Nous allons commencer la septième séance du Comité permanent de la défense nationale. Selon l'ordre du jour,
[Traduction]
conformément au paragraphe 108(2) du Règlement et à la motion adoptée le 23 février 2009, nous entamons notre séance d'information au sujet des effets que les changements climatiques ont eus sur le mandat du ministère de la Défense nationale dans l'Arctique canadien.
[Français]
Voici nos témoins aujourd'hui: du ministère de la Défense nationale, M. Gardam, directeur général, Plans de l'état-major interarmées stratégique, et M. Hébert, directeur, Élaboration de la politique de défense; sous-ministre adjoint, Politiques.
Messieurs, vous avez la parole.
:
Je vous remercie beaucoup, monsieur le président, de nous avoir invités à partager nos points de vue et nos connaissances sur l'Arctique canadien.
Je m'appelle Philippe Hébert, je suis directeur de l'Élaboration des politiques. À ce titre, je suis responsable de tout ce qui touche à la politique de défense par rapport à l'Arctique canadien. Ma direction fait la liaison avec Affaires étrangères et Commerce international Canada, de même qu'avec Affaires indiennes et du Nord Canada en ce qui à touche à la stratégie du Nord canadien. J'ai donc j'ai beaucoup d'interaction sur le plan politique avec des collègues d'autres ministères. Je suis très heureux d'avoir l'occasion de m'entretenir avec vous de ces sujets.
Mon allocution sera brève et portera sur le contexte de sécurité dans l'Arctique canadien, sur le rôle et le mandat des Forces canadiennes ainsi que sur certaines autres initiatives relatives au Nord canadien qui sont présentement en cours au sein des Forces canadiennes. Le commodore Gardam vous parlera ensuite de nos ressources militaires actuelles dans l'Arctique et des opérations des Forces canadiennes dans le Nord.
Il est très opportun que le comité se penche sur ces questions en ce moment. Comme vous le savez sans doute, le ministère de la Défense nationale et les Forces canadiennes portent de plus en plus d'attention à l'Arctique. C'est une région qui représente 40 p. 100 du territoire canadien, avec environ 100 000 habitants, mais qui connaît actuellement d'importants changements, en particulier des changements climatiques. La fonte de la couche de glace rend possible un accroissement de la navigation, du tourisme, de la prospection des ressources. En outre, de nouvelles voies de navigation dans tout l'Arctique sont actuellement à l'étude.
[Traduction]
Du point de vue de la Défense, il n'y a plus de menace militaire conventionnelle dans le Nord, comme ce fut le cas pendant la guerre froide, mais de toute évidence, les défis en matière de souveraineté et de sécurité pourraient devenir plus importants au fur et à mesure que les changements climatiques permettent une augmentation des activités partout dans le Nord. Bien que l'activité croissante dans le Nord pourrait déboucher sur d'importants avantages économiques pour le Canada, son accessibilité croissante pourrait également engendrer une activité illégale accrue, notamment le crime organisé et l'immigration illégale.
De plus, des navires de conception inadéquate pourraient nuire au fragile environnement. Il y a eu une hausse importante du nombre de vols commerciaux au-dessus du Nord canadien, ce qui augmente le risque d'une catastrophe aérienne importante dans la région.
Enfin, au fur et à mesure que l'activité économique et la navigation augmentent dans le Nord, on pourrait faire appel plus souvent aux Forces canadiennes pour qu'elles appuient les opérations terrestres et maritimes de recherche et sauvetage.
[Français]
Le gouvernement du Canada réagit aux changements qui ont cours dans le Nord canadien en élaborant une stratégie intégrée pour le Nord, qui a été annoncée dans le discours du Trône de 2007. Cette stratégie est basée sur quatre piliers: le premier concerne le respect de la souveraineté canadienne dans le Nord; il y aussi la promotion du développement social et économique, l'amélioration et la délégation de la gouvernance et la protection de l'environnement.
Au ministère de la Défense nationale, nous contribuons surtout à la Stratégie pour le Nord canadien en satisfaisant aux attentes définies par la stratégie de défense « Le Canada d'abord ». Notre stratégie de défense précise que les Forces canadiennes joueront un rôle de plus en plus important dans l'Arctique canadien au cours des prochaines années.
Plus particulièrement, les Forces canadiennes contribueront à l'amélioration de la sécurité et au respect de la souveraineté du Canada dans le Nord canadien, grâce à nos opérations de surveillance et de contrôle ainsi qu'à une présence un peu plus visible dans la région. Les Forces canadiennes doivent aussi être en mesure d'intervenir en cas d'urgence, en collaboration avec d'autres ministères fédéraux. Nous nous entraînons donc dans l'éventualité de tels cas.
[Traduction]
Cependant, il convient de noter que les autres ministères et organismes fédéraux sont responsables de la plupart des questions de sécurité dans le Nord. Malgré cela, ils font souvent appel aux capacités des Forces canadiennes pour les aider à remplir leurs mandats. Essentiellement, nous avons donc un rôle de soutien très important à jouer dans la région.
Je tiens à souligner que le rôle et le mandat des Forces canadiennes dans l'Arctique ne changeront pas à cause des effets des changements climatiques. En fait, à cause des changements climatiques, nous devrons être prêts à faire davantage ce que nous faisions déjà et à améliorer nos capacités d'oeuvrer dans le Nord canadien. À cette fin, nous mettons en oeuvre de nombreuses initiatives qui appuieront ces activités. Vous en connaissez probablement certaines: l'acquisition de navires de patrouille extracôtiers de l'Arctique; la construction d'une installation d'amarrage en eau profonde et de ravitaillement à Nanisivik, à l'entrée est du passage du Nord-Ouest; l'expansion et la modernisation des Rangers canadiens; la mise en place du Centre de formation des Forces canadiennes dans l'Arctique à Resolute Bay; la formation d'une Compagnie de réservistes de l'Arctique à Yellowknife; la formation de Groupes-compagnies en alerte pour l'Arctique dans chacun des secteurs des Forces terrestres du Sud du Canada.
Les Forces canadiennes disposent également d'un certain nombre d'outils dans le Nord et mènent des missions de souveraineté dans le cadre du Commandement Canada. Mon collègue le commodore Gardam va vous entretenir de ces questions.
Merci.
:
Bonjour à tous. Je suis ravi d'être ici.
Tout d'abord, pour vous mettre en contexte, je travaille au sein de l'État-major interarmées stratégique. Je relève directement du chef d'état-major de la Défense. Je suis donc responsable des questions touchant l'Arctique et l'Afghanistan, ainsi que de nombreux autres dossiers.
En ce qui concerne l'Arctique, je vous parlerai des rôles et des missions des Forces canadiennes dans cette région. Plutôt que de prendre 30 minutes pour vous énumérer ce que nous y faisons, je n'en prendrai que cinq afin que nous disposions d'une plus longue période de questions.
Sans plus tarder, j'entre dans le vif du sujet. Comme mon collègue l'a déjà signalé, la défense conventionnelle constitue l'un de nos principaux rôles dans la défense de l'Arctique. Actuellement, aucune menace conventionnelle ne pèse sur cette région.
Lorsqu'on parle de l'Arctique, il y a quelques aspects qu'il est essentiel de saisir. Premièrement, par-delà les changements climatiques et l'évolution des choses dans cette région, il y a des prémisses indiscutables. L'environnement y est austère. Dans notre terminologie, il s'agit d'un théâtre des opérations que nous devons appuyer, c'est-à-dire qu'il n'y existe aucune infrastructure véritable permettant de soutenir facilement des opérations d'envergure. Nous disposons donc, à différents endroits, de bases d'opérations pour nous aider dans cette tâche.
Il fait extrêmement froid la moitié de l'année. Il fait sombre également. Il y a bien sûr de la glace. Il est vrai que les glaces diminuent au fil des ans. Si vous voulez aborder cette question, nous pourrons le faire un peu plus tard pour voir l'impact de ce phénomène sur le passage du Nord-Ouest, entre autres.
La recherche et le sauvetage constituent l'un des rôles clés que nous jouons dans le Nord. De plus, nous serions les premiers à intervenir s'il s'y produisait une catastrophe aérienne importante. Comme mon collègue l'a signalé, l'appui accordé aux autres ministères constitue 90 p. 100 de nos responsabilités dans l'Arctique. Il est très important de bien le comprendre. Nous appuyons de nombreux ministères parce que l'environnement dans lequel ils travaillent est austère, qu'ils ont besoin de notre aide et que nous disposons souvent de moyens qu'ils n'ont pas pour s'adapter à cet environnement.
Sur le plan des ressources, nous avons la Force opérationnelle interarmées (Nord) à Yellowknife, à l'extrémité ouest, ainsi que deux postes de commandement; nous avons les Rangers canadiens, dont on a déjà parlé, et le 440e Escadron de transport qui comprend des Twin Otter pour appuyer les opérations; nous avons quatre emplacements avancés d'opérations, qui disposent de pistes pour appuyer les opérations aériennes; sur l'île d'Ellesmere, il y a également la SFC Alert, la station des Forces canadiennes la plus au nord.
Sur le plan de l'infrastructure, si vous allez de l'ouest vers l'est dans l'Arctique, nous avons la Force opérationnelle interarmées à Yellowknife, puis les emplacements avancés d'opérations à Inuvik, Yellowknife, Rankin Inlet et Iqaluit.
En ce qui concerne les opérations, les Forces canadiennes exécutent trois opérations importantes par année. L'une se déroule en mars et en avril à Nunalivut, à l'entrée ouest, sous l'égide de la Force opérationnelle interarmées (Nord), dont les représentants, si j'ai bien compris, comparaîtront devant le comité. L'opération met à contribution le 440e Escadron et les Rangers. Les capacités exceptionnelles dont ils disposent permettent aux Rangers d'appuyer la FOIN dans le cadre de cette opération visant à affirmer notre souveraineté et notre présence. En 2008, l'opération Nunalivut s'est déroulée de mars à la mi-avril. Environ 100 militaires y ont participé. Trois patrouilles comprenant des Rangers canadiens et des scientifiques ont effectué, dans le nord-ouest de l'île d'Ellesmere, une mission sur les modifications du climat de l'Arctique dans le cadre de l'Année polaire internationale.
Nous menons également l'opération Nunakput dans le centre de l'Arctique. Se déroulant l'été de concert avec la Garde côtière canadienne et la GRC, cette opération intégrée de la FOIN consiste en des exercices portant sur la souveraineté et l'interopérabilité. Il est essentiel que le système de commandement et de contrôle des Forces canadiennes puisse travailler de concert avec les autres ministères canadiens afin de pouvoir intervenir en cas d'urgence.
Il y a également l'opération Nanook, qui se tient sur la côte est de l'île de Baffin et la région du détroit d'Hudson. L'an dernier, l'opération s'est déroulée du 9 au 16 août, l'objectif étant d'améliorer les relations entre les différents ministères, dans le cadre d'exercices menés conjointement en matière d'intervention en cas de catastrophe et d'aide humanitaire.
Ce sont là les principales activités des Forces canadiennes dans le Nord.
Je vous remercie de votre attention.
:
Merci, monsieur le président.
Merci également à vous, messieurs les témoins, d'être parmi nous aujourd'hui.
Mes questions s'adresseront surtout à mon collègue du Yukon. Je voudrais surtout en savoir plus sur la collaboration avec les autres agences et ministères. Quelles sont les modalités de cette collaboration? Pouvez-vous nous donner des précisions? J'ai posé cette question au sous-ministre de l'Environnement à une séance d'un autre comité.
Je voudrais savoir les modalités précises de cette collaboration et qui, au bout du compte, est responsable sur le plan de l'exécution. Selon les Nations Unies, de toutes les demandes d'aide présentées en 2007, une seule n'était pas liée aux changements climatiques. Je voudrais donc savoir quels sont les préparatifs à cet égard.
Je céderai par la suite la parole à M. Bagnell.
:
Je vais répondre à cette question.
Sur la question de l'échange de renseignements, le tout dépend de ce que vous entendez par là. Le Groupe de travail interministériel sur la sécurité dans l'Arctique constitue le principal organe d'échange de renseignements, notamment sur les pratiques exemplaires. Par l'intermédiaire de la Force opérationnelle interarmées (Nord), les Forces canadiennes président ce groupe de travail avec Sécurité publique Canada. Nous y explorons les pratiques exemplaires et la façon de travailler dans le Nord.
Dans le Nord, il y a une lacune importante qu'on ne retrouve pas au sud du 66e parallèle: le manque d'infrastructure. La collaboration est essentielle au déroulement des opérations dans un tel environnement. C'est le Groupe de travail interministériel sur la sécurité dans l'Arctique qui coordonne l'échange de renseignements opérationnels à cet égard.
En ce qui concerne l'aspect tactique, l'échange se fait lors des exercices, qui sont conçus de façon à ce que les différents ministères et organismes, qu'il s'agisse de la Garde côtière, de la GRC, du MDN ou du ministère des Pêches, comprennent leurs rôles respectifs. C'est très important. Il s'agit de comprendre le mandat de chacun pour que nous puissions déterminer la meilleure façon d'appuyer ces ministères et organismes. C'est ainsi que nous échangeons les renseignements.
Je dirais qu'au cours des deux ou trois dernières années certainement, toute cette collaboration entre Sécurité publique Canada et la Force opérationnelle interarmées (Nord) a permis d'améliorer l'échange de renseignements au Groupe de travail interministériel sur la sécurité dans l'Arctique.
Ma question s'adresse à l'un ou l'autre d'entre vous.
J'apprécie beaucoup les militaires. Je m'efforce d'en apprendre davantage sur le Nord, sans trop de succès.
Un document ou des recommandations ont-ils été présentés au Cabinet du premier ministre et au gouvernement sur les problèmes que causera le réchauffement climatique? Je ne parle pas des répercussions sur le Nord, mais bien de la crise internationale qu'engendrerait le réchauffement climatique sur le plan de la sécurité. Le ministère de la Défense nationale a-t-il rédigé un tel document? A-t-il donné des renseignements ou formulé des propositions au gouvernement à ce chapitre, de concert avec le ministère des Affaires étrangères?
:
Merci, monsieur le président.
Je remercie nos invités de leur présentation.
Il y a beaucoup de façons d'exercer sa souveraineté sur un territoire. Les Russes ont employé une façon un peu bizarre, en laissant tomber un drapeau russe au fond de l'Arctique dans une capsule de titane. Je ne suis pas sûr que ce soit là la façon d'assurer que ce territoire est le leur.
Monsieur Hébert, cette question s'adresserait peut-être davantage à vous: quelle est la stratégie du Canada quant à sa volonté de revendiquer sa pleine souveraineté? Par exemple, ce qu'on lit sur le prolongement du plateau continental, est-ce ainsi que le Canada veut démontrer que le Nord lui appartient? Par exemple, entreprend-on des expéditions scientifiques pour justifier le prolongement du plateau continental?
Il me semble qu'on aura de ce côté un solide argument. Cela soulève aussi tout l'aspect de la cartographie des fonds marins. Le ministère de la Défense nationale participe-t-il à cela? Y a-t-il des expéditions scientifiques pour cartographier les fonds marins? Est-ce cela, la stratégie? Il y a d'autres stratégies. Il ne s'agit pas seulement de laisser tomber un drapeau au fond de l'océan; il y a aussi des patrouilles militaires maritimes. Personnellement, j'ai toujours pensé qu'on ne pourrait pas gagner sur le plan militaire contre l'armée américaine, la marine américaine ou la marine russe. Il me semble qu'on a besoin d'arguments scientifiques et logiques.
Pourriez-vous nous expliquer: le prolongement du plateau continental ainsi que la cartographie des fonds marins font-ils partie de la stratégie pour revendiquer la pleine souveraineté du Canada dans l'Arctique, au moment où l'on se parle?
:
Merci beaucoup, monsieur Bachand.
Beaucoup des points que vous avez soulevés concernent vraiment les représentants du ministère des Affaires étrangères. En effet, c'est vraiment eux qui ont la responsabilité de répondre à ces questions portant sur le droit international.
Néanmoins, en règle générale, c'est sûr et certain que la stratégie du Canada est de continuer à oeuvrer au sein de la Convention des Nations Unies sur le droit de la mer, et que la cartographie des fonds marins et le plateau continental font aussi partie de la stratégie visant à délimiter exactement notre territoire. Beaucoup d'efforts sont faits à ce niveau.
Les Forces canadiennes prêtent main-forte à Environnement Canada, et ainsi de suite. Elles participent à un certain nombre d'opérations scientifiques, que ce soit en fournissant des avions, et ainsi de suite. On a déjà apporté notre soutien à ces missions, et c'est vraiment très important.
Il n'est pas fait souvent mention, dans les médias, de possibles conflits dans le Nord ou de quoi que ce soit d'autre. Personne aux ministères de la Défense nationale et des Affaires étrangères n'entrevoit une guerre, ou quoi que ce soit, avec les Russes ou les Américains.
En effet, il faut se rappeler que la souveraineté du Canada en ce qui concerne nos îles et nos terres arctiques n'est pas contestée, mis à part la petite île Hans. Avec le Danemark, on a certaines disputes concernant des frontières maritimes, mais elles sont bien gérées sur le plan diplomatique. Il y a vraiment un robuste cadre juridique international, en ce qui concerne l'Arctique, qui est basé sur la Convention des Nations Unis sur le droit de la mer.
Grâce à ces instruments, on peut gérer toutes les relations internationales qui concernent le Nord. Ce n'est certainement pas une question de défense conventionnelle; c'est vraiment davantage une question de diplomatie.
:
Merci, monsieur le président.
Merci de votre présence aujourd'hui. Comme mon collègue l'a dit, nous venons d'entreprendre l'étude de cette question qui, je pense, nous tient tous à coeur. Nous sommes donc ravis de vous entendre aujourd'hui.
Nous sommes tous conscients et inquiets de la fragilité de l'écosystème dans l'Arctique. L'un des plus graves problèmes auquel sont confrontés mes amis du Nord, c'est la fonte des routes de glace, ce qui complique le transport des marchandises. Ces amis m'ont fait part également d'autres préoccupations liées à la faune — les ours polaires notamment qui sont affectés par les changements climatiques dans l'Arctique. Cette fonte des routes de glace nuit-elle à vos activités dans cette région?
Je veux également aborder la question de la surveillance que vous venez d'évoquer. Je pense que tous s'inquiètent de ce qui adviendra au fur et à mesure de la fonte de la calotte glaciaire. J'ai également mes préoccupations. Je viens de Vancouver où fait rage actuellement une effroyable guerre des gangs. Plusieurs personnes ont été tuées, la plupart à cause du trafic de la drogue. Je m'interroge donc sur l'accroissement des voies navigables, qui permettra aux trafiquants d'importer plus facilement drogue et armes à feu.
Je suis également préoccupé par les répercussions sur le trafic de personnes, une activité importante à laquelle s'adonnent les criminels organisés et qui nous concerne tous.
Pourriez-vous nous donner quelques précisions à cet égard? J'aurai quelques autres questions à poser par la suite.
:
Je répondrai en premier.
En ce qui concerne les routes de glace et l'infrastructure, la plupart des endroits où nous nous trouvons sont dans un environnement si austère — par exemple, Alert — que les marchandises y sont transportées par air. Là où nous disposons d'installations portuaires de logistique, le transport se fait souvent également par air.
Ce qui manque dans le Nord, c'est l'infrastructure pour le transport des marchandises — chemins de fer, etc. À votre question sur le trafic de drogue et de personnes, je répondrai que l'accès est indubitablement plus facile. Il s'agit d'un vaste territoire. Le problème, c'est que, lorsqu'on y arrive, on se demande où aller. C'est le véritable problème. L'environnement y est si austère... Je voudrais savoir combien d'entre vous sont-ils déjà allés dans le Nord. Vous savez donc ce dont je parle lorsque je dis que c'est un environnement austère. Pendant la majeure partie de l'année, les seules couleurs qu'on voit sont le gris et le blanc.
Y acheminer les marchandises et les transporter d'un point à l'autre relèvent de l'exploit d'une logistique. Il faut les y acheminer par air, entre autres. Comment s'y prend-on alors pour surveiller et contrôler la circulation aérienne? Nous le faisons par le NORAD, qui nous indique les appareils dans notre espace aérien grâce à notre réseau de détection lointaine. Nous pouvons donc détecter les appareils.
Quelqu'un pourrait-il donc passer par le Nord? Oui, mais ce serait très difficile. Il existe donc des solutions plus faciles.
:
Je reviens à ce que j'ai dit à propos de nos principales missions.
J'ai parlé de « défense conventionnelle » en précisant qu'il n'y aurait pas de modifications à long terme à ce chapitre.
Les activités de recherche et de sauvetage augmentent dans le Nord sans que ne change la nature de notre rôle, mais nos opérations s'accroîtront parce qu'il y aura plus de risques en raison de la facilité de l'accès à la région. Ces risques seront toujours présents. Je dirais donc qu'il y aura peut-être davantage d'activités de recherche et de sauvetage à cause des risques accrus, et qu'il est susceptible d'y avoir davantage de catastrophes aériennes importantes, étant donné qu'il y aura de plus en plus de vols au-dessus du pôle Nord.
En ce qui concerne l'aide que nous apportons dans la lutte contre les infractions, notre rôle ne changera pas, mais l'ampleur du soutien que nous apportons pourrait augmenter.
En matière d'aide humanitaire et d'assistance aux autres ministères, nos rôles sont fondamentaux. Je ne crois pas qu'ils changeront .
:
J'ai en fait des statistiques sur les dernières années. Elles montrent une lente augmentation de la circulation dans le Nord. Presque toute la circulation, mon collègue a-t-il souligné, est imputable au tourisme. Le Nord est une destination touristique. Selon nous, la circulation continuera de croître parallèlement à la fonte de la glace, mais pas nécessairement dans le passage du Nord-Ouest.
J'aimerais préciser certains points sur le passage du Nord-Ouest, sur ses mythes et ses réalités. Pour le marin, y naviguer, c'est comme rouler sur une route de campagne pleine de nids de poule. Il n'y a pas de meilleure façon de le dire. La route maritime du Nord est semblable à une grande autoroute.
Si vous n'êtes pas marin, vous ne regardez que l'horizon, sans vous arrêter à ce qu'il y a sous l'eau. Les marins regardent ce qu'il y a sous l'eau, où se trouvent les obstacles qui les arrêtent. Et il y a un couvert de glace soudée à l'entrée ouest du passage du Nord-Ouest; des icebergs de la taille d'une maison y flottent.
Dans le Nord, le problème, ce sont les conditions climatiques. Les vents violents et la visibilité réduite nous empêchent alors de voir les icebergs qu'on détecte normalement par mer calme. Ces icebergs sont très durs et peuvent faire sombrer un navire. C'est la réalité dans le passage du Nord-Ouest, et la situation ne changera pas d'ici au moins 20 à 30 ans.
Il faut adopter une stratégie pragmatique et graduelle pour s'attaquer au problème. Le navire de patrouille extracôtier de l’Arctique, le NPEA, et le perfectionnement de la connaissance du domaine maritime constituent un élément essentiel de cette stratégie. Il faut savoir qui se trouve sur notre territoire et pourquoi il s'y trouve. Il y a un autre aspect très intéressant: dans le Nord du Canada, il y a une exigence réglementaire selon laquelle tout navire qui veut pénétrer dans nos eaux territoriales doit donner un préavis de 96 heures. C'est obligatoire.
Il y a également des lois et des conventions très efficaces, notamment la Loi sur la prévention de la pollution des eaux arctiques et la Convention des Nations Unies sur le droit de la mer. Tous les pays y ont adhéré.
Nous disposons donc de moyens très utiles à ce chapitre. Il reste maintenant à déterminer les mesures que nous prendrons pour nous préparer à l'accroissement graduelle de la navigation dans le Nord et à la mer libre d'ici 40 ou 50 ans. C'est ce qui va se produire; il faut simplement nous y préparer.
Il faudra des investissements supplémentaires. Le NPEA constitue un très bon point de départ. Le navire aura une durée de vie de 30 ans. Passé ce délai, il devra être remplacé en fonction des besoins à combler.
:
Merci, monsieur le président.
Les Britanniques, les Américains et les Danois se sont beaucoup attaqués aux changements climatiques et aux problèmes stratégiques dans le Nord. Par votre intermédiaire, monsieur le président, j'aimerais demander aux témoins des précisions sur les relations qu'ils ont entretenues jusqu'à présent avec nos partenaires de l'OTAN au sujet du Nord, plus particulièrement au sujet des conséquences des glaces flottantes et des banquises qui se détachent.
Je passe ensuite à la question du tourisme. De nombreux navires d'excursion se rendent dans le Nord. Beaucoup de touristes ne savent pas comment s'y comporter nous ne sommes pas en Méditerranée. Quel est l'effet de ce phénomène sur nos activités de recherche et sauvetage?
:
Merci, monsieur le président.
J'en profite pour vous souhaiter la bienvenue, car je n'ai pas siégé à la première réunion. Je voudrais dire que lorsque mon collègue du Bloc québécois a parlé de souveraineté canadienne, c'était de la musique à mes oreilles. Je tiens à le rassurer: je n'ai pas l'intention d'en parler à la période de questions.
Je voudrais souhaiter la bienvenue à nos collègues qui commencent notre étude sur l'Arctique canadien. Il est vrai que cette région représente 40 p. 100 du territoire canadien et compte 100 000 habitants, ce qui n'est pas énorme. Je vous remercie pour les diapositives et les notes explicatives que vous nous avez remises.
Monsieur Gardam, on parle de 90 personnes au quartier général situé à Yellowknife et d'un escadron de 45 personnes, puis de 75 personnes à Alert. Il y a donc de 200 à 300 militaires en permanence dans le Grand Nord. Est-ce exact?
:
La Loi sur la prévention de la pollution des eaux arctiques interdit le déversement d'eaux noires, c'est-à-dire des eaux usées, et du pétrole, qui est évidemment un polluant. Il restreint aussi le déversement de stocks alimentaires ou de déchets dans l'eau. Par déchets, on entend normalement des sacs à ordures, etc.
Il y a de nombreuses années, quand nous mettions au point de nouvelles frégates de patrouille canadiennes, nous les avons conçues pour qu'elles soient écologiques. Nous ne déversons aucun déchet qui n'est pas biodégradable selon les normes canadiennes. Cela comprend ce que l'on jette dans l'évier à la maison. Mais il s'agit d'une substance interdite dans l'Arctique.
Nos navires ne peuvent pas entreposer notamment des restants de pommes de terre broyées pour une longue période. Si vous êtes dans l'Arctique pour deux, trois ou quatre semaines, vous devez demander la permission de le faire. Nous avons demandé l'autorisation de déverser ce que nous appelons des eaux grises dans l'Arctique, ce qu'on jette dans l'évier. Mais rien n'était toxique. C'était l'essentiel. Ce n'était pas une substance toxique. Il s'agissait de déchets normaux provenant de la cuisine, de stocks alimentaires.
:
Oui, nous apprenons qu'il est très difficile de travailler dans l'Arctique. L'avitaillement en carburant est un exemple. Pour avitailler une frégate dans le Nord, comme il n'y a pas de réserve de carburant, on doit accoster un navire de la Garde côtière. Il faut ensuite entourer le navire ancré d'un barrage flottant pour contenir les hydrocarbures. On doit s'assurer de prendre ces mesures pour pouvoir transférer le carburant.
Une des leçons tirées, c'est que l'environnement est extrêmement fragile. Nous avons de très bonnes pratiques pour ce qui est d'assurer une diligence raisonnable environnementale, mais nous devons tout vérifier deux ou trois fois pour être sûrs de ne pas nuire à l'environnement.
Voilà les principales leçons que nous avons tirées. Par ailleurs, nous avons appris qu'il est tout simplement difficile d'assurer un soutien. Les distances sont tellement grandes. Si quelque chose se brise, il faut soit le réparer, soit le laisser tel quel. Il n'y a pas de station-service.
Les employés de la Garde côtière canadienne sont des spécialistes dans le domaine de l'Arctique parce qu'ils ont tant d'années d'expérience. Quand ils naviguent dans les eaux de l'Arctique, ils ont à bord des matelots qui ont une expérience de 20 ans et qui peuvent remettre à neuf des moteurs. Cela convient très bien quand on travaille avec du diesel agricole. S'il s'agit d'un moteur à réaction à la fine pointe de la technologie, comme dans le cas des frégates de patrouille canadiennes...
Nous apprenons beaucoup de choses.
Pour donner suite à la question de M. Hawn, vous allez nous dire plus tard si l'autorisation relative aux eaux grises s'applique toujours — c'est-à-dire, si elle est en vigueur.
Je tiens à signaler que l'électeur qui a soulevé la question de la sécurité mondiale s'appelle Ken Madsen.
Je veux un éclaircissement sur le centre de formation. Ce n'est pas la question que j'avais l'intention de poser, mais vous avez dit que le centre de formation aura quelques employés pendant quelques mois de l'année, n'est-ce pas?
Les sous-marins semblent très populaires cet après-midi. À un certain moment, on songeait à équiper les sous-marins canadiens du air-independent propulsion system, ou système de propulsion anaérobie, qui leur permettrait d'aller sous la calotte polaire. Vu qu'on fait partie de la confrérie sous-marine, les Américains se font un devoir de nous dire qu'ils sont sur place parce qu'ils veulent éviter des risques de collision, comme cela s'est produit entre les sous-marins de la France et de la Grande-Bretagne. Si un sous-marin voulait se sauver sous la calotte polaire alors qu'il est détecté, aucun sous-marin canadien ne pourrait le poursuivre sous la calotte polaire justement parce qu'il n'est pas doté du air-independent propulsion system.
Le ministère prévoit-il équiper un ou deux sous-marins de ce système?
:
NORAD a un nouveau mandat, soit les alertes maritimes, sujet dont il a été question dans le dernier cycle des négociations. Et je crois que le commandement binational canado-américain continuera de travailler à la surveillance du secteur maritime dans le Nord. C'est une piste que nous pouvons peut-être explorer.
Pour ce qui est des radars et de la transmission des renseignements et des sources d'information, les renseignements sont transmis par le système d'alerte rapide de NORAD. Ils sont transmis à Colorado Springs, et ils sont également mis à notre disposition au Canada. Ils traversent en continu le Canada et les États-Unis. Comme il s'agit d'un commandement binational, c'est ni canadien ni américain; c'est les deux. Le commandant adjoint de NORAD est un Canadien.
De toute évidence, la façon dont nous transmettons et échangeons l'information ne sera pas modifiée à mesure que NORAD prendra le relais pour ce qui est de la surveillance du domaine maritime. En fait, on pourrait voir une croissance.
:
Merci, monsieur le président.
En ce qui concerne la dernière question, l'information est disponible à Winnipeg et à Colorado Springs, et elle est mise à la disposition de tout le monde dans le système NORAD. On peut capter l'information qu'on veut. On n'a pas besoin de passer par des filtres. L'information est mise à la disposition de toutes ces organisations.
Pour clarifier un point que j'ai peut-être mal compris, relativement à l'argument de M. Bagnell, ai-je raison de dire qu'il n'y a aucune politique qui accorde une autorisation générale à la marine pour déverser le genre de substances dont il est question?
:
J'ai cette information quelque part ici. Juste un instant. Désolé si je dois consulter mes notes.
Durant la guerre froide, l'Amérique du Nord avait recours à des chaînes de radar pour assurer des alertes avancées. Au début des années 1960, une vingtaine de ces stations ont été mises hors service et placées sous la responsabilité du ministère des Affaires indiennes et du Nord canadien. Le MDN a continué à utiliser 21 stations jusqu'en 1993. Le système d'alerte du Nord a, par la suite, été remplacé.
Le projet d'assainissement du réseau DEW a été lancé en 1990 dans le but d'assainir les sols contaminés de 21 stations du réseau DEW. On estime que le projet coûtera 500 millions de dollars pendant toute sa durée. Entre 1996 et 2007, on a nettoyé 14 stations. L'assainissement du reste des stations devrait être terminé en 2012, mais nous continuerons de surveiller le site d'enfouissement jusqu'en 2037.
[Traduction]
Je tiens à remercier les témoins. Je pense que vos déclarations se sont avérées fort utiles pour les députés.
[Français]
Il en est de même pour les réponses aux questions qui vous ont été posées par les membres. Merci beaucoup de nous avoir informés cet après-midi.
Vous pouvez disposer. Merci.
[Traduction]
Nous avons reçu une motion de M. Wilfert, mais je ne peux pas en discuter pour l'instant. J'ai besoin d'un consentement unanime. Êtes-vous tous d'accord pour discuter de cette motion?
[Français]
Je comprends que nous avons le consentement unanime des membres. Je vais donc demander à M. Wilfert de proposer sa motion.
:
Merci, monsieur le président. Merci, chers collègues.
Je propose que, compte tenu des récentes déclarations du lieutenant-général Andrew Leslie, chef d'état-major de l'Armée de terre, selon lesquelles l'armée canadienne était « en crise » en raison des difficultés de la mission en Afghanistan, le Comité permanent de la défense nationale entreprenne une étude au sujet de la stratégie de recrutement actuelle et future du ministère de la Défense nationale visant à attirer le personnel et à obtenir les ressources nécessaires pour répondre aux besoins à court et à long terme des Forces canadiennes.
Après avoir consulté mon collègue M. Hawn, j'appuie son amendement, si vous voulez le proposer.