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ACVA Réunion de comité

Les Avis de convocation contiennent des renseignements sur le sujet, la date, l’heure et l’endroit de la réunion, ainsi qu’une liste des témoins qui doivent comparaître devant le comité. Les Témoignages sont le compte rendu transcrit, révisé et corrigé de tout ce qui a été dit pendant la séance. Les Procès-verbaux sont le compte rendu officiel des séances.

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CANADA

Comité permanent des anciens combattants


NUMÉRO 038 
l
3e SESSION 
l
40e LÉGISLATURE 

TÉMOIGNAGES

Le mercredi 9 février 2011

[Enregistrement électronique]

(1530)

[Traduction]

    Maintenant que Peter est arrivé, nous pouvons commencer.
    Bienvenue à tous à la 38e séance du Comité permanent des anciens combattants.
    Conformément au paragraphe 108(2) du Règlement, nous étudions le stress lié au combat et ses conséquences sur la santé mentale des anciens combattants et de leurs familles. Le témoin que nous entendrons cet après-midi est Tim Wall, directeur exécutif de l'Association canadienne pour la prévention du suicide.
    Soyez le bienvenu parmi nous, monsieur Wall. Je crois que vous avez un exposé. Pouvez-vous nous le livrer?
    J'ai déjà réclamé l'indulgence du président du comité, parce que mon exposé pourrait prendre 13 ou 14 minutes.
    Au nom de l'Association canadienne pour la prévention du suicide, ou ACPS, je remercie le comité de m'avoir invité et de me donner l'occasion de m'adresser à vous. J'ai déjà pu le faire, avec ceux d'entre vous qui font partie d'autres comités permanents. Dans ce cas, mes propos d'aujourd'hui ne vous sembleront pas complètement inconnus.
    Contrairement au gouvernement du Canada, les Forces canadiennes ont publiquement reconnu que le suicide était un problème de santé publique. Elles ont consacré beaucoup d'efforts et d'argent à sa prévention et elles élaborent une stratégie pour le combattre dans les forces armées.
    L'ACPS, notre conseil d'administration et nos membres de partout au Canada louangent les Forces canadiennes pour son esprit d'initiative et sa détermination à prévenir le suicide et ils sont fiers d'elles. Nous espérons qu'un jour, bientôt, le gouvernement du Canada s'engagera dans la même direction, qu'il reconnaîtra le suicide comme une priorité de la santé publique et qu'il fera preuve de la même stature.
    Au cours des deux dernières décennies, près de 100 000 Canadiens se sont suicidés. L'année dernière, le bilan a été de près de 4 000, soit plus que celui, combiné, de toutes les morts causées par blessure et homicide au Canada.
    Le taux de suicide au Canada place notre pays dans le tiers supérieur des pays aux taux de suicide les plus élevés. Combien de vétérans font partie de ces morts? Lors d'une conférence qui a eu lieu récemment aux États-Unis, sur la prévention du suicide, le secrétaire aux Anciens combattants Eric Shinseki a déclaré que 20 p. 100 des 30 000 suicides déplorés chaque année dans ce pays étaient le fait d'anciens combattants.
    Plus de 3 millions de Canadiens — parmi lesquels, sans doute, certains d'entre nous, dans cette salle — ont connu les affres de la douleur que provoque le suicide d'un être cher. Malheureusement, le suicide ne met fin à aucune douleur. En effet, elle se répercute dans la famille, sur les amis, dans la collectivité, qui souffrent alors d'une blessure en grande partie invisible et, la plupart du temps, silencieuse.
    Le suicide n'est pas la conséquence d'une cause unique. C'est un phénomène complexe, et sa prévention exige une démarche plurielle. Il résulte de l'interaction de facteurs bio-psycho-sociaux et spirituels complexes qui peuvent englober l'isolement social, le traumatisme, le stress, la violence familiale, la toxicomanie, la pauvreté, une mauvaise santé mentale, des maladies physiques et mentales, pour ne nommer que ceux-là. La prévention fait donc appel au concours coordonné de spécialistes de divers secteurs et domaines. Malheureusement, au Canada, elle est morcelée et elle souffre d'une absence de vision nationale. Actuellement, elle ne procède pas d'une action unifiée.
    En 2010, les Forces canadiennes ont publié un rapport détaillé sur la prévention du suicide dans l'armée, dont la contribution sera sûrement importante dans ce milieu. Dans sa conclusion, on pouvait lire que beaucoup de programmes de prévention s'adressent principalement à la masse. Le comité d'experts propose plutôt que le programme des Forces canadiennes soit principalement axé sur la prestation de soins efficaces de santé mentale à ceux qui en ont besoin. En effet, des soins efficaces de santé mentale sont le remède au comportement suicidaire.
    Autant nous devons souligner l'influence notable des atteintes à la santé mentale telles que la dépression et le syndrome de stress post-traumatique, puis les traiter en conséquence, autant il importe de reconnaître que le traitement de la suicidalité n'est pas nécessairement synonyme de traitement de ses manifestations ni qu'il suffit, à lui seul, à diminuer le risque de suicide. D'après nous, la prévention du suicide ne peut pas s'appuyer uniquement sur une seule base. Elle devrait plutôt reposer sur de nombreuses bases et être modulée d'après une stratégie nationale globale.
    À l'effort des Forces canadienne on devrait ajouter une stratégie nationale qui ne viserait pas seulement les autres groupes qui relèvent des autorités fédérales, tels que les anciens combattants et la population des prisons fédérales, mais qui, aussi, chercherait à réduire le risque de suicide dans la population en général.
    Le rapport des Forces canadiennes est un document important, qui marque un progrès dans l'étude de la question, mais il a été préparé dans l'isolement et il ne tient pas compte des acquis d'autres milieux, régions, secteurs et pays.
(1535)
    Les excellents efforts des Forces canadiennes ne sont que l'un des nombreux exemples du morcellement de la prévention du suicide au Canada. Ils n'obéissent pas à une vision nationale élargie, qui s'inspire des actions comparables appliquées ailleurs au Canada et dans le monde en matière de prévention du suicide, d'intervention et de postvention. En général, d'après la recherche effectuée au Canada, les taux de suicide sont légèrement plus faibles chez le personnel militaire en service actif. Elle a émis des hypothèses qui expliquent bien le phénomène. L'un des facteurs de protection les plus efficaces est probablement les rapports plus nombreux dans le groupe et la constitution d'un réseau social plus solide que dans la population en général.
    Selon toute probabilité, ce facteur de protection perd en efficacité après le départ du service actif. Jusqu'à maintenant, cependant, la recherche canadienne ne s'est pas occupée des populations d'anciens combattants et de militaires libérés. Elle ne s'est concentrée que sur les suicides chez les soldats en service actif. On pense généralement que beaucoup de soldats subissent des traumatismes pendant leur service actif sans manifester de signes de stress post-traumatique tant qu'ils restent en service actif. Beaucoup auront éprouvé un traumatisme même avant le début de leur carrière militaire.
    Toutefois, le traumatisme peut rester dormant tout en mûrissant lentement. Il s'exprimera longtemps après le fait. La politique des forces armées ne se préoccupe pas du risque pour les anciens combattants. Indéniablement, ce groupe exposé à un risque élevé a besoin de beaucoup d'attention. D'après une recherche récente effectuée au Royaume-Uni, le risque de suicide chez les soldats masculins qui avaient quitté le service et qui avaient moins de 24 ans était de deux à trois fois plus élevé que dans la population générale et que chez ceux qui sont en service actif. D'après une autre recherche, également effectuée au Royaume-Uni, le cinquième seulement des anciens combattants de ce pays qui se sont suicidés a cherché de l'aide avant de mourir.
    Il y a plus de 15 ans, les Nations Unies et l'Organisation mondiale de la Santé ont reconnu que le suicide était un important problème de santé publique, mais elles n'ont pas cantonné les responsabilités dans un seul domaine. En 1992, l'ONU a demandé au Canada de prendre la tête de l'élaboration de lignes directrices internationales pour la prévention du suicide, qu'elle a adoptées en 1996. Ces lignes directrices et celles, ultérieures, de l'OMS, demandaient à tous les pays de se doter d'une stratégie nationale de prévention du suicide et de créer un organisme national de coordination à cet égard.
    Peu après, partout autour du monde, les pays ont commencé à élaborer des stratégies à eux. Jusqu'à ce jour, tous les pays industrialisés en possèdent une, tous sauf le Canada. En fait, non seulement le Canada n'a pas donné suite aux lignes directrices de l'ONU et de l'OMS et ne les a pas reconnues, mais, encore, il n'a pas encore reconnu que le suicide est un problème de santé publique d'ampleur nationale et que sa prévention est prioritaire. Au lieu de manifester publiquement et vigoureusement son appui à la prévention du suicide dans tous les milieux et dans toutes les parties du pays, le gouvernement du Canada, par son silence, contribue à la honte et aux problèmes engendrés par le suicide.
    Comme l'ONU l'a reconnu en 1993, le suicide ne relève pas d'un seul secteur. Il touche la santé publique, la santé mentale, le mieux-être collectif, la prévention des blessures, la Défense nationale, les Anciens Combattants et Corrections Canada. La collaboration n'est pas seulement souhaitable, elle est indispensable. Cependant, aujourd'hui encore, le gouvernement ne nous a pas procuré les mécanismes la permettant. Aucune stratégie nationale ne nous oriente, aucun organe, aucune structure ne promeut la collaboration et la coordination. Nul ne peut esquiver le problème ou se soustraire à ses responsabilités, et pourtant, pour beaucoup d'entre nous, c'est ce qu'a semblé faire le gouvernement. Jusqu'ici, la réponse fédérale — pas uniquement celle du gouvernement actuel, mais aussi de tous ceux qui ont précédé — à nos appels a été de dire qu'il s'agissait d'un domaine de compétence strictement provincial ou territorial, non fédéral.
    En fait, le suicide concerne tout le monde, et tout le monde a un rôle à jouer. Les Forces canadiennes ont reconnu leurs responsabilités et le rôle qu'elles jouent dans la prévention du suicide, tout comme, je pense, les Anciens Combattants. Quand le reste du gouvernement reconnaîtra-t-il ses responsabilités et le rôle important qu'il peut également jouer?
(1540)
    Par le passé, notre gouvernement national a fait preuve d'initiative et il a collaboré avec les provinces et les territoires sur de nombreux dossiers de santé publique et à la lutte contre de nombreuses pandémies telles que la grippe A H1N1, le syndrome respiratoire aigu sévère (ou SRAS) et le sida. Il est maintenant temps pour lui de vraiment lutter, de toutes ses forces, contre la pandémie du suicide au Canada. Si le gouvernement fédéral a consacré d'importantes ressources à la prévention du suicide dans les communautés des Premières nations, il n'est pas sorti de ce cadre très étroit et de cette réponse très sélective et il n'y a consacré directement aucune ressource ailleurs.
    Mais il y a lieu de se réjouir: on peut prévenir le suicide. On connaît la solution et on peut l'appliquer. Personne d'entre nous, y compris les Forces canadiennes ou les Anciens Combattants, ne devrait agir seul. Nous sommes tous ensemble de la partie.
    Depuis sept ans, l'ACPS propose au gouvernement du Canada une stratégie nationale pour la prévention du suicide. Publiée pour la première fois en 2004, elle a été suivie d'une deuxième édition, en 2009. Malheureusement, ce don nous est chaque fois retourné. Cette stratégie a été reconnue à l'échelle internationale, de même que dans les provinces et les territoires. Si le gouvernement n'en veut pas ou qu'il ne l'aime pas, qu'il le dise au moins, qu'il mette en évidence des lacunes, qu'il prenne les choses en main et qu'il convoque tous les acteurs pour faire mieux.
    L'Écosse et l'Angleterre ont lancé des stratégies nationales de prévention du suicide en 2002 et, plus tard, les deux pays ont signalé une diminution du taux général de suicide dans la population. En fait, l'Angleterre constate son taux de suicide le plus bas jamais enregistré et une réduction de 20 p. 100 de la mortalité par suicide. Elle a déterminé que, grâce à cette réduction, aux morts évitées et aux améliorations apportées à la qualité de vie, sa stratégie entraînerait des économies. L'Écosse a calculé qu'il suffisait de sauver encore cinq vies pour éponger le coût de toute sa stratégie.
    En 2001, le directeur du Service de santé publique des États-Unis a dévoilé la stratégie de prévention du suicide de ce pays. Elle comportait une déclaration selon laquelle le suicide était un grave problème de santé publique, un problème que l'on pouvait prévenir. La stratégie des États-Unis, comme celle de l'Écosse et de l'Angleterre, a constitué un point de comparaison qui permettait aux éléments disparates du mouvement de prévention du suicide d'examiner ses propres priorités, tout en les amenant à fonctionner à l'intérieur du cadre général. Elle a aussi servi de guide pour l'identification des objectifs communs qui, par leur crédibilité, emporteraient l'adhésion du public. Capable de transformer les attitudes, les politiques et les services, la stratégie a également été un catalyseur polyvalent du changement social. L'un de ses partenaires les plus actifs et les plus incontournables est le ministère de la Défense.
    Beaucoup de belles choses sont en train de se produire, partout au pays, en prévention du suicide. Cependant, chaque région, chaque ministère ou chaque secteur ne connaît pas ce que les autres font. Aucun système n'est en place pour échanger et partager l'information, promouvoir et établir des pratiques exemplaires, coordonner la recherche, féconder les idées, harmoniser les efforts et collaborer. Bref, nous ne communiquons pas les uns avec les autres, nous ne collaborons pas et nous n'apprenons pas ensemble. En outre, il n'existe pas de programme public national de sensibilisation et d'éducation à la prévention du suicide ni de programme d'appui à l'évaluation des initiatives en cours en fonction d'une norme.
    En décembre, j'ai eu l'occasion d'aborder ce problème dans une conversation avec l'un de vos collègues. À un moment donné, je me suis encore fait servir métaphoriquement le commentaire qu'il s'agissait d'une question de compétence provinciale: on n'appelle pas l'électricien, c'est-à-dire le gouvernement fédéral, pour faire le travail du plombier, c'est-à-dire les provinces et les territoires. Mais il ne faut pas oublier, dans l'esprit de cette métaphore, que pour construire une maison, il faut également un bon entrepreneur pour faciliter la communication et la planification.
    D'après nous, le gouvernement est tenu de s'assurer que la prévention du suicide est confiée à un bon entrepreneur — autrement dit, à un organisme national de coordination qui est financé pour ce travail. Le premier critère pour juger des efforts d'un pays dans la prévention du suicide est l'existence d'un tel organisme. Le Canada ne respecte pas ce critère. Il est recalé.
(1545)
    Dans le passé, notre gouvernement national a pris les choses en main et il a collaboré avec les provinces et les territoires dans de nombreux dossiers de santé publique et dans la lutte contre de nombreuses pandémies telles que la grippe A H1N1, le SRAS et le sida. Nous avons signalé aux gouvernements antérieurs ainsi qu'au gouvernement actuel les avantages économiques qui découlaient d'une stratégie nationale de prévention du suicide, mais nous savons qu'il n'y a pas que l'argent. Il s'agit de faire son devoir, de sauver des vies, d'empêcher les familles d'être déchirées et traumatisées par le suicide.
    Nous parlons de nos frères, soeurs, mères et pères, tantes, oncles, cousins, amis, collègues et des personnes que nous croisons tous les jours dans nos déplacements, de personnes qui ont été au service du pays et qui ont fait d'énormes sacrifices personnels, incompréhensibles à la plupart d'entre nous. Nous devons assurer la sécurité de nos anciens combattants, tout comme ils ont assuré la nôtre.
    Bref, que peut faire le gouvernement du Canada?
    Nous lui demandons, avec votre appui, de reconnaître officiellement que le suicide est un problème grave de santé publique et communautaire, un enjeu dans la prévention des blessures, une priorité stratégique; nous demandons au gouvernement de constituer et de financer adéquatement un organisme national de coordination de la prévention du suicide, qui servira d'intermédiaire dans la chaîne du savoir, qui favorisera la transmission des connaissances, les pratiques exemplaires, la recherche et la communication; et nous lui demandons de s'engager à collaborer avec cet organisme, les provinces et les territoires, à l'établissement d'une stratégie nationale de prévention du suicide.
    Nous croyons que, grâce à une collaboration informée, on change les choses pour le mieux. L'ACPS serait heureuse d'avoir l'occasion de collaborer avec le comité, les Anciens Combattants, la Défense nationale et le ministère de la Santé pour faire avancer la prévention et la postvention du suicide au Canada et l'intervention contre le suicide.
    Trop de vies sont abrégées. Trop de promesses d'un avenir prometteur et enrichissant sont trahies. Trop de familles sont privées d'êtres chers qui auraient continué d'enrichir leurs vies et nos collectivités. Dans notre pays, des centaines de milliers de vies ont été irrémédiablement changées à cause d'un suicide tragique et inutile. Certains d'entre eux sont vos électeurs, vos amis, votre famille.
    On peut prévenir le suicide. Il y a de l'espoir. Avec votre aide, nous pouvons sauver des vies et nous le ferons. Nous consolerons ceux qui pleurent.
    Merci.
    Madame Sgro, veuillez ouvrir le bal.
    Merci beaucoup, monsieur Wall, pour cette déclaration si importante pour nous, alors que nous poursuivons cette étude particulière.
    Depuis combien de temps l'Association canadienne pour la prévention du suicide existe-t-elle et depuis combien de temps en êtes-vous le directeur?
    L'association existe depuis 25 ans. Je souligne le fait que tout son travail est effectué par des bénévoles. Je suis un bénévole. Mon poste de directeur n'est financé par personne.
    Nous rassemblons des chercheurs, des universitaires, des survivants, des professionnels de la santé mentale, des soignants et des citoyens de partout au Canada qui sont tout simplement inquiets. Nous agissons sous la direction d'un conseil d'administration.
(1550)
    Dans votre analyse, vous mentionnez 4 000 Canadiens, mais que le Canada se situait dans le premier tiers des pays ayant les taux de suicide les plus élevés au monde. Est-ce l'absence de stratégie pour s'attaquer directement au problème qui fait que le bilan continue d'être si lourd ici par rapport à celui d'autres pays?
    Je ne pense pas que cela contribue aux suicides, mais je pense qu'une telle stratégie et, ce qui est tout aussi important, un organisme financé de coordination font partie de la solution.
    Qui vient en premier, la stratégie ou l'organisme?
    Il faudrait que ce soit l'organisme. C'est un peu comme chercher à déterminer ce qui vient en premier, l'oeuf ou la poule. Nous pouvons nous inspirer des mesures que le gouvernement a prises, et pour lesquelles nous l'avons félicité, afin de s'attaquer aux problèmes de santé mentale en créant la Commission de la santé mentale du Canada. Cet organisme de coordination a reçu pour mandat d'élaborer une stratégie nationale, à laquelle il travaille encore. Nous devrions suivre cet exemple, car cette approche a fait ses preuves.
    J'aimerais cependant faire remarquer que la Commission de la santé mentale du Canada ne parle qu'une fois de la prévention du suicide dans sa stratégie et son rapport intitulé Vers le rétablissement et le bien-être. On croit parfois à tort que la stratégie de santé mentale englobe la prévention du suicide, mais ce n'est pas le cas. Il s'agit de deux questions distinctes. Cette initiative ne remplace aucunement une stratégie de prévention du suicide, mais il ne fait aucun doute que la Commission de la santé mentale du Canada constitue un joueur de premier plan. Nous aimerions toutefois que la prévention soit considérée comme une priorité, et ce n'en est pas une pour la Commission.
    Si vous aviez des recommandations à formuler concernant le trouble de stress post-traumatique dans le cas précis des anciens combattants, que nous conseilleriez-vous?
    Je vous conseillerais fortement d'informer les intervenants qui assurent des services pour Anciens combattants Canada, les forces armées et d'autres organismes au sujet du TSPT. Il existe un mouvement international qui prône la sensibilisation au TSPT dans les soins et les pratiques, et le Canada accuse du retard à cet égard. Il faut notamment examiner tous les aspects de la prestation de services pour veiller à ce qu'ils soient adaptés aux besoins des personnes touchées par le trouble.
     L'organisme pour lequel je travaille à Winnipeg, le Klinic Community Health Centre, a préparé une boîte à outils sur la manière d'offrir et de favoriser des soins de santé et des pratiques tenant compte du TSPT. Nous diffusons ce document aux quatre coins du monde. Les États-Unis et d'autres pays en ont pris connaissance et souhaitent s'en servir.
    Il existe d'excellentes ressources pour sensibiliser les organisations et les services à ce trouble. C'est une question à laquelle Anciens combattants Canada devrait réellement s'intéresser. Je suppose qu'il le fait déjà, mais une foule d'outils peuvent l'aider dans ses efforts.
    Est-ce votre organisme qui a conçu cette boîte à outils?
    Oui.
    Et d'où venait l'argent?
    C'est l'Agence de santé publique du Canada qui a fourni les fonds.
    Bien. L'Agence reconnaît donc l'excellent travail que vous accomplissez.
    Je l'espère.
    Je crois que la question de la prévention du suicide nous tient tous à coeur, que ce soit chez les anciens combattants ou le public en général. Mais dans le cas des anciens combattants, le trouble joue un rôle important, et il importe de le détecter à un stade précoce. Il me semble que les conseillers et les intervenants travaillant auprès des anciens combattants doivent avoir besoin d'une formation très particulière pour pouvoir détecter les indices qui tendent à...
    Quand il est question de prévention du suicide, les intervenants doivent posséder une formation très solide, n'est-ce pas?
(1555)
    Afin d'évaluer les risques de suicide?
    Pour la prévention du suicide.
    La formation constitue une facette importante de la stratégie globale, mais il faut également tenir compte des autres aspects.
    Il existe déjà d'excellentes formations à ce sujet, comme la Formation appliquée en techniques d'intervention face au suicide, qui est utilisée partout dans le monde. Ce type de formation est très accessible et n'exige pas d'études en santé mentale ou en soins de santé.
    Nous pouvons poser des gestes simples pour former les gens afin de leur permettre d'intervenir et d'évaluer si quelqu'un présente des risques afin de les aider à obtenir l'aide nécessaire. Il ne s'agit pas de former des thérapeutes ou des cliniciens, car il y en a déjà. Nous devons savoir comment trouver les personnes touchées et les diriger vers les ressources.
    Vous avez dit que c'était la Formation appliquée en techniques d'intervention face au suicide? Pourriez-vous...
    La Formation appliquée en techniques d'intervention face au suicide est un programme de formation de deux jours sur la prévention du suicide élaboré par LivingWorks. On l'utilise au Canada, aux États-Unis et en Europe. Il existe également la formation d'une demi-journée de safeTALK.
    Merci.
    Monsieur André, vous avez la parole.

[Français]

    Bonjour, monsieur Wall.
    Je suis préoccupé, d'une part, car j'aimerais avoir plus de détails. Au Québec, on a toute une stratégie de lutte contre le problème du suicide. Nos services de prévention contre le suicide se retrouvent dans chacune des régions du Québec. Il y a des services d'écoute et des services d'intervention auprès des gens. Il y a vraiment une grande dynamique qui se fait autour de cette question. Je comprends que quelque chose de similaire se fait à l'échelle du Canada. Ma préoccupation n'est toutefois pas globale et ne cible pas l'ensemble de la population. Elle est plus spécifique aux anciens combattants et aux militaires qui deviennent bien sûr des anciens combattants.
    Quelle est votre expertise en termes d'intervention auprès des anciens combattants? Avez-vous une expertise spécifique? Avez-vous réalisé des projets pilotes auprès des anciens combattants?

[Traduction]

    Non. L'ACPS serait toutefois fort intéressée à appuyer ce type d'initiative, car, comme je l'ai indiqué lors de mon exposé, très peu de recherches portent expressément sur les anciens combattants. On en a effectué un grand nombre sur les membres actifs de l'armée, mais bien peu au sujet des anciens combattants. C'est valable non seulement au Canada, mais également aux États-Unis et dans d'autres pays. Mais l'ACPS ne dispose tout simplement pas des ressources nécessaires pour entreprendre ce genre de recherches.

[Français]

    Cela me surprend, parce que vous étiez invité comme témoin au Comité permanent des anciens combattants pour parler de la problématique du suicide. Cela ne relève peut-être pas de votre responsabilité. C'est peut-être à nous de se questionner sur qui on invite comme témoin. Ce n'est pas de votre ressort.
    Je vais seulement vous questionner par rapport à certaines choses que vous avez mentionnées. Vous avez dit qu'aux États-Unis, des statistiques générales nous disent que 20 p. 100 des militaires et des anciens combattants s'enlèvent la vie. Vous avez dit que, au Royaume-Uni, on a certaines données indiquant que 2 ou 3 fois plus de militaires ou d'anciens combattants s'enlèvent la vie par rapport au reste de la population. Vous avez également mentionné que c'est à peu près 20 p. 100 des anciens combattants qui s'enlèvent la vie. Toutefois, vous n'avez pas donné de statistiques pour le Québec et le Canada. Pourquoi? Est-il plus difficile d'avoir des données?
     On lit les statistiques sur le Royaume-Uni et les États-Unis, mais ici, lorsqu'on parle du suicide au niveau des militaires et des anciens combattants, on dirait que c'est très difficile d'avoir des données. En comité, différentes personnes nous ont dit qu'il y en avait un grand nombre. D'autres nous ont dit qu'il n'y en avait pas plus que dans le reste de la société. On a eu toutes sortes de propos, mais on n'est pas capables d'avoir de données exactes à cet égard. Pouvez-vous m'expliquer pourquoi?
(1600)

[Traduction]

    C'est parce que ces données n'existent pas. C'est le néant.
    Ce que vous dites est très pertinent. Je crois que nous devons examiner très précisément la question du suicide chez les anciens combattants. Quand nous avons cherché les données qui existent sur la question en vue de notre comparution d'aujourd'hui, nous n'avons rien trouvé. Nous avons consulté quelques personnes au Canada — comme M. Paul Links, l'un des grands chercheurs en matière de suicide au pays, qui a déjà fait partie du groupe d'experts mis sur pied par les Forces canadiennes. Il nous a répondu qu'il n'existe pas de données sur le sujet. L'information fait cruellement défaut dans ce domaine, vous avez absolument raison.

[Français]

    D'accord.
    Toutefois, j'imagine que les ministères de la Défense, autant en Grande-Bretagne qu'au États-Unis, sont un monde secret et caché. Il est très difficile de savoir ce qui se déroule dans ces milieux. C'est très difficile d'obtenir des statistiques. Cela veut-il dire que dans les autres pays, il y a une ouverture plus grande qu'ici pour recueillir des statistiques sur les taux de suicide? Comprenez-vous ce que je veux dire?
    Si on est en mesure d'avoir des données sur le suicide en Grande-Bretagne et aux États-Unis et qu'on ne peut les obtenir ici, j'imagine que l'ouverture des ministères de la Défense est plus grande dans ces pays qu'elle ne l'est ici, au Canada.

[Traduction]

    D'après ce que j'ai compris, même au Royaume-Uni et aux États-Unis, il y a peu de recherches sur la question. Il y en a certainement moins que celles qui portent sur les membres actifs des Forces armées. Il semble toutefois que ces pays soient en avance sur nous concernant les questions qui touchent les anciens combattants.
    Je ne suis pas certain de savoir exactement pourquoi. C'est peut-être parce que les gouvernements de ces pays considèrent le suicide comme une priorité et ont affecté les fonds en conséquence.

[Français]

    Il y a des ressources et une ouverture plus grandes.

[Traduction]

    Merci.
    Monsieur Stoffer, vous avez la parole pour cinq minutes.
    Merci, monsieur le président.
    Monsieur Wall, je vous remercie beaucoup de comparaître aujourd'hui.
    D'où tirez-vous le chiffre de 4 000? Vous avez affirmé que l'an dernier, 4 000...
    Oui, c'était environ 3 750. Je crois que ce chiffre vient de Statistique Canada, mais je devrai vérifier.
    D'accord. Ce n'est que justice, parce qu'en fait, quand j'ai discuté de la question avec le ministre de la Santé de la Nouvelle-Écosse, il y a quelques temps, il m'a indiqué qu'il était très difficile d'évaluer le nombre de personnes qui se sont suicidées. Si une personne prend volontairement une surdose de drogue, le coroner classera l'affaire comme une surdose et non comme un suicide. Quelqu'un peut se suicider en percutant un semi-remorque ou en sautant d'un pont, mais le rapport indiquera qu'il s'agit d'un accident.
    Les chiffes peuvent donc être bien plus élevés. Ai-je raison?
    Oui.
    Selon nous, le nombre réel de suicides est sous-évalué. En fait, dans la stratégie de prévention du suicide que nous avons élaborée, il est justement question d'améliorer et d'élargir les mesures de surveillance pour pouvoir recueillir des statistiques plus justes.
    Vous avez toutefois raison: un grand nombre de décès qui sont probablement le résultat d'un suicide sont attribués à d'autres causes.
(1605)
    Bien.
    Comme vous le savez, M. Richardson et sa conjointe, qui résident à Ottawa, ont perdu un être qui leur était très cher. J'étais très fier de voir le leader conservateur à la Chambre et les députés de toutes allégeances faire preuve de solidarité hier, pas seulement à la Chambre, mais également lors d'une conférence de presse qui s'est déroulée dans l'antichambre du foyer de la Chambre des communes. Six de nos collègues arboraient des chandails de hockey, témoignant ainsi de leur soutien inconditionnel à l'égard de la famille.
    Le gouvernement mérite lui aussi des félicitations pour avoir instauré ce que l'on appelle la stratégie nationale contre le cancer, une initiative qui a permis de coordonner les efforts des provinces et des diverses organisations pour établir des pratiques courantes exemplaires et tout le reste. Comme nous tous, j'entends souvent dire que les soins de santé sont de compétence provinciale, mais le gouvernement a montré dans ce cas et dans plusieurs autres questions, comme le SRAS ou le sida, qu'il est prêt à participer à un système national, le cancer, en l'occurence.
    Il va donc de soi qu'en notre qualité de représentants du gouvernement et de parlementaires, nous veillions à résoudre cette très grave question de santé publique, laquelle, pour diverses raisons, prend malheureusement de l'ampleur. C'est une question à laquelle nous devrions tous porter attention à cet égard. Je ne peux parler au nom du gouvernement, mais il est parfaitement capable de le faire lui-même.
    Mais pour en revenir aux anciens combattants, y a-t-il des militaires ou des anciens combattants dans votre conseil d'administration bénévole?
    Pour ce qui est des membres du conseil d'administration, nous sommes justement en train d'en élire de nouveaux. Il y en avait au moins un qui était un ancien combattant, mais il ne fait plus partie du conseil. Chose certaine, nous voulons que le nouveau conseil soit composé de membres de tout horizon. Nous aimerions donc qu'il comprenne un ancien combattant.
    Si vous étiez président du Conseil du Trésor et que affectiez les fonds comme vous voudriez qu'ils le soient, quelle somme le gouvernement devrait-il dépenser initialement pour établir un système national? De toute évidence, à long terme, l'investissement rapporterait. Comme vous l'avez indiqué dans le cas de l'Écosse, si l'on peut réduire le nombre de décès, les économies ainsi réalisées compensent l'argent investi. Mais quel serait l'investissement initial du gouvernement pour instaurer cette stratégie nationale?
    Je tenterai de répondre à cette question de diverses manières.
    Nous pouvons vous dire combien d'argent l'Angleterre et l'Écosse ont investi dans leurs stratégies nationales, car j'ai les chiffres en main. Notre organisation ne disposant toutefois pas des ressources nécessaires pour calculer le coût d'une stratégie nationale, je ne peux me prononcer sur la question.
    Je prendrai l'Écosse comme exemple. Sa stratégie comprenait deux volets. Dans le cadre du premier volet, soit de 2003 à 2006, le pays a investi l'équivalent d'un peu plus de 14 millions de dollars. Un autre montant d'un peu moins de 5 millions de dollars a été réservé pour des activités nationales qui appuieraient la stratégie. Le second volet a fait l'objet d'un investissement d'un peu plus de 13 millions de dollars pour la période de 2006 à 2008.
    Pour ce qui est du coût d'un organisme de coordination, nous avons fait quelques prévisions à cet égard et considérons qu'il en coûterait 700 000 $.
    Merci.
    Monsieur Mayes.
    Merci, monsieur le président.
    Monsieur Wall, bienvenue devant le comité.
    Il est malheureux que ce soit les politiques inadéquates des précédents gouvernements fédéral et provinciaux en matière de santé mentale qui ont fait sortir le rapport sénatorial de l'ombre. Par la suite, une commission et une stratégie de la santé mentale ont vu le jour.
    J'ai commencé à lire ce rapport, mais je ne l'ai malheureusement pas terminé. Y est-il question de la prévention du suicide et des questions de santé mentale?
(1610)
    Je l'ai lu au complet, et il ne comprend qu'une phrase sur la prévention du suicide. Ce n'est qu'une remarque faite en passant.
    Voilà qui est intéressant, car je crois que cela devrait faire partie intégrante de la stratégie.
    Je ne veux pas trop perdre de temps à analyser les chiffres, car ce sont les gens qui nous préoccupent et non les données. Ce sont les gens qui importent. M. André a dit quelque chose qui a suscité...
    Lors de votre exposé, vous avez indiqué que l'étude réalisée par les forces armées du Royaume-Uni faisait état d'un nombre de suicides deux à trois fois plus élevé. Mais vous avez ciblé un groupe d'âge, n'est-ce pas?
    Oui.
    Il ne s'agit donc pas de l'ensemble des forces armées, mais d'un certain groupe d'âge. Je veux simplement que les choses soient claires, car les chiffres portent à interprétation. Il faut faire attention.
    En effet. Et c'est la seule étude que nous avons pu trouver.
    Bien.
    Il y a quelque chose que je me demandais. Quand je travaillais dans l'industrie de l'exploitation minière, trois mineurs se sont malheureusement suicidés en l'espace d'un mois. C'était presque comme une association, car c'étaient trois amis. Je me demande si les suicides par groupes ou associations sont un phénomène fréquent. Dans le cas présent, du moins en ce qui concerne les forces armées, il s'agirait de jeunes hommes ou de jeunes femmes qui ont peut-être vécu des situations semblables et vu un de leurs collègues s'enlever la vie. Cela pourrait-il les pousser à passer à l'acte?
    Le risque est effectivement accru si une personne vulnérable connaît quelqu'un qui s'est suicidé. C'est un peu comme si on leur donnait le feu vert. Comme quelqu'un d'autre l'a fait, ils considèrent peut-être que cette solution peut leur convenir.
    L'effet de contagion a été plus fréquemment observé chez les jeunes, qui peuvent réagir plus impulsivement.
    Au Canada, on trouve trois groupes à risque élevé: les Premières nations, les jeunes et les aînés. Certaines des recherches que nous avons consultées laissent entendre que les aînés ont un taux de suicide plus élevé que les jeunes; cependant, leur décès tend à attirer moins l'attention que celui des jeunes. Chez les anciens combattants, certains segments présentent tellement de facteurs de risque que, comme je l'ai souligné dans mon exposé, ils sont particulièrement vulnérables.
    Malheureusement, il semble que la vie soit moins valorisée et moins sacrée dans notre société. Les jeunes ont grandi dans cet environnement. Je sais que nous pouvons attribuer le problème aux missions de combat ou à certains des défis inhérents au service dans les Forces canadiennes, comme la cohabitation étroite. C'est difficile. Avez-vous réalisé des études ou recueilli de l'information concernant les Forces canadiennes et les mesures que ces dernières pourraient prendre pour atténuer certaines de ces conséquences?
    Je crois que les Forces canadiennes l'ont fait. Elles ont rédigé un rapport très exhaustif comprenant environ 59 recommandations pour améliorer leurs mesures de prévention du suicide. Je crois qu'elles font un excellent travail à cet égard. Je doute de pouvoir ajouter quoi que ce soit à ce rapport. Ici encore, comme on l'a indiqué à bien des reprises, ce sont les anciens combattants qui ont été oubliés.
(1615)
    Considérez-vous que c'est une question que le comité devrait examiner afin de recommander que l'on s'intéresse au passage du service actif à la vie civile et que l'on transfère l'information pour tenter de détecter les risques potentiels?
    Oui.
    D'accord.
    Vous avez affirmé que le suicide devrait être considéré comme un problème de santé publique et qu'il faudrait élaborer une stratégie nationale. Mais qui devrait défendre cette cause? J'avais pensé à la Commission de la santé mentale, mais devrait-on s'adresser à Santé Canada ou à la commission comme telle? Comment devrait-on procéder? Anciens combattants Canada aurait également un rôle à jouer dans l'élaboration d'une stratégie.
    Il conviendrait peut-être de confier le dossier à la Commission de la santé mentale, comme l'Écosse l'a fait. Ce pays a instauré une stratégie de santé mentale, dans le cadre de laquelle il a élaboré une stratégie de prévention du suicide.
    Je crois que l'Agence de santé publique du Canada pourrait jouer un rôle à cet égard, même si, à ce que je sache, il n'est pas question de la prévention du suicide sur son site Web.
    Il fait se rappeler de faire attention avant de confier l'affaire à un seul intervenant. On tend à considérer le problème uniquement sous l'angle de la santé mentale ou de la santé, alors qu'il touche tous ces secteurs. Voilà pourquoi je crois qu'il est essentiel de mettre sur pied un organisme de coordination pour unifier les démarches, actuellement fragmentées.
    Je vous remercie tous pour tout ce que fait votre organisme sur les plans de la santé mentale et de la prévention du suicide.
    Merci.
    Merci.
    Madame Duncan, vous avez la parole.
    Merci, monsieur le président.
    Je vous remercie, monsieur Wall, de votre exposé et du travail extraordinaire que vous accomplissez dans ce domaine.
    Vous avez proposé d'adopter une stratégie nationale, et je me demande quels en seraient le cadre ou les éléments fondamentaux.
    Voulez-vous que je...
    Contentez-vous de nous exposer les principaux éléments, je vous prie.
    Je crois que l'on peut la diviser en trois composantes, comprenant chacune trois visées principales assorties d'objectifs.
    Il faut d'abord favoriser la sensibilisation et la compréhension. L'éducation et la sensibilisation du public sont donc des éléments principaux.
    Viennent ensuite la prévention, l'intervention et la postvention.
    En dernier lieu, il y a le développement, le transfert et l'échange de connaissances.
    Bien. Cela nous aide. Merci.
    Je vous ai remis un exemplaire de notre stratégie, si vous souhaitez la consulter.
    Croyez-vous que ce soit utile? Notre comité considère que la prévention, l'intervention et la postvention constituent un cadre valable. Pourriez-vous nous proposer des pratiques exemplaires et formuler des recommandations précises dans chacun de ces domaines?
    Je peux difficilement le faire en quelques mots. Je crois que les pratiques exemplaires pour chacun de ces domaines sont expliquées en détails dans notre stratégie.
    Bien, je comprends.
    C'est difficile à expliquer.
    Que nous recommanderiez-vous au chapitre de la postvention? Les familles d'anciens combattants souffrent de la situation. Que pourrait-on faire pour renforcer leur résilience?
(1620)
    Même s'il est possible de prévenir le suicide, il n'en reste pas moins que certains passent à l'acte. Nous devons donc nous assurer que les gens ont accès au soutien nécessaire, et il n'en manque pas. Il existe d'excellentes ressources pour aider ceux qui sont touchés par le suicide. Il nous faut donc coordonner toutes ces ressources pour que quand un suicide survient, les personnes aient accès à l'information et au soutien.
    Quelles recherches ont été réalisées sur la postvention? Devrait-on interroger les familles et les anciens combattants pour tenter de comprendre ce qui s'est passé?
    À mon avis, il faut leur tendre la main. Quand on apprend qu'une famille a perdu un proche, il faut au moins aller vers elle pour se présenter et l'encourager fortement à communiquer avec nous si elle a besoin de soutien et de parler à quelqu'un, en assurant peut-être un suivi ultérieur.
    Nous recommanderiez-vous des mesures précises pour renforcer la résilience? Ces familles vont avoir besoin d'énormément de soutien.
    Les normes encadrant les pratiques exemplaires établies pour offrir du soutien aux personnes touchées par le suicide d'un proche diffèrent de celles qui entourent la prévention. La clinique pour laquelle je travaille est justement en train d'établir, en collaboration avec l'ACPS, des normes et des pratiques exemplaires afin d'aider les personnes à la suite d'un suicide.
    Pouvez-vous nous dire ce que vous savez sur la manière de renforcer la résilience? Se peut-il que rien n'existe à cet égard et qu'il faille vraiment...
    En ce qui concerne la résilience, j'ai peut-être un peu de mal à comprendre la question. Il existe un éventail de programmes pour renforcer la résilience et ainsi favoriser le mieux-être mental. De nombreux programmes sont offert en dehors du soutien dans le deuil en cas de suicide.
    Quand un suicide survient, il faut aider les personnes à surmonter leur chagrin. Et il arrive parfois que ce soutient ne soit tout simplement pas là pour permettre aux personnes touchées de comprendre les répercussions que ce geste a sur elles et de parler de ce qu'il leur arrive afin de surmonter l'épreuve.
    Je suppose que c'est ce que je voulais savoir.
    Votre temps est écoulé.
    Monsieur Lobb, la parole est à vous.
    Merci, monsieur le président.
    Je vous rappellerai simplement que nous siégeons jusqu'à environ 16 h 35.
    Monsieur Wall, je vous remercie.
    Lors de votre exposé, vous avez parlé d'une stratégie de prévention du suicide qui fait intervenir le ministère de la Défense nationale et Anciens Combattants Canada. Est-ce exact?
    Ils ont effectivement un rôle à jouer.
    Vous collaborez donc dans le cadre de la stratégie.
    L'ombudsman des anciens combattants a témoigné lors de notre dernière séance et nous a affirmé quelque chose que nous avions déjà entendu, c'est-à-dire que ces ministères sont vraiment des chefs de file mondiaux au chapitre du TSPT et les blessures de stress opérationnel. Objectivement, croyez-vous que ce soit le cas? Pensez-vous que nous sommes sur la bonne voie et même à l'avant-garde?
    J'ignore si nous devançons les autres pays, car je ne sais pas ce que font leurs forces armées ou leur ministère des Anciens Combattants.
    Les forces armées portent certainement de plus en plus attention au TSPT, et je crois qu'elles envisagent des moyens d'intervention vraiment novateurs. Je suis généralement impressionné par les mesures que j'ai vues jusqu'à présent. Je ne dirais par qu'elles touchent au but, mais elles sont sur la bonne route.
(1625)
    J'ai également demandé à d'autres témoins s'ils considéraient que les professionnels de la santé mentale qui offrent du soutien aux membres des Forces canadiennes et aux anciens combattants reçoivent une formation adéquate. Les deux fois où j'ai posé la question, on m'a répondu que les psychologues, les psychiatres ou les autres intervenants qui traitent les personnes touchées reçoivent effectivement une bonne formation en raison de l'expérience acquise lors des stages, effectués à Parkwood, à Londres, à Ste. Anne's, à Montréal, ou dans un autre établissement. Partagez-vous cet avis?
    Je sais que certains programmes de traitement du stress opérationnel sont très avant-gardistes et couvrent bien le problème du TSPT. C'est ce que je présume en me fondant sur ce que je connais des programmes de santé mentale offerts à l'extérieur de l'armée. Je suppose que les deux types de programmes doivent être assez semblables. Il y a encore un peu de travail à faire pour mieux informer le personnel au sujet du TSPT. Les choses progressent à pas de géant dans ce domaine. Même au cours de la dernière année, nous en avons appris à cet égard. Je crois que certaines formations offertes ne sont pas à jour.
    Le sénateur Kirby et sa Commission de la santé mentale ont, je crois, reçu des félicitations pour leur travail. Le comité devrait-il porter une attention particulière à certains aspects des travaux de la commission? Il ne serait peut-être pas question du trouble ou du TSPT, mais de certaines facettes de la santé mentale qui pourraient nous intéresser et dont nous pourrions traiter dans notre rapport.
    Qu'en pensez-vous?
    À mon avis, la Commission de la santé mentale a vraiment fait le tour de la question en ce qui concerne la santé mentale en général et sa promotion. Il ne manque pas grand-chose, si ce n'est la prévention du suicide et le trouble. Je crois que sa stratégie repose sur sept thèmes de base. J'aurais préféré qu'il y en ait neuf, dont un sur la question du trouble, qui est une sorte un point commun aux divers thèmes, puisqu'il est souvent sous-jacent aux autres problèmes. Il y a en outre la prévention du suicide, bien sûr. Je crois que ce sont les deux aspects qui sont...
    Merci.
    Je donne la parole à M. Vincent pour cinq minutes.

[Français]

    Bonjour, monsieur Wall.
    Vous avez dit tantôt qu'au niveau de la stratégie des forces armées contre le suicide, il y avait une approche coordonnée et vous avez félicité leurs efforts. Est-ce que vous vous êtes déplacé sur le terrain, dans n'importe quelle base militaire, pour évaluer les efforts actuels de prévention des Forces canadiennes et les services offerts aux anciens combattants?
     Je comprends que les anciens combattants relèvent d'un de vos champs de compétence au niveau national. Êtes-vous vraiment allé sur le terrain pour évaluer la stratégie des Forces canadiennes?

[Traduction]

    Non, je ne me suis pas rendu sur place. J'aimerais bien disposer des ressources nécessaires pour le faire.

[Français]

    Je suis désolé pour vous parce que vous avez parlé précédemment de 700 000 $. Présentement, il y a un gel au niveau des enveloppes budgétaires. Donc, pour aller plus loin avec votre montant de 700 000 $, je pense que vous allez repasser dans quelques années.
    Vous avez dit que vous avez un rapport contenant 50 points et vous avez parlé de ses bienfaits. Toutefois, en regard avec ce qui se passe vraiment sur le terrain et ce qu'on écrit, vous savez qu'il y a une grosse différence. J'ai de la difficulté à suivre votre stratégie. Vous dites que oui, c'est bon, oui, c'est parfait et que vous allez dans la bonne direction, sauf que personne ne va vérifier ce qui se fait sur le terrain et il n'y a pas de suivi. Qu'est-ce que vous en pensez?
(1630)

[Traduction]

    Je ne peux affirmer que les choses vont bien. Tout ce que je peux vous dire, c'est que je crois que les Forces canadiennes sont en train de préparer un plan, une stratégie, pour intervenir à cet égard.
    Mais vous avez raison de dire qu'il faut vérifier d'une manière quelconque si les mesures ont l'effet escompté et permettent d'améliorer la situation. C'est souvent un aspect que l'on néglige. Je suis donc d'accord avec vous.

[Français]

    Il est certain que le principe de la stratégie est de préserver des vies, mais qu'arrive-t-il si on n'est pas en mesure de le faire? D'autant plus que le Canada n'est pas signataire d'une entente relative à une stratégie nationale sur la prévention du suicide. Comment peut-on avoir une stratégie adéquate au niveau des Forces canadiennes quand on n'en a même pas une au niveau national? Cela laisse vraiment un grand vide pour toutes ces personnes et il n'y a aucune stratégie. On ne sait pas où on s'en va, on ne sait pas ce qu'on fait, on ne sait pas ce que font la main gauche et la main droite. On espère, on pense que c'est bien fait, mais il n'y a personne à l'extérieur des Forces canadiennes qui est en mesure d'aller sur le terrain évaluer ce qui se fait présentement et faire des recommandations à cet égard. Croyez-vous que ce serait l'une de vos recommandations, à savoir que des personnes de l'extérieur des Forces canadiennes puissent aller évaluer la formation qui est donnée à ces jeunes qui se rendent sur les théâtres d'opérations? Je ne sais trop quelle formation cela nécessiterait, parce qu'on ne sait aucunement quelle est la stratégie de formation ou quel est le plan. C'est plus facile pour mes amis conservateurs de comprendre le mot « stratégie » que le mot « plan ». Il n'y a aucun plan. On ne sait pas quel est leur plan pour faire en sorte que nos jeunes puissent revenir dans un état intellectuel semblable à celui qu'ils avaient lorsqu'ils sont partis sur un théâtre d'opérations. J'aimerais avoir votre opinion là-dessus.

[Traduction]

    Je conviens avec vous que la prévention du suicide est tellement fragmentée, comme vous l'avez indiqué, que la main droite ne sait pas toujours ce que fait la main gauche. Les efforts déployés par les Forces canadiennes et les autres groupes qui s'occupent de la prévention du suicide seraient plus efficaces s'ils s'inscrivaient dans une initiative globale, une stratégie nationale, qui favoriserait l'échange d'information et assurerait ainsi la continuité et la cohérence de nos approches et de nos activités.
    Il faut que l'évaluation et l'examen des résultats d'une stratégie ou d'un programme soient objectifs et fassent intervenir un groupe de représentants d'horizons divers qui donneraient leur avis et assureraient la supervision. Comme ce groupe comprendrait des experts externes, le processus d'évaluation ne serait pas hermétique et réservé aux personnes directement concernées. Il est toujours avantageux de faire appel à des gens de l'extérieur.

[Français]

    J'ai une dernière question.
    Vous êtes d'accord avec moi pour dire que s'il y avait une stratégie nationale et les sommes d'argent nécessaires, on serait possiblement capables de sauver des vies au niveau de nos anciens combattants qui ont quitté les Forces canadiennes. Ceux-ci sont souvent laissés à eux-mêmes et on les retrouve dans les rues, dans des groupes comme les AA ou des groupes comme ceux-là. S'il y avait une stratégie nationale, pensez-vous qu'on serait en mesure de sauver des vies à ce niveau?

[Traduction]

     Je le crois, oui.
    Monsieur Kerr, vous avez la parole.
    Je serai très bref. Je ne vous poserai pas de question, car je crois que nous avons bien couvert la question aujourd'hui, et le temps nous manque un peu. Je tiens cependant à vous remercier pour le travail que vous accomplissez. En nous laissant l'étude et les recommandations qu'elle contient, vous nous aidez certainement dans nos efforts, car il nous est très difficile d'avoir une idée claire des origines du problème et de ce qui est recommandé de faire. Vous nous faites comprendre que nous nous attaquons à une question extrêmement ardue, qui ne sera peut-être jamais résolue, mais qu'il est aussi possible de mieux coordonner les efforts. Je voulais donc vous remercier de votre travail et de nous avoir transmis cette étude. Nous l'examinerons certainement avec le plus grand soin, car je crois qu'elle est fort valable.
(1635)
    En ma qualité de président, j'aimerais poser une petite question sur un point qui me tracasse passablement. Si une personne ayant un problème de santé mentale ou des tendances suicidaires, qu'il s'agisse d'un ancien combattant, d'un membre des Forces canadiennes ou d'un civil, refuse qu'on l'aide ou qu'on la traite, peut-on la soigner de force?
    Si le risque est imminent, oui.
    Un risque imminent de suicide.
    Oui.
    Mais ce n'est pas nécessairement une question de santé mentale.
    Tout dépend de la province; je sais ce qui se fait au Manitoba. Il faut prouver que la personne est très susceptible de se faire du tort ou de blesser quelqu'un d'autre. Elle éprouve peut-être un problème de santé mentale, mais si la situation n'est pas urgente, il n'y a pas grand-chose que l'on puisse faire.
    Je vous remercie de nouveau d'avoir témoigné aujourd'hui, monsieur Wall. Je suis très satisfait. Je vous souhaite un bon voyage de retour, monsieur.
    Maintenant que M. Wall nous quitte, nous devons entendre deux témoins que nous n'avons pas encore approuvés. Je crois comprendre qu'ils devraient comparaître.
    Bonne idée.
    Est-ce une bonne idée?
    Monsieur Vincent.

[Français]

    Je vais vous soulager un peu, monsieur le président.
    J'avais sur ma liste le colonel Drapeau, qui est avocat et qui représente les membres des Forces canadiennes ou d'autres membres qui sont des anciens combattants. C'est son travail de les représenter auprès de l'armée canadienne. Je vais le laisser de côté. M. Drapeau reviendra une prochaine fois dans un autre dossier qu'on abordera éventuellement ici au Comité permanent des anciens combattants.

[Traduction]

    Monsieur Stoffer.
    Simplement pour ajouter mon grain de sel, je ferais remarquer qu'il est beaucoup question du rapport du sénateur Michael Kirby. Je demande donc au comité s'il conviendrait de le convoquer, lui ou les membres du comité qui l'ont aidé à rédiger le rapport, pour nous donner des conseils sur la voie à suivre?
    Mon attaché de recherche a lu ce rapport et m'indique à l'instant qu'il ne traite pas beaucoup du suicide et pas du tout des anciens combattants.
    Je m'en tiens là, alors.
    On propose donc de... Doit-on biffer M. Drapeau de la liste des témoins?
    Oui.
    Bien, c'est donc réglé.
    Andrew Cohn viendra, par contre. Êtes-vous tous d'accord?
    En ce qui concerne M. Cohn, il a conçu un programme visant expressément à renforcer la résilience. C'est très pointu. Il a reçu un prix, et la Royal Society... Son programme concerne le renforcement de la résilience au sein des forces armées et donne apparemment d'excellents résultats.
    Il est Australien, n'est-ce pas?
    Il témoignera donc par téléconférence.
    Sur ce, je lève la séance.
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