Nous tenons aujourd'hui la 18e séance du Comité permanent de l'environnement et du développement durable de la Chambre des communes. Conformément à l'ordre de renvoi du mercredi 3 février 2021 et à la motion adoptée par le Comité le 17 février, nous entreprenons notre étude sur le projet de loi , Loi modifiant la Loi canadienne sur la protection de l'environnement, 1999, élimination définitive de déchets plastiques.
La réunion d'aujourd'hui comporte deux parties. Nous allons, dans un premier temps, entendre le parrain du projet de loi, le député Scot Davidson.
Félicitations, monsieur Davidson, d'avoir mené votre projet de loi jusqu'à l'étape du processus législatif. Nous savons tous que ce n'est pas chose facile, et vous avez réussi grâce à votre travail acharné.
Nous disposerons d'un peu plus de 30 minutes avec M. Davidson. Nous passerons ensuite à la deuxième partie de la réunion.
Je ne crois pas avoir besoin de vous expliquer les règles, monsieur Davidson. Vous disposez de cinq minutes pour votre discours préliminaire. Je vous demanderais d'éteindre votre micro lorsque vous ne parlez pas.
Sur ce, vous avez la parole.
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Merci, monsieur le président.
J'aimerais tout d'abord remercier les membres du Comité pour leur travail en vue de protéger l'environnement. Je suis certain que le projet de loi à l'étude représente une autre occasion pour eux d'accroître ces efforts.
Le projet de loi vise à interdire l'exportation de déchets plastiques du Canada vers d'autres pays, où ils sont trop souvent brûlés, déversés dans l'océan ou éliminés de manière inappropriée, ce qui entraîne des conséquences dévastatrices pour l'environnement.
D'autres pays comme l'Australie, la Nouvelle-Zélande et le Royaume-Uni ont déjà pris des mesures pour aborder cette importante question, mais le Canada ne l'a toujours pas fait. Le gouvernement actuel a en fait rejeté toutes les demandes visant une interdiction des déchets plastiques, affirmant que la pratique visant à envoyer des déchets plastiques dans les pays étrangers était bénéfique, malgré de nombreuses données probantes démontrant le contraire. Nous ne pouvons maintenir une telle pratique. Le Canada doit faire preuve de leadership et assumer la responsabilité de ses propres déchets plastiques.
Le projet de loi , qui modifie la Loi canadienne sur la protection de l'environnement en vue d'interdire l'exportation de déchets plastiques vers des pays étrangers aux fins de l'élimination finale, nous permet de le faire. Ce projet de loi a été rédigé de manière à veiller à ce que nos lois nationales interdisent fermement l'exportation de déchets plastiques dans le respect de nos accords internationaux, tout en permettant l'exportation de déchets plastiques recyclés de manière appropriée.
À cette fin, la définition de « déchets plastiques » présentée à l'annexe du projet de loi est tirée de la Convention de Bâle. De façon similaire, le terme « élimination finale » est défini de manière spécifique, et a trait aux opérations qui ne permettent pas la récupération, le recyclage, la restauration ou la réutilisation des ressources. Parmi les exemples d'élimination finale, on compte la décharge dans les dépotoirs, le déversement dans les océans ou l'entreposage permanent. En nous centrant sur les opérations d'élimination finale, nous pouvons veiller à ce que l'exportation légitime, durable et écologique des déchets plastiques ne soit pas interdite.
Le projet de loi permettrait d'harmoniser ces changements au reste des règlements de cette partie de la Loi. Ainsi, le ministre pourrait ajouter ou retirer des plastiques de la liste des produits interdits, et ceux qui contreviendraient à la Loi devraient payer des amendes et des pénalités. Ces changements permettront enfin d'interdire l'exportation des déchets de plastique du Canada vers d'autres pays pour une élimination finale.
Alors que le Comité étudie le projet de loi, je crois qu'il doit tenir compte de certains points importants, le premier étant évidemment l'environnement. C'est essentiel. On a clairement démontré que l'exportation de déchets plastiques — surtout vers les pays en développement — ne peut continuer selon le rythme actuel. Cette pratique a détruit l'environnement dans de nombreux pays, et elle a une incidence sur notre propre environnement ici, au Canada, également. La bonne nouvelle, monsieur le président, c'est qu'il y a une meilleure façon de faire. En premier lieu, il faut interdire l'exportation de tels produits.
Il est important de tenir compte du rôle de l'industrie à cet égard. J'ai été propriétaire d'une petite entreprise et je sais que ces changements entraînent d'importantes conséquences sur les entreprises. Ils représentent toutefois aussi une occasion à saisir. De nombreuses sociétés canadiennes novatrices ont une solution à notre problème de déchets plastiques. J'en ai déjà nommé quelques-unes, mais Cielo Waste Solutions est l'exemple parfait d'une entreprise qui veut changer les choses avec un processus de gestion des déchets propre. Le problème, à l'heure actuelle, c'est qu'il n'y a pas assez de plastique canadien à la disposition de ces entreprises. Nous en exportons trop. Il faut aussi nous assurer que les déchets plastiques peuvent être exportés s'ils sont recyclés de manière appropriée.
Il n'y a pas très longtemps, monsieur le président, le Comité avait recommandé une interdiction de l'exportation des déchets plastiques dans son rapport intitulé La goutte qui fait déborder le verre: réduire la pollution par le plastique au Canada, qui a été présenté à la Chambre en juin 2019. La recommandation 11 a été rédigée après des mois de réunions et d'échanges avec divers groupes environnementaux, membres de l'industrie et ministères. Le projet de loi représente la meilleure occasion de faire de cette recommandation une réalité.
Je suis heureux de voir l'appui que reçoit le projet de loi à la Chambre et de la part des Canadiens de partout au pays. J'ai décidé de le présenter parce que je crois fermement que l'environnement et la question des déchets de plastique ne doivent pas être des enjeux partisans, monsieur le président. J'ai eu des conversations constructives avec mes collègues de tous les partis à ce sujet, et je les remercie pour leurs idées et leur contribution à la question.
Je me réjouis à l'idée de suivre le travail du Comité, alors qu'il étudiera cette semaine le projet de loi.
Avec le projet de loi , le Canada peut une fois de plus jouer un rôle de premier plan et interdire l'exportation de déchets plastiques.
Je remercie tous mes collègues.
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Merci, monsieur le président, et merci à mon collègue.
Je suis d'accord avec M. Davidson sur presque tout, sauf au sujet de ce qu'il a dit pendant son test de son: que sa circonscription était la meilleure. Je suis certaine que de nombreux députés auraient des arguments pour faire valoir que ce qualificatif revient en fait à leur circonscription.
Ce projet de loi est très important et je suis très heureuse de voir qu'il est présenté.
Le député a parlé de la recommandation du Comité à cet égard. C'était avant la pandémie. Elle nous a montré l'importance de l'autosuffisance, qu'il s'agisse de la fabrication de notre propre équipement de protection personnelle ou de l'élimination des déchets de plastique.
Pouvez-vous nous en dire un peu plus au sujet de vos motivations? Vous aviez l'occasion de présenter un projet de loi. De tous les domaines possibles, pourquoi avez-vous choisi celui-ci? Pourquoi est-il important pour vous?
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Comme vous le savez, ma circonscription est la plus belle du Canada, puisqu'elle compte le lac Simcoe.
J'ai été propriétaire d'une petite entreprise il y a longtemps de cela. J'ai grandi sur le lac Simcoe, en fait. J'ai vécu près de l'eau toute ma vie. La salubrité de l'eau m'est très chère. Les membres du Comité savent que lorsque nous parlons du Canada — les députés, les témoins, la greffière, le président —, nous pensons à ses côtes intactes, à ses chaînes de montagnes et à ses cascades.
L'eau est très importante. Nous savons qu'il y a un problème avec le plastique dans les océans. J'ai parlé du Royaume-Uni et de l'Australie, mais il est temps pour le Canada de faire preuve de leadership en la matière; c'est pourquoi je crois que le projet de loi est si important.
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Je vous remercie pour votre question.
Monsieur Saini, vous me manquez aussi. Je suis heureux de vous voir.
J'ai consulté les membres de l'industrie. Comme je l'ai dit, je les ai reçus dans mon bureau. Il faut comprendre que j'ai été aussi surpris que vous lorsque j'ai obtenu le 5e rang au tirage au sort des projets de loi d'initiative parlementaire; j'ai dû rédiger le projet de loi rapidement. C'était une lourde tâche... Il a fallu rencontrer les témoins au début de la pandémie de COVID.
Cela étant dit, j'y suis tout de même arrivé. J'ai échangé avec les membres de l'industrie. Ce qui les préoccupait, entre autres, c'était qu'ils avaient l'impression qu'ils ne pouvaient pas... Ils me disaient « Scott, qu'est-ce qui arrivera si des produits que nous envoyions aux États-Unis, et qui servaient à St. Marys Cement, ne peuvent plus y être envoyés? » C'est pourquoi je me suis centré sur l'élimination finale du plastique. C'est pourquoi le terme « élimination finale » figure au projet de loi.
Examinons la Convention de Bâle, puisque vous l'avez mentionnée, car je pense que le détail technique est là. À mon avis, personne n'est contre l'esprit de votre projet de loi. Je pense que nous sommes tous rendus là. Toutefois, il faut aussi reconnaître, par rapport aux déchets plastiques et à la nécessité d'agir, que si nous n'avons pas appuyé cette mesure législative, c'est essentiellement parce qu'elle est juridiquement muette.
Vous avez mentionné la Convention de Bâle, dont les dispositions relatives au consentement préalable en connaissance de cause — qui sont entrées en vigueur cette année — s'appliqueraient à tous les signataires. L'accord modifié, qui porte sur les exportations de plastique avec les États-Unis, réglementerait le mouvement transfrontière des déchets plastiques. Par conséquent, pourquoi le projet de loi est-il toujours nécessaire, puisque nous sommes déjà signataires de la Convention et que nous respectons déjà les modifications et les dispositions de cet accord signé par 188 pays?
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Le Canada n'a pas déposé le dernier amendement.
Il y a eu trois amendements, et le Canada n'en a entériné que deux. Les États-Unis ne sont pas signataires de la Convention de Bâle.
Premièrement, Environnement Canada n'exerce même pas un suivi des déchets plastiques qui sortent du pays. Quatre cent mille tonnes de déchets plastiques ont été exportées sans permis.
La réalité, lorsqu'on regarde les océans du monde et tout ce qui se passe, c'est que le plastique est un problème. Cela nous saute aux yeux, et cela continue malgré tout. Donc, il nous faut une loi avec du mordant pour que cela cesse.
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Merci, monsieur le président.
Je vous remercie tous de votre présence.
Je veux saluer l'initiative du député ayant déposé ce projet de loi qui s'attaque à un enjeu majeur pour l'environnement.
On sait que la situation concernant le plastique est critique pour nos écosystèmes. Je salue ce projet de loi puisqu'il essaie de trouver des solutions ici, à l'interne, en vue de cesser d'exporter nos problèmes.
Ma première question sera en lien avec la Convention de Bâle, dont on vient de parler.
On sait qu'il y a eu des amendements à la Convention de Bâle. Le projet de loi aurait donc besoin d'être modifié, notamment l'annexe 7.
Êtes-vous ouvert à mettre le projet de loi à jour en fonction des derniers amendements de la Convention de Bâle?
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Je vous remercie de la question.
Oui, je suis ouvert. Comme je l'ai dit, je suis prêt à travailler avec le Comité et à étudier les amendements que proposera le Comité. À titre de parlementaires, nous avons l'occasion de faire en sorte que le Canada joue un rôle de chef de file, comme l'Australie et le Royaume-Uni, et que ce projet de loi donne les résultats escomptés.
Une mesure est proposée. Nous sommes actuellement en situation de gouvernement minoritaire, ce qui pourrait changer à tout moment. Je remercie le Comité de s'être réuni pour examiner le projet de loi . J'espère que nous pourrons travailler ensemble pour que cela fonctionne.
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C'est-à-dire que vous avez situé votre projet de loi dans la Loi canadienne sur la protection de l’environnement. Or, on sait que le gouvernement actuel veut revoir cette loi. Je trouvais que ce serait une bonne idée que vous interveniez lorsqu'il y aura des modifications à la Loi.
J'ai une autre question à vous poser. Si on s'attarde seulement l'exportation des déchets plastiques, on ne règle pas le problème. Le chercheur Marc Olivier dit que la production canadienne de plastique s'élève à 3,25 millions de tonnes au Canada seulement. C'est trop élevé pour que cesse entièrement l'exportation.
Est-ce que le projet de loi serait intégré dans un plan plus vaste? Si oui, pouvez-vous nous présenter ce plan?
Si on s'attaque à l'exportation uniquement, c'est insuffisant.
Est-ce que vous avez une idée d'un plan plus vaste, pour venir à bout du problème des déchets plastiques?
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Merci, monsieur le président.
Merci beaucoup, monsieur Davidson, d'être ici avec nous aujourd'hui.
Merci d'avoir présenté ce projet de loi qui vise à mettre fin à la pratique inacceptable qu'est l'exportation de nos déchets plastiques vers des pays qui n'ont pas l'infrastructure nécessaire pour les traiter. Nous ne devrions jamais nous débarrasser de nos déchets en les envoyant dans d'autres pays.
Je pense que vous avez très bien décrit les répercussions sur la santé, l'environnement et les océans. Elles sont très graves, surtout pour les pays ayant des populations à faible revenu, marginalisées et racialisées. Ces pays ont été particulièrement touchés par le manque de leadership du Canada à cet égard. Il est vraiment important que nous nous attaquions à ce problème.
J'ai parlé à divers experts de la Convention de Bâle. Ce qui les préoccupe, c'est que cibler uniquement les déchets plastiques destinés à l'élimination définitive, comme le fait ce projet de loi, ne nous empêcherait pas d'exporter une bonne partie des déchets plastiques qui se retrouvent dans les océans et les sites d'enfouissement ou qui sont incinérés. Souvent, le plastique qui aboutit dans des pays pauvres comme les Philippines et le Cambodge n'est pas étiqueté comme destiné à l'élimination définitive, mais au recyclage. Il s'avère toutefois que ce plastique est contaminé et ne peut être recyclé dans ces pays, notamment parce qu'ils n'ont pas l'infrastructure nécessaire.
Je me demande quelles sont vos intentions avec le projet de loi . Il semble que l'objectif soit vraiment de contribuer à empêcher que ce genre de déchets ne se retrouve dans des pays qui n'ont pas l'infrastructure nécessaire. Je me demande si vous pourriez nous en parler brièvement.
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Je suis un partisan de l'innovation canadienne. Encore une fois, le Canada doit miser sur ses entreprises novatrices et doit les mettre en valeur.
Je suis un partisan du recyclage. Nous voulons tous créer une économie circulaire du plastique; c'est notre objectif, et je pense que mes collègues libéraux seront d'accord avec moi sur ce point. Je sais que M. Saini est d'accord.
Nous voulons la mise en place d'un programme de recyclage efficace au Canada. Nous voulons que les entreprises canadiennes innovent. Voulons-nous un problème de plastique dans les océans de la planète? Très franchement, madame Collins, les gens de ma circonscription me demandent en quoi cela les touche au lac Simcoe. Eh bien, nous savons que de récents articles traitent des microplastiques et du fait que les poissons mangent du plastique. Nous savons que a discuté de la question avec mes collègues de la côte de la Colombie-Britannique et, par rapport à la pêche au homard, avec mes collègues de l'Île-du-Prince-Édouard, du Nouveau-Brunswick et de la Nouvelle-Écosse.
Toutes ces choses sont importantes. Je suis ouvert à l'idée de rendre ce projet de loi aussi solide que possible.
Nous accueillons maintenant notre deuxième groupe de témoins, qui compte cinq personnes.
Nous accueillons M. James Puckett, du Basel Action Network; Mme Elena Mantagaris et M. Bob Masterson, de l'Association canadienne de l'industrie de la chimie; Mme Sabaa Khan, de la Fondation David Suzuki; Mme Jo-Anne St. Godard, du Recycling Council of Ontario.
Chaque témoin dispose de cinq minutes pour sa déclaration préliminaire. Nous aurons ensuite une ou deux séries de questions.
Qui veut commencer?
Puisque vous êtes le premier sur la liste, monsieur Puckett, aimeriez-vous commencer?
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Bonjour, mesdames et messieurs. Je vous remercie pour l'invitation.
Je m'appelle Jim Puckett. Je suis le fondateur et le directeur du Basel Action Network, un organisme international dont le nom est inspiré de la Convention de Bâle. La Convention de Bâle est un traité de l'ONU qui vise à contrôler l'exportation et l'importation des ordures ménagères dangereuses et, plus récemment, des déchets plastiques.
D'abord et avant tout, je souhaite louer de se préoccuper profondément et sincèrement d'un réel problème d'une grande importance: les déchets plastiques. La quantité de déchets plastiques qui sont produits à l'échelle mondiale est effrayante, et elle augmente chaque année. Ces déchets sont très polluants et souvent toxiques, et pourtant, l'industrie qui les génère a peu de solutions à offrir quant à leur gestion.
Pendant de nombreuses années, nous, les pays développés, avons discrètement exporté ce type de déchets vers la Chine. Or il y a deux ans, la Chine a déclaré que c'était assez et qu'elle n'en voulait plus. Les pays comme le Canada et les États-Unis ont été pris par surprise par ce refus soudain de la part de la Chine d'accepter nos déchets, et les courtiers de déchets ont dû faire des pieds et des mains pour les détourner vers d'autres pays d'Asie, comme la Malaisie, l'Indonésie et la Thaïlande.
L'an dernier, les États-Unis ont exporté plus de 25 000 tonnes métriques de déchets par mois vers ces pays. Le Canada en a exporté moins, soit environ 1 000 tonnes métriques par mois. Collectivement, les États-Unis et le Canada expédient plus de 300 000 tonnes métriques de déchets plastiques par année dans des pays en développement.
Nous trouvons juste d'associer les États-Unis et le Canada dans cette vilaine affaire, car à la fin de l'année dernière, les gouvernements canadien et américain ont conclu une entente en secret en vue d'ignorer la décision récente de la Convention de Bâle de contrôler le commerce des plastiques contaminés et mixtes. Les deux pays souhaitaient plutôt que le commerce qu'ils font entre eux demeure obscur et non contrôlé.
Le Centre pour le développement du droit international de l'environnement a condamné ce pacte bilatéral puisqu'il fait fi des obligations du Canada en vertu de la Convention de Bâle. En outre, comme les États-Unis ne sont pas signataires de cette convention, l'entente permet aux négociants canadiens de se servir des États-Unis comme intermédiaire pour exporter des déchets plastiques canadiens vers des ports d'Asie, contournant ainsi les obligations prévues par la Convention.
Toutefois, voici ce qu'il importe de souligner aujourd'hui. Le projet de loi vise à interdire l'exportation à des fins d'élimination définitive. Cependant, les déchets expédiés de nos jours vers des pays en développement ne sont pas exportés dans le but déclaré d'être éliminés définitivement; ils sont destinés au recyclage. Cela peut sembler positif; or, en réalité, les pratiques de recyclage, prétendument sans danger pour l'environnement, utilisées en Asie sont tout sauf écologiques.
En fait, ce type de recyclage est un leurre dont nous sommes tous victimes. La réalité, c'est que nulle part dans le monde n'est-il possible de recycler de manière rentable une grande proportion des déchets plastiques. Ils sont simplement jetés sur des terres agricoles d'Asie et régulièrement brûlés. Quant aux déchets plastiques qui parviennent bel et bien aux usines d'Asie pour y être fondus et utilisés à d'autres fins, ils représentent une grave menace pour la santé des travailleurs. En effet, l'air respiré à longueur de journée, six jours par semaine, par les travailleurs d'usine, dont la majorité sont des femmes, est un mélange d'additifs chimiques et de vapeurs très nocives produites par les composés organiques volatils.
J'ai visité l'intérieur de ces usines. Cette méthode de recyclage cause immanquablement de violents maux de tête en cinq minutes, et bien sûr, les effets à long terme sont bien pires.
Par conséquent, le projet de loi ne résout pas le plus grand problème d'envergure mondiale que et d'autres tentent de régler au moyen de cette mesure législative puisqu'il porte uniquement sur l'exportation à des fins d'élimination définitive, c'est-à-dire l'enfouissement ou l'incinération. La version actuelle du projet de loi ne s'attaque pas au fond du problème, à savoir l'exportation à des fins de recyclage.
C'est pourquoi il faudrait amender ce projet de loi bien intentionné, et la façon de le faire est claire. Les parties à la Convention de Bâle ont déjà convenu d'interdire l'exportation des déchets dangereux destinés au recyclage à partir des pays développés vers les pays en développement. Cette interdiction est prévue par le nouvel article 4A de la Convention.
Pour une raison quelconque, le Canada refuse de ratifier ce nouvel article, alors que tous les pays de l'Union européenne et 70 autres pays l'ont fait. Le Canada doit le ratifier. En même temps, il peut s'attaquer réellement au problème de l'exportation de déchets plastiques et d'ordures ménagères en suivant l'exemple de l'Union européenne, et en incluant les déchets inscrits à l'annexe II de la Convention de Bâle dans la liste des déchets dangereux, qu'il est interdit d'exporter vers des pays en développement. Les déchets plastiques figurent actuellement à l'annexe II.
En résumé, afin de corriger la position actuelle du Canada, nous faisons les recommandations qui suivent. D'abord, il faut amender le projet de loi actuel en y ajoutant, en plus de l'interdiction d'exporter des déchets plastiques destinés à l'élimination définitive vers tous les pays, l'interdiction d'exporter des déchets figurant à l'annexe II, c'est-à-dire les plastiques sales et mixtes...
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Je vous remercie, monsieur le président, mesdames et messieurs les membres du Comité. Je représente l'Association canadienne de l'industrie de la chimie. L'industrie canadienne de la chimie et des plastiques pèse 80 milliards de dollars. Elle se classe au troisième rang des industries les plus importantes du Canada. Nous exportons 80 % de tout ce que nous fabriquons. La question à l'étude n'est pas un problème canadien; c'est un problème mondial.
Je suis ravi d'être accompagné par ma collègue, Mme Elena Mantagaris. Elle m'aidera à répondre à vos questions.
Avant de vous présenter notre point de vue sur le projet de loi, je trouve important de mettre les choses en contexte.
Premièrement, il doit absolument être clair que, tout comme le Parlement et la société, notre industrie est d'avis que les déchets plastiques n'ont pas leur place dans l'environnement.
Deuxièmement, notre industrie reconnaît sa part de responsabilité et elle sait qu'elle doit jouer un rôle majeur dans la lutte contre ce problème. La solution réside d'abord et avant tout dans l'accélération du rythme de l'innovation pour créer une économie circulaire et dans la conception. Notre industrie s'est fixé des objectifs ambitieux en Amérique du Nord: d'ici 2030, tous les emballages en plastique devront être conçus pour être recyclables. Cette date butoir est dans moins de 10 ans.
Le troisième élément surprend souvent les gens. Il constitue une grande différence, par moments, entre le Canada et les États-Unis. Notre industrie soutient pleinement les programmes de responsabilité élargie des producteurs, comme celui qui a été mis en place en Colombie-Britannique. Dans le cadre de tels programmes, l'industrie assume à elle seule le financement et l'exploitation de systèmes de recyclage dans le but d'atteindre des objectifs de recyclage ambitieux à l'échelle de la province. Nous collaborons quotidiennement avec d'autres provinces et nous prévoyons que d'ici quelques années, 85 % de la population canadienne sera touchée par les programmes de responsabilité élargie des producteurs financés par l'industrie.
Enfin, notre industrie est convaincue qu'une économie circulaire pour les plastiques est non seulement envisageable, mais aussi réalisable, et ce, dans un avenir relativement proche. Nos clients l'exigent. C'est indéniable. Plusieurs initiatives de transformation sont nécessaires pour répondre aux exigences de nos clients.
Vous savez, on dit: « pour les petites industries, de petites solutions ». Or, notre industrie est de grande taille et d'envergure mondiale. La vraie solution consiste à renvoyer les matériaux récupérés aux installations de production de plastiques afin que les résines elles-mêmes contiennent des concentrations élevées de matières recyclées, peu importe les produits pour lesquels elles sont utilisées. Si 50 % du contenu de la résine est recyclé, alors 50 % du contenu du produit qu'elle servira à fabriquer sera recyclé. Voilà une solution à grande échelle.
Comme nous avons déjà remis au Comité une critique détaillée du projet de loi d'initiative parlementaire, je serai bref.
Je le répète, nous comprenons les intentions louables des parlementaires. Les Canadiens sont fâchés de voir des images de déchets plastiques mélangés, mal triés et contaminés envoyés à l'étranger pour être éliminés sans qu'il soit réaliste d'imaginer qu'ils seront recyclés ou transformés. Toutefois, nous sommes d'avis que le projet de loi n'est pas nécessaire pour régler ce problème. En effet, le projet de loi a été mis en œuvre avant que d'importants amendements soient apportés à la Convention de Bâle. Ces amendements sont maintenant en vigueur et ils ont été ratifiés par plus de 170 pays, y compris le Canada. Le travail se poursuit. De grands efforts sont déployés pour élaborer des lignes directrices portant sur les amendements, et le Canada joue un rôle de premier plan dans ce travail.
Le Comité devrait absolument tenir compte des lignes directrices qui accompagneront les amendements à la Convention de Bâle. Ces amendements interdisent le commerce des déchets plastiques dangereux et des plastiques post-consommation non dangereux qui ne sont pas destinés au recyclage sans consentement préalable en connaissance de cause.
À maints égards, le projet de loi répète inutilement ces exigences, tout en semant la confusion. Par exemple, la liste de déchets plastiques comprend l'éthylène, qui est une charge d'alimentation, et non un déchet plastique.
Par ailleurs, M. Davidson a donné une bonne définition de l'élimination définitive, mais ce terme n'est pas défini dans le projet de loi. La mesure ne prévoit pas non plus de mécanisme autorisant les mouvements continus de matières post-consommation, en particulier entre le Canada, les États-Unis et d'autres pays de l'OCDE.
La création d'une économie circulaire mondiale pour les plastiques post-consommation exige beaucoup de travail. La première étape est d'envisager ces matériaux comme des ressources économiques plutôt que comme des déchets. Nous savons ce que nous faisons avec les déchets: nous les envoyons au dépotoir. Nous savons aussi ce que nous faisons avec les ressources: nous les laissons traverser les frontières et circuler librement d'un territoire à l'autre. Il faut donc éliminer les entraves aux mouvements transfrontières des matières post-consommation, et non les renforcer, surtout entre les pays de l'OCDE et au sein du marché nord-américain fortement intégré. Pour favoriser la mise sur pied d'une économie circulaire à grande échelle, le Canada doit récupérer les matériaux qu'il exporte aux États-Unis sous la forme de produits.
Les efforts qui visent uniquement le Canada ne toucheront que les 20 % des plastiques produits au pays qui restent au pays. Je le répète, nous exportons 80 % des plastiques que nous fabriquons. Pour que nos installations produisent des résines contenant une concentration élevée de plastiques post-consommation, nous devons mettre en place un mécanisme nous permettant de récupérer nos plastiques. Rendre la frontière plus hermétique en empêchant le commerce des ressources que sont les plastiques post-consommation ne nous aidera pas à atteindre cet objectif.
Ce sont là nos observations, monsieur le président. Merci beaucoup.
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Je vous remercie, monsieur le président.
Je remercie les membres du Comité pour l'invitation. Les témoignages d'aujourd'hui ont mis en lumière les effets nocifs considérables des déchets plastiques sur l'environnement et la santé humaine, ainsi que le besoin de favoriser la création d'une économie circulaire pour les plastiques en vue de réduire la pollution causée par la production et la consommation de plastiques.
Malgré les répercussions dévastatrices de la pollution par les plastiques, le commerce mondial des déchets plastiques dépasse en grande partie la portée des règles internationales concernant le mouvement transfrontière des déchets dangereux et d'autres déchets problématiques sur le plan environnemental. Comme vous le savez, ces règles sont contenues dans la Convention de Bâle, un traité signé par 187 pays, dont le Canada. Comme le projet de loi , ce traité a été adopté dans le but de mettre un terme à l'expédition des déchets toxiques vers les pays en développement.
En vertu de la Convention de Bâle, les parties doivent obtenir le consentement éclairé préalable avant d'exporter, d'importer ou de transiter des déchets dangereux et d'autres déchets énoncés dans le traité, mais avant 2019, la Convention n'obligeait pas explicitement l'application de ce mécanisme de contrôle aux déchets plastiques solides. Toutefois, elle a été modifiée en mai 2019 dans le but d'améliorer la transparence et la reddition de comptes dans le secteur du commerce des déchets plastiques. Ces règles, appelées les amendements sur les déchets plastiques, sont entrées en vigueur le 1er janvier 2021. Le Canada a ratifié ces amendements en décembre dernier.
La ratification signifie que le Canada a l'obligation de veiller à ce que le mécanisme du consentement préalable soit appliqué aux déchets plastiques dangereux et non dangereux qui entrent au pays et qui en sortent, puisque ces déchets sont maintenant inscrits à l'annexe II de la Convention de Bâle, où figurent les catégories de déchets demandant un examen spécial.
Les catégories de déchets demandant un examen spécial comprennent les types de déchets plastiques mixtes et contaminés qui ont été expédiés par le Canada et saisis aux Philippines et en Malaisie dans des cas récents d'exportations de déchets largement médiatisés. Le 9 novembre 2019, une cargaison semblable de déchets plastiques mixtes en provenance du Canada et destinée pour l'Inde a été saisie au port d'Anvers, en Belgique.
C'est précisément en raison d'incidents comme ceux-là que les parties à la Convention de Bâle, dont le Canada, ont décidé de renforcer le régime réglementaire de surveillance du commerce des déchets plastiques. C'est aussi en raison de ces incidents que nous étudions aujourd'hui le projet de loi . Le tableau que nous avons fourni au Comité comme document de référence explique les nouvelles obligations du Canada aux termes de la Convention de Bâle et l'état actuel de leur mise en œuvre. Les seules catégories de déchets plastiques que le Canada peut exporter sans préavis et sans consentement préalable sont les catégories de déchets plastiques non dangereux prévues à l'annexe IX de la Convention. De plus, en tant que membre de l'OCDE, le Canada a aussi des obligations en vertu de la décision du Conseil de l'OCDE régissant le commerce des déchets entre les membres de l'OCDE.
Bien que la Convention de Bâle et la décision du Conseil de l'OCDE obligent toutes les deux le Canada à soumettre la majorité des transferts de déchets plastiques mixtes à des contrôles environnementaux plus rigoureux, le Canada n'a toujours pas adopté de loi fédérale mettant en œuvre ces exigences juridiques. D'autres pays sont en avance sur nous. Par exemple, l'Union européenne a intégré les amendements sur les déchets plastiques de la Convention de Bâle à son règlement concernant les transferts de déchets en octobre dernier. Le projet de loi est un pas dans la bonne direction vers la mise en œuvre des obligations du Canada aux termes de la Convention de Bâle. Toutefois, pour qu'il atteigne son objectif et pour qu'il soit conforme aux amendements de la Convention, il faut le renforcer. L'interdiction d'exporter des déchets dangereux destinés à l'élimination définitive sera difficile à appliquer, car les déchets ne sont pas étiquetés de cette façon, et nous savons que le problème est dû au fait que les déchets sont faussement identifiés comme figurant sur la liste verte des déchets.
Afin que les déchets plastiques canadiens cessent de se retrouver dans l'environnement ailleurs dans le monde, le projet de loi doit refléter le libellé des amendements sur les déchets plastiques de la Convention de Bâle. Par ailleurs, pour favoriser la mise sur pied d'une économie circulaire pour les plastiques, les déchets plastiques non dangereux inscrits à l'annexe XI de la Convention de Bâle doivent continuer d'être échangés librement, tandis que le commerce des déchets plastiques considérés comme dangereux ou demandant un examen spécial en vertu de la Convention de Bâle doit être assujetti à l'article 185 de la LCPE.
Le Canada doit adopter une loi sur les exportations de déchets plastiques. Une entente signée entre le Canada et les États-Unis avant que le Canada ne ratifie les amendements sur les déchets plastiques soulève de grandes préoccupations quant à la possibilité que des déchets plastiques canadiens exportés aux États-Unis soient expédiés dans des pays en développement à des fins d'élimination définitive. Afin d'interdire de manière efficace l'expédition des déchets plastiques canadiens vers les pays en développement, le Canada doit ratifier l'amendement d'interdiction de la Convention de Bâle, limitant ainsi l'exportation de tout déchet dangereux vers les pays non membres de l'OCDE. Par ailleurs, le projet de loi doit mettre en œuvre l'amendement d'interdiction conformément aux pratiques exemplaires internationales. Pour ce faire, il faut amender le projet de loi de sorte d'interdire explicitement l'exportation de tout déchet plastique vers les pays non membres de l'OCDE, à l'exception des déchets plastiques non dangereux inscrits à l'annexe IX de la Convention de Bâle.
Il est essentiel que le Canada améliore les choses sur le plan de la reddition de comptes pour les exportations de déchets plastiques, notamment en raison du volume important de ses échanges commerciaux avec les États-Unis, s'il veut que sa loi nationale soit conforme à ses nouvelles obligations internationales.
Merci.
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Bonjour. Je vous remercie de me donner l'occasion de participer à la séance d'aujourd'hui.
Le projet de loi met en évidence une conséquence importante des déchets, à savoir le problème de plus en plus grand que représentent les déchets plastiques en particulier. Comme on l'a souligné, selon les estimations, plus de 90 % des déchets plastiques du Canada finissent par être éliminés, ce qui a des répercussions économiques, environnementales et sociales importantes. Bien que le projet de loi fait ressortir l'aspect international des déchets plastiques et la responsabilité du Canada, interdire simplement l'exportation de ces déchets ne règle pas le fond du problème.
Certains déchets plastiques sont des produits utiles. Leur utilisation pour remplacer des matières vierges dans la production de nouveaux produits s'accompagne d'importants gains sur les plans économique, environnemental et social. Toutefois, certains marchés étrangers dont nous sommes devenus dépendants ont des normes environnementales, sanitaires et de sécurité peu élevées.
Dans le monde du recyclage, tous les plastiques ne sont pas égaux. La demande, l'offre et la valeur des produits varient considérablement selon les différents types de résine. Malgré ces différences, les plastiques sont souvent gérés comme un tout homogène afin de rendre leur collecte simple et rentable. Par conséquent, les exportations de plastiques sont souvent mélangées, c'est-à-dire qu'elles combinent plusieurs types de résine plastique qui sont négociés entre les vendeurs et les acheteurs sous forme de balles ou de chargements. Les plastiques moins recherchés et de faible qualité sont mélangés et vendus avec des résines de valeur que l'on finit par trier pour le recyclage. Les plastiques non désirés sont ensuite éliminés. Ainsi, ce que nous pensons avoir été exporté pour le recyclage peut, en partie, se retrouver dans des sites d'enfouissement.
La demande mondiale de déchets plastiques a changé de façon spectaculaire ces dernières années et, par conséquent, le mouvement de ces déchets aussi. La Chine et plusieurs autres pays d'Asie du Sud-Est limitent leurs achats et contrôlent l'entrée de certains types de plastiques. En outre, des normes rigoureuses relatives à la contamination sont appliquées, ce qui pousse les services de ramassage des déchets canadiens, tant municipaux que privés, à améliorer considérablement le tri à la source des matières. Ces nouvelles restrictions ont déstabilisé les marchés: certains services de ramassage sont contraints d'enfouir les déchets et d'autres, de payer pour l'entreposage en attendant que les restrictions s'assouplissent et que les marchés se rétablissent.
Tout au long de ces perturbations des marchés, les analystes, les décideurs politiques et les opérateurs locaux se sont employés à chercher de l'information afin de mesurer les répercussions et d'explorer les solutions. Il en ressort qu'un obstacle majeur à la réduction des déchets plastiques et à l'amélioration des conditions du marché, c'est le manque général de renseignements sur le marché et de données fiables. En l'absence d'une exigence réglementaire sur le suivi des déchets plastiques, de leur production à leur élimination finale, il est tout simplement impossible de comprendre pleinement les pertes économiques et environnementales liées aux marchés de l'élimination des déchets ou du recyclage, à l'échelle locale ou internationale.
Il faut mettre un terme à la pratique consistant à envoyer des matières plastiques dans d'autres pays sans en faire rapport et sans prendre de mesures de contrôle au chapitre de la gestion. Il est essentiel que nous devenions pleinement responsables de nos déchets plastiques, et pour ce faire, il faut tout d'abord comprendre leur parcours du point d'origine à la destination finale, à l'échelle locale et mondiale.
Je recommande que l'on modifie le projet de loi afin d'y inclure des exigences en matière de rapport pour suivre les matières entre les producteurs, les entreprises de collecte et les transformateurs locaux et étrangers. Cette information, centralisée et accessible, fournira des informations essentielles pour l'élaboration de politiques, l'obtention de renseignements sur le marché et l'industrie, et la sensibilisation du public.
De meilleures données nous permettront d'avoir une meilleure idée de la quantité totale combinée de déchets plastiques qui est générée et des types de résine. Elles nous permettront de déterminer, en ce qui concerne la résine ou le produit, quels déchets sont collectés de la meilleure façon et sont véritablement recyclés, et lesquels sont envoyés à la décharge ou se retrouvent dans l'environnement.
De meilleures données permettront aux décideurs de déterminer quelles matières plastiques se retrouvent fréquemment dans les flux de déchets et quelles approches réglementaires il est approprié et nécessaire d'adopter, telles que l'interdiction de vente, l'interdiction d'élimination, la responsabilité élargie du producteur et d'autres approches de stimulation du marché, comme l'obligation que le produit contienne une certaine quantité de matières recyclées ou l'inclusion de plastiques dans les spécifications d'approvisionnement.
De meilleures données nous permettront d'obtenir plus de renseignements et d'améliorer les conditions pour attirer des investissements afin de développer notre industrie nationale du recyclage et de lui permettre de prospérer. Elles permettront aux détenteurs de marques et aux fabricants de mieux connaître le marché et d'optimiser l'utilisation de matières recyclées post-consommation dans la conception de produits, ce qui stimulera la demande et augmentera la valeur matérielle des plastiques qui, autrement, se perdent et sont éliminés.
En conclusion, s'il est essentiel de prendre en compte tous les déchets, et les plastiques en particulier, le simple fait d'interdire l'exportation des déchets ne permet pas de s'attaquer efficacement à l'ensemble des conséquences environnementales ou aux pertes économiques liées à l'élimination. Les déchets plastiques sont à leur apogée et leur instabilité chronique sur le marché nécessite l'adoption d'une approche stratégique à plusieurs volets qui se fonde sur des données de qualité qui sont constamment surveillées et évaluées.
Merci.
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Merci, monsieur le président.
Je tiens à remercier tous nos invités de leurs témoignages. Évidemment, il y a beaucoup de choses à discuter en très peu de temps et je vous demanderai donc de comprendre que je ne peux pas poser des questions à tout le monde. Ensuite, veuillez répondre de votre mieux et le plus brièvement possible.
Je vais commencer par Mme Khan, de la Fondation David Suzuki.
Essentiellement, si nous excluons les pays de l'OCDE, ce qui inclurait les États-Unis, le Parlement ne créerait-il pas une échappatoire qui permettrait au Canada d'envoyer des déchets dans des pays comme les États-Unis, ce qui ferait en sorte que les Américains pourraient les expédier vers des pays en développement?
Le problème que me pose cette échappatoire est d'ordre pratique. Une fois que le plastique destiné au recyclage quitte nos frontières, notre vue d'ensemble devient vraiment moins claire et nous devons essentiellement compter là-dessus. Si je suis quelqu'un dans ce domaine, je vais m'adresser aux clients qui sont les plus près et les plus importants ou aux personnes qui pourraient peut-être utiliser cela à leurs propres fins. Ce serait les États-Unis. Je ne peux imaginer qu'on expédierait certains de ces produits dans d'autres pays si les États-Unis sont si près.
Selon le New York Times, les expéditions de déchets en provenance des États-Unis n'ont pas diminué, car ce pays n'est pas partie à la Convention de Bâle, et rien ne l'empêche d'expédier ce qu'il veut, même si le traité stipule que d'autres pays ne sont pas censés l'accepter.
Cela ne prouve-t-il pas que nous devons faire très attention à ce que nous envoyons aux États-Unis
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Merci beaucoup, monsieur le président. J'aimerais remercier tous nos témoins de leur présence. La réduction des déchets plastiques est une question très importante pour les gens de ma circonscription, celle de Vaudreuil—Soulanges, et je vous remercie d'offrir votre expertise dans le cadre de cette discussion.
Monsieur Puckett, j'aimerais commencer par vous.
Vous avez dit que le projet de loi est axé sur la question des déchets plastiques exportés pour leur élimination définitive, mais qu'on y laisse grandement de côté la question des plastiques destinés au recyclage, ce que de nombreux intervenants de partout au Canada ont signalé comme étant un grave problème. Par conséquent, le projet de loi ne porterait pas sur les déchets plastiques qui sont exportés pour être recyclés, mais plutôt sur ceux qui sont envoyés dans des pays qui ne sont pas en mesure de recycler de façon efficace les déchets plastiques mixtes ou contaminés.
Pouvez-vous expliquer pourquoi il s'agit d'une énorme omission et dans quelle mesure le projet de loi ne s'attaque pas au « fond du problème », comme vous le dites, à savoir l'exportation à des fins de recyclage?
C'est exactement cela. Le grand problème que tout le monde a relevé, c'est ce qui se passe dans les pays en développement au nom du recyclage. Le recyclage qui a lieu est incomplet et très polluant. Il est très facile pour les gens de dire qu'ils envoient les déchets plastiques dans les pays pauvres parce qu'ils en feront le recyclage pour nous. Le fait est qu'il s'agit de recyclage très polluant et toxique. Comme c'est le cas dans toute industrie, le recyclage peut être bon ou mauvais.
Je pense qu'au Canada, nous devons faire la même chose que l'Union européenne. Elle a adopté l'amendement d'interdiction de la Convention de Bâle, qui est un amendement distinct visant à interdire l'exportation de déchets dangereux vers des pays en développement, point final, c'est-à-dire vers des pays qui ne sont pas membres de l'OCDE; mais l'Union européenne a déclaré qu'elle allait également ajouter les déchets inscrits à l'annexe II à la liste et à cette interdiction. L'annexe II comprend les déchets ménagers et ces nouveaux déchets plastiques qui sont sales et mixtes. Nous pensons que le projet de loi de M. Davidson peut être laissé tel en ce qui concerne l'interdiction d'exporter quoi que ce soit pour l'élimination définitive, mais ajoutons-y l'interdiction des exportations destinées au recyclage vers des pays en développement. Je pense que cet amendement le couvre.
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Je vous remercie de la question.
Je reviendrai sur ce que M. Puckett a dit sur le bon et le mauvais recyclage.
Tout d'abord, je pense que l'idée ici est d'accroître la transparence quant à ce que nous ramassons et envoyons à l'étranger, et c'est certainement similaire à ce que nous devrions faire à l'intérieur de nos frontières également. Comme je l'ai mentionné dans mon exposé, sous le couvert du recyclage, toutes les matières recyclables ne sont pas, en fait, recyclées. Nous avons besoin d'un mécanisme assurant la traçabilité, de la production jusqu'à l'élimination définitive. Une interdiction pure et simple de l'exportation ne va pas vraiment au cœur du problème, c'est-à-dire que peu importe ce que nous produisons, la façon dont nous le produisons ou l'endroit où c'est géré, nous devons avoir une vue d'ensemble de ce que c'est pour garantir que les matières sont gérées jusqu'à l'utilisation finale et selon des mesures de protection de la santé humaine très rigoureuses.
Au-delà de cela, nous devons commencer à créer une demande. La quantité de matières générées est bien supérieure à nos capacités de recyclage. Nous devons créer les types de demandes qui créent de la valeur, et en fait nous pouvons essayer de construire l'industrie du recyclage ici même dans notre pays. Nous avons le pouvoir de le faire par la spécification de produit et les marchés publics, toutes ces activités qui font augmenter la quantité de matières recyclées dans les produits et les emballages que nous créons. Cela peut en fait hausser la valeur des plastiques et, ce faisant, augmenter le recyclage ici au pays.
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Merci, madame St. Godard.
Ma dernière question s'adresse à M. Masterson.
Je vous remercie de votre présence.
Notre gouvernement libéral a rencontré des intervenants partout au Canada pour qu'ils lui parlent des meilleurs moyens de réduire les déchets plastiques et les exportations de déchets plastiques. Votre organisation, comme beaucoup d'autres, a soulevé de sérieuses inquiétudes quant aux aspects techniques du projet de loi et aux difficultés de le mettre en application dans sa forme actuelle.
Pouvez-vous nous dire, d'un point de vue pratique, à quels égards l'industrie aurait peut-être de la difficulté à appliquer le projet de loi et il lui coûterait cher de le faire? Puisque nous sommes ici pour essayer d'améliorer cette mesure législative, avez-vous des suggestions sur la façon dont il pourrait être amélioré pour aider l'industrie?
M. Bob Masterson: Voilà beaucoup de choses à couvrir en très peu de temps.
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J'ai quelques messages clés à vous rappeler.
Il s'agit d'un problème très complexe que l'on ne va certes pas régler avec un projet de loi proposant une réponse en une seule phrase. La principale préoccupation vient du fait que l'on ne cerne pas et que l'on ne définit pas le concept d'« élimination définitive ». Il faut absolument corriger cette lacune.
Les solutions doivent passer par la responsabilité élargie des producteurs. J'espère que vous pourrez demander à ma collègue, Mme Mantagaris, de vous en dire plus long au sujet de cette notion et des marchés qui ont été créés pour les matières recyclées en Colombie-Britannique.
Quant au problème que nous avons au Canada, il suffit de regarder comment les choses se passent en Ontario où il y a quelque 256 marchés différents pour les matières recyclées, plutôt qu'un seul.
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D'accord. Tenez compte de l'interprétation, s'il vous plaît.
Je joins ma voix à celle de mes collègues pour remercier tous les témoins de leur présence.
Ma question s'adresse à M. Masterson.
On sait que l'exportation des différents plastiques vers la Chine a beaucoup diminué depuis 2018. Pendant ce temps-là, la part envoyée aux États-Unis a augmenté. Ces derniers n'ont pas signé la Convention de Bâle.
Pourquoi dites-vous que le projet de loi empêcherait la collaboration avec les États-Unis, alors que la réalité démontre que le partenariat a abondamment été utilisé?
Je vous demanderais de me répondre rapidement, puisque j'ai à peine deux minutes et demie.
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Excusez-moi. Je dois malheureusement vous interrompre.
Vous avez dit tantôt qu'il va y avoir des modifications, mais que vous visez 2030. Or, lors d'un colloque en 2019, le président de Dow Chemical prétendait qu'il n'y avait pas assez de demandes pour le plastique recyclé pour que ce soit viable. Or, il existe une filière scientifique qui développe les bioplastiques compostables; il s'agit de Bosk Bioproduits au Québec et d'Advanced BioCarbon 3D en Colombie-Britannique. C'est un marché prometteur, mais vous reportez cela en 2030.
J'aimerais rappeler aussi qu'il y a un plan d'action pour la mise en œuvre d'une économique circulaire. C'est déjà en place à la Commission européenne. Il y a un centre québécois d'expertise qui offre déjà des services-conseils et des solutions sur cette question à des gouvernements à des entreprises. À mon avis, 2030, c'est beaucoup trop loin. Il y a moyen d'agir maintenant.
Pourquoi pas?
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Nous agissons d'ores et déjà. Nous avons le plan d'action du Conseil canadien des ministres de l'environnement pour en finir avec les déchets plastiques. Tous ces éléments doivent être mis de l'avant et pris en considération.
Comme l'indiquait M. Albas, nous avons maintenant un programme complet de responsabilisation des producteurs en Colombie-Britannique. Dans cette province, près de la moitié des déchets plastiques générés sont récupérés et réutilisés. En moyenne, c'est cinq fois mieux que dans le reste du pays.
L'Ontario, l'Alberta et le Québec ont tous modernisé leurs programmes de recyclage pour passer à des systèmes harmonisés fondés sur un régime de responsabilité élargie des producteurs totalement financé par l'industrie. On peut dire que la Colombie-Britannique a essentiellement un système provincial unique pour le recyclage.
En Ontario seulement, nous avons 256 systèmes différents. On ne pourra pas parvenir à nos fins avec 256 systèmes différents...
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Merci pour la question. C'est un enjeu qui nous préoccupe beaucoup également. Nous n'avons été mis au courant que très tard. Nous n'avons pas été consultés à titre de partie prenante. Les groupes environnementaux au Canada ne l'ont pas été non plus.
L'accord bilatéral conclu avec les États-Unis permet essentiellement au Canada de ne pas tenir compte de ses obligations découlant de la Convention de Bâle. On a tout simplement laissé de côté les amendements établissant une nouvelle liste de plastiques pour le suivi et le contrôle en toute transparence des déchets plastiques mixtes et contaminés qui sont plus difficiles à recycler. Les deux pays se sont dit qu'ils allaient conclure cet accord pour maintenir le statu quo et pouvoir ainsi continuer leurs échanges en évitant les mesures de contrôle et de transparence. Nous jugeons la situation d'autant plus préoccupante que les États-Unis sont un grand exportateur de toutes sortes de matières problématiques vers les pays en développement, et qu'il est très facile pour une entité canadienne de faire passer simplement ses déchets par les États-Unis pour éviter d'avoir à se conformer aux obligations que lui impose la Convention de Bâle.
L'accord lui-même a fait l'objet de vives critiques. Les pays qui sont parties à la Convention de Bâle peuvent conclure des ententes bilatérales distinctes, mais celles-ci doivent offrir le même niveau de contrôle et la même rigueur environnementale que la convention elle-même. On ne peut certes pas parler d'un niveau de contrôle équivalent lorsqu'on décide de faire carrément fi des nouvelles listes établies.
Cela nous apparaît de prime abord illégal, mais c'est aussi très problématique du fait que l'Amérique du Nord contribue ainsi à la contamination de pays en développement.
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Merci, monsieur le président, et merci à tous nos témoins.
Je veux d'abord m'adresser moi aussi à M. Puckett.
La Convention de Bâle a été mise en oeuvre alors qu'un gouvernement conservateur était au pouvoir au tournant des années 1990. Elle est bien sûr toujours en vigueur, mais il y a tout de même eu quelques problèmes. Tout le monde se souvient de la situation en Malaisie et de quelques autres cas qui ont été mentionnés. Les déchets plastiques canadiens à l'étranger ont fait beaucoup de bruit.
Vous avez indiqué que les libéraux ont essentiellement fait fi de ce problème dans l'accord conclu avec les États-Unis, et Mme Khan a parlé de la réglementation américaine sur l'expédition de déchets. Est-ce que le fait que nous éprouvons encore des problèmes démontre la nécessité d'adopter une nouvelle loi, comme le projet de loi , afin que de telles choses ne puissent pas se reproduire à l'avenir?
Peut-être pourrions-nous présenter la situation autrement en permettant l'exportation de matières propres déjà triées. Ce serait une bonne chose.
Monsieur Masterson, je tiens à vous remercier pour notre rencontre du mois dernier. J'ai ainsi pu en apprendre beaucoup sur ce dossier. Je me souviens que nous avons comparé le programme de recyclage mis en œuvre dans l'ensemble de la Colombie-Britannique à ce qui se fait dans des provinces plus petites. La situation est sans doute différente dans ma ville de Saskatoon. Nous n'avons tout simplement pas la même capacité de nettoyage et de tri des matières.
Voilà que les conservateurs reviennent à la charge pour donner plus de mordant à l'application de la Convention de Bâle au Canada. Je peux comprendre les inquiétudes de l'industrie, mais n'a-t-on pas besoin de mesures législatives plus rigoureuses pour favoriser le développement dans notre pays d'une économie circulaire plus forte et plus efficace?
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Tout à fait, et bien d'autres efforts sont déjà déployés à cette fin dans le cadre du plan d'action du Conseil canadien des ministres de l'Environnement pour en finir avec les déchets plastiques.
J'ai encore un peu l'impression de naviguer à contre-courant. Je suis d'accord avec mes collègues lorsqu'ils disent qu'il faut éviter l'expédition de matières non triées à des fins d'élimination, mais il n'en demeure pas moins que vous tentez de régler un problème complexe avec un simple énoncé: « Il est interdit d'exporter des déchets plastiques — et on en fournit une liste incomplète — « destinés à l'élimination définitive », un concept que vous n'avez pas défini. Je répète qu'il serait très bénéfique que l'on puisse préciser le tout à l'issue d'un vaste processus de consultation.
Par ailleurs, je ne souscris pas à l'idée que l'accord Canada-États-Unis puisse servir en quelque sorte d'échappatoire. L'article 11 de la Convention de Bâle autorise expressément la conclusion d'accords semblables, et il existe un traité de mise en œuvre de cette convention liant le Canada et les États-Unis depuis 1986. Il est donc un peu trompeur de prétendre que cet accord puisse être en partie responsable de ce qui arrive.
Selon moi, il faut d'abord et avant tout rédiger ce projet de loi de manière à ce qu'il permette l'atteinte des objectifs établis tout en n'entravant pas la circulation des matières plastiques utilisées comme ressources. Les activités de récupération entre le Canada et les États-Unis sont un élément clé de ce processus.
On devra prendre toutes les précautions nécessaires et il faudra bien plus qu'un libellé d'une seule ligne dans une loi nationale pour atteindre ces objectifs, malheureusement...
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Merci pour la question.
Je crois qu'il y a deux axes de réponse possibles. Il faut dans un premier temps que la définition du concept d'élimination définitive soit bien claire. Il est impératif de bien comprendre que, même lorsque nous expédions des matières qui sont censées être recyclables, le consentement préalable éclairé ne signifie pas que les matières effectivement reçues sont bel et bien recyclées. Il ne s'agit pas seulement d'obtenir le consentement préalable. Il faut assurer un suivi des matières en question pour s'assurer qu'elles sont effectivement recyclées.
Je veux juste souligner que nous atteignons parfois de 30 à 35 % de rejets résiduels parmi les matières que nous traitons ici même au Canada. Ainsi, 35 % des matières traitées dans une installation canadienne peuvent aboutir dans un site d'enfouissement. On ne va pas régler ce problème en interdisant les exportations de matières destinées à une élimination définitive comme le propose ce projet de loi.
Je sais que nous n'utilisons pas toute la capacité que nous offre l'infrastructure de recyclage en place au Canada et que les exportations vers d'autres pays empêchent en fait l'industrie... En tout cas, cette pratique n'a assurément pas pour effet de stimuler les investissements en sol canadien pour accroître la capacité de recyclage et permettre à l'industrie de prendre de l'expansion au pays. J'estime qu'une plus grande transparence s'impose pour savoir comment et à quel endroit ces matières sont générées et où elles sont traitées au pays, et pour pouvoir suivre leur parcours d'exportation jusqu'à l'élimination définitive.
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D'accord. Il est donc possible que non.
Je vais me tourner vers Mme Khan pour les deux minutes qu'il me reste.
Je veux revenir à ce que j’ai pu entendre de la bouche de différents témoins aujourd’hui. Il s’agit du fait que le problème que nous tentons de régler, tout au moins de la manière dont M. Davidson l’a articulé, est lié à la façon dont les déchets plastiques sont éliminés une fois rendus à destination. Vous avez été nombreux à faire valoir, comme l'a fait Mme St. Godard il y a un moment à peine, qu'il nous faut de la transparence, une visibilité directe et de la reddition de comptes — pour reprendre certains des termes que vous avez vous-même utilisés — afin de nous assurer que ces matières sont adéquatement éliminées ou recyclées, selon le cas.
Madame Khan, est-ce qu'à votre point de vue ou au point de vue de la Fondation David Suzuki, la solution à ce problème réside dans la mise en œuvre de la Convention de Bâle? Est-ce essentiellement ce que vous essayez de nous dire?
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Je vous dis essentiellement que la Convention de Bâle représente la norme juridique la plus élevée à l'échelle internationale — mais aussi la norme minimale à suivre — pour ce qui est des mouvements transfrontières de déchets dangereux et de certains autres déchets.
Les déchets plastiques ont récemment été ajoutés à ce cadre parmi les déchets devant être contrôlés grâce au mécanisme du consentement éclairé préalable. Cela ne veut pas dire que le commerce des déchets plastiques a été interdit à l'échelle planétaire. De fait, il n'y a aucune interdiction en vigueur. C'est simplement une façon de faire visant la transparence et permettant de s'assurer qu'une chaîne de responsabilité a été mise en place. Je crois donc que le Canada doit redoubler d'efforts pour respecter les obligations qui lui incombent en vertu de la Convention de Bâle.
Le Canada a ratifié cette convention avec un objectif bien précis en tête. Au départ, au mois de mars, le Canada a indiqué qu'il n'allait pas accepter les amendements concernant les déchets plastiques. En pareil cas, l'accord conclu avec les États-Unis n'aurait pas posé problème, car il n'aurait pas été nécessaire d'assurer un contrôle des déchets inscrits dans la liste Y48 de l'annexe II au moyen du mécanisme du consentement éclairé préalable. Le Canada est toutefois revenu sur sa décision en décembre pour accepter et ratifier officiellement ces amendements.
L'Union européenne a déjà intégré ces amendements à ses lois. Tous les échanges de matières plastiques mixtes et contaminées entre l'Union européenne et le Canada sont assujettis aux mécanismes de contrôle via le consentement éclairé préalable et doivent être en fait soumis à une procédure d'avis et consentement.
Nous aimerions voir le Canada respecter la norme minimale internationale pour l'exportation de déchets plastiques et se conformer à ses obligations en la matière.
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Encore là, il faut mettre les choses en perspective. Nous voulons résoudre un problème qui représente bien moins de 5 % des exportations de déchets du Canada ou de l'Amérique du Nord, et la partie non recyclée de ces déchets est encore plus petite. Je ne minimise pas les problèmes environnementaux qu'ils posent, mais je pense que le Comité ferait meilleur usage de son temps, compte tenu du défi qui se dresse devant nous et de la possibilité de créer une économie circulaire pour les déchets plastiques, en se concentrant sur les solutions aux problèmes, plutôt qu'en s'inquiétant pour ces maigres 1 ou 2 %.
Comme je l'ai déjà mentionné, il s'agit d'une économie très intégrée, et l'innovation… Le recyclage n'est pas chose fixe. Ce n'est pas une solution unique. Il y a beaucoup de solutions différentes, comme d'autres témoins l'ont dit aussi, et il y en a constamment de nouvelles.
L'une des grandes préoccupations de notre industrie, c'est la mise au point de technologies adaptées pour retransformer ces matières en résines. Chaque fois que nous discutons de recyclage chimique ou de la transformation de ces matières en combustibles raffinés, bon nombre de nos détracteurs affirment qu'il ne s'agit pas de recyclage. Les gens de notre industrie proposent toutes sortes de nouvelles solutions pour régler les problèmes, mais se font dire à répétition qu'il ne s'agit pas de recyclage.
Vous comprendrez tout de suite pourquoi nous réagissons si fortement au fait que le projet de loi ne définisse pas le « recyclage » ou l'« élimination définitive ». Il y aura de nombreuses innovations dans notre secteur au cours des 10 prochaines années, et comme Mme Pauzé le disait, nous ne savons pas ce qui va se passer. Nous savons qu'il devra y avoir toutes sortes de solutions, mais nous ne les avons pas encore dans l'œil de mire. Il faut donc être vigilants pour que les textes législatifs aient toute la souplesse nécessaire pour permettre les solutions futures pour récupérer de la valeur ou ajouter de la valeur aux déchets, un enjeu qui sera très important au cours des prochaines années.
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Il y a trois grands éléments.
Premièrement, il y a l'élargissement des lois sur la responsabilité des producteurs, afin de redonner la responsabilité financière et tangible du recyclage aux acteurs de la chaîne qui exercent la plus grande influence, c'est-à-dire aux fabricants, aux propriétaires de marques, aux concepteurs et aux vendeurs. Cependant, nous ne pouvons nous y attaquer que dans le contexte canadien, pour des catégories de produits limitées, comme les plastiques entrant dans la conception d'appareils électroniques.
Quand on pense aux plastiques, on pense souvent seulement à l'emballage, qui ne représente que 30 % des plastiques vendus sur le marché, selon les données à notre disposition. L'élargissement de la responsabilité des producteurs a amélioré beaucoup les choses dans certaines catégories de produits très étroites, comme les appareils électroniques et les emballages, mais il y a toutes sortes de produits plastiques sur le marché qui ne sont toujours pas visés par cette responsabilité élargie.
Ensuite, il faut réduire le plus possible et même éliminer les plastiques à usage unique. Nous savons que les produits à usage unique n'ont aucune viabilité, d'un point de vue environnemental ou économique.
Enfin, le gouvernement, en particulier, devrait utiliser son pouvoir d'achat pour créer de la demande pour certaines propriétés de recyclage après consommation.
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Merci, monsieur le président.
Compte tenu de certaines questions que j'ai entendues, j'aimerais rappeler que la gestion des matières résiduelles est aussi une compétence provinciale.
Monsieur Puckett, j'ai une question à vous poser. Comme j'aurai également une deuxième question et que j'ai peu de temps, j'aimerais que vous répondiez rapidement.
D'après vous et selon toute l'expérience que vous possédez dans le domaine environnemental, quels seraient les dommages pour l'environnement et la santé humaine en cas d'augmentation soudaine de la demande de gestion et d'élimination des déchets plastiques ici, au Canada?
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C'est une question très importante. La véritable solution, c'est de créer moins de déchets plastiques, comme Mme St. Godard le disait. Il faut arrêter de produire des plastiques à usage unique.
Le recyclage ne pourra pas à lui seul nous sortir de la crise des déchets plastiques. Cela ne fait aucun doute. Les technologies de recyclage ne suffisent pas. Si on finit par les incinérer, par en faire des combustibles, on ne peut qu'exacerber exponentiellement le problème environnemental.
Il ne faut pas chercher de nouveaux endroits pour les cacher dans le monde. La véritable solution consiste à freiner le problème à la source, à fermer le robinet, à réparer les dégâts et à arrêter véritablement de créer autant de déchets plastiques. C'est la véritable solution.
Nous félicitons le Canada d'être un chef de file en la matière, à l'instar de l'Union européenne.
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Je vous remercie, monsieur Puckett. Vous rejoignez beaucoup ce que je pense, à savoir qu'il faut commencer par réduire nos déchets avant de les recycler ou de les récupérer.
Je me tourne maintenant vers M. Masterson.
J'aimerais que vous nous fournissiez des précisions sur une annonce qu'il y a eu en Alberta en 2020. On parlait d'un programme de diversification du secteur pétrogazier afin de stimuler les investissements dans l'industrie. La compagnie Dow, qui est un de vos membres, et d'autres applaudissent ce programme, qui s'appelle « Natural Gas Vision and Strategy ».
Pouvez-vous énumérer les mesures que vos membres et vous-même, comme association, allez adopter pour inciter votre secteur à prendre un virage vert?
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Il y a deux éléments clés. L'un est la réglementation, comme Mme St. Godard vient de le dire. Les objectifs sont réglementés et ils doivent être atteints, et ils sont rehaussés en ce moment même.
Le second est l'harmonisation. L'un des défis en Ontario — vous me l'avez déjà entendu dire — est qu'il y a 256 programmes différents. Aucune partie de la discussion d'aujourd'hui n'est revenue sur les municipalités. Lorsque nous pensons à ces balles mélangées et à ce qu'il faut en faire, l'industrie du recyclage — les Merlin et autres — et les transporteurs de déchets ont leur mot à dire, mais dans la plupart des régions du Canada, la majeure partie de ce travail relève de la responsabilité des administrations municipales, qui n'ont tout simplement pas...
Les petites villes ne peuvent pas traiter tous les plastiques qu'elles ont, alors que font-elles? Elles les mettent en balles mélangées. Elles essaient toutes de s'adresser aux mêmes personnes, mais il n'y a pas de marché pour ces plastiques, alors soit elles les jettent dans leurs propres décharges, soit elles les donnent à quelqu'un d'autre pour qu'il s'en débarrasse. Ce n'est pas un problème facile.
Ce que la Colombie-Britannique permet, c'est que vos couvercles de tasse à café soient recueillis à l'échelle d'une province de plusieurs millions d'habitants. Vous pouvez maintenant trouver un marché pour vos couvercles de tasse à café usagés, c'est certain.
Des objectifs réglementés au titre du Programme de responsabilité élargie des producteurs et un système harmonisé sont des ingrédients clés pour réussir. Comme l'a dit Mme St. Godard, si l'Ontario ne les met pas en place, il ne réussira pas.
Vous vous êtes arrêté à un bel endroit, monsieur Masterson.
Je faisais partie d'un comité d'examen de la gestion des déchets à la Ville de Guelph. Nous nous sommes penchés sur des projets comme celui de Partners in Project Green à l'aéroport Pearson, où on a créé une zone éco-industrielle. À l'échelon municipal, nous essayions d'augmenter notre taux de détournement des sites d'enfouissement. Nous avons atteint un taux de détournement de 68 %.
Une grande partie de ce processus dépend des municipalités locales, et la façon dont nous les soutenons par voie législative est vraiment importante. J'aimerais que vous nous disiez comment il s'accorde avec ce type de projet de loi d'initiative parlementaire d'une ligne qui pourrait finir par dire aux municipalités qu'elles doivent maintenant accepter tous ces déchets qu'elles expédiaient aux États-Unis.
Je remercie les membres du Comité, dont les questions ont permis de faire ressortir beaucoup d'informations sur le sujet.
Je remercie les témoins d'avoir partagé leurs connaissances avec le Comité. C'était une discussion extrêmement intéressante. J'ai pu moi-même combler plusieurs lacunes dans ma compréhension du sujet. Je les remercie de s'être rendus disponibles et je les invite à se déconnecter s'ils le veulent.
Il me reste à faire quelques annonces aux membres du Comité.
Mercredi, nous poursuivrons notre étude de ce projet de loi. En première partie, nous recevrons des représentants d'Environnement et Changement climatique Canada et d'Affaires mondiales Canada. Dans la deuxième heure, nous débattrons d'un certain nombre amendements.
La réunion du 22 mars est réservée à des travaux du Comité, notamment pour passer en revue la deuxième version du rapport de l'étude sur les véhicules zéro émission. Nous profiterons de cette séance afin de donner des instructions aux analystes pour la rédaction du rapport concernant l'application de la Loi canadienne sur la protection de l'environnement.
Si tout va bien, dans un monde idéal, nous serions en mesure de lancer l'étude en cinq séances sur les plastiques.
Est-ce que quelqu'un voudrait proposer l'ajournement de la réunion d'aujourd'hui?
Madame Pauzé le propose et il semble y avoir consensus.
La séance est levée.