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Je souhaite la bienvenue à tous et à toutes.
Nous ne procéderons pas à l'étude article par article aujourd'hui. Nous sommes ici pour écouter et apprendre des témoins experts sur le projet de loi d'initiative parlementaire présenté par Mme Zann.
Nous accueillons M. Sylvain Gaudreault, député de Jonquière à l'Assemblée nationale du Québec, et Mme Lynn Jones, qui a rassemblé beaucoup d'information sur la question. Tous deux comparaissent à titre personnel. Nous recevons aussi Mme Lisa Gue, responsable, Politique nationale, au sein de la Fondation David Suzuki, et Mme Elaine MacDonald, directrice des programmes, Collectivités en santé, chez Ecojustice Canada.
Je sais que certains d'entre vous ont déjà comparu devant notre Comité. Les règles sont assez simples. Si vous n'avez pas la parole, mettez-vous en sourdine. On vous demande aussi de vous adresser aux membres du Comité par l'entremise du président.
Les témoins disposeront de cinq minutes pour présenter leur allocution d'ouverture. Nous prévoyons d'effectuer ensuite deux tours et demi de questions, parce que nous nous réservons une demi-heure à huis clos à la fin de la séance pour finaliser le rapport issu de l'étude sur la Loi canadienne sur la protection de l'environnement.
Il est 16 h 15. La séance durera deux heures et elle se terminera à 18 h 15.
Monsieur Gaudreault, vous avez la parole pour cinq minutes.
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Bonjour à tous et à toutes. Je suis très heureux d'être devant un comité parlementaire d'un autre Parlement, le Parlement fédéral. C'est une première pour moi. Je veux saluer mes collègues membres du Parlement fédéral. Je reconnais quelques visages, des gens que j'ai déjà rencontrés, notamment lors de missions parlementaires.
Je veux d'abord me présenter personnellement. Je suis député de Jonquière depuis 2007. J'ai été ministre des Transports et des Affaires municipales, des Régions et de l'Occupation du territoire sous le gouvernement du Parti québécois. Je suis présentement porte-parole du troisième groupe d'opposition en matière d'environnement, de lutte contre les changements climatiques et d'énergie. Vous comprenez que, à ce titre, j'ai été très interpellé par le projet de loi déposé par votre collègue . J'ai été interpellé parce que je constate que, au Québec, et partout dans le reste du Canada aussi, il y a de très nombreux exemples de discrimination environnementale qui sont basés sur des inégalités sociales. Ces enjeux environnementaux viennent renforcer même, dans certains cas, les inégalités sociales.
Voici quelques exemples. À Rouyn‑Noranda, il y a la Fonderie Horne, qui produit du cuivre et qui émet des taux hallucinants d'arsenic dans le quartier tout près de la fonderie, le quartier Notre‑Dame, qui est habité par des gens à revenu moins élevé. C'est un quartier historiquement plus démuni ou un quartier de travailleurs.
On pourrait penser également aux très nombreux sols contaminés dans l'Est de Montréal, qui est également une section montréalaise moins nantie que l'Ouest de Montréal, par exemple.
C'est la même chose tout près, où il y a des problèmes liés à la qualité de l'air autour du port de Montréal, par exemple, dans le quartier historique d'Hochelaga‑Maisonneuve.
Il y a également les mines d'amiante dans le Centre‑du‑Québec, qui ont causé beaucoup de problèmes de santé à des travailleurs de cette industrie.
Il est inacceptable que, encore aujourd'hui, plusieurs communautés autochtones isolées, partout au Canada, n'aient pas accès à l'eau potable.
Vous voyez que tous ces enjeux environnementaux liés à des inégalités sociales touchent l'ensemble de la population. Je reconnais qu'il y a une disparité quant aux répercussions environnementales chez les populations démunies par rapport aux populations les mieux nanties. Il est donc nécessaire de prendre des mesures pour contrer les inégalités ou iniquités sociales. Il faut lutter constamment contre les iniquités sociales en environnement.
Cependant, je vous informe que, selon moi, le projet de loi ne règle pas ce problème.
Premièrement, il n'y a pas de définition de l'expression « racisme environnemental » à l'article 2.
Deuxièmement, les enjeux des iniquités sociales sont très larges et touchent, par exemple, l'éducation, la santé, le développement économique et l'exploitation des ressources naturelles, qui sont tous, historiquement et selon la Constitution, des champs de compétence qui relèvent exclusivement des provinces. Si on veut lutter contre les inégalités sociales, il faut agir en éducation, en santé, en développement économique et, évidemment, sur l'enjeu de l'exploitation des ressources naturelles.
Le principal problème, c'est l'alinéa 3(3)d), qui se lit comme suit: « évaluer l'exécution et le contrôle d'application des lois environnementales dans chaque province ». De mon point de vue, cela peut aller très loin, et c'est inacceptable pour le Québec. D'ailleurs, même le premier ministre, François Legault, a déjà réclamé au gouvernement fédéral d'obtenir toutes les compétences en matière d'environnement. Seul le Québec doit décider des projets sur son territoire en matière d'environnement. Cet alinéa 3(3)d) pourrait ouvrir la porte de façon importante à des empiètements sur les compétences du Québec en matière d'environnement.
J'ai déposé à l'Assemblée nationale du Québec, et ce, à deux reprises, sous l'ancienne législature et sous la législature actuelle, le projet de loi no 391, Loi modifiant la Loi sur la qualité de l'environnement afin d'affirmer la primauté de la compétence du Québec en cette matière. Je l'ai déposé le 30 mai 2019. Ce projet de loi va exactement dans le même sens que celui déposé par l'autre député de , celui qui siège à votre Parlement, et qui a déposé le projet de loi .
Je termine en disant que, en ce qui me concerne, le projet de loi doit être rejeté, de préférence, ou substantiellement modifié. Je vous invite à tenir compte du fait que les provinces ont compétence en matière d'environnement.
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Merci beaucoup. Je disais que je suis maintenant à la retraite — ou qu'ils soutiennent que je suis à la retraite, mais je ne le suis pas vraiment, car mon militantisme se poursuit.
En parlant aujourd'hui du projet de loi, je crois que j'éprouve un peu de tristesse. Ma tristesse est liée au fait qu'en tant que militants, nous tentons depuis si longtemps de mettre en évidence les problèmes de nos communautés. Nous voici encore en train de le faire, mais la présente tentative est passionnante. Je suis heureuse que nous soyons parvenus à en discuter au niveau national, et j'espère que nous réussirons.
J'ai examiné le projet de loi et le mot « remédier ». Nous avons un dicton dans notre communauté: « Si ce n'est pas brisé, pourquoi le réparer? », mais le fait d'employer le mot « remédier » veut dire qu'il y a quelque chose de brisé et que nous nous adressons à vous pour nous aider à le réparer.
Je suis une descendante de la communauté afro-néo-écossaise, qui est établie en Nouvelle-Écosse depuis longtemps. Nous sommes le peuple africain originel du Canada. En ce moment, je suis assise dans la propriété de ma famille. Je ne sais pas si bon nombre d'entre vous connaissent la ville de Truro, en Nouvelle-Écosse. J'ai pensé que la meilleure façon de parler du racisme environnemental serait de regarder par ma fenêtre et d'essayer de vous raconter l'histoire de la petite collectivité où je me trouve.
Je sais que certains d'entre vous ont du mal à comprendre pourquoi les collectivités comme la nôtre ont besoin de ce projet de loi spécial sur le racisme environnemental. C'est à cause du mot « disproportionné », qui figure dans le projet de loi . Cela ne veut pas dire que la dégradation de l'environnement ne se produit pas dans toutes les collectivités, mais elle se produit de façon disproportionnée dans la nôtre.
La petite collectivité de Truro compte trois communautés noires traditionnelles, et elles sont surnommées « l'Île », « le Marais » et « la Colline ». « L'île » possédait un dépotoir qui avait été établi il y a de nombreuses années, avant même que je sois née. La communauté noire a dû faire face à toutes les horreurs qui en ont découlé. Quand la communauté blanche a commencé à se rapprocher de nos communautés traditionnelles, ses membres ont déclaré: « Ce dépotoir doit disparaître. Nous ne voulons pas qu'il soit dans notre cour ». Imaginez où ils ont décidé de déplacer le dépotoir. Ils l'ont déménagé dans un autre quartier noir de la ville, c'est‑à‑dire « la Colline ». Le dépotoir d'origine n'a jamais été nettoyé. Il n'a jamais été bétonné. Aujourd'hui, le terrain de jeu de nos enfants se trouve sur cet ancien dépotoir. Personne ne s'en est jamais occupé.
La communauté du « Marais », dont je fais partie, était une communauté noire traditionnelle, mais « Le Marais » s'est maintenant embourgeoisé. Il ne reste que trois familles noires dans ce quartier, où nous avons été forcés de vivre à cause du racisme de l'époque. Cela est dû en partie aux conséquences des inondations qui ont eu lieu dans cette collectivité. En raison des inondations et du manque de ressources et de logements adéquats, la communauté noire a pratiquement disparu. Comme je l'ai indiqué, il ne reste que trois familles, parce que les nouvelles personnes qui arrivent dans la collectivité — qui ne font pas partie de notre communauté — ont eu accès à toutes les ressources qui vont de pair avec la construction de nouvelles habitations et la protection du quartier contre les inondations. Elles n'ont pas eu à faire face à la dégradation des conditions qu'a affrontée la communauté noire.
Le projet de loi vous demande seulement de collaborer à l'élaboration d'une stratégie visant à lutter contre cette incidence disproportionnée qui, de nos jours, touche encore les communautés noires et autochtones. Nous demandons que l'on remédie à la situation. Je suis également une ancienne militante syndicale, et je suis fière de dire que je me souviens d'avoir, il y a de nombreuses années de cela, fait insérer le racisme environnemental dans ce qu'on appelait le « rapport du groupe de travail national voué à la lutte contre le racisme » du Congrès du travail du Canada.
Le Congrès du travail du Canada a également eu du mal à s'y retrouver. Qu'est ce racisme environnemental, et pourquoi faudrait‑il qu'il s'accompagne de clauses spéciales ou distinctes?
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Merci, monsieur le président. Je vous remercie également de m'avoir invitée à me joindre à vous aujourd'hui.
Je me joins à vous depuis Ottawa, qui est situé sur le territoire non cédé du peuple algonquin anishinabe. Je tiens d'abord à souligner les horribles événements des dernières semaines qui ont mis en lumière le racisme passé et présent au Canada: la découverte sur les terrains du pensionnat indien de Kamloops des lieux de sépulture non marqués de 215 enfants et le meurtre d'une famille musulmane de London, en Ontario, ciblée en raison de sa foi.
Le projet de loi est un point de départ pour aborder la dimension environnementale du racisme systémique au Canada. Cette démarche est à la fois opportune et attendue depuis longtemps. Nous savons gré au Comité de reprendre son étude du projet de loi C‑230 cette semaine, et nous vous demandons instamment de faire un rapport favorable sur le projet de loi avant l'ajournement d'été.
Je suis reconnaissante à Mme Jones des réflexions qu'elle vient de vous communiquer, mais je voudrais également vous renvoyer à l'exposé que Mme Ingrid Waldron a donné au Comité le 14 avril. Les recherches de Mme Waldron sur le racisme environnemental au Canada et le cadre conceptuel qu'elle vous a présenté orientent les perspectives de la Fondation David Suzuki sur le projet de loi .
Monsieur le président, vous avez fait observer que le « racisme environnemental » est un nouveau concept pour beaucoup de gens, et il se peut, en fait, que ce soit la première fois que votre comité examine une loi sur le racisme environnemental, bien que je n'en sois pas certaine. Toutefois, il convient de noter que bon nombre des mesures prescrites par le projet de loi reflètent les exigences juridiques en vigueur aux États-Unis depuis un quart de siècle.
Je vais vous donner un aperçu des exigences juridiques en vigueur aux États-Unis, parce qu'elles mettent en lumière les lacunes de la gouvernance et du droit environnemental au Canada, des lacunes que le projet de loi commencerait à combler.
Le décret américain sur les mesures fédérales visant à garantir la justice environnementale au sein des populations minoritaires et des populations à faible revenu date de 1994. Il a été émis par le président Clinton, et il a été maintenu, à divers degrés, par les administrations républicaines et démocrates qui ont suivi l'administration Clinton. Le décret ordonne à chaque organisme fédéral de « faire de la réalisation de la justice environnementale un élément de sa mission », d'élaborer des stratégies de justice environnementale et d'en rendre compte.
Ces stratégies doivent distinguer et traiter tout effet négatif disproportionné que les programmes, politiques et activités du gouvernement pourraient avoir sur la santé ou l'environnement des minorités et des populations à faible revenu. Le décret impose également la collecte d'informations sur les risques sanitaires et environnementaux que courent les Américains en fonction de leur race, de leur origine et de leur revenu.
De façon générale, le projet de loi établirait pour la première fois au Canada des exigences parallèles grâce à ses principales dispositions, à savoir celles qui sont liées à l'élaboration d'une stratégie nationale sur le racisme environnemental et l'obligation de s'assurer que cette stratégie comprend un examen du lien entre la race, le statut socio-économique et le risque environnemental, la collecte d'informations relatives à l'emplacement des dangers environnementaux, des modifications possibles des lois, politiques et programmes fédéraux, et la participation des groupes communautaires à l'élaboration des politiques environnementales.
Toutefois, le décret américain va plus loin en créant un groupe de travail multipartite de haut niveau sur la justice environnementale, composé des responsables de 11 organismes fédéraux et de la Maison-Blanche, afin de soutenir une approche pangouvernementale. L'équivalent canadien pourrait être un comité permanent du Cabinet ou un groupe de travail interministériel.
Au sein de l'EPA des États-Unis, c'est‑à‑dire l'équivalent d'Environnement et Changement climatique Canada, le Bureau de la justice environnementale fournit une capacité fonctionnelle de mise en œuvre de la stratégie de justice environnementale de l'organisme.
Le Bureau de la justice environnementale offre également une aide technique et financière aux communautés, ainsi que des conseils, des outils et des formations sur la politique de justice environnementale aux fonctionnaires de l'EPA. Le bureau soutient la collecte de données et un programme de recherche intégrée. Il joue le rôle de point central pour collaborer avec les chercheurs, les organismes communautaires et les gouvernements des États et des collectivités locales.
Récemment, le président Biden a placé la justice environnementale au centre de son programme environnemental. En mars, la Maison-Blanche a nommé un nouveau Conseil consultatif national sur la justice environnementale chargé de fournir des conseils sur la mise à jour du décret de 1994 en vue de lutter contre les injustices environnementales actuelles et historiques.
Le projet de loi nous offre la possibilité d'harmoniser nos politiques avec celle des États-Unis à un moment où nous renouvelons notre engagement envers des mesures environnementales bilatérales. La Fondation David Suzuki exhorte tous les partis à appuyer le projet de loi C‑230 et à le soutenir par des structures de gouvernance et des investissements.
À cet égard, j'attire l'attention du Comité sur le mémoire présenté par la Coalition du budget vert, dont la Fondation David Suzuki est membre. Dans le mémoire, la coalition recommande que le gouvernement investisse des fonds pour établir un bureau canadien de la justice et de l'équité environnementales, et finance l'élaboration d'une stratégie sur le racisme environnemental comme premier résultat attendu.
En conclusion, la Fondation David Suzuki plaide depuis longtemps pour la reconnaissance juridique du droit à un environnement sain et pour l'intégration de considérations en matière de droits de la personne et d'équité dans la prise de décisions environnementales. Le projet de loi est un pas important dans cette direction.
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Merci, monsieur le président. Je vous remercie également de m'avoir invitée à comparaître aujourd'hui devant vous afin de parler de ce projet de loi incroyablement important qui vise à élaborer une stratégie nationale pour lutter contre le racisme environnemental. Comme Mme Gue l'a déjà indiqué, les horribles événements des dernières semaines ont rendu encore plus évidente l'incommensurable nécessité que notre société s'attaque à toutes les formes de racisme systémique qui existent dans notre pays.
Je me joins à vous depuis les territoires traditionnels de plusieurs Premières Nations, dont ceux des Hurons-Wendat, des Anishinabe, des Haudenosaunee, des Chippewas et des Mississaugas de la Première Nation de Credit.
Ecojustice Canada est la plus grande organisation caritative canadienne dans le domaine du droit environnemental. Nous travaillons avec des personnes, des collectivités, des Premières Nations et d'autres organisations non gouvernementales, ainsi qu'en leur nom, afin de plaider en faveur d'un renforcement des lois environnementales du Canada. Ecojustice s'est engagée à respecter les appels à l'action que la Commission de vérité et réconciliation a lancés en vue de favoriser la réconciliation avec toutes les communautés autochtones, et nous mettons l'accent sur la justice, l'équité, la diversité et l'inclusion dans tous les aspects de notre organisation.
Je commencerai par m'appuyer sur les observations de Mme Gue concernant le décret américain sur la justice environnementale. À la suite de ce décret, l'EPA a mis au point un outil de dépistage et de cartographie de la justice environnementale, appelé EJSCREEN. D'une façon semblable à l'analyse prévue dans le projet de loi , EJSCREEN expose les inégalités substantielles des dangers et des risques environnementaux ayant une incidence sur les communautés racialisées de l'ensemble des États-Unis. EJSCREEN combine des données démographiques avec des données environnementales afin de calculer des indices de justice environnementale à l'échelle des îlots de recensement. Des données comme les concentrations de polluants atmosphériques, la proximité de sites d'enfouissement de déchets dangereux, la proximité de sites de déversement d'eaux usées polluantes et le risque de cancer dû à l'exposition à des polluants atmosphériques dangereux sont cartographiées et accessibles à toute personne disposant d'une connexion Internet.
Les collectivités, les industries et les organismes de réglementation utilisent tous EJSCREEN à des fins diverses. Par exemple, les organismes de réglementation l'utilisent pour évaluer les répercussions sur l'environnement et la santé humaine au niveau communautaire; et les collectivités consultent l'analyse pour lutter contre le racisme environnemental ou exercer des pressions à cet égard.
Pour illustrer ce point, j'ai extrait des renseignements d'EJSCREEN portant sur une région proche de La Nouvelle-Orléans, qui est tristement connue sous le nom de « corridor des cancers » et qui est située près d'un groupe de raffineries et d'usines de produits chimiques. EJSCREEN montre que cette communauté est presque entièrement composée de personnes de couleur à faible revenu. Ces gens se classent au 99e percentile, l'un des percentiles les plus élevés aux États-Unis, en ce qui concerne leur risque de développer un cancer dû à l'inhalation de toxines atmosphériques, ainsi qu'à un niveau tout aussi élevé en ce qui concerne la proximité des sites de déversement d'eaux usées polluantes. Ce ne sont là que quelques-uns des renseignements compilés et analysés sur les dangers liés à la pollution et aux substances toxiques. D'autres facteurs de risque, tels que ceux liés aux inondations côtières dues au changement climatique, sont également disponibles sur EJSCREEN.
Il est presque impossible de trouver des renseignements semblables sur les communautés touchées au Canada. Par exemple, dans la région connue sous le nom de « vallée chimique », qui est située près de Sarnia, en Ontario, un groupe de raffineries et d'usines pétrochimiques entoure la réserve de la Première Nation Aamjiwnaang. En visitant les habitations de la Première Nation Aamjiwnaang, j'ai pu constater la proximité de l'industrie. J'ai senti, goûté et ressenti la pollution dans ma gorge et dans mes yeux. Je me suis rendu compte de mon privilège lorsque je suis retournée chez moi à Toronto.
La seule base de données environnementales fédérale sur la pollution au Canada est l'Inventaire national des rejets de polluants, ou INRP, lequel est très limité. Comme son nom l'indique, l'INRP ne fournit que des renseignements sur les rejets de polluants provenant de sources industrielles et d'autres installations. Il ne contient aucune information démographique et aucune évaluation des répercussions sur les collectivités. Par conséquent, dans sa forme actuelle, ce n'est pas un outil qui peut être utilisé pour évaluer l'égalité réelle et travailler à son atteinte.
L'analyse des données prévue par le projet de loi , en particulier aux alinéas 3(3)a) et 3(3)b), pourrait commencer à répondre à ce besoin urgent au Canada. C'est la raison pour laquelle Ecojustice soutient pleinement le projet de loi et recommande qu'il soit adopté par tous les partis et que l'analyse des données soit accessible au public afin que tout le monde, y compris les autres gouvernements, puisse l'utiliser pour guider les décisions qui ont une incidence sur les populations racialisées et les peuples autochtones.
Cependant, si vous souhaitez renforcer le projet de loi, Ecojustice a quelques dispositions supplémentaires à vous recommander. Nous recommandons d'apporter un amendement pour obliger le gouvernement du Canada à prendre toutes les mesures nécessaires pour s'assurer que les évaluations environnementales et les évaluations des risques en vertu des lois fédérales déterminent les répercussions potentielles des projets sur les peuples autochtones et les populations racialisées et pour garantir que les approbations, les permis, les licences et les autres décisions fédérales ne perpétuent pas, n'intensifient pas ou n'exacerbent pas le racisme environnemental. En outre, nous recommandons que le projet de loi comprenne un mécanisme juridique présentant peu de risques et peu d'obstacles qui permet aux particuliers ou aux communautés de faire valoir un manquement présumé à cette obligation.
Le dernier point que je tiens à souligner, c'est que je connais très bien le projet de loi qui vise à modifier la LCPE, et je peux donner aux membres du Comité l'assurance que le projet de loi et le projet de loi C‑28 sont entièrement complémentaires. Le projet de loi C‑28 jette les bases de la reconnaissance du droit à un environnement sain dans l'administration de la LCPE et exige que l'on tienne compte des populations vulnérables, mais il ne rend pas obligatoire la collecte et l'analyse de données sur le racisme environnemental, comme le prescrit le projet de loi C‑230, et le projet de loi C‑28 ne contient pas d'accent particulier sur le racisme environnemental. Les deux projets de loi sont nécessaires et attendus depuis longtemps.
Je veux remercier le Comité de son attention. Je répondrai avec grand plaisir à vos questions.
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Je remercie tous les témoins. Nous avons assurément entendu de très importants témoignages sur ce projet de loi d'initiative parlementaire. Je veux commencer en procédant à une brève vérification.
Aucun des témoins d'aujourd'hui n'affirmerait que ce projet de loi n'aura aucune incidence sur les peuples autochtones. Est‑il juste de dire que ce projet de loi... Cette affirmation est-elle exacte?
Je ne vois personne indiquant qu'elle ne l'est pas. Nous savons donc que ce projet de loi aura des répercussions sur les peuples et les communautés autochtones.
Ce que je peine à comprendre, c'est que le gouvernement et de nombreux membres du Comité adhèrent à la Déclaration des Nations unies sur les droits des peuples autochtones, dont je veux lire un article. Il s'agit de l'article 19 de la déclaration, qui stipule ce qui suit:
Les États se concertent et coopèrent de bonne foi avec les peuples autochtones intéressés — par l’intermédiaire de leurs propres institutions représentatives — avant d’adopter et d’appliquer des mesures législatives ou administratives susceptibles de concerner les peuples autochtones, afin d’obtenir leur consentement préalable, donné librement et en connaissance de cause.
J'examine ce projet de loi d'initiative parlementaire, sachant que le gouvernement au pouvoir s'est engagé à mettre en œuvre la déclaration des Nations unies, et je me demande comment nous pouvons aller de l'avant avec cette mesure alors que le gouvernement n'a manifestement pas respecté la norme figurant à l'article 19 de la déclaration des Nations unies.
Je pourrais peut-être commencer par Mme Gue.
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Je vous renverrais vers le témoignage livré par Mme Ingrid Waldron sur le lien avec la justice environnementale ou, de fait, sur la définition de racisme environnemental. Ces deux concepts sont certainement interreliés.
Dans ma présentation sur la structure du gouvernement américain et les exigences juridiques découlant de l'ordonnance sur la justice environnementale, vous remarquerez que ce terme est employé aux États-Unis. Cependant, nous remarquons également que la définition fonctionnelle de « justice environnementale » utilisée par l'Environmental Protection Agency des États-Unis indique explicitement que la discrimination fondée sur la race en ce qui concerne les torts causés à l'environnement figure parmi les domaines d'intérêt de l'organisme. Je dirais qu'il est largement accepté que le racisme environnemental s'inscrit dans le concept plus vaste de justice environnementale.
J'ajouterais peut-être que, selon ce que je comprends du mouvement de justice environnementale — qui existe depuis bien plus longtemps aux États-Unis qu'au Canada, du point de vue de ses manifestations juridiques et législatives, du moins —, c'est que le mouvement est en fait mené par les communautés afro-américaines touchées par la pollution et la dégradation de l'environnement. C'est certainement au cœur du concept.
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Merci, monsieur le président.
Je remercie tous les témoins d'être venus aujourd'hui.
Ma question s'adresse à M. Gaudreault, que je connais beaucoup pour son implication en environnement, justement.
Monsieur Gaudreault, vous avez dit dans votre mot d'ouverture que la santé, l'éducation et les ressources naturelles, qui relèvent du Québec et des provinces, étaient essentielles pour rétablir une meilleure égalité sociale.
Au Québec, justement, le droit de vivre dans un environnement sain et respectueux de la biodiversité est reconnu depuis 2006 dans la Charte des droits et libertés de la personne. Dans la mesure où ce droit a une portée quasi constitutionnelle, il protège tous les Québécois. Je m'interroge donc sur l'intérêt d'inclure dans la législation des articles ayant le même objectif, mais dont la valeur juridique serait moindre.
Dès lors, n'avez-vous pas l'impression qu'en raison de l'exception québécoise, les dispositions prévues dans le projet de loi sont d'un intérêt moindre pour le Québec que pour le reste du Canada?
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Je vous remercie de votre question.
Effectivement, cela va exactement dans le sens de ce que j'ai présenté tout à l'heure. Il faut savoir que, bien que le droit à un environnement sain ait été inscrit comme valeur dans la Charte des droits et libertés de la personne du Québec, il faut faire un pas de plus. C'est un pas en avant qui est fait dans cette charte, mais il faut en faire un motif de discrimination, ce qui n'est pas le cas actuellement.
Je partage votre point de vue, mais je voudrais ajouter un élément. Si nous voulons lutter contre les inégalités sociales, qui sont notamment causées et renforcées par des enjeux environnementaux, il faut agir sur tous les fronts, c'est-à-dire en matière de santé, d'éducation ainsi que d'affaires sociales, sur la question de l'exploitation des ressources naturelles. Ce sont toutes des compétences qui relèvent des provinces. Pour moi, c'est davantage à cet égard qu'il faut agir du côté des compétences des provinces.
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Oui, tout à fait. D'ailleurs, c'est pour cette raison que l'alinéa 3(3)d) du projet de loi est complètement inacceptable.
Je vous rappelle que, à la faveur de l'élection fédérale de 2019, le 17 septembre, le premier ministre François Legault avait écrit une lettre à chacun des chefs des partis politiques fédéraux pour réclamer tous les pouvoirs en matière d'environnement. Évidemment, les Pères de la Confédération, en 1867, ne pouvaient pas imaginer la crise climatique que nous vivons aujourd'hui et que nous allons vivre à l'avenir.
Les ressources naturelles et la question du développement économique relèvent de la compétence des provinces. Par extension, cela nous amène à considérer que l'environnement doit relever exclusivement de la compétence du Québec et des provinces, d'autant plus que, souvent, la Loi québécoise sur la qualité de l'environnement protège davantage l'environnement et va plus loin que la loi fédérale.
Malheureusement, cette loi ne s'applique pas aux infrastructures de compétence fédérale comme les ports, les gazoducs ou les pipelines interprovinciaux. Pourtant, ces infrastructures ont des répercussions très fortes dans les communautés autochtones du Québec, dans des communautés qui sont déjà dévalorisées ou qui sont déjà en difficulté et où il y a des familles à faible revenu. Il faut que les compétences du Québec et la Loi sur la qualité de l'environnement du Québec, qui va plus loin que la loi fédérale, notamment pour évaluer le bruit et la poussière, soient considérées comme prédominantes.
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Vous posez cette question à la mauvaise personne. Je dis cela, car je m'occupe depuis longtemps de questions de racisme et d'antiracisme. Je reviendrai à la question précédente sur la justice et la justice environnementale, y compris le racisme.
Je suis âgée, n'est‑ce pas? Je vieillis, mais j'étais là à l'époque du mouvement de « justice » environnementale, et à ce moment, jamais on ne s'est attardé aux problèmes de ma communauté ou de n'importe quelle communauté marginalisée ou racisée, comme les communautés noires et autochtones. On ne parlait pas de nous et il n'était pas question de nos problèmes quand on discutait de justice environnementale, même si on pourrait croire que cela aurait été le cas, puisque la justice est pour tout le monde. Nous n'avons pas été inclus, et c'est pourquoi il est primordial que l'on parle du racisme, car nous sommes alors inclus.
Dès qu'on prononce le mot « racisme », d'une manière ou d'une autre, on frappe un mur, et je ne pense pas que ce soit différent pour les préoccupations provinciales et nationales. Mon impression personnelle, puisque vous me la demandez, c'est qu'à moins d'examiner ce projet de loi pour s'assurer qu'il prévoie des mesures incitatives nationales, la lutte contre le racisme et, dans le cas présent, le racisme environnemental ne sera pas uniforme à l'échelle nationale...
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Comme je l'ai indiqué, ma réflexion a en quelque sorte été interrompue.
Je voulais dire que c'est une excellente chose que ce projet de loi ait une portée nationale. Par exemple, nous avons tenté de nous attaquer au racisme environnemental à l'échelle provinciale. Même si nous avons réalisé des progrès, nous n'avons pas éliminé le problème, car il faut... Les problèmes ne se posent pas seulement au Québec, par exemple, car le racisme est le même partout au pays.
Si nous voulons vaincre le racisme environnemental, je pense qu'il faut impérativement agir à l'échelle nationale. Les provinces auront toujours la possibilité de faire toutes les bonnes choses qui sont envisagées. Nous n'enlevons pas cette partie du projet de loi.
Je m'arrêterai là. Je pourrais poursuivre en parlant de l'effet de ruissellement et de ce genre de chose, mais ce sera pour une autre fois.
Je vous remercie.
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Je vous remercie, madame Jones.
Je m'adresserai peut-être maintenant à Mme Gue ou à Mme MacDonald.
Au début, Mme McLeod a évoqué la déclaration des Nations unies. Compte tenu des répercussions du racisme environnemental sur les Autochtones et comme nous discutons des droits des Autochtones et du besoin de les inclure dans le processus de prise de décisions, considérez-vous que l'ajout d'une référence explicite à la déclaration des Nations unies renforcerait le projet de loi? Quelle serait, selon vous, la meilleure manière de procéder dans ce projet de loi?
Je suis désolé. Je sais que le fait de poser une question à tout un groupe de témoins sème la confusion. Je tenterai d'être plus précis. Nous commencerons par Mme MacDonald, puis Mme Gue pourra nous faire part de ses réflexions.
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Monsieur Bachrach, nous vous remercions pour ce long historique de la défense des droits environnementaux à l'échelon municipal et au Parlement.
Nous sommes aussi encouragés par la présentation du projet de loi par le gouvernement, mais nous sommes en même temps découragés de voir qu'il n'a pas encore fait l'objet d'un débat. J'espère que nous aurons l'occasion, dans un avenir assez rapproché, de revenir devant le Comité pour discuter de ces importantes mesures associées aux droits environnementaux et d'autres mises à jour essentielles relatives à la Loi canadienne sur la protection de l'environnement, qui représentent un complément important au projet de loi .
En ce qui a trait à votre question précise au sujet du lien entre les deux, comme l'a fait valoir Mme MacDonald, ils sont complémentaires. J'ajouterais que, bien sûr, le projet de loi vise principalement à modifier la Loi canadienne sur la protection de l'environnement et les dispositions relatives aux droits environnementaux et à la justice environnementale propres aux autorités de la Loi, tandis que le projet de loi présente une vision plus large des mesures fédérales.
Il y a d'autres autorités législatives associées à la gestion de l'énergie nucléaire, des déchets nucléaires, de l'évaluation environnementale fédérale et de la réglementation des pesticides, pour n'en nommer que quelques-uns, qui pourraient entraîner certaines conséquences. Je crois que c'est une force du projet de loi et un complément important à ce qui est proposé dans le projet de loi , pour que la stratégie nationale proposée soit associée à une vision holistique et pangouvernementale pour éliminer le racisme environnemental.
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Bien sûr, les Canadiens savent depuis longtemps que les parlementaires et les journalistes discutent de façon continue de la transparence des régimes du Canada et des États-Unis, alors que le modèle américain semble plus ouvert par défaut.
On dit ici que le gouvernement consultera les provinces, les Premières Nations et d'autres communautés. Le problème avec cela, c'est que lorsqu'un gouvernement communique avec un autre, les renseignements échangés ne peuvent être visés par une demande d'accès à l'information. Ces renseignements sont protégés. Je ne sais pas ce qu'il en est des autres communautés, comme les discussions municipales, avec les Premières Nations ou avec d'autres groupes, comme l'a dit Mme Jones, parce que ces discussions pourraient s'appliquer à d'autres éléments.
Est‑ce que vous vous préoccupez du manque de transparence ou d'équité en ce qui a trait à l'accès à l'information?
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Le racisme environnemental est étroitement lié à l'histoire de notre pays.
Je préside aussi le chapitre néo-écossais du Global Afrikan Congress, qui aborde les atrocités émanant de la traite transatlantique des esclaves, dont nous n'aimons pas parler au Canada.
Les Africains du Canada doivent faire face au racisme depuis plus de 400 ans, depuis que nous sommes arrivés en Amérique. Il va sans dire que le racisme fait partie intégrante de nous, de ce que nous sommes. Nous ne pouvons pas faire abstraction de l'environnement dans lequel nous vivons et de ce qui nous arrive depuis que nous sommes arrivés au pays.
Pour d'autres groupes racisés, les étapes sont différentes, mais le racisme imprègne tout ce que l'on fait. Les Premières Nations l'ont vécu en premier. Ainsi, lorsque vous me demandez d'expliquer où commence le racisme environnemental, je vous répondrais qu'il a commencé au moment où les colonisateurs ont mis le pied dans le pays et qu'il a trait à ce que nous, les colons et les esclaves, avons dû subir lorsque nous sommes arrivés ici.
Nous n'avons pas voulu en parler ni y faire face, mais c'est la réalité.
J'espère que vous me poserez des questions sur la collecte des données du point de vue des communautés, parce que j'ai des choses à dire à ce sujet.
Merci.
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Je n'ai jamais autant entendu parler de collecte de données que depuis le début de la pandémie de COVID‑19. C'est très réel, et l'effet sur... Évidemment, je connais très bien la communauté afro-canadienne. Dans ma communauté, il y avait des Noirs et des Autochtones. En ce qui a trait au besoin de données désagrégées, on entend beaucoup parler de données sur la santé; l'environnement et la santé sont étroitement liés. On ne peut aborder l'environnement sans aborder la santé.
Dans le projet de loi, nous aurons l'occasion... D’autres secteurs, comme celui de la santé et le système policier reconnaissent maintenant que la pandémie a eu des effets très néfastes sur nos collectivités, mais nous n'avons pas les données pour le montrer.
Le projet de loi nous permettra aussi de recueillir des données désagrégées dans le but de nous améliorer. Nous ne le faisons pas uniquement par principe, mais bien parce que nous voulons améliorer l'environnement et la santé de ces collectivités. Nous voulons aborder ces problèmes.
Je ne suis pas experte en mathématique ni ingénieure, mais je peux vous parler de la communauté et de ses besoins.
Merci.
Je reconnais qu'il y a des répercussions environnementales très difficiles et très dures pour des communautés appauvries, pour des communautés immigrantes qui vivent dans des quartiers plus démunis, par exemple, et pour des communautés racisées également.
Je vais vous donner un exemple très frappant, celui du quartier Notre‑Dame, à Rouyn‑Noranda. Il faut être allé là une fois dans sa vie pour constater à quel point ces gens habitent près de l'usine de cuivre. Ils y sont pratiquement collés. Une recherche démontre que, adultes et enfants confondus, ils sont quatre fois plus imprégnés par l'arsenic que les membres d'un groupe témoin comparable à Amos, qui est dans la même région, en Abitibi. C'est un quartier assez uniforme sur le plan ethnoculturel. Il est habité par des générations de travailleurs de la Fonderie Horne. Alors, imaginez cela, ils sont quatre fois plus imprégnés par l'arsenic que les membres d'un groupe témoin comparable situé à Amos.
C'est inacceptable, il faut lutter contre cela. C'est ce qu'on appelle la justice environnementale. Je suis profondément convaincu que, pour lutter pour une plus grande justice environnementale, il nous faut des services étendus qui touchent plusieurs secteurs, comme l'éducation.
Par exemple, au Québec...
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Le coût représente probablement le plus grand obstacle: les coûts négatifs, les frais d'avocat ou le coût d'accès aux tribunaux. Ecojustice Canada intervient dans de nombreux litiges, et le risque associé au coût est important.
Les coûts ne sont pas aussi importants devant la Cour fédérale, mais ils peuvent l'être dans certains tribunaux provinciaux, et le risque associé au coût est un enjeu pour de nombreux particuliers et pour les petites collectivités qui n'ont tout simplement pas suffisamment de fonds. C'est le plus grand obstacle qui les empêche de porter leur cause devant les tribunaux. C'est pourquoi nous avons proposé un outil facile et à faible risque qui permettrait d'annuler les coûts, à moins que l'affaire ne soit vexatoire, par exemple.
La Loi canadienne sur la protection de l'environnement comprend une disposition sur l'intervention pour la protection de l'environnement, que nous avons examinée, et nous la jugeons préoccupante. Elle n'a jamais été utilisée parce qu'elle crée de nombreux obstacles. Par exemple, elle exige que la personne demande d'abord une enquête du gouvernement et qu'elle obtienne une réponse vague du ministre ou encore aucune réponse. Ensuite, elle peut aller de l'avant, mais encore là, le risque en matière de coût représente le principal obstacle à cet égard.
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Merci, monsieur le président.
Monsieur Gaudreault, je vais commencer avec vous. Nous vous remercions pour votre service à l'Assemblée nationale.
Je suis d'accord avec vous lorsque vous dites que les provinces ont une position unique. Elles ont un pouvoir local et ont souvent la capacité d'intervenir immédiatement dans les cas de violation des lois environnementales.
Toutefois, dans mon ancienne circonscription, dans une réserve des Premières Nations, une personne a été accusée et poursuivie en justice pour avoir brûlé du bois illégalement. Je crois que le gouvernement provincial de la Colombie-Britannique voulait imposer des amendes de 100 000 $. Le tribunal a déterminé que la cause dépassait ses pouvoirs: qu'elle relevait de la compétence fédérale, parce qu'il s'agissait de la réserve de la bande indienne de Penticton, régie par le gouvernement fédéral. De plus, en vertu de la Loi sur les Indiens, les sanctions étaient plutôt de l'ordre de 250 $.
Bien que je sois d'avis que les provinces devraient pouvoir appliquer leurs propres lois, malheureusement, dans certains cas, les lois provinciales ne s'appliquent pas.
Comment aborderiez-vous cette question, monsieur?
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Je pense que la Loi sur les Indiens du gouvernement fédéral est complètement désuète. L'exemple que vous venez de me donner en est une preuve de plus.
Il faut certainement revoir en profondeur la Loi sur les Indiens en reconnaissant la Déclaration des Nations unies sur les droits des peuples autochtones, mais il faut le faire avec des moyens contemporains en tenant compte de la réalité aujourd'hui. J'ajouterais que les communautés autochtones doivent utiliser des services qui sont offerts par les gouvernements des provinces, comme les hôpitaux, les établissements de santé et les systèmes d'éducation comme les universités.
Il reste beaucoup de travail à faire du côté des hôpitaux et des services de santé dans les provinces. Il faut être davantage à l'écoute de ces communautés et leur offrir des services mieux adaptés, ne serait-ce que sur le plan linguistique. De plus, il faut offrir plus de services dans les communautés autochtones.
En ce qui concerne les communautés autochtones elles-mêmes, il faut réviser en profondeur la loi fédérale sur les Indiens et améliorer les services offerts par les provinces à ces communautés.
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Merci. Je vous en suis reconnaissant.
Encore une fois, je suis préoccupé par le fait que, parce que cette question sera soumise à la consultation du ministère de l'Environnement et du Changement climatique, elle n'obtiendra pas nécessairement le profil nécessaire pour que le ministre compétent réponde.
L'Autorité de la santé des Premières Nations en Colombie-Britannique est une initiative que le gouvernement Harper a mise en place pour que les Premières Nations aient plus de contrôle sur leur système de soins de santé. Avec cette bande des Premières Nations, nous avons pu mettre en place davantage de ressources, y compris un centre de santé, ce que j'apprécie.
Pour ma prochaine question, je vais commencer avec Mme Jones, puis je laisserai les autres témoins répondre.
L'un des défis que nous devons relever est que notre pays est vaste et diversifié. Nous n'avons peut-être pas autant d'histoire que d'autres endroits dans le monde, comme l'Europe, mais nous avons beaucoup d'histoire où certaines de ces choses se sont produites sous plusieurs gouvernements. Par où commencer? Par où commencer si vous avez un mandat entier où vous pourriez commencer avec les Premières Nations, où vous pourriez commencer avec les provinces ou où vous pourriez commencer avec des communautés individuelles, comme la communauté noire de Truro? Comment choisir une priorité pour les consultations afin d'aller de l'avant?
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Merci, monsieur le président.
Je pense que je vais reprendre là où mon collègue, M. Albas, s'est arrêté.
Madame Jones, vous avez eu une vie tellement riche, à explorer et à défendre. Votre expérience historique dans ce domaine est vaste. La connaissance que nous acquérons de vous est énorme en ce qui concerne votre perspective personnelle sur ce sujet.
Pour reprendre là où mon collègue s'est arrêté, je vous pose la question suivante: comment faire en sorte que les communautés marginalisées participent de manière significative à l'élaboration des politiques environnementales? Compte tenu de votre riche expérience, quelles sont les meilleures pratiques que vous nous recommanderiez de prendre en compte dans cette discussion?
J'aimerais aller un peu plus loin. J'ai beaucoup travaillé à l'édification d'une société partagée à l'autre bout du monde, en Israël et en Palestine. Une chose que j'ai apprise au cours de ce processus, lorsque vous consultez les communautés, c'est que vous apprenez beaucoup, mais vous apprenez aussi où sont les lacunes. Nous avons parlé tout à l'heure des données, et je vais ouvrir la discussion aux autres témoins qui sont ici aussi. Quelles sont les lacunes en matière d'information ou de connaissances que nous avons actuellement en ce qui concerne la justice environnementale et le racisme environnemental, alors que nous allons de l'avant avec ce projet?
Je vais peut-être demander, madame Jones, si certains de nos autres témoins veulent s'exprimer avec vous, bien sûr... Peut-être que quelqu'un d'autre prendra la parole.
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Dans le contexte des changements climatiques, qui sont irrémédiables, la question de la justice environnementale est certainement le principal défi qui se pose à nos populations. Toute répercussion sur n'importe quelle population est à éviter. On doit lutter pour éviter les répercussions.
Ces répercussions peuvent se produire à trois étapes. Il y a les répercussions du passé sur les populations autochtones et les populations ouvrières, entre autres, que nous devons absolument corriger. Il y a les répercussions actuelles liées aux changements climatiques, qu'elles concernent les îlots de chaleur ou la santé publique. Enfin, il y a les répercussions futures, notamment liées à la transition écologique, qui vont amener des travailleurs, des travailleuses et des familles à délaisser leurs emplois actuels pour passer à de nouveaux types d'emplois, par exemple.
Cela aussi représente la justice environnementale pour tous. C'est pourquoi il faut absolument que les gouvernements provinciaux et le gouvernement fédéral investissent largement dans une transition juste. Il faut une transition juste pour nos travailleurs et nos travailleuses, pour nos populations vulnérables, qu'elles soient racisées ou autochtones, qu'elles soient dans des quartiers historiquement démunis, que ce soit des gens qui ont de bons salaires, mais qui devront abandonner leur emploi pour exercer d'autres types d'emploi dans le futur. C'est ce qu'on appelle la transition juste.
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Merci, monsieur le président.
J'ai une question pour Mme Gue que j'ai posée à un groupe de témoins précédent. Souvent, lorsque nous pensons au racisme environnemental, les exemples les plus intuitivement compris concernent des sites contaminés à proximité des communautés, ou des incidents très précis à un site. Dans la région où je vis et que je représente, le Nord-Ouest de la Colombie-Britannique, les changements climatiques touchent de façon disproportionnée les communautés des Premières Nations, comme vous le savez bien, et cela a des répercussions sur les stocks de saumon sauvage, la faune et tant d'autres valeurs. Il s'agit d'un type d'impact fondamentalement différent de la contamination d'un site particulier, car il est lié aux changements climatiques, qui est un problème mondial. Ce projet de loi va‑t‑il traiter suffisamment ces deux expressions très différentes du racisme environnemental?
À quoi cela ressemblerait‑il dans le contexte de la stratégie nationale, par exemple?