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HESA Réunion de comité

Les Avis de convocation contiennent des renseignements sur le sujet, la date, l’heure et l’endroit de la réunion, ainsi qu’une liste des témoins qui doivent comparaître devant le comité. Les Témoignages sont le compte rendu transcrit, révisé et corrigé de tout ce qui a été dit pendant la séance. Les Procès-verbaux sont le compte rendu officiel des séances.

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CANADA

Comité permanent de la santé


NUMÉRO 008 
l
2e SESSION 
l
40e LÉGISLATURE 

TÉMOIGNAGES

Le jeudi 5 mars 2009

[Enregistrement électronique]

(1530)

[Traduction]

     Bienvenue à notre comité encore une fois. Nous sommes ravis de vous accueillir.
    Mesdames et messiers, nous avons avec nous le Dr Peter Singer du Centre McLaughlin-Rotman pour la santé mondiale. Bienvenue.
    De l'Université Laval, nous recevons le Dr Marc Ouellette.
    De l'Université McGill, nous avons le Dr Greg Matlashewski. Bienvenue.
    Vous disposerez de 10 minutes chacun pour nous présenter votre mémoire, puis nous passerons à la première ronde de questions des membres du comité.
    Nous entendrons d'abord le Dr Singer. Nous vous écoutons.
    Merci beaucoup et bon après-midi. Je m'appelle Peter Singer et je suis professeur de médecine au Centre McLaughlin-Rotman pour la santé mondiale du University Health Network et de l'Université de Toronto. Je vous parle aujourd'hui en mon nom personnel.
    J'ai commencé à m'intéresser à la biosécurité en 2003 lorsque j'ai joint les rangs de la National Academy of Sciences des États-Unis, qui a publié un rapport sur la mondialisation, la biosécurité et l'avenir des sciences de la vie. J'ai aussi participé au projet de réduction de la menace biologique du Center for Strategic and International Security à Washington. J'agis actuellement à titre de conseiller pour le bureau du Secrétaire général de l'ONU dans le cadre de l'initiative sur les biotechnologies.
    En janvier 2009, j'ai rédigé un éditorial pour le The Globe and Mail intitulé « Is Canada ready for bioterrorism? » (ou « Le Canada est-il prêt pour le bioterrorisme? »). En somme, ma réponse était « je n'en suis pas sûr ». Contrairement à ce qui a été fait aux États-Unis, où au moins cinq comités indépendants ont étudié la question, aucune évaluation exhaustive et indépendante n'a été effectuée au Canada à ma connaissance.
    Le projet de loi C-11, la Loi sur les agents pathogènes humains et les toxines, permettra certainement de nous protéger, et c'est pourquoi je l'appuie. Je veux soulever deux points concernant la loi, pour lesquels je formulerai deux recommandations précises.
    Tout d'abord, je vous dirais que la loi ne nous protégera que si elle est mise en oeuvre en étroite collaboration avec les scientifiques qu'elle régit. J'aimerais reprendre votre discussion de mardi, lorsque vous avez abordé cette question.
    J'estime par ailleurs que la loi n'est qu'un des éléments du réseau de protection nécessaire pour protéger le Canada contre le bioterrorisme et le préparer à cette éventualité, notamment quand il est question des menaces de nouvelle génération.
    Cela dit, je crois qu'il est important de souligner à quel point la biosécurité diffère de la sécurité nucléaire. Il n'y a qu'un passage obligé pour la sécurité nucléaire, c'est-à-dire le contrôle de l'uranium et du plutonium hautement enrichis. On assure la sécurité nucléaire en gardant secrets les moyens pour produire ces éléments à des fins militaires. Les technologies pour les produire sont dispendieuses, sans compter qu'il faut avoir l'autorisation de l'État. On arrive donc à veiller à la sécurité nucléaire grâce au contrôle de l'uranium et du plutonium hautement enrichis.
    Ce n'est pas le cas pour la biosécurité. Les pathogènes sont partout, les connaissances sont disséminées librement et les technologies sont peu coûteuses. En bref, il est primordial de solliciter l'aide des scientifiques et d'établir un réseau de protection pour être en mesure de parler véritablement de biosécurité.
    Je m'explique.
    Je vous ai d'abord parlé de la mise en oeuvre de la loi en étroite collaboration avec les scientifiques. Comme vous l'aviez mentionné précédemment, le bien-être social et la prospérité économique du Canada reposent sur les découvertes scientifiques. Imaginez-vous un instant qu'un régime règlementaire avait empêché Banting et Best de découvrir l'insuline, ou avait fait obstacle à la production commerciale de l'insuline dans des bactéries, l'insuline utilisée par tous les patients canadiens souffrant de diabète.
    Je crois que la loi proposée vise un juste équilibre entre la liberté scientifique et la réduction des risques, mais ce calcul se jouera d'abord dans les règlements, et il faudra suivre la situation de très près et rééquilibrer les choses constamment, ce qui ne peut être fait qu'en collaboration avec le milieu scientifique.
    Parce que biosécurité n'est pas synonyme de sûreté des pathogènes, cette loi vient en réalité compliquer la tâche à ceux qui voudraient utiliser les pathogènes à mauvais escient. Elle permet de dissiper quelque peu le brouillard dans lequel sont plongés les laboratoires, de façon à ce que les activités irrégulières soient plus facilement détectables. Mais nous devons également aider les milliers de scientifiques travaillant dans ces laboratoires, qui n'ont jamais eu l'intention de mal utiliser des pathogènes humains, à part peut-être quelques rares exceptions, à constituer un réseau de vigilance prêt à signaler ces activités irrégulières aux autorités. C'est en effet en gagnant le coeur et l'esprit des scientifiques que nous arriverons à un certain niveau de biosécurité, pas en imposant des exigences par la force d'une loi. La solution consiste à favoriser une culture de sensibilisation et de responsabilité au sein du milieu scientifique, car il est très important d'avoir son appui.
    J'ai communiqué avec les responsables d'une université, d'un organisme provincial de prévention en matière de santé et d'une association de l'industrie pour vérifier s'ils avaient été consultés aux différentes étapes de l'élaboration de cette loi. J'ai été heureux de voir que les réponses étaient positives dans l'ensemble. Toutefois, ce qui compte maintenant, et la question a d'ailleurs été soulevée par votre comité mardi, c'est de trouver le moyen pour poursuivre le dialogue. Cela m'amène à ma première recommandation, soit que le comité recommande la création d'un groupe consultatif externe pour conseiller le ministre, groupe formé de représentants d'universités, d'organismes provinciaux de santé publique, du secteur privé et d'autres organisations (peut-être les IRSC). Ce serait une façon de veiller à ce que les règlements et la mise en oeuvre de la loi, à la suite des deux années de préparation des règlements, tiennent compte des commentaires des scientifiques qui doivent s'y conformer.
(1535)
    Je crois avoir illustré pourquoi le dialogue est aussi important pour une loi concernant la sûreté des agents pathogènes, bien plus que ce ne le serait pour une autre loi.
    J'aimerais également vous parler du réseau de protection et des menaces de nouvelle génération. La biosécurité a plusieurs ramifications, lesquelles doivent être efficaces en soi, en plus de bien fonctionner avec les autres. Il y a l'aspect militaire de la biodéfense, régi par la Convention sur les armes biologiques, et l'aspect non militaire, là où entrent en jeu l'exécution de la loi et la sécurité nationale, et où on devrait probablement assurer une plus grande collaboration entre les communautés gouvernementales et non gouvernementales. Pensons aussi aux interventions en matière de santé publique, qui sont en fait le moyen ultime et commun de défense. Malheureusement, nos capacités ont été mises à rude épreuve par le SRAS; mais je crois que cet épisode a contribué à renforcer nos capacités d'intervention en santé publique. Ce projet de loi met l'accent sur la sûreté des agents pathogènes, la biosécurité en laboratoire et les problèmes de biosécurité. Nous devons y voir, et c'est pourquoi j'appuie le projet de loi. Je vous réfère par ailleurs à mes remarques précédentes concernant la mise en oeuvre.
    Par contre, nous n'avons pas encore parlé des menaces de nouvelle génération, et c'est là-dessus que j'aimerais me concentrer. Les sciences de la vie peuvent permettre de créer de nouvelles menaces beaucoup plus graves. J'aimerais parler de cette réalité et proposer des moyens pour y remédier.
    Les menaces de demain ne se limiteront pas aux agents pathogènes et aux toxines figurant dans les annexes de cette loi. Le rapport publié par la National Academy of Sciences des États-Unis, auquel j'ai contribué, recommandait notamment d'adopter une vision plus large des différentes menaces qui nous guettent. Nous avons expliqué comment les terroristes pourraient utiliser des techniques comme la manipulation génétique et la biologie synthétique pour créer des bactéries résistantes aux antibiotiques. Une procédure appelée interférence à ARN pourrait être utilisée pour désactiver les gènes qui nous protègent du cancer. La biologie des appareils anatomiques pourrait permettre de trouver des façons de perturber le système immunitaire de l'organisme, nous rendant vulnérables aux infections, ou d'effacer notre mémoire. On pourrait trouver de nouvelles façons de transporter les armes bactériologiques grâce à la nanotechnologie, qui est en fait devenue le Saint-Graal du bioterrorisme. Nombreuses sont les menaces de nouvelle génération qui méritent notre attention, et elles ne sont pas toutes liées aux agents pathogènes.
    Parallèlement, notre comité a recommandé de maintenir, dans toute la mesure possible, un libre échange d'information concernant les sciences de la vie, parce que tenter d'étouffer ces avancées technologiques, c'est concéder la victoire aux bioterroristes, avant même que ces derniers n'aient déclaré la guerre. La liberté scientifique est également importante pour le développement de contre-mesures. Pour atteindre cet équilibre, il faut s'assurer que les universités et les entreprises font la promotion d'une culture commune de conscientisation et d'un sens commun des responsabilités pour prévenir les abus au sein de la communauté scientifique. C'était d'ailleurs une autre des recommandations de notre comité. On y arrive grâce à l'utilisation de codes de conduite et de modèles de comportement, un aspect qui ne se retrouve pas encore dans le programme de biosécurité du Canada.
    Un comité formé précédemment par la National Academy of Sciences a publié un rapport intitulé Biotechnology Research in an Age of Terrorism (La recherche en biotechnologie à l'ère du terrorisme), mettant en lumière, par exemple, des expériences aux résultats inquiétants, notamment comment rendre les vaccins inefficaces et transformer des agents non pathogènes en agents pathogènes, des choses qu'on ne voit nulle part dans le projet de loi. Il faut s'assurer que les revues médicales et les organismes subventionnaires sont sensibilisés à ces questions et qu'ils disposent des processus nécessaires pour gérer ce genre de situations.
    En outre, les menaces évoluent au gré des progrès scientifiques. C'est pourquoi notre comité a recommandé de créer, au moyen d'une loi, un groupe consultatif indépendant en science et technologie à l'appui de la collectivité du renseignement. À ma connaissance, il n'y a aucun groupe au Canada qui se penche sur ces menaces de nouvelle génération de façon approfondie et systématique de la même façon que le font différents groupes aux États-Unis. Nous n'examinons pas non plus à fond comment les différentes ramifications dont j'ai parlées plus tôt forment un réseau de protection et comment elles travaillent ensemble. J'ai appris que la coordination de ces communautés est aussi importante que l'efficacité de chacune d'entre elles. Et je ne parle pas seulement de la coordination au sein du gouvernement, dont il a été question mardi, un élément aussi important, mais des liens qui unissent les communautés gouvernementales et les communautés non gouvernementales dans les universités, le secteur privé, etc.
    Dans l'article que j'ai écrit pour le Globe and Mail, je proposais au gouvernement fédéral de commander une étude qui déterminerait si le Canada est prêt ou non pour le bioterrorisme. Cette évaluation pourrait être menée par le Conseil des académies canadiennes, en collaboration avec l'Académie canadienne des sciences de la santé et l'Académie canadienne du génie, des organismes réunissant quelques-uns des plus brillants universitaires du pays. Ces académies nationales de scientifiques ont été créées, et dans le cas du Conseil des académies canadiennes, financées pour mener des évaluations de ce genre. Le mandat d'une telle étude, qui pourrait venir compléter la portion de cette loi portant sur la sûreté des agents pathogènes, serait d'évaluer si le Canada est prêt ou non pour le bioterrorisme, en mettant l'accent sur les menaces de nouvelle génération et le réseau global de protection, à savoir comment toutes ces ramifications se rejoignent entre elles.
    Je n'entrerai pas dans les détails au sujet d'un tel mandat, mais je pourrais le faire au cours de la période de discussion.
(1540)
    Pour vous donner quelques exemples, on pourrait se demander quelle est la nature de la menace, y compris les menaces de nouvelle génération. Dans quelle mesure les différentes ramifications se rejoignent-elles pour former un réseau de protection? Avons-nous la capacité au Canada, à l'extérieur du gouvernement, de se pencher sur ces questions de biosécurité? Est-ce que le public est suffisamment sensibilisé aux problèmes de biosécurité? C'est le genre de questions que l'on pose dans une étude de ce genre.
    En terminant, j'aimerais réitérer ma deuxième recommandation, c'est-à-dire que ce comité recommande au ministre que l'Agence de la santé publique du Canada commande au Conseil des académies canadiennes, en collaboration avec l'Académie canadienne des sciences de la santé et l'Académie canadienne du génie, une étude pour évaluer si le Canada est prêt ou non pour le bioterrorisme, en mettant l'accent sur les menaces de nouvelle génération et le réseau de protection, c'est-à-dire comment les différentes ramifications et communautés interagissent. C'est vraiment l'ensemble de ces éléments qui permettent d'assurer la biosécurité, pas seulement le contrôle des agents pathogènes.
    C'est une bonne loi, mais nous ne voulons pas qu'elle nous procure un faux sentiment de sécurité. Nous voulons avoir une perspective globale de la biosécurité.
    Merci beaucoup de m'avoir écouté. C'était un honneur pour moi de venir vous parler, et je répondrai à vos questions avec plaisir.
    Merci, docteur Singer. C'était très intéressant.
    Docteur Ouellette, voulez-vous nous présenter votre mémoire?

[Français]

    Mon nom est Marc Ouellette et je suis du Centre de recherche en infectiologie de l'Université Laval. J'ai une chaire de recherche du Canada sur la résistance aux agents antimicrobiens, dont mon collègue vient de parler. On peut traiter les micro-organismes, que ce soit des virus, des parasites ou des bactéries, mais ils deviennent également résistants aux agents antimicrobiens, et c'est une de mes spécialités.
    Une des raisons pour lesquelles je suis content d'être ici aujourd'hui — et je remercie le comité —, c'est que j'ai été le représentant académique qui a participé à la rédaction des lignes directrices en matière de biosécurité. C'est le document phare auquel les chercheurs étaient assujettis, dans les universités canadiennes, quand ils devaient importer ou exporter des pathogènes humains. Je connais assez bien le sujet. On a été consultés abondamment lors de la rédaction de ce document.
    Chaque université canadienne a un comité de biosécurité. Obtenir l'aval de ces comités de biosécurité est une condition sine qua non pour obtenir des fonds de recherche, et je fais partie de celui de l'Université Laval. Je vais y revenir plus tard. Toutefois, je vais parler aujourd'hui en mon nom personnel et surtout en tant qu'importateur et exportateur fréquent de pathogènes de groupe de risque 2.
    Je suis à la deuxième page du document que vous avez entre les mains.
(1545)

[Traduction]

    Je tiens d'abord à vous remercier de votre invitation. Il a été très instructif pour moi de prendre connaissance du projet de loi C-11, mais il a été encore plus intéressant de lire la transcription du débat qu'ont tenu les députés concernant ce projet de loi. J'ai été très impressionné. Les interventions étaient excellentes et démontraient bien que les gens avaient compris de quoi il s'agissait. J'ai trouvé tout ça très enrichissant.
    L'Agence de la santé publique du Canada nous a informés du projet de loi C-54, le prédécesseur du projet de loi C-11, mais elle ne nous a jamais consultés. Le projet de loi C-54 a semblé sortir de nulle part et a surpris l'ensemble de la communauté scientifique. Je suis donc très heureux de constater que l'on ait pensé à nous consulter pour ce nouveau projet de loi. C'est ainsi avec plaisir que je viens discuter de la biosécurité avec les membres du Comité permanent de la santé de la Chambre des communes aujourd'hui.
    J'aimerais d'abord souligner que la biosécurité est une question qui nous importe, et c'est vrai dans toutes les universités du Canada. Je vais vous donner quelques exemples. D'abord, sachez qu'il existe trois organismes nationaux qui financent la recherche. Il y a les IRSC, le CRSNG et le CRSH, ce dernier s'occupe des sciences humaines et ne travaille pas vraiment avec les micro-organismes — à part peut-être les virus informatiques, mais ce n'est pas de ça dont il s'agit ici.
    Lorsque nous rédigeons une proposition pour le CRSNG et les IRSC, nous devons indiquer à quelles exigences de bioconfinement doit être soumis l'organisme que nous étudions. On les classe selon quatre niveaux. On a généralement affaire à des micro-organismes de niveau 1, mais j'y reviendrai. Il est aussi assez fréquent d'étudier des micro-organismes de niveau 2. Avec un peu de chance, nous obtenons une subvention. Il y a un taux de réussite de 20 p. 100, alors on ne peut pas toujours gagner. Quand notre proposition est retenue, il nous faut ensuite obtenir l'autorisation de notre établissement d'attache. Chaque université a son propre comité qui étudie le dossier et qui détermine s'il s'agit d'un niveau 2 ou d'un niveau 3, et ce n'est que lorsque le comité a donné son aval que l'on peut obtenir les fonds. Il y a donc déjà une structure en place pour examiner cet aspect.
    Une fois qu'on a l'argent, il faut commencer à travailler. On veut donc importer des pathogènes que l'on n'a pas dans notre laboratoire. La première chose à faire, c'est de demander un permis à l'Agence de la santé publique du Canada. Voici le document que nous devons remplir pour obtenir l'autorisation de l'agence. Je peux en fournir une copie dans les deux langues au comité. Et comme presque tous les pathogènes humains sont aussi des pathogènes animaux, il faut demander un permis à l'ACIA. Voici le permis, et voici les documents supplémentaires que nous devons remplir. C'est en fait à ça que ressemble le formulaire, parce que la version française et la version anglaise sont sur le même document.
    Une fois que ce formulaire est rempli, on doit souvent répondre à différentes questions. On nous dira qu'il nous manque une information quelconque ou un protocole, etc. Là où je veux en venir, c'est qu'il faut suivre toute une procédure pour obtenir un pathogène. Il faut passer par une série de processus administratifs avant d'avoir nos pathogènes. Maintenant, l'établissement est responsable de la formation des étudiants et du personnel qui devront travailler avec les agents pathogènes.
    Tout ça pour dire que l'importation et la manipulation de pathogènes sont assujetties à de rigides contrôles administratifs. Bien sûr, personne ne peut s'opposer à une stratégie visant à renforcer la santé publique, mais il s'agit de trouver la meilleure façon pour ouvrir un dialogue entre les législateurs, les fonctionnaires, les organismes nationaux et les gens qui travaillent quotidiennement dans le domaine.
    Vous pouvez lire quelques commentaires à la page 3.

[Français]

    Un des problèmes de ce document, qui est fort bien fait d'ailleurs — le projet de loi C-11 —, est que les micro-organismes de niveau 1 n'y sont même pas mentionnés. Ceux de niveau 1 sont ceux qui ne portent aucun préjudice à l'être humain, à moins de se trouver en quantité astronomique, mais la quantité de micro-organismes est un autre sujet. Les micro-organismes de niveau 1 comprennent, par exemple, le E. coli. Tout le monde a entendu parler du Escherichia coli. Dans la liste, il est inscrit comme un pathogène de niveau 2, mais en ce qui concerne le E. coli, tous les laboratoires au Canada qui font de la biologie, qui vont prendre un morceau de gène et qui vont le mettre dans un autre, travaillent avec du E. coli non pathogène.
    Alors, il faudra faire très attention parce que dans le cas du E. coli ou de toutes les espèces indiquées ici, il y a des représentants pathogènes et d'autres qui ne le sont pas. Cela compliquerait la recherche de façon extrêmement importante si jamais il n'y avait pas cette distinction entre les E. coli pathogènes et les autres.
    Croyez-moi, je siège à plusieurs comités consultatifs, et tout le monde au Canada est inquiet et se demande si ce qu'on fait depuis des années et des années va éventuellement devenir un problème.
    Une des particularités relatives au projet de loi est qu'on a des pathogènes de niveau 2, de niveau 3 et de niveau 4. Le projet de loi ne fait pas de distinction entre eux, mais en ce qui a trait à ceux de niveau 2, les risques pour la communauté sont pratiquement nuls. Donc, il ne faut pas que les organismes de niveau 2 soient considérés au même titre que ceux des niveaux 3 et 4. Alors, quand on parle d'habilitation de sécurité, je pense que ceux qui travaillent avec des pathogènes de niveau 2 ne devraient pas être obligés de subir un security check.
    Tous les laboratoires sont de niveau 2, dans les universités. Les bureaux des professeurs sont des laboratoires. Donc, de quelle façon les étudiants qui voudront aller voir les professeurs s'y prendront-ils, s'ils doivent subir un security check au préalable? Ce sont des choses auxquelles il faudra réfléchir sérieusement.
    Six pages de ce document portent sur le rôle de l'inspecteur, une fonction qui n'existe pas actuellement. Ce ou ces personnages auront beaucoup de pouvoir. Il faudra voir comment on pourra circonscrire ce pouvoir pour ne pas qu'il y ait un jour un abus de pouvoir, pour ne pas que la personne vive un power trip et que, finalement, elle puisse blesser...
(1550)

[Traduction]

    Docteur Ouellette, désolée de vous interrompre, mais je vous signale qu'il ne vous reste qu'une minute.
    Très bien. Merci beaucoup.
    Je vais donc passer à la page 4 de mon document. Les annexes au projet de loi peuvent être une source importante de confusion quant aux différents niveaux. Comme je l'ai déjà indiqué, la bactérie E. coli devrait plus souvent qu'autrement être classée parmi les pathogènes du groupe 1, plutôt qu'avec ceux du groupe 2. Nous modifions souvent des bactéries par manipulation génétique. Faudra-t-il alors signaler l'existence d'un nouveau pathogène? Si nous injectons un plasmide, serons-nous en présence d'un nouveau parasite, d'une nouvelle bactérie?
    Le projet de loi ne traite pas en profondeur des questions liées à la microbiologie clinique. On ne sait pas vraiment comment ces laboratoires pourront composer avec les nouvelles règles, ou la nouvelle loi?
    Comme il ne me reste que 30 secondes, je vais conclure en vous remerciant d'abord et avant tout pour ce projet de loi. Je pense qu'il arrive à point nommé et il est bien que nous puissions en débattre, mais je vous exhorte à prêter une oreille attentive aux utilisateurs, car c'est nous qui allons bénéficier de ce projet de loi ou en subir les conséquences.

[Français]

    Merci énormément de votre attention.

[Traduction]

    Merci, monsieur Ouellette.
    Nous passons maintenant à M. Matlashewski. Est-ce que j'ai moins massacré votre nom cette fois-ci?
    Merci.
    Dans un premier temps, je tiens à remercier votre comité de me donner l'occasion de présenter mon point de vue sur ce projet de loi. Je vais donc vous entretenir du contenu de la loi proposée et de l'interprétation que j'en fais.
    Permettez-moi de me présenter brièvement. Je dirige le département de microbiologie à l'Université McGill. J'enseigne la microbiologie et l'immunologie et, ce qui risque d'intéresser davantage le comité, je fais également de la recherche et de l'application pratique dans ces deux domaines. J'ai contribué par mes travaux de recherche à plus de 90 publications. Je fais également partie de comités consultatifs pour les Instituts de recherche en santé du Canada; les National Institutes of Health aux États-Unis; la FDA, la Food and Drug Administration, aux États-Unis; l'Organisation mondiale de la santé, à Genève; les Nations Unies; et Médecins Sans Frontières.
    Je fais partie depuis plusieurs années de ces comités où l'on traite de maladies infectieuses et de microbiologie, et je vais continuer à le faire. Je crois donc avoir toute la compétence voulue pour m'exprimer sur cette tribune au sujet du projet de loi.
    Tout comme l'Agence de santé publique du Canada et les membres de ce comité, je veux surtout assurer la santé de la population et la protéger contre les maladies infectieuses. C'est dans cette optique que je suis favorable à ce projet de loi dans ses grandes lignes, bien que j'estime que certaines modifications s'imposent avant son adoption. Je vais donc concentrer mon attention sur les changements souhaitables en vous indiquant les raisons qui les justifient. Je ne veux pas me montrer trop critique. Je veux seulement mettre en lumière les ajustements qu'il convient d'effectuer.
    La meilleure façon d'améliorer ce projet de loi serait d'en extraire les pathogènes du groupe 2. Comme Marc vient tout juste de le faire valoir, ces pathogènes ne devraient pas être amalgamés à ceux des niveaux 3 et 4.
    Je m'explique. Les pathogènes du groupe 2 posent généralement un risque faible pour la santé publique. Il est improbable qu'ils puissent causer une maladie grave et les risques de propagation sont peu élevés. Les pathogènes de niveau 3 et 4 sont complètement différents; ils représentent un risque élevé et sont susceptibles de causer de graves maladies. Les risques de propagation sont considérables pour les pathogènes du groupe 4. Par conséquent, les méthodes de travail utilisées avec ces pathogènes sont très différentes.
    Il y a une façon de travailler avec les pathogènes de niveau 2. On se sert d'une enceinte de sécurité biologique à l'intérieur de laquelle l'air est confiné, et on peut travailler à mains nues. Pour les pathogènes des groupes 3 et 4, l'infrastructure requise est tout autre et coûte plusieurs millions de dollars, notamment pour une salle à pression négative.
    Alors, les conditions de travail sont très différentes selon les pathogènes qu'on utilise. Les formalités administratives et les niveaux de sécurité requis doivent aussi être adaptés en conséquence. Le projet de loi ne fait pourtant pas cette distinction. Du point de vue de l'administration et de la sécurité, on met dans le même panier les niveaux 2, 3 et 4. Cela ne peut pas fonctionner. Il faut établir cette distinction, tout comme on le fait pour les méthodes de travail. On ne peut pas amalgamer tous ces pathogènes. Si vous le faites, les conséquences seront énormes pour le Canada.
    Par exemple, une grande partie des recherches scientifiques menées sur les pathogènes de groupes 3 et 4, les plus dangereux, sont en fait réalisées en utilisant des pathogènes de niveau 2 comme modèles de comparaison. Ainsi, le mycobacterium tuberculosis, qui passe par les aérosols, est un pathogène qui se loge dans les poumons, y survit et cause la tuberculose, une maladie mortelle. Le mycobacterium smegmatis est un organisme très similaire. Leur apparence est la même sous le microscope. Leurs gênes sont identiques, ou presque. La filière biochimique est la même. Mais l'évolution légèrement différente de cette dernière bactérie fait en sorte qu'elle ne survit que dans le sol et ne présente que de très faibles risques d'infection pour l'être humain. Il s'agit donc d'un pathogène du groupe 2.
    Les médicaments qui détruisent le mycobacterium smegmatis vont avoir le même effet sur le mycobacterium tuberculosis, ce qui permet d'utiliser un pathogène du groupe 2 pour réduire les risques et, ce qui est tout aussi important, les coûts de la recherche. Alors si ce projet de loi est adopté dans son libellé actuel, les pathogènes de niveau 2 et de niveau 3 seront considérés sur le même pied du point de vue administratif et cet avantage sera perdu. Comme les formalités administratives seront les mêmes dans les deux cas, on ne profitera plus de cet avantage que procure l'utilisation de pathogènes du groupe de risque 2.
    Il s'agit d'un recul très important. Comme M. Ouellet vous a donné un très bon aperçu de l'aspect administratif, je n'en dirai pas davantage à ce sujet. Je vais me contenter d'un exemple. Si j'ai un échantillon de mycobacterium smegmatis — un organisme sans danger dans un laboratoire — je peux très bien le donner à mon collègue du laboratoire voisin, mais je ne pourrai plus le faire si ce projet de loi est adopté. Il faudra d'abord que j'obtienne un permis d'Ottawa, ce qui risque d'être très long.
    J'ai peut-être mal compris les dispositions du projet de loi, mais si je lui remettais quand même l'échantillon, je crois que je serais tenu criminellement responsable et que je m'exposerais à une amende de 250 000 $ et à une peine d'emprisonnement de trois mois. C'est une perspective qui a eu l'heur d'effrayer mes collègues de tout le pays. On m'a appelé d'un peu partout pour savoir si c'est effectivement ce que prévoit le projet de loi.
(1555)
     Il faut également que le Canada soit en mesure de soutenir la concurrence mondiale dans le milieu scientifique. À ce titre, il faut souligner l'arrivée à Montréal de la compagnie pharmaceutique Merck, l'une des plus grandes au monde, qui vient tout juste de concevoir un excellent vaccin contre le virus du papillome humain.
    L'entreprise déplace des États-Unis vers Montréal ses installations de recherche sur les maladies infectieuses. Ce sera un institut de recherche de plusieurs millions de dollars. Merck a besoin du soutien de la communauté scientifique canadienne en microbiologie et immunologie. Nous devrons être en mesure de former des étudiants et des chercheurs pour assurer le bon fonctionnement d'une telle installation. J'ai parlé aux gens de Merck et ils souhaitent pouvoir travailler avec l'Université McGill, l'Université Laval, et l'Université de Montréal, car ils tiennent à cette interaction avec le monde universitaire.
    Dans son libellé actuel, le projet de loi C-11 nous lie les mains quant aux possibilités d'effectuer ce genre de recherche et à notre capacité de travailler en interaction avec des entreprises comme Merck. Si Merck ne peut pas demeurer à Montréal en raison des répercussions éventuelles de ce projet de loi sur la recherche au Canada, d'autres entreprises pourraient choisir de ne pas s'installer ici. Si l'on minait ainsi nos perspectives de collaboration scientifique, je crois que cela serait vraiment dommageable tant du point de vue de l'économie que du côté de la recherche.
    Marc a également soulevé un autre point important. Il faut que nous puissions enseigner à nos étudiants. À McGill, nous comptons actuellement 350 étudiants de premier cycle en microbiologie et immunologie. Nous leur apprenons à utiliser les pathogènes du groupe 2. Suivant les dispositions actuelles de ce projet de loi, nous ne pourrions plus le faire. Il ne nous serait plus possible de former les étudiants, car ceux-ci ne détiendraient pas l'habilitation de sécurité requise. Les correctifs nécessaires doivent être apportés au projet de loi.
    Il faut aussi tenir compte du fait qu'au Canada, les bureaux des professeurs sont le plus souvent situés à l'intérieur du laboratoire. Si je donne un cours le matin, un étudiant ne pourra plus venir me poser une question à mon bureau, car celui-ci se trouve dans le laboratoire et que l'étudiant n'est pas autorisé à y avoir accès. C'est un autre aspect problématique de ce projet de loi.
    Chaque semaine, l'Université McGill reçoit la visite de scientifiques avec lesquels nous aimons bien discuter des questions qui nous intéressent. Ces visiteurs n'auraient plus accès à mon laboratoire. En vertu du projet de loi dans sa forme actuelle, il nous serait interdit de discuter des résultats de nos travaux dans le laboratoire.
    J'aimerais conclure avec une considération que j'estime importante et qui me tient tout particulièrement à coeur. Le Canada nous offre un environnement très propice à la recherche. Les Instituts de recherche en santé du Canada n'ont rien à envier aux institutions du reste de la planète. Voilà plus de 15 ou 20 ans qu'ils financent ma recherche sur la leishmania.
    La leishmania est un pathogène du groupe 2. Comme elle est transmise par des moucherons que l'on retrouve dans le sable, elle ne peut pas causer de maladies au Canada, mais la situation est bien différente dans les pays en développement, et surtout au Pérou où elle est à l'origine d'une forme grave de lèpre. Grâce au soutien des Instituts de recherche en santé du Canada, nous avons pu concevoir de nouveaux traitements pour cette maladie. À l'issue des tests en laboratoire, nous procédons maintenant aux essais cliniques au Pérou. Nous sommes en mesure de traiter les gens avant qu'ils ne contractent cette forme de lèpre. Cette initiative bénéficie de l'appui de l'Organisation mondiale de la santé et de Médecins Sans Frontières. Si nous pouvons effectuer des travaux aussi utiles, c'est grâce aux conditions idéales pour la recherche qui nous sont offertes au Canada.
    Je peux vous dire très franchement que si les dispositions du projet de loi C-11 avaient été adoptées dans leur forme actuelle, soit en incluant les pathogènes de niveau 2, il nous aurait été impossible d'apporter de telles contributions scientifiques et de soutenir la concurrence sur la scène internationale.
    J'estime que ce projet de loi comporte de nombreux éléments positifs, mais il n'en demeure pas moins que le milieu scientifique canadien est d'avis que l'on fait fausse route en mettant dans le même paquet les pathogènes de niveau 2 et ceux des groupes 3 et 4. On peut facilement rectifier le tir en retirant les pathogènes du groupe 2, de manière à cibler uniquement ceux des niveaux 3 et 4. C'est le message que je souhaitais vous communiquer aujourd'hui.
    Je vous remercie beaucoup d'avoir eu la patience de m'écouter.
(1600)
    Je tiens à vous remercier pour vos exposés d'aujourd'hui. C'est un point de vue intéressant qui nous donnera certes matière à réflexion. Les membres du comité se réjouissent de pouvoir maintenant vous poser leurs questions.
    Madame Duncan, pouvez-vous commencer?
    Merci, messieurs.
    Vos exposés étaient effectivement très intéressants. Je retiens notamment vos précisions concernant les différents niveaux de biosécurité et je conviens avec vous que la loi a pour but de protéger tant les Canadiens dans leur ensemble que ceux qui travaillent dans les laboratoires.
    J'ai plusieurs questions. Dans quelle mesure ce projet de loi est-il conforme aux recommandations de l'OMS et comment se compare-t-on aux États-Unis et au Royaume-Uni pour ce qui est des différentes catégories? Est-ce qu'il y a distinction entre le groupe 2 et le groupe 3?
    Je vais vous donner mon point de vue à ce sujet.
    En vertu du projet de loi C-11, les pathogènes du groupe 2 seraient traités différemment au Canada. Les États-Unis n'appliquent pas de restrictions semblables sur ces pathogènes. Ils le font pour les pathogènes des niveaux 3 et 4. Le projet de loi à l'étude s'applique à juste titre pour ces deux niveaux, mais fait fausse route dans le cas des pathogènes du groupe 2.
    Aux États-Unis, il est possible d'échanger les réactifs beaucoup plus librement sans avoir à obtenir d'abord un permis fédéral. Il n'y a pas de restrictions de sécurité. Je peux me rendre dans n'importe quel laboratoire aux États-Unis pour parler avec un chercheur. La réciproque n'est pas vraie ici. Si un scientifique américain vient me rendre visite, il n'aura pas accès à mon laboratoire. Il y a donc une différence. Il en va de même pour le Royaume-Uni et pour l'Europe dans son ensemble.
(1605)
    C'est ce que je voulais savoir. Merci.
    Quels changements préconisez-vous? Vous avez parlé de la distinction à établir avec le groupe 2. Au Canada, nous travaillons avec des étudiants. Quelle formation pourrait être offerte... pas seulement en laboratoire, mais aussi au chapitre de la déontologie concernant le travail avec les pathogènes de niveau 2, si cette distinction était établie?
    Chaque étudiant de deuxième cycle, et chacun de ceux du premier cycle également — en tout cas dans mon université, je ne sais pas pour ailleurs — doit suivre des cours sur l'éthique dans la recherche. Ces cours ne portent pas expressément sur les pathogènes, mais c'est l'un des sujets compris dans le cadre global des cours obligatoires de déontologie. Lorsque les étudiants viennent travailler en laboratoire, ils doivent suivre une formation en biosécurité. Il ne s'agit pas d'une formation de 10 ans, mais on leur enseigne tout ce qu'ils ont besoin de savoir pour travailler avec des micro-organismes. Ils doivent suivre une formation pour pouvoir travailler dans le laboratoire lorsqu'ils décrochent un contrat et participent à une recherche s'étendant sur plusieurs semaines.
    Pouvez-vous me rappeler la deuxième partie de votre question?
    Je vous remercie, c'est très bien.
    Monsieur Singer.
    J'ai déjà dirigé un centre de bioéthique et l'une des recommandations formulées par le comité du Conseil canadien des académies concernait cette culture de la responsabilité. Permettez-moi de vous raconter quelque chose.
    George Church est l'un des leaders mondiaux dans la production de brins d'ADN, une opération du secteur des sciences de la vie auxquelles sont associées certaines menaces de la prochaine génération. Il est un modèle auquel ses étudiants aiment bien s'identifier. Il leur parle des questions éthiques liées à la biosécurité. Il suit le parcours de tous ses étudiants après l'université. Il y a donc bien des choses qu'il est possible de faire, selon moi davantage de façon informelle et en prêchant par l'exemple qu'à l'intérieur du programme d'études proprement dit. Tout ce travail, effectivement sur les pathogènes, mais également dans l'ensemble des sciences de la vie, pose d'importantes menaces de la prochaine génération.
    C'est là où je voulais en venir.
    C'est pourquoi j'ai formulé cette deuxième recommandation préconisant un regard plus vaste sur les sciences de la vie, les menaces de la prochaine génération et tous les éléments de l'équation, y compris les aspects éthiques, au sujet desquels il est difficile de légiférer, voire d'appliquer une réglementation... Pour accroître la biosécurité au Canada, il faut absolument faire le nécessaire à cet égard.
    C'est la protection additionnelle, effectivement.
    Y a-t-il selon vous d'autres éléments qui devraient figurer dans la liste des toxines ou des modifications que vous voudriez voir apporter à cette annexe? Soyez très précis.
    Je crois que nous pourrions tous vous proposer des changements, mais je pourrais vous citer le mycobactérium bovis, un pathogène du groupe 3 connu sous le nom de BCG. C'est en fait un pathogène qui a été injecté aux tiers des habitants de la planète comme vaccin contre la tuberculose. Alors, je comprends mal comment on peut le classer parmi les pathogènes de niveau 3 quand il a été injecté à autant de gens aux fins de la vaccination.
    Y en a-t-il d'autres? Par exemple, le ricin ne semble pas...
    La bactérie E.coli. Il doit y avoir une façon de placer l'escherichia coli... On la retrouve parmi les pathogènes de niveau 2, mais il y en a également plusieurs souches inscrites dans le groupe 1. Tous les laboratoires au Canada et tous ceux de l'industrie travaillent avec des souches de la bactérie E. coli qui ne sont pathogènes pour l'être humain. C'est donc une grande source d'inquiétude pour le milieu.
    Et qu'en est-il des toxines?
    Pour les toxines, c'est différent. Mais existe-t-il des lignes directrices pour les toxines? L'agent de biosécurité de mon université m'indiquait qu'il n'y avait pas vraiment de lignes directrices pour l'utilisation des toxines.
    C'est ce que j'allais demander à M. Singer.
    J'allais dire que ces listes, surtout celles pour les groupes 3 et 4... Je ne suis pas microbiologiste, mais ces listes m'apparaissent plutôt raisonnables; elles sont comparables à ce que prévoit le règlement américain relatif aux agents désignés. Je tiens cependant à souligner qu'un bon biologiste moléculaire peut, en un tour de main, changer une bactérie non pathogène — et j'exagère à peine — en pathogène du groupe 3 ou 4. En tout cas, il peut certes augmenter son pouvoir pathogène. C'est le genre de menace contre laquelle un projet de loi semblable ne nous protège pas. C'est un élément crucial de la biosécurité.
    Pour que nous puissions vraiment aller de l'avant, j'ai recommandé une étude du Conseil des académies canadiennes qui formulerait des recommandations en dehors du cadre législatif.
(1610)
    Seriez-vous disposé à rédiger un amendement?
    Dans le sens de la recommandation que je viens de formuler, assurément.
    C'est cela. La recommandation.
    Oui.
    Merci beaucoup, monsieur Singer.
    Monsieur Malo.

[Français]

    Merci, madame la présidente.
    Merci à vous, messieurs les scientifiques, d'être présents cet après-midi pour donner une vision un peu différente de ce que nous connaissions déjà.
    Docteur Ouellette, selon ce que vous dites, le milieu des chercheurs n'a pas véritablement été consulté. Il y a plutôt eu une séance d'information.
    De votre côté, docteur Matlashewski, vous dites qu'au sein de la communauté scientifique, il y a encore énormément de questions et de craintes de voir les activités des différents laboratoires réduites ou compromises.
    En présumant que ce que nous dit l'Agence de santé publique du Canada est vrai, à savoir que le cadre réglementaire va être bâti à la suite d'une très grande consultation et que tous les intervenants vont être rencontrés, rassurés, et en tenant compte de ce que nous savons sur ces consultations et de ce qui a été fait dans le passé, je me demande si, pour vous, la seule véritable solution n'est pas d'éliminer carrément du projet de loi tout ce qui touche les pathogènes de niveau 2. Ainsi, le cadre réglementaire s'établirait de façon plus rapide, plus précise. Vous avez expliqué que les pathogènes humains de niveau 2 ne sont en aucun cas comparables aux pathogènes des niveaux 3 et 4.
    En effet, c'est le cas en ce qui concerne le risque pour la communauté. Si un individu est malade à cause d'un pathogène de niveau 2 ou 3, il peut également en mourir. Toutefois, ce n'est pas la même chose.
    En ce qui concerne le projet de loi C-54, je n'ai pas été consulté, pas plus que tous les collègues que je connais. Cependant, nous avons été informés. D'ailleurs, le député de notre circonscription, qui ne l'est plus maintenant — c'était Luc Harvey, du Parti conservateur —, a été très proactif à ce sujet. Il nous a fait visiter les bureaux de l'Agence de la Santé publique du Canada. Il est venu à l'Université Laval pour discuter de ce sujet. Il a été surpris que nous soyons étonnés.
    À présent, bravo! nous sommes consultés au sujet du projet de loi C-11. J'ai cru comprendre que cette consultation allait continuer. Tout le monde est en faveur d'augmenter la sécurité du public. Certaines pratiques existent déjà. Elles ont fait leurs preuves. Si nous pouvons les améliorer, avoir un cadre, tant mieux. Est-ce que nous nous sentons rassurés du fait que Santé Canada nous dit qu'il va maintenant y avoir un cadre régulateur qui va amoindrir, changer, ou circonscrire la loi différemment? Nous sommes des personnes de bonne volonté. Si jamais on nous demande notre avis et nos efforts pour avoir une loi qui soit la plus proactive possible, nous allons participer.
    La proposition du docteur Signer à l'effet que le cadre réglementaire soit établi non seulement par des fonctionnaires mais aussi par la communauté scientifique, les intervenants du milieu, donc, au fond, par un comité à part dûment mandaté pour l'établir vous convient-elle?
(1615)
    Absolument.
    Monsieur Malo, je suis d'accord en ce qui concerne le groupe 2. Selon moi, le groupe 2 ne doit pas être inclus dans ce projet de loi. Cela entraînerait trop de problèmes.

[Traduction]

    Ce serait la solution la plus facile et je crois que bien des problèmes seraient réglés si le groupe 2 était exclus de ce projet de loi.
    Je dirais que l'on utilise des pathogènes de niveau 2, plutôt que du groupe 3, pour plus de 90 p. 100 des travaux de recherche en microbiologie et immunologie effectués au Canada. Le retrait des pathogènes de niveau 2 n'entraînerait aucun risque additionnel pour la population canadienne. Les Canadiens sont bien protégés par les mesures déjà en place. Le maintien des pathogènes de niveau 2 dans ce projet de loi va assurément ralentir la recherche au Canada et miner notre capacité de soutenir la concurrence sur la scène internationale et d'attirer des sociétés de biotechnologie et de grandes entreprises comme les produits pharmaceutiques Merck.
    Si Merck a décidé de s'installer à Montréal, c'est en raison de l'expertise qu'elle peut y trouver, plutôt que de la qualité de vie qu'on peut lui offrir. Nous avons l'Université de Montréal, l'Université McGill, l'Université Laval et quelques-uns des meilleurs microbiologistes de la planète. C'est pour toutes ces raisons que Merck va s'installer chez nous. Je suis persuadé que si les pathogènes du groupe 2 demeurent visés par ce projet de loi, c'est notre développement économique et nos possibilités de travail dans ce domaine qui vont en souffrir.

[Français]

    En tant que chercheur à McGill, avez-vous été consulté au sujet du projet de loi C-54? Avez-vous été en mesure d'exprimer ces craintes très légitimes par rapport au contenu du projet de loi?

[Traduction]

    Nous n'avons pas vraiment été consultés... En tout cas, je n'ai eu connaissance d'aucune consultation auprès de l'Université McGill avant la rédaction du projet de loi. Je pense qu'on nous a présenté le projet de loi après coup, mais j'estime que si on nous l'avait soumis au préalable, nous aurions certes pu apporter notre contribution à ce moment-là.

[Français]

    Les craintes, encore une fois très légitimes, que vous exposées aujourd'hui ont-elle été, d'une façon ou d'une autre, transmises à l'Agence de santé publique du Canada avant aujourd'hui? Dans le moment, ses représentants sont dans la salle.
    Absolument. En fait, quand le projet de loi C-54 a été soumis, une des premières choses que l'on a faites — une communauté de chercheurs —, a été de lancer une campagne de lettres, de courriels. Les représentants de l'agence ont été très proactifs. Ils sont venus et nous ont expliqué le projet de loi. On a fait part de nos doléances face à ce projet de loi, puis il est mort au Feuilleton. À présent, le projet de loi C-11 est une réincarnation du projet de loi C-54. En gros, je pense qu'il est resté le même, sauf peut-être en ce qui concerne un pathogène qui était de niveau 3 et qui est maintenant de niveau 2. On avait fait beaucoup de lobby en ce sens parce que c'était une erreur, d'ailleurs. Oui, on leur a fait part de nos doléances.
    On est tous arrivés en même temps ici aujourd'hui et on s'est parlé pendant presque une demi-heure. Tout ce qu'ils disaient avait énormément de sens.

[Traduction]

    Merci, monsieur Ouellette.
    Nous passons à Mme Wasylycia-Leis.
    Merci, madame la présidente.
    Compte tenu des circonstances, je pense qu'il serait merveilleux si les représentants du ministère pouvaient être ici pour nous faire part de leur avis sur vos propos et échanger avec vous. Je suis un peu...
    Madame Wasylycia-Leis, ils seront ici dans 10 minutes environ. D'ici là, continuons avec le présent groupe de témoins.
    Ce serait bien que M. Plummer and Mme Tam soient là maintenant pour qu'il y ait des échanges de points de vue.
    J'y vais de ma première question. D'après les documents de la ministre, des consultations ont eu lieu en 2007 sur cette question. Avez-vous été consulté en septembre 2007?
    On signale également dans la documentation qu'aucune opposition ne s'est manifestée, même si certaines préoccupations ont été exprimées à propos de la mise en oeuvre.
    Vous vous ne souvenez d'aucune consultation?
    Je ne m'en souviens pas.
    Je n'ai pas été consulté en septembre 2007.
    Je pense que vous demandez où se trouve l'équilibre dans ce projet de loi. D'une part, vous parlez de ne pas nuire à la recherche, alors que les députés et le public se préoccupent de la nécessité de protéger la santé.
    On est aux prises avec beaucoup de problèmes liés aux pathogènes de niveau 1 ou 2 qui peuvent causer des décès. La listériose en est un bon exemple. Elle figure sur la liste des pathogènes du niveau 1, je crois. E. coli a entraîné beaucoup de décès et de nombreuses maladies. À mon avis, le ministère tient compte un peu de cela et se demande comment parvenir à un tel équilibre.
    Je pense que la priorité absolue doit être accordée à la protection de la santé et du bien-être. En deuxième lieu, il ne faut pas nuire à la recherche. J'imagine que les sociétés pharmaceutiques vous feront valoir avec insistance qu'ils veulent le moins de restrictions possible. Les universitaires et nous devons faire preuve de beaucoup de vigilance, et nous avons besoin de vos meilleurs conseils.
    Dans son exposé de l'autre jour, Mme Tam a indiqué que le programme et le règlement découlant de cette mesure législative sont moins rigoureux pour les personnes qui manipulent des anthropopathogènes et des anthropotoxines moins dangereux que pour celles qui manutentionnent les plus dangereux. Elle a donné l'exemple de la vérification de sécurité qui n'est pas nécessaire pour les personnes travaillant avec les anthropopathogènes de niveau 2.
    Dites-vous que ce n'est pas vrai ou qu'il y a d'autres restrictions qui sont problématiques? Comment parviendriez-vous au juste équilibre entre la protection de la santé et la recherche innovatrice.
(1620)
    Comme je l'ai dit et comme vous le dites, nous avons entendu le même message de la part de l'Agence de la santé publique du Canada, et nous sommes ravis de ce que nous avons entendu. On nous a demandé notre avis sur ce qui a été libellé. Ce qui a été libellé ne correspond pas à ce que vous dites.
    Me permettez-vous de revenir sur la question de la listériose, de Walkerton, du SRAS et de Clostridium difficile?
    il y a également la salmonelle, E.coli et les autres....
    Effectivement, ces agents pathogènes causent tous des maladies infectieuses susceptibles de se déclarer en tout temps quels que soient les règlements rigoureux pris. Nous avons expliqué la façon dont nous manipulons les pathogènes. La manipulation du pathogène n'a rien à voir avec la listériose, qui est plutôt causée par le fait que les établissements de traitement des viandes sont mal nettoyés. Le SRAS est une maladie infectieuse de l'Asie qu'on n'a pas décelé assez rapidement à Toronto. C'est une maladie infectieuse; c'est une question de santé publique. Cela n'a rien à voir avec la manipulation du pathogène. Les aspects liés à la manipulation des pathogènes seront utiles si nous pouvons effectuer de la recherche à cet égard pour améliorer le diagnostic et le traitement.
    Je vous remercie de votre explication. J'attendrai les réponses que me donneront les représentants de l'Agence de la santé publique du Canada.
    Monsieur Singer, vous souhaiterez peut-être apporter un commentaire sur cette question. Je voudrais vraiment avoir votre avis sur le bioterrorisme. Par le passé, j'ai souligné le manque de coordination au sein de l'administration fédérale. Compte tenu de tout le personnel qui doit être prêt en cas d'attaque bioterroriste, que faut-il faire pour favoriser la coordination et l'état de préparation?
    Je voudrais aborder brièvement la coordination et ensuite revenir à la question des pathogènes de niveau 2.
    J'ai entendu la question que vous avez posée à propos de la coordination et la réponse formulée mardi par Frank Plummer qui a bien expliqué, selon moi, tous les exercices sur table et la coordination au sein de l'administration fédérale.
    D'après moi, la coordination est nécessaire au sein de l'administration fédérale, mais elle ne garantit pas la biosécurité. Les représentants du gouvernement, les universitaires spécialistes des sciences de la vie et le secteur privé doivent collaborer et être sur la même longueur d'ondes.
    Lorsque que je siégeais au comité de la National Academy, et je ne propose pas qu'on agisse ainsi au Canada, les membres ont commencé à parler de leurs conflits d'intérêts. On y retrouvait tous ces scientifiques de Stanford ou d'ailleurs, et chacun se vantait de faire partie de tel comité de la Defense Intelligence Agency. Les représentants du gouvernement ne tenaient pas vraiment compte de l'avis des gens de l'extérieur. On pousse jusqu'à ce point la coordination et l'interaction, ce que je ne constate pas au Canada. Les Américains sont peut-être allés trop loin. Il y a peut-être un juste milieu.
    Voilà donc où je veux en venir en ce qui concerne la collaboration et la protection. Je pense qu'il vous faut plus de détails à ce sujet. C'est pourquoi je vous propose de recourir au Conseil des académies canadiennes.
    Au sujet des pathogènes de niveau 2, je vous dirai très brièvement que vous êtes confrontés au problème suivant selon moi — et je ne veux pas me substituer à eux, car les gens de l'ASPC accomplissent un travail magnifique. Mais je suis convaincu qu'ils vous diront la prochaine fois: « Nous vous avons garanti que les pathogènes de niveau 2 seront traités différemment dans le règlement et qu'on tiendra compte de la plupart des scénarios de Greg. Il n'y aura aucun problème. Nous n'aurons pas besoin d'habilitation de sécurité pour les pathogènes de niveau 2. » Et ils continueront ainsi.
    Je pense donc que les choix qui s'offrent au comité sont.... D'une part, dites-vous qu'il est suffisant d'établir uniquement dans le règlement la distinction entre les pathogènes de niveau 2 et les pathogènes de niveaux 3 et 4? À l'opposé, on retrouve ceux qui prônent d'exclure les pathogènes de niveau 2 du projet de loi. Et je pense que vous voudrez leur demander quels effets préjudiciables il en découlera.
    Entre ces deux extrêmes, il existe un compromis, solution que vous pouvez adopter. C'est pourquoi j'ai proposé le mécanisme du comité consultatif, composé d'utilisateurs qui conseilleraient la ministre sur la mise en oeuvre même après la période réglementaire. Il y a d'autres mécanismes ayant cette vocation.
(1625)
    Merci, monsieur Singer.
    Monsieur Carrie.
    Merci infiniment, madame la présidente.
    Je veux remercier les témoins d'aujourd'hui. Je peux vous assurer que vos propos ont amené les membres du comité à réfléchir.
    Je veux obtenir quelques précisions et aussi vous demandez de bien vouloir rester parmi nous lorsque le prochain groupe de témoins comparaîtra. Comme M. Singer l'a signalé, j'ai hâte d'entendre les réponses que ces témoins proposeront aux problèmes que vous avez soulevés.
    Je voudrais revenir encore à la question des pathogènes de niveau 2. Vous proposez qu'il faudrait peut-être les exclure totalement. Je vois là une apparence de conflit.
    Selon vous, monsieur Singer, un bon microbiologiste pourrait, même lors de travaux de recherche courante, manipuler un pathogène de niveau 2 qui pourrait devenir de niveau 3, voire de niveau 4. Le laboratoire ne serait peut-être alors pas prêt à composer avec une telle situation, sans compter les problèmes de biosécurité.
    J'ai parlé récemment à des représentants du secteur nucléaire, qui ont évoqué l'incident de l'eau lourde. Avec des déchets nucléaires, il est possible de fabriquer des bombes sales, qui ne sont pas aussi pires que les bombes nucléaires. Cependant, il existe une réglementation différente à cet égard.
    Pourriez-vous nous parler de la question d'équilibre? Je demande à chacun quelques précisions supplémentaires, parce que c'est là un problème avec lequel le comité est aux prises.
    Monsieur Singer, pourriez-vous répondre en premier?
    Il est vraiment important que les membres du comité ne tombent pas dans le piège de la métaphore, d'où mes précisions au sujet du nucléaire. Il y a d'une part la sécurité nucléaire, et je parle des bombes nucléaires, non des sales bombes qui posent un peu moins de problèmes. La sécurité nucléaire passe par le contrôle du plutonium et de l'uranium fortement enrichi. À l'opposé, il y a la cybercriminalité. Dans son sous-sol, un enfant de 12 ans peut causer beaucoup de tort avec un virus. Il y a un tel pouvoir de dissémination.
    Le risque chimique et le risque biologique ne sont pas loin de la cybercriminalité mais sont encore plus près du risque nucléaire. Ce que je vous disais en fait, c'est de ne pas tomber dans le piège de la métaphore nucléaire et de ne pas penser que sécurité des pathogènes signifie biosécurité. C'est nécessaire, mais ce n'est pas suffisant.
    À mon avis, il est vraiment important que le comité comprenne — parce que vous n'allez pas pousser à l'extrême la sécurité des pathogènes. Vous n'obtiendrez pas le résultat nécessaire de toute façon. Il vous faut l'appui des scientifiques, sinon cela équivaudrait à « chercher une aiguille dans une botte de foin ». De plus, vous devez vous attaquer à des problèmes indépendants du projet de loi, notamment la question des sciences de la vie.
    C'est le tableau de la situation.
    En fait, la première recommandation de notre comité de la National Academy proposait d'envisager plus globalement la gamme des menaces. Les scientifiques qui ont été assujettis pendant cinq ans aux règles sur les agents désignés aux États-Unis — qui sont analogues à celles-ci — nous disent d'arrêter de nous focaliser sur les pathogènes et de ne penser qu'à eux.
    Il faut prendre en considération les pathogènes, mais parmi ces scientifiques, les plus extrémistes élimineraient toute règle sur les agents désignés. Je ne suis pas d'accord, particulièrement en ce qui concerne les pathogènes de niveaux 3 ou 4. Ils nous disent cependant très clairement de ne pas nous focaliser sur les pathogènes et de songer aux autres risques. J'exagère un peu, mais pas trop, lorsqu'il s'agit d'agents qui passent du niveau 0 au niveau 3.
    C'est le point de vue dont je voulais vous faire part, alors que vous vous penchez sur la question de l'équilibre. Vous vous rendez compte que vous obtenez certains résultats, mais que vous ne réglez pas le problème. Il faut un processus parallèle. Il faut mettre à contribution les scientifiques.
    Ces précisions vous sont-elles utiles?
    Tout à fait. Mais je voudrais que les autres...
    Merci, monsieur Singer. Je suis désolé, mais il est 16 h 30 et je vais demander aux représentants de l'Agence de la santé publique du Canada, monsieur Tam, monsieur Plummer, monsieur Gilbert et madame Allain, de bien vouloir prendre place à la table. J'inviterais les témoins de l'autre groupe à demeurer ici pour intervenir au besoin.
    Je ne suspendrai pas la séance. Je voudrais que le changement de places se fasse le plus rapidement possible pour que nous puissions poursuivre nos travaux.
    La période de questions et réponses s'est révélée très intéressante. Je tiens à vous remercie infiniment, messieurs Ouellette, Matlashewski et Singer.
(1630)
    Merci à vous.
    Les représentants de l'Agence de la santé publique pourraient-ils prendre place à la table? Vous pouvez vous asseoir aux places qu'occupaient les représentants du Centre for Global Health. Merci.
    Nous allons passer immédiatement à la période des questions, étant donné que vous avez présenté vos exposés hier.
    Madame Murray, vous êtes la première.
    Madame Tam, avez-vous pris connaissance de la lettre adressée au Dr Butler-Jones par Craig Knight, sous-ministre adjoint au ministère des Services de santé de la Colombie Britannique?
    On y emploie un ton assez direct pour indiquer que les séances d'information précédentes n'ont pas répondu d'une manière satisfaisante aux questions en suspens. Je dirais que de graves préoccupations persistent non seulement sur le chevauchement que j'ai signalé la dernière fois, mais également sur le processus de consultation ou le manque de consultation. C'est d'ailleurs ce que viennent de nous confirmer d'éminents dirigeants de laboratoires universitaires, qui, eux aussi, n'ont pas été consultés à cet égard.
    Je me demande pourquoi on se précipite ainsi et pourquoi on agit ainsi. Pourquoi ne prend-on pas le temps de bien consulter les provinces, surtout qu'on pourrait empiéter sur les compétences provinciales et que la constitutionnalité de votre projet de loi pourrait être contestée devant les tribunaux, à cause de ce chevauchement des compétences? Pourquoi ne prend-on pas le temps voulu pour bien faire les choses? Combien cela nous coûterait-il d'attendre? De graves problèmes sont-ils survenus qui nécessitent qu'on s'y attaque à toute vapeur? Quelle est la raison de cette urgence?
     Premièrement, nous considérons qu'il s'agit là d'une question importante de sécurité. Il y a une lacune au Canada, et nous avons recommandé que le Parlement la corrige.
    Avant la présentation du projet de loi, il y a eu des consultations et séances d'information. Cependant, je conviendrais avec les témoins qu'il n'y a pas eu de consultations approfondies sur le projet de loi. À l'Agence de la santé publique du Canada, nous nous sommes penchés sur la question. Avant la présentation du projet de loi, nous avons pu brosser un tableau de la situation qui en découlerait, mais c'était dans le cadre d'une brève séance d'information.
    Quel est le rôle du ministère? Nous avons donné des conseils stratégiques au gouvernement sur le projet de loi qui devrait être présenté. D'habitude, on prend connaissance du projet de loi lorsque le gouvernement le présente au Parlement et on ne tient donc pas de consultation sur celui-ci avant son dépôt. La consultation des intéressés est cependant nécessaire, et c'est ce que nous ont dit les témoins. Dès le dépôt du projet de loi, nous avons sillonné le pays pour l'expliquer. Nous avons fait ressortir la distinction sur le degré de risque entre les pathogènes de niveau 2, 3 ou 4. Nous avons insisté sur la sécurité pour les pathogènes de niveau 3 et proposé d'assujettir les pathogènes de niveau 2 à des mesures essentiellement volontaires, dans le but de prôner la biosécurité.
    Lorsque le projet de loi est devenu un document public, nous savions d'emblée que nous devions intervenir, et nous avons pu consulter les chercheurs de tous les coins du Canada à cet égard. Nous avons examiné la lettre de la Colombie Britannique et nous voulons poursuivre dans cette veine. La véritable consultation porte sur le règlement.
    Dans la lettre, on se demandait si le règlement pourrait être libellé correctement. Vous avez donc là une idée précise de ce que la province souhaite dans la formulation du règlement, et c'est là, à mon avis, le début d'une très bonne consultation.
(1635)
    Merci.
    Je dirais que ce n'est pas toujours ainsi. Ayant présenté plusieurs projets de loi auparavant, je sais que vous pouvez consulter exhaustivement avant la rédaction du projet de loi, de façon à ce que celui-ci tienne compte de l'avis des principaux intéressés.
    Je ne sais pas à qui je devrais adresser ma prochaine question, mais visiblement le projet de loi cause de plus graves répercussions sur son règlement d'application. C'est un fardeau réglementaire. Il y a quelques années en Colombie Britannique, nous avons répertorié tous les règlements...
    Il ne vous reste que 30 secondes, madame Murray.
    Sait-on exactement ce que ce fardeau réglementaire représentera pour les laboratoires et les clients?
    Je pense que nous devons tenir des consultations au moment de l'élaboration des règlements. Nous voulons établir un juste équilibre entre la science, l'innovation et la biosécurité, ce qui veut dire que le fardeau va être moins lourd pour les laboratoires de niveau 2 que pour les laboratoires spécialisés de niveaux 3 et 4.
    À notre avis, les laboratoires de niveaux 3 et 4  — soit la presque totalité des 150 laboratoires — se conforment déjà au règlement sur l'importation des agents anthopopathogènes. Pour eux, les mécanismes sont déjà en place.
    Les préoccupations soulevées aujourd'hui, lors des séances d'information et dans la lettre rédigée par la Colombie-Britannique, portent sur des questions de détails. Or, ce sont justement les détails qui posent problème. Comment structurer un programme de manière à réduire les coûts au minimum? Comment structurer un programme pour les gens qui manipulent des pathogènes moins dangereux du groupe de risque 2, par exemple? Nous proposons d'établir des exigences moins rigoureuses. S'il n'est pas nécessaire de délivrer une habilitation de sécurité, ou encore d'inclure dans les inventaires les pathogènes des groupes de risque 3 et 4, nous pouvons instaurer une norme nationale élémentaire en matière de biosécurité en laboratoire.
    Les discussions entourant le groupe de risque 2 sont intéressantes, car nous exigeons déjà de ceux qui importent des pathogènes appartenant à ce groupe qu'ils se conforment aux lignes directrices en matière de biosécurité en laboratoire que prévoit le règlement sur l'importation des agents anthropopathogènes. En ce qui concerne les 3 500 laboratoires qui appliquent déjà ces lignes directrices — y compris ceux qui importent des agents pathogènes du groupe de risque 2 —, nous proposons d'uniformiser les règles du jeu afin que les autres laboratoires soient eux aussi assujettis à des lignes directrices raisonnables en matière de sécurité. Le retrait du groupe de risque 2 va provoquer un recul au niveau de la réglementation sur l'importation d'agents pathogènes humains et entraîner une baisse du niveau de sécurité des 3 500 laboratoires.
    Nous entendons discuter de toutes ces questions, c'est-à-dire de l'habilitation de sécurité, des coûts, du non-dédoublement des efforts déjà déployés par les provinces au chapitre de l'inspection des laboratoires, par exemple. Nous verrons s'il est possible d'harmoniser les processus d'élaboration des programmes et les règlements, d'en accroître l'efficacité.
    Merci, madame Tam.
    Madame McLeod.
    Merci, madame la présidente.
    Je trouve que c'est une très bonne chose, c'est ce que je pense du moins, que nous ayons eu l'occasion d'entendre le premier groupe de témoins, car nous pouvons maintenant également discuter du sujet avec vous. Cela nous permet d'avoir une meilleure compréhension des enjeux.
     Il y a un détail qui m'intrigue. Les chercheurs universitaires nous ont clairement dit que les laboratoires de niveau 2... À leur avis, les règlements ne permettront pas de régler cet aspect du problème. Je crois comprendre qu'il y a, au Canada, des établissements de niveau 2 qui ne sont pas des laboratoires universitaires. Êtes-vous en train de dire que cette mesure va permettre de rehausser leur niveau de classification? Pouvons-nous avoir un peu plus de précisions à ce sujet?
    Oui. Il existe divers régimes à l'heure actuelle dans les provinces. Les régimes, les lignes directrices, les exigences des provinces ont tendance à s'appliquer à certains laboratoires — par exemple, les laboratoires de diagnostic médical ou encore les laboratoires de recherche, qui doivent remplir certains critères pour avoir droit à des subventions de recherche. Il n'existe pas de norme nationale pour l'ensemble des laboratoires, qu'il s'agisse de laboratoires d'analyse de la qualité de l'eau, de laboratoires d'analyse environnementale, de laboratoires de recherche, de laboratoires universitaires ou de laboratoires de diagnostic. Or, il est essentiel que ces laboratoires soient assujettis à une norme nationale en matière de sécurité. Il faut absolument, à notre avis, uniformiser les règles du jeu.
    Les laboratoires de recherche sont sans doute ceux qui font un meilleur travail. Les établissements représentés ici par les témoins se conforment déjà aux lignes directrices en matière de biosécurité en laboratoire. Selon nous, la mise en oeuvre du projet de loi, si on accomplit déjà ce que l'on est censé faire, n'entraînera pas un dédoublement d'efforts important.
    Pour ce qui est des processus et de l'assouplissement du fardeau réglementaire, nous allons essayer, quand viendra le temps de concevoir les programmes, d'harmoniser certains éléments. Mais il est vrai que nous voulons essayer d'uniformiser les règles du jeu. Il y a beaucoup de laboratoires qui ne figurent pas parmi les meilleurs, mais qui suivent déjà les lignes directrices.
(1640)
    Je voudrais faire deux autres commentaires très brefs.
    D'abord, les règles visant l'importation des agents pathogènes sont très détaillées. Je présume que c'est quelque chose qui pourrait être harmonisé pour éviter tout dédoublement d'efforts.
    Absolument.
    Prenons l'exemple du régime de délivrance de permis. Nous allons, dans le cas d'une université, tenir compte des droits d'importation et de la demande de permis autorisant le transfert, entre établissements au Canada, d'agents pathogènes appartenant à un groupe de risque particulier, ainsi de suite. Nous pouvons simplifier et harmoniser les conditions de délivrance de permis dans certains domaines. Nous n'exigerons pas de permis d'importation distincts, ou encore de permis distincts pour les droits nationaux. Tout cela va être harmonisé.
    Merci.
    Il vous reste une minute, madame McLeod. Vous pouvez également partager votre temps de parole avec un de vos collègues.
    Madame Davidson.
    Merci, madame la présidente.
    Je pense que M. Singer a dit que la sûreté des agents pathogènes n'est pas la même chose que la biosécurité. D'après lui, le projet de loi ne peut pas couvrir tous les aspects de la question. C'est là une des préoccupations qu'il a soulevée.
    Est-ce que quelqu'un peut me donner des précisions à ce sujet?
    Je crois que nous accueillons positivement les idées de M. Singer. Nous discutons, lui et moi, de divers sujets. L'enjeu, il est vrai, est beaucoup plus vaste. Toutefois, le projet de loi et les règlements d'application constituent un pas dans la bonne direction. Certes, ils ne règlent pas tous les problèmes liés à la biosécurité. M. Singer a fait d'autres suggestions. Je suis certaine qu'il y a des chercheurs et des experts qui en auront également d'autres à soumettre.
    Les témoins qui nous ont précédés nous ont également donné des idées au sujet de la mise sur pied d'un comité consultatif d'experts qui se chargerait de nous fournir des conseils sur l'élaboration des règlements, des agents pathogènes qui devraient être inclus dans les différents groupes de risque, ainsi de suite. Nous prévoyons, en fait, mettre sur pied un tel comité. La Loi sur l'Agence de la santé publique du Canada précise même que le ministre peut mettre sur pied des comités d'experts en matière de réglementation.
    Je suis désolée, madame Davidson, mais votre temps est écoulé.
    Monsieur Dufour.

[Français]

    Merci beaucoup.
    L'exposé de M. Ouellette et celui de M. Matlashewski étaient fort intéressants. Au sujet du défunt projet de loi C-54, les scientifiques disaient qu'ils n'avaient peut-être pas été assez consultés. Il s'agissait davantage de séances d'information.
    Vous avez eu l'occasion de les entendre. Ils sont d'accord sur l'idée derrière le projet de loi C-11, mais ils ont fait certaines critiques sur des aspects bien précis. J'aimerais que vous me disiez ce que vous pourriez modifier dans le projet de loi C-11, à présent que vous avez entendu la version de M. Ouellette et de M. Matlashewski.
(1645)

[Traduction]

    Merci de la question.
    Encore une fois, les experts croient, comme nous, que nous devons tenir des consultations en bonne et due forme sur la réglementation. Nous savons qu'il faudra attendre encore deux ou trois ans avant de pouvoir élaborer des règlements. Et ce n'est pas seulement parce que le processus de réglementation au Canada est très rigoureux. Les experts doivent nous faire part de leurs vues sur la conception et la mise en oeuvre des programmes. Nous ne pouvons, sans leur contribution, établir des règlements. Nous le savons fort bien. Voilà pourquoi nous avons entamé avec eux ce que nous espérons être un dialogue fort constructif.
    J'aimerais préciser que le projet de loi soulève beaucoup d'interrogations. La loi elle-même sert de cadre. Ce qui préoccupe vraiment les chercheurs et les administrateurs des universités, ce sont les règlements et la conception des programmes. Pour ce qui est du projet de loi lui-même, seuls certains éléments vont entrer en vigueur immédiatement. Je songe, par exemple, à l'interdiction visant l'utilisation du virus de la variole. Nous trouvons cela logique. Nous voulons que son utilisation soit interdite. Les autres dispositions vont uniquement entrer en vigueur à la suite des consultations que nous allons tenir. Les discussions nous permettent d'apprendre beaucoup de choses. Par exemple, la mise sur pied d'un programme dans une grande université comme celle de Toronto, de comités de biosécurité bien informés et de règles de gouvernance, et les tests de sécurité alimentaire que mène un laboratoire sont deux activités bien différentes. Il existe une directive du Cabinet qui nous oblige à tenir des consultations sur la réglementation. Nous allons bien sûr nous y conformer. Nous n'avons pas le choix, car pour établir de bons programmes et des règlements solides, nous devons tenir des consultations en raison de la complexité de la tâche.
    Pour ce qui est du projet de loi lui-même, nous avons consulté les intervenants et nous pensons avoir atteint un juste équilibre entre l'innovation et la sécurité. C'est plutôt le règlement qui va demander un peu plus d'efforts. L'Agence de la santé publique du Canada est déterminée à tenir des discussions sérieuses avec les intervenants.

[Français]

    Il y avait une autre crainte, de la part de M. Ouellette particulièrement, par rapport au fait que les inspecteurs auraient peut-être trop de pouvoir en vertu du projet de loi C-11 et que cela pourrait peut-être ralentir leurs travaux. J'aimerais vous entendre à ce sujet.

[Traduction]

    Je crois comprendre qu'il y a des différences entre les projets de loi C-54 et C-11. Les inspecteurs doivent avoir un motif raisonnable de croire que les activités d'un laboratoire sont conformes à la loi ou aux règlements d'application.
    Nous avons également essayé de trouver un moyen d'harmoniser les règlements qui existent déjà dans les provinces. Nous avons songé, par exemple, à déléguer des pouvoirs, chose que permet le projet de loi. Si nous donnions aux inspecteurs provinciaux la formation dont ils ont besoin pour inspecter les établissements en vertu de la Loi sur les agents pathogènes humains et les toxines, nous serions en mesure de mettre nos capacités et ressources en commun et ainsi éviter d'imposer un double fardeau aux laboratoires.
    Merci beaucoup, madame Tam.
    Nous allons maintenant entendre M. Uppal. Je crois comprendre que vous allez partager votre temps de parole avec M. Brown.
    Merci.
    Merci, madame la présidente.
    Merci d'être venue nous rencontrer de nouveau.
    Ma question découle des observations formulées par les témoins qui vous ont précédée. Ils ont parlé des enquêtes de sécurité, du fardeau qu'elles allaient imposer, surtout aux étudiants et aux autres visiteurs. Pouvez-vous me dire pourquoi nous devons tenir de telles enquêtes, et pourquoi cette exigence figure dans le projet de loi?
    Le projet de loi traite de la biosécurité. Après les événements du 11 septembre, bon nombre de nos alliés ont adopté des mesures législatives sur la biosécurité. Le Canada ne possède pas encore de règles qui l'obligent à dresser des inventaires ou à établir la liste des personnes qui ont accès aux pathogènes les plus dangereux.
    Nous proposons, dans le cadre réglementaire, de moduler l'habilitation de sécurité en fonction du groupe de risque auquel appartiennent les agents pathogènes. Par exemple, nous ne pensons pas exiger une habilitation de sécurité pour le groupe de risque 2. Cette règle s'appliquerait à la vaste majorité des laboratoires. Il n'y en a que 150 environ qui manipulent des agents pathogènes appartenant aux groupes de risque 3 et 4.
    Nous songeons à cibler les agents pathogènes du groupe de risque 3. Par exemple, manipuler le virus VIH ou le virus de la tuberculose n'est pas la même chose que manipuler l'anthrax, qui figure également dans le groupe de risque 3, ou le virus du SRAS, qui est disparu de la population mais qui fait partie du groupe de risque 3. Ces questions feront également l'objet de discussions avec les intervenants lors du processus d'élaboration des règlements.
    Pour ce qui est du risque de groupe 4, M. Plummer et son voisin sont les seuls à diriger un laboratoire de niveau 4 au Canada. Ils mènent déjà des enquêtes de sécurité. 
(1650)
    Merci.
    Merci, monsieur Uppal.
    Monsieur Brown.
    Comme on l'a mentionné, il n'y a pas vraiment eu, au Canada, des incidents bioterroristes graves impliquant des pathogènes humains ou des toxines. Y a-t-il eu des incidents à l'extérieur du Canada qui démontrent qu'un tel cadre réglementaire s'impose?
    Oui. Je pense que les Canadiens se souviennent surtout du virus du SRAS, qui a maintenant été éliminé de la population humaine grâce aux efforts déployés à l'échelle planétaire.
    À Beijing, en Chine, le virus du SRAS a été propagé par des employés de laboratoire qui ont infecté des membres de leur famille. Le virus du SRAS, s'il n'est pas confiné, pourrait réapparaître au sein de la population. Personne ne veut revivre cette expérience.
    Heureusement, le Canada n'a pas eu à composer avec ce genre de situation. Toutefois, le virus du SRAS est peut-être éliminé au Canada, mais il y a sans doute plusieurs laboratoires qui le manipulent. Nous aimerions savoir quels sont ces laboratoires. Or, il n'existe pas de mécanisme systématique officiel qui nous permet de les identifier. Nous pouvons effectuer des sondages et autres choses du genre, mais nous n'avons pas le pouvoir de demander qui possède le virus du SRAS.
    Autre exemple: la salmonella est un agent qui fait partie du groupe à risque 2. Or, en Oregon, on a retrouvé des traces de cette bactérie dans les buffets à salade. Quelqu'un a contaminé un buffet à salade avec cette bactérie. Il s'agit là d'un acte bioterroriste. Mentionnons aussi les lettres contenant de la poudre d'anthrax trouvées aux États-Unis. Dans l'ex-Union soviétique, il y a eu une fuite d'anthrax qui a non seulement affecté les employés de laboratoire, mais également les habitants de la collectivité, des spores d'anthrax ayant été dispersés par le vent.
    Bon nombre de ces agents appartiennent aux groupes de risque 3 et 4. Ce sont ceux qui soulèvent le plus d'inquiétudes. Reste que les gens peuvent utiliser les bactéries salmonella et E. coli, entre autres.
    Il y a un autre virus qui est connu, soit celui de la polio. Il est en train de disparaître. Il a été éliminé des Amériques. Or, compte tenu des obligations que nous avons à l'égard de l'Organisation mondiale de la santé — et nous avons donné notre accord —, nous devrions savoir quels sont les laboratoires qui manipulent ce virus au Canada. Mis à part les quelques sondages que nous pouvons mener, nous n'avons pas le pouvoir de recueillir des données à ce sujet, ce qui veut dire que nous ne sommes pas en mesure de soumettre des rapports détaillés à l'OMS. Nous avons essayé de faire de notre mieux. Toutefois, ce projet de loi va nous permettre de déterminer quels sont les établissements qui manipulent le virus de la polio, le virus du SRAS, ainsi de suite.
    Merci, madame Tam.
    Nous apprenons des choses fort utiles aujourd'hui.
    Madame Duncan.
    Merci.
    J'ai du mal à croire que nous ne savons pas quels sont les laboratoires qui manipulent des virus appartenant aux groupes de risque 3 et 4. Je suis contente de voir que, dorénavant, nous allons avoir accès à cette information.
    Qu'en est-il des menaces ou des actes bioterroristes émergents? Est-ce que ce projet de loi va assez loin à cet égard?
    Il nous faut une approche plus globale, de portée plus vaste. Un projet de loi ou un règlement peut nous permettre d'assurer la biosécurité, mais dans une certaine mesure seulement. Les enquêtes de sécurité nous donnent l'assurance que les personnes qui manipulent les agents pathogènes appartenant aux groupes de risque 3 et 4 ont fait l'objet d'une vérification. Toutefois, il va toujours y avoir des personnes qui posent des gestes que nous ne pouvons prévoir.
(1655)
    Est-ce que le projet de loi pourrait être renvoyé au comité, une fois les règlements établis?
    Le processus d'élaboration des règlements auquel Mme Tam a fait allusion est très long. Il exige la tenue de consultations transparentes et sérieuses. Concernant le processus lui-même, les objectifs visés par le règlement sont soumis à une consultation. Le projet de règlement fait ensuite l'objet d'une publication préalable dans la partie 1 de la Gazette du Canada. Il s'ensuit une période de commentaires.
    Le ministère analyse les commentaires et les renseignements reçus, soumet le projet de règlement à un examen plus pointu, entreprend une révision en profondeur du règlement avant de faire publier la version finale de celui-ci dans la Gazette du Canada. Le résumé de l'étude d'impact de la réglementation, les commentaires des intervenants et les mesures prises pour répondre à leurs préoccupations sont également publiés dans la Gazette du Canada. Tous ces renseignements relèvent du domaine public.
    Nous en avons déjà discuté mardi. Je crois que nous avons reconnu qu'un système identique a été mis en place, par exemple, en Ontario. Que comptez-vous faire dans ce cas-là?
    Les lignes directrices provinciales-territoriales, ou les exigences définies par certaines provinces et certains territoires mettent l'accent sur la santé et la sécurité au travail, ou encore l'assurance de la qualité et les capacités de diagnostic. Les exigences varient d'un endroit à l'autre. Le projet de loi cible non pas un segment précis de la population comme les employés de laboratoire, mais l'ensemble des Canadiens.
    Par ailleurs, il n'existe pas de régimes provinciaux de portée générale qui s'appliquent à tous les laboratoires situés dans une province, comme les laboratoires de diagnostic médical, les laboratoires d'analyse de la qualité de l'eau, les laboratoires universitaires, ainsi de suite. Ces régimes ne mettent pas l'accent sur les exigences, comme la tenue d'inventaires ou l'identification des personnes qui ont accès aux agents.
    Madame Tam, je comprends ce que vous dites, mais je veux savoir comment nous allons... nous avons ici un système qui fait double emploi. Comment allons-nous composer avec cette situation?
    Pour ce qui est de la mise en oeuvre des programmes et des règlements, ce que nous examinons, ce sont les domaines dans lesquels nous pouvons harmoniser les règles. Par exemple, s'il existe déjà un programme d'inspection dans une province — il se peut qu'il vise uniquement les laboratoires de diagnostic médical, mais si un tel programme existe — nous allons l'utiliser, et non pas créer un deuxième programme. Comme je l'ai mentionné, nous pouvons demander au même inspecteur qu'il soumette un rapport. Nous pouvons simplifier les mécanismes de présentation de rapports afin que le laboratoire ne soit pas obligé d'en soumettre plusieurs. Nous pouvons harmoniser certaines de ces choses.
    En est-il question dans le projet de loi? Des préoccupations à ce sujet ont été formulées par les universités, par exemple, les laboratoires. Pouvons-nous, à cet égard, apporter des éclaircissements au projet de loi?
    Nous pouvons le faire par le truchement du processus d'élaboration des règlements. Nous avons beaucoup parlé du concept d'équivalence au moment de l'élaboration du projet de loi. Ce sujet a fait l'objet de nombreuses discussions, en raison des problèmes que suscitaient l'interprétation du concept et les objectifs de certains régimes. Il a été difficile de produire ce document repère. Si nous voulons aller de l'avant, nous devons, comme nous l'avons mentionné, trouver des moyens d'harmoniser les règles par l'entremise du processus de mise en oeuvre des programmes.
(1700)
    Merci, docteur Tam.
    Madame Wasylycia-Leis.
    Merci beaucoup.
    J'aimerais obtenir une réponse directe des professeurs Ouellette et Matlashewski. Peut-être que vous, docteur Plummer, en votre qualité de membre de la communauté chercheurs-universitaires-scientifiques, avez entendu leurs préoccupations. Ils sont très inquiets de l'incidence de ceci sur leur capacité d'encourager les étudiants, de leur enseigner et de leur offrir des occasions d'innovation scientifique. Pouvez-vous les rassurer?
    Lors de mon témoignage, mardi, devant le comité, j'ai dit qu'à prime abord, quand j'ai vu ce que proposait le projet de loi, j'ai eu les mêmes préoccupations. J'ai été rassuré et convaincu par mes collègues de l'agence, avec lesquels j'ai eu, dirais-je, des discussions plutôt animées, que le règlement réglera ces questions, qu'aucun fardeau trop lourd ne sera imposé à des personnes qui travaillent sur des agents de niveau 2, et que l'enseignement et la recherche se poursuivront. Il y aura un certain fardeau, mais je ne pense pas qu'il soit trop lourd; c'est gérable.
    Bien des mesures qui devront être mises en place ou seraient exigées par cette loi devraient exister de toute façon dans un laboratoire bien géré — les inventaires et ce genre de choses. Bien que le risque pour la santé publique d'une infection par un agent de niveau 2 contractée au laboratoire soit faible en général, ce risque existe. Il y a un virus de la grippe qui circule en ce moment, de type H1N1, qui tire probablement son origine d'un accident de laboratoire ou d'une libération intentionnelle en Russie dans les années 1970. Il circule depuis lors, et est la source d'une petite pandémie. Donc, il ne peut y avoir absence absolue de risque.
    Je vois. Je vous remercie de ces assurances, mais je m'inquiète et me méfie un peu que l'on veuille tout laisser sur le compte du règlement. Nous avons déjà emprunté cette voie auparavant. Nous avons perdu le contrôle, en tant que parlementaires. À moins que nous déposions et adoptions une motion selon laquelle tout règlement doit d'abord passer par ce comité, comme nous l'avons fait pour les technologies de reproduction, et nous attendons d'ailleurs encore — je pense que cela fait déjà huit ans — je ne suis pas convaincue que nous ayons la moindre assurance d'obtenir les résultats recherchés. Nous entendons exprimer des inquiétudes très graves, et je pense qu'il nous faut pouvoir dire à la communauté universitaire un peu plus que de seulement attendre le règlement.
    Alors j'aimerais que vous m'en parliez, et aussi, bien entendu, entendre quelque chose de plus concret que de simplement dire que nous discutons tout le temps avec des comités consultatifs, ou que cela fait partie du processus... du concret. Si ce n'est pas dans la loi et nous devons nous fier au règlement, il nous faut quelque chose avec quoi nous puissions avoir une relation, un moyen d'assurer la reddition des comptes et la transparence.
    Pour nous, il y a toujours un choix pour ce qui est de recommander ce qui devrait être dans la loi et ce qui devrait être dans le règlement, mais comme je le disais à mon dernier passage devant le comité, c'est très complexe, et c'est pourquoi les membres du comité et les témoins estiment, et ils ont raison, qu'il faut travailler avec les intervenants et trouver un moyen. Il faut, surtout, travailler sur une longue période pour faire en sorte que les systèmes de gouvernance sont interreliés, pour nous assurer que le programme est conçu avec logique et que le système réglementaire correspond aux enjeux avec lesquels nous composons. Il est très difficile d'y parvenir dans la loi, là où tout est figé, et si c'est dans le règlement, on peut avoir le processus de consultation nécessaire à l'Agence de la santé publique du Canada pour pouvoir créer le meilleur programme qui soit.
    Au-delà de ceci, cependant, nous sommes ici aujourd'hui pour dire, par exemple, que nous n'aurons pas d'habilitation de sécurité pour les laboratoires de niveau 2. Nous sommes devant le comité de la Chambre des communes pour dire que nous voulons aller de l'avant avec cela, qu'il sera plus simple de faire les inventaires, que l'octroi de permis pour les laboratoires de niveau 2 se fera au moyen d'un système Web, par lequel l'Agence de la santé publique recevra les demandes, que des analystes examineront et ils vérifieront qu'il y a un inventaire, et le permis sera octroyé. Alors nous essayons, en fait, de faire cette différence entre les pathogènes réellement mortels des niveaux 3 et 4 et ce que ce sera, et de bien indiquer qu'au niveau 2, le point de mire sera sur une bonne biosécurité, rien que pour savoir qui a quoi et que les pathogènes qu'ils ont vraiment dans leurs laboratoires sont de niveau 2 et non pas 3 ou 4. Alors c'est ce qu'il nous faut déterminer, et c'est pourquoi nous nous concentrons sur le niveau 2.
    Au plan réglementaire toutefois, nous voulons faire les choses comme il le faut. Nous voulons dialoguer avec les intervenants, et le processus réglementaire y est bien plus favorable que le processus législatif.
(1705)
    Merci, monsieur Gilbert. Je regrette, mais c'est tout le temps que vous aviez.
    Madame Davidson.
    Merci, madame la présidente. Je vais poser la question que je n'ai pas eu le temps de poser la dernière fois.
    Nous parlions des enjeux de la biosécurité. Est-ce que le ministère a des plans concrets pour continuer, en ce qui concerne la biosécurité? Est-ce qu'il y a des plans concrets pour mettre sur pied un comité consultatif, pour poursuivre cette mise en oeuvre? Je pense que tout le monde a dit que ce projet de loi, bien qu'il assure la sécurité des pathogènes, du moins nous l'espérons, n'assure pas la biosécurité. Alors qu'est-ce qui est prévu pour poursuivre cette démarche?
    Je pense que nous avons entendu de bonnes idées aujourd'hui. Monsieur Signer nous a déjà parlé du concept de faire examiner une étude à des écoles canadiennes, du moins pour commencer. Alors il est certain que nous allons étudier certaines de ces approches.
    Pour ce qui est de la lutte contre le terrorisme ou le bioterrorisme, il y a bien d'autres volets à la démarche de l'Agence de la santé publique. Par exemple, nous avons un plan pour la variole, et nous avons un stock de vaccins, nous avons prévu des contre-mesures pour l'anthrax, etc. Alors il y a de nombreuses composantes, mais je pense que ce dont a parlé M. Signer, au sujet des nouveaux éléments, est probablement le genre de domaines... l'approche « de pointe, ce qui pourrait venir ensuite ». Nous n'avons pas encore réfléchi à cela en profondeur, de manière concertée. Il se peut qu'il y ait d'autres secteurs du gouvernement, notamment au plan de la recherche en défense, qui s'intéressent à certains de ces aspects, et il est certain que nous collaborerons avec eux aussi.
    Je vous remercie. Je regrette, je n'étais pas là mardi pour entendre votre présentation, mais j'ai ici une lettre que j'ai reçue de l'Agence ontarienne de protection et de promotion de la santé, et je présume que vous avez, vous aussi, reçu cette lettre. Ils avaient exprimé certaines préoccupations relativement à plusieurs aspects précis sur lesquels, selon nous, un examen plus poussé s'imposait, et ils avaient parlé de consultation avant l'adoption de règlements, d'éviter les régimes d'inspection multiples, et il se peut bien que ce soit ce dont parlait Mme Duncan. Ils parlent aussi de la portée de l'application d'une loi, de l'octroi de permis, de la clarté relativement au risque professionnel comparativement au risque pour le public, et de la communication de renseignements au ministre.
    Pourriez-vous parler de certaines de ces choses, en ce qui concerne l'Ontario, et me dire si c'est le même genre de préoccupations qu'a soulevées la Colombie-Britannique?
    Je pense qu'elles sont assez similaires. Certaines des questions relatives à la mise en oeuvre sont aussi similaires à celles que nous avons entendues lors des séances initiales d'information. Nous devons rencontrer le Dr Vivek Goel la semaine prochaine pour examiner cela en détail.
    Nous avons parlé un peu d'habilitation de sécurité. Nous allons, ensemble, chercher les moyens d'harmoniser plutôt que de reproduire les efforts de conception de programmes et de règlements.
    Je pense que l'on craint aussi beaucoup l'effet d'entonnoir, en ce qui concerne les habilitations de sécurité, par exemple. D'un côté, c'est bon que le gouvernement fédéral assume le coût des habilitations de sécurité, mais on se demande avec angoisse s'il pourra les traiter assez rapidement. Il faut examiner le programme d'habilitations de sécurité lui-même, avec les intervenants aussi, pour déterminer ce qui est acceptable, faisable et raisonnable.
    Pour ce qui est de la question des pouvoirs du ministre de la Santé, bien qu'ils soient, de manière générale, formulés dans le même language juridique dans un projet de loi, nous voulions rassurer les provinces et territoires qu'il y a des limites. Le ministre peut demander à ce que des renseignements lui soient communiqués ou exercer les pouvoirs que lui confère le projet de loi seulement pour ce qui concerne la loi elle-même. Pour les deux autres conditions, ces renseignements peuvent être divulgués s'il y a danger immédiat ou incident lié à la sécurité publique, ou s'il y a des exigences internationales de déclaration, comme dans le Règlement sanitaire international. Ces pouvoirs ont donc des limites bien définies.
    Je ne sais pas si Jane veut ajouter quelque chose.
(1710)
    Merci, docteur Tam.
    Nous laissons maintenant la parole à M. Carrie.
    Merci beaucoup, madame la présidente.
    J'aimerais porter deux ou trois choses à votre attention. Quel que soit le type de règlement ou de loi, on veut en assurer l'équilibre. Je pense que vous avez déployé d'énormes efforts, et que vous y parvenez assez bien, mais j'ai tout de même quelques inquiétudes. Je pense que le Dr Ouellette disait qu'il arrive, dans ces laboratoires, que l'on fasse des manipulations génétiques, et les pathogènes sont modifiés. Est-ce que chacun de ces actes, dans le quotidien, sera assujetti à des règles sévères? Je ne voudrais rien faire qui nuise à la recherche et au développement ici, au Canada.
    Je me demande si vous pouvez revenir sur ce que disait le Dr Matlashewski, et apaiser quelque peu ces préoccupations. Nous avons ce projet de loi devant nous. Je l'ai étudié, et il me semble vraiment bien. Y a-t-il autre chose que vous aimeriez dire, qui convaincra la communauté de la recherche que vous la consulterez sans faute, au fur et à mesure des progrès réalisés?
    Ce que je trouve instructif, c'est qu'il y a un écart quand on essaie de sensibiliser les gens à ce qui arrive entre le projet de loi, qui englobe tout, et l'élaboration d'un règlement. Il faudrait que nous parvenions mieux à le faire comprendre.
    Nous sommes absolument résolus à consulter. Dans le cadre actuel, nous envisageons un permis qui englobera le groupe à risque dans son ensemble. Nous ne demandons pas de permis pour des pathogènes particuliers. Si on manipule un pathogène, tant qu'on n'augmente pas son incidence sur la santé ou encore son pouvoir pathogène, et qu'il est dans ces limites, il n'est pas nécessaire d'obtenir un autre permis rien que parce qu'on doit manipuler un organisme. Si, toutefois, la manière dont on manipule l'organisme augmente sa pathogénicité et le niveau de risque à 3 ou 4, il faut nous appeler s'il y a la moindre question à ce sujet. Nous aimerions en discuter, et ce comité scientifique expert peut se réunir pour discuter de certaines de ces situations.
    Avec le mécanisme d'octroi de permis lui-même, nous pouvons certainement faire beaucoup pour réduire au minimum le fardeau réel de la communauté de la recherche.
    Est-ce que quelqu'un d'autre aimerait en parler? Avons-nous appris quelque chose aujourd'hui, en écoutant les chercheurs, sur le moyen de mieux faire ceci?
    Je pense que nous étions conscients que certains de ces aspects susciteraient des préoccupations. Les scientifiques qui travaillent avec moi au Laboratoire national de microbiologie ont exprimé ce type de préoccupations. Mais si on a un permis très limité, comme Theresa vient de l'expliquer, je ne vois pas en quoi cela pourrait être un fardeau trop lourd. Je vais, moi aussi, devoir appliquer ces dispositions, et je ne trouve pas que ce soit trop lourd, pas du tout.
    Je pense que mon collègue, M. Uppal, a quelque chose à dire.
    Monsieur Uppal, voulez-vous prendre ce qu'il reste de temps? Vous avez deux minutes.
    Merci, madame la présidente.
    Pour revenir un peu sur ce que vous avez dit au sujet du comité de scientifiques qui étudierait de certaines de ces questions, en pratique, à quel point serait-il facile de les joindre, à quelle fréquence est-ce qu'ils se réuniraient, et avec quelle rapidité y aurait-il une réponse à une question d'un laboratoire?
    Je pense que c'est là, encore une fois, qu'il nous faut créer le comité consultatif. Il existe déjà un groupe de référence pour le mécanisme actuel et les consultations, potentiellement, sur l'élaboration de règlements.
    Ce que nous constaterons, c'est que lorsque ce projet de loi et le règlement afférent entreront en vigueur, concrètement, bien des gens différents nous en parleront. Il y a beaucoup de scientifiques et beaucoup d'experts, tant au Canada qu'à l'étranger, dont nous pouvons tirer parti.
    Le concept prévoit notamment qu'il y aura un comité consultatif d'experts, mais nous avons aussi quantité d'experts sur des pathogènes très particuliers, des gens qui sont déjà sur une liste et qui ont convenu de nous fournir des conseils experts au besoin, très rapidement.
    Il nous faut, vraiment, des listes d'experts non seulement pour ce projet de loi ou ce règlement particulier; il nous en faudra, de toute façon, pour obtenir rapidement des réponses relativement aux nouveaux pathogènes. Vous savez que nous avons déjà deux experts sur le leishmania et ils seront probablement tout à fait disposés à nous aider, parce qu'ils seront prêts à intervenir. Alors je pense qu'il y a des incitatifs, des deux côtés, pour mettre sur pied un comité qui soit viable, au courant et efficace.
    Ce que nous aimerions faire, potentiellement, c'est de formuler un concept au sujet duquel nous pourrions consulter — « Que pensez-vous de ce concept de structure d'un comité? » — pour voir les réactions de nos intervenants.
(1715)
    Merci, docteur Tam.
    Il ne nous reste que quelques minutes. Nous avons fait nos tournées. Est-ce que quelqu'un, ici, aurait d'autres questions à poser? Il nous reste quelques minutes, si vous voulez les prendre.
    J'ai les noms de Mme Bennett, M. Malo et Mme Wasylycia-Leis. Nous n'arriverons pas à entendre tout le monde.
    Docteur Bennett, vous êtes la première.
    J'ai deux choses. Tout d'abord, avez-vous une réponse à donner aux préoccupations qu'a exprimées le groupe de tout à l'heure? Je suis sûre que vous les avez entendus: l'aspect de l'habilitation de sécurité, pour le partage d'échantillons entre collègues, et ce genre de choses. Avez-vous envie d'offrir une réponse du genre « quelle idée superbe » ou « oui, mais » à ce qu'a dit le groupe précédent?
    Ma deuxième question est la suivante. Nous savons que parfois, avec les comités consultatifs sur des sujets scientifiques, les gouvernements se font critiquer, comme quoi dès que le comité est annoncé, le monde connaît d'avance la réponse. Avez-vous des idées sur la manière dont vous le mettriez sur pied et si le Conseil consultatif des sciences de Santé Canada pourrait participer au choix des membres du comité, pour faire les meilleurs choix possibles de gens pouvant donner conseil sur quelque chose aussi importante que ceci?
    La dernière question vient de Derek Lee. Il semble que la vérification, en bout de ligne, du règlement, manque dans ce projet de loi, c'est-à-dire son examen par le comité ou le Parlement. Dans tout cela, pour chaque projet de loi concernant des règlements et la science, nous allons proposer un amendement de Derek Lee nous demandant de... On ne peut pas supprimer l'élément de surveillance du Parlement à priori et à posteriori.
    Il y a plusieurs questions auxquelles d'autres membres du groupe ne pourront peut-être pas répondre, mais j'aimerais revenir sur deux ou trois autres choses dont ont parlé des témoins précédents.
    La question du groupe de risque 2, je pense, est celle qui inquiète le plus. Ce que nous avons dans le projet de loi est un juste équilibre entre une liste qui assure un certain degré de clarté et fournit quelques définitions, qui nous aideront à attraper certains éléments qui ne sont pas sur la liste, par exemple. Nous avons entendu parler du colibacille, et du fait que vous voulez vous assurer qu'il ne soit question que de types pathogéniques. Nous estimons que le projet de loi, dans son ensemble, ne traite que de pathogènes humains et ne concerne en rien ce qui n'est pas pathogénique pour les humains.
    Mais nous envisageons de mettre entre crochets — après « colibacille », par exemple — les souches pathogéniques, ce qui est raisonnable. C'est clair pour nous, mais cela semble avoir créé beaucoup d'angoisse dans la communauté. Bien que nous puissions clarifier ce texte comme étant général, il y a des moyens relativement faciles de composer avec le risque que pose les pathogènes de niveau 2. Mais nous ne nous intéressons qu'à ceux qui sont de nature pathogénique, et pas à ceux qui ne le sont pas.
    Pour ce qui est du comité consultatif, il est certain que nous sommes très ouverts à toutes les idées qu'on peut nous donner. Nous voulons un processus ouvert et transparent. Il faut que ce soit scientifique; je pense que c'est un principe fondamental. Ce ne peut être...
    Le comité consultatif doit fournir des conseils transparents à la ministre. Celle-ci peut en faire ce qu'elle veut, mais je pense que les Canadiens doivent savoir ce qu'ont dit les scientifiques. Alors, si la ministre doit prendre une décision politique, c'est différent; c'est bon. Au moins, les Canadiens sauraient ce que dit la science.
    Et je suis d'accord avec cela aussi.
    Je vous remercie.
    Monsieur Malo.

[Français]

    Merci, madame la présidente.
    Depuis le début de cette étude, depuis le dépôt de ce projet de loi, on a surtout entendu les gens du ministère nous exposer leur point de vue sur ce sujet. Aujourd'hui, on a eu l'occasion d'entendre trois chercheurs, trois professeurs qui sont sur le terrain. Ce qu'on a appris aujourd'hui est tout à fait nouveau. On a appris qu'il était possible de respecter l'esprit de la loi et ce qu'elle tente de faire, en éliminant du projet de loi tout ce qui touche le niveau 2. Je n'ai pas entendu de votre part d'arguments suffisamment forts à l'effet que si on retire le niveau 2, cela causera des torts, et l'esprit et l'objectif du projet de loi ne seront pas respectés. J'aimerais vous entendre à ce sujet et également sur d'autres questions.
    Le professeur Matlashewski nous disait que ça allait ralentir la recherche, ralentir les percées, empêcher nos chercheurs et notre industrie d'être à la fine pointe de la technologie et de répondre aux exigences de l'industrie qui souhaite s'installer ici. J'aimerais vous entendre à ce sujet. Si en conservant le niveau 2 dans le projet de loi, cela nous empêche de bien faire notre travail, cela pose problème.
    Il y a un autre problème. Je suis convaincu que vous allez nous dire que, par le biais la réglementation, tout cela sera réglé. J'aimerais savoir si vous êtes conscients que ce que vous nous demandez à nous, les parlementaires, et à la communauté scientifique qui travaille en laboratoire, c'est de vous donner carte blanche.
(1720)

[Traduction]

    J'aimerais répondre à cela en disant que nous avons l'assurance que le programme est fondé sur le règlement actuellement en vigueur relatif à l'importation de pathogènes humains. De fait, ces laboratoires le font déjà, et cela ne les a pas empêchés de faire de la recherche ou d'innover. Nous essayons d'assurer des règles du jeu équitables en faisant que tous les laboratoires qui n'importent pas soient assujettis aux mêmes normes que les laboratoires qui importent déjà.
    Si on élimine le groupe de risque de niveau 2, ce qui arrivera, c'est qu'il faudra probablement maintenir le règlement relativement aux importations — qui englobe des éléments du groupe 2 — tel qu'il est, et il faudra maintenir des règles du jeu qui ne sont pas équitables, puisqu'il y aura des laboratoires qui obtiendront des pathogènes à l'échelle nationale et d'autres qui les obtiendront de l'étranger. Le SRAS, actuellement, par exemple, est un pathogène intérieur.
    Alors vraiment, c'est fondé sur le règlement actuellement en vigueur.
    L'autre préoccupation concernait l'habilitation de sécurité. Nous disons qu'elle n'est pas nécessaire pour les pathogènes de niveau 2, et on peut avoir des gens qui accompagnent les scientifiques particuliers qui travaillent sur ceux de niveau 3, s'ils n'ont pas encore obtenu leur habilitation de sécurité. Il y a des enjeux liés à l'inventaire dont veulent discuter les gens, et des questions de coûts, et ce sont des détails que nous ne pouvons pas préciser tant que ceux des programmes n'auront pas été définis. C'est pourquoi il est beaucoup plus facile d'en traiter dans un règlement que de les préciser dans le projet de loi lui-même.

[Français]

    Le seul ajout que je ferais aux propos du Dr Tam, c'est qu'en vertu de l'alinéa 33b) du projet de loi, si la personne est accompagnée d'une personne qui est titulaire d'une habilitation de sécurité, cela peut toujours se faire, pourvu qu'elle soit accompagnée et surveillée. C'est écrit explicitement dans le projet de loi. Les autres détails quant au niveau de risque et à savoir qui doit se soumettre à cette notion de sécurité vont se limiter aux niveaux 3 et 4. Ce qui concerne l'accompagnement est dans la loi.

[Traduction]

    Merci, madame Alain.
    Madame Wasylycia-Leis.
    Merci beaucoup. J'ai une question, très rapidement.
    Je m'inquiète beaucoup de devoir tellement laisser pour le règlement. Je m'en soucie pour les universitaires qui sont ici aujourd'hui et qui ont exprimé leurs préoccupations. Je vois que vous essayez de leur répondre, mais je pense encore qu'il faut trouver un autre moyen de les assurer que leurs préoccupations recevront réponse.
    Mais je m'inquiète aussi du manque de contrôle sur le règlement relativement à ce que pourrait chercher à faire de grandes compagnies pharmaceutiques sous couvert de cette loi. Je ne pense pas que nous ayons entendu des représentants de compagnies pharmaceutiques devant ce comité. Cela m'angoisse beaucoup. Ils pensent que le projet de loi est tout ce qu'il y a de mieux, et je trouve que c'est inquiétant. Je ne suis pas sûre que vous les ayez consultés, mais en tout cas, je suis très inquiète qu'on veuille laisser tout cela aussi ouvert.
    Jane pourrait peut-être vous dire pourquoi il est important que le projet de loi confère plus de pouvoirs pour qu'on puisse réagir très rapidement lorsqu'il le faut, dans l'intérêt de la santé ou de la sécurité du public.
    Pour ce qui est des compagnies pharmaceutiques, il est certain qu'elles ont participé aux consultations. Au Québec, par exemple, GSK et d'autres ont participé à certaines de ces séances. Il est vrai qu'elles n'ont pas exprimé beaucoup de préoccupations relativement à ce projet de loi. Je pense que toutes importent déjà des pathogènes, par exemple, qui sont déjà assujettis au règlement actuel, et elles ne nous ont pas exprimé de préoccupations particulières. Mais il serait intéressant, c'est vrai, qu'elles nous en parlent.
(1725)
    Alors nous verrons.
    Je tiens à vous remercier infiniment, et particulièrement nos invités. Cela fait deux fois que vous revenez, et j'apprécie, c'est certain, vos commentaires éclairés. Je pense que notre comité a déjà bien profité de votre présence ici. Bon voyage de retour à Winnipeg et ailleurs.
    La séance est levée.
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