INDU Réunion de comité
Les Avis de convocation contiennent des renseignements sur le sujet, la date, l’heure et l’endroit de la réunion, ainsi qu’une liste des témoins qui doivent comparaître devant le comité. Les Témoignages sont le compte rendu transcrit, révisé et corrigé de tout ce qui a été dit pendant la séance. Les Procès-verbaux sont le compte rendu officiel des séances.
Pour faire une recherche avancée, utilisez l’outil Rechercher dans les publications.
Si vous avez des questions ou commentaires concernant l'accessibilité à cette publication, veuillez communiquer avec nous à accessible@parl.gc.ca.
Comité permanent de l'industrie, des sciences et de la technologie
|
l |
|
l |
|
TÉMOIGNAGES
Le lundi 17 octobre 2011
[Enregistrement électronique]
[Traduction]
Bon après-midi, mesdames et messieurs. Bonjour à tous. Bienvenue à la septième réunion du Comité permanent de l'industrie, des sciences et de la technologie.
Nous poursuivons notre étude sur le marché du cybercommerce au Canada. J'aimerais vous signaler la présence parmi nous d'éminents invités. Je prendrai un peu de temps pour vous les présenter.
Nos deux premiers témoins, qui comparaissent à titre personnel, sont Michael Geist, titulaire de la Chaire de recherche du Canada en droit d'Internet et du commerce électronique de l'Université d'Ottawa, et Jacques St Amant, chargé de cours au Département de sciences juridiques de l'Université du Québec à Montréal.
Nous entendrons ensuite les représentants de Manufacturiers et exportateurs du Canada, à savoir Mathew Wilson, vice-président, Politique nationale, et Martin Lavoie, directeur des politiques, Fabrication de compétitivité et d'innovation.
Je précise à l'intention des membres que, même s'il y a deux représentants pour une même organisation, il n'y aura qu'une seule déclaration préliminaire.
Nous recevons aussi Wendy Cukier, vice-présidente de la recherche et de l'innovation à la Ryerson University.
Finalement, nous entendrons les représentants du Ottawa Centre for Regional Innovation, soit Blair Patacairk, directeur principal, Investissement, et Samer Forzley, directeur principal, Market Drum.
J'espère avoir prononcé tous vos noms correctement. Nous débuterons, comme d'habitude, par les déclarations liminaires, pour lesquelles vous disposerez de six minutes. Ensuite, à tour de rôle, les membres vous poseront des questions.
La parole est maintenant à monsieur Geist pour six minutes.
Bon après-midi.
Comme vous l'avez entendu, mon nom est Michael Geist. Je suis professeur de droit à l'Université d'Ottawa, où je suis titulaire de la Chaire de recherche du Canada en droit d'Internet et du commerce électronique. Je comparais aujourd'hui devant le comité à titre personnel, pour présenter mon propre point de vue.
Je voudrais féliciter le comité d'avoir décidé d'entreprendre une étude sur le commerce électronique au Canada. Il s'agit d'un sujet d'importance capitale, qui mérite une grande attention.
Bien que le comité ait cerné quelques excellentes questions, je pourrais résumer le problème par une seule question: pourquoi, alors que les consommateurs canadiens ont adopté avec enthousiasme le commerce électronique, le Canada n'est-il pas parvenu à produire de nombreux exemples de réussite à l'échelle mondiale dans le domaine du commerce électronique?
La popularité du commerce électronique auprès des consommateurs canadiens est bien connue. Nous comptons parmi les chefs de file mondiaux en matière d'utilisation d'Internet et de consommation de vidéos en ligne. Durant plusieurs années, le Canada a été le plus important utilisateur de Facebook par habitant au monde. Netflix n'a été lancé qu'en ligne, d'abord au Canada, puis a rapidement pris de l'ampleur pour atteindre un million d'abonnés. De plus, les ventes de musique numérique ont augmenté plus rapidement au Canada qu'aux États-Unis au cours de chacune des cinq dernières années.
Néanmoins, malgré la croissance de la consommation, nous faisons piètre figure en ce qui a trait à la création d'entreprises internationales en ligne, une situation dont faisait état l'étude McKinsey préparée pour la réunion du G8 tenue en France plus tôt cette année. Il y a des exceptions, bien entendu — Club Penguin, Flickr, AbeBooks et StumbleUpon, pour n'en nommer que quelques-unes — mais la plupart des entreprises sont achetées par de plus grandes sociétés américaines avant d'avoir eu la chance de croître et de devenir des acteurs mondiaux.
Le Canada a pourtant son lot de PME de commerce électronique, mais les multinationales qui emploient des milliers de personnes et génèrent des milliards de dollars nous ont largement échappé. Comment se fait-il? Il existe sans doute de nombreux facteurs — capital-risque, taille du marché, goût du risque — mais pour reprendre une expression populaire, quand vous n'avez comme outil qu'un marteau, tout ressemble à un clou. Si vous êtes professeur de droit, vous remarquez les échecs sur le plan de la législation et des politiques.
Il y a plus d'une décennie, le Canada établissait les bases juridiques du commerce électronique, notamment le caractère exécutoire des contrats en ligne, les règles relatives à la vie privée ainsi que certains moyens de protection des consommateurs en ligne. Mais ces mesures ne constituent que le prix d'entrée. Les histoires de réussite se produisent souvent dans les pays qui sont allés plus loin. Je crois que des entreprises telles que YouTube, Google et Facebook auraient pu être canadiennes, mais que les règles de droit ont réduit les chances qu'il en soit ainsi.
Par exemple, YouTube aurait pu être canadienne. Elle se serait appelée iCraveTV, nom que portait une jeune entreprise torontoise de vidéos en ligne lancée en 1999. Elle diffusait en mode continu des émissions de télévision, financée par des annonceurs dont les messages publicitaires défilaient au bas de l'écran. C'était l'ancêtre de YouTube, qui a vu le jour plusieurs années plus tard. L'entreprise menait ses activités en vertu des lois canadiennes. Les États-Unis se sont opposés, et quelques mois après son lancement, le service a été fermé. Les lois canadiennes ont ensuite été modifiées parce que nous avons cédé sous la pression américaine.
Google aurait pu être canadienne. Elle se serait appelée OpenText. OpenText est, bien entendu, le plus important fabricant de logiciels canadien dont le siège social se trouve à Waterloo. Avant que Google ne prenne forme comme projet de recherche étudiant à l'Université Stanford, OpenText fournissait déjà des technologies de recherche à des entreprises telles que Yahoo. La législation américaine sur les droits d'auteur comporte une disposition sur l'utilisation équitable, sur laquelle Google s'est basée par la suite pour indexer le Web et devenir une entreprise de plusieurs milliards de dollars. Le Canada maintient une approche plus restrictive en matière d'utilisation équitable, et OpenText a opté pour la gestion du contenu dans le marché des entreprises, un service qui ne soulève pas les mêmes questions juridiques.
Facebook aurait pu être canadienne. Elle se serait appelée Nexopia. Cette entreprise, qui est toujours active, est maintenant un réseau social basé à Edmonton. Elle a été fondée en 2003, un an avant le lancement de Facebook, mais à l'inverse de Facebook et de milliers d'autres entreprises américaines, elle n'a pas bénéficié d'une disposition accordant l'immunité juridique aux intermédiaires concernant les contributions de tiers, puisqu'il n'en existe pas au Canada. Aux États-Unis, l'article 230 de la Communications Decency Act a été utilisé par tous les colosses de l'industrie, tels que Facebook, Amazon, Google et eBay, pour limiter les risques et la responsabilité relatifs aux articles publiés par leurs utilisateurs. Au Canada, nous ne possédons pas les mêmes protections, et les risques auxquels sont exposées les personnes qui mènent des activités en ligne sont beaucoup plus grands.
Je pourrais continuer. Nous pourrions souligner que Skype n'avait que peu de chance d'être canadienne à cause du cadre de réglementation et de l'environnement concurrentiel dans lesquels évoluent nos entreprises de télécommunications. Nous pourrions mentionner que Zillow, ce géant de l'immobilier en ligne, ne pourrait pas être une entreprise canadienne en raison des règles restrictives s'appliquant à l'utilisation des données relatives aux inscriptions. Nous pourrions ajouter qu'Amazon ne pourrait pas être une entreprise canadienne en raison de nos restrictions visant les investissements étrangers.
Le Canada n'a pas su construire un cadre juridique et stratégique concurrentiel pour le commerce électronique, et nous devons désormais vivre avec les conséquences.
Alors, quelle sera la prochaine étape? Il existe de nombreuses questions de politique qui doivent être soulevées, et elles ne relèvent pas toutes du gouvernement fédéral, puisque certaines sont de compétence provinciale. Je peux rapidement en mettre quatre en relief et peut-être pourrons-nous les examiner plus durant la période des questions.
En premier lieu, viennent les dispositions touchant le marketing et la protection de la vie privée. Il est temps pour nous d'adopter une loi antipourriel, dont l'effet ne sera pas dilué par le règlement d'application, comme certains le demandent. Il faut assurer l'adoption rapide des mesures sur la vie privée du projet de loi C-12, qui vient juste d'être déposé. En outre, le prochain examen de la législation relative à la protection de la vie privée doit avoir lieu cette année. Nous devons proposer des mesures d'application plus fermes et maintenir le principe de la surveillance des tribunaux concernant la divulgation obligatoire de renseignements personnels.
En second lieu, vient la souplesse en matière de droits d'auteur. La réussite des entreprises de commerce électronique d'aujourd'hui et de demain dépend davantage de la souplesse des lois en matière de droits d'auteur que des verrous numériques qui constituent la pierre angulaire du projet de loi actuel sur les droits d'auteur, le projet de loi C-11.
Troisièmement, d’autres pays ont adopté une utilisation équitable, et un plus grand nombre encore sont en train d’examiner la question. Le Canada devrait faire de même. Il est absolument impératif de mettre en place pour les intermédiaires Internet un équivalent de l’article 230 de la CDA, dont j’ai parlé précédemment. Pour ce faire, il faudra, toutefois, compter sur la coopération des gouvernements provinciaux.
Le quatrième et dernier point concerne la levée des restrictions sur l'investissement étranger et la suppression d’autres entraves à la concurrence dans de nombreux secteurs qui touchent au commerce électronique. Il s’agit de favoriser un environnement Internet plus compétitif et de se pourvoir d’une provision à l’intention des nouveaux venus dans la future vente aux enchères de licences d'utilisation du spectre.
Il est à noter que si le Canada a été le premier à profiter d’un service Netflix entièrement en ligne, il s’est toutefois valu la distinction peu flatteuse d’avoir vu Netflix offrir des versions de ses contenus adaptées pour une largeur de bande réduite en raison du plafonnement des données téléchargées sur Internet et des coûts élevés. Les répercussions se font sentir bien au-delà du marché de consommation, puisqu’elles sont également subies directement par les entreprises de commerce électronique. Le Canada a peut-être laissé passer une génération de chefs de file du commerce électronique, mais il ne doit pas passer à côté de la prochaine génération.
Permettez-moi d'ajouter quelques réflexions à celles du professeur Geist.
Imaginez un instant que les paiements mobiles soient un peu mieux implantés qu'ils ne le sont actuellement au Canada. Si vous aviez été en voyage d'affaires à l'étranger, il y a une semaine, et que, pour régler votre note d'hôtel et payer une prime d'assurance-vie à distance, vous aviez compté exclusivement sur votre BlackBerry, vous auriez été un peu ennuyé.
Monsieur le président, mesdames et messieurs, je vous remercie de m'avoir invité à échanger avec vous aujourd'hui. J'enseigne le droit de la consommation à l'Université du Québec à Montréal et je m'intéresse notamment aux questions relatives aux paiements depuis une vingtaine d'années. Je suis actuellement membre du Comité consultatif des intervenants de l'Association canadienne des paiements. De plus, depuis avril dernier, je suis conseiller pour les questions de consommation pour le Groupe de travail sur l'examen du système de paiements institué par le ministre des Finances au cours de l'été 2010. C'est cependant à titre purement personnel que je comparais devant vous aujourd'hui.
Les questions que vous examinez sont nombreuses et complexes. Je les envisagerai primordialement dans la perspective des usagers, notamment celle des consommateurs, mais aussi, dans une certaine mesure, celle des petites entreprises.
Je m'arrête aujourd'hui à l'enjeu des paiements parce qu'il s'agit évidemment d'un élément essentiel de presque toutes les opérations de commerce électronique, un élément que l'on tient généralement pour acquis et, en cela, on a grandement tort.
Évidemment, l'argent comptant ne règne pas sur le Web. On doit compter sur des modes de paiement électronique qui sont de plus en plus diversifiés et qui sont offerts par une gamme grandissante de fournisseurs. Cette évolution est en soi souhaitable et elle peut être bénéfique, mais elle génère des risques nouveaux qu'il faut comprendre et maîtriser.
Il existe d'abord des risques d'exploitation. En effet, des paiements peuvent être égarés, des renseignements personnels peuvent être interceptés et des réseaux peuvent tomber en panne. Incidemment, je dois des excuses à Research In Motion, puisque l'expérience des dix dernières années au Canada, avec nos banques notamment, indique que tous les réseaux sont vulnérables.
Il existe également plusieurs risques financiers. Des fournisseurs peuvent faire faillite, fermer leurs portes sans préavis alors que des millions, voire des milliards, de dollars destinés à des consommateurs ou à des entreprises pourraient être en jeu.
Par exemple, imaginez simplement une faillite imprévue de PayPal. C'est hautement improbable, bien sûr, mais on peut imaginer les conséquences que pourraient avoir les fermetures de concurrents plus petits et possiblement plus vulnérables.
Tout cela entraîne à la fois des risques juridiques — j'enseigne aussi le droit — et des risques pour la réputation de l'ensemble de l'industrie des paiements si certains acteurs viennent à faire faillite. Or, au Canada, nous n'avons actuellement aucun mécanisme efficace de gestion de ces risques.
Sur le plan législatif, les États-Unis comptent, depuis 1978, sur une loi à laquelle se sont ajoutés d'autres instruments. L'Union européenne s'est dotée d'un cadre normatif adapté aux nouvelles réalités au cours de la dernière décennie. L'Australie fignole en continu le cadre réglementaire des paiements électroniques depuis une bonne quinzaine d'années. Le Canada, lui, a fait trop peu dans ce domaine jusqu'à maintenant.
Il en résulte chez nous un cadre réglementaire troué comme une dentelle, incohérent, incompréhensible et donc à peu près inconnu. Il en résulte que des fournisseurs comme les institutions financières, qui sont les mieux placées pour prévenir et gérer les risques liés aux modes de paiement qu'elles offrent, s'efforcent autant qu'ils le peuvent de transférer, par des contrats d'adhésion, ces risques et ces coûts aux usagers, qu'il s'agisse de consommateurs ou de marchands, ce qui est aussi injuste qu'économiquement inefficace.
Il en résulte également que certains fournisseurs comme les institutions financières font au moins l'objet d'une surveillance de leur solvabilité, mais pas les autres, ce qui induit des disparités dans le marché en plus de générer des risques. Il faut donc envisager d'agir.
On parle actuellement beaucoup de paiements mobiles, au Canada comme ailleurs, et il se peut bien, en effet, que ce soit la voie de l'avenir et que notre téléphone intelligent en vienne à remplacer nos cartes de plastique. Toutefois, il se peut aussi que d'autres mécanismes de paiement électronique l'emportent plutôt ou, du moins, qu'ils jouent un rôle complémentaire important. Il ne s'agit donc pas simplement de s'intéresser aux paiements mobiles. C'est tout le champ des paiements électroniques qui requiert une intervention.
Pourquoi intervenir? Il le faut pour les même raisons que celles qui nous ont amenés à créer des feux de circulation et tracer des lignes sur les chaussées. Il faut des règles claires et observées par tous pour réduire les risques, soutenir la confiance et faciliter la participation.
Au moins deux grands principes devraient sous-tendre de nouvelles règles canadiennes en matière de paiements électroniques: la confiance et l'accessibilité. Sans confiance mutuelle, il n'y a pas de paiements possibles.
Il faut assurer la solidité financière et la fiabilité de nos systèmes de paiement. Il faut que les règles en matière de partage des risques, des avantages, des coûts et des responsabilités soient claires, cohérentes et justes, ce qu'elles ne sont pas à l'heure actuelle. Il faut que tous les acteurs concernés puissent participer à l'évolution du cadre réglementaire, que leurs préoccupations et leurs besoins soient pris en compte, ce qui n'est présentement pas le cas.
Toutefois, aussi fiables que soient nos modes de paiement, il faut encore pouvoir s'en servir. L'accessibilité, autrement dit les prix, constitue donc également un enjeu important, notamment en matière de paiements mobiles, ne serait-ce que parce que nos services téléphoniques mobiles figurent toujours parmi les plus coûteux du monde.
De plus, l'accessibilité territoriale est problématique hors des grandes zones urbaines. N'oublions pas non plus que près de la moitié de la population adulte est fonctionnellement analphabète au Canada. L'usage d'interfaces complexes n'ira pas nécessairement de soi. S'ajoutent à cela des questions comme, par exemple, l'inclusion des personnes handicapées.
Ce ne sont là que quelques-uns des enjeux liés aux paiements mobiles et au paiement électronique en général, et je ne fais que les esquisser. Je n'ai même pas mentionné, par exemple, les monnaies virtuelles comme les crédits de Facebook.
Cela me fera évidemment plaisir de discuter plus longuement de tout cela avec vous un peu plus tard.
Merci beaucoup, monsieur St-Amant.
[Traduction]
Poursuivons maintenant avec les Manufacturiers et exportateurs du Canada.
Monsieur Wilson, vous avez la parole pendant six minutes.
Monsieur le président, mesdames et messieurs les membres du comité, je vous remercie.
Merci de nous avoir invités ici aujourd'hui pour parler de l’état actuel du commerce électronique au Canada et de l’utilisation qui en est faite par nos membres.
Les Manufacturiers et exportateurs du Canada représentent environ 10 000 membres provenant de partout au Canada. Nous présidons la Coalition des manufacturiers du Canada, qui regroupe 47 associations membres. Près de 85 p. 100 de nos adhérents sont de petites et moyennes entreprises qui utilisent quotidiennement ce type de technologie.
Nos points de vue divergent probablement légèrement de ceux exposés par les deux premiers intervenants, du fait que nous nous concentrons davantage sur l’utilisation commerciale de la technologie et le marché du commerce électronique interentreprises.
Bien que généralement l’attention porte principalement sur le côté consommateur de la transaction — parce que c’est ce qui affecte notre vie quotidienne — environ 80 à 90 p. 100 de toutes les transactions de commerce électronique sont conclues en réalité entre des entreprises. Il existe bon nombre d’exemples notables qui sont constamment cités: le système de contrôle des stocks trop bien connu de Walmart et sa chaîne d'approvisionnement; les géants de l’industrie automobile comme GM, Ford et Chrysler qui réalisent auprès de leurs fournisseurs des transactions qui se chiffrent à 500 milliards de dollars; les grandes entreprises d’aliments et de boissons telles que Procter & Gamble, Coca-Cola, Nestlé et Unilever qui représentent pour leurs fournisseurs un marché d’environ 200 milliards de dollars en achat de biens et services. D’autres organisations comme B2B Steel, sociétés comme FedEx et fournisseurs de services interentreprises importants appartiennent à des secteurs où les entreprises rendent et offrent quotidiennement des services.
Cependant, le commerce électronique a également profondément modifié la façon dont les produits sont commercialisés. De nos jours, les entreprises sont en mesure de développer, concevoir, tester, mettre sur le marché et vendre toutes sortes de produits de consommation à l’aide d’outils de commerce électronique et de relier virtuellement diverses chaînes d’approvisionnement mondiales. Par exemple, les voitures et les camions — qui, il y a dix ans, nécessitaient cinq à sept ans pour leur commercialisation — sont désormais prêts à faire leur entrée en salle d’exposition au bout de deux ou trois ans. La recherche et développement, la R-D, des entreprises, bien que toujours contrôlée centralement, est aujourd’hui réalisée à l’international par l’intermédiaire de différents portails. Le processus, notamment la jonction des fournisseurs avec les entrepreneurs de montage partiel, de même que celle de la R-D et conception avec les tests de produits, peut être mené presque entièrement virtuellement et, grâce à des bureaux répartis dans le monde entier, 24 heures par jour.
Les produits, qui autrefois étaient introduits à l’international sur un ou deux marchés à la fois, peuvent désormais être fabriqués dans divers endroits du monde en vue d’être vendus simultanément sur presque tous les marchés.
Cette évolution dans le développement des produits a certes eu des répercussions notables sur les consommateurs, mais elle a également modifié fondamentalement les relations d’affaires, ainsi que la façon dont les entreprises florissantes conduisent leurs activités à l’échelle mondiale. Sur le plan de l’élaboration des politiques, plusieurs outils de commerce électronique majeurs sont également essentiels aux entreprises canadiennes. Certains de ces outils s’ajoutent à ce qui a déjà été mentionné.
J’aimerais aborder, en particulier, quatre de ces outils, lesquels concernent principalement l’infrastructure et l’investissement commercial.
Tout d’abord, pour ce qui a trait à l’infrastructure, des politiques de libre accès sont indispensables pour la compétitivité numérique du Canada. Dans un rapport du Berkman Center for Internet & Society de l'université Harvard publié plus tôt cette année, le Canada a obtenu un classement médiocre sur le plan des prix et des vitesses Internet. Ce fait a une incidence négative directe et importante sur la capacité des entreprises à recourir à des technologies et stratégies de commerce électronique au Canada.
En 2009, le Conseil de la radiodiffusion et des télécommunications canadiennes a ordonné aux entreprises de télécommunications de mettre leur nouvelle et coûteuse infrastructure Internet à fibre à la disposition des petites entreprises n'ayant pas les moyens de bâtir leurs propres réseaux. Il est essentiel que le gouvernement mette en place des règlements de libre accès qui obligeront les propriétaires de réseaux Internet à partager leur infrastructure avec de petits compétiteurs.
Deuxièmement, des mesures d’incitation à l’investissement dans les technologies de l'information et des communications, les TIC, doivent être mises en place à l’intention des entreprises. Les TIC comptent pour environ un tiers de la totalité des investissements en matériel et équipement réalisés par les entreprises canadiennes. Toutefois, les TIC sont également présentes dans d’autres produits, ainsi que d’autres technologies de procédés déployées dans l’ensemble de l’entreprise. Malgré cela, les entreprises canadiennes cumulent du retard par rapport aux entreprises américaines sur le plan des investissements en matériel et équipement depuis environ 1992. De plus, environ 20 p. 100 de l’écart de l'investissement dans les TIC entre le Canada et les États-Unis est causé par la différence entre les structures industrielles des deux pays. Les industries à forte concentration de TIC occupent une part plus importante aux États-Unis, et le Canada compte une proportion plus élevée de petites entreprises, qui tendent à moins investir dans les TIC.
Les faibles investissements dans les TIC expliquent les piètres niveaux de productivité du Canada en comparaison avec d'autres pays. En conséquence, le Canada devrait mettre en place un crédit d'impôt à l'investissement lié explicitement aux TIC.
Nous souhaitons que l'investissement demeure dans des infrastructures parallèles qui visent à offrir aux établissements d’enseignement et aux entreprises la capacité de partager des bases de données géantes et des services de prototypage. Le Réseau canadien pour l'avancement de la recherche, de l'industrie et de l'enseignement, qui fournit plus de 19 000 kilomètres de câbles à fibres optiques à vitesse ultra, est un levier indispensable à l’innovation canadienne.
La mondialisation n’a pas seulement révolutionné la façon dont les entreprises fabriquent des produits et les mettent en marché, mais elle a également radicalement changé la manière dont celles-ci accèdent aux ressources planétaires pour favoriser l’innovation. La recherche devient de plus en plus exigeante en données, commandant ainsi des réseaux rapides et fiables aptes à permettre aux entreprises, aux établissements d’enseignement, aux laboratoires et aux autres intervenants en matière d’innovation de travailler ensemble.
Les Manufacturiers et exportateurs du Canada (MEC) étaient ravis que le mandat de CANARIE ait été renouvelé pour une période de cinq ans, mais nous souhaiterions qu'il soit prolongé de cinq autres années.
Enfin, pour ce qui est de l'aide à l'investissement des entreprises dans les systèmes informatiques de haute performance, comme la recherche exige un volume de données de plus en plus élevé, il lui faut non seulement une infrastructure qui lui soit dédiée, mais également des ordinateurs très performants qui lui permettent de gérer et de traiter des méga-bases de données. Les systèmes informatiques de haute performance ou les super-ordinateurs sont actuellement relativement peu connus dans bien des milieux d'affaires canadiens, mais leur potentiel pour accroître la productivité est énorme.
Certaines industries manufacturières qui requièrent un coefficient élevé de recherche et de développement, comme les industries de l'aérospatiale et de l'automobile, ont déjà largement recours aux systèmes informatiques de haute performance pour effectuer des simulations complexes, qu'elles partagent avec leurs partenaires d'affaires et de recherche. Le département américain de la Défense ainsi que certains États élaborent déjà des stratégies en vue de devenir des chefs de file dans l'utilisation de ces systèmes dans le secteur manufacturier. Nous croyons que le Canada doit commencer à s'intéresser à l'énorme avantage que les secteurs manufacturiers peuvent tirer des super-ordinateurs.
J'ai le plaisir de vous annoncer aujourd'hui que les MEC, en partenariat avec l'Alliance canadienne pour les technologies avancées et d'autres intervenants, préparent actuellement une enquête pour recenser l'utilisation des systèmes informatiques de haute performance dans les secteurs manufacturiers canadiens.
Je termine sur ces propos, monsieur le président, en espérant poursuivre la discussion avec vous.
Merci.
Merci beaucoup, monsieur Wilson.
Nous allons maintenant donner la parole à Mme Cukier pour six minutes.
Merci beaucoup. Je suis très heureuse de me trouver parmi vous aujourd'hui.
Plutôt que de répéter certaines observations faites par les autres témoins, j'aimerais parler au nom de l'Université Ryerson de notre vision des processus d'innovation, du rôle des universités dans la recherche et le développement ainsi que dans le développement des compétences numériques. Je vais vous envoyer un mémoire que je n'ai malheureusement pas eu le temps de terminer pour l'exposé d'aujourd'hui.
Lorsque nous abordons les questions touchant l'innovation et l'entrepreneuriat au Canada, nous devons essentiellement tenir compte de trois niveaux. Nous avons beaucoup entendu parler de l'importance de créer un environnement qui favorise l'innovation et l'entrepreneuriat. Deux autres éléments sont cependant tout aussi importants, à savoir les processus d'entrepreneuriat et la compréhension des processus d'adoption des technologies, d'une part, et les personnes dotées d'un bon esprit d'entreprise, d'autre part. Je pense que les universités ont un rôle important à jouer à ces deux niveaux, et c'est sur ces aspects que portera mon intervention.
Si nous examinons la question relative à l'adoption du commerce électronique au Canada, je pense qu'il importe de faire la distinction entre l'accès à Internet et l'utilisation du commerce électronique. Les données que j'ai examinées récemment avec mes collègues laissent croire que l'adoption du commerce électronique axé sur le consommateur au Canada est à la traîne en comparaison de ce qui se fait aux États-Unis à ce chapitre. Environ 8 p. 100 des dépenses enregistrées dans le secteur de la vente au détail aux États-Unis sont effectuées au moyen du commerce électronique, contre à peine 1 p. 100 au Canada. Il y a plusieurs raisons à cela, mais je pense qu'il est important que nous examinions notre situation sur l'échiquier mondial.
L'une des raisons à cela... Voilà pour ce qui est des consommateurs, mais si nous examinons la situation des entreprises et la relations entre les entreprises, comme nous l'avons mentionné précédemment, nous constatons qu'il existe d'énormes différences entre les secteurs, et à l'intérieur d'un même secteur. Or, avant de commenter les faibles taux de productivité et la lente adoption des technologies, je pense qu'il faut comprendre que les données ne sont souvent que des moyennes. Dans certains secteurs — le commerce de détail, par exemple —, il arrive souvent que l'investissement soit très important et donne des gains considérables, ou qu'il soit minime et n'engendre aucune retombée, ou encore qu'il soit considérable sans produire aucun gain. Il est extrêmement important de désagréger les données afin d'avoir une bonne idée de ce qui constitue une réussite ou un échec. Je pense que nous ne le faisons pas assez.
Il est extrêmement important de comprendre aussi — et nous avons effectué des recherches assez poussées en ce sens avec l'ACTI et la CATA — que les nombreux obstacles à l'adoption de technologies dans le secteur des petites et moyennes entreprises ne sont pas, à proprement parler, d'ordre technologique. On insiste beaucoup sur la technologie et, bien sûr, c'est important. L'infrastructure est de toute évidence essentielle. Mais nous constatons également très souvent que les compétences nécessaires pour évaluer la corrélation entre la technologie et les objectifs des entreprises sont tout simplement absentes. L'analyse de rentabilisation nécessaire à l'adoption de technologies n'est pas effectuée dans bien des cas. Et bon nombre de vendeurs exacerbent le problème en proposant des technologies sans avoir examiné attentivement les besoins du marché.
Je ne parlerai pas plus longuement de ce sujet, mais tout me porte à croire que si vous souhaitez accélérer l'adoption du commerce électronique, vous devrez dans un premier temps vous assurer que l'analyse de rentabilisation est bien comprise, car si les petites et moyennes entreprises — et plus particulièrement les petites entreprises — ne voient aucun impact en bout de ligne, elles n'investiront ni dans la technologie ni auprès des gens qui ont pour mandat de tirer le meilleur parti possible de la technologie.
Quant aux établissements postsecondaires, ils peuvent contribuer à quatre niveaux. Le premier niveau a trait aux compétences numériques, et j'aurai quelques remarques à faire à ce sujet. Le deuxième niveau a trait à la recherche. Nous parlons ici de la recherche axée sur la découverte qui a aidé le Canada à construire son infrastructure, et de la recherche axée sur les besoins du marché et qui favorise le développement de produits, de services et de nouveaux procédés. Les universités jouent un rôle important au chapitre de la commercialisation et de l'innovation, et elles pourraient également jouer un rôle beaucoup plus important qu'elles ne jouent actuellement en tant qu'utilisateurs modèles.
De même que le gouvernement devrait être un utilisateur modèle en matière de commerce électronique — et Service Canada est un bon exemple de la façon dont il peut l'être —, les universités ont souvent du retard en ce qui concerne l'adoption de la technologie.
À propos des compétences numériques, on entend beaucoup parler de ce qu'on appelle, en anglais, les STEM, c'est-à-dire les sciences, la technologie, l'ingénierie et les mathématiques. Il n'y a aucun doute que l'éducation dans ce domaine est fondamentale pour la création d'une économie numérique, mais elle n'est pas suffisante. Nous ferions valoir qu'il faut accorder une importance égale à des éléments tels que l'entrepreneuriat et la gestion si nous voulons vraiment obtenir les avantages promis de la technologie, de même qu'une culture numérique de base. Nous devons assurer non seulement l'accès aux outils, mais aussi l'utilisation efficace de ceux-ci.
Dans une perspective globale, nous n'avons pas seulement besoin d'ingénieurs et d'informaticiens; nous avons aussi besoin de création de contenu. Si l'on songe à ce qui accélérera l'expansion dans certains segments du marché du commerce électronique, cela a davantage à voir avec la création de contenu, des textes efficaces et la compréhension des consommateurs qu'avec les bits et les octets
À Ryerson, l'orientation des recherches en médias numériques et des travaux liés au commerce électronique est grandement tributaire des partenariats avec l'industrie. Il y a plusieurs programmes du gouvernement fédéral qui sont particulièrement précieux pour ce qui est de promouvoir la recherche axée sur le marché.
Nous avons plusieurs recommandations. D'abord, il est essentiel de comprendre la nature de l'innovation. Ensuite, nous devons comprendre que les compétences numériques constituent une partie de l'infrastructure humaine si nous voulons utiliser efficacement le commerce électronique. Troisièmement, nous devons mobiliser le talent des jeunes, ce que nous ne faisons pas assez. Quatrièmement, nous devons nous assurer de disposer de modèles de collaboration à l'appui des recherches regroupant l'industrie et les universités. Enfin, nous devons veiller à comprendre non seulement les critères universitaires traditionnels qui servent à évaluer la recherche, mais aussi des critères qui tiennent compte de la rentabilité et des résultats obtenus. Il est possible d'en faire bien davantage dans ces domaines.
Merci.
Merci, madame Cukier.
Si vous incluez cela dans l'aperçu que vous nous ferez parvenir, veuillez alors l'envoyer au greffier. Il le fera traduire et tous pourront avoir vos recommandations à titre documentaire. Il en est de même pour tous les autres témoins qui souhaiteraient présenter des documents par la suite.
Nous entendrons maintenant M. Patacairk.
Je vous remercie de me fournir l'occasion de témoigner aujourd'hui.
[Français]
Merci beaucoup de nous avoir invités ici aujourd'hui.
[Traduction]
L'Ottawa Centre for Regional Innovation a été créé il y a 26 ans pour faciliter la commercialisation entre les laboratoires fédéraux, les universités et l'industrie des technologies émergentes. Nous avons grandi depuis; nous comptons maintenant environ 700 membres, qui représentent 120 000 employés dans la région d'Ottawa.
La région d'Ottawa s'est engagée dans la voie du développement économique axé sur les grappes pour faire en sorte que son économie demeure durable, innovatrice et diversifiée. L'OCRI travaille en étroite collaboration avec tous les niveaux de gouvernement, nos communautés d'exportateurs, nos collèges et universités et notre infrastructure de soutien locale pour faire de la région un modèle de succès dans l'économie basée sur le savoir.
Aujourd'hui, mon bon ami Samer Forzley est ici pour vous parler un peu de l'industrie. Loin de moi l'intention de vous parler de l'industrie alors qu'un expert de l'industrie m'accompagne. Samer est un ancien cadre de eBillme, une compagnie qui vient d'être vendue. Market Drum est une entreprise d'experts-conseils pour laquelle il travaille à présent et il va vous donner un bref aperçu à ce sujet.
Avant de poursuivre, j'aimerais dire que les Canadiens ont dépensé environ 6,5 milliards de dollars en achats en ligne depuis 2010 et l'on prévoit que leurs dépenses grimperont à quelque 30,9 milliards de dollars en 2015. La moitié de tous les Canadiens ont fait un achat en ligne l'an dernier, selon Forrester Research. La valeur moyenne des commandes des consommateurs canadiens est supérieure à celle des consommateurs américains, mais ce résultat est probablement contrebalancé par le peu de concurrents en ligne au Canada, comparativement aux États-Unis. Les grandes marques multinationales et les détaillants spécialisés représentent la majorité des détaillants en ligne au Canada. À nouveau, toutefois, loin de moi l'idée de vous dire ce que nous devons faire dans notre ville, dans notre pays, pour améliorer la situation.
Je vais laisser la parole à Samer, pour qu'il puisse vous en dire un peu plus.
Pour qu'une transaction puisse se faire en ligne, elle doit satisfaire trois besoins : le besoin du client, celui de marchand et celui de la banque.
Les consommateurs ont besoin de trouver un article quelconque en ligne. Une fois l'article trouvé, ils veulent l'obtenir à bon prix, puis le payer en toute sécurité. Une fois l'article payé, ils ont besoin qu'il leur soit livré rapidement.
Le problème au Canada, c'est que les gens qui magasinent sur Internet ne trouvent pas les produits qu'ils cherchent. Que ce soient des lecteurs DVD, des téléviseurs, peu importe, ils ont rarement un bon choix. Bien entendu, les produits spécialisés sont faciles à obtenir.
Et si le consommateur trouve la télé recherchée, son prix n'est pas avantageux. Nous y reviendrons en abordant le point de vue des marchands, mais les prix au Canada ne sont pas du tout concurrentiels. Cela restreint la capacité de mise en marché des commerçants, vu qu'ils n'ont guère de marge de manoeuvre.
Advenant que le client accepte de payer le prix réclamé et achète la télé, il y a un minimum de possibilités de paiement à l'achat. Au Canada, 89 p. 100 des paiements s'effectuent par carte de crédit. Les Canadiens apprécient le système Interac, mais il est peu répandu. D'ailleurs, les cartes de débit en général ne sont pas disponibles faute d'être associées à un réseau. Donc, je reprendrai les remarques à propos des options de paiement: elles sont très limitées, et restreintes par les banques, de sorte que c'est un obstacle auquel il faut s'attaquer.
D'autre part, les coûts d'expédition posent problème. Que les marchandises soient expédiées au Canada, aux États-Unis ou ailleurs dans le monde, le transport coûte extrêmement cher, si bien que les consommateurs ont tendance à ne pas se rendre au bout de la transaction.
Quand on examine les enjeux dans l'optique des marchands, on constate que les coûts réels du commerce électronique représentent un problème majeur, surtout à cause du mode de paiement. Une entreprise de niveau intermédiaire, comme la compagnie DNA 11 ici-même à Ottawa, doit verser en dépôt environ 100 000 $ pour acquérir une machine à traitement de cartes de crédit, en guise d'assurance contre la fraude. Pourtant, DNA 11 est une compagnie qui vend des images ADN, et ses transactions en ligne sont on ne peut plus sûres; en effet, quoi de plus sûr qu'une entreprise qui traite l'ADN des gens? Mais à cause de la façon dont les banques sélectionnent, ou trient les marchands, ce coût leur est imposé.
Ainsi, il est très difficile pour les petites ou moyennes entreprises de s'établir au Canada, et si elles le font, leur coût de transaction par carte de crédit s'élève à environ 3,5 p. 100, un taux élevé. Comparons cela avec la situation aux États-Unis où, en tant que marchand de calibre intermédiaire, je ne suis pas obligé de me procurer une machine à traitement. À la place, je vais sur un des nombreux sites de vente en ligne pour soumettre mon volume d'affaires; les gestionnaires soumissionnent d'après mon bilan, comme on le fait ici pour les hypothèques, et j'obtiens un taux. Voici les chiffres précis pour DNA 11: 3,5 p. 100 au Canada contre 1,9 p. 100 aux États-Unis, et ce pour la même entreprise, avec les mêmes clients. C'est presque injuste. Le coût des transactions de paiement étant, à lui seul, excessif, le prix ne peut pas être concurrentiel. Imaginez cela dans le domaine de l'électronique; ce coût est alors insupportable étant donné les faibles marges bénéficiaires.
Vient ensuite la question des expéditions. Au Canada, le transport coûte cher à cause des grandes distances évidemment, mais même pour envoyer des marchandises outre-frontière... Quand une entreprise prend de l'expansion, elle doit exporter. Ses clients peuvent se trouver en majorité aux États-Unis, et quand elle vend à l'étranger, il y a des coûts autres que ceux d'expédition.
En plus de ces coûts, certaines compagnies de cartes de crédit perçoivent une redevance sur le commerce extérieur, autour de 6 p. 100, simplement pour pouvoir exporter aux États-Unis. Ce que font de nombreux commerçants canadiens, c'est louer un camion, le charger de matériel ou de produits et l'envoyer à Ogdensburg, où quelqu'un traite puis expédie le chargement aux États-Unis. Tôt ou tard, quand l'entreprise est devenue assez grosse, elle y déménage. DNA 11 vient de louer un grand entrepôt à Las Vegas, tandis que les compagnies Cymax et Coastal Contacts, établies à Vancouver, ont déménagé aux États-Unis, et ainsi de suite.
Le hic, c'est qu'une fois l'entreprise rendue au sud de la frontière, elle ne fait plus d'affaires au Canada, parce que ses efforts visent surtout les États-Unis, son principal débouché. Résultat: il y a moins de choix pour les consommateurs. C'est un cercle vicieux pour les marchands canadiens, en particulier les PME.
Mon temps est épuisé. Si vous avez des questions, j'y répondrai; mais la formule est déséquilibrée, la balance penche nettement en faveur des banques au Canada.
Merci.
Merci beaucoup, monsieur Forzley.
On a entendu de bonnes déclarations préliminaires. Je suis sûr que vous avez une foule de questions à poser.
Passons maintenant à M. Lake pour sept minutes.
Merci, monsieur le président.
Merci aux témoins.
Je voulais commencer par un autre aspect, mais je vais m'entretenir avec Samer. Du côté des consommateurs, il semble que ce soient des problèmes essentiellement d'ordre commercial, que les bonnes entreprises doivent résoudre pour la plupart par elles-mêmes.
Mais du côté des marchands, apparemment, les problèmes ne sont pas tous liés à l'électronique. Certains d'entre eux seraient plutôt de nature commerciale. Vous pourriez peut-être nous en dire un peu plus à ce sujet.
Oui, bien sûr. Du point de vue des consommateurs, je ne sais pas exactement comment ils pourraient aborder certaines situations, même s'ils le voulaient, surtout en ce qui concerne les paiements. Quand on se préoccupe pour les questions de sécurité ou de protection des renseignements personnels, qu'on navigue sur Internet, qu'on n'a d'autre choix que d'utiliser sa carte de crédit et qu'il faut en communiquer les informations, cela pose un gros problème pour de nombreux consommateurs. En fait, juste pour vous faire prendre conscience de l'ampleur des pertes que cela représente aux États-Unis, en 2009, 20 milliards de dollars ont été perdus parce que les gens ne se sentaient pas à l'aise de passer à la caisse si le seul mode de paiement accepté était une carte de crédit.
C'est un montant quasiment égal à tout le cybercommerce au Canada. Donc, c'est un problème grave et, au Canada, c'est encore plus grave, parce qu'on ne dispose généralement que de cartes de crédit et que les banques n'autorisent l'utilisation d'aucune autre option pour les paiements. C'est aussi simple que cela. À titre d'exemple, nous sommes une entreprise canadienne qui est en exploitation depuis au moins six ans et nous n'avons pas un seul commerçant ni un seul client au Canada. Ils sont tous aux États-Unis. Nous n'arrivons pas à embarquer dans le réseau.
C'est donc structurel, et pour les consommateurs, quand vient le moment de passer à la caisse, je ne sais pas exactement comment ils pourraient régler ces problèmes.
Du point de vue des entreprises, encore une fois, le principal problème... Il y a deux problèmes ici. L'un est le coût de faire des affaires au Canada. Cela coûte très cher, sur le plan des paiements comme sur celui des expéditions. Le problème des expéditions a des chances d'être résolu. Postes Canada fait un effort. Cet organisme a créé une filiale qui permet effectivement de canaliser certaines ventes des États-Unis au Canada et vice versa, mais en ce qui concerne les paiements, il ne se passe pas grand-chose.
Bien. D'après les notes que j'ai prises lorsque vous avez parlé des consommateurs, les produits sont difficiles à trouver. C'est aussi ce que je constate quand j'essaie d'acheter quelque chose. En général, le problème, c'est que la compagnie a un très mauvais site Web et l'on n'arrive pas à y trouver ce qu'on veut. Les prix ne sont pas avantageux. Finalement, il semble qu'on en revienne à un problème commercial.
Mais aussi structurel... Désolé de vous interrompre. Aux États-Unis, par exemple, si je suis un marchand de petite ou moyenne envergure, je n'ai pas besoin de garder tous ces produits en stock. Je peux m'adresser à un intermédiaire en gros ou à une place de marché électronique pour étoffer mon catalogue. Au Canada, on n'a pas cette possibilité, tout simplement parce que, au départ, les marchands sont moins nombreux à se joindre au réseau pour y ajouter leurs produits. Alors, aux États-Unis, dans bien des cas, il est possible de voir des marchands qui sont peut-être rivaux, mais qui, en fait, collaborent. Un marchand vend le produit et l'autre fait l'expédition en son nom, tout simplement parce que dans les faits, c'est comme cela que le réseau prend de l'expansion. Cela n'existe pas au Canada.
Si vous le permettez, j'aimerais m'entretenir maintenant avec Mme Cukier.
Vous avez mentionné une analyse détaillée pour déterminer quels étaient les succès et les échecs, ce qui m'amène à me poser la question: quels sont les succès et les échecs?
Quels sont les succès quand on parle de cela, quand on examine le cybercommerce? Quel serait un modèle de succès qui existerait pour vous? Quel serait un modèle d'échec? À quoi cela ressemble-t-il?
À ce stade-ci, nous n'avons pas beaucoup de données désagrégées. Un projet a été proposé en collaboration avec ITECH, le Conseil canadien du commerce de détail et REALpac, une association d'immobilier commercial qui s'occupe de bon nombre de gros centres commerciaux, afin de pouvoir donner cette réponse.
Les gens parlent depuis quelque temps de Groupon, qui serait un exemple de succès au Canada. Le Canada a réussi à développer des applications très spécifiques pour soutenir le cybercommerce, basées sur l'informatique sensible au contexte et ainsi de suite, mais franchement, il n'y a pas d'économies d'échelle au Canada pour bon nombre de grandes entreprises qui traitent avec les consommateurs, ce qui représente un défi de taille.
J'y reviendrai peut-être un peu plus tard.
Monsieur Geist, dans vos observations, vous avez dit à un moment donné que vous pourriez continuer, et puis vous avez évoqué certaines questions concernant les contextes de la réglementation et de la concurrence. Vous avez parlé du géant immobilier en ligne qui ne pouvait être canadien à cause des règles restrictives relativement aux inscriptions de propriétés, et vous avez dit qu'Amazon n'aurait pu être une entreprise canadienne à cause des restrictions sur les investissements étrangers.
Continuez.
Bien. On y retrouvait trois autres exemples. Il existe aux États-Unis un certain nombre d'entreprises qui ont émergé grâce aux données ouvertes du gouvernement. Elles ont donc utilisé des données gouvernementales rendues disponibles en format ouvert, elles y ont mis une valeur ajoutée et elles sont devenues des sociétés commerciales viables.
Vous avez mentionné Amazon, par exemple. Ce ne pouvait être une entreprise canadienne à cause des restrictions sur les investissements étrangers. Pourquoi?
Vous vous souvenez peut-être de ce qui s'est passé quand Amazon a essayé de pénétrer le marché canadien. L'entreprise s'appelle amazon.ca et mène ses activités surtout grâce aux services postaux. À cause des exigences voulant que les librairies appartiennent à des Canadiens, cette entreprise ne pouvait fonctionner ici de la même façon que dans d'autres pays. Nous avons des restrictions relativement à la propriété, et donc, à moins d'être Canadien, Jeff Bezos aurait un problème. Mais il ne l'est pas.
Avec une entreprise telle que Skype, il existe des problèmes du côté des télécommunications pour le service VoIP. Il lui est même difficile d'avoir accès à des numéros de téléphone. C'est l'une des raisons pour lesquelles il n'existe pas autant de services de téléphonie Internet au Canada qu'ailleurs.
En ce qui concerne les inscriptions de propriétés, c'est un dossier sur lequel la commissaire de la concurrence se penche. Le Service inter-agences se bat pour conserver ces données, ce qui fait obstacle aux autres services qui voudraient les utiliser. Aux États-Unis, il existe un véritable écosystème Web 2.0 pour les données immobilières, à partir desquelles on établit des cartes et des vues de rues similaires à celles produites par Google, et toutes sortes d'autres données, ce qui produit une expérience multicouche beaucoup plus riche que celle offerte aux Canadiens.
Pourriez-vous émettre des recommandations ou nous faire part de vos idées sur la question des investissements étrangers?
Pour ce qui est de la culture, avec des produits comme les livres, je comprendrais que l'on veuille retenir quelques-unes des règles relatives aux éditeurs et autres, bien que je pense que cela pourrait faire aussi l'objet d'un vif débat. L'idée, cependant, que la nationalité du propriétaire puisse compter pour ce qui est des librairies me semble tout à fait absurde. Laisser entendre que le pays d'origine d'un libraire va entraîner une différence importante dans le nombre de livres vendus au Canada n'a aucun sens. Les auteurs canadiens sont à portée de la main et les librairies vendent les livres que les gens veulent acheter. Je ne pense pas qu'il importe beaucoup de savoir où se trouvent leurs actionnaires.
Pour ce qui est des télécommunications, cela est déjà chaudement débattu. Je suis d'avis personnellement, en particulier au moment où nous allons vers une vente aux enchères du spectre, que nous devrions faire tomber les barrières.
Parmi les nouvelles entreprises sur le marché détenues par des Canadiens, certaines ont du mal à obtenir du capital. Si nous voulons avoir une saine concurrence et tout ce dont ont parlé les fabricants en faveur de la liberté d'accès, nous devons ouvrir la porte à certains des géants internationaux. Ils peuvent créer un environnement plus vigoureux et plus concurrentiel.
[Français]
Je vous remercie beaucoup, monsieur le président.
Merci également à tous nos témoins. J'aimerais commencer par M. St-Amant.
Vous avez parlé du cadre législatif qui existe dans d'autres pays, par exemple aux États-Unis, en Union européenne et en Australie. Cependant, vous n'avez pas donné de détails. Quels aspects législatifs caractérisent les mesures adoptées par ces trois États, lesquelles sont différentes de ce que nous avons présentement au Canada?
Je vais répondre rapidement, car le sujet est vaste.
En Australie, par exemple, on a tout récemment adopté un code cohérent sur les paiements électroniques pour les ventes au détail. En fait, on a remis à jour un code qui existait déjà. C'est un processus qui se poursuit depuis des années. C'est un code qui établit les droits et les obligations des consommateurs, dont les usagers qui effectuent des paiements électroniques, par exemple.
Oui. Il n'y a rien de comparable au Canada. Depuis des années, l'Australie poursuit une série de réflexions. Par exemple, on a procédé cet été à une consultation sur l'innovation dans le domaine des paiements et sur la façon de favoriser le travail concerté des divers intervenants. Il est assez fascinant de voir la profondeur de la recherche et de la réflexion dans les documents de réflexion et de consultation qui sont produits en Australie. Malheureusement, nous n'en sommes pas encore là au Canada.
Au sein de l'Union européenne, on a mis en avant deux directives au cours des dernières années: l'une sur les paiements électroniques en général, l'autre sur les fournisseurs de monnaie électronique. Ainsi, on a pu établir un encadrement prudentiel adapté à la fois aux grands fournisseurs tels que les banques et aux concurrents de plus petite taille qui n'imposent pas les mêmes risques au système, mais qui doivent tout de même faire l'objet d'un encadrement concerté et organisé.
En Australie, comme aux États-Unis et en Europe, on s'est penché sur les questions liées aux frais d'interchange et aux coûts des paiements par carte de crédit imposés aux commerçants. Par ailleurs, ces coûts sont actuellement beaucoup plus élevés au Canada qu'en Australie. Cependant, on sait que les émetteurs de cartes de crédit australiens se portent assez bien financièrement.
Il y a un ensemble de questions très complexes. Toutefois, il y a aussi un ensemble de mesures mises en place qui fonctionnent de façon générale. Même si ces mesures ne sont pas toutes transposables au Canada, elles peuvent au moins inspirer une réflexion approfondie. Les conclusions du Groupe de travail sur l'examen du système de paiements, qu'on devrait connaître d'ici à la fin de l'année, seront probablement intéressantes. Personnellement, il me paraît impératif d'établir un cadre réglementaire qui donnera une chance à tout le monde, qui permettra une concurrence accrue et qui protégera suffisamment les intérêts de tous les participants, ce qui n'est pas le cas actuellement.
J'ai une dernière question à ce sujet. Je crois savoir qu'en Australie, il y a une limite au pourcentage des frais d'administration qui peut être demandé aux petits commerçants et aux grandes entreprises qui utilisent le...
Grosso modo, ce pourcentage varie autour de 0,5 p. 100. Cela correspond environ au tiers ou au quart de ce qui est imposé au Canada. Il y a des variantes dans certains domaines d'activité, et il faut tenir compte des taxes, etc. Toutefois, en ce qui concerne l'ordre de grandeur, il existe vraiment un écart très considérable.
Merci.
[Traduction]
J'aimerais en venir à une autre question. C'est quelque chose dont le secrétaire parlementaire — je suis désolé qu'il ne soit pas ici en ce moment — et moi-même avons parlé amicalement, à savoir le financement gouvernemental direct de la R et D au Canada. Je voudrais juste citer un passage d'un rapport des Sciences et de la technologie de l'an passé. Il s'agit d'un rapport gouvernemental:
Le Canada a enregistré le taux le plus faible parmi les pays de l’Organisation de coopération et de développement économiques au chapitre du financement public direct des activités de recherche-développement des entreprises.
Il s'agit là d'un fait notoire. Cette citation vient d'un rapport gouvernemental; le gouvernement doit donc être au courant.
Je me demande si nos témoins considèrent que cela a un impact sur le développement du cybercommerce ici au Canada — le fait que le Canada soit parmi les derniers pays de l'OCDE en matière de recherche et de développement.
J'aimerais commencer par les représentants de Manufacturiers et Exportateurs du Canada, parce qu'ils ont mentionné la R et D comme une composante importante.
Même si vous examinez le financement indirect pour lequel le Canada est censé être très bon, l'investissement en TIC n'est pas nécessairement inclus dans les RS&DE, par exemple. Ce qui est compris dans le crédit d'impôt pour l'acquisition de TIC, c'est la déduction pour amortissement. Les entreprises peuvent donc obtenir une déduction pour amortissement accéléré pour certains équipements en TIC.
Vous avez mentionné le perfectionnement des compétences. Le Québec et l'Ontario, par exemple, prévoient quelques crédits d'impôt pour cela, mais le gouvernement fédéral n'en offre pas. Ce serait peut-être quelque chose à explorer également.
Pas vraiment, mais je crois savoir qu'un nouveau rapport qui traite de cette question vient juste de paraître aujourd'hui.
Oui et il soulève d'autres inquiétudes.
Monsieur Forzley, vous avez dit que les coûts administratifs représentaient un problème majeur pour les entreprises. Nous venons de voir avec le témoignage de M. St-Amant que dans d'autres pays, ces frais sont plafonnés. Est-ce que c'est quelque chose que le Canada devrait examiner? Si nous n'avons pas encore de cadre pour le commerce électronique et que nous sommes en retard par rapport à d'autres pays en ce qui concerne la mise en œuvre d'un cadre administratif et législatif, pensez-vous qu'il soit important de considérer la question des coûts administratifs pour les petites et moyennes entreprises?
Il y a deux aspects à considérer ici. Premièrement, l'accès restreint à d'autres fournisseurs. Aux États-Unis, si vous êtes fournisseur de paiement parallèle, vous pouvez offrir des frais ne dépassant pas 1 p. 100 à un marchand — je le sais parce que c'est ce que nous avons facturé — au lieu de 2 p. 100, et, au Canada, de 3,5 ou 4 p. 100. Les concurrents sont donc nombreux là-bas. Dans la seule sphère des services de paiement parallèle, je pourrais facilement en citer 20; c'est donc très concurrentiel. C'est le premier aspect. L'accès devrait être plus libre pour permettre davantage de concurrence.
Deuxièmement, aux États-Unis, avec l'amendement du sénateur Durbin qui vient juste d'être adopté, on a limité les frais de carte de débit facturés par les banques. Les cartes de débit étaient facturées au même taux que les cartes de crédit. Maintenant, elles n'ont plus le droit de faire cela. Les frais sont passés de 2 p. 100 à X, puis, maintenant, à quelques cents, parce que les risques et les problèmes associés aux cartes de débit sont différents.
On pourrait avoir ces deux choses au Canada. Malheureusement, nous n'avons pas de liberté d'accès et nos règlements sont limités en ce qui concerne les frais qui peuvent être facturés.
Merci beaucoup, monsieur Julian.
Maintenant, nous allons donner la parole à M. John Carmichael pendant sept minutes.
Merci, monsieur le président et merci à nos invités d'aujourd'hui.
Il y a eu un commentaire intéressant à l'ouverture du débat.
Monsieur Wilson, j'ai pris quelques notes au sujet de vos commentaires. Vous avez parlé de la taille de l'investissement des entreprises en TIC. Vous avez dit que cela représentait environ un tiers de l'investissement total d'une entreprise, ce qui représente une part importante des frais d'exploitation d'une entreprise. Vous avez également mentionné que les entreprises canadiennes sont à la traîne des entreprises américaines en matière d'investissement en TIC depuis 1992.
Je viens du monde des affaires et je connais le prix à payer pour faire des affaires. Je viens d'une petite entreprise et nous célébrons cette semaine les petites entreprises et leur contribution exceptionnelle à notre pays.
Je me demande si vous pourriez en dire un peu plus sur l'aspect coût pour ce qui est des TIC et expliquer pourquoi nous sommes à la traîne des États-Unis. Est-ce uniquement une question de taille ou une question d'occasion?
C'est sans doute un peu des deux. Je dirais toutefois qu'un des principaux facteurs par le passé, c'était le temps nécessaire pour amortir les investissements dans le matériel, les TIC ou autre chose. Jusqu'à il y a quelques années, nous n'avions pas un système accéléré et il fallait plus de 13 ans pour amortir les investissements dans du nouveau matériel. Si on parle des TIC, cela représente beaucoup de temps pour amortir les coûts avant de réinvestir dans la technologie. Aux États-Unis, un cycle bien plus court a permis d'accélérer l'amortissement. Les TIC profiteraient sans doute d'investissements considérables.
Martin pourra peut-être me corriger. Je n'ai pas vu de données ces deux ou trois dernières années, depuis que le Canada a mis en oeuvre durant deux ans la déduction pour amortissement accéléré. Il sera très intéressant de savoir si l'amortissement s'est accéléré ces quatre dernières années. Je pense qu'il sera essentiel de se poser la question lorsque certaines données seront rendues publiques.
La réduction du temps d'amortissement de 13 à 2 ans a permis aux entreprises d'investir des sommes importantes qui comblent le manque à gagner, du moins, je l'espère.
Ma position diffère un peu. Le commerce électronique est très vaste, mais je pense que nous n'aidons pas les choses si nous nous concentrons en grande partie sur l'achat de matériel comme si cela allait stimuler le commerce électronique. Pour être honnête, je ne pense pas que ce soit le cas. En fait, le marché tend dans l'autre direction, à l'heure actuelle. Par exemple, les PME utilisent des services axés sur les nuages informatiques pour les logiciels, l'infrastructure ou toute une gamme de choses. Bon nombre de PME n'ont donc pas besoin d'investir beaucoup dans les TIC.
Au lieu de nous demander comment faire pour que les gens achètent, de manière générale, plus de matériel qui est produit à l'étranger et qui n'engendre pas de profits au pays, nous devrions peut-être penser un peu plus à la façon d'attirer les importants services de nuages informatiques, très prisés présentement. Je pense que le Canada a l'occasion d'être un chef de file mondial, d'établir de grandes batteries de serveurs plus efficients sur le plan énergétique et de rassurer les gens sur la présence dans le nuage de nombreuses données personnelles, protégées par certaines dispositions législatives canadiennes sur la protection des renseignements personnels. Il s'agit en fait d'une occasion mondiale et les gouvernements commencent à se concurrencer pour accueillir les services axés sur les nuages informatiques.
Il ne faut donc pas penser à mon avis que, si les gens achètent plus de matériel, certaines questions seront réglées.
C'est une excellente remarque. Dans le milieu des affaires d'où je viens, beaucoup d'entreprises passent à ce type de services, simplement en raison des grands investissements qu'il faut faire. Les PME n'ont simplement pas la capacité d'investir autant.
C'est donc une question d'acheter ces services informatiques à des prix plus abordables et de donner des cours de formation et de perfectionnement. Dans le budget de 2011, nous avons annoncé un projet pilote de 80 millions de dollars pour que les collèges et les petites entreprises adoptent plus rapidement les TIC. Je me demande si vous avez des commentaires.
Les témoins ont-ils quelque chose à dire sur certains programmes que nous avons déjà mis en oeuvre? Ces programmes fonctionnent-ils, vont-ils fonctionner et auront-ils une influence?
Par exemple, il y a la « zone numérique » à l'Université Ryerson, une amélioration qui me semble très intéressante. Je pense qu'il faut investir davantage dans ce genre de chose.
Monsieur Geist, voulez-vous commencer? Nous passerons ensuite aux autres témoins intéressés.
Comme je l'ai dit au début, je me concentre surtout sur les politiques. Je pense que certaines choses qui étaient, disons, dans le discours du Trône sont importantes. Dans la dernière législature, la loi antipourriel a été adoptée et on élabore actuellement la réglementation. Il convient de remarquer qu'un certain nombre de groupes n'étaient pas assez attentifs lorsque le projet de loi a été adopté et, à l'étape de l'élaboration de la réglementation, ils tentent d'annuler le genre de structure mis en oeuvre par le gouvernement, qui a fait du bon travail selon moi.
Je pense que les modifications proposées aux dispositions sur la protection des renseignements personnels constituent une autre avancée très positive.
À mon avis, bien des éléments du projet de loi vont aider à élaborer certaines choses dont nous avons discuté, même concernant les droits d'auteur dont j'ai beaucoup parlé. Comme j'ai dit au début, les dispositions sur les verrous numériques n'en font toutefois pas partie. En fait, il importe de distinguer la flexibilité offerte, entre autres, par les dispositions sur l'utilisation équitable et l'application de dispositions sur les verrous numériques, qui ne présentent pas de risque juridique pour l'heure. Les dispositions sur l'utilisation équitable comportent un risque juridique pour les entreprises au Canada, mais pas aux États-Unis. L'application des dispositions sur les verrous numériques n'entraîne un risque potentiel que pour les entreprises. Je pense que ce qui sera plus facile grâce à davantage de flexibilité diffère pas mal de ce qu'une démarche de verrous apporte.
Bien sûr. Ma réponse porte sur plus d'un aspect. Je pense que les 80 millions de dollars sont bien investis. Je répète que, surtout pour les PME, bien des inconvénients ne sont pas liés au matériel par rapport aux logiciels, mais qu'il faut reconnaître l'occasion qui se présente et comprendre comment mettre les systèmes en oeuvre.
J'étais consultante en technologie avant que certaines personnes dans la salle ne soient nées et je répète que, très souvent, les questions ne sont pas d'ordre technologique; l'important, c'est de reconnaître l'occasion qui se présente. À l'Université Ryerson, notre seul regret, c'est que les investissements sont réservés aux collèges et que les universités n'y ont pas accès.
Concernant...
Je dois vous interrompre. Le temps est écoulé.
Je tiens à vous dire que, lorsque vous avez fait votre commentaire, tout le monde se regardait et se demandait comment une personne pouvait être assez jeune.
Monsieur Regan, pour sept minutes.
Le commentaire ne s'adressait sûrement pas à moi, monsieur le président.
Monsieur Geist, permettez-moi de commencer par vous. Comment la vente aux enchères du spectre peut-elle renforcer la compétitivité?
C'est une excellente question. Je pense qu'à bien des égards, cette vente représente une des meilleures occasions de changer la dynamique de concurrence dans une certaine mesure.
Je vais parler d'au moins deux ou trois questions. Je pense que nous avons besoin d'un autre marché réservé pour donner l'exclusivité d'une partie du spectre mis aux enchères aux nouveaux acteurs ou à ceux qui n'ont qu'un très faible pourcentage du marché, que les principaux intéressés ont avantage à garder en dehors du marché. En effet, les principaux intéressés sont prêts à surenchérir pour obtenir le spectre, pas parce que de payer autant est sensé sur le plan des affaires, mais parce qu'il est sensé de garder certains concurrents en dehors du marché. Cependant, un marché réservé semblable à celui que nous avions il y a quelques années est très sensé.
Comme les réponses à certaines questions de M. Lake ont donné à penser, il faut selon moi permettre aux investisseurs étrangers d'entrer en concurrence, en plus d'établir un marché réservé. C'est une occasion parfaite pour le faire; il faut créer un marché réservé et donner la possibilité aux étrangers de participer aux enchères.
À mon avis, il importe de souligner que la libération du spectre qui était utilisé pour la télévision analogique va entraîner des retombées considérables, peut-être des milliards de dollars. Les milliards recueillis dans la dernière vente aux enchères du spectre ont été accordés de façon compréhensible au secteur automobile, qui en avait besoin.
La vente aux enchères constitue une réelle occasion de réinvestir les fonds dans les questions d'ordre numérique pour offrir à tous Internet à large bande, aider à financer une partie de la culture et de la créativité que nous avons évoquées et financer l'acquisition de certaines compétences numériques dont les gens parlent.
Nous savons tous que les temps sont difficiles. Le réinvestissement représente non seulement une grande partie des fonds nécessaires, mais il rend aussi les enchères plus intéressantes pour les entreprises, car les dépenses retournent en quelque sorte dans certaines choses du secteur qui sont présentement sous-financées.
Comment pourrait-on abaisser les frais de transaction?
J'adresse d'abord la question à M. Geist, puis à M. Forzley.
Des spécialistes des moyens de paiement sont ici, mais je pense que, dans certains pays, il est tout à fait évident que l'on préconise la voie de la réglementation. Même en ce qui concerne le commerce électronique, aux États-Unis, nous avons entendu parler des craintes exprimées au sujet de l'emploi des cartes de crédit.
Aux États-Unis, les cartes de crédit présentaient un risque assez faible. Le règlement Z, qui fixe à 50 $ le passif maximal possible, faisait de la carte de crédit une forme viable de paiement, du point de vue du consommateur.
Le Canada n'a pas de tel règlement; en général, c'est contractuel. Des mesures ont été prises aux États-Unis pour faire descendre les deux types de frais et protéger convenablement les consommateurs. Ici, on a été plus timide.
Monsieur Forzley, vous avec mentionné que, aux États-Unis, on a le choix d'un plus grand nombre de fournisseurs d'accès au paiement par Internet, l'une des raisons étant le plus grand nombre de commerçants permettant d'appuyer ce système.
Compte tenu de ce problème, comment peut-on abaisser les frais de transaction au Canada?
Au Canada, malgré le nombre moindre de commerçants, beaucoup de fournisseurs d'accès au paiement par Internet fournissent volontiers leurs services. Il faut également savoir que, aux États-Unis et ailleurs à l'étranger, de nombreux commerçants cherchent à prendre pied au Canada, mais qu'ils s'en abstiennent, à cause des problèmes de frais et d'expédition. Ils trouvent le régime contraignant.
L'important c'est donc que plusieurs moyens de rechange se fassent concurrence sur le marché — pas seulement d'autres modalités de paiement. Il faut davantage d'acquéreurs ou sociétés de traitement des paiements. Par exemple, pour les cartes de crédit, il y a Moneris, qui est à peu près seul, n'est-ce pas? Toute la concurrence mise ensemble n'est pas assez forte pour provoquer la baisse des frais. Il faut donc ouvrir ce marché.
Pour les cartes de débit, il y a le règlement E et, pour les cartes de crédit, le règlement Z mentionné par M. Geist. Et il y a Durbin. Aux États-Unis, d'autres lois répriment la fraude et réglementent le risque, etc. Nous avons donc besoin de moyens semblables.
[Français]
Professeur St-Amant, quel système de réglementation pour protéger le système de paiements prévoyez-vous?
[Traduction]
Je pense que les principaux problèmes qui nuisent à l'accès sont la concentration des infrastructures et le flou juridique opaque qui rebutent probablement les acquéreurs étrangers. Il faut les examiner.
En ce qui concerne les frais d'interchange, on peut toujours rêver que les détaillants, les émetteurs et les réseaux finiront par s'entendre — peut-être. Mais je suis presque convaincu que pour arriver à ce résultat, il faudrait les menacer de faire décider quelqu'un d'autre à leur place.
Madame Cukier, comment laisseriez-vous libre cours au talent des jeunes de la façon que vous avez décrite?
Il y a quelques années, nous avons publié Innovation Nation: Canadian Leadership from Java to Jurassic Park, un livre sur les entrepreneurs du secteur des hautes technologies. Quelqu'un est d'autant plus susceptible de fonder les entreprises à répétition qu'il vient d'une famille d'entrepreneurs, que ce soit d'agents immobiliers, d'agriculteurs ou de médecins de ville.
Cela étant posé, il faut ensuite reconnaître que la structure de l'économie canadienne ne nous est pas réellement favorable, parce que la majorité des emplois se trouvent chez les gros employeurs. Il faut réfléchir à ce qu'il faut faire dans le système d'éducation pour mettre en place le genre de sensibilité, de goût du risque et d'aptitudes qui vont impulser l'esprit d'entreprise. Je ne parle pas seulement du contexte des affaires, mais j'inclus également l'entrepreneuriat social, et je crois vraiment que nous avons besoin d'une stratégie qui s'appliquera sans interruption de la garderie à l'université.
Certains ont parlé de la zone des médias numériques de Ryerson; vous êtes tous les bienvenus pour venir voir ce dont il s'agit. C'est un espace que le président a créé pour les étudiants. Il est animé et géré par les étudiants: on leur donne accès à cet espace, à la technologie et on les laisse aller. En 18 mois, ils ont créé 47 entreprises et 240 emplois, essentiellement en inventant de nouvelles formes d'apprentissage par expérience et d'approches à l'innovation. Ils appartiennent à une génération qui en sait plus sur la technologie et ses possibilités que la nôtre — je ne parle pour aucun de vous, mais pour moi-même uniquement.
Certains programmes provinciaux et fédéraux déjà mis sur pied donnent aux jeunes les occasions et l'expérience dont ils ont besoin pour augmenter leur employabilité, mais ils leur donnent aussi la confiance dont ils ont besoin pour voler de leurs propres ailes et créer leurs propres emplois. C'est, d'après moi, d'une importance capitale.
Je pense qu'il existe des occasions à saisir particulièrement intéressantes que nous négligeons. Il y a par exemple le mentorat inversé en vertu duquel les jeunes enseignent aux vieux à utiliser les médias sociaux. Les coûts sont faibles, mais cela offre d'excellentes possibilités.
À Ryerson, cela fait partie des choses que nous considérons comme très importantes.
Merci beaucoup, madame Cukier.
C'est la fin du premier tour de questions. Nous commençons le deuxième tour, avec M. Braid, qui disposera de cinq minutes.
Merci, monsieur le président.
Merci à tous les témoins d'être ici. Vous nous avez présenté des exposés qui étaient vraiment excellents et instructifs. Je vous en remercie.
Monsieur Geist, je commence par vous. Dans vos remarques préliminaires vous avez parlé de l'importance de mettre en place un Internet plus favorable à la concurrence. Pourriez-vous nous éclairer davantage sur le sens d'Internet plus favorable à la concurrence?
J'ai été encouragé d'apprendre que les fabricants et les groupes qui représentent les consommateurs partagent à ce sujet la même opinion. Il s'agit du genre de concurrence dont nous sommes témoins pour les services à large bande fournis aux foyers, les services câblés, au moyen de fibres optiques ou autrement, de même que les services sans fil. Peu importe le classement que l'on a sous les yeux, je pense que nous devons tous reconnaître que le Canada n'est pas un chef de file. En fait, au cours de la dernière décennie, à peu près, il s'est fait dépasser en ce qui concerne les prix payés par les Canadiens. Il y a aussi les plafonds qui compliquent la vie, reconnaissons-le, au commerce électronique, non seulement pour le consommateur, mais aussi pour les entreprises qui essaient de saisir les occasions qu'il offre et qui découvrent tous les frais cachés pour le consommateur. Elles ne peuvent donc pas lui offrir les plans concurrentiels accessibles à l'étranger, à cause de ces limites ou des frais élevés. Pour les deux protagonistes, c'est un lourd boulet à porter: les entreprises sont incapables de tirer avantage de la technologie, et les consommateurs doivent payer davantage.
La situation est la même dans le sans-fil, qui, dernièrement, s'est amélioré. Mais, d'après les statistiques des dernières années, presque tous les paramètres ou points de comparaison montrent que le Canada reste en arrière, en ce qui concerne les prix. Certains gros joueurs du secteur ont commencé à offrir la vitesse LTE ou 4G. Nous commençons donc à assister à l'accélération des vitesses. Mais ici, à Ottawa, par exemple, où Rogers a d'abord lancé son réseau LTE, supposément pour que des personnes comme vous voyiez que la technologie est effectivement arrivée au Canada, il faut se rendre à l'évidence: c'est inabordable pour le particulier. C'est une offre destinée aux entreprises, en raison des prix faramineux. Quel contraste avec d'autres pays où la possibilité de passer directement à un service à large bande sans fil permet le genre de concurrence que vous recherchez! Le consommateur n'a pas seulement le choix entre le câble et la ligne d'abonné numérique, le DSL. Ces deux options semblent à peu près équivalentes, mais, désormais, le sans-fil offre une troisième possibilité. Une façon d'augmenter la concurrence passe par les prochaines enchères du spectre de fréquences.
Monsieur Geist, vous avez dit que, à cause des politiques mises en place il y a 10 ou 15 ans, le Canada s'est privé de la possibilité pour Google ou Facebook d'être canadiens. Vous en avez un peu parlé, quand vous avez fait allusion à l'infonuagique. Actuellement, qu'est-ce que le Canada fait de bien? Quelles forces pouvons-nous démultiplier? Où pouvons-nous continuer d'encourager l'innovation ainsi que le travail et les économies axés sur la connaissance?
Dernièrement, on a beaucoup parlé de certains succès remportés par de petits joueurs, par exemple dans le marché des applications. À Toronto, un certain nombre de joueurs importants sont entrés sur ce marché. Nous avons assisté dernièrement à beaucoup d'achats d'entreprises, de nouvelles entreprises canadiennes, qui ont commencé à monter un peu et qui se font cueillir par des sociétés américaines. Je reconnais que pour les entrepreneurs qui vendent leur entreprise, le gain est considérable. C'est la généreuse récompense pour laquelle ils ont tant travaillé. Mais du point de vue canadien, cela crée un cercle vicieux. Pour grossir, on a besoin de joueurs plus importants — comme dans un écosystème en développement. Nous en avons été les témoins, il y a quelques années, ici, à Ottawa, quand les Corel et les Newbridge ont commencé à créer toutes sortes de sociétés dérivées. Des sociétés de deuxième et troisième générations, de nouvelles sociétés sont arrivées sur le marché, en profitant généralement des succès de la première génération.
Dans votre circonscription, la réussite de RIM a permis la naissance de telles sociétés de deuxième et de troisième générations. Les entreprises qui se trouvent dans un marché où il est difficile de grossir rapidement, en partie à cause du système juridique, ne donneront pas de progéniture, malgré la réussite et l'énergie créatrice de leurs fondateurs. Nous sommes plutôt devenus une sorte de pépinière pour les joueurs importants des États-Unis. Pour certains d'entre eux, c'est formidable, mais, d'après moi, cela réserve à notre économie des répercussions négatives à long terme.
Merci, monsieur le président.
Monsieur Geist, vous avez parlé de serrure numérique et de son éventuel effet sur le commerce électronique. Quelque chose que l'on voudrait acheter en ligne pourrait être mis sous serrure numérique... il y a beaucoup de confusion à ce sujet chez les consommateurs. Pourriez-vous nous éclairer?
Volontiers.
Actuellement, rien n'empêche une entreprise d'employer une serrure numérique. Un certain nombre d'entreprises l'ont utilisée. Beaucoup ne l'utilisent plus. C'est l'industrie de la musique qui l'a utilisée la première, pensant en avoir besoin. En général, les consommateurs se sont rebellés, et l'industrie a fini par ne plus l'utiliser.
Personne, donc, ne dit qu'il n'est pas loisible à une entreprise d'employer une serrure numérique. Les groupes de consommateurs, les groupes de sensibilisation, le Conseil canadien du commerce de détail ou plusieurs autres s'inquiètent de la possibilité que, en vertu du libellé du projet de loi C-11, la serrure numérique ait préséance sur de nombreux autres droits accordés par la Loi sur le droit d'auteur.
Ainsi, le consommateur qui achète un DVD est incapable de le transférer d'un appareil à un autre. C'est une serrure électronique assez importante.
Plus tôt cette année, quand RIM a lancé le PlayBook, j'ai eu l'occasion d'en parler également devant le comité étudiant le projet de loi C-32. Par égard pour les propriétaires de la plate-forme d'un concurrent, par exemple d'un iPad, j'ai mentionné que le coût réel de l'appareil n'était pas ce qui avait été payé pour l'acquérir; c'était celui du contenu, enrichi au fil du temps, livres électroniques, films, émissions de télévision et tout le reste, qui est acheté.
L'adoption de politiques favorables aux serrures numériques — croyez-moi, c'est exactement l'effet du projet de loi C-11 — accroît de façon spectaculaire le coût du transfert du contenu d'un iPad au Canadian PlayBook, parce que le coût ne se situe pas uniquement dans cet appareil. Il est augmenté du coût du transfert de tout le contenu, parce que le consommateur est littéralement enfermé dehors.
Merci de vos éclaircissements.
Maintenant, à M. Patacairk — est-ce que j'ai bien prononcé votre nom?
Parfait. Merci.
Peut-être pouvez-vous décrire certains défis que vos membres ont dû relever en adoptant la technologie du commerce électronique et en s'y adaptant.
La plupart de nos membres qui ont adopté ces technologies jusqu'au point que Samer vient de décrire trouvent que c'est un marché dans lequel il est difficile d'entrer et où, effectivement, il est difficile de réussir. Et je ne veux pas répéter ce que tous les autres témoins ont dit, au cours de la dernière heure et demie, mais, pour toutes ces raisons combinées, c'est un domaine que les gens tendent à éviter. Le risque est tout simplement trop grand pour lancer une entreprise que l'on veut durable et dans laquelle on veut exceller.
Actuellement, aux États-Unis, on fait sauter les obstacles. On déréglemente, pour permettre aux sociétés américaines d'affronter la concurrence. En ma qualité de responsable principal des investissements directs de l'étranger dans notre organisation, qui parcourt le monde entier, particulièrement les États-Unis, j'ai eu connaissance, ces temps-ci, d'innombrables fusions et acquisitions, plus que dans les investissements dans des installations nouvelles et c'était uniquement de bons investissements au Canada.
Le phénomène est le suivant: ces sociétés ont trouvé la brèche ici et s'y engouffrent pour faire main basse sur nos sociétés. C'est un problème qui perdurera. Et pas seulement dans le secteur dont nous parlons. Il sera général. Je peux citer des noms. Actuellement, beaucoup de sociétés sont à vendre. Nos sociétés, pour toutes ces raisons, se tiendront à l'écart du commerce électronique et essaieront de faire autre chose.
Quelqu'un a fait un commentaire sur ce que nous pouvons faire. Je pense que le gouvernement fédéral commence à s'en faire une meilleure idée. Il existe un programme dont nous profitons pour les sciences, les technologies, l'ingénierie et les mathématiques (ou STIM) ainsi que toutes nos belles réussites, en réunissant les efforts des universités, de l'industrie, etc. — par exemple, FedDev, ou le programme de développement du Sud de l'Ontario. En fonction de l'interlocuteur, c'est l'un des deux programmes, mais il y a d'excellents programmes dont peuvent profiter les entreprises, y compris le STIM.
C'est avec des gens comme nous, à l'échelon régional et à celui des organismes de développement économique, que les choses se passent avec les compagnies. Nous sommes à leur écoute et nous comprenons la situation. Un tel programme, c'est brillant, parce qu'il amène le gouvernement fédéral à oeuvrer à la base, à commencer à travailler sur tout ce qui doit être fait dans les différents domaines.
Félicitations donc au gouvernement fédéral. Nous avons beaucoup de terrain à couvrir. Les États-Unis apprennent rapidement à profiter de la situation, mais si nous ne travaillons pas ensemble sur la question du commerce électronique et sur les technologies en général, ils auront le champ libre pour venir ici s'emparer de nos entreprises.
Merci, monsieur Patacairk.
Monsieur Thibeault, c'est tout le temps qui reste.
Passons maintenant à M. Lobb. Cinq minutes.
Merci, monsieur le président.
Ma première question s'adresse à M. Geist, et c'est également une observation générale. Dans les remarques préliminaires, beaucoup de points intéressants ont été soulevés. Nous n'avons cependant pas entendu parler d'un facteur qui étouffe l'innovation: les poursuites intentées en vertu des brevets américains.
Avant d'être élu, je travaillais pour une entreprise de logiciels. Elle employait 150 personnes et elle commençait à surpasser ses concurrents aux États-Unis. On l'a actionnée dans le sud-est du Texas pour contrefaçon de brevet. Elle a eu la chance de bien s'en tirer au moyen d'un règlement qui lui permettait de poursuivre son activité.
Comment les jeunes entreprises canadiennes peuvent-elles protéger leur propriété intellectuelle et être actives aux États-Unis? C'est grâce à ce marché que beaucoup de nouvelles entreprises vont pouvoir croître. Comment peuvent-elles faire? Comment pouvons-nous les aider? Que pouvons-nous faire?
Je ne crois pas qu'il s'agit simplement de la façon de faire des affaires aux États-Unis. Le problème tient à ce qu'il y a des armées de brevets. En effet, la capacité d'innover dans quelque secteur que ce soit est souvent freinée par la présence de multiples brevets dans le domaine. On entre dans une véritable course, et il ne s'agit pas tant des innovations elles-mêmes que d'un moyen de se défendre au cas où quelqu'un contesterait l'innovation déclarée.
Selon moi, cette situation crée, en un sens, une perte énorme de temps et de ressources. À titre d'exemple, nous avons vu, dernièrement, les compagnies de téléphones intelligents dépenser des milliards de dollars, non pas pour la R-D, le marketing, le développement ou toute autre activité d'innovation que nous trouverions souhaitable, mais simplement pour se défendre contre des batailles futures possibles.
Au Canada, nous devons reconnaître que nous avons besoin d'une loi sur les brevets et d'une réforme du droit des brevets pour éviter, dans toute la mesure du possible, de nous retrouver avec le genre de problèmes créés par des armées de brevets qui étouffent actuellement l'innovation.
J'aimerais vous parler d'un cas particulier au secteur pharmaceutique. Dans les négociations qu'elle mène avec le Canada pour conclure un accord économique et commercial global, l'Union européenne exerce de fortes pressions pour accroître les mesures de protection des brevets. Je crois qu'une augmentation de ces mesures nuirait à certaines compagnies pharmaceutique canadiennes. Le marché serait fermé pour certains de leurs produits, sans parler des coûts connexes, qui augmenteraient les coûts des pharmaceutiques et qui seraient répercutés sur les consommateurs.
D'accord.
J'ai une question à poser à M. Wilson.
Les systèmes de planification des ressources de l'organisation sont à l'évidence très précieux pour le groupe que vous représentez. Vous avez dit représenter 10 000 personnes ou compagnies. Quelles avancées réalisent-elles avec leurs systèmes de planification? Quel pourcentage est en temps réel? Je sais que là où j'ai travaillé auparavant, nous ne pouvions pas travailler en temps réel et que c'était un problème. Où en sont la plupart des compagnies relativement à cette technologie?
Je vais parler de la situation en général.
Je ne sais pas si Martin a quelque chose d'autre à ajouter.
À cause de l'immense diversité des compagnies, qui va des grandes multinationales aux petites firmes de génie logiciel, la situation concernant cette technologie varie probablement grandement de l'une à l'autre. Je ne pourrais pas donner de réponse définitive à ce sujet à qui que ce soit. Cela dépend de la région, de la compagnie et du secteur en cause.
Sur le plan de la compétitivité — il est bien évident que si on a un système à la fine pointe qui permet de travailler en temps réel, cela donne un avantage énorme — que peut faire le gouvernement pour aider les entreprises à investir dans un tel système?
Je pense que beaucoup a déjà été fait. Le programme d'amortissement accéléré aidera considérablement, comme je l'ai dit plus tôt. C'est une chose cruciale. Il serait très utile de rendre la déduction permanente. Actuellement, on ne parle que d'une période de deux ans qui vient juste d'être prolongée dans le budget le plus récent.
Vous avez raison de dire que la capacité de travailler en temps réel revêt une importance cruciale dans le monde des affaires, tout comme cela est le cas pour les consommateurs. Alors, toute innovation en technologie qui peut être mise à profit — nous parlons de la formation des employés — serait une excellente politique publique. Je n'ai rien de plus précis à vous répondre pour l'instant.
J'aimerais parler brièvement du Programme d'aide à la recherche industrielle ainsi que du Programme d'aide à la recherche scientifique et au développement expérimental. La compagnie pour laquelle j'ai travaillé a fait une contribution énorme à cet égard, que pensez-vous de ces programmes?
Il y aurait probablement une façon d'étendre un peu le Programme d'aide à la recherche scientifique et au développement expérimental. Le groupe de travail Jenkins a formulé plusieurs recommandations pour faire des coûts de ce programme de simples coûts de main-d'oeuvre. Les types d'activités admissibles au programme seraient alors réduits, étant donné que 70 p. 100 des activités de R-D au Canada sont menées dans le cadre du Programme d'aide à la recherche scientifique et au développement expérimental et d'autres programmes indirects. Alors, si le Programme d'aide à la recherche industrielle peut contrebalancer l'appui indirect que nous fournissons actuellement en permettant d'appuyer de façon plus directe des acquisitions de technologies de l'information et des communications, nous serions probablement favorables à cette recommandation.
Merci, monsieur Lavoie.
Je cède maintenant la parole au vice-président, M. Masse, pour cinq minutes.
Merci, monsieur le président.
Merci de votre présence ici.
Je crois qu'on a parlé de ces socialistes radicaux fous aux États-Unis qui ont décidé de limiter les frais des cartes de débit parce qu'ils les considéraient injustes. Voilà un bon exemple de situations qui parfois nécessitent un système réglementaire fort.
J'aimerais poser une question à MM. Wilson et Forzley au sujet des membres de leurs organisations et de l'expérience qu'ils ont de la chose dans leur milieu. Nous savons que les frais des cartes de crédit, ou de quoi que ce soit d'autre, sont plus élevés ici au Canada, mais les banques facturent-elles les mêmes frais au Canada et aux États-Unis? Les frais des banques sont-ils différents selon qu'elles font des affaires au Canada ou aux États-Unis? Sait-on si ma banque par exemple, la TD, facture au Canada des frais différents de ceux qu'elle facture aux États-Unis?
Dans de nombreux cas, aux États-Unis ou même ici, au Canada, on ne traite pas directement avec les banques, mais avec un service de traitement des paiements. Ce sont ces gens qui traitent en fait les paiements, même si les compagnies de cartes de crédit — disons VISA ou MasterCard ou les banques — se font parfois chauffer. D'une certaine façon, les services de traitement des paiements font également partie du problème, bien que pour ce qui est des banques, leur part est restreinte depuis l'adoption de la modification Durbin, etc. Aux États-Unis, au moins, les banques devront faire montre de constance à cause de ce changement. Toutefois, la règle ne s'applique qu'aux cartes de débit, naturellement.
Au Canada, c'est différent, parce qu'il n'y a pas vraiment beaucoup de concurrence et parce que les négociations se font davantage de personne à personne; les frais varient donc d'un marchand à l'autre.
J'ai peut-être une question pour notre attaché de recherche; je lui demanderais de me fournir des renseignements de base sur l'écart observé entre le Canada et les États-Unis dans les frais facturés aux entreprises et aux consommateurs. Ce serait une information intéressante à avoir.
La compétitivité de notre marché me préoccupe vraiment. Le secteur est en croissance et les écarts demeurent; cela va créer plus de problèmes. Nous devons corriger la situation, si ce n'est peut-être par une réglementation.
Je cède maintenant le temps qui me reste à M. Thibeault. Il posera les dernières questions.
Merci beaucoup.
Merci.
Dans la même veine, nous entendons parler de choses comme Google Wallet. Le programme a été lancé aux États-Unis, mais il utilise aussi VISA et MasterCard, qui ont ces taux d'interchange. Google Wallet fera inévitablement son entrée au Canada. Quel type de répercussions Google Wallet aura-t-il sur les marchands?
Au cours de la dernière législature, notre comité s'est penché sur les taux d'interchange qui se répercutent sur les petites et moyennes entreprises. Lorsque Google Wallet entrera sur le marché canadien — ce qui, nous l'espérons, facilitera les choses pour l'utilisateur du commerce électronique — quelles seront les répercussions sur les PME?
J'imagine que la question s'adresse à moi.
Google Wallet ou d'autres programmes semblables — Amazon Payments PayPal, il y en a une tonne — n'utilisent pas seulement les cartes de crédit. Aux États-Unis, les cartes de débit sont délivrées par VISA ou MasterCard; ce qui permet aux gens de les utiliser pour faire des achats en ligne. Les gens peuvent également utiliser le traitement automatique des chèques; ils donnent leur numéro d'acheminement bancaire au fournisseur et ils peuvent tirer de l'argent directement de leur compte bancaire. En adhérant à Google, PayPal, Amazon, ou d'autres programmes du genre, les gens peuvent maintenant avoir directement accès à l'argent dans leur compte bancaire.
Actuellement, tout cet espace est en pleine ébullition aux États-Unis. Lorsque cette technologie arrivera au Canada, elle attirera des adeptes, naturellement, parce que si on fait confiance à Google et si on a Google, Amazon, PayPal, ou quoi que ce soit d'autre, on a, d'une certaine façon, son identité numérique liée à ses cartes de crédit et ses cartes de débit et on peut faire des transactions rapidement. La technologie est assez sûre, parce que ces programmes sont munis de certains dispositifs de protection, qui s'ajoutent à ceux des cartes de crédit et des cartes de débit.
Au Canada, la difficulté est de lier facilement ses cartes de débit à l'accès à sa banque et à son portefeuille. Il en est ainsi parce que les cartes de débit ne sont pas rattachées à un réseau.
Monsieur St-Amant, vous en avez parlé un peu, pour ce qui est de la protection des consommateurs, comment le Canada se prépare-t-il à l'adoption à grande échelle des paiements mobiles ou des portefeuilles électroniques?
Premièrement, pour répondre à votre première question, j'aimerais ajouter deux points. Notre infrastructure de paiement — notre plomberie, si vous voulez — est plutôt incapable de soutenir actuellement le genre de nouveaux paiements qui sont en train de prendre de l'expansion aux États-Unis. Nous tirons de l'arrière là aussi.
Ensuite, selon le type de dispositif utilisé, les détaillants pourraient devoir dépenser davantage pour offrir le nouveau bidule à leurs clients, et ils ne seront peut-être pas très heureux de la chose. Je suis certain que le Conseil canadien du commerce de détail serait enchanté de vous en parler en détail.
En ce qui concerne la protection des consommateurs, la situation actuelle est intenable. Nous avons un certain nombre de règles, certaines fédérales, d'autres provinciales, d'autres du ressort de l'ACP et des codes de conduite, dont personne n'a jamais entendu parler. Le droit du contrat en général est impossible à comprendre, et je dirais que, pour le bénéfice de tout le monde — les sociétés qui émettent les dispositifs de paiement, les consommateurs, les détaillants — il faut mettre en place une espèce de tribune commune pour que tout le monde connaisse les règles. J'ai bien peur que cela nécessite l'adoption de dispositions législatives par le gouvernement fédéral.
On pourrait peut-être créer au moins un terrain sur lequel une centaine de fleurs pourraient ensuite pousser, à mesure que les compétiteurs voudraient offrir une meilleure protection, etc., mais nous avons besoin d'un terrain commun, et je dirais qu'il faudrait probablement pour cela des dispositions législatives fédérales. Vous jugerez peut-être utile d'avoir auparavant de longues discussions avec vos amis des provinces et des territoires. Des mécanismes sont déjà en place pour régler les questions d'harmonisation, mais il y a lieu de réfléchir à la façon de les améliorer.
Merci, monsieur St-Amant.
Je veux informer les membres que je suis très souple pour les périodes de temps accordées aux partis. À cause de la nature et de la complexité des réponses, j'essaie d'équilibrer le temps dans son ensemble.
Je cède maintenant à la parole à M. Richardson.
Je suis curieux de connaître les différences dans les réglementations en vigueur au Canada et aux États-Unis. M. Geist a parlé des limites d'utilisation des données. J'aimerais en savoir plus sur les différences entres les systèmes bancaires canadiens et américains.
Pourquoi avons-nous ces obstacles, ici, au Canada? Qui protégeons-nous?
En ce qui concerne les limites, qui sont devenues un enjeu politique et populaire plus tôt cette année pour la facturation fondée sur l'utilisation, je crois que la chose est passée inaperçue pour la plupart des Canadiens pendant deux ou trois ans. Les relations avec la CRTC faisaient en sorte que deux ou trois gros joueurs, menés par Bell, avaient la capacité de faire bouger les choses.
Je crois que le gouvernement, que tous les partis, ont fait un bon travail en février lorsqu'ils ont mis fin à cette situation. Nous avons tenu des audiences avec le CRTC au cours de l'été, et nous verrons plus tard ce que cet organisme fait actuellement. Toutefois, il faut reconnaître que nos problèmes concernant les limites d'utilisation des données ne seront pas résolus seulement en les déréglementant. Je ne crois pas d'ailleurs que le CRTC se prépare à faire cela. L'organisme interviendra au niveau de l'ensemble du marché et non au niveau du marché de détail. La seule façon de changer la situation est de changer la concurrence sur le marché. Nous avons besoin de plus de compétiteurs. Nous avons peut-être besoin de plus de règles pour faciliter l'accès ouvert dont nous ont parlé les fabricants. Voilà le genre de choses qui peut aider les petits fournisseurs d'Internet qui ont parfois de nombreux abonnés dans les collectivités locales, sans être pour autant de gros joueurs. Pour corriger le déclin graduel dans lequel le Canada s'est enlisé, on pourrait, entre autres moyens, permettre aux petits fournisseurs d'être plus compétitifs et laisser d'autres joueurs entrer sur le marché pour encourager ainsi l'utilisation du sans fil à large bande. Notre pays est le seul au monde où les limites d'utilisation des données sont pour ainsi dire uniformes. Cette situation a pour conséquence qu'il y a des coûts cachés importants lorsque vient le temps de mettre en place de nouvelles sortes de services de commerce électronique.
D'un point de vue pratique, le réseau bancaire américain est assez ouvert. Aujourd'hui, même si on entend dire, chaque semaine, que des banques ferment leurs portes, il y a toujours plus de 17 000 banques aux États-Unis; beaucoup sont petites et ne comptent qu'un seul établissement. Il y a les coopératives de crédit des services de pompiers, par exemple. Pour que les clients de ces établissements puissent faire des affaires, que ce soit par carte de débit, carte de crédit ou même par transaction en ligne, le réseau bancaire doit demeurer assez ouvert. On peut en fait entrer dans ce réseau de plusieurs façons. On peut se faire parrainer par une banque; ou encore travailler avec un intermédiaire, comme RPPS, propriété de MasterCard. Il y a différentes façons d'entrer dans le réseau bancaire, et il est facile d'y entrer pour un compétiteur, qu'il s'agisse d'un fournisseur de services de paiement d'un autre genre ou d'un service de traitement de cartes de crédit. Le réseau compte un nombre considérable d'établissements bancaires. Les organismes de traitement des paiements, pour leur part, se comptent par centaines. Il ne s'agit même pas de dizaines, dans ce cas.
C'est un réseau assez ouvert. Presque tout le monde qui a un peu d'argent et qui peut faire un dépôt pour garantir le flux de paiement peut joindre le réseau. C'est simplement un marché structuré différemment.
Il n'est pas facile d'ouvrir une banque au Canada. Pour devenir banquier, il faut suivre un processus important et très restrictif. Aux États-Unis, on peut faire un dépôt de 100 000 $ et devenir banquier rapidement par la suite. C'est aussi simple que cela; et dès qu'on le veut, qu'on soit un banquier ou un fournisseur de service de traitement, on peut commencer à faire transiter de l'argent et, de ce fait, on peut commencer à concurrencer les autres, que ce soit sur le marché de la carte de crédit, de la carte de débit, ou quelque chose d'autre. Il est facile d'entrer dans le réseau bancaire et de faire partie de ce réseau. Cela n'est pas le cas ici.
[Français]
Ma question s'adresse à M. St-Amant, pour poursuivre la conversation commencée par mon collègue M. Thibeault qui parlait des portefeuilles électroniques.
Pensez-vous qu'il serait approprié de créer, au Canada, un genre d'instance, gouvernementale ou autre, qui s'occuperait exclusivement des paiements électroniques?
Dans le document de consultation qu'il a publié en juillet dernier, le Groupe de travail sur l'examen du système de paiements proposait une structure incluant une organisation de concertation et un organisme de surveillance et de réglementation. Divers intervenants ont émis des commentaires et recommandé de préciser un peu les détails de cette proposition. Toutefois, à ma connaissance, personne jusqu'à maintenant n'a dit que c'était une mauvaise idée.
Je pense qu'il faudra effectivement envisager de se doter, d'une manière ou d'une autre, d'un mécanisme de réglementation et d'encadrement des paiements. En Australie, par exemple, c'est très clairement la Banque centrale australienne qui encadre les paiements. Aux États-Unis, c'est toujours plus compliqué, mais la Réserve fédérale joue un rôle extrêmement important. Actuellement, on assiste à une refonte de la réglementation du secteur financier au Royaume-Uni, où l'on va s'assurer que ces questions seront traitées par des régulateurs étatiques.
Pour en revenir à la question précédente, il faut dire que le secteur financier a ceci de particulier que, dans bien des cas, pour augmenter la concurrence, il faut réglementer un peu plus et un peu mieux. Car le secteur financier utilise ou traite l'épargne des gens — votre épargne, vos économies, les paiements que vous voulez faire et ceux que vous voulez recevoir. Donc, si on veut que de nouveaux joueurs arrivent dans le marché, il faut s'assurer, dans l'intérêt macroéconomique comme dans celui des différents intervenants individuels, d'avoir en place des règles qui sont adaptées. Le cadre de la surveillance prudentielle, par exemple, vaut pour une banque qui a 500 milliards de dollars d'actifs, mais ne vaut peut-être pas pour un petit fournisseur. Or, il faut quand même des règles. Actuellement, au Canada, il n'y a strictement rien.
Nous avons besoin de règles et nous avons besoin de quelqu'un pour les mettre en place, de façon à favoriser davantage de concurrence. Toutefois, il faut s'assurer que tout le monde connaît les règles du jeu, à la fois pour les paiements électroniques et pour les paiements traditionnels. On assiste actuellement à une situation où de plus en plus de commerçants refusent d'accepter du numéraire. Cependant, pour 5 p. 100 ou 10 p. 100 de la population canadienne qui n'a pas de carte de crédit ni peut-être de carte de débit, refuser l'argent émis par la Banque du Canada pose problème.
[Traduction]
Désolé, je parle sans doute trop vite.
Non seulement faut-il envisager les paiements électroniques, mais il faut repenser à l'ensemble de l'enjeu lié aux paiements. De plus en plus, c'est un monde qui change et les paiements, comme je le disais plus tôt, sont essentiels à toutes les formes de commerce électronique.
Deux d'entre vous — et peut-être que vos collègues vont abonder dans le même sens — ont mentionné un cadre évolutif et précisé qu'on devrait avoir un cadre réglementaire qui soit flexible.
Quelles seraient les conditions nécessaires pour répondre aux besoins des consommateurs et des entreprises notamment, plus qu'à ceux des banques? On sait que toute cette technologie évolue très rapidement. Quelles seraient les conditions qui permettraient d'avoir un cadre législatif évolutif?
Il y a des principes réglementaires de base, neutres sur le plan technologique, qu'on pourrait mettre en place et qui seraient facilement adaptables.
L'autre élément auquel la plupart des intervenants tiennent depuis des années, c'est la mise en place d'un forum qui permettrait aux gens de s'asseoir autour d'une table et de débattre de ces questions de façon intelligente, cohérente et organisée. C'est un des éléments qui étaient proposés dans le document de consultation du groupe de travail. Dans la mesure où c'est possible, bien que ce ne soit pas simple à mettre en place, ce serait un outil extrêmement utile. Il existe déjà un certain nombre de forums, mais ils sont insuffisants.
Évidemment, le défi considérable auquel on fait face dans ce domaine, comme dans celui des télécommunications, c'est qu'on retrouve un petit nombre de joueurs qui sont extrêmement influents et qui, jusqu'à maintenant, ont trouvé que la situation leur convenait très bien. Le changement est donc susceptible de les déranger un peu. Il faut leur expliquer que si on effectue ce changement correctement, dans un marché plus gros, même avec une part peut-être un peu plus petite, ils vont faire davantage de profits et que même eux pourraient être gagnants.
Merci, monsieur le président.
Monsieur Geist, j'aimerais revenir à ce que vous avez dit.
Vous avez dit tout à l'heure que le Canada avait la possibilité de devenir un chef de file mondial en économie numérique. J'ai lu que vous avez dit cela plusieurs fois. Vous avez de nombreuses idées sur la façon pour le Canada de le devenir. Nous parlons de tant de choses en même temps: la stratégie d'économie numérique, le rapport Jenkins qui s'en vient, l'anti-pourriel, le droit d'auteur, la Loi sur la protection des renseignements personnels et les documents électroniques dont vous parliez plus tôt, l'utilisation du spectre et la propriété étrangère.
Nous pensons aux fabricants et aux exportateurs que MM. Wilson et Lavoie représentent ici — les détaillants et les petites et moyennes entreprises —, mais qu'en est-il des techniciens, des gens de la TI? Quelles possibilités s'ouvriraient à eux si nous changeons les choses? De quoi ce monde aurait-il l'air pour eux? Quelles occasions ratent-ils actuellement?
Il y a dix ans, quand les gens parlaient du commerce électronique, ils disaient, dans une large proportion, que les obstacles pour y entrer étaient peu élevés. Bref, une petite entreprise pouvait soudainement avoir accès au marché. Franchement, j'entends dire depuis presque deux heures que les obstacles sont même plus élevés que ce que la plupart avaient prévu. En fait, ils sont peut-être plus élevés maintenant que ceux du monde non électronique, ce qui ne correspond certes pas à ce que le commerce électronique promettait au départ.
Mme Cukier a parlé de séparer un peu les choses. Je ne parlerais pas des réussites et des échecs, mais des différents types d'entreprises. Les obstacles ne sont pas élevés pour le secteur des services, où le volume de l'équipement, des produits et d'autres choses en cause n'est pas nécessairement très important. Nous pouvons constater un certain mouvement dans ce secteur, qui est loin d'être suffisant à cause, en partie, de l'absence de mesures de protection. Quelqu'un qui essaierait de créer une plate-forme devrait assumer la responsabilité de tout ce qui se dirait sur cette plate-forme. Voilà un risque considérable qu'il faut courir au Canada, mais qui n'existe pas aux États-Unis.
Des occasions s'offrent à nous tant sur le plan de la vente de produits que sur celui de certains services. Or, il est très clair que des obstacles se dressent devant nous, qu'il s'agisse de risques légaux ou financiers ou simplement d'obstacles pour entrer sur le marché — nous devons faire face à ces trois types d'obstacles en fait — et que nous ne pouvons pas profiter des occasions qui se présentent.
Si l'environnement devait ressembler à ce que vous aimeriez qu'il soit, et nous avons parlé de ce à quoi cet environnement pourrait ressembler, que serait-il pour le fabricant? À quoi ressemblerait votre monde pour l'exportateur ou le détaillant au Canada? Quelle serait l'interaction avec le consommateur dans un monde idéal?
Vous commenceriez à le voir comme vous le voyez dans d'autres pays. Vous le voyez dans une certaine mesure aux États-Unis, dans des magasins de détail ordinaires. Vous le voyez notamment au Japon et en Corée du Sud, où les gens utilisent le réseau comme principal outil d'achat et d'interaction, pour accéder à de nombreux services, des jeux et du divertissement, ce que nous appelons ici le commerce électronique. Il y a là des possibilités commerciales extraordinaires.
Il importe de reconnaître, comme on nous l'avait dit, que le Canada constitue un petit marché et qu'on souhaite aller ailleurs. Dans de nombreux cas, c'est presqu'une nécessité, parce que le marché est petit et il faut surmonter ces obstacles. Si on créait un environnement qui permettrait aux entreprises de démarrer, de grandir et de prendre de l'expansion ici, elles auraient la possibilité de vendre leurs produits dans un marché mondial. Nous sommes tous au courant des difficultés qu'a connues RIM récemment. RIM est l'exemple classique de l'entreprise qui a démarré ici et qui est devenue très rapidement un acteur sur la scène mondiale. C'est un lieu commun de dire que nous avons besoin de multiplier ce type d'entreprises, mais c'est la vérité. Ce que nous devons faire, entre autres, c'est de cerner, dans notre cadre actuel, ce qui nous empêche de le faire.
Oui. Comme je l'ai dit au début, il nous faut absolument un environnement qui ne présente pas d'obstacles, et je ne suis pas en désaccord là-dessus. Mais il faut aussi des gens qui ont des aspirations. On dit souvent des Canadiens... Nous avons beaucoup d'entreprises en démarrage, mais elles n'arrivent pas à l'étape suivante. Ce qu'a dit le professeur Geist au sujet des idées des entrepreneurs canadiens qui sont souvent vendues à quelqu'un d'autre est malheureusement vrai. Nous venons d'effectuer une étude qui montre que plus de la moitié des entreprises en démarrage obtenaient du financement à l'extérieur du Canada. Cette situation a quelque chose à voir avec l'aversion du risque d'un grand nombre de financiers et la difficulté d'accéder aux capitaux au Canada.
Ce que je dirais — et c'est possible que je me trompe —, c'est que vous pourriez apporter bon nombre des changements réglementaires dont on parle aujourd'hui. Vous pourriez créer des ouvertures. Vous pourriez abaisser les prix. Toutefois, si on ne s'attaque pas à ces problèmes pour créer une culture où les gens seraient encouragés à faire des essais et des erreurs, si on ne fait pas en sorte que les ingénieurs soient jumelés à des gens qui comprennent ce qu'est un marché et comment combler les besoins d'un marché, si on ne fait pas ces choses correctement, vous pourriez bien tout déréglementer, mais je ne suis pas certaine qu'on serait bien avancé pour autant.
La seule autre chose que je voudrais dire — puisque j'étais là lorsque nous avons discuté de l'interconnexion et de la concurrence dans le domaine de l'interurbain —, c'est que si vous êtes à l'extérieur des grandes régions urbaines, les problèmes d'accès à l'infrastructure et ainsi de suite... Très peu en ont parlé. Si nous souhaitons faire avancer l'économie canadienne et améliorer la qualité de vie de tous les Canadiens, nous devons nous attaquer à quelques-uns de ces problèmes d'accès.
La déréglementation complète n'est peut-être pas la façon de répondre aux besoins des gens qui vivent dans le nord de l'Ontario. Je tiens à ce que cela figure dans le compte rendu également.
Merci beaucoup, madame Cukier.
Voilà qui met fin à notre deuxième tour de table. Nous allons entreprendre le troisième. Nous avons tout juste le temps de le terminer. Nous allons probablement prolonger un peu la séance pour que chacun puisse avoir ses cinq minutes, mais nous allons devoir faire preuve de discipline. Alors je vous prie de m'excuser à l'avance si je dois vous interrompre.
Monsieur Braid, vous avez cinq minutes.
Merci, monsieur le président.
Vous avez parlé un peu plus tôt, monsieur le président, de la complexité des réponses, mais vous n'avez rien dit de la complexité des questions. Je ne sais pas si c'était intentionnel ou non.
Madame Cukier, je suis député de la circonscription de Kitchener—Waterloo. Le climat est propice à l'innovation à cet endroit. Il y a différentes raisons à cela. Il y a, entre autres, la politique de l'Université de Waterloo qui fait en sorte que les professeurs possèdent leur propriété intellectuelle. Pouvez-vous nous faire part de vos commentaires à ce sujet, et décrire peut-être quelle est la politique de Ryerson?
Beaucoup de personnes croient que les université doivent adopter la politique de Waterloo. À Ryerson, les professeurs et les étudiants conservent leur propriété intellectuelle, sauf dans les cas où l'université a beaucoup investi; elle négocie alors une part avec la personne concernée. Toutefois, comme un de mes bons amis le disait, 10 p. 100 de zéro donne zéro. C'est donc très important d'encourager l'innovation.
Je crois, encore une fois, que nous ne faisons pas assez de véritable évaluation, alors ce dont on parle tient beaucoup de l'anecdote. Toutefois, la plupart des gens diraient que l'Université de Waterloo a récupéré de façon exponentielle ce qu'elle a cédé en n'adoptant pas une position très limitative sur la propriété intellectuelle.
J'ai quelques questions à poser aussi aux représentants de l'OCRI. Évidemment, Ottawa a aussi établi un climat très favorable à l'innovation. On le doit en partie à l'OCRI.
Pouvez-vous décrire ou expliquer comment l'OCRI a contribué à favoriser et à soutenir l'innovation dans la région d'Ottawa?
Bien sûr.
Il y a trois éléments fondamentaux à l'OCRI. Il y a d'abord le centre d'entreprenariat, qui accueille les jeunes entreprises, les encourage et les aide à démarrer. Le centre permet essentiellement aux entreprises d'éclore et de prendre leur envol.
Il y a aussi le centre d'innovation régionale. Il s'agit d'un programme financé par la province; il s'adresse aux entreprises plus matures qui cherchent un financement de démarrage, que ce soit en première, deuxième, ou troisième phase. On les prépare à se lancer et à obtenir l'argent. C'est toute une affaire, quand on sait qu'il n'y a pas beaucoup d'argent au Canada ces temps-ci, alors sur la scène internationale... Nous travaillons avec différents programmes fédéraux pour qu'elles puissent obtenir de l'argent, que ce soit par l'intermédiaire des CEO, du PARI, etc. Nous les aidons à prendre leur envol, en nous assurant qu'elles ont une base solide pour prendre de l'expansion.
Le troisième élément est celui dont je suis responsable. Les entreprises me sont confiées et je les dirige vers le monde par le développement d'affaires et je m'assure qu'elles prennent pied sur la scène internationale.
Je crois que notre modèle, le modèle qui se trouve dans votre région, à Waterloo, avec CTT et Communitech, par exemple... Ce sont d'excellents exemples de ce qu'on peut faire quand de bonnes organisations travaillent en collaboration avec les universités et les collèges.
J'aimerais revenir à ce qu'a dit Wendy tout à l'heure, à savoir que nous avons besoin d'un plus grand nombre de champions au Canada. Il faut que d'autres champions comme RIM aillent de l'avant et fassent ce qu'ils font — non seulement les entreprises, mais les personnes qui se démarquent, comme Balsillie, tous les Terry Matthews de ce monde, qui dirigent ces entreprises.
Pour revenir à ce que vous avez dit plus tôt, nous pouvons mettre en place tous les programmes que nous voulons et faire tout le mentorat que nous voulons à notre niveau et au niveau universitaire, mais les choses se mettent vraiment en branle lorsque les gens de l'industrie deviennent les mentors de ces personnes. Les vrais entrepreneurs sont très peu nombreux. Leur nombre est infime et, de ce nombre, nous n'en attrapons qu'une fraction. Ce que dit l'OCRI, c'est que si 10 p. 100 sont de vrais entrepreneurs et que nous n'en attrapons que de 3 à 5 p. 100, si nous pouvions augmenter ce pourcentage de 2 ou 3 p. 100, il y aurait beaucoup plus de gens sur le terrain pour créer une bonne culture d'entreprenariat.
C'est très difficile à faire. Ce n'est pas seulement nous, pas seulement le gouvernement et pas seulement l'industrie; c'est tout le monde ensemble qui pousse dans la même direction. C'est là où excellent des organisations comme la nôtre, ainsi que Communitech et CTT: le travail de collaboration.
J'allais simplement ajouter que quelques-uns des nouveaux programmes, comme FedDev, sont particulièrement utiles pour promouvoir ce type de collaboration. Nous avons énormément profité du talent et de l'innovation de nos partenaires d'affaires grâce aux programmes qui favorisent vraiment ce type de partenariat au lieu de renforcer l'isolement.
La seule autre chose que j'ajouterais, c'est que je ne suis pas convaincue que nous avons fait un aussi bon travail au chapitre de la documentation, de l'évaluation et de la diffusion de ces histoires de réussite et d'échec. Bon nombre de nos entreprises en démarrage ne réussissent pas et nous ne comprenons pas nécessairement pourquoi. Je crois qu'il faut y travailler davantage.
Merci beaucoup.
Nous donnons maintenant la parole à M. Julian, pour cinq minutes. Il va partager son temps d'intervention.
Oui. Merci beaucoup, monsieur le président.
J'aimerais revenir à Mme Cukier. Je n'ai pas eu la chance de vous poser cette question lors du premier tour de table.
Vous avez cerné des secteurs clés où les établissements postsecondaires pouvaient apporter leur contribution, que ce soit sur le plan des compétences numériques, de la recherche, de l'innovation ou de la commercialisation, à titre d'utilisateurs modèles. Je voulais vous demander, de façon générale, comment le secteur de l'éducation se tire d'affaire dans l'ensemble du pays, selon vous? Les établissements s'engagent-ils dans ces domaines? Si oui, pouvez-vous nous donner un ou deux exemples? Sinon, que faut-il faire pour que nos établissements postsecondaires jouent ce rôle important?
Je dirais qu'il y a bien des zones d'innovation dans les établissements postsecondaires. Il y a de nombreux établissements partout au pays — ils sont trop nombreux pour les nommer — qui font des choses intéressantes et novatrices.
Toutefois, j'ajouterais que beaucoup de structures de financement, de systèmes de récompenses, etc., ne renforcent pas ces comportements. Il faut reconnaître que de nombreuses structures actuelles ont été mises en place il y a très, très longtemps, à l'époque où la recherche et le développement dans le secteur des télécommunications signifiait que Bell-Northern Research cherchait des moyens de stocker plus d'information dans les canalisations ou de le faire sans fil. Ces choses sont encore importantes, mais nous savons que les possibilités, surtout dans l'espace du commerce électronique, passent très rapidement et nécessitent différents modèles de développement.
Nous devons continuer de soutenir la recherche basée sur la découverte — c'est très important pour le Canada et pour les universités en particulier —, mais je crois que de nouveaux mécanismes pour promouvoir ce type de partenariat, la recherche axée sur le marché et l'apprentissage expérientiel pour les étudiants sont extrêmement importants, puisque nous savons que le chômage chez les jeunes au Canada est un très grave problème. Nous avons eu beaucoup de chance et nous ne sommes pas victimes de ce vers quoi le chômage peut conduire, mais je suis inquiète. Si nous ne réussissons pas à faire sortir les jeunes et les immigrants de cette impasse — si vous n'avez pas d'expérience, vous ne pouvez obtenir un emploi, et vous ne pouvez obtenir un emploi parce que vous n'avez pas d'expérience —, nous allons avoir des problèmes. C'est pourquoi il est extrêmement important, à mon avis, de faire preuve d'innovation et de songer à des façons nouvelles et créatives de canaliser ces talents.
Merci.
On a beaucoup parlé d'innovation et de commerce électronique. L'industrie du paiement mobile fait partie de cela, je crois. De plus en plus, nous voyons de nouvelles applications apparaître sur le PlayBook, le iPad et nos téléphones. Il s'ensuit quelques préoccupations quant à savoir qui réglemente la création de ces applications qu'achètent Monsieur et Madame Tout-le-monde.
J'utilise donc mon iPad — ou mon PlayBook, pour faire plaisir à M. Braid. Je surfe et je vois cette nouvelle application que je peux acheter grâce au commerce électronique. Toutefois, cette application me permet maintenant de me rendre dans un magasin et, d'un simple clic, d'acheter un article et de le payer avec ma carte de crédit. Qui réglemente cela, qui crée les applications et qui en profite?
Ce qui est préoccupant, c'est que nous savons déjà que les frais d'interchange que doivent assumer les petites et moyennes entreprises sont plus élevés ici que dans d'autres pays, et certaines entreprises ne voudront pas s'embarquer là-dedans à cause des frais connexes. Or, c'est dans cette voie que se dirigent les consommateurs. Mon enfant de huit ans veut acheter des choses sur Internet. Alors que faisons-nous? Où commençons-nous?
J'aimerais entendre d'abord M. St-Amand, et je sais que Mme Cukier aimerait faire part de ses commentaires également — pour une minute.
Une voix: Moins d'une minute.
En fait, nous pourrions être tentés d'aller dans cette direction, parce que ces types de paiements peuvent être efficaces, mais le jour où quelqu'un se fait voler, toute l'industrie s'effondre. À l'heure actuelle, bon nombre de ces transactions sont strictement réglementées, si je peux m'exprimer ainsi, par l'entente que vous avez conclue avec le fournisseur. Vous savez, ce sont les clauses écrites en petits caractères qui disent: « Je, le fournisseur, ne suis responsable de rien du tout ». Vous retrouvez ces clauses même dans les ententes avec les banques. Je pourrais vous donner de très beaux exemples. Ce n'est pas la voie à suivre. Ce n'est pas ainsi qu'on va gagner la confiance des gens.
Je vois la chose du point de vue du consommateur. Je suis certain que les détaillants vous diraient que le même type de clause se trouve dans les ententes qu'ils ont avec les banques ou avec les différents fournisseurs. Il faut mettre un minimum d'ordre ici.
Nous allons devoir nous arrêter ici.
Nous allons maintenant écouter M. Braid, pendant cinq minutes, qui partagera son temps avec M. Carmichael.
Merci, monsieur le président.
Je n'ai qu'une seule question, et je céderai ensuite la place à mon collègue, M. Carmichael.
Voici une question que je lance à l'ensemble des témoins, à quiconque serait prêt à y répondre — et je ne veux pas mettre personne sur la sellette — au sujet du rapport Jenkins. Le groupe d'experts Jenkins a publié son rapport cet après-midi même, à 14 heures. Ceux d'entre vous qui ont eu la possibilité d'en assimiler certaines parties pourraient-ils nous dire ce qu'ils en pensent? Qu'avez-vous entendu au sujet du rapport qui vous plaît?
Nous sommes d'accord pour dire qu'il y a un certain nettoyage à faire en ce qui concerne tous les programmes. Ils veulent que tout relève d'une nouvelle structure qui serait supervisée par le PARI et d'autres. Nous n'avons rien contre cela.
Il y a quelques bonnes recommandations au sujet de la BDC et du capital de risque. Ils envisagent de nouveaux crédits pour la BDC pour appuyer les entreprises de démarrage et le développement.
Nous devons consulter nos membres pour ce qui est des changements concernant la RS et DE. Si on ne vise que les coûts de la main-d'oeuvre, juste parce que ce serait plus simple... Je dois savoir, dans le secteur manufacturier, quels volets de la R et D sont plus exigeants en main-d'oeuvre et lesquels le sont moins. Certains pourraient être pénalisés par cette mesure.
Ils veulent réduire le remboursement. MEC est un organisme d'entreprises. Nous proposons le contraire. Au cours des dernières années, nous avons voulu augmenter le remboursement de la RS et DE.
Ce que le rapport propose, c'est d'utiliser l'argent que nous allons économiser grâce à cette mesure pour soutenir plus directement les entreprises. Nous aimerions donc voir ce que le gouvernement choisira de faire ou de ne pas faire, puisque ce ne sont que des recommandations.
Nous allons tous quitter cette séance aujourd'hui avec des idées différentes, dont certaines me paraissent très emballantes. L'une d'elles ressemble à une nouvelle émission de téléréalité: comment allons-nous financer ces entrepreneurs novateurs?
J'aimerais terminer avec Mme Cukier. Vous avez parlé des succès que vous avez connus dans le domaine des médias numériques. Je me demande si vous pouvez nous parler brièvement de l'équilibre entre les succès et les échecs. Vous avez beaucoup investi. Vous avez dit, je crois, que vous aviez créé 240 nouveaux emplois, ce qui est fantastique. Il semble que ce soit un domaine dont bon nombre d'universités et d'établissements d'enseignement vont tirer profit. Vous pourriez donc parler brièvement non seulement de l'aspect créatif, mais aussi de l'entreprenariat. Il semble y avoir une disjonction. Comment allons-nous les financer? Comment allons-nous les garder?
Certaines entreprises ont investi d'énormes sommes d'argent pour financer ces nouveaux projets de démarrage, et elles ont eu leur part de succès et d'échecs. La majorité sont toutefois des échecs. Je ne crois pas que nous avons vu les réussites dont nous avons besoin. Je me demande si, pour terminer, vous pouvez nous faire part de vos réflexions sur la façon dont nous pouvons changer les choses.
Tous les entrepreneurs qui ont du succès aujourd'hui ont déjà connu leur part d'échecs. Si l'on veut favoriser l'émergence d'une culture de l'innovation, il faut laisser aux gens la liberté de rater leur coup, ce qui est bien difficile pour plusieurs universités. C'est l'une des raisons qui expliquent leur réticence à aller de l'avant.
Il ne fait aucun doute que la principale réussite de la zone des médias numériques est de parvenir à offrir aux étudiants un apprentissage fondé sur des expériences qui vont changer le cours de leur vie. Il est trop tôt pour savoir combien des entreprises ainsi créées vont survivre, mais si les choses se passent comme ailleurs au pays pour les entreprises en démarrage, nous avons de quoi nous réjouir.
Je peux vous parler de deux de ces projets. Je ne sais pas si vous avez pu voir à l'oeuvre le bras bionique. C'est un bras qui est actionné par les ondes cérébrales. C'est presque de la science-fiction. Son coût correspond à 20 p. 100 de celui d'un bras artificiel implanté par chirurgie. Ses créateurs ont 19 et 21 ans et sont sollicités par des investisseurs de toute la planète. Ils travaillent maintenant à un projet de fauteuil marchant. C'est extraordinaire.
Un autre étudiant postdoctoral a créé une application mobile tenant compte du contexte qui a été vendue au métro de Paris. L'application est aussi installée par Metrolinx à Toronto et devrait également être utilisée à l'aéroport de Vancouver.
Il suffit de quelques réussites semblables pour que l'investissement soit rentable. Mais je vous répète qu'il y a inévitablement des échecs sur la route du succès. Il faut donc créer un environnement où les gens pourront prendre des risques semblables.
Nous n'avons plus de temps. Désolé, monsieur Patacairk. Peut-être M. Regan vous donnera-t-il l'occasion d'intervenir.
Monsieur Regan.
Merci. Je croyais que c'était terminé, monsieur le président. Je me réjouis d'avoir l'occasion de poursuivre.
Monsieur Geist, pour quelle raison le gouvernement voudrait-il interdire le contournement des serrures numériques? C'est dans l'intérêt de qui?
Je pense qu'il est assez clair que la disposition touchant les serrures numériques... Je tiens à souligner à nouveau que l'on parvient à trouver un juste équilibre dans presque toutes les sections du projet de loi C-11. La disposition concernant les serrures numériques est la seule exception. Si on examine différentes choses qui ont pu se produire, qu'il s'agisse des documents qui ont été divulgués sur des sites comme WikiLeaks notamment... Le fait est que l'on voit ici le résultat de pressions importantes exercées par les États-Unis.
Il est désappointant de constater que de très nombreux groupes — du milieu des affaires comme les détaillants, du monde de l'éducation, des regroupements de consommateurs, la Business Coalition for Balanced Copyright, qui compte dans ses rangs les grandes entreprises de télécommunication et de radiodiffusion — représentant vraiment l'ensemble du spectre, ont été unanimes. Ce n'est pas qu'on soit contre le principe d'une protection juridique pour les serrures numériques, mais on souhaiterait y retrouver le même libellé équilibré que l'on s'efforce d'instaurer à bien d'autres égards. Il s'agit de protéger juridiquement ceux qui le désirent tout en respectant nos obligations internationales, mais sans tailler en pièces pour autant tous ces droits sur lesquels les détaillants comptent pour pouvoir vendre leurs produits aux consommateurs et qui existent également au bénéfice des consommateurs et de nos éducateurs.
Je vous remercie.
Je pense au rapport d'aujourd'hui sur l'innovation et au rôle des universités et des collèges communautaires dans l'adaptation de la technologie. Nous avons d'ailleurs parlé également de l'adaptation du cybercommerce. Quelles sont les lacunes au chapitre du transfert d'information et qu'est-ce qui les explique d'après vous?
C'est une bonne question. Si j'en reviens à nos discussions au sujet de l'inforoute, on a toujours mis l'accent sur l'infrastructure physique à construire. J'estime que nous n'avons jamais accordé suffisamment d'attention au développement de l'infrastructure de compétences nécessaire pour tirer parti de la technologie et permettre une participation active de nos concitoyens. Nous avons donc généralement négligé de prendre en compte les compétences non techniques et tout cet aspect de la question, exception faite de STEM. Je dirais toutefois que STEM bien que nécessaire, n'est pas suffisant à lui seul pour nous permettre d'atteindre nos objectifs.
Il en ressort une concentration sur les éléments de la technologie, mais une attention insuffisante sur le moment où elle devrait être utilisée. En étudiant le paradoxe de la productivité, vous pouvez en avoir une illustration parfaite: certaines entreprises investissent beaucoup et en retirent d'énormes dividendes, alors que d'autres qui investissent tout autant perdent des sommes considérables. Au final, tout cela s'égalise.
Il nous faut arriver à mieux comprendre et à mieux enseigner aux gens la façon d'améliorer leurs chances de succès.
Il y a aussi l'aspect de l'entrepreneuriat. L'esprit d'entreprise n'est pas aussi développé qu'il le faudrait dans notre pays et nous devons trouver des moyens de corriger cette lacune en mettant à contribution notre système scolaire dans le cadre de partenariats avec l'industrie tout particulièrement.
Merci.
J'essaie de me rappeler lequel parmi vous — peut-être était-ce M. Wilson ou M. Lavoie — a abordé la question des difficultés à attirer au Canada de grandes entreprises du secteur des services dématérialisés. Je vous demande donc comment nous devrions nous y prendre.
Je suis heureux de vous répondre à ce sujet car il y a certaines précisions à apporter.
Pour bon nombre de ces services dématérialisés, de ces parcs de serveurs, les coûts énergétiques sont de loin les plus importants. Nous avons ici un avantage naturel. Plusieurs ont souligné le potentiel d'implantation de tels parcs dans les régions nordiques du Canada. On pourrait compter sur un système carboneutre en réutilisant à d'autres fins la chaleur générée par ces batteries de serveurs. Les coûts sont très faibles. Nous avons des câbles à fibres optiques pour assurer la transmission des données, tout ça ici au Canada. Ces possibilités ne sont pas pleinement exploitées. Des projets semblables sont en cours de développement dans des pays comme l'Islande.
Je constate également que nous sommes aux prises avec un important problème au chapitre des échanges, et je ne pense pas ici aux considérations financières dont M. Thibeault entre autres a traité, mais aux échanges de données à proprement parler. Ces échanges, souvent en provenance de parcs de serveurs canadiens, sont plutôt limités à destination des États-Unis, et sont largement contrôlés par les habitués, si je puis m'exprimer ainsi. Nous devons accroître le nombre d'échanges semblables si nous souhaitons favoriser une expansion des services dématérialisés au Canada.
À ce sujet, M. Wilson a parlé de CANARIE dans sa déclaration préliminaire. Je fais partie du conseil d'administration de ce réseau pour la recherche et l'éducation. Notre mandat a été renouvelé il y a plusieurs années, mais doit l'être à nouveau l'an prochain, une échéance qui arrive rapidement. Il est absolument essentiel que CANARIE obtienne les approbations requises car, sans cela, il faudra tout reprendre à zéro, car nos réseaux d'éducation et nos autres intervenants en ont vraiment besoin.
Merci beaucoup, monsieur Geist.
Au nom du comité, je tiens à vous remercier grandement pour les excellentes réponses que vous nous avez données et les renseignements que vous nous avez communiqués. Merci pour le temps que vous nous avez consacré.
Oui, monsieur Braid, les questions posées étaient aussi tout à fait pointues et réfléchies, et c'est ce qui fera toute l'utilité de cette séance.
Merci beaucoup.
J'aimerais seulement obtenir une précision. Il est question ici du pourcentage de ménages canadiens ayant accès à Internet à la maison. Il n'y a aucune donnée concernant les territoires, alors je me demande s'il serait possible d'obtenir ces chiffres pour le Yukon, les Territoires du Nord-Ouest et le Nunavut.
Explorateur de la publication
Explorateur de la publication