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INST Réunion de comité

Les Avis de convocation contiennent des renseignements sur le sujet, la date, l’heure et l’endroit de la réunion, ainsi qu’une liste des témoins qui doivent comparaître devant le comité. Les Témoignages sont le compte rendu transcrit, révisé et corrigé de tout ce qui a été dit pendant la séance. Les Procès-verbaux sont le compte rendu officiel des séances.

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STANDING COMMITTEE ON INDUSTRY, SCIENCE AND TECHNOLOGY

COMITÉ PERMANENT DE L'INDUSTRIE, DES SCIENCES ET DE LA TECHNOLOGIE

TÉMOIGNAGES

[Enregistrement électronique]

Le mardi 15 mai 2001

• 1533

[Traduction]

La présidente (Mme Susan Whelan (Essex, Lib.)): La séance sur le projet de loi S-17, Loi modifiant la Loi sur les brevets, est ouverte.

Nous accueillons cet après-midi M. Andreï Sulzenko, sous-ministre adjoint, Politique industrielle et scientifique; M. Robert Main, directeur général par intérim, Régie d'entreprise; Mme Susan Bincoletto, directrice, Projets spéciaux; et M. Rob Sutherland-Brown, avocat-conseil, du ministère de l'Industrie.

Vous avez un exposé à nous présenter, après quoi nous aurons peut-être certaines questions à vous poser. Nous allons d'abord attendre de voir ce que vous avez à dire. Allez-y, dès que vous serez prêt, monsieur Sulzenko.

M. Andreï Sulzenko (sous-ministre adjoint, Politique industrielle et scientifique, ministère de l'Industrie): Merci, madame la présidente. Je vais tout de suite passer à l'exposé. Nous en avons remis des copies au greffier dans les deux langues.

Les modifications du projet de loi S-17 ont un but simple. Leur unique objectif est de rendre la loi canadienne sur les brevets conforme à deux décisions récentes de l'Organisation mondiale du commerce.

Mon but aujourd'hui est de vous présenter un bref aperçu des événements qui ont rendu nécessaire ce projet de loi, d'examiner avec vous l'incidence des modifications, et de faire valoir les contraintes de temps auxquelles le gouvernement est confronté en ce qui a trait à l'adoption du projet de loi.

• 1535

Au cours des trois dernières années, deux contestations ayant trait au régime canadien des brevets ont été soumises à l'Organisation mondiale du commerce par l'Union européenne et les États-Unis. Ces deux contestations n'étaient pas reliées entre elles et avaient trait à des aspects distincts de notre régime des brevets. Le Canada a gagné à certains égards et perdu à d'autres.

D'une part, un groupe d'experts de l'OMC a validé l'exception relative à la «fabrication anticipée», prévue par la Loi sur les brevets. Cet élément fondamental de notre régime des brevets permet à des tiers d'utiliser une invention brevetée au cours de la période de protection, pourvu que l'utilisation ait pour but d'obtenir l'approbation réglementaire pour la mise en marché d'un produit équivalent après l'expiration du brevet. Dans le contexte de l'industrie pharmaceutique, on estime que cette exception accélère l'accès au marché de médicaments génériques en raccourcissant le délai de trois à six ans et demi. Cela est très important pour les Canadiens et constitue donc une victoire importante pour le Canada.

D'autre part, le groupe d'experts a conclu que notre exception relative à «l'emmagasinage» et la durée de protection conférée par un brevet aux termes de l'ancienne loi allaient à l'encontre de nos obligations internationales.

Dans l'ensemble, ces décisions n'affaiblissent ni ne mettent en péril l'équilibre fondamental du régime canadien des brevets. Elles signifient cependant que la Loi sur les brevets doit être modifiée de manière à être conforme à nos obligations envers l'OMC.

Le projet de loi S-17 comporte uniquement les modifications nécessaires pour assurer la conformité de la Loi sur les brevets avec les décisions de l'OMC. La décision de l'arbitre de l'OMC accorde au Canada un délai allant jusqu'au 12 août prochain pour que ce dernier se conforme à la décision rendue dans le cas de la contestation présentée par les États-Unis. Si le Canada n'exécutait pas la décision à cette date, les États-Unis pourraient demander à l'OMC l'autorisation de prendre des mesures de rétorsion commerciales contre le Canada.

Évidemment, pour que cela ne se produise pas, le projet doit être adopté par le Parlement et recevoir la sanction royale avant le congé d'été. Les modifications qui figurent dans le projet de loi ont été gardées aussi simples et directes que possible afin que nous puissions respecter la date d'échéance.

J'aimerais vous donner rapidement un aperçu des contestations des États-Unis et de l'Europe. Prenons tout d'abord la contestation présentée par les États-Unis.

Les modifications les plus importantes qui vous sont présentées rendraient la Loi sur les brevets conforme à la décision de l'OMC dans la contestation présentée par les États-Unis. Au cours des procédures, les États-Unis ont souvenu que certains brevets octroyés aux termes de l'ancienne loi, avant 1989, au Canada ne bénéficiaient pas d'une période minimale de 20 ans à compter de la date de dépôt de la demande, comme l'exige l'ADPIC. Ces brevets ont bénéficié plutôt d'une période de protection de 17 ans à compter de la date de la délivrance du brevet.

En septembre dernier, l'Organe d'appel de l'OMC a accepté l'interprétation des États-Unis et recommandé que le Canada rende l'article 45 de la Loi sur les brevets conforme aux dispositions de l'ADPIC.

Ces modifications établiraient que la durée de protection des brevets octroyés aux termes de l'ancienne loi serait de 17 ans à compter de la date de délivrance ou d'au moins 20 ans à compter de la date du dépôt de la demande de brevet au Canada, la date la plus tardive prévalant.

Il semble y avoir confusion à propos de la signification de la durée de protection. Contrairement à ce que certains pourraient croire, la différence entre les deux périodes n'est pas de trois ans. En effet, un brevet octroyé aux termes de l'ancienne loi n'aurait bénéficié de moins de 20 ans de protection à compter de la date de dépôt de la demande que si l'examen du brevet avait duré moins de trois ans. Si, par exemple, un brevet était octroyé deux ans après la date de dépôt, la durée de protection effective du brevet serait de 19 ans. Cependant, dans la plupart des cas, ce processus a pris plus de trois ans et donc la durée de protection se conforme aux exigences de l'OMC.

En ce qui concerne la contestation présentée par l'Union européenne, le projet de loi S-17 comporte également des modifications découlant de notre différend. Dans ce cas, le groupe d'experts de l'OMC a décidé que l'exception relative à l'emmagasinage allait à l'encontre de nos obligations internationales aux termes de l'ADPIC. Cette exception permettait aux fabricants de médicaments génériques de fabriquer et d'emmagasiner leur version d'un produit breveté pendant les six derniers mois de la période de protection du brevet.

• 1540

Le Canada s'est déjà conformé à la décision en abrogeant le règlement en cause en octobre 2000. Les modifications soumises à votre examen vont simplement dans le sens de la conformité à la décision en supprimant l'exception relative à l'emmagasinage, devenue désuète, que contient la Loi sur les brevets. Ces modifications rendraient la loi conforme à nos obligations aux termes de l'ADPIC.

Quant à l'incidence des modifications, au 1er janvier 2001, environ 138 800 brevets pour lesquels des demandes ont été déposées aux termes de l'ancienne loi étaient en vigueur. De ce nombre, 53 500 font l'objet d'une période de protection de moins de 20 ans à compter de la date du dépôt de la demande de brevet. Il importe cependant de signaler que ces brevets n'ont pas tous une valeur commerciale. Les autres 85 300 brevets bénéficient déjà d'une période de protection de 20 ans à compter de la date de dépôt de la demande de brevet, conformément à l'ADPIC, parce qu'il a fallu au moins trois ans pour les octroyer. Ces brevets ne sont pas en cause dans le différend et ne seront pas touchés par le projet de loi S-17.

Dans le cadre des consultations à ce sujet, il a été question des brevets ayant trait à des médicaments vendus par des fabricants de médicaments d'origine. Aucune autre industrie ne nous a présenté des commentaires au sujet de ces modifications.

En ce qui a trait à l'impact, nous évaluons à 30 environ le nombre de brevets portant sur des médicaments d'importance commerciale qui pourraient bénéficier d'un prolongement de moins de six mois, en moyenne, de la période de protection. Précisons qu'à l'heure actuelle, environ 5 200 médicaments d'ordonnance sont en vente au Canada, et seulement 30 pourraient être touchés.

De plus, les incidences sur les coûts des médicaments seront mineures. Les modifications proposées n'entraîneront pas une augmentation globale du prix des médicaments. Elles pourraient plutôt avoir pour incidence de retarder de quelques mois les économies qu'engendrerait la mise sur le marché de médicaments génériques. Permettez-moi de m'arrêter sur ce point.

Même en retenant de généreuses hypothèses, par exemple, que chacun de ces médicaments pouvant être touchés serait copié par un fabricant de médicaments génériques et que ce produit générique s'emparerait immédiatement de tout le marché, les économies mentionnées constitueraient moins d'un dixième de 1 p. 100 des ventes de médicaments d'ici 2009, année où expirera le dernier des brevets touchés.

Comme je l'ai déjà dit, ces décisions n'affaiblissent ni ne mettent en péril l'équilibre fondamental du régime des brevets. Le régime équilibré des brevets du Canada continuera de garantir une protection de brevet efficace afin de récompenser l'innovation tout en favorisant une concurrence rapide et efficace dans le domaine des médicaments pour que les Canadiens aient accès à des médicaments à un coût abordable.

Le régime actuel des brevets est favorable aux Canadiens. Le dernier rapport du Conseil d'examen du prix des médicaments brevetés démontre que, pour ce type de médicaments, les Canadiens paient 11 p. 100 de moins que la médiane des prix internationaux et 40 p. 100 de moins que les Américains. De plus, les prix canadiens sont sensiblement les mêmes que ceux de six importants pays d'Europe ayant des régimes de santé publics semblables. Le rapport indique également que les fabricants de produits pharmaceutiques d'origine ont dépensé près de 900 millions de dollars au titre de la R-D au Canada en 1999.

J'aimerais maintenant parler de certaines des discussions qui ont eu lieu au comité sénatorial.

[Français]

Comme vous le savez, le projet de loi S-17 a été examiné par le Comité sénatorial permanent des banques et du commerce. Je serais négligent si je ne signalais pas les points de vue divergents exprimés sur diverses questions par les deux parties de l'industrie pharmaceutique.

• 1545

[Traduction]

Les fabricants de médicaments innovateurs, représentés par Rx&D, sont en faveur du projet de loi et de son adoption rapide. Pour leur part, les fabricants de médicaments génériques, représentés par l'Association canadienne des fabricants de produits pharmaceutiques, sont d'avis qu'il faudrait élargir le champ d'application du projet de loi S-17 et y inclure des modifications aux médicaments brevetés. Il s'agit du Règlement sur les avis de conformité qui est assujetti à la Loi sur les brevets.

Pour ce qui est du Règlement concernant les avis de conformité portant sur les médicaments brevetés, permettez-moi de le situer brièvement dans le contexte de la politique canadienne sur les brevets concernant les médicaments. Comme vous le savez, l'exception de la fabrication anticipée prévue dans la Loi sur les brevets a été validée par l'OMC. J'ai dit qu'il s'agissait d'une victoire très importante pour le Canada. Dans le domaine des produits pharmaceutiques en particulier, elle permet à un fabricant de médicaments génériques d'accomplir le processus d'approbation réglementaire au cours de la durée de protection du brevet du médicament d'origine qu'il copie.

Dans la pratique, cela veut dire que le fabricant du médicament générique peut être prêt à entrer sur le marché avec sa version du médicament avant que le brevet du fabricant du médicament d'origine expire. Si l'entrée a lieu, elle pourrait constituer une contrefaçon du brevet. Pour éviter cette situation, en 1993, dans le cadre du projet de loi C-91, le gouvernement du Canada a mis en oeuvre le Règlement concernant les avis de conformité portant sur les médicaments brevetés. Je devrais ajouter que le comité l'a examiné en profondeur en 1997 et que certaines modifications y ont été apportées pour en améliorer le fonctionnement.

Ainsi, si un fabricant de médicaments génériques s'appuie sur l'exception de la fabrication anticipée afin d'obtenir l'approbation réglementaire et cherche à entrer sur le marché avant l'expiration du brevet, le Règlement concernant les avis de conformité s'appliquerait. Dans ces cas, le fabricant de médicaments génériques doit fournir des preuves que la vente de son produit ne constituerait pas une contrefaçon d'un brevet pertinent valide.

J'attire l'attention du comité sur cette question, madame la présidente, uniquement pour montrer qu'il s'agit là de deux éléments importants qui contribuent à un équilibre, soit l'exception de la fabrication anticipée qui a été très favorable aux fabricants de médicaments génériques en permettant l'entrée des médicaments génériques sur le marché dès l'expiration du brevet applicable aux médicaments d'origine et le Règlement concernant les avis de conformité portant sur les médicaments brevetés. Les deux se complètent.

[Français]

Ainsi, ces deux dispositions de la politique canadienne sur les brevets concernant les médicaments se complètent et font partie intégrante de l'approche canadienne équilibrée: l'accès rapide aux médicaments génériques et l'exécution efficace des droits de propriété intellectuelle.

[Traduction]

Malgré l'intérêt exprimé par certains intervenants à l'égard du Règlement concernant les avis de conformité portant sur les médicaments brevetés, le comité sénatorial reconnaît en général que ce règlement n'est pas visé par le projet de loi S-17 et que ce n'est pas le moment d'aborder des questions globales liées à la propriété intellectuelle. Je crois que tous les membres sont également d'avis que le projet de loi S-17 est nécessaire pour établir la conformité avec les décisions de l'OMC et que le Canada devrait respecter ces décisions. Je pense cependant qu'on peut dire que c'est probablement le seul point sur lequel tout le monde s'entend.

[Français]

En conclusion, madame la présidente, le projet de loi S-17 est nécessaire pour rendre la Loi sur les brevets conforme aux deux décisions prises récemment par l'OMC.

Ni les décisions de l'OMC, ni les modifications proposées n'affaibliront ni ne mettront en péril l'équilibre fondamental du régime canadien des brevets. Les innovateurs continueront d'être protégés et les Canadiens continueront d'avoir accès à des médicaments à un coût abordable.

[Traduction]

Le projet de loi s'inscrit dans l'objectif déclaré du gouvernement de faire en sorte que les lois et règlements du Canada, y compris ceux qui régissent la propriété intellectuelle, demeurent parmi les plus modernes et les plus progressistes du monde. En appliquant les décisions de l'OMC dans les délais prescrits, nous montrons à nos partenaires commerciaux que nous prenons nos obligations au sérieux. Nous démontrons également que nous avons à coeur notre climat d'investissement.

Rendre la Loi sur les brevets conforme à nos obligations internationales constitue la priorité immédiate du gouvernement. Il y aura d'autres occasions de discuter de notre régime de propriété intellectuelle une fois que les décisions de l'OMC auront été appliquées et c'est d'ailleurs ce que le ministre a dit lorsqu'il a témoigné devant le comité sénatorial. Pour l'instant, toutefois, nous ne recommandons qu'une légère révision de la Loi.

• 1550

Merci, madame la présidente. Mes collègues et moi répondrons avec plaisir à vos questions.

La présidente: Merci beaucoup, monsieur Sulzenko. Nous allons maintenant passer aux questions.

Monsieur Rajotte, s'il vous plaît.

M. James Rajotte (Edmonton-Sud-Ouest, AC): Merci, madame la présidente.

Je vous remercie beaucoup de votre exposé ici aujourd'hui. J'aimerais simplement vous demander... À la page 2 et dans votre conclusion, vous dites que les décisions rendues n'affaibliront pas et ne mettront pas en péril non plus l'équilibre fondamental du régime canadien des brevets. Quelle incidence aura alors l'élimination de l'exception relative à l'emmagasinage? Cette incidence sera-t-elle minime? Quelles seront les répercussions pour les Canadiens?

M. Andreï Sulzenko: Madame la présidente, l'exception relative à l'emmagasinage a déjà été éliminée par voie de règlement. Cela ne fait donc pas partie du présent projet de loi, sauf qu'il supprime la disposition habilitante qui était dans la loi. Nous croyons—et je pense que les fabricants de produits génériques sont d'accord—que cela aura une incidence relativement minime. Lorsque nous avons entrepris de donner suite à la décision de l'OMC, ils ne pensaient pas qu'ils auraient plus de difficulté pour autant à mettre leurs médicaments en marché.

M. James Rajotte: Il a été décidé que nous examinerions les dispositions relatives à l'avis de conformité de 24 mois à une date ultérieure. J'ai une question bien simple à poser: Pourquoi ne pas en tenir compte dans le projet de loi? Pourquoi devons-nous attendre à plus tard?

M. Andreï Sulzenko: Madame la présidente, j'occupais le même poste en 1997, lorsque nous avons revu la réglementation. Le débat a été long et pénible. Il y avait de nombreux points de vue différents. Il y a eu d'énormes difficultés techniques aussi, en raison de la complexité de la réglementation. Étant donné l'échéancier qui nous a été imposé par l'arbitre de l'OMC, le gouvernement ne croit pas qu'il aurait été possible d'entreprendre un nouvel examen en profondeur sur-le-champ tout en nous conformant à la décision de l'OMC.

C'est donc la raison pour laquelle le ministre a dit, je pense, que lorsque ce projet de loi aura été adopté, il serait prêt à réexaminer les questions qui ont été soulevées, honnêtement, par les deux camps pour ce qui est des améliorations à apporter à notre régime de brevets concernant les médicaments.

M. James Rajotte: D'après ce que vous avez entendu aux audiences du Sénat, puis-je vous demander pourquoi l'Association canadienne des fabricants de produits pharmaceutiques... Est-ce le fait que le projet de loi n'aborde pas assez de questions qui inquiète les fabricants? Ou est-ce le fait que le projet de loi ne leur soit pas favorable?

M. Andreï Sulzenko: Je ne peux pas parler en leur nom et je crois qu'ils comparaîtront devant votre comité. Si je me souviens bien, lorsque nous avons réexaminé la réglementation il y a plusieurs années, ils trouvaient qu'elle ne leur était pas favorable, malgré les modifications que nous y avons apportées. Leur position était—et je ne pense pas qu'elle ait changé—que nous devrions supprimer complètement le Règlement concernant les avis de conformité. Ce n'est pas la position que le gouvernement a adoptée et ce n'est pas non plus, je pense, celle qu'il défend actuellement.

C'est donc une question très controversée. Je le répète, madame la présidente, nous n'aurions pas pu la régler dans le peu de temps dont dispose le Parlement.

La présidente: Merci, monsieur Rajotte.

Monsieur McTeague.

M. Dan McTeague (Pickering—Ajax—Uxbridge, Lib.): Merci, madame la présidente.

Monsieur Sulzenko, il y a eu récemment des commentaires voulant que certains ministères et certains ministres cherchent à trouver des moyens de faire en sorte que le Canada soit plus productif vis-à-vis de ses partenaires commerciaux, et que nous examinions un certain nombre de questions. Je me demandais si vous aviez des commentaires à faire à ce sujet puisque vous avez parlé de 1997. La plupart des députés—à l'exception de la présidente—n'étaient pas ici, je pense, en 1997, mais nous avons certaines préoccupations qui ont été émises...

• 1555

La présidente: En fait, c'est le contraire.

M. Dan McTeague: C'est M. Lastewka. Désolé, monsieur Lastewka.

Veuillez accepter mes excuses, monsieur Cannis et vous tous.

Depuis 1997, la valeur des importations pour ce qui est de la balance du commerce dans les industries pharmaceutiques et médicales est passée de 3 milliards à 5,86 milliards de dollars canadiens tandis que le volume des exportations semble avoir accusé une baisse relative considérable, au point où la règle n'est maintenant plus que du quart ou de 23 p. 100 en ce qui concerne les exportations. Elle est de 76,9 p. 100 pour les importations. Autrement dit, nous importons la technologie d'autres pays.

J'ai une question à poser au sujet de votre définition de la Loi sur les brevets. Le projet de loi reprend l'article 55 de la Loi sur les brevets qui porte sur la contrefaçon. À votre connaissance, une disposition quelconque de la Loi sur les brevets entraîne-t-elle une injonction automatique lorsque quelqu'un, en particulier le titulaire d'un brevet, affirme qu'il y a eu contrefaçon, par opposition à une contrefaçon effective de brevet? Y a-t-il dans la Loi sur les brevets un autre exemple semblable à ce que nous avons ici, sans preuve prima facie?

M. Andreï Sulzenko: Madame la présidente, je vais essayer de répondre à la première partie de la question du député et je demanderai à mon collègue, M. Sutherland-Brown, de bien vouloir répondre à la deuxième.

Je n'ai pas les données sur le commerce devant moi. Tout ce que je peux dire, c'est que le Canada, comme pays importateur et exportateur, n'a pas une balance commerciale dans chaque secteur. Nous avons un excédent commercial global plutôt important, mais pas dans chaque secteur. Nous avons toujours adopté une approche sectorielle des questions commerciales. Il y a de nombreux secteurs, dont celui de l'automobile, où nous avons un énorme excédent commercial par comparaison à nos importations. Les chiffres parlent peut-être d'eux-mêmes, mais je ne vois pas en quoi précisément...

M. Dan McTeague: Seriez-vous donc prêt à reconnaître que le déficit commercial du Canada dans le secteur des produits pharmaceutiques a augmenté depuis 1993, ou depuis 1997 plus précisément puisque vous en avez parlé, et qu'il est plus marqué puisque le chiffre est de 5,86 milliards de dollars?

La présidente: Je crois que M. Sulzenko a déjà dit qu'il n'avait pas cette information devant lui de sorte qu'il ne pouvait pas commenter vos chiffres.

M. Dan McTeague: Alors, laissez-moi vous poser une autre question.

La présidente: M. Sutherland-Brown ne vous a pas encore répondu. Pouvons-nous revenir à cette première question?

M. Dan McTeague: Si j'ai assez de temps, madame la présidente. Allez-vous me laisser du temps?

La présidente: Oui.

M. Dan McTeague: Merci. Allez-y.

Me Rob Sutherland-Brown (avocat-conseil, ministère de l'Industrie): Si je me souviens bien, vous vouliez savoir s'il y avait une autre disposition de la Loi sur les brevets qui entraînait une injonction automatique? Il y a plusieurs dispositions de la Loi sur les brevets qui prévoient une preuve par présomption. L'une d'entre elles est le paragraphe 43(2) selon lequel une fois qu'il a été émis, un brevet sera considéré comme valide jusqu'à preuve du contraire. Il y a aussi l'article 55.1 qui dispose que, dans le cas des brevets de procédé, si un produit semblable fait son apparition sur le marché, ce produit est présumé être fabriqué conformément au procédé breveté. Il y a déplacement du fardeau de la preuve qui incombe alors au fabricant du nouveau produit. Il y a aussi les dispositions de l'article 57 de la Loi sur les brevets, je pense, qui permettent aux tribunaux d'émettre des injonctions pour restreindre la vente, la fabrication, etc. sur demande.

M. Dan McTeague: La présomption est-elle déclenchée par une revendication du titulaire du brevet, ou est-elle considérée comme automatique?

Me Rob Sutherland-Brown: La présomption est là dans la loi. Il faut qu'il y ait une allégation.

M. Dan McTeague: Donc, s'il y a allégation, une injonction est-elle immédiatement rendue à l'endroit de la personne accusée de contrefaçon?

Me Rob Sutherland-Brown: Non.

M. Dan McTeague: Donc, ce serait très différent de ce que nous avons dans cet avis de conformité, au paragraphe 55(4). Ce serait un cas unique.

Me Rob Sutherland-Brown: Le sursis prévu par le règlement est unique en ce sens que c'est une procédure inhabituelle en droit canadien. Ce n'est pas un cas unique au monde. Les États-Unis ont une série très semblable de règlements qui portent exactement sur le même type d'équilibre entre les intérêts des innovateurs et les intérêts des fabricants de produits génériques.

• 1600

M. Dan McTeague: Évidement, le régime canadien m'intéresse, monsieur Sutherland-Brown. J'aimerais savoir pourquoi, en vertu de la Loi sur les brevets, on ne suivrait pas normalement le cours obligatoire du dépôt en preuve devant un tribunal de la compétence appropriée en s'appuyant sur la preuve prima facie qu'une contrefaçon a eu lieu, plutôt que d'imposer le fardeau de la preuve à la personne qui n'est pas obligatoirement en infraction par rapport à la loi.

Je pense bien entendu à l'opinion qu'a exprimée le juge Iacobucci qui a déclaré que cet article est manifestement injuste puisqu'il soumet les fabricants de médicaments génériques à un régime si draconien sans leur donner la possibilité de se protéger et de réduire la durée de l'injonction présomptive en lançant un processus concernant les avis de conformité. Il a constaté que cet article va à l'encontre de plusieurs dispositions réglementaires.

Puisque vous avez admis qu'il s'agissait d'un processus plutôt unique, quelqu'un peut peut-être expliquer au comité comment cela est arrivé, étant donné que le comité n'a pas eu l'occasion de vraiment se pencher sur la question en 1997. Il l'a peut-être fait, mais je ne me souviens pas que le comité se soit penché sur cette question, tout au moins d'après les notes que j'ai relues.

Me Rob Sutherland-Brown: Je crois que cette question figurait parmi celles examinées par le comité.

La citation du juge Iacobucci relève d'un contexte qui contribuerait à rendre le système encore plus sévère qu'il ne l'est.

Selon la jurisprudence, si l'on en juge par les dispositions fondamentales qui s'appliquent aux deux parties de l'industrie, le régime mis en place par le règlement est beaucoup moins draconien qu'il n'en a l'air sur le papier.

La présidente: Ce sera votre dernière question.

M. Dan McTeague: J'espère que j'aurai l'occasion de poser également cette question à M. Sulzenko.

Si j'étais un grand fabricant, que j'avais conçu un accessoire quelconque et que je m'apercevais, au moment de l'expiration de mon brevet que quelqu'un avait déjà copié mon produit, je ne bénéficierais pas des mêmes privilèges que ceux dont jouit l'industrie pharmaceutique. Ne pensez-vous pas, si vous me passez le jeu de mots, que cela soit une injustice patente à l'égard de l'industrie en général?

Me Rob Sutherland-Brown: Je n'aime pas les jeux de mots.

De manière générale, je pense que les injonctions en vertu de la Loi canadienne sur les brevets sont accordées à un grand nombre d'industries. Les tribunaux sont très réticents à délivrer des injonctions interlocutoires à l'industrie chimique et à l'industrie pharmaceutique en particulier. Ils ont mis au point un critère qui s'applique également dans d'autres secteurs. C'est un critère tripartite. La question mérite-t-elle d'être examinée? L'octroi de dommages-intérêts peut-il suffire à réparer les dommages ou préjudices potentiels? Le troisième volet concerne la prépondérance des inconvénients entre les parties concurrentes.

Dans d'autres pays, les tribunaux ont accepté plus volontiers que les tribunaux canadiens d'imposer des mesures de redressement par voie d'injonction interlocutoire dans le secteur pharmaceutique. Dans d'autres secteurs tels que l'industrie automobile, il est plus facile pour un fabricant titulaire d'un brevet mécanique, selon le type d'entreprise, d'obtenir des mesures de redressement par voie d'injonction.

La présidente: Monsieur Sulzenko, est-ce que vous voulez répondre?

M. Andreï Sulzenko: Pour compléter la réponse de M. Sutherland-Brown, j'aimerais revenir à ce que j'ai déclaré plus tôt, à savoir que si le règlement de liaison est particulier à l'industrie pharmaceutique, l'exception relative à la fabrication anticipée n'existe nulle par ailleurs que dans l'industrie pharmaceutique. Je signale au comité que ces deux dispositions sont liées. De fait, le gouvernement estime que l'une ne peut aller sans l'autre. Il est impossible des les appliquer isolément.

L'industrie pharmaceutique est unique et le régime qui s'applique à elle est unique. D'après ce que nous avons constaté depuis 1997, lorsque nous avons apporté un certain nombre d'amendements, le régime fonctionne assez bien. De fait, dans certains cas, les litiges sont moins fréquents qu'ils ne l'auraient été en l'absence de ce régime.

Madame la présidente, je suis certain que M. Sutherland-Brown pourrait longuement expliquer en détail les diverses dispositions du règlement qui, à notre avis, dépassent la portée du projet de loi.

• 1605

La présidente: Nous y reviendrons peut-être. Nous allons poursuivre, puisque beaucoup d'autres personnes veulent poser des questions.

Monsieur Brien.

[Français]

M. Pierre Brien (Témiscamingue, BQ): Merci, madame la présidente.

Afin de m'éclairer, pouvez-vous me dire si apporter des modifications au règlement de liaison ou l'abolir sans apporter de modification à la fabrication anticipée serait conforme à nos obligations internationales? Si les deux dispositions n'étaient pas liées, si elles n'allaient pas main dans la main, comme vous dites, est-ce qu'en modifiant l'une d'elles, par exemple en abolissant le règlement de liaison, on serait en conformité avec nos obligations internationales?

La présidente: Madame.

Mme Susan Bincoletto (directrice, Projets spéciaux, ministère de l'Industrie): Merci, madame la présidente.

Oui, effectivement, on serait conformes à nos obligations internationales, parce que rien ne nous oblige ni nous contraint à les avoir ou à les éliminer.

Par contre, le gouvernement a créé ces dispositions en contrepartie de ce qu'on appelle l'approbation réglementaire, le early working en anglais, qui permet aux fabricants de produits génériques de faire de la recherche dans le but d'obtenir cette approbation réglementaire avant que le brevet n'expire. Donc, c'est pour essayer de minimiser ou d'éliminer la possibilité qu'un produit générique n'entre sur le marché avant l'expiration du brevet que nous avons mis sur pied ce règlement de liaison.

Ce règlement permet aux détenteurs de brevet de s'assurer qu'ils seront notifiés, avant que le produit générique ne soit sur le marché, qu'effectivement, il y existe un potentiel de violation ou de contrefaçon.

M. Pierre Brien: D'accord.

Maintenant, revenons au nombre de litiges. Monsieur McTeague, il y a des membres de ce comité qui en faisaient déjà partie en 1997. C'est mon cas. Le nombre de litiges dus au règlement de liaison était relativement élevé, selon les représentations qu'on nous faisait. Est-ce que la tendance a changé depuis 1997 quant au nombre de litiges? Est-ce allé en diminuant ou en augmentant?

M. Andreï Sulzenko: M. Sutherland-Brown a une réponse à cette question. C'est depuis 1997.

Me Rob Sutherland-Brown: Since 1997. Je m'excuse, j'ai plus facilement la réponse en anglais.

[Traduction]

Depuis 1997, il y a eu une soixantaine de poursuites, d'avis d'allégation adressés au ministre et aux titulaires de brevets par des fabricants de produits génériques. Environ 30 de ces causes ont entraîné l'application d'ordonnances d'interdiction en vertu de l'article 6.

En 1998, une soixantaine d'avis d'allégation a encore été déposée et à peu près 28 procédures d'interdiction ont été entamées en vertu de l'article 6.

En 1999, il y a eu une quarantaine d'avis d'allégation qui ont entraîné une trentaine d'applications d'ordonnances d'interdiction.

En 2000, il y a eu une vingtaine d'avis d'allégation et une quinzaine d'applications d'ordonnances.

En 2001, une dizaine d'avis d'allégation ont été déposés jusqu'à présent qui ont donné lieu à une seule application d'ordonnance.

[Français]

M. Andreï Sulzenko: Madame la présidente, nous avons ces chiffres ici, si le comité veut les avoir.

M. Pierre Brien: J'aimerais bien.

M. Andreï Sulzenko: Je peux les donner au greffier. Merci.

M. Pierre Brien: Enfin, ma dernière question ne portera pas spécifiquement sur le projet de loi, car, je pense, tout le monde s'entend sur le fait que ce sont des ajustements relativement mineurs ou de routine qui sont proposés. Ma seule question là-dessus, d'ailleurs, serait: pourquoi ne pas l'avoir fait plus tôt puisque nous devons nous conformer?

• 1610

Est-ce que le ministère dispose d'une évaluation de la protection qui est effectivement accordée aux brevets ici, en moyenne, comparativement à ce que font d'autres joueurs internationaux, les pays industrialisés entre autres, soit les pays d'Europe et les États-Unis? Est-ce que vous avez un tel tableau, représentant la version du ministère, dirais-je?

M. Andreï Sulzenko: On n'a pas exactement ce que vous décrivez.

M. Pierre Brien: Est-ce que cela a déjà été fait?

M. Andreï Sulzenko: Il est très difficile d'établir une comparaison entre les régimes des divers pays. Comme M. Sutherland-Brown l'a mentionné, notre régime ressemble à celui des États-Unis, mais n'est pas équivalent.

[Traduction]

Me Rob Sutherland-Brown: Madame la présidente, j'aimerais ajouter que depuis l'adoption de l'Accord sur les ADPIC qui se rapporte aux aspects des droits de propriété intellectuelle qui touchent au commerce, tous les pays développés sont censés respecter les normes de protection de brevets de droit d'auteur et de marque déposée, de conception industrielle, etc., tel que précisé dans les accords de l'OMC. Par conséquent, sur le plan de l'efficacité de notre protection, la situation est assez comparable pour tous.

L'absence de mesures de prolongation de la durée du brevet est peut-être le seul aspect du régime canadien qui soit moins favorable aux titulaires de brevets que le régime des autres pays membres de l'OCDE et de l'OMC. Ainsi, les États-Unis qui appliquent un régime analogue au règlement concernant les avis de conformité qui figure dans le régime canadien, offrent également des mesures de prolongation de la durée du brevet.

La prolongation de la durée du brevet permet aux titulaires d'un brevet de compenser le temps qu'ils ont perdu lorsque leurs médicaments étaient en attente d'approbation par la FDA. Au Canada, nous n'accordons pas une telle compensation aux titulaires de brevet. Aussi, dans une certaine mesure, la protection que nous offrons est moins attrayante pour les titulaires de brevet.

[Français]

M. Pierre Brien: Merci.

[Traduction]

La présidente: Merci beaucoup, monsieur Brien.

Monsieur Lastewka.

M. Walt Lastewka (St. Catharines, Lib.): Merci, madame la présidente.

Il y a deux choses que j'aimerais préciser. Essentiellement, ces changements s'opposent à la constitution de réserves. Les fabricants de produits génériques peuvent tout mettre en oeuvre pour commencer la production dès le premier jour.

M. Andreï Sulzenko: C'est exact, la plus importante exception étant que la fabrication anticipée est actuellement approuvée par l'OMC. Par conséquent, il me semble que nous nous trouvons actuellement dans une meilleure position qu'avant les discussions, puisque nous sommes désormais certains de respecter nos obligations internationales.

M. Walt Lastewka: Et par conséquent, les fabricants de produits génériques peuvent prendre toutes les dispositions pour commencer à produire. Jusqu'à présent, cette question n'était pas réglée. Or, comme vous l'avez dit, c'est maintenant chose faite, puisque l'OMC l'a confirmé. Les fabricants peuvent donc se livrer à tous les préparatifs hormis la production.

M. Andreï Sulzenko: C'est exact.

M. Walt Lastewka: Mon collègue M. McTeague a parlé des questions soulevées par la révision de 1997... les abus éventuels par les différentes parties, sur lesquels il faudrait se pencher. J'aimerais tout simplement confirmer le débat avec le ministre. Est-ce que le ministre a l'intention d'ordonner le réexamen de la loi?

D'après moi, l'examen quinquennal de la loi n'étant pas prévu, il faudrait donc que le ministre ou notre comité en prenne l'initiative. Est-ce exact?

M. Andreï Sulzenko: Oui. C'est exact.

Je pense que le ministre a déjà dit, notamment lorsqu'il a comparu devant le comité du Sénat, que les deux parties avaient soulevé ces questions plus générales. J'insiste sur l'intervention des deux parties, puisque les fabricants de médicaments d'origine ont également soulevé des questions. M. Sutherland-Brown en a évoqué une, celle de la prolongation de la durée du brevet. Ils ont leurs propres listes de questions, comme les fabricants de produits génériques. Elles sont toutefois assez différentes. Cependant, je pense que le ministre s'est engagé à en faire l'étude le moment venu et à demander l'aide des comités du Parlement. On ne sait pas précisément à quel moment cela se fera.

• 1615

M. Walt Lastewka: Vous précisez, à la page 7 de votre rapport, que les fabricants de médicaments de marque déposée ont consacré à peu près 900 millions de dollars à la R-D au Canada en 1999. Je sais que les fabricants de produits génériques investissent eux aussi dans la R-D. À combien se chiffrerait leur investissement?

M. Andreï Sulzenko: Madame la présidente, nous ne possédons pas ces chiffres. Nous pourrions peut-être les trouver, mais les observations portent surtout sur les fabricants de médicaments d'origine. D'ailleurs, au moment de la révision de 1997, ils s'étaient engagés à investir 1 milliard de dollars par année dans la R-D d'ici 2000. Nous ne savons pas encore s'ils ont atteint cet objectif, mais on peut dire qu'ils étaient sur la bonne voie.

M. Walt Lastewka: Mon collègue a évoqué les brevets dans l'industrie automobile, secteur que je connais bien. Dans le secteur pharmaceutique, l'accès aux données fait partie intégrante de l'approbation des produits génériques. Cette opération peut se faire pendant l'application du brevet et avant son expiration, n'est-ce pas?

Me Rob Sutherland-Brown: Les fabricants n'ont pas véritablement accès aux données, mais ils peuvent déposer leur propre dossier. Santé Canada peut recevoir deux types de présentations en vertu des règlements sur les aliments et drogues. La première est essentiellement celle des fabricants de médicaments nouveaux, novateurs et de marque ou de produits vétérinaires en vue de leur commercialisation. Il s'agit de la présentation de drogue nouvelle qui contient toutes les études cliniques et exige des données extrêmement complètes. Il existe un second type de présentation abrégée qui consiste à effectuer une comparaison entre les médicaments que le postulant souhaite commercialiser et un autre médicament qui est déjà sur le marché. Dans le second type de demande, la personne qui fait la présentation compare sa version d'un produit à un médicament déjà sur le marché qui est en général breveté, et prouve que son médicament est bioéquivalent. À partir de là, le fabricant de produits génériques peut obtenir l'autorisation de fabriquer son médicament...

M. Walt Lastewka: C'est le mot que je cherchais.

Merci, madame la présidente.

La présidente: Merci beaucoup, monsieur Lastewka.

Madame Desjarlais s'il vous plaît.

Mme Bev Desjarlais (Churchill, NPD): Au sujet de l'avis de conformité, quelqu'un d'autre ou vous-même avez précisé que l'avis de conformité ne relevait pas de ce projet de loi et pourtant vous avez indiqué également que l'OMC a décidé qu'il fallait maintenir un équilibre entre les deux en matière de fabrication anticipée. Est-ce que j'ai mal compris?

M. Andreï Sulzenko: Oui, nous avons dit que le règlement concernant les avis de conformité équilibrait les exceptions relatives à la fabrication anticipée.

Mme Bev Desjarlais: Vous n'avez pas parlé d'une décision de l'OMC?

M. Andreï Sulzenko: Non.

Mme Bev Desjarlais: Bon. Je voulais le vérifier, parce que c'est ce que j'avais cru comprendre. L'OMC n'exige donc pas le maintien de l'avis de conformité.

M. Andreï Sulzenko: Non. L'OMC n'a jamais soulevé cette question.

Mme Bev Desjarlais: Très bien. Il est donc possible de ne plus avoir l'injonction concernant l'avis de conformité.

• 1620

M. Andreï Sulzenko: Je répète ce que nous avons déjà dit. Le gouvernement a décidé, en particulier lorsqu'on dispose de peu de temps pour mettre en oeuvre les décisions de l'OMC, qu'il ne serait pas approprié pour le moment de réexaminer les questions plus vastes dont relève le règlement concernant les avis de conformité. Par conséquent, il se limite strictement à l'application des conclusions de l'OMC, rien de plus, rien de moins.

Mme Bev Desjarlais: Très bien.

Vous prolongez à 20 ans les brevets de moins de 20 ans relevant de l'ancienne loi, mais le projet de loi ne prévoit pas de réduire à 20 ans les brevets d'une durée supérieure qui relèvent de l'ancienne loi. Est-ce qu'il y a une raison à cela?

M. Andreï Sulzenko: C'est vrai que les brevets relevant de l'ancienne loi dont la durée d'application était de plus de 20 ans, ne sont pas réduits. La raison est tout simplement que le gouvernement a décidé de ne rien y changer. Il n'y a aucune obligation de réduire leur durée d'application et elle demeurera donc la même.

Mme Bev Desjarlais: Savez-vous combien de médicaments bénéficient d'une prolongation et d'un brevet d'une durée d'application de plus de 20 ans?

M. Andreï Sulzenko: Nous ne connaissons pas ce chiffre. Nous avons le chiffre qui correspond au nombre total de brevets, soit environ 85 000, mais comme nous l'avons dit, la plupart de ces brevets n'ont pas à notre connaissance, une valeur commerciale particulière. Ce sont les médicaments brevetés.

Mme Bev Desjarlais: Est-il possible d'obtenir ces chiffres? Non. Je vois.

Au nombre des injonctions qui ont été automatiquement demandées par les fabricants des médicaments d'origine, combien ont -elles été maintenues? Je conviens que c'est à peu près la même question que celle de M. Brien, mais j'ai peut-être perdu certains détails au passage d'une langue à l'autre.

Me Rob Sutherland-Brown: Madame la présidente, je peux vous présenter quelques chiffres provenant de Santé Canada. Mais, pour bien les comprendre, il est peut-être utile de dire un mot sur le règlement concernant les avis de conformité et la façon dont il s'applique.

Lorsqu'un fabricant de produits génériques souhaite comparer son produit à un autre, il est tenu de consulter la liste des brevets que conserve le ministre de la Santé et s'il existe un brevet correspondant à ce médicament, il doit soit accepter de ne pouvoir obtenir un avis de conformité tant que tous les brevets figurant sur la liste ne parviendront pas à expiration, soit de produire ce que l'on appelle un avis d'allégation et de le présenter au titulaire du brevet et au ministre de la Santé.

Depuis l'entrée en vigueur du règlement en 1993, il y a eu 463 cas de présentation abrégée d'une nouvelle drogue. Parmi ces 463 demandes, le fabricant de produits génériques n'a pas présenté d'avis d'allégation dans 70 cas. Cela signifie soit que le fabricant de produits génériques a reconnu que son produit était une contrefaçon, soit qu'il n'avait aucune raison de contester la validité du brevet.

Il reste donc 393 présentations qui ont donné lieu à l'envoi d'un avis d'allégation. C'est-à-dire que les fabricants de produits génériques ont fait parvenir au titulaire d'un brevet un avis stipulant que le brevet n'était plus valable ou que le produit qu'il allait commercialiser ne constituait pas une infraction au brevet. Sur ces 393 cas, le titulaire du brevet n'a pas entamé de poursuite dans 183 cas, c'est-à-dire dans environ 47 p. 100 des cas. Le titulaire du brevet a entamé des poursuites en vertu de l'article 6 dans 210 cas, soit 53 p. 100 des cas. Sur le nombre total de poursuites entamées, 59 ont été rejetées, 82 ont été retirées, soit par le fabricant de produits génériques, soit par le titulaire du brevet. Le retrait est dû à diverses raisons qu'il est impossible de préciser à partir des données fournies par le ministre de la Santé. Trente-huit pour cent des cas ont fait l'objet d'une ordonnance d'interdiction, trois cas ont donné lieu à une ordonnance d'interdiction partielle et 28 poursuites sont encore en instance.

• 1625

Mme Bev Desjarlais: Une simple précision. L'ordonnance d'interdiction empêche le fabricant de produits génériques de commercialiser son produit, n'est-ce pas?

Me Rob Sutherland-Brown: C'est exact. En fait, l'ordonnance d'interdiction s'adresse au ministre de la Santé, l'empêchant d'émettre un avis de conformité qui est essentiellement une autorisation de commercialisation au fabricant de produits génériques.

Grosso modo, seulement 50 p. 100 des demandes qui font l'objet d'une présentation abrégée de nouvelle drogue sont concernées d'une façon ou d'une autre. Pour le reste, soit le titulaire du brevet donne son aval, soit le fabricant de produits génériques retire sa proposition.

La présidente: Merci.

Madame Torsney, s'il vous plaît.

Mme Paddy Torsney (Burlington, Lib.): Pour poursuivre dans la même ligne que Mme Desjarlais, j'aimerais savoir combien de temps durent ces processus? Je suppose que certaines poursuites ont interminables et que d'autres se règlent très rapidement. Quelle est la durée moyenne...

Me Rob Sutherland-Brown: Je ne connais pas exactement la durée moyenne actuelle, mais je pense qu'une poursuite en vertu du règlement concernant les avis de conformité dure en moyenne de 15 à 16 mois. Il faut 17, 18 ou 19 mois au ministre de la Santé pour approuver une présentation abrégée de drogue nouvelle.

Il faut bien comprendre que ces deux processus sont simultanés. Le fabricant de produits génériques ne peut commercialiser son produit tant qu'il n'a pas reçu un avis de conformité. En général, il faut de 17 à 19 mois au ministre de la Santé pour délivrer un avis de conformité. Au cours de cette période, si le titulaire du brevet entame des procédures pour obtenir une ordonnance d'interdiction, il faut compter un délai de 15, 16 ou 17 mois avant d'obtenir une ordonnance du tribunal. Mais ce sont là des moyennes; certaines causes durent plus longtemps que d'autres.

Mme Paddy Torsney: Le problème, dans certains de ces 210 cas, c'est que l'intention est essentiellement de retarder la commercialisation du produit. Mais enfin, puisque les deux processus sont simultanés, c'est encore moins gênant.

M. Andreï Sulzenko: Je pense que c'est vrai. Et j'aimerais ajouter aux informations que donnait M. Sutherland-Brown que les chiffres qu'il a cités ont diminué énormément par rapport aux années antérieures, tant pour les procédures judiciaires que pour l'examen des dossiers par Santé Canada. Je pense qu'au moment de l'examen en 1997, les moyennes tournaient autour de 27 mois.

Par conséquent, on note une certaine accélération, ce qui signifie que le système devient plus efficient et présente moins de possibilités de retard.

Mme Paddy Torsney: Ma question s'adresse à vous monsieur Sulzenko. Comment êtes-vous parvenu, à la page 5 de la version anglaise de votre mémoire, au chiffre de moins d'un dixième d'un pour cent?

M. Andreï Sulzenko: Je vais vous donner une description générale et mes collègues pourront vous donner des détails supplémentaires si cela vous intéresse.

Certains médicaments bénéficieront de l'adoption de ce projet de loi. Il y en a relativement peu. Et, comme nous l'avons précisé dans notre déclaration, la prolongation moyenne est d'environ six mois.

• 1630

Ensuite, il faut tenir compte des ventes annuelles de ces médicaments, chiffre qu'il faut rajuster évidemment si la durée moyenne est de six mois et faire le calcul en tenant compte du fait qu'un produit générique remplacera ces médicaments le jour même de leur expiration et que ce produit sera vendu à environ 70 p. 100 du coût du médicament de marque déposée. Autrement dit, les consommateurs de médicaments économisent environ 30 p. 100.

Tous ces calculs aboutissent à un chiffre relativement faible sur une période de huit ans, compte tenu de la prolongation accordée à ces brevets. Voilà comment nous aboutissons au résultat de moins d'un dixième de un pour cent. Et encore, on part de l'hypothèse que le médicament générique serait disponible littéralement le jour après l'expiration du brevet, ce qui est pratiquement impossible.

Je crois qu'en termes juridiques on pourrait parler d'impact de minimis. Si le comité le souhaite, nous pouvons vous présenter les chiffres en détail, mais c'est en général de cette façon que nous avons procédé.

Mme Paddy Torsney: Ma dernière question concerne la possibilité que notre loi sur les brevets empêche ou ait empêché par le passé certaines sociétés de déposer un brevet au Canada. Est-il nécessaire d'harmoniser les régimes des différents pays afin que nous ayons accès aux médicaments les plus innovateurs?

M. Andreï Sulzenko: C'est la position qu'ont adoptée les fabricants de médicaments. Dans la pratique, il est très difficile de savoir exactement quelles ont été leurs véritables décisions d'investissement et sur quelles bases. Le meilleur moyen est de retourner à la révision de 1997, lorsque les fabricants de médicaments novateurs ont affirmé au gouvernement qu'ils répondraient à une stabilisation et une amélioration du régime canadien par une augmentation substantielle de leurs investissements au pays.

Depuis, d'importants fabricants de médicaments ont annoncé de nouveaux investissements substantiels au Canada et, par ailleurs, ils se sont collectivement engagés à augmenter leurs dépenses de R-D afin de les porter, comme je l'ai déjà mentionné, à un milliard de dollars par an en l'an 2000. Lorsque nous obtiendrons les données, nous saurons s'ils ont respecté leurs objectifs, mais leurs investissements atteignaient 900 millions de dollars en 1999 alors qu'ils n'en représentaient au départ que la moitié. D'après moi, les compagnies pharmaceutiques ont nettement augmenté ces investissements.

Mme Paddy Torsney: Vous êtes le sous-ministre adjoint de la politique scientifique. Comment cette industrie se compare-t-elle aux autres? Nous avons consacré une longue étude à la science et à la technologie et nous avons réfléchi aux mesures qu'il faudrait prendre pour augmenter l'innovation au pays et il a été question des recherches qui se font dans ce secteur. Comment ce secteur se compare-t-il aux autres sur le plan des investissements?

M. Andreï Sulzenko: Madame la présidente, je dirais très rapidement et de manière générale que cette industrie est une de celles qui contribuent le plus à l'investissement en R-D au pays. C'est un peu dommage, parce que cela signifie que beaucoup d'autres secteurs font très peu de R-D au pays, qu'ils appartiennent à des intérêts canadiens ou étrangers. Ce secteur combiné à celui des télécommunications représente sans doute 40 à 50 p. 100 de l'ensemble de la R-D industrielle réalisée au pays. C'est pourquoi ces secteurs sont très importants pour nous et pour le gouvernement s'il veut atteindre l'objectif qu'il s'est fixé dans le discours du Trône de placer le Canada parmi les cinq pays de l'OCDE qui font le plus de R-D.

Permettez-moi d'ajouter que cela signifie qu'il faudrait multiplier par deux et demi tous les efforts de R-D réalisés par tous les intervenants du pays au cours de dix prochaines années. C'est un objectif absolument ahurissant. Nous avons certes besoin de la participation de nombreuses autres industries, mais nous devons également maintenir et augmenter les activités dans ce secteur.

• 1635

La présidente: Merci beaucoup, monsieur Sulzenko. Monsieur Brison, s'il vous plaît.

M. Scott Brison (Kings—Hants, PC): Merci beaucoup, madame la présidente et merci aux témoins que nous entendons aujourd'hui.

Les fabricants de produits génériques affirment que le règlement concernant les avis de conformité prolonge les brevets au-delà de 20 ans. D'après vous, est-ce que c'est faux? Mais si c'est le cas, comment se fait-il que le règlement concernant le lien entre l'avis de conformité et le brevet prolonge les brevets au-delà de 20 ans?

M. Andreï Sulzenko: Madame la présidente, cette question a deux volets. Je vais m'occuper du premier et peut-être que mes collègues pourront parler du deuxième.

Comme nous l'avons indiqué dans notre exposé, certains brevets relevant de l'ancienne loi avaient une durée supérieure à 20 ans. Les nouveaux brevets en place depuis 1989 sont d'une durée de 20 ans à compter de leur dépôt, c'est clair. Voilà la situation du groupe de brevet en transition de l'ancien régime au nouveau selon les exigences de l'OMC.

Quant à l'impact du règlement sur...

Me Rob Sutherland-Brown: Madame la présidente, il faut bien comprendre que le règlement concernant les avis de conformité cesse de s'appliquer à l'expiration d'un brevet. S'il s'agit d'un brevet d'une durée de 20 ans et que ce brevet arrive à échéance, toutes les interdictions en vertu du règlement cessent de s'appliquer dès l'expiration du brevet. C'est la même chose avec les brevets d'une durée de 17 ans. Certains produits font parfois l'objet de différents brevets ayant différentes dates d'expiration, mais le règlement lui-même ne peut étendre la durée de protection.

La présidente: Monsieur Brison.

M. Scott Brison: Vous avez indiqué que notre régime de protection des brevets est moins attrayant que le régime américain sur le plan de la protection ou de la prolongation des brevets. Quelles en sont les conséquences, pas uniquement sur les grosses entreprises pharmaceutiques—les laboratoires pharmaceutiques de recherche—mais également sur l'industrie de la biotechnologie au Canada? J'ai l'impression que l'impact est encore plus grand sur la biotechnologie, en raison de la nature des sociétés de ce secteur et de leurs activités. Elles effectuent généralement des recherches sur un, deux ou une série de produits et le risque est, bien entendu, beaucoup plus grand sous plusieurs aspects.

Quel serait l'impact de ce désavantage sur notre industrie de la biotechnologie?

M. Andreï Sulzenko: Eh bien, je préférerais dire que le Canada ne présente pas un désavantage fondamental. Globalement, notre régime propose une situation différente.

Les fabricants de produits d'origine et bon nombre des compagnies de biotechnologie aimeraient que le Canada apporte certaines améliorations à la protection des brevets—la prolongation de la durée des brevets en étant une, mais ce n'est pas la seule des demandes figurant sur leurs listes. En revanche, les fabricants de produits génériques ont une liste différente de revendications, comme je l'ai mentionné. Le travail du gouvernement consiste à trouver un juste équilibre entre ces intérêts contraires.

Je ne pense pas que nous ayons reçu récemment, depuis que je m'occupe de ce domaine, de demande de la part des fabricants exigeant qu'on leur accorde les mêmes prolongations de durée de brevets qu'aux États-Unis, faute de quoi, ils déménageraient toutes leurs activités chez nos voisins. Bien sûr, c'est ce qu'ils souhaiteraient, mais je ne pense pas que la question se pose de manière particulièrement urgente ou qu'elle nuise à nos perspectives d'accroissement des investissements, bien au contraire. Depuis quelques années, notre régime attire d'importants investissements.

• 1640

Nous faisons la différence entre les conditions que ces sociétés souhaiteraient obtenir dans le meilleur des mondes possibles et un environnement commercial tout à fait acceptable pour l'industrie.

M. Scott Brison: Les critères que vous appliquez lorsque vous élaborez des politiques dans ces domaines tiennent-ils compte de l'incidence qu'aurait une meilleure protection des brevets sur nos universités et nos écoles de médecine au plan du transfert de technologie et des possibilités de commercialisation des recherches?

M. Andreï Sulzenko: Absolument.

De fait, le Conseil consultatif des sciences et de la technologie du premier ministre a été chargé il y a quelques temps d'effectuer une étude sur la commercialisation des recherches universitaires. Le rapport du comité d'experts a été rendu public et je serais très heureux de le faire parvenir aux membres du comité qui seraient intéressés à le lire.

Ce rapport contenait des idées extrêmement constructives sur la façon d'améliorer les possibilités de commercialisation. Nous conseillons le gouvernement sur la mise en place d'une telle stratégie dans le contexte de sa priorité en matière d'innovation. Je ne peux pas vous donner des détails sur les conseils que nous donnons au gouvernement, mais je peux vous assurer que c'est là un sujet qui est actuellement intensément débattu.

M. Scott Brison: Vous avez mentionné l'industrie de la biotechnologie tout à l'heure—ce sera ma dernière question, madame la présidente. Vous n'avez pas vraiment parlé de l'ampleur des conséquences qu'une bonne protection par brevet pourrait avoir pour cette industrie. J'aimerais savoir ce que vous en pensez, à cause des liens importants entre l'industrie de la biotechnologie et nos universités, ainsi que de l'important potentiel qui existe dans ce domaine au Canada.

J'aimerais beaucoup avoir vos commentaires à ce sujet-là.

M. Andreï Sulzenko: L'industrie de la biotechnologie a sa propre association. Je pense qu'elle a changé de nom récemment; elle s'appelle maintenant BIOTECanada. Si je me souviens bien, sa position sur les brevets est très similaire à celle du secteur de la R-D. Elle est fortement en faveur d'un régime de brevets très dynamique, capable de soutenir la concurrence internationale.

Je ne fais pas de distinction majeure entre ces deux groupes en ce qui concerne leur position sur la question des brevets.

La présidente: Merci, monsieur Brison.

Monsieur McTeague, s'il vous plaît.

M. Dan McTeague: Merci, madame la présidente.

J'aimerais savoir, messieurs, ce que vous pensez des investissements consentis par les fabricants de médicaments d'origine. Je comprends que les fabricants de médicaments génériques ont peu investi dans notre pays ou ailleurs dans le monde. C'est peut-être une explication, tandis que le graphique que vous nous avez présenté pourrait bien ne pas vouloir dire que les questions de contestation ne posent aucun problème—ou en tous cas, les avis d'allégation—mais plutôt qu'il y a bien des gens qui hésitent à s'engager dans ce processus parce qu'ils savent qu'ils vont se faire taper sur la tête.

Monsieur Sutherland-Brown, vous avez laissé entendre tout à l'heure que c'était une situation particulière. Vous vous êtes cependant—comme M. Sulzenko—réjoui du fait que vous avez pu obtenir quelque chose de l'OMC au sujet de la fabrication anticipée; vous semblez en être très satisfait.

Nous sommes contents aussi, sauf que j'aimerais savoir—selon votre avis d'expert, monsieur Sutherland-Brown—s'il y a d'autres types de produits dont la fabrication anticipée peut être approuvée, mais qui ne sont pas assujettis à ce droit assez particulier d'injonction automatique?

Me Rob Sutherland-Brown: La disposition contenue dans la loi, monsieur, s'applique à toutes les industries où il peut être nécessaire d'obtenir un certificat, un avis ou une autorisation quelconque avant de pouvoir fabriquer, vendre ou annoncer un produit.

M. Dan McTeague: Donc, il y a des cas de fabrication anticipée dans d'autres secteurs visés par la Loi sur les brevets. Ce n'est pas une exception; cela existe ailleurs.

Mais ce qu'il y a de particulier, dans le cas de l'industrie pharmaceutique, c'est que l'article 55, qui porte sur l'avis de conformité, a été ajouté à la suite des délibérations du comité en 1993. C'est exact?

Me Rob Sutherland-Brown: Si je me rappelle bien, monsieur, et je suis désolé...

M. Dan McTeague: Autrement dit, quand cette disposition est-elle entrée en vigueur?

Me Rob Sutherland-Brown: Je suis désolé d'admettre que je travaille à ce dossier depuis aussi longtemps, mais je crois qu'il y a eu des modifications apportées à l'étape du rapport à la Chambre des communes. Je pense que l'article 55.2 est une des dispositions qui ont été adoptées à ce moment-là.

M. Dan McTeague: Merci.

• 1645

La présidente: Je voudrais seulement un éclaircissement.

La fabrication anticipée, est-ce que c'est l'exception ou la règle? Je pensais que c'était particulier à cette loi.

Me Rob Sutherland-Brown: Non. Il s'agit d'une exception touchant la responsabilité en cas de contrefaçon, prévue au paragraphe 55.2(1) de la Loi sur les brevets. Ce que dit ce paragraphe, essentiellement, c'est que les activités qui y sont énumérées ne constituent pas une contrefaçon de brevet.

La présidente: Je comprends. Ce que je veux savoir, c'est si c'est une exception ou si c'est la règle. Est-ce que c'est particulier à la Loi sur les brevets? C'est tout ce que je veux clarifier.

Me Rob Sutherland-Brown: C'est une exception aux dispositions sur la contrefaçon de brevet. Les brevets établissent une foule de droits exclusifs: le droit de vendre une invention, le droit de la fabriquer et le droit de s'en servir. Ces droits s'appliquent pendant une période définie qu'on appelle la durée de protection; elle était de 17 ans en vertu de l'ancienne loi et elle est de 20 ans à partir de la date de dépôt en vertu de la loi actuelle.

Pour défendre son droit d'utilisation exclusive, le titulaire de brevet doit intenter une action en contrefaçon. Le paragraphe 55.2(1) prévoit une protection législative pour les tierces parties qui souhaitent utiliser, fabriquer ou construire un produit breveté—pour reprendre la terminologie de la Loi sur les brevets—pendant la période de protection afin d'obtenir une approbation réglementaire ou une autre forme d'autorisation d'une instance gouvernementale, que ce soit au Canada, dans une province ou à l'étranger.

La présidente: D'accord.

Monsieur McTeague.

M. Dan McTeague: J'ai soulevé cette question—et je vous remercie de votre intervention, madame la présidente—parce que je trouve que c'est important.

Vous nous avez donné l'impression que nous avions bénéficié en quelque sorte d'un compromis et que, d'une manière ou d'une autre, parce que nous avons obtenu l'exception relative à la fabrication anticipée pour les médicaments génériques, nous devrions nous en féliciter et affirmer que c'est merveilleux. Ce qui m'inquiète, c'est l'ensemble du régime, qui a probablement entraîné les hausses de coûts les plus élevées et les plus rapides pour les consommateurs canadiens de médicaments. Tout porte à croire que la lenteur du processus d'homologation des médicaments génériques pourrait être la raison fondamentale pour laquelle les Canadiens paient plus cher pour leurs médicaments.

Mais je voudrais vous poser une question spécifique, parce qu'il est très clair à mon avis que cette impression est erronée. Quand vous laissez entendre que nous avons bénéficié d'un bon compromis et que nous devrions nous réjouir que l'OMC nous ait accordé quelque chose au sujet de la fabrication anticipée... Cela s'applique de toute évidence à tout le monde. Mais ce qui ne s'applique pas à tout le monde, c'est la situation tout à fait particulière et plutôt excessive qui a été créée en vertu de l'article 55.

Donc, ma question porte sur l'autre aspect que vous avez mentionné au départ au sujet de la R-D. Vous avez dit que le chiffre de 900 millions de dollars était satisfaisant. Permettez- moi de vous citer des chiffres pour 1999: il y a eu pour 5 milliards de dollars d'importations au Canada. C'est un ratio d'au moins 5:1, peut-être même de 5,5:1. Pour chaque dollar que les compagnies pharmaceutiques détenant des brevets ont apporté sur le marché canadien, il y en a eu au moins cinq, six, sept ou huit qui ont été dépensés à l'extérieur du pays. Et surtout, je voudrais vous demander si votre ministère a déterminé ce qui constitue de la R-D, en ce qui a trait à ces 900 millions? Est-ce cela inclut la publicité?

M. Andreï Sulzenko: Madame la présidente, avant de répondre à cette question sur la R-D, je voudrais en revenir à une observation de M. Sutherland-Brown au sujet de l'utilisation du terme «particulier».

D'après ce que j'ai pu comprendre, quand nous avons dû défendre l'exception relative à la fabrication anticipée devant l'OMC, nous avons fait de la recherche pour déterminer s'il y avait d'autres industries qui appliquaient cette disposition et nous n'en avons pas trouvé. Donc, quand nous disons que c'est «particulier», nous voulons dire qu'en pratique, d'après ce que nous avons pu voir, c'est propre ou particulier à l'industrie pharmaceutique. Je tenais à vous le préciser. C'est une question de pratique ou de droit, mais nous pensons que ce qui compte, c'est la pratique.

M. Dan McTeague: Une petite précision, madame la présidente. Je voulais parler de la disposition relative à la contrefaçon dans la Loi sur les brevets. Et la réponse de M. Sutherland-Brown... Je pense que le compte rendu montrera clairement que c'était particulier par rapport à tous les autres brevets, à part pour cette industrie.

Il me semble, monsieur Sulzenko, que vous coupez les cheveux en quatre.

M. Andreï Sulzenko: Excusez-moi, madame la présidente. J'ai peut-être mal compris la question du député, mais ce que j'ai voulu dire, c'est que, bien que le règlement sur les avis de conformité soit particulier à l'industrie pharmaceutique, l'exception relative à la fabrication anticipée, elle, ne l'est pas. Mais je suppose qu'on pourrait dire, en fait, que ces deux aspects sont propres à l'industrie pharmaceutique parce qu'aucun autre secteur n'applique l'exception relative à la fabrication anticipée. Donc, si j'ai mal compris la question, je vous prie de m'excuser.

• 1650

M. Dan McTeague: Monsieur Sulzenko, est-ce que cela veut dire que votre ministère n'est pas au courant du fait que cette exception s'applique aux produits agricoles, aux nouveaux pesticides, aux instruments médicaux, aux moniteurs cardiaques et aux rayons X? Vous venez de nous présenter des données et même un petit graphique de Santé Canada. Vous auriez certainement pu demander à Santé Canada s'il y a dans son secteur une industrie qui applique couramment elle aussi l'exception relative à la fabrication anticipée. Vous dites que le ministère de l'Industrie ne le sait pas et qu'il a pourtant tiré ses conclusions sur ce régime? Je pose la question, c'est tout.

La présidente: Monsieur Sutherland-Brown.

Me Rob Sutherland-Brown: Merci, madame la présidente. Je voudrais pouvoir vérifier la recherche que nous avions faite à l'appui des arguments que nous avons présentés pour notre défense devant l'OMC. Ce que je me rappelle, c'est que, même si l'exception à la responsabilité touchant la contrefaçon s'applique à tout le monde, là où il y a un processus d'approbation réglementaire en place, aucune autre industrie ne se trouvait dans la même situation que l'industrie pharmaceutique, en ce sens qu'il y avait sur le marché des fabricants de médicaments génériques très compétitifs, qui voulaient obtenir du gouvernement l'approbation de mettre en marché des produits concurrents à certains produits protégés par des brevets.

La présidente: Merci.

Merci, monsieur McTeague.

Monsieur Rajotte.

M. James Rajotte: Je voudrais seulement poser une question générale. Quelles seraient les répercussions... Qu'est-ce qui se passerait si ce projet de loi n'était pas adopté? Qu'est-ce qui arriverait si nous ne mettions pas en oeuvre ces décisions de l'OMC?

M. Andreï Sulzenko: Eh bien, c'est difficile à dire, mais il est certain que les États-Unis pourraient entamer d'autres procédures devant l'OMC pour prouver que nous ne respectons pas les règles. Je pense que ce serait assez simple. Les États-Unis pourraient ensuite demander l'autorisation d'adopter des mesures de représailles, qui devraient à leur tour être approuvées par l'OMC.

Il y aurait donc des négociations ou des discussions sur l'ampleur que ces mesures pourraient prendre, mais je dirais que cela ne devrait pas nécessairement être dans le secteur pharmaceutique. Ce pourrait être n'importe où. Il y a donc une part d'inconnu, et je pense que le gouvernement n'envisagerait pas cette éventualité avec plaisir. C'est la raison pour laquelle il veut faire adopter cette loi avant que le problème se pose.

M. James Rajotte: C'est tout. Merci.

[Français]

La présidente: Monsieur Brien.

M. Pierre Brien: Puisqu'on déborde un peu du sujet, je vais me permettre de le faire encore. Le Conseil d'examen du prix des médicaments brevetés surveille le prix des médicaments d'origine sur le marché. Est-ce que vous présumez qu'après l'expiration d'un brevet, alors qu'il y a encore des produits génériques sur le marché, il s'établit une concurrence normale et que, à ce moment-là, il n'y a plus lieu de surveiller le prix des médicaments?

En effet, les prix des produits génériques ne font pas l'objet de surveillance, qu'il s'agisse des versions génériques du fabricant initial ou du deuxième fabricant. Est-ce qu'il y a un contrôle des prix ou une surveillance qui s'exercent sur la version générique?

Mme Susan Bincoletto: Effectivement, il n'y a pas de contrôle des prix qui s'applique aux produits génériques. Nous avons de l'information qui nous provient de—malheureusement, je n'en ai que le titre anglais—d'un groupe fédéral-provincial-territorial qui a fait un travail sur les prix des produits pharmaceutiques.

• 1655

L'étude a démontré qu'en 1997, par exemple, les médicaments génériques étaient, en moyenne, entre 27 p. 100 et 37 p. 100 inférieurs à leur équivalent d'origine. C'est une question de concurrence.

Il y a aussi également les formulaires provinciaux qui font état d'une politique de remboursement laquelle dicte, d'une certaine façon, le comportement du prix du médicament générique puisque si, par exemple en Ontario, le remboursement consenti correspond jusqu'à 70 p. 100 du prix du médicament d'origine, le générique va s'aligner, plus ou moins, sur cette politique de remboursement.

Mais le gouvernement fédéral ne joue aucun rôle là-dessus.

M. Pierre Brien: Je me rappelle qu'à l'époque, en 1997, certains avaient dit que, finalement, ce n'était pas nécessairement des marchés de pleine concurrence qui s'établissaient après l'expiration des brevets. On estimait qu'il y avait là matière à examiner le niveau des prix parce que, souvent, ceux-ci s'alignaient sur le pourcentage maximal remboursable. Ce que vous me dites, finalement, confirme à peu près ça.

Vous êtes-vous demandé s'il y avait lieu d'étendre éventuellement les pouvoirs du Conseil d'examen du prix des médicaments brevetés à ceux de la deuxième version?

Mme Susan Bincoletto: Cela tombe sous la juridiction du ministère de la Santé surtout. Donc, on est un peu mal placés pour vous répondre à ce sujet.

M. Pierre Brien: D'accord.

[Traduction]

La présidente: Merci.

Madame Desjarlais.

Mme Bev Desjarlais: Encore une fois, je sais que vous me corrigerez si je me trompe, mais j'aimerais savoir si c'est à cause du peu de temps dont nous disposons que nous n'étudierons pas le règlement sur les avis de conformité dans le cadre de ce projet de loi? Est-ce exact?

M. Andreï Sulzenko: Madame la présidente, il est évident, étant donné tout particulièrement l'intérêt que cette question suscite—pas tellement le projet de loi lui-même, mais surtout la réglementation—dans l'industrie, des deux côtés, qu'il n'aurait pas été possible en pratique de rouvrir tout le débat et d'adopter ce projet de loi dans le temps qui reste.

Mme Bev Desjarlais: Pourquoi?

M. Andreï Sulzenko: Parce que c'est très controversé et litigieux. Je dirais...

Mme Bev Desjarlais: Avant d'aller de l'avant, par conséquent—parce que je n'ai plus beaucoup de temps—au sujet de la décision de l'OMC sur cette question... Le délai habituel est d'environ 15 mois pour permettre aux pays visés de se plier aux exigences de l'OMC. Or, les États-Unis ont fait les représentations suivantes à l'OMC:

    31. Les États-Unis font observer que le Canada a un système parlementaire, ce qui signifie que le gouvernement, avec sa majorité parlementaire, peut effectivement faire en sorte que toute législation qu'il souhaite faire adopter le soit dans un délai aussi court qu'il le souhaite. Ainsi, si le Canada a la volonté d'adopter rapidement le projet de loi, il a largement les moyens de le faire en utilisant les dispositions législatives qu'il a décrites, en particulier, si l'on considère que le Parti libéral a une majorité déterminante au Parlement depuis la récente élection et que les règles de procédure législative n'exigent en moyenne qu'une journée de séance obligatoire pour chacune des étapes suivantes: lecture, deuxième lecture, examen en comité et étape du rapport et troisième lecture prises ensemble.

    32. Les États-Unis affirment, que comme le montre la pratique antérieure, de nombreux projets de loi ont été adoptés rapidement par le gouvernement en place. Par exemple, au cours du 36e Parlement (1997-2000), sur les 78 projets de loi présentés par le gouvernement qui ont reçu la sanction royale, 40 ont été adoptés en quatre mois ou moins. De fait, certains projets de loi ont été adoptés dans des délais aussi courts qu'une semaine.

Je dirais que, si le gouvernement veut vraiment être juste dans toute cette affaire, il pourrait apporter ces changements dans la réglementation, ce qui assurerait un véritable équilibre.

M. Andreï Sulzenko: Madame la présidente, la seule chose que j'aimerais ajouter à ce que j'ai déjà dit, c'est que nous avons eu recours à l'arbitrage parce que nous n'étions pas d'accord avec les Américains. Mais c'était notre dernier recours.

Mme Bev Desjarlais: Nous sommes tous d'accord sur ce point.

M. Andreï Sulzenko: En bien, je pense que l'arbitre a coupé la poire... Je ne sais pas si c'est exactement en deux, mais à peu près. C'est son dernier mot, et nous n'avons pas d'autre recours, que ce soit à l'OMC ou ailleurs.

• 1700

Tout ce que je peux faire, madame la présidente, c'est réitérer la décision du gouvernement. Je suis ici uniquement pour expliquer cette décision, à savoir qu'il s'agit d'un projet de loi restreint qui vise à régler cette question, après quoi nous pourrons consacrer le temps qu'il faudra aux questions plus vastes qui ne peuvent pas être réglées aussi rapidement, de l'avis du gouvernement.

Mme Bev Desjarlais: Merci.

La présidente: Monsieur McTeague.

M. Dan McTeague: Monsieur Sulzenko, vous êtes sûrement conscient du fait que, comme députés, nous représentons—de ce côté-ci, du moins—une portion relativement importante du gouvernement du Canada et que, dans la plupart des mesures législatives qui nous sont soumises, lorsqu'il est fait mention de cette loi comme c'est le cas dans le projet de loi S-17, cela dénote clairement qu'il est possible de nous attaquer à la question plutôt litigieuse de la contrefaçon.

Je comprends comment on doit se sentir quand on est traîné devant un tribunal de compétence internationale et qu'on doit y défendre sa position. Je suis sûr que c'était très difficile pour votre industrie. Vous ne vouliez certainement pas paraître partiaux, et nous non plus. Mais par souci d'équité, et pour définir le rôle que devraient jouer le Parlement et l'industrie, il ne fait aucun doute à mon avis qu'il faut régler la question de la contrefaçon, et qu'il faut la régler immédiatement, sans quoi nous nous trouverons sûrement d'autres excuses plus tard pour ne pas le faire.

Je ne vous demande pas de commenter ce que le ministre a dit. J'aimerais plutôt que vous m'expliquiez pourquoi, dans le passé, vous n'avez pas signifié au ministre ou à notre comité votre intérêt pour la disposition contenue dans le paragraphe 55.2(4), ou l'importance de cette disposition—ses répercussions sur les médicaments génériques, ses conséquences sur les coûts des médicaments, et le fait qu'elle joue un rôle assez particulier dans le droit canadien sur les brevets. C'est ma première question.

Ma deuxième question est très courte. Est-ce qu'il y a des gens de l'industrie des médicaments d'origine qui ont communiqué avec vous ou qui ont fait du lobbying au sujet de ce projet de loi au cours des derniers mois, depuis son dépôt ou avant?

Une voix: ...

[Note de la rédaction: Inaudible]

M. Dan McTeague: Ce ne sont pas les fabricants de médicaments génériques qui vont bénéficier du projet de loi.

M. Andreï Sulzenko: Je suppose...

M. Dan McTeague: Mais il y a des consommateurs...

La présidente: Bon, il y a une question qui a été posée.

M. Andreï Sulzenko: La seule chose que je peux ajouter à ce que j'ai déjà dit en réponse à la dernière question, c'est que le gouvernement a procédé à un examen approfondi en 1997. Cela a pris du temps, comme certains d'entre vous s'en souviendront. Et, depuis, nous avons apporté d'autres modifications à la réglementation quand c'était nécessaire.

Je trouve, personnellement, qu'il n'y a vraiment pas très longtemps que nous avons apporté des changements substantiels à la réglementation. Il semble, d'après ce que nous voyons des deux côtés—d'après les faits, et d'après certaines des choses dont M. Sutherland-Brown a parlé au comité—que même si le système fonctionne relativement bien, cela ne veut pas dire pour autant que les deux côtés sont pleinement satisfaits des résultats.

M. Dan McTeague: Excusez-moi, mais voulez-vous parler encore une fois du graphique qui vous a été fourni par Santé Canada?

M. Andreï Sulzenko: Je veux parler de l'ensemble du processus de réglementation, du régime en place. Ce que je veux dire, c'est qu'il y a eu un examen très approfondi il n'y a pas longtemps. Contrairement à ce que vous semblez croire, le gouvernement considère qu'il n'y a pas d'urgence pour le moment, de toute évidence; mais il y a beaucoup de questions qui se sont accumulées et, comme l'a dit le ministre, nous allons les examiner de nouveau au moment approprié.

M. Dan McTeague: Monsieur Sulzenko, il y a eu deux cas depuis 1997. La quantité des médicaments importés au Canada—ce qui ne touche évidemment pas les provinces qui peuvent prétendre avoir des intérêts dans ce domaine—a doublé, passant de 3,079 à 5,856 milliards de dollars. En même temps, il y a eu un certain nombre de formulaires et de médicaments exemptés. Vous ne l'avez peut-être pas remarqué sur le plan de la réglementation, monsieur, mais nous nous en sommes certainement rendu compte, du point de vue des consommateurs.

Vous pourriez peut-être m'expliquer pourquoi vous n'attachez pas d'importance à la perte de 3 milliards de dollars pour l'économie canadienne.

M. Andreï Sulzenko: Franchement, madame la présidente, je ne pense pas devoir ajouter quoi que ce soit à ce que j'ai déjà dit.

La présidente: Monsieur Lastewka.

M. Dan McTeague: J'avais une dernière question.

La présidente: Il y a une autre question à laquelle vous n'avez pas eu de réponse?

M. Dan McTeague: Vous savez de quoi je veux parler. J'ai demandé s'ils avaient été approchés par des fabricants de médicaments d'origine.

M. Andreï Sulzenko: Oh, excusez-moi.

La présidente: Il y a peut-être eu du lobbying des deux côtés. C'est probablement suffisant.

M. Andreï Sulzenko: Eh bien, c'est un fait. Ces gens-là nous parlent tout le temps.

La présidente: Des deux côtés.

M. Andreï Sulzenko: Oui, des deux côtés.

La présidente: C'est ce que je pensais.

Monsieur Lastewka, s'il vous plaît.

M. Walt Lastewka: Je voulais seulement ajouter que nous avons tous été approchés par des gens des deux côtés. Si ce n'est pas votre cas, je vais vous les envoyer.

• 1705

M. Dan McTeague: Et qui est-ce qui gagne?

M. Walt Lastewka: Tout ce que je voudrais dire à mes collègues du comité, c'est que, quand le ministre dira qu'il est temps de rouvrir le dossier et de revoir la loi à cause de questions litigieuses, tout ce que je demande, c'est que nous soyons tous prêts à nous réunir trois, quatre ou cinq fois par semaine pendant quatre mois, comme je l'ai dit, et à prendre notre temps, sans date d'échéance, pour examiner la loi et écouter des représentants de tous les camps, et tous les gens qui veulent contribuer au débat.

Merci.

La présidente: Merci, monsieur Lastewka. J'apprécie votre commentaire.

Monsieur Cannis.

M. John Cannis (Scarborough-Centre, Lib.): Je voudrais poser une question à M. Sutherland-Brown pour faire suite à celle que mon collègue M. McTeague lui a posée au sujet de l'application de l'exception relative à la fabrication anticipée. Cette exception ne s'applique pas à toutes les entreprises?

Me Rob Sutherland-Brown: Comme je l'ai dit plus tôt dans mon témoignage devant le comité, cette exception à la responsabilité relative à la contrefaçon, prévue au paragraphe 55.2(1), s'applique à toutes les industries où il existe un processus de réglementation avant la mise en marché ou la fabrication, et où ce processus doit être appliqué avant que la partie qui présente une demande puisse faire ce qu'elle veut.

Ce qui distingue l'industrie qui semble susciter un grand intérêt aujourd'hui, l'industrie pharmaceutique—je ne l'ai peut-être pas dit tout à l'heure—c'est que le processus est différent pour les différents membres de cette industrie. Les fabricants de médicaments d'origine doivent soumettre une présentation complète de drogue nouvelle. Les fabricants de produits de deuxième génération, qu'il s'agisse d'autres produits de marque ou de produits génériques, ont l'avantage de pouvoir compter sur le fait que la première compagnie qui a lancé son produit sur le marché a été voir Santé Canada et a soumis toutes les données nécessaires pour démontrer la sécurité et l'efficacité du traitement en cause, aux fins avancées par l'inventeur.

En général, les fabricants de médicaments d'origine doivent consacrer de huit à dix ans à faire approuver leur produit. Comme l'a dit M. Sulzenko dans ses remarques préliminaires, les fabricants de médicaments génériques peuvent soumettre une forme abrégée de la présentation de drogue nouvelle en trois à six ans. Donc, c'est assez particulier à cet égard.

M. John Cannis: Monsieur Sulzenko, dans votre présentation... Je veux vous parler de la partie qui commence à la page 6 et se termine à la page 7. Si je me rappelle bien, j'ai aussi lu dans un journal local, il n'y a pas très longtemps, un article sur le coût des médicaments. J'ai lu certaines choses moi aussi au sujet du fait que les prix sont inférieurs de 40 p. 100 à ceux qui se pratiquent aux États-Unis. Je ne pense pas avoir été induit en erreur par cet article, évidemment, et je ne pense pas que vous vouliez m'induire en erreur aujourd'hui non plus, parce que nous devons répondre à nos électeurs qui nous appellent sans cesse pour nous dire...

Je ne suis pas ici pour discuter de cela avec mon collègue ou avec qui que ce soit d'autre, mais je voudrais vraiment aller au fond des choses sur deux questions—l'exactitude de ces chiffres et, bien sûr, ce que nous cherchons vraiment à faire avec le projet de loi. Nous nous tournons toujours vers l'OMC quand nous avons besoin d'un arbitrage, quand nous estimons que nos produits ne font pas l'objet d'un traitement équitable. Nous demandons à l'OMC de trancher, comme nous l'avons fait récemment quand nous avons eu un différend avec le Brésil. Et nous demandons ensuite à nos partenaires commerciaux internationaux de respecter ses décisions.

Pourriez-vous nous expliquer encore une fois en quoi consiste ce projet de loi, pour le compte rendu, pour moi et pour tout le monde, et quel est objectif il vise?

M. Andreï Sulzenko: Madame la présidente, comme je l'ai dit plusieurs fois, ce projet de loi vise un objectif très restreint; il a simplement pour but de mettre en oeuvre les obligations que nous avons contractées dans le cadre de l'OMC. Ni plus, ni moins.

• 1710

Pour répondre à ce que vous avez dit en introduction à votre question, les prix des médicaments sont contrôlés au Canada, comme vous le savez, par le CEPMB. C'est une autre caractéristique de notre système—je ne sais pas s'il est propre au Canada—qui contribue certainement à l'équilibre recherché en ce qui concerne les droits et les obligations des deux grandes parties en cause.

Comme vous l'avez dit, ces prix sont substantiellement plus bas qu'aux États-Unis. Ils sont également plus bas que dans beaucoup d'autres pays. Selon les données du CEPMB, ils sont moins élevés qu'en Suède, en Allemagne, au Royaume-Uni et en Suisse, mais plus élevés, en moyenne, qu'en Italie et en France.

M. John Cannis: Pourriez-vous fournir ces chiffres aux membres du comité un de ces jours?

M. Andreï Sulzenko: Nous les avons tirés directement du rapport du CEPMB, mais nous nous ferons un plaisir de vous les laisser si cela peut vous être utile.

La présidente: Nous allons en prendre un exemplaire aussi. Est-ce différent de ce que nous avons déjà?

M. Andreï Sulzenko: Je ne pense pas que nous ayons déjà remis ces chiffres au comité.

La présidente: D'accord. Je pensais que vous nous aviez remis deux séries de graphiques.

Madame Torsney, vous avez une dernière question à poser?

Mme Paddy Torsney: Oui, merci.

Je voudrais seulement préciser quelque chose encore une fois. Le projet de loi S-17 rendrait conformes tous les produits visés par l'ancien régime, et tous les produits pour lesquels quelqu'un demanderait un brevet aujourd'hui tomberaient sous le coup du nouveau régime. Donc, le projet de loi vise à corriger la situation pour un très petit nombre de brevets, pour qu'ils soient conformes au nouveau régime. S'il y a des gens qui pensent que ce nouveau régime pose des problèmes, il y aurait beaucoup plus de brevets qui seraient touchés, et il serait bizarre de vouloir régler grâce à ce projet de loi les problèmes qui pourraient exister d'autre part, parce que le projet de loi vise seulement à rendre les deux régimes égaux.

Est-ce que j'ai raison ou si j'ai tort?

Me Rob Sutherland-Brown: Je pense que c'est un bon résumé de la situation. Individuellement, les brevets qui seront touchés le seront tous différemment parce qu'ils sont tous de durée différente. Si un brevet accordé en vertu de l'ancienne loi, pour une protection de 17 ans à partir de la date d'octroi, a été approuvé en moins de trois ans par le bureau des brevets, sa durée supplémentaire pourra être de dix jours à quinze mois environ; la situation varie d'un brevet à l'autre. Mais c'est tout ce que nous faisons; cette période supplémentaire, c'est-à-dire la différence entre 17 ans après la date d'octroi du brevet et 20 ans après la date du dépôt, sera ajoutée à la fin de la période de protection.

Mme Paddy Torsney: Merci.

La présidente: Merci beaucoup, madame Torsney.

Je vous remercie d'être venus. La discussion a été très intéressante. Nous sommes conscients du fait qu'il y a eu un examen très approfondi en 1997, suivi d'un nouvel examen qui a débouché sur des changements dans la réglementation en 1998; nous comprenons aussi que le projet de loi S-17, qui nous est soumis aujourd'hui, se rattache expressément à la décision de l'OMC. J'espère que tous les membres du comité s'en souviendront au cours de nos discussions des prochains jours.

Merci beaucoup; nous avons hâte de vous rencontrer de nouveau.

La séance est levée.

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