CIIT Réunion de comité
Les Avis de convocation contiennent des renseignements sur le sujet, la date, l’heure et l’endroit de la réunion, ainsi qu’une liste des témoins qui doivent comparaître devant le comité. Les Témoignages sont le compte rendu transcrit, révisé et corrigé de tout ce qui a été dit pendant la séance. Les Procès-verbaux sont le compte rendu officiel des séances.
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CANADA
Comité permanent du commerce international
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TÉMOIGNAGES
Le jeudi 26 mars 2009
[Enregistrement électronique]
[Traduction]
Mes chers collègues, merci. Souhaitons maintenant la bienvenue à nos témoins.
Nous sommes heureux d'accueillir aujourd'hui des visiteurs venus de la Colombie. Nous avons avec nous Jorge Enrique Robledo, membre du Sénat de la République de la Colombie. Monsieur le sénateur, soyez le bienvenu. Nous avons également Son Excellence Jaime Duarte, ambassadeur de Colombie au Canada, qui a d'ailleurs déjà comparu devant notre comité; Excellence, je vous remercie d'avoir bien voulu revenir témoigner à si bref délai.
J'invite nos visiteurs à bien vouloir commencer par une brève déclaration préliminaire. Je donnerai tout d'abord la parole au sénateur Robledo qui sera suivi par Son Excellence l'ambassadeur, après quoi, nous passerons aux questions des membres du comité. Cela dit, si nous sommes tous d'accord, et si nos systèmes d'interprétation sont en place, je donne la parole au sénateur Robledo.
Je voudrais tout d'abord remercier tout particulièrement tous les membres de cet important comité de la Chambre des communes du Canada pour avoir bien voulu nous accueillir ce matin.
Excusez-moi, sénateur, un instant.
Apparemment, nous entendons simultanément l'espagnol et les traductions en français et en anglais. Tout passe en même temps sur le même canal, et il est difficile de faire une distinction. Nous allons nous interrompre un instant pour voir s'il est possible d'arranger cela. Nous recevions bien la traduction, mais on l'entendait sur le même canal de l'espagnol.
L'hon. Jorge Enrique Robledo (Interprétation):
Faisons un essai. Entendez-vous l'anglais?
Merci; excusez-nous du contretemps. Nous allons maintenant pouvoir entendre la voix des témoins. Après tout, vous ne serez pas réduit au silence.
Sénateur Robledo, veuillez reprendre. Merci, sénateur.
L'hon. Jorge Enrique Robledo (Interprétation):
Je réitère mes remerciements au comité parlementaire pour avoir bien voulu nous accueillir et nous offrir la possibilité de vous présenter notre point de vue sur un sujet aussi important qu'est la possibilité d'un accord de libre-échange entre le Canada et la Colombie. Premièrement, je tiens à préciser que j'appartiens au PDA, un parti colombien qui, depuis sa création, a une position très claire: il n'appuie, ne parraine, ni ne participe de quelle que manière que ce soit au conflit armé, et à plus forte raison, il ne justifie pas des actes abominables tels que des enlèvements. On pourrait penser que lorsque l'on discute de questions commerciales, une telle introduction est peut-être excessive. Mais dans le cas de la Colombie, je ne pense pas que ce le soit, car il est bon de préciser que dans ce pays, il n'y a pas deux positions dans le conflit armé, celle du gouvernement et celle des forces armées, il y en a en fait trois — je dirais même qu'il y en a plus — pour tout ce qui touche à la vie politique colombienne.
Deuxièmement, je tiens à souligner qu'en principe, le PDA considère comme un élément positif que les peuples entretiennent des rapports économiques nombreux et divers, et que nous ne sommes pas hostiles aux traités économiques internationaux. Au plan des principes, nous ne sommes pas non plus opposés à l'importation des marchandises ou à l'exportation de biens et services. Nous estimons également souhaitable qu'il y ait des investissements étrangers en Colombie. Tout cela suppose naturellement que dans ces échanges économiques, une série de conditions soient respectées et que celles-ci soient profitables pour les diverses parties à ces échanges.
Troisièmement, je tiens à faire observer que nous considérons que le parti démocratique aux États-Unis a absolument raison, comme l'attestent le Congrès américain et le gouvernement lui-même, de considérer que le gouvernement colombien, présidé par Álvaro Uribe Vélez, ne peut pas prétendre sérieusement qu'il respecte les droits de la personne dans notre pays.
Il est de notoriété publique que notre pays est un des plus dangereux, voire le plus dangereux du monde, pour ceux qui participent à des activités syndicales. Le nombre de syndicalistes qui ont été tués est extrêmement élevé. Au gouvernement, il y en a eu aussi un nombre assez important de victimes. La position du gouvernement national pose également problème en ce qui concerne les enquêtes lancées par la cour suprême de justice contre les parapolitiques. Ce terme est utilisé dans notre pays pour décrire les liens existant entre les leaders politiques les plus importants et les organisations criminelles paramilitaires. Dans au moins 80 p. 100 des cas — et il y en a des dizaines — ces liens impliquent des cadres supérieurs des partis représentés au gouvernement de coalition de Álvaro Uribe Vélez.
Vu les récents événements dans notre pays, le Congrès des États-Unis considère que la conduite ou les explications du gouvernement de la Colombie ne sont pas convaincantes. Dans notre pays, nous apprenons ces événements des « faux positifs ». Un « positif » en jargon militaire est un ennemi qui meurt au combat. Il y a « faux positif » lorsqu'une personne qui ne joue aucun rôle dans la guerre est tuée, ce qui permet de dire que c'est un guérillero tombé au cours d'un combat; nous parlons là de jeunes gens des bidonvilles de Colombie. Je ne tiens pas à entrer dans les détails d'événements si douloureux et tragiques dans la vie de notre pays, mais ce qui est certain, c'est que nous croyons — comme, je le répète, la majorité des membres du Congrès des États-Unis — que la position du gouvernement d'Álvaro Uribe Vélez ne résiste pas à un examen attentif, comme il le devrait, en de telles circonstances.
Je peux comprendre qu'il y a des gouvernements dans le monde qui ont le droit de décider qu'ils ne tiendront pas compte de ce genre de questions lorsqu'on en vient au domaine commercial, parce qu'ils pensent qu'après tout, les affaires sont les affaires. C'est une position que tout gouvernement est libre d'assumer. Cependant, ce que je ne saurais en aucun cas tolérer, c'est qu'on prétende qu'en Colombie, le respect du critère des garanties démocratiques pour les syndicalistes, les travailleurs et les citoyens résiste à une analyse objective. Car si ces garanties étaient mises à l'épreuve, le résultat serait un lamentable échec.
Je ne peux pas non plus dire que le libre-échange facilitera l'effort de paix dont notre pays a un urgent besoin. Dans le cas particulier de la Colombie, nous pouvons prouver qu'un grand nombre des politiques de libre-échange qui y sont appliquées, à commencer par les accords avec l'Organisation mondiale du commerce, ont porté un préjudice considérable à notre économie nationale. À titre d'exemple, la Colombie était autosuffisante dans le domaine de la production agricole, celui des denrées alimentaires jusqu'en 1990. Pourtant, aujourd'hui, nous importons huit millions de tonnes de produits alimentaires, ce qui porte naturellement un très fort préjudice à notre économie nationale. Ces importations sont bien sûr ruineuses pour nos entreprises, car nos travailleurs agricoles se retrouvent sans emploi; elles ruinent aussi les habitants de nos campagnes et les peuples autochtones, dont beaucoup, même s'ils ne le veulent pas, sont contraints par le libre-échange et la destruction de leurs économies de se consacrer à des cultures telles que celles du cacao. D'une manière ou d'une autre, cela contribue à accroître le pouvoir des trafiquants de drogue et rend en quelque sorte la population prisonnière des horreurs de la violence dans notre pays. Je ne suis pas de ceux qui croient que la pauvreté suffit à justifier la violence, mais je demeure convaincu qu'elle offre un terrain propice à la violence, et nous pouvons montrer par de multiples exemples que dans le cas de la Colombie, le libre-échange engendre inévitablement la pauvreté.
En fin de compte, dans notre cas, même s'il n'y avait pas de violence, il n'y a aucune garantie de protection pour les syndicalistes. On peut montrer que ni les lois colombiennes ni l'interprétation qu'en fait le gouvernement ne favorisent l'usage de pratiques syndicales vraiment démocratiques. Dans bien des circonstances, il est impossible de s'organiser. Les négociations collectives sont fréquemment interdites, comme le droit de faire la grève, ce qui a manifestement un effet négatif sur la défense des droits en matière de travail.
Enfin, je peux comprendre qu'au Canada, certains secteurs nationaux tireront un profit non négligeable de l'accord de libre-échange, comme dans le cas de celui avec la Colombie. Je peux vous assurer que les Colombiens seront les grands perdants. Je crois aussi qu'à moyen et long terme, l'accord de libre-échange n'est pas un élément positif pour les Canadiens. Je crains que si cela continue, le Canada ne se retrouve à un certain moment perdant, notamment pour ce qui est de son système de sécurité sociale alors que celui-ci qui est aujourd'hui, un exemple pour le monde entier. Je crois que la crise mondiale que nous vivons est aussi une crise du libre-échange et de politiques qui sont préjudiciables non seulement à la Colombie, mais à l'ensemble de la population mondiale.
J'espère donc que le Parlement canadien n'approuvera pas l'accord de libre-échange qui a été signé par les deux gouvernements, et qu'il sera possible de trouver un moyen plus démocratique — et je dirais, plus civilisé — de permettre au Canada et à la Colombie d'établir les meilleures relations économiques et commerciales possibles.
Je vous remercie.
Merci, sénateur.
Votre Excellence, voudriez-vous faire un commentaire ou présenter une déclaration préliminaire?
Oui, monsieur le président.
Premièrement, je tiens à exprimer mes plus vifs remerciements à l'honorable comité pour m'avoir permis de participer à cette réunion.
Je souhaiterais aussi la bienvenue à l'honorable sénateur Jorge Enrique Robledo, de la République de la Colombie.
Monsieur le président, je vais faire une déclaration qui est assez contraire à celle du sénateur Robledo. La voici.
À une autre occasion, l'an dernier, lorsque j'ai eu la chance d'être invité à comparaître devant votre comité, j'ai pu expliquer en détail que la violence en Colombie est une situation qui dure depuis près de cinq décennies et qui a engendré un certain nombre de phénomènes dans notre pays. Des civils ont été tués et déplacés; la corruption est apparue et le trafic de drogues a été encouragé.
Comme je l'ai dit l'an dernier, la situation sur le plan social dans son ensemble, liée à ce que nous reconnaissons maintenant comme la non-présence de l'État sur la plus grande partie du territoire à l'époque, a permis à cette situation de s'aggraver. On en est arrivé à un point où cette situation n'était vraiment plus contrôlable au début de cette décennie. À cette époque, nous pouvions dire que la Colombie était sur le point de devenir ce que la communauté internationale appelle un « état en déroute ». C'est alors que le pays s'est livré à un effort de réflexion et a reconnu qu'il avait besoin d'une stratégie qui lui permettrait de recouvrer ce dont il avait besoin.
Pour cette politique, on avait conclu qu'il fallait une stratégie positive qui permettrait au pays de récupérer son dû. Il fallait commencer par rétablir la sécurité dans le pays et faire sentir la présence de l'État dans tous les coins et recoins du territoire.
C'est une politique qui avait d'abord été proposée par Alvaro Uribe, lorsqu'il était candidat à la présidence, puis développée par lui lorsqu'il était devenu chef de l'État. Cette politique est fondée sur trois éléments principaux: premièrement, rechercher la sécurité pour tous; deuxièmement, rechercher un investissement social pour améliorer le niveau de vie des habitants; troisièmement, gérer des politiques économiques saines qui nous aident non seulement à atteindre ces objectifs sociaux, mais aussi à rétablir la confiance des Colombiens à l'égard de leur pays ainsi que celle de la communauté internationale à l'égard de la Colombie, étant entendu que la confiance que nous recherchons est également liée aux besoins du pays en matière d'investissement.
C'est en ce sens que la réflexion du gouvernement l'amène à considérer avec plus d'intérêt le secteur étranger de l'économie. Il le fait parce qu'il est convaincu que la mobilisation de ce secteur étranger et l'appel aux investissements étrangers sont la meilleure façon de créer des emplois — des emplois de qualité, des emplois bénéficiant de la sécurité sociale, des emplois qui contribuent à tisser le tissu social de la Colombie.
C'est en ce sens que l'on a défini une politique de recherche de marchés, de marchés pour un commerce légal. Pourquoi en fais-je mention? Parce que nous avons un taux de chômage élevé en Colombie. On a montré qu'un Colombien sur sept appartient au secteur informel de l'économie — c'est-à-dire que c'est un citoyen qui travaille mais qui ne jouit pas des avantages de la sécurité sociale. Bien entendu, les personnes qui sont à la charge de ce citoyen sont sans aucune protection.
Il faut aussi tenir compte de la création d'emplois, car la paix poursuivie par la politique du gouvernement s'est avérée insaisissable et ne s'est pas encore concrétisée. Des négociations ont été engagées avec divers groupes armés illégaux. Il y a tout d'abord les négociations avec ce que l'on appelle les paramilitaires, c'est-à-dire les groupes armés d'extrême droite, qui ont abouti à la démobilisation de près de 35 000 membres de ces groupes.
Il y a cependant aussi eu, de manière individuelle, la démobilisation d'environ 15 000 membres des groupes armés d'extrême gauche. Il s'agit donc d'une population démobilisée d'environ 50 000 personnes qui doivent retourner à la vie civile. Il faudrait leur offrir la possibilité de participer à la production légale, mais à quoi bon le faire et accroître la production du pays si celle-ci ne peut se vendre nulle part. D'où l'importance de la politique commerciale en cours d'élaboration.
La recherche d'un accord commercial avec le Canada, comme cela a été le cas avec les États-Unis, ne s'est pas faite pour des raisons politiques ou idéologiques — c'est un besoin réel qui nous inspire. Nous avons déjà négocié des accords avec les États-Unis, le Canada, le Mexique, le Chili, l'Amérique centrale et l'Association européenne de libre-échange. Nous sommes actuellement à Lima où nous participons à la seconde ronde de négociations avec l'Union européenne, et nous avons discuté du cadre qui serait utilisé pour négocier les accords de libre-échange avec des pays tels que l'Inde, la Corée, et l'Australie.
L'objectif est d'assurer l'accès de la production colombienne aux marchés et de créer des emplois de qualité. Il est absolument indispensable que nous empêchions ceux qui, jusqu'à présent, ont été impliqués dans la violence ou au trafic de drogues, de penser que la seule option pour eux est de reprendre les armes et retourner à un combat qui dure depuis si longtemps. Les négociations avec les groupes paramilitaires se sont déroulées selon un processus ambitieux dans le cadre d'une loi généreuse à l'égard de ceux qui déposent les armes, mais qui a essayé, à un moment donné d'établir un équilibre entre la justice et la paix.
Les groupes qui ont négocié et qui ont mis bas les armes s'attendaient à ce que la société les accueille immédiatement et respecte les garanties voulues pour eux par le gouvernement. Mais cela implique des processus de préparation de la société à l'accueil de ceux qui sont démobilisés. Bon nombre des paramilitaires qui avaient négocié leur réinsertion dans la vie du pays, avaient l'impression d'être laissés sans protection ou étaient déçus par ce qu'ils avaient trouvé; ils étaient donc retournés pour former ce qui constitue aujourd'hui des gangs de criminels, n'ayant aucune idéologie à défendre. Manifestement, ils devraient être traités en conséquence. Quoi qu'il en soit, ce qui importe, c'est l'expérience qu'ils laissent dans leur sillage et les leçons à en tirer. Si le pays ne peut pas leur assurer des conditions de vie décentes, ces gens-là seront tentés de reprendre les seules activités qu'ils ont connues jusque-là.
L'accord est donc important pour la Colombie, non seulement parce que nous croyons qu'il conduira à une augmentation du commerce et des services entre les deux pays, mais que nous croyons que le commerce crée des espaces pour l'investissement étranger et que nous sommes convaincus que dans le domaine du commerce et de l'investissement, il est absolument nécessaire d'avoir un cadre permanent clairement défini garantissant aux gens d'affaires et aux investisseurs que leurs activités bénéficieront du climat de stabilité et de permanence dont ils ont besoin.
Il est donc essentiel pour nous de conclure autant d'accords commerciaux que possible. Le Canada est un partenaire intéressant pour nous, un modèle à suivre pour structurer le cadre colombien. Nous nous intéressons au modèle canadien qui s'appuie sur l'exercice de la démocratie dans une économie ouverte et sur un système de sécurité sociale répondant pratiquement à toutes les ambitions et les aspirations des Colombiens.
La présence canadienne dans le domaine des affaires et de l'investissement contribuera à améliorer les principes régissant actuellement les relations entre les Colombiens et les autres. Il importe cependant aussi de noter que les accords, en particulier dans le secteur du travail, qui est un de nos sujets de préoccupation, représentent un progrès important par rapport au contenu actuel de la législation nationale et de nos engagements internationaux, particulièrement en ce qui concerne les conventions de l'OIT.
En ce sens, contrairement à ce qu'a dit le sénateur, je serais pour ma part reconnaissant au comité de considérer ce texte d'un oeil favorable, et dans la mesure où il serait possible de comparer les résultats qui en découleraient, de considérer les bénéfices que pourrait en tirer un pays qui n'a pas encore surmonté les conflits qui le déchirent et qui a besoin de réinsérer ceux qui ont participé à des actes de violence.
Je vous remercie.
Merci, Votre Excellence, et encore une fois merci, sénateur Robledo.
Nous allons maintenant passer aux questions des membres du comité. Comme d'habitude, nous donnerons la parole à chaque parti, et nous limiterons la première ronde à sept minutes. Pour que ce soit bien clair pour les témoins comme pour le comité, je précise que ces sept minutes couvrent à la fois la question et la réponse.
Je commencerai par le Parti libéral, et je tiens à préciser que plusieurs membres du comité souhaitent poser des questions; il va donc falloir respecter scrupuleusement cette limite de sept minutes. Je couperai les micros au bout de sept minutes, même si vous êtes en plein milieu d'une phrase, de manière à ce que ce soit juste pour tout le monde et que tous puissent s'exprimer.
Commençons par M. Silva; vous avez sept minutes.
Merci.
Je partagerai le temps dont je dispose avec M. Cannis.
Bienvenue. Nous sommes ravis d'accueillir l'ambassadeur et le sénateur.
Manifestement, lorsque nous cherchons à établir ces accords de libre-échange, les droits de la personne comme d'ailleurs les enjeux en matière de travail, nous préoccupent toujours. Pour l'accord qui nous concerne, l'ambassadeur et le sénateur savent peut-être aussi qu'il va plus loin que les négociations actuelles entre la Colombie et l'Union européenne. En fait, les deux accords que la Colombie a conclus avec l'AELE et avec l'Union européenne ne traitent pas des questions relatives aux accords dans le domaine du travail et aux droits de la personne de manière aussi complète que nous le faisons ici. Je crois que notre accord est beaucoup plus exhaustif que celui qui existe avec l'Union européenne.
J'ai fait de fréquents voyages en Colombie et j'ai relevé une différence au fil des années. Les ONG qui étaient là-bas il n'y a pas si longtemps — Caritas, Human Rights Watch et Amnesty International — exprimaient des inquiétudes au sujet du respect des droits de la personne. Il y a ceux qui sont totalement opposés au libre-échange, quels que soient les enjeux, en dehors de toute considération des droits de la personne. Il y a ceux qui, dans chaque pays, sont légitimement opposés au libre-échange, quelle que soit leur opinion à l'égard des questions des droits de la personne.
En réalité, il y a eu une nette amélioration de la situation dans le pays en ce qui concerne les droits de la personne. En fait, la Colombie était presque un pays en déroute il y a quelques années. Elle n'était plus capable de contrôler ses frontières et de fournir des services. Aujourd'hui, la stabilisation de la Colombie a tout changé dans la vie de ses habitants, et la cote de confiance de 80 p. 100 dont jouit le Président Uribe en témoigne. Il ne l'a pas obtenue en ne faisant rien. Il l'a obtenue en stabilisant le pays. Aujourd'hui, la population approuve tout à fait ses efforts.
Vous ne pouvez pas nier le fait qu'il est extrêmement populaire. Je sais, sénateur, que vous appartenez à l'opposition, mais il faut bien qu'il ait fait quelque chose de bon pour acquérir une telle popularité en Colombie et obtenir une cote de confiance de 80 p. 100. Peut-être le sénateur a-t-il un mot à dire à ce sujet.
L'hon. Jorge Enrique Robledo (Interprétation):
Certainement, je serais ravi de le faire. Je voudrais souligner deux points. Premièrement, je dirais qu'outre le problème de la violence dans le milieu syndical, la législation colombienne pose un problème, car elle laisse beaucoup à désirer en ce qui concerne les droits syndicaux. Elle a imposé ce que l'on appelle les « coopératives associées », si bien que les conventions collectives ont été remplacées par une sorte de système de relations économiques structurées de manière à ce que nos travailleurs ne puissent pas former de syndicats. Environ 6 000 personnes travaillent dans le secteur de la production de sucre de canne en Colombie. Tout ce qu'ils voulaient, c'est que leurs patrons leur reconnaissent le droit de se syndiquer. Nous tenons à souligner le fait que ce droit leur est refusé.
L'accord de libre-échange n'a rien changé à la situation. J'ai lu très attentivement l'accord parallèle sur le travail et l'environnement entre la Colombie et les États-Unis. C'est une annexe au traité ne contenant absolument rien qui permette aux travailleurs colombiens de se syndiquer et de faire face à certaines des catastrophes dans le domaine du travail auxquelles nous avons été confrontés en Colombie. Nous ne disposons même pas de la législation du travail nécessaire.
Je peux vous assurer que l'ALE avec les États-Unis n'a pas arrangé la situation. Cet accord dit une foule de choses, mais il n'a certainement rien réglé en ce qui concerne le droit d'organisation. À mon avis, ce sont là des points à signaler; ce sont des faits.
Quant à savoir s'il y a eu des progrès ou non, que dire? En ce qui concerne la violence contre les dirigeants syndicaux, il y a eu 49 assassinats l'an dernier, 25 de plus que l'année précédente, et 16 dirigeants... Que se passerait-il si, l'an dernier, 16 dirigeants syndicaux avaient été assassinés au Canada? Qu'en penseriez-vous? Je le répète, le nombre des meurtres a augmenté, et les normes du travail ne facilitent pas les choses. Ainsi, 18 années de politique de libre-échange ont abouti en Colombie à la destruction de l'appareil productif. La pauvreté est en hausse, l'emploi est en baisse, et les emplois créés sont des emplois faiblement rémunérés.
Permettez-moi de souhaiter aussi la bienvenue au sénateur et à l'ambassadeur.
J'avais d'autres questions à poser mais votre réponse, sénateur, m'incite à vous poser celle-ci. Je cite le Washington Post, qui notait que les travailleurs syndiqués constituent 2 p. 100 de la population colombienne, mais que seulement 0,0027 p. 100 des 17 198 meurtres commis en Colombie visaient des membres de syndicats. Bien que dans certains secteurs, les syndicalistes soient nettement visés, ces chiffres semblent indiquer qu'ils sont en fait moins susceptibles d'être tués que les membres de l'ensemble de la population en général.
Ce sont à des faits que nous avons affaire. Mais avant de vous céder la parole, monsieur, je voudrais poser toutes mes questions; ce sera ensuite votre tour.
Vous avez assisté à une table ronde pendant votre séjour ici — le 25, je crois — sur les méthodes de lutte contre la pauvreté mondiale, et vous avez dit que la pauvreté engendre la violence. Nous sommes tous d'accord sur ce point, je crois, et je crois que la simple décence nous dicte à tous de lutter contre cette pauvreté.
Mais ce qui m'inquiète c'est que dans de nombreux domaines, votre pays... selon les informations qu'on nous a communiquées, le Canada a apporté une aide à la Colombie. Par exemple, il a contribué 32 millions de dollars entre 2006 et 2008 dans les domaines suivants: les droits des enfants, les jeunes, les personnes déplacées hors de leur pays. Le Canada a aussi versé un total de 50 millions de dollars depuis 2005 dans le cadre de son fonds pour la paix et la sécurité mondiales afin de promouvoir la paix en Colombie et la région, de protéger les droits des victimes en leur ménageant un accès à la justice et à des réparations — et ce n'est pas tout.
Je crois donc que nous avons été tout à fait présents. Nous ne voulons pas nous contenter de conclure un accord commercial.
Comment lutter contre la pauvreté, monsieur, je vous le demande. Je crois qu'on a dit que vous vivez dans un climat de violence depuis cinq décennies. Comment combattre la violence? Vous avez dit, si vous me permettez de vous citer, « Il importe que nous trouvions d'autres méthodes civiles plus démocratiques pour régler ces problèmes. » Pourriez-vous nous faire des suggestions sur ce que sont les autres méthodes plus démocratiques?
Je crois aussi, comme le suggérait la critique, que l'ALE augmentera les pressions sur le gouvernement pour qu'il améliore ses lois. C'est en partie ce que nous avons fait, je crois, sur le plan national, lorsque nous avons signé des accords avec d'autres pays. Nous leur avons montré les moyens de le faire. Je prendrai la Chine comme exemple, où nous avons fait un énorme pas en avant sur le plan de la législation du travail, des syndicats, etc. Adopter une attitude d'engagement ne peut qu'être bénéfique.
Merci, monsieur le président.
L'hon. Jorge Enrique Robledo (Interprétation):
Merci. À mon avis, la première chose à faire est de lutter contre la pauvreté, et pour cela, il faut faire marcher les économies. Comment? Il faut développer l'appareil productif. Il faut avoir des petites et moyennes entreprises et aussi des grandes sociétés, comme c'est le cas dans l'agriculture, où vous pourrez trouver du travail pour les ouvriers agricoles et les grands propriétaires fonciers.
Dans un système capitaliste, il s'agit manifestement de personnes qui ont de bons revenus et de bons emplois. Les contributions qu'un pays peut verser à un autre sont très utiles et tout à fait bienvenues. Ce à quoi nous devons avant tout aspirer, c'est d'avoir une économie qui fonctionne.
Dans le cas de la Colombie, je le répète, nous appliquons depuis 18 ans la théorie du libre-échange et il n'a pas été du tout prouvé que le libre-échange fonctionne. En fait, il a détruit une énorme partie de l'appareil de productif colombien. Nous important maintenant huit millions de tonnes de produits alimentaires, ce que nous ne faisions pas dans le passé. Nous avons neuf millions d'hectares de terres inutilisées. Peut-être le sont-elles comme pâturages, et ces terres ne produisent rien, et il n'y pousse que des broussailles. Nous avons toutes ces terres inexploitées. Pourquoi? Parce que les importations de produits agricoles et autres, de produits alimentaires d'autres pays qui ont une technologie supérieure et des subventions plus élevées signifient que nos fermiers locaux ne peuvent pas développer leurs produits et services.
Je tiens à souligner que dans le cas de la Colombie — et je ne parle pas de théorie — le libre-échange a clairement montré qu'il avait dégradé notre appareil productif. La même chose s'est produite dans le cas de notre appareil industriel. Nous sommes déjà sous-développés dans ce domaine. Je peux vous assurer que nous avons été complètement ravagés par les importations; or, le Canada est une très grosse puissance économique. Les États-Unis le sont encore plus, mais le Canada l'est aussi, et croyez-moi, il est totalement impossible pour nous de jouer à armes égales avec vous.
Soyons francs, la concurrence internationale est un des éléments de base du libre-échange. Que tirons-nous du « libre-échange »? Les salaires sont bas. Constatons-nous une amélioration des normes du travail en Colombie? Comment y parvenir? Si nous relevions ces normes, la Colombie ne serait plus compétitive. Si nous avions de meilleurs salaires, nous ne pourrions pas affronter la concurrence des produits étrangers. Si les salaires étaient augmentés, il serait très difficile d'exporter nos produits. Si les salaires colombiens étaient plus élevés, nous ne pourrions probablement plus attirer les investisseurs étrangers, car cela ne présenterait plus d'intérêt pour eux. Nous serions en concurrence avec des pays où les normes du travail sont encore plus basses.
Selon la manière dont les choses sont actuellement organisées, comment un pays comme la Colombie peut-il progresser? Nous sommes condamnés à affronter la concurrence avec de faibles salaires et dans la pauvreté. La théorie selon laquelle les accords de libre-échange ont amélioré les normes du travail est totalement contraire à la réalité. Nous avons eu quatre réformes de la législation du travail en 18 ans, depuis le début du libre-échange en Colombie, et je peux vous assurer qu'aucune de ces réformes n'a vraiment amélioré la situation.
Vous allez dépasser le temps alloué. Je crois que nous allons d'abord limiter les questions et la longueur des réponses de manière à ce que tout le monde puisse intervenir.
Monsieur Cardin.
[Français]
Merci, monsieur le président.
Monsieur le sénateur, monsieur l'ambassadeur et autres témoins, bienvenue et merci d'être ici.
Depuis le début du débat sur l'accord de libre-échange entre le Canada et la Colombie, on ne peut passer à côté de ce débat. On en entend parler d'autant plus depuis que les États-Unis ont refusé d'entériner l'accord avec la Colombie en invoquant pour motif les droits de la personne. Le débat se tient, on est en plein dedans.
On doit se poser certaines questions fondamentales. Doit-on maintenir la tendance de faire des affaires pour faire des affaires strictement, sans prendre en considération les droits de la personne, entre autres? Jusqu'où doit-on aller?
Ma question s'adresse principalement à vous, monsieur le sénateur. Des gens croient qu'un accord de libre-échange est la panacée à tous les problèmes liés aux droits de la personne, à la sécurité, à l'environnement et au développement social des pays en cause. Dans un premier temps, j'aimerais savoir ce que vous pensez de cette orientation selon laquelle il faut faire des affaires et le reste suivra, les choses s'amélioreront toutes seules. J'aimerais connaître votre opinion.
[Traduction]
L'hon. Jorge Enrique Robledo (Interprétation):
Il est donc indiscutable que l'activité économique et les activités commerciales en général sont profitables pour au moins une des parties en cause, n'est-ce pas? Mais ce qui arrive fréquemment c'est que ce n'est pas nécessairement bon pour les deux parties. Cela peut l'être pour l'une mais pas autant pour l'autre. Je crois que cela a été l'effet qu'a eu le libre-échange en Colombie. Lorsque quelqu'un vient en Colombie et exporte des produits alimentaires, ce peut être une bonne affaire pour l'exportateur, mais la question suivante continue à se poser: Qu'arrive-t-il aux Colombiens et aux producteurs colombiens? Si nous parlions du libre-échange, je dirais que, ce qui se passe, est totalement contraire à l'idée qu'un simple coup de baguette magique assure le développement. En fait, si nous nous fondons sur les 18 dernières années, sur ce qui s'est passé et sur ce qui continue à se passer dans le monde, la situation actuelle confirme et prouve ce que nous savions déjà en théorie et que nous savons dans la pratique en Colombie. Nous savons parfaitement que ce n'est pas de cette façon que nous allons régler nos problèmes à moyen terme — qu'il s'agisse des problèmes de la Colombie, du Canada ou du monde entier.
[Français]
Ma prochaine question s'adresse à monsieur l'ambassadeur.
Bon nombre de groupes de la société civile, que ce soit au Canada ou en Colombie, sont contre l'accord de libre-échange et nous suggèrent fortement de ne rien signer tant et aussi longtemps que les problèmes liés aux droits de la personne et aux droits du travail, et même certains éléments en matière d'environnement, ne seront pas réglés ou à tout le moins en voie d'être réglés.
J'aimerais connaître votre position à ce sujet.
[Traduction]
S. E. M. Jaime Giron Duarte (Interprétation):
Oui, monsieur le député. En fait, c'est une opinion que nous avons déjà entendu exprimer et nous respectons complètement ce point de vue. Pour ce qui est d'attendre une solution — autrement dit, résoudre les problèmes avant de signer ou d'appliquer un accord de libre-échange — ma réaction a toujours été de répondre par une comparaison. Je présente la Colombie comme un pays qui fait de gros efforts pour surmonter ces difficultés avant de résoudre le problème de la violence intérieure. En ce sens, c'est comme une personne qui tombe en plein milieu de la rivière et qui essaie de regagner la rive à la nage pour se sauver. La question que je poserais dans une telle situation est la suivante: est-il préférable que j'attende que la personne se noie ou que je lui tende la main lorsqu'elle est encore en vie? Je reconnais que les accords de libre-échange n'offrent pas une solution à tous les problèmes, mais ils contribuent à d'autres politiques d'État destinées à surmonter les situations qui compromettent la stabilité d'une nation et du même coup, son développement économique. J'estime dans le cas d'un pays comme la Colombie, qui fait un effort, cela vaut certainement la peine de lui ouvrir la porte et de lui donner sa chance, plutôt que d'attendre et de le laisser retomber dans la situation où il se trouvait au début de cette décennie.
[Français]
Le Congrès américain a refusé d'entériner l'accord de libre-échange avec la Colombie. On sait très bien qu'en matière d'économie, d'affaires et de commerce, les États-Unis n'ont pas nécessairement tendance à agir en boy-scouts. Ils sont là pour gagner de l'argent et faire des échanges rentables. Pour notre part, nous pensons toujours qu'un échange économique est bon dans la mesure où tout le monde en sort gagnant. Or ce n'est pas toujours le cas des États-Unis.
Ils prétendent que leurs décisions se fondent sur les droits de la personne. Il est certain qu'ils font allusion aux droits de la personne, comme ils le font par exemple dans le cas de la Chine, qui leur porte préjudice énormément au chapitre du commerce international. Or je ne pense pas que la Colombie porte énormément préjudice aux États-Unis sur le plan économique.
D'après vous, monsieur le sénateur et monsieur l'ambassadeur, quelle raison motive les États-Unis à ne pas ratifier l'accord de libre-échange avec la Colombie? Ils prétextent que c'est en raison des droits de la personne. Ne pensez-vous pas qu'il y aurait autre chose, par exemple le trafic qui a cours en Colombie? Percevez-vous d'autres intérêts particuliers?
[Traduction]
Peut-être pourrions-nous accorder une minute à chacun de nos témoins.
Serait-il possible d'obtenir une réponse qui ne dépasse pas une minute?
S. E. M. Jaime Giron Duarte (Interprétation):
Merci beaucoup. À mon avis, l'accord avec les États-Unis n'a pas été rejeté, mais il attend la décision du Congrès. Ce n'est pas tant dû au fait que les progrès réalisés dans le domaine des droits de la personne n'ont pas été reconnus. En fait, il est reconnu que nous avons réalisé beaucoup de progrès dans ce domaine.
J'estime que la question du trafic de drogues n'entre pas en considération. L'accord signé avec les États-Unis a été soumis au Congrès à un moment tout à fait particulier de la vie politique. Premièrement, la composition du Congrès américain a changé et, bien sûr, les démocrates ont obtenu la majorité. Deuxièmement, c'est une question qui a été traitée au cours d'une année d'élections, ce qui a politisé le débat. Ce que souhaiterait la Colombie, c'est que les accords soient conclus par des États et non par des partis. Ces accords ne devraient pas avoir un caractère partisan. Je crois que c'est très clair.
L'hon. Jorge Enrique Robledo (Interprétation):
Il est très clair que la majorité démocratique au Congrès des États-Unis et au gouvernement ne souhaite pas approuver un accord de libre-échange avec le gouvernement de la Colombie, et en particulier avec le Président Alvaro Uribe, pour des raisons liées aux droits de la personne, comme ils l'ont bien spécifié. Ils l'ont dit sous toutes sortes de formes. Par exemple, la semaine dernière, le sénateur Patrick Leahy, qui est un sénateur très important aux États-Unis, a encore une fois gelé les ressources allouées à l'armée colombienne en raison des faux positifs dont nous parlions il y a un instant. Voilà la preuve indiscutable qu'il s'agit d'un problème des droits de la personne qui a un caractère politique; nous aussi considérons que c'est une question des droits de la personne.
Un autre accord, absolument identique à l'accord avec la Colombie, qui a été négocié cette année, a en fait été approuvé dans le cas d'un autre pays, le Pérou. Au moment même où il est refusé à la Colombie, ou à M. Uribe, il est accordé au Pérou.
À mon avis, un des aspects négatifs évidents est que si le Parlement canadien décidait d'approuver l'accord, cela reviendrait à absoudre notre gouvernement de toute culpabilité.
Il en va de même pour la Norvège. La Norvège ne voulait pas signer d'accord avec la Colombie pour des raisons touchant aux droits de la personne.
Merci, monsieur le président.
Merci d'avoir bien voulu comparaître devant notre comité.
Cela montre la faiblesse des arguments en faveur de cet accord lorsque le seul élément favorable que peuvent invoquer ses partisans est un sondage discrédité selon lequel le président jouirait d'un large appui. Je pourrais tout aussi bien effectuer un sondage auprès de ma famille et obtenir que 90 p. 100 de ses membres disent que je suis un type formidable, mais je ne pense pas que l'on pourrait utiliser cela comme argument crédible à l'appui de quoi que ce soit.
Sénateur Robledo, je souhaiterais vous poser une série de questions.
Le comité a entendu le témoignage de diverses personnes en Colombie. Comme certains de nos membres sont nouveaux, ils n'ont pas entendu certains de ces témoignages.
Nous avons entendu Gabriel Perez, qui disait « Il est plus facile de créer un groupe armé qu'un syndicat dans ce pays. »
Nous avons entendu Patricia Cespedes, qui nous a dit qu'environ 6,5 millions d'hectares de terres colombiennes sur lesquelles des paramilitaires avaient fait main basse — il s'agissait essentiellement de pauvres qui avaient été chassés de leurs terres par des paramilitaires entretenant, selon les allégations, des liens avec le gouvernement, qui étaient manifestement très intéressés par la possibilité de vendre ces terres à des sociétés canadiennes, par exemple. Cela nous aurait certainement rendu complices des violations continues des droits de la personne qui se produisent là-bas.
Nous avons entendu Mario Gomez, qui nous a dit que des groupes paramilitaires se forment tous les jours, et qu'il y a des milliers de nouveaux paramilitaires en Colombie.
La semaine dernière, Amnistie Internationale a attaqué le gouvernement colombien en lui reprochant d'utiliser le système de justice pour harceler et intimider les défenseurs des droits de la personne.
Comme vous venez de le dire, sénateur Robledo, le nombre de meurtres de syndicalistes et de défenseurs des droits de la personne a doublé en 2008. Les chiffres ne baissent donc pas. Ils montent en flèche. Le nombre des paramilitaires, des meurtres de syndicalistes et de défenseurs des droits de la personne augmente. Il serait ridicule de prétendre que la situation s'améliore. Elle empire.
Ma première question est la suivante. Êtes-vous d'accord avec Hollman Morris, un défenseur des droits de la personne en Colombie, pour dire que cet accord est en fait une récompense accordée aux responsables de ce qui se passe dans la réalité, ces violations constantes et de plus en plus nombreuses des droits de la personne en Colombie?
Deuxièmement, à propos des paramilitaires, êtes-vous d'accord avec l'évaluation de Señora Cespedes qui dit qu'il y a des millions d'hectares de terre sur lesquelles des paramilitaires sont en train de faire main basse?
Troisièmement, vous avez parlé de faux positifs, un terme anodin. Il représente en fait quelque chose d'horrible. Un faux positif est un crime commis de sang-froid. Apparemment, les conservateurs pensent que ce genre de crime est acceptable tant qu'il se produit hors du Canada...
... mais le faux positif est le meurtre d'un innocent.
Avez-vous une idée du nombre de meurtres de pauvres commis en Colombie?
Quatrièmement, le gouvernement colombien et le gouvernement canadien ont conçu un accord prévoyant une amende en cas de violations répétées des droits de la personne. Il s'agit en fait d'une amende pouvant atteindre 15 millions de dollars. Êtes-vous d'accord avec moi pour trouver qu'il est horrible de pouvoir quantifier la vie humaine en attachant un prix aux violations répétées des droits de la personne? Cela revient en quelque sorte à accorder une ristourne pour de telles violations.
À votre avis, cela rendrait-il en un sens le Canada complice de ce qui se passe, de cette évidente augmentation des violations des droits de la personne? C'est ce qui ressort très clairement de ce que disent des organisations réputées. Si le Canada récompense l'administration en signant un accord de libre-échange, pensez-vous que nous sommes en un sens complices de ce qui apparaît très clairement comme une augmentation du nombre des violations des droits de la personne en Colombie?
L'hon. Jorge Enrique Robledo (Interprétation):
Premièrement, disons que l'on peut, à mon avis, expliquer la popularité de M. Uribe, par son flair politique. Je ne citerai pas de noms, mais vous savez certainement qu'il y a eu des chefs d'État dans l'histoire de l'humanité qui ont commis des actes horribles, et qui, à l'époque où ils les ont commis, bénéficiaient de soutien de leurs citoyens. En soi, ce type de soutien ne signifie pas que vous avez raison. Deuxièmement, il est très clair que si la Colombie souhaite signer d'autres accords ou négocier des ALE avec d'autres pays, c'est parce que c'est pour elle un moyen de se faire absoudre, d'obtenir le pardon des Canadiens etc. — une absolution que refusent les démocrates aux États-Unis.
Vous avez donc là en fait un problème d'éthique à résoudre. Il va vous falloir décider de la position à prendre. Choisirez-vous de quantifier les horreurs qui se produisent en Colombie, si bien que quand vous en arriverez à la prise de décisions financières, direz-vous alors, après tout, « les affaires sont les affaires. Continuons. Il y a de grandes sociétés canadiennes qui en tireront un profit; exploitons donc les circonstances »? C'est un dilemme moral qui vous appartient de résoudre vous-mêmes. Je peux vous assurer que si vous décidez d'appuyer l'ALE, ceux qui l'approuveront devront faire face à bien des questions, ici et partout ailleurs, parce que les faits ne mentent pas.
Je tiens à répéter que le gouvernement colombien ne satisferait pas aux critères des garanties démocratiques. Il est également évident, comme vous pouvez le voir très clairement, que la propriété des terres se trouve concentrée par la violence entre les mains de criminels. Beaucoup d'entre eux sont des paramilitaires qui ont eu recours à la violence pour s'approprier ces terres, et le gouvernement de la Colombie ne peut absolument rien faire pour renverser cette situation.
Il y a des millions de personnes déplacées, des personnes qui ont été obligées d'abandonner leurs terres à cause d'actes de violence dont l'objet essentiel et de les déplacer. Les statistiques sont éloquentes. Non seulement le gouvernement de la Colombie ne fait-il rien pour corriger cela, mais il a plus d'une fois essayé de faciliter la légalisation de la propriété de ces terres qui ont, bien entendu, été obtenues par des moyens illégaux.
Maintenant, en ce qui concerne les faux positifs dans les chiffres...
Dans la pratique, le gouvernement approuve-t-il donc sans discussion la prise de contrôle illégale ou forcée de terres?
L'hon. Jorge Enrique Robledo (Interprétation):
Dans la pratique, disons que ce qui se passe en fin de compte, c'est que ces déplacements de populations créent une nouvelle configuration de la propriété foncière en concentrant celle-ci entre les mains d'un très petit nombre de personnes, et le gouvernement national n'a rien fait pour redresser la situation. Quant aux victimes de la violence en Colombie, on ne fait rien, ou du moins, le gouvernement ne fait pas grand-chose. Une loi récemment approuvée a créé une certaine structure définissant les modalités de la propriété foncière en Colombie. Pour ce qui est des faux positifs, il ne s'agit pas simplement de quelques affaires; il y en a un nombre important qui ont été portées devant les tribunaux et qui impliquent 1 500 personnes. Nous parlons là de violations très graves, et nous ne sommes pas les seuls à le dire. Les démocrates américains pensent que ces violations sont très graves; or ce sont là des gens qui connaissent bien le monde des affaires. Ne l'oubliez pas. C'est donc un problème très réel et concret.
L'accord de coopération dans le domaine du travail, accord parallèle dans l'ALE Colombie-États-Unis, ne change rien aux choses. Des amendes sont prévues, mais elles sont nominales ou symboliques; elles ne sont pas réelles. J'espère que personne ne pense que les crimes commis contre des syndicalistes peuvent être résolus en imposant de simples amendes. Ce serait scandaleux. Il serait scandaleux de penser que c'est la manière appropriée de procéder.
Vos neuf minutes sont écoulées. Nous les avons un peu dépassées — à moins que vous ne vouliez faire un commentaire, Excellence.
S. E. M. Jaime Giron Duarte (Interprétation):
Si vous me le permettez, je voudrais faire quelques brèves observations. La première a trait à la cote de popularité du Président Uribe. Je suis d'accord avec ce qu'a dit l'honorable M. Silva. Je ne pense pas, M. Julian, qu'il s'agisse uniquement d'une question d'appui donné par les proches du président. Cette cote exprime le sentiment partagé par la population colombienne. Beaucoup de Colombiens pensent que lorsqu'ils voient cela, cela signifie qu'il y a de l'espoir pour l'avenir de la Colombie.
À propos des faux positifs, je tiens à vous dire qu'il s'agissait manifestement d'une situation dénoncée par le ministre de la Justice en Colombie. Et comme l'a dit le sénateur Robledo, il y a actuellement beaucoup d'affaires en cours devant les tribunaux. Cela signifie que, dans le cas des parapolitiques, ce qui a été mentionné plus tôt, le gouvernement a décidé, comme nous le disons en espagnol, de prendre le taureau par les cornes et de faire face à une situation qui est honteuse pour notre pays et qui montre qu'il est indispensable d'assainir tous les niveaux de gouvernement. Ce sont donc là des situations auxquelles tous les Colombiens sont opposés, mais elles se règlent actuellement au tribunal.
En ce qui concerne l'accord dans le domaine du travail, je crois qu'il permettra d'améliorer la situation. Si vous lisez attentivement le préambule, celui-ci révèle non seulement le désir de préserver les normes et les règlements existants, mais aussi de promouvoir les engagements internationaux; les conventions de l'OIT sont d'ailleurs mentionnées dans le préambule.
Par ailleurs, le système mentionné par M. Julian, relatif aux amendes, mérite d'être lu attentivement, car il se réfère au mécanisme de règlement des différends qui crée plusieurs niveaux de règlement, si bien qu'une personne, si elle peut vraiment montrer que les règlements ont été enfreints, peut intenter un procès à un État. Autrement dit, les cas seront soumis à trois niveaux différents de règlement, l'un d'entre eux permettant de déterminer s'il y a effectivement eu une violation sur le plan commercial. Dans un tel cas, des amendes seront imposées.
Nous parlons là d'une somme de 15 millions de dollars en ce qui concerne les États-Unis, ce qui est naturellement peu si on la compare à l'importance d'une vie humaine comme vous l'avez dit. Mais en fait, dans le cas de la Colombie, 15 millions de dollars représentent l'équivalent du budget du ministère de la Sécurité sociale; il ne s'agit donc pas d'indemniser les violations des droits du travail en imposant une amende; ce que nous voulons, c'est que le montant de cette amende soit versé à un fonds qui devra être réinvesti dans le pays qui a enfreint le règlement afin d'améliorer les conditions de travail. Le sénateur Robledo a dit qu'il fallait améliorer ces lois, et en voici un exemple.
Je vous remercie.
Merci.
Excusez-moi, nous recevons tous des courriels. Il y a apparemment un vote à la Chambre et on nous y appelle.
[Français]
[Traduction]
Je ne comprends pas très bien, mais nous allons être obligés de nous en aller.
Je regrette que le Parti conservateur n'ait pas pu poser de questions. Normalement, nous aurions terminé la ronde. Je propose que le comité se rende directement à la Chambre. Apparemment, la sonnerie a été déclenchée. Je ne sais pas de quel vote il s'agit. Je regrette de devoir interrompre la séance, et d'empêcher le Parti conservateur de poser des questions à nos témoins.
Je vous remercie d'être venus. Cela a été très utile. Merci d'avoir bien voulu comparaître aujourd'hui.
Monsieur Cardin.
[Français]
Monsieur le président, selon la note que je viens de recevoir, le vote se tiendra dans 30 minutes. On en avait encore pour 10 minutes. Cela prend 4 minutes pour aller à la Chambre à partir d'ici. Nous avons des invités, le sénateur et l'ambassadeur, et par respect pour eux, je suis prêt à rester, même 15 minutes, si vous le voulez.
[Traduction]
Bien, merci. C'est nouveau, si vous pensez que c'est une sonnerie de 30 minutes. Je ne le crois pas.
Bien, vous pouvez continuer. Je vous prie d'excuser cette interruption.
Nous allons conclure. Nous entendrons une brève question. Nous disposons de sept ou huit minutes et je vais donc autoriser le Parti conservateur à poser ses questions, mais après cela, il faudra nous rendre dare-dare à la Chambre.
Monsieur Allison.
Merci, monsieur le président.
Je tiens à remercier le sénateur, ainsi que l'ambassadeur, d'être venu aujourd'hui.
Je dirais simplement, pour commencer, que je crois que M. Julian serait probablement ravi d'obtenir 85 p. 100 des votes de sa famille. Je ne sais pas si cela serait possible, mais vous savez...
Nous verrons.
Je voudrais revenir sur les commentaires de M. Silva. Je trouve extraordinaire qu'un président en exercice puisse obtenir 80 p. 100 des voix. Je comprends également qu'il a été utile pour notre comité de se rendre en Colombie afin de mieux comprendre les problèmes qui s'y posent. Cela tient certainement en partie à l'idéologie, aux différences d'opinion et aux positions des différents partis.
Comme vous l'avez dit, monsieur l'ambassadeur — mes questions s'adresseront à vous — ce ne sont certainement pas là tous les éléments du casse-tête; essayer de préparer des accords de libre-échange n'en est qu'une partie. Je sais aussi que le gouvernement a fait beaucoup d'efforts pour essayer d'assurer la réinsertion de différents groupes dans la société. Je sais que le Président Uribe a nommé un conseiller supérieur à la réinsertion sociale et économique. Mes questions porteront là-dessus.
Je comprends bien que la notion de désarmement, de démobilisation, et de réinsertion sociale représente un énorme effort lorsqu'il s'agit de réinsérer et de démobiliser des groupes illégalement armés. Pourriez-vous nous dire quelques mots au sujet de ce processus, de ce qui s'est passé et de ce que le gouvernement essaie de faire pour rétablir la paix? Je sais bien qu'il y a des gens qui se sont trouvés associés à des groupes paramilitaires et à différents groupes illégaux qui essayaient de déstabiliser la société. Qu'a fait le gouvernement pour essayer de les réinsérer dans la société? Je sais que près de 50 000 personnes ont déposé les armes. Cela doit être un défi difficile à relever étant donné que vous n'avez jamais cessé de vous battre pendant des générations. Qu'a tenté de faire le gouvernement pour réinsérer ces personnes dans leurs familles et dans la société? Je sais que la création d'emplois pour ces gens-là est un des aspects du programme.
Je vais vous laisser le reste du temps dont je dispose — je crois qu'il reste au moins cinq minutes — pour faire des commentaires sur ce programme.
S. E. M. Jaime Giron Duarte (Interprétation):
Merci beaucoup. Merci d'avoir posé cette question. Il est évident que c'est un des programmes que le bureau du Président de la République a lancé, et comme vous l'avez fort justement dit, un conseiller principal auprès du président pour les questions de réinsertion et de réconciliation a été nommé. Il se fait que ce conseiller principal se trouvait à Ottawa le mois dernier et qu'il a eu l'occasion de s'entretenir avec des représentants des médias et de la société civile et de leur présenter le programme. C'est un programme qui se déroule dans un climat de vif enthousiasme et offre de grandes opportunités, mais il a manifestement d'importants défis à relever.
La poursuite de l'objectif de ce programme s'appuie en fait sur deux cadres en ce qui concerne la réinsertion. Dans le premier, grâce à des organismes tels que l'OIM — l'Organisation internationale pour les migrations — le gouvernement de la Colombie reçoit une aide pour assurer la réinsertion et la reprise en charge des enfants de moins de 18 ans qui ont été sauvés des groupes armés illégaux en Colombie. Le programme est animé par l'institut colombien pour le bien-être des familles, qui est essentiellement chargé de poursuivre les objectifs du conseiller présidentiel en matière de réinsertion.
Que fait ce programme de réintégration en Colombie? Il a pour objet de s'occuper d'une population d'individus qui ont quitté les rangs des groupes illégaux. Je parle là d'un groupe, comme vous l'avez dit, de 50 000 personnes dont l'âge moyen est de 25 ans. Ce sont donc des individus qui sont déjà sortis de l'enfance et de l'adolescence.
Le programme a deux objectifs: premièrement, fournir à ces personnes les soins psychologiques et physiques requis pour les aider à se rétablir et les préparer pour la seconde étape, celle de l'acquisition de compétences qui leur permettra d'avoir des activités légales. Le programme vise, d'une part la réinsertion de ces individus afin de leur permettre de trouver un moyen de s'occuper en ayant des emplois décents et d'autre part, leurs familles.
Pourquoi ciblons-nous aussi les familles? Ce programme nous a permis de constater qu'un grand nombre de ceux qui avaient rejoint les rangs des groupes illégaux l'avaient fait parce que leur environnement familial n'était pas de nature à les encourager à rester chez eux. Ils avaient parfois agi ainsi par esprit d'imitation ou parce qu'ils avaient besoin de trouver du travail et un certain style de vie.
Le processus vise donc deux groupes: les personnes réinsérées et leurs familles, de manière à ce qu'une fois le programme terminé, ces personnes peuvent retourner dans leurs familles et être accueillies par elles. Cependant, le programme vise aussi ce que nous pourrions appeler l'éducation de la société colombienne, en particulier, celle des propriétaires d'entreprise. Le but poursuivi est de les débarrasser du sentiment de crainte qui a été créé chez eux et continue à l'être, la crainte que l'on éprouve en accueillant dans son entreprise une personne ayant appartenu à un de ces groupes armés; le but est également d'offrir une place aux personnes qui ont quitté le programme afin de leur permettre de devenir des membres utiles de la société.
Quel est le problème? Le problème est que ce programme couvre actuellement 31 000 des 50 000 personnes qui ont été démobilisées. Évidemment, ce qui se passe, c'est qu'il y a de nombreuses désertions. Certains commencent à suivre le programme mais ne se sentant pas motivés, ils l'abandonnent. C'est préoccupant, car la question est de savoir où vont ensuite ces individus. Ils réintègrent fréquemment des groupes illégaux ou forment des gangs de criminels communs.
Le programme répond cependant à ces préoccupations. Il bénéficie du soutien de la communauté internationale. En ce qui concerne la question du désarmement, de la démobilisation et de la réinsertion (DDR), il se fait que le mois prochain, à la Colombie sera l'hôte de la première conférence portant sur ce sujet dans la ville de Carthagène. L'objectif de la conférence est d'assurer un échange de vues entre les experts en DDR de tous les pays qui ont été affectés par un conflit, de manière à déterminer les meilleures pratiques possibles, franchement et pas nécessairement avec un engagement de la part des gouvernements, et de manière à ce que l'expérience colombienne puisse servir aux populations touchées par des conflits dans d'autres pays.
Merci.
Je regrette, mais je crois que nous sommes à court de temps.
Merci encore d'avoir posé cette question, monsieur Allison.
Merci de cette réponse.
Encore une fois, je remercie nos visiteurs d'être venus aujourd'hui.
[Français]
[Traduction]
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