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J'aimerais vous remercier, monsieur le président et chers membres du Comité, de votre invitation à comparaître aujourd'hui au nom des travailleurs et travailleuses des TCA et de la construction navale, local 1. Le préavis était court, alors pardonnez-moi si j'ai quelques lacunes. J'ai griffonné quelques idées sur un bout de papier afin de ne pas m'éloigner du sujet.
Je suis moi-même un représentant de la troisième génération d'ouvriers de chantiers navals. Depuis l'époque de mes aïeux, les choses ont beaucoup changé. J'aime ce travail; il m'apporte énormément. C'est comme un prolongement de l'enfance. Vous construisez quelque chose dont le Canada a besoin et ensuite vous pouvez le voir quitter le port. Cela donne beaucoup de fierté.
J'ai grandi avec les histoires que mon grand-père et mon père nous racontaient autour de la table pendant les repas; ils nous parlaient des chantiers navals et du bon vieux temps. C'étaient des histoires colorées. Il y avait plus de 1 000 ouvriers sur le chantier qui travaillaient 24 heures sur 24. Vous pouvez imaginer combien certaines anecdotes pouvaient être savoureuses.
Depuis cette époque, l'industrie de la construction navale canadienne, qui était subventionnée, s'est tournée peu à peu vers le libre marché, la déréglementation et tout ce qui s'ensuit. Le résultat est que les constructeurs navals du Canada sont loin de partir sur le même pied que leurs concurrents étrangers.
Les efforts menés par l'OCDE et l'OMC pour permettre à cette industrie de rivaliser à armes égales avec ses concurrents n'ont pas permis d'éliminer ni de limiter les subventions et autres problèmes auxquels nous sommes confrontés. Les constructeurs navals canadiens font systématiquement face à des concurrents dont la production est subventionnée, qui reçoivent des aides généreuses, bénéficient d'une protection de leurs marchés et dont les intérêts appartiennent à l'État. Et il s'avère que le marché potentiel le plus grand du Canada — en l'occurence les États-Unis — nous est complètement fermé à cause de la Jones Act.
Les politiques canadiennes ne soutiennent pas cette industrie à la hauteur de ses besoins dans ce contexte de globalisation des marchés. Elles laissent les constructeurs navals canadiens se livrer concurrence sur les marchés intérieurs essentiellement. Dans notre secteur, nous appuyons les transports, les pêcheries, l'industrie pétrolière et gazière et, par-dessus tout, les marchés publics.
Malheureusement, depuis quelque temps déjà, tous ces secteurs ne font pas preuve d'un grand dynamisme. Du coup, l'industrie de la construction navale se concentre sur les services et l'entretien de navires existants. Il lui est donc très difficile d'améliorer ses modes de production, de retenir des travailleurs qualifiés et d'attirer des investissements.
En ce moment, la demande intérieure est quelque peu refoulée. Je pense que nous avons une occasion inespérée de prendre le temps, en cette période de turbulence économique, de créer des emplois qualifiés de qualité — oui, de créer des milliers d'emplois spécialisés dans la construction navale dont le Canada a grandement besoin actuellement. Le Canada a besoin de ces navires, et nous serions très heureux de les lui construire. Cela va des navires de soutien interarmées aux bateaux de la garde côtière, en passant par les patrouilleurs arctiques et les transbordeurs, sans parler du renouvellement de la flotte de cargos hors mer.
Ce qui est désolant, c'est que si le gouvernement n'intervient pas, la situation pourrait continuer de se dégrader et notre industrie péricliter. Il faut adopter des politiques affirmant que la construction navale est une industrie stratégiquement importante pour la souveraineté de notre pays.
Pensez-y, c'est très sérieux. Avant de faire quoi que ce soit, nous devons prendre un peu de recul face à la situation et reconnaître que la construction navale est essentielle pour le Canada. Notre pays a le littoral le plus long du monde; il est entouré par trois océans et jouit d'un réseau fluvial intérieur immense, sans parler des Grands Lacs. Les implications en matière de défense, de transport et de commerce devraient êtres évidentes pour tout le monde.
Les gouvernements des principaux pays constructeurs navals, notamment ceux des États-Unis, de la Norvège, de l'Islande, du Japon, de la Corée, et plus récemment de la Chine, sont depuis longtemps intervenus pour bâtir et soutenir leur industrie et créer une économie nationale basée sur la construction navale. Cela prend de nombreuses années; on utilise toutes sortes de politiques d'approvisionnement: subventions, allégements fiscaux, garanties de prêts, développement des infrastructures et protection tarifaire. Toutes ces mesures ont permis à ces pays de s'approprier de larges parts de marché sur la scène internationale, et ce de manière déloyale. Avec ces volumes de travail, ils ont continuellement raffiné leurs méthodes de production et ont amélioré la santé globale de leurs industries.
Moi qui connais toute la situation, je trouve très dérangeant d'entendre certains politiciens canadiens dire de notre industrie qu'elle est incapable de rivaliser avec les chantiers navals asiatiques et européens. Ces chantiers navals ont profité des largesses de leurs gouvernements qui contreviennent clairement aux règles fixées par l'OCDE et par l'OMC que le Canada respecte religieusement. Je pense que notre pays est l'un des seuls à suivre la réglementation au pied de la lettre, mais je pourrais me tromper.
Notre industrie de la construction navale et des services maritimes a été sacrifiée, je crois, à cause de l'absence de politiques adéquates de soutien, et aussi parce que nous n'avons pas été en mesure de régler certains problèmes découlant d'ententes signées par le passé, je veux parler de la Jones Act des États-Unis ainsi que des accords avec le Chili, dans le cadre de l'ALENA. Ces accords ont entraîné de lourdes pertes pour notre industrie.
Je sais que mon intervention aura été brève, mais pour conclure, j'exhorte le Comité à ne pas aller de l'avant avec cette entente, à en exclure la construction navale ou à prendre certaines dispositions avant d'aller plus loin.
J'aurais aimé vous faire un exposé un peu plus structuré; j'aurais voulu être accompagné d'Andrew et peut-être de l'économiste de notre syndicat. J'aurais souhaité aussi pouvoir vous donner plus de chiffres et entrer davantage dans le détail, mais le temps a manqué. Je trouve néanmoins important d'être ici pour vous dire ces quelques mots au nom de ceux que je représente.
J'aimerais maintenant vous donner quelques chiffres approximatifs que j'ai rassemblés. C'est un chantier naval de taille moyenne. Il fonctionne à environ 40 ou 50 p. 100 de sa capacité avec à peu près 500 employés; la masse salariale moyenne annuelle tourne autour de 24 millions de dollars; les impôts fonciers se chiffrent à 400 000 $; les charges sociales, les cotisations versées au RPC et à l'assurance-emploi gravitent autour de 9 millions de dollars; l'achat de biens et services locaux en Nouvelle-Écosse pour ce chantier naval de taille moyenne représente environ 35 millions de dollars; et les dépenses d'immobilisations depuis 1995 sont approximativement de 30 millions de dollars.
Je le répète, c'est un chantier naval qui ne fonctionne qu'à 40 p. 100 de sa capacité. Il jouit donc d'une importante marge de manoeuvre, et les chiffres que je viens de vous donner sont autrement plus grands pour un chantier naval comme celui de Davie, qui est beaucoup plus imposant.
Voici quelques recommandations concernant les politiques : Nous avons besoin de mesures concrètes comme celles dont je vais vous parler. Il existe déjà plusieurs programmes, comme le programme d'amortissement accéléré et le mécanisme de financement supplémentaire. Je crois que si nous combinions les deux, ce serait très avantageux pour la construction navale. Je considère que des politiques fiscales favorables et peut-être le prolongement du financement...
Il y a des gens capables de financer une voiture sur plus de 10 ans et jusqu'à 20 ans. Nous parlons d'un navire qui a une durée de vie de 30 à 40 ans et qu'on ne peut financer que sur 12 ans. Il faut étendre la période de financement et poursuivre les politiques gouvernementales qui favorisent la production au Canada.
Si nous prenons des mesures dans ce sens et continuons d'appliquer la stratégie d'EDC que nous avions utilisée pour Davie... Je pense que c'était un grand pas en avant. Nous avons encouragé nos chantiers navals à vendre leurs produits à l'étranger. Ces temps-ci, nous parlons pour la première fois d'un déficit réel de la balance commerciale — nous exportons moins que nous importons —, et je crois que c'est parce que nous dépendons beaucoup des matières premières et que la demande pour ces produits de base diminue. Nous devons donc favoriser la production au Canada et exporter, et la construction navale fait partie de l'équation.
Je le répète, il est important que nous nous demandions une chose: Que pouvons-nous fabriquer de plus gros au Canada qu'un navire, qui permette d'employer plus de gens et de créer des emplois qualifiés?
La dernière chose que j'aimerais préciser, c'est que ce n'est pas une industrie en déclin. Je l'ai déjà entendu dire. C'est une industrie à la fine pointe de la technologie. Elle fait appel à des ouvriers qualifiés, des ingénieurs de haut niveau et des concepteurs hors pair. Pour maintenir ce niveau de qualité, il nous faut un travail régulier.
Je pense que cela demande la mobilisation du gouvernement, de l'industrie et des gens engagés dans la réussite de ce secteur. Je pense que si nous prenons le taureau par les cornes, nous pourrons améliorer la santé globale de cette industrie. Nous pouvons accroître les investissements. Nous pouvons soutenir la croissance de l'industrie et, tôt ou tard, éliminer les tarifs douaniers. Mais d'abord, nous devons prendre ces mesures. Nous ne pouvons continuer de signer des accords commerciaux et remettre à plus tard les discussions sur les politiques. Ces politiques doivent être adoptées avant toute chose. Nous devons saisir l'occasion de prendre un nouveau départ. Avant de pouvoir être compétitifs, nous devons nous relever.
Vous nous demandez de sauter sur le ring et de nous mesurer à un lutteur professionnel, mais nous ne nous sommes jamais battus. Ces gens ont de l'expérience, ils rivalisent entre eux. Ils ont de la pratique, alors que nous ne sommes que des amateurs.
Laissez-nous entrer dans le jeu. Nous pouvons livrer concurrence sur les marchés à créneau internationaux. Nous ne serons pas des chefs de file mondiaux dans la construction navale, mais nous pouvons prendre ces marchés. Nous sommes capables de contrôler notre production intérieure et je pense que nous pourrons réussir.
Ce sera le mot de la fin. Je tiens à rappeler que tout s'est fait précipitamment, que je n'ai pas eu beaucoup de temps pour me préparer davantage et que j'aurais aimé aussi me faire accompagner de quelques-uns de mes collaborateurs.
Merci, monsieur le président.
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Merci, monsieur Risser.
Avant de poursuivre, j'aimerais faire un rappel quant à notre façon de procéder. En plus du témoin que nous venons tout juste d'entendre, nous accueillons aujourd'hui les représentants de deux ministères, soit ceux de l'Industrie et des Finances.
Je tiens à rappeler aux membres du Comité, et surtout à nos nouveaux membres, que les fonctionnaires que nous recevons aujourd'hui, comme ceux qui comparaîtront ultérieurement, ne sont pas ici pour discuter des politiques gouvernementales. Ils sont chargés de la mise en oeuvre de ces politiques et peuvent vous entretenir du fonctionnement des processus au sein de leur ministère et vous fournir des renseignements de base dans différents dossiers. Nous allons donc garder nos questions politiques pour les ministres lors de leur éventuelle comparution devant le Comité.
Comme le thème de notre séance d'aujourd'hui semble être exclusivement la construction navale, nous recevons, du ministère de l'Industrie, Gary McGee, qui est directeur de la défense et de la marine au sein de la Direction générale de l'aérospatiale, de la défense et de la marine. Il est accompagné de M. Émile Rochon, qui est coordonnateur principal des programmes au sein de la même direction générale à Industrie Canada.
Du ministère des Finances, nous recevons Dean Beyea, chef principal, Division de la politique commerciale internationale, Finances et échanges internationaux; Patrick Halley, chef, Accès aux marchés et politique tarifaire; et Kei Moray, qui est directrice adjointe de la Division de l'impôt des entreprises au sein de la Direction générale de la politique de l'impôt.
Nous avons donc des ressources très intéressantes à notre disposition. Nos témoins sauront certes trouver réponse à la plupart de vos questions. Nous allons débuter.
Je rappelle à chacun que les quatre intervenants du premier tour auront droit à sept minutes pour les questions et les réponses. La série suivante en sera une de cinq minutes. Je pense que nous devrions avoir le temps pour quelques rondes de questions aujourd'hui. Nous allons respecter rigoureusement, avec l'aide de notre greffier, chronomètre en main, le temps alloué à chacun tel que convenu par le Comité.
Nous commençons aujourd'hui avec M. Bryson qui dispose de sept minutes.
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Merci, monsieur le président. Je vais partager mon temps avec mon honorable collègue, M. Harris.
Merci à nos témoins.
J'estime important de travailler ensemble de manière constructive. Pour remettre les pendules à l'heure, je reviens aux commentaires de mon honorable collègue de la Colombie-Britannique concernant les traversiers rapides. Comme je suis moi-même de cette province, je peux vous dire que ce fut l'un des plus grands fiascos du gouvernement du NPD. Pour éviter d'autres fiascos semblables, nous devons nous assurer que les gouvernements conjuguent leurs efforts pour aller de l'avant.
Notre comité s'est déjà penché abondamment sur cet accord lors du 39e Parlement. Je sais que de nouveaux membres se sont greffés au Comité. Pour la gouverne de ceux-ci et pour rafraîchir la mémoire aux autres, je souligne qu'il a été alors question d'exclure l'industrie de la construction navale. Les États-Unis n'exemptent pas la construction navale de leurs accords commerciaux, mais le Canada a été en mesure de se ménager un privilège d'achat chez nous.
Dans le budget de 2009, qui suit actuellement le processus parlementaire, 175 millions de dollars sont prévus pour les approvisionnements de la garde côtière. Et il faut se réjouir encore davantage du fait qu'au cours des 30 prochaines années, tant la garde côtière que la marine canadienne vont procéder à un renouvellement majeur de leur flotte pour des investissements totaux estimés à quelque 43 milliards de dollars sur 30 ans — des chiffres que nos fonctionnaires pourront peut-être confirmer.
Il faut donc prévoir une renaissance de notre industrie de la construction navale. Cela pourrait ouvrir des possibilités pour vos enfants et vos petits-enfants, et nous devons faire le nécessaire pour que nos chantiers navals puissent compter sur du personnel et des gens de métier qualifiés pour accomplir tout le travail qui les attend au détour de cette période de transition.
Je sais que les données sur nos échanges commerciaux ont été rendues publiques hier par Statistique Canada et qu'elles soulèvent des préoccupations quant à notre situation à titre de nation commerçante. Le Canada est reconnu comme un pays actif au sein d'un système commercial libre et équitable. Nous avons maintenu une bonne relation avec les États-Unis, mais nous avons perdu du terrain dans nos accords commerciaux avec d'autres pays et nous devons faire en sorte que nos industries bénéficient de chances égales de prospérer.
Ma question s'adresse aux représentants des ministères. Pourraient-ils nous indiquer dans quelle mesure ils croient que l'accord de libre-échange avec l'Europe pourrait permettre aux entreprises, aux industries et aux provinces canadiennes, ainsi qu'aux Canadiens en général, d'entretenir des liens économiques plus étroits avec l'Union européenne?
Qui veut répondre à cette question?
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Merci, monsieur le président.
Permettez-moi également de souhaiter la bienvenue aux témoins.
En 2001 ou 2002, je crois... le NPD nous a damé le pion et une motion a été adoptée, avec l'appui du gouvernement libéral de l'époque, afin qu'on effectue un examen de la construction navale, parce que nous avions certaines préoccupations. Je ne sais pas si vous vous en souvenez, monsieur Risser. Quoi qu'il en soit, cela s'est produit sous le gouvernement de John Manley, dont j'étais le secrétaire parlementaire.
Je commence par apporter cette précision, étant donné que vous avez déclaré dans votre exposé que nous devions reconnaître l'importance de l'industrie de la construction navale pour le Canada. Je suis d'accord avec vous.
Je pense que vous conviendrez avec moi que toutes les autres industries, par exemple celle de l'aéronautique ou de l'automobile, sont d'égale importance; ce n'est qu'une question de perspective. Il n'y a pas de construction navale chez moi, à Scarborough, mais il y a une industrie automobile. Je crois qu'elle est importante pour mes concitoyens, tout comme la construction navale peut l'être pour les gens vivant près de chez vous. C'est pourquoi nous avons appuyé cet examen.
Maintenant, vous avez mentionné un élément ou deux. Tout d'abord, je suis impressionné par le fait que vous soyez un ouvrier de chantiers navals de troisième génération. Je vous lève mon chapeau. Mais vous reconnaîtrez avec moi que la manière d'approcher le travail de votre père et de votre grand-père, ou les méthodes de travail employées après la Seconde Guerre mondiale, diffèrent totalement de la façon de travailler de votre génération. Les modes de financement, de construction des bateaux et tout le reste, sont différents. Êtes-vous d'accord avec moi?
Une voix: Prenez le temps que vous voulez, maintenant.
M. Gerald Keddy: Pourvu que je ne dépasse pas cinq minutes, n'est-ce pas?
Bienvenue à tous nos témoins d'aujourd'hui, et bien sûr à M. Risser.
Karl, j'apprécie le fait que vous soyez un ouvrier des chantiers navals de la troisième génération. Dans le monde réel, j'étais de la cinquième génération d'une famille de fermiers. Il est très important d'avoir les deux pieds sur terre. Vous-même et une partie de vos travailleurs syndiqués faites partie de mes concitoyens, alors j'apprécie votre perspective. En même temps, je comprends le point de vue de M. Cannis ainsi que d'autres commentaires qui ont été formulés.
Nous avons ici une situation... Et je vais faire une remarque. Nous avons fait fonctionner nos chantiers pendant des années — je m'y connais un peu en matière de chantiers navals au Canada, puisque j'ai passé une décennie de ma vie en mer, sur des plates-formes pétrolières et des bateaux de ravitaillement, à 50 p. 100, avec une protection. Durant cette période, vous avez absolument raison, nous n'avions pas de politique sur la construction navale. Nous nous sommes donc embarqués dans des ententes de libre-échange avec d'autres nations dans le monde pour éviter de dépendre des échanges avec les États-Unis dans une proportion de 80 p. 100.
Nous avons tenté d'évaluer les impacts pour la construction navale. Un certain nombre de mesures que vous demandez sont là-dedans. Nous investissons 50 millions de dollars de plus dans un mécanisme de financement structuré. Nous avons permis l'application du programme d'amortissement fiscal accéléré. Nous avons présenté, pour la première fois en des décennies, une politique d'approvisionnement au Canada relativement à la construction navale qui totalise 43 milliards de dollars. Deux contrats ont été attribués jusqu'ici — un de 351 millions de dollars à Washington Marine Group, en Colombie-Britannique, et un autre de 549 millions de dollars qui est allé au chantier naval de Irving. Et d'autres contrats sont en vue.
Je ne désapprouve pas vos commentaires sur la souveraineté. J'estime qu'il y a lieu de défendre l'idée de la souveraineté dans l'industrie de la construction navale en ce qui a trait à notre propre approvisionnement. Mais ce que je tente de faire valoir concernant un certain nombre de problèmes dont vous avez parlé, c'est que nous avons pris des moyens. Maintenant, peut-être n'avons-nous pas suffisamment progressé à votre goût, mais je pense que nous avons fait les trois quarts du chemin, si ce n'est tout le chemin, dans certains cas.
On a donc ce problème que soulève la protection tarifaire d'une durée de 15 ans, la plus longue protection que nous ayons jamais négociée pour un accord commercial dans l'histoire du Canada. Sur cette période de 15 ans, nous avons 10 années de protection pour des produits moins sensibles, et trois ans de protection totale.
Vous savez, si l'on considère la question de la souveraineté, il y a là une dimension d'approvisionnement. Nous avons protégé l'approvisionnement du gouvernement. Il est question d'une industrie qui exige du temps pour pouvoir livrer concurrence. Jusqu'à il y a quelques années, les Norvégiens, par exemple, avaient un avantage. Eh bien, il y a trois ou quatre ans, ils ont mis fin à leurs subventions. Maintenant, l'équivalent de trois années de subventions sont débloquées. Ils ont eu beaucoup plus de temps que cela, je le comprends, et j'en conviens avec vous. Mais nous ne pouvons rien y faire. C'est quelque chose qui aurait dû se produire il y a 20 ou 30 ans, mais cela n'est pas arrivé.
Nous pouvons seulement protéger ce que nous avons aujourd'hui, aller de l'avant progressivement et offrir des emplois et des débouchés. En ce moment même, nos chantiers navals — je dois le préciser — fonctionnent à 40 ou 50 p. 100. Nous avons encore une protection en ce qui les concerne, et nous avons tous ces contrats gouvernementaux. J'aurais donc tendance à croire qu'ils pourront s'adapter à ces 15 années de protection qui sont prévues là-dedans.
Je suis totalement d'accord avec vous quant au fait que nos travailleurs des chantiers navals comptent parmi les meilleurs au monde, sans conteste, et nous l'avons dit à la Chambre. Alors que tous les autres partis déclaraient que nous devrions adopter des mesures protectionnistes, j'ai soutenu que nous pouvions livrer concurrence n'importe où, n'importe quand, mais qu'il fallait nous rendre là. Or, nous en sommes là maintenant. Cet accord de libre-échange a été négocié. Nous avons entendu des témoins sur la question. Nous avons eu de longues discussions. Tôt ou tard, il nous faudra aller de l'avant.
S'il me reste du temps, j'aimerais poser une question.
Une voix: C'était tout un discours.
M. Gerald Keddy: M. Brison a posé une question au sujet des acheteurs étrangers qui étaient en mesure d'accéder au mécanisme de financement structuré et à la déduction pour amortissement accéléré. Ce n'est pas ce que j'ai compris. Quelqu'un pourrait-il faire la lumière là-dessus?
Bien que des membres de la famille Holder qui vivaient au Nouveau-Brunswick aient été des constructeurs navals il y a de cela plusieurs générations, monsieur Risser, je ne viens pas du milieu de la construction des navires, alors je ne peux pas me réclamer de votre vécu. Cela dit, j'apprécie la présence de tous les témoins aujourd'hui.
Tandis que je parcourais tous les documents concernant l'AELE, et surtout la question de la construction navale, j'ai entendu la comparaison qu'on a faite entre l'industrie de la construction navale canadienne et celle de la Norvège, ce qui a représenté une bonne partie de la discussion aujourd'hui. On dirait que les industries respectives de nos deux pays sont semblables, car elles sont spécialisées dans la production de navires de petite et moyenne taille.
Le gouvernement de la Norvège, encore une fois, d'après les renseignements dont je dispose, a indiqué qu'il éliminerait ses programmes de subventions à l'industrie de la construction navale, ou du moins, c'est ce qu'il a fait en 2005. La Norvège a réitéré cette promesse quelques fois depuis, et maintenant, nous en sommes à un point où... J'ai été frappé par un commentaire de l'un des fonctionnaires; je crois qu'on faisait référence au chantier naval de Davie et au fait que le Canada était aussi productif que n'importe quel constructeur naval norvégien. Je trouve que c'est incontestable, mais voici ma question.
Compte tenu des remarques de M. Keddy, et de la référence au fait qu'il y aura un certain nombre de projets maritimes qui totaliseront quelque 43 milliards de dollars au cours des 30 prochaines années, si nous avons une capacité d'environ 50 p. 100, ou si nous utilisons environ à 50 p. 100 nos chantiers navals, dans quelle mesure a-t-on déterminé que cette politique sur l'approvisionnement augmentera cette capacité? Restera-t-elle à 50 p. 100? En avez-vous une idée, du point de vue des prévisions?
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Monsieur le président, la manière d'aborder la question chez les conservateurs me laisse un peu perplexe. Depuis que le projet de loi a été adopté en première lecture, nous n'avons entendu qu'un seul témoin externe à propos de l'AELE. Souvenez-vous que nous n'avons pas invité de témoins à ce sujet lors de la dernière législature. C'est en partie la raison pour laquelle le projet de loi est mort au
Feuilleton. Nous n'avons entendu qu'un seul témoin, Karl Risser, à ce propos.
M. Brison a tout à fait raison. Si nous voulons assumer nos responsabilités envers les Canadiens, la moindre des choses est d'entendre plus d'un témoin externe.
La tournure qu'a prise le débat me préoccupe, puisqu'après avoir entendu un seul témoin, les conservateurs semblent vouloir le faire adopter à toute allure. Cela me déconcerte; les répercussions sur les emplois canadiens sont pourtant considérables.
Quant à la motion de M. Brison, je ne conçois aucune raison pour laquelle l'on puisse s'y opposer. Elle vise simplement à ce que le Comité fasse son travail. Cependant, si les conservateurs nous reçoivent de la même façon chaque fois que nous tentons d'inviter des témoins et qu'ils essaient de faire adopter le projet de loi à toute allure, quelles qu'en soient les conséquences, j'ai raison de m'inquiéter.
Monsieur le président, mes observations s'adressent au secrétaire parlementaire. À la Chambre, le ministre du Commerce international a déclaré qu'il nous fallait parler aux personnes qui ont soulevé des questions à propos de l'AELE. Il a dit qu'elles avaient peut-être changé d'idée.
La responsabilité du Comité est de rappeler ces témoins et de voir si c'est le cas. Le ministre semblait le laisser entendre — que les gens ont changé d'avis à propos de l'accord.
En tant que comité, nous avons le devoir de travailler avec diligence et de nous acquitter de notre responsabilité fiduciaire envers les Canadiens, ce qui signifie qu'il faut entendre des témoins. Les conservateurs, le gouvernement minoritaire, vont devoir comprendre que nous allons faire notre travail et dresser une liste de témoins.
La motion relève du bon sens, et c'est pourquoi je l'ai appuyée. Je crois que M. Brison la met de l'avant en usant de la prudence que doit avoir un membre du Comité. De là à affirmer que le Comité a fait l'examen du projet de loi — je suis désolé, mais ce n'est pas le cas. Nous n'avons entendu qu'un témoin externe jusqu'à présent, en deux législatures.
Sauf votre respect, en ce qui a trait au projet de loi, il nous faut prendre nos responsabilités, ce qui signifie que nous interrogerons des témoins et que nous allons nous pencher sur les répercussions de l'accord.
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Je vous remercie, monsieur le président.
Je serai bref en vous disant seulement que je fais miens les propos de mon collègue, Scott Brison. Qui plus est, je ne suis souvent pas d'accord avec le NPD, mais je dois dire que, pour une fois, les commentaires de M. Julian reprennent ce que j'allais dire, mot pour mot. Je suis tout à fait du même avis.
J'estime que la motion est recevable, mais en ce qui a trait à la présence d'un autre ministre, je ne crois pas qu'il soit sage de faire comparaître les deux ministres devant le Comité pendant la même séance, et je doute que nous ayons assez de temps pour le faire. Je propose d'y remédier en organisant deux séances distinctes pour entendre les deux ministres individuellement.
En outre, j'aimerais souligner ceci. La construction navale continue de relever de ce ministère. Du moins, c'était le cas lorsque j'étais secrétaire parlementaire du ministre de l'Industrie. Est-ce toujours le cas? Le secrétaire parlementaire pourrait-il me répondre?
Dans l'affirmative, il serait alors sensé de faire comparaître le ministre compétent en matière de construction navale, contrairement à ce que semble avoir dit mon collègue, le secrétaire parlementaire. Il importe que nous l'interrogions. Comme M. Julian l'a clairement souligné, nous avons des questions à poser et nous ne pouvons pas nous limiter à un seul témoin.
Je crois que c'est la responsabilité du Comité, sans quoi comment voulez-vous qu'on puisse regarder les intéressés dans les yeux par la suite? Que ce soit des gens de ma circonscription de Scarborough ou d'ailleurs, là n'est pas la question; ils se tourneraient vers moi de toute façon, qu'ils viennent de Nouvelle-Écosse ou d'ailleurs. Je suis dans l'obligation de leur dire la vérité, et je n'aurais pas la conscience tranquille si je leur disais que je n'ai pas entendu de témoins et que je n'ai pas fait mon travail.
Voilà le fond de ma pensée, monsieur le président.