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HESA Réunion de comité

Les Avis de convocation contiennent des renseignements sur le sujet, la date, l’heure et l’endroit de la réunion, ainsi qu’une liste des témoins qui doivent comparaître devant le comité. Les Témoignages sont le compte rendu transcrit, révisé et corrigé de tout ce qui a été dit pendant la séance. Les Procès-verbaux sont le compte rendu officiel des séances.

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CANADA

Comité permanent de la santé


NUMÉRO 037 
l
2e SESSION 
l
40e LÉGISLATURE 

TÉMOIGNAGES

Le lundi 19 octobre 2009

[Enregistrement électronique]

(1530)

[Traduction]

    Bonjour à tous et à toutes.
    Soyez le bienvenu, Dr Martin. C'est un plaisir de vous accueillir parmi les membres notre comité.
    Je souhaite la bienvenue à nos témoins d'aujourd'hui. Nous sommes très heureux que vous puissiez venir nous donner un aperçu de l'état de préparation de la collectivité au virus H1N1. Comme nous étudions à fond cette question, nous sommes heureux d'avoir un nouveau point de vue aujourd'hui.
    Je vais demander à un membre de chaque organisation de nous présenter un exposé de 10 minutes. Si vous voulez partager votre temps de parole, je n'y vois aucun inconvénient. C'est même ce que je vous suggère afin de pouvoir dire tout ce que vous voulez. Ensuite, il y aura deux séries de questions. Si deux personnes prennent la parole, elles auront chacune cinq minutes. Prévoyez donc votre temps de parole en conséquence.
    Nous allons commencer immédiatement les exposés, après quoi nous entamerons un premier tour de sept minutes.
    Commençons par le Dr Anand Kumar. Je vous souhaite la bienvenue. J'aimerais beaucoup que vous vous présentiez, docteur.
    Je vous remercie de m'avoir invité à venir témoigner aujourd'hui.
     Je m'appelle Anand Kumar. À titre d'information, je possède des compétences assez particulières pour vous parler de la menace d'une pandémie de grippe H1N1. Je suis chercheur et spécialiste en soins intensifs à l'Université du Manitoba et l'un des quelque douze médecins au Canada à avoir reçu une formation en médecine de soins intensifs et en maladies infectieuses.
    Comme vous le savez tous, le Canada est aux prises avec une épidémie importante de grippe H1N1, qui constitue le prélude à la première pandémie de grippe depuis plus de 40 ans. Durant la première vague d'éclosion, ce printemps, au Manitoba, plus de 50 patients ayant contracté la grippe H1N1, dont la plupart étaient jeunes et en santé, ont été admis aux services de soins intensifs de Winnipeg en raison d'une pneumonie virale grave accompagnée d'une proportion exceptionnelle de lésions pulmonaires, d'insuffisance rénale et parfois, d'un état de choc. Ils étaient tous en danger immédiat de mort; huit sont décédés, soit environ 20 p. 100.
    Les ressources des services de soins intensifs et des hôpitaux ont été mises à rude épreuve durant l'épidémie. Je le sais parce que j'étais là et que j'ai traité, avec plusieurs de mes collègues, bon nombre des patients atteints durant la période la plus grave de leur maladie. On s'inquiète, à juste titre, du fait que l'épidémie au Manitoba n'était qu'un prélude à la pandémie qui commence à frapper cet automne.
    Les cas enregistrés au printemps au Manitoba et ceux, moins nombreux, enregistrés dans l'ensemble du pays au cours de l'été pourraient nous aider à tirer des enseignements importants afin de répondre à la menace de la grippe H1N1 à l'avenir. Parmi les éléments clés observés, on constate que les adolescents et les adultes, surtout les femmes, qui se portent relativement bien sont les principaux groupes exposés au risque de développer une maladie grave et de mourir, un cas de figure très inhabituel.
    De plus, les communautés des premières nations, les personnes souffrant d'obésité et les femmes enceintes présentent un risque particulièrement élevé. Selon ce que nous avons constaté jusqu'à maintenant, la maladie semble exceptionnellement grave et la propagation du virus H1N1, fulgurante. Les ressources nécessaires en soins intensifs pour soigner ces patients sont immenses. Mes collègues du groupe canadien d'essais cliniques dans le domaine des soins intensifs et moi-même avons publié ces observations la semaine dernière dans le Journal of the American Medical Association.
    Ce sont les habitants du Manitoba qui ont payé le prix de ces premiers enseignements, qu'il s'agisse des cas graves et des morts enregistrés dans les premières nations et la population non autochtone du Manitoba ou du fardeau exceptionnel imposé à nos travailleurs de la santé durant l'épidémie. Leurs pertes et leurs sacrifices doivent être reconnus. De plus, je tiens à souligner le leadership dont ont fait preuve Brian Postl et Dan Roberts, de l'Office régional de la santé de Winnipeg; les efforts et la résilience extraordinaires du personnel infirmier et de soutien des services de soins intensifs et des salles d'urgence de tous les hôpitaux de l'ORSW, en particulier de Centre des sciences de la santé et de l'hôpital de Saint-Boniface; ainsi que le professionnalisme et le dévouement de nos médecins de soins intensifs et d'urgence. Je suis honoré d'avoir travaillé à leurs côtés.
    Les efforts immenses déployés par mes collègues, en particulier Rob Fowler, du Groupe canadien d'essais cliniques dans le domaine des soins intensifs, doivent aussi être soulignés. La prévoyance du Dr Fowler et les efforts soutenus des membres du groupe ont permis de recueillir une quantité énorme de données essentielles sur la propagation nationale du virus durant l'éclosion printanière et estivale. Les données recueillies par le groupe, à ses frais et sans aucune aide financière externe immédiate, ont joué un rôle crucial dans l'élaboration de notre stratégie nationale de réponse au virus H1N1, de l'identification des groupes présentant le risque le plus élevé pour une intervention précoce jusqu'à la détermination des traitements médicaux optimaux pour le sous-ensemble des patients les plus gravement atteints.
    Les efforts de l'Agence de la santé publique du Canada et des scientifiques du Laboratoire national de microbiologie du Canada, dirigé par Frank Plummer, sont à souligner. Lorsque l'ampleur de la menace régionale est devenue évidente, ils ont rapidement offert leurs ressources et leur appui sans condition préalable. Cela nous a permis de recueillir de nombreux prélèvements biologiques aux fins d'analyses dès le début de l'épidémie afin d'établir un diagnostic juste et des stratégies de prise en charge thérapeutique. Leur appui a également été essentiel pour créer des liens entre l'industrie, le milieu universitaire et le gouvernement. Ces liens ont mené à l'amélioration des thérapies traditionnelles et au développement de nouveaux traitements suffisamment tôt pour que les patients que nous traiterons dans les prochaines semaines et les prochains mois puissent en bénéficier. En outre, l'Agence de la santé publique et le LNM ont rapidement organisé une conférence nationale regroupant des spécialistes des soins intensifs, des professionnels de la santé publique et d'autres intervenants dans le but de partager de l'information à propos du risque de pandémie de grippe H1N1.
    Même si nous avons acquis des connaissances et réalisé des progrès considérables, il existe encore des risques importants. Le premier est le scepticisme tenace de la population quant à l'utilité et à l'innocuité du vaccin. L'avantage potentiel de la vaccination contre la grippe ne sera jamais aussi grand que cette année. Habituellement, les personnes très âgées ou affaiblies par la maladie sont les principales victimes de la grippe. Cette année, les victimes ressembleront plutôt aux personnes dans cette pièce et à nos enfants. Il est impératif que nous trouvions une façon de convaincre la population de l'importance de se faire vacciner, car c'est la seule façon efficace de limiter les dommages potentiels que la pandémie de grippe pourrait causer. De plus, même si on a augmenté les effectifs des unités de soins intensifs, il nous faut rester vigilants à bien des égards, surtout dans l'embauche du personnel infirmier, là où les pressions exercées sur le système pourraient être très fortes dans les prochains mois.
(1535)
    On a aussi un besoin immédiat de financement accru pour la recherche appliquée sur cette épidémie. Des fonds ont récemment été affectés à la recherche sur l'influenza. C'est une bonne chose, mais si l'on examine la liste des projets financés, on se rend compte que la plupart ne vont donner des résultats que dans quelques années. Nous sommes dans une situation précaire et nous devrions envisager d'investir davantage pour répondre aux questions essentielles qui permettront la prise en charge immédiate des patients.
    Je suis prêt à répondre à vos questions.
    Merci, docteur Kumar.
    Vous et moi sommes de Winnipeg, et je sais très bien que les médecins, le personnel infirmier et le reste du personnel de l'hôpital de Saint-Boniface et du Centre des sciences de la santé accomplissent de l'excellent travail pour lutter contre cette pandémie. Nous suivons leurs progrès de très près et nous sommes très heureux que vous soyez ici aujourd'hui.
    Nous allons maintenant entendre les représentantes de l'Association canadienne des soins de santé, soit Denise Desautels, directrice des politiques et des communications, et Pamela Fralick, présidente et chef de la direction.
    Allez-y, Pamela. Merci.

[Français]

[Traduction]

    Je tiens à tous vous remercier de me donner l'occasion de m'adresser à vous.
    Bien honnêtement, je ne suis pas certaine de pouvoir vous dire aujourd'hui quoi que ce soit que nous n'ayez déjà entendu. Cela dit, puisque j'en ai l'occasion, je vais vous parler de quelques enjeux importants. Mon exposé portera en grande partie sur les services de première ligne et les systèmes; ce sera donc pour vous un point de vue différent.
    Je suppose que la plupart d'entre vous savent que l'Association canadienne des soins de santé est une fédération d'hôpitaux et d'organismes de santé provinciaux et territoriaux. Nos membres représentent toute la gamme des soins offerts au pays.
    Je dois vous dire que les membres de l'ACS sont, en général, très satisfaits de la façon dont on traite la question jusqu'ici et qu'ils approuvent évidemment la façon dont l'Agence de la santé publique du Canada gère le dossier. Nous savons qu'il y a eu quelques problèmes et qu'il y a encore des choses à régler, mais je voulais vous transmettre ce message de la part de nos membres.
    Cela dit, il y a sept points dont je voudrais vous parler aujourd'hui, ce que je vais faire assez rapidement afin de vous laisser suffisamment de temps pour poser des questions.
    Le premier point est évident; il s'agit de l'importance d'adopter une approche fondée sur des données probantes dans tout ce que nous faisons. C'est d'ailleurs essentiel pour gagner la confiance de la population, dont nous venons de parler. Nous reconnaissons ne pas être en mesure de prévoir la gravité et l'impact d'une éclosion potentielle, mais il est très important que chacun de nous, y compris les membres des médias, soyons conscients des effets négatifs de la peur sur le grand public et les professionnels de la santé. Par conséquent, il est essentiel de nous assurer que les décisions prises et les stratégies mises en oeuvre sont fondées le plus possible sur des données probantes et de considérer comme crédibles et légitimes les directives scientifiques.
    Le Dr Kumar a abordé l'un des points les plus importants: le rôle de la prévention. Nous savons que selon les données actuelles, environ seulement 35 p. 100 des Canadiens auront recours à la vaccination. Nous savons également que beaucoup de travailleurs de la santé n'ont pas reçu le vaccin contre la grippe saisonnière; de 40 à 60 p. 100 d'entre eux seulement l'ont reçu. Des programmes doivent donc être mis en place pour encourager tous les Canadiens, y compris le personnel de la santé, à se faire vacciner contre la grippe H1N1. Nous devons leur faire comprendre que les données probantes démontrent que la vaccination massive est une stratégie efficace et les encourager ensemble à opter pour cette solution.
    Durant l'exposé du Dr Kumar, je me suis demandé si le fait de voir tous les membres du comité se faire vacciner à la télévision nationale susciterait la confiance de la population, puisque cela montrerait que tous les partis appuient cette initiative. Mais je vais vous laisser en discuter à huis clos.
(1540)
    Avant d'accepter, il faudrait que je consulte M. Dufour pour savoir s'il a peur des aiguilles.
    Je vais vous laisser en discuter à huis clos.
    Le troisième point dont je voulais vous parler — encore une fois, je suis certaine qu'on vous en a déjà parlé —, c'est la communication et la nécessité de faire preuve de cohérence dans les messages. Nous avons la conviction qu'il doit y avoir une source unique de communications. Les messages proviennent des autorités fédérales, provinciales et municipales. Ils doivent être transmis plus rapidement et être cohérents.
    Nous respectons le droit de chaque province d'élaborer son propre plan de communications pour toutes les questions de soins de santé, mais actuellement, nous estimons que le droit des Canadiens de recevoir de l'information claire et cohérente devrait prévaloir sur tout autre besoin. Nous pensons qu'il s'agit d'une situation où beaucoup d'intervenants trouvent nécessaire de communiquer des informations et ce, dans leur propre langue. Or, pour le Canadien moyen, ce n'est tout simplement pas acceptable à ce stade-ci.
    Il y a également des lacunes sur le plan de la communication au niveau communautaire. Je vais combiner deux points: on met beaucoup l'accent, pour des raisons évidentes, sur les établissements de soins actifs, mais nous savons, d'après toutes les informations fournies par les spécialistes, que le problème est au niveau communautaire. L'information n'est pas transmise efficacement aux professionnels de la santé à ce niveau.
    Un autre point à prendre en considération, parce que nous essayons de vous parler aussi des solutions et pas juste des problèmes, c'est que les associations de professionnels de la santé sont une source précieuse de partage d'information, mais qu'on ne les utilise pas. Nous essayons depuis des années d'avoir recours plus souvent aux ordres professionnels de la santé.
    Par exemple, bon nombre d'entre vous connaissent le Groupe d'intervention action santé, ou HEAL. C'est une coalition de 38 associations nationales de santé qui existe depuis bien des années, une communauté qui s'est bâtie de façon naturelle, si vous voulez, pour donner de l'information directe à tous les intervenants en matière de santé, ce qui ne peut que consolider et corroborer l'information reçue d'autres sources. C'est l'une des solutions que je propose.
    Bien sûr, la nécessité d'avoir suffisamment de personnel pour s'occuper de tous les patients soulève de grandes préoccupations. La coordination nous préoccupe. Je pourrais aussi mentionner la mobilité de la main-d'oeuvre, l'ACI et les permis, des questions que nous avons tenté de régler depuis la crise du SRAS, mais je ne sais pas vraiment si elles ont bien été résolues, même si toutes les provinces ont signé l'ACI. Y a-t-il des accords de mise en oeuvre pour que nous puissions mettre en commun nos ressources humaines si la crise n'éclate pas en même temps dans tout le pays, mais à différents endroits à différents moments, afin de faire face au manque de personnel que nous prévoyons?
    Le dernier point dont je vais vous parler est la formation des professionnels de la santé. Je fais allusion aux gens qui vont procéder à la vaccination. Ils doivent recevoir de l'information précise sur l'innocuité et les risques du vaccin.
    J'aimerais également souligner ce qui est, à première vue, une question mineure: les dates de péremption des divers médicaments et vaccins. Nous savons que les dates indiquées sont les meilleures possibles, mais aussi que bien des médicaments restent efficaces au-delà de cette date. Si la quantité de vaccins est insuffisante et que la demande est grande, comment pouvons-nous savoir lesquels peuvent être utilisés de façon sécuritaire et efficace après la date de péremption? C'est peut-être un problème mineur, mais il pourrait représenter une grande partie de la solution s'il y avait une grave pénurie.
    Il y a de nombreuses autres questions que nous n'allons pas approfondir pour le moment. Elles vont peut-être ressortir durant la discussion. Il s'agit notamment des aspects psychologiques et éthiques qui surgissent dans les situations d'affectation des ressources ainsi que des décisions difficiles qui doivent être prises. Nous avons l'impression qu'elles ont été négligées dans la logistique de la vaccination.
    Nous reconnaissons que de faire face à cette situation n'est pas une tâche facile pour nous tous. Nous profitons de cette occasion pour approfondir le dialogue et travailler à des solutions avec tous les membres du comité et nous avons hâte de participer à la discussion après les exposés.
    Merci.
(1545)
    Je vous remercie beaucoup.
    Madame Debra Lynkowski.
    Merci de nous donner l'occasion de témoigner devant vous. Nous espérions être accompagnés de notre président le Dr Cordell Neudorf, également médecin hygiéniste dans la région de Saskatoon. Il n'a toutefois pas pu se libérer. J'ai demandé l'avis de notre personnel de terrain, qui doit également affronter cette situation, à l'instar du Dr Kumar.
    En général, l'association estime qu'on a tiré beaucoup de renseignements des urgences antérieures en matière de santé publique. Grâce à l'initiative de l'Agence de santé publique du Canada et de notre médecin en chef de la santé publique, nous estimons que, cette fois-ci, les améliorations ont été spectaculaires. Le niveau de coordination, de communication et de coopération entre les organismes fédéraux, les provinces et les territoires a été tout à fait exemplaire par rapport à ce qu'il a été contre le syndrome respiratoire aigu sévère ou SRAS. Nous constatons le même esprit d'initiative aux niveaux provincial et territorial ainsi qu'au niveau local.
    Cela dit, nous savons que nous affrontons une situation unique et nous essayons de réagir à la propagation du virus en temps réel. Je crois que c'est ce qui rend la situation si exigeante. Dans le cas du SRAS et, maintenant, du virus H1N1, nous avons l'impression d'être aussi vulnérables qu'un canari dans une mine. On connaît les points faibles de notre système de santé publique et de notre système de soins de courte durée. Aujourd'hui, je veux vous communiquer les observations faites par le personnel de terrain, sur la santé publique, plus particulièrement sur les éléments que nous estimons fonctionnels et sur ceux dont nous prévoyons qu'ils feront problème.
    En général, j'ai l'impression que les gens ont conscience de l'existence d'un plan général et que ce plan fonctionne bien et qu'il évolue. Je pense que tout le monde comprend qu'il doit évoluer, en raison de la complexité de la situation et parce que, de fait, en l'espace de six mois, nous sommes partis de l'identification d'un virus et avons mis sur pied des campagnes d'immunisation complète en passant par la mise au point d'un vaccin, ce qui est tout à fait remarquable.
    Les systèmes de surveillance de la santé publique fonctionnent bien et ils permettent de suivre l'évolution de la maladie. Comme l'a mentionné le Dr Kumar, les laboratoires de santé publique fonctionnent de manière exceptionnelle. La création de réseaux provinciaux, et, en particulier, les nouvelles agences de santé publique... Celle de la Colombie-Britannique n'est pas de création si récente, mais la Colombie-Britannique, le Québec et l'Ontario ont réellement contribué à notre capacité actuelle de réponse. Le nouveau réseau canadien de santé publique nous a vraiment donné l'occasion d'instaurer le dialogue et la coordination actuels et il nous a permis des réponses plus standardisées, ce qui est très important.
     Enfin, la plupart d'entre vous ont probablement appris la publication récente du guide d'autosoins. Nous sommes très heureux de l'exactitude et de l'accessibilité de l'information distribuée au public.
     Nous craignons des difficultés, et l'une d'elles est probablement déjà connue du comité. Au Canada, la santé publique continue d'être sous-financée et de manquer de ressources de manière chronique. Dans la confusion des chiffres, je tiens pour avéré qu'elle représente entre 4 et 6 p. 100 de toute l'enveloppe de la santé. C'est peu, quand il s'agit d'organiser une réponse. Aujourd'hui, la plupart des unités de santé publique n'ont pas les ressources qui leur permettraient, en général, de mettre en œuvre des pratiques exemplaires, de sorte qu'il est très difficile de faire entrer une pandémie dans l'équation. Dans moins de deux semaines, nous entreprendrons la plus grande campagne d'immunisation depuis des décennies. Elle utilisera de deux à trois fois plus de doses qu'on en utiliserait dans une campagne normale. Tout ce branle-bas survient dans un système qui, soyons francs, est sollicité à son maximum sans bénéficier de ressources supplémentaires.
    Cette situation a des conséquences et un coût. Au niveau local, les services de santé publique doivent retarder, annuler ou diminuer la plupart des autres services, pendant un à deux mois, pour organiser cette campagne. Qu'est-ce que cela signifie pour les Canadiens? Le passé nous enseigne qu'une cohorte d'enfants risque de ne jamais combler le retard qu'elle aura subi dans ses immunisations régulières, des mères ne seront pas visitées et, disons-le, des inspections n'auront pas lieu. Les services de santé publique n'ont tout simplement pas la capacité de répondre aux situations exceptionnelles. Comme me l'a dit un collègue qui travaille sur le terrain, nous ne pouvons pas affronter deux crises de santé publique à la fois; nous ne saurions pas y répondre.
    Nous prévoyons qu'il y aura des problèmes d'information pour les praticiens généralistes, principalement des médecins et des praticiens dans le secteur des soins de courte durée, parce que nous avons des réseaux de santé publique bien connectés, des réseaux de soins de courte durée bien connectés, mais ils ne sont pas nécessairement connectés les uns avec les autres.
    Un autre défi sera de nous assurer que nous disposons des meilleurs renseignements sur le vaccin, parce que les praticiens doivent traduire cette information scientifique en conseils clairs, à la portée de leurs patients.
    Plus important encore, je pense, étant donné ce que Mme Fralick vient de dire, que la santé publique ne peut pas se réduire à de petites phrases toutes faites, comme celles que l'on a essayé de formuler dernièrement, il ne suffit pas de les imaginer et de les passer dans les médias. Ça ne fonctionne pas. La situation est trop complexe. Comme on me l'a dit, la santé publique est autant un art qu'une science.
(1550)
    Nous savons que les autorités des provinces et des territoires utiliseront des méthodes différentes, et le public est de plus en plus confus. Nous avons donc tous la responsabilité de publier les meilleures recommandations factuelles et d'en faire la promotion constante.
    En terminant, je veux simplement dire que je sais que le comité veut être informé de la situation et de nos solutions pour aujourd'hui. Cependant, notre regard doit également se tourner vers l'avenir. Il nous faut une vision à long terme pour la santé publique. Pendant vos délibérations sur la situation actuelle, je vous presse vivement de regarder également vers l'avenir.
    L'ACSP et la Coalition canadienne pour la santé publique au XXIe siècle — Pamela Fralick et moi-même présidons ce groupe — ont formulé une série de recommandations, la plus récente dans une fiche d'information que nous avons fait parvenir à tous les députés, mais aussi dans des mémoires de consultation prébudgétaire. Sur ce point, je n'en dirai pas davantage. Ces documents sont disponibles. Christine, nous pouvons vous les faire parvenir aussitôt que possible.
    Il importe de se rappeler que la santé publique travaille toujours de façon très discrète. On me connaît pour cette phrase que je répète souvent: « Je veux que ma famille comprenne ce que je fais, parce que personne ne comprend ce qu'est la santé publique ». Nous tenons toutes ses réussites comme allant de soi. Nous avons l'eau potable sans nous émerveiller des moyens mis en oeuvre pour l'obtenir. La ceinture de sécurité et les lois promulguées sur la sécurité au travail nous permettent d'éviter des blessures, et nous n'y pensons même pas. Nous y pensons uniquement lorsqu'il y a crise, et Walkerton, le SRAS, le virus H1N1 en sont de parfaits exemples. Nous devons donc nous servir de la situation actuelle pour changer l'avenir. Si nous nous contentons uniquement de réagir à la situation actuelle, nous invitons une autre crise pour plus tard.
    Pour nous ramener au présent, je vous rappelle les paroles de Mme Fralick. Vos deux réalisations les plus importantes, cher comité, ce sera d'appuyer la réponse nationale contre le virus H1N1 et de vous faire vacciner, publiquement, ainsi que d'encourager vos amis, vos familles et vos collègues à faire de même.
    Merci beaucoup.
    Merci beaucoup de votre exposé.
    Avant de commencer la période de questions, je veux annoncer que le comité entreprendra l'étude de ses travaux à 17 heures. Ce qui nous donne une heure dix minutes pour les questions et les réponses.
    Commençons avec Mme Duncan.
    Merci, madame la présidente.
    Vous avez tous soulevé d'importantes questions. Je vais commencer par la capacité de répondre aux situations exceptionnelles.
    Docteur Kumar, je sais qu'au cours du printemps et de l'été vous avez traité beaucoup d'Autochtones. Quelle est la durée moyenne d'un traitement à Winnipeg, et qu'est-ce qui a été fait avant le traitement?
    Voulez-vous dire le temps pour se présenter à l'hôpital ou le temps pour se faire soigner.
    Oui.
    Je m'en allais dire que je ne possède de données que sur les patients admis aux soins intensifs, mais, de fait, je possède des données sur tous ceux qui se sont présentés, soit à la salle d'urgence, soit à l'hôpital, soit à l'unité de soins intensifs. Nous avons, entre autres choses, constaté que la rapidité avec laquelle on est soigné après le début des symptômes — c'est-à-dire le temps écoulé avant de se présenter au médecin ou à la salle d'urgence — influe directement sur la gravité de la maladie.
    Nous avons ainsi constaté que, chez les victimes, le temps médian d'intervention avait été d'environ huit ou neuf jours. Chez ceux qui ont été admis à l'unité de soins intensifs, mais qui ne sont pas morts, le temps médian était d'environ sept jours. Chez les hospitalisés, il était de cinq jours et, chez ceux qui se sont présentés à l'urgence, mais qui n'ont jamais été hospitalisés, il n'était que de trois jours. Il y a donc une corrélation assez forte entre la gravité de la maladie et la rapidité avec laquelle on se présente pour obtenir des soins médicaux.
(1555)
    Si les malades partaient de leur milieu de vie autochtone, recevaient-ils des antiviraux dans leur localité? Combien de temps s'est écoulé entre la manifestation des symptômes et l'obtention du médicament antiviral, et ce temps a-t-il influé sur l'issue de la maladie?
    Je suis convaincu que cela a influé sur l'issue de la maladie. Vous savez, on ne s'attend jamais à ce qu'une pandémie ait lieu chez soi. C'est pourquoi il y avait beaucoup d'incertitude et de confusion, pour ainsi dire, au début, sur la situation. À vrai dire, les conseils que nous obtenions de diverses sources étaient basés sur des patients ambulatoires, des patients qui n'étaient pas gravement malades. Au début, on nous conseillait, pour ces patients, d'attendre d'abord la confirmation des tests d'identification du virus H1N1 ou, du moins, la confirmation de la grippe, ce qui prenait trois jours, parce que les tests n'avaient lieu que deux fois par semaine. Il y avait toutes sortes de raisons pour les retards. Comme les collectivités autochtones ont été frappées les premières, elles ont essentiellement été les principales victimes de l'ignorance. Dans leur cas les retards ont été assez longs, de l'ordre, je crois, de sept ou huit jours.
    Les probabilités de rétablissement chutent-elles vraiment après 48 heures, pour ce qui concerne les antiviraux?
    Non. Je crois qu'on n'a pas bien compris la règle des 48 heures. Nous parlons toujours de médecine factuelle, mais nous oublions que si le groupe étudié n'est pas le groupe traité, il n'y a fondamentalement pas de faits.
    Nous avons constaté, et nous savons maintenant, que si la maladie est peu grave dans ses manifestations et si la thérapie antivirale intervient dans les 48 heures suivant le début des symptômes, ils durent un jour de moins avant que le patient se sente mieux.
    Qu'arrive-t-il quand les manifestations sont graves?
    Au début, on s'est fait dire, et c'est vrai, que si les symptômes remontaient à plus de 48 heures, on n'avait pas à se soucier de traiter les patients. Malheureusement, certains de nos médecins ont même appliqué ce jugement aux patients en unité de soins intensifs. Le fait est que, pour le malade, vaut mieux tard que jamais.
    On nous a fait passer pour des évidences beaucoup d'autres erreurs. En quelque sorte, nous avons dû réinventer la roue et, graduellement, réexaminer ces idées toutes faites. Je pense que l'une des raisons pour lesquelles, à l'échelle nationale, les choses vont mieux, c'est que nous avons fait le ménage des idées toutes faites.
    L'une des choses à faire, pour aller mieux, même quand la maladie est grave, c'est d'obtenir l'antiviral.
    Oh! Incontestablement! Si les symptômes exigent un traitement aux soins intensifs, même si quatre, cinq ou six jours se sont écoulés, il faut administrer les antiviraux.
    C'est ce que je voulais entendre. Merci.
    J'aimerais connaître votre capacité de fonctionnement pendant le printemps et l'été, et quelles répercussions la grippe a eues sur votre personnel, vos fournitures, les unités de soins intensifs et les ventilateurs. Est-ce qu'on s'attend encore à ce que 25 à 35 p. 100 de la population soit touchée, et que 1 p. 100 soit gravement atteinte? Et ce 1 p. 100 représente combien de personnes au Manitoba? Pouvez-vous répondre à la demande d'unités de soins intensifs et de ventilateurs? En cas de difficulté, comment prenez-vous ces décisions difficiles?
    Eh bien, ça fait beaucoup de questions.
    Effectivement.
    Les prévisions actuelles concernant le taux potentiel d'attaque ont vraiment beaucoup varié. D'après nos modélisations mathématiques, le taux final d'attaque dans la présente vague de l'épidémie toucherait entre 25 et 30 p. 100 de la population; cette tranche de population sera atteinte cet automne, essentiellement, dans l'hypothèse que le vaccin n'est pas accessible. C'est un faible taux d'attaque pour une pandémie. Par le passé, les taux d'attaque des pandémies se sont situés entre 25 et 40 p. 100. On peut donc s'imaginer qu'une bonne proportion de la population sera touchée.
    Maintenant, la question, je crois est la suivante: quel pourcentage de la population sera gravement malade ou suffisamment malade pour être hospitalisé? Les chiffres et les prévisions, disons-le, varient énormément. Personne, je crois, ne le sait vraiment. Au début, on parlait d'une personne sur 250, chiffre qui a été utilisé pour la grippe saisonnière. D'après mes estimations, cette proportion a sensiblement diminué. Je pense qu'elle est de l'ordre d'une personne pour 1 000, ou moins.
    Encore une fois, nous disposons de certaines données récemment communiquées au Journal de l'Association médicale canadienne. À propos, les données que je vous ai communiquées, il y a un instant, sur le délai pour être traité aux antiviraux ont été calculées par mon collègue Ryan Zarychanski.
    Nous avons obtenu des données d'un modèle dynamique du nombre de cas que l'on pourrait constater, dans l'hypothèse d'un déploiement timide du vaccin. Nous avons pensé que nous pourrions compter jusqu'à 1 500 à 2 500 cas simultanément dans tout le pays. Ce sont des estimations très approximatives. Il s'agit plus ou moins du scénario le plus pessimiste, parce que nous ne disposons que d'environ 3 000 lits en unités de soins intensifs — autre estimation très approximative — dans tout le pays.
(1600)
    Merci, docteur Kumar. D'autres questions vous seront posées.
    Je suis à votre disposition.
    Je vous demande de surveiller le voyant. Quand il s'allume, ça veut dire que nous avons dépassé le temps qui nous était alloué. J'aimerais que tous les membres du comité puissent vous questionner.
    Merci.
    Passons maintenant à M. Malo.

[Français]

    Merci, madame la présidente. Merci à nos témoins d'être avec nous cet après-midi.
    Est-ce que tout le monde comprend bien ce que je dis?

[Traduction]

    Je suis désolé. C'est la première fois que j'utilise ces machins. À notre arrivée, personne ne nous montre comment nous en servir.
    Je l'ai.
    Tout va bien maintenant, docteur Kumar?
    J'entends quelqu'un. C'est en anglais.
    Bon, monsieur Malo. Êtes-vous sur le canal 2? C'est celui que vous devez utiliser.

[Français]

    Je vous remercie d'être avec nous cet après-midi.
    Depuis quelques séances, je commence toujours par poser la même question à tous les témoins, parce qu'il y a de la confusion en ce qui a trait à l'importance de la vaccination. Je sais que vous êtes tous et toutes intervenus à ce sujet au cours de vos déclarations. Cependant, j'aimerais que vous nous indiquiez clairement pour quelles raisons vous considérez qu'il est important que la population se fasse vacciner.

[Traduction]

    Qui aimerait répondre à cette question?
    Je vous demande de m'excuser. Mon français est déplorable.
    Je pense que c'est une question non seulement de responsabilité individuelle pour les soins envers soi-même, mais c'est aussi un devoir, pour prendre également soin d'autrui. La question n'est donc pas d'être vacciné pour se protéger soi-même ou sa famille; c'est une façon de protéger toute la population. L'immunisation a été l'une des plus grandes conquêtes de l'histoire de la santé publique, et, quand on compte le nombre de maladies qui ont été complètement éradiquées, il faut savoir que c'est à cause de l'immunisation. Nous constatons maintenant qu'il y a des régions où l'immunisation n'a pas été couronnée de réussite, par exemple dans certains pays d'Afrique où la poliomyélite se manifeste de nouveau — nous pensions que cette maladie était disparue depuis longtemps. D'après moi, c'est un devoir personnel et un devoir public. Et c'est l'une des initiatives de santé publique les moins dangereuses et les plus efficaces que nous ayons jamais eues.
    Je ne peux que répéter ce que Mme Lynkowski a dit. À la question du devoir, qui est très importante, s'ajoutent des considérations d'ordre pratique que nous jugeons étroitement liées: votre santé, celle de votre famille et de vos collègues, les coûts assumés par le système de soins de santé pour traiter les cas réels, les avantages de la prévention, les coûts en matière de productivité — la liste est longue.
    À notre connaissance, le processus est très sécuritaire. Des doutes, il y en aura toujours. Les gens continuent de dire qu'ils ne se feront pas vacciner contre la grippe saisonnière parce qu'ils vont l'attraper de toute façon. Nous avons beaucoup de mal à dissiper les mythes qui existent. Voilà pourquoi nous avons besoin de leadership, à l'échelle nationale, de la part de ceux qui sont les mieux placés pour en faire montre. Je me présenterais bien à la télévision, mais personne ne me reconnaîtrait. Vous, vous représentez... Je ne vous demande pas de le faire, soit dit en passant, mais c'est ce que je propose, pour toutes ces raisons.
    Ma position au sujet de la vaccination est très ferme et catégorique. Il y avait une cinquantaine de patients qui luttaient pour leur vie dans l'unité des soins intensifs. Et il n'est pas question ici de cas où il suffit de brancher une personne sur un ventilateur pendant deux jours pour qu'elle s'en tire. Non. Nous avons pendant trois semaines mené une lutte quotidienne pour garder ces gens en vie. Je n'ai jamais vu un groupe de personnes aussi malade. C'est un miracle que nous n'ayons perdu que 20 p. 100 de celles-ci. Si ces personnes avaient été plus âgées, qu'elles avaient été dans la cinquantaine, la soixantaine, le taux de mortalité aurait atteint 60 p. 100.
    Il existe un vaccin qui nous permet d'éviter le problème — je ne sais pas si j'ai le droit de dire que ça tombe sous le sens, mais ce n'est pas une décision difficile à prendre, en ce qui me concerne, si l'on tient compte du fait que le vaccin est très sécuritaire et très efficace. La plupart de ces personnes vous auraient dit que le risque qu'elles attrapent la grippe est faible, qu'elles sont jeunes, en bonne santé — « comment puis-je être aussi malade? » — sauf qu'elles l'étaient. Donc, pour moi, le choix est clair.
(1605)

[Français]

    Merci beaucoup.

[Traduction]

    Un dernier commentaire: je voudrais savoir ce que pensent les membres du comité des ceintures de sécurité. Dans le passé, personne ne bouclait sa ceinture. Il est vrai qu'on peut toujours mourir dans un accident de voiture même si la ceinture est bouclée, sauf qu'aujourd'hui, tout le monde attache sa ceinture de sécurité. Maintenant on cherche, dans diverses régions du pays, à interdire l'usage du téléphone cellulaire au volant.
    Donc, pour reprendre les propos de ma collègue, ça tombe sous le sens. Il est question ici de prévention, de promotion, un sujet que l'on évite d'aborder, pour une raison ou pour une autre, dans les discussions sur la santé qui ont cours ici et ailleurs. Il faut mettre l'accent sur les activités en amont qui permettent d'éviter une telle douleur, les décès, les coûts.

[Français]

    Madame Fralick, lors de votre intervention, vous avez évoqué d'éventuelles conséquences psychologiques de la crise. Pouvez-vous élaborer davantage là-dessus?
    Je m'excuse, j'aimerais répondre en français, mais je suis un peu rouillée. Si cela ne vous dérange pas, je vais continuer en anglais.

[Traduction]

    Je ne crois pas qu'elles soient bien documentées. Nos membres commencent à peine à en parler.
    Cela dit, il y a plusieurs mesures qui peuvent être prises. D'abord, pour ce qui est de l'éthique, des décisions entourant la répartition des ressources, le Dr Kumar vient de dire... D'après vos chiffres, vous prévoyez qu'entre 1 500 et 2 000 personnes gravement malades auront besoin de soins intensifs. Or, il n'y a que 3 000 lits de soins intensifs au Canada. Qu'allons-nous faire si le nombre de personnes devant être soignées atteint 3 500 ? Qui va recevoir des soins si nous manquons de vaccins ou de masques N-95, par exemple? Des décisions devront être prises, sauf qu'il n'existe aucune ligne directrice à ce sujet. Il y a bien sûr des comités de révision déontologique, mais ils n'ont pas les ressources voulues pour réagir rapidement. Il s'agit là d'un problème de taille.
    Il faut également tenir compte des questions d'ordre psychologique qui entourent... quel est le nom déjà? Les TSPT, les troubles de stress post-traumatique. La situation va évoluer, le nombre de malades va augmenter, ce qui risque d'entraîner des conséquences importantes pour les fournisseurs de soins de santé et les familles. Mais il s'agit là d'un point de départ. Les signes sont encourageants.
    Merci, madame Fralick. Ces précisions sont fort utiles.
    Madame Wasylycia-Leis.
    Merci, madame la présidente, et merci à tous nos témoins.
    D'abord, vous avez raison de dire que nous avons un rôle à jouer pour ce qui est de reconnaître l'importance de la vaccination. Certains, ici, se sont sentis un peu vexés quand le premier ministre a hésité à répondre à la question. J'espère que tout a été clarifié.
    Il est vrai qu'il y a une certaine confusion qui entoure le vaccin. Le milieu médical en est en partie responsable. Certaines études laissent entendre que le vaccin n'a pas fait l'objet de recherches suffisamment approfondies, et c'est pourquoi les gens doutent de sa sécurité. Certains avancent qu'il y a des problèmes d'interaction entre le vaccin antigrippal et le vaccin contre la grippe H1N1, ce qui complique les choses.
    Quels gestes pouvons-nous poser dès maintenant pour dissiper la confusion qui règne, communiquer rapidement un seul et unique message à la population? Nous ne pouvons pas simplement nous contenter de dire, publiquement, « Je vais me faire vacciner. » Que pouvons-nous faire pour encourager un plus grand nombre de Canadiens à se faire vacciner?
(1610)
    Je vais répondre en premier. Vous soulevez une question fort intéressante et très importante.
    Encore une fois, je le répète: comme vous le savez tous, nous sommes confrontés à un défi bien réel, et le débat scientifique suit son cours alors que nous essayons de mettre au point un vaccin qui nous permettra de réagir à la pandémie. Voilà le défi que nous devons relever.
    Toutefois, nous devons dès aujourd'hui nous assurer que les messages diffusés par les médias et dans les tribunes publiques comme celle-ci s'appuient sur les meilleures preuves scientifiques qui existent, et reconnaître aussi que ces preuves vont évoluer avec le temps. Nous devons éviter de profiter de cette situation pour mettre en avant diverses politiques, comme l'a mentionné Mme Fralick.
    L'administrateur en chef de la santé publique a formulé d'excellentes recommandations. Les autorités locales et provinciales aussi. Nous devons encourager la population à suivre ces recommandations, parce qu'elles reposent sur des preuves scientifiques.
    Un des problèmes, c'est qu'au cours de la phase initiale de l'épidémie, on a dit à la population qu'il s'agissait d'une pandémie légère. Les gens ont cru que l'expression « pandémie légère » était synonyme de maladie peu grave. Alors pourquoi s'en inquiéter?
    Nous devons faire plus attention quand nous transmettons un message. Nous devons dire, oui, il s'agit d'une pandémie légère en ce sens que la plupart des gens ne seront pas gravement malades. Toutefois, il faut préciser très clairement dans ce message qu'il y a un petit groupe de personnes qui vont devenir gravement malades, et que bon nombre d'entre elles vont être atteintes d'une infection virtuellement mortelle, d'où l'importance de se faire vacciner pour éviter de se retrouver au sein de ce petit groupe. Nous devons faire preuve de cohérence.
    Merci.
    Ce qui me préoccupe le plus, ce n'est pas la vaccination, la prévention, mais plutôt l'état du système de soins de courte durée. Je me demande s'il sera en mesure de réagir à une propagation importante du virus de la grippe H1N1. J'ai lu un article rédigé par Mark Humphries, du Collège Mount Royal, à Calgary. À son avis, la leçon à tirer de la pandémie de 1918 est la suivante: il faut se concentrer sur le traitement, et non sur la prévention. Il soutient que notre système de soins de santé n'a pas les ressources voulues pour faire face au défi que pourrait entraîner toute propagation grave du virus. Vous en avez parlé brièvement, docteur Kumar.
    D'après une des études dévoilées lors du colloque qui a eu lieu au début de septembre, les établissements de soins actifs fonctionnent présentement à pleine capacité. Qu'allons-nous faire si une crise se manifeste? L'étude ajoute que l'on ne compte, à l'heure actuelle, que 8,7 lits avec ventilateur pour 100 000 patients. Si nous sommes frappés de plein fouet par la pandémie, nous aurons besoin d'environ 3 000 lits avec ventilateur pour 100 000 patients. Et si entre 30 et 35 p. 100 de la population est malade et que bon nombre de patients nécessitent des soins intensifs pendant six à huit semaines, il sera impossible de réagir à la situation.
    Le gouvernement fédéral s'est montré plutôt discret à ce chapitre. Il soutient que cette responsabilité relève des provinces. Ce qui m'inquiète, c'est notre attitude passive face à l'inconnu, le fait que l'on espère que la situation ne sera pas grave, sauf que si elle le devient, nous allons nous retrouver en bien mauvaise posture.
    J'aimerais savoir ce que vous pensez de notre système de soins actifs. Il est vrai que nous devons nous pencher sur les enjeux de santé publique à long terme, mais je me demande si nous allons être prêts à réagir si quelque chose de grave se produit.
    Qui veut prendre la parole?
    Madame Fralick.
    Je peux commencer.
    Je ne sais pas si je suis en mesure de répondre, mais comme je m'exprime également au nom des établissements de soins actifs, je peux vous dire que nos membres attachent beaucoup d'importance à la prévention. Voilà pourquoi nous insistons là-dessus. Nous ne voulons pas nous retrouver dans une situation où nous sommes incapables de répondre aux besoins, car vous avez tout à fait raison: il existe de sérieux problèmes du côté des effectifs et de la capacité d'intervention. Nous en avons d'ailleurs déjà discuté avec le comité. Plusieurs d'entre vous en font partie depuis longtemps. Déjà, avant l'apparition du H1N1, vous meniez des consultations sur l'état des ressources humaines en santé. Nous sommes confrontés à une crise qui risque de s'aggraver, puisque les États-Unis risquent de se doter d'un système différent qui s'appuiera sur un plus grand nombre de fournisseurs de soins de santé pour desservir un plus grand nombre de citoyens. D'où vont provenir ces fournisseurs de soins de santé? Dans bon nombre des cas, du Canada. Donc, nous devrons composer et avec la crise et avec le manque d'effectifs. Voilà pourquoi nous accordons tellement d'importance à la prévention.
    Les messages que l'on diffuse présentement sont cohérents. Nous avons mis du temps à nous organiser, mais la teneur de ceux-ci s'est nettement améliorée au cours des trois ou quatre dernières semaines.
    J'ai fait allusion, dans mon exposé, à la mobilité de la main-d'oeuvre et aux questions relatives aux permis, que nous avons tenté de régler depuis la crise du SRAS. L'ACI est maintenant en place. Nous croyons comprendre que toutes les provinces l'ont signé, mais peut-il vraiment être mis en oeuvre? Je ne sais pas comment tout cela fonctionne — peut-être que le Dr Kumar le sait —, mais si le virus frappe à différents endroits et à différents moments, est-ce que les fournisseurs de soins de santé vont pouvoir se déplacer? Est-ce là une des solutions envisagées?
(1615)
    Merci, madame Fralick.
    Puis-je demander au Dr Kumar de répondre?
    Docteur Kumar, souhaitez-vous faire un commentaire?
    Au sujet de la mobilité des travailleurs?
    Non, au sujet de l'état de préparation des établissements de soins actifs.
    Je pense que nous sommes pratiquement prêts. Il y a des domaines où des améliorations s'imposent, mais je crois que nous arriverons à gérer la vague qui va nous frapper si nous sommes prêts. Nous ne serons pas submergés par celle-ci, mais si nous sommes prêts, nous pourrons y faire face. Si nous nous préparons, nous en viendrons à bout. En tout cas, nous nous rapprochons du but.
    Merci.
    Madame McLeod.
    Merci, madame la présidente.
    Je remercie les témoins d'être venus nous rencontrer. Je tiens à vous dire que je suis prête à retrousser ma manche devant les médias et à me faire vacciner. En tout cas, je vais certainement encourager les gens à faire de même. Comme vous l'avez si bien indiqué, la vaccination est un élément très important de notre stratégie.
    J'ai plusieurs questions à poser à divers témoins. Docteur Kumar, vous faites partie du groupe d'experts techniques qui a mené une étude sur les méthodes de traitement intensives de courte durée. Existe-t-il des pratiques exemplaires que nous pouvons mettre en oeuvre, ou encore que nous pouvons appliquer pour traiter les patients qui ont besoin de soins intensifs?
    Oui, dans le contexte des USI. J'ai participé à ce volet-là de l'étude. En fait, l'Agence de la santé publique du Canada va bientôt émettre des directives sur la prise en charge des patients ayant fréquenté des unités de soins intensifs. Plusieurs des préoccupations formulées par le Dr Duncan vont être abordées. L'agence va recommander qu'une personne se fasse soigner même au bout de 48 heures, et qu'elle suive une thérapie antivirale de dix jours au lieu de cinq.
    Par ailleurs, les directives vont préciser que le test diagnostique, qui est qualifié de totalement sensible, ne l'est pas en situation réelle, de sorte que les cas possibles seront considérés comme étant réels en attendant la confirmation des données. Il y a toute une série de directives qui vont être émises.
    Cela va donc se faire très bientôt.
    Dans les prochaines semaines.
    Très bien.
    J'ai trouvé vos propos sur la recherche appliquée fort intéressants. Bien sûr, nous avons tous entendu parler des travaux de recherche importants qui ont été réalisés, de la nécessité de financer la recherche à plus long terme. Concernant la recherche appliquée, quels sont, d'après vous, les domaines d'intérêt qu'il faudrait approfondir, les lacunes qu'il faudrait combler, les besoins qui existent à ce chapitre?
    Il y a deux ou trois choses qui me viennent à l'esprit. D'abord, la plupart des intensivistes estiment qu'il faut absolument mettre sur pied un système qui leur permettra de connaître en temps réel la disponibilité des lits et les contraintes qui existent à ce chapitre à l'échelle nationale, surtout lorsqu'une pandémie sévit. À l'heure actuelle, nous ne savons même pas combien il y a de lits avec ventilateur dans les unités de soins intensifs au Canada. Nous essayons de recueillir cette information. Le Groupe canadien d'essais cliniques dans le domaine des soins intensifs se penche là-dessus, sauf qu'il n'y a pas de données en temps réel qui permettent d'assurer le redéploiement des ressources vers les points chauds, si besoin est. Il est impossible pour l'instant de faire une telle chose. La mise en place d'un tel système est donc essentielle.
    Il existe d'autres enjeux tout aussi importants. Vous ne le savez peut-être pas, mais les fonds actuellement alloués ne servent pas à financer les thérapies qui sont pratiquement au point. Prenons, par exemple, le traitement par la globuline hyperimmune, le traitement non approuvé le plus susceptible de venir en aide aux malades en phase terminale. Nous tentons de trouver des fonds de développement, parce qu'aucun mécanisme de financement n'a été mis sur pied. Nous pouvons nous adresser aux entreprises pharmaceutiques, essayer de trouver de l'argent, un moyen de financer la recherche, mais les fonds fédéraux et autre chose du genre...
    Selon l'OMS, il faut déterminer, entre autres, s'il est plus efficace d'administrer des doses standards ou des doses élevées d'antiviraux. Ce sont toutes là des questions d'ordre pratique. Les tests doivent eux aussi être examinés pour voir s'ils sont efficaces. Ces opérations pratiques peuvent être accomplies dans l'immédiat, sauf qu'il n'y a pas vraiment de mécanismes de financement qui nous permettent de le faire.
(1620)
    Je voulais passer à autre chose, mais vos propos ont piqué ma curiosité. Nous sommes confrontés, bien sûr, à une pandémie planétaire. Il serait bien que différents pays assument différents rôles et qu'ils ne fassent pas tous la même chose. En tout cas, je pense que la question du partage des responsabilités fait présentement l'objet de discussions. Encore une fois, il serait intéressant d'en savoir plus là-dessus.
    Je tiens à préciser que le Dr John Marshall, qui fait partie du Groupe canadien d'essais cliniques dans le domaine des soins intensifs et qui travaille à l'hôpital St. Michael, a participé à la mise sur pied d'un réseau international qui fait exactement ce que vous proposez, de sorte que différentes personnes travaillent sur différents projets.
    Ma prochaine question s'adresse à Mme Fralick.
    Il est vrai que le gouvernement fédéral et les provinces ont chacun un rôle à jouer. On retrouve dans les provinces des régies régionales de la santé et diverses autres structures. D'après les organisations membres de votre association, où en sont les régies régionales et provinciales de la santé côté planification? Avez-vous l'impression que les gens se sont vraiment attaqué à ce problème au cours des dernières années? Se sentent-ils plus confiants?
    Nous communiquons avec les régies régulièrement. Nous organisons des téléconférences avec les directeurs généraux des services de santé provinciaux et territoriaux ou leurs représentants au sein de notre groupe. De manière générale, ils estiment recevoir suffisamment de renseignements à l'échelle aussi bien provinciale que territoriale. À notre avis, comme le système d'échange d'informations fonctionne bien, ils n'ont pas besoin qu'on leur fournisse un grand nombre de données.
    Cela dit, nous avons tenu une téléconférence avec eux la semaine dernière. Il a surtout été question du H1N1, de la cohérence des messages, de la capacité d'intervention et des effectifs. Tous les points abordés dans mon exposé continuent de soulever de sérieuses inquiétudes, malgré les améliorations observées.
    Mais ils en sont au stade de planification...
    Oui. Ils y travaillent. En fait, lors des téléconférences, il y a, la plupart du temps, un ou deux directeurs qui manquent à l'appel parce qu'ils sont aux prises avec des cas de grippe H1N1 dans leur région. Donc, ce dossier les mobilise beaucoup.
    Je ne sais pas si j'ai répondu à votre question.
    Vous l'avez fait.
    Les systèmes de soins de santé des provinces ont eu à faire face à des enjeux éthiques au fil du temps. Cette situation n'a rien d'exceptionnel. Habituellement, il y a des structures en place au sein des différentes organisations qui ont pour mandat de régler ces questions. Comme je l'ai mentionné, nous sommes constamment appelés à nous pencher là-dessus. Or, nous avons des entités qui sont en mesure de faire le travail, étant donné que les mécanismes sont déjà en place.
    Notre temps est écoulé. Quelqu'un souhaiterait peut-être faire un bref commentaire. Madame Fralick.
    Comme j'ai soulevé ce point, je tiens à préciser que si cette question préoccupe nos membres, c'est en raison du caractère immédiat et imprévisible de la crise. Il existe des comités de déontologie dans les universités et dans les hôpitaux, sauf que je ne sais pas s'ils ont les ressources voulues pour s'attaquer aux problèmes urgents.
    Franchement, quant on voit ce qui s'est passé au Manitoba, où des housses mortuaires ont été distribuées, on se demande comment une telle décision a pu être prise. Aurait-il été possible, sur le plan éthique, d'éviter ce genre de situation?
    Vous semblez un peu surprise.
    Non, c'est...
    Merci beaucoup.
    Nous allons maintenant céder la parole à Mme Murray.
    Merci d'être venus nous éclairer sur le sujet.
    Je voudrais parler des mesures de prévention, puisque vous insistez sur l'importance de mettre sur pied un programme de vaccination de masse pour empêcher la propagation du virus. Je ne crois pas que nous ayons reçu des directives claires à ce sujet de la part des dirigeants de l'Agence de la santé publique. Tout ce qu'ils ont dit, c'est qu'il y aura suffisamment de vaccins pour tout le monde. Savez-vous si des directives précises ont été données aux provinces et aux territoires concernant la vaccination de masse?
(1625)
    Allez-y.
    Je pense que l'Agence de la santé publique du Canada a émis des directives très claires qui ont été communiquées aux autorités provinciales et ensuite régionales. Elles encouragent la vaccination de masse.
    Je sais que nos collègues qui s'occupent de santé publique s'apprêtent à lancer des campagnes de vaccination de masse. C'est pour cette raison que certaines initiatives de santé publique ont été suspendues pour l'instant ou réduites.
    Merci.
    Je vais me renseigner pour voir où ces directives ont été émises, car certains travailleurs sur le terrain affirment qu'ils n'ont rien reçu et qu'il serait utile pour eux d'en prendre connaissance. Je ne sais pas si tous vos collègues sont d'avis que les directives émises par l'agence sont claires et précises.
    Madame Fralick, voulez-vous répondre?
    J'ai entendu les directives qui ont été données, mais il y a des secteurs du système des soins de santé, et la population n'est pas en reste, pour qui le message n'est pas très clair. Il y a, au sein du milieu de la santé, tout un débat qui a cours sur la question de savoir si l'on peut forcer les fournisseurs de soins de santé à se faire vacciner. Les professionnels de la santé ont jugé qu'une telle chose était impensable, que la vaccination devait être volontaire.
    Le sujet soulève encore beaucoup de discussions.
    Ce qui m'inquiète surtout, c'est l'absence de financement de la part du gouvernement fédéral. Je vois dans mon esprit des boîtes et des boîtes de vaccins laissées sur les quais en attendant d'être livrées. Or, la prise en charge de ces vaccins et le lancement d'une campagne de vaccination de masse entraînent des coûts énormes. En Colombie-Britannique, on estime que la vaccination va coûter entre 8 $ et 10 $ par personne, selon qu'elle vit dans une région isolée ou non. La province va devoir dépenser 25 millions de dollars de plus si 70 p. 100 des habitants se font vacciner. Les services de santé en Colombie-Britannique sont déjà en situation déficitaire. Ils doivent réduire leurs dépenses. Les gouvernements provinciaux, eux, se trouvent dans le même bateau.
    Savez-vous si des programmes de vaccination de masse ont déjà été entrepris, des programmes où le gouvernement fédéral n'a payé que pour le produit lui-même et non pour la vaccination de masse?
    Une voix: Non.
    Qui veut répondre à la question?
    Certaines personnes ont fait non de la tête. Je vais donc continuer.
    D'accord. Vous ne voulez pas d'explications.
    Ce qui m'inquiète, c'est qu'il ne fournira pas de fonds en raison des déficits auxquels les provinces et les autorités en matière de santé sont confrontées. Pensez-vous que, si le gouvernement fédéral partageait une partie des coûts, qui sont évalués à 25 millions de dollars, cela permettrait de faire en sorte que les gens se fassent vacciner dans le cadre de ce programme plutôt théorique de vaccination massive?
    Je pense que toute aide financière supplémentaire contribue à faire une différence. Comme je l'ai déjà mentionné, nous croyons que les autorités de la santé publique vont réorganiser leurs activités pour faire en sorte que cette vaccination ait lieu. Toutefois, les fonds additionnels vont leur permettre de faire le travail de manière plus efficace.
    Madame Lynkowski, pensez-vous que les responsables de la santé en Colombie-Britannique vont être en mesure de trouver les ressources dont elles ont besoin, et j'inclus dans celles-ci les infirmières, le temps de déplacement, les fournitures, la diffusion de messages, de dépliants, ainsi de suite, sans aide fédérale additionnelle, c'est-à-dire sans les 25 millions de dollars?
    Non. Je ne peux parler au nom des autres régions, leur situation étant différente. Je pense que chaque région, chaque province et territoire va réagir différemment, puisque leur capacité d'intervention n'est pas la même. Ils possèdent tous, en fait, une capacité d'intervention différente. Il faut donc tenir compte du contexte. Comme il existe des lacunes à ce chapitre, ainsi que nous l'avons déjà mentionné, toute aide additionnelle, peu importe le montant, serait vraisemblablement bien accueillie.
    Je ne veux pas m'exprimer au nom des autres groupes, mais je sais que plusieurs secteurs — par exemple, le syndicat représentant les infirmières et l'Association médicale canadienne — considèrent les coûts comme un problème de taille. Par exemple, nous voulons que tous les travailleurs soient munis de masques adéquats, sauf que nous ne savons pas où trouver les fonds pour les acheter.
(1630)
    Merci beaucoup.
    Monsieur Carrie.
    Merci beaucoup, madame la présidente.
    Je remercie les témoins d'être venus nous rencontrer. Je tiens à dire que le gouvernement fédéral prend ses responsabilités très au sérieux. Nous avons déjà investi plus de 300 millions de dollars dans l'achat de vaccins, et plus de un milliard de dollars dans le plan de lutte contre la pandémie. Quand nous comparons cela à la situation qui existait au moment de la crise du SRAS, nous constatons que de grands progrès ont été réalisés. Il est vrai qu'il y a toujours place à l'amélioration, comme vous l'avez si bien dit.
    Je voudrais parler des travailleurs de première ligne. Je suis chiropraticien de formation. J'ai travaillé dans une clinique multidisciplinaire. Pendant la crise du SRAS, nous avons vu défiler beaucoup de personnes. J'ai rencontré des médecins de famille qui avaient de sérieuses inquiétudes au sujet des divers messages qui étaient transmis.
    Vous avez, dans les sept points que vous avez soulevés, insisté sur le fait que nous devons nous appuyer sur des renseignements qui sont fondés sur des preuves. Nous sommes tous du même avis. Toutefois, nous avons entendu au cours de nos délibérations, qui nous permettent de nous tenir à jour, des preuves et des opinions contradictoires.
    Mon collègue du NPD a parlé du vaccin saisonnier. D'après une étude non publiée, la personne qui reçoit le vaccin contre la grippe saisonnière est plus susceptible d'attraper le virus H1N1. Les provinces ont adopté des protocoles différents. Comment faire pour n'avoir qu'un seul messager? Comment s'y prendre? Vous avez parlé de directives qui sont publiées sur Internet et qui contiennent des renseignements à jour. Le ministre a dit à la Chambre que les renseignements que nous possédons sont à jour, qu'ils sont fondés sur des preuves. Nous semblons encore avoir de la difficulté à transmettre le message. Je me demande si vous avez des suggestions à formuler à ce sujet.
    Vous avez posé plusieurs questions.
    Docteur Kumar, je vous ai vu secouer la tête vigoureusement. Vous aimeriez peut-être répondre en premier. Nous entendrons ensuite Mme Fralick et ensuite Mme Lynkowski.
    Je secouais la tête à cause de cette étude non publiée qui laisse entendre que le vaccin saisonnier contre la grippe nous expose à de plus grands risques pour ce qui est du H1N1. Je pense que... Cette étude n'a pas été publiée. Il s'agit en fait d'une rumeur. Je n'y accorde pas beaucoup d'importance, surtout que cette question a été examinée par de nombreux autres groupes, dont le nôtre. Ils ont rejeté cette conclusion. En fait, la majorité des études publiées — je dirais neuf sur dix — affirment que le vaccin saisonnier n'aura aucun effet. Il y a une ou deux études qui prétendent qu'il aura un effet protecteur. Donc, je n'accorderais pas beaucoup d'importance à une étude non publiée à ce stade-ci.
    Je suis d'accord avec vous, sauf que vous soulevez des points intéressants. Vous dites que ces études affirment telle et telle chose, sauf que vous êtes un expert en la matière. La population, elle, reçoit des messages contradictoires. Je me demande s'il est possible de n'avoir qu'un seul messager.
    Il y a des médecins de première ligne qui, au cours d'une journée normale de travail, voient une cinquantaine de patients. Le virus, lorsqu'il va frapper, va susciter la crainte au sein de la population. Vous avez parlé des facteurs psychologiques et je suis heureux de constater que mon collègue a lui aussi soulevé la question. La personne qui a un petit rhume de cerveau va se présenter au bureau d'un médecin. Or, celui-ci ne verra pas une cinquantaine de patients mais plutôt une centaine. Il faut que le message soit transmis aux travailleurs de première ligne.
    On me dit que la communication entre le gouvernement fédéral, les provinces et les territoires est très bonne. Je me demande quelles mesures vous avez prises, ou vous comptez prendre, pour bien informer les différentes régions et municipalités afin que leurs besoins et leurs exigences soient pris en compte, que les travailleurs de première ligne soient bien renseignés eux aussi.
    Madame Fralick, voulez-vous répondre?
    Merci.
    D'abord, j'ai effectivement parlé des preuves, mais des preuves « disponibles », parce qu'elles ne le sont pas toujours. Il ne faut surtout pas oublier que nous suivons l'évolution de cette crise en temps réel. Nous apprenons sur le tas. Il y a toute une série de facteurs à prendre en considération. Les preuves ne sont pas nécessairement rigoureusement scientifiques. Nous nous fondons sur les meilleures pratiques qui existent. Nous devons nous assurer que tous les intéressés partagent les nouvelles données qu'ils récoltent au jour le jour.
    Vous avez dit que vous avez travaillé dans une clinique multidisciplinaire. Ce que j'ai oublié de mentionner, mais il en est question dans la lettre que nous vous avons transmise il y a une ou deux semaines de cela, ce sont les préoccupations des travailleurs à temps partiel ou des travailleurs affectés à diverses cliniques, qu'il s'agisse d'infirmières, de physiothérapeutes, de médecins qui se déplacent d'une clinique à l'autre et qui doivent composer avec des politiques différentes.
    Je pourrais vous donner d'autres exemples, mais pour ce qui est des messages qui sont diffusés, j'aimerais bien vous fournir une réponse satisfaisante. Tout ce que je peux dire à l'heure actuelle, c'est que nous avons l'Agence de la santé publique du Canada et l'administrateur en chef de la santé publique, vers qui les gens se tournent de plus en plus et qui est considéré comme l'unique source d'information. Nous pourrions faire mieux à ce chapitre, insister sur le fait qu'il constitue l'autorité en la matière. Les renseignements changent au jour le jour mais c'est à lui que nous nous adressons.
    Les provinces et les territoires collaborent bien ensemble, mais comme je l'ai déjà mentionné, je crois qu'il est essentiel de transmettre le même message aux Canadiens. Il faut s'en remettre à l'administrateur en chef de la santé publique pour les renseignements.
(1635)
    Merci.
    Monsieur Dufour.

[Français]

    Merci beaucoup, madame la présidente. Je tiens à remercier tous les témoins de leurs éclaircissements.
    Nous étudions le dossier de la grippe H1N1 depuis plusieurs semaines. On a rencontré énormément de témoins, et je pense qu'on a déjà un très bon aperçu de la chose.
    Un élément m'a toujours frappé, et on en a parlé aujourd'hui. Ça revient, et j'aimerais faire un lien avec ce qu'a dit mon collègue, M. Carrie. On remarque que beaucoup de spécialistes et de gens sur la ligne de front ne veulent pas se faire vacciner. Pourtant, ils ont accès à beaucoup d'informations sur les bienfaits du vaccin.
    M. Kumar va pouvoir, peut-être, nous donner un coup de pouce pour déboulonner ces mythes. Il n'y a pas de solution miracle, mais connaissez-vous une approche ou une manière permettant d'augmenter substantiellement le taux d'employés qui se font vacciner? On comprend qu'on ne peut pas les forcer à se faire vacciner, mais y aurait-il une stratégie ou une manière de faire augmenter ce taux?

[Traduction]

    Qui voudrait répondre?
    Merci, madame Lynkowski.
    Je vais dire quelques mots à ce sujet.
    Il est vrai que nous sommes confrontés à un défi bien réel. Comme nous l'avons déjà mentionné, l'Agence de la santé publique peut vigoureusement encourager les travailleurs de la santé à se faire vacciner, mais elle ne peut pas les forcer.
    C'est un problème de taille, car les travailleurs de la santé lisent eux aussi, comme les autres Canadiens, les journaux. Ils sont aussi touchés que les autres citoyens, et ce, même s'ils ont accès à plus d'informations que nous, les non-spécialistes. Nous devons, à mon avis, revoir la vaste stratégie de communication qui a été mise en place, puisqu'elle vise également les travailleurs de la santé, et encourager ceux-ci à se faire vacciner. J'espère que, cette année, les pourcentages vont augmenter, étant donné que les gens sont beaucoup plus sensibilisés au virus de la grippe H1N1.
    Docteur Kumar.
    Vous avez raison. Certains de mes collègues ont affirmé, indirectement, qu'ils entretiennent des doutes au sujet du vaccin. Franchement, je trouve cela ahurissant.
    Les gens hésitent à se faire vacciner pour plusieurs raisons. Le problème, c'est qu'il y a beaucoup de faux renseignements qui circulent à l'heure actuelle. La meilleure façon de corriger cette situation, c'est de transmettre des informations claires et précises. Il faut pour cela approfondir les recherches, avancer des chiffres.
    Permettez-moi de vous donner un exemple. On estime que durant la pandémie de la grippe porcine, en 1976, une personne sur 100 000 a été atteinte du syndrome Guillain-Barré — ce qui est grave, surtout que la pandémie n'a jamais eu lieu. Or, si elle avait effectivement eu lieu, comme ce sera clairement le cas ici, le taux de mortalité aurait été de un pour 2 500. Soit dit en passant, la grippe provoque le syndrome Guillain-Barré chez une personne sur 100 000.
    Donc, la grippe peut provoquer le syndrome Guillain-Barré dans une proportion égale, sauf que le taux de mortalité est de un pour 2 500.
    Docteur Kumar, auriez-vous l'obligeance d'expliquer ce que c'est?
    Excusez mon ignorance.
    Le syndrome de Guillain-Barré est une maladie auto-immune qui pousse le système immunitaire du corps à se battre contre lui-même et, en l'occurence, à s'attaquer aux nerfs périphériques, ce qui entraîne essentiellement une paralysie pouvant durer des semaines ou, à l'occasion, une paralysie permanente. C'est donc une maladie qu'il faut éviter à tout prix, mais pour vous dire franchement, elle ne touche qu'une personne sur 100 000 cas de grippe normale.
    Je crois qu'il faut séparer l'ivraie du bon grain, puis diffuser la bonne information au public.
(1640)
    Allez-y, monsieur Dufour.

[Français]

    On parlait justement de transmettre de l'information exacte et de réfuter certaines nouvelles tronquées qui pourraient se faufiler. Cela m'amène à me poser des questions sur les médias.
    Pensez-vous que ceux-ci ont joué leur rôle et mis suffisamment l'accent sur, par exemple, les bienfaits de la vaccination ou les problèmes qui pourraient se manifester si la pandémie prenait effectivement forme? Pensez-vous que les médias traditionnels ont été un allié en ce qui a trait à la grippe H1N1?

[Traduction]

    Je crois que les médias ont leurs propres intérêts, comme tout le monde.
    Est-ce que j'aurais voulu qu'ils mettent davantage l'accent sur l'importance de la vaccination? Oui.
    Comment s'y prendre pour faire ressortir le message? Je ne sais pas. Peut-être au moyen de créneaux publicitaires. Mais, de toute évidence, la vaccination sera une question cruciale parce que si on ne parvient pas à atteindre un taux de vaccination suffisant, on assistera à une éclosion de cas très graves au cours des six prochains mois.
    Merci beaucoup.

[Français]

    Madame Fralick...

[Traduction]

    Allez-y.
    Merci.
    Je crois que les médias se trouvent dans une position très difficile, parce qu'ils doivent raconter des histoires, rapporter des nouvelles, informer les gens — un mandat qui ne correspond pas toujours à nos besoins en tant que fournisseurs de soins de santé.
    Je me contenterai toutefois d'ajouter qu'à Toronto, environ 60 personnes atteintes de troubles mentaux très graves se jettent sous le métro chaque année, et on n'en entend pas parler dans les médias. Il y a une entente muette entre les médias. Pourquoi? Parce que la recherche montre que cela risque de provoquer des actes d'imitation.
    Je crois que les médias peuvent et veulent agir de manière très responsable dans la façon dont ils traitent les questions. Nous devons peut-être tisser de meilleurs liens avec les médias et les considérer sous un autre angle pour qu'ils deviennent, eux aussi, des intervenants dans ce dossier.
    Merci. Ce sont là des paroles d'une grande sagesse.
    Madame Davidson.
    Merci, madame la présidente, et merci à nos témoins de cet après-midi.
    Nous étudions ce dossier depuis pas mal de temps, et à juste titre. Chaque personne que nous rencontrons nous fait part d'un point de vue différent. Nous apprenons sans cesse, et c'est une bonne chose. Ce qu'on nous dit est encourageant. Je pense que nous allons dans la bonne direction.
    Il est également encourageant d'entendre des gens comme le Dr Kumar mentionner que nous faisons du progrès. Mais je crois que personne n'ira jusqu'à dire que nous sommes prêts, et c'est judicieux. C'est une bonne attitude à prendre. Nous ne saurons peut-être jamais si nous allons être prêts un jour ou l'autre. Nous avons besoin d'un plan fluide qui évoluera sans cesse au gré des événements et qui nous permettra de réagir en conséquence. Le plan d'intervention immédiate vise à mettre en place le plus de stratégies différentes pour que nous puissions réagir de bien des façons. C'est ce que nous avons essayé de faire et, d'après les personnes à qui nous avons parlé, nous allons dans la bonne direction. Nous ne sommes pas encore rendus au but, comme tout le monde en conviendrait, mais nous sommes sur la bonne voie.
    Nous avons travaillé en très étroite collaboration avec les provinces et les territoires. La planification en cas de pandémie repose sur une hiérarchie, si on veut s'exprimer ainsi, de façon à ce que les différents paliers de gouvernement s'occupent de différentes choses. C'est un point extrêmement important dont on doit être conscient. Aucun pallier de gouvernement ne peut, à lui seul, répondre aux besoins de tout le monde.
    Nous veillons à ce que des stratégies soient mises en place dans les provinces et les territoires. Nous avons publié certaines directives provisoires sur des mesures de prévention et de contrôle de l'infection à l'intention des travailleurs de la santé et des services d'urgence. Pouvez-vous nous en dire davantage là-dessus, madame Lynkowski? Vous occupez-vous de cet aspect?
(1645)
    Nous n'y avons pas travaillé directement par l'entremise de l'ACSP, à l'exception de nos médecins hygiénistes. Je serais d'accord pour dire que les mécanismes et les forums dont nous disposons maintenant et qui n'existaient pas durant l'épidémie du SRAS, ont permis une intervention coordonnée et uniformisée. C'est particulièrement vrai pour la coordination entre le gouvernement fédéral et les provinces et territoires. Le travail relatif au virus H1N1 est une véritable réussite sans précédent. Grâce à une meilleure coordination et communication, nous avons pu nous allier avec certaines des associations de soins de santé et d'autres fournisseurs de soins primaires.
    Quelqu'un d'autre a-t-il des observations à faire sur le travail avec les fournisseurs de services d'urgence et les premiers intervenants? Non?
    Une chose dont on a parlé aujourd’hui, c’est l’importance de la communication pour convaincre les gens que c’est la bonne chose à faire. Quand je parle aux gens sur le terrain, j’entends souvent la question « pourquoi? » — pourquoi se faire vacciner? Je pense que nous avons raté la cible côté communication. Comment faire passer le message? Je l’ignore. Il faut une approche multidimensionnelle. Je ne pense pas qu’il existe une seule façon d'y procéder.
    Nous avons évoqué publiquement la possibilité de vacciner les membres du comité. Il est plus important de vacciner les travailleurs de la santé que de vacciner les huit députés qui siègent au comité. Les travailleurs de la santé sont considérés comme des gens ayant une connaissance spéciale. S’ils ne vont pas se faire vacciner, alors pourquoi les autres le devraient? Ce sont les travailleurs de la santé qui devraient connaître les faits. Nous avons besoin d’une meilleure stratégie de communication et d’éducation pour les travailleurs de la santé.
    Madame Fralick.
    Un des arguments que j’ai fait valoir, c’est justement que la communication pose problème. À mon avis, on sous-estime le travail des gens qui ont mis en place ces processus. Les gens à Santé Canada et à l’ASPC ont fait tout leur possible pour instaurer les bonnes stratégies, et certaines d’entre elles sont très efficaces. Mais on entend dire sans cesse que le message ne passe pas. Nous ne pouvons pas céder à la complaisance. Nous devons continuer à transmettre le message, puis à examiner d’autres solutions, comme les associations de fournisseurs de soins de santé.
    Et je félicite certainement ceux qui ont fait tout ce beau travail sur le plan de la communication. Je n’essayais pas de sous-estimer leur contribution, mais je crois que nous devons envisager d’autres moyens plus innovateurs, dans la mesure du possible, et poursuivre ce processus.
    Merci.
    Docteur Martin.
    Merci beaucoup, madame la présidente.
    Et merci à tout le monde d'être des nôtres aujourd'hui.
    En toute franchise, je dois dire que le Dr Kumar et moi avons suivi ensemble nos études en médecine; alors si je suis gentil avec lui, vous saurez pourquoi. C’est parce que je connais tous les secrets de l’école de médecine; voilà pourquoi.
    Et n'oubliez que vous aurez la parole sous peu, docteur Kumar.
    Merci, madame la présidente.
    Voici ma première question pour le Dr Kumar. Si l’on évalue nos réserves de respirateurs, c’est-à-dire le type et le nombre de ces appareils, ainsi que les médicaments à administrer aux patients qui sont intubés, mis sous sédation et sous oxygénation aux soins intensifs, dispose-t-on d’une réserve suffisante sur ces deux plans?
    II y a quelques mois, je vous aurais dit être très préoccupé par la question des respirateurs. D’après notre modèle, nous avons maintenant probablement un nombre suffisant ou quasi-suffisant d’appareils. Si on tient compte des stocks supplémentaires dans différents lieux — les réserves fédérales, etc. —, je crois que nous sommes en bonne posture. Mais cela risque quand même d’être serré.
    Et je dois vous dire qu’une des choses qui me déçoivent dans la situation actuelle, c’est que nous n’avons pas trouvé une bonne stratégie pour redéployer des ressources d’un endroit à l’autre. Comme c’est le cas pour toute pandémie, celle-ci tombera comme des gouttes de pluie sur le pays. On ne sait pas qui en seront touchés, ni à quel moment ou à quelle intensité. On peut toutefois dire que, dans l’ensemble, nos modèles laissent entendre que nous sommes presque prêts, mais certaines régions risquent d’être dépassées parce qu’elles seront durement frappées. Quant à savoir comment redéployer des ressources d’un endroit à l’autre, la réponse ne me paraît pas claire. Oui, nous avons conclu des ententes pour accorder des permis aux infirmières et aux médecins, mais sur le plan opérationnel, comment s’y prendre? C’est donc un sujet d’inquiétude.
    L’autre préoccupation, comme vous l’avez mentionné, ce sont les problèmes subtils liés à la chaîne d’approvisionnement qui, selon moi, n’ont pas été réglés adéquatement. Par exemple, quand nous avons été touchés au Manitoba, nous nous sommes rendu compte que les patients avaient absolument besoin de doses massives de sédation pour faire en sorte qu’ils restent sous oxygénation. Comme il n’est pas naturel d’être branchés à un respirateur, les patients ont besoin d’un certain niveau de sédation. Mais ils en ont besoin en quantité massive. Nous avons épuisé nos stocks de sédatifs à deux reprises. Comme nous étions la seule région au Canada à être touchée, nous avons réussi à importer des sédatifs. Mais si de nombreuses régions sont frappées en même temps, la situation risque de poser problème.
    Juste pour vous donner une idée, Keith, nous avons terminé en deux mois une quantité de sédatifs qui étaient censés nous durer pendant 18 mois.
(1650)
    C’est une statistique choquante, n’est-ce pas?
    J’ai deux petites questions. Pouvez-vous nous parler du concept de l’immunité collective et nous expliquer pourquoi il est vraiment important d’atteindre un niveau d’immunisation de 70 p. 100 pour pouvoir retarder la dissémination du virus?
    Deuxièmement, d’après votre opinion professionnelle, si quelqu’un est vacciné contre le H1N1, en cas de mutation du virus, pensez-vous qu’il y aura éventuellement une réactivité croisée entre le virus et sa version mutée?
    Pour ce qui est de la mutation, je pense que personne ne sait au juste si une mutation est chose probable. Nous ne savons même pas ce qui s’est passé en 1918 — c’est à cet événement que vous faites allusion —, lorsque la deuxième vague était bien pire que la première. Pour vous dire franchement, je ne m’attends pas à ce qu’il y ait une mutation importante. C’est possible, mais quant à savoir si le vaccin pourra ensuite la combattre, je l’ignore.
    Je suis désolé, Keith, quelle était votre première question?
    C'était sur l'immunité collective et le fait d'essayer d'atteindre la cible de 70 p. 100.
    Essentiellement, selon le principe de l’immunité collective, il n’est pas nécessaire de vacciner tout le monde pour créer une immunité efficace au sein de la population entière. Il suffit d’immuniser un certain pourcentage. Ce pourcentage dépend de nombreux facteurs, comme le taux d’attaque, etc. En général, plus la population est nombreuse… Si nous parvenons à vacciner jusqu’à 50 ou 60 p. 100 de la population, il se peut que ce soit suffisant, mais pour l’instant, nous sommes loin de cette cible, à entendre la réaction des gens sur ce qu'ils sont prêts à accepter.
    Ce serait, il me semble, un bon argument pour encourager les gens à obtenir le vaccin parce que c’est dans l’intérêt public; en effet, en se faisant vacciner, nous aidons à protéger nos concitoyens contre le virus et à retarder sa propagation.
    Absolument. Je crois que c'est tout à fait vrai.
    Permettez-moi d’ajouter quelque chose en aparté. Beaucoup de gens pensent qu’ils ne seront pas touchés, mais sachez que la chose la plus triste, c’est de voir un parent devant son enfant malade — car bon nombre des gens qui sont touchés sont des jeunes — ou une mère qui se demande pourquoi elle n’a pas fait vacciner son enfant aux prises avec une maladie terrifiante. Je ne saurais trop insister sur l’importance de la vaccination.
    Merci.
    Monsieur Uppal.
    Merci, madame la présidente, et merci aux témoins de comparaître.
    Nous étudions ce dossier depuis pas mal de temps, et c’est une bonne chose. J’ai visité l’une des principales localités dans ma circonscription, Fort Saskatchewan, où je me suis entretenu avec notre chef adjoint de service d’incendie et notre conseiller principal en santé et sécurité pour connaître leur expérience sur le terrain. À vrai dire, j’ai été très rassuré. Ils disposent d’un plan qui existe depuis longtemps. Selon le chef adjoint de service d’incendie, une partie du plan sert également aux mesures d’urgence en cas de catastrophe pour d’autres problèmes. Dans notre circonscription, on trouve des usines de valorisation du pétrole et d’autres usines de produits chimiques; voilà pourquoi il y a un plan de mesures d’urgence en cas de catastrophe, et on l'a modifié pour une éclosion éventuelle du virus H1N1.
    Le plan de continuité des activités est donc en place. Les représentants municipaux ont déterminé les postes prioritaires à l’intérieur même de leur structure. Ils ont trouvé des stratégies pour éventuellement déplacer le personnel d’une division à l’autre; ils ont également songé à la possibilité du télétravail. C’est très rassurant de voir qu’ils ont déjà trouvé des solutions à toutes ces questions.
    Quand je leur ai demandé s’ils avaient des améliorations à suggérer, ils m’ont dit qu’ils reçoivent beaucoup d’informations utiles mais qu’il y en a beaucoup trop; ils ont du mal à rester à l’affût de toutes les informations qui entrent. Un des médecins ici présents vient de nous dire la même chose, et c’est ce que nous ont également signalé d’autres témoins par le passé; il est difficile pour certaines de ces personnes, qui sont déjà très occupées par leur travail et par d’autres priorités quotidiennes, de consacrer beaucoup de temps à ce genre de lecture. La suggestion serait de simplifier l’information.
    Pouvez-vous nous dire si cela correspond à votre expérience aussi?
(1655)
    Je peux en parler du point de vue de l’ACSP. Encore une fois, il s’agit d’une préoccupation légitime. C’est quelque chose que nous avons constaté, nous aussi, et nous travaillons actuellement avec l’Agence de santé publique ainsi qu’avec l’Association médicale canadienne, le Collège des médecins de famille et la Société nationale de spécialistes pour la médecine communautaire afin de nous assurer qu’il existe, pour ainsi dire, des versions sommaires des meilleures preuves dont nous disposons — des lignes directrices à l’intention des médecins de premier recours. On a reconnu cette préoccupation. Je crois que l’agence de santé publique donne suite à cette préoccupation en essayant de fournir des outils plus conviviaux, et bon nombre de nos organismes travaillent avec ces gens pour trouver une solution concrète par l’entremise de nos réseaux respectifs.
    Docteur Kumar.
    Je ne sais pas comment faire pour simplifier le message. Je pense que vous avez raison au sujet du nombre écrasant d’informations qui circulent. Pour être parfaitement honnête avec vous, il y a beaucoup de mauvaises informations. Je crois que les militants contre la vaccination ont vraiment sauté sur cette occasion.
    Je ne sais pas comment on pourrait remédier à la situation, sauf en restant fidèle au message. Il faut amener toutes les parties prenantes à transmettre le même message, peut-être même à faire une campagne publicitaire à la télévision. C’est ce que nous avons fait pour la lutte contre tabac, alors pourquoi pas la même chose pour la vaccination? À part cela, je ne sais pas.
    En passant, pour ce qui est de la préparation, je pense que le travail est, dans l’ensemble, très efficace au niveau local. Ce qui me préoccupe relativement à la préparation, c’est surtout la coopération entre les sites. Autrement dit, la santé publique se porte bien sur ce plan, mais sachez que les unités de soins intensifs gravitent depuis toujours à l’extérieur du domaine de la santé publique. La santé publique ne va pas plus loin que l’hôpital — c’est-à-dire la disponibilité de lits — mais le service des soins de santé est une boîte noire; donc, si on se trouvait dans une situation où il fallait absolument collaborer, on s’aventurerait sur un terrain inconnu. À mon avis, c’est l’un des gros défauts: la coopération des unités de soins intensifs à la grandeur du pays, si jamais cela devenait nécessaire.
    J'ai une petite observation à faire.
    Comme je l’ai mentionné, je vivais à Toronto durant l’épidémie du SRAS et j’assumais alors la présidence d’un hôpital. La continuité des activités n’était pas un gros problème à l’époque, mais tout le monde voulait mettre la main sur un document considéré comme la référence en matière de planification de la continuité des activités; il s’agissait du document de Sherry Cooper, une économiste pour TD Bank ou CIBC… Désolée, je vois qu’on me fait signe. En tout cas, je ne suis pas censée dire…
    En effet.
    Je vous remercie beaucoup. Pourriez-vous juste prendre une minute pour conclure rapidement? Nous siégerons ensuite à huis clos. Il n’y aura pas d’autres questions puisque nous allons poursuivre la séance à huis clos.
    Puis-je poser une question?
    Non, madame Wasylycia-Leis, nous allons poursuivre nos travaux à huis clos. Je regrette.
    Je pensais que vous aviez dit que ce serait à 17 heures.
    Nous vous remercions infiniment de votre présence aujourd’hui et de toutes les observations que vous avez faites. Elles étaient très pertinentes.
    Je vais suspendre la réunion. Nous avons quelques travaux très importants à l'ordre du jour, et je sais que Mme Wasylycia-Leis veut vous poser une question; je vais donc vous accorder trois minutes. Madame Wasylycia-Leis, cela vous convient-il? Nous allons prendre une pause de trois minutes pour retirer les caméras. Nous siégerons ensuite à huis clos jusqu’à 17 h 30, avant de passer à notre autre réunion sur les maladies neurologiques.
    Je vais interrompre la séance pendant trois minutes, et nous allons reprendre les travaux tout de suite après. Les personnes qui ne siègent pas au comité auraient-elles l'obligeance de quitter la salle, parce que nous allons poursuivre la séance à huis clos?
    Merci.
    [La séance se poursuit à huis clos.]
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