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FEWO Réunion de comité

Les Avis de convocation contiennent des renseignements sur le sujet, la date, l’heure et l’endroit de la réunion, ainsi qu’une liste des témoins qui doivent comparaître devant le comité. Les Témoignages sont le compte rendu transcrit, révisé et corrigé de tout ce qui a été dit pendant la séance. Les Procès-verbaux sont le compte rendu officiel des séances.

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Emblème de la Chambre des communes

Comité permanent de la condition féminine


NUMÉRO 011 
l
2e SESSION 
l
41e LÉGISLATURE 

TÉMOIGNAGES

Le lundi 10 février 2014

[Enregistrement électronique]

(1530)

[Français]

    J'aimerais vous souhaiter la bienvenue à la 11e séance du Comité permanent de la condition féminine. Aujourd'hui, nous poursuivons notre étude sur les troubles de l'alimentation chez les filles et les femmes.
    Au cours de la première heure, nous accueillons les Dres Leora Pinhas et Gail McVey. Elles présenteront chacune un témoignage d'environ 10 minutes. Par la suite, nous passerons à la période de questions.
    Mesdames, bienvenue de nouveau à notre comité.

[Traduction]

    Merci. Je vous remercie de nous avoir invités.
    Je vais tenter d'être claire et concise. J'ai lu les témoignages des témoins précédents. Je m'efforcerai de ne pas répéter leurs propos, même si je suis en grande partie d'accord avec eux. Comme vous entendrez des témoins qui vous donneront des statistiques et vous brosseront un tableau de la situation, j'ai préféré vous parler de mon expérience, mais bien entendu, je commencerai par vous donner quelques chiffres pour établir le contexte.
    Hier, j'ai fait une recherche sur la page Web des IRSC pour voir quelles sommes avaient été consacrées aux subventions de fonctionnement dans le domaine des troubles de l'alimentation ces cinq dernières années. On a versé un total de 7,5 millions de dollars, ce qui me semblait beaucoup jusqu'à ce que je fasse la même recherche pour la schizophrénie et que je constate qu'on y avait consacré 86 millions de dollars, soit plus de 10 fois plus. Les troubles de l'alimentation sont tout aussi graves et plus répandus que la schizophrénie; c'est pour cela que j'ai fait la comparaison avec la schizophrénie. Ce sont donc 7,5 millions de dollars contre 86 millions de dollars.
    J'aimerais vous donner d'autres chiffres.
    Selon les données de Statistiques Canada, le taux d'obésité chez les adolescentes au Canada est de 9 %. Le taux de troubles de l'alimentation, lui, est approximativement de 18 %. Le taux de nouveaux cas de troubles de restriction de l'alimentation chez les enfants de 5 à 12 ans est quatre fois celui des nouveaux cas de diabète de type II au sein du même groupe.
    Au Canada, il n'y a pas de programme intensif en santé mentale spécialisé dans le traitement des enfants souffrant de troubles de l'alimentation. C'est aussi le cas pour les adolescents dans au moins trois provinces et dans les trois territoires.
    Les résidents en psychiatrie sont plus susceptibles d'être exposés aux stéréotypes négatifs des troubles de l'alimentation et d'être dissuadés de traiter les patients qui en souffrent que de recevoir la formation pertinente.
    Je suis ici aujourd'hui parce que je suis l'une des principales expertes en psychiatrie de l'enfant et de l'adolescent, ce qui est un peu inquiétant, car, comme je n'ai pas encore une longue carrière, je ne devrais pas occuper un poste de niveau supérieur. Si j'occupe ce poste, c'est qu'il n'y a personne de plus chevronné. J'ai lancé le programme de premiers soins pour les adolescentes souffrant de troubles mentaux alors que j'étais encore étudiante boursière. J'ai participé à la création de deux [Note de la rédaction: difficultés techniques]... programmes, un deuxième programme de traitement de jour, un programme en établissement et un programme externe. Je suis membre fondatrice et première présidente de l'Association des troubles alimentaires du Canada. Si j'ai fait tout cela, c'est qu'il n'y avait personne d'autre pour le faire.
    Il y a deux ou trois ans, j'ai cessé de demander des subventions de recherche aux IRSC. J'ai aussi abandonné l'idée de devenir professeure titulaire. Je resterai probablement professeure adjointe. J'ai récemment quitté un poste à temps plein à l'hôpital universitaire pour enfants qui dispense nos services spécialisés en troubles de l'alimentation, non pas parce que mon travail n'est pas à la hauteur — pendant ma carrière, j'ai reçu de nombreux prix pour mon travail —, mais parce qu'il y a trop d'obstacles et que j'en ai assez de tenter de les surmonter.
    S'il ne s'agissait que de moi, vous perdriez votre temps à m'écouter. Or, presque tous les pédopsychiatres du Canada qui ont tenté de travailler dans le domaine des troubles de l'alimentation vivent la même chose.
    S'il n'y a pas de psychiatre plus chevronné que moi, c'est qu'après 10 ans de frustration — le cycle semble durer 10 ans —, la génération précédente s'est épuisée et est partie.
    Je vois maintenant des collègues de ma génération qui quittent le domaine. Un peu partout au pays, des pédopsychiatres experts partent, laissant [Note de la rédaction: difficultés techniques]... des postes qui sont pourvus par des médecins récemment diplômés ayant peu de formation et moins d'expérience ou par des pédiatres, quand ils ne restent pas vacants. C'est ce qui se produit, à une exception près, dans l'ensemble des sept provinces qui pourraient avoir un programme de soins tertiaires ou de soins spécialisés intensifs pour le traitement des troubles de l'alimentation chez les adolescentes.
(1535)
    Docteure Pinhas, pourriez-vous ralentir un peu? Le son n'est pas très bon et les interprètes ont du mal à rendre votre témoignage si important.
    Merci beaucoup, docteure Pinhas.
    Oui, merci.
    Je reprends la dernière partie.
    Un peu partout au pays, des psychiatres chevronnés experts partent, laissant des postes à la tête de programmes de soins tertiaires, postes qui sont pourvus par des médecins récemment diplômés ayant peu de formation et moins d'expérience ou par des pédiatres, quand ils ne restent pas vacants. C'est ce qui se produit, à une exception près, dans l'ensemble des sept provinces qui ont actuellement un programme de soins tertiaires ou de soins spécialisés intensifs pour le traitement des troubles de l'alimentation chez les adolescentes.
    Accepterait-on une telle situation pour toute autre maladie grave? Que ferait-on si tous les cardiologues chevronnés cessaient de pratiquer la pédocardiologie? Ne serait-ce pas une crise? Accepterait-on que les programmes de cardiologie ne recrutent que de nouveaux diplômés n'ayant pas ou pratiquement pas de formation? Accepterait-on qu'ils recrutent des cardiologues n'ayant aucune formation en soins spécialisés aux enfants? Peut-être qu'un spécialiste de la chirurgie pédiatrique thoracique pourrait diriger les services de cardiologie. Après tout, le coeur se trouve à l'intérieur du thorax, n'est-ce pas? Cela devrait aller.
    Quand les familles cherchent un programme spécialisé, elles tiennent pour acquis que le traitement sera offert par des experts ayant la formation et l'expérience pertinentes. Pourquoi les enfants et les adolescents souffrant de troubles de l'alimentation n'auraient-ils pas aussi ce droit?
    Pourquoi? À cause de la discrimination qui a cours au sein du système de soins de santé et de santé mentale, et non pas dans la collectivité. Mes collègues chercheurs, universitaires et cliniciens n'aiment tout simplement pas les patients souffrant de troubles de l'alimentation et ils trouvent les gens comme moi dérangeants.
    Si vous soulevez la question du manque de formation, on vous répondra qu'on fait mention des troubles de l'alimentation pendant la formation et que c'est déjà beaucoup. Si vous dites qu'il faut plus de services, on vous répondra qu'il y en a déjà bien assez car, après tout, c'est une maladie rare. Si vous demandez une subvention de recherche pour mener une étude inédite sur les conséquences médicales à long terme des troubles de l'alimentation, on vous classera dans la catégorie de la nutrition et votre demande sera rejetée parce qu'aucune diététicienne ne participe à l'étude.
    À l'instar de bon nombre de mes collègues, j'ai baissé les bras. Je n'ai pas abandonné les personnes souffrant de troubles de l'alimentation. J'ai plutôt renoncé à pratiquer au sein des établissements médicaux qui ne savent pas soigner nos patients. Nous faisons ce que nous pouvons avec ce que nous avons. Nous saisissons toutes les occasions de plaider notre cause. Les institutions ne s'intéressent à nous que si nous obtenons des subventions, mais peu importe les besoins ou le montant des subventions, les troubles de l'alimentation sont rarement prioritaires dans les établissements.
    Je témoigne aujourd'hui parce que je vois des patients qui deviennent des malades chroniques, faute d'un accès rapide aux services dont ils ont besoin et qui sont dispensés dans le respect. J'en ai assez de voir des parents supporter l'humiliation et la discrimination dans l'espoir que leur enfant reçoive des soins. Aucun parent ne devrait être forcé de voir son enfant mourir lentement de faim parce qu'elle est trop malade pour la clinique externe ou les soins à domicile, mais qu'on refuse de l'admettre à l'hôpital parce qu'on n'aime pas s'occuper des cas de troubles de l'alimentation et qu'on n'en a pas envie.
    C'est la norme ici, au Canada, et c'est inacceptable.
    Que peut faire le gouvernement fédéral?
    Premièrement, il nous faut un registre national des troubles de l'alimentation afin que nous puissions suivre ceux qui en souffrent. À l'heure actuelle, il n'y a pas de base de données nous fournissant les données fiables dont nous avons besoin. Or, si nous ne mesurons pas l'ampleur du problème, c'est comme si le problème n'existait pas.
    Il nous faut une stratégie de recherche financée par le gouvernement fédéral. Les stratégies actuelles de financement font en sorte que nos collègues refusent de partager... [Note de la rédaction: difficultés techniques]... avec nous. Nous ne pouvons plus nous contenter de miettes. Il faut aussi financer l'infrastructure qui facilitera la formation et l'application des connaissances dans toutes les régions du pays et à tous les niveaux de formation.
    Des interventions, fondées sur des données probantes, ont mené à des taux de rétablissement de 60 à 70 % chez les adolescentes souffrant de graves troubles de l'alimentation, mais on ne dispense ces soins de façon cohérente et rapide nulle part au pays. En fait, ces services n'existent qu'à de rares endroits au pays, et les adolescentes qui ont la malchance d'en être privées sont condamnées à la maladie chronique et à une espérance de vie réduite.
    Notre pays doit agir maintenant.
    Ce cycle de négligence ne doit pas se répéter. Qu'il soit maintenant chose du passé.
    Merci.
(1540)

[Français]

    Merci beaucoup de votre témoignage passionnant, docteure Pinhas.
    Maintenant, je cède la parole à la Dre Gail McVey, qui dispose de 10 minutes.

[Traduction]

    Je vous parle aujourd'hui au nom de mes deux rôles. D'abord, à titre de chercheuse scientifique principale associée à l'hôpital pour enfants, où je me suis occupée pendant 17 ans d'un programme de recherche sur la prévention des troubles de l'alimentation. Ensuite, à titre de psychologue et de directrice d'un programme de formation provincial axé sur le traitement des troubles de l'alimentation et qui est financé par le ministère ontarien de la Santé et des Soins de longue durée.
    Ma recherche axée sur la prévention prône une approche qui tient compte du cheminement entier d'une vie et qui est centrée sur la promotion de la santé mentale afin de créer des mécanismes d'adaptation sains pour composer avec les facteurs de stress qui mènent à des troubles de l'alimentation.
    La première moitié de ma carrière de recherchiste a été financée par la Fondation ontarienne de la santé mentale, le Conseil ontarien des services de santé pour les femmes, ainsi que les IRSC grâce à la bourse pour l'application des connaissances. Au milieu de ma carrière, j'ai reçu un prix de l'Institut de la santé des femmes et des hommes, qui relève des IRSC.
    J'ai cerné des facteurs de stress normatifs chez les jeunes adolescents qui peuvent déclencher des troubles de l'alimentation chez les jeunes femmes. Cela a mené à l'élaboration, à la mise en oeuvre et à l'évaluation de la prévention des symptômes qui aboutissent à des troubles de l'alimentation chez les jeunes femmes.
    J'ai ensuite formé des praticiens en santé publique à l’échelle locale pour qu'ils puissent promouvoir la prévention. J'ai ensuite fait de la recherche sur le sujet. J'ai été la première à élaborer et à faire de la recherche sur un programme de prévention écologique fondé sur les écoles, qui est conçu pour prévenir les troubles de l'alimentation en faisant appel à la participation des élèves, garçons et filles, des parents, des enseignants, du personnel de l'école et de celui de la santé publique.
    En raison du risque de souffrir d'un trouble de l'alimentation dans les dernières années de l'adolescence, j'ai créé un partenariat avec des praticiens dans les services de santé pour étudiants à l'université, afin d'élaborer, de mettre en oeuvre et évaluer un programme de prévention destiné aux étudiants universitaires et dans le cadre duquel les éducateurs en santé servent d'agents du changement. J'ai transposé les stratégies fondées sur les preuves en programmes en ligne pouvant être consultés par les enseignants et des employés de la santé publique. J'ai jumelé le tout aux objectifs d'apprentissage du ministère de l'Éducation pour en accroître l'utilisation par les enseignants de l'Ontario, de la Nouvelle-Écosse et de la Colombie-Britannique.
    La coordination de mes activités de recherche sur la prévention et d’application des connaissances a été rendue possible grâce à ma participation active et bénévole à de nombreuses coalitions, notamment la Coalition ontarienne pour des écoles en santé, la Body Image Coalition of Peel et l'Association canadienne pour la santé en milieu scolaire et grâce aux ateliers face à face axés sur une prévention fondée sur les collectivités que j'ai tenus partout dans la province de l'Ontario.
    Ce que ma recherche de prévention comporte d'unique et de novateur, c'est qu'elle a pu accroître les facteurs de protection et décroître les facteurs de risque liés aux troubles de l'alimentation et à l'obésité. Ces stratégies de prévention font également la promotion d'un sentiment d'appartenance et d'attachement chez les jeunes. Cela leur permet notamment de se protéger contre une kyrielle de problèmes de santé mentale et de comportements à risque.
    J'ai élargi mon programme de recherche de deux manières depuis 2007. D'abord, j'ai réduit l'écart entre la prévention sur les troubles de l'alimentation et l'obésité, afin que l'on arrive à un terrain commun qui permet de promouvoir la santé. Ensuite, j'ai élargi la portée de mes partenariats afin qu'elle soit pancanadienne. À l'heure actuelle, je chapeaute un modèle de formation pour le développement professionnel qui vise à aider les promoteurs de santé de première ligne à intégrer la promotion de la santé mentale dans leur message au sujet d'un poids santé. De plus, je dirige une stratégie pancanadienne de mobilisation des connaissances, soit le groupe pour une stratégie nationale de prévention de l'obésité et des troubles de l'alimentation. Tout cela a été effectué grâce à un financement pilote de la part des IRSC, au montant de 68 000 $.
    Le caractère intermittent du financement de cette recherche a fait en sorte que ce programme de recherche a été interrompu. Des demandes concurrentes auxquelles font face les praticiens et les éducateurs en matière de santé publique, que j'ai également formés, ont noyé le besoin de mettre l'accent sur la prévention des troubles de l'alimentation et l'intervention précoce.
    Dans le domaine de recherche sur la prévention des troubles de l'alimentation, la prévention ciblée, qui se traduit par des interventions conçues pour les élèves du secondaire et qui ont pour objectif d'empêcher les premiers symptômes de se développer et de se transformer en troubles de l'alimentation, a produit les effets d'intervention les plus importants dans ce domaine de recherche. Cela veut donc dire que ces interventions sont les plus efficaces. En revanche, il n'existe pas de prévention ciblée pour les adolescents canadiens.
    Cette lacune dans le service, que l'on pourrait également appeler la vallée de la mort, coïncide avec la période à laquelle les jeunes sont le plus à risque de développer des symptômes de troubles de l'alimentation et de devoir composer avec ces enjeux de santé mentale. Jusqu'à 25 % des enfants et des jeunes Canadiens font face à des problèmes de santé mentale considérables, et 50 % de ces problèmes apparaissent avant l'âge de 14 ans. Les troubles de l'alimentation n'en font pas exception. Ils se retrouvent dans la même catégorie de prévalence et d'apparition.
(1545)
    Le tiers des jeunes qui risquent d'être atteints de problèmes de toxicomanie, dont la plupart sont des filles, ont également un trouble de l'alimentation concomitant. Et pourtant, il n'y a aucun programme au Canada qui traite la toxicomanie et le trouble de l'alimentation comme des troubles concomitants. En fait, il n'y a que l'organisation Rideauwood Addiction and Family Services d'Ottawa qui s'intéresse à notre champ d'étude sur les troubles alimentaires et leur traitement. Ainsi, cette petite organisation pourra être la première à mettre sur pied un centre de traitement et de prévention concomitante pour les troubles de l'alimentation et la toxicomanie.
    Il semblerait que nous soyons dotés, au Canada, de ressources et de politiques qui permettent de mettre l'accent sur la promotion de la santé de toute la population en amont. On accorde également de l'attention à la santé maternelle et au bien-être de la petite enfance, pour les enfants âgés de zéro à six ans. On s'intéresse aussi aux adultes. Toutefois, il existe un énorme fossé en ce qui a trait à la recherche en intervention et aux ressources disponibles pour les gens âgés de 6 à 19 ans ou de 6 à 24 ans.
    En travaillant avec l'Ontario Community Outreach Program for Eating Disorders, grâce au soutien généreux du ministère ontarien de la Santé et des Soins de longue durée, mes collègues et moi avons mis sur pied un programme de formation provincial. Cette approche, qui tient compte du cheminement entier d'une vie, offre de la formation et de la surveillance ainsi qu'un traitement pour les troubles de l'alimentation qui est fondé sur les données. Le programme vise à établir des partenariats entre les secteurs.
    Grâce à un petit investissement de 100 000 $ en 1994, nous avons sillonné la province de l'Ontario. Cela nous a permis d'identifier des champions qui, avec notre soutien, ont voulu se spécialiser dans le traitement des troubles de l'alimentation et éduquer les praticiens en soins de santé et les éducateurs pour qu'ils nous aident à recenser les troubles et à procéder à une intervention précoce, dans la mesure du possible.
    Grâce à un investissement supplémentaire de la part du ministère de la Santé de l'Ontario, nous avons pu créer un réseau provincial qui était le premier en son genre et qui rassemblait des fournisseurs de services spécialisés en troubles de l'alimentation.
    Malgré tous les efforts que nous déployons, nous ne pouvons combler la lourde demande en ce qui a trait à un traitement spécialisé. Il faut également tenir compte de la complexité croissante du sujet et des conditions de comorbidité qui accompagnent les troubles de l'alimentation, comme l'anxiété, la dépression ou la toxicomanie. Nous avons besoin d'aide de la part des fournisseurs de soins dans les domaines de la santé mentale et de la toxicomanie.
    Je vous recommande donc d'indiquer, dans votre rapport, que nous avons besoin de nous doter d'un système qui permettra de faire le suivi des troubles de l'alimentation à l'échelle nationale. Il nous faut un registre. Nous devons établir des lignes directrices pour traiter et prévenir les troubles de l'alimentation. Ces lignes directrices devraient comprendre des dispositions qui porteraient sur les troubles de l'alimentation des enfants et des adolescents, des adultes, ainsi que des jeunes adultes en transition. Nous avons besoin d'un mécanisme de transfert de connaissances pour que nous puissions utiliser ces lignes directrices dans plusieurs disciplines et départements.
    Nous avons besoin d'une chaire de recherche sur la prévention des troubles de l'alimentation et sur le traitement des troubles de l'alimentation. Il en faudrait une pour les adultes et une autre pour les enfants et les jeunes.
    Nous avons besoin d'une stratégie pour pouvoir communiquer avec les praticiens en soins primaires, notamment les médecins de famille, qui représentent souvent le premier point de contact pour le public. Malgré cela, ils sont les moins outillés pour reconnaître les troubles de l'alimentation et offrir une intervention en temps opportun.
    Enfin, en tant que domaine d'étude, nous devons rassembler les paliers fédéraux, provinciaux et territoriaux qui sont responsables de la santé mentale, afin que les troubles de l'alimentation fassent partie de sujets abordés en table ronde et que l'on parle notamment de la réduction des préjugés, de l'application des connaissances, des conseils de jeunes, des lignes directrices pour les fournisseurs de soins de santé, de la formation des interlocuteurs et des trousses d'outils.
    En bref, nous voulons mettre un terme à la discrimination à laquelle fait face le domaine des troubles de l'alimentation afin que nous puissions répondre aux besoins des personnes et de leurs familles, car elles ont désespérément besoin de notre aide.
    Merci.
(1550)

[Français]

    Merci beaucoup, docteure McVey.
    Nous allons maintenant commencer la période de questions.
     Madame Truppe, vous disposez de sept minutes.

[Traduction]

    Merci, docteure McVey et docteure Pinhas, d'avoir pris le temps de venir témoigner aujourd'hui, malgré vos horaires chargés.
     Docteure Pinhas, je suis ravie de vous revoir aujourd'hui. J'ai eu l'honneur et le plaisir de vous rencontrer la semaine dernière afin d'en apprendre davantage sur les troubles de l'alimentation. La séance a été très instructive. Merci d'avoir accepté de vous entretenir avec quelques députés.
    Bien sûr, il existe différentes approches dans le traitement des troubles de l'alimentation, comme c'est le cas pour d'autres maladies, et parce qu'il s'agit surtout d'une maladie psychologique. C'est ce que nous découvrons.
    Dans le contexte des troubles de l'alimentation, pourriez-vous nous dire quelle différence vous remarquez lorsque vous travaillez avec des jeunes en comparaison avec les adultes.
    Vous en avez parlé pendant notre conversation dans mon bureau. Vous avez dit que les jeunes présentent des défis particuliers en raison de leur profil psychologique.
    Qu'est-ce qui fonctionne lorsque vous travaillez avec les plus jeunes? Quelle pratique fonctionne le mieux, selon vous?
    D'abord, il existe un réel manque de recherche portant précisément sur les enfants. Nous savons qu'il faut adopter une approche pédagogique plutôt que d'essayer de traiter les enfants comme de petits adultes ou de petits adolescents.
    À l'heure actuelle, les enfants de 6 ou 7 ans atteints de troubles de l'alimentation que l'on accueille à l'hôpital seront traités avec les jeunes de 17 ans. C'est un problème. La plupart d'entre nous ne voudraient pas que leur enfant de sept ans fréquente des adolescents qui pourraient aborder des sujets qu'un enfant de sept ans ne peut comprendre. Ce qui semble fonctionner, c'est lorsqu'on travaille de concert avec les parents et qu'on les aide à trouver des solutions pour que leur enfant se remette à manger, tout en appuyant les parents en thérapie familiale, même s'il n'y a pas de recherches suffisantes.
    Nous avons des traitements fondés sur des données probantes qui fonctionnent pour les adolescents. Nous avons la recherche pour l'appuyer, mais encore là, il n'y en a pas suffisamment à notre goût. Lorsqu'on traite des adultes, on traite des personnes indépendantes qui n'ont pas le même genre de relations avec leurs parents.
    Concernant votre question sur le besoin d'avoir un éventail de traitements, le problème, c'est que même pour les adultes qui souffrent d'autres maladies, il existe différentes options de traitement. Pour l'insuffisance rénale, on pourrait faire une greffe de rein ou administrer une dialyse. Pour soigner la dépression, il existe différents types de thérapie. Toutefois, pour ce qui est des troubles de l'alimentation, on a décidé qu'il est suffisant d'offrir un programme par ville et, si le traitement ne fonctionne pas pour vous, tant pis. Vous avez le choix de réessayer ou de rester malade.
    Vous avez également parlé de certains programmes alimentaires et nutritionnels qu'on enseigne à l'école secondaire au Canada et de certaines conséquences malheureuses qu'ils ont entraînées.
    Pouvez-vous parler davantage de ces programmes et de ce qui vous dérange?
    Bien sûr. Je pense que nous avons intégré au programme d'études toutes sorte de cours sur des habitudes de vie saines, qui sont enseignées dès la maternelle et qui finissent par être abordées non seulement dans les classes sur le thème de la santé, mais aussi en mathématiques et en anglais. Les enfants se retrouvent submergés d'information, parfois trop d'information, qu'ils n'arrivent pas vraiment à comprendre et, de toutes les façons, ils ne sont pas chargés de prendre des décisions à cet égard. On dit aux enfants qu'ils s'alimentent mal ou qu'ils doivent changer leurs habitudes alors qu'ils n'achètent pas leur propre nourriture et qu'ils ne font pas leur boîte à lunch. Voilà un domaine de l'éducation où, plutôt que d'assigner aux enfants des tâches qui correspondent à leur âge et qui les amèneraient à mettre en pratique des compétences, on leur dit quoi faire et on s'attend à ce qu'ils se débrouillent avec le reste.
    Si nous voulons que les enfants mangent des repas nutritifs et sains, nous devons établir un programme de boîte à lunch. On ne peut pas dire aux enfants ce qui constitue une boîte à lunch saine et s'attendre à ce qu'ils se débrouillent. Au final, on mine l'autorité parentale, on porte atteinte au développement normal et, en conséquence, on se rend compte que des enfants développent des troubles de l'alimentation.
(1555)
    Docteure McVey, j'ai lu votre biographie et on y explique que vous organisez un symposium international sur l'intégration des pratiques de prévention des troubles de l'alimentation. Qui invitez-vous à ce symposium? Quel genre de professionnels? Qui invitez-vous du Canada ou de l'étranger? J'imagine que vous avez des participants de partout dans le monde?
    Les participants viennent de partout au Canada. J'ai communiqué avec des intervenants de chaque province, des territoires et des trois organismes fédéraux. L'objectif, c'est d'être stratégique. Nous voulions créer un pont avec le domaine des troubles de l'alimentation; nous avons donc pris contact avec des professionnels spécialisés dans la prévention des troubles de l'alimentation. Nous avons invité des gens qui travaillent dans le domaine des politiques, de la recherche ou de la pratique et qui font la promotion d'un poids santé et de la prévention de l'obésité. Il s'agit de disciplines multiples, et nous n'avons pas fait d'exclusion à cet égard. Nous cherchions plutôt des experts dans ces deux catégories.
    Nous voulions tirer profit des conclusions de recherche dans ces deux domaines et étudier les leçons tirées des histoires de réussite afin de nous pencher sur une approche intégrée concernant la prévention d'un large éventail de troubles liés au poids.
    Vous parlez d'histoires de réussite et de leçons. Y a-t-il une histoire de réussite, une pratique exemplaire ou une autre mesure qui a attiré votre attention et qui pourrait fonctionner, selon vous, ou qui a fonctionné et dont vous auriez appris l'existence dans le cadre de ce symposium?
    Lorsque j'ai rassemblé tous les participants, je leur ai distribué un document d'information que j'avais produit, et je serais heureuse d'en transmettre une copie au comité. Il s'agit d'une analyse de comptes rendus de recherche en faveur de l'intégration des deux approches pour traiter les patients jusqu'à un certain groupe d'âge. Les études révèlent qu'il existe des facteurs de risque et des facteurs de protection communs aux troubles de l'alimentation et à l'obésité. Certaines recherches en prévention démontrent qu'il est possible de modifier les facteurs de risque et de renforcer les facteurs de protection, mais ces recherches ont été financées dans le cadre de la littérature sur les troubles de l'alimentation et n'ont pas encore été comparées à la prévention de l'obésité.
    À quelle fréquence organisez-vous ces conférences? Est-ce chaque année?
    À l'origine, c'était grâce à une bourse de planification et dissémination offerte par les Instituts de recherche en santé du Canada, au montant de 20 000 $. Il s'agissait d'une rencontre en personne, s'étalant sur deux jours, que nous avons organisée en 2011. L'événement a connu beaucoup de succès, et les participants m'ont demandé de continuer à présider les réunions. Jusqu'à maintenant, nous avons organisé des rencontres aux deux mois.
    Merci.
    Madame Ashton, vous avez sept minutes.
    Merci, docteure Pinhas et docteure McVey, d'être parmi nous aujourd'hui pour nous parler de vos travaux et de vos recherches.
    Docteure Pinhas, je m'intéresse beaucoup à votre livre, intitulé Developing a feminist-informed model for decision making in the treatment of adolescent eating disorders.
    Les personnes souffrant d'anorexie refusent parfois le traitement des médecins. Je me demande si vous croyez qu'il est éthique d'intervenir contre leur gré. Quelles pourraient être les conséquences dans un contexte féministe plus large qui favorise le consentement éclairé? Je me demande comment vous abordez cette difficulté dans votre livre.
    J'aimerais préciser qu'il s'agit d'un article de recherche et non d'un livre.
    Nous voulions faire valoir que les patients qui souffrent de troubles de l'alimentation sont comme tous les autres patients en santé mentale, et parfois leur maladie fait en sorte qu'ils ne sont pas capables de donner leur consentement à un traitement, surtout lorsqu'il s'agit de patients très jeunes. Dans le cas d'un enfant de 12 ans à qui on a permis de refuser un traitement, il faut se demander... [Note de la rédaction: difficultés techniques]... si l'enfant comprend vraiment les conséquences de son choix.
    Un cadre féministe comprend non seulement l'idée du consentement éclairé et la liberté de prendre des décisions, mais aussi la responsabilité et l'obligation des familles de prendre soin d'elles-mêmes. La plupart des individus vivent en famille et prennent leurs décisions indépendamment de leurs familles.
    Parfois les individus refusent de se faire traiter parce qu'ils n'ont pas les moyens de faire garder leurs enfants. J'ai moi-même vu une personne remettre son traitement à plus tard parce qu'elle ne pouvait pas faire garder ses enfants pendant les vacances de Noël. Elle n'a pas pu suivre le traitement parce qu'elle devait être à la maison avec ses enfants.
    L'article disait non pas que le traitement doit être imposé, mais plutôt que les gens ont des familles et qu'il faut éviter de causer du tort, et il faut s'assurer que les familles peuvent s'occuper des membres de la famille.
    Comme c'est le cas avec d'autres troubles de santé mentale, lorsque vient le moment où les patients ne peuvent plus prendre des décisions rationnelles en ce qui les concerne, nous devons agir de la même façon que nous le faisons pour d'autres troubles. C'était en réaction directe à l'absence d'intervention, même quand c'était clair que les personnes étaient affamées au point où elles ne réfléchissaient pas clairement et qu'antérieurement, elles avaient choisi la thérapie ou auraient choisi un traitement si elles avaient été en pleine possession de leurs moyens.
    Nous ne devrions pas permettre aux gens de prendre des décisions qui ont comme conséquence de mettre fin à leur vie. Nous ne le faisons pas dans des cas de schizophrénie. Nous ne le faisons pas dans des cas de dépression. Nous ne devrions pas le faire lorsqu'il s'agit de troubles de l'alimentation. J'ai des collègues qui ne peuvent pas agir parce qu'il n'y a aucun endroit pour traiter les patients. Personne ne veut les prendre dans une unité verrouillée. Ces gens n'ont pas les mêmes droits.
    Je dirais que les enfants de 10 ou 12 ans n'ont pas la capacité de décider de mourir d'un trouble de l'alimentation. Je prends ces choses-là très au sérieux.
(1600)
    Absolument.
    Pensez-vous que c'est important d'utiliser un regard féministe lorsqu'il s'agit de troubles de l'alimentation?
    Absolument.
    Des intervenants comme vous et des médecins nous disent qu'il n'y a pas suffisamment d'accès au traitement pour les personnes qui ont des troubles de l'alimentation. Souvent, il faut être hospitalisé afin d'obtenir une place dans un programme de traitement. On n'y traite pas suffisamment les causes des troubles de l'alimentation et on ne fait pas de suivi une fois que le patient sort du programme de traitement.
    Je vois que votre travail avec Sheena's Place comprend un soutien aux gens tout au long de leur vie. Nous pensons que votre travail est remarquable. Pourriez-vous nous parler du modèle de financement pour Sheena's Place et nous dire comment on pourrait mettre sur pied des centres semblables? Compte tenu du travail de notre comité, il serait encore plus important que vous nous disiez comment le gouvernement fédéral pourrait appuyer ce genre d'initiatives?
    Je crois que le gouvernement fédéral pourrait appuyer ce genre d'initiatives.
    À l'heure actuelle, l'organisme Sheena's Place est financé par le biais de dons. Il n'a pas vraiment accès à des fonds gouvernementaux. Par contre, on fournit les groupes. On accorde les fonds nécessaires aux thérapeutes qui, eux, assurent les groupes. On fournit un espace sûr pour les patients qui ont eu des expériences négatives et qui ont peur de retourner à l'hôpital.
    En fait, parfois les gens qui travaillent dans les hôpitaux, comme moi, rencontrent des patients à Sheena's Place parce que les patients se sentent plus en sécurité là-bas. J'appuie fortement le travail que fait Sheena's Place et celui que font d'autres organismes semblables, notamment Hope's Garden et Danielle's Place. Nous avons besoin de plus de services, mais nous devons aussi les aider à fournir plus de services.
    Je sais que Sheena's Place s'inquiète souvent de la question de savoir s'il aura suffisamment de fonds. Parfois, il doit effectuer des coupures. L'organisme a vraiment du mal à joindre les deux bouts.
    J'ai quelque chose à rajouter, s'il vous plaît.
    Souvent, dans les cas de troubles de l'alimentation graves, la stabilisation médicale et psychiatrique est justifiée — c'est une façon de voir les choses. Nous dépendons beaucoup de nos collègues travaillant dans les hôpitaux de soins tertiaires, mais il y a trop souvent très peu de financement qui reste pour aider les patients, à cause du peu de ressources et de financement dont nous disposons. La stabilisation médicale et psychiatrique aide en quelque sorte les patients à maximiser l'utilisation du traitement externe. Elle permet d'examiner les causes fondamentales des troubles de l'alimentation et peut aider à les surmonter, mais souvent, il ne nous reste pas beaucoup de fonds pour ces traitements externes.
    Je partage l'opinion de certains des autres témoins qui ont indiqué dans leur intervention que nous manquons de services avant et après l'hospitalisation. Comme je l'ai dit durant mon exposé, je crois aussi que nous devons en faire plus sur le plan de la prévention ciblée, c'est-à-dire interpeller les jeunes femmes et les jeunes hommes au tout début de leur symptôme pour essayer d'empêcher l'apparition de troubles de l'alimentation.
    Il est surprenant d'apprendre que vous ne subsistez que sur des dons. Le gouvernement fédéral pourrait vraisemblablement jouer un rôle pour ce qui est du financement de ce travail. Nous sommes préoccupés par le manque de financement de la part du gouvernement pour lutter contre les troubles de l'alimentation. Nous nous inquiétons également du manque de financement pour cette lutte de la part de tous les ordres de gouvernement.
    Nous avons reçu un témoignage convaincant la semaine dernière de la part de Merryl Bear du Centre national d'information sur les troubles de l'alimentation. Elle nous a parlé de la pénurie de fonds et de la nature instable des modèles de financement pour des organismes comme le sien ou Sheena's Place. Elle a affirmé que ce manque de financement s'inscrit dans un contexte culturel qui ne valorise pas assez les soins de santé pour les femmes. Elle a indiqué que le gouvernement coupe les fonds au Programme de contribution pour la santé des femmes et d'autres fonds qui appuyaient le travail dans le domaine de la santé des femmes.
    Êtes-vous du même avis que Merryl Bear? Comment un financement accru mènerait-il à de meilleurs résultats pour les gens atteints de troubles de l'alimentation?
(1605)
    Une réponse très courte, s'il vous plaît.
    La seule chose que je rajouterais à ce qu'a dit Merry Bear du Centre national d'information est que, dans mon domaine, en tant que spécialiste dans la recherche sur la prévention, vers le début et au milieu de ma carrière, j'ai obtenu des fonds d'organismes de financement pour les femmes. Quand ces organismes ont manqué de fonds ou ont disparu, le financement pour ma recherche sur les troubles de l'alimentation a aussi disparu.
    J'ai beaucoup bénéficié de ces sources de financement. Je crois qu'il y a un manque de compréhension des troubles de l'alimentation. Il ne s'agit pas d'une question de santé féminine uniquement. Les troubles de l'alimentation nous touchent tous. Ils devraient être classés dans la catégorie des questions de santé mentale et de dépendance, et nous devons faire partie des autres initiatives sur la santé dont on discute partout au niveau fédéral.
    Merci beaucoup, docteure McVey.

[Français]

    Monsieur Terence Young, vous disposez de sept minutes.

[Traduction]

    Docteure Pinhas, j'aimerais savoir si vous avez des préoccupations concernant les interventions contre l'obésité présentées par certains professionnels de la santé et amplifiées par les médias, ce qui pourrait créer une certaine anxiété chez les jeunes, les jeunes filles, par exemple, en donnant l'impression que toutes les sortes de sucres sont néfastes et que l'on ne devrait jamais en manger, ou que toutes les jeunes filles devraient avoir le même indice de masse corporelle.
    Croyez-vous que tous ces messages mèneront peut-être à des troubles d'alimentation chez les jeunes?
    Absolument.
    Je pense qu'on s'est laissé emporter par cette panique entourant l'obésité. Il y a, de toute évidence, une épidémie d'obésité. Cependant, autant que je sache, le taux d'obésité chez les enfants est essentiellement stable. En fait, des données récentes en provenance des États-Unis laissent entendre que chez les plus jeunes, le taux d'obésité diminue au lieu d'augmenter. Nous continuons à faire comme si nous devions absolument faire quelque chose pour s'assurer que les enfants ne soient pas obèses, mais dans notre empressement, nous créons une sorte de panique. Ce qui se produit, c'est que les enfants commencent à penser que le gras est mauvais et que c'est mal d'être gros.
    Vous savez, il y a des études qui démontrent que les enfants préféraient qu'un de leurs parents meure du cancer, ils préféraient perdre un bras ou être frappés par un camion plutôt que d'être gros. L'embonpoint est l'une des principales raisons pour lesquelles les enfants font l'objet d'intimidation. D'autres se sentent justifiés lorsqu'ils entendent leurs enseignants, leurs médecins et leurs parents dire que l'obésité est quelque chose d'horrible. C'est quelque chose qu'ils comprennent mal. Il nous faut ralentir et réfléchir aux messages que nous transmettons.
    Je tiens à féliciter Hasan Hutchinson, qui a témoigné un peu plus tôt, pour ses travaux en santé publique dans le cadre desquels elle s'est véritablement efforcée de nous amener à accorder moins d'importance au poids et davantage d'importance aux modes de vie sains. Vous pouvez faire de l'embonpoint et être en santé. Vous pouvez être mince et ne pas être en santé. On ne peut pas déterminer l'état de santé de quelqu'un uniquement par un chiffre, et pourtant cela semble être le message que nous transmettons. Depuis récemment, on tente de mettre l'accent sur l'éducation physique et le savoir-faire physique, mais j'ai aussi entendu des gens suggérer que l'on devrait tenir compte de l'IMC des élèves dans la note qu'ils obtiennent pour leur cours d'éducation physique, comme si les enfants pouvaient le contrôler.
    Ce sont de mauvaises nouvelles. Merci de nous avoir fourni une réponse complète.
    Docteure Pinhas, quelle devrait être la norme de soins minimale pour les jeunes filles et les femmes atteintes de troubles de l'alimentation?
    C'est une grande question. Ce que je dirais, c'est que les jeunes filles et les femmes atteintes de troubles de l'alimentation ont droit à des soins qui répondent aux mêmes normes que ceux auxquels elles auraient droit si elles étaient atteintes de toute autre maladie mentale. Il devrait y avoir des lignes directrices et des choix de traitement variés partout au pays. Ce serait là une norme minimale de soins. Dans certains domaines, nous disposons de recherche fondée sur des faits probants et lorsque cette recherche fait défaut, il faut la faire. Je dirais que c'est cela la norme minimale de soins.
    Je pourrais vous expliquer en détail ce dont nous avons besoin. Il est certain que nous avons besoin de programmes en milieu hospitalier, et oui, il nous faut aussi des programmes en centre d'hébergement, mais ce dont nous avons surtout besoin, ce sont des programmes externes. Il nous faut des programmes communautaires intensifs et des gens qui sont formés pour travailler auprès des familles dans leurs collectivités en leur donnant l'aide à laquelle elles ont droit, comme ce serait le cas pour tout autre trouble mental.
    Souvent, nos enfants sont exclus des services offerts dans les unités générales de services de santé mentale. Si un enfant est atteint de dépression, on pourrait l'envoyer suivre un programme externe de santé mentale à l'échelle locale. Lorsqu'on indique que ces enfants souffrent de trouble de l'alimentation, on nous dit souvent qu'il n'y a pas de place pour eux. À Toronto, tous les patients qui reçoivent un diagnostic principal de troubles de l'alimentation sont exclus de tous les lits de soins intensifs en santé mentale destinés aux adolescents, et ce, même s'ils ont d'autres raisons d'être hospitalisés, comme les tendances suicidaires.
    Certains de mes collègues psychiatres m'ont déjà indiqué vouloir hospitaliser quelques-unes de ces jeunes filles, mais qu'ils ne sont pas autorisés à le faire, parce que les personnes atteintes de troubles de l'alimentation n'ont pas droit à ces lits.
(1610)
    Merci.
    Cette absence de services comparables et efficaces destinés aux enfants atteints de troubles de l'alimentation est-elle causée par un manque de financement?
    Il y a deux aspects. Bien sûr, il s'agit d'argent, mais c'est aussi une question de discrimination. Lorsqu'il y a de l'argent qui est envoyé à un centre de soins en santé mentale pour enfants et adolescents, que ce soit du financement fédéral ou provincial, nous regardons toujours... Les troubles de l'alimentation figurent toujours sur la liste, mais lorsqu'on envoie l'argent au centre de soins en santé mentale, rien ne se fait; il n'y a aucun soin spécialisé pour traiter les troubles de l'alimentation, et on n'inclut même pas les patients souffrant de troubles concomitants de l'alimentation à d'autres programmes.
    Il y a deux aspects. Tout d'abord, il faut déterminer ce qui s'impose et ensuite, assurer une reddition de comptes pour que lorsque l'argent est réparti, les groupes traitant des questions de troubles de l'alimentation soient invités à la table, comme la Dre McVey l'a suggéré.
    Merci.
    Si un médecin ou un parent d'enfant atteint de troubles de l'alimentation voulait savoir combien il en coûte pour le traitement de cet enfant, y compris le coût du transport, de la garderie, des congés de travail, etc., y aurait-il moyen de trouver ces renseignements?
    Pas... [Note de la rédaction: difficultés techniques] Nous n'en faisons pas le suivi. Il n'y a pas de recherche qui se fait sur la question, et ce serait presque impossible de trouver un moyen de financer ce genre de recherche.
    Y a-t-il moyen de savoir combien de femmes et de filles sont mortes d'un trouble de l'alimentation au Canada?
    Non, il n'y a pas moyen.
    Un registre des décès serait-il utile?
    Un registre indiquant le décès ou la guérison de patients souffrant de troubles de l'alimentation, ou tout autre type de données semblables à celles que l'on trouve, par exemple, dans le registre pour le cancer, pourraient immédiatement améliorer l'état des choses.
    Certains des patients qui sont traités dans le cadre de programmes en milieu hospitalier mettent fin à leur traitement et reprennent parfois leurs vieilles habitudes, comme la provocation du vomissement, etc. — je parle ici de filles et de femmes. Que pourrait-on faire? Quelles mesures en matière de soins pourrait-on ou devrait-on prendre pour que ces améliorations soient permanentes?
    Très brièvement, s'il vous plaît.
    Tout d'abord, ce serait bien d'avoir un programme en clinique externe. Un grand nombre de ces femmes quittent les services intensifs en milieu hospitalier et se retrouvent devant rien; alors, toute mesure que nous pourrions prendre, même s'il s'agit de visites hebdomadaires, serait beaucoup mieux. Nous pourrions certainement faire autre chose, comme du travail dans la collectivité, à l'instar de ce qui se fait pour les toxicomanes ou pour les enfants. Bref, n'importe quoi serait mieux que ce qu'on a à l'heure actuelle, c'est-à-dire rien du tout.
    Les écoles se tournent vers nous pour savoir comment aider ces personnes à réintégrer le système scolaire lorsqu'elles sont en cours de guérison ou lorsqu'elles se sont récemment rétablies d'un trouble de l'alimentation.
    Merci, monsieur Young.

[Français]

    Madame Duncan, vous disposez de sept minutes.

[Traduction]

    Merci, docteure Pinhas et docteure McVey. Bienvenue au comité.
    Tout d'abord, je ne veux pas trop insister là-dessus, mais j'attends toujours les renseignements que j'ai demandés auprès des fonctionnaires le 10 décembre.
    Docteure McVey, pourriez-vous dire au comité combien de psychiatres il y a au Canada pour traiter les Canadiens qui souffrent de troubles de l'alimentation.
    Oui. Il y a environ 40 000 à 41 000 psychiatres au Canada. Selon des données empiriques, environ 12 psychiatres travaillent dans le domaine des troubles de l'alimentation au Canada. Certains se spécialisent dans les troubles de l'alimentation chez les adultes, et d'autres se spécialisent dans les troubles de l'alimentation chez les enfants et les adolescents.
    C'est ahurissant. Y a-t-il des provinces où il n'y a pas... S'il n'y a qu'un psychiatre, la distance que doivent parcourir certaines personnes est consternante.
    Si vous deviez faire une recommandation au comité relativement aux psychiatres qui oeuvrent dans le domaine des troubles de l'alimentation, quelle serait votre recommandation précise?
(1615)
    Ma recommandation porterait sur des possibilités de formation et de mentorat pour les résidents en psychiatrie et un plan pour la relève. Nous sommes préoccupés, car si les 12 psychiatres actuels qui se spécialisent dans les troubles de l'alimentation prennent leur retraite ou se dirigent vers un autre domaine, nous devrons faire de la planification pour la relève. Il existe un besoin réel et urgent de formation dans ce domaine.
    J'aimerais ajouter qu'en tant que psychiatre, il est impossible d'obtenir son diplôme en psychiatrie sans avoir traité quelqu'un qui souffre de schizophrénie ou de troubles de l'humeur. Il est cependant possible d'obtenir aujourd'hui un diplôme en psychiatrie sans avoir traité des gens qui souffrent de troubles de l'alimentation. Il est possible d'être un pédopsychiatre et de ne jamais avoir traité quelqu'un qui souffre de troubles de l'alimentation.
    Nous devons traiter les troubles de l'alimentation et la formation dans ce domaine de la même manière que les autres diagnostics majeurs de l'axe I.
    Merci , docteure Pinhas.
    J'ajouterais que vous êtes en train de nous donner une recommandation très précise qui, selon vous, devrait être ajoutée au rapport, et il s'agit d'une recommandation sur la formation et la planification de la relève.
    Docteure McVey, pourrais-je vous demander de déposer une recommandation très précise auprès du comité? Pour ce qui est de la formation, quel genre de formation souhaiteriez-vous? À quel moment? Quel serait le financement requis? Je vous prie d'être aussi précise que possible.
    Docteure McVey, si les gens ont besoin de traitement à long terme, combien de centres existe-t-il au Canada?
    Je crois qu'il y a sept provinces qui offrent une forme quelconque de traitement des troubles de l'alimentation. Pour un traitement complet des troubles de l'alimentation, c'est-à-dire un niveau de service minimal, ce qui comprend une combinaison de traitements en clinique externe et en milieu hospitalier, l'Ontario est probablement la province la plus avancée dans ce domaine. Le ministère de la Santé et des Soins longue durée de l'Ontario a effectué des investissements, surtout grâce à un groupe de gens qui s'intéressaient particulièrement à la question. Le tout a commencé avec un programme de formation qui nous a permis de rencontrer des gens de diverses disciplines pour tenter de les convaincre et pour trouver des façons de les amener à participer à un traitement des troubles de l'alimentation.
    Il n'y a que sept provinces qui offrent de l'aide dans le domaine des troubles de l'alimentation.
    Ce ne sont pas toutes les provinces qui offrent une gamme complète de services.
    D'accord, merci.
    Combien de centres de traitement à long terme existe-t-il au Canada?
    Vous voulez dire qui sont financés?
    Oui, où les gens n'ont pas à payer de leur poche.
    En ce moment, il n'y en a pas.
    C'est exact, il n'y en a pas vraiment. Il y a deux lits à Homewood.
    Oui. Nous n'avons pas de programme financé au Canada pour les soins en établissement à long terme. Homewood reçoit du financement pour un lit dans le cadre d'un programme de soins en établissement qui a une liste d'attente de trois à sept ans.
    N'y a-t-il pas de centres de soins de longue durée financés par le secteur public au Canada?
    C'est exact.
    Les gens qui souffrent de troubles de l'alimentation ne peuvent pas attendre. Vous avez dit que la liste d'attente est de trois à sept ans. S'ils ne peuvent pas attendre, ils vont à l'extérieur du pays. Pourriez-vous nous dire ce qu'il en coûte aux familles?
    Nous n'avons pas évalué, d'un bout à l'autre du Canada, le coût total pour les familles.
    Pour ceux d'entre nous qui travaillent dans le système de soins de santé, nous avons tenté d'évaluer le coût de l'hospitalisation dans une province ici au Canada pour le comparer à un traitement de jour aux États-Unis. Le résultat est assez frappant. Nous payons souvent beaucoup plus pour les soins à l'extérieur du pays. Nous ne savons toutefois pas si ce sont des traitements qui ont fait leurs preuves. En outre, lorsque les clients reviennent au Canada, il leur faut souvent des soins de suivi. Ils ont déjà noué des rapports avec une équipe dans un autre pays et ils se retrouvent sur des listes d'attente, si bien qu'ils finissent parfois par revenir. C'est un peu comme une porte tournante. Par conséquent, ils pourraient être tenus d'aller à l'étranger à plusieurs reprises.
    J'aimerais poursuivre dans cette veine. Je crois qu'en Ontario, les frais engagés pour des traitements à l'étranger sont remboursés. Vous avez parlé du suivi, et j'espère que mes collègues vous poseront d'autres questions à ce sujet. Si vous pouviez transmettre au comité une recommandation très précise à propos des traitements à long terme, quelle serait cette recommandation?
(1620)
    Une réponse brève, s'il vous plaît.
    Je dirais que nous avons besoin de programmes de traitement de longue durée en établissement partout au pays, pas seulement en Ontario. Il existe un besoin pour les adolescents et pour les adultes. On doit les traiter de la même façon que d'autres patients atteints de troubles mentaux en établissement de soins de longue durée ou dans les logements avec service de soutien. Il doit y avoir une variété d'options et on doit les financer.
    Le gouvernement de l'Ontario envisage certainement le rapatriement de ces services, mais il est le premier à le faire. Il faudrait mener l'exercice partout au pays.
    Merci beaucoup.
    Madame O'Neill Gordon, vous avez cinq minutes.
    Merci aux témoins; vos exposés étaient très instructifs.
    Plus on en apprend sur les troubles de l'alimentation, plus on se rend compte qu'il faut en parler davantage. Il existe un besoin criant pour sensibiliser la population. Il y a certainement de nombreux publics cibles à sensibiliser, comme les écoles, les groupes communautaires, les professionnels, les spécialistes de la santé et les groupes laïcs.
    Comment les campagnes de sensibilisation du public peuvent-elles transmettre efficacement ce message aux différents publics cibles? Ils doivent aussi entendre votre message.
    Nous avons quelques solutions qui ne requièrent pas forcément de financement. J'aimerais bien voir les troubles de l'alimentation inclus dans l'excellent travail qu'effectuent, dans le domaine de la santé mentale et de la toxicomanie, la Commission canadienne de la santé mentale, Santé Canada, l'Agence de la santé publique du Canada et les Instituts de recherche en santé du Canada. Nous demandons d'inclure les troubles de l'alimentation dans l'information sur la santé mentale et la toxicomanie fournie aux professionnels et au grand public parce qu'il s'agit d'un problème de santé mentale et il mérite d'être inclus dans ces campagnes de sensibilisation du public.
    Plus nous en apprenons, plus nous comprenons que le message n'a pas été véhiculé. Il doit y avoir un traitement au même titre que les autres maladies.
    Nous savons aussi que le diagnostic de troubles de l'alimentation présente de nombreuses difficultés. Quelles sont certaines des difficultés auxquelles sont confrontés les professionnels de la santé dans la détection et le diagnostic des troubles de l'alimentation, plus particulièrement chez les filles et les femmes?
    Je pense que d'envisager qu'il peut s'agir de troubles de l'alimentation constitue une difficulté en soi. Il existe des idées reçues selon lesquelles ces troubles touchent les adolescentes de race blanche issues de la classe moyenne aisée, mais cette maladie ne discrimine pas. Les nouveaux immigrants peuvent en être atteints. Des personnes de toutes les races ou ethnicités peuvent en être atteintes. Bien souvent, si une personne ne correspond pas au cas typique, on n'envisage même pas cette maladie comme une possibilité. Voilà une conséquence du manque de formation et des mythes liés aux troubles de l'alimentation.
    Il faut aussi penser à la honte et aux préjugés qui accompagnent cette maladie encore très stigmatisée. Les parents ont souvent honte. Les jeunes ont tendance à garder leurs habitudes secrètes parce qu'ils veulent continuer. Les patients qui se retrouvent dans les programmes destinés aux enfants et aux adolescents sont souvent entraînés contre leur gré parce que leurs parents sont inquiets.
    Il faut d'abord reconnaître que cette maladie ne discrimine pas et dispenser de la formation pour permettre aux gens de reconnaître les symptômes.
    Il faut aussi savoir quand on a besoin d'aide supplémentaire. On peut entendre qu'il s'agit simplement d'une phase ou qu'on fera un suivi de la situation, ou encore on dit aux malades, « Revenez la semaine prochaine, je veux voir si vous avez pris du poids », et cette démarche dure pendant des mois. Le patient ne reçoit pas le traitement de santé mentale approprié, parce que ces traitements existent, et par conséquent, la maladie devient chronique. Au Royaume-Uni, une étude intéressante a démontré que si un enfant reçoit rapidement des soins spécialisés en santé mentale, on peut faire en sorte que les premiers symptômes des troubles de l'alimentation ne se transforment pas en maladie chronique. Un enfant atteint de la maladie depuis plus longtemps sera plus difficile à traiter.
(1625)
    Me reste-t-il du temps?

[Français]

    Il vous reste une minute et demie.

[Traduction]

    Je me demande dans quelle mesure les perceptions ont changé. Quelles incidences, positives ou négatives, ces perceptions ont-elles dans la lutte contre les troubles de l'alimentation? Les médecins sont-ils plus avertis? Existe-t-il davantage de formation?
    Il s'est passé quelque chose de semblable ici en Ontario grâce aux investissements du ministère de la Santé et des Soins de longue durée.
    Nous avons un programme de formation qui nous a permis de financer et d'offrir des ressources. Les spécialistes des troubles de l'alimentation se déplacent dans les différentes collectivités et essaient d'y offrir de la formation aux intervenants de première ligne. Nous souhaiterions bien sûr que cette initiative soit reprise dans d'autres provinces. Nous aimerions étudier les possibilités. En Ontario, nous le faisons depuis 20 ans. Nous pourrions analyser ce qui fonctionne bien et cerner les difficultés. Nous aimerions pouvoir transmettre nos connaissances partout au Canada.
    Merci.
    Merci beaucoup.

[Français]

    Madame Sellah, vous avez le temps de poser une question, si vous le voulez bien.
    Oui, madame la présidente.
    Tout d'abord, je remercie les Dres Pinhas et McVey de leurs témoignages. En les écoutant, j'ai bien compris que, malheureusement, la situation des soins consacrés aux troubles alimentaires était sombre. En ce qui a trait aux ressources professionnelles, on sait que seulement deux psychiatres parmi l'ensemble des psychiatres traitent ces troubles. Il y a un manque d'infrastructures; un ou deux centres, peut-être, s'en occupent. Il y a aussi un manque de bases de données et de recherche financée. Le message a été reçu.
    Docteure Pinhas, lorsque vous avez commencé votre présentation, vous avez dit qu'il n'y avait pas d'accès aux soins d'urgence au Canada, à l'exception d'une province. Pourriez-vous nous dire dans quelle province les gens ont accès à ces soins d'urgence?
    Par ailleurs, j'aimerais revenir sur vos travaux. Je sais que vous avez étudié les programmes des écoles publiques qui visent à promouvoir une vie saine. Étonnamment, vous démontrez que ces programmes ont provoqué des effets contraires aux objectifs principaux. Vous expliquez que les enfants qui ont suivi ces programmes ont eu tendance à perdre du poids et à souffrir de troubles alimentaires. Comment expliquer les conséquences néfastes de ce genre de programmes? Est-ce parce que les enseignants manquent de connaissances ou parce qu'il y a une méconnaissance des troubles qu'ils peuvent engendrer?

[Traduction]

    Tout d'abord, la question concernant les services d'urgence me laisse perplexe. Je ne me souviens pas d'en avoir parlé dans mon introduction.
    On a parlé de 12 psychiatres.
    Il y a 12 psychiatres au pays, et non deux. Voilà une précision à apporter.

[Français]

    C'est bien 12 psychiatres.
    Oui, je voulais dire 12 psychiatres sur 40.

[Traduction]

    J'aimerais répondre à la question concernant la sensibilisation au poids santé et au style de vie sain. Je tiens à féliciter les gouvernements territoriaux, provinciaux et fédéral pour leurs initiatives. Nous sommes d'accord avec nos collègues pour dire que nous devons étudier les comportements sédentaires et encourager une alimentation plus saine auprès des enfants et des jeunes au Canada.
    Je profite de cette occasion pour féliciter Santé Canada, en particulier le ministère de Hasan Hutchinson et les initiatives qu'il a mises en oeuvre. Il a joué un rôle de chef de file partout au Canada pour déterminer comment intégrer l'obésité et les troubles de l'alimentation afin d'éviter des retombées négatives que pourrait entraîner le message de sensibilisation pour un poids santé.
    Je pense qu'il y a place à l'amélioration dans nos écoles et dans différents secteurs des communautés. Les professionnels et les adultes ayant de l'influence en général doivent conscientiser leurs propres opinions sur le poids et leur attitude relative au poids et à la forme physique. Ils doivent comprendre que parfois, le message qu'ils envoient aux enfants peut être négatif. J'ai mené des travaux de recherche en prévention auprès des enfants et je travaille maintenant avec les adultes parce qu'il y a beaucoup de place à l'amélioration. On peut former les adultes afin qu'ils soient mieux sensibilisés et qu'ils apprennent à être plus objectifs dans leur façon d'aider les enfants à adopter des styles de vie sains.
(1630)

[Français]

    Merci beaucoup.
    Docteures McVey et Pinhas, je vous remercie beaucoup de vos témoignages. Ils nous ont vraiment éclairés.
    Nous allons suspendre la séance afin de nous préparer pour notre deuxième heure de séance.

[Traduction]

    Permettez-moi de vous remercier et de remercier les deux médecins qui ont comparu. J'espère que vous n'avez pas perdu espoir et que vous êtes encouragés du fait que nous menons cette étude et que nous tentons d'attirer l'attention sur le sujet.
    J'aimerais aussi féliciter le seul homme qui siège à notre comité. C'est Terence Young, le député de Oakville, qui a proposé que nous entreprenions cette étude.
    Je suis heureuse d'être ici et d'avoir eu l'occasion d'entendre ce que vous aviez à dire.
    Merci.

[Français]

    Merci beaucoup, madame Crockatt.

    Nous allons maintenant reprendre la séance.
    Nous accueillons maintenant Mme Jarrah Hodge.
     Je vous invite à faire votre présentation de 10 minutes.

[Traduction]

    Je remercie le comité de m'avoir invitée aujourd'hui.
    Je suis Jarrah Hodge, militante et blogueuse féministe, de Vancouver. Je dirige un blogue féministe d'un collectif d'auteurs qui s'appelle Gender Focus.
    L'un de nos principaux objectifs est d'analyser les façons dont les femmes sont représentées dans les médias. C'est dans cette optique que je m'engage auprès de Women, Action and the Media, WAM, à Vancouver. WAM est un groupe de créateurs médias, de militants, d'universitaires et de sympathisants qui travaillent ensemble pour faire progresser la participation des femmes dans les médias et pour améliorer leur représentation. Plusieurs membres du groupe m'ont parlé de leur expérience et m'ont aidée à orienter mes recherches pour préparer mon exposé d'aujourd'hui, et je les en remercie.
    Je suis certaine que les autres témoins vous ont parlé des problèmes graves dont nous discutons aujourd'hui et des statistiques qui révèlent que les troubles de l'alimentation font partie des 10 principales causes d'invalidité chez les jeunes femmes. Nous savons que tant des fillettes d'à peine cinq ans que des femmes âgées peuvent être atteintes de troubles de l'alimentation.
    La situation des femmes et des filles ne devraient pas nous amener à marginaliser ou à oublier les patients de sexe masculin. Nous ne ferions qu'ériger davantage de barrières pour les hommes qui veulent accéder à des traitements. Cette différence entre les hommes et les femmes montre bien la nécessité d'effectuer des recherches et des analyses qui tiennent compte du sexe. Je suis ravie de voir que le comité fait sa part grâce à cette étude.
    Nous savons que les troubles de l'alimentation découlent d'une interaction complexe des facteurs biologiques, génétiques, psychologiques, comportementaux et sociaux.
    Mes observations d'aujourd'hui porteront sur l'un des facteurs sociaux clés, c'est-à-dire l'influence des médias et de la publicité.
    Il serait difficile de ne pas constater que dans les médias populaires, la minceur est sous les projecteurs tandis que la grosseur est cachée, ou si elle est montrée, elle s'accompagne de honte. L'idéal de minceur d'aujourd'hui est plus mince que par les générations passées. Cet idéal ne reflète pas non plus ce qu'on observe dans la population en général aujourd'hui.
    À un très jeune âge, les filles apprennent que leur corps sert à attirer plutôt qu'à agir, ce qui fait en sorte que l'atteinte d'un idéal de beauté est essentielle, et ce, pendant toute la vie.
    Des recherches menées l'année dernière à l'Université Pepperdine ont examiné des filles de l'âge de 3 à 5 ans et ont conclu qu'elles avaient déjà internalisé les stéréotypes fondés sur le poids. Les filles avaient plus tendance à associer les corps minces à des personnes gentilles, intelligentes, belles, soignées et tranquilles, tandis qu'elles associaient les corps plus ronds à des personnes méchantes, stupides, sans amies, négligées et tapageuses. Il n'est pas difficile d'imaginer qu'elles peuvent se juger elles-mêmes de la même façon.
    L'Association canadienne pour la santé mentale déclare que l'aspect glamour associé dans les médias aux soi-disant corps idéaux, combiné à la perception que les régimes constituent une activité normale, peut voiler les problèmes d'alimentation d'une personne.
    Au cours des dernières décennies, de nombreuses études ont examiné les liens entre l'image véhiculée dans les médias, l'image corporelle des femmes et les troubles de l'alimentation. Dans une méta-analyse de ces études, Shelly Grabe et ses collègues ont remarqué que « les approches prospectives et longitudinales dans la recherche ont révélé que l'insatisfaction à l'égard du corps est l'un des facteurs de risque les plus constants et les plus menaçants pour les troubles de l'alimentation comme la boulimie ».
    Grabe a analysé 77 études, y compris des études expérimentales menées en laboratoire et des études corrélationnelles qui comparent la consommation médiatique réelle des femmes avec leur image corporelle au fil du temps. Les analyses ont révélé une relation entre la quantité de consommation médiatique et l'intensité des symptômes de troubles de l'alimentation, en plus d'autres problèmes liés à l'image corporelle.
    Les données sont convaincantes et indiquent qu'on peut prendre certaines mesures. Avant d'en parler, je dois souligner trois lacunes importantes dans la recherche et dans notre façon de parler des troubles de l'alimentation et d'y réfléchir en général.
    D'abord, se concentrer uniquement sur l'idéal de minceur peut nous empêcher de réfléchir au rôle que jouent la honte et les infamies qu'on associe à la grosseur. Kalamity Hilderbrandt de Fat Panic! à Vancouver affirme que les comportements alimentaires problématiques ne sont pas seulement liés à un objectif d'idéal de minceur. Elle affirme qu'il y a aussi tout un contexte culturel derrière cet objectif qui est véhiculé dans les médias qui vilipendent la grosseur. Le message? « Regardez comment on traite les gros. »
    Je reviens à l'étude Pepperdine. Que la grosseur soit synonyme de sans ami, laid, méchant, stupide et tapageur est tout aussi important que ce que la minceur signifie pour les filles. L'auteur de l'étude, Jennifer Harriger a affirmé: « De nombreuses fillettes de trois ans m'ont dit ‘Je la déteste, elle est grosse’ ou encore ‘Elle a un gros ventre, je ne veux pas lui ressembler’. » Pour moi, c'était préoccupant de constater que des enfants si jeunes avaient une opinion si tranchée à propos des personnes avec un surplus de poids.
    Lorsqu'il est question de troubles de l'alimentation, les suppositions relatives au poids et à la grosseur peuvent être dévastatrices. De nombreux programmes dans les hôpitaux refuseront d'accueillir des patients parce qu'ils ne sont pas assez minces. Dans certains hôpitaux, on est forcé de dire aux gens qu'ils doivent être plus malades avant d'obtenir un traitement. Que le poids soit un critère de décision démontre à quel point la compréhension des incidences physiques des différents troubles de l'alimentation est simpliste et à quel point différents facteurs sont pris en considération pour différentes personnes.
(1635)
    Nous devons nous assurer de ne pas vivre dans une société où les comportements considérés comme problématiques chez les gens minces, comme les régimes extrêmes et la purge, sont acceptés et même encouragés chez les personnes obèses.
    Je dois souligner une autre lacune: l'observation de Grabe selon laquelle les femmes de couleur sont extrêmement négligées dans ce secteur de recherche. C'est un aspect qu'il faudra changer à l'avenir. Nous devons effectuer davantage de recherches de qualité sur la façon dont les femmes de couleur et les femmes des Premières Nations vivent avec les troubles de l'alimentation, sur les liens que l'on peut faire avec les messages véhiculés dans les médias et sur l'accès ou le manque d'accès aux traitements adéquats offerts aux communautés culturelles au Canada.
    Enfin, nous devons penser davantage aux gens de la communauté LGBT et à la façon dont les troubles de l'alimentation sont façonnés par leur identité. Pour eux, la violence, l'intimidation et la peur du rejet qu'ils vivent sont peut-être plus intenses et peuvent augmenter le risque de souffrir de troubles alimentaires. Il faut aussi se demander s'ils sont confrontés à des obstacles supplémentaires dans l'accès au traitement en comparaison aux personnes hétérosexuelles ou cisgenres.
    Or, les recherches nous démontrent qu'il y a des sphères où nous pouvons agir dès maintenant. Le plus important, dans le contexte de mes observations d'aujourd'hui, c'est la nécessité de présenter de nouveaux programmes de littératie médiatique dans nos écoles et d'enrichir les programmes qui existent déjà. Groesz, Levine et Martin définissent la littératie médiatique comme l'éducation qui sensibilise à l'utilisation des médias, ce qui comprend l'analyse du contenu et les intentions, et qui encourage la participation à une forme de campagne de sensibilisation aux médias ou de militantisme.
    J'aimerais parler brièvement d'une autre méta-analyse, qui concerne l'efficacité des programmes de littératie médiatique. Szabo a analysé des études portant sur des programmes de partout en Europe et en Amérique du Nord et a conclu que les programmes de littératie médiatique s'avèrent efficaces et pourraient potentiellement atténuer des facteurs de risque généraux et précis relatifs aux troubles de l'alimentation.
    Toutefois, il n'est peut-être pas suffisant de prévoir une courte période de temps en classe un après-midi pour donner de l'information sous forme d'exposé.
    La même méta-analyse révèle que les programmes de prévention de littératie médiatique les plus efficaces étaient des programmes complexes qui comprenaient des volets ne se concentrant pas seulement sur l'image corporelle et sur les problèmes liés aux habitudes alimentaires, mais qui mettaient aussi l'accent sur la lutte contre la pression sociale et l'amélioration d'une pensée critique à l'égard des normes de la société et des messages véhiculés dans les médias. Yager et O'Dea confirment ces conclusions. Ils ont conclu que les programmes comprenant un volet de littératie médiatique bien réfléchie comptaient parmi les plus efficaces pour aider les jeunes à composer avec l'image corporelle et les troubles de l'alimentation.
    J'ai plus de renseignements à propos de programmes précis qui ont fait l'objet de recherches et qui se sont révélés efficaces, mais je n'ai pas le temps d'en parler davantage. Peut-être pourrons-nous en discuter pendant les questions.
    Pour conclure, je n'ai abordé qu'un seul facteur qui influe sur les troubles de l'alimentation et leurs conséquences pour les filles et les femmes, c'est-à-dire l'influence des médias et de la culture sur l'image corporelle. Or, il s'agit d'un facteur important qui ne devrait pas être écarté de cette étude.
    Bien que j'aie proposé des domaines qui devraient faire l'objet davantage d'études et que j'aie formulé des recommandations portant surtout sur la littératie médiatique axée en premier lieu sur la prévention, j'aimerais appuyer ce qui a été affirmé par de nombreux organismes et défenseurs de la lutte contre les troubles de l'alimentation au Canada, à savoir que des changements urgents doivent être apportés maintenant.
    Comme nous l'avons vu en Nouvelle-Écosse la semaine dernière, il existe des façons de veiller à ce que les professionnels de la santé soient mieux formés pour aider les personnes souffrant de troubles de l'alimentation. Essentiellement, il n'y a tout simplement pas assez de place dans les hôpitaux, là où les gens en ont besoin. Nombreux sont ceux qui ne peuvent pas se payer une place dans les logements avec services de soutien. Les moyens financiers et la géographie ne devraient pas être des obstacles à l'accès au traitement, et c'est aussi vrai pour les évaluations universelles qui refusent l'accès à des personnes qui ne sont pas assez minces. Il faut aussi s'attaquer au manque criant de soins de longue durée.
    Je remercie le comité du temps qui m'a été imparti et je serai ravie de répondre à vos questions.
(1640)
    Merci beaucoup.

[Français]

    Madame Preskow, c'est à vous. Vous disposez de 10 minutes.

[Traduction]

    En ma qualité de fondatrice de la National Initiative for Eating Disorders, la NIED, j'aimerais remercier le comité d'avoir entrepris cette étude sur les troubles de l'alimentation chez les filles et les femmes. Je suis ici aujourd'hui pour parler au nom de centaines de milliers de mères et de pères, de soignants et de familles comme la nôtre.
    Nous sommes les parents d'une fille de 28 ans qui souffre d'anorexie et de boulimie depuis plus de 13 ans. Mon mari, Len et moi avons fait tout ce qui était possible sur le plan émotionnel, physique et financier pour offrir de l'aide à notre fille Amy, mais ce n'est jamais assez.
    Nos sentiments d'impuissance, de frustration et finalement de colère m'ont donné la force de créer un organisme de sensibilisation et d'agir à propos du monde bizarre et sans pitié des troubles de l'alimentation. La douleur pour ceux qui en souffrent et pour les familles est insurmontable. Le stress et la pression que vivent les familles sont extrêmes, épouvantables et dévastateurs.
    Il n'y a aucun système en place pour aider notre enfant. Oui, à 28 ans, elle est une enfant non seulement avec un trouble de l'alimentation, mais elle reçoit l'appui d'un programme provincial de soutien pour personnes invalides parce qu'elle ne peut pas travailler. Elle est paralysée par l'anxiété et la dépression, mais on s'attend quand même à ce qu'elle passe par le soi-disant système de soutien en raison de son âge.
    En tant que parents, nous avons vécu les choses les plus horribles et inimaginables, y compris le recours à une discipline des plus sévères tout en étant conscients de l'amour inconditionnel que nous ressentons pour notre fille.
    Les frères, les soeurs, les grands-parents, les cousins, les tantes, les oncles et les amis sont tous touchés par la souffrance de notre fille. Heureusement, Len et moi nous sommes serrés les coudes et nous sommes soutenus contre vents et marées. Cette souffrance peut anéantir des relations et des mariages et y parvient parfois. Elle déchire les familles, elle les isole et parfois entraîne même des faillites.
    Les troubles de l'alimentation sont mortels. Ils présentent le plus haut taux de mortalité de toutes les maladies mentales. Toutefois, contrairement à la dépression, à la schizophrénie, à l'anxiété et aux troubles de l'humeur, ceux qui souffrent de troubles de l'alimentation n'ont pas de profil type.
    Oui, on reconnaît que les troubles de l'alimentation sont une maladie mentale, mais on en parle rarement comme tel.
    Beaucoup d'information circule sur la santé mentale comme telle, mais les troubles de l'alimentation sont toujours exclus de la portée du radar de la santé mentale, des programmes ou des campagnes.
    En juillet dernier, Amy a été hospitalisée pendant une semaine à Toronto pour que cessent ces comportements de frénésies alimentaires et de purges. À titre d'exemple, elle pouvait avoir des pulsions hyperphagiques et se purger 15 à 20 fois par jour. Elle pouvait sortir par un temps glacial en hiver au beau milieu de la nuit pour combler ses pulsions alors qu'elle était si faible qu'elle aurait pu tomber raide morte à tout moment. Elle consommait des quantités de nourriture inimaginables.
    Lorsque je suis venue sur la Colline parlementaire à Ottawa en novembre dernier, elle m'a avoué avoir dépensé 450 $ en nourriture qu'elle a mangée et purgée en trois jours. Lors de ces frénésies alimentaires, elle peut manger de 36 à 48 muffins, de six à huit grandes pizzas, des plaques de gâteaux, des litres de glace, des montagnes de chocolat, et je suis certaine qu'il y aurait autre chose à ajouter. Elle a répété ce comportement pendant trois jours.
    Vous pouvez comprendre pourquoi, dans un tel état, elle a eu recours au vol à l'étage pour nourrir sa dépendance. Malheureusement, elle s'était déjà fait prendre à quelques occasions et on a appelé la police. On l'a traitée de façon non professionnelle, avec négligence, on l'a ridiculisée et on l'a presque envoyée dans une ambulance. Ces épisodes ont entraîné des crises de panique sévères.
    Ce n'est pas une criminelle. Elle est malade et elle n'a nulle part où aller pour trouver de l'aide. Comment est-il possible qu'une personne si malade se voit refuser un traitement ou qu'elle n'ait pas accès à un traitement dans un délai raisonnable?
    Je reviens à son hospitalisation qui a fonctionné pendant une semaine, alors que Len et moi nous relayions pendant la journée pour être avec elle. D'autres patients ont commencé à l'intimider et à inventer des rumeurs à son sujet, ce qui l'a rendue si mal à l'aise qu'elle est partie. Laisser tomber un programme à mi-chemin est très courant pour des milliers de personnes comme elle.
    Avant son hospitalisation, Amy vivait dans un studio où elle mourait à petit feu à cause de ses troubles de l'alimentation. Après son départ de l'hôpital, elle était si vulnérable que nous l'avons ramenée à la maison. Elle vit maintenant en permanence avec nous depuis octobre.
    Comme tant d'autres mères au pays, dont l'une était présente avec nous la semaine dernière sur la Colline, je lui prodigue des soins 24 heures sur 24, sept jours sur sept. Elle n'a nulle part où aller et je n'ai d'autre choix que de m'occuper d'elle à temps plein.
    Je sais et elle sait qu'elle ne devrait pas avoir à composer avec l'anxiété, les pulsions hyperphagiques, la dépression, les sautes d'humeur, tout en s'efforçant avec l'énergie du désespoir de ne pas céder aux voix fortes, bruyantes, violentes dans sa tête qui pourraient entraîner d'autres pulsions.
    Pendant certaines périodes, ce n'était pas assez et Len a dû prendre congé ou partir plus tôt du travail pour me relayer.
(1645)
    Comme vous pouvez le voir, les répercussions se font sentir bien au-delà de la personne qui souffre, et elles touchent directement les proches et indirectement la communauté dans son ensemble.
    J’ai mis sur pied la NIED il y a deux ans, pour laquelle en passant je ne reçois aucun financement, afin de sensibiliser les gens au sort des personnes atteintes de troubles de l'alimentation et de leurs familles, et de changer et améliorer le système partout au Canada. Je suis extrêmement reconnaissante à l'égard des bénévoles qui m'ont appuyée, surtout les médecins et spécialistes de la santé qui, en dépit des défis qu'ils doivent eux aussi relever dans le système qui traite les troubles de l'alimentation, ont déployé des efforts incommensurables pour appuyer NIED. Je pense notamment au Dr Blake Woodside, à la psychologue Gail McVey, à la Dre Leora Pinhas, au Dr Mark Norris, au psychologue Chuck Emmrys, en plus des nombreux députés fédéraux et provinciaux qui ont contribué à faire progresser NIED afin de voir certains changements commencer à s'opérer.
    J'appuie sans réserve les recommandations...
    Madame Preskow, veuillez, s'il vous plaît, ralentir votre débit afin de nous assurer que les interprètes peuvent traduire toutes vos excellentes recommandations. Je vous laisse continuer, mais je vous demanderais de ralentir. Merci.
    Très bien.
    Nous appuyons entièrement les recommandations des médecins. En tant que parents, nous voulons un accès rapide à des traitements fournis par des professionnels bien formés.
    Nous souhaitons la création de foyers de groupes, d'endroits sûrs, tout comme ceux qui existent pour les personnes qui abusent de l'alcool ou d'autres drogues. Il n'existe absolument rien de semblable pour ceux qui souffrent d'un trouble de l'alimentation.
    Pour ce qui est de la couverture du traitement, les compagnies d'assurance médicale doivent faire leur part et commencer à couvrir les dépenses nécessaires pour aider tous ces patients et leur famille. Où va-t-on avec un régime de l'employeur de 500 $? Deux séances avec un psychologue et il ne reste plus rien. Il est presque préférable de ne pas commencer plutôt que d'ouvrir une boîte de Pandore et de laisser les choses s'envenimer.
    Nous demandons que soient couverts les traitements fournis par les psychothérapeutes, les infirmières praticiennes et les nutritionnistes qui travaillent avec les personnes qui souffrent d'un trouble de l'alimentation et dont les services ne sont pas couverts en Ontario par le RAMO ou les compagnies d'assurance privées.
    Les omnipraticiens, les pédiatres, les travailleurs sociaux, les enseignants, la police, le personnel des tribunaux et tous les autres professionnels qui offrent des services de première ligne devraient suivre des cours obligatoires sur les troubles de l'alimentation dans le cadre de leur formation.
    En terminant, j'aimerais vous faire part d'un message qu'Amy a envoyé à mon téléphone samedi soir:
    « Tu ne cesses de répéter qu'à la même époque l'an dernier, j'étais en train de mourir et, même si je ne cours plus le même danger immédiat, ma tête est toujours autant, sinon plus, enfoncée dans le trou noir le plus profond. J'ai un sentiment de catastrophe imminente, le même sentiment que j'avais lorsque j'étais seule et que mon poids était à son plus bas et que je me gavais et purgeais sans arrêt. C'est la peur profonde que je ne guérirai jamais de ce trouble de l'alimentation. Je ne serai pas parmi le tiers qui guérit. Je pourrais même être parmi les 20 % qui meurent.
    « Tu es en train de changer le monde des troubles alimentaires au Canada, et peut-être que ma seule raison d'exister était de te donner l'occasion de créer ce changement colossal, et moi alors? Il faudra des années avant qu'un tel centre de traitements de rêve existe au Canada. Nous savons tous que le système actuel est sans coeur et pratiquement inutile. On prend mon poids, puis on me renvoie dans le monde, et je me retrouve exactement dans la même situation que lorsque j'étais une petite fille: j'ai peur de vivre et j'ai autant peur de mourir, j'ai peur de l'inconnu et de vieillir, de perdre et d'être abandonnée. »
    « Il n'existe aucun endroit où l'on traite les troubles de l'alimentation chroniques. Il n'y a aucun endroit où aller en cas d'urgence. Ils sont rares ceux qui comprennent. Je me réveille encore remplie de craintes face à la journée qui commence. Comment vais-je passer à travers? Qu'est-ce que je vais manger ou ne pas manger? Est-ce que je vais pouvoir m'empêcher de manger les aliments qui déclenchent des crises? Je ne peux me concentrer sur rien. Je peux à peine lire ou écrire ou trouver du plaisir dans quoi que ce soit car je suis constamment paralysée par la peur et l'anxiété, rongée par l'indécision et l'envie d'être insensible. »
    En tant que mère, je représente ici le NIED pour demander des changements et pour sensibiliser les gens aux troubles à l'alimentation, tout comme Terry Fox et sa mère l'ont fait pour le cancer.
    Merci.
(1650)

[Français]

    Madame Preskow, merci beaucoup de votre témoignage.
    Je vais maintenant céder la parole à Mme Ambler pour sept minutes.

[Traduction]

    Merci à toutes les deux d'être venues aujourd'hui.
    Wendy, nous nous sommes rencontrées la semaine dernière. Je suis ravie de vous revoir. Merci d'être revenue nous parler.
    Je pense que nous avons tous perçu votre frustration, votre colère et votre sentiment d'impuissance. Merci de nous en avoir parlé.
    J'aimerais savoir comment vous avez navigué dans le système au début et au cours des 12 dernières années pour aider votre fille. Quelles embûches avez-vous rencontrées et quelles recommandations aimeriez-vous formuler pour corriger ces problèmes?
    Au tout début, nous avons découvert qu'Amy jetait son lunch à l'école lorsqu'une amie est venue nous le dire. Elle avait 16 ans. Je pense qu'à ce moment-là, elle était rendue presque au point où elle aurait pu être hospitalisée.
    Au début, je pense que nous étions totalement naïfs, ignorants et sous le choc. Nous avons deux autres enfants. Je me souviens que mon mari et moi pleurions dans les bras l'un de l'autre la nuit en nous demandant ce que nous avions fait de mal. Pourquoi est-ce que cela lui arrive?
    Je me rappelle lorsque je l'ai amenée voir un pédiatre. Nous avons été plongés dans l'abîme, désemparés. Nous étions entièrement sous le choc. Je me souviens également que mon mari s'est précipité au centre-ville, justement où travaille Merryl Bear, au NEDIC. Il a fait une recherche sur Google — il y a 13 ans, je suppose que Google, c'était quelque chose d'assez nouveau — et il a trouvé le NEDIC. Il est revenu à la maison avec des pages et des pages et des pages de documents. Nous nous sommes assis sur le lit et nous ne savions pas par où commencer. Je me souviens que je l'ai amenée voir le pédiatre et que je lui avais d'abord envoyé des notes pour que, au moment de l'examiner, il comprenne nos inquiétudes comme parents. Je pense qu'il lui a fallu pas mal de temps avant de dire à Amy qu'elle souffrait d'un trouble de l'alimentation. Pour sa part, Amy a mis quatre ans avant de pouvoir dire le mot « anorexie », car au début elle souffrait d'anorexie.
    Ensuite, il a fallu obtenir une recommandation pour qu'elle voit quelqu'un d'autre. Je me souviens qu'on nous a renvoyé à l'hôpital général de North York. Je ne me souviens plus du tout combien de temps il a fallu attendre avant d'avoir un rendez-vous. Je ne m'en souviens plus, mais je sais qu'elle était vraiment à la limite. Elle se tenait juste en dessous de la limite à laquelle elle aurait dû être hospitalisée. Elle n'a jamais été hospitalisée lorsqu'elle avait 16 ou 18 ans. C'est arrivé beaucoup plus tard.
    Pour ce qui est des embûches, il est difficile de savoir où obtenir de l'aide, où trouver le nom des spécialistes et des psychologues, et ensuite il faut attendre et il faut payer. Vous savez, après deux séances, nous avions atteint le maximum de ce que rembourse le régime de l'employeur de mon mari. Maintenant, il y a aussi le problème qu'Amy a 28 ans et qu'elle n'est admissible à aucune prestation en vertu du régime de l'employeur de mon mari, parce qu'elle a plus de 25 ans et qu'elle n'est pas étudiante. L'argent qu'elle reçoit dans le cadre du Programme ontarien de soutien aux personnes handicapées n'est pas suffisant pour couvrir ses dépenses mensuelles. Nous l'aidons beaucoup.
    En ce qui concerne les embûches, je pense que nous n'avions tout simplement pas assez d'aide, nous n'avions pas accès à l'aide, et tout le processus de renvoi a un spécialiste est long et ensuite il faut attendre les résultats de l'évaluation. On reçoit les résultats des mois après le rendez-vous. Il faut attendre des mois avant d'être admis au programme à l'hôpital. Lorsqu'on a reçu l'appel de l'hôpital... Amy a eu une grave crise de panique et d'anxiété. Elle n'a pas pu accepter sur le coup. Il faut décider immédiatement, pendant que l'on parle à la secrétaire. Il faut accepter pendant l'appel téléphonique sinon la place est offerte à la prochaine personne sur la liste d'attente.
(1655)
    Merci beaucoup.
    Vous avez encore deux minutes.
    Oh, tant mieux.
    D'après vous, quelles sont les idées erronées les plus courantes auxquelles vous et votre fille vous êtes heurtées au sujet de son trouble de l'alimentation?
    Honnêtement, je pense que c'est le manque de compréhension de la part de la majorité. Je pense qu'au fil des années, les gens, même les membres de ma famille proche — ça m'attriste de le dire, mais c'est vrai — ne comprenaient pas. Ils en avaient assez, ils ne voulaient plus m'entendre en parler, alors j'ai arrêté d'en parler. Nous avons des amis merveilleux et d'autres systèmes de soutien.
    Je pense que les gens ne se rendent pas compte des complications et de la complexité, de l'anxiété, de la phobie sociale, de la peur de quelque chose que vous et moi nous tenons pour acquis ou ne considérons pas comme très grave. Pour quelqu'un comme Amy, c'est absolument énorme. Même un repas familial. Pas plus tard que l'autre jour, elle m'a dit que ça ne la dérange pas de manger des fruits et des légumes devant moi et mon mari, mais qu'elle est incapable de manger une omelette devant nous parce qu'elle ne sait pas comment faire. Je pense honnêtement qu'elle a vécu tellement mal au cours des six ou sept dernières années que l'idée de réapprendre des aptitudes sociales normales lui sont une tâche colossale.
    Merci beaucoup. Nous apprécions grandement votre franchise et votre honnêteté.
    Il vous reste une minute, si vous voulez en profiter.
    C'est vrai? C'est formidable.
    La semaine dernière, lorsque nous nous sommes rencontrés, nous avons parlé d'un article paru dans la revue Canadian Living. J'ai mentionné que la mère de l'adolescent dans l'article qui avait un trouble de l'alimentation se blâmait et s'interrogeait sur le genre de messages qu'elle avait transmis à son fils, par exemple lorsqu'elle lui disait de ne pas servir une deuxième fois pour ne pas devenir gros. Elle se sentait très coupable.
    Je me demande s'il y a un message que nous devrions transmettre aux parents. Je voudrais leur dire que ce n'est pas leur faute. Avez-vous ressenti la même chose? Êtes-vous passée par cette phase? Y a-t-il des conseils que vous pourriez donner aux parents d'enfants qui souffrent d'un trouble de l'alimentation?
(1700)
    Oui, au début, mon mari et moi nous sentions très coupables: qu'avons-nous fait de mal? Qu'avons-nous dit?
    Je pense que le meilleur conseil que je pourrais donner aux parents, c'est que même si leur enfant ne veut pas d'aide, eux en ont besoin. Ce n'est pas quelque chose que les parents ont fait ou n'ont pas fait. Je ne dis pas que c'est toujours vrai, mais d'après les connaissances que j'ai acquises au fil des années, je sais maintenant que ce n'est absolument pas quelque chose que mon mari et moi avons fait. Chaque personne a sa propre histoire, et mon meilleur conseil pour les parents, c'est qu'eux-mêmes doivent obtenir de l'aide.
    C'est un excellent conseil. Merci.
    Merci beaucoup.
    Nous passons maintenant à Mme Ashton, pour sept minutes.
    Merci beaucoup, madame Hodge et madame Preskow, de vous être jointes à nous aujourd'hui
    Madame Preskow, je tiens à vous remercier de nous avoir raconté votre histoire privée, l'histoire de votre famille, et je vous remercie de votre témoignage puissant. D'autres témoins nous ont dit que l'un des principaux obstacles, c'est le silence dans lequel vivent les personnes qui ont un trouble de l'alimentation et leur famille. Vous rompez ce silence en parlant au nom des nombreuses familles qui, normalement, ne pourraient pas se joindre à nous au comité.
    Madame Hodge, pendant votre exposé, vous avez parlé assez longuement des recherches qui sont effectuées, mais aussi des lacunes dans ces recherches. Est-ce que vous pourriez nous dire de quelle manière le sous-financement nuit à la qualité des recherches menées sur les troubles de l'alimentation et sur la qualité des soins que reçoivent les femmes?
    Il y a une véritable lacune dans la recherche qui se fait au Canada sur les troubles de l'alimentation depuis quelque temps. Les derniers calculs détaillés faits par Statistique Canada sur le nombre de personnes atteintes au Canada remontent à 1993. Cela explique en partie les énormes écarts dans les estimations des besoins. Les organismes sans but lucratif, les organisations communautaires et les fournisseurs de soins de santé qui veulent pouvoir offrir des programmes se retrouvent un peu dans un cercle vicieux. Pour offrir des programmes, ils ont besoin de statistiques fiables, mais pour obtenir ces données, il leur faut des fonds et les moyens de faire des projets pilotes. Je pense qu'il y a vraiment d'importantes lacunes.
    Il serait utile également que le gouvernement analyse l'incidence financière globale des troubles de l'alimentation au Canada. Des pays comme l'Allemagne l'ont fait. Il faut pour cela tenir compte non seulement des coûts du système de soins de santé, mais aussi du fardeau imposé aux fournisseurs de soins et des coûts indirects attribuables au fait que certaines personnes ne peuvent pas travailler. Je pense que toute cette information nous aiderait à déterminer de quelle manière répondre aux besoins et à montrer, comme ils l'ont fait en Allemagne, que le fait de ne pas répondre à ces besoins est irresponsable tant sur le plan moral que sur le plan financier à long terme.
    C'est intéressant.
    Vous avez parlé avec beaucoup de passion de l'importance de la littératie médiatique. Fait intéressant, notre premier témoin dans le cadre de cette étude, le Dr Woodside, qui a consacré sa longue carrière aux troubles de l'alimentation, et Mme Preskow a parlé de lui, nous a dit que les causes profondes sont liées à des problèmes que l'on peut définir sur le plan médical, que ce soit des troubles mentaux ou connexes, mais que le déclencheur est très souvent social. Vous avez parlé des images auxquelles les filles et les femmes sont exposées. Vous avez mentionné les pressions croissantes, peut-être récemment — et je pense que nous en avons toutes fait l'expérience, moi y compris, en tant que jeune femme — le genre d'images que les gens de ma génération continuent de voir et qui changent également avec le temps, n'est-ce pas? Il y a des modes en ce qui concerne l'apparence ou le comportement des femmes.
    Étant donné le besoin, comme vous le savez, d'initiatives en matière de littératie médiatique, particulièrement dans les écoles, je me demande à quoi ressemblerait une campagne de sensibilisation générale qui toucherait vraiment le public d'une manière efficace.
(1705)
    Oui, je pense qu'il faut sensibiliser le public et avoir des programmes dans les écoles. Il faudrait, par exemple, que le gouvernement reconnaisse davantage le problème et qu'il aide les militants, les défenseurs et les groupes sans but lucratif qui travaillent dans le domaine. Pour ce qui est des programmes dans les écoles, la recherche montre que les interventions en littératie médiatique doivent être à long terme. Il faut commencer tôt et mettre l'accent sur la pensée critique, la remise en question et la discussion. Il ne suffit pas, comme je le disais, de donner de l'information ou de montrer une vidéo.
    Au Royaume-Uni, il y a un programme qui s'appelle Bien dans ma peau, un programme scolaire qui s'adresse aux enfants de 10 et 11 ans, à la fois aux filles et aux garçons. Il traite des facteurs de risque connus qui donnent une image corporelle négative. Il encourage l'estime de soi. Des chercheurs ont évalué les participants avant, pendant et trois mois après le programme. Ils ont constaté chez les filles un changement très positif en matière de satisfaction corporelle, de conversation et de comparaison au sujet de l'apparence, de comportements alimentaires et de connaissance des questions dont elles parlaient. Ils ont constaté des résultats positifs chez les garçons également.
    Aux États-Unis, il y a un programme qui s'appelle Allez les filles, qui a été évalué dans cinq États. Ce programme comporte 12 réunions de groupe d'une heure chacune, soit en classe soit après l'école. L'évaluation a également révélé des résultats très prometteurs. Les filles étaient moins susceptibles d'internaliser des idéaux de minceur, elles souhaitaient moins être minces, elles s'acceptaient davantage et se sentaient plus responsables.
    Merci beaucoup, madame Hodge.
    Quand vous avez fait vos remarques liminaires, vous avez dit vouloir nous donner plus de détails sur deux ou trois questions. Peut-être aimeriez-vous le faire maintenant dans la minute qui vous reste.
    D'accord.
    J'ai déjà parlé un peu des deux programmes. Je le répète, une seule rencontre, ce n'est pas un traitement efficace... Il doit y avoir discussion pour que le message soit renforcé avec le temps. Outre les thérapies, nous avons aussi désespérément besoin d'autres solutions pour améliorer la situation maintenant et à plus long terme. Il faut penser à l'éducation pour faire évoluer les choses et pour susciter une certaine résistance aux déclencheurs sociaux.
    Merci.
    Merci beaucoup, madame Hodge.

[Français]

    Nous passons à Mme Crockatt, qui dispose de sept minutes.

[Traduction]

    J'aimerais d'abord poser une question à Jarrah.
    Merci à vous deux d'être venus. Tous les témoins que nous avons entendus sont plus convaincants les uns que les autres. C'est à se demander comment il se fait que cet enjeu n'ait pas été étudié plus tôt. Quoi qu'il en soit, je suis heureuse que vous soyez venues témoigner.
    Jarrah, comme j'ai moi-même travaillé dans les médias, j'aimerais parler un peu de l'image que projettent les médias. J'ai l'impression que vous avez beaucoup réfléchi à cette question, et je vous en suis reconnaissante.
    Selon vous, où devrions-nous concentrer nos efforts? On croit parfois qu'il faut intervenir sur tous les fronts pour changer les attitudes, mais pour ce groupe d'âge en particulier, que devrions-nous cibler?
    Il faut commencer par l'école, mais vous avez raison, c'est tout un problème. C'est en partie ce qui explique que les interventions ponctuelles ne marchent pas, selon les études. Quand vous regardez une vidéo, vous êtes bombardé de messages qu'on retrouve aussi sur les panneaux publicitaires et à la télé. Il y a l'émission de téléréalité « Qui perd gagne » et bien d'autres encore. Il faut inculquer des compétences aux jeunes enfants et les renforcer avec le temps. Il ne suffit pas de dire aux enfants ce qui est mal; il faut les amener à comprendre les tactiques publicitaires. Comme l'a souligné Mme Ashton, l'idéal de beauté aujourd'hui n'est pas ce qu'il était il y a, 10 ans, 6 ans, ce qui prouve que ces idées changent avec le temps.
    Les médias projettent des images qui, en outre, créent des obstacles pour celles qui n'ont pas la peau blanche. Les premières constations découlant d'études qui ont été menées auprès de femmes de couleur souffrant de troubles de l'alimentation indiquent que leurs cas sont plus complexes du fait que l'idéal de beauté est représenté par une femme blanche. Ça représente peut-être un risque de plus pour elles. Il faut donc explorer aussi l'aspect racial.
(1710)
    Nous pouvons peut-être sortir des sentiers battus pour voir ce qui influence les enfants. Si les enfants d'à peine trois ans...
    Aujourd'hui, nous avons entendu des stéréotypes très négatifs à l'égard des gros. S'agit-il de quelque chose à laquelle doivent s'attaquer les parents dès le jeune âge? Faut-il créer des bandes dessinées pour les enfants? Comment peut-on s'attaquer à un stéréotype si écrasant, selon lequel être mince, c'est être séduisante et désirable, lorsque c'est sur une boîte de céréales, que c'est ce que l'on voit chaque jour quand on allume la télé, qu'on regarde un film. C'est dans tout.
    Absolument, les parents ont un rôle très important à jouer. Si on pouvait intégrer certains de ces éléments dans les programmes destinés aux parents ou aux parents et aux enfants dans les collectivités, ce serait fantastique. Ce n'est pas quelque chose qui va se faire toute seule. Il faut y voir vraiment.
    De plus, en ce qui concerne les choses comme les boîtes de céréales et autres publicités auxquelles on expose les enfants au quotidien, c'est une chose qui vaut la peine d'être examinée. Il faut se montrer créatif, j'imagine. En Norvège, en Angleterre et en France, par exemple, on a parlé de la possibilité d'ajouter des messages d'avertissement sur les publicités pour indiquer que les photos ont été retouchées ou pour, en tout cas, faciliter les choses. L'Association médicale américaine veut faciliter la tâche aux personnes qui, aux États-Unis, veulent porter plainte quand les femmes et les images sont tellement retouchées que la publicité n'est plus fidèle à la réalité.
    Connaissez-vous la compagnie de mannequins qui se sert de mannequins aux mensurations normales? Je ne sais pas d'où elle vient, mais je crois qu'elle est implantée à Barrie, en Ontario. Dove, le fabricant de savon, s'est servi de la compagnie, et d'autres l'ont imité. La connaissez-vous? Pensez-vous que cela a un effet?
    Je ne la connais pas précisément, mais des études réalisées en laboratoire sur l'image corporelle montrent souvent des femmes. Dans ces études, on évalue l'attitude des femmes face à leur corps et ensuite on leur montre des images, après quoi on les réévalue. Il a été prouvé que les femmes à qui on montre des femmes de taille moyenne ou des mannequins plus rondes dans les publicités ont une moins mauvaise image d'elles-mêmes à la fin de ces expériences. Je crois donc que cela a un effet.
    En Italie, en Israël et en Inde, on a envisagé d'interdire les mannequins qui sont trop maigres. Je ne sais pas si cela aurait des effets énormes, car nous recevons une grosse partie du contenu de nos médias des États-Unis, mais je crois qu'il serait utile d'encourager la bonne santé et de chercher à contrer l'idée selon laquelle la beauté n'existe qu'en une seule taille.
    Madame Preskow, je suis désolée de ne pas m'adresser à vous. Ce n'est pas ce que je voulais, mais j'ai une autre question et je crois que c'est tout le temps dont je dispose pour Jarrah.
    Vous avez mentionné la communauté GLBT. Je sais que vous n'êtes pas une experte sur la cause des troubles de l'alimentation, mais vous êtes l'auteure d'un blogue et vous avez des gens qui vous écrivent là-dessus. Que savez-vous sur les risques et les causes des troubles alimentaires, d'après ce que vous avez entendu? Nous savons qu'un grand nombre de personnes s'expriment davantage et plus ouvertement dans les médias sociaux qu'ailleurs. Qu'en pensez-vous?
    Oui, dans une étude du National Institutes of Health qui portait sur les membres de la communauté GLBT et les troubles de l'alimentation, on signale qu'on retrouverait davantage de troubles de l'alimentation chez les hommes gais, car ils subissent davantage les pressions pour se conformer à un idéal de beauté, mais que ces troubles affectent moins les femmes lesbiennes. Cependant, la seconde partie de cette étude montre que ce n'est pas le cas, que les femmes lesbiennes et les femmes bisexuelles souffrent de troubles de l'alimentation à peu près de la même façon. Il faut absolument étudier davantage la question.
    Chaque fois qu'on dit aux gens qu'il y a une façon d'être beau et que le seul objectif doit consister à attirer quelqu'un grâce à cette beauté, on crée des problèmes et c'est un message qui ne s'adresse pas uniquement aux personnes hétérosexuelles.
(1715)
    Merci beaucoup.

[Français]

    Merci beaucoup.
    Madame Duncan, vous avez la parole pour sept minutes.

[Traduction]

    Madame Preskow, merci pour votre témoignage percutant, pour votre courage et pour votre force. Nous gardons votre famille dans nos pensées.
    Pourriez-vous dire au comité ce que ça coûte à une famille, les soins d'un psychiatre ou d'un nutritionniste? Combien est-ce que ça coûte pour un an, par exemple?
    Amy bénéficie du régime d'invalidité de l'Ontario, et il s'agit d'un montant limité naturellement. Même si elle obtient en réalité un petit peu plus, car elle souffre d'un problème de l'alimentation, avec l'argent qu'elle reçoit, à moins qu'elle ne vive dans un taudis, pour être honnête avec vous, elle n'aurait plus d'argent pour faire autre chose. Même lorsqu'elle ne vivait pas avec nous, ce qui est le cas depuis à peine six mois, nous l'aidions pour son loyer et sa nourriture tous les jours. Nous faisions exactement ce que notre thérapeute nous avait aidés à faire, à savoir nous l'aidions à ne pas voler. Nous l'aidions en lui donnant de la nourriture et en lui achetant des aliments, un cellulaire, ce qui représente environ 70 $ par mois. Étant donné qu'elle est si anxieuse, prendre le métro et les transports en commun, c'est très difficile, quasiment impossible. Je dois donc la conduire partout, chez le docteur, à l'épicerie, au magasin pour acheter des vêtements, que je lui paie.
    Lorsqu'elle ne vivait pas avec nous, il y avait les vêtements, la nourriture, le câble pour la télé, l'hébergement, toutes les choses essentielles pour vivre. Heureusement, sa psychologue — et je peux vraiment l'en remercier publiquement — la traite gratuitement depuis deux ans, car elle s'est rendu compote qu'Amy ne pouvait tout simplement pas la payer et que tout cela est au-delà de nos moyens. C'est environ de 200 $ à 250 $ chaque semaine, et cela donne un joli montant très rapidement.
    Étant donné qu'Amy se sent coupable de tout... À vrai dire, je lui donnerais les vêtements que je porte, je lui ferais couler un bain et nous nous priverions volontiers, car sa douleur à elle est incroyable. Elle se sent si coupable et elle s'en veut pour tout. Elle se voit comme un fardeau. J'essaie constamment de lui dire que ce n'est pas de sa faute.
    En fait, je lui ai dit que le Canada la laissait pour compte, qu'elle devrait être dans un bel endroit, agréable et où il fait bon rester, pas un endroit où elle demeurerait 24 heures sur 24, 7 jours sur 7, mais un endroit auquel elle pourrait avoir accès. Ce ne serait pas nécessairement un centre résidentiel, uniquement un endroit où elle pourrait aller, où elle se sentirait à l'aise et qui ne serait pas un établissement. Je lui ai dit très souvent que ce qui lui arrivait ne devrait pas lui arriver, que ce n'est pas de sa faute et que je suis désolée que son pays l'ait laissée tomber. C'est ce que je lui ai dit.
    Ce sont là des mots très puissants. Pourriez-vous être très précise et nous dire ce qui aurait facilité la vie de Amy, à partir du moment où elle a été diagnostiquée, en passant par chacune des étapes?
    Comme vous l'avez dit plus tôt, il faut apprendre à vivre dans ce monde nouveau, seul. Il n'y a pas d'aide.
    Très précisément, quelles seraient les recommandations que vous feriez à notre comité pour que les vies soient plus faciles à l'avenir?
    Ce que j'ai essayé de faire par la sensibilisation... Si les familles étaient plus au courant de ce qui se passe... Très souvent, et cela nous est certainement arrivé à nous également, c'est une maladie tellement secrète au début. Nous n'avons pas gardé le secret, mais nous ne voulions pas qu'Amy souffre de cette étiquette. Je ne voulais pas qu'on la regarde différemment en se disant: « Oh, Amy, elle a un trouble de l'alimentation. » Si les gens étaient davantage au courant et que les familles en étaient plus conscientes...
    De plus, il y a une chose que je dirais aux mères, tout spécialement, c'est de ne jamais dire en face de leurs enfants: « Je dois perdre cinq kilos, car je vais à un mariage et il faut que je rentre dans une tenue spéciale. »
    Je n'ai jamais prononcé le mot « régime » chez nous. Jamais. Ce n'est jamais un mot qu'elle a entendu de ma bouche. Dans notre famille, nous ne souffrons pas d'embonpoint. Donc, ce n'est jamais quelque chose dont j'ai parlé. L'attitude des parents et leur acceptation de soi a probablement un rôle à jouer en ce qui concerne leurs enfants. Si les enfants voient que leurs parents se regardent constamment dans le miroir ou qu'ils disent: « Je ne devrais pas manger ça », cela va avoir un effet sur leurs enfants.
    Il y a d'autres choses également...
(1720)
    Madame Preskow, je vais peut-être vous interrompre.
    Si vous aviez une recommandation à faire à notre comité, ce serait d'organiser une campagne de sensibilisation et d'éducation — j'imagine; je ne veux pas mettre des mots dans votre bouche et dites-moi donc si je me trompe — et de chercher également à réduire la stigmatisation. Est-ce bien ça?
    Oui.
    On a besoin d'une campagne de sensibilisation qui soit visible et non pas cachée. Les troubles de l'alimentation sont cachés. Surtout et malheureusement pour quelqu'un comme Amy, comme elle était au début, avec son anorexie, on peut voir que quelqu'un a l'air d'être anorexique par son apparence physique et son corps. Mais pour ce qui est de la boulimie, on ne peut pas savoir qui souffre de boulimie. On ne sait pas combien de ses collègues autour de la table pourraient être boulimiques.
    Les campagnes et la publicité devraient être conçues de manière à ce que les gens sachent qu'on devrait en parler. La situation actuelle des troubles de l'alimentation, à mes yeux, est comparable à celle du sida, il y a 30 ans. Les troubles de l'alimentation se situent au même niveau que le sida, il y a 30 ans. Tout ce qui a été fait pour le sida, le fait d'en avoir parlé et de le faire au grand jour, a fait en sorte que le monde entier l'a accepté et a voulu aider les personnes atteintes du sida. Je crois que les maladies ou les troubles de l'alimentation accusent un retard de 50 ans.
    Merci.

[Français]

    Madame Young, vous avez la parole pour cinq minutes.

[Traduction]

    Merci encore à vous deux d'être venues aujourd'hui.
    J'aimerais vraiment vous remercier, madame Preskow, pour vos derniers commentaires. Vous avez en quelque sorte synthétisé mes questions.
    Évidemment, nous avons des décennies de retard. Plus tôt, nous avons entendu le témoignage de la Dre Katzman qui nous a dit que la prévalence des troubles de l'alimentation au Canada concernait environ 1,5 % de notre population, soit environ 525 000 personnes. Elle nous a dit que 10 000 personnes souffrent du cancer, 25 000, du diabète, et comme vous le savez, il y a une plus grande prise de conscience et bien évidemment des services et des programmes, et de toutes les choses dont nous avons discuté avec les témoins précédents.
    Il y a 25 ou 26 ans, le Canada a été le premier pays à adopter une loi sur le tabagisme passif. Cela a fait bouger les choses, car à l'heure actuelle dans les programme télévisés notamment, les gens fument beaucoup moins.
    J'aimerais adresser mes questions à Jarrah Hodge, car j'aimerais m'attarder sur une perspective sociétale au sens large et étant donné que je suis également sociologue de l'Université de la Colombie-Britannique.
    Étant donné votre expérience avec les blogues et que les gens vous racontent certaines anecdotes, quel changement culturel ou législatif — et vous l'avez abordé à la toute fin de votre témoignage — pourrait, à votre avis, entraîner les mêmes changements que nous avons vus, comme la prise de conscience actuelle sur le cancer, la réduction du tabagisme à la télé, dans toutes sortes de domaines? Comment pouvons-nous nous rendre jusque-là? Nous sommes de toute évidence encore loin du compte avec les troubles de l'alimentation.
    Je crois qu'il s'agit d'une excellente question.
    Tout d'abord, il faut être absolument clair et dire qu'il s'agit d'une question qui touche à la santé. Nous devons nous servir de certaines des techniques qui ont été utilisées avec le tabagisme passif, notamment la publicité concernant la sécurité publique, et éventuellement envisager des étiquettes d'avertissement, ou au moins accroître la responsabilité des publicitaires. Voilà ce qu'on peut faire. Je crois que cela aurait un effet sur l'ensemble du système. Nous devons absolument intervenir dans les écoles. Pour contrer certains des messages puissants et écrasants des médias, il serait également utile de souligner et de répéter dans les médias et en public que ces images sont déformées, qu'elles ne sont pas réelles et que ce n'est pas un idéal.
    Ce serait formidable d'avoir des campagnes d'éducation et de sensibilisation en matière de santé. Je crois qu'on a besoin de recherche, notamment pour combler les lacunes que j'ai mentionnées, mais également de manière générale, pour voir où se trouvent ces lacunes et intervenir sur les coûts. Ce serait également très utile pour les programmes.
(1725)
    Madame Hodge, je suis désolée, mais je vais devoir vous interrompre un instant. Je n'ai que très peu de temps et je voudrais vous demander à vous et à Mme Preskow de nous soumettre toute information additionnelle dont vous disposez. J'aimerais vous poser mes questions et je vous invite à nous répondre par écrit, car nous inclurons cela dans votre témoignage.
    Étant donné que nous n'avons que très peu de temps, j'aimerais maintenant vous poser des questions supplémentaires, si vous n'y voyez pas d'inconvénient. Je suis tout à fait d'accord avec vous: nous avons besoin de travailler davantage au niveau des médias, entre autres, mais il s'agit là d'une notion très vague. À mon avis, si nous avons si bien réussi avec le tabagisme, c'est que nous avons travaillé avec les fabricants de cigarettes et que nous les avons ciblés, entre autres. Les médias, pour leur part, sont un concept très vague.
    Madame Preskow, vous avez dit que vous ne veniez pas d'une famille d'obèses et que vous n'avez donc jamais parlé de régime. Et donc vous devez vous demander, d'où Amy a-t-elle sorti ces concepts? Comment cela s'est-il transformé en trouble de l'alimentation? Quel est le lien entre les médias et notre société? Comment les choses se sont-elles transformées en un trouble de l'alimentation chez elle?
    Je crois que, étant donné l'ampleur de ce problème qui affecte 500 000 personnes, et le fait qu'il soit si caché, nous devons nous poser ces questions. Évidemment, cela a un énorme impact, non seulement sur les familles comme la vôtre, madame Preskow, mais sur toute la société, car nous avons perdu tellement de ces personnes qui peuvent y contribuer.
    Veuillez s'il vous plaît répondre à ces questions.
    Merci beaucoup.
    Madame Hodge et madame Preskow, voilà les questions de Mme Young. La greffière vous enverra ces questions et vous pourrez y répondre par écrit. Vous pouvez aussi nous fournir tout renseignement qui vous semble utile sur des points que vous n'avez pas eu l'occasion d'aborder ou d'approfondir, entre autres. N'hésitez pas à communiquer avec la greffière du comité, car cela continuera d'enrichir notre étude sur cette question très importante.
    Je tiens à vous remercier, encore une fois, d'avoir pris le temps de nous rencontrer et je vous souhaite une très bonne soirée.
    Notre prochaine réunion aura lieu le mercredi 12 février, à 15 h 30, dans la même salle.
    La séance est levée.
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