Selon mon BlackBerry, il est précisément 8 h 45, heure avancée, reculée ou normale de l'Est. Je vous souhaite la bienvenue à la 41e réunion du Comité permanent de la condition féminine. C'est d'ailleurs la dernière réunion du comité en 2014, ce qui en fait une réunion très spéciale. Nous poursuivons notre étude sur les pratiques prometteuses pour prévenir la violence envers les femmes.
Aujourd'hui, nous avons le plaisir d'accueillir Mme Marion Little, qui est professeure adjointe à l'École d'administration publique de l'Université de Victoria.
Nous recevons aussi Mme Tracy O'Hearn, qui est directrice générale du Pauktuutit Inuit Women of Canada.
Par ailleurs, nous accueillons par vidéoconférence Mmes Bonnie Johnston et Jenny Ofrim, du Sheldon Kennedy Child Advocacy Centre, ainsi que Mme Fay Faraday, qui est avocate et professeure invitée du Osgoode Hall Law School.
Chacun des groupes de témoins va disposer de 10 minutes pour sa présentation. Par la suite, il y aura la période de questions.
J'aimerais commencer avec Mme Little, qui dispose de 10 minutes.
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Merci, madame la présidente, merci, chers membres du comité. Je vous remercie infiniment de votre invitation.
Permettez-moi de commencer et de terminer ma déclaration en vous lisant des poèmes qui font entendre certaines des voix des nombreuses femmes et jeunes filles que j’ai eu le privilège d’aider au fil des ans.
Jamie Jardine est l’auteur du premier poème.
Blessures
Nue devant mon miroir,
Je fixe mon reflet.
Que vois-je?
Non pas la femme sans défaut que j’aspire à être,
Mais plutôt une fille meurtrie qui porte des cicatrices permanentes,
Marquée par des coups non désirés qui ne s’effaceront jamais,
Quoi que je fasse.
Chaque regard me rappelle
L’origine de ces blessures.
J’ai cessé d’essayer de changer,
De couvrir ou d’effacer ces cicatrices.
J’ai cessé d’expliquer ces sombres meurtrissures.
Ce sont mes tatouages.
Il y a tellement de questions dont j’aimerais vous parler aujourd’hui. Par expérience, je mettrai exclusivement l’accent sur les femmes marginalisées qui sont beaucoup plus susceptibles d’être victimes d’actes de violence que qui que ce soit d’autre. La première chose que j’aimerais faire valoir, c’est que les femmes marginalisées doivent avoir accès à des programmes d’entraide personnalisés, réceptifs et inconditionnels qui sont financés de façon durable et qui s’inspirent directement de leurs besoins et du contexte dans lequel elles vivent.
Pardonnez-moi. Je suis tellement nerveuse que j’entends ma voix trembler.
Cette pratique exemplaire de base est reconnue comme étant la façon la plus accessible, la plus efficace et la plus économique d’accroître le bien-être de ces femmes, tout en réduisant leur marginalisation et la violence dont elles sont victimes. Les femmes marginalisées sont plus susceptibles de participer à des programmes d’entraide qu’à des programmes ordinaires. La probabilité qu’elles divulguent leurs circonstances est plus grande lorsqu’elles parlent à des pairs en qui elles ont confiance, ce qui rend ces programmes essentiels pour la planification d’interventions, la liaison avec les services de police, leur rétablissement à la suite d’un traumatisme et la prévention de la violence.
La deuxième chose que j’aimerais faire valoir, c’est que les pratiques exemplaires en matière d’élaboration de politiques et de lois relatives aux femmes marginalisées exigent que ces groupes d’entraide soient consultés à fond et qu’on tienne compte du consensus auquel les chercheurs universitaires parviennent à ce sujet, à l’échelle nationale.
Dans le rapport d’enquête de la Colombie-Britannique sur les femmes portées disparues, intitulé « Forsaken », l’honorable Wally Oppal définit la marginalisation comme « le processus social qui amène des personnes ou des groupes à être placés en marge de la société » et « à être systématiquement privés des droits, des perspectives d’avenir et des ressources qui sont habituellement à la disposition des membres de cette société ».
Le terme est lié au fait que les gens marginalisés sont « en danger et vulnérables en ce qui concerne la prédation », « ce qui crée un milieu propice à l’oubli des femmes assassinées et portées disparues ».
M. Oppal affirme que:
Trois tendances sociales et économiques générales contribuent à la marginalisation des femmes: le retranchement des programmes d’aide sociale, les effets permanents du colonialisme, la réglementation criminelle de la prostitution et des stratégies d’application de la loi connexes.
Selon l’Ending Violence Association de la Colombie-Britannique, la plupart des femmes et des enfants tués ou gravement blessés au cours d’actes récents de violence familiale ou sexuelle faisaient partie de groupes marginalisés. Pour de plus amples renseignements à ce sujet, veuillez consulter le site Web à l’adresse www.endingviolence.org. Les membres de cette association ont détecté des lacunes dans les services spécialisés offerts dans le domaine de la violence familiale ou sexuelle aux femmes marginalisées et, en particulier, aux femmes autochtones, aux immigrées, y compris les réfugiées et les travailleuses migrantes, aux femmes handicapées, aux femmes atteintes de troubles mentaux, aux toxicomanes, aux habitantes de régions rurales, aux femmes pauvres, aux lesbiennes, aux transsexuelles et aux travailleuses du sexe. Et j’ajouterais que les services offerts aux jeunes itinérantes ou aux jeunes femmes qui risquent de tomber dans l’itinérance sont insuffisants.
Selon Statistique Canada, les femmes qui sont le plus souvent la cible de toutes les formes de violence sont âgées de 15 à 24 ans. En raison de leur jeune âge et de leur marginalisation, il est difficile de saisir l’énormité du problème, surtout que les femmes marginalisées hésitent souvent à appeler la police et sont plus portées à avoir recours à de l’aide officieuse.
Comme vous le savez, les femmes autochtones, c’est-à-dire les femmes inuites, métisses et des Premières Nations — font face à des taux de violence élevés et sont surreprésentées parmi les femmes assassinées et portées disparues de l’ensemble du Canada. Elles sont plus vulnérables à la violence simplement parce qu’elles vivent dans ce que l’honorable Wally Oppal appelle « une société qui présente des risques pour leur sécurité ». Le rapport indique également qu’« en Colombie-Britannique et dans le monde entier, les femmes marginalisées et vulnérables sont exposées à un taux de violence plus élevé, dont des agressions sexuelles, des meurtres et des prédateurs en série. »
La Commission d’enquête sur les femmes disparues de la Colombie-Britannique soutient qu’il est impératif que nous prenions conscience des forces plus vastes de la marginalisation ainsi que du rejet et de l’abandon par la société qui ont contribué à accroître la vulnérabilité de ces femmes. Ce rejet et cet abandon ont également influé sur la réaction des services de police. Si des groupes d’Autochtones et des groupes de travailleuses du sexe ont soulevé des questions valides au sujet de l’enquête menée par la Colombie-Britannique, son rapport contient des recommandations très judicieuses. Je vous conseille de l’examiner.
Veuillez examiner le sommaire du rapport de l’honorable Wally Oppal, intitulé « Forsaken », qui est affiché sur le site Web du procureur général de la Colombie-Britannique. Je vous invite également à passer en revue la lettre datée du 1er octobre 2014 que le secrétaire général d’Amnistie internationale a envoyée au Parlement et qui est affichée sur le site Web de l’organisation.
La Cour suprême a reconnu que les prostituées qui travaillent dans les rues sont parmi les membres les plus marginalisés de la société. Le Centre for Addictions Research de l’Université de Victoria vient juste de publier la première étude sur l’industrie du sexe menée à l’échelle nationale. Cette étude présente de nouvelles conclusions, que certaines personnes pourraient trouver surprenantes. Il est crucial de comprendre la réalité de l’industrie du sexe pour pouvoir élaborer des lois, des politiques, des pratiques et des services de soutien qui préviendront la violence et accroîtront la sécurité de tous. Veuillez consulter le site Web de ce centre à l’adresse www.understandingsexwork.com/fr.
Le soutien par les paires est une pratique exemplaire fondamentale pour les groupes marginalisés. Par exemple, l’organisation PEERS de Victoria et ses organisations sœurs des quatre coins du pays offrent un soutien par les pairs rare, inconditionnel et digne de confiance aux travailleuses du sexe d’aujourd’hui et hier, lorsqu’elles sont en détresse, qu’elles sont victimes de violence ou qu’elles cherchent de l’aide. Malheureusement, toutes ces organisations manquent cruellement de fonds.
La relation respectueuse qu’entretiennent l’organisation PEERS de Victoria, les travailleuses du sexe qu’elle sert et l’Unité spéciale des victimes du Service de police de Victoria entraîne régulièrement l’arrestation et l’incarcération de délinquants violents, ce qui accroît la sécurité publique. Le soutien apporté aux groupes marginalisés à un effet bénéfique sur les collectivités en entier.
Malheureusement, quelques agents immoraux suffisent à détruire cette confiance et les avantages qui s’y rattachent. Les travailleuses du sexe et les études nous révèlent que certains de leurs clients sont des agents de police. Certains agents immoraux sont violents et abusent de leur pouvoir pour forcer les travailleuses à avoir des relations sexuelles avec eux. Comme il est assez commun que les travailleuses du sexe aient cette expérience, elles ont tendance à se méfier de la police en tant qu’institution. Le fait que des agents immoraux exploitent des travailleuses du sexe et leur causent des torts crée un certain dilemme, car, en vertu du projet de loi , ces mêmes agents auront désormais un pouvoir accru sur les travailleuses du sexe et des raisons supplémentaires de les faire taire.
Il est nécessaire que le système de justice en entier soit renseigné sur les femmes marginalisées afin d’accroître les signalements, de garantir des interventions efficaces, de protéger les personnes vulnérables et de prévenir la violence. Il est également indispensable d’offrir en permanence des cours de formation sur la prévention des mauvais traitements et d’élaborer des politiques robustes pour prévenir les abus de pouvoir au sein des institutions gouvernementales, comme celles responsables de la santé, de la justice et des services sociaux, car les femmes marginalisées ont tendance à se méfier de ces institutions en raison des expériences qu’elles ont vécues auprès d’elles, expériences qui sont allées de l’impolitesse au rejet, en passant par l’exploitation et la violence.
L’exploitation sexuelle des mineurs ne fait pas partie de l’industrie du sexe. Il s’agit de violence à l’égard des enfants. Cette exploitation et la traite des personnes sont des enjeux distincts et des actes de violence directs qui sont gérés par des lois précises. Toutefois, les lois ne suffisent pas à prévenir ces atrocités. Comme premières mesures de prévention, nous devons fournir un logement stable, une sécurité alimentaire et un renforcement affectif aux plus de 65 000 jeunes Canadiens qui sont actuellement sans abri ou qui risquent de le devenir (voir le site Web www.cheztoit.org).
La violence faite aux femmes et aux jeunes filles marginalisées est directement liée à nos taux de pauvreté chez les enfants et à notre crise du logement — en fait, elle est liée à la situation de crise dans nos foyers. Si nous cherchons vraiment à prévenir la violence, nous allons devoir atténuer les facteurs qui accroissent la marginalisation personnelle, relationnelle, communautaire et sociétale. Pour ce faire, il faut offrir à ces personnes un logement stable, une aide juridique, une sécurité alimentaire et de l’eau propre. Il faut que nous prévoyions un nombre suffisant de places dans des garderies abordables, de lits dans des centres de désintoxication, de refuges temporaires et de programmes, en particulier des programmes de soutien par les pairs, qui appuient le rétablissement à la suite d’un traumatisme, le développement des compétences et le développement communautaire. Nous devons investir dans l’augmentation de la résilience et l’autonomisation.
Lorsque nous tolérons la violence faite aux femmes marginalisées, dont les exemples les plus flagrants sont les travailleuses du sexe et les femmes autochtones, nous permettons que cette menace pèse sur toutes les femmes, une menace explicite qui nous rappelle que la violence est tolérée contre n’importe laquelle d’entre nous, en fonction seulement de nos circonstances et des caprices de la société, et que ni nos lois, ni nos droits et libertés en tant que Canadiennes, ne nous protégeront contre cette violence. La violence faite aux femmes marginalisées sur laquelle la société ferme les yeux est une attaque lancée ouvertement contre toutes les femmes, contre le système de justice et contre les droits et libertés des citoyens canadiens.
Je vais conclure mon exposé en vous lisant un dernier poème très court écrit par une poète de l’organisation PEERS. Elle utilise un labyrinthe plein de culs-de-sac comme métaphore, et elle le compare à une route contemplative sans embranchement:
Casse-tête
Ma vie est un labyrinthe.
Des culs-de-sac bloquent constamment ma route,
Peu importe la direction que je prends,
Même lorsque je fais un pas dans la bonne direction.
Je m’efforce de transformer ma vie en une route sans embranchement,
D’être sur la bonne voie,
quelle que soit la direction dans laquelle je m’engage,
D’être toujours centrée sur mon cheminement.
Merci.
[Français]
Bonjour.
Ullakut.
Je vous remercie de l'invitation. Je ne parle pas beaucoup le français.
[Traduction]
J’aimerais vous communiquer les salutations et les meilleurs voeux de Rebecca Kudloo, notre présidente. Elle vit à Baker Lake, au Nunavut, et elle ne pouvait pas être ici aujourd’hui. Elle vous est très reconnaissante de l’occasion qui nous est donnée de comparaître devant vous.
Pour ceux d’entre vous qui ne connaissent peut-être pas l’organisation Pauktuutit, je précise qu’elle vient de fêter son 30e anniversaire à titre de représentante nationale de l’ensemble des femmes inuites du Canada. Notre organisme a un vaste mandat à remplir, mais notre travail met l’accent sur trois principaux secteurs, notamment la santé, la prévention de la violence et des mauvais traitements, qui est l’une de nos principales priorités depuis 30 ans maintenant, et le développement socioéconomique général.
Je suis heureuse de répondre à toutes les questions que vous pourriez avoir à ce sujet.
On nous a demandé de parler aujourd’hui de nos pratiques exemplaires ou prometteuses dans le domaine de l’éducation et des programmes qui peuvent contribuer à prévenir la violence faite aux femmes.
Nos politiques et nos programmes de prévention de la violence faite aux femmes inuites doivent être fondés sur la culture, les valeurs, les pratiques, la géographie et la langue des Inuits. C’est la norme dans notre travail. Nous produisons un vaste éventail de ressources que les personnes, les fournisseurs de service ou d’autres organisations utilisent dans leur collectivité. Nos ressources sont toujours rédigées clairement en anglais et, au moins, dans l’un des dialectes d’inuktitut. L’inuktitut est l’une des trois langues autochtones du Canada qu’on s’attend à voir survivre, et il est encore employé quotidiennement.
Nous nous efforçons d’apprendre au fur et à mesure que nous avançons et d’améliorer nos façons de communiquer. L’utilisation d’Internet se répand rapidement dans le Nord — nous avons maintenant une page Facebook —, mais les moyens de communication comme la radio sont toujours très efficaces. À l’heure du dîner, tout le monde retourne à la maison et écoute la radio. C’est donc un défi à relever. Le fait que nous devons communiquer avec des gens éparpillés sur un tiers de la masse continentale du Canada représente probablement l’une de nos plus grandes difficultés. Cependant, nous nous efforçons de tirer des leçons de nos erreurs et de nous améliorer.
Malheureusement, Pauktuutit lutte contre ce problème depuis 30 ans, et non seulement la situation ne s’est pas améliorée, mais elle s’est, au contraire, considérablement aggravée. Je ne vais pas vous citer de nouveau toutes les statistiques et les taux de criminalité, car ils sont très bien connus. J’aimerais cependant mentionner le récent rapport publié par la Nunavut Tunngavik Incorporated, qui est l’organisation inuite de revendications territoriales du Nunavut. Le rapport porte sur l’état de la société et de la culture inuites, et met l’accent sur la violence faite aux femmes. Le rapport indique que le Nunavut est la région du Canada où les femmes et les enfants sont les plus en danger, et c’est absolument vrai.
En ce qui concerne la violence faite aux femmes, cet enjeu doit aussi être envisagé comme un important problème de santé mentale et physique. Il existe un vaste éventail d’interventions possibles: les soins d’urgence, les évacuations sanitaires, les chirurgies, la réadaptation, les périodes d’éloignement de la famille et les emplois. Je suis certaine qu’un grand nombre de ces répercussions nous sont tous très familières.
J’aimerais maintenant attirer votre attention sur le fait que quatre enquêtes régionales sur la santé ont été menées. Il y a quatre principales régions inuites au Canada.
Dans le cadre d’une étude menée au Nunavut en 2004, on a découvert que la moitié des femmes qui avaient participé à l’enquête sur les ménages inuits avaient été victimes d’agressions sexuelles ou de tentatives d’agressions sexuelles lorsqu’elles étaient mineures. Un quart d’entre elles avait connu les mêmes problèmes à l’âge adulte. Pour ce qui est des hommes, 16 % de ceux qui avaient participé au sondage régional avaient subi les mêmes agressions lorsqu’ils étaient enfants, et 13 % d’entre eux avaient continué d’être agressés à l’âge adulte. Au Nunavut, une femme inuite sur deux a été victime de graves agressions sexuelles pendant son enfance, et ces blessures vont plus loin que des os fracturés. En l’absence de soutien et de services spécialisés, ces blessures peuvent meurtrir une âme et ruiner une vie. En règle générale, ce soutien et ces services n’existent pas dans les collectivités inuites.
Bien que nous ne puissions le prouver, nous savons au fond de nous qu’un grand nombre des personnes qui ont été victimes d’agressions sexuelles pendant leur enfance choisissent de mettre fin à leur douleur en se suicidant. Nous le savons.
J'aimerais parler brièvement d'un projet qui tire à sa fin avec Condition féminine Canada. C'était la première fois que nous avions l'occasion d'étudier les connaissances, les attitudes et les comportements des femmes et des hommes inuits, de différents groupes d'âge, de les sonder sur les connaissances, les attitudes et les comportements qui génèrent un niveau de violence déclencheur de crise. Nous sommes encore en train d'en compiler les résultats. Ce projet va se terminer à la fin mars. Nous espérons en apprendre beaucoup des résultats du sondage.
Nous travaillons notamment à concevoir une trousse de ressources. Notre projet vise à mobiliser les hommes et les garçons pour réduire la violence. Encore une fois, c'est la première fois que nous avons l'occasion d'utiliser cette approche. Nous sommes aussi en train de concevoir une série d'outils pour les particuliers, pour les groupes d'hommes et pour quiconque veut les utiliser dans les communautés pour encourager les hommes à oser parler de leurs difficultés et à essayer de se guérir.
Pour ce qui est de recommandations sur les pratiques exemplaires, nous participons à toutes les tribunes possibles pour faire entendre la voix des femmes inuites. À la fin octobre dernier, nous avons participé au 4e sommet national des femmes autochtones à Membertou, en Nouvelle-Écosse. À titre de membres du comité de planification nationale, nous sommes en train de préparer un rapport sur ce sommet. Pendant le sommet de Membertou, nous avions pour tâche d'examiner les recommandations issues des trois premiers sommets nationaux des femmes autochtones pour déterminer ce qui a été fait, ce qu'il faut faire maintenant et ce qu'il faudra faire ensuite. Le principal thème récurrent des recommandations formulées depuis 2007 concerne la nécessité d'un financement stable, coordonné et pluriannuel. Ce travail doit être adapté aux besoins, aux priorités et aux circonstances uniques des femmes membres des Premières Nations, des Inuites et des Métisses et se faire en partenariat équitable avec les organisations représentatives. Malheureusement, rien n'a encore été fait à ce chapitre.
Je vais vous parler aussi brièvement du plan d'action national de lutte contre la violence envers les femmes autochtones qui a été annoncé en septembre. Je sais que certaines organisations y ont répondu assez rapidement. Nous ne l'avons pas fait, parce que nous avions besoin de comprendre ce qu'il comprenait exactement, ce qui semble nouveau, ce qui pourrait déjà exister. Nous avons publié un communiqué de presse la semaine dernière pour nous positionner autant que possible, sur la base des renseignements que nous avons reçus, principalement d'Affaires autochtones et Développement du Nord Canada. Sur les 7 millions de dollars que le ministère réserve chaque année pour prévenir la violence familiale et en protéger les victimes, les femmes inuites du Canada reçoivent en ce moment 75 000 $ par année, soit 1 % de ces 7 millions de dollars. Les collectivités inuites sont constamment exclues du financement fédéral destiné aux refuges dans les réserves. Cela fait une vingtaine d'années que nous essayons d'élever cette question au niveau stratégique au ministère, soit depuis que je travaille pour l'organisation.
Si l'on regarde un peu les 20 millions de dollars attribués cette année aux organisations représentatives autochtones, notamment pour la prévention de la violence familiale, nous avons reçu 80 000 $ cette année, sur 20 millions, pour stimuler le développement économique. Si l'on prend ces 20 millions de dollars, plus 7 millions de dollars, les femmes du Pauktuutit — ce que j'interprèterais comme les femmes inuites en général — ont reçu la moitié d'un pour cent du financement total de 27 millions de dollars rendu disponible cette année par Affaires autochtones et Développement du Nord. Je sentais le besoin de porter la chose à votre attention.
Je dirais également au sujet des pratiques exemplaires ou prometteuses, qu'il n'y a pas assez de mesures de prévention de la violence chez les Inuits qui ont été évaluées à long terme pour que nous puissions même parler de pratiques prometteuses. Nous sommes appuyées dans notre travail. Notre travail est suivi de près par les femmes de la communauté, par les fournisseurs de services, par les spécialistes des Inuits et par d'autres experts. Nous sommes persuadés d'être sur la bonne voie, mais il faut ratisser plus large, offrir des services viables à long terme et les évaluer sur de longues périodes.
Encore une fois, je vous suis très reconnaissante de me consacrer du temps ce matin. Merci infiniment.
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Le lien avec le public ne s'établit pas tout à fait de la même façon dans l'univers de la vidéo. C'est entendu. Je vous remercie beaucoup. Il est 7 heures ici, à Calgary, et je pense que nous n'avons même pas encore pris notre café, Jen, n'est-ce pas? Nous allons ralentir.
Le Canada a la chance énorme que ses gouvernements fédéral et provinciaux reconnaissent l'importance du développement sain de l'enfant. Nous avons des ressources clés, comme les divers centres d'appui aux enfants qu'on trouve un peu partout au pays et qui sont des chefs de file dans l'aide aux enfants victimes de violence.
Nous avons aujourd'hui trois principaux messages à vous transmettre.
Premièrement, les enfants victimes de violence sont plus susceptibles que les autres de commettre des actes violents contre leurs conjoints et leurs propres enfants plus tard et d'en être de nouveau victimes à l'adolescence et à l'âge adulte.
Deuxièmement, le fait qu'un enfant soit témoin de violence conjugale est une forme de violence qui vient souvent avec d'autres formes de violence à la maison. Ce ne sont pas des problèmes isolés, et les solutions doivent cibler toutes les formes de violence.
Troisièmement, les filles et les femmes sont disproportionnellement touchées par la violence, particulièrement par la violence sexuelle. Pour prévenir ou faire diminuer la violence envers les femmes et les filles, il faut essayer de prévenir la violence et d'intervenir précocement auprès des enfants et des adolescents agressés ainsi que des familles à risque. Ces interventions assureront une meilleure qualité de vie à nos enfants et à nos familles, en plus d'avoir des effets visibles sur les générations futures.
Le Sheldon Kennedy Child Advocacy Centre est un organisme à but non lucratif qui travaille en partenariat avec six organisations gouvernementales: le service de police de Calgary, les services à l'enfance et à la famille de la région de Calgary, les services de santé de l'Alberta, Alberta Justice, la GRC et Alberta Education. Il vise à améliorer les services aux enfants et aux familles touchés par la violence faite aux enfants. Nous sommes extrêmement fières de ce nouveau modèle. Le centre est entièrement opérationnel avec tous ses partenaires et ses presque 100 employés sur le terrain depuis le mois d'avril 2013.
Le principal objectif de notre centre est de réduire le plus possible les traumatismes grâce au travail d'équipes multidisciplinaires qui se spécialisent dans le traitement, les enquêtes et l'aide aux enfants et aux familles victimes de violence. Celle-ci comprend toutes les formes de violence sexuelle envers des enfants signalées à la police, comme les cas les plus graves et complexes de violence physique et de négligence signalés à l'une de nos organisations partenaires. C'est véritablement un système d'intégration et de collaboration qui cible les enfants et les familles.
Pendant les 16 premiers mois d'activité du centre, nous avons évalué presque 2 000 nourrissons, enfants et adolescents.
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Pendant nos 16 premiers mois d'activité, les deux tiers des 2 000 enfants et adolescents évalués au centre étaient des filles. Parmi ces 2 000 cas, 7 sur 10 concernaient des abus sexuels et 2 sur 10, de la violence physique ou de la négligence grave. Quatre-vingt-treize pour cent des enfants et des adolescents rencontrés au centre ont été agressés par une personne de confiance comme un parent ou un éducateur.
Le centre a également eu l'occasion de recueillir de l'information sur les répercussions de la violence. Bien que nous ne recueillions de données que depuis avril 2014, celles-ci montrent déjà, en première analyse, qu'un nourrisson, enfant ou adolescent sur trois a des pensées suicidaires, une dépendance à l'alcool ou à la drogue, des problèmes de santé mentale, des comportements agressifs ou sexualisés ou une tendance à l'automutilation. Dans le groupe des jeunes de 12 à 17 ans, la proportion atteint un sur deux. À l'écoute des témoignages de plusieurs spécialistes de la violence envers les femmes, il n'est pas surprenant d'entendre que la prévalence de ce crime et les problèmes qui y sont liés sont renversants.
Les répercussions de la violence faite aux enfants sur le taux de revictimisation et de comportements violents futurs doivent être pris en considération pour trouver des solutions afin de prévenir la violence envers les femmes.
L'une des plus grandes études menées à ce jour, dans le cadre de la recherche sur les expériences négatives vécues pendant l'enfance aux États-Unis, montre que le fait d'avoir été agressé physiquement ou sexuellement ou d'avoir grandi dans un foyer où il y avait de la violence conjugale double le risque de commettre de la violence conjugale ou d'en être victime à l'âge adulte. Chez les enfants victimes de ces trois types d'abus, le risque est trois fois et demie plus élevé pour les femmes et encore plus chez les hommes.
Les enfants victimes de violence ont eux-mêmes des enfants plus tard. Si rien n'est fait pour les guérir de ce traumatisme, ces enfants peuvent subir longtemps les répercussions de la violence de leurs parents, et ce, de bien des façons. Si l'on ne s'attaque pas très tôt à ces problèmes, les recherches nous montrent que ces filles sont quatre fois plus susceptibles de s'automutiler et d'avoir des idées suicidaires, qu'elles sont 30 % moins susceptibles d'obtenir leur diplôme d'études secondaires, qu'elles sont 1,5 fois plus susceptibles de consommer des drogues illicites à l'âge adulte et trois fois plus susceptibles d'avoir une grossesse précoce non planifiée.
Le terme « cycle de la violence » revient souvent, et c'est la réalité de nombreux enfants que nous voyons au centre. Il faut reconnaître que la violence faite aux enfants est un problème de santé publique national. Il faut concerter nos efforts pour prévenir la violence contre les enfants. Quand ils en sont victimes, il faut leur assurer les meilleurs services le plus tôt possible, pour qu'ils puissent vivre une vie saine et productive, sans violence.
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Nous sommes heureuses de saisir cette occasion de faire les recommandations suivantes, qui se fondent sur notre expérience et les réflexions d'autres spécialistes qui luttent activement contre la violence envers les enfants et les femmes.
Recommandation no 1: Que le gouvernement fédéral fasse preuve de leadership à l'échelle internationale en promettant du financement prévisible et stable pour lutter contre la violence faite aux enfants. Ce financement devrait comprendre des fonds accrus pour appuyer l'établissement et le développement des activités des centres d'appui aux enfants partout au Canada. Le modèle du centre d'appui aux enfants est une solution novatrice pour lutter contre la violence faite aux enfants. En reconnaissance que la violence envers les enfants est un problème multisectoriel, ce modèle fait le lien entre l'application de la loi, la protection de l'enfance, la Couronne, l'éducation et les services thérapeutiques et médicaux. La collaboration entre ces secteurs crée un modèle d'affaires particulièrement efficace. En réunissant ces services à une même enseigne, on peut offrir tout l'éventail des services à une famille au même endroit plutôt que de la voir contrainte de naviguer d'un système à l'autre, par elle-même, pendant une période traumatisante.
Recommandation no 2: Que le gouvernement fédéral s'engage à ce que ces centres de recherche comme les Instituts de recherche en santé du Canada ciblent les enjeux liés à la violence faite aux enfants, notamment les incidences socioéconomiques des modèles de prestation des services axés sur la collaboration. Jusqu'à maintenant, la recherche en la matière se limite à la divulgation de statistiques et à des rapports sur les taux de violence. Lorsque les multiples secteurs collaborent, une compréhension plus profonde des enjeux et des répercussions de la violence faite aux enfants et de la violence conjugale émerge.
Recommandation no 3: Que le gouvernement fédéral s'engage à atténuer les répercussions de la violence faite aux enfants grâce à des interventions précoces, notamment en offrant aux enfants et aux familles l'accès à des thérapies intensives reconnues scientifiquement, ce qui comprend l'accès rapide à des services pour les jeunes qui affichent des comportements sexualisés intrusifs ou agressant de nature.
Recommandation no 4: Qu'on favorise les politiques et pratiques interministérielles provinciales qui permettent l'échange de renseignements pertinents et cruciaux. Dans la pratique, l'échange de renseignements entre les équipes multidisciplinaires du centre s'avère fondamental pour offrir des services rapides et adaptés aux familles dans le besoin. En somme, nous faisons en l'espace de quelques heures ou de quelques jours ce qui nous demandait des semaines ou des mois pour répondre adéquatement à ces familles. Ces échanges permettent à chaque membre de l'équipe de prendre des décisions conscientes pour gérer chaque cas dans l'intérêt de l'enfant et de sa famille.
Recommandation no 5: Que des interventions spécialisées et rapides ciblent les femmes enceintes et les parents de nourrissons qui vivent dans des environnements à risque élevé. Les femmes dont les options sont limitées doivent avoir accès à des services de garde sûrs à moindre coût. L'Agence de la santé publique du Canada doit continuer d'accorder la priorité à la santé maternelle et infantile. Notre centre offre également les services d'une équipe de soutien prénatal aux femmes enceintes très vulnérables et les renvoie vers les services prénataux qui répondent à leurs besoins. La première année, nous avons effectué 30 recommandations de ce type. Actuellement, nous avons déjà redirigé ainsi plus de 240 femmes de la région en situation de risque élevé. Ce programme s'avère excellent pour réduire le risque et faire diminuer le nombre de bébés confiés aux services de protection de l'enfance.
Recommandation no 6: Qu'une formation normalisée et spécialisée soit offerte aux professionnels de l'éducation, de la santé, de la justice et des services sociaux pour l'évaluation de la violence, de la revictimisation sexuelle et de la violence conjugale dans le cadre de leurs interventions auprès des enfants et des adolescents, pour que des professionnels comme les enseignants aient les compétences, la formation et les outils requis pour reconnaître les signes de violence contre des enfants, pour comprendre leurs responsabilités et pour réagir avec compassion de manière à les aider vraiment. Il faut aussi que les professionnels de la lutte contre la violence faite aux enfants aient accès à de la formation spécialisée et à du soutien.
Nous commençons à peine à comprendre toutes les ramifications de la violence faite aux enfants et ses liens avec la violence envers les femmes. Nous sommes en train de concevoir des modèles novateurs axés sur la collaboration. Si le gouvernement, les collectivités et les organisations unissent leurs forces, nous pouvons réussir à changer la vie de nos enfants et ultimement à construire de la résilience pour les générations à venir.
Notre société a le devoir moral et éthique de protéger ses enfants et de faire de la lutte à la violence envers les enfants et les femmes une priorité nationale.
Nous vous remercions de votre temps et de votre appui sur ces enjeux très graves.
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Je vous remercie de m'avoir invitée à m'exprimer devant le comité.
Comme on vous l'a dit en introduction, je suis avocate spécialisée en droit du travail et en droits de la personne. J'exerce à Toronto et je suis professeure invitée à la Osgoode Hall Law School. Je travaille depuis 25 ans avec les travailleurs migrants à faible revenu qui arrivent au Canada par les divers les canaux de migration destinés aux travailleurs temporaires: le Programme des travailleurs agricoles saisonniers, le Programme des aides familiaux résidants et le Programme des travailleurs étrangers temporaires.
J'aimerais vous parler aujourd'hui des problèmes structurels qui rendent les femmes migrantes particulièrement vulnérables à la violence sexuelle. J'aimerais surtout aborder deux thèmes, soit la nécessité d'éliminer les barrières structurelles propres aux programmes de migration pour les travailleurs temporaires, qui rendent les femmes vulnérables à la violence sexuelle, puis le genre de pratiques à mettre en place pour créer un milieu sécuritaire.
Les caractéristiques qui rendent les travailleurs migrants vulnérables à la violence et exposent particulièrement les femmes à la violence sexuelle sont les conditions de dépendance, d'isolement, de précarité du statut d'immigration au Canada et l'absence de mécanisme efficace pour leur permettre de se plaindre de leur traitement. Ce sont les quatre éléments que je veux examiner.
J'aimerais également faire le lien avec un exemple de l'usine de transformation de poisson Presteve Foods de Wheatley, en Ontario. Dans cette affaire, 42 travailleuses migrantes mexicaines et thaïlandaises ont porté plainte non seulement pour des infractions en matière d'emploi, mais pour violence sexuelle en milieu de travail. L'employeur a été accusé de 23 chefs d'agression sexuelle et 5 chefs de voies de fait simples. Il a fini par plaider coupable pour voies de fait simples, mais les accusations de violence sexuelle ont dû suivre leur cours sous forme d'une plainte en droits de la personne devant le Tribunal des droits de la personne de l'Ontario. Le plus remarquable dans l'affaire Presteve n'est pas tant la vulnérabilité des femmes et la violence à laquelle elles ont été confrontées, mais le fait qu'elles aient réussi à porter plainte officiellement. Le plus remarquable dans leur situation, c'est qu'elles étaient syndiquées. Elles ont réussi à porter plainte grâce à l'appui de leur syndicat et d'organisations communautaires du Sud de l'Ontario, mais la plupart des femmes n'ont pas tout ce soutien. Comme vous le verrez, même tout ce soutien n'a pas suffi.
La principale caractéristique qui rend les femmes migrantes si vulnérables à la violence sexuelle, c'est la dépendance que créent les contraintes associées à leur permis de travail. Selon les programmes de migration pour les travailleurs temporaires à faible revenu, les travailleurs reçoivent des permis qui les lient exclusivement à l'employeur nommé sur le permis, à l'emploi indiqué sur le permis, à l'endroit inscrit sur le permis et pour la période associée à ce permis temporaire. Cette seule condition crée un énorme déséquilibre des pouvoirs qui rend pratiquement impossible pour les travailleurs de résister aux abus auxquels ils sont exposés.
Pour bon nombre de travailleurs, les programmes de migration temporaire exigent également que le logement soit lié à l'employeur ou qu'il soit dans les faits fourni par l'employeur. Cela crée un autre lien qui les rend encore plus vulnérables.
Le troisième facteur que je tiens à porter à votre attention, c'est que la plupart des travailleurs migrants qui occupent ces emplois peu rémunérés doivent payer des frais de recrutement exorbitants et abusifs pour pouvoir venir ici. J'ai réalisé une étude qui a été publiée en avril dernier et qui montre que les deux tiers des aides familiaux résidants qui viennent au Canada paient des frais de recrutement de 3 500 $ à 5 000 $. Ces frais ne cessent de grimper ensuite: ils passent à 7 000 $, 9 000 $ ou 12 000 $ pour un travailleur qui arrive au Canada.
Dans d'autres secteurs, dans la transformation des aliments, en restauration ou pour d'autres emplois peu rémunérés, les frais de recrutement illégaux sont tout aussi courants. Ces frais lient encore davantage les travailleurs à l'employeur, parce qu'ils ne peuvent pas résister aux traitements injustes et aux abus sexuels en milieu de travail, parce qu'ils doivent rembourser leurs prêts de recrutement.
Dans l'affaire Presteve, quand ces travailleuses du Mexique et de la Thaïlande sont arrivées au Canada, elles étaient liées à cet employeur. Elles avaient payé jusqu'à 10 000 $ en frais de recrutement. À leur arrivée, elles vivaient dans un pavillon-dortoir sur la propriété de l'employeur, si bien qu'elles étaient totalement isolées de la communauté locale et qu'elles étaient abondamment exposées à de la violence et à du harcèlement sexuel au travail.
L'impossibilité de porter plainte à ce sujet est tout à fait réelle, car ces femmes ne peuvent pas démissionner et trouver un autre emploi; elles sont liées à leur employeur. Elles ne peuvent pas partir, car elles doivent rembourser les frais de recrutement. Elles sont isolées en raison de leur langue. Elles souffrent aussi d'un isolement physique. Elles ne peuvent pas avoir accès aux services d'établissement, ce qui est vraiment problématique. Les organisations fédérales offrent ces services uniquement aux travailleurs qui ont le statut de résident permanent, et non à ceux qui sont ici temporairement. Il y a vraiment un manque de protection pour les travailleuses qui veulent se plaindre d'actes de violence sexuelle.
Dans l'exemple que je vous ai donné, les actes de violence ont été commis en 2007 et 2008, et les procédures judiciaires ne sont toujours pas terminées. Le Tribunal des droits de la personne a été saisi de pas moins de 13 motions de procédure. La décision finale quant au bien-fondé des plaintes n'a pas encore été rendue. Les permis de travail des victimes ne sont toutefois valides que pour une période de deux ans. Le processus judiciaire avance à pas de tortue. Bon nombre des travailleuses victimes de mauvais traitements ont déjà dû quitter le pays. Il n'y a aucun processus en place pour protéger les femmes qui décident de se plaindre. Elles n'ont pas accès à un permis de travail ouvert ou à une autre forme de garantie qui leur permettrait de rester au Canada, de trouver un gagne-pain pendant que les procédures judiciaires suivent leur cours, ou d'établir leur admissibilité à la sécurité sociale pour pouvoir rembourser les sommes qu'elles ont dû verser pour venir au Canada.
Il faut absolument que l'on comprenne bien qu'il y a moyen de faire changer les choses. Je ne suis pas la première à formuler de telles recommandations. Il serait notamment important d'éliminer ces permis de travail créant un lien avec l'employeur. Plusieurs ont déjà recommandé l'instauration de permis provinciaux ou sectoriels qui permettraient aux travailleuses de partir ou de changer d'emploi lorsqu'elles subissent des mauvais traitements. Il faudrait appliquer de façon très stricte des dispositions législatives empêchant l'imposition de frais de recrutement abusifs. Elles doivent pouvoir se syndiquer et s'intégrer à des réseaux communautaires. Il faut les informer de leurs droits à leur arrivée au Canada et leur indiquer à qui elles peuvent s'adresser pour obtenir de l'aide, notamment en cas de mauvais traitements. Il faut leur offrir des recours efficaces pour assurer le respect de leurs droits en leur évitant un processus judiciaire qui risque de durer plus longtemps que leur séjour possible au Canada. Et, en fin de compte, il faut surtout qu'il leur soit possible d'accéder au statut de résidente permanente pour ne pas être piégées dans une situation de séjour temporaire où leur présence au Canada et tous les droits dont elles disposent chez nous sont assujettis au maintien d'un lien avec leur employeur.
Les modifications apportées, tant au Programme des travailleurs étrangers temporaires en juin qu'à celui des aides familiaux résidants n'ont atténué en rien la vulnérabilité inhérente à ce statut temporaire et à ces permis créant un lien avec l'employeur.
Je me ferai un plaisir de répondre à toutes vos questions.
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C'est le statut temporaire de ces travailleuses qui est à l'origine de leur manque de sécurité. Les permis de travail qui les lient à leur employeur sont également un facteur important à considérer.
Les modifications qui viennent d'être apportées avec l'imposition de maximums ont pour effet de dénaturer l'entente qui est à la base du programme des aides familiales résidantes. En vertu de cette entente, ces femmes pouvaient obtenir le statut de résidente permanente à l'issue de deux années de travail comme aide familiale. Ce n'est plus le cas. Elles peuvent soumettre une demande, mais rien ne garantit qu'on leur octroiera la résidence permanente. Ces femmes deviennent ainsi encore plus vulnérables. Elles ne savent plus si elles pourront devenir un jour résidentes permanentes ou si elles sont prises au piège dans une suite de situations temporaires.
Pour ce qui est des autres changements apportés, la distinction entre les volets garde d'enfants et soins à des personnes ayant des besoins médicaux élevés est aussi à l'origine d'une vulnérabilité accrue. Auparavant, les femmes pouvaient travailler dans ces deux secteurs pour accumuler les 24 mois d'emploi dont elles avaient besoin. Dorénavant, elles seront limitées à un seul de ces deux volets. Elles ne pourront pas passer de l'un à l'autre pour accumuler des périodes d'emploi.
Il y a des obstacles bien réels et beaucoup d'incertitude quant à la possibilité d'accéder au statut de résidente permanente. Il faudrait offrir à ces travailleuses le droit à un tel statut dès leur arrivée au pays. Il faut notamment se préoccuper du fait que des changements apportés au volet des fournisseurs de soins à des personnes ayant des besoins médicaux élevés confinent à un statut temporaire toute une série d'emplois généralement occupés par des femmes au titre desquels elles pouvaient demander directement le statut de résidente permanente dans le cadre du volet fédéral des emplois hautement spécialisés. Ainsi, les infirmières autorisées, les infirmières psychiatriques autorisées et les infirmières auxiliaires autorisées, qui pouvaient autrefois présenter directement une demande, se retrouvent maintenant coincées dans un statut temporaire qui les oblige à travailler pendant une certaine période à l'issue de laquelle elles peuvent devenir résidentes permanentes, bien que ce ne soit pas garanti.
Plus ces travailleuses se retrouvent dans une situation vulnérable et incertaine, plus elles se voient dans l'obligation d'endurer les traitements qu'on leur fait subir au travail dans l'espoir d'accéder un jour à une certaine sécurité. Plus cette éventualité devient éloignée pour elles, plus leur situation devient périlleuse.
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Nous avons mené un examen de la documentation pour trouver des pratiques prometteuses ou plus appropriées au sein des populations et des collectivités autochtones avec l'objectif général de travailler auprès des hommes pour réduire la violence. Nous avons cerné environ 10 pratiques qui, à notre avis, sont prometteuses. L'une d'entre elles était le programme I Am A Kind Man exécuté par l'Ontario friendship centre association.
Nous travaillons toujours avec un comité consultatif qui représente la région. Nous travaillons avec deux groupes d'hommes inuits en particulier: l'un au Nunavik, dans le Nord du Québec et l'autre au Nunavut. Il n'y a pas beaucoup de groupes d'hommes inuits organisés. Nous avons discuté avec les membres de notre comité consultatif de certains des éléments de chaque programme qui, à leur avis, fonctionneraient, et des éléments qui devraient être modifiés et adaptés aux Inuits, et nous avons ensuite commencé l'ébauche de documents qui portent sur le traitement des sévices subis dans le passé. Les hommes ont un grand besoin de guérison. Comme je l'ai mentionné plus tôt, les hommes ont également été victimes de violence et de mauvais traitements lorsqu'ils étaient enfants. Nous ne commencerons pas à parler des pensionnats, etc., mais nous le savons. Nous rédigeons des ébauches. Par exemple, si un groupe d'hommes d'une collectivité souhaite exécuter un programme pendant six semaines, quels pourraient être les modules de ce programme? Comment pourrions-nous les répartir?
Un grand nombre de personnes considèrent que les activités menées sur les terres sont très efficaces, car les participants peuvent quitter le village, aller à la chasse et revenir à des pratiques plus traditionnelles qui se perdent en quelque sorte dans l'économie fondée sur les salaires et les virages culturels très rapides. Ce sont les éléments que nous avons tenté de développer en nous fondant sur nos autres travaux.
Nous soumettons constamment nos conclusions à notre comité consultatif et aux groupes d'hommes et, comme je l'ai dit, ma collègue est à Rankin Inlet aujourd'hui pour préparer ce qui, nous l'espérons, sera la version finale, afin qu'il y ait des outils, des ressources, des exercices et des techniques pour travailler avec les hommes, surtout en vue de leur propre guérison, mais avec l'objectif principal de réduire la violence.
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Je ne suis pas au courant de la présence d'un psychiatre dans le Nord. Je crois que les services offerts au Nunavik le sont par l'entremise de télésanté — c'est-à-dire de manière virtuelle. Ce serait donc un service.
Je dirais que la deuxième recommandation générale est liée à la nécessité d'effectuer des investissements pour résoudre la crise immédiate. Il y a 53 collectivités inuites dans l'Inuit Nunangat, comme on l'appelle. Environ 70 % de ces collectivités n'ont pas de refuge sécuritaire pour les femmes et les enfants qui tentent d'échapper à la violence. Je sais personnellement et par expérience que cette situation a directement entraîné la mort de femmes et d'enfants. Plus de 70 % de ces collectivités n'ont pas de refuge sécuritaire. Il n'y a aucune aide, mais il faut améliorer l'accès aux services qui aident les femmes à quitter leur foyer et leur collectivité, car il faut le faire par avion.
J'ai entendu une histoire il n'y a pas si longtemps, lorsque Helena Guergis était ministre responsable de la Condition féminine. Elle a participé à notre réunion annuelle. Une femme avait pratiquement supplié un travailleur social de l'Ouest du Nunavut de lui trouver une place dans un avion pour qu'elle puisse échapper à la violence dans sa collectivité. Sa demande a été refusée, et elle a été assassinée.
Je le sais donc par expérience. Je ne sais pas comment classer des priorités aussi urgentes, mais ce serait la deuxième priorité, c'est-à-dire un meilleur accès à la sécurité pour les femmes et les enfants.
Je dirais que la troisième priorité est liée à des efforts soutenus, et non à un projet annuel fondé sur des critères prédéterminés et qui répond ou ne répond peut-être pas aux besoins et aux priorités des Inuits. Il faut que ces efforts soient soutenu. Et à mon avis, il faut qu'il s'agisse d'une réponse qui vient de l'ensemble du gouvernement, donc joignons tous nos efforts avec les organismes de femmes inuites régionaux. Nous devons être en mesure de collaborer. Ils n'ont pratiquement aucune capacité. Je crois que tous les intervenants inuits, le gouvernement fédéral, les provinces et les territoires — nous avons une table ronde en février avec les provinces et les territoires — doivent se rassembler, cerner les priorités inuites et le rôle que chaque entité doit jouer et déterminer la façon dont nous pouvons réaliser ces initiatives de façon durable et appropriée.
Merci.
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Les résultats des recherches effectuées au Canada et partout dans le monde et les organismes de défense des droits des travailleurs du sexe de partout au Canada expriment certainement des préoccupations considérables sur la façon dont le projet de loi forcera probablement les travailleurs du sexe à la clandestinité.
J'ai parlé de la façon dont un seul petit facteur, c'est-à-dire le nombre restreint de policiers qui ont des comportements contraires à l'éthique dans chaque région, peut nuire à la capacité de mettre en oeuvre un tel projet de loi, car ces policiers nuisent eux-mêmes à la relation entre les travailleurs du sexe et la police.
La confusion liée aux restrictions visant les travailleurs du sexe est énorme, et je pense donc que nous avons créé une situation très complexe pour les gens qui font ce type de travail pour subvenir à leurs besoins.
Lorsque nous examinons un pays comme la Nouvelle-Zélande, nous constatons certainement que lorsqu'on consulte les femmes marginalisées touchées par une certaine loi, la loi créée a ensuite tendance à faire diminuer la violence commise contre ce groupe. En Nouvelle-Zélande, nous avons constaté, sur plus de 10 ans, comment ce type de consultation avec les groupes pair-à-pair, ainsi qu'avec les entreprises et le gouvernement, avait réduit la violence de façon exponentielle là-bas et avait augmenté le signalement d'activités telles l'exploitation, la traite de personnes, l'exploitation des jeunes, etc.
Ici, avec la loi en vigueur, les gens hésiteront davantage à s'adresser à la police, ce qui signifie que lorsque les travailleurs du sexe sont témoins d'activités liées à la traite de personnes ou à l'exploitation des jeunes, s'ils hésitaient déjà à s'adresser à la police dans le cadre de l'ancienne loi, ils hésiteront davantage maintenant, car ils ne sauront pas à quelles répercussions s'attendre. Je crois donc qu'il s'agit certainement d'une préoccupation.
Je sais que l'intention était bonne.
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Je vous remercie, madame la présidente.
Mesdames, je vous remercie de vos témoignages de ce matin.
Je vais commencer par faire une remarque par rapport à vos réponses.
Comme il a été dit, rien n'est encore fait et rien n'arrive à freiner la violence faite aux femmes. J'ai su que vous n'aviez pas été consultées au sujet du plan national contre la violence faite aux femmes.
Contrairement à mes collègues de l'autre côté, je pense que, quel que soit le nombre de femmes, par exemple au Nunavut, la somme allouée devrait être la même. Cela devrait plutôt être une question de qualité.
Vous avez dit qu'au Nunavut — au Canada —, les femmes et les enfants sont en danger, et cela me fait peur. Il faudrait investir davantage pour pouvoir intervenir dans les cas urgents, afin de protéger la sécurité de ces femmes et de ces enfants, plutôt que d'investir uniquement en fonction de la population.
Il y a un autre problème. La cour a reconnu que les travailleuses du sexe sont les femmes les plus vulnérables. Or jusqu'à présent, rien n'a été fait pour les protéger de façon correcte.
Comment expliquez-vous que rien n'ait été fait pour protéger de la violence les travailleuses du sexe ainsi que les femmes et les enfants du Nunavut?
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La situation dans le Nord est très compliquée, notamment en raison du système de cours itinérantes, qui peut entraîner de longs délais.
Chose certaine, nous tenons des discussions à l'échelle nationale sur les nombreuses raisons qui pourraient empêcher les femmes de dénoncer leur agresseur. Prenons l'exemple d'une femme qui vit à Clyde River et qui est victime de violence. Tous ses proches habitent dans des maisons surpeuplées, ce qui l'oblige à rester chez elle et à se taire. Et d'après d'autres études qui ont été réalisées dans le Sud, une femme peut être agressée jusqu'à 35 fois avant de porter plainte à la police.
On n'a pas le soutien nécessaire. Je me souviens d'avoir comparu avec Sheldon Kennedy il y a quelques semaines et d'avoir dit au comité que nous ne pouvions que rêver de cette coordination de services. Ces enfants ont déjà été agressés. On ne fait pas de la prévention; on fait de l'intervention. Il y a tellement de choses.
Beaucoup de gens vivent dans un logement social et ont signé un bail. C'est souvent ce que nous ont dit les femmes, qui n'ont parfois pas le choix de partir parce qu'elles sont locataires. L'accession à la propriété est le fait d'une minorité. La plupart d'entre elles louent un logement, alors il pourrait y avoir des dispositions dans le bail qui font en sorte que l'agresseur peut rester chez lui.
Nous devons ensuite tenir compte de toutes les questions de pouvoir et de contrôle et du manque d'options. Vous posez une question très vaste. J'aimerais également souligner l'incidence du système de cours itinérantes et du manque d'accès des victimes aux services de soutien dont j'ai parlé plus tôt. Toutefois, selon ce que les femmes nous ont dit, elles préféreraient rester chez elles avec leurs enfants.
Les prisons du Nord débordent. Le centre correctionnel de Baffin a été vivement critiqué par l'enquêteur correctionnel, entre autres, et il ne semble pas y avoir d'autre endroit où on peut envoyer ces agresseurs.
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Aucun des changements qui a été mis en oeuvre en juin ne concernait les structures, dont j'ai parlé plus tôt, qui rendent les travailleurs plus vulnérables à l'exploitation et à la violence. Je considère que le retrait des permis de travail qui rattachent les travailleurs à un employeur donné est absolument essentiel.
Parmi les dangers qui découlent de ces changements, mentionnons la durée plus courte des permis de travail. Les travailleurs ont désormais un permis de travail d'un an, et non plus de deux ans, ce qui leur met encore plus de pression pour ce qui est de se conformer aux demandes de leur employeur et ce qui les rend encore plus vulnérables. Ils peuvent se faire remplacer plus facilement. Ils n'ont aucune garantie qu'ils pourront rester au Canada assez longtemps pour rembourser leurs frais de recrutement, prendre connaissance de leurs droits ici au Canada et s'en prévaloir.
Nous observons un taux de roulement encore plus élevé; par conséquent, les travailleurs n'ont même pas le temps de faire valoir leurs droits. Ces changements ne visaient aucunement à éliminer les éléments qui ont une incidence sur la vulnérabilité des travailleurs.
De plus, ces changements contribuent à présenter ces travailleurs étrangers comme étant une menace ou un problème. Lorsqu'il est question d'accorder la priorité aux Canadiens, on crée des dissensions entre les Canadiens et les travailleurs étrangers qui vivent et travaillent ici depuis longtemps.
Il faut remédier à cette situation et reconnaître que ces travailleurs accomplissent un travail dont dépend l'économie de notre pays. Ce sont des membres de nos collectivités. Il faut en être conscient et leur permettre de régulariser leur statut comme membres permanents de nos collectivités. Ils devraient pouvoir amener leur famille avec eux. Le fait d'être isolés de leur famille les rend encore plus vulnérables. Cela ne fait qu'accroître la marginalisation et faire en sorte qu'il est plus facile pour l'employeur de contrôler chaque aspect de leur vie.
Voilà donc des enjeux importants auxquels il faut s'attaquer; la question du recrutement n'a pas été abordée du tout.
Je tiens à remercier tout le monde d'être avec nous aujourd'hui. Il est formidable d'être témoin de votre passion et d'entendre vos excellentes idées. Je pense que nous avons une belle occasion de nous réunir, de consolider certaines grandes idées, et d'obtenir vos commentaires quant aux choses qui fonctionnent, mais aussi qui ne fonctionnent pas, et sur la façon d'apporter certaines solutions.
J'aimerais aussi mentionner rapidement que les travailleurs étrangers temporaires constituent un problème de taille en Alberta. Il existe toutefois bien des solutions, comme l'Entrée express à compter du 1er janvier, l'autorisation d'emploi ouverte, et le fait que nous avons quadruplé le personnel faisant enquête sur les rapports de mauvais traitements. J'aimerais que Mme Faraday nous tienne au courant pour que nous sachions dans quelle mesure ces programmes fonctionnent.
Je m'adresse à Bonnie et à Jenny, qui sont à Calgary: je suis heureux de vous revoir toutes les deux. J'ai eu la chance de visiter le centre à deux ou trois occasions au fil des ans.
Bonnie, vous avez brièvement dit que le centre arrive à faire en quelques jours et même quelques heures ce qui aurait auparavant nécessité des semaines et des mois. Je vous invite à nous en parler un peu plus. Je pense que ce qui doit être clair, c'est que vous réunissez tous les services sous un même toit. Il s'agit donc d'un centre multiservices, pour ainsi dire. Voilà qui semble changer complètement la donne.
Tout d'abord, pouvez-vous nous dire ce qui a changé en réunissant tous ces groupes? En deuxième lieu, vous avez parlé de l'équipe d'aide prénatale, mais je n'avais jamais entendu parler de ce programme. Pourriez-vous nous en dire un peu plus là-dessus, en nous expliquant son fonctionnement et ce qu'il comprend?
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Je vous remercie de cette question; c'est un sujet auquel nous avons beaucoup songé. Le manque de ressources et l'absence de société civile, pour ainsi dire, constituent tout un problème au sein des collectivités inuites. Iqaluit est probablement la plus grande d'entre elles, et c'est la seule ville. Encore une fois, les Inuits ne vivent vraiment en collectivités et en colonies que depuis deux générations, ce qui représente un changement culturel à la vitesse de l'éclair. Dans certaines régions, 70 % des enfants inuits ne terminent toujours pas leurs études secondaires. Les difficultés sont nombreuses, comme le chômage, la pauvreté et les logements surpeuplés.
Je ne veux pas exagérer, mais lorsqu'on essaie simplement de passer les jours et de survivre, en nourrissant peut-être ses enfants ou non, il peut être très difficile de réunir les ressources, le temps, les connaissances et les compétences nécessaires à la création d'une telle société civile. Il n'y a aucun groupe de femmes ou autres comme ceux que nous tenons pour acquis dans le sud.
Nous travaillons auprès de deux organisations régionales de femmes inuites; chacune a sa capacité respective. Nous aimerions consulter officiellement ces femmes afin de connaître les priorités propres à leur région.
Il existe un certain nombre d'organisations. Le Qulliit Nunavut Status of Women Council a un rôle à jouer, et nous avons un conseil d'administration. En préparation à la table ronde de février réunissant les provinces et les territoires, nous espérons être là, mais nous devrons bien franchement vendre des pâtisseries pour y arriver. Encore ici, je ne veux pas exagérer.
Puisque nous n'avons pas la moindre ressource pour recueillir les points de vue en matière de priorités, nous avons créé une nouvelle adresse courriel, et j'espère que les femmes nous feront parvenir leurs priorités. Pour que les résultats soient équitables, il doit y avoir des ressources permettant une participation équitable, comme il a été dit plus tôt — non pas un montant par habitant, mais bien des ressources équitables. À l'aide d'une approche préconisant une égalité réelle, que faut-il pour atteindre un résultat équitable, quel qu'il soit?