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JUST Réunion de comité

Les Avis de convocation contiennent des renseignements sur le sujet, la date, l’heure et l’endroit de la réunion, ainsi qu’une liste des témoins qui doivent comparaître devant le comité. Les Témoignages sont le compte rendu transcrit, révisé et corrigé de tout ce qui a été dit pendant la séance. Les Procès-verbaux sont le compte rendu officiel des séances.

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STANDING COMMITTEE ON JUSTICE AND HUMAN RIGHTS

COMITÉ PERMANENT DE LA JUSTICE ET DES DROITS DE LA PERSONNE

TÉMOIGNAGES

[Enregistrement électronique]

Le jeudi 29 novembre 2001

• 0939

[Traduction]

Le président (M. Andy Scott (Fredericton, Lib.)): Je déclare ouverte la 52e séance du Comité permanent de la justice et des droits de la personne. Aujourd'hui, nous allons étudier le projet de loi C-15B, Loi modifiant le Code criminel (cruauté envers les animaux et armes à feu) et la Loi sur les armes à feu.

• 0940

Alors que nous mettons un terme à l'examen de cette mesure, nous accueillons Mme Anne McLellan, ministre de la Justice et procureure générale du Canada, ainsi que des hauts fonctionnaires de son ministère, qu'elle nous présentera. Je m'excuse au sujet du problème de local; c'est la raison pour laquelle nous commençons un peu en retard.

Je vais tout de suite donner la parole à la ministre.

[Français]

L'hon. Anne McLellan (ministre de la Justice et procureur général du Canada, Lib.): Merci, monsieur le président.

Bonjour, distingués membres du comité. Je suis très heureuse d'avoir l'occasion de vous parler aujourd'hui des dispositions du projet de loi C-15B, Loi modifiant le Code criminel (cruauté envers les animaux et armes à feu) et la Loi sur les armes à feu.

Avant d'aborder les questions de fond, j'aimerais remercier les membres du comité pour tout le travail effectué dans le cadre de l'étude du projet de loi C-15B. Je vous suis reconnaissante des efforts que vous avez déployés pour favoriser la discussion et une meilleure compréhension de ce texte législatif.

[Traduction]

En ce qui concerne le contenu du projet de loi, j'aimerais d'abord m'attacher à l'objet et à l'effet de la disposition relative à la cruauté envers les animaux.

Monsieur le président, les Canadiens ont exprimé haut et fort leur opinion à ce sujet, et ce, de façon constante. Après avoir consulté la population en 1998 sur les dispositions actuelles du Code criminel relatives à la cruauté envers les animaux et après avoir reçu des pétitions comptant plus de 10 000 signatures ainsi que des centaines de lettres par semaine, il est absolument évident pour moi que la grande majorité des Canadiens souhaitent que notre législation à cet égard soit modernisée et renforcée. Qu'il me suffise de dire, monsieur le président, qu'en moyenne, il n'y a aucun dossier qui m'a valu plus de correspondance en faveur de la modernisation et du resserrement des dispositions de ces parties du code. En fait, le volume de courrier réclamant la révision et le renforcement de ces dispositions est tout à fait stupéfiant. J'ai reçu, certaines semaines, plus de 300 lettres et cartes de gens réclamant que l'on modifie nos lois pour les moderniser et les amener, à tout le moins, au niveau des lois en vigueur dans des pays avec lesquels le Canada se compare habituellement, soit l'Australie, la Nouvelle-Zélande et de nombreux États des États-Unis d'Amérique.

Je constate aussi que les gouvernements de l'Ontario et de la Nouvelle-Écosse ont tous les deux souscrit aux propos des Canadiens et des Canadiennes qui réclament que l'on apporte des modifications aux dispositions relatives à la cruauté envers les animaux. En fait, en septembre dernier, le solliciteur général de l'Ontario, David Turnbull, a exigé publiquement que j'agisse sans tarder pour moderniser et renforcer ces dispositions. Il avait été confronté à certains incidents profondément troublants de cruauté envers les animaux dans la province de l'Ontario et à son avis, la législation, dans sa forme actuelle, ne reflète pas les valeurs de la grande majorité des Ontariens et des Canadiens.

Dans mon allocution d'aujourd'hui, j'entends préciser l'intention des dispositions sur la cruauté envers les animaux du projet de loi C-15B et évoquer également ce que les amendements ne couvrent pas.

En créant une partie distincte du Code criminel sur la cruauté envers les animaux, le projet de loi C-15B précise que si l'on peut se servir des animaux à diverses fins pour satisfaire les besoins des êtres humains, les animaux doivent toutefois être bien traités et ne pas être sujets à des souffrances inutiles. Je crois savoir qu'aucun témoin ne s'est présenté pour demander que cette politique soit modifiée. Telle a été l'intention de la loi depuis 1953. Je serai claire: la cruauté envers les animaux est le fait d'infliger volontairement ou par négligence des douleurs, des souffrances ou des blessures à un animal alors que cela n'est pas nécessaire pour favoriser l'atteinte d'un objectif légitime. Cette notion de cruauté envers les animaux existe depuis plus de 50 ans, et elle a été maintenue dans le projet de loi C-15B.

• 0945

Historiquement, la société reconnaît la gravité d'une conduite en particulier par le biais de la pénalité prescrite pour la conduite en question. Le projet de loi C-15B augmentera sensiblement la pénalité applicable à des actes de cruauté intentionnels en créant une infraction hybride—ce qui s'inscrit dans nos travaux de réforme du droit pénal—et en portant la pénalité maximale pour une déclaration sommaire de culpabilité et pour une déclaration de culpabilité par voie de mise en accusation à 18 et cinq ans respectivement. Nous proposons à l'attention du comité un amendement qui permettrait l'imposition d'une amende pouvant aller jusqu'à 5 000 $ pour les cas de poursuites sommaires aux termes du paragraphe 182.3 et jusqu'à 10 000 $ aux termes du paragraphe 182.2. Cette souplesse permet à la Couronne d'ajuster la pénalité aux circonstances d'un cas spécifique. On transmet ainsi au juge, au procureur et au grand public le message que les infractions en matière de cruauté envers les animaux sont des cas sérieux de violence et devraient être traités avec la sévérité qui convient. Je crois savoir, monsieur le président, que les témoins que votre comité a entendus appuient des pénalités plus sévères.

Dans le cadre de votre étude du projet de loi C-15B, d'aucuns ont peut-être fait valoir qu'il n'est pas nécessaire de modifier les dispositions actuelles du code, sinon pour relever les pénalités. Cet argument fait fi des anachronismes et de la complexité inutile de la loi actuelle. D'après certaines dispositions actuelles du Code criminel relativement à la cruauté envers les animaux, le statut de propriété d'un animal détermine si des poursuites peuvent être engagées ou non, même si la politique fondamentale sous-jacente aux dispositions relatives à la cruauté envers les animaux vise à protéger tous les animaux de la cruauté intentionnelle et de la négligence criminelle.

Permettez-moi de vous citer plusieurs exemples qui montrent comment le projet de loi C-15B contribue à simplifier la législation actuelle. L'alinéa 446(1)a) du Code criminel semble s'appliquer uniquement au fait d'infliger délibérément une douleur, souffrance ou blessure, sans nécessité. Cependant, il convient de lire cette disposition en conjonction avec le paragraphe 429(1) qui stipule que le caractère délibéré englobe la négligence. En outre, c'est uniquement à la lecture du paragraphe 446(3) qu'il est clair que l'alinéa 446(1)a) crée deux infractions. C'est un bel exemple de complexité. Par conséquent, chers collègues, il faut comprendre qu'en réunissant ces dispositions, on crée deux infractions, l'une concernant la cruauté intentionnelle et l'autre concernant le fait d'infliger une douleur, souffrance ou blessure par suite de négligence volontaire.

Le projet de loi C-15B évacue ces éléments complexes et ces anachronismes et établit clairement deux principales catégories d'infractions, les actes de cruauté intentionnels et les actes causant douleurs, souffrances ou blessures à des animaux par suite de négligence criminelle. Voilà les deux infractions qui sont clairement établies. Cela signifie qu'une personne qui aime les animaux, mais qui en a trop et qui n'est pas capable de les nourrir convenablement et de les garder en santé commet une infraction différente de celle qui inflige intentionnellement des souffrances à un animal—et nous sommes tous au courant de trop nombreux exemples scandaleux des deux cas. Pour que tout soit absolument clair, nous entendons saisir le comité d'une motion qui ajouterait à la phrase «omet de lui fournir les aliments» l'expression «par négligence» à l'alinéa proposé 182.3(1)b).

Un autre objectif du projet de loi C-15B est de combler une lacune dans la loi. À l'heure actuelle, une personne qui tue en toute légalité un animal, mais qui le fait sauvagement ou cruellement, ne peut être inculpée de cruauté envers les animaux à moins d'infliger également à l'animal une douleur, souffrance ou blessure, sans nécessité. En fait, ce sont des magistrats de ma propre province, l'Alberta, qui ont signalé cette lacune dans la loi et qui ont fait état de leur incapacité, en raison de cette échappatoire, de condamner dans certaines circonstances une personne dont il est acquis que la conduite est réprouvée par la société.

Le projet de loi C-15B crée une nouvelle infraction à l'égard du fait de tuer intentionnellement un animal sauvagement ou cruellement, peu importe que l'animal endure des souffrances. Par exemple, une telle conduite engloberait le fait d'attacher un animal à une voie ferrée, de fixer un dispositif explosif sur le corps d'un animal ou encore de mettre un animal dans un four micro-ondes, autant d'exemples d'incidents qui se sont déjà produits. D'ailleurs, ce matin les journaux relatent un autre exemple horrible de cruauté dans notre pays. J'espère que tous les députés condamneront d'une même voix ce genre de conduite et feront en sorte que le Canada dispose d'une législation lui permettant de condamner ceux qui se rendent coupables d'actes aussi moralement répréhensibles.

• 0950

Voilà qui m'amène à discuter de ce que ne couvrent pas les changements proposés dans le projet de loi C-15B. Je sais que certains témoins ont fait valoir que le retrait des infractions concernant la cruauté envers les animaux des dispositions du code relatives à certains biens aura l'effet non intentionnel de supprimer la protection présentement accordée aux chasseurs, aux agriculteurs, aux chercheurs et aux trappeurs. Je tiens à rassurer les membres du comité en leur disant que ce n'est tout simplement pas le cas. Je suppose que nous pourrons discuter de cela plus en détails au cours de la période des questions et réponses, mais je tiens à préciser que contrairement à ce que certains témoins vous ont dit, le paragraphe 429(2) du code n'a pas pour effet d'exempter les pratiques de l'industrie de l'application des dispositions relatives à la cruauté envers les animaux. La loi n'a jamais prévu ce genre de choses. Cette position se fonde sur l'hypothèse erronée que si les défenses énoncées au paragraphe 429(2) n'existaient pas, l'industrie serait coupable d'infractions relatives à la cruauté envers les animaux. Je pense qu'il est important d'apaiser ces craintes en examinant soigneusement ce qu'il convient de prouver avant d'affirmer qu'une infraction de cruauté envers les animaux a été commise.

L'ensemble du droit coutumier, de la common law et des lois territoriales, provinciales et fédérales existantes régissant l'utilisation des animaux dans différents contextes établit que l'utilisation d'animaux dans le domaine de la recherche et dans le secteur industriel est sans conteste légale dans notre pays et continuera de l'être. Par exemple, une infraction de cruauté intentionnelle ne peut même pas être alléguée à moins que le procureur puisse prouver, sans l'ombre d'un doute raisonnable, que la méthode utilisée pour réaliser un objectif légitime a causé une douleur qu'il était possible d'éviter, après avoir tenu compte de méthodes de rechange accessibles et économiques.

La question des défenses se pose uniquement lorsque l'infraction a été prouvée. À ma connaissance, les défenses énoncées au paragraphe 429(2) n'ont jamais été invoquées avec succès pour excuser l'imposition de douleurs et de souffrances inutiles. En fait, sur le plan pratique, ces défenses se limiteraient à des circonstances exceptionnelles. Elles pourraient englober la contrainte ou la nécessité, deux défenses qui sont prévues dans la common law et qui sont maintenues au paragraphe 8(3) du Code criminel.

On peut invoquer l'apparence de droit uniquement si l'accusé croyait sincèrement, par exemple, que sa conduite causait le moins de souffrance alors qu'en fait, il n'en était rien. L'apparence de droit est un type particulier d'erreur de fait. Les défenses d'erreurs de fait sont conservées au paragraphe 8(3) du Code criminel. Cette perspective a été renforcée, je crois, par le témoignage de Mme Heather Perkins-McVey, qui a comparu au nom de «Criminal Lawyers Association». En effet, elle a déclaré que de l'avis des membres du Barreau, il était opportun de retirer les dispositions concernant la cruauté envers les animaux de la partie IX du Code criminel et que les personnes inculpées d'infraction ne perdraient aucune défense à la suite de cette mesure.

En dernière analyse, nous avons examiné ces dispositions avec beaucoup de soin et je peux donner aux membres du comité l'assurance que les dispositions concernant la cruauté envers les animaux n'ont pas visé dans le passé les personnes engagées dans des pratiques industrielles reconnues et dépourvues de cruauté, et ne les viseront pas davantage à l'avenir. En fait, nous avons l'intention de soumettre à l'étude du comité un amendement qui confirmerait que les défenses actuellement disponibles aux termes du paragraphe 8(3) du Code criminel continueront de s'appliquer.

Certains membres du comité se sont inquiétés de ce que la définition d'animal dans le projet de loi C-15B étend la protection pour englober des animaux qui, à l'heure actuelle, ne sont pas visés par la disposition relative à la cruauté envers les animaux. Comme vous le savez sans doute, il n'y a pas de définition dans le régime actuel et il s'ensuit que l'on peut utiliser la définition très large du dictionnaire. Le projet de loi C-15B propose d'imposer à la Couronne le fardeau de la preuve. Celle-ci devra établir scientifiquement, ce qui restreint la portée de la mesure actuelle, sans l'ombre d'un doute raisonnable, que lorsqu'un invertébré est en cause, il doit avoir la capacité de ressentir la douleur. Pareille exigence n'existe pas dans la loi actuelle.

• 0955

Cette définition est tout à fait conforme à la politique sous-jacente à la législation ainsi qu'à l'approche scientifique objective visant à définir les créatures visées par le nouveau régime. Je rappelle aux membres du comité, comme l'a fait le Dr Clément Gauthier, directeur exécutif du Conseil canadien de protection des animaux, que la définition actuelle d'animal dans le projet de loi C-15B est la définition qu'utilise le Conseil canadien de protection des animaux dans ses opérations. Je vous signale, chers collègues, qu'il existe une vaste gamme de définitions utilisées dans notre pays et de par le monde. D'ailleurs, dans ma propre province, les lois de nature réglementaire utilisent une définition très large d'animal. À l'instar de nombreux pays et provinces, nous avons décidé d'inclure une définition d'animal aux fins de la loi, ce qui permet de la préciser et de conférer plus de certitude au sujet de ces dispositions.

Pour conclure mes observations au sujet de l'amendement concernant la cruauté envers les animaux, je tiens à souligner que l'on répond à un intérêt supérieur de la société en traitant les infractions envers les animaux plus sérieusement. Comme Mme Perkins-McVey l'a mentionné dans son témoignage, une preuve scientifique croissante montre qu'il existe une corrélation entre la cruauté envers les animaux et la violence subséquente envers les humains. Des questionnaires remis aux femmes battues dans les refuges ont fait ressortir qu'environ 75 p. 100 d'entre elles avaient dans leur foyer des animaux domestiques et que leurs agresseurs en avaient tué un ou plusieurs.

Les mauvais traitements infligés aux animaux peuvent également avoir une incidence psychologique dévastatrice sur les enfants qui sont forcés d'être témoins de brutalités envers des animaux qu'ils aiment. À Calgary, récemment, j'ai eu l'occasion de rencontrer une famille qui avait perdu certains de ses chevaux à la suite d'actes de cruautés scandaleux. Il a fallu beaucoup de courage aux deux enfants de la famille pour accompagner leur mère à la manifestation à laquelle j'assistais, et ils ont exprimé très fermement leur appui à la mesure. Même s'ils vivent sur une ferme et qu'ils comprennent très bien la nature de l'industrie agricole, ils sont aussi très sensibles à l'effet psychologique dévastateur que peut avoir la perte d'animaux sur une famille dont les animaux ont été victimes d'actes horribles. Les magistrats, les professionnels de la santé et les agents d'exécution de la loi ont reconnu que les mauvais traitements infligés aux animaux représentent un aspect du problème plus vaste de la violence dans notre société et s'y sont par conséquent attaqués. Le projet de loi C-15 nous donne à tous l'occasion de faire de même.

J'aimerais maintenant parler des amendements de nature administrative qui sont proposés en vue de revitaliser le Programme canadien de contrôle des armes à feu. Ce programme concrétise une démarche pratique en matière de sécurité relative aux armes à feu. Les exigences d'obtention de permis et d'enregistrement contribuent à priver d'accès aux armes à feu les personnes qui ne devraient pas en posséder, tout en encourageant une utilisation responsable et sécuritaire des armes.

Je suis heureuse de vous dire que la phase de demande de permis du programme a été un succès, avec un taux fort élevé d'observance d'environ 91 p. 100. Les propriétaires d'armes à feu admissibles, qui en ont fait la demande dans les délais prescrits, devraient maintenant être en possession de leur permis de possession d'arme à feu. Les demandes nécessitant un suivi soit parce que les questionnaires étaient incomplets soit parce qu'elles exigeaient un examen plus attentif pour des motifs de sécurité publique, continuent d'être traitées le plus rapidement possible, dans le respect de nos objectifs de sécurité.

Cet investissement national dans la sécurité publique est un succès. Un meilleur tri des demandeurs de permis d'armes à feu et une vérification continue de leur admissibilité contribuent à la sécurité dans les domiciles et les collectivités en refusant l'accès aux armes aux individus qui présentent une menace pour eux-mêmes ou pour autrui. Depuis le 1er décembre 1998, plus de 4 000 permis ont été refusés ou révoqués par les autorités responsables de la sécurité publique. Le nombre des révocations est 32 fois plus élevé que le total pour les cinq années précédentes dans le cadre de l'ancien programme.

Les Canadiens comprennent les avantages que cela présente pour la sécurité publique et continuent d'appuyer sans réserve le programme des armes à feu. Dans une enquête nationale menée en avril 2001 auprès de 2 035 Canadiens par Environics Research Group, 77 p. 100 des gens appuient les principes sur lesquels se fonde le programme de contrôle des armes à feu du Canada. Ce nombre englobe une majorité nette dans toutes les régions et provinces du Canada ainsi qu'une majorité évidente de partisans de tous les partis politiques représentés à la Chambre des communes. En outre, cette enquête a fait ressortir que les deux tiers des Canadiens vivant dans des collectivités de 5 000 habitants ou moins souscrivent à ces principes. Ces constatations correspondent aux résultats d'un sondage Gallup publié plus tôt cette semaine, qui rapporte le taux le plus élevé d'approbation pour le registre depuis 1995—une question spécifique a été posée par les enquêteurs Gallup à ce sujet—et que 76 p. 100 des Canadiens appuient l'enregistrement obligatoire de toutes les armes à feu. Dans la province de Québec, 90 p. 100 des répondants sont en faveur de telles mesures et 80 p. 100 en Ontario.

• 1000

Comme les membres du comité le savent, les services de police, dont l'Association canadienne des policiers et l'Association canadienne des chefs de police, demeurent d'ardents partisans de ce programme qui leur offre des outils essentiels pour lutter contre la criminalité.

Maintenant que la phase de l'octroi de permis est derrière nous, nous pouvons passer à la phase suivante de cet important programme de sécurité publique, l'enregistrement des armes à feu d'ici le 1er janvier 2003. Dans chaque région, les propriétaires d'armes à feu titulaires de permis reçoivent une formule d'enregistrement personnalisée par courrier qui leur demande d'enregistrer leurs armes à feu gratuitement dans certains délais. Une nouveauté a été ajoutée, soit la possibilité d'enregistrer son arme à feu en ligne. À ce jour, la réaction à ces initiatives a été encourageante. Nous avons tiré des leçons de l'expérience de la phase des permis et nous avons été à l'écoute des préoccupations des propriétaires d'armes à feu et d'autres Canadiens quant à l'efficience du programme et au service à la clientèle. Nous y répondons en y apportant des changements administratifs qui faciliteront l'observance des règles du programme et permettront de continuer d'assurer un service de haute qualité à la clientèle.

Permettez-moi de vous dire que nous avons créé un groupe d'utilisateurs qui a comparu devant le comité. Il s'agit d'un groupe de personnes représentant tous les éléments de la communauté des utilisateurs d'armes à feu, qui nous a énormément aidés à rédiger l'ensemble des propositions de modification dont vous êtes saisi. Si M. Torino comparaissait ici, il vous dirait que ces modifications représentent concrètement les souhaits des propriétaires d'armes à feu. Certains demeurent opposés au programme, mais cela mis à part, ces propositions concrétisent tous les voeux des propriétaires d'armes à feu sans pour autant compromettre les objectifs de la sécurité publique. Ce sont là des initiatives qui rendront le programme plus convivial et qui aideront les propriétaires d'armes à feu légitimes à respecter la loi. Je tiens à remercier en public ce groupe d'utilisateurs pour l'appui sans faille qu'il a réservé à nos efforts et pour l'étude détaillée sur les modalités du programme et sur les moyens à prendre pour aider les usagers, tout en assurant des normes de sécurité publique des plus élevées.

Comme je l'ai dit, nous ne modifions pas les objectifs stratégiques fondamentaux du programme, pas plus que la date butoir d'enregistrement des armes à feu du 1er janvier 2003 ou encore l'adhésion clairement exprimée par le gouvernement aux principes de la sécurité publique. Ces changements administratifs nous permettent de simplifier les processus et les exigences pour les propriétaires d'armes à feu. Parallèlement, ils renforceront la contribution du programme à la sécurité publique. Le service à la clientèle et l'efficience seront accrus grâce à un système mieux rationalisé. Cela englobe le fait de simplifier les renouvellements de permis d'armes à feu ainsi que le processus d'enregistrement. Le traitement des visiteurs apportant des armes au Canada rendra également le processus à la frontière plus efficient. C'est un enjeu qui, de nos jours, nous intéresse tous, sous ses nombreuses facettes.

Nous allons également améliorer l'efficience et réduire les coûts en étalant le renouvellement des permis d'armes à feu afin d'éviter une augmentation subite du nombre des demandes au cours des cycles de cinq ans et d'équilibrer la charge de travail associée au programme. Nous allons également peaufiner l'administration quotidienne du programme des armes à feu en assurant une responsabilisation plus directe. Pour ce faire, nous allons consolider le pouvoir juridique relatif à toutes les activités sous l'égide d'un commissaire aux armes à feu, qui fera directement rapport au ministre de la Justice.

D'autres modifications nous permettront d'améliorer les contrôles aux frontières pour ce qui est de l'importation et de l'exportation des armes à feu et de respecter nos engagements en vertu d'accords internationaux. Cela inclut le protocole récemment finalisé de l'ONU concernant les armes à feu, qui appuie la politique canadienne et qui devient un outil supplémentaire pour contrer le trafic illégal des armes à feu.

Nous avons été à l'écoute de l'opinion de divers particuliers et organismes qui ont comparu devant votre comité et je suis convaincu qu'un grand nombre des questions soulevées trouveront réponse lorsque vous entendrez les fonctionnaires participant à l'étude article par article du projet de loi. Grâce aux propositions dont j'ai discuté aujourd'hui et à la collaboration suivie avec nos partenaires et intervenants, nous serons en mesure d'assurer un bon équilibre entre les intérêts des propriétaires d'armes à feu responsables et notre objectif commun de sécurité publique.

• 1005

En conclusion, mesdames et messieurs, dans le domaine de la cruauté envers les animaux, nous faisons en sorte que les dispositions du Code criminel reflètent les valeurs actuelles des Canadiens. Pour ce qui est des modifications proposées à la Loi sur les armes à feu, elles visent à nous doter d'un programme qui reflète les valeurs canadiennes, mais qui est aussi le plus efficace et efficient possible, à l'intention des citoyens qui utilisent le système, sans pour autant sacrifier la sécurité publique. Je vous recommande d'accueillir favorablement ces deux mesures. Elles bénéficient toutes deux d'un large appui populaire et je pense qu'elles concrétisent nos efforts pour adopter une législation qui, en bout de ligne, reflétera les valeurs canadiennes.

Merci.

Le président: Merci beaucoup, madame la ministre.

Je vais accorder la parole à M. Toews pour sept minutes.

M. Vic Toews (Provencher, Alliance canadienne): Merci beaucoup, monsieur le président.

Je ne vais pas me lancer dans le débat sur le registre des armes à feu. À mon avis, il est clair que ce registre a été un échec lamentable. Le gouvernement avait promis qu'il coûterait 85 millions de dollars aux contribuables canadiens. Il avait laissé entendre qu'il abandonnerait l'idée d'un tel registre à 150 millions de dollars. Or, nous apprenons maintenant qu'il a coûté 685 millions aux contribuables, sans que cela ait sensiblement amélioré la sécurité publique. L'an dernier, le gouvernement avait évalué à 35 millions de dollars le coût de l'établissement d'un registre des armes à feu. En fait, le gouvernement est tellement minable qu'il a sous-estimé les coûts de 114 millions de dollars; le coût total s'élève à 149 millions.

Le gouvernement a peut-être de l'argent à jeter par les fenêtres pour un registre des armes à feu qui ne constitue qu'un exercice de relations publiques. Dans les collectivités de ma région du sud-est du Manitoba et dans l'ensemble des Prairies, où nous comptons sur les agents de la GRC, nous savons bien ce qu'a fait le gouvernement. Il a sabré dans les services. Il y a une pénurie chronique d'agents de la GRC. Ces derniers ont été affectés au travail entourant le registre des armes à feu. Nos agents ne sont plus là pour servir la population. Le gouvernement actuel a dû interrompre la formation des agents de la GRC à Regina pour injecter davantage d'argent dans un registre des armes à feu.

Encore une fois, je sais que tous les Canadiens appuient un contrôle légitime des armes à feu. Personne ici ne dit le contraire. Mais dans ses enquêtes, le gouvernement pose des questions tendancieuses et a recours à la désinformation pour être sûr que les chiffres recueillis sont en faveur d'un programme qui est un échec lamentable. D'ailleurs, les agents d'exécution de la loi avec lesquels j'ai des rapports suivis reconnaissent que cette initiative draine les ressources des services de police de première ligne pour les injecter dans un système administratif qui compromet le maintien de l'ordre, particulièrement dans les régions rurales.

Il ne lui suffit pas d'avoir détruit l'industrie de la chasse dans ma circonscription, notamment de la chasse au canard, le tourisme également est battu en brèche par ce système d'enregistrement. Les gens sont découragés.

M. Paul DeVillers (Simcoe-Nord, Lib.): J'invoque le Règlement, monsieur le président, M. Toews a sept minutes...

M. Vic Toews: Si c'est là votre rappel au règlement...

M. Paul DeVillers: ...et il peut les utiliser à sa guise mais il n'est pas nécessaire d'insulter notre intelligence en disant qu'il ne se lancera pas dans une discussion sur le registre et passer ensuite les sept minutes suivantes à déblatérer à ce sujet.

M. Vic Toews: Tout ce que je veux dire, c'est que la ministre nous a servi un discours qui n'avait rien à voir avec la réalité. Pour ma part, je tiens des propos qui font état des faits.

M. Paul DeVillers: C'est votre prérogative. Je vous demande simplement de ne pas faire insulte à notre intelligence en affirmant que vous n'allez pas parler du registre des armes à feu.

M. Vic Toews: Monsieur le président, je n'ai pas interrompu le député, et j'apprécierais beaucoup qu'il me rende la politesse pendant les sept minutes dont je dispose.

M. Paul DeVillers: Ne nous insultez pas.

M. Vic Toews: Je n'ai que sept minutes, et il m'interrompt.

Les témoignages que nous avons entendus au sujet de la mesure relative à la cruauté envers les animaux ne correspondent pas à ce qu'a dit la ministre. D'après Mme McVey, les défenses énoncées à l'article 429 étaient implicites dans le nouvel article et, pour sa part, elle n'avait pas d'objection à les rendre explicites. C'est expressément ce qu'elle a dit dans son témoignage. Cela ne correspond pas au résumé que nous a fait la ministre ici aujourd'hui.

• 1010

La ministre a affirmé que les activités légitimes qui sont légales maintenant aux yeux de la loi le seraient toujours une fois que le projet de loi aura reçu la sanction royale. Pourtant, nous avons entendu témoin après témoin, et le Dr Clément Gauthier, qu'elle a cité, a formulé ses préoccupations en ces termes:

    La suppression de l'excuse légale comme défense signifie que l'objet de l'expérience doit être justifié uniquement en rapport avec les critères de la disposition sur l'infraction; la légitimité de l'activité expérimentale ou son objectif au-delà du contexte des dispositions pénales ne peuvent être invoqués en défense.

M. Robert Giroux, président de l'Association des universités et collèges du Canada, a lui aussi exprimé des inquiétudes quant au manque de précision du projet de loi. Il a soumis une liste de termes.

    Ces termes ne sont pas définis dans le projet de loi. Leur interprétation et leur application seront hautement problématiques et risquent de varier d'une province à l'autre. En outre, la simple menace de poursuites frivoles ou sans fondement pourrait suffire à paralyser une partie importante de la recherche universitaire financée par le gouvernement fédéral.

Le Dr Andrew Tasker a exprimé les mêmes préoccupations. Son inquiétude concernant l'utilisation légitime des animaux est revenue constamment dans la bouche de savants qui s'intéressent de près à la recherche médicale.

La ministre qui, à l'instar d'autres de ses collègues ministériels, a affirmé que le registre des armes à feu ne coûterait pas plus de 85 millions de dollars—alors qu'on en est à 685 millions—nous fournit aujourd'hui d'autres assurances. Elle nous demande de faire confiance au gouvernement, d'accepter que cela est implicite dans la mesure législative. Je voudrais savoir si la ministre a l'intention de rendre ces défenses explicites, ce à quoi Mme McVey a déclaré n'avoir aucune objection.

En outre, contrairement à ce qui a été dit ici aujourd'hui, les groupes de défense des droits des animaux souhaitent manifestement se prévaloir de la possibilité d'engager des poursuites. Nous connaissons leur stratégie. Elle est expliquée sur tous leurs sites Web. La ministre va-t-elle à tout le moins protéger les agriculteurs, les chercheurs médicaux et d'autres de ces poursuites frivoles et sans fondement en précisant qu'aucune poursuite aux termes de ces articles ne saurait être engagée sans l'assentiment des procureurs généraux des provinces? Il s'agit là d'une pratique standard à l'égard d'un grand nombre de nouvelles dispositions du Code criminel dont on ignore l'incidence. Après avoir entendu son allocution et ses arguments, je tiens pour acquis qu'elle est sincère à ce sujet. Si elle est vraiment sincère, va-t-elle protéger les agriculteurs de ma circonscription, les chercheurs médicaux et d'autres acteurs qui utilisent en toute légitimité des animaux dans le meilleur intérêt des Canadiens?

Le président: Merci, monsieur Toews. Vous avez obtenu vos sept minutes et même plus.

M. Vic Toews: Merci.

Mme Anne McLellan: Monsieur le président, je pourrais évidemment passer le reste de la matinée à répondre aux assertions et aux questions de M. Toews, mais permettez-moi de dire tout d'abord qu'à ma connaissance, lors de leur comparution devant le comité, les chefs de police et les représentants de l'ACP ont tous deux affirmé sans ambages leur soutien indéfectible à un régime de délivrance de permis et d'enregistrement des armes à feu. En fait, je tiens à rassurer les membres du comité, tout comme je l'ai fait dans le passé: le programme a généralement eu pour effet de libérer des ressources policières. Les policiers ne sont pas astreints aux tâches administratives qui étaient leur lot en vertu de l'actuelle Loi sur le contrôle des armes à feu. Qui plus est, lorsque les services de police y consacrent du temps, nous leur versons directement des fonds, qui sont de l'ordre de quelque 30 millions de dollars par an à l'échelle du pays. De façon générale, les services policiers ont plus de temps car dans la plupart des collectivités du pays, ils ne sont plus affectés aux tâches liées au programme de délivrance de permis de port d'armes.

• 1015

J'apprécie le soutien indéfectible à la fois des chefs et de l'ACP car ils oeuvrent sur la ligne de front et ils comprennent les conséquences tragiques qui peuvent s'ensuivre si des armes tombent entre de mauvaises mains.

Je vais m'en tenir là. Je constate que M. Toews est parti, de sorte que d'une certaine façon, je ne me sens pas obligée de répondre. Cela dit, je tiens à apporter une précision au sujet des propos de Mme McVey. Je n'ai pas commenté ce qu'elle a dit pour ce qui est d'apporter des éclaircissements. Ce que j'ai dit, ce qui est tout à fait exact—c'est qu'en tant qu'experte, elle ne considérait pas que les inculpés étaient privés de droits de défense. C'est ce qu'elle a dit. Pour ce qui est d'apporter des précisions ou non, c'est une autre affaire. Mais à ma connaissance, en tant qu'avocate représentant l'ABC, elle a affirmé clairement qu'à son avis, les personnes inculpées n'avaient perdu aucun droit de défense. En fait, comme je l'ai déjà affirmé ce matin, nous entendons proposer un amendement—et c'est mon secrétaire parlementaire qui prendra les choses en main la semaine prochaine lorsque vous aborderez l'étude article par article—, qui confirmera que les droits de défense actuellement disponibles en vertu du paragraphe 8(3) du Code criminel continueront de s'appliquer.

Le président: Merci beaucoup, madame la ministre. Je rappelle aux députés que les règles de la Chambre concernant la présence ou l'absence de collègues s'appliquent ici également. Je vous le rappelle avant que quelqu'un ne me le rappelle.

Monsieur Lanctôt, vous avez sept minutes.

[Français]

M. Robert Lanctôt (Châteauguay, BQ): Merci, monsieur le président.

Je vais commencer par les amendements à la partie du Code criminel qui porte sur la cruauté envers les animaux. Je vous dirai d'abord que nous appuyons les changements que comporte la nouvelle partie V.I par rapport aux dispositions qu'on trouvait dans la partie XI. Je pense qu'il était temps qu'on fasse cette démarche qui permet de considérer les animaux non plus comme des biens mais comme des animaux à part entière. Ce ne sont pas des biens meubles, et je pense que c'est déjà faire un pas en avant que de le reconnaître. De notre côté, nous sommes en faveur de ce changement.

Par contre, Mme McVey de «Criminal Lawyers Association» est venue nous dire qu'elle ne pouvait pas garantir ce que dit la ministre, soit que les droits de défense qui existaient et qui existent au paragraphe 429(2) pourraient s'appliquer implicitement. Elle croyait que oui, mais ne pouvait le garantir.

Par contre, dans son témoignage devant ce comité, elle a dit qu'elle reconnaissait que cela n'enlèverait rien à la protection contre la cruauté envers les animaux d'ajouter explicitement les droits de défense prévus à 429(2), où on parle d'«excuse légale» et d'«apparence de droit». Cela n'enlèverait rien. Au contraire, cela ajouterait quelque chose: les gens qui ont des craintes—agriculteurs, chasseurs, trappeurs ou scientifiques,—malgré l'amendement ajouté par l'article 8 du projet de loi, se sentiraient sécurisés.

Vous savez comme moi que ces droits de défense sont appliqués de façon très restrictive. Seule une preuve très précise peut en exempter. On ne peut pas invoquer l'«apparence» de droit simplement en disant qu'on croyait avoir le droit de faire une chose. Non, il y a des normes qui sont bien établies. Donc, ce serait un ajout et je pense même que «Criminal Lawyers Association» l'a reconnu par la bouche de Mme McVey.

Pour ma part, je pense la même chose. Je pense aussi que l'opposition est d'accord. Même des députés de votre gouvernement qui sont membres du comité sont d'accord pour qu'on fasse un ajout qui protégerait les agriculteurs, les chasseurs, tous ceux qui touchent à ce sport, et les scientifiques.

Donc, je ne vois pas en quoi cela nuirait d'ajouter un amendement aussi explicite à ce projet de loi, amendement qui permettrait de faire un grand pas. Sinon, nous n'aurons pas le choix; nous ne pourrons pas voter en faveur d'un projet de loi comme celui-là si on ne protège pas ces droits de défense.

Je pense que tout le monde peut être gagnant: les gens qui veulent protéger les animaux contre la cruauté par ce qui sera contenu dans le Code criminel, et aussi tous les gens qui vivent de cela ou qui y trouvent du plaisir. Il ne faut pas dépasser...

Est-ce qu'il me reste beaucoup de temps?

Le président: Oui.

M. Robert Lanctôt: Merci.

Parlons maintenant des armes à feu. On sait que vous aviez l'appui du Québec sans lequel, je pense, cette loi-là n'aurait jamais pu être adoptée. Vous dites que 90 p. 100 des gens au Québec sont d'accord sur la Loi sur les armes à feu. D'ailleurs, tout cela tient à un événement qui a eu lieu à Montréal, comme vous le savez. Donc, au Québec, on veut vraiment dire oui à cette loi qui vise la protection des gens, c'est-à-dire la Loi sur les armes à feu.

• 1020

Cependant, je trouve incroyable qu'on ait utilisé le Québec—et je dis bien utilisé—en s'octroyant dorénavant la responsabilité de l'émission des permis, du traitement, de la réception, de la délivrance, de la cession. Tout cela relevait du contrôleur des armes à feu du Québec. Maintenant, par ce projet de loi, vous êtes en train d'enlever au complet toute cette responsabilité portant sur les permis et de la donner au commissaire ou à un directeur.

Donc, le problème qui se pose à nous, c'est qu'il est évident que malheureusement, une fois de plus, vous avez préparé un projet de loi omnibus contre lequel on sera peut-être forcés de voter, même si on présente des amendements concernant la protection des animaux. On votera peut-être contre le projet de loi, non pas à cause de ce qu'il contient sur la protection des animaux, mais en partie à cause de cet amendement que vous dites administratif.

Il n'a pas qu'un aspect administratif. Vous allez aussi couper toutes les sommes nécessaires et tout le contrôle que pouvait avoir le Québec. Or, actuellement, tout cela fonctionne bien au Québec: l'émission, la délivrance et la cession des permis. On a acquis une expertise, et vous voulez donner tout cela à une agence fédérale ou à d'autres parties et recommencer à zéro.

Donc, je pense qu'il y a quelque chose à faire, dans le projet de loi, pour permettre clairement au Québec de continuer à accorder ces pouvoirs au contrôleur des armes à feu.

Le président: Merci, monsieur Lanctôt.

[Traduction]

Madame la ministre.

Mme Anne McLellan: Je remercie l'honorable député de ses commentaires. Tout d'abord, je suis convaincue qu'avec l'amendement proposé concernant le paragraphe 8(3) pour établir une plus grande certitude, il ne saurait être plus clair que tous les droits de défense qui existent dans la common law sont disponibles aux termes de cette disposition. Nous ajoutons cette disposition en guise d'assurance, ce qui, je l'espère, répondra aux préoccupations légitimes qui ont été soulevées.

Pour ce qui est des armes à feu, je vais demander à Gary Webster de répondre. Je peux vous donner l'assurance qu'au niveau fédéral, nous apprécions non seulement l'appui vigoureux de la population du Québec, mais également celui du gouvernement du Québec qui administre le programme de contrôle des armes à feu dans la province. Et nous n'avons absolument pas l'intention d'entraver les responsabilités fondamentales du contrôleur des armes à feu. Elles demeurent.

Cependant, nous peaufinons cette mesure législative, en partie en raison des coûts. De toute part, on nous a dit—et je pense que les Québécois partagent cette préoccupation—qu'on souhaite un programme efficient dans le cadre duquel on a recours le plus possible à la technologie afin de ne pas se retrouver avec des inefficiences administratives qui ajoutent au coût d'application de la loi. Nous voulons donc rationaliser nos méthodes. Personne n'a jamais proposé qu'en parallèle avec l'évolution de la technologie, nous ne faisions pas de changements au programme pour tirer parti de cette technologie, et dans certains cas, cela peut toucher certaines fonctions assumées par divers acteurs, que ce soient les contrôleurs des armes à feu ou d'autres, y compris le ministre.

Je vais demander à M. Webster de vous donner des précisions concernant le contrôleur des armes à feu et la création du poste de commissaire pour assurer la plus haute responsabilisation politique possible.

Je me suis entretenu hier avec le ministre de la Sécurité publique, M. Ménard, à l'occasion de la réunion des ministres territoriaux, provinciaux et fédéral, et j'ai demandé à mon sous-ministre d'assurer avec son homologue le suivi du dossier en ce qui a trait aux craintes exprimées par M. Ménard. Il m'en a parlé directement. Au cours des prochains jours, nous aurons le temps de discuter de ces questions avec lui directement et au début de la semaine prochaine, nous verrons quels auront été les résultats de ces discussions.

Mais je tiens à rassurer tout le monde, y compris vous, en tant que représentant de la province de Québec. Notre intention est de rationaliser le processus, de le rendre efficient et rentable, mais les contrôleurs des armes à feu continuent de jouer un rôle absolument crucial pour que la gestion et l'administration de ce programme soient une réussite.

Gary, voulez-vous ajouter quelque chose?

• 1025

M. Gary Webster (président-directeur général, Centre canadien des armes à feu): Une ou deux petites choses. Les propositions de modification dont il est question aujourd'hui découlent de consultations avec les contrôleurs des armes à feu de tout le pays, y compris du Québec. Dans certains cas, des problèmes ont été évoqués par tous les contrôleurs du pays et les discussions que nous avons eues dans le cadre de ces consultations se sont avérées nécessaires.

Le pouvoir fondamental et essentiel des contrôleurs des armes à feu est maintenu dans les modifications proposées à l'égard de toutes les questions concernant la sécurité publique dans chaque province. Ainsi, à la suite des changements proposés, le directeur de l'enregistrement des armes à feu assume de nouvelles responsabilités, mais tout différend ou problème concernant la sécurité publique ou encore toute preuve découlant de la vérification des antécédents à l'égard d'un permis ou d'un enregistrement sont immédiatement communiqués au contrôleur des armes à feu de la province, à qui il incombe alors de confirmer ou de régler tous les problèmes. Par conséquent, malgré les nombreux changements qui ont été apportés ou qui sont proposés dans les modifications, le directeur de l'enregistrement des armes à feu au niveau fédéral est tenu d'aller chercher l'appui et les conseils du contrôleur provincial.

Je vais m'en tenir là pour ce qui est de cette explication.

Le président: Nous allons maintenant donner la parole à M. Myers, pour sept minutes.

M. Lynn Myers (Waterloo—Wellington, Lib.): Merci beaucoup, monsieur le président. Je tiens à remercier la ministre et les deux autres témoins d'être venus comparaître.

Monsieur le président, je ne veux pas, moi non plus, parler des armes à feu. Je ne veux vraiment pas.

Le président: Alors, ne le faites pas.

M. Lynn Myers: Je ne veux pas avoir à répondre aux élucubrations de M. Toews, pétries de faits tordus et de désinformation, sauf peut-être pour dire...

M. Howard Hilstrom (Selkirk—Interlake, Alliance canadienne): J'invoque le Règlement, monsieur le président. M. DeVillers nous accuse d'insulter les autres députés et la ministre et voici maintenant que nous devons essuyer une tirade de Lynn Myers. Je réclame que tant M. DeVillers que M. Lynn Myers retirent leurs propos.

Le président: C'est un peu court pour une tirade, mais je demanderais à M. Myers de s'en tenir au sujet à l'étude.

M. Howard Hilstrom: Dans le contexte d'un comité parlementaire, le fait d'insulter l'autre parti ne correspond pas à un comportement approprié de votre part, Paul, et je pense que plus tôt nous reprendrons nos travaux dans le respect de...

Le président: Monsieur Hilstrom, M. Myers a la parole. Tentons de poursuivre avec la collégialité dont fait généralement preuve le comité.

M. Lynn Myers: Oui, monsieur le président, c'est très collégial. Je veux simplement signaler qu'il arrive parfois qu'on se retrouve coincé, qu'on se retrouve acculé au pied du mur et c'est alors qu'on réagit en conséquence. Lorsqu'on est en train de perdre sa cause et que de toute façon cette cause est mauvaise, c'est alors qu'on est confronté à des éclats comme celui de tout à l'heure.

Cela dit, madame la ministre, il y a un prix à payer pour la sécurité, pour protéger les femmes de la violence conjugale, par exemple, pour protéger nos enfants pour ce qui est des armes et de leur accès, pour protéger nos policiers lorsqu'ils se trouvent dans une situation très délicate, pour empêcher que des armes soient utilisées à mauvais escient, comme c'est souvent le cas, pour réduire la possibilité que se produise un incident comme celui de l'École polytechnique à Montréal, et d'autres du même genre qui sont survenus dans le passé, pour s'assurer que les armes qui entrent ici à partir des États-Unis... Il y a donc un prix à payer. En tant que nation, nous devrions être fiers d'avoir les ressources pour garantir que la sécurité est assurée d'une façon conforme aux grandes valeurs du Canada.

Monsieur le président, comme je l'ai dit, je ne voulais pas me lancer dans cette discussion. Je voulais plutôt aborder...

Le président: Dans ce cas, ne le faites pas.

M. Lynn Myers: ...toute la question de la cruauté envers les animaux.

Je voulais vous expliquer ce qui suit. Au printemps dernier, la firme Ipsos-Reid a fait un sondage concernant les agriculteurs canadiens. Plus précisément, on a demandé aux gens non seulement s'ils étaient convaincus que les agriculteurs canadiens produisent des aliments sûrs, ce que nous savons être le cas au Canada, mais aussi s'ils traitent bien leurs animaux, s'ils leur accordent un traitement correspondant à celui qui devrait être accordé à tout animal. D'après les réponses fournies à la suite du sondage Ipsos-Reid, environ 83 p. 100 des Canadiens se sont dit d'avis que tel est le cas.

• 1030

Si je vous signale cela, c'est que les agriculteurs, les chercheurs scientifiques et les gens des secteurs de la fourrure, de la trappe, de la chasse, de la pêche, etc. veulent, avec raison, poursuivre leurs activités. Je ne crois pas me tromper en disant cela. J'ai noté, par exemple, et j'ai porté ce fait à votre connaissance, qu'en 1987, la Commission de réforme du droit du Canada, dans son rapport numéro 31, intitulé Pour une nouvelle codification du droit pénal, évoquait les exceptions, au paragraphe 20. Je vais simplement les citer pour qu'elles figurent au compte rendu:

    Pour l'application du paragraphe 20(1), aucune blessure ni douleur physique grave n'est infligée sans nécessité s'il s'agit d'un moyen raisonnablement nécessaire d'atteindre les objectifs suivants:

      a) l'identification, le traitement médical ou la stérilisation;

      b) l'approvisionnement en nourriture ou l'obtention d'autres produits dérivés des animaux;

      c) la chasse, le piégeage, la pêche ou toute autre activité sportive licite conforme aux règles qui la régissent;

      d) la lutte contre la vermine, les prédateurs ou la maladie;

      e) la protection des personnes ou des biens;

      f) la recherche scientifique sauf si le risque d'infliger des blessures ou des douleurs physiques graves est disproportionné par rapport aux bénéfices que pourrait apporter la recherche;

      g) le dressage ou l'entraînement de l'animal.

Il me semble que cela résume assez bien ce que les agriculteurs, les chercheurs scientifiques, les trappeurs, les pêcheurs et d'autres souhaitent voir dans la mesure pour qu'ils puissent ainsi poursuivre leurs pratiques habituelles.

Ma question est donc simple. L'amendement que vous proposez, assorti de cette liste, et, on le suppose, d'autres activités qui s'inscrivent dans les codes des pratiques habituelles, dans la façon habituelle de faire les choses, dans les pratiques courantes des agriculteurs, des chercheurs scientifiques, des pêcheurs et des trappeurs et de quiconque est visé par la mesure, votre amendement, donc, va-t-il répondre à ces préoccupations?

Mme Anne McLellan: Comme je l'ai dit, monsieur Myers, en réponse aux instances de certaines personnes que j'ai rencontrées—vous-même, des représentants de l'Association des producteurs de volaille et d'autres—, cette loi n'entravera en rien les pratiques légales des personnes qui se livrent à une activité commerciale, que ce soient les producteurs de volaille, d'autres producteurs agricoles, les trappeurs ou les chasseurs. Ce n'est pas l'intention de la loi, et j'ai rassuré les gens que j'ai rencontrés, y compris ceux que j'ai rencontrés avec vous. Je leur ai dit que j'allais préciser explicitement l'intention de ces amendements.

Je vous ai d'ailleurs annoncé ce matin que nous avions l'intention d'inclure, pour plus de certitude, un renvoi au paragraphe 8(3) qui fait référence à toute défense ou justification de la common law. On ne peut être plus clair. En outre, nous ajouterons l'expression «par négligence» à l'une des infractions en question pour s'assurer encore une fois que l'on vise une conduite inacceptable, que l'on ne ratisse pas intentionnellement ceux qui agissent sans faire preuve de négligence. Je pense que grâce à ces amendements, l'intention devrait être absolument claire.

L'autre intention concerne—et j'en ai déjà parlé—le fait que nous sommes à la remorque du reste du monde. Ailleurs dans le monde, on fait de la recherche; ailleurs dans le monde, les industries agricoles prospèrent. C'est le cas en Australie, aux États-Unis, dans la plupart des États de l'Union. En fait, nos dispositions relatives à la cruauté envers les animaux sont à la traîne, loin derrière la réforme du droit, même derrière la réforme de la réglementation en droit qui a été effectuée dans certaines de nos provinces. Et les Canadiens nous disent tout simplement que c'est inacceptable.

Par ailleurs, il existe certes des intérêts légitimes que nous entendons bien protéger. Nous l'avons dit en toutes lettres, et je pense que les amendements annoncés ce matin vont le préciser davantage.

M. Lynn Myers: Monsieur le président, j'ai une brève observation.

Le président: Il y a des gens qui attendent de ce côté, monsieur Myers.

Monsieur Sorenson, trois minutes.

M. Kevin Sorenson (Crowfoot, Alliance canadienne): Merci, monsieur le président. Je remercie aussi la ministre d'être venue comparaître aujourd'hui; nous apprécions votre présence.

Je pense que c'est Dickens qui a dit: «c'était la meilleure époque, c'était la pire époque». Je suppose que pour ma part, je suis en train d'attendre la meilleure époque, parce que quand on nous présente des projets de loi comme celui-ci, c'est bien la pire époque, c'est le pire en fait de législation.

Je voudrais aussi, en guise de préambule à mes observations, traiter très brièvement du projet de loi C-68. Nous n'avons jamais vu pire projet de loi que le C-68. Jamais projet de loi n'a été plus fractionnel que le C-68. Jamais n'avons-nous vu un projet de loi dresser l'un contre l'autre les citadins et les ruraux, comme l'a fait le projet de loi C-68. Jamais n'avons-nous vu un projet de loi qui, comme on l'a déjà dit, était censé coûter 80 millions de dollars et qui a fini par en coûter 685 millions. Jamais n'avons-nous vu un échec aussi lamentable. Nous avons entendu la tirade de l'autre député qui croit que c'est nécessaire pour aider à lutter contre le crime. Cela n'aidera pas à lutter contre le crime, c'est un désastre.

• 1035

Cela dit, je voudrais maintenant affirmer que ce projet de loi-ci, le C-15B, réussit à faire exactement la même chose. Il dresse les citadins contre les ruraux. Il crée une énorme méfiance envers le gouvernement. Les agriculteurs qui possèdent des animaux ont horreur de la cruauté, ils ont horreur de ceux qui maltraitent les animaux. Le projet de loi C-15B va bien au-delà des mesures nécessaires pour s'assurer que toute utilisation criminelle des animaux sera punie. Nous adorerions que l'on punisse plus sévèrement ceux qui maltraitent les animaux, mais il semble bien que les modifications qu'on nous propose représentent un premier pas vers un objectif tout à fait différent. C'est un pas vers l'élévation du statut de l'animal, auquel on veut attribuer des droits et quasiment les attributs de l'être humain dans certains cas, puisqu'on retire les animaux de la partie de la législation qui traite des biens. La mesure va beaucoup plus loin que ce que vous avez laissé entendre aujourd'hui quand vous avez dit qu'il s'agissait uniquement d'enrayer la cruauté envers les animaux. La définition du terme animal est tellement vaste que la loi va conférer une protection juridique à tout animal qui a la capacité de ressentir de la douleur. Cela va compromettre sérieusement les pratiques légitimes qui ont cours dans les fermes et les ranches. Il est certain que de quelconques groupes de défense des droits des animaux invoqueront cette mesure législative pour fonder des poursuites inappropriées.

Je dirai ceci à la ministre. Nous avons entendu des témoins. Nous avons entendu des gens qui ont pris l'initiative d'énoncer publiquement des choses comme celles-ci, non pas comme témoins devant le comité, mais à l'extérieur de la salle. Voici ce qu'ils ont dit:

    Cette mesure législative n'est qu'un début. La balle est maintenant dans le camp des sociétés pour la protection des animaux et d'autres groupes d'intervenants de première ligne qui voudront aller jusqu'au bout, mettre à l'épreuve les paramètres de cette loi, et qui auront le courage et la conviction nécessaires pour porter des accusations. Ne vous y trompez pas, c'est bien ce dont il s'agit.

Je viens de citer Liz White, que nous avons entendue ici à titre de témoin. Ils nous disent que c'est maintenant à eux qu'il incombe d'intenter des poursuites contre l'industrie de l'élevage, d'aller jusqu'au bout, de tester la loi, et ne vous y trompez pas, madame la ministre, ils vont le faire. Ils ont soulevé de très vives inquiétudes parmi les éleveurs de ma circonscription et partout dans l'ouest du Canada.

Le président: Y a-t-il une question?

M. Kevin Sorenson: Ma question serait celle-ci: même si vous avez affirmé que les pratiques de l'élevage et de l'agriculture seront exemptées, quand on entend des extrémistes dire qu'ils ont tous les outils voulus pour intenter des poursuites, qu'avez-vous à répondre à l'agriculteur qui se débat pour joindre les deux bouts, qui a une marge bénéficiaire infime et parfois même nulle, quelles assurances pouvez-vous lui donner qu'il ne sera pas obligé de se défendre contre des poursuites alors qu'il ne peut pas se le permettre?

Mme Anne McLellan: Est-ce arrivé aux termes de la loi existante, monsieur Sorenson?

Le président: Je demanderais à la ministre de ne pas répondre aux questions par des questions lorsque les trois minutes sont écoulées.

M. Kevin Sorenson: Je vais répondre.

Mme Anne McLellan: Il faut voir ce qui se passe. N'importe qui peut se lancer dans de pures spéculations extrémistes sur ce qui pourrait ou ne pourrait pas se passer, mais je pense qu'il est important d'examiner ce qui s'est passé en application de la loi existante. En fait, comme je l'ai déjà dit en réponse à M. Myers, les pratiques qui sont licites aujourd'hui continuent d'être licites.

M. Sorenson a soulevé la question de la définition. Je trouve intéressant que dans la province de M. Sorenson, qui est aussi ma propre province, nommément l'Alberta, la définition précise «n'inclut pas un être humain». En fait, c'est une définition extraordinairement large et je ne vois pas que l'industrie de l'élevage ait été prise à la gorge, pas plus que la communauté des chercheurs dans le domaine médical, dans la province de l'Alberta.

Il y a une grande diversité de définitions. En fait, nous définissons pour la première fois l'animal. Je pense qu'il est juste de dire que nous apportons une plus grande certitude dans la législation, car en l'absence de cette définition, quelqu'un pourrait soutenir que n'importe quoi... Quelle est la norme permettant de définir ce qui est visé par cette loi? En fait, notre définition contribue à injecter une certaine certitude dans la loi, au nom de tous les intervenants.

J'essaie de ne pas me répandre en propos pessimistes, car c'est irresponsable, et la population canadienne mérite mieux que cela de notre part. J'ai été...

M. Kevin Sorenson: Mais vous avez peur.

Mme Anne McLellan: ...absolument claire en précisant que les pratiques qui sont actuellement légales continueront d'être légales en application de cette loi. Je le répète, nous nous ferons un plaisir de modifier la mesure pour que ce soit bien clair pour tout le monde. Le paragraphe 8(3) ne saurait être plus clair:

    Chaque règle et chaque principe de la common law qui font d'une circonstance une justification ou excuse d'un acte, ou un moyen de défense contre une inculpation, demeurent en vigueur [...]

Rien ne saurait être plus clair.

• 1040

J'espère que cela rassure ceux qui ont des préoccupations quelconques relativement à ce qu'ils décrivent comme les défenses existantes, quoique l'on comprenne très mal, comme je l'ai fait remarquer dans mes observations, la façon dont ces dispositions s'appliquent en réalité.

Le président: Merci.

Monsieur Cotler, vous avez trois minutes.

M. Irwin Cotler (Mont-Royal, Lib.): Madame la ministre, j'ai reçu des instances de la part de membres de la communauté juive et de la communauté musulmane qui m'ont fait part de leurs craintes. Ils craignent notamment que la pratique de l'abattage rituel prescrit par la kashrout dans la tradition juive, ainsi que les pratiques musulmanes apparentées du halal puissent être visées par cette mesure législative. J'ai lu le projet de loi et l'exposé que vous avez fait ce matin permet, à mes yeux, de dissiper ces craintes, mais je trouve qu'il serait important de le dire officiellement, afin que chacun se rende bien compte qu'en fait, ces pratiques seront protégées.

Le président: Merci, monsieur Cotler.

Madame la ministre.

Mme Anne McLellan: C'est une question importante et, comme M. Cotler l'a dit, elle a été portée à notre attention par des membres de diverses communautés. Je tiens à rassurer tout le monde ce matin. Comme je l'ai dit à tous les membres des diverses communautés qui ont abordé cette question avec moi, absolument rien, dans ce projet de loi, ne vient compromettre ce que l'on pourrait décrire approximativement en utilisant l'expression «abattage rituel». Je tiens à être absolument claire là-dessus: ces pratiques existent à l'heure actuelle et absolument rien dans cette mesure législative n'empêchera le moindrement la communauté juive ou la communauté musulmane de continuer de respecter ces rituels traditionnels.

Voudriez-vous ajouter quelque chose à ce sujet?

Le président: Madame Markham.

Mme Karen Markham (avocate, Section de la politique en matière de droit pénal, ministère de la Justice du Canada): Je n'ai pas vraiment quoi que ce soit à ajouter à ce que la ministre a dit sur ce point précis, sinon pour insister sur le fait que les critères de responsabilité aux termes des dispositions sur la cruauté envers les animaux demeurent les mêmes, et il n'y a aucune raison de croire qu'il y aura le moindre problème en l'absence de tout changement dans les critères de responsabilité.

Le président: Merci beaucoup.

[Français]

Monsieur Lanctôt.

M. Robert Lanctôt: J'aimerais bien vous croire, mais je ne suis pas le seul à être hésitant. Ce sont tous les groupes qui viennent nous voir en précisant qu'ils ont obtenu des avis juridiques.

J'ai une crainte. Pourquoi? Même si je vous félicite de l'amendement que vous apportez au Code criminel par l'article 8 du projet de loi, qui apporte déjà une précision pour prévoir des droits de défense selon la common law, je me demande pourquoi on vient en ajouter au paragraphe 429(2). Le législateur n'est pas là pour parler pour rien. Si on a ajouté quelque chose, c'est parce que certaines choses n'étaient pas claires. Cela existe dans 429(2).

Je vous le demande: pour quelle raison hésitez-vous à inclure tout simplement «sans justification légale, excuse et apparence de droit» au paragraphe 182.2(1) proposé, dans le préambule et au paragraphe 182.3(1)? Dans les deux préambules, vous n'avez qu'à ajouter quelque chose. Déjà vous ajoutez les dispositions proposées à l'article 8 du projet de loi en vue de les protéger. Cela n'enlève rien. Cela va les protéger et vous sécuriseriez tout le monde simplement en ajoutant «par négligence» et «sans justification légale, excuse ou apparence de droit». Déjà, vous avez ajouté «par négligence» à l'alinéa 182.3(1)b) proposé. C'est parfait. Mais il n'y a pas que «par négligence». Ajoutez cela au fait que vous allez faire l'amendement de l'article 8, et tout le monde va être content. Je ne comprends pas pourquoi on ne le mettrait pas. C'est le premier point.

Mon deuxième point concerne la définition. J'ai entendu d'à peu près tous les témoins la même chose que ce que les responsables de dossiers et même les policiers viennent nous dire. Ce qu'ils font est important, mais le problème est surtout le manque de ressources. Or, lorsque vous ajoutez à la définition «et de tout autre animal pouvant ressentir de la douleur», c'est bien en principe et je ne peux pas être contre cela, mais comment allez-vous faire pour mettre cela en application? Il va vous falloir des preuves démontrées par des expertises et ajouter des sommes d'argent, pas seulement pour les défenseurs, mais aussi pour la Couronne. La Couronne va être obligée d'établir les faits.

On manque déjà de ressources pour établir si la loi qu'on avait protégeait suffisamment les animaux contre la cruauté. Les sommes nécessaires n'étaient même pas disponibles et vous ajoutez quelque chose d'encore plus difficile pour arriver à votre but, soit protéger les animaux. C'est là mon deuxième point.

• 1045

Voici le troisième. Lorsque vous parlez de rationaliser la Loi sur les armes à feu, vous me dites que les contrôleurs vont garder leurs pouvoirs. C'est complètement faux. Je ne sais pas si M. Webster sera nommé commissaire, mais qui aura les pouvoirs? C'est aussi simple que cela. Est-ce que ce sera le commissaire, le directeur ou, pour la délivrance de permis et j'en passe, le contrôleur des armes à feu? Pouvez-vous répondre à cela, s'il vous plaît?

Le président: Merci, monsieur Lanctôt.

[Traduction]

Madame la ministre.

Mme Anne McLellan: Je vais demander à Mme Markham de répondre au premier point de M. Lanctôt, après quoi je demanderai à M. Webster de revenir sur la question du contrôleur des armes à feu.

Mme Karen Markham: Je voudrais une précision. Si je comprends bien, ce que vous proposez, c'est d'inscrire les défenses prévues au paragraphe 429(2) dans l'en-tête des infractions substantielles. Est-ce exact?

[Français]

M. Robert Lanctôt: D'accord. Voici ce que je veux qu'on ajoute dans le préambule du paragraphe 182.2(1) proposé: «et sans justification légale, excuse ou apparence de droit». Et j'aimerais qu'on ajoute la même chose dans le préambule du paragraphe 182.3(1) proposé: «et sans justification légale, excuse ou apparence de droit».

[Traduction]

Mme Karen Markham: Je comprends et je vous remercie de cette précision.

La difficulté est que si ces excuses sont inscrites dans l'en-tête de l'infraction, nous courons un très grand risque, celui de créer un changement de fond dans la loi, pour les raisons suivantes. Par exemple, les défenses prévues au paragraphe 429(2) n'ont jamais été invoquées relativement à des activités qui sont interdites purement et simplement. Or, comme vous le savez, les dispositions sur la cruauté prévoient l'interdiction totale de nombreuses activités. Deuxièmement, ces défenses n'ont jamais été invoquées avec succès, par exemple, pour ce qui est de causer sans nécessité douleur ou souffrance. Donc, s'il y avait un renvoi à ces défenses dans le corps même du texte sur l'infraction, on se trouverait à indiquer aux tribunaux qu'une personne pourrait avoir une excuse pour avoir causé sans nécessité douleur et souffrance. On se trouverait donc, en fait, à changer la loi relativement à la protection qui existe actuellement contre la cruauté envers les animaux.

Mme Anne McLellan: Cela affaiblirait les protections actuelles, et nous voulons plutôt les renforcer. Nous voulons progresser, et non pas régresser.

Mme Karen Markham: Je poursuis—et je m'excuse de ne pas pouvoir parler français—dans le cas de l'interdiction de tuer ou d'empoisonner un animal, nous avons conservé «sans excuse légitime», qui est un concept extraordinairement souple en common law et qui a résisté à l'épreuve de la jurisprudence. La raison en est que ces activités se font constamment dans des industries légitimes et il est donc très important d'ajouter «sans excuse légitime» pour circonscrire l'infraction, tandis que pour les autres infractions que j'ai mentionnées, notamment de causer douleur, souffrance ou blessure, l'interdiction est totale, et la défense ne peut être invoquée que dans des cas extrêmement inhabituels. Ces défenses ne sont pas invoquées couramment.

Si je peux me permettre, j'ajouterais qu'il y a peut-être un malentendu. Certains pourraient croire qu'il faut un renvoi à une excuse légitime pour excuser des activités légitimes, ce qui n'est pas le cas. L'infraction en elle-même, par exemple le fait de causer sans nécessité douleur ou souffrance, n'est même pas perpétrée, à moins que le procureur puisse prouver que même s'il y a une fin légitime, la méthode choisie, comme la ministre l'a indiqué, a causé une souffrance sans nécessité, en ce sens qu'elle était disproportionnée ou évitable. Donc, dans la plupart des cas, la question de la défense ne se pose même pas dans ces circonstances et, comme je l'ai dit, cette défense n'a jamais été invoquée avec succès.

Lorsque c'est pertinent, pour circonscrire l'infraction, ces défenses ont été conservées; comme la ministre l'a dit, à des fins d'application générale, elles ont été conservées au paragraphe 8(3), de sorte que les personnes accusées ne perdent aucune protection.

Le président: Merci beaucoup.

Monsieur Owen, vous avez trois minutes.

M. Stephen Owen (Vancouver Quadra, Lib.): Merci, madame la ministre et mesdames et messieurs les fonctionnaires.

Certaines craintes ont été exprimées, encore ce matin, au sujet d'éventuelles poursuites privées frivoles et vexatoires. Je me demande si Mme Markham pourrait nous parler des protections qui existent contre les poursuites de ce genre, en rappelant également ce que nous avons fait dans le projet de loi C-15A.

• 1050

Mme Karen Markham: Merci. Oui, c'est en fait un point très important. Je vous remercie de me donner l'occasion d'en parler. Ce qui est en cause, c'est la crainte que des militants pour la défense des animaux puissent utiliser les tribunaux pour intenter des poursuites frivoles.

Je ne vais pas passer en revue toutes les dispositions dans les détails, mais à l'heure actuelle, le droit criminel comporte des dispositions qui exigent que l'on obtienne le consentement de la cour relativement à une poursuite qui n'est pas menée par le procureur général, c'est-à-dire évidemment une poursuite privée, avant de pouvoir faire une mise en accusation. Le projet de loi C-15A a créé un nouvel article 507.1, qui fait intervenir cet examen beaucoup plus tôt dans le processus, dès le départ. Une dénonciation est déposée, le dossier est confirmé par le juge et il est ensuite renvoyé à un juge d'une cour provinciale. Avant que le juge de la cour provinciale ou le juge désigné, selon le cas, puisse confirmer ou entamer des procédures relativement à cette dénonciation, il faut d'abord une audience. Le procureur général reçoit préavis de l'audience, il a le choix d'y assister, il peut convoquer et contre-interroger des témoins, etc. C'est seulement après ce processus que la procédure suit son cours relativement à cette plainte ou dénonciation.

C'est une solide protection, dès le départ, contre les poursuites vexatoires. La raison pour laquelle cette disposition s'applique est que toutes les infractions dans les dispositions sur la cruauté sont des infractions mixtes et sont traitées aux termes de la loi d'interprétation comme des actes criminels. Donc, toutes les infractions relatives à la cruauté, à l'unique exception de celle qui a trait à la violation d'une ordonnance d'interdiction, feront l'objet d'un tri au tout début du processus en application de ce mécanisme.

Le président: Merci beaucoup.

Monsieur Hilstrom, vous avez trois minutes.

M. Howard Hilstrom: Merci, monsieur le président.

Madame la ministre, pouvez-vous me dire quand vous êtes allée pour la dernière fois dans une porcherie d'un élevage intensif du porc?

Mme Anne McLellan: Oh, mon dieu. C'était chez un agriculteur de la Nouvelle-Écosse. Il a un troupeau de Holsteins et a gagné des prix.

M. Howard Hilstrom: Êtes-vous allée dans la porcherie?

Mme Anne McLellan: Je suis déjà allée dans une porcherie. La famille de ma belle-soeur exploite l'un des plus grands élevages de porcs de la Nouvelle-Écosse.

M. Howard Hilstrom: Bon.

Mme Anne McLellan: En fait, mon frère et ma belle-soeur élevaient autrefois des porcs, en plus de leur troupeau de vaches laitières. Et quand j'étais petite, mon père faisait l'élevage intensif de la volaille. Nous avions plus de 17 000 poules pondeuses. Elles étaient dans des cages et, tous les jours, j'y allais pour ramasser les oeufs et m'occuper de tout ce qu'il faut faire dans un élevage intensif de volaille. En fait, je comprends assez bien l'industrie agricole—et mon frère n'a aucune objection à ces dispositions.

M. Howard Hilstrom: Voilà qui est excellent, madame la ministre, parce que ma question suivante exige justement une bonne connaissance de l'agriculture et de l'élevage.

Vous savez ce qu'est une cage de mise-bas, évidemment, et l'avantage est bien sûr que les cochonnets ne risquent pas de se faire écraser. Quand ils naissent, ils ne se font pas manger par la truie ou par d'autres porcs. Pouvez-vous me garantir et garantir à l'industrie de l'élevage du porc du Canada qu'il n'y aura aucun changement ni aucune poursuite relativement aux cages de mise-bas?

Mme Anne McLellan: Je connais les cages de mise-bas, parce que ma belle-soeur était dans le secteur du porc, et...

M. Howard Hilstrom: Mais pouvez-vous me garantir qu'il n'y aura aucune poursuite?

Mme Anne McLellan: Je vais vous dire exactement ce que j'ai dit en réponse à M. Myers. Ce qui est licite continue d'être licite. Je ne saurais être plus claire, monsieur le président.

M. Howard Hilstrom: Et la taille des cages à poules? Ces cages sont-elles légales? Y aura-t-il des poursuites?

Mme Anne McLellan: Écoutez, je vous dirais...

Le président: On devrait essayer de poser une question et d'y répondre.

Mme Anne McLellan: Je dirai très clairement que ce qui est licite continuera d'être licite, et j'espère avoir établi ma bonne foi pour ce qui est de comprendre la nature du secteur agricole et des pratiques d'élevage intensif, grâce à ma propre expérience personnelle.

M. Howard Hilstrom: Avant que mon temps de parole soit écoulé, permettez que je fasse une dernière petite observation. L'Union européenne a légiféré pour modifier la taille des cages de mise-bas, adoptant des lois qui ont rendu les pratiques agricoles beaucoup plus coûteuses qu'au Canada et que dans beaucoup d'autres pays, et des intervenants au symposium sur le porc qui a eu lieu tout récemment à Regina, en Saskatchewan, ont déclaré que notre pays se dirige vers cela. Je demande si vous avez réfléchi le moindrement aux répercussions économiques des changements relatifs aux droits des animaux et au bien-être des animaux, aux répercussions sur le secteur agricole, qui est toujours confronté aux problèmes de la rentabilité et de la survie. Avez-vous réfléchi à cette question?

• 1055

Mme Anne McLellan: En fait, c'est une question dont j'ai discuté avec les intervenants du secteur agricole qui sont venus m'en parler. Je voudrais dire d'abord que ni moi ni mon gouvernement n'avons juridiction sur les normes que les provinces peuvent choisir d'imposer relativement aux pratiques d'élevage, de marketing, etc. Tout cela relève essentiellement des provinces et n'a rien à voir avec le droit criminel. Si les normes sont modifiées, que ce soit par les provinces ou par l'industrie ou encore en application des règles de l'OMC ou d'une autre instance, c'est une question relative au commerce qui n'a rien à voir avec le droit criminel. Je ne peux que répéter, monsieur le président, que ce qui est licite aux termes de la loi actuelle continuera d'être licite. Je ne saurais être plus claire, c'est simple, ce n'est pas compliqué.

Le président: Je vais maintenant donner la parole à M. Maloney, qui aura trois minutes.

M. John Maloney (Erie—Lincoln, Lib.): Madame la ministre, pendant les audiences, nous avons entendu nos agriculteurs et nos chercheurs dans le domaine médical exprimer beaucoup de préoccupations; ils ont dit craindre de faire l'objet d'une chasse aux sorcières après l'adoption de cette loi. Je vous suis reconnaissant de votre réponse qui contribue à rassurer les gens à cet égard, surtout en ce qui concerne les amendements prévus au paragraphe 8(3). Je remercie aussi Mme Markham de la réponse qu'elle a donnée à la question de M. Owen. Mais quelqu'un a dit ici même tout à l'heure qu'il y a eu des suggestions selon lesquelles les procureurs généraux des provinces seraient peut-être en mesure d'approuver d'éventuelles poursuites, de manière à éviter toute poursuite frivole qui risquerait d'entraîner des dépenses pour l'agriculteur, l'université ou quiconque fait de la recherche médicale. Y a-t-il une raison d'ordre pratique ou contraignante qui nous empêcherait d'envisager cette possibilité?

Mme Anne McLellan: En fait, comme Mme Markham l'a dit, nous avons déjà des protections dans le Code criminel actuel. Une poursuite privée peut être intentée. Ce qui est crucial, c'est ce qui se passe après cela et le rôle que peut alors jouer le procureur général. Comme Mme Markham vous l'a expliqué, en application de l'article 507 du Code criminel, le procureur général peut intervenir très précocement dans le processus, une fois que la dénonciation est déposée par un simple citoyen. Bien que cela n'arrive pas très souvent, un élément important de notre droit criminel est qu'un simple citoyen peut déposer une dénonciation. La clé, c'est ce qui se passe après.

Nous avons effectivement renforcé la protection contre les poursuites frivoles et vexatoires car, comme Mme Markham l'a expliqué, le juge de paix est tenu de convoquer une audience et le procureur général en est avisé. Le procureur général comparaît alors et présente un plaidoyer s'il est convaincu que la poursuite en question est frivole ou vexatoire. Elle peut donc être tuée dans l'oeuf, au tout début du processus.

Cela figure à l'article 507, mais le paragraphe 574(3) stipule que dans le cas de poursuites menées par un poursuivant autre que le procureur général et mettant en cause une allégation d'acte criminel, un procès ne peut avoir lieu à la Cour supérieure sans une ordonnance écrite d'un juge du tribunal devant lequel le procès est censé avoir lieu, et l'article 579 du Code criminel stipule que le procureur général peut ordonner un arrêt des procédures. Donc, en fait, la protection existe déjà, mais elle a encore été renforcée pour empêcher les poursuites frivoles et vexatoires.

Le président: Merci beaucoup.

Monsieur Lanctôt, vous pourrez peut-être obtenir une réponse aux deux autres questions.

[Français]

M. Robert Lanctôt: Merci. Je ne répéterai pas la même question. Je pense que je vais avoir la réponse de M. Webster, mais je vais simplement en ajouter un petit peu.

• 1100

Au sujet de l'alinéa 84(3)d) proposé, plusieurs groupes sont venus nous dire qu'il y avait de la confusion attribuable à la double négation. Le but était vraiment de clarifier l'exemption concernant les normes afin de savoir si, par exemple, les paint balls pourraient être considérées comme des armes à feu devant être enregistrées. On voit bien que ce n'est pas le but. Je pense simplement qu'une nouvelle rédaction devrait être faite pour que ce soit un ou l'autre, pour qu'il y ait une exemption d'enregistrement. Il s'agit seulement de préciser si ça va être fait, mais, bien entendu, j'attends la réponse à la première question qui se résume à ceci: est-ce que le commissaire reprend les pouvoirs du contrôleur des armes à feu de l'administration à Québec?

[Traduction]

Mme Anne McLellan: Merci, monsieur Lanctôt. Je vais demander à Gary Webster de répondre à ces questions.

M. Gary Webster: La réponse à la question de savoir si le commissaire va reprendre les pouvoirs du contrôleur des armes à feu est tout simplement non. Nous faisons ici une rationalisation qui est nécessaire pour garantir le traitement efficace et efficient de toutes les demandes de permis et d'enregistrement. Il s'agit de simplifier le processus de manière que les formalités administratives soient assumées par le directeur de l'enregistrement des armes à feu.

Dans les domaines qui comportent moins de risques et les domaines qui mettent en cause la sécurité publique, les dossiers seront renvoyés au contrôleur des armes à feu en consultation, cette consultation débouchant sur une décision définitive relativement à un permis en particulier ou même l'enregistrement d'une arme. En même temps, le contrôleur continue, comme je l'ai dit tout à l'heure, d'assumer les responsabilités ultimes du contrôleur des armes à feu relativement à la délivrance des permis. Les contrôleurs continueront de le faire. Ils continueront d'être nommés, dans les provinces qui ont adhéré au programme, par le ministre provincial. Ils continueront d'autoriser la cession des armes à feu prohibées et d'utilisation restreinte. Ils continueront d'émettre les permis en application du règlement sur la possession autorisée de posséder des armes automatiques et des armes de poing automatiques modifiées. Ce ne sont là que quelques exemples qui montrent que le contrôleur des armes à feu continuera de jouer un rôle absolument fondamental pour la mise en oeuvre du programme.

Il est généralement reconnu par le Centre canadien des armes à feu et le ministère de la Justice que ce sont les organisations de chacune des provinces qui connaissent le mieux la situation et qui ont le plus d'expérience de première ligne quant à la situation des armes à feu dans la collectivité. En conséquence, nous avons effectué une vaste consultation et nous continuerons de travailler en très étroite collaboration avec les contrôleurs des armes à feu qui continueront d'exercer leur pouvoir de mettre en oeuvre et d'assumer des responsabilités aux termes de ces modifications.

Le président: Merci beaucoup.

Monsieur McKay, trois minutes, et ensuite M. Fitzpatrick, trois minutes également—je dis cela pour donner à la ministre une idée du temps qu'il nous reste. Ensuite, M. Myers aura une dernière brève question.

M. John McKay (Scarborough-Est, Lib.): Merci, monsieur le président.

Merci, madame la ministre, d'être venue témoigner et de nous avoir fait part de votre expérience familiale. Moi aussi, dans ma famille, j'ai beaucoup d'expérience pour ce qui est de pelleter des excréments de poulet. J'aime à croire que je poursuis la tradition familiale ici même. Je me demande si vous seriez d'accord sur ce point.

J'ai deux questions. La première concerne le retrait de cet article de la partie du code traitant des biens et son insertion dans la partie qui traite des infractions sexuelles, de la moralité publique et de l'inconduite. Je trouve que c'est une décision curieuse que de muter ces dispositions de la partie sur les biens à la partie dont je viens de parler, pour deux raisons. Premièrement, ce faisant, vous soulevez la question de savoir si les défenses sont mutées en même temps. Je pense que vous avez réglé cette question grâce à vos amendements et j'espère que vos déclarations et le dialogue que nous venons d'avoir ont dissipé tout doute à ce sujet. Deuxièmement, il me semble que si j'étais victime d'une infraction sexuelle ou relative à la moralité publique ou autre inconduite de ce genre, je serais humilié d'être visé par la même partie du code qui traite de la cruauté envers les animaux. Je me demande pour quelles raisons juridiques et logiques on n'a pas laissé ces dispositions là où elles se trouvent actuellement, en se contentant simplement de créer une sous-rubrique à l'intérieur de cette partie.

Mme Anne McLellan: Je veux apporter une précision. Ce n'est pas dans cette partie du tout. Ces mesures se trouvent dans une partie séparée, comme le sont la plupart des dispositions modernes sur la cruauté envers les animaux dans les autres pays. Ce n'est pas dans cette partie. Ça l'était aux termes des changements qui avaient été proposés antérieurement, mais cela ne se retrouve pas dans ce projet de loi-ci. Ces dispositions constitueront une partie distincte du Code criminel, dans le cadre de notre réorganisation continue visant à moderniser le code, en partie pour s'aligner sur ce que d'autres pays ont fait dans ce domaine.

• 1105

M. John McKay: J'ai repiqué cette question des instances qui nous ont été présentées par plusieurs intervenants. Celle-ci est tirée du mémoire de la coalition pour le bien-être de la volaille. Ces gens-là se trompent donc à ce sujet?

Mme Anne McLellan: Malheureusement, ils ne comprennent pas bien la situation. Ces dispositions constitueront une partie séparée, comme c'est le cas dans un nombre grandissant de pays et d'États autour du monde.

M. John McKay: Il semble que ce soit une solution logique.

Mme Anne McLellan: Tout à fait.

M. John McKay: Ma deuxième question porte sur les circonstances semblables. L'Association médicale canadienne a laissé entendre que la négligence mettrait en cause une comparaison avec des faits et actes semblables. Je pense que ce qu'elle craint, c'est que les agriculteurs soient comparés à d'autres catégories de personnes accusées d'infractions semblables. Pouvez-vous rassurer l'Association au sujet de cette disposition?

Le président: Merci, monsieur McKay.

Madame McLellan.

Mme Anne McLellan: Je vais laisser Mme Markham répondre.

M. John McKay: Et je vais rester vissé à ma chaise pour entendre la réponse.

Mme Karen Markham: J'espère être à la hauteur de vos attentes.

Pour dissiper tout doute, vous parlez bien de définir la négligence comme le degré de diligence qu'une personne raisonnable utiliserait dans des circonstances semblables, quelque chose du genre?

M. John Maloney: Oui.

Mme Karen Markham: Le renvoi n'est pas nécessaire en pareil cas, parce qu'une longue série de décisions, dont la dernière est probablement la décision rendue dans l'affaire Creighton par la Cour suprême du Canada, ont établi très clairement que l'évaluation des circonstances est absolument vitale pour établir s'il y a un écart prononcé par rapport au degré de diligence auquel on peut s'attendre d'une personne raisonnable. Il faudrait que la cour sache quelles sont les circonstances, parce qu'autrement, les juges ne peuvent pas faire cette évaluation. Le libellé du paragraphe 2 a évolué en fonction de la jurisprudence et c'est la façon absolument la plus claire et la plus concise d'énoncer cela et de dire aux tribunaux que nous entendons appliquer en l'occurrence la norme de la négligence criminelle. Si l'on commence à modifier le critère qui est bien compris par les tribunaux, il y a toujours le risque de créer par inadvertance un changement de fond à la loi.

Le président: Merci beaucoup.

Monsieur Fitzpatrick.

M. Brian Fitzpatrick (Prince Albert, Alliance canadienne): Je voudrais réitérer un point. Les cages de mise-bas, la formation des travailleurs relativement aux droits et au bien-être, les installations comportant des stalles individuelles, la densité de logement, les dispositifs d'alimentation, le régime alimentaire des truies grosses, et les matériaux dont sont faites les litières, tout cela a été scruté à la loupe en Europe à cause d'une mesure législative comme celle-ci. Ces pratiques ont été contestées et il y a eu des répercussions, il en est résulté une forte augmentation des coûts pour les producteurs européens. Je tiens seulement à le préciser à mes homologues.

Sur la question des armes à feu, il me semble que nous discutons de questions administratives. Or, à l'heure actuelle, je pense que les autorités des armes à feu sont en train de rembourser des frais de 10 $ aux propriétaires d'armes à feu et je trouve que cela devrait relever de ce que nous essayons de faire ici dans le domaine administratif. J'ai vu des analyses du secteur privé sur ce qu'il en coûte pour envoyer un chèque; le montant peut s'élever jusqu'à 15 $ par chèque. Je voudrais donc passer en revue quelques éléments.

Il me semble que le gouvernement devra payer 50c. pour un timbre. Il faudra au moins un tiers d'heure de travail rémunéré pour traiter chacune de ces formalités—et je pense que mon estimation est sans doute trop basse, car on ne parle pas ici d'employés d'un Wal-Mart—et j'avancerais qu'il en coûtera 11 $ de rémunération. Je dirais qu'il en coûtera 20c. pour l'enveloppe, le papier, et encore 20c. pour les divers. J'ai travaillé dans le secteur privé pendant 25 ans et je dirigeais une entreprise où je devais avoir l'oeil sur les coûts, la masse salariale, etc., et il me semble que, d'après mes calculs, et je répète qu'ils sont très prudents, nous allons dépenser 11,70 $ pour envoyer un chèque de 10 $ de remboursement aux demandeurs. Avez-vous fait une analyse de ce qu'il en coûte à votre ministère pour envoyer un chèque de 10 $ à ces gens-là?

Mme Anne McLellan: J'ignore si cette analyse a été faite, mais si vous parlez de l'enregistrement, le montant était variable. Il pouvait être de 10 $, 14 $ ou 18 $.

M. Brian Fitzpatrick: Je parle des 10 $.

• 1110

Mme Anne McLellan: Eh bien, je vais laisser M. Webster...

M. Brian Fitzpatrick: Mais j'espère que vous avez analysé cet aspect.

Mme Anne McLellan: Oui, mais permettez que je...

Le président: Laissez-la répondre.

Mme Anne McLellan: Permettez que je revienne à ce que je disais.

M. Brian Fitzpatrick: Non, je veux que l'on réponde à ce que moi, je

Mme Anne McLellan: Oui, tout à fait. J'insiste sur le fait que cette rationalisation nous permettra d'économiser de l'argent. À long terme, une fois que les changements technologiques auront été faits, la simplification administrative prendra place et nous ferons économiser beaucoup d'argent aux contribuables canadiens dans la mise en oeuvre continue et stable de ce programme.

Il y a des changements...

M. Brian Fitzpatrick: Quel est le coût par chèque?

Le président: C'est la dernière fois que vous posez cette question.

Mme Anne McLellan: Je voudrais dire aussi que nous voulons évidemment encourager les gens à enregistrer leurs armes le plus tôt possible, pour éviter ce qui s'est passé dans le cas des permis, c'est-à-dire que des centaines de milliers de demandes ont été présentées au mois de décembre. Aucun système, aussi efficace soit-il, ne peut traiter rapidement des centaines de milliers de demandes. Nous nous sommes donc demandés ce qui pourrait encourager les propriétaires légitimes d'armes à feu qui veulent enregistrer leurs armes à le faire rapidement. Toutes nos analyses de marché nous apprennent que le meilleur encouragement, c'est le coût, c'est-à-dire le fait d'économiser. En fait, nous l'avons découvert dans le cadre de notre programme de permis: quand les frais ont été supprimés, le nombre de personnes qui ont présenté leur demande a augmenté de façon astronomique. Nous voulions donc encourager les gens à s'inscrire rapidement au programme d'enregistrement et, en fait, les économies à long terme pour le programme et les gains d'efficience permis par l'enregistrement précoce sont considérables, et nous avons fait tout ce travail d'analyse.

Le président: Merci beaucoup.

Monsieur Myers, trois minutes.

M. Lynn Myers: On remet constamment sur le tapis la grandeur des stalles—je reviens à la cruauté envers les animaux—et les pratiques d'élevage, notamment l'exemple européen, etc. Je trouve que ces interventions visent à semer la peur parmi les agriculteurs, et je n'aime pas ça. Vous nous avez écoutés sur toute cette question, et vous proposez maintenant, par l'entremise du secrétaire parlementaire, les amendements qui permettront de dissiper ces craintes. Je tiens à dire absolument clairement que tel est le cas, et que moi je le sais, mais je pense que nous devons nous assurer que les agriculteurs d'un bout à l'autre du Canada comprennent bien que c'est effectivement le cas.

Vous avez déjà vu cela. Vous connaissez les pratiques agricoles. Vous venez d'une famille d'agriculteurs. Vous avez encore des gens dans votre parenté qui travaillent dans l'agriculture.

M. Paul DeVillers: Pourrions-nous entendre cela encore une fois?

M. Lynn Myers: Oui, je pense que ça en vaudrait la peine. Vos antécédents, votre bagage vous permettent d'appuyer avec crédibilité l'utilisation à des fins légitimes des pratiques agricoles et l'application du code de conduite, et je pense que nous devons dire absolument clairement que c'est précisément ce qui se passe en l'occurrence. Je trouve irresponsable de remettre sur le tapis les pratiques de l'Union européenne et, je vous le dis franchement, je n'aime pas ça.

Le président: Merci, monsieur Myers.

Mme Anne McLellan: M. Fitzpatrick a beau dénigrer mes origines rurales, ce que je trouve d'ailleurs plutôt troublant, laissez-moi vous dire, monsieur Myers, que ce que je vais faire...

M. Brian Fitzpatrick: Qu'avez-vous dit là?

Mme Anne McLellan: J'ai dit que je trouve plutôt troublant que M. Fitzpatrick semble dénigrer mes origines rurales.

M. Brian Fitzpatrick: Monsieur le président, je veux répondre à cette affirmation. J'aimerais savoir exactement quels propos j'ai tenus en ce sens, pour que vous puissiez les consigner au compte rendu et que je sache ce dont on parle.

Mme Anne McLellan: À quoi avez-vous fait allusion, à des cochons Holstein?

M. Brian Fitzpatrick: Pardon?

Mme Anne McLellan: Vous savez ce que vous avez dit.

M. Brian Fitzpatrick: Je ne connais aucune variété de porcs appelée Holsteins.

Mme Anne McLellan: Je n'en tiendrai pas compte...

Le président: Je vais vérifier la transcription.

Mme Anne McLellan: ...parce que je suis très fière de mes origines rurales.

Je vais répéter, monsieur Myers, ce que j'ai déjà dit, à savoir que ce qui est licite continuera d'être licite et que le droit criminel n'a rien à voir avec les normes d'application volontaire que pourront décider d'adopter les organisations agricoles ou autres. Cela n'a rien à voir avec le droit pénal. Nous savons tous, par exemple, que les pratiques se sont améliorées progressivement dans les abattoirs. Cela n'a rien à voir avec le droit pénal, cela a tout à voir avec la réglementation provinciale et avec la responsabilisation de l'industrie elle-même. En fait, nous avons au Canada un excellent secteur agricole qui comprend l'importance de faire évoluer les normes à mesure que la technologie et d'autres facteurs le permettent.

• 1115

Je veux donc répéter encore une fois que ce qui est licite continuera d'être licite et qu'il est inacceptable de jouer au prophète de malheur. Il ne convient pas, en particulier pour les élus, de semer la peur, alors que notre travail devrait être d'aider les gens à comprendre la loi et de rassurer les gens quant à l'importance et à l'intention de cette mesure législative.

Le président: Merci beaucoup, madame la ministre. Je sais que tous les autres ont été impressionnés par vos antécédents dans ce contexte de... Je dois dire que pour ma part, j'ai surtout été impressionné par le fait que vous êtes originaire des Maritimes.

Sur cette note joyeuse, je remercie beaucoup la ministre et ses collaborateurs.

Mme Anne McLellan: Merci. C'était un plaisir de témoigner ici.

Le président: J'attire l'attention des membres du comité sur le fait que l'étude article par article du projet de loi C-15B est prévue pour le mardi 4 décembre, à 9 h 30. Les députés ont reçu les coordonnées du personnel qui se chargera de recevoir les propositions d'amendements, et je veux rappeler à tous qu'il serait utile que ceux qui ont l'intention de proposer des amendements le fassent dans les plus brefs délais, afin que le personnel puisse tout organiser. Je rappelle toutefois aux députés que c'est votre prérogative de proposer des amendements au projet de loi quand nous ferons l'étude article par article, pourvu qu'ils soient mis par écrit.

Là-dessus, la séance est levée.

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