JUST Réunion de comité
Les Avis de convocation contiennent des renseignements sur le sujet, la date, l’heure et l’endroit de la réunion, ainsi qu’une liste des témoins qui doivent comparaître devant le comité. Les Témoignages sont le compte rendu transcrit, révisé et corrigé de tout ce qui a été dit pendant la séance. Les Procès-verbaux sont le compte rendu officiel des séances.
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37e LÉGISLATURE, 1re SESSION
Comité permanent de la justice et des droits de la personne
TÉMOIGNAGES
TABLE DES MATIÈRES
Le jeudi 21 février 2002
¿ | 0905 |
Le président |
M. George Radwanski (commissaire à la protection de la vie privée du Canada) |
¿ | 0910 |
M. Scott |
M. Chuck Cadman (Surrey-Nord, Alliance canadienne) |
M. George Radwanski |
¿ | 0915 |
M. Chuck Cadman |
M. George Radwanski |
M. Chuck Cadman |
M. George Radwanski |
M. Chuck Cadman |
M. George Radwanski |
¿ | 0920 |
M. Grose |
M. George Radwanski |
M. Ivan Grose |
M. George Radwanski |
¿ | 0930 |
Le président |
M. Peter MacKay (Pictou--Antigonish--Guysborough, PC/RD) |
M. George Radwanski |
M. Peter MacKay |
M. George Radwanski |
M. Peter MacKay |
¿ | 0935 |
M. George Radwanski |
M. Peter MacKay |
M. George Radwanski |
M. MacKay |
M. George Radwanski |
M. Andy Scott |
M. Kevin Sorenson (Crowfoot, Alliance canadienne) |
Le président |
M. George Radwanski |
¿ | 0940 |
M. Kevin Sorenson |
M. George Radwanski |
M. Kevin Sorenson |
M. George Radwanski |
M. Kevin Sorenson |
Le président |
M. George Radwanski |
M. Kevin Sorenson |
M. Scott |
Le président |
¿ | 0945 |
M. Maloney |
M. George Radwanski |
M. John Maloney |
M. George Radwanski |
M. John Maloney |
M. George Radwanski |
M. John Maloney |
M. Andy Scott |
M. Peter MacKay |
¿ | 0950 |
M. George Radwanski |
M. Peter MacKay |
M. George Radwanski |
M. MacKay |
Le président |
M. John McKay (Scarborough-Est, Lib.) |
¿ | 0955 |
M. George Radwanski |
Le président |
M. Chuck Cadman |
À | 1000 |
M. George Radwanski |
Le président |
M. John Maloney |
M. George Radwanski |
M. John Maloney |
M. Maloney |
M. George Radwanski |
À | 1005 |
Le président |
M. Peter MacKay |
M. George Radwanski |
Le président |
À | 1010 |
M. Peter MacKay |
Le président |
M. George Radwanski |
Le président |
M. Kevin Sorenson |
M. Sorenson |
M. George Radwanski |
À | 1015 |
Le président |
M. Kevin Sorenson |
M. George Radwanski |
M. Sorenson |
M. George Radwanski |
Le président |
M. John McKay |
À | 1020 |
M. George Radwanski |
Le président |
M. Peter MacKay |
À | 1025 |
M. George Radwanski |
M. Peter MacKay |
M. George Radwanski |
Le président |
M. Bellehumeur |
Le président |
M. John Maloney |
M. George Radwanski |
À | 1030 |
Le président |
M. Chuck Cadman |
M. George Radwanski |
Le président |
À | 1035 |
M. Chuck Cadman |
Le président |
M. John McKay |
M. George Radwanski |
Le président |
M. George Radwanski |
Le président |
M. George Radwanski |
Le président |
À | 1045 |
M. George Radwanski |
À | 1050 |
Le président |
M. Chuck Cadman |
M. George Radwanski |
À | 1055 |
Le président |
M. Michel Bellehumeur |
M. George Radwanski |
M. Michel Bellehumeur |
M. George Radwanski |
Le président |
M. Strahl |
Á | 1100 |
Á | 1105 |
Le président |
M. George Radwanski |
M. Strahl |
George Radwanski |
Le président |
M. John McKay |
Á | 1110 |
M. McKay |
M. George Radwanski |
Á | 1115 |
M. John McKay |
M. George Radwanski |
Le président |
M. Kevin Sorenson |
M. George Radwanski |
Á | 1120 |
Le président |
M. Paul Harold Macklin (Northumberland, Lib.) |
M. George Radwanski |
Le président |
M. Strahl |
M. George Radwanski |
M. Strahl |
Á | 1125 |
M. George Radwanski |
M. Strahl |
M. George Radwanski |
Le président |
M. Chuck Cadman |
Á | 1130 |
M. George Radwanski |
Le président |
M. Chuck Cadman |
M. George Radwanski |
M. Chuck Cadman |
M. George Radwanski |
Á | 1135 |
M. Chuck Cadman |
M. George Radwanski |
M. Chuck Cadman |
George Radwanski |
Le président |
M. Peter MacKay |
M. George Radwanski |
Á | 1140 |
M. Peter MacKay |
M. George Radwanski |
M. Peter MacKay |
M. George Radwanski |
M. MacKay |
George Radwanski |
M. MacKay |
George Radwanski |
Le président |
M. Kevin Sorenson |
M. George Radwanski |
Á | 1145 |
Le président |
M. Strahl |
M. George Radwanski |
M. Strahl |
M. George Radwanski |
Á | 1150 |
M. Strahl |
M. George Radwanski |
Le président |
M. Peter MacKay |
Á | 1155 |
M. George Radwanski |
M. Peter MacKay |
M. George Radwanski |
M. Peter MacKay |
M. George Radwanski |
M. Peter MacKay |
M. George Radwanski |
M. Peter MacKay |
M. George Radwanski |
M. Peter MacKay |
M. George Radwanski |
M. Peter MacKay |
M. George Radwanski |
M. MacKay |
M. George Radwanski |
Le président |
M. George Radwanski |
Le président |
Le président |
M. Matthew Perry (agent des services juridiques communautaires, codirecteur par intérim, HIV & AIDS Legal Clicic (Ontario)) |
 | 1215 |
 | 1220 |
Le président |
M. Bruce Miller (administrateur, Association des policiers de l'Ontario) |
 | 1225 |
Constable Natalie Hiltz (Association des policiers de l'Ontario) |
 | 1230 |
Le président |
M. Patrick Healy (professeur, Faculty of Law and Institute of Comparative Law, Université McGill) |
 | 1235 |
 | 1240 |
Le président |
M. Chuck Cadman |
M. Matthew Perry |
 | 1245 |
Le président |
M. Patrick Healy |
M. Chuck Cadman |
M. Patrick Healy |
M. Patrick Healy |
M. Michel Bellehumeur |
 | 1250 |
Le président |
M. Michel Bellehumeur |
 | 1255 |
Le président |
M. Strahl |
· | 1300 |
M. Patrick Healy |
M. Chuck Strahl |
M. Patrick Healy |
M. Strahl |
M. Patrick Healy |
M. Strahl |
M. Patrick Healy |
M. Strahl |
M. Patrick Healy |
· | 1305 |
M. Macklin |
Le président |
M. Bruce Miller |
Le président |
M. Matthew Perry |
· | 1310 |
M. Macklin |
M. Bruce Miller |
M. Macklin |
Const. Natalie Hiltz |
M. Macklin |
Const. Natalie Hiltz |
M. Chuck Cadman |
M. Patrick Healy |
· | 1315 |
Le président |
M. Macklin |
M. Patrick Healy |
· | 1320 |
M. Macklin |
M. Patrick Healy |
M. Macklin |
M. Michel Bellehumeur |
Le président |
· | 1325 |
M. Patrick Healy |
M. Patrick Healy |
M. Maloney |
M. Patrick Healy |
M. Strahl |
· | 1330 |
M. Patrick Healy |
M. Strahl |
M. Patrick Healy |
M. Strahl |
M. Patrick Healy |
M. Patrick Healy |
M. Patrick Healy |
Le président |
M. Chuck Cadman |
M. Bruce Miller |
M. Cadman |
M. Bruce Miller |
M. Cadman |
Le président |
· | 1335 |
M. Chuck Cadman |
M. Strahl |
Le président |
M. Strahl |
Le président |
CANADA
Comité permanent de la justice et des droits de la personne |
|
l |
|
l |
|
TÉMOIGNAGES
Le jeudi 21 février 2002
[Enregistrement électronique]
¿ (0905)
[Traduction]
Le président (M. Andy Scott (Fredericton, Lib.)): Je déclare la séance ouverte.
Veuillez accepter mes excuses au nom des participants, nous nous réunissons habituellement à 9 h 30. Je crois que nous avons tous vu dans notre agenda qu'il y avait une assemblée du comité du ministère de la Justice ce matin, mais personne n'a remarqué à quelle heure elle avait lieu. Si l'on faisait le compte des membres du comité du ministère de la Justice, je crois que nous y serions tous.
Je déclare la 64e séance du Comité permanent de la justice et les droits de la personne ouverte. Ce matin, conformément à l'alinéa 108(1)c), nous allons examiner le rapport annuel du Commissaire à la protection de la vie privée.
Pour nous aider, nous avons avec nous George Radwanski, Commissaire à la protection de la vie privée du Canada, moniseur Radwanski.
M. George Radwanski (commissaire à la protection de la vie privée du Canada): Bonjour. Je suis très heureux d'être ici ce matin pour vous parler de mon premier rapport annuel et pour répondre à toute question que vous pourriez avoir à ce sujet.
J'aimerais surtout profiter de ma présence ici aujourd'hui pour vous demander de m'aider à enrayer l'une des plus répréhensibles des atteintes à la vie privée au Canada, l'utilisation d'une caméra de surveillance vidéo par la GRC de Kelowna, en Colombie-Britannique, pour surveiller les activités de citoyens respectueux de la loi.
Comme vous le verrez dans mon rapport, la caméra de surveillance a été installée par la GRC qui agissait comme corps de police municipal afin de surveiller en permanence et d'enregistrer tout individu qui se trouve dans les rues publiques de Kelowna. Il s'agit ici d'une violation flagrante de la Loi sur la protection de la vie privée qui interdit la collecte non autorisée de renseignements personnels que la loi définit comme tous «renseignements, quels que soient leur forme et leur support, concernant un individu identifiable». Cependant, lorsque confronté au fait indéniable, le commissaire Zaccardelli de la GRC a pris avantage d'une lacune pour se conformer de façon minimale à la loi.
Voici de quelle lacune il s'agit. Lorsque la Loi sur la protection de la vie privée a été rédigée il y a de cela 20 ans, l'expression «quels que soient leur forme et leur support» semblait convenir à toutes les situations possibles. Personne n'avait pensé à la surveillance vidéo en temps réel, bien sûr. En ordonnant la surveillance caméra 24 heures par jour sans l'enregistrement continu, le commissaire Zaccardelli a suivi la lettre de la loi. Il n'a cependant pas respecté l'esprit ou même l'objectif de celle-ci.
L'arrêt de l'enregistrement sur vidéo ne résout pas le problème fondamental créé par la caméra. Ce n'est pas l'enregistrement comme tel des images qui porte atteinte à la vie privée, c'est plutôt la surveillance permanente de toute personne qui se trouve par hasard à marcher sur cette rue publique.
Comme l'a dit le juge La Forest de la Cour suprême dans une décision de 1990:
permettre la surveillance magnétoscopique illimitée par des agents de l'État, ce serait diminuer d'une manière importante le degré de vie privée auquel nous pouvons raisonnablement nous attendre dans une société libre... nous devons toujours rester conscients du fait que les moyens modernes de surveillance électronique, s'ils ne sont pas contrôlés, sont susceptibles de supprimer toute vie privée. |
J'ai demandé à plusieurs reprises au commissaire de la GRC de se conformer à cette décision. Je lui ai demandé de fermer la caméra de Kelowna afin de respecter l'esprit et l'objectif de la législation relativement à la protection de la vie privée. Il a tout simplement refusé.
La GRC jouit d'une excellente réputation qui lui a valu la confiance et le respect des Canadiens. Pour parler franchement, je trouve qu'il est honteux que notre force nationale de police ait trouvé refuge derrière un point de détail de la loi afin de poursuivre sa violation d'un des droits fondamentaux de la personne, le droit à la vie privée dont jouissent tous les Canadiens.
Il est tout aussi inacceptable que la GRC n'hésite aucunement à ignorer la recommandation éminente d'un haut fonctionnaire du Parlement. Cette vision de la protection des droits fondamentaux du citoyen à la vie privée repose sur le respect que porteront les institutions fédérales à l'autorité morale de l'officier indépendant qui est votre porte-parole, le porte-parole du Parlement. Si une institution nationale importante comme la GRC se permet de prendre une telle recommandation à la légère, c'est toute cette vision qui est atteinte, et avec elle, le fondement même de nos droits.
Jusqu'ici, je dois dire que cette notion a été bien comprise. Récemment, lorsque j'ai fait part de mes inquiétudes concernant l'ouverture de la correspondance par les commissaires en douane du Canada, même si cela constituait théoriquement un droit légal, le ministre du Revenu national de l'époque a remis la question en cause. Lorsque mon prédécesseur a fait valoir ses inquiétudes concernant le fichier longitudinal sur la main-d'oeuvre du DRHC, qui était tout aussi légal, cette base de données a été détruite par ordre du ministre.
¿ (0910)
Il ne s'agit pas ici d'une seule petite caméra. Le mois prochain, cinq autres caméras seront mises au service de la GRC à Kelowna. De plus, cette pratique prend une ampleur nationale.
Si la GRC peut se permettre de défier les décisions du Commissaire fédéral à la protection de la vie privée, l'ensemble des forces policières et des municipalités y verront un précédent leur permettant d'ignorer les décisions relatives à la protection de la vie privée et d'installer des caméras comme bon leur semble. Si tel est le cas, la protection de la vie privée, qui est un droit fondamental de la personne au Canada, aura subi un échec terrible, probablement irréparable.
Même si la GRC prétend que la caméra contribue à réduire le crime à Kelowna, elle ne peut présenter aucune preuve à cet effet malgré mes demandes répétées. En fait, il n'existe aucune preuve convaincante, où que ce soit, qui nous permettrait de dire que la surveillance vidéo des rues, la surveillance vidéo des rues libres au public, contribue réellement à réduire la criminalité.
Londres, en Angleterre, compte plus de caméras de surveillance vidéo que toute autre ville. Il y avait encore plus de caméras à Londres pendant la dernière année qu'à toute autre année auparavant. L'an dernier, le crime de rue a augmenté de 40 p. 100.
En tant qu'ombudsman, mes outils de travail sont la persuasion et la publicité. Je continuerai d'utiliser ceux-ci pour défendre les droits à la vie privée et les libertés qui définissent notre nation. J'ai cependant besoin de votre appui pour résoudre le problème de la caméra de Kelowna, qui représente une cause type cruciale. Je suis ici aujourd'hui pour demander votre appui en tant que membres du Parlement et de ce comité. Je demande aux membres de la Chambre qui font partie du gouvernement de soulever la question auprès de leurs collègues de caucus, y compris le solliciteur général, qui est en charge du dossier de la GRC, et aux membres de l'opposition de faire tout en leur pouvoir pour inciter le commissaire Zaccardelli à respecter l'esprit, et non seulement la lettre, des lois sur la protection de la vie privée au Canada.
Ceci dit, il me fera plaisir de répondre à toutes vos questions. Je suis à votre disposition.
Je vous remercie de l'attention que vous m'avez accordée.
Le président: Merci beaucoup monsieur le commissaire.
La parole va maintenant à M. Cadman pour sept minutes.
M. Chuck Cadman (Surrey-Nord, Alliance canadienne): Merci, monsieur le président, et merci à vous, monsieur le commissaire, pour votre présence ici aujourd'hui.
Je ne m'attarderai pas sur des questions concernant la caméra de Kelowna dès maintenant, car j'aimerais bien m'entretenir personnellement avec la GRC et avec la GRC de Kelowna avant de le faire. Le comité voudra peut-être se pencher sur la question.
Je n'ai donc qu'une question à poser.
Pouvez-vous nous indiquer quelles sont les autres juridictions, au Canada, qui utilisent des caméras actuellement? Vous avez mentionné que d'autres planifiaient les utiliser. Pouvez-vous nous dire qui?
M. George Radwanski : Cela a commencé, pour vous dire très franchement, à se répandre comme la peste de l'invasion de la vie privée. Je ne suis donc peut-être pas au courant des derniers développements. Je sais qu'ils comptent installer 23 caméras au centre-ville de Vancouver. J'ai eu l'occasion de parler du problème à cet endroit. Ils envisagent installer des caméras à Hamilton. Ils en parlent à Calgary et à London en Ontario. Des caméras ont été utilisées à Sudbury depuis un certain temps.
Je ne crois pas que cette liste est exhaustive. Le problème découle d'une attitude conformiste qui soudainement nous dit «installons des caméras». Nous adoptons ce raisonnement parce qu'il nous donne un sentiment de sécurité. Le problème c'est que nous ne sommes pas vraiment en sécurité, parce que, comme je l'ai dit, il n'existe aucune preuve qui puisse démontrer que les caméras contribuent à diminuer la criminalité.
Dans certaines juridictions des États-Unis, où des caméras de surveillance vidéo on été installées, les autorités ont découvert qu'elles n'ont servi à rien, et ils s'apprêtent à les enlever.
Le problème est brûlant, cependant, car dès l'instant où les caméras sont installées, il est encore plus difficile d'obtenir un consensus en vue de faire démanteler un système hautement technologique qui représente un investissement; ce qui a pour effet de perturber le travail des forces policières. L'autre problème cependant—et cela se produit déjà aux États-Unis—c'est que l'usage répandu des caméras de surveillance vidéo amène éventuellement l'utilisation d'appareils de biométrie et de reconnaissance des visages, ce qui donne encore plus d'ampleur au problème. Et alors, en plus d'être surveillés en permanence, nous perdons notre droit à l'anonymat lorsque certains renseignements associés à notre photo de permis de conduire ou de passeport se retrouvent entre les mains des autorités.
Si nous laissons cela se produire, nous ne serons même plus en mesure de marcher dans les rues sans que les forces policières puissent, en appuyant sur un bouton, savoir qui nous sommes et où nous vivons. Nous ne sommes pas tenus de nous identifier ou même d'avoir sur nous nos papiers d'identification lorsque nous marchons dans les rues. Encore une fois, nous serons privés d'un de nos droits. Le problème est donc très sérieux et il prend de l'ampleur.
¿ (0915)
Ces derniers temps, j'ai déclaré que le problème constituait l'une des plus pressantes et des plus importantes questions concernant la protection de la vie privée à laquelle notre société sera confrontée et j'en ai fait ma priorité absolue depuis le début de l'année et surtout durant les derniers mois. Dans les mois à venir, ce problème retiendra beaucoup l'attention et je compte être là pour tenter d'y remédier.
M. Chuck Cadman: Y a-t-il certaines circonstances où, selon vous, il serait raisonnable d'utiliser ce type de surveillance.
M. George Radwanski: Bien sûr. Je ne dis pas que la surveillance vidéo est mauvaise en soi. Ce qui m'inquiète c'est plutôt son utilisation dans les rues et les places publiques où l'on se consacre à nos activités quotidiennes. Par exemple—et je l'ai dit clairement—à certains endroits où la sécurité pose un problème particulier, la surveillance vidéo est sans doute nécessaire, que ce soit à l'extérieur du Parlement ou du palais de justice, ou à l'extérieur d'un édifice gouvernemental particulièrement vulnérable.
Pour plusieurs raisons, la surveillance vidéo dans les magasins et les banques est complètement différente. Premièrement, nous avons le choix—au moins en théorie, et même en pratique—de ne pas entrer dans un endroit privé si l'on ne veut pas se faire filmer ou se faire observer. Nous pouvons, par exemple, effectuer de plus en plus de nos opérations bancaires par téléphone ou même par ordinateur. C'est la première différence. Par contre, si un grand nombre de caméras sont installées dans les rues publiques, à moins qu'on ne puisse léviter au-dessus de celles-ci, nous n'aurons plus aucun moyen de circuler normalement pour se rendre d'un endroit à un autre sans être épiés au moyen de la surveillance vidéo.
Il y a toute une différence entre la surveillance vidéo à circuit fermé, comme dans un dépanneur, où, à moins que le magasin ne soit le théâtre d'un vol à main armée, personne n'y prête attention, et la surveillance systématique des individus par des agents de l'État—la police—qui peuvent, bien sûr, y porter intérêt pour quelque raison que ce soit. Cette distinction est considérable.
Je ne dis pas qu'on ne devrait jamais utiliser la surveillance vidéo. Je dis simplement qu'il n'y a aucune raison pouvant justifier la surveillance vidéo dans les rues publiques.
Un chef d'entreprise de Kelowna a déclaré que, selon lui, personne ne devrait s'objecter à la surveillance vidéo parce que c'est tout comme si un agent de police se trouvait à chaque coin de rue, et que personne ne pourrait s'objecter à cela. Je répliquerais en disant qu'il y a plusieurs endroits dans le monde où l'on place un policier à chaque coin de rue, nous appelons ces endroits des état policiers.
M. Chuck Cadman: Puis-je présumer que, selon vous, la surveillance qui permet d'identifier les individus suscite plus d'inquiétude que la surveillance constante des ponts, comme c'est le cas à Vancouver.
M. George Radwanski: Non, vous avez entièrement raison à ce sujet, en ce qui concerne les caméras pour la circulation qui ne visent pas les personnes derrière le volant et ne prennent pas leur photo, ou...
M. Chuck Cadman: Et que dire des «caméras d'intersection»? Plusieurs de ces caméras sont placées aux intersections afin d'identifier les véhicules qui brûlent un feu rouge.
M. George Radwanski: Cela soulève effectivement une question relativement à la protection de la vie privée mais ce n'est pas aussi grave que les caméras dans les rues. À vrai dire, cela ne pose pas vraiment un problème si les caméras sont utilisées pour saisir le numéro de plaque d'un véhicule qui brûle un feu rouge. De cette façon, le conducteur du véhicule n'est pas nécessairement identifié, ce qui constitue un des problèmes de la surveillance vidéo bien sûr, mais un problème d'un tout autre ordre. À moins qu'il ne soit utilisé pour un but autre que l'identification d'un véhicule qui brûle un feu rouge afin qu'une contravention soit émise, ce type de surveillance ne me pose aucun problème fondamental ou philosophique. Ce n'est pas la même chose si on nous observe pendant que nous vaquons à nos occupations sur la rue.
Lorsque des gens me disent «Oui mais c'est un endroit publique! On ne peut pas s'attendre à ce que nos droits à la vie privée soient les mêmes». Imaginez-vous en train de marcher dans la rue, ici à Ottawa par exemple, lorsqu'un policier décide de marcher directement derrière vous toute la journée. Il vous suit partout où que vous alliez, il ne vous importune pas, il ne vous adresse pas la parole, il ne fait que vous suivre et vous observer. Je crois que la plupart d'entre nous diraient qu'il s'agit d'une atteinte à la vie privée ou de harcèlement. Je ne vois pas la différence entre cela et une caméra qui permet de faire les mêmes observations en suivant nos moindres déplacements jusqu'à ce que nous soyons à la portée de la prochaine caméra, et surtout qu'il est impossible de voir le policier qui nous observe à distance. Je crois que ces deux exemples sont du même ordre, mais ils sont aussi très différents des autres types de caméras que vous avez décrits.
Le président: Merci beaucoup. Je crois que nous aurons l'occasion de revenir à vous.
Monsieur Grose, puisque vous êtes arrivé de bonne heure.
¿ (0920)
M. Ivan Grose (Oshawa, Lib.): En ce qui concerne la caméra d'intersection, c'est nous qui la déclenchons. Si nous ne brûlons pas le feu rouge, la caméra ne se met même pas en marche. Je ne vois donc pas du tout comment cela est-il semblable.
Pour ce qui est de l'utilité des caméras de surveillance, je suis scandalisé par la décision de la GRC d'utiliser des caméras en dépit de vos recommandations. Je ne comprends tout simplement pas. Ont-ils perdu les pédales? Et je parle en connaissance de cause car cela m'inquiète encore plus que les caméras de surveillance en question. Qu'ils continuent de les utiliser, sachant que vous n'aimez pas cela et que je n'aime pas cela, c'est là la clé du problème selon moi.
Je sais qu'il y a eu une prise de bec dans ma ville au sujet des caméras de surveillance dans les dépanneurs, mais nous ne sommes pas obligés d'aller dans ces dépanneurs. Nous devons cependant marcher dans la rue. Je le répète, je suis scandalisé par la décision de la GRC d'utiliser ces caméras. Pour ma part, je crois que le comité devrait se pencher sur la question.
M. George Radwanski: J'apprécie votre commentaire et j'ai besoin de votre aide; j'ai besoin de l'aide de la Chambre à ce sujet. En fait, de la façon dont le système est structuré, je n'ai aucun pouvoir décisionnel en tant que Commissaire à la protection de la vie privée. Mes prédécesseurs et moi avons toujours favorisé ce système parce qu'il n'est pas exagérément formaliste, et ce qui fonctionne le mieux c'est l'influence morale.
Nous savons tous que le Commissaire à la protection de la vie privée n'est que le porte-parole qui supervise, et dans certains cas, qui fournit des conseils et des recommandations au nom du Parlement sur ce qui doit être fait pour que les droits fondamentaux que le Parlement a choisi d'endosser soient respectés.
Le système risque carrément de s'effondrer si une institution importante du gouvernement, surtout une institution comme la GRC, peut tout simplement dire «c'est bon», comme le commissaire Zaccardelli l'a fait: «Merci pour vos recommandations concernant cette question importante... maintenant, laissez-nous faire ce que nous voulons.»
Le problème est grave lorsqu'une institution du gouvernement agit ainsi. Le problème est d'autant plus grave, et c'est pourquoi je dis que la situation est honteuse, lorsqu'il s'agit de la force nationale de police qui doit porter une attention toute particulière au respect de nos droits. J'ai parlé avec le commissaire Zaccardelli, je l'ai rencontré, je lui ai écrit, mais tout ce qu'on me laisse entendre c'est: «c'est votre opinion, tant mieux pour vous».
À part le fait de soulever la question au cours de différents forums, comme je l'ai fait, mon seul recours c'est de demander au Parlement de dire qu'il respecte le Parlement, qu'il est assujetti à l'autorité civile, et qu'on exerce cette autorité.
M. Ivan Grose: En dépit de cela, quel est votre degré de succès en général? Est-ce que les gens ou les organisations ou gouvernements vous écoutent et corrigent ce que vous considérez comme une violation?
M. George Radwanski: Il me fait plaisir de vous dire que mon niveau de succès a été excellent jusqu'ici.
Je peux vous donner quelques exemples récents. Ma plus grande réussite est probablement survenue lorsqu'il a été question du projet de loi C-36 contre le terrorisme. Je crois que certaines des dispositions du projet de loi comportaient des erreurs qui auraient pu abroger nos droits à la vie privée en rendant possible la présentation d'un certificat visant à suspendre l'exercice de cette loi. Avec l'aide du Parlement, j'ai été en mesure de persuader le ministre d'apporter tous les amendements que je proposais en vue de régler la situation définitivement. Lorsque j'ai remercié le ministre par la suite pour avoir respecté les droits à la vie privée, certaines personnes ont interprété ce geste comme une abdication de ma part. En fait, c'est le gouvernement qui a obtempéré. C'est un exemple.
L'autre exemple, et j'en ai parlé brièvement plus tôt, concerne l'ouverture de la correspondance. Il existe une pratique où les agents des douanes du Canada ouvrent une partie du courrier provenant de l'étranger à la demande de Citoyenneté et Immigration Canada. Ils cherchent de la marchandise de contrebande, des certificats falsifiés, des documents d'immigration, etc. Les enveloppes qui pèsent moins qu'un certain poids sont considérées comme des envois format lettre, et la loi interdit strictement l'ouverture de ces enveloppes sans un mandat. Je crois que les envois qui dépassent ce poids, 30 grammes, sont considérés comme des paquets et ils peuvent être ouverts. De nos jours, si on veut que nos envois se rendent à destination, on doit utiliser un service de messagerie. La grosse enveloppe dans laquelle on doit mettre la lettre fait passer le poids de votre envoi au-dessus de la limite et votre correspondance pouvait être ouverte à volonté.
J'en ai parlé à la ministre de la Citoyenneté et de l'Immigration, qui est en fait le client. Elle a dit: «c'est dans la loi, qu'il en soit ainsi». Je me suis ensuite présenté devant le ministre du Revenu national de l'époque, M. Cauchon. Je lui ai décrit le problème et tout fut réglé. Ils ont maintenant élaboré une nouvelle politique selon laquelle ils ne tiennent pas compte de l'emballage extérieur de l'envoi, c'est-à-dire les enveloppes des services de messagerie, afin de déterminer si le poids du contenu est inférieur ou non à la limite de poids pour les envois de format lettre.
Je pourrais vous citer une multitude d'exemples semblables.
Normalement—et heureusement car le travail n'en vaudrait pas la peine—lorsque le Commissaire à la protection de la vie privée publie ses résultats, que ce soit au sujet d'une enquête concernant une plainte ou parce qu'un problème a été porté à mon attention, l'institution gouvernementale réagit. Jusqu'ici, selon les circonstances, si le gouvernement ne réagissait pas, alors le commissaire demandait l'appui du public et le tollé qui en résultait forçait l'institution à réagir.
La GRC semble être indifférente aux clameurs de protestation ou à l'opinion du public, et cette situation est déplorable. Cela est particulièrement déplorable pour une autre raison qui devrait intéresser ce comité. À la suite des événements du 11 septembre, il était à prévoir que les forces policières, et plus particulièrement la GRC qui représente une force de police nationale avec certaines responsabilités en matière de sécurité, se devraient de suivre un plan d'action moins respectueux de la protection de la vie privée qu'auparavant. Le projet de loi C-36 fait partie intégrante du processus qui vise à reconnaître cette situation. Et cela est compréhensible. Dans une société démocratique, la protection de la vie privée doit parfois être sacrifiée en faveur de la sécurité. Mais il est particulièrement important, dans de telles circonstances, que les Canadiens puissent s'attendre à ce que les agents de la GRC se comportent de manière à respecter, dans la mesure la plus humainement possible et peu importe l'endroit, les droits fondamentaux de la personne, y compris le droit au respect de la vie privée.
Ce qui veut dire que dans une situation où une caméra est installée à la demande du maire d'une ville, comme ce fut le cas à Kelowna, et qu'un haut fonctionnaire fédéral dit: arrêtez! la GRC devrait profiter de l'occasion pour dire bien sûr que nous voulons respecter vos droits et que nous tiendrons compte des recommandations qui seront faites. S'ils font le contraire, ils envoient le mauvais message à la population.
¿ (0930)
Le président: Merci beaucoup.
La parole est à Peter MacKay pour sept minutes.
M. Peter MacKay (Pictou--Antigonish--Guysborough, PC/RD): Bonjour. Il me fait plaisir de vous revoir monsieur Radwanski. Je m'excuse du retard.
Vous connaissez sûrement la décision Dagg c. Canada, notre ministre des Finances. Votre bureau et votre prédécesseur ont grandement participé à cette décision.
Il y a eu plusieurs autres cas récemment où toute la question concernant la protection de la vie privée a été remise en cause. Je parle bien sûr de la décision du président du Conseil du Trésor visant à empêcher la divulgation de renseignements concernant les reçus des cartes de crédit des ministres et des hauts fonctionnaires au sein des ministères.
Je comprends qu'on empiète sur la ligne parfois imperceptible entre le commissaire à l'information et le commissaire à la protection de la vie privée pour déterminer quels droits ont été abrogés, mais je me demande si vous pourriez commenter cette décision, parce qu'il me semble, et je crois que c'est aussi le cas de bien des Canadiens, que le caractère gênant des renseignements ne constitue pas un critère qui devrait s'appliquer lorsqu'il est question de la protection de la vie privée des ministres ou des hauts fonctionnaires. Ces renseignements étaient anciennement disponibles en vertu de la Loi sur l'accès à l'information. Je crois que cette information est fondamentale au respect de la démocratie gouvernementale—c'est-à-dire, pour vérifier si les fonds publiques ont été dépensés adéquatement.
Il me semble que ces relevés de cartes de crédit sont essentiels pour vérifier si les dépenses sont légitimes ou non, surtout lorsque les dépenses dépassent l'objectif fixé. Il y a malheureusement plusieurs exemples où des ministres ont pris des décisions inappropriées ou intempestives concernant l'utilisation de ces cartes de crédit.
Je me demande donc si vous voulez émettre un commentaire, ou si en fait cette décision, qui constituait l'opinion dissidente d'un juge de la Cour suprême plutôt qu'une décision majoritaire...
M. George Radwanski: Vous avez parlé de la ligne imperceptible entre le commissaires à la protection de la vie privée et le commissaire à l'information. Cette ligne n'est pas imperceptible, elle est, au contraire, très évidente. C'est même un ligne statutaire. Mon mandat, ma responsabilité, consiste à protéger la vie privée; ce qui veut dire que je dois m'imposer lorsqu'il y a un risque de violation de la vie privée, c.-à-d. lorsque des renseignements pourraient être ou ont été recueillis, utilisés ou divulgués de façon inconvenante.
Ce n'est pas mon rôle de demander que des renseignements personnels soient divulgués à une tierce partie. Ce rôle, celui de défendre les intérêts de la divulgation de l'information, revient à mon collègue, le commissaire à l'information. Il n'y a donc pas vraiment de contradiction en ce moment et nous pouvons, mon bureau et moi, intervenir en exprimant notre opinion ou en fournissant une interprétation de la situation. C'est notre position en ce moment.
Je comprends très bien le point que vous avez apporté, et c'est certainement un point que vous pourriez présenter au commissaire à l'information. Normalement, je dois m'imposer seulement s'il y a un risque que des renseignements personnels soient divulgués, et non s'ils sont dissimulés.
M. Peter MacKay: Je comprends.
Vous n'êtes donc pas en mesure de commenter publiquement la pertinence de cette décision stratégique, je suppose, et il s'agit d'une décision essentiellement de nature interne plutôt que de nature législative.
M. George Radwanski: C'est exact, tout simplement parce que ce n'est pas mon rôle, et j'espère que vous et votre chef ne me demanderez pas encore une fois quelles ont été les raisons qui m'ont incité à ne pas émettre de commentaire, puisque ma ligne de conduite, en ce moment comme dans le passé, est dictée par ma responsabilité, en tant que commissaire à la protection de la vie privée, à exercer mes fonctions en vertu de la Loi sur la protection de la vie privée. Mais je ne voudrais pas être mal compris.
M. Peter MacKay: On ne peut jamais savoir quelles questions seront posées. Ce n'est pas moi qui décide quelles questions M. Clark doit ou ne doit pas demander.
De façon similaire, je suppose que vous ne voudriez pas faire une déclaration au sujet du dossier courant du commissaire à l'information concernant la divulgation des renseignements sur le calendrier du Cabinet du Premier ministre. Cela ferait partie de la même catégorie.
¿ (0935)
M. George Radwanski: Non. Il y avait une différence. J'étais intervenu pour une raison bien précise. Comme je l'ai expliqué publiquement, je devais aller en cour et conséquemment prendre une position qui aurait pu avoir des répercussions sur mon bureau aussi, parce que la question portait sur nos pouvoirs similaires d'investigation.
J'étais préoccupé parce que la question avait été soulevée au sujet d'un dossier où d'autres éléments du dossier pouvaient réduire nos pouvoirs d'investigation, y compris le fait que les renseignements seraient considérés comme des renseignements personnels inconsultables et que la cour aurait pu tirer une conclusion basée sur cette raison. J'ai cru bon et nécessaire d'intervenir à ce moment afin d'insister pour que la question ne soit pas débattue au cours de cette instance, parce que le processus pourrait aussi avoir des répercussions sur mon bureau. C'était complètement différent de la situation actuelle où mon bureau n'est pas concerné du tout. Les situations ne sont pas du tout semblables.
M. Peter MacKay: Lorsqu'un dossier comme celui qui concerne l'ordre du jour et l'horaire du premier ministre est présenté en cour, croyez-vous que votre bureau devrait appuyer une cause ou s'y joindre lorsque cette cause pourrait avec des répercussions sur la juridiction ou sur les pouvoirs de votre bureau par exemple.
M. George Radwanski: En général, lorsque la sphère de mes fonctions me permet d'intervenir et que je crois que mon intervention serait appropriée, je n'hésite pas à la faire, comme vous le savez. Lorsque je ressent qu'il n'est pas approprié pour moi d'intervenir parce que le dossier ne concerne pas une question sur laquelle je peux émettre un commentaire à ce moment, ou parce que mon intervention pourrait nuire au processus, ou parce que le dossier n'en est pas à une étape où une intervention optimale peut être entendue, alors je n'interviens pas. Je crois que cela fait partie des fonctions de l'ombudsman. Votre rôle consiste à prendre ce genre de décisions.
M. Peter MacKay: Cas par cas, les décisions qui sont prises affectent le pouvoir de votre bureau.
M. George Radwanski: Exactement.
M. Andy Scott: Merci beaucoup messieurs MacKay et Radwanski.
Monsieur Sorenson, vous avez trois minutes.
M. Kevin Sorenson (Crowfoot, Alliance canadienne): J'aimerais ajouter que votre présence ici aujourd'hui est grandement appréciée. Il est bon de savoir qu'il y a quelqu'un qui voit à la protection de nos droits à la vie privée et à la liberté.
Pour ce qui est de la questions concernant les caméras dans les rues, je ne crois pas qu'il y ait atteinte aux droits à la vie privée d'une personne lorsque celle-ci marche dans une rue publique. Dans certains cas, l'utilisation de caméras est nécessaire. Nous pouvons nous attendre à ce que nos droits à la vie privée soient respectés dans l'intimité de notre foyer et sur notre propriété. Je ne crois pas que cela s'applique lorsque nous marchons dans la rue.
Un des commentaires faits par l'opposition concernait la GRC. Ont-ils perdu les pédales? Je donne toujours le bénéfice du doute à la GRC. Je ne crois pas qu'ils m'ont souvent laissé tombé.
Peut-être que c'est le gouvernement qui a perdu les pédales en négligeant la sécurité de notre pays à ce point. Il y a 2 200 agents de la GRC de moins au Canada en raison, entre autre, de l'attrition que pendant la fin des années 80 et le début des années 90. C'est le crime organisé qui a progressé depuis un certain temps.
Au cours de nos assemblées nous avons parlé de la lutte contre le crime organisé, de la menace que représentent le crime organisé et les drogues, et de tout ce qui concerne le crime organisé. J'ai vraiment compris ce qui se passait pendant que les assemblées de ce comité.
Je ne crois pas que la GRC a perdu les pédales. Je crois que le crime organisé progresse. Certains individus sont même venu nous dire que les criminels disposent d'une quantité illimité d'argent et de ressources financières, tandis que nos ressources sont très limitées.
Je ne crois pas que les agents de la GRC essaient de trouver des stratégies afin de s'immiscer dans notre vie privée en installant systématiquement des caméras sans raison. Vous savez qu'il y a sûrement une raison justifiable. Ce n'est qu'un commentaire.
Je ne suis pas au courant de ce qui ce passe à Kelowna. Y a-t-il un problème de drogue? S'agirait-il d'un problème occasionné par le trop grand nombre de touristes, ce qui entraînerait une augmentation du crime organisé et un manque de ressources pour remédier au problème, et qu'un moyen simple d'assurer la paix et de combattre le crime serait d'installer des caméras?
Le président: Merci monsieur Sorenson. Vous avez eu trois minutes.
Monsieur Radwanski.
M. George Radwanski: Je répondrai d'abord à votre première question, qui est une question très légitime, concernant notre droit à la vie privée dans les endroits publiques, dans la rue. Cette question est très importante. Ma réponse est Oui. Il y a différents niveaux d'intimité auxquels nous avons droit évidemment. Nous nous attendons à ce que notre vie privée soit beaucoup plus respectée lorsque nous sommes dans notre demeure bien sûr, mais nous ne devrions pas avoir à renoncer à notre droit fondamental à la vie privée lorsque nous traversons le seuil de notre porte.
Laissez-moi m'expliquer. Si vous vous trouvez dans une rue publique et que vous parlez à un ami au moyen de votre téléphone portable, vous pouvez vous attendre à ce que les passants entendent une partie de votre conversation et s'aperçoivent que vous êtes au téléphone. Mais si quelqu'un s'arrête tout près de vous pour écouter délibérément tout ce que vous dites, je pense que vous seriez d'accord pour dire que cette personne empiète sur votre vie privée. Vous diriez probablement quelque chose comme, pardon mais... pouvez-vous vous mêler de vos affaires! Du moins, vous seriez offensé par ce comportement.
De façon similaire, si vous vous assoyez sur un banc dans un parc publique pour lire une lettre, vous pouvez vous attendre à ce que les passants s'aperçoivent que vous êtes assis sur un banc de parc en train de lire ce qui semble être une lettre. Mais si quelqu'un s'assoit juste à côté de vous et commence à lire délibérément votre lettre en regardant par dessus votre épaule, ou si quelqu'un utilise une caméra vidéo pour zoomer sur votre lettre et y lire le contenu...
¿ (0940)
M. Kevin Sorenson: Est-ce que c'est cela qui se passe?
M. George Radwanski: Non. Ce n'est pas ce que je voulais dire. Je répondais à votre questions concernant notre droit à la vie privée sur les rues publiques.
M. Kevin Sorenson: C'est poussé à l'extrême.
M. George Radwanski: Non, un principe est un principe. Nous avons droit à la vie privée d'abord et avant tout. Cela veut dire que nous avons le droit, selon moi, de ne pas nous faire observer systématiquement.
Et oui, c'est caméras sont dotées d'une fonction de zoom. Elles peuvent zoomer sur l'étiquette d'un paquet que vous transportez de façon à ce qu'il soit bien visible. Cette fonction a été démontrée à mon enquêteur.
M. Kevin Sorenson: Mais ils peuvent le faire dans n'importe quel dépanneur ou institution bancaire.
Le président: Monsieur Sorenson, pour que nous puissions--
M. George Radwanski: C'est le premier point. Je sais que nous avons droit à un certain niveau de vie privée, même dans les endroits publiques. Vous n'êtes peut-être pas d'accord avec moi, c'est votre droit. C'est ce que moi j'en pense cependant et je crois que c'est aussi l'opinion de tout ceux qui se sont penchés sur la question des droits à la vie privée, qui, comme vous le savez, font partie des droits fondamentaux de la personne reconnus par les Nations Unies.
Pour ce qui est de la police, je ne comprends pas comment vous pouvez dire que si les policiers le font, c'est qu'ils doivent avoir une bonne raison.
M. Kevin Sorenson: [Inaudible—éditeur]
M. George Radwanski: Oui, mais nous avons fait une enquête, et nous leur avons demandé de nous prouver qu'il s'agit d'un outil efficace.
Par exemple, au moment de l'enquête, les caméras avaient été en opération depuis déjà huit mois, et j'ai demandé à la GRC--j'ai demandé moi-même au commissaire--de nous divulguer le nombre des arrestations qui ont été effectuées à l'aide des caméras.
Deuxièmement, je leur ai demandé de nous fournir des statistiques sur le nombre de crimes rapportés et sur le taux de criminalité observé pendant les huit mois où la caméra a été en opération pour les comparer aux statistiques pour les mêmes huit mois de l'année précédente.
Il s'agissait, semble-t-il, d'un projet pilote. Eh bien, ils n'ont même pas, ou ils disent ne pas avoir, ces statistiques.
Je leur ai donné le bénéfice du doute, et j'ai dit, expliquez-moi à quoi cela nous avance. Ensuite, je me suis enquis auprès des plus grands spécialistes en la matière; mon bureau a même communiqué avec les plus grands experts du monde entier pour se renseigner sur la surveillance vidéo. Est-ce que cela réduit le taux de criminalité? Pouvons-nous jouir d'une sécurité accrue? La réponse est non.
Tout ce qu'on parvient à accomplir à l'aide des caméras, dans les meilleurs des cas, c'est de déplacer le crime de l'endroit où se trouve la caméra à un endroit où il n'y en a pas.
Prenez l'exemple des toxicomanes dans une communauté, l'installation de caméras ne les poussera pas au sevrage brutal pour ensuite qu'ils aillent boire un café au lait au Starbucks. Ils iront tout simplement faire leurs transactions ailleurs.
Il y avait un porte-parole... et si vous voulez leur donner le bénéfice du doute, voici quelque chose qui vous fera douter et pour lequel vous pourrez leur donner le bénéfice. Un porte-parole de la GRC a déclaré dans le Vancouver Sun l'été dernier que, oui, bien sûr que les caméras vidéo «ne font que déplacer le crime» plutôt que de le réduire, mais si nous installons assez de caméras vidéo dans le centre-ville de Kelowna--et il a vraiment dit ceci--le crime se déplacera vers les quartiers résidentiels, et les propriétaires de maisons dans ces quartiers sont plus aptes à appeler les forces policières lorsqu'un crime est commis.
Eh bien cette déclaration soulève plusieurs questions dans mon esprit en ce qui concerne l'approche préconisé par les forces policières.
Je dirai, pour terminer, que je n'ai rien contre les forces policières et que je sais qu'ils ont besoin de plus de ressources et d'effectifs. En fait, l'ennui c'est que la surveillance vidéo est maintenant perçue en Angleterre, si je peux me permettre de conclure ainsi--j'arrêterai ensuite monsieur le président--comme une solution bon marché. Vous mettez des caméras dans les rues au lieu de policiers en patrouille, et bien sûr la caméra ne peut pas sauter en bas de sa perche et arrêter un crime en cours ou vous sauver la vie si on vous agresse, etc. C'est choses là se passent en un clin d'oeil.
Le président: J'aimerais rappeler à tous que les règles sont encore en vigueur. Je crois que tout le monde aura amplement le temps de s'exprimer, mais je ne tiens pas à ce que nous adoptions des nouvelles manies lorsque nous somme très occupés.
La parole est à monsieur Maloney pour trois minutes, et cela comprend l'intervention et la réponse.
Monsieur MacKay est toujours la victime dans cette situation parce qu'il est assis près des témoins, il a donc pris l'habitude de leur parler--et c'est cette proximité, j'en suis sûr, et non le manque de respect de monsieur MacKay envers le président, qui déclenche le dialogue. J'interromprai alors toute personne, sauf le témoin, qui continuera à parler lorsque son temps sera écoulé, car nous savons tous combien de temps nous avons pour parler. Je demanderais aussi à monsieur Radwanski d'être le plus concis possible dans ses réponses pour que nous puissions progresser plus rapidement.
Monsieur Maloney, vous avez trois minutes.
¿ (0945)
M. John Maloney (Erie--Lincoln, Lib.): Vous avez mentionné que la police de Kelowna n'a pas amassé les statistiques nécessaires pour pouvoir déterminer si les caméras réduisent ou non le crime. S'ils parvenaient à le prouver, changeriez-vous votre position.
M. George Radwanski: Il serait intéressant de voir cela d'abord. Selon la position qu'ils ont adoptée, les caméras contribueraient à réduire le crime. J'aimerais pouvoir analyser le principe sur lequel ils ont fondé cette déclaration. Et si c'est le cas, il serait très intéressant de se pencher sur la question car cela ferait de Kelowna une ville différente de toutes les autres communautés où l'expérience a été tentée auparavant.
M. John Maloney: J'aimerais changer le sujet. Le dernier ministre de la Justice a annoncé une révision de la Loi sur la protection de la vie privée. Est-ce qu'on vous a consulté dans le cadre de cette révision?
M. George Radwanski: La révision n'est pas très avancée, si on la compare à la révision de la Loi sur la protection des renseignements personnels, pour plusieurs raisons. D'abord, puisque le commissaire doit contribuer substantiellement à cette révision, j'ai indiqué au dernier ministre que je n'étais pas assez familier avec le poste en ce moment pour bien connaître les atouts et les faiblesses de la loi et pour décider des améliorations qui devront être apportées. Je préfère acquérir plus d'expérience avant de m'attaquer à cela.
Deuxièmement, comme vous le savez, la nouvelle loi pour le secteur privé, la Loi sur la protection des renseignements personnels et les documents électroniques, est entrée en vigueur le 1er janvier de l'an dernier. En raison de sa mise en application progressive, nous commençons à peine à connaître cette nouvelle législation. Et bien sûr elle présente plusieurs points en commun avec la Loi sur la protection de la vie privée, surtout en ce qui concerne les responsabilités du commissaire à la protection de la vie privée et les exigences en matière de temps, de ressources et tout.
Alors, de nouveau, je suggère qu'il serait plus pratique d'attendre un peu pour que nous puissions acquérir l'expérience nécessaire afin de savoir quels sont les différences entre cette législation et la Loi sur la protection de la vie privée, et si ces différences contribuent à améliorer on non la législation, puis effectuer la révision par la suite.
M. John Maloney: Pouvez vous nous indiquer combien de temps cela prendra-t-il?
M. George Radwanski: Non, la situation n'est pas urgente selon moi, parce que, très franchement, je n'ai pas trouvé beaucoup de problèmes avec la loi actuelle. Manifestement, si le gouvernement veut réviser les modifications apportées, c'est son droit, mais de mon point de vue, la situation n'est pas urgente en ce qui concerne des problèmes qui devraient êtres réglés.
M. John Maloney: Merci.
M. Andy Scott: Merci, monsieur Maloney.
La parole est à Peter MacKay pour trois minutes.
M. Peter MacKay: Merci, monsieur le président, j'essaierai de respecter cette limite de temps.
Ce sujet est fascinant, comme vous le savez sûrement, et vous en avez parlé de façon détaillée dans votre rapport. Je ne veux pas vous accuser de tenir un discours rhétorique, mais les mots que vous avez choisis sont très forts. Par exemple, à la page 17 de votre rapport vous dites, et je cite:
Le niveau et la qualité de la vie privée dans notre pays risquent de subir une atteinte paralysante et irréparable si nous nous permettons d'être assujettis à une surveillance constante et implacable par la lentille des caméras vidéo de plus en plus nombreuses contrôlées par la police et les autres agents de l'État. |
Toutefois, le Projet de loi C-36, que vous avez mentionné et dont vous avez fait l'éloge plus tôt pendant votre témoignage, n'accorde-t-il pas aux forces policières un pouvoir accru, bien que cela soit fait au moyen de mandats ou de pouvoirs judiciaires accrus, ce qui revient presque au même? Nous agrandissons la sphère des pouvoirs des forces policières en préconisant non seulement la surveillance, mais aussi les arrestations sans mandat, et en leur laissant mener des audiences d'enquête.
Je vous demanderais donc d'élaborer à ce sujet.
Une question intéressant m'est venue en tête concernant l'utilisation de caméras que nous ne contrôlons pas, c.-à-d. des caméras installées dans des endroits publiques qui sont en effet comparables à des placebos. Quelle serait votre position là-dessus? Des caméras factices pour les imbéciles qui pourraient penser qu'on les observe lorsqu'en fait on ne les observe pas du tout. Est-ce que cela constituerait une violation des droits à la vie privée des individus?
¿ (0950)
M. George Radwanski: Qui serait l'imbécile dans ce scénario, nous pourrions élaborer là-dessus.
M. Peter MacKay: Peut-être est-ce moi pour avoir posé la question.
M. George Radwanski: Je ne voulais pas dire vous, mais peut-être que ce sont les forces de l'ordre, si elles croient que c'est une bonne chose à faire. Mais j'y reviendrai.
Laissez-moi répondre à votre première question d'abord. Je vous remercie de ne pas m'avoir accusé de tenir un discours rhétorique; je l'apprécie beaucoup. J'espère aussi que vous ne m'accuserez pas d'avoir fait l'éloge d'une législation dont je n'ai pas fait l'éloge et que je n'ai pas proscrite non plus. J'ai cependant fait l'éloge du ministre pour la façon avec laquelle il a réglé certaines dispositions qui auraient pu porter atteinte à nos droits à la vie privée, et qui, je l'espère, avaient tout d'abord été incluses par inadvertance.
Pour ce qui est du reste de la loi, je répète que mon mandat ne concerne que de la protection de la vie privée. Plusieurs des dispositions de cette législation m'intéressent en tant que citoyen. Elles intéressent certainement aussi les défenseurs des libertés civiles. J'utilise cette formulation afin de rester neutre.
Mais, puisque mon mandat ne concerne que la protection de la vie privée, je ne peux pas me permettre d'émettre des commentaires qui ne concernent pas la protection de la vie privée. J'ai dit que la protection de la vie privée n'était pas un droit absolu; cependant, toute violation ou restriction de la vie privée, pour des raisons de sécurité par exemple, doit satisfaire quatre exigences essentielles.
D'abord, il doit être démontré que cette violation est indispensable à la résolution d'un problème spécifique. Deuxièmement, il doit être démontré que le problème peut être réglé efficacement de cette façon. Troisièmement, les conséquences de la violation doivent être proportionnelles à l'avantage collectif qui en découlera. Et quatrièmement, il ne doit pas y avoir d'autres solutions qui porteraient moins atteinte à la protection de la vie privée.
M. Peter MacKay: Tout compte fait, il s'agit d'exigences d'admissibilité.
M. George Radwanski: Exact.
J'ai constaté que les éléments du projet de loi C-36 qui traitent de la protection de la vie privée, tels que les changements en ce qui concerne l'écoute électronique, satisferaient aux exigences; donc je ne m'oppose pas à ceux-ci.
Je ne crois pas qu'il y ait de conclusions à tirer des circonstances entourant la présence de caméras dans les rues publiques, ce dont j'ai parlé en fonction du contexte en question, en fait. Je serais heureux de vous envoyer une copie de l'exposé que j'ai donné à Vancouver, où j'ai mis en application les mêmes exigences pour la surveillance vidéo dans les rues publiques et où aucune des exigences n'ont été satisfaites. Je crois donc que notre position est cohérente.
Pour ce que vous appelez de la rhétorique, je m'en excuse, j'utilise parfois un langage emphatique parce que je dois parler de sujets sérieux. Dans les circonstances actuelles, cela ne peux pas être qualifié de rhétorique; il s'agit d'un fait qui aura des répercussions si nous suivons cette voie. Très franchement, si vous voulez appeler cela de la rhétorique, alors cette rhétorique n'est pas très différente de la rhétorique utilisée par la cour Suprême. Donc, nous sommes tous des rhétoriciens dans ce monde.
M. Peter MacKay: Si vous vous rappelez bien j'ai dit que ce n'était pas de la rhétorique.
Le président: La parole est à John McKay pour trois minutes.
M. John McKay (Scarborough-Est, Lib.): Merci, monsieur le président.
J'aime bien l'analogie que vous avez faite entre une caméra et un policier passif qui vous suit dans la rue. C'est une analogie intéressante. J'ai voyagé en Russie où j'ai été suivi, en tant que touriste, et j'ai donc une appréciation nouvelle de cette analogie. Je crois que c'est très approprié.
Ce qui m'amène à la question suivante, pensez-vous que votre mandat comporte un vide juridique? J'aime bien la question concernant la persuasion morale et le succès que vous avez eu avec le projet de loi C-36--j'aimerais croire que cela a été rendu possible grâce a un de vos forums, et ce comité est peut-être un peu responsable du succès de vos présentations--et dans d'autres domaines, au sujet de l'ouverture de la correspondance et des choses de cette nature.
Mais cela me semble un peu pathétique--je n'utilise pas le bon terme ici ou je mets un peu trop d'emphase--que le commissaire à la protection de la vie privée doive faire appel au Parlement pour persuader la GRC que ce genre d'activité représente une violation considérable de la vie privée.
Alors, est-ce qu'il y a un certain vide juridique dont vous aimeriez parler.
Ma deuxième question porte sur le registre des délinquants sexuels, que mes amis de l'opposition semblent affriander. Ce problème soulève un bon nombre de questions concernant la protection de la vie privée, et j'aimerais entendre vos commentaires à ce sujet. Il semble qu'avec la coopération des provinces, le champ d'action du CIPC sera modifié et les renseignements seront diffusés dans la communauté. Il s'agit ici de renseignements sensibles et personnels concernant un délinquant dont la sentence sera terminée ou qui aura eu droit à une réduction de peine légale.
Quel est votre point de vue en ce qui concerne la communication de ces renseignements à la communauté et qui devraient en être les destinataires? Pouvez-vous nous donner une opinion éclairée à ce sujet?
¿ (0955)
M. George Radwanski: Merci. Pour ce qui est de la question concernant mes pouvoirs, il existe un modèle. Les hauts-commissaires ont le pouvoir de donner des ordres. Cela ne fonctionne pas trop mal. Je ne sais pas si, dans l'ensemble, cela fonctionnerait mieux. Le problème c'est qu'il faudrait d'abord beaucoup plus de lignes directrices détaillées et de règles explicites. Cela rendrait le processus beaucoup plus rigide et contribuerait à la création de règles de droit immuable, et cela demanderait l'engagement d'avocats de toutes les régions. Le processus serait beaucoup plus officiel, ce qui représenterait une plus grande absorption de temps et des litiges beaucoup plus complexes qui ne se résorberaient jamais.
Jusqu'ici, cela a fonctionné. Pour être franc avec vous, je ne vois pas cela... je veux dire, c'est pathétique--j'ai dit honteux; le terme pathétique est peut-être trop faible--que la GRC ne veule pas respecter la recommandation d'un haut fonctionnaire fédéral du Parlement. Mais lorsque je demande de l'aide au Parlement, je ne crois pas que cela est pathétique, c'est plutôt élégant de ma part.
Le Parlement représente la population canadienne. Les hauts fonctionnaires du Parlement sont les porte-parole du Parlement. Vous, en tant que membres du Parlement, avez un rôle important à jouer en ce qui a trait à ce sujet, soit en soulevant la question en caucus et en demandant l'aide du solliciteur général, lorsqu'il s'agit du parti au pouvoir, soit en protestant à la Chambre des communes. Nous verrons ce qui se passera.
Franchement, avant que je ne détermine si mes pouvoirs doivent être modifiés... C'est en quelque sorte une expérience. Je ne crois pas que mes prédécesseurs l'ont fait. Ce que je dis c'est «je suis un haut fonctionnaire du Parlement et vous êtes le Parlement. Nous avons un problème. Travaillons ensemble pour que tous respectent l'esprit et l'intention des lois que le Parlement a adoptées.» J'observerai avec attention ce qui se passera. J'aime mieux croire qu'ensemble nous pourrons atteindre le résultat que toute cette approche devrait atteindre.
Concernant votre deuxième question qui a trait aux délinquants sexuels, à vrai dire, je n'ai pas étudié la question en détail parce qu'elle ne nous a pas été confiée. Je ne voudrais pas créer un climat de rejet publique ou de dénonciation, où certains individus d'une communauté sont étiquetés pour quelque raison que ce soit, y compris le fait que la marginalisation des délinquants sexuels ne donne pas nécessairement les meilleurs résultats. Les droits concernant la protection de la vie privée s'appliquent en général à tous les Canadiens.
Ceci dit, toute disposition devra satisfaire les exigences dont j'ai parlé en réponse à une question précédente. Bien sûr, nous devons élaborer notre approche concernant la protection de la vie privée en considération de la sécurité des autres, des enfant en particulier. C'est une question d'équilibre et je devrai examiner une proposition en détail. Il me fera plaisir de vous donner mon opinion de façon détaillée à ce sujet, mais je ne voudrais pas trop m'attarder là-dessus aujourd'hui.
Le président: Merci, monsieur McKay.
Monsieur Cadman, vous avez trois minutes.
M. Chuck Cadman: Monsieur Radwanski, j'aimerais avoir votre opinion concernant la protection de la vie privée en milieu de travail, c.-à-d. la surveillance des lieux de travail, comme par exemple, la surveillance des courriels, la surveillance de l'utilisation d'Internet, et la surveillance vidéo parfois nécessaire en milieu de travail. J'aimerais avoir votre point de vue général sur ces questions, à savoir si ces démarches sont appropriées ou non, et dans quelles circonstances.
À (1000)
M. George Radwanski: Bien sûr, j'en ai déjà parlé. J'ai même présenté des exposés là-dessus en fait.
Fondamentalement, et contrairement à ce que certains employeurs pensent, nous ne perdons pas nos droits fondamentaux à la protection de la vie privée du moment que nous traversons le seuil de la porte de notre lieu de travail, pas plus que nous ne perdons nos autres droits fondamentaux de protection contre la discrimination, et ainsi de suite. Nous pouvons donc mettre en application--certainement dans la mesure où la nouvelle loi pour le secteur privé s'applique aux employeurs; ce qui est le cas pour certains secteurs et non pour d'autres--un test de personne raisonnable où, même avec un consentement--parce qu'il est effectivement possible d'obtenir le consentement forcé d'un employé en lui disant que s'il désire travailler ici, il devra renoncer à certains de ses droits à la protection de la vie privée--est-ce que des renseignements, divulgués par l'utilisateur, sont recueillis pour des motifs qu'une personne raisonnable considéreraient comme appropriés dans ces circonstances.
Cela veut dire, par exemple, que selon moi un employeur n'a pas plus le droit de lire votre courriel ou de fouiller dans votre ordinateur qu'il n'a le droit de fouiller dans vos tiroirs de bureau en temps normal.
Le niveau de sécurité et de surveillance approprié pour un lieu de travail diffère selon la nature et la vulnérabilité du lieu de travail et c'est ici que le caractère raisonnable entre en ligne de compte. Par exemple, votre employeur pourrait d'autant plus vous demander de vider vos poches lorsque vous quittez le travail ou faire installer des caméras de surveillance si vous fabriquez de la monnaie pour la Monnaie royale canadienne, ou si vous travaillez dans une usine où l'on taille des diamants, que si vous travaillez pour une compagnie d'assurance.
On doit donc établir un test situationnel visant à déterminer le degré de sécurité et de surveillance approprié. Mais, en général, les gens ne travaillent pas au meilleur de leurs capacités lorsqu'ils sont continuellement observés. J'ai mentionné dans mes exposés, par exemple, que très peu d'employés sont en mesure d'exécuter leur meilleur travail lorsque leur patron se tient directement en face d'eux et qu'il observe chacun de leurs mouvements.
Encore une fois, la présence des caméras de surveillance vidéo en milieu de travail, si elles sont utilisées afin de s'assurer que les employés travaillent, ne constitue non seulement pas une bonne manière de respecter leurs droits, mais aussi une mauvaise manière de promouvoir un environnement de travail sain et productif.
C'est ma réponse en quelques lignes.
Le président: Merci beaucoup.
Monsieur Maloney.
M. John Maloney: Nous avons fait la comparaison aujourd'hui entre une personne qui se promène dans la rue avec un téléphone cellulaire dans sa main et une personne qui se promène dans la rue avec un téléphone dans sa main alors que quelqu'un le suit et écoute tout ce qu'il dit. Je crois qu'il existe des appareils électroniques qui peuvent en fait capter les communications par téléphone cellulaire. Quelqu'un pourrait, par inadvertance ou délibérément, laisser sont téléphone en marche pendant une réunion et on pourrait entendre tout ce qui se dit pendant cette réunion.
Est-ce que cela pourrait causer un problème? et devrions-nous y faire quelque chose?
M. George Radwanski: Je crois que les gens devraient se méfier dans de telles circonstances. Il y a plusieurs choses qui se font, qu'elles soient légales ou non, qui sont certainement inappropriées lorsqu'il s'agit de personnes qui s'espionnent.
Je parle donc ici de la police, bien sûr. Si des policiers veulent faire l'écoute d'une de vos conversations ou poser un dispositif d'écoute clandestine sur votre téléphone, ils doivent obtenir un mandat. S'ils veulent fouiller votre demeure, ils doivent obtenir un mandat. Ils sont obligés d'obtenir un mandat.
Considérez-vous comme une lacune de notre système judiciaire l'absence d'exigences semblables dans les situation où les policiers veulent vous observer délibérément au moyen d'une caméra lorsque vous vous promenez dans la rue? Je crois que ma question est légitime.
M. John Maloney: Je ne parlais pas des caméras.
Je parlais de quelqu'un qui surveillerait mon téléphone cellulaire, votre téléphone cellulaire ou n'importe quel téléphone cellulaire, peut-être pour faire de l'espionnage industriel, écouter des réunions confidentielles en cours. Cette personne pourrait être intéressée par ce qui se dit. Devrions-nous nous préoccuper de cela? Vous faites un parallèle avec des policiers qui devraient obtenir un mandat pour faire la même chose.
M. George Radwanski: Nous devons certainement nous en préoccuper lorsqu'il s'agit d'une atteinte à la vie privée. Si deux personnes s'espionnent entre elles, cela ne relève pas de la Loi sur la protection de la vie privée, qui régit les institutions du gouvernement fédéral, ou de la loi du secteur privé, qui régit les entreprises commerciales du secteur privé. Cela ne concerne pas du tout le commissaire fédéral à la protection de la vie privée.
Est-ce que je suis contre l'écoute clandestine des conversations personnelles? Absolument. Est-ce que je peux y faire quelque chose? Non, je ne peux pas, mais cela me préoccupe. Si un fonctionnaire fédéral... Supposons qu'une banque recueille des renseignements sur des individus de cette façon, par exemple, en interceptant des conversations. Je ne dis pas qu'il y a des banques qui le font, mais si tel était le cas, cela relèverait de ma juridiction et j'aurais sûrement l'occasion de me pencher sur la question.
Pour ce qui est du reste, je ne crois pas qu'il y ait un nombre grandissant de personnes qui s'espionnent de cette façon, c.-à-d. en interceptant des appels. Il est plus difficile de le faire avec les téléphones numériques qu'avec les anciens téléphones analogiques, mais cela n'est pas hors du possible.
Permettez-moi cette digression, nous avons appris qu'un petit génie a mis sur pied un site Web où il utilise un scanner pour intercepter des appels faits au moyen d'un téléphone cellulaire--c'était des téléphones analogiques bien sûr--et les divulguer sur son site Web en temps réel. Je ne sais pas si le crédit nous revient ou non, mais nous avons communiqué avec le fournisseur de service Internet et le site de cette personne a été démantelé sur-le-champ.
Il y a plusieurs choses bizarres qui se passent et qui me préoccupent. Parfois, même lorsque cela ne fait pas partie de ma juridiction, si je découvre un abus flagrant, j'essaie de faire ce que je peux, que ce soit en informant le public, en faisant sonner l'alarme, en attirant l'attention sur la question ou en mettant fin à cette activité.
À (1005)
Le président: Merci beaucoup, monsieur Maloney.
M. MacKay pour Pictou--Antigonish--Guysborough.
M. Peter MacKay: Merci, monsieur le président.
Je ne veux pas insinuer que la situation a atteint des proportions démesurées, mais je me demande si vous avez des commentaires à faire sur la prolifération ou l'émergence des entreprises de sécurité, des entreprises privées de sécurité, des détectives privés. Selon moi, il semble y avoir un nombre croissant d'entreprises de sécurité qui apparaissent, dû en partie aux événements du 11 septembre. Je crois qu'en général cette industrie connaît une croissance normale, que ce soit pour une personne qui tente de prendre en défaut un époux ou une épouse infidèle ou une compagnie qui engage une entreprise privée afin de surprendre un employé qui pige dans le tiroir-caisse.
Est-ce que le gouvernement fédéral devrait se pencher sur la question pour ce qui a trait à la législation fédérale. Si je comprends bien, il y a aussi un problème lié à la juridiction des provinces, concernant plus précisément l'octroi d'un permis aux détectives privés. Avez-vous songé à cela depuis que vous occupez votre nouveau poste?
M. George Radwanski: Pas en détail jusqu'ici. Il y aura sûrement des questions à régler lorsque nous arriverons en 2004, c.-à-d. lorsque la nouvelle loi du secteur privé s'appliquera à l'ensemble du secteur privé, sauf pour les provinces qui ont adoptées des lois semblables. Des questions seront soulevées en ce qui concerne les détectives privés, et j'ai commencé à y réfléchir. Nous étudions la question et nous avons fait des recherches à ce sujet, mais je ne peux pas vous donner de réponse claire en ce moment.
Pour ce qui est de votre question plus générale, la prolifération des entreprises de sécurité ne me préoccupe pas autant. Il n'y a rien de mal à travailler dans le domaine de la sécurité. Nous devrions plutôt examiner ce que ces entreprises font. Si une entreprise de sécurité doit surveiller les entrées d'un édifice, ou si elle doit s'assurer que personne ne laisse de colis suspects sur les lieux, qu'à cela ne tienne. Par contre si une entreprise porte atteinte à la vie privée des gens, alors la vraie question portera sur la protection de la vie privée et non sur l'existence de l'entreprise. Nous devons alors nous demander si ces entreprises violent la Loi sur la protection de la vie privée, si elles font affaire avec le fédéral ou avec une entité du gouvernement. Ces entreprises violent-elles la loi du secteur privé? Je crois qu'il serait important de s'attarder au comportement plutôt qu'à la prolifération de ces entreprises.
Je suis très conscient de l'accent qui a été mis sur la sécurité depuis les événements du 11 septembre, ce qui est très compréhensible. Il ne devrait pas y avoir de panique générale qui entraînerait certains employeurs ou entreprises à violer le droit à la vie privée de tous--paniquons et ne respectons plus aucune règle établie. Cela n'a pas de sens, et plus souvent qu'autrement, cela ne donne rien de bon.
Vous soulevez une bonne question, c'est une question que je garderai en tête.
Le président: J'allais attendre la fin de la déposition du témoin, mais je crois que je devrais porter à l'attention du comité qu'un comité précédent--la moitié du présent comité ne représentant que la moitié du comité des droits de la personne--avait entrepris une étude assez approfondie sur la question concernant la protection de la vie privée, en fonction de la technologie contemporaine. Il avait été question de surveillance, de procédures médicales non désirées, etc.
Certaines des questions qui ont été soulevées ont aussi été posées au cours de cet exercice. J'étais vice-président du comité des droits de la personne à cette époque--Mme Finestone était présidente--et je recommanderais à tous de lire le rapport. C'était au printemps de l'année 1996, je crois. Le rapport s'intitulait La vie privée: où se situe la frontière? Dieu merci pour la mémoire collective.
Plusieurs de ces questions ont été abordées, et je crois qu'il serait important à ce point, en réponse au premier rapport annuel du commissaire, que le comité examine de nouveau ce rapport.
Monsieur MacKay.
À (1010)
M. Peter MacKay: Monsieur le président, serait-il possible d'obtenir des copies de ce rapport? Est-il disponible à la bibliothèque du Parlement? Pouvons-nous y avoir accès?
Le président: Tous les membres du comité recevrons une copie du rapport. Je recommande à tous les membres de l'examiner soigneusement.
M. George Radwanski: J'encouragerais tous les membres du présent comité à passer en revue régulièrement toutes les questions, parce que même si les années 90 ne sont pas très loin derrière nous, plusieurs choses ont changé depuis. Comme je le mentionne dans ce rapport, les événements entourant la protection de la vie privée accélèrent tellement rapidement, avec l'avancement de la technologie et tout, qu'il serait très utile pour nous de nous maintenir au courant de tous ces développements.
Le président: Mon intervention sera déduite de vos trois minutes et la parole ira à monsieur Sorenson.
Je plaisantais, parce qu'il n'y a personne sur la liste.
Monsieur Sorenson.
M. Kevin Sorenson: Merci, monsieur le président. Il est bon de savoir que vous êtes neutre et juste dans cette affaire.
J'ai quatre questions brèves.
Premièrement, étant membre du Parlement, j'ai reçu quelques appels ces derniers jours concernant Statistique Canada qui loge des appels pendant l'heure du souper pour demander de l'information personnelle, et mes électeurs se demandaient s'il s'agissait bel et bien de Statistique Canada.
On ne cogne plus à notre porte de nos jours; on ne reçoit pas une lettre. On reçoit un appel. Ils se demandent, premièrement, si le comité pourrait se pencher sur la question en ce qui concerne la protection de la vie privée.
Deuxièmement, pendant la discussion au sujet de la GRC et de Kelowna, vous avez parlé de correspondance avec la GRC. Pourriez-vous soumettre à la discussion vos échanges avec la GRC, ainsi que vos résultats concernant le problème à Kelowna.
Ma troisième question est plutôt une déclaration... à bien y penser, ce sera une question.
Je sais que le bureau du commissaire existe depuis les années soixante-dix et quatre-vingt. Y a-t-il eu une intervention--et je suis sûr qu'il y en a eu une--lorsque nous avons traité du projet de loi C-68.
Je suis un propriétaire responsable d'armes à feu, et maintenant quelqu'un sait exactement combien d'armes à feu j'ai en ma possession. Il existe maintenant une liste qui indique qui, qu'il demeure sur cette rue ou sur ce chemin de campagne, possède des armes à feu. A-t-on pensé aux atteintes possibles à la vie privée à ce moment?
Je pourrais probablement obtenir la réponse de monsieur McKay ou de monsieur MacKay. Je ne suis pas un avocat.
Prenons l'exemple des policiers qui enquêtent sur un crime, un vol de banque qui s'est déroulé il y a dix ans par exemple, et qui placent un dispositif d'écoute électronique sur quelqu'un pendant un entretien--est-ce que cela vous inquiète? J'espère qu'ils obtiennent un mandat pour cela.
Ce sont les questions les plus importantes. Je peux m'informer auprès d'un avocat pour les autres questions.
M. George Radwanski: Monsieur le président, j'essaierai de répondre brièvement à chaque question. Comme vous l'avez dit, nous avons le temps. Un des avantages, avec des nombres réduits, c'est que nous avons plus de temps pour répondre à vos questions en profondeur.
En ce qui concerne Statistique Canada et les atteintes possibles à la vie privée, comme vous le savez, sauf pour ce qui est du recensement, personne n'est astreint à répondre à leurs questions. Je les ai encouragés à mettre cela bien au clair lorsqu'ils font des sondages, écrits ou verbaux, pour que les gens sachent que même s'il s'agit de Statistique Canada, ils ne sont pas obligés de répondre.
Le problème concernant les appels et l'identification de l'appelant n'a pas été porté à mon attention. Vous soulevez un point intéressant lorsque vous demandez comment pourrait-on confirmer qu'il s'agit bel et bien de Statistique Canada, bien qu'une partie de la réponse serait de dire que si les gens ne sont pas convaincus qu'il s'agit de Statistique canada, ils ne devraient pas répondre. J'entretiens des bons rapports avec le statisticien en chef, monsieur Fellegi, et je lui en parlerai aussitôt que possible.
Votre deuxième question, ou était-ce la troisième, concernait ma correspondance avec la GRC. En ce qui concerne Kelowna, le tout a commencé lorsque j'ai reçu une plainte officielle de la part du commissaire à la protection de la vie privée de la Colombie-Britannique au sujet de cette caméra qui constituait une atteinte à la vie privée. Il a fait cela parce que même si la GRC agissait au nom de la municipalité, le cas relevait quand même de la juridiction du fédéral. Le résumé de mes conclusions à ce sujet a été publié et je serais heureux de vous en remettre une copie. Il a aussi été envoyé au commissaire de la GRC ainsi qu'au plaignant.
Par la suite, mes échanges avec le commissaire se sont faits surtout verbalement. Je l'ai rencontré et je lui ai demandé de se conformer aux recommandations. Il m'a répondu par écrit pour me remercier d'avoir soulevé des points intéressants, mais que la GRC agirait comme bon lui semble. Dans cette lettre, il indiquait que la caméra s'avérait un outil très utile pour le maintien de l'ordre et la prévention du crime à Kelowna. Cela m'a incité à l'appeler pour lui demander de me donner les statistiques sur lesquelles ils s'étaient basés. Il s'agissait donc d'échanges purement verbaux, et c'est comme cela que je procède la plupart du temps.
Je serai très heureux de mettre mon résumé de conclusion à la disposition du comité.
L'autre question concernait l'utilisation de dispositifs d'écoute électroniques et ainsi de suite, un sujet complètement différent. Premièrement, bien sûr qu'il y a une jurisprudence pour déterminer ce qui est approprié et ce qui ne l'est pas. Deuxièmement, il y a une différence entre les opérations des policiers au cours d'une enquête particulière--et cela relève sûrement du responsable du programme--et l'examen ou la collecte de données au sujet de citoyens respectueux de la loi qui n'ont jamais été soupçonnés de quoi que ce soit auparavant et qui vaquent à leurs occupations, et c'est cela que la surveillance vidéo représente.
L'autre question est beaucoup plus restreinte. J'ai dit, même dans mes conclusions, qu'il y avait peut-être des circonstances où l'utilisation de la surveillance vidéo serait appropriée afin de surveiller certains suspects d'une manière restreinte dans le cadre d'une enquête spéciale. Mais cela est entièrement différent de la situation dont je parle, où j'estime qu'il est honteux que la GRC refuse de se conformer aux recommandations.
À (1015)
Le président: Merci.
M. Kevin Sorenson: Il y a une question à laquelle il n'a pas répondu.
M. George Radwanski: J'en ai oublié une?
M. Kevin Sorenson: Oui, celle au sujet des armes à feu. On a empiété sur mes droits à la vie privée en divulguant combien d'armes à feu j'avais chez-moi.
M. George Radwanski: En réponse à votre question, si je me rappelle bien--c'était avant que je n'occupe le poste--mon bureau avait participé activement à tout le processus. Nous avions mis de l'avant plusieurs recommandations dont quelques-unes avaient été considérées et un bon nombre d'entre elles avaient été rejetées. Puis nous avons fait la révision de l'opération du programme d'armes à feu, qui a été rendue publique l'an dernier. Je crois que c'était à la fin de l'été ou de l'automne. Nous avions aussi élaboré un bon nombre de recommandations supplémentaires. Jusqu'ici, à ma grande déception, je n'ai reçu aucune réponse officielle du ministère de la Justice à propos de ces recommandations.
M. Kevin Sorenson: Le rapport a-t-il été rendu publique?
M. George Radwanski: Oui.
Le président: Merci beaucoup.
La parole ira à John McKay pour trois minutes.
M. John McKay: Merci, monsieur le président.
Les journaux rapportent que des lecteurs biométriques qui identifient l'iris de l'oeil seront installées dans les aéroports sous peu. Je ne connais pas vraiment les conséquences possibles que représente l'utilisation de ces machines en ce qui concerne la protection de la vie privée, alors j'aimerais savoir quelles pourraient être ces conséquences et si vous avez été consulté à ce sujet.
Ma deuxième question porte sur l'utilisation abusive des numéros d'assurance social. J'aimerais savoir si vous pensez que le gouvernement a fait des progrès à ce sujet.
À (1020)
M. George Radwanski: La réponse à votre première question est oui, mon bureau a été mis au courant des derniers développements concernant la lecture rétinienne. Nous avons émis plusieurs commentaires au cours du processus. Selon ce que j'ai pu comprendre, dans l'état actuel des choses cela ne représente pas une atteinte importante à la vie privée puisque le procédé est volontaire. Si vous voulez un procédé rapide d'identification, vous pouvez en faire la demande, obtenir l'autorisation du service de sécurité, puis vous soumettre à l'identification rétinienne avant d'entrer.
Cela soulève quand même des questions essentielles, surtout en ce qui concerne la protection de l'information. Ce genre de procédé doit être supervisé. Mais il y a un problème plus important encore, la plupart du temps ces nouvelles procédures sont effectuées sur une base volontaire, puis elles deviennent de plus en plus difficile à éviter, pour ne pas dire obligatoires.
Je ne dis pas cela pour être pessimiste, mais prenons l'exemple des guichets automatiques. Ces guichets ont été conçus initialement pour offrir un service d'appoint aux clients. Toutefois, il est évident que si les banques peuvent réduire leur effectif de cette façon, elles pourraient tout aussi bien obliger leurs clients à faire la plupart de leurs transactions au moyen de ces guichets.
Pouvons-nous prendre un tel risque et permettre que la lecture rétinienne faite sur une base volontaire et restreinte prenne de l'ampleur, on nous dira ensuite que cela fait partie intégrante de notre passeport et que nous devons tous nous y soumettre, et que ceux qui ne s'y soumettront pas seront pénalisés? Cela m'inquiéterait beaucoup car le procédé est envahissant. Cela pourrait entraîner plusieurs formes d'abus.
Je ne suis pas préoccupé par ce qu'ils font à court terme, mais je serais très intéressé de savoir comment les choses vont se dérouler et quelles dispositions seront adoptées afin d'assurer...
La deuxième question, portant sur l'utilisation abusive des NAS, traite d'un sujet qui nous préoccupe depuis longtemps. Presque chaque mois nous apprenons que quelqu'un a tenté une expérience stupide avec son NAS. C'est une situation qui ne change pas.
Le gouvernement, en toute honnêteté, a bien essayé. Je ne me rappelle pas exactement quand cela s'est passé, mais il y a quelque temps, le Conseil du Trésor distribuait une mise à jour des lignes directrices qui rappelait aux gens que leur NAS ne pouvait être utilisé que pour certains services et spécifiait quels étaient ces services. Cependant, il y a toujours quelqu'un qui croit pouvoir utiliser son NAS pour d'autres motifs et qui divulgue son numéro à des gens qui ne devraient par être en possession de cette information.
Nous devons aussi nous assurer qu'il n'y aura pas de surprises à ce sujet, parce qu'il est très facile ensuite de dire qu'un programme ou un autre fonctionnerait mieux si on pouvait utiliser notre NAS. C'est quelque chose qui me préoccupe beaucoup, parce que les codes d'identification simples entraînent toutes sortes de risques.
Le président: Merci beaucoup monsieur McKay.
Peter MacKay, trois minutes.
M. Peter MacKay: Monsieur Radwanski, je vous conseille de ne pas le prendre personnellement lorsqu'un fonctionnaire vous dit: «Merci beaucoup de votre intérêt, mais nous allons faire à notre tête». Nous avons souvent le sentiment de recevoir cette réponse en tant que membres de l'opposition. C'est un sentiment très commun chez nous.
J'ai été très impressionné lorsque vous avez dit essentiellement que la balle était dans notre camp et que le Parlement devait s'impliquer davantage précisément dans ce type de débats et ce type d'exercices. Je suppose que je fais un commentaire plutôt que de poser une question. Je crois qu'il y a d'autres occasions où on pourrait en dire de même au sujet de divers débats publics qui impliqueraient le Parlement de façon beaucoup plus importante. Je suis donc encouragé par ce commentaire.
J'aimerais revenir sur le point dont John McKay a parlé au sujet des numéros d'assurance social et de leur but premier. Lorsqu'on a lancé ce programme, on a fait croire au public essentiellement que ces numéros allaient servir à un nombre très limité d'applications. Mais nous avons pu constater, comme vous l'avez laissé entendre, que ce nombre d'applications avait augmenté.
Je dirais qu'on a fait le même genre de promesses au public au sujet de la Loi sur les armes à feu. Je pense particulièrement aux discussions sur le fait qu'on entendait confier ce programme au secteur privé. Cette mesure vous empêcherait quelque peu de surveiller le programme et elle empêcherait les autres organismes gouvernementaux de s'assurer que cette information serait utilisée dans un but précis, et qu'elle serait protégée, ce qui est encore plus important. Comme M. Sorenson l'a dit, si cette information se trouve entre les mains de la mauvaise personne, ce sera très grave. Si une personne veut cibler un vol de biens--par exemple, un vol de fusils de grande valeur ou convoités par des criminels organisés--il lui sera très utile de connaître les propriétaires des fusils et les endroits où on les serre.
Vous a-t-on mis au courant de cette question? Est-ce un sujet qui vous inquiète? Des données très publiques comme l'enregistrement des armes à feu--opération continue et démesurée d'enregistrement d'informations, dont les coûts sont considérables et les bienfaits, peu nombreux--sont susceptibles d'être confiées au secteur privé.
À (1025)
M. George Radwanski: J'ai dit en effet que cette situation me préoccupait beaucoup. Il en est aussi question dans le rapport d'analyse des armes à feu auquel j'ai fait allusion plus tôt.
Le gouvernement a adopté la position selon laquelle il demeurerait responsable, peu importe les mesures administratives qui seront prises à l'égard du processus actuel, et il ne ferait absolument rien qui contreviendrait à la Loi sur la protection de la vie privée. Je trouverais assurément inadmissible le fait d'atténuer la responsabilité du gouvernement à l'égard de ce programme.
Je crains qu'il ne soit pas aussi facile d'assurer la sécurité dans les cas où le gouvernement n'est pas directement impliqué. J'ai exprimé ce souci. Je peux vous assurer que mon bureau demeurerait tout aussi vigilant si c'était le cas. Nous n'accepterions--et je n'accepterais--aucune réduction de notre capacité d'exercer une surveillance et de nous assurer du bon fonctionnement des opérations.
M. Peter MacKay: Croyez-vous que cela est possible si la responsabilité des opérations est confiée au secteur privé? Vous avez émis des réserves.
M. George Radwanski: Tout dépend de ce que l'on confie, de la manière dont on le fait, des mesures de sécurité que l'on adopte, de la surveillance générale et de la surveillance sur les lieux que le gouvernement exerce. C'est une question très pratique.
Je le répète, mes plus grands soucis ont trait à la façon dont le transfert se fera. S'il y a des difficultés, quelles seront les répercussions? J'espère rencontrer le nouveau ministre de la Justice sous peu pour lui faire part de mon point de vue et de mes soucis à ce sujet.
Je vais reprendre brièvement le sujet que vous avez abordé au début. J'étais très sérieux lorsque j'ai demandé que les membres du Parlement participent à ces discussions. Je serai particulièrement vigilant sur la question que nous traitons. Oui, je vous demande de prendre le relais. J'espère vraiment que vous le ferez.
Le président: Merci beaucoup.
Monsieur Bellehumeur, avez-vous une question?
[Français]
M. Michel Bellehumeur (Berthier--Montcalm, BQ): Non, je n'ai pas de questions.
[Traduction]
Le président: Monsieur Maloney, je vous accorde la dernière question.
M. John Maloney: Récemment, monsieur Kingsley, le Directeur général des élections, a précisé que si l'on permettait aux Canadiens de voter électroniquement par l'Internet, la participation électorale augmenterait considérablement. Ce commentaire me trouble. La protection de la vie privée n'est-elle pas en cause?
M. George Radwanski: Jusqu'ici, il n'en a parlé ni à moi ni à mon bureau. M. Kinsley exprime diverses idées, mais j'ai l'impression qu'il ne cherche pas tant à élaborer des politiques qu'à exprimer tout haut ce qu'il pense pour alimenter le débat.
J'émets certainement des réserves sur le vote électronique. Je n'ai pas étudié le sujet en profondeur puisque nous n'avons pas eu de proposition sérieuse en ce sens. Ce type de vote soulève toutes sortes de questions, non seulement sur la sécurité normale relative à l'utilisation de nombreux serveurs et autres questions de ce genre, mais également sur un sujet qui me trouble.
Lorsque les électeurs votent dans un isoloir, personne ne connaît leur choix. Mais s'ils votent au moyen d'un ordinateur à la maison, un certain nombre de personnes peuvent participer à l'opération, selon le type de maison habitée.
Par exemple, dans une maison où habite une personne très autoritaire, comment éviter que cette personne influence le vote des enfants de 18 ans et plus ou du conjoint? Je crois que le fait de permettre que l'on vote ailleurs que dans un isoloir, où l'on est obligatoirement seul, réduit la confidentialité du vote de façon inquiétante.
Je n'ai pas eu de proposition en ce sens. Je ne sais pas de quelle façon on traiterait ce type de problème et toutes les questions propres à la sécurité.
À (1030)
Je n'ai pas l'impression qu'il s'agit d'une procédure de vote pour laquelle notre société a un besoin criant, compte tenu des questions de confidentialité qui entrent en jeu. D'après moi, il faut conserver le caractère formel de la procédure, l'obligation de se déplacer et de faire un choix. C'est un type d'opération différent de celui où l'on commande le gadget le plus récent sur l'Internet. Mais ce point de vue est personnel.
Le président: Merci beaucoup.
J'ai accordé la première question à M. Grose puisqu'il est arrivé tôt et je vais accorder la dernière question à M. Cadman puisqu'il est arrivé en retard.
M. Cadman.
M. Chuck Cadman: Merci, monsieur le président.
Monsieur Radwanski, j'aimerais revenir à ma question sur la surveillance au travail. Je comprends votre point sur la surveillance vidéo constante.
Je pense à la surveillance de fonctions comme l'utilisation du courrier électronique et l'utilisation de l'Internet. Il ne s'agirait pas nécessairement de surveiller le contenu des courriels, mais de s'assurer que cet outil est utilisé pour les affaires de la compagnie, et non pour des affaires personnelles, et faire de même pour l'Internet.
M. George Radwanski: C'est une question qu'il faut étudier au cas par cas. Honnêtement, je ne tenterai pas de vous donner une réponse évasive, mais je tenterai de choisir, disons, judicieusement mes mots puisque je dois remplir des fonctions de surveillance. Je pourrais recevoir une plainte demain sur cette question, au sujet de l'employé d'un organisme assujetti à la loi, ou aux deux lois, et je devrais faire enquête, étudier les faits liés à la situation et écouter les arguments des deux parties. Je ne veux donc pas faire d'affirmations générales qui nuiraient à une enquête au cas par cas.
Il est très difficile de répondre à cette question. Un employeur a-t-il le droit de s'assurer que l'équipement et les installations sont utilisés pour les besoins de son entreprise? Assurément. Les implications pratiques de cette réponse en ce qui concerne l'étendue de la surveillance et l'ampleur du besoin doivent être déterminées en fonction de la situation, de l'entreprise et de l'organisme.
Par exemple, je sais que dans le projet de loi C-42, certaines dispositions ont trait au droit du ministère, je suppose, de surveiller l'équipement---les ordinateurs et ainsi de suite--pour s'assurer qu'on en fait aucune mauvaise utilisation. Je crois que le mot «nuisible» devrait être utilisé, au lieu de «non autorisé». Je crois qu'il faut nuancer les activités nuisibles plutôt que de permettre à tous de se surveiller, selon des critères très imprécis.
Les mêmes principes peuvent s'appliquer au milieu de travail. Il faut que les choses aient du sens. Il faut exercer une surveillance pour des raisons valables, et ces critères se déterminent au cas par cas.
Le président: Merci beaucoup à vous et à monsieur Radwanski. Votre point de vue nous sera utile pour le projet de loi C-217 et les membres en sont conscients. La séance est suspendue pendant cinq minutes.
Monsieur Cadman est...
À (1035)
M. Chuck Cadman: Je voudrais poser une seule question. Serait-il utile de demander à nos employés d'effectuer des recherches préliminaires et de recueillir des renseignements sur la surveillance, comme la surveillance exercée par la police à l'aide d'une caméra vidéo, les endroits qui font l'objet de cette surveillance, les statistiques qui peuvent démontrer que--
Le président: M. Radwanski a mentionné au cours de son témoignage qu'il n'avait pas été en mesure d'obtenir auprès des autorités policières des données ou des statistiques relatives à une surveillance visuelle.
Je vais moi-même me charger de faire cette demande à l'organisme policier mentionné et je verrai ce qu'ils répondront.
Avant que le comité demande aux employés d'entamer des recherches sur ce sujet, je crois qu'il devra décider ce qu'il veut faire à l'égard de l'intervention de M. Radwanski. Nous voudrons peut-être étudier plus profondément ce sujet, ce que j'invite les membres à faire.
Je remercie à nouveau M. Radwanski de ses interventions qui sont toujours décisives. En tant que haut fonctionnaire du Parlement, il assume une responsabilité des plus importantes.
M. John McKay: Monsieur le président, je...
Le président: De toute évidence, notre témoin a suscité beaucoup d'intérêt, et je ne peux mettre fin à cette réunion.
Monsieur McKay.
M. John McKay: Le témoin a demandé, avec raison, de l'aide au Parlement. Je me demande s'il possède du matériel utile au sujet de ses discussions avec la GRC.
M. George Radwanski: Et bien, j'ai mon compte rendu qui résume essentiellement toutes les représentations que nous avons faites et les réponses obtenues.
Le président: Pourrait-on remettre au comité des copies des renseignements que le commissaire juge utiles à cette étape-ci du processus?
M. George Radwanski: J'en serais ravi.
Le président: Les membres sont-ils satisfaits?
M. George Radwanski: Cet après-midi, nous remettrons à votre commis tout ce que nous pouvons.
Le président: Merci.
La séance est suspendue pendant cinq minutes.
À (1037)
À (1044)
Le président: Nous reprenons les travaux de la séance no. 64 du Comité permanent de la justice et des droits de la personne.
Le comité est heureux d'accueillir à nouveau le Commissaire à la protection de la vie privée du Canada, M. George Radwanski. Son témoignage aura trait au projet de loi C-217, Loi permettant le prélèvement d'échantillons de sang au profit des personnes chargées de l'application et de l'exécution de la loi et des bons samaritains et modifiant le Code criminel.
À (1045)
J'aimerais porter à l'attention de tous le fait que nous devons entendre les témoins d'une autre table ronde sur le projet de loi C-217 à midi. Nous accusons un retard d'environ 15 minutes. Veuillez en tenir compte: j'ai invité des personnes à se rendre à midi et je ne veux pas les faire attendre. Elles peuvent avoir fait des réservations de vol et pris d'autres dispositions de ce genre.
Sur ce, monsieur le Commissaire, veuillez commencer.
M. George Radwanski: Merci, monsieur le président.
Permettez-moi d'abord d'affirmer que je comprends les bonnes intentions à l'origine de ce projet de loi.Mais les tests de dépistage obligatoires et la divulgation obligatoire des résultats des tests de dépistage constituent une grave violation de la vie privée et de l'autonomie personnelle qui découle de la vie privée.Et il s'agit d'une atteinte sérieuse au principe—que vous partagez tous, j'en suis sûr—voulant que l'information médicale vous concernant est l'information la plus intime et la plus privée à votre sujet.
Notre droit à la vie privée se fonde en premier lieu sur la notion de consentement. Toute la législation concernant la vie privée, toutes les politiques et les codes de pratique tournent autour de ceci : si je veux savoir quelque chose à votre sujet, si je veux utiliser ou divulguer l'information vous concernant, je dois d'abord vous demander votre consentement.La vie privée, c'est le droit de contrôler l'accès à nous-mêmes et à l'information nous concernant.
Ce projet de loi aurait pour effet de violer la vie privée de la façon la plus grave possible—car il nous priverait du droit de contrôler l'accès non seulement à l'information de nature privée la plus délicate qui soit nous concernant, mais à notre intégrité physique, à notre propre corps.
Je ne prétendrai jamais que la vie privée est un droit absolu. Mais je crois que toute mesure ayant pour effet de limiter ou de porter atteinte à la vie privée doit satisfaire à quatre conditions : la mesure proposée doit être manifestement nécessaire pour régler un problème précis; elle doit permettre de répondre efficacement à ce problème; elle doit être proportionnelle à l'importance du problème; et il ne doit pas exister de solution de rechange portant moins atteinte à la vie privée.
Je peux me tromper, mais jusqu'à maintenant nul n'a démontré que ce projet de loi satisfait à l'une ou l'autre de ces conditions.
D'abord, la nécessité. Je n'ai vu aucune preuve statistique quant à l'ampleur du problème que ce projet de loi est sensé régler. Il n'existe que des données non scientifiques à cet égard—et même ces données ne révèlent pas l'existence d'un problème si grave qu'il justifierait une violation si draconienne de la vie privée.
Par exemple, on ne signale que deux cas probables de transmission au travail du virus du sida au Canada, et un seul cas confirmé. Dans ce dernier cas, il s'agissait d'un travailleur de la santé. Mais dans les deux autres cas, il s'agissait de personnes travaillant dans un laboratoire de recherche, qui ne sont même pas visées par le projet de loi.
Deuxièmement, l'efficacité. Je ne suis pas convaincu que les bienfaits réels de ce projet de loi se matérialiseraient assez rapidement ou seraient suffisamment concluants pour répondre au but visé. Il faudrait du temps pour obtenir un mandat, un échantillon sanguin, pour effectuer les tests et en obtenir les résultats—probablement plus que le temps dont on dispose pour entreprendre un traitement préventif. Et les résultats ne seraient pas concluants, de toute façon.
Un test négatif ne signifie pas nécessairement que la personne source n'est pas infectée—cette personne pourrait être dans la période de «x» jours ou mois ou dans la période de latence sérologique avant même que le virus ne soit détecté. Et si l'affaire implique un objet comme un couteau ou une seringue, la personne testée n'est pas nécessairement la seule source de contagion. Qui sait si d'autres personnes n'ont pas déjà été en contact avec cet objet?
Troisièmement, le caractère approprié de la mesure. Nous parlons ici d'une invasion grave, sans précédent, de la vie privée. Le Code criminel ne permet la prise d'échantillons sans consentement que dans deux cas : les tests de dépistage de la consommation d'alcool dans les cas où l'on a des motifs raisonnables de soupçonner une conduite avec facultés affaiblies, et les tests d'ADN reliés à la poursuite pour des infractions très graves. Dans les deux cas, on doit avoir des motifs raisonnables de soupçonner un délit criminel.
Les tests de dépistage obligatoires appliqués à des citoyens ordinaires respectueux des lois constituent une violation de la vie privée si grave que je les considère hors de toute proportion par rapport à un problème dont l'ampleur n'a même pas été démontrée, sans rapport avec son efficacité douteuse en tant que solution dans quelque situation que ce soit.
À (1050)
Enfin, existe-t-il des solutions de rechange portant moins atteinte à la vie privée? Je crois que l'on peut répondre affirmativement à cette question.
On continue de s'appuyer sur le consentement des personnes concernées. Je constate que les études indiquent que la plupart des personnes sources acceptent d'être testées et que l'information pertinente soit partagée avec le travailleur exposé, si on les aborde de façon délicate et si on leur expose le sérieux du problème—particulièrement dans les cas où la vie privée, la sécurité et la confidentialité sont préservées.
Et puis on a amélioré la prévention et la gestion de l'exposition en milieu de travail à des agents pathogènes transmissibles par le sang—notamment l'adoption de meilleures politiques et pratiques et la formation, de même que l'immunisation plus généralisée contre l'hépatite B.
Pour résumer, ce projet de loi propose la suppression d'un droit fondamental.D'ici à ce que l'on puisse présenter un argument plus convaincant, satisfaisant aux quatre conditions énoncées plus haut, je vous exhorte à rejeter toute proposition de prélèvement obligatoire d'échantillons de sang.
Merci beaucoup.
Le président: Merci beaucoup.
Je m'excuse auprès de vous, membres du comité, de ne pas vous avoir présenté notre nouveau membre, M. Macklin, Secrétaire parlementaire du ministre de la Justice.
Bienvenue. Je crois que vous apprécierez les travaux du comité.
Monsieur Cadman, je vous accorde sept minutes.
M. Chuck Cadman: Merci, monsieur le président, et merci encore, monsieur Radwanski.
M. George Radwanski: Je suis heureux d'être de retour.
M. Chuck Cadman: Vous dites que le problème n'est pas répandu. Je crois que si nous l'envisageons d'un autre point de vue, certaines situations dont on nous a fait part démontrent qu'il y a un problème. Un certain nombre de personnes ne sont pas nécessairement infectées, mais elles sont éclaboussées: les travailleurs paramédicaux, les policiers, les travailleurs d'intervention d'urgence, qui sont piqués ou reçoivent des éclaboussures de liquides organiques. Nous parlons d'un nombre considérable de travailleurs. Vu sous cet angle, le problème est plus important.
Vous avez affirmé que le nombre de personnes qui ont été infectées était petit. Je crois que le but de ce projet de loi est de donner la tranquillité d'esprit aux personnes qui ont peut-être été infectées en les traitant immédiatement. Nous avons entendu parler d'un test dont les résultats, quels qu'ils soient, peuvent être connus en 30 minutes.
Selon vous, on peut simplement demander et obtenir le consentement des personnes. C'est peut-être le cas dans un hôpital, mais malheureusement, ça ne semble pas bien fonctionner pour les policiers et les travailleurs d'intervention d'urgence : les personnes en cause ne semblent pas vouloir coopérer. Qu'en pensez-vous?
M. George Radwanski: Je suis d'accord avec vous, mais au sujet des personnes exposées aux éclaboussures de sang, entre autres, je voudrais d'abord dire ceci. Pendant notre examen, nous n'avons pas pris connaissance de statistiques--peut-être en existe-t-il et votre comité les a-t-il en main--sur le nombre de personnes qui sont exposées à ce type de danger chaque année, au point de craindre une infection, ni sur celles qui choisissent de toute manière de bénéficier d'un traitement préventif, ou qui choisissent un traitement préventif en l'absence de prélèvements d'échantillons de sang. Ces données sont suffisamment objectives et selon moi, elles devraient être connues pour qu'on puisse évaluer l'ampleur du problème.
Deuxièmement, je prends pour acquis que nous ne parlons pas de toute éclaboussure de sang possible. De toute évidence, les travailleurs d'intervention d'urgence peuvent être exposés aux éclaboussures de sang, qu'il s'agisse des policiers, des travailleurs paramédicaux, des ambulanciers ou même parfois des pompiers. On en tient compte dans la conception des procédures et de l'équipement de protection. Par exemple, je sais pertinemment que les ambulanciers portent des gants. Il faut plus que des éclaboussures de sang sur des vêtements pour être contaminé et risquer une infection comme celles dont nous avons parlé.
J'ajouterais que nous parlons du droit à la protection de la vie privée, et en particulier du droit fondamental de la protection des renseignements personnels sur la santé. J'ai dit dans plusieurs de mes discours qu'en général, j'ai constaté que la plus grande menace à la protection de la vie privée ne provient pas de personnes malintentionnées. On pourrait régler facilement ce problème. Les plus grandes menaces à la protection de la vie privée proviennent de personnes qui prétendent, avec de très bonnes intentions, qu'il faut sacrifier la protection de la vie privée pour une cause plus importante, comme la sécurité ou l'efficacité des services gouvernementaux, dans un cas comme celui de la protection des travailleurs d'intervention d'urgence. Mais je ne suis pas convaincu que le vrai problème soit grave au point de justifier une telle réduction de la protection de la vie privée. Cette mesure créerait un précédent des plus inquiétants.
Au sujet des tests rapides, je dirais que dans une situation où je craindrais d'avoir été contaminé, pour les raisons que j'ai évoquées, je ne sais pas si je ferais confiance à un test plutôt que de prendre toutes les précautions nécessaires de toute façon. Et je crois que c'est ce que ferait la plupart des gens.
Ma position demeure donc la même. Je suis ouvert à ce qu'on me présente des faits qui la changeraient, mais jusqu'ici ça ne s'est pas produit.
À (1055)
Le président: Merci beaucoup.
Monsieur Bellehumeur.
[Français]
M. Michel Bellehumeur: Merci beaucoup, monsieur le président.
Monsieur le commissaire, ce sera très court parce que je partage entièrement votre point de vue, tant en ce qui concerne la nécessité qu'en ce qui concerne l'efficacité, le reste des inconvénients et les critères qu'on devrait suivre. Je pense que ce qui manque le plus--et c'est votre dernière réponse--, c'est d'étayer encore davantage les données et d'avoir des statistiques et de l'information qui pourraient nous faire changer d'avis.
Moi aussi, je trouve cela très sympathique. J'ai entendu des témoignages qui étaient très bien, très structurés. Je suis humain comme tout le monde. Je trouve déplorable et triste ce que les gens ont vécu, mais il ne faut pas faire une mesure législative pour des cas d'espèce parce que ça va créer un précédent. Aujourd'hui, c'est pour cela, demain, ce sera pour autre chose, etc.
Avec les projets de loi que le gouvernement fédéral a adoptés ces derniers jours, ces dernières semaines ou ces derniers mois en matière de sécurité et pour toutes sortes d'autres choses, on voit que de plus en plus, on s'en va vers une certaine perte de confidentialité et de vie privée, cela pour des motifs très publics. À un moment donné, il va falloir s'arrêter, sinon on va être dans un État policier. Je pense que ça, c'est une marche supplémentaire qui est fort dangereuse, et je vous remercie du courage que vous avez de venir nous dire très honnêtement, sur la base de votre formation et de votre mandat, qu'on devrait rejeter un projet de loi semblable, non pas parce qu'on n'est pas compatissants, non pas parce qu'on ne croit pas qu'il y a un problème quelconque, mais parce que n'est pas en légiférant qu'on va régler ce problème. On en crée d'autres fort importants.
Merci beaucoup.
M. George Radwanski: Cette fois-ci, je n'ai pas grand-chose à ajouter parce que nous sommes d'accord.
M. Michel Bellehumeur: On va laisser ça aux autres.
M. George Radwanski: Merci.
[Traduction]
Le président: Monsieur Strahl, je vous accorde sept minutes.
M. Chuck Strahl (Fraser Valley, PC/RD): Merci.
Merci, monsieur Radwanski, d'avoir à tout le moins louer les objectifs du projet. Je peux au moins me consoler en pensant aux remarques que vous avez faites au début de votre témoignage.
Je vous invite, vous et votre personnel, à réviser certains témoignages--peut-être l'avez-vous déjà fait--depuis la dernière fois. Je sais que vous vous souciez de la protection de la vie privée, c'est votre travail. Mais je crois qu'on peut soutenir que cette loi est nécessaire. Un total de 80 organismes nationaux canadiens lui ont donné leur appui. Ils affirment que cette question inquiète leurs membres. Ils ne prennent pas cette question à la légère; ils se soucient réellement de leurs membres. Est-ce une question de souffrance morale? Je ne le sais pas, mais ils croient que cette loi répond à un grand besoin. Je suis d'accord avec eux.
Je ne sais exactement comment on peut atteindre l'équilibre. Je tiens absolument à la protection de la vie privée des personnes qui subissent un test de dépistage. Les résultats ne doivent servir qu'à cette fin. Ils doivent être connus par le plus petit nombre de personnes possible. Ils ne doivent servir qu'à déterminer si des personnes qui risquent d'avoir été infectées par les liquides organiques d'une autre personne doivent recevoir un traitement médical. Nous devons certainement faire tout en notre pouvoir pour renforcer ces mesures. On ne doit faire aucune mauvaise utilisation de ces renseignements, on ne doit pas en abuser, et il faut prendre toutes les mesures nécessaires pour s'assurer du respect de ces dispositions.
Pour vous convaincre, je peux peut-être m'y prendre autrement que de tenter de...Par exemple, lorsque les travailleurs paramédicaux sont venus l'autre jour, ils ont dit qu'on les avait tous obligés à se faire administrer le vaccin contre l'hépatite B, souvent contre leur gré, puisqu'on avait décidé qu'il en était ainsi. Même s'il n'existe pas de statistiques démontrant que ces travailleurs de la santé infectent un grand nombre d'autres personnes, on leur a dit qu'ils devaient le faire, sans quoi ils risquaient de perdre leur emploi.
Pour eux, se faire vacciner contre l'hépatite B est une chose envahissante. Pourtant, s'ils veulent des renseignements pour protéger les personnes avec lesquelles ils entrent en contact, on leur répond: dommage, vous ne pouvez être aussi bien protégés que les gens que vous traitez.
Je ne sais exactement comment on peut atteindre l'équilibre. Le cas qui a suscité mon intérêt pour cette question est le suivant. Le Centre sur le SIDA de Vancouver a dit à un jeune homme de ma circonscription qu'il devait suivre un traitement préventif en raison de la quantité considérable de sang dont il avait été éclaboussé et de la durée pendant laquelle le sang était demeuré sur lui.
Ce jeune homme a donc suivi un programme de traitement d'une durée de six mois. On lui a dit que le traitement pouvait avoir des effets néfastes durables sur sa santé et ses capacités de reproduction. Et comme des experts l'ont mentionné dans leur témoignage, on aurait immédiatement arrêté le traitement préventif post-exposition si un test s'était avéré négatif. Ils affirment que malgré diverses possibilités, le fait est que le traitement est très envahissant et ses effets durables sont inconnus; c'est pourquoi ils l'arrêteraient immédiatement si un test était négatif, ce qui démontre la gravité de la situation.
Pour ce jeune homme de ma circonscription, l'importance de ces renseignements est donc primordiale.
En dernier lieu, cette mesure est-elle efficace? Je ne le sais pas, mais je sais que deux agents de police ont témoigné de cas où des sans-abri ont affirmé qu'ils accepteraient qu'on leur prélève du sang en échange d'un hamburger, à peu près dans ces termes: «Vous pouvez me prélever du sang en retour d'un Big Mac». Un test négatif change vraiment la vie des personnes en attente de ces résultats.
Et puis il y a la négociation de plaidoyers. Les agents de police reconnaissent qu'ils offrent de retirer les accusations si une personne accepte qu'on lui prélève du sang.
Á (1100)
J'affirme que la loi est nécessaire pour ce type de raisons. Il s'agit peut-être de sources anecdotiques, mais c'est tout ce dont nous disposons. Il n'est pas possible d'obtenir des statistiques à ce sujet. On nous l'a répété cette semaine. On ne dispose que de statistiques anecdotiques obtenues des services policiers d'Ottawa et d'Edmonton.
Il s'agirait d'une mesure très rarement utilisée. Nous devons trouver des façons de renforcer l'aspect relatif à la protection de la vie privée. Mais selon les organismes nationaux, cette loi répondrait à un grand besoin puisque grâce à son application, on pourrait déterminer si une personne a besoin de recevoir un traitement. On n'aurait besoin d'appliquer cette loi que très rarement, mais le recourt à cette mesure me semble préférable aux offres de Big Macs et de retrait d'accusations faites dans le cadre de marchandage. Et il n'existe pas de méthodes qui réduisent moins la protection de la vie privée.
La plupart des personnes accepteront certainement d'elles-mêmes qu'on les teste. Mais à l'occasion, tout comme dans le cas du vaccin contre l'hépatite C, le gouvernement devra intervenir dans les meilleurs intérêts de la société. C'est une question de santé et de tension mentales, et d'effets secondaires physiques. Il faut recourir à cette mesure à l'occasion, même si elle réduit la protection de la vie privée. Je ne vois pas comment on peut y échapper: 80 organismes m'ont dit essentiellement que la situation devait changer pour leurs membres.
Á (1105)
Le président: Merci, monsieur Strahl.
M. George Radwanski: Comme je l'ai mentionné dans mes premiers commentaires, je respecte énormément les intentions à l'origine de ce projet. En tant que citoyen, j'aime toujours voir un membre du Parlement présenter un projet de loi visant à répondre à un besoin humain et aider la population. J'encourage ce type d'initiative. Honnêtement, je suis triste de ne pas pouvoir vous dire: «Allez de l'avant: vous avez la bénédiction du Commissaire à la protection de la vie privée.»
Vos affirmations posent plusieurs problèmes. D'abord, vous avez dit que dans l'application de cette mesure, vous voudriez qu'on respecte le plus possible le droit à la vie privée. Peut-être n'avons-nous pas la même perception du concept de la vie privée. Selon moi, si on s'adresse à une personne qui n'a violé aucune loi--le projet de loi ne propose pas de critère de violation de la loi--, qui a connu peut-être des problèmes physiques, mais qui en général se mêle de ses affaires, et qu'on lui dise : «Vous acceptez qu'on vous prélève des échantillons de sang ou vous allez en prison», on envahit massivement sa vie privée. Voilà mon premier point.
Deuxièmement, ces renseignements seront divulgués à un membre de la communauté et à un agent de la paix. Il s'agit d'un envahissement massif de la vie privée. Comment faire pour que cette information ne soit pas transmise à d'autres personnes? Supposons que nous avons affaire à une petite communauté. La personne testée obtient un résultat positif. Veut-elle que son employeur soit mis au courant? Souhaite-t-elle que le monde entier soit mis au courant? On ne peut garantir la protection de la vie privée. On a forcé une personne à renoncer à son droit à la vie privée. C'est une question extrêmement grave. Y a-t-il des cas où il faut forcer une personne à renoncer à son droit à la vie privée? Oui : lorsque les quatre critères que j'ai déjà mentionnés sont remplis.
Vous avez aussi dit qu'il n'était pas possible d'obtenir des statistiques à ce sujet. Je n'en suis pas convaincu. Je suis sûr qu'il n'en existe pas, mais je ne suis pas convaincu qu'il soit impossible d'en obtenir. Il n'aurait sûrement pas été impossible aux organismes dont vous avez parlé--pompiers, travailleurs paramédicaux, agents de police--de fournir des données sur le nombre de personnes qui ont suivi ce traitement préventif très grave au cours de la dernière année, si ce nombre avait été significatif. Il serait très facile d'obtenir cette statistique.
Si on ne compile pas de statistiques à ce sujet, je pense que c'est parce que le nombre de cas où cela se produit n'est pas élevé. Quant aux cas où les gens s'inquiètent, je suis sûr qu'ils sont nombreux.
Nous vivons dans un monde dur, et je ne veux pas parler ici d'indifférence. Les personnes prennent des risques pour de bonnes raisons, et certains risques sont inévitables. Je ne dis pas ici que seul un petit nombre de personnes détruisent leur vie d'une façon ou d'une autre et que c'est correct. Ce n'est pas du tout ce que je veux dire. Mais pour créer une loi qui réduit les droits de toutes les personnes d'une société, il faut des critères très rigoureux. Prenons l'exemple des agents de police : il est permis d'affirmer que notre monde serait plus sécuritaire s'ils avaient le droit de fouiller n'importe qui, n'importe quand, sans raison valable. Si les autorités avaient le droit de pénétrer dans nos foyers en tout temps ou d'ouvrir notre courrier, peut-être que des vies seraient sauvées et que la société serait plus sécuritaire. Je pourrais vous donner de nombreux arguments sur le bien qui découlerait de la prise de telles dispositions.
M. Chuck Strahl: Comme l'enregistrement des armes à feu.
George Radwanski: Je pourrais vous présenter de nombreux arguments en faveur de toutes sortes d'intrusions et du bien qu'elles feraient. Mais dans notre société, on ne peut simplement affirmer : «Cette disposition permet d'aider quelqu'un, alors prenons-la». Et je soutiens que la création d'une telle loi--aussi louable soit-elle--changerait notre conception du droit à la protection de l'accès à nos corps et des renseignements sur la santé à tel point qu'on ne pourrait la justifier--les incidents individuels ne justifient pas le besoin de créer une telle loi, peu importe leur gravité.
Le président: Merci beaucoup.
Monsieur McKay.
M. John McKay: Merci, monsieur le président.
Je voudrais commenter les quatre critères dont vous avez parlé. Selon le premier critère, il faut démontrer la nécessité de créer une telle loi. Vous dites qu'il n'y a pas de preuves statistiques, seulement des données anecdotiques. Je ne sais s'il est possible d'obtenir des preuves statistiques, mais il me semble un peu inutile et irréaliste de tenter d'établir des preuves statistiques objectives qui seraient significatives.
Nous avons entendu des témoignages sur le type de statistiques compilées par le service de police d'Edmonton. Honnêtement, je crois qu'elles sont tout à fait insignifiantes.
D'autre part, nous avons en main des évidences anecdotiques qui démontrent que ces personnes sont constamment exposées à des situations qui créent chez elles un niveau d'anxiété légitime. Je ne suis pas convaincu que votre argument soit plus fort à cet égard.
Le deuxième critère a trait à l'efficacité. Je crois qu'il s'applique à la rapidité avec laquelle on déterminerait s'il y a contamination ou non. Je suis d'accord avec vous pour dire qu'il ne serait pas opportun d'obtenir un prélèvement de sang sans consentement, mais ce serait utile pour déterminer s'il faut poursuivre un traitement. On peut recommander pour des raisons médicales de suivre un traitement prophylactique, mais si un prélèvement ne s'avère pas positif, on peut mettre fin au traitement. Sans cette information, on est dans l'ignorance.
Á (1110)
Quant au critère de mesure très rarement utilisée, je suis plutôt d'accord avec vous: il s'agit d'une mesure nettement draconienne. C'est un peu comme écraser une mouche avec un gant de boxe. Par contre, la loi contre la conduite avec facultés affaiblies--qui comporte ses propres mesures de protection--a été passablement efficace dans notre pays: il y a donc un précédent.
Finalement, pour ce qui est du consentement--un grand nombre de personnes accepteraient d'elles-mêmes d'être testées, mais il faudrait peut-être graisser la patte de certaines d'entre elles--, il s'agit d'un argument non pertinent. La loi est destinée aux personnes qui refusent qu'on leur prélève du sang. Qu'en pensez-vous?
M. George Radwanski: Merci de vos commentaires. Permettez-moi de répéter certains points. Honnêtement, cet aspect de mon travail est celui que j'aime le moins. Il n'est jamais plaisant de jeter une douche d'eau froide sur un projet qui vise à aider les gens. Personnellement, je n'aime pas ça, et il peut sembler que la défense de la protection de la vie privée exige que l'on soit insensible. Je suis très conscient de cela. Mais mon travail consiste à défendre le droit à la vie privée: c'est un droit important.
Vous dites que les statistiques peuvent être inutiles. C'est certainement vrai dans certains cas, mais je crois qu'il faut garder à l'esprit que la création d'une telle loi a une incidence sur les droits de tous les Canadiens: nous ne pouvons pas savoir à quel moment l'un d'entre nous se trouvera dans une situation où on lui demandera d'être testé.
C'est donc une question qui a une incidence sur chaque Canadien. Pour des raisons autres que celles qui concernent les faits anecdotiques et les malheurs individuels, je crois qu'il faut poser la question suivante: comment ce problème peut-il avoir une incidence sur les droits de chaque Canadien?
Vous avez pris l'exemple des analyses du sang dans les cas de conduite en état d'ébriété. Ce point illustre parfaitement mon propos. Il ne manquait certainement pas de statistiques sur le nombre de décès et d'accidents attribués à la conduite en état d'ébriété. Il n'est pas difficile de démontrer que ce problème est grave.
Il s'agit d'une intervention exceptionnelle dans le cas d'un problème grave et manifeste. Mais pour moi, une intervention exceptionnelle dans le cas d'un problème anecdotique, alors qu'on a pas de chiffres à l'appui, est contraire à tous les principes de respect des droits fondamentaux de la personne.
Vous dites que les cas sont nombreux où il est justifié que les personnes se sentent anxieuses, et ainsi de suite. Je suis convaincu que c'est vrai. Mais on ne peut réduire de façon draconienne les droits de la personne pour apaiser les gens. Je ne veux pas être insolent, mais je crois qu'il faut des arguments plus forts que ceux qui réfèrent à l'anxiété des travailleurs d'intervention d'urgence à l'égard de leurs conditions de travail.
Je soutiens encore que même un test négatif, dans un cas où il y a lieu de s'inquiéter... Mettra-t-on fin au traitement si on a vraiment de bonnes raisons de croire ou de craindre que la personne est contaminée? En cas de test négatif, dit-on: «Bon, je vais mettre fin au traitement prophylactique.»? Peut-être. Mais j'imagine que bon nombre de personnes pourraient aussi se dire: «Non, je ne vais pas prendre de chance. Qu'arriverait-il si les résultats de laboratoire étaient inexacts?». Les résultats de laboratoire sont parfois erronés ou on les confond, c'est connu. Il pourrait s'agir d'une période d'incubation.
Je ne suis pas convaincu...
Á (1115)
M. John McKay: Avec un résultat de test en main, il s'agit davantage d'une décision médicale éclairée.
M. George Radwanski: Vous avez un peu raison. Je veux revenir sur la rareté et l'efficacité de tous ces tests. Peut-être que la plupart d'entre eux ont une certaine valeur. Je ne dis pas que ce n'est pas le cas. Mais en tant que Commissaire, je crois qu'ils ne répondent pas aux critères liés à un problème de cette ampleur.
Je me pose également la question--pour moi, ce n'est pas la plus importante--à quoi tout cela aboutira-t-il? Tout cela est bien beau; un travailleur d'intervention d'urgence, par exemple, reçoit des éclaboussures de sang ou est exposé à quelque chose. La personne en cause est, disons, un malade ambulatoire ou elle refuse tout traitement supplémentaire ou quoi encore... Faut-il en conclure qu'il faut placer cette personne en garde ou en captivité en guise de protection, même si la personne n'a brisé aucune loi? Et si cette personne était difficile à trouver ou se trouvait à l'extérieur de la ville? Alors on dirait qu'il faut la mettre en quarantaine, au cas où. Ce type de mesures vous place vraiment sur une pente dangereuse.
Le président: M. Sorenson, je vous accorde trois minutes.
M. Kevin Sorenson: Je dois parler rapidement puisque le président ne cesse de me couper la parole.
Mon épouse est une infirmière autorisée, et une fois, nous sommes intervenus dans un accident où la personne était décédée. Il y avait du sang. Nous devions la sortir du véhicule. Mon épouse m'avait déjà dit qu'elle ne voudrait pas intervenir dans des incidents sur le bord de la route. Mais lorsque l'occasion s'est présentée, nous l'avons fait.
Vous avez dit qu'il ne devrait pas être permis de prélever du sang simplement pour aider une personne. Vous l'avez affirmé à deux reprises. Vous avez dit que vous aviez en horreur de jeter une douche d'eau froide sur un projet visant à aider les autres. Vous avez aussi mentionné que les personnes qui occupent des postes comme agent de police ou pompier courent certains risques. Mais en réalité, il ne s'agit pas simplement d'aider une personne, mais de la sauver. Il peut s'agir de sauver la vie d'une personne, son mariage, sa famille, de lui permettre de vivre en paix.
Je ne sais plus si c'est vous ou M. McKay qui avez comparé cette mesure à l'écrasement d'une mouche avec un gant de boxe. J'étais entièrement en désaccord avec vous. La question à laquelle il faut répondre est la suivante: pourquoi quelqu'un devrait-il pouvoir prélever du sang d'une personne pour sauver sa vie, et non celle d'une autre personne? Si je suis sans connaissance dans un véhicule, on devra peut-être prélever du sang pour me faire une transfusion sanguine. On prélèvera du sang.
Dans certains cas, par exemple quand une personne est sans connaissance, n'est-il pas nécessaire de pouvoir prélever du sang? Nous sommes déjà en mesure de prélever du sang, mais nous ne sommes pas autorisés à l'analyser pour voir s'il est contaminé. Nous pouvons prélever le sang d'une personne, mais nous n'avons pas l'autorisation de faire une analyse sanguine. Cela me rend perplexe...
Ce projet de loi me semble sensé; il vise à sauver des vies. Le nombre de vies n'est pas important, puisqu'un grand nombre de personnes consentent à ce qu'on leur prélève du sang... Il n'est pas question ici de prélever du sang de toutes les personnes qu'on puisse rencontrer, mais plutôt de celles qui n'y consentent pas.
M. George Radwanski: Permettez-moi d'abord de parler de la question du consentement. Il s'agit d'un concept plutôt insignifiant si, dans les cas où on ne l'obtient pas, on contraint une personne à se soumettre quand même à un test. Ce que vous dites se résume à ceci: nous ne vous forcerons pas si vous acceptez que l'on vous teste, mais dans le cas contraire, on vous forcera. Ce n'est pas ainsi que je conçois le consentement.
Votre argument sur le prélèvement de sang pour aider une personne est intéressant, je dirais même astucieux. Si une personne est sans connaissance, pourquoi ne pourrait-on pas lui prélever du sang pour en aider une autre? Et bien, je répète que c'est une simple question de consentement. De façon implicite, une personne sans connaissance consent à ce qu'on la traite, à ce qu'on fasse le nécessaire pour préserver son bien-être, pour sauver sa vie. Mais ce consentement implicite n'a pas trait à d'autres mesures, peu importe leur avantage. Selon la logique de votre propos, on pourrait prélever un litre de sang à une personne sans connaissance pour faire une transfusion à quelqu'un qui en aurait besoin. C'est utile pour quelqu'un d'autre. Mais en fait, ce n'est pas possible si l'on n'a pas obtenu le consentement d'une personne.
En toute honnêteté, je trouve que cette position est un peu poussée. Supposons qu'une personne se fait opérée au genou et qu'elle est sans connaissance. On pourrait aussi lui retirer son appendice, pour lui éviter des dérangements. Mais sans le consentement de cette personne, on ne pratiquera pas cette opération, puisqu'elle a le droit de déterminer ce que l'on fera à son corps. J'aborde ici le sujet des droits de la personne, et non seulement celui du droit à la vie privée. Mais le fait de nier à une personne sans connaissance le droit de consentir à quelque chose, à part ce que la loi définit comme un consentement implicite d'une personne à des mesures qui permettent de sauver sa vie, serait nettement exagéré. Constatez où tout cela peut nous mener si nous ne sommes pas prudents.
Á (1120)
Le président: M. Macklin.
M. Paul Harold Macklin (Northumberland, Lib.): J'aimerais traiter de cette question. Le point de vue exprimé, d'une façon très sensible selon moi, a trait à l'équilibre d'une personne par rapport à une autre, par opposition à celui d'une personne par rapport à la communauté. Si l'on évalue les intérêts de deux personnes à un moment précis, est-ce le test qui doit être fait? Qu'en pensez-vous?
M. George Radwanski: Il semble que oui. Si l'on commence à adopter ce type de mesures, on pourra justifier la violation des droits à la vie privée d'à peu près tout le monde. On peut toujours citer des cas où le bien que la violation de ce droit fait à une personne est plus grand que le préjudice subi par celle à qui on viole ce droit. C'est le cas d'à peu près tous les droits fondamentaux. Le problème a trait à la façon dont on perd un droit.
C'est pourquoi j'ai affirmé que la plus grande menace au droit à la vie privée est liée aux bonnes intentions. Si on examine la question d'un point de vue personnel en dramatisant suffisamment, il est facile de défendre une autre position. Puis, tout à coup, on se rend compte qu'il n'existe plus de vie privée. C'est le genre de problèmes auxquels mènent ces idées.
En fin de compte, on affirme que telle loi comporte déjà telle disposition et que l'existence de telle autre loi n'est donc pas justifiée. Puis à la fin, tous sont d'accords pour affirmer que le droit à la vie privée est un luxe qu'on ne peut se payer. La société finit par croire que l'exercice de ce droit nuit à un trop grand nombre de personnes.
Le Commissaire à la protection de la vie privée est nommé pour protéger ce droit. Et j'apprécie beaucoup qu'on m'ait invité. Il faut toujours discuter d'une proposition, même si on dit qu'elle n'entraîne que des changements mineurs et qu'elle est tout à fait inoffensive.
Le président: M. Strahl, je vous accorde trois minutes.
M. Chuck Strahl: Je voudrais faire des commentaires sur deux ou trois points. Je crois que l'exemple d'une opération au genou et d'un retrait des reins alors qu'on est endormi n'est pas très représentatif.
M. George Radwanski: Je ne voulais pas insinuer que l'exemple s'appliquait à votre projet de loi. J'illustrais le concept de consentement, et dans le cas d'une personne sans connaissance, j'évoquais l'idée d'appliquer une mesure simplement parce qu'il est possible de le faire.
M. Chuck Strahl: Je reconnais qu'il faut améliorer certaines dispositions. Mais en vertu du projet de loi, il doit être vraiment difficile d'obtenir un prélèvement de sang.
Prenons à titre d'exemple une personne qui reçoit quelques éclaboussures de sang, puis demande que l'on teste le type en question. On n'accepterait pas sa demande. Le médecin ou le légiste répondrait qu'il ne s'agit pas d'une exposition grave. Il faudrait faire appel à un juge, qui pèserait le pour et le contre relativement à chaque droit. Je reconnais que les droits sont divergents. Le juge décidera de ne pas donner l'ordre de prélever du sang puisque la situation n'est pas assez grave.
Autrement dit, si je reprends votre exemple, une personne endormie sur la table d'opération ne finira pas avec les reins d'une autre, simplement parce que quelqu'un en a décidé ainsi. Il sera très difficile de pouvoir faire des prélèvements de sang puisque des droits divergents sont en jeu. Comme vous l'avez mentionné, il n'existe pas de droit absolu à la vie privée. Il n'existe que des droits divergents. Il doit être très difficile de faire des prélèvements de sang, mais pas impossible.
J'ai des articles en main. Un agent de police affirme qu'au cours d'une arrestation, un type l'a mordu, il lui a dit qu'il avait le sida et lui a offert ses meilleurs voeux... Il s'agissait essentiellement d'une agression avec transfert de liquides d'un corps à l'autre. Puisque le type n'a pas consenti à ce qu'on lui prélève du sang, l'agent a dû suivre un traitement prophylactique. Cette aventure a gâché sa vie : elle a brisé son mariage et on l'a mis à pied pendant six mois. Ce fût toute une souffrance morale. Nous pourrions peut-être dire qu'il a renoncé à son droit à la vie privée, puisque tous les habitants de Calgary étaient au courant de sa mésaventure.
Des droits divergents sont en jeu. Le fait qu'il soit difficile, comme il se doit, d'obtenir l'autorisation de faire des prélèvements et qu'il s'agisse d'un processus privé ne peut-il pas satisfaire à vos exigences?
Les médecins ont constamment en main des dossiers dont le contenu ne doit pas être divulgué. Il est entendu que le médecin, ou toute personne concernée, respectera la confidentialité des dossiers. Ce type de mesure pourrait être utilisé pour le traitement d'une personne, après qu'on ait convaincu un juge et un légiste que la situation est assez grave et dans les rares cas où quelqu'un ne donne pas son consentement. Les occasions où il faudra appliquer la loi ne se présenteront que rarement, à des moments où la vie des personnes est en danger.
Tant de personnes m'ont remis des lettres dans lesquelles elles me racontaient leur histoire. Et nous avons entendu le témoignage de personnes éprouvant divers problèmes : mariages brisés; inactivité sexuelle pendant six mois, soit pendant l'attente des résultats de test. Ils ne savent comment composer avec les enfants, ils se demandent s'ils doivent prendre des précautions spéciales. Tout ça parce qu'ils ne peuvent obtenir de prélèvement de sang.
Certains diront qu'un prélèvement de sang n'est pas sûr à 100 p. 100. Mais d'après tous les témoignages que j'ai entendus, les experts, dont ceux de Santé Canada, affirment que si les résultats de test sont négatifs, ils mettent fin au traitement prophylactique et ne se font plus de soucis à ce sujet. C'est un grand soulagement pour ces personnes.
Je soutiens qu'il faut équilibrer les droits. Il faudrait instaurer un nombre suffisant de mesures de protection : je suis prêt à en intégrer un grand nombre, s'il le faut. Il me semble que dans les rares cas où la situation est grave, la police de Calgary devrait savoir que ce n'est pas la fin du monde si elle doit attendre parce qu'on n'a pas pu obtenir un prélèvement de sang.
Á (1125)
M. George Radwanski: J'entends ce que vous dites. J'aimerais faire des commentaires à plusieurs sujets.
En premier lieu, vous dites qu'il devrait être extrêmement difficile d'obtenir un mandat. C'est bien, mais selon cette même logique, il devrait être extrêmement difficile d'obtenir un mandat de perquisition. Combien de cas connaissez-vous où la police ne peut absolument pas obtenir un mandat de perquisition? Je dirais qu'il s'agit de l'exception plutôt que de la règle. C'est ce que j'ai pu constater lorsque j'étais journaliste et que je m'occupais de la chronique policière: il n'est pas difficile d'obtenir un mandat de perquisition.
À quel point serait-il difficile d'obtenir un mandat de perquisition ou de trouver un juge sympathique à sa cause? On peut souhaiter que ce sera difficile, mais est-ce que ce sera vraiment le cas? À quel point est-il difficile de trouver un médecin de garde qui déterminera qu'il s'agit hors de tout doute d'un risque sérieux.
M. Chuck Strahl: Pourtant, on accepte que des mandats de perquisition soient émis même si... Je dirais que le type de mandat dont nous parlons serait plus difficile à obtenir, puisqu'il faudrait faire appel à un médecin qui déterminerait la gravité de la situation, ainsi qu'à un juge, qu'il soit sympathique ou non à la cause. Nous continuons à accepter que des mandats de perquisition soient émis, puisque nous considérons qu'une descente dans notre foyer est une grave violation de la vie privée. Et même si cette perquisition n'aboutit pas à une déclaration de culpabilité en raison d'un manque de preuves, nous l'approuvons.
M. George Radwanski: Bien sûr, mais il y a une différence entre les mandats de perquisition, où l'on a des raisons de croire qu'il y a eu infraction, et les droits des gens respectueux des lois. À propos des mandats de perquisition, je voulais souligner le fait qu'il n'est pas difficile de les obtenir. Peut-être voudrait-on que ce soit difficile, mais je crains que ce ne soit pas nécessairement le cas.
J'essaie de me rappeler quel était l'autre argument que vous avez présenté. J'étais sur le point d'y répondre, mais j'ai perdu soudainement ce que...
Le président: M. Radwanski, le temps file. Pendant que vous y réfléchissez, nous allons passer à M. Cadman, et si vous retrouvez votre idée, nous reviendrons probablement à M. Strahl.
M. Chuck Cadman: Merci, monsieur le président.
Je veux simplement examiner...
Á (1130)
M. George Radwanski: Je viens tout juste de me rappeler l'argument dont je voulais parler, veuillez me pardonner.
J'espère que c'est un argument que vous apprécierez. Je vous ai vu vous demander: «Mon Dieu, que va-t-il dire encore?»
Vous avez donné l'exemple d'une personne qui s'est fait mordre par un suspect. J'aurais besoin d'y réfléchir, mais s'il s'agissait uniquement de mesures législatives qui avaient trait aux agressions délibérées, à une véritable agression, où il est clair qu'il y a faute ou transgression de la part de la personne, on parlerait d'une circonstance plus restreinte et d'un domaine différent. Je ne dis pas que dans ce cas, toutes les questions de droit à la vie privée seraient réglées. Je voudrais en connaître davantage sur la situation. Mais si une personne en mord une autre, elle perd peut-être une partie de son droit à la vie privée. Je ne suis pas sûr que ce soit le cas lorsqu'une personne s'effondre sur le trottoir et qu'elle saigne.
Par conséquent, si des mesures législatives étaient plus étroitement libellées et qu'elles ne visaient que des cas flagrants encore plus rares, comme celui d'une personne qui transperce la peau d'une autre, il s'agirait d'un autre domaine, d'un domaine plus étroit. Je ne vous dirais pas forcément d'aller de l'avant avec le projet, mais les questions de droit à la vie privée seraient beaucoup moins nombreuses.
Je ne sais pas si je réponds aux arguments que vous avez présentés, mais il est clair pour moi qu'une personne qui fait délibérément du mal à une autre personne perd des droits, et les exigences de respect des droits dans ces cas sont moins élevées que dans les cas où les personnes s'occupent de leurs affaires et respectent la loi.
Le président: Merci.
M. Cadman, je vous accorde trois minutes.
M. Chuck Cadman: Merci, monsieur le président.
Une question me vient à l'esprit. Abordons le problème sous un angle différent. Je veux parler d'un bon samaritain plutôt que d'un travailleur d'intervention d'urgence. Si je rencontre, sur le bord de la route, une personne qui a subi un accident, qui est sans connaissance et qui saigne abondamment, et si je décide consciemment qu'en l'absence de loi pour me protéger dans les cas d'infections causées par des liquides organiques, de ne pas l'aider, mais plutôt de la regarder mourir... Existe-t-il un règlement quelconque qui m'oblige à l'aider?
M. George Radwanski: Pas à ma connaissance.
M. Chuck Cadman: Je crains qu'en l'absence d'une loi, ce type de réactions se reproduise fréquemment, en raison des maladies comme le sida et l'hépatite C. Les gens vont carrément se dire : «Non, il n'est pas question que j'intervienne dans ce type de situation.»
Je me demande--peut-être les avocats peuvent-ils m'éclairer à ce sujet--si un règlement quelconque oblige une personne à intervenir dans ces cas, plutôt que de simplement observer quelqu'un qui se meurt et ne rien faire par crainte d'être contaminé?
M. George Radwanski: Certains systèmes juridiques possèdent une loi du bon samaritain, mais je ne sais pas si c'est le cas au Canada. Mais mis à part cette question, honnêtement--je répète que je ne suis pas un expert dans ce domaine...
Á (1135)
M. Chuck Cadman: Non, je comprends cela.
M. George Radwanski: --mais à ma connaissance, il n'est pas si facile d'être infecté ou contaminé dans ces conditions. Il faudrait ingérer ou faire pénétrer dans son corps d'une façon quelconque un agent infectieux véhiculé par le sang. C'est dire que si vous n'avez pas de coupure, si personne ne vous a poignardé et s'il n'y a pas de raison qu'un virus pénètre dans votre courant sanguin, vos chances de contracter une maladie ne sont pas élevées, c'est le moins que l'on puisse dire. Elles sont statistiquement très minces.
Alors on peut dire que dans la plupart des cas, cette crainte empêchera les gens d'apporter une aide normale. Mais je répète qu'il faudrait qu'on me démontre que c'est bien le cas. Je m'inquiéterais si, par exemple, les craintes étaient exagérées et que les gens se disaient: «Ah non, la contagion est à ce point répandue, et on n'a pas adopté la loi, et, vraiment, il serait préférable de ne pas s'approcher de qui que ce soit qui saigne.» Mais ce type de comportement serait le résultat d'une mauvaise information plutôt que d'un risque excessif.
M. Chuck Cadman: Mais prenons l'exemple d'une expérience que j'ai vécue qui est semblable à celle de M. Sorenson. Il y a bien des années, je me suis trouvé devant un accident de voiture. Six personnes étaient dans un véhicule et j'ai aidé à les tirer de là et je me suis coupé et j'ai certainement été moi-même exposé. C'était il y a 20 ans. Bien sûr, certains des problèmes auxquels nous nous heurtons aujourd'hui n'étaient alors pas aussi présents ou nous n'en étions alors pas conscients, mais, réflexion faite, je ne suis pas si sûr que j'agirais aujourd'hui comme je l'ai fait il y a 20 ans.
M. George Radwanski: Non, je comprends, la balance peut pencher des deux côtés et, du point de vue de la politique d'intérêt public, le risque pour la société est-il si grand qu'on laissera mourir un grand nombre de personnes qui ont eu un accident? Ce risque est-il si important qu'on doive promulguer une loi qui touche et qui restreint radicalement les droits fondamentaux à la vie privée de chacun?
Encore une fois, la preuve devrait en être faite. Je ne suis pas conscient d'une telle situation. Je suis donc obligé d'adopter le point de vue que j'ai exprimé. Il y a bien des choses que nous pourrions faire, au cas où, qui violeraient ces droits, mais mon rôle est de dire que la barre doit être considérablement élevée avant de dire que c'est acceptable.
Le président: Merci beaucoup, Monsieur Cadman.
Peter MacKay.
M. Peter MacKay: Merci beaucoup, Monsieur le président.
Monsieur Radwanski, il me semble que l'effort de mon collègue concernant le projet de loi C-217 correspond à ce qui arrive souvent dans ce genre de circonstances, dont l'exemple le plus parlant est celui des événements du 11 septembre dernier, mais nous parlons ici de moderniser la loi. Il y a des années, personne ne prévoyait les progrès que nous réaliserions relativement à l'ADN, ni les analyses d'haleine et de sang dans les cas de conduite en état d'ébriété.
Vous qualifiez cela de décisions liées à la politique d'intérêt public. Il est devenu si important de lutter contre l'ivresse au volant que cette intrusion nous a paru justifiée. Il me semble que nous en arrivons rapidement là. Cette idée... vous faites remarquer fort justement qu'il s'agit d'une question de proportions et de notre réponse à combler un besoin.
Je crains grandement que, d'un point de vue d'une politique d'intérêt public, nous ne découragions les bons samaritains. Non seulement nous décourageons les bons samaritains, mais nous envoyons un message aux soins de santé, aux soins d'urgence et aux agents de police, leur disant d'hésiter, de réfléchir à deux fois, car leurs gestes pourraient avoir des répercussions à long terme sur leur propre santé, voire même la compromettre parce qu'en fin de compte, ils ne seront pas protégés s'ils prennent cette décision.
Le fait de décider de se mettre consciemment en danger fait partie de la liberté de choix. J'avancerais que la police et les travailleurs de la santé n'ont pas vraiment ce choix; c'est ce qu'on attend d'eux.
Donc, tout compte fait, et en étudiant cette question proportionnellement quant à ce que nous permettons à la loi d'encourager aujourd'hui et à l'application... Je regrette de toujours prendre le même exemple, mais il est évident dans le contexte de la vie privée: le cas des armes à feu est l'exemple le plus flagrant car, dorénavant, la police peut entrer chez quelqu'un simplement parce qu'elle soupçonne qu'un modèle de la Seconde Guerre mondiale y est mal entreposé ou n'est pas enregistré.
Il me semble que le fait de permettre, dans une certaine mesure, avec les stipulations liées à un mandat, qu'une personne évite les répercussions psychologiques évidentes, mais, plus important encore, constituant un danger de mort résultant d'avoir volontairement contribué à aider l'humanité en essayant de sauver une personne ou en l'arrêtant dans l'exercice de ses fonctions, selon le cas, la vie privée de cette personne, ou ses attentes en matière de vie privée, qu'il s'agisse de votre exemple ou que cela soit volontaire... on penserait que cela réduit les attentes en matière de vie privée s'il s'agit d'une piqûre, si quelqu'un frappe volontairement une autre personne avec un flacon de leur sang ou de sang contaminé, ou dans le cas où une personne en mord une autre, l'agresse volontairement. Je suis d'accord pour dire que ces situations appartiennent à une catégorie quelque peu différente, mais il me semble nécessaire, dans ce cas, d'accorder une importance moindre à l'élément vie privée. Pour moderniser la loi, je pense que nous devons aller dans cette direction.
M. George Radwanski: Écoutez, vous présentez un point de vue très valable sur le plan intellectuel. La difficulté est la suivante, et je l'entends dans plusieurs contextes différents. On entend beaucoup parler de moderniser diverses lois et, bien trop souvent, « moderne » semble être synonyme de droits restreints, de vie privée restreinte, que l'on parle de cette question, que l'on parle des nombreuses choses rendues possibles par la technologie, et ainsi de suite. On se trouve avec des gens qui, comme cet Américain des technologies de l'information, quel que soit son nom, qui avait dit de regarder les choses en face, la vie privée est morte; notre technologie l'a rendue désuète.
Il est très facile de glisser vers un concept où la modernisation devient, ma foi, ces vieux droits ne sont plus pratiques, ou quelque chose du genre. C'est pourquoi cet aspect m'inquiète.
Á (1140)
M. Peter MacKay: Je vous interromps ici.
Je vais toutefois vous demander cela. Auriez-vous envisagé, même il y a neuf mois, que vous auriez été prêt à soutenir l'atteinte à la vie privée de la part du gouvernement—je suppose—qui est désormais autorisée en vertu du projet de loi C-36? Je ne souhaite pas réouvrir ce débat, mais...
M. George Radwanski: Non, allez-y.
M. Peter MacKay: ...c'est une question qui concerne la vie privée.
M. George Radwanski: Mais les modifications que j'ai soutenues, si vous voulez, qui concernaient la vie privée n'étaient pas nombreuses, car, dans l'ensemble, ce projet de loi ne traitait pas de la vie privée. Il concernait bien des libertés civiles et peu d'entre elles traitaient de la vie privée. C'est pourquoi je n'ai même pas soutenu une loi de temporisation, parce que j'ai dit que ces modifications me paraissaient franchement relever du bon sens. Je n'aurais probablement pas vu d'objections à ces modifications-là avant le 11 septembre, pour être bien clair, parce qu'elles ne m'ont pas donné l'impression d'être des atteintes déraisonnables.
Par exemple, le fait que, si le Centre de la sécurité des télécommunications intercepte une communication provenant d'un terroriste vivant en Italie, il n'est plus obligé de se débrancher si cette personne appelle un complice au Canada ne me paraît pas déraisonnable, et cela ne m'aurait pas semblé déraisonnable avant le 11 septembre.
Je crois que nous devons être très prudents en utilisant ce modèle. Mais, bien sûr, nous nous écartons un peu du sujet.
J'allais dire, vous avez pris l'exemple des armes à feu, qui était une analogie très intéressante pour une autre raison. Je suppose qu'en général, au Canada, les armes à feu représentent un plus grand danger pour les agents de police que le VIH, par exemple. Pourquoi ne pas dire, par exemple, à quel point des vies seraient améliorées, les vies d'agents de police seraient sauvées, si nous disions simplement qu'en aucun cas, au Canada, une personne autre qu'un agent de police ne serait autorisée à posséder une arme à feu? Si vous vous faites prendre avec une arme à feu, vous allez en prison pour le reste de votre vie.
Cela simplifierait bien des points pour les autorités policières. C'est un argument qui pourrait être avancé. Et le point que je soulève est qu'il est toujours possible de faire valoir que certaines choses augmenteraient la sécurité des personnes qui ont des métiers dangereux, mais qu'il faut faire attention de ne pas choisir seulement ce qui ne nuit pas à nos intérêts.
M. Peter MacKay: Mais vous touchez à une question de propriété. C'est la possession d'un bien par rapport à l'intégrité physique d'une personne.
M. George Radwanski: Sauf le respect que je vous dois, je crois que votre sang est encore davantage votre propriété.
M. Peter MacKay: Oh, il n'y a pas de doute, mais en cela, le choix ne vous appartient pas, tandis que vous pouvez choisir de posséder certains biens.
M. George Radwanski: Je crois que vous renforcez mon argument, mais je n'en suis pas sûr.
Le président: Sur ce, nous allons passer à M. Sorenson, pour trois minutes.
M. Kevin Sorenson: Je ne pense pas que M. MacKay renforçait votre argument.
J'ai un commentaire, plutôt qu'une question. Je ne suis pas sûr d'être d'accord avec votre dernière déclaration, à savoir que les armes à feu posaient davantage de risque pour la GRC ou pour nos agents de police que le VIH. Si vous prenez le nombre d'agents de police en service qui, dans notre pays, se trouvent sur les lieux d'un accident, qui sont sur les bas-côtés des routes et qui informent des proches que leur conjoint est décédé, je crois qu'il y a là un plus grand risque pour les agents... parce que je les ai vus. J'ai vu des agents de police sur place, avec les ambulances, qui aidaient des personnes à sortir des véhicules.
En ce qui concerne la modernisation, c'est exactement ce à quoi nous faisons allusion. Ce n'est plus forcément l'arme à feu qui les menace; c'est une petite écorchure sur la main ou le bras et le fait de tirer une personne couverte de sang. Cela commence à menacer la tranquilité d'esprit.
J'estime que ce projet de loi relève du bon sens et que nous devons l'appuyer.
Je ne vais pas entrer encore une fois dans le débat sur les armes à feu, mais je pense simplement que nous vivons à une époque différente. Il s'agit de quelque chose que ces gens, de qui nous attendons le maintien de la paix, de qui nous attendons l'application des mesures d'urgence et le souci des vies des gens, ont demandé; ils en reconnaissent la nécessité. Je ne vois vraiment pas comment le nombre d'atteintes à la vie privée prime dans tout ceci.
M. George Radwanski: Je crois que la question est que, dans ce cas, la grande atteinte surgit dès le moment où une loi de cette nature est élaborée. C'est l'adoption d'une loi de ce genre qui restreint les droits, sans tenir compte du nombre de fois où elle est invoquée, ni du fait qu'elle est rarement invoquée la première année, mais très souvent en cinq ans. La véritable atteinte à la vie privée est le moment où nous disons que l'État peut faire cela.
Je veux être prudent sur certains des autres points que vous avez soulevés. Je pourrais y répondre, mais, bien que j'apprécie un bon débat, je crois que je dois faire attention de ne pas tourner cette question en une joute d'esprit ou en débat. Mon rôle est de vous présenter le point de vue de la vie privée. Vous en entendrez bien d'autres.
Á (1145)
Il m'appartient de vous dire, de mon mieux, ce qu'il faut considérer sur le plan de la vie privée et de vous donner mon avis sur la question en jeu. Je ne suis pas sûr de vouloir la débattre en profondeur, parce que je ne crois pas que cela fasse partie de mon rôle, bien que je sois heureux de le faire.
Le président: Monsieur Strahl.
M. Chuck Strahl: C'est une position différente car nous avons des droits concurrents. La vie privée en est un et c'est un droit dont vous êtes spécialiste et dont vous vous faites l'avocat. En ce sens, je comprends votre position.
Le projet de loi Patten de l'Ontario, le projet de loi 105, traite du prélèvement obligatoire d'échantillons de sang en vue de protéger les travailleurs de la santé ou les travailleurs en général du point de vue de la santé. Je ne sais pas s'ils ont considéré autant de préoccupations en matière de vie privée que nous le faisons ici pour ce projet de loi, ou s'ils envisagent de le faire. Avez-vous commenté ce projet de loi?
M. George Radwanski: On ne m'a pas demandé de le faire et, bien sûr, les lois de l'Ontario ne sont pas de mon ressort, bien que, comme dans le cas de notre loi générale sur la santé où l'on se demandait si elle serait en grande partie semblable à la loi fédérale sur le secteur privé, on m'ait invité à donner mon avis, ce que j'ai fait. Mais en général, je ne commente pas les lois provinciales à moins d'avoir une raison pressante.
Je suggèrerais que les mêmes critères que j'ai abordés aujourd'hui s'appliquent également dans ce cas: les quatre tests que j'ai mentionnés, c'est-à-dire nécessité, efficacité, proportionalité et disponibilité des solutions de rechange. Comme je n'ai pas étudié le projet de loi, ni les arguments en sa faveur ou à son détriment, je ne pourrais pas vous dire quelle serait ma position.
M. Chuck Strahl: En Ontario, tous les partis ont appuyé le projet de loi, mais, bien sûr, toutes ces personnes ne sont pas forcément des spécialistes de la vie privée, donc qui sait ce qu'elles feront.
Vous avez invoqué un argument fondé sur la théorie selon laquelle il s'agissait d'un terrain glissant. Je crois qu'il n'y a pas grand chose qui puisse vous persuader que les renseignements pris... Ou peut-être, vous pouvez faire la distinction pour nous. Il y a la vie privée d'une personne, la capacité de dire que c'est mon sang, personne d'autre ne l'aura. Ensuite, il y a la protection des renseignements personnels après le prélèvement, qu'il soit fait dans le cabinet d'un médecin ou dans un centre d'échange de seringues. C'est l'idée de la confidentialité des renseignements, pour qu'ils ne circulent pas dans la collectivité et ainsi de suite. Supposons que nous allons l'appuyer. Nous disons, merci, Monsieur Radwanski, mais cela nous est égal, nous allons le faire quand même. Y a-t-il des choses disponibles sur la protection des renseignements qui vous persuaderaient que les renseignements, une fois utilisés pour le traitement d'un agent de police, par exemple, resteront confidentiels? Ou est-ce qu'une fois que ces renseignements sont pris, ils se retrouveront quelque part sur Internet et tout le monde le saura? Existe-t-il quelque chose qui puisse protéger ces renseignements, comme des sanctions en cas de transmission, des sanctions contre le médecin, ou alors effacer les noms sur les flacons? Y a-t-il quelque chose qui puisse être fait pour protéger les renseignements personnels, une fois l'échantillon prélevé?
M. George Radwanski: Ma première observation est qu'il est important de ne pas employer les termes vie privée, protection des renseignements et confidentialité de façon interchangeable. Ce sont des concepts très différents. La vie privée est votre droit de contrôler l'accès à votre personne et à des renseignements vous concernant. Par définition, ce droit, dans la situation que vous décrivez, est rejeté, violé.
Une fois que ce droit a volé en éclat, il est très difficile d'en recoller les morceaux, car une fois que l'on sait quelque chose, on ne peut pas faire marche arrière. En bref, vous pouvez avoir de bonnes précautions sur le plan de la protection des renseignements, bien qu'aucune précaution, comme vous le savez, ne soit parfaite, mais, bien évidemment, toutes les sanctions du monde n'empêcheront pas le destinataire ou la personne qui demande le test de donner les résultats à autrui.
La loi, pour des raisons qui ne me sont pas claires, mentionne que l'agent de la paix, par exemple, connaîtra aussi les résultats du test, ce qui, selon moi, n'a aucun sens.
Á (1150)
M. Chuck Strahl: Nous avons retiré cet élément.
M. George Radwanski: Ce que je disais, c'est que quand le vin est tiré, il faut le boire. Ce genre de pensées m'inquiète donc.
J'aimerais toutefois soulever un point, parce que vous m'en avez donné l'occasion. Mais j'y pensais de toute façon. J'espère que le comité, sauf le respect que je vous dois, décidera de ne pas donner suite à ce projet de loi.
Mais si vous décidiez, en principe, que vous alliez y donner suite en dépit des préoccupations concernant la vie privée que j'ai soulevées, j'apprécierais vraiment, sans changer d'avis sur le fait de m'y opposer, avoir la possibilité de revenir discuter et faire contre mauvaise fortune bon cœur—si nous en parlions disposition par disposition, quels passages devraient être modifiés pour les rendre moins nuisibles—bien que ce ne soit en aucun cas une approbation de ce projet de loi, parce que je ne peux, dans les circonstances actuelles, l'approuver.
Le président: Merci beaucoup.
Monsieur MacKay.
M. Peter MacKay: Merci, Monsieur le président.
Simplement pour faire le suivi de cette question de politique d'intérêt public, il me semble que l'admistration actuelle a commencé l'exercice, intellectuel ou autre, consistant à évaluer les intérêts opposés. Pour reprendre l'expression de M. Strahl mentionnant un terrain glissant, il y a évidemment des moments où des personnes comme vous, ou des représentants du gouvernement ou les tribunaux interviennent et essaient de mettre le doigt sur la politique ou sur le terrain glissant et disent «Cela s'arrête ici».
Les tribunaux ont beaucoup contribué et sont parfois beaucoup intervenus dans ces changements. L'utilisation de l'ADN est un exemple qui vient à l'esprit. Dans le contexte judiciaire, nous avons vu des cas où des affaires graves—des meurtres ou des viols—ont été rejetées parce que la police n'avait pas pris les bonnes décisions relativement à la façon dont elle avait utilisé l'ADN, mais, plus important encore, à la façon dont elle se l'était procuré.
L'exercice que je vous suggère est très ouvert relativement à ses objectifs et aux personnes dont on essaie ici de protéger les droits. ll me semble que l'utilisation de mandats ou de protection contre la négligence est un domaine où nous pouvons, en tant que comité—en ramenant ceci à l'exercice tangible d'élaboration d'une loi qui soit acceptable—si cela doit fonctionner, mettre en place des mesures de protection des renseignements personnels.
Le fait de permettre à une personne qui, à défaut d'un meilleur terme, est le donneur d'une maladie ou d'un trouble sanguin pouvant être dangereux d'avoir droit aux protections dont M. Strahl parle—la garantie que cela ne sera pas utilisé à d'autres fins que celle de déterminer si cette personne a transmis sa maladie—ne voyez-vous pas du mérite à poursuivre cela? Pensez-vous que ce projet de loi est de nature à porter atteinte au droit d'une personne à la protection de son propre sang, de sa propre maladie, en d'autres termes, de transmettre—j'ai utilisé cette phrase avec une personne qui était avec nous au début de cette semaine et qui est atteinte du sida—leur propre tragédie, leur propre malchance, que ce soit volontairement ou involontairement?
Si ces personnes savent qu'elles sont malades mais qu'elles ne souhaitent pas le confirmer ni se soumettre à des tests pour que l'autre personne puisse savoir comment réagir, en savoir assez pour subir un traitement ou se comporter d'une certaine manière pour protéger ses proches—cela, pour moi, fait pencher la balance. Je trouve étonnant que nous parlions de la volonté du gouvernement de tenir une banque de données génétiques, ou de la décision récente d'enfin adopter un registre des délinquants sexuels ou un registre des armes à feu—toutes ces choses vont dans la même direction—mais que, lorsqu'il s'agit de protéger de façon altruiste celles et ceux qui nous protègent, qui sont de bons samaritains, vous semblez hésiter à même l'envisager.
Je n'essaie pas d'amorcer un obscur débat intellectuel avec vous, et je ne cherche pas à vous défier en termes de capacité intellectuelle, parce que vous pourriez facilement me distancer à cet égard. C'est contre votre réticence à même envisager ce genre de loi dans le cadre d'une politique d'intérêt public que je lutte.
Á (1155)
M. George Radwanski: Eh bien, je dirais, Monsieur, que malgré votre modestie, vous êtes un brillant débatteur et un interlocuteur certainement intéressant sur ces questions. Je suis désolé de le mentionner, mais vous avez encore une fois illustré ce que je venais de dire. Vous avez cité trois exemples de lois qui ont pour effet de considérablement restreindre le droit à la vie privée et avez ensuite demandé: «Comment le gouvernement peut-il faire ces trois choses et ne pas faire cette quatrième qui est vraiment une bonne chose et qui limiterait encore davantage le droit à la vie privée?» C'est exactement ce que je dis et ce que je disais tout à l'heure.
En dehors de l'atteinte portée par cette disposition, c'est exactement le terrain glissant dont je parle. Nous adoptons ce projet de loi pour une très bonne raison: pensez à tous les gens qui en bénéficieront. Nous avons aujourd'hui quatre projets de loi. Donc, lorsque le prochain projet de loi, qui fera aussi du bien tout en limitant le droit à la vie privée, arrivera, si nous avons une conversation semblable, vous pourrez dire: «Le gouvernement autorise même le prélèvement et l'analyse d'échantillons de sang. Comment pouvez-vous discuter? Je suis très surpris que vous ne soyez pas d'accord avec ce cinquième projet de loi.»
Sauf le respect que je vous dois, c'est ainsi que l'on se retrouve sans aucun droit à la vie privée.
M. Peter MacKay: Ce que je dis, c'est qu'un plus grand bien découle de cette atteinte à la vie privée que des autres. Nous ne sommes peut-être pas d'accord là-dessus, mais mon but n'est pas de confirmer ce que vous venez d'avancer. Je dis simplement que, si ce que le gouvernement a fait est acceptable et si vous, de par votre présence ici, je suppose, appuyez ces projets de loi, parce que je ne vous ai pas entendu...
M. George Radwanski: Non, je ne les appuie pas.
M. Peter MacKay: Je ne vous ai pas entendu vous prononcer.
M. George Radwanski: Cela serait une mauvaise supposition.
M. Peter MacKay: Je ne vous ai pas entendu soulever d'importantes préoccupations relativement au registre des armes à feu ou à la banque de données génétiques.
M. George Radwanski: Avez-vous lu mon rapport sur les armes à feu?
M. Peter MacKay: Non.
M. George Radwanski: Pourquoi ne pas en reparler lorsque vous l'aurez lu?
M. Peter MacKay: Avec plaisir. Je prendrai le temps de le faire.
M. George Radwanski: Allez-y. Je dois dire que je suis surpris, étant donné votre intérêt pour cette question, que vous n'ayez pas lu le rapport du commissaire à la protection de la vie privée à ce sujet.
M. Peter MacKay: Très occupé.
M. George Radwanski: Moi aussi. Cela a demandé vraiment beaucoup de travail pour le rédiger.
M. Peter MacKay: Ce que je veux dire, c'est qu'étant donné le bien qui découlera, les avantages sur le plan humain, du fait d'autoriser cette atteinte, quoiqu'avec des protections, aucun détriment tangible ne l'emporte sur les avantages. Voilà ce que je voulais dire.
M. George Radwanski: Eh bien, nous pourrions passer une demi-heure là-dessus seulement, Monsieur. Accordons-nous donc pour dire que le bien est désirable.
Le président: Nous n'allons pas y passer une demi-heure et j'espère que Monsieur MacKay se rend compte qu'on vient de lui accorder une grande latitude.
Une dernière observation, Monsieur le commissaire.
M. George Radwanski: J'aimerais récapituler les points que j'ai déjà abordés. Je ne désire en aucun cas dénigrer ni minimiser le genre de souffrance humaine que ce projet de loi s'efforce de réduire ou de soulager, mais il est essentiel que, dans une société comme la nôtre, qui se rattache à certaines valeurs et à certains droits fondamentaux de la personne, nous ne limitions pas excessivement--et, dans ce cas, je crois que ce serait excessivement--un droit fondamental de la personne comme le droit à la vie privée, à la poursuite de ce qui est certainement un bien, mais un bien non proportionnel à l'énormité de l'atteinte ni au précédent qui serait ainsi créé.
Le président: Merci beaucoup.
Je vais suspendre la séance pendant cinq minutes. Des témoins sont prêts pour le prochain groupe. Cela nous amènera à 13 h 30.
Merci, Monsieur le commissaire.
 (1200)
 (1211)
Le président: Nous reprenons la séance numéro 64 du Comité permanent de la justice et des droits de la personne. Nous étudions le projet de loi C-217, loi permettant le prélèvement d'échantillons de sang au profit des personnes chargées de l'application et de l'exécution de la loi et des bons samaritains et modifiant le Code criminel.
Jusqu'à environ 11 h 30, nous entendrons les témoins suivants : tout d'abord Matthew Perry, représentant la HIV & AIDS Legal Clinic (Ontario); puis Bruce Miller et Natalie Hiltz, de l'Association des policiers de l'Ontario et ensuite Patrick Healy, de l'université McGill.
Donc, celles et ceux qui ont fini de manger en premier peuvent commencer et je demanderais aux témoins de limiter leurs présentations à dix minutes ou moins pour nous donner la chance de dialoguer avec les membres du comité. Je vais commencer par M. Perry.
M. Matthew Perry (agent des services juridiques communautaires, codirecteur par intérim, HIV & AIDS Legal Clicic (Ontario)): Merci. Je vous remercie de m'avoir donné l'occasion de m'adresser à ce comité.
La HIV & AIDS Legal Clinic (Ontario) est un organisme communautaire de bienfaisance enregistré, une clinique d'aide juridique sise en Ontario qui fournit des services juridiques directs aux personnes à faible revenu atteintes du VIH et du sida dans la province.
Comme beaucoup d'entre vous le savent, nous nous sommes beaucoup intéressés aux questions soulevées par le projet de loi 105 de l'Ontario et nous avons également de sérieuses préoccupations relativement au projet de loi C-16.
Notre position quant au projet de loi C-217, en quelques mots, est que, tel quel, ce projet de loi n'est pas une réponse adéquate et ne correspond pas à son but, parce qu'il existe de meilleures démarches plus équilibrées dans d'autres secteurs et d'autres exemples dans d'autres secteurs; parce que le Code criminel n'est pas l'instrument adéquat pour traiter de ce que l'on assume être essentiellement une question de santé et de vie privée; parce que les tests obligatoires violent les droits à la vie privée et à la sécurité de la personne visés par la Charte des droits et libertés; parce qu'il sape les principes juridiques et éthiques qui soulignent le consentement éclairé et parce le projet actuel ne contient pas de restrictions en matière de vie privée et de confidentialité.
Je tiens à aborder quelques questions concernant le projet de loi C-217. Certaines ont déjà été soulevées et j'aimerais les renforcer.
La première, c'est que nous parlons d'une situation où intervient le projet de loi C-217, où une personne est considérablement exposée à un virus, où il est possible de tester la personne source et où cette personne a refusé de subir ces tests. Le fait est que la plupart des gens acceptent de s'y soumettre et un certain nombre de statistiques le montrent. Ces documents vous ont probablement aussi été présentés au cours d'autres présentations.
Ce que j'aimerais faire remarquer, c'est que, dans un exemple tiré d'une enquête effectuée à Denver, au Colorado--qui concernait le service de police de cette ville--94 p. 100 des personnes à qui on l'avait demandé ont consenti à subir ces tests. Le Canadian Needlestick Surveillance Network signale que 83 p. 100 des personnes sources dans des cas de blessures causées par des seringues ont accepté de se soumettre à ces tests.
Vous avez probablement entendu, il y a deux jours, qu'en Colombie-Britannique, je crois qu'il s'agissait de l'hôpital St. Paul de Vancouver, dans 1 700 cas d'exposition, seulement deux personnes ont refusé de subir les tests.
La deuxième question que je souhaite aborder est le risque réel de transmission. Lorsqu'il s'agit de transmission percutanée--c'est-à-dire une seringue sous la peau--le risque d'infection est de 0,3 p. 100. Lorsqu'il s'agit de transmission muco-cutanée, dans quel cas les muqueuses entrent en contact avec des substances corporelles infectées, le risque d'infection atteint 0,1 p. 100; ce risque est inférieur à 0,1 p. 100 lorsqu'il s'agit d'une lésion cutanée.
Nous estimons qu'il existe en fait de meilleurs moyens de régler les cas d'exposition professionnelle aux pathogènes à diffusion hématogène comme l'hépatite B, l'hépatite C et le VIH. Par exemple, dans le cas de l'Ontario, des lignes directrices et des protocoles obligatoires renseignent les travailleurs sur les services d'urgence. Ce protocole stipule qu'une personne qui connaît l'exposition professionnelle communique avec le médecin hygiéniste et que des mesures soient recommandées. Ces étapes mettent la personne touchée en présence de personnes qui ont une entente et des connaissances médicales relatives aux risques de transmission.
Une autre question que j'aimerais aborder concerne les associations chefs de file qui se sont opposées aux tests obligatoires. Ces organismes comprennent l'Association des infirmières et infirmiers du Canada; l'Association canadienne des infirmières et infirmiers en sidologie; l'Association médicale canadienne; des syndicats comme le SCFP et le SEEFPO dans le cas de l'Ontario; la Société canadienne du sida; l'Association canadienne de santé publique et, plus récemment, le médecin hygiéniste en chef de l'Ontario.
 (1215)
Nous estimons qu'étant donné la structure du projet de loi C-217, un travailleur exposé et un juge ne sont pas les meilleures personnes pour déterminer le risque d'exposition ni d'évaluer ce risque pour décider de l'émission d'un mandat qui autoriserait le prélèvement puis l'analyse d'un échantillon de sang. Cette tâche devrait être la responsabilité d'une personne dont les connaissances médicales sont plus développées et qui comprend mieux les risques d'exposition, les risques réels d'infection découlant de cette exposition.
Ma principale préoccupation et la principale raison de ma présence ici est de souligner les préoccupations en matière de vie privée et de confidentialité soulevées par ce projet de loi. Comme il a été mentionné aujourd'hui dans ce comité, des garanties sur le flot d'information font défaut relativement aux résultats de l'analyse d'un échantillon de sang. De par notre expérience, nous avons appris que les renseignements médicaux figuraient parmi les renseignements les plus délicats. Dans mon travail, les renseignements touchant la séropositivité d'une personne sont extrêmement confidentiels. La raison de cette confidentialité provient des conséquences de la communication de ce genre de renseignements.
Je pourrais vous donner d'innombrables exemples--je vous en donnerai deux--de personnes qui ont été forcées de quitter leur collectivité parce que leur séropositivité avait été dévoilée. Elles ont subi des dommages corporels parce que des gens avaient appris leur séropositivité, elles ont perdu leur emploi à cause de leur séropositivité et la protection offerte par les droits de la personne n'arrive que trop tard et ne réprime pas tout le mal qui découle de la communication de ce renseignement.
J'ai parlé à des gens à qui l'on avait demandé de quitter le fauteuil de dentiste après qu'ils avaient informé leur dentiste de leur séroposivité parce qu'ils pensaient que c'était la chose à faire. On les a ensuite menacés de les traîner en justice parce qu'ils n'avaient pas communiqué cette information. Aucune loi ne les oblige à le faire.
Nous savons que les immigrants qui se révèlent séropositifs se voient régulièrement refuser le statut de résidents permanents et nous savons que les déplacements des personnes dont la séropositivité a été communiquée deviennent restreints.
Les conséquences de la communication de la séropositivité sont considérables et j'aimerais que cela soit bien clair étant donné nos préoccupations, préoccupations auxquelles le commissaire à la protection de la vie privée vous a rendu attentifs relativement aux protections de la vie privée en vertu de cette loi.
Je ne pense pas que les tests obligatoires soient une première réponse adéquate à l'exposition professionnelle. Je ne trouve pas très logique qu'il revienne à une personne qui a été exposée, qui est aux prises avec le choc émotif de cette exposition--et ce choc est énorme, c'est certain--de demander à un juge d'autoriser la communication de ces renseignements.
J'aimerais rapidement soulever quelques questions relatives au projet de loi 105 de l'Ontario et souligner que, lorsque ce projet de loi a été discuté en comité, une seule personne a été invitée à participer, le médecin hygiéniste en chef et il n'a pas appuyé ce projet de loi. Après les débats du comité, certaines modifications ont été apportées au projet de loi et je voudrais souligner quelques différences importantes entre le projet de loi 105 et celui dont nous discutons aujourd'hui.
La première est que le projet de loi 105 entre dans le contexte d'une loi sur la santé, et il s'agit ici d'une question de santé et de vie privée. S'il doit figurer quelque part, c'est un meilleur contexte que le Code criminel.
Deuxièmement, la personne qui détermine la nécessité d'émettre un ordre de prélèvement a une formation et des connaissances médicales et comprend probablement mieux les risques de transmission lors d'une exposition donnée.
Troisièmement, le requérant doit fournir le rapport d'un médecin avec sa demande. Cela signifie qu'il a dû voir un médecin qui a évalué l'exposition et le risque soulevé par celle-ci, parlé des conséquences de cette exposition et d'une prophylaxie post-exposition et fait des recommandations relatives à une prophylaxie post-exposition.
Pour terminer, le projet de loi 105 offre des garanties quant à la procédure. Une personne faisant l'objet d'un ordre de prélèvement peut faire appel dans les 15 jours suivant la réception de cet ordre. Cette personne peut également interjeter appel afin de suspendre cet ordre.
Je vais récapituler, et je parlerai davantage durant la période de questions, en disant que nous n'appuyons pas le projet de loi C-217. Nous trouvons que c'est une réponse trop sévère à une situation très réelle, mais ce n'est pas la bonne réponse et il existe de meilleurs endroits et des façons plus appropriées de traiter la question de l'exposition professionnelle.
Merci.
 (1220)
Le président: Merci beaucoup.
Monsieur Miller et Madame Hiltz, vous avez dix minutes.
Mr. Bruce Miller (administrateur, Association des policiers de l'Ontario): Je tiens à vous remercier de me donner l'occasion d'être présent ici aujourd'hui. Je m'appelle Bruce Miller et je suis l'administrateur de l'Association des policiers de l'Ontario, qui représente 13 000 membres des services policiers municipaux de première ligne de la province. Avant d'assumer mes fonctions d'administrateur, j'ai été policier au Service policier de London pendant 22 ans. Aujourd'hui, je suis accompagné de Natalie Hiltz, du Service policier régional de Peel.
Nous sommes en faveur de l'adoption expéditive du projet de loi C-217 et nous appuyons la position énoncée par l'Association canadienne des policiers et des policières (ACP). Beaucoup de documentation que nous aurions insérée dans notre Mémoire figure dans celui de l'ACP et, par conséquent, nous ne l'avons donc pas reproduite.
Il nous a été impossible de traduire toute la documentation qui figure dans notre Mémoire en raison du court préavis nous convoquant à la présente audience et je vous offre mes excuses à cet égard.
Natalie et moi ne sommes pas des experts médicaux. Nous ne sommes pas des avocats de droit constitutionnel. Nous ne disposons pas d'une foule de statistiques. Néanmoins, nous espérons vraiment vous faire part du point de vue du personnel policier ontarien de première ligne en nous fondant sur nos constatations personnelles.
Nous sommes donc ici aujourd'hui pour mettre l'accent sur le besoin d'administrer des tests sanguins obligatoires à des personnes qui risquent d'avoir infecté des intervenants d'urgence, des victimes d'actes criminels et de bons Samaritains. Je me rend compte que certains aspects, les victimes d'actes criminels en tous cas, ne sont pas couverts par ce projet de loi.
Cela s'appliquerait au policier mordu par un contrevenant qui apprend que ce dernier a le sida. Ce policier devrait être en mesure de prendre une décision éclairée, quant au traitement qui s'impose. La victime d'agression sexuelle devrait avoir ce même droit de sens commun. Le bon Samaritain qui pratique la réanimation bouche à bouche devrait avoir le droit de savoir s'il a mis sa propre santé en péril par ce contact.
En Ontario, nous avons maintenant une loi à cet égard. En effet, le projet de loi 105, la Loi de 2001 modifiant la Loi sur la protection et la promotion de la santé, a été adopté le 13 décembre à quelques heures seulement de la clôture de la session législative. Le député Garfield Dunlop avait introduit ce projet de loi d'initiative parlementaire à la suite d'audiences consultatives tenues à la grandeur de l'Ontario. De nombreux groupes avaient eu l'occasion d'y assister, mais certains ont choisi de ne pas le faire. Le projet de loi fut donc introduit par un député conservateur et le critique libéral en matière de justice présenta la motion. Le projet de loi 105 fut adopté par un vote de 80 à 2 et sera proclamé au cours de 2002, une fois que les programmes éducatifs seront en place.
L'appui accordé par la population et le gouvernement à ce projet de loi est renversant. Pourquoi? Parce qu'il tombe sous le sens. Nous devons faire tout notre possible pour protéger ceux et celles qui nous protègent. À un moment donné, il faut faire passer les besoins des victimes devant les droits des contrevenants.
Nous disposons d'innombrables exemples d'attaques délibérées contre le personnel policier, perpétrées par des gens porteurs (ou prétendant être porteurs) du VIH ou atteints d'autres maladies. Les gants de caoutchouc et les précautions universelles ne font que diminuer le risque. Délibérément, on a craché sur certains de nos membres et on les a mordus; certains de nos membres ont été exposés aux écoulements de sang ou à d'autres substances biologiques d'un agresseur ou d'un autre individu. Je le sais, parce que cela m'est arrivé à plusieurs reprises.
Des lois fédérales laxistes et une législation inadéquate, ainsi que les dispositions actuelles régissant la détermination des peines ne servent qu'à multiplier le nombre de ces incidents. Il nous faut protéger les victimes, ainsi que ceux et celles qui nous protègent. Nous respectons le droit à la vie privée, mais à un moment donné, nous devons établir l'équilibre entre ce droit et le besoin de protéger la société.
L'administration de tests sanguins obligatoires permettrait aux personnes de prendre des décisions dûment éclairées, relativement au traitement post-exposition. Le «cocktail chimique» (comme il est convenu de l'appeler) administré au victimes en post-exposition entraîne ses propres risques médicaux bien documentés, comme de graves maux de tête, la nausée perpétuelle, l'épuisement total, de l'urticaire et la perte de cheveux. Ils peuvent durer plusieurs mois, selon la personne atteinte, la combinaison des médicaments ingérés et la longueur du traitement. Le meilleur traitement disponible aujourd'hui peut être qualifié de «surdestructeur» pour éliminer le virus nuisible. Tout en nous réjouissant de pouvoir recourir à ce traitement, nous ne voulons pas y recourir sans que ce soit absolument indispensable.
Nous avons donc besoin d'une législation pour nous donner droit au maximum d'information possible de sorte que nous puissions prendre une décision éclairée, de concert avec nos médecins, quant à la forme de traitement qui s'impose, s'il y a lieu.
 (1225)
Il y a quelques années, j'ai appliqué les techniques de réanimation à une personne qui n'a malheureusement pas survécu. Le coroner redoutait que cette personne eût souffert de méningite cérébrospinale et ordonna une autopsie immédiate qui confirma son soupçon. On me téléphona chez moi en fin de soirée pour me dire de me rendre à la salle d'urgence locale afin de commencer le traitement sans tarder. J'obtempérai. Si cette personne avait survécu, j'aurais risqué de ne jamais être mis au courant de cette information.
Avant de terminer, permettez-moi de vous présenter Natalie Hiltz, du Service policier régional de Peel. En 1997, Natalie fut mordue en effectuant une arrestation et je lui demanderais de vous raconter son histoire.
Constable Natalie Hiltz (Association des policiers de l'Ontario): Merci, Bruce.
Je suis agente de police au Service policier régional de Peel et je veux vous faire part d'un incident qui m'est arrivé. J'avais alors 26 ans et j'étais fraîchement recrue. C'était le samedi 14 juin 1997, à huit heures du matin, au début d'une journée de travail ordinaire, pensais-je.
On me dépêcha sur les lieux d'une querelle familiale avec un autre policier. À notre arrivée, nous avons séparé les deux personnes impliquées, en respectant le protocole de notre service. Je m'occupais de la femme, mais elle me poussa et se sauva. Je l'ai poursuivie et elle me mordit la main gauche pendant que je la mettais en état d'arrestation. J'avais la peau lacérée et la blessure saignait.
On découvrit qu'elle avait mordu une autre personne avant mon arrivée. On m'apprit aussi qu'il s'agissait d'une prostituée bien connue et qu'elles abusait beaucoup de drogues intraveineuses, en plus d'être toxicomane au crack. C'était une itinérante qu'on croyait porteuse du VIH séropositif. Elle avait l'air malade et ses gencives saignaient. Je savais que j'étais dans le pétrin.
Je me rendis immédiatement à l'hôpital Credit Valley où le médecin me prévint que le risque de contagion était élevé. Il me conseilla de prendre le cocktail chimique, ajoutant qu'il était efficace à 80 p. 100. La personne qui m'avait mordue refusa de subir les tests.
Je croyais que ma vie était en danger. L'hôpital insista pour que je paye les médicaments avant de daigner commencer le traitement. J'ai appelé mon fiancé qui m'a apporté une carte de crédit pour que je puisse payer les médicaments qui pouvaient me sauver la vie et qui ne pouvaient m'être donnés avant que je les paie.
Les effets secondaires furent sévères. Je souffrais de fatigue chronique et de nausées mais les effets affectifs étaient pires. Le médecin m'avait prévenue que ces médicaments risquaient de causer le cancer ou des malformations congénitales. Je m'inquiétais des effets que subiraient mes êtres chers et les gens autour de moi.
J'ai réussi à passer au travers de cette épreuve grâce au soutien de mon fiancé, de ma famille, de mes amis, de mes collègues, ainsi que de mon association policière et de mon corps policier, le Service policier de Peel.
Mon histoire se termine bien. D'après mes examens, je suis en pleine santé. Mon fiancé est maintenant mon mari et nous attendons notre premier bébé.
Je suis ici aujourd'hui parce que je suis passée par des temps très difficiles et que je veux faire tout mon possible pour alléger le fardeau de ceux et celles qui devront sûrement passer par là aussi. Je ne suis pas en mesure de vous énumérer les risques et le nombre d'expositions, chiffres à l'appui. Tout ce que je peux faire, c'est de vous raconter ce que j'ai vécu moi-même.
En l'occurrence, la personne qui m'a mordue était effectivement porteuse du VIH séropositif. D'une façon ou de l'autre, j'aurais été obligée de prendre les médicaments.
Je ne peux vous dire ce que j'aurais fait si la personne avait subi les tests et avait été déclarée saine, si j'avais pris ces médicaments sans que cela ne soit nécessaire, m'exposant ainsi à un risque de cancer et exposant tout enfant que je pourrais avoir à des anomalies congénitales.
Cependant, je peux vous dire que j'aurais basé ma décision sur des consultations avec mon médecin. Je peux vous dire que j'aurais été en mesure de prendre une décision éclairée, en possession de tous les renseignements possibles. Je peux vous dire que cela aurait enrayé beaucoup d'incertitude. Je peux vous dire que le prix affectif est élevé et que la nature humaine nous pousse à nous attendre au pire.
Nous avons donc besoin d'être en mesure de prendre des décisions éclairées en nous basant sur tous les renseignements possibles, pour nous protéger et pour protéger nos être chers.
Nous serions heureux de répondre à toutes les questions que vous voulez nous poser. Avant de terminer, je tiens à vous remercier de m'avoir donné l'occasion de venir ici aujourd'hui et je veux exprimer ma reconnaissance à Monsieur Strahl pour les efforts qu'il a déployés.
L'adoption de la Loi sur le prélèvement d'échantillons de sang est indispensable. Cependant, nous vous proposerions d'octroyer la même protection aux victimes d'actes criminels, dont les victimes d'agressions sexuelles, qu'aux bons Samaritains et aux intervenants d'urgence.
On dit aux Canadiens d'appeler le 911 pour obtenir de l'aide. Nous acceptons la possibilité que nous nous exposons au danger en répondant à leur appel. Aujourd'hui, Bruce et moi sommes ici au nom de nos collègues et camarades pour vous demander de nous aider et de nous appuyer. Nous vous prions de répondre à notre appel.
Merci.
 (1230)
Le président: Merci beaucoup pour votre présentation, qui a duré exactement dix minutes, à la seconde près.
Monsieur Healy.
M. Patrick Healy (professeur, Faculty of Law and Institute of Comparative Law, Université McGill): Merci beaucoup, Monsieur le président.
Je tiens à remercier le comité et ses membres de m'avoir invité à venir parler du projet de loi C-217 cet après-midi.
Je voudrais dire dès le départ que je ne peux que reconnaître la terrible angoisse que doivent connaître les personnes qui courent le risque d'être infectées ou d'être exposées à des infections dans le cadre du travail qu'elles effectuent dans l'intérêt du public.
Mes remarques cet après-midi se limiteront strictement à la validité juridique du projet de loi. J'en conclus que, premièrement, il ne s'agit pas d'une loi pénale valable relativement à l'autorité du Parlement par rapport au droit pénal.
Mes conclusions concernant la validité juridique de ce projet de loi sont les suivantes: premièrement, ce n'est pas du ressort du Parlement, relativement au droit pénal, de créer une loi de la façon dont ce projet a été élaboré; deuxièmement, j'estime que ce n'est pas non plus du ressort du Parlement d'élaborer ce genre de loi; troisièmement, s'il s'agissait d'une loi provinciale, elle représenterait un important défi constitutionnel; quatrièmement, certaines graves difficultés constitutionnelles liées à la Charte se dresseraient devant cette loi; et dernièrement, certains points techniques de la loi sont ouverts à la critique.
Je crois que vous avez probablement déjà entendu certaines de ces conclusions, mais je dirai très rapidement qu'en ce qui concerne la division des pouvoirs, il ne s'agit pas d'une loi qui tire sa validité de l'autorité du Parlement sur le droit pénal. Rien dans cette loi n'a trait à une enquête liée à une infraction ni à la poursuite d'une infraction; de plus, aucun but de droit pénal en accord avec la jurisprudence canadienne sur la question ne peut être déterminé dans cette loi.
Je répondrai avec plaisir aux questions du comité à ce sujet au fur et à mesure qu'elles se posent.
En ce qui concerne la Charte, il y aurait de toute évidence des difficultés liées aux fouilles et aux saisies déraisonnables, puisque cette loi envisage le prélèvement forcé de sang d'une personne. Il y aurait également, comme un témoin précédent l'a mentionné, des problèmes relatifs à la sécurité de la personne et à la protection garantie par l'article 7 de la Chartre.
En ce qui concerne certains points techniques, j'aimerais en porter quelques-uns à l'attention du comité.
La procédure envisagée dans ce projet de loi consiste à une demande de mandat émis par un juge. La première remarque à faire est qu'il n'y a aucune exigence relativement à une demande faite sous serment, ni à la validité technique d'un mandat émis par un juge.
Quant à la définition des «fonctions désignées», je comprends tout à fait que le projet de loi vise à protéger celles et ceux qui, dans l'exercice de leurs fonctions, sont chargés soit de l'application soit de l'exécution de la loi, mais c'est bien sûr plus que cela. Bien d'autres personnes seraient englobées. Et l'une des difficultés de la définition «fonctions désignées» est qu'elle est à la fois sous-inclusive et vague, étant donné le but de la loi ici présentée.
De façon plus générale, la demande de mandat envisagée dans le cadre de cette loi est bizarre, parce qu'essentiellement, elle prévoit un processus pénal pour un recours civil, c'est-à-dire que le requérant cherche à obtenir la divulgation obligatoire de renseignements liés à un diagnostic dans le cadre d'une procédure qui, sous certains aspects, ressemble à l'émission d'un mandat de perquisition, mais qui, comme je l'ai dit tantôt, n'a en fait aucun but pénal.
Une autre difficulté, qui apparaît à l'article 3 du projet de loi, est qu'il n'y a aucune exigence relative à des motifs raisonnables pour l'identification de la personne recherchée pour les tests. De plus, en ce qui concerne l'article 3--et cela me paraît très important--l'article n'est pas clair quant aux circonstances dans lesquelles une demande peut être formulée.
Si vous regardez de plus près la façon dont l'article 3 est formulé, il envisage deux cas tout à fait différents en ce qui concerne la fonction désignée. Il mentionne que :
a) il est entré en contact avec une substance corporelle de cette personne alors qu'il était dans l'exercice d'une fonction désignée auprès d'elle, ou |
--et ce «ou» définit quelque chose de complètement différent...
qu'il portait ou tentait de lui porter secours alors qu'il croyait que la vie de cette personne était en danger, |
Cette partie ne se limite pas aux fonctions désignées. Et si cette loi avait pour but d'être limitée ainsi, elle devrait l'énoncer clairement. C'est en supposant que cette loi est valable à part cela, mais je ne crois pas qu'elle le soit.
Quant à l'article 4, aucun mécanisme dans cette loi ne contraint la personne nommée pour les tests à comparaître. Rien dans le projet de loi n'indique par quel moyen cette personne serait informée.
 (1235)
En ce qui concerne l'article 6, rien ne prévoit d'aviser la personne recherchée pour les tests, ni la façon de le faire.
Je vais laisser l'article 7 de côté pour l'instant, si vous le voulez bien. J'aimerais passer directement à l'article 9, qui crée, ou prétend créer, une responsabilité entraînant une peine d'emprisonnement maximale de six mois pour omission ou refus de subir un examen sanguin. Je ne sais pas ce que c'est. On dirait que cela ressemble à quelque chose comme un pouvoir sur un outrage, un refus d'obéissance à l'ordonnance d'un mandat, mais aucune infraction n'a été définie. Il est impossible d'exposer quelqu'un à une responsabilité pénale s'il n'y a pas eu d'infraction. De toute évidence, cet article devrait être reformulé pour qu'il tienne compte de cette objection.
Le projet de loi ne prévoit pas de procédure pour obliger quelqu'un à justifier son omission ou son refus de comparaître. C'est-à-dire qu'il n'y a pas de procédure liée au préavis.
Ce projet de loi ne mentionne nulle part s'il est souhaitable de garder les échantillons prélevés d'une personne testée.
L'article 17, avec tout le respect que je vous dois, n'a pas de sens. Il traite de l'utilisation de certificats, puis stipule --et je comprends son but--qu'un certificat ne peut pas être utilisé lors d'une procédure criminelle sauf lors d'une procédure visée à l'article 9. Eh bien, cela vous dit que la loi envisage une responsabilité criminelle pour un refus ou une omission de comparaître, mais, en même temps, elle précise qu'un certificat pourrait être utilisé pour ce genre de procédure. Un certificat qui dirait quoi? La loi n'étudie que les certificats qui exposent le contenu de l'analyse. Il n'y a pas de certificat pour une omission ou un refus de comparaître. Je crains donc que l'article 17 n'ait aucun sens à cet égard.
Je vais m'arrêter là, Monsieur le président, et répondre aux questions des membres du comité.
 (1240)
Le président: Merci beaucoup.
Je vais passer à Monsieur Cadman, pour sept minutes.
M. Chuck Cadman: Merci, Monsieur le président. Je tiens à remercier les experts de leur présence.
Nous avons certainement entendu beaucoup de jargon juridique pendant ces dernières minutes. Je m'en rends compte et celles et ceux d'entre nous qui ne sont pas avocats s'en rendent encore mieux compte.
Je reviens à une observation que j'avais faite devant le groupe d'experts précédent, qui traitait davantage de la réalité de la rue. Nous entendons beaucoup parler des personnes qui sont exposées dans l'exercice de leurs fonctions. J'aimerais étudier davantage l'angle du bon samaritain, de la personne dont on n'attend pas qu'elle fasse ce genre de chose. J'avancerais que, particulièrement en cas d'accident de voiture et de choses comme ça, en général, la première personne sur les lieux n'est pas forcément un ambulancier ni un policier. C'est généralement un civil.
Encore une fois, comme je l'ai mentionné au groupe d'experts précédent, j'ai moi-même vécu cette expérience il y a environ 30 ans, lorsqu'un grave accident a eu lieu devant le restaurant où je me trouvais et que deux ou trois personnes ont été tuées. Il y avait 10 personnes dans le véhicule. Il y avait beaucoup de sang et mon beau-père et moi-même étions les premiers sur les lieux. Nous avons tiré des personnes hors d'une voiture pendant 15 minutes avant que les ambulanciers n'arrivent et nous étions couverts de sang. Maintenant, il y a 30 ans, nous ne connaissions évidemment pas les maladies infectieuses transmissibles dont nous devons tenir compte aujourd'hui.
Sans ce genre de loi, j'aimerais bien savoir comment nous ferions cela. Si elle n'a pas sa place dans le Code criminel, où devrait-elle être? Pour parler franchement: Pourquoi est-ce que je voudrais même aider, bon Dieu? Pourquoi sortir de ce restaurant et me trouver devant ce genre de situation? Sachant ce que je sais aujourd'hui, est-ce que je voudrais vraiment sortir et aider à tirer ces gens de là? C'est l'une des questions que je voudrais poser.
Deuxièmement, quelle est ma responsabilité si je reste là à dire «Non, je n'y vais pas» et si je retourne finir mon repas dans le restaurant en laissant des gens mourir? Quelle est ma responsabilité, dans ce cas? Je vais vous laisser répondre à ces questions.
M. Matthew Perry: Merci. Je répondrai à la première, mais pas à la seconde, car elle n'est pas de mon domaine.
En ce qui concerne la première question, je vais la ramener au temps présent. Dans l'exemple que vous avez donné, si vous avez été exposé lorsque vous avez tiré ces gens hors du véhicule, vous pouvez être préoccupé par cette exposition. En vertu du projet de loi C-217, vous pourriez avoir le droit, en tant que bon samaritain, de déposer une demande de mandat pour que l'une des personnes auxquelles vous avez été exposé doive produire un échantillon de sang qui puisse être analysé. Les résultats vous seraient communiqués pour vous aider à prendre une décision sur votre niveau de risque.
Du point de vue de la santé, cela ne va pas vous être très utile dans cette séquence d'évènements. S'il y a effectivement un risque considérable d'exposition, comme nous l'avons entendu, les décisions que vous devez prendre, premièrement, doivent tenir compte de l'exposition qui a eu lieu. Était-ce un risque d'exposition important? Y a-t-il un grand risque que vous ayez été infecté?
Deuxièmement, l'état de la personne que vous avez aidée est seulement l'un des renseignements qui entrent en jeu. C'est un renseignement qui entre en jeu, mais c'en est un parmi d'autres. Toute décision que vous devez prendre pour vous protéger et éviter d'être infecté doit être prise rapidement. La période idéale est dans les deux heures. Dans ce cas, le mieux est de parler à un médecin pour obtenir une évaluation du niveau de risque et de votre risque d'infection, afin de décider de quel genre de prophylaxie vous voulez commencer, si une prophylaxie est jugée nécessaire.
Le fait de connaître l'état de la personne qui peut avoir été la source de l'infection sera l'un des renseignements obtenus plus tard, après ces évènements, si le projet de loi C-217 est accepté. Ce renseignement pourra être utilisé pour évaluer le traitement à suivre. Dans l'exemple que nous avons entendu aujourd'hui, où une personne s'en tire et est séropositive, vous savez que la prophylaxie que vous avez déjà commencée doit se poursuivre à cause du risque d'infection.
Lorsque les résultats sont négatifs, vous recevrez un autre renseignement. Ce n'est pas un renseignement définitif non plus. C'est un autre renseignement qui indique que lorsque cette personne a fourni un échantillon de sang, elle a testé négatif pour le VIH, l'hépatite C ou l'hépatite B. Vous allez recevoir un autre renseignement dont vous tiendrez compte lorsque vous prendrez vos décisions. Vous pourriez décider, si le test du VIH était négatif, de ne pas continuer la prophylaxie jusqu'au bout. Il se peut que vous interrompiez la prophylaxie et que vous ne soyez pas infecté. Il se peut aussi que vous soyez infecté parce que ce résultat n'est pas définitif.
Le projet de loi C-217 ne va pas forcément résoudre le principal problème. De l'information sur les niveaux de risque, des renseignements réels et une évaluation approfondie de l'évauation du risque sont des renseignements plus importants dans l'immédiat. La première étape devrait être le test volontaire qui ne divulgue pas de renseignements confidentiels et qui ne porte pas atteinte au droit à la vie privée d'une personne. Comme je l'ai dit tantôt, et comme vous l'aurez entendu dire par bien d'autres avant cela et l'aurez lu dans la documentation, le taux de consentement des personnes visées dans ces circonstances, lorsqu'elles se rendent compte des enjeux, est très élevé.
 (1245)
Le président: Merci, Monsieur Perry.
Monsieur Miller.
M. Bruce Miller: Mon seul commentaire est que, provisoirement, en attendant une réponse, la personne est décédée. Pourquoi aideriez-vous? Je ne sais pas pourquoi vous devriez aider.
Ce milieu est en pleine évolution sur le plan médical. Les risques sont plus élevés dans la société d'aujourd'hui. Nous communiquons un message à la société et nous disons que nous devons aider. Nous avons toute sorte de programmes de formation en place pour la réanimation cardio-respiratoire et le bouche-à-bouche. Pour le citoyen ordinaire, honnêtement, si vous n'intervenez pas et ne protégez pas la personne, pourquoi devriez-vous aider?
Je ne suis pas un expert en matière de données. J'ai entendu dire que 96 p. 100 des personnes, et 83 p. 100, acceptent de subir un dépistage volontaire. Ce que je me demande, c'est pourquoi une différence de 7 p. 100? Pourquoi 4 p. 100 de plus?
Bien que nous ayons appuyé et encouragé la protection des bons samaritains par la législation de l'Ontario, elle est également importante pour les personnels des services d'urgence. Les personnels des services d'urgence doivent se poser la même question lorsqu'ils arrivent sur les lieux. Nous ne voulons pas voir ce genre de situation.
La chose finale sur laquelle nous insistons à nouveau est que nous essayons d'impliquer les victimes. Je peux vous dire que dans la perspective de l'Ontario, nous disposons d'un large éventail d'avis juridiques à cet égard. Dans une certaine mesure, si vous réunissez six procureurs dans une pièce, en toute déférence pour les procureurs présents, vous avez tendance à recevoir six opinions différentes. C'es la situation à laquelle nous avons été confrontée. Nous demandons simplement au gouvernement de réaliser la chose que nous considérons comme la bonne et de promulguer la loi dont il est question.
Le président: Professeur Healy.
M. Patrick Healy: Juste pour répondre à votre question, le Québec est la seule province pour laquelle il existe une question d'obligation. Elle émane de l'article 2 de la Charte québécoise des droits et libertés de la personne qui stipule une obligation d'aider les gens.
M. Chuck Cadman: Par conséquent, ce que vous dites est que, si je n'aide pas, je suis responsable...
M. Patrick Healy: Oui, mais je n'ai pas connaissance...
M. Chuck Cadman: Je suis coupable de cet acte, mais je n'aurai pas droit à la protection--
M. Patrick Healy: Mais je n'ai connaissance d'aucun cas pour lequel le présent article a été appliqué dans de telles circonstances.
M. Chuck Cadman: Non. Je comprends.
Le président: Monsieur Bellehumeur. Vous avez sept minutes.
[Français]
M. Michel Bellehumeur: Je vais commencer par M. le professeur.
J'avais beaucoup de questions, mais vous avez à peu près répondu à toutes celles ayant trait à la juridiction du Parlement canadien. C'est beau d'avoir de grands principes et on peut être d'accord sur un objectif visé, mais il faut savoir si ça relève de notre juridiction. Je pense que vous avez répondu très clairement que cela ne relevait pas de la juridiction du Parlement fédéral, dont je fais partie à titre de législateur fédéral. Vous êtes même allé plus loin que cela: même si j'étais dans le bon Parlement, cela ne passerait pas le test de la Charte des droits et libertés non plus. Je partage entièrement votre avis.
Mais vous m'avez réveillé encore plus en décortiquant le projet de loi et en en faisant l'analyse. Comme vous l'avez très bien indiqué, il contient des erreurs d'écriture, des erreurs de forme, des articles qui n'ont pas raison d'y être, etc. Encore là, on peut avoir de bons objectifs et être bien intentionné, mais on ne peut pas adopter n'importe quoi sur ces principes. Là-dessus, vous m'avez très bien éclairé. En fait, je n'ai pas beaucoup de questions à vous poser.
Je passe maintenant à l'Association des policiers de l'Ontario. On a entendu d'autres policiers et vous avez répété exactement la même chose: vous n'êtes pas capables de nous donner des statistiques ou des précisions pour justifier une certaine nécessité d'intervenir ou de trouver des solutions. Je sais que ce que vous relevez existe; je ne dis pas que vous avez inventé tous ces cas. Je lis les journaux et j'ai entendu des témoins, mais vous n'avez aucune statistique, alors que M. Perry, pour sa part, nous a donné des statistiques. Que ce soit au Colorado, au Canada ou dans un hôpital, il a des statistiques pour démontrer que les refus pour lesquels on veut vraiment intervenir ne sont pas si importants. Il va toujours y en avoir trop. Dès qu'on en a un qui refuse, c'est trop.
À titre de législateurs, nous ne devons pas intervenir pour tous les cas d'espèce, sinon on ne va faire que des mesures législatives, personne ne va se comprendre, et on va se diriger de plus en plus vers un État policier, ce que je ne souhaite pas, mais pas du tout. Or, avec les mesures législatives qu'on a adoptées ces derniers temps, il y a un fil qu'il ne faut pas franchir et qu'on est très près de franchir au niveau des libertés individuelles et privées.
Ma première question s'adresse aux policiers. Vous avez entendu les statistiques ou les chiffres avancés par votre voisin. Est-ce que vous les contestez? Et si vous les contestez, avez-vous, de votre côté, des chiffres à nous soumettre, de l'information à nous donner pour que nous puissions voir l'importance du problème et tenter, si la solution n'est pas le projet de loi C-217, de voir quelles autres solutions nous pourrions apporter?
 (1250)
[Traduction]
Le président: Je pense que la question a été posée à M. Miller ou à Mme Hiltz.
M. Bruce Miller: Premièrement, il n'existe pas de statistiques précises et révélatrices sur l'exposition en Ontario.
Au cours des cinq dernières années depuis que Natalie est agente de police à Peel, nous avons connaissance d'au moins quatre agents qui ont dus prendre le cocktail médicamenteux. Nous en voyons des exemples innombrables; il y en a des exemples dans les documents ci-inclus. Est-ce que je conteste que 80 à 90 p. 100 des personnes subissent le dépistage volontaire? Je suis d'accord avec le taux de 100 p. 100.
Cependant, du point de vue de la police, le problème est que les gens avec qui nous traitons quotidiennement ne font pas preuve de coopération. Je ne pense pas qu'il y ait, parmi le grand public, une personne respectueuse de la loi qui refuse de subir le dépistage si quelqu'un sauve sa vie. Cependant, nous ne traitons pas avec cette catégorie de personnes, malheureusement, et c'est un problème.
Pour ce qui est de la question nationale que cela représente, la seule chose que je puisse dire est que j'espère que le gouvernement prendra des mesures en vue d'une loi que puisse protéger la santé et les besoins de la société canadienne.
En toute déférence pour les membres du gouvernement, vous abandonnez vos électeurs si vous ne promulguez pas la présente loi. S'il y a des problèmes avec les projets de loi,... Je ne suis pas familier avec le processus fédéral, je travaille en permanence au niveau provincial, mais le processus de notre comité en Ontario est de modifier les projets de loi et de les améliorer. J'avais compris que c'était la raison pour laquelle nous étions présents aujourd'hui.
Le président: Monsieur Bellehumeur.
[Français]
M. Michel Bellehumeur: Ce sera ma dernière question.
Mardi, on a reçu un policier de l'Alberta avec son épouse et il nous a donné des chiffres relativement au secteur où il travaillait à partir de 1999 et 2000, je pense. Il n'avait pas les chiffres complets pour 2001. Mais depuis l'événement et depuis une certaine sensibilisation au sein son corps policier, les chiffres relativement à l'implication de personnes, comme dans le cas que l'on vise, ont chuté. Il y avait, je pense, plus de 100 personnes en 1999 et il n'y en avait plus que huit par la suite, tout ça parce qu'il y avait de nouvelles directives et de nouvelles techniques dans le milieu. Entre autres, on mettait des gants deux fois. Il y avait eu une sensibilisation et on faisait plus attention.
La solution n'est-elle pas d'avoir une meilleure sensibilisation, de meilleurs outils de travail, une nouvelle approche avec ces personnes plutôt que d'intervenir et de légiférer dans un domaine où, comme on le sait, les procédures judiciaires ne seront peut-être pas nécessairement efficaces, même si on arrive à la conclusion que c'est légal, que ça respecte la Charte, etc.? Ce n'est peut-être pas nécessairement un outil législatif qu'il nous faut pour vous donner des outils supplémentaires ou pour vous permettre de faire votre travail de façon plus sécuritaire.
 (1255)
[Traduction]
Le président: Monsieur Miller.
M. Bruce Miller: Je peux vous dire, monsieur, que cela s'est produit en Ontario. Nous avons élaboré des protocoles, dont nous avons fait mention auparavant, mais ils n'ont pas réussi. Nous utilisons des précautions universelles, telles que des gants en caoutchouc, mais nous n'avons pas toujours le temps de les mettre. Nous avons des exemples d'agents qui conduisaient ou marchaient dans la rue et se sont fait agresser par des individus. Nous ne pouvons pas nous préparer.
Nous avons essayé d'élaborer des protocoles au travail. Nous avons essayé de mettre en place des équipements d'urgence pour protéger les personnels des services d'urgence. Nous avons des législations gouvernementales pour cela, mais cela ne fonctionne pas. Nous avons adopté le projet de loi 105 en Ontario, parce que le système et la protection que nous avions en place ne fonctionnaient pas.
Le président: Monsieur Perry.
M. Matthew Perry: Je suppose que ma réponse est la suivante si les protocoles sur l'exposition professionnelle n'ont pas réussi. J'ai l'impression que c'est le cas pour les situations non récurrentes. Ma préoccupation est que nous devons peut-être essayer davantage de faire face à cette situation par des moyens qui protègent réellement l'intégrité de la vie privée des personnes et d'obtenir le consentement volontaire des individus de façon respectueuse, et ne pas enfreindre les droits des individus garantis par la Charte, avant de nous empresser de travailler sur un projet de loi à cet effet.
Nous devons peut-être aussi étudier la question de savoir pourquoi le présent projet de loi ne mentionne pas les infirmiers; n'émane pas du secteur des soins de santé et n'est pas non plus dicté par celui-ci. À mon avis, il n'est pas possible de remettre en cause le fait que les risques d'exposition liés aux pathogènes à diffusion hématogène sont beaucoup plus importants et plus courants.
Ces cas sont traités par les protocoles d'exposition professionnelle, les protocoles des hôpitaux et les protocoles des associations professionnelles. L'Association des infirmières et infirmiers du Canada en particulier dit que cela ne garantit pas un dépistage obligatoire de la personne. Le médecin hygiéniste en chef en Ontario a également parlé de la nécessité d'un certain degré de dépistage, ou des tests de référence, pour la personne exposée, ce que nous n'envisageons pas non plus.
Il existe d'autres approches pour traiter de ces situations qui ne représentent pas le préjudice énoncé par le projet de loi C-217.
Le président: Merci, monsieur Perry.
Monsieur Strahl, vous avez sept minutes.
M. Chuck Strahl: Merci à tous d'être venus.
C'est un témoignage très utile; tout cela a été très utile. Merci et félicitations, madame Hiltz, pour votre grossesse. Ce sont des bonnes nouvelles pour commencer.
L'agente de police Natalie Hiltz: Merci.
M. Chuck Strahl: Je voulais poser deux autres questions. Une à M. Healy. Avez-vous lu le témoignage de M. Chipeur lors de la dernière séance? Nous avions un spécialiste constitutionnel parmi nous, un des six procureurs, qui devaient nous donner leurs opinions.
· (1300)
M. Patrick Healy: Je suis le septième.
M. Chuck Strahl: D'accord, vous êtes peut-être le septième.
Selon lui, ce serait constitutionnel. Il est spécialiste constitutionnel en quelque sorte--tout le monde est évalué en fonction d'une échelle je suppose. Sa prétention était la suivante. Il existe des affaires pour lesquelles le tribunal a décidé que si quelqu'un sait qu'il est atteint du VIH et ne prend pas les précautions pour informer un partenaire sexuel, il est passible de poursuite au criminel. Il est obligé de le dire s'il le sait.
Il a mentionné une autre prétention, selon laquelle, si une personne est une séropositive, peu importe si elle agit intentionnellement, par négligence ou autre, elle peut faire l'objet de poursuites pénales. Voici pour cette question.
Il a également mentionné une affaire au civil impliquant Paul Bernardo, pour laquelle la Division générale de la Cour de l'Ontario a ordonné à M. Bernardo de fournir un échantillon de sang dans un souci de satisfaction de l'individu qui risquait d'avoir été contaminé pour répondre à ses préoccupations quant à sa santé mentale. Par conséquent, il y a eu une affaire au civil dans laquelle un juge de la Division générale de la Cour de l'Ontario a ordonné: «Nous allons prélever un échantillon de sang afin de répondre à des préoccupations de santé mentale».
Pourquoi un tribunal et un juge aurait-il le droit de prononcer une telle ordonnance dans une affaire au civil afin d'apaiser une souffrance morale, mais pas dans une affaire au criminel? Il s'agit de traitement et, en partie, de souffrance morale.
M. Patrick Healy: Je ne suis pas familier avec l'affaire au civil concernant Bernardo. Je suis bien informé sur les affaires au pénal. Cependant, le présent projet de loi n'est pas restreint de cette manière. Il s'agit d'une loi qui fournirait un mécanisme pour contraindre à divulguer l'information en absence de toute enquête judiciaire et de toute infraction pénale.
Vous avez tout à fait raison, il peut y avoir une offense pénale. Nous avons entendu des témoignages de la police qui est régulièrement exposée à des agressions non provoquées, et bien sûr, il s'agit d'agressions. Cependant, la loi dont il est question n'est pas restreinte de cette manière. Elle ne protège pas uniquement les agents de police et les conduites intentionnelles ou même les conduites négligentes; elle comprend également les accidents. Il est très difficile de trouver un moyen de décrire comment elle pourrait être caractérisée de loi pénale lorsqu'elle est aussi vaste.
Croyez-moi, M. Strahl, je veux préciser une chose. J'ai essayé de préciser ce point dès le début. La situation en question--la souffrance mentale impliquée dans l'exposition au risque et à la concrétisation des risques dans bien des cas--est dévastatrice.
L'agente de police Hiltz nous en a donné un exemple très concret. Malheureusement, la loi nous demande d'observer un certain nombre d'exigences. Une est la validité constitutionnelle--non seulement en vertu de la Charte, mais également en vertu du partage des pouvoirs. Il ne s'agit pas de loi pénale; il s'agit principalement d'un recours civil pour une personne privée.
Je comprends exactement l'objectif, mais vous avez un obstacle constitutionnel insurmontable.
M. Chuck Strahl: Ce n'est pas ce que M. Chipeur a dit, mais...
M. Patrick Healy: Je n'étais pas présent, mais je suis le septième procureur. Je vous donne seulement une septième opinion.
M. Chuck Strahl: C'est dommage que n'ayez pas été présents tous les deux en même temps. Cela aurait été un débat intéressant.
M. Patrick Healy: Il parlait toutefois d'autre chose, d'après ce que vous avez dit.
M. Chuck Strahl: Je peux vous lire sa conclusion :
«Ces cas me mènent tous à la conclusion que si le Parlement devait promulguer le présent projet de loi, il ne serait pas annulé par la Cour suprême ou un autre tribunal pour violation de la Charte canadienne des droits et libertés.»
Il a fait valoir que c'est une question de compétences très difficile. Cependant, il a plaidé dans son exposé qu'il existe un intérêt social suffisant--et il a cité l'affaire Dyment, que vous connaissez, j'en suis sûr--et si nous avions une atteinte très nette à la vie privée, telle que des analyses sanguines obligatoires, elle sera sanctionnée en vertu de la Charte uniquement si les revendications sociales l'emportaient sur les intérêts privés--et les choses sont toujours évaluées l'une envers l'autre--et lorsqu'ils existent des règles précises stipulant les modalités en vertu desquelles il y aura violation du droit à la vie privée.
Je pense que vous avez fait du bon travail. J'examinerai votre témoignage plus tard, mais j'ai pris note de quelques points pour lesquels, à votre avis, le projet de loi est négligent et qui ne sont pas expliqués adéquatement.
Je pense que s'il était adopté, il devrait être contesté, comme beaucoup de lois, afin de déterminer si tout bien considéré, il y a équilibre des droits. Je comprends qu'il s'agit d'équilibre des droits. J'ai déclaré à trois ministres de la Justice depuis que je travaille sur le projet de loi, aidez-moi à réaliser ce qu'il faut réaliser pour protéger la vie privée, ainsi que la notification et le besoin de s'assurer que c'est réalisé de manière appropriée. Je suis donc prêt à le modifier. Vos conseils ont été les plus précis jusqu'à ce jour et je les apprécie.
Tout le monde n'est pas d'accord avec moi, mais je pense que nous pouvons établir fermement qu'il y a équilibre des droits dans le meilleur intérêt de la société et qu'il l'emporte sur les autres risques.
Le président: Monsieur Healy:
M. Patrick Healy: Réfléchissons d'abord à deux exemples que vous avez mentionné: les mandats autorisant le prélèvement d'ADN, qui ont récemment été promulgués par le Parlement, et les alcootests et les échantillons de sang pour conduite en état d'ivresse. Ce qui caractérise ces deux exemples, c'est que les échantillons sont prélevés dans le cadre de l'enquête relative à une infraction pénale présumée. Ce n'est pas le cas ici. Le projet de loi l'enlève de la compétence du droit pénal d'entrée de jeu.
Deuxièmement, ma préoccupation concernant la validité constitutionnelle du présent projet de loi ne se limite pas à la Charte. Il ne s'agit pas uniquement de l'article 8 et de la protection de la vie privée ou de l'article 7 et de la sécurité de la personne. Il s'agit de déterminer si le Parlement est autorisé à agir dans ce domaine. Je suis conscient de la gravité de ce que l'agente de police Hiltz nous a communiqué, mais je suis au regret de dire qu'à mon avis, ce n'est pas du ressort du Parlement, et dans son libellé actuel, ce n'est pas du ressort d'une province, vous devriez avoir une certaine forme de danger perçu. Ce n'est pas le cas dans cette situation.
Ce que le projet de loi propose est que vous confériez à quelqu'un le droit d'obtenir l'information sur le diagnostic. Pour une affaire au criminel, le seuil serait la suspicion d'une infraction, et en affaire au civil, si une personne atteinte de tuberculose progressive voyage en avion, vous pouvez alors soulever la question. Cependant, ce que vous faites dans le cas présent consiste à autoriser une recherche d'information pour déterminer si cette personne a des raisons d'être préoccupée, ce qui est une question totalement différente.
· (1305)
Le président: Merci beaucoup.
Nous avons ensuite M. Macklin pendant sept minutes.
M. Paul Harold Macklin: Merci.
À mon avis, comme vous l'avez dit dans votre témoignage, monsieur Miller, nous essayons tous de déterminer quoi faire pour protéger ceux qui nous protègent. C'est le défi qui nous a été confié avec ce projet de loi et c'est pourquoi nous siégeons au comité pour tenter de comprendre de quoi il s'agit. Il me semble entendre diverses manières d'aborder cette question--une approche législative quelconque évidemment et les protocoles qui sont déjà en place.
À la fin de la journée, pouvons-nous présumer que si nous légiférons peu importe que nous ayons le droit de le faire ou non, fournirons-nous vraiment une aide valable à cet individu? Ne voudra-t-il toujours pas être absolument certain et se protéger par le biais de ce processus?
Puis-je obtenir vos commentaires à ce sujet, s'il vous plait?
Le président: Monsieur Miller.
M. Bruce Miller: Merci.
Dans un premier temps, nous avons eu des agents qui ont été exposés, qui ont subi un traitement, mais lorsqu'ils ont reçu les résultats du test de la personne qui peut les avoir infectés, ont arrêté leur traitement après avoir consulté leur médecin. Cette décision a été prise sur les conseils de leur médecin. Je pense que nous savons tous que le traitement est particulièrement horrible et peut avoir des effets secondaires durables. Natalie a été prévenue que le traitement peut être cancérigène. Il peut entraîner des déficiences congénitales. Nous ne sommes pas des médecins légistes. C'est simplement ce qui a été communiqué à Natalie. Voici une occasion de terminer le traitement. Voici une occasion de réduire les conséquences émotionnelles pour une personne, si le test revient avec des résultats négatifs.
Enfin, je peux uniquement répéter que nous avons essayé les protocoles. Nous avons essayé l'éducation. Cela ne fonctionne pas. Nous appuierons d'autres programmes éducatifs, mais nous avons besoin que le présent projet de loi soit promulgué pour les gens qui, peu importe l'éducation qui est fournie, ne coopèrent pas.
Le président: Monsieur Perry.
M. Matthew Perry: Ce qui me préoccupe, c'est que nous bâtissons une législation basée sur des émotions, sur une tentative d'apaiser le stress émotionnel et je veux répéter également et bien faire comprendre que je suis conscient de la gravité de la situation. Je n'ai jamais été confronté à ce genre de situation et je ne sais donc pas ce qu'il en est. Cependant, je me rends compte de ce que cela doit être, d'après mon expérience en première ligne dans le cadre de mes fonctions.
Je suis préoccupé par le coût. Le résultat final lié aux résultats d'un test est que vous êtes plus confortables en ce qui concerne les décisions que vous prenez ou le traitement que vous suivez. Cependant, la personne qui a subi le test, qui a été contrainte de subir le test auquel elle n'a pas consentie et qui a été contrainte de donner des renseignements sans son consentement n'a que peu de contrôle d'une certaine manière.
Si vous sortez de cet édifice après l'audience du comité aujourd'hui et si vous être renversé par un bus et que quelqu'un vous vient en aide et si vous êtes inconscient et incapable de donner votre consentement et qu'il s'avère que vous êtes séropositif ou que vous êtes atteint d'hépatite C, le flot d'information s'est déroulé. Comme nous l'avons entendu ce matin, le génie est sorti de la lampe et le contrôle de l'information est perdu.
C'est une préoccupation importante parce que vous ne toucherez pas votre assurance-vie. Vous aurez peut-être des problèmes pour trouver un travail. L'équilibre des préjudices que subira cette personne et des bienfaits pour l'individu en question--et il y a des bienfaits, nous ne questionnons pas le fait qu'il y a des bienfaits--, voici les questions. Les bienfaits sont-ils suffisants pour contraindre à un dépistage obligatoire? Les bienfaits sont-ils suffisants pour élaborer des moyens de mettre en place un dépistage obligatoire? Les bienfaits sont-ils suffisants pour prétendre que les protocoles existants ne sont pas suffisamment bons et ne devraient pas être utilisés, que cela devrait être notre première réponse?
· (1310)
M. Paul Harold Macklin: Ce que j'en conclus à nouveau est le point suivant. Le témoignage de Mme Hiltz comprend une déclaration très provocatrice : «Je ne peux pas vous dire ce que j'aurais fait si cette personne avait été testée et qu'elle avait un bilan de santé impeccable». Il y a donc toujours cette question à la fin de la journée. Peu importe si vous me donnez cette information, la résolution n'en dépend pas nécessairement. En d'autres termes, nous n'atteignons aucune forme de perfection, juste un plus haut degré d'information.
M. Bruce Miller: Soyons clair aussi sur le fait que la personne dont nous parlons n'est pas dans la plupart des cas la personne renversée par le bus--le citoyen respectueux des lois--qui sera reconnaissant et subira le test. C'est le criminel qui mort un agent et essaye d'intimider cet agent ou le gardien de prison. Les personnes qui jettent des godets d'urine, du sang, mordent, crachent et qui, lorsqu'elles le font, vous disent que vous avez le sida maintenant, ce sont les personnes auxquelles nous sommes confrontées quotidiennement. C'est la raison pour laquelle nous avons besoin de la législation. Les programmes d'éducation ne seront tout simplement pas efficaces pour ces individus. Ce n'est tout simplement pas possible.
M. Paul Harold Macklin: Puis-je revenir à une des questions à laquelle je crois que vous avez répondu? Du moins dans votre déclaration initiale, vous avez dit qu'il y avait quatre agents à votre connaissance qui avait pris le cocktail dans votre force de police. Combien de ces agents ont pris le cocktail parce qu'ils ne pouvaient pas obtenir le consentement?
Const. Natalie Hiltz: C'est mon service policier et je ne sais pas s'ils n'ont pas été en mesure d'obtenir le consentement dans tous les cas. Je ne connais pas tous les détails particuliers à chaque cas, mais je sais qu'ils ont été suffisamment exposés pour que les docteurs et les hôpitaux jugent que la nature de l'exposition et les risques élevés qu'ils devaient prendre un cocktail. Je ne sais pas si le contrevenant a finalement accepté de donner un échantillon de sang ou non, néanmoins je sais qu'ils ont dû prendre les médicaments.
M. Paul Harold Macklin: Exact.
Le président: Une dernière question.
M. Paul Harold Macklin: D'après ce que vous savez, s'agit-il des meilleures statistiques dont vous disposez pour refléter le besoin de cette sorte de prophylaxie?
Const. Natalie Hiltz: En termes de statistiques, non, ce n'est pas le cas. Il s'agit simplement de personnes que je connais personnellement...
M. Paul Harold Macklin: Je vois.
Const. Natalie Hiltz: --dont je connais le nom. Mais il y a un grand nombre d'agents qui ont été exposés et dont je n'ai pas entendu parlé.
Le président: Monsieur Cadman, vous avez trois minutes.
M. Chuck Cadman: Merci, monsieur le président.
J'ai juste une brève question. Premièrement, j'entends dire que nous ne devons absolument pas adopter la loi parce que c'est une mauvaise loi en raison des questions de respect de la vie privée. D'autres personnes disent que nous devons l'adopter.
Professeur Healy, vous dites que ce n'est pas au Parlement de se prononcer sur la question... ou au Code criminel ou aux provinces. Si nous partons de l'hypothèse que nous convenons de mettre quelque chose en place, où le faisons-nous? Où pouvons-nous élaborer un système qui puisse obliger quelqu'un à donner un échantillon de sang? Si ce n'est pas par le biais du Code criminel, si ce n'est pas par le biais des provinces, où le faisons-nous? Comment?
M. Patrick Healy: En règle générale, si la question est considérée comme des mesures d'hygiène, elle devra alors être résolue par chaque province. Cependant, dans ce contexte, il y a malheureusement des problèmes avec la présente loi en vertu de la Charte. Il existera peut-être même des problèmes en vertu de la législation provinciale, mais cela dépendra entièrement de la manière dont l'ébauche est rédigée.
J'écoutais M. Miller et il a dit à deux reprises maintenant que les agents de police--et tout le monde en a conscience--sont souvent victimes de voies de fait impliquant le sang et d'autres substances corporelles. Il est possible d'envisager une application très restreinte dans ces circonstances parce que, selon les propos de M. Miller, vous parlez alors d'agents en service dont la sécurité est menacée, et dans les circonstances qu'il décrit, il y aura probablement une appréhension, parce qu'en vertu des articles 494 et 495 du Code criminel, il est clair qu'une infraction a été commise envers cet agent. Cependant, ce n'est pas l'objet du projet de loi. Le projet de loi a pour but de fournir des renseignements relatifs au diagnostic pour un grand nombre de personnes qui sont impliquées dans toute sorte de fonctions, et non pas seulement l'exécution de la loi pénale par les agents de police. Il s'agit donc d'un problème sérieux.
Il est possible, je suppose, qu'il y ait une application restreinte de cette nature qui serait connexe à l'exécution habituelle de la loi pénale, mais elle ne s'appliquerait qu'à un nombre limité de personnes, qui ne sont pas celles que nous essayons de protéger par le projet de loi.
· (1315)
Le président: Monsieur Miller.
M. Bruce Miller: Je peux juste ajouter qu'en Ontario, lorsque nous l'avons présenté, nous avons évidemment rencontré le Commissaire à la protection de la vie privée; nous avons eu des réunions avec le Commissaire à la protection de la vie privée et des employés du Procureur général. De nombreux travaux juridiques nous ont été remis, et nous avons pu déterminer que cela était certainement possible selon les opinions reçues.
Nous avons entendu dire que le médecin hygiéniste en chef s'y opposait, mais lorsqu'il s'est impliqué et qu'il s'est réuni avec nous, nous avons mis sur pied le projet de loi à la fin de la journée. Par conséquent, dans la perspective de l'Ontario et de ma participation, il s'agit d'un projet de loi réalisable et nous aimerions qu'il s'applique à l'ensemble du pays.
Nous observons un certain nombre de questions concernant le projet de loi de M. Strahl, et en particulier avec le mandat, qui sont préférables à ce que nous avons en Ontario, parce que nous avons des délais en Ontario qui me semblent plus longs qu'avec le projet de loi de M. Strahl. Il y a indubitablement une amélioration dans ce domaine et nos membres aimeraient en tirer profit.
Le président: Monsieur Perry.
M. Matthew Perry: En ce qui concerne la situation en Ontario, j'aimerais juste faire part de mes préoccupations en ce qui concerne le fait qu'un nombre important de personnes n'ont pas été consulté dans le cadre de ce processus. Ce projet de loi a été rédigé relativement vite. Je peux parler du point de vue d'un organisme qui a expressément demandé à plusieurs reprises à être présent et à communiquer ses commentaires, mais qui n'a pas été informé. Le médecin hygiéniste en chef a été informé quelques jours avant de comparaître devant le comité. Il y a donc des sujets de préoccupation.
J'ai également mentionné que le projet de loi 105 est relativement différent de nombreuses manières. Je le répète, c'est un projet de loi sur la santé, qui est différent. Avant que nous ayons le projet de loi 105, le médecin hygiéniste en chef pouvait déjà rendre des ordonnances et ces ordonnances pouvaient obliger quelqu'un à... Ces ordonnances sont très vastes. Vous pouvez prononcer une ordonnance en Ontario qui stipule: «Tu n'auras pas de rapports sexuels». Je ne sais pas comment vous poursuivez l'exécution d'une telle ordonnance sans suivre quelqu'un 24 heures sur 24, mais elles sont très vastes... Je ne sais quelle est la validité constitutionnelle de telles ordonnances, mais le fait est qu'en Ontario, nous avons la possibilité de déposer de telles ordonnances et que c'est différent. Ce n'est pas un mandat; c'est en fait une demande qui a été déposée sur le bureau d'un médecin hygiéniste en chef en fonction d'une consultation et d'un rapport qui se produit sur consultation d'un médecin.
Ce qui me préoccupe le plus, c'est que nous parlons d'un calendrier fixe, en particulier lorsque nous parlons de VIH. Je pense que de bien des façons nous parlons de VIH dans le cas présent. Nous parlons d'une période de temps bien déterminée à laquelle aucun de ces projets de loi n'est en mesure de répondre.
Des décisions sont prises et des conséquences en découlent--p. ex. la prophylaxie post-exposition et les effets nuisibles qui lui sont associés. Je remarque que les séropositifs prennent ces médicaments tous les jours jusqu'à la fin de leur vie. Ces décisions sont prises si vite et le projet de loi ne changera pas cela. Il permettra d'autoriser l'obtention de certaines informations ultérieurement et il y aura préjudice pour l'individu entre temps.
Le président: Monsieur Macklin, vous avez trois minutes.
M. Paul Harold Macklin: Professeur, j'aimerais juste savoir ce que vous pensez des relations entre le projet de loi qui nous est présenté et le projet de loi de l'Ontario. Font-ils double emploi ou en fait obtenons-nous les mêmes résultats? Constitutionnellement, croyez-vous que nous devons agir dans le cadre législatif de la province?
M. Patrick Healy: Je ne suis pas certain. C'est une question très importante.
Je pense que, comme l'a dit M. Miller, l'élaboration du projet de loi doit consister en partie en une application nationale s'il doit être valide autrement, mais à mon avis, ce n'est pas le cas parce qu'il n'est pas du ressort du Parlement. Je pense que même au niveau de la province, il y a de sérieuses difficultés. J'imagine que le projet de loi 105 est en vigueur, mais bien sûr, quant à savoir s'il survivra, c'est une autre histoire. Certaines des objections soulevées en ce qui concerne le projet de loi C-217 peuvent tout aussi bien s'adresser au projet de loi 105, en particulier en vertu de la Charte, même si nous supposons que c'est une loi provinciale sur la santé valide.
Je ne sais pas ce que je peux ajouter d'autre que de répéter certaines choses que j'ai déjà dit. L'objectif est indubitablement valide, mais à mon avis, comme je l'ai dit à M. Strahl, il existe des problèmes juridiques insurmontables. C'est un des paradoxes terribles que tout le monde peut reconnaître. Il suffit d'écouter l'agente de police Hiltz et les autres. Ils sont conscients de la situation, mais je suis au regret de devoir dire que cela ne semble pas être ni une réponse licite, dans le sens qu'elle n'est pas du ressort du Parlement, ni une réponse mesurée.
· (1320)
M. Paul Harold Macklin: Cependant, si vous deviez poursuivre cette question, le feriez-vous au niveau provincial en fonction des renseignements dont vous disposez à l'heure actuelle?
M. Patrick Healy: Ce sera nécessaire, parce que de par sa nature, le projet de loi offre à une personne privée le bénéfice d'un certain type d'information qui est recueillie par quelqu'un d'autre. Le seul niveau où ce genre de chose peut être réalisé est au niveau provincial. Cela ne peut pas être réalisé au niveau fédéral.
M. Paul Harold Macklin: Merci.
[Français]
M. Michel Bellehumeur: Je voulais justement revenir sur la différence entre le projet de loi 105 de l'Ontario et le projet de loi C-217. C'est peut-être davantage une demande aux recherchistes qu'une question. Ce n'est pas d'aujourd'hui qu'on nous parle du projet de loi de l'Ontario. J'ai tenté de l'obtenir et je ne l'ai pas encore eu. Ce que j'ai eu, ce sont des notes explicatives et surtout le discours qui l'accompagnait lorsque le ministre l'a déposé.
Effectivement, il y a une différence notable. On ne peut même pas regarder du même oeil le projet de loi C-217 et le projet de loi de l'Ontario. Ce sont deux mondes complètement différents. Je pense qu'il faudrait qu'on ait entre les mains ce projet de loi 105, qui n'est pas encore en vigueur, je crois. La loi a-t-elle été promulguée? Elle a été promulguée. D'accord.
Il faudrait avoir cette loi maintenant afin de pouvoir faire des comparaisons. L'objectif est peut-être le même: protéger des individus, mais encore là, je ne suis pas sûr que l'objectif soit à 100 p. 100 identique. Je pense que ce projet de loi a beaucoup plus un caractère de salubrité publique qu'autre chose, mais il faudrait au moins faire la comparaison parce que trop de témoins nous parlent du projet de loi 105, et je pense qu'on mêle certaines choses. Ce serait excessivement important compte tenu que nous nous occupons du volet criminel. Il ne faut pas oublier que c'est le volet criminel qui nous préoccupe. Ce n'est pas le volet santé ou le volet civil. On va laisser aux autres le soin de faire ce qu'ils veulent avec leur juridiction. On a assez de la nôtre, qui se limite au criminel. Je pense qu'on ne mange pas dans le bon râtelier présentement avec ce projet de loi.
Alors, c'était davantage un commentaire et une demande à l'endroit des recherchistes.
[Traduction]
Le vice-président (M. Chuck Cadman): Monsieur Miller.
M. Bruce Miller: J'ai juste un bref commentaire et il s'adresse à nouveau à la situation en Ontario: juste un commentaire sur les audiences. Il s'agit d'audiences qui se sont tenues dans l'ensemble de la province et je suppose que certains groupes ont choisi de ne pas y participer, bien qu'ils étaient publics. À la fin de la journée, a-t-il été adopté rapidement? Oui, il a été adopté rapidement. Cependant, nous entendons les mêmes préoccupations en Ontario. Est-ce constitutionnel? Est-il du ressort du gouvernement fédéral ou du gouvernement provincial? Nous avons entendu ces différents arguments à maintes reprises, et à la fin de la journée, dans le cadre de nos débats aux audiences du comité et avec les membres de l'Assemblée législative de l'Ontario, notre message est que le projet de loi en question est nécessaire; c'est ce qu'il faut faire.
Le soutien du public est extraordinaire et je souhaite penser que nos fonctionnaires provinciaux élus ont agi parce que, selon eux, c'était dans le meilleur intérêt de leurs électeurs. Il y avait un besoin au niveau provincial et nous avons débattu du besoin au niveau fédéral. Ils ont poursuivi et ont promulgué la loi. Il y a des défis constitutionnels, oui; nous devrons attendre et voir comme la situation se déroulera.
Nous sommes présents aujourd'hui pour vous demander avec insistance de promulguer ce projet de loi. Il a peut-être besoin de quelques précisions, mais nous vous demandons avec insistance de le promulguer.
Le président: Monsieur Maloney.
M. John Maloney: J'aimerais poser cette question au docteur Healy--
· (1325)
M. Patrick Healy: Je ne suis pas docteur; je suis professeur.
M. John Maloney: Monsieur Healy, excusez-moi...
M. Patrick Healy: J'ai été accusé d'être le septième procureur, donc je ne veux pas être médecin maintenant.
M. John Maloney: Nous avons entendu des témoignages contradictoires, sur des questions d'ordre juridique et d'autres. Il s'agit d'une question d'ordre émotionnel qui, à mon avis, a une extrême importance pour beaucoup de gens. D'après vous, serait-ce une bonne idée de renvoyer ce projet de loi à un organisme tel que la Conférence pour l'harmonisation des lois au Canada pour une prise en compte à un niveau très approfondi?
M. Patrick Healy: La Conférence pour l'harmonisation des lois au Canada est un organisme national qui examine les questions de droit civil et pénal. Oui, il est tout à fait possible que la Conférence pour l'harmonisation des lois au Canada examine cette question. En outre, il est peut-être possible de soulever la question en vertu des consultations fédérales-provinciales qui se tiennent sur les questions de droit et sous l'égide de la convention nationale des procureurs généraux.
Le président: Monsieur Strahl.
M. Chuck Strahl: Merci. Il s'agit d'un processus très lent, mais un processus lent est parfois nécessaire pour s'assurer que les choses sont réalisées de manière appropriée. Je ne nie pas ce fait.
Je regrette de ne pas avoir de copies du témoignage de M. Chipeur, même s'il n'aura pas le dernier mot. Mais sa plaidoirie, pour y revenir, concernait essentiellement la partie II du projet de loi. Le projet de loi comprend deux parties, comme vous le savez. Il est revenu en arrière jusqu'en 1988 et a parlé d'arguments publiés dans des journaux médicaux et juridiques internationaux, plaidant que le prélèvement d'échantillons de sang ressemble trop à une chasse aux sorcières. Il a plaidé qu'il n'y a souvent pas suffisamment de mesures de protection en place, il n'est pas tenu compte des questions de respect de la vie privée et il s'agit d'une intrusion grave dans la vie privée qui n'est pas justifiée, étant donné les bienfaits que vous en retirez. Il s'agissait d'un argument semblable.
Puis, en 1992, lorsqu'il a été appelé à comparaître en tant qu'expert en ce domaine, il a plaidé que, bien qu'il y ait eu des progrès relatifs à l'ADN, le rassemblement des preuves et d'autres domaines scientifiques, jusqu'à ce que vous puissiez prouver qu'il y a un lien direct, un argument de bienfaits pour la société, jusqu'à ce que vous puissiez plaider que, jusqu'à ce que les progrès de la science et de la médecine constituent un argument solide, vous n'arriverez pas à faire dire aux tribunaux que c'est dans le meilleur intérêt de la société. Il a plaidé que vous ne pouvez pas prouver que les bienfaits sont suffisants parce que les connaissances médicales sont chancelantes, le traitement était chancelant--nous parlons de 1992--et il était certain que ce qui se produirait est que vous ne pourriez toujours pas le faire.
Lorsqu'il a témoigné l'année dernière, voici un an et demi, il a dit lorsqu'il pensait que nous en étions à ce niveau. C'est la première chose qu'il a dit. Il a dit qu'il y avait eu suffisamment de progrès en termes de bienfaits que vous pouvez retirer de cette information au cours des quatorze années pendant lesquelles il a étudié la question--et plaidé contre le plus souvent--et qu'il était maintenant convaincu qu'il y avait suffisamment de renseignements pertinents qui l'emportaient sur l'intérêt des personnes pour que les renseignements puissent être obtenus et que l'intérêt de la société avait finalement atteint le niveau médical, que nous avions franchi une étape. Nous avons réussi.
Deuxièmement, afin de déterminer s'il s'agit de compétence fédérale ou provinciale, il a fait référence à la législation sur les armes à feu, parce qu'elle devait être présentée au même moment que son témoignage--la semaine suivante en réalité--. Il a dit qu'il aurait de plus amples précisions à propos des compétences fédérale ou provinciale sur ce qui était, en vertu de la plaidoirie des provinces à cette époque, strictement du ressort de la province. Le tribunal fédéral a dit non, ce n'est pas le cas, les fédéraux ont autorisé à légiférer illicitement sur quelque chose qui est fondamentalement un droit de propriété. Ils en ont le droit, c'est dérogatoire. Il s'agit d'une précision concernant la répartition constitutionnelle des pouvoirs.
J'aimerais vous communiquer l'argument qu'il avait alors invoqué et obtenir vos commentaires. Il a plaidé que l'évolution des intérêts de la société avait été suffisante en raison des progrès médicaux; et en ce qui concerne la question de compétence, il a dit que si elle était réglée en faveur de la compétence fédérale, cela soutiendrait votre cas, selon lui, pour la partie II du projet de loi. Il a dit qu'à son avis, il y aurait beaucoup d'arguments disant que c'est constitutionnel. Par conséquent, en fonction de ces deux arguments, dit-il, cela vaut la peine de le déposer au moins.
Il a dit qu'il serait remis en question et il a demandé avec insistance aux gens de se rappeler qu'il serait remis en question en tout point. Il a dit de ne pas avoir peur d'être remis en question, parce que tout est remis en question. Tout est remis en question. C'est ce qui fait vivre les procureurs.
Pourriez-vous néanmoins exprimer quelques commentaires à propos de ces deux arguments du témoignage de M. Chipeur?
Le président: M. Healy.
· (1330)
M. Patrick Healy: Merci.
Je comprends les commentaires auxquels vous faites référence, mais j'ai beaucoup de problèmes à concevoir comment il est possible de qualifier le fond du projet de loi C-217 de criminel par nature, parce que le contenu du projet de loi, même dans la partie II, n'implique aucunement que l'application du mandat est assujettie à l'enquête pour une infraction.
M. Chuck Strahl: N'existe-il pas de nombreuses lois fédérales, même des sanctions du Code criminel, qui portent sur l'inexécution d'un acte?
M. Patrick Healy: Oui, ce sont toutes des infractions.
M. Chuck Strahl: Par exemple, si vous ne déclarez pas votre impôt sur le revenu, si vous ne respectez pas une ordonnance du tribunal ou si vous refusez de donner un échantillon de sang ou de subir un alcootest. Dans ce cas, il s'agit du refus de donner un échantillon de sang.
M. Patrick Healy: Cependant, ce n'est pas ce que vous faites. Vous n'avez pas commis l'infraction de refuser de donner un échantillon de sang et vous n'avez pas défini une intention criminelle pour laquelle il faut obtenir l'échantillon en premier lieu. Quelle est la conduite criminelle? Être séropositif peut-être? Est-ce le cas? Est-ce que vous essayez de criminaliser?
M. Chuck Strahl: Peut-être infecté quelqu'un d'autre.
M. Patrick Healy: Peut-être infecté quelqu'un? Vous voulez dire avoir la capacité, ce qui n'est pas encore prouvé, juste avoir l'éventualité, le risque 50/50, oui, non, que la personne puisse être infectée. Ce serait une conduite criminelle de peut-être avoir une maladie transmissible?
M. Chuck Strahl: La Cour de l'Ontario a ordonné à Bernardo de donner un échantillon de sang juste pour examiner la santé mentale de quelqu'un, sans parler de leur bien-être physique. Il me semble que le tribunal intervient parfois et dit que c'est grave, que cela vaut la peine d'intervenir sur ordonnance du tribunal, d'obtenir quelque chose pour que... Dans ce cas, c'était pour apaiser la souffrance morale.
Je plaide qu'il s'agit de bien davantage. Il s'agit de souffrance mentale, et en plus d'une intervention médicale que vous devez subir et qui si elle ne met pas la vie en danger est néanmoins certainement très perturbatrice et change la vie de la personne, met souvent votre mariage, votre emploi et sans aucun doute votre santé mentale personnelle en péril.
M. Patrick Healy: Eh bien, tout d'abord, je ne connais pas l'affaire Bernardo dont vous parlez. Deuxièmement, vous avez dit qu'il s'agit d'une affaire au civil. Par définition, ce n'est pas une affaire au criminel. Par conséquent, je reviens au point de départ, qui est que je ne vois pas de contenu criminel à la loi en question--aucun.
Le président: Monsieur Cadman, j'aimerais alors profiter de l'occasion, si possible, de prendre deux minutes de votre temps.
M. Chuck Cadman: Monsieur Miller, quelle est la conséquence de refuser de donner un échantillon en Ontario?
M. Bruce Miller: L'affaire sera présentée devant une cour supérieure de justice qui devra prononcer une ordonnance. La cour devra ordonner et imposer des sanctions. Il n'y a aucune pénalité. Mon interprétation de la loi--en qualité d'agent de police et non de procureur--est que le juge de la cour supérieure de justice pourra ordonner que cette personne subisse le test qu'elle le veuille ou non.
M. Chuck Cadman: Si la personne ne la respecte pas, s'agit-il d'outrage à l'ordonnance? De quoi s'agit-il...?
M. Bruce Miller: Je ne pense pas que le non-respect de l'ordonnance soit une option, selon mon interprétation de la loi.
M. Chuck Cadman: D'accord, c'est tout. J'ai dit que je serai bref.
Le président: Pour ce qui est de donner des précisions sur nos curriculum vitae, je ne suis pas procureur non plus.
J'ai une question toutefois, parce que cela a été une journée intéressante, en ce qui concerne les débats sur le fait que nous examinons un projet de loi qui me protège de la même manière que je marche dans la rue ou que je sois renversé par une voiture et sauvé par M. Chuck Cadman, et--
· (1335)
M. Chuck Cadman: Dans vos rêves.
M. Chuck Strahl: Je le ferais, Andy.
Le président: Merci.
Eh bien, il essaie de faire adopter un projet de loi.
Je suis traité de la même manière que quelqu'un qui a mordu l'agente de police Hiltz et je pense que c'est une partie du dilemme. Nous sommes confrontés à un ensemble de situations qui rendent difficile, dans un cas, de considérer ou d'envisager la possibilité de restreindre mon droit à la vie privée, parce que je n'ai commis aucune infraction et j'ai juste été renversé par une voiture, contrairement aux circonstances dans lesquelles quelqu'un agresse un agent de police, etc.
Je pense que le professeur Healy en a parlé, ainsi que monsieur Bellehumeur et le Commissaire à la protection de la vie privée--sans nécessairement suggérer que quiconque plaide dans ce sens, mais certainement les gens seraient plus tolérants envers ces débats, si vous préférez, en cas d'intention criminelle punissable. Je pense que c'est le Commissaire qui a dit ce matin que dans une certaine mesure, pour un acte criminel ou qu'on pourrait considérer comme criminel, vous renoncez à certains droits. Vous le faites certainement si vous êtes supposé en état d'ébriété, etc.
Par conséquent, pour M. Strahl et les autres personnes qui s'intéressent au projet de loi..., un autre point qui m'a fait réfléchir est lorsque M. Miller a dit «comprendre les personnes auxquelles nous sommes confrontées». Je sais que dans l'esprit de M. Miller et de l'agente de police Hiltz, l'univers est petit. L'univers auquel il pense est limité aux personnes avec lesquelles ils ont des rapports tous les jours. Mais il ne comprend pas la personne qui traverse la rue, se fait renverser par une voiture ce qui entraîne la résistance d'autres personnes pour résoudre le problème.
Par conséquent, je pense que nous devons considérer ceci. Il existe une possibilité--et je le dis uniquement après avoir assisté aux débats toute la journée. Je n'exprime aucune opinion, mais c'est simplement pour dire qu'il semble y avoir des idées en commun derrière le projet de loi qui peuvent aider à faire progresser l'ordre du jour.
Ceci dit, je veux remercier tous les membres du comité. La journée a été remplie d'informations et le niveau des débats a été très élevé. Je pense que nous travaillons dans le bon sens.
Monsieur Strahl.
M. Chuck Strahl: J'ai également apprécié les débats aujourd'hui et j'ai appris beaucoup de choses à mon avis. Comme je l'ai fait hier ou l'autre jour, j'aimerais à nouveau demander avec insistance à tout le monde d'examiner le témoignage de la dernière réunion.
Ce qui se produit lorsque nous participons à ces audiences est que nous pensons aux agents de police aujourd'hui, parce ce qu'ils sont présents. Deux jours plus tôt, nous pensions tous aux travailleurs paramédicaux parce qu'ils étaient présents.
De la même manière, je demande avec insistance à tout le monde de considérer les deux aspects de l'argument constitutionnel, qui sont tous les deux très convaincants, mais il faut réaliser qu'il a deux aspects à la question. Nous avons entendu un expert constitutionnel qui nous a donné une autre opinion, un exposé raisonné différent, et je demande juste avec insistance à tout le monde de lire tout cela avant d'en arriver à la conclusion à laquelle vous pouvez nous mener.
Le président: Merci beaucoup. Pour le compte rendu, je ne mène personne nulle part. J'ai assisté aux débats toute la journée et il y a des thèmes qui sont apparus et que j'ai trouvé intéressants--c'est tout--et je voulais les porter à l'attention de tout le monde. Cependant, je ne mène le comité nulle part; c'est le comité qui me conseille.
Merci beaucoup.
La séance est suspendue.