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JUST Réunion de comité

Les Avis de convocation contiennent des renseignements sur le sujet, la date, l’heure et l’endroit de la réunion, ainsi qu’une liste des témoins qui doivent comparaître devant le comité. Les Témoignages sont le compte rendu transcrit, révisé et corrigé de tout ce qui a été dit pendant la séance. Les Procès-verbaux sont le compte rendu officiel des séances.

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37e LÉGISLATURE, 1re SESSION

Comité permanent de la justice et des droits de la personne


TÉMOIGNAGES

TABLE DES MATIÈRES

Le mardi 30 avril 2002




Á 1100
V         Le vice-président (M. John McKay ((Scarborough-Est, Lib.))
V         M. Syed Akhtar (témoigne à titre personnel)

Á 1105

Á 1110

Á 1115
V         Le vice-président (M. John McKay)
V         M. Chuck Cadman (Surrey-Nord, Alliance canadienne)
V         M. Syed Akhtar
V         M. Chuck Cadman
V         M. Syed Akhtar
V         M. Chuck Cadman
V         M. Syed Akhtar

Á 1120
V         M. Chuck Cadman
V         M. Syed Akhtar
V         Le président (M. Andy Scott (Fredericton, Lib.))
V         M. Chuck Cadman
V         M. Syed Akhtar
V         M. Jay Hill (Prince George--Peace River, Alliance canadienne)
V         M. Syed Akhtar
V         Le président
V         M. Robert Lanctôt (Châteauguay, BQ)

Á 1125
V         M. Syed Akhtar
V         M. Robert Lanctôt
V         M. Syed Akhtar
V         M. Robert Lanctôt

Á 1130
V         M. Syed Akhtar
V         Le président
V         M. Paul Harold Macklin (Northumberland, Lib.)
V         M. Syed Akhtar

Á 1135
V         Le président
V         M. Chuck Cadman
V         M. Syed Akhtar

Á 1140
V         M. Chuck Cadman
V         M. Syed Akhtar
V         M. Chuck Cadman
V         M. Syed Akhtar
V         M. Chuck Cadman
V         M. Syed Akhtar
V         M. Chuck Cadman
V         M. Syed Akhtar
V         Le président
V         M. Maloney
V         M. Syed Akhtar
V         M. John Maloney
V         M. Syed Akhtar

Á 1145
V         Le président
V         M. Robert Lanctôt
V         M. Syed Akhtar
V         M. Robert Lanctôt
V         M. Syed Akhtar

Á 1150
V         Le président
V         M. John McKay
V         M. Syed Akhtar
V         M. John McKay
V         M. Syed Akhtar
V         M. John McKay
V         M. Syed Akhtar

Á 1155
V         Le président
V         M. Jay Hill
V         M. Syed Akhtar
V         M. Jay Hill

 1200
V         M. Syed Akhtar
V         M. Jay Hill
V         M. Syed Akhtar
V         Le président
V         M. John McKay
V         M. Syed Akhtar
V         Le président
V         M. Sorenson
V         M. Syed Akhtar

 1205
V         M. Kevin Sorenson
V         M. Syed Akhtar
V         M. Kevin Sorenson
V         M. Syed Akhtar
V         Le président
V         M. Robert Lanctôt
V         Le président
V         M. Syed Akhtar
V         M. Jay Hill
V         M. John McKay
V         M. Jay Hill
V         M. John McKay
V         M. Jay Hill
V         Le président
V         M. Jay Hill

 1210
V         M. Syed Akhtar
V         M. Jay Hill
V         M. Syed Akhtar
V         Le président
V         M. Robert Lanctôt
V         M. Syed Akhtar
V         Le président

 1215
V         M. Jay Hill
V         M. Syed Akhtar
V         Le président
V         M. Chuck Cadman
V         M. Syed Akhtar
V         M. Chuck Cadman
V         M. Syed Akhtar
V         Le président










CANADA

Comité permanent de la justice et des droits de la personne


NUMÉRO 083 
l
1re SESSION 
l
37e LÉGISLATURE 

TÉMOIGNAGES

Le mardi 30 avril 2002

[Enregistrement électronique]

Á  +(1100)  

[Traduction]

+

    Le vice-président (M. John McKay ((Scarborough-Est, Lib.)): J'aimerais rappeler à l'ordre la 83e réunion du Comité permanent de la justice et des droits de la personne, s'il vous plaît.

    Notre témoin est le Dr Syed Akhtar, dans le cadre de notre examen des dispositions relatives aux troubles mentaux figurant dans le Code criminel. Bienvenue, Dr Akhtar.

    En général, nous demandons aux participants d'effectuer un exposé de dix minutes. Étant donné que vous êtes notre seul témoin aujourd'hui, je crois que nous pouvons être quelque peu flexibles sur ce point. Ensuite, chacun des partis d'opposition aura la possibilité, pendant sept minutes, de vous poser une question ou deux, après quoi nous échangerons.

    Veuillez commencer, et bienvenue au Comité.

+-

    M. Syed Akhtar (témoigne à titre personnel): Merci, monsieur le président et honorables députés, de m'avoir invité à témoigner devant vous. C'est la première occasion que j'ai de parcourir ces corridors du pouvoir. C'est un peu intimidant, mais je crois que je m'y habituerai.

    Je consacrerai mes dix minutes à lire un mémoire, car je crois que cela facilitera également les choses pour les traducteurs. Il me sera aussi plus facile de passer en revue les points que je désire soulever.

    Voici tout d'abord mes antécédents professionnels. Je suis diplômé en médecine du King Edward Medical College, à Lahore, au Pakistan. J'ai reçu ma formation psychiatrique au Massachussetts, aux États-Unis, et à la Dalhousie University, à Halifax. J'ai reçu ma formation en psychiatrie médico-légale à l'Institute of Psychiatry and Law, USC, à Los Angeles, en Californie.

    Je suis membre du Collège royal des médecins et chirurgiens du Canada et je détiens les qualifications de l'American Board en psychiatrie générale et médico-légale.

    De 1973 à 1995, j'ai occupé le poste de directeur du Service de psychiatrie médico-légale à l'Hôpital de Nouvelle-Écosse, qui est l'Institut psychiatrique provincial. Depuis 1995, j'ai oeuvré en pratique privée de la psychiatrie médico-légale à Dartmouth, en Nouvelle-Écosse. Je suis également professeur agrégé à la Dalhousie University depuis 1987.

    J'ai fait partie du Comité interministériel qui a rédigé la version préliminaire de la dernière Loi sur la santé mentale en Nouvelle-Écosse, en 1979. Pendant plusieurs années, j'ai été expert en psychiatrie du Conseil d'agrément des services de garde, et, dans l'exercice de mes fonctions, j'ai eu l'occasion de visiter des instituts psychiatriques dans tout le Canada et d'étudier leur structure et leur fonctionnement. En décembre 2000, j'ai été nommé membre à la Commission d'examen du Code criminel de la Nouvelle-Écosse.

    Au cours des cinq dernières années, j'ai eu l'occasion de visiter la Nouvelle-Zélande en qualité de consultant en psychiatrie médico-légale auprès de divers établissements et organismes. Je souligne ce point parce que la loi de la Nouvelle-Zélande dans ce domaine ressemble beaucoup à la situation qui prévalait au Canada avant 1992, et même avant, probablement avant 1972. Je développerai ce point un peu plus tard.

    J'aimerais faire des observations préliminaires au sujet des dispositions du Code criminel, qui ont été introduites en 1992.

    Le projet de loi C-30 a adopté une terminologie psychiatrique moderne dans le Code criminel, a clarifié et codifié les critères d'aptitude à subir un procès et a élargi l'autorité des Commissions d'examen sur les contrevenants qui sont déclarés inaptes à subir un procès ou non responsables criminellement pour cause de troubles mentaux. Ce projet de loi a surtout dépolitisé le processus en accordant des pouvoirs quasi judiciaires aux Commissions d'examen, et en rendant explicite la réintégration d'un contrevenant atteint de troubles mentaux dans la société comme l'un des mandats des Commissions d'examen, l'autre étant que la société devrait être à l'abri des contrevenants dangereux atteints de troubles mentaux.

    Ces changements ont entraîné une grande amélioration au système et ont été bien accueillis, à la fois par les disciplines juridiques et psychiatriques.

    Le travail des Commissions d'examen, en vertu du Code criminel en particulier, font l'envie d'autres juridictions anglophones qui me sont connues, c'est-à-dire celles des États-Unis et de la Nouvelle-Zélande. Je participe à des conférences en psychiatrie médico-légale chaque année, et lorsqu'on aborde le sujet de la décision reliée aux individus non responsables criminellement, les gens font l'éloge du système canadien. J'ai même amorcé un petit mouvement en Nouvelle-Zélande dans le but d'entraîner des changements semblables au système canadien.

Á  +-(1105)  

    Après ces observations préliminaires, permettez-moi d'aborder certaines des questions soulevées par le Comité dans son document de réflexion.

    Tout d'abord, la défense de non-responsabilité criminelle pour cause de troubles mentaux. Étant donné qu'un verdict de NRC-TM ne signifie plus une hospitalisation psychiatrique automatique et indéfinie pour les contrevenants, les avocats de la défense de toute la province soulèvent cette défense de plus en plus souvent, non seulement dans des cas graves, mais aussi pour des cas moins importants. Par conséquent, les Commissions d'examen font face à une charge de travail croissante.

    La tendance complémentaire de la part de la Couronne à ne pas contester les opinions psychiatriques, particulièrement lorsque les accusations sont mineures--telles que le fait de troubler la paix ou le refus d'un conducteur avec des facultés affaiblies de se soumettre à l'ivressomètre, etc.--contribue à cette charge de travail.

    Dans de nombreuses occasions, les rapports psychiatriques sur l'état mental de la personne au moment du délit allégué sont acceptés sans réserves par toutes les parties et l'auteur n'a pas à fournir son plein raisonnement lors du témoignage oral. Cette méthode est adoptée parce qu'elle est la moins lourde pour toutes les parties et aussi parce qu'elle est perçue comme étant plus humanitaire.

    Par conséquent, la Commission d'examen de la province de Nouvelle-Écosse devient, en pratique, le second palier de traitement pour les malades mentaux, sans égard au fait qu'ils constituent une menace plus ou moins élevée pour la société. Je crois qu'il s'agit d'un train lancé vers nulle part et que le système paralysera si on ne réagit pas. J'estime que le temps est venu de freiner cette folie. Voici mes recommandations à cet égard:

    (1) La défense de NRC-TM devrait être restreinte aux actes criminels. Une telle modification pourrait poser des défis au plan constitutionnel, mais je prie le Comité de prendre ce risque dans l'intérêt de la réalité pratique.

    (2) Autrement, pour les infractions punissables par voie de déclaration sommaire de culpabilité, le tribunal devrait être mandaté à tenir une audience de décision au moment de rendre le verdict de NRC-TM. Certains accusés seraient admissibles à une absolution inconditionnelle à cette étape. Seules les personnes représentant un danger important sur une base permanente seraient référées à la Commission d'examen.

    Le deuxième point que je désire aborder est celui des critères d'aptitude. Dans la plupart des cas, les critères à trois volets énoncés dans la Section 2 du Code criminel suffisent à protéger les malades mentaux qui ne devraient pas passer en justice. Cependant, suite au cas Taylor, en Ontario, de nombreux avocats se demandent si le seuil de capacité cognitive limitée reconnu par la Cour de l'Ontario couvre toutes les situations.

    Une personne atteinte de dépression profonde, par exemple, qui veut appeler une condamnation en raison d'un sens de culpabilité psychologique, même si ses capacités cognitives sont intactes, pourrait ne pas être couverte par les critères actuels, s'ils sont appliqués strictement. La même considération s'applique à un accusé qui comprend la nature et l'objet des accusations qui pèsent contre lui, de même que les conséquences d'une condamnation et qui est en mesure de communiquer avec son avocat mais pourrait être incapable de faire un choix éclairé entre diverses options en raison de limitations psychiatriques. La défense est particulièrement préoccupée par cette situation. Il faut donc réexaminer les critères d'aptitude.

    Le troisième point que je désire aborder est le pouvoir de la Commission d'examen. Ayant été membre de la Commission d'examen du Code criminel canadien en Nouvelle-Écosse pendant plus d'un an, je me suis rendu compte que dans de nombreuses situations, la Commission ne possède pas les renseignements adéquats pour prendre une décision rapide.

Á  +-(1110)  

    Afin de régler ce problème, je recommande que la Commission soit habilitée à ordonner une évaluation avant d'examiner la disposition d'un contrevenant, lorsqu'une telle évaluation n'est pas déjà disponible.

    Je recommande également que la Commission d'examen ait le pouvoir d'acquitter absolument un accusé inapte afin que les cas mineurs, communs et inoffensifs puissent être réglés dans les plus brefs délais. Afin de s'assurer que l'intérêt public ne soit pas oublié dans une telle décision, l'apport de la Couronne pourrait être exigé avant que la Commission d'examen prenne la décision.

    Le quatrième point est relié à la détermination de périodes de détention d'une durée maximale. Je suggère qu'une distinction soit établie entre une telle détermination pour le groupe de personnes NRC-TM et pour les accusés inaptes.

    Pour le premier groupe, il n'est ni logique ni pratique d'adopter cette méthode. Le but de la détention ou d'autres restrictions pour ces personnes consiste à assurer qu'elles ne représentent aucun danger pour la collectivité. Si cette méthode est adoptée, certaines personnes seront exemptées de toute restriction et supervision à la fin de la période de détention, sans égard au fait qu'elles continuent ou non de représenter un danger.

    Si cette méthode est adoptée pour ce groupe, il faudra donc, comme l'ont suggéré d'autres témoins du Comité, l'accompagner d'une proclamation des sections d'accusé dangereux atteint de troubles mentaux.

    Pour les accusés inaptes, je recommande donc la détermination de périodes de détention d'une durée maximale. Cependant, elle ne devrait pas comporter une période fixe d'un certain nombre d'années--arbitrairement, deux ou trois ans, ou sept ans--mais être liée au progrès ou à l'absence de progrès dans l'atteinte de l'objectif consistant à rétablir l'accusé en état d'aptitude. Une fois que la Commission ou la Cour en arrive à la conclusion que l'accusé est insusceptible d'être rétabli à cet état, la Commission ou la Cour doit suspendre les procédures ou ordonner une absolution inconditionnelle. C'est ce que je recommande.

    Automatisme: cette défense, bien qu'elle soit utilisée rarement, est difficile à comprendre pour les avocats, les psychiatres et le grand public. Des cas récents, au Canada, ont suscité l'intérêt mondial mais ont peu éclairé les conditions nécessaires qu'il faudrait remplir avant de l'intégrer avec succès dans les cas psychologiques. Les professions juridique et psychiatrique doivent absolument étudier ce phénomène de façon systématique et détaillée. J'estime qu'il doit être codifié, mais avant d'être codifié il doit être étudié de façon exhaustive par une Commission d'enquête.

    Je recommande que le Gouvernement du Canada mette sur pied une Commission pour examiner la défense traditionnelle de l'automatisme et clarifie ses limites conceptuelles et juridiques. Je pense à la Commission McRuer qui a été établie dans les années cinquante pour étudier la défense d'aliénation mentale, du nom qu'on lui donnait à cette époque. J'estime que ses découvertes ont été très utiles pour les professions psychiatriques et juridiques.

Á  +-(1115)  

+-

    Le vice-président (M. John McKay): Merci, Dr Akhtar.

    Maintenant, nous allons accorder sept minutes à M. Cadman.

+-

    M. Chuck Cadman (Surrey-Nord, Alliance canadienne): Merci, monsieur le Président.

    Merci, Dr Akhtar, de votre présence aujourd'hui. J'ai quelques brèves questions.

    Il y a quelques semaines, nous avons reçu le témoignage du Dr Semrau, qui a suggéré--et de façon assez controversée, à mon avis--que l'état mental d'un accusé ne doit pas être pris en considération pour la détermination de culpabilité, mais que cette détermination de culpabilité soit faite en premier et que l'état mental de l'accusé ou du contrevenant soit pris en considération au moment de la détermination de la peine. Je me demande si vous avez des commentaires à ce sujet.

+-

    M. Syed Akhtar: Il s'agit d'une question plus juridique que psychiatrique. C'est une question de politique, et d'après moi, la loi a toujours considéré le facteur mental comme un élément essentiel de la culpabilité: on ne peut pas établir la culpabilité sans prendre en considération le facteur mental. Le terme «coupable», d'après ce que je comprends du concept juridique, ne peut pas être appliqué à moins que l'esprit même ne soit coupable. Je ne vois donc pas le bien-fondé de cette recommandation.

+-

    M. Chuck Cadman: En ce qui concerne les déclarations des victimes sur les répercussions du crime, on a proposé qu'il soit permis aux victimes de faire des déclarations orales sur les répercussions avant les audiences de la Commission d'examen. Je me demande si vous connaissez cet aspect ou si vous avez une recommandation à ce sujet.

+-

    M. Syed Akhtar: En Nouvelle-Écosse, je fais partie de la Commission depuis un an et demi seulement, et certaines victimes ont comparu une ou deux fois seulement. Je ne sais pas si ces personnes sont au courant que la Commission examinera ce cas en particulier. Il serait peut être nécessaire de les aviser, si elles sont déjà inscrites sur une liste quelconque, lorsqu'un cas pertinent à leur plainte sera examiné. Je n'ai aucune objection à ce qu'elles soient avisées.

+-

    M. Chuck Cadman: Qu'en est-il de la question des déclarations orales des victimes sur les répercussions du crime?

+-

    M. Syed Akhtar: Il s'agit encore d'une question juridique plutôt que psychiatrique. Je crois que cela compliquera la situation si l'accusé--je le qualifie de patient--doit faire face à la victime, parfois en présence de membres de la famille. En considération du fonctionnement pratique de la Commission, cela n'est probablement pas nécessaire.

Á  +-(1120)  

+-

    M. Chuck Cadman: Vous savez que cela est maintenant permis devant le tribunal et lors des audiences de libération conditionnelle. Vous suggérez donc que cela ne serait pas d'une grande utilité pour la commission d'examen.

+-

    M. Syed Akhtar: Je ne crois pas que cela soit très utile.

+-

    Le président (M. Andy Scott (Fredericton, Lib.)): Il vous reste encore quatre minutes.

+-

    M. Chuck Cadman: J'ai une brève question. Merci, Docteur Akhtar.

    Si je vous ai bien compris, vous avez mentionné dans votre exposé qu'à votre avis les commissions d'examen deviennent pratiquement un second palier de traitement. Je me demande si vous pourriez apporter quelques précisions à ce sujet, afin que je puisse mieux comprendre votre pensée.

+-

    M. Syed Akhtar: Il existe des cas où l'individu n'est pas extrêmement psychotique mais a certains problèmes, et quelqu'un soulève la défense de l'aliénation mentale. On décide d'envoyer l'individu à l'Hôpital de Nouvelle-Écosse, sur détention psychiatrique, afin d'obtenir un rapport sur son état mental. Le psychiatre l'examine. Il est accusé d'une infraction mineure seulement, telle que le fait de troubler la paix, mais il est atteint de troubles mentaux. Le psychiatre en arrive à la conclusion honnête que l'individu était perturbé au moment où il a troublé la paix, à un point tel que l'article 16 s'applique à lui, et il dresse son rapport.

    L'individu retourne devant le tribunal. La poursuite n'insiste pas car il s'agit d'un cas mineur. La défense, bien entendu, est très satisfaite: elle sait que l'individu ne sera pas détenu indéfiniment et qu'il recevra des traitements. Donc, tout le monde est satisfait du résultat. Les Commissions d'examen deviennent donc comme les Commissions d'examen sous le droit civil. Je crois que chaque province possède une Commission civile.

    J'établis une distinction entre un danger de type civil et un danger de type criminel. Il se peut que je donne trop de détails à ce sujet. La notion de procédures civiles est conçue afin de permettre aux Commissions d'examen du Code criminel de faire face à une menace d'une ampleur différente. Sur le plan civil, elles font face seulement à la maladie mentale. Du point de vue de l'examen du Code criminel, elles sont aux prises non seulement avec la maladie mentale, mais également avec des troubles de la personnalité, ainsi que des déviations sexuelles. Sur le plan civil, on est confronté à la menace pour la société, en plus de la menace pour la personne elle-même. Sur le plan criminel, on se préoccupe surtout de la menace pour la société. Sur le plan civil, on est aux prises avec le danger à court terme et l'ampleur est moindre. Sur le plan criminel, l'ampleur est plus grande et on fait face à des problèmes à long terme.

    Le processus de la Commission d'examen est donc déraillé ou dirigé vers des domaines qui seraient traités par les Commissions de traitement.

+-

    M. Jay Hill (Prince George--Peace River, Alliance canadienne): Donc en résumé, Docteur, vous dites que votre souci premier à l'égard du fonctionnement des Commissions d'examen, pour cet aspect en particulier, est la façon dont elles traitent les cas civils par rapport aux cas criminels?

+-

    M. Syed Akhtar: Les cas mineurs--la façon dont elles abordent les cas de nature mineure. Elles sont inondées de ces cas mineurs. Il y a une énorme augmentation du nombre de cas, et plusieurs d'entre eux sont des cas mineurs.

    Je suggère donc que la défense NCR soit restreinte aux actes criminels. Et si ceci ne peut être accompli de façon constitutionnelle, le tribunal devrait être forcé à prendre une décision, du moins pour les cas mineurs. Plutôt que de prendre 30 ou 45 jours, et d'envoyer l'individu devant la Commission d'examen, le tribunal devrait être mandaté, par exemple dans un cas de trouble de la paix, à prendre une décision tout de suite après le verdict. Plusieurs individus seraient ainsi en mesure de retourner chez eux ou à l'hôpital, peu importe.

+-

    Le président: Merci beaucoup.

    Monsieur Lanctôt.

[Français]

+-

    M. Robert Lanctôt (Châteauguay, BQ): Merci, monsieur le président.

    Nous avons entendu le témoignage d'un psychiatre, M. Stanley Semrau. Ce dernier est venu un peu chambarder toute la lignée des travaux qui avaient été faits à cette étape du comité. Ses idées étaient peut-être intéressantes; on ne le sait pas. Nous ne sommes pas des psychiatres, et c'est pour cette raison que je profite de l'occasion pour vous poser la question. Il demande de faire vraiment un virage à 180 degrés. Pour lui, les troubles mentaux n'ont rien à voir avec l'intention coupable. Pour lui, sauf quand il y a des convulsions, la schizophrénie, les hallucinations ou toutes ces choses n'ont rien à voir avec l'intention coupable. Or, on lui posait des questions vraiment importantes parce que pour lui, l'intention coupable va presque automatiquement avec le fait, avec l'actus reus. Quant au mens rea, pour lui, ce n'est pas parce qu'on a un trouble mental qu'on vient chambarder cette vision des choses.

    Qu'est-ce que vous en pensez?

Á  +-(1125)  

[Traduction]

+-

    M. Syed Akhtar: Je crois que j'ai déjà répondu à cette question, avec l'autre honorable député.

    Je crois qu'il s'agit d'une question juridique. Je ne sais pas. Je ne veux pas critiquer Semrau. Il a ses propres opinions, mais ceci est une opinion extrême, tant du point de vue psychiatrique que du point de vue juridique. Si on accepte le fait que le facteur mental n'est pas nécessaire, on doit démolir les fondements, la philosophie du droit criminel, de la responsabilité criminelle. On écarte ainsi 400, 500, 600 années d'expérience dans la façon d'aborder l'intention criminelle ou la culpabilité. Mais il s'agit, essentiellement, d'une question d'ordre juridique, à savoir qu'est-ce que la culpabilité?

    D'après moi, le principe fondamental qui s'applique est celui qu'aucune personne n'agit de façon coupable à moins que l'esprit même ne soit coupable. On doit donc détruire cette proposition.

[Français]

+-

    M. Robert Lanctôt: Mais ce dernier allait plus loin. Je m'adresse au médecin, pas à l'aspect légal. Je comprends bien votre réponse là-dessus. En tant que psychiatre, en tant que médecin, il nous disait que les troubles mentaux n'avaient pas à être touchés quant à l'intention coupable, sauf dans le cas de convulsions. Pour lui, un schizophrène, ou quelqu'un qui hallucine ou quoi que ce soit peut avoir cette intention coupable. Pour lui, cela n'a rien à voir. Je demande si, d'un point de vue médical, il a raison. Ce sont ses prémisses. S'il part en voulant changer ce système, ce sont les prémisses qu'il prend. Vous, en tant que psychiatre, qu'est-ce que vous pensez?

[Traduction]

+-

    M. Syed Akhtar: Je ne suis pas d'accord. Je ne crois pas que cela soit la question.

[Français]

+-

    M. Robert Lanctôt: D'accord.

    Je reviens un peu aux victimes. Les derniers témoins qu'on a entendus nous ont dit que les victimes sont vraiment laissées pour compte. C'est le cas, entre autres, d'une victime d'un acte très grave qui est venue témoigner en confidentialité. Pour elles, il serait nécessaire, peut-être pas pour le système ou pour la commission, mais pour elles-mêmes, les victimes...

    Est-ce que cela nuirait vraiment à la commission que d'entendre ces victimes, si cela est nécessaire pour leur cheminement, pour leur équilibre et même pour continuer à vivre? Elles en ont la possibilité, comme le disait mon collègue, dans d'autres instances, mais on ne parle pas de la même chose. On ne parle pas d'accusés, on ne parle pas de coupables, on ne parle pas de rien de cela, encore moins de libération conditionnelle. On parle d'un cas où cette personne-là n'est pas reconnue coupable. Donc, légalement, ça cause le problème qu'on voit. Les victimes veulent « suivre » la pénalité ou savoir si la personne sort ou ne sort pas. Est-ce que cela nuit vraiment à la commission, si on peut aider ces gens?

    Qui choisit-on? Est-ce qu'on choisit la réhabilitation de l'accusé, qui a commis cet acte envers sa victime, ou la victime elle-même, qui vient témoigner à l'effet qu'elle sent qu'elle a moins de droits que l'accusé?

Á  +-(1130)  

[Traduction]

+-

    M. Syed Akhtar: Je ne crois pas que cela minera le travail de la Commission d'examen. J'estime que cela augmentera la charge de travail et compliquera les choses si la victime est présente.

    Le concept de la personne, surtout dans un cas de NCR-TM, veut que l'esprit ne fonctionnait pas de façon appropriée lorsque la victime a été attaquée. Je ne vois pas l'utilité d'une confrontation entre la victime et l'accusé, dans le cadre d'une audience officielle devant un organisme quasi judiciaire. Je crois que les victimes devraient avoir la possibilité d'écrire à la Commission d'examen et de soumettre leur point de vue sur ce qui s'est passé. Je parle de leur présence lors de l'audience. Je ne crois pas que cela soit ni nécessaire ni utile.

+-

    Le président: Merci beaucoup. Je vais maintenant poursuivre. Nous y reviendrons.

    Monsieur Macklin.

+-

    M. Paul Harold Macklin (Northumberland, Lib.): Merci.

    J'aimerais vous poser environ trois questions. L'une d'entre elles, bien entendu, porte sur ma curiosité à l'égard de votre point de vue sur la Nouvelle-Zélande. Vous avez dit que vous reviendriez sur le sujet. J'aimerais entendre ce que vous avez à dire.

    Deuxièmement, vous avez parlé du seuil--c'est-à-dire de l'aptitude à subir un procès. J'aimerais entendre vos commentaires en particulier sur des principes directeurs que nous pourrions utiliser, sur le plan juridique, qui seraient énoncés de façon plus adéquate dans le code.

    Troisièmement, pour fins de précision, quelle est votre référence lorsque vous dites «libération inconditionnelle par la Commission d'examen en présence de la Couronne». Cela signifie-t-il que vous estimez qu'il n'y aurait pas d'autre présentations devant les cours criminelles? Aurait-on le droit, par le biais du processus de la Commission d'examen, d'accorder une libération inconditionnelle, telle qu'elle est définie au sein du concept du système de justice pénale, plutôt qu'une libération qui serait utilisée d'une façon plus générale, afin de décrire une personne relâchée dans le cadre du système médico-légal?

+-

    M. Syed Akhtar: Laissez-moi tout d'abord répondre à cette dernière question. Je parle d'une libération inconditionnelle, tout comme lorsque la Couronne laisse tomber les accusations, dans l'intérêt public.

    Tout ce que je dis, c'est que si l'on se préoccupe du fait que cela aurait pour résultat d'usurper le rôle de la poursuite, la Commission d'examen prendrait alors la place de la poursuite. Je dis que l'on pourrait exiger que la décision de la Commission d'examen d'accorder une libération inconditionnelle à quelqu'un ne puisse être prise à moins que la Couronne n'ait eu la possibilité de représenter l'intérêt public. C'est mon opinion à ce sujet.

    En ce qui concerne votre question sur l'aptitude, cela dépend de la terminologie utilisée. Les experts juridiques sont mieux qualifiés que moi, mais voici mon opinion qui est basée sur un cas récent que j'ai observé en Nouvelle-Zélande. Un médecin avait été accusé du meurtre de sa femme. Il avait été surintendant d'un institut de psychiatrie médico-légale. Il est devenu extrêmement déprimé après sa retraite et éprouvait également des difficultés avec sa femme; il souffrait de ce que nous, les psychiatres, appelons la dépression évolutive. Les gens âgés déprimés développent cette culpabilité délirante et ils sollicitent une punition. Ils veulent être punis. Cet homme était donc dans cet état d'esprit.

    Il était pleinement conscient de la nature et du but des accusations parce que, comme je l'ai dit, il avait été surintendant d'un institut de psychiatrie médico-légale, et il répondait aux critères reliés à la nature, aux conséquences, au but et ainsi de suite, et il avait communiqué avec un avocat. Mais il ne voulait soulever aucune défense. C'est ce dont je parle. Sur le plan cognitif, il est intact. Il répond aux critères du cas Taylor, mais il n'a pas la motivation. Sa motivation est à l'opposé. Il ne veut pas la défendre. Il veut être déclaré coupable. C'est le genre de situation que les critères actuels n'englobent peut-être pas. Et certains individus aux capacités mentales inférieures peuvent également se trouver dans la même situation.

    On peut ajouter au libellé un quatrième critère à l'effet que sa maladie n'entrave pas ses pouvoirs décisionnels. C'est le genre d'élargissement auquel je pense à l'égard du critère d'aptitude, strictement appliqué, surtout si le seuil d'inaptitude est très élevé et le seul d'aptitude est bas, comme dans le cas Taylor--capacité cognitive limitée--on doit alors se préoccuper des individus qui ne sont pas motivés.

    Passons maintenant au cas de la Nouvelle-Zélande, qui ne possède aucune Commission d'examen--c'est le système qui existait ici auparavant, lorsque j'ai débuté ma pratique en psychiatrie médico-légale. La décision est prise à l'égard de ces individus par le procureur général. La même situation prévalait en Nouvelle-Écosse lorsque j'ai débuté ma pratique en psychiatrie médico-légale. C'était le lieutenant-gouverneur, mais le lieutenant-gouverneur demandait conseil auprès de psychiatres, et j'étais le seul psychiatre. Je frémis aujourd'hui à l'idée que j'ai duré aussi longtemps en étant le seul conseiller auprès du lieutenant-gouverneur, qui démontrait parfois un intérêt personnel et interrogeait ces patients, mais à plusieurs reprises il ne le faisait pas. Je connais des cas dans d'autres provinces où la décision a été prise de relâcher et de ne pas relâcher pour des motifs politiques. Quelle serait alors la réaction de la communauté?

    La même situation prévaut maintenant en Nouvelle-Zélande. Le procureur général décide de relâcher ou de ne pas relâcher, et c'est très troublant pour la profession juridique comme pour la profession psychiatrique. J'estime que nous avons réalisé un grand accomplissement avec notre système de Commissions d'examen, et les gens nous envient sur ce point. Prenons l'exemple de la dépolitisation et de la politisation.

Á  +-(1135)  

    Lorsque j'ai mentionné ce point à certains avocats là-bas, je leur ai dit qu'ils devraient lancer un mouvement afin d'instaurer une législation semblable à la loi canadienne. Ils m'ont répondu «Mais c'est une année électorale; personne ne s'y intéressera.»

+-

    Le président: Je n'ai jamais entendu parler d'une chose pareille!

    Des voix: Oh, oh!

    Le président: Merci, Monsieur Macklin.

    De retour à Monsieur Cadman pour trois minutes.

+-

    M. Chuck Cadman: Docteur, j'aimerais revenir à la question des déclarations des victimes, parce que je suis un peu embrouillé. Vous dites que c'est une question d'ordre juridique, et que la plaidoirie de non-responsabilité criminelle signifie essentiellement que la personne n'est pas coupable. Mais je dirais que le fait que la personne soit tenue criminellement responsable ou non est sans rapport avec la victime. Les accusés sont toujours la cause des situations dans lesquelles se trouvent les victimes. Vous avez suggéré que cela compliquerait probablement les choses si la victime témoignait, que cela pourrait causer des problèmes à la personne reçue en examen.

    En ce qui concerne la réhabilitation, pour déterminer si quelqu'un s'est réhabilité ou est maintenant apte à être libéré--je parle de non-responsabilité criminelle maintenant--est-ce que le fait d'être capable de faire face à sa victime, à ce qu'il a fait, et d'être capable de rencontrer cette personne face à face ne refléterait pas en partie sa réhabilitation ou sa capacité à fonctionner en société ? Je ne suggère pas une confrontation, mais juste d'être capable de faire face à ce qu'il a fait à la victime.

+-

    M. Syed Akhtar: Je pense que cela devrait se faire dans un cadre différent. Je ne dis pas qu'il ne faut pas le faire. Les préoccupations de la victime doivent être prises en considération, peut-être durant une entrevue séparée entre le patient et la victime, mais pas dans un cadre officiel.

Á  +-(1140)  

+-

    M. Chuck Cadman: S'ils ne sont pas capables de faire face à leurs victimes, est-ce que cela ne nous en dit pas un peu sur leur capacité ou leur aptitude à être libérés? C'est mon point de vue.

    La commission d'examen prend une décision à savoir si telle ou telle personne est apte à être libérée. S'ils ne sont pas capables de faire face à ce qu'ils ont fait, de faire face à leur victime, ne serait-ce pas qu'en partie...

+-

    M. Syed Akhtar: Il y a différentes étapes à l'amélioration. Certains peuvent y faire face, tandis que certains peuvent ne pas être capables d'y faire face. On les voit immédiatement après leur arrestation, dans les 45 à 90 jours, puis on les voit quelques mois plus tard à un moment où leur état mental peut avoir changé. Après une certaine période, ils seront probablement capables d'y faire face. Mais on ne peut pas dire dans chaque cas qu'ils seront capables d'y faire face.

+-

    M. Chuck Cadman: Comment le savez-vous, si vous ne les voyez pas interagir avec leur victime?

+-

    M. Syed Akhtar: Je ne dis pas qu'il ne faut pas que cet échange ait lieu, je dis qu'il doit avoir lieu dans un cadre différent. Durant une réunion de la commission d'examen, il n'est pas possible d'observer ce qu'il ressent ou de lui demander comment il se sent. Durant une séance de traitement, le médecin peut dire voilà comment se sent la victime, qu'en pensez-vous? Quelle est votre réaction? Mais il n'est pas possible de demander cela durant une réunion de la commission d'examen.

+-

    M. Chuck Cadman: Pourquoi pas, exactement?

+-

    M. Syed Akhtar: Parce qu'il ne s'agit pas d'une entrevue du genre d'une entrevue avec un patient psychiatrique. Ce n'est pas une entrevue. Parfois, les avocats conseillent à leurs clients de ne répondre à aucune question. C'est leur droit.

+-

    M. Chuck Cadman: Je suis un peu préoccupé par les droits de cette personne.

+-

    M. Syed Akhtar: C'est leur droit. J'ai posé une question à une personne il n'y a pas longtemps. L'avocat a conseillé à cette personne déclarée NRC de ne répondre à aucune question. Je voulais savoir s'il avait choisi de ne pas répondre aux questions parce qu'il avait décidé de ne pas le faire ou parce qu'il entendait des voix lui disant de ne pas le faire. Mais je ne pouvais le demander à l'avocat. Je ne pouvais même pas demander au psychiatre, qui témoignait à titre de membre de la commission, ce qu'il pensait du refus du patient de répondre aux questions. J'étais tenu au silence par le président, un juge à la retraite. Il a dit que je ne pouvais faire de déduction. Que je ne pouvais demander à un psychiatre de faire une déduction quant au droit d'un patient ou de n'importe quelle personne d'exercer son droit constitutionnel de pas répondre aux questions.

    C'est la situation. Il ne s'agit pas d'une relation patient-médecin. Il s'agit d'une situation d'ordre juridique. Il faut composer avec ces subtilités juridiques.

+-

    Le président: Merci beaucoup.

    Monsieur Maloney.

+-

    M. John Maloney (Erie--Lincoln, Lib.): La commission d'examen éprouve des difficultés en raison de la charge de travail qui augmente, et vous avez suggéré de n'y recourir peut-être que pour les actes criminels et vous avez tiré une ligne arbitraire sur son utilisation. En tant que psychiatre professionnel, vous sentez-vous à l'aise avec cette ligne?

+-

    M. Syed Akhtar: Pourvu que des dispositions appropriées soient prises pour éduquer ces personnes. Ce qu'il faut, c'est un système de traitement. Je ne dirai pas qu'il ne faut pas s'occuper de ces personnes du tout; je dis simplement qu'elles ne devraient pas être traitées par une commission d'examen d'un tribunal criminel, mais par le système civil.

+-

    M. John Maloney: La situation est-elle une question de ressources? Votre commission d'examen devrait-elle être élargie? Devrait-il y en avoir plus?

+-

    M. Syed Akhtar: La situation est avant tout une question de ressources. C'est vrai, il n'y a aucun doute là-dessus. Mais aussi, à mon avis, cela réduit les normes du témoignage psychiatrique. Cela nuit à la psychiatrie médico-légal parce que personne n'examine la question de manière critique; personne n'a contre-interrogé ce médecin. Certains médecins pourraient dire qu'il est schizophrène et qu'il trouble l'ordre public, et que par conséquent il est sous sujet de la section 16, et cela sans lien, sans aucun raisonnement, et sans que l'avocat conteste.

    Dans ce sens, je crois que cela réduit les normes de la profession juridique et de la profession psychiatrique, parce que c'est une chose automatique. Il s'agit d'une infraction mineure, personne ne s'en fait à ce sujet, et le médecin dit qu'il n'est pas coupable, qu'il n'est pas responsable criminellement, donc qui suis-je pour faire tout un plat avec cela, surtout parce qu'il ne s'agit que d'une infraction mineure? C'est ce que je dis. Cela a cet effet latéral.

Á  +-(1145)  

+-

    Le président: Merci, monsieur Maloney.

    Monsieur Lanctôt.

[Français]

+-

    M. Robert Lanctôt: C'est bon d'entendre le parti ministériel parler de manque de ressources. Habituellement, ça vient du parti de l'opposition. Je remercie mon collègue M. Maloney.

    Je reviens encore au problème des victimes. Vos réponses donnent un peu raison aux victimes qui viennent nous dire qu'elles sont vraiment laissées de côté, parce que vous nous dites que ce n'est pas le bon forum pour qu'elles viennent s'exprimer ou qu'elles viennent se vider le coeur ou qu'elles viennent rencontrer l'accusé. Mais c'est ce qu'elles sont venues dire. Elles veulent faire partie, justement, de ce cadre strict. Cela fait partie, pour elles, de leur réhabilitation. Cela fait partie aussi du suivi d'un système dans lequel elles ont été impliquées les premières. Ce sont les victimes, et les exclure de cette façon-là... D'ailleurs, vous n'êtes pas le seul. À peu près tous les psychiatres et toutes les commissions d'examen sont venus dire la même chose: que ça n'ajouterait rien, que ça ne nuirait pas, mais que ce serait plus complexe.

    C'est peut-être le cas, mais il est peut-être temps aussi d'y voir, si ça ne change rien pour la commission sinon que ça complique les choses. Pour la personne qui est victime, c'est encore plus compliqué de ne pas pouvoir participer à ce forum strict. Elles ne veulent pas que ce soit fermé, justement. Quelle est l'impression de la victime si tout ce qu'elle peut faire, c'est écrire un texte que vous allez lire pendant qu'elle pourrait raconter les mêmes faits verbalement? Elle pourrait vous en dire des choses, mais pour elle, la victime, si cela n'ajoute rien pour vous, cela fait partie du processus qui consiste à tenir compte de ce que vit la victime.

[Traduction]

+-

    M. Syed Akhtar: C'est peut-être parce que je me soucie du patient que vous dites que j'ignore les souffrances des victimes. Je n'ignore pas leurs souffrances. Mon point de mire, c'est que le verdict de non-responsabilité criminelle pour cause de troubles mentaux signifie que la personne ne voulait pas faire de mal à la victime. Bien que la victime ait souffert, l'accusé n'avait pas l'intention de la faire souffrir. Comment réagissez-vous dans la vie de tous les jours lorsque quelqu'un vous heurte en disant «Désolé, je n'avais pas l'intention de vous heurter»? Comment agissez-vous dans ces cas-là?

    Je dis que cela ne devrait pas se faire dans un cadre officiel. Peut-être que le psychiatre pourrait rencontrer d'abord la victime séparément et voir quelle serait la meilleure méthode de guérison pour elle, peut-être une confrontation avec le patient. Des situations différentes amèneront des solutions différentes.

    Je ne dis pas que ce n'est pas un problème; c'est un problème pour la victime, cela ne fait aucun doute. Je dis que chaque situation exigera une solution différente pour la victime, et porter cela dans un cadre officiel n'est pas toujours une solution. Je n'y suis pas opposé. Je dis que cela ne fait que compliquer les choses, mais je n'y suis pas aussi opposé que je le suis pour l'abolition de la défense de NRC.

[Français]

+-

    M. Robert Lanctôt: Si les victimes vous entendaient aujourd'hui et si elles entendaient les autres personnes, je suis certain qu'elles viendraient toutes dire que ces commentaires font en sorte qu'elles ne sont pas prises en compte, alors que c'est pourtant elles qui ont subi cela.

    Je comprends que votre patient... Mais indirectement, vous avez un autre patient ou une autre patiente, dont vous n'avez pas à régler le cas, mais pour qui cela fait partie d'un cheminement qui peut l'aider. Vous avez un forum dans la société, qui est établi par le Code criminel. Ces victimes ne sont pas imbéciles. Pourquoi les exclure de ce forum?

[Traduction]

+-

    M. Syed Akhtar: Je ne dis pas qu'il faut les rejeter. Je dis qu'elles doivent être entendues et qu'elles doivent en avoir la possibilité. Elles doivent être traitées, si nécessaire, pour se remettre de la blessure psychologique dont elles ont souffert. C'est le cadre dans lequel on veut le faire que je ne trouve pas utile, parce qu'il s'agit d'un cadre officiel. Il ne s'agit pas d'un cadre de traitement informel.

Á  +-(1150)  

+-

    Le président: Merci.

    John McKay.

+-

    M. John McKay: Merci pour votre témoignage.

    Vous avez soulevé la question des critères d'aptitude, et vous avez fait allusion à un test en trois volets dans la définition de la nature... La personne doit comprendre la nature des poursuites, les conséquences de celles-ci, et être capable de communiquer avec son avocat. Vous avez donné quelques exemples de personnes qui étaient déprimées, ou de personnes qui étaient incapables de faire un choix éclairé, et avez suggéré qu'il faudrait peut-être réviser ces critères.

    Nous avons aussi entendu un témoignage--sans vouloir insister--selon lequel si la personne est à l'écoute et connaît le juge, sa plaidoirie sera acceptée. Si elle est à l'écoute, qu'elle connaît le juge et ce qu'il peut lui faire, sa plaidoirie sera acceptée. C'est assez minime. Dois-je supposer que votre problème, concerne le fait que le seuil est trop bas, ou que pour une série de raisons les personnes peuvent ne pas être en mesure de communiquer de manière rationnelle? Est-ce que c'est quelque chose qui ne va pas avec les trois points--la nature et l'objet des poursuites, les conséquences des poursuites, ou la communication avec son avocat--ou est-ce que c'est lié au fait que cela devrait être changé? Je ne suis pas trop sûr de ce que vous voulez dire ici.

+-

    M. Syed Akhtar: Je n'ai pas de problème avec le seuil. Je pense qu'il est suffisamment bas. Il doit être bas, surtout maintenant, c-à-d quand on le compare à celui d'il y a plusieurs siècles, lorsque les accusés n'avaient pas d'avocat et devaient se défendre seul. Le test à ce moment consistait à vérifier s'ils pouvaient assumer leur défense. Maintenant, tout le monde a un avocat, donc les défauts de compréhension d'une personne devraient être compensés par la compétence de son avocat. Je pense que le seuil doit être bas. À mon avis ce n'est pas un problème. C'est à la fois dans l'intérêt de l'accusé et dans l'intérêt de la société, et le fait que tout le monde a un avocat signifie que le niveau d'aptitude approprié est bas.

    Mes préoccupations sont liées aux limites du concept d'aptitude, et c'est pourquoi j'ai donné cet exemple précis. Il faut plus que des capacités cognitives pour participer de manière rationnelle au processus. La personne qui a des capacités cognitives adéquates mais qui manque de motivation ne participe pas de manière rationnelle à sa défense. Je pense que cette situation devrait être couverte.

+-

    M. John McKay: Je ne sais pas trop comment il faudrait formuler cela dans un code criminel.

+-

    M. Syed Akhtar: J'ai parlé de ce cas pour donner un exemple, pour entrer dans la terminologie juridique. Je suis certain que les avocats seront capables d'en arriver avec une meilleure terminologie--c'est-à-dire, que son esprit fonctionne ou que ses capacités cognitives ne sont pas influencées par d'autres processus irrationnels. On peut utiliser un langage différent. Je suis certain que des gens vont en arriver à quelque chose, mais je donne cet exemple pour expliquer ma préoccupation.

+-

    M. John McKay: On pourrait dire que cela ouvre la porte à des situations du genre «je suis trop déprimé pour mandater un avocat».

+-

    M. Syed Akhtar: Bien, vous ne pouvez dire cela. C'est au juge à décider de toute façon. Vous n'irez pas loin avec cela.

Á  +-(1155)  

+-

    Le président: Merci beaucoup, monsieur McKay.

    Monsieur Hill.

+-

    M. Jay Hill: Merci, monsieur le président.

    Je voudrais faire valoir un certain nombre de points et ensuite je vais peut-être vous demander vos commentaires à la fin.

    D'abord, en raison de la nature de nos questions, nous laissons souvent un aspect de côté, sans y revenir. J'aimerais apporter mon commentaire à propos de la personne déclarée non responsable criminellement qui a le droit, en vertu de la constitution, de ne pas réagir et de ne pas répondre aux questions. Je pense que dans les meilleurs intérêts de la société, le système devrait peut-être bénéficier du droit, en vertu de la constitution, de lui refuser sa libération, à cause de son refus de répondre. S'ils veulent faire ce type de choix et se draper dans le droit constitutionnel, je crois que la société a le droit elle aussi de se protéger.

    Si je vous comprends bien, vous soutenez peut-être l'idée d'une rencontre indépendante entre la victime et la personne NRC, en présence des médecins. Je dirais que si cette méthode doit être utilisée, il faudrait absolument que ce type de rencontre ait lieu avant que la commission d'examen ne se réunisse pour décider d'une libération.

    Pour reprendre ce que disait M. Cadman, j'ajouterais que la commission d'examen doit savoir, lorsqu'elle prend sa décision, de quelle manière la personne NRC pourra interagir avec la victime, afin de pouvoir conclure s'il y aura ou non des problèmes dans l'avenir.

    Le dernier point que je voudrais faire valoir concerne la question des droits des victimes. Il me semble, et nous avons fait valoir ce point précédemment, que le système et les commissions d'examen s'intéressent surtout à la santé mentale de la personne que vous continuez d'appeler patient et que nous appelons criminel. L'accusé a commis le geste, qu'il en ait eu l'intention ou non.

    Il nous semble que le système ne s'intéresse qu'à la santé mentale et au bien-être des personnes NRC, et certains nous ont posé cette question: que dire de la santé mentale et du bien-être des victimes? Le système semble oublier cet aspect. Je pense qu'en tant que société, nous leur devons quelque chose en ce sens qu'il faut essayer, comme en a fait mention le membre du Bloc, de les aider à tourner la page elles aussi. Par conséquent, je pense que c'est au système qu'il revient d'examiner leur santé mentale.

    Le dernier point que j'aimerais faire valoir concerne le cas de défense de non-responsabilité criminelle. Est-ce que cela signifie toujours qu'ils ne voulaient pas le faire, ou est-ce que parfois ce n'est pas nécessairement qu'ils ne voulaient pas le faire, mais qu'ils n'ont pas pu se contrôler?

+-

    M. Syed Akhtar: Dans certaines juridictions des États-Unis, c'est vrai. Le contrôle est un des critères de la défense fondée sur l'aliénation mentale, comme ils l'appellent aux États-Unis. Pas au Canada. Au Canada, le contrôle n'entre pas en ligne de compte. On parle de capacité cognitive, de comprendre la signification de l'acte et de prendre conscience s'il est moralement mauvais ou non. Par conséquent, au Canada, cette défense signifie toujours qu'il ou elle n'avait pas l'intention de le faire.

+-

    M. Jay Hill: Avez-vous des commentaires concernant mes trois autres points au sujet de toute cette affaire portant sur les droits de la victime et la nécessité pour la victime de voir la société protéger son droit à la réhabilitation et à la guérison?

  +-(1200)  

+-

    M. Syed Akhtar: J'ai dit précédemment que j'était en faveur de cette démarche. Je l'appuie. Je veux aider les gens. Vous avez raison, ce système a été créé pour mettre l'accent sur la santé mentale de la personne et la sécurité du public. C'est la raison d'être du système des commissions d'examen. Il y a habituellement d'autres gens qui souffrent--les victimes--il n'y a pas de doute là-dessus. Je suis tout à fait d'accord pour éviter les effets à long terme sur leur santé, et pour leur guérison, comme je l'ai dit.

    Je parle de la situation dont j'ai fait mention, où on ne peut lui poser de questions. Il faut vivre avec cela.

+-

    M. Jay Hill: Que pensez-vous de mon idée d'organiser une rencontre indépendante avant que la commission d'examen prenne sa décision?

+-

    M. Syed Akhtar: Les personnes qui présentent des rapports vont s'y opposer, parce que vous nous imposez des restrictions--vous nous dites comment exercer notre psychiatrie. Mais je n'ai pas d'objection à cela en tant que membre de la commission. Plus on a de renseignements, mieux c'est. La qualité de notre décision repose sur la qualité des renseignements sur lesquels elle se fonde, par conséquent, je suis tout à fait d'accord.

+-

    Le président: Monsieur John McKay.

+-

    M. John McKay: Pour revenir à ce point, je croyais que vous aviez dit précédemment que la présence de la victime à une audience de la commission d'examen ne serait ni utile, ni profitable. J'espère que je vous cite bien. Pourtant, en réponse à la demande de M. Hill, vous semblez prêt à inviter la victime à participer au processus d'examen. Il faudrait apporter une précision ici, parce que des personnes sont venues nous dire qu'il fallait inviter la victime à participer au processus, qu'il fallait que le processus soit plus que le simple dépôt d'une déclaration, qu'il fallait que les victimes puissent venir dire à la commission comment cet événement les avait traumatisées, etc.

    Il y a un certain attrait superficiel à cela. Mais je pense que vous avez déclaré que la commission est centrée sur l'accusé, pas le criminel--juste pour préciser--parce qu'il n'a pas été déclaré criminel. Vous vous intéressez à l'état mental de l'accusé, à juste titre. Le système est conçu pour cela. Pourriez-vous réconcilier ces considérations irréconciliables, du moins en surface, sur le rôle de la victime dans le processus et le rôle de la commission?

+-

    M. Syed Akhtar: Je suis désolé si mon propos porte à confusion. Dans mon esprit, c'est clair. Je dis que la victime doit pouvoir participer pleinement au processus, mais ne doit pas être présente physiquement à l'audience de la commission d'examen. Cette démarche ne peut avoir aucun effet thérapeutique, à cause de l'exemple que je vous ai donné, où ils n'ont pas à répondre aux questions s'ils ne veulent pas le faire. Autrement, tous les efforts devraient être faits dans le bureau du médecin, dans la présentation du rapport à la commission d'examen. Je n'ai pas de problème avec cela.

+-

    Le président: Merci monsieur McKay.

    Monsieur Sorenson, avez-vous des commentaires?

+-

    M. Kevin Sorenson (Crowfoot, Alliance canadienne): Oui, s'il vous plaît. Je suis désolé, d'avoir manqué votre témoignage. Nous avons parfois plus d'une réunion ici sur la Colline.

    Même si je ne suis certainement pas un psychiatre et que je ne prétends pas comprendre tout ce qu'il vous faut comprendre pour être psychiatre médico-légal, nous comprenons que les victimes sont traumatisées. Elles peuvent devenir très émotives lorsqu'elles voient la personne qui a commis l'acte criminel, ou la personne qui en est accusée. Nous avons entendu le témoignage d'une victime qui est venue dire comment elle doutait d'être capable de faire face à la personne qui a commis cet acte criminel contre elle. Elles deviennent très émotives.

    Est-il possible que les réactions puissent être les mêmes pour les accusés, lorsqu'ils voient la personne contre laquelle ils ont peut-être commis cet acte criminel--qu'ils puissent avoir un comportement différent de celui qu'ils auraient normalement s'ils ne voyaient pas leur victime?

+-

    M. Syed Akhtar: Oui, il serait différent. Cela dépend de la personnalité de la victime. Certaines personnes vont réagir de manière très efficace; d'autres vont devenir encore plus traumatisées. La même chose est vraie pour le patient ou l'accusé. C'est pourquoi je dis qu'il y a tant de variables qu'il n'est pas possible de généraliser.

    Tout ce que je dis, c'est que l'on ne peut mener une entrevue thérapeutique dans le cadre d'une commission d'examen. Si le but est d'obtenir un effet salutaire sur l'état mental de la victime sans perturber sérieusement l'état mental de l'accusé, cela ne peut se faire--ou n'est pas réalisable--dans le cadre d'une commission d'examen.

  +-(1205)  

+-

    M. Kevin Sorenson: Il y a aussi d'autres preuves de personnes--je ne suis pas sûr s'il s'agissait de simples criminels ou de personnes atteintes de troubles mentaux--qui sont retournées après avoir été accusées, après être sorties de prison, voir les mêmes victimes de leurs actes atroces pour les harceler ou tenter de les attaquer de nouveau, de commettre le même geste.

    Ma question est la suivante. Même si vous avez dit que vous traitez avec l'accusé et que vous pouvez professionnellement établir, juste d'après lui et sans parler à la victime, que la victime ne devrait pas comparaître devant la commission d'examen, croyez-vous que vous devriez savoir comment s'est déroulée la rencontre entre la victime et l'accusé, pas devant la commission d'examen, mais dans un autre endroit?

+-

    M. Syed Akhtar: Oui, j'aimerais avoir accès à cette information.

+-

    M. Kevin Sorenson: Donc, il serait important pour vous d'avoir accès à la manière dont s'est présentée cette information?

+-

    M. Syed Akhtar: Oui, absolument. Je dis que plus on a de renseignements, mieux c'est: plus on a de renseignements sur l'accusé et la victime, et sur le contexte dans lequel s'est déroulée la rencontre, mieux c'est pour la commission d'examen et pour le psychiatre traitant.

+-

    Le président: Merci, monsieur Sorenson.

    Monsieur Lanctôt,vous avez trois minutes.

[Français]

+-

    M. Robert Lanctôt: Cela démontre, encore une fois, que c'est juste ce petit aspect, dont vous pouvez vous rendre compte vous-même à la commission, qui fait que cela peut être dérangeant pour l'accusé. Cela va vous donner encore plus d'informations si sa réaction... C'est bien beau, il peut avoir vu la victime dans un autre endroit, à l'hôpital, lors d'une rencontre précédente, mais si vous, en tant que membre de cette commission, vous voyez... Souvent, le langage non verbal va vous donner des indications. Ça existe, le non verbal, mais ça ne sera pas nécessairement écrit dans un rapport.

    Comment fait-on pour établir la crédibilité d'un témoin devant un juge afin que ce dernier puisse voir si son témoignage est crédible ou non? Souvent, le non verbal va dire quelque chose, mais vous, en tant que membre de cette commission, que vous soyez trois ou cinq à l'avant, vous allez voir du non verbal, et peut-être que déjà, avant de prendre une décision, vous verrez que la rencontre entre la victime et l'accusé va vous donner un tout autre ordre d'idée.

    À la lumière de ce que vous venez de me dire, je pense, au contraire, que cette confrontation-là, dans ce forum... Il ne faut pas oublier que l'accusé responsable, qu'il soit apte ou non, qui arrive devant cette commission et qui voit la victime va réagir d'une façon complètement différente qu'il aurait réagi s'il l'avait vue dans un autre endroit, comme dans un hôpital où il n'y a pas de pression. Il va revoir et resasser des choses dans sa tête, et vous aurez beaucoup plus d'informations si les victimes sont présentes et qu'elles peuvent donner leur version verbalement. J'en suis convaincu.

[Traduction]

+-

    Le président: Merci beaucoup.

    Je passerai la parole à M. Hill, à moins que...

+-

    M. Syed Akhtar: Je veux juste dire que vos attributions sont différentes des miennes.

    Le président: Ah, c'est un grand pays.

    Monsieur Hill.

+-

    M. Jay Hill: Je voudrais poursuivre de manière à ce que nous comprenions très clairement votre point de vue, docteur. Vous avez déclaré à plus d'une occasion aujourd'hui que vous croyez, assez profondément je pense, que plus la commission d'examen a de renseignements à sa disposition, mieux c'est. Je pense que c'est ce que vous avez dit.

    Malgré le fait que M. McKay pense qu'il puisse y avoir un certain attrait superficiel à permettre aux victimes de faire une déclaration orale devant la commission, je ne le crois pas.

+-

    M. John McKay: Je n'ai pas dit que je croyais cela. J'ai dit que c'était un témoignage.

+-

    M. Jay Hill: Non, non, vous avez dit qu'il y avait un certain attrait superficiel au fait de leur permettre de le faire.

+-

    M. John McKay: Ce n'est pas nécessairement une profession de foi.

+-

    M. Jay Hill: Bien, je ne fais que vous prendre au mot.

    Quoi qu'il en soit, docteur, veuillez excuser les plaisanteries partisanes parmi les membres de notre comité.

+-

    Le président: Je vous suggère de passer par l'intermédiaire du président.

+-

    M. Jay Hill: Bien, le docteur Akhtar est notre invité.

    Quoi qu'il en soit, j'essaie de comprendre pourquoi vous semblez si ferme quand vous dites que la commission ne devrait pas assister à cette rencontre, ou du moins à cette éventuelle rencontre. Comme vous l'avez souligné, il n'y a aucun moyen de forcer les personnes NRC à répondre. Si c'est ce qu'elles choisissent, elles ne répondront simplement pas aux questions ou ne réagiront pas aux déclarations que pourraient faire les victimes devant elles.

    Même cela signifierait quelque chose pour la commission. Ce serait beaucoup plus évident, et utile à sa décision, si elle pouvait être témoin de cela, au lieu de lire sur un bout de papier que la personne NRC n'a pas répondu. Parce que comme l'ont dit d'autres membres de ce comité, le langage non verbal et les émotions exprimées pourraient aider la commission à en arriver à une décision juste quant à savoir si cette personne doit être libérée ou non.

  +-(1210)  

+-

    M. Syed Akhtar: Il y aurait certains avantages, mais je vous dis que vous devez peser le pour et le contre... Dans la vie, vous devez faire des compromis. Quelle est la valeur de l'avantage que vous obtiendrez de cet échange par rapport à tous les autres renseignements que vous avez, c'est-à-dire pas seulement le langage non verbal, mais aussi tous les autres renseignements que vous avez? Quels en seront les effets dans une situation artificielle?

    L'objectif de la présence des victimes est lié à leur santé émotive, n'est-ce pas, pour qu'elles puissent oublier ce qui leur est arrivé. Je dis que ce genre d'objectif thérapeutique n'est pas réalisable dans le contexte juridique d'une commission d'examen. C'est tout ce que je dis. Il s'agit de deux contextes différents.

    Vous n'atteindrez pas votre objectif en permettant à la victime d'être présente--l'objectif que vous et moi avons en tête, soit de leur permettre d'oublier.

+-

    M. Jay Hill: Je voudrais juste souligner que ce n'est pas la seule raison pour laquelle nous croyons que la victime doit être présente, pour sa réhabilitation ou sa guérison. J'espère que nul d'entre nous ne vous a induit en erreur là-dessus. C'est une raison fondamentale et nous croyons que cela doit être un droit, autant pour la victime que pour l'accusé, de disposer de ce moyen de traitement mental, si vous me permettez. Mais ce n'est pas la seule raison.

    Je dirais qu'une autre des raisons pour que cet échange ait lieu, consite à pouvoir voir si la personne NRC réagit à la victime. Comme l'ont souligné des membres de ce comité, très clairement, si la commission en arrive à la décision de le ou la relâcher--la personne NRC, l'accusé, le patient, comme vous l'appelez--et que cette personne NRC attaque de nouveau la même personne, il ne fait pas de doute, et je pense que tous sont d'accord, que ce serait une véritable parodie du système.

+-

    M. Syed Akhtar: Une fois encore, je ne peux songer à aucun incident de ce genre qui soit arrivé. Ce n'est jamais arrivé, dans ma pratique, qu'une personne soit retournée attaquer la même victime... pas en Nouvelle-Écosse, en tout cas. C'est très rare. Vous pouvez évoquer toutes sortes de situations; tout ce que je dis, c'est que c'est très rare.

    Donc, comme je l'ai dit, il faut avoir un compromis. Il faut faire l'équilibre entre ce que l'on obtient de cet échange par rapport aux restrictions ou complications qu'il entraîne.

+-

    Le président: Il reste deux noms sur la liste. Je sais que M. Cadman veut passer à un autre sujet, donc même si c'est son tour, je vais passer la parole à Michel Lanctôt maintenant, si sa question porte sur le même sujet.

    M. Michel Lanctôt: Le même sujet.

    Le président: C'est sur le même sujet, donc nous allons le laisser terminer sa réflexion.

[Français]

+-

    M. Robert Lanctôt: C'est sur le même sujet et c'est très court. Vous-même, docteur, nous avez dit dans votre introduction que c'était votre première présence dans dans cette enceinte, que vous étiez nerveux et que vous espériez vous y adapter, etc. Voyez-vous que simplement le lieu, même pour quelqu'un qui est sain d'esprit, pour un professionnel d'expérience comme vous... Cela démontre, encore une fois, que l'accusé qui ira là où il saura qu'on va règler sa situation avec la victime, soit à la commission d'examen, va probablement réagir--je vais juste prendre le mot « probablement »--différemment, et cette rencontre devant vous, dans cette enceinte, apporterait probablement quelque chose de très positif en termes de réaction pour les membres de cette commission. J'en suis certain.

[Traduction]

+-

    M. Syed Akhtar: Merci.

+-

    Le président: Monsieur Cadman.

  -(1215)  

+-

    M. Jay Hill: Je voudrais juste soulever un point sur le même sujet et attirer l'attention du docteur... Je n'utiliserai qu'un exemple. Nous avons tous entendu parler des cas de harceleurs atteints de maladie mentale, qui, en dépit des ordres de la cour leur interdisant de s'approcher d'une célébrité--un joueur de hockey ou une vedette du cinéma--continuent de le faire de toute façon. J'ai simplement choisi cet exemple pour démontrer comment une personne atteinte de maladie mentale peut continuer, tant qu'elle est libre de le faire--autrement dit, dans notre société--de s'attaquer à la même personne.

+-

    M. Syed Akhtar: Je ne dis pas que cela n'arrive pas. Je dis que c'est rare.

+-

    Le président: Monsieur Cadman.

+-

    M. Chuck Cadman: Nous avons reçu des psychologues qui sont venus nous dire qu'ils devraient être autorisés à faire les évaluations. Nous avons reçu de nombreuses personnes qui ont dit appuyer cette proposition voulant qu'ils soient autorisés à faire les évaluations concernant l'aptitude, etc., et d'autres personnes qui ont dit s'y opposer. Je me demandais quelles étaient vos impressions là-dessus.

+-

    M. Syed Akhtar: Il y a deux types de psychologues: les psychologues cliniciens, qui ont une certaine formation en matière d'évaluation de la maladie et de son traitement, et les psychologues de recherche. D'après moi, s'ils ont une formation clinique suffisante, ils peuvent être autorisés à faire les évaluations. Mais quelqu'un qui ne connaît pas la maladie mentale--parce que c'est le fondement essentiel du verdict de non aptitude--ne sera pas en mesure de faire un bon travail.

+-

    M. Chuck Cadman: Êtes-vous en train de dire que cela ne vous cause aucun problème, mais qu'il doit y avoir des critères, des qualifications?

+-

    M. Syed Akhtar: Oui. Ils devraient avoir une formation clinique--et ces critères devraient être stricts--et connaître suffisamment la maladie psychiatrique, pas seulement les problèmes psychologiques, en particulier les psychoses, pour lesquelles peu de psychologues ont reçu une formation complète. C'est mon opinion.

-

    Le président: Merci à tous.

    Y a-t-il d'autres questions?

    Sinon, docteur Akhtar, je vous remercie de votre participation et de votre aide sur ce sujet très compliqué. Aussi, au nom de la région, merci pour les services rendus à la province de la Nouvelle-Écosse, durant toutes ces années. Merci beaucoup.

    Pour les membres du comité, vouliez-vous présenter vos choses aujourd'hui? Je vais suspendre assez longtemps pour poursuivre à huit clos de manière à pouvoir terminer de donner les directives au personnel pour la préparation du rapport. Cela prendra quelques minutes.

    La séance est suspendue.

    [Note de la rédaction: la séance se poursuit à huit clos]