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FEWO Réunion de comité

Les Avis de convocation contiennent des renseignements sur le sujet, la date, l’heure et l’endroit de la réunion, ainsi qu’une liste des témoins qui doivent comparaître devant le comité. Les Témoignages sont le compte rendu transcrit, révisé et corrigé de tout ce qui a été dit pendant la séance. Les Procès-verbaux sont le compte rendu officiel des séances.

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CANADA

Comité permanent de la condition féminine


NUMÉRO 019 
l
2e SESSION 
l
39e LÉGISLATURE 

TÉMOIGNAGES

Le jeudi 28 février 2008

[Enregistrement électronique]

(0905)

[Traduction]

    Chers collègues, nous accueillons aujourd'hui Mme Claire Young, vice-doyenne principale et professeure à la Faculté de droit de l'Université de la Colombie-Britannique; et par vidéoconférence, M. David Good, professeur à l'École d'administration publique de l'Université de Victoria.
    Bienvenue à tous les deux. Je suis sûre que vous avez eu beaucoup de temps pour examiner également le budget, et si vous voulez faire des observations là-dessus ou, si l'on pose des questions à ce sujet et que vous êtes capables d'y répondre, nous vous en serons reconnaissants.
    Vous avez, tous les deux, un exposé à faire, je suppose, de dix minutes chacun? Allons-nous commencer par M. Good?
    Cela vous convient-il, monsieur Good, de passer en premier?
    M'entendez-vous?
    Oui. Merci.
    Merci beaucoup de me donner l'occasion de témoigner devant le comité parlementaire de la condition féminine.
    Même si je suis professeur ici à l'Université de Victoria, je dois préciser que j'ai passé 30 ans à Ottawa, au service du gouvernement fédéral. J'ai occupé le poste de sous-ministre adjoint dans plusieurs ministères, y compris à DRHC. J'ai travaillé aussi au Bureau du Conseil privé. J'ai été sous-ministre adjoint de Pêches et Océans, et j'ai également travaillé au Conseil du Trésor.
    Dans le cadre de mes fonctions, j'ai participé de très près, à plusieurs reprises, à l'élaboration des budgets, aussi bien à DRHC, qui est très dépensier, qu'au Conseil du Trésor, qui est le gardien des finances. Je suis donc particulièrement heureux d'être ici ce matin, et je vais limiter mes observations à moins de dix minutes afin de laisser assez de temps pour les questions.
    Si j'ai bien compris, le comité invitera des témoins des organismes centraux, notamment du Conseil du Trésor, du ministère des Finances et du Bureau du Conseil privé, afin d'examiner le lien entre la question de l'analyse comparative entre les sexes et la budgétisation qui, selon moi, est un sujet important.
    Je crois que nous ne devons pas perdre de vue, pour commencer, le caractère fondamental du processus budgétaire et la façon dont on peut de plus en plus s'assurer que d'autres facteurs et d'autres aspects influent sur les budgets.
    Rappelons-nous que le budget est un processus fondamentalement analytique ainsi qu'un processus largement politique. Nous l'avons bien vu dans le budget déposé il y a quelques jours, de même que dans tous les processus budgétaires.
    Souvenons-nous aussi que lorsque nous examinons des budgets, nous devons vraiment tenir compte à la fois des dépenses et des impôts. Les deux ont des répercussions et des ramifications considérables en ce qui concerne les sexes. Ils ont des impacts différentiels, selon les indicateurs utilisés, tant sur le plan des dépenses que sur celui des impôts — par impacts différentiels, on entend les conséquences des diverses politiques pour les hommes et les femmes.
    Une façon d'aborder l'analyse comparative entre les sexes dans le contexte du processus budgétaire, c'est en sachant que tout budget comporte, bien entendu, de nombreux acteurs. On doit donc tenir compte non seulement de ceux qui jouent le rôle de gardiens, principalement le ministère des Finances et le Conseil du Trésor, mais aussi des ministères qui dépensent et militent pour une cause, puis déterminer comment l'analyse comparative entre les sexes peut les cibler et mettre en évidence les répercussions.
    De plus, il y a bien sûr ceux qui fixent des priorités. Ces derniers exercent une influence accrue sur le budget. Il s'agit essentiellement de gens qui gravitent autour du Cabinet du Premier ministre et du Bureau du Conseil privé, c'est-à-dire ceux qui sont en première ligne du processus budgétaire et qui ont la haute main sur l'établissement de ces priorités. Voilà qui est donc très important.
    Autre point à observer: nous avons beau croire que la budgétisation tient compte d'absolument tout et que chaque année, dans le budget, les gouvernements examinent la gamme complète des budgets, la réalité est que la budgétisation est fondamentalement différentielle.
    Si nous regardons le budget déposé il y a deux jours, nous constatons que même si le gouvernement dépense 244 milliards de dollars, le montant des nouveaux crédits attribués dans une année ne s'élève qu'à environ 1,5 milliard de dollars, et c'est vraiment sur ce point que toute l'attention est dirigée. Par conséquent, dans la question fondamentale de l'analyse des politiques de dépenses générales, voire de toute politique publique, la tendance consiste souvent à n'examiner que l'effet différentiel. Pourtant, nous devons aussi examiner la base fondamentale. Voilà un défi de taille, et je pourrai y revenir tout à l'heure.
    Le dernier point — et je crois que c'est une bonne nouvelle pour l'analyse comparative entre les sexes —, c'est le fait fondamental qu'on essaie d'axer davantage les budgets sur le rendement. Nous essayons d'examiner le rendement des budgets, c'est-à-dire les résultats que nous en obtenons et les effets qui s'y rattachent.
    À mon avis, c'est ici que l'analyse comparative entre les sexes peut entrer en jeu, parce que nous savons que les budgets peuvent exercer un impact différentiel sur les sexes, hommes et femmes, et sur les différents groupes qui les composent. Comme nous commençons à voir la budgétisation davantage dans une optique de rendement et de résultats, nous pouvons commencer aussi à examiner les diverses analyses stratégiques requises.
    Là où je veux en venir avec toute cette question de l'analyse comparative entre les sexes et son lien avec la budgétisation, c'est que nous devons considérer l'analyse comparative entre les sexes comme un élément fondamental de l'analyse des politiques. En réalité, l'idée est de faire ses devoirs avant même de faire toute annonce et de prendre des décisions sur les nouvelles dépenses ou initiatives fiscales possibles, et de s'assurer que cette analyse n'est pas isolée, mais qu'elle fait partie intégrante de la politique publique.
(0910)
    Tout analyste de politique publique au gouvernement, qui travaille sur des budgets ou des questions stratégiques, examinera de nombreux facteurs qui entrent en ligne de compte dans une décision finale concernant une initiative budgétaire, qu'il s'agisse du partage du revenu, des modifications au régime d'assurance-emploi, des modifications à la politique sur les soins de santé, des modifications aux diverses initiatives en matière de transports, ou je ne sais quoi d'autre. Les impacts seront multiples. L'impact sur les deux sexes ne sera qu'un des nombreux facteurs, dont le tout devra être soupesé et analysé, dans l'espoir de mener à un processus décisionnel plus éclairé.
    D'après ce que j'en déduis à la lecture des rapports et à la lumière de mes recherches sur la situation à Ottawa... N'oublions pas que l'analyse comparative entre les sexes a été mise en place officiellement il y a environ dix ans au sein du gouvernement du Canada. Selon moi, il est généralement admis que nous disposons probablement d'un nombre suffisant de règles et de procédures en la matière. Nous avons besoin maintenant de plus d'incitatifs.
    À mon avis, il faut considérer l'analyse comparative entre les sexes comme une initiative visant à faciliter une interaction productive et éclairée entre les principaux joueurs, que ce soit dans le processus d'élaboration des politiques, le processus législatif, le processus réglementaire ou, dans le cas qui nous occupe, le processus budgétaire. Je ne crois pas que ce soit quelque chose pouvant être entrepris simplement par une unité spéciale au sein de diverses organisations, que ce soit le Conseil du Trésor, le Bureau du Conseil privé ou les ministères responsables.
    Je ne crois pas non plus que nous devions consacrer un temps fou à essayer des exercices de coordination à n'en plus finir dans l'ensemble du gouvernement afin de coordonner ces diverses unités. À mon avis, l'analyse comparative entre les sexes ne devrait pas consister à demander davantage de coordination et de plans d'action; on ne devrait pas non plus se concentrer autant sur les mesures de surveillance pour vérifier si ce genre d'analyse est réalisé.
    D'après ce que j'ai cru comprendre, il y a du pain sur la planche puisque le Conseil du Trésor exige actuellement que toute présentation lui étant adressée comporte une analyse comparative entre les sexes; bien sûr, cette exigence s'applique également, de façon générale, aux documents liés aux MC.
    Ce qu'il faut éviter, à la longue, c'est l'utilisation de la liste de contrôle, méthode selon laquelle dès qu'une décision est prise, il suffit de cocher les différentes cases pour déterminer s'il y a eu effectivement une analyse comparative entre les sexes. Il vaudrait mieux s'assurer que l'analyse comparative entre les sexes est intégrée au processus décisionnel et qu'elle fait partie d'un tout, de pair avec bien d'autres facteurs qui entrent en ligne de compte dans les décisions.
    Si j'avais à faire une mise en garde, ce serait qu'on ne rende pas l'analyse comparative entre les sexes trop spéciale et trop précieuse pour éviter qu'elle finisse par être complètement isolée du gouvernement. Elle doit être intégrée au tout.
    Ce qui m'amène à mes deux dernières observations.
    Le leadership est absolument crucial si l'on veut intégrer ce genre d'analyse, de travail et de nuances dans les processus d'élaboration des politiques et de prise des décisions au gouvernement. Il faut le leadership des plus hautes instances politiques et, à coup sûr, celui du premier ministre devient primordial. Par exemple, la personne choisie comme ministre de la Condition féminine fait toute la différence, selon la façon dont elle travaille et selon l'image de force qu'elle projette en général — et souvent, elle ne figure pas parmi les ministres de premier plan au gouvernement, bien qu'elle soit très qualifiée.
    Un autre élément déterminant, c'est lorsque le ou la ministre de la Condition féminine ou n'importe quel autre ministre intervient dans les débats à un comité particulier du Cabinet ou au Cabinet, en posant la question fondamentale suivante: y a-t-il eu une analyse comparative entre les sexes pour ladite question stratégique? Lorsque cette question est lancée, les gens tendent l'oreille. Les hauts fonctionnaires écoutent, de même que les autres ministres. Bien entendu, lorsqu'un ministre reçoit l'aval du premier ministre — non seulement sous la forme d'une lettre de mandat ordonnant la conduite d'une telle analyse, mais aussi sous la forme d'un soutien verbal et d'un appui dans son travail pour s'assurer que ces choses se concrétisent — il y a lieu de croire que cela peut changer le cours des événements.
    À mon avis, ce qui compte aussi beaucoup, c'est lorsque le ministre des Finances, à l'instar de l'ancien ministre, déclare publiquement son intention d'entreprendre une analyse comparative entre les sexes.
    Là où je veux en venir, c'est que le leadership est crucial; ce n'est pas seulement ce qu'on en lit dans les manuels et les documents.
    Le leadership est, bien sûr, également important dans la fonction publique, ce qui nécessite des relations de travail solides entre les sous-ministres, les sous-ministres adjoints et les organismes centraux pour s'assurer que l'on accorde à cette question l'importance qu'elle mérite.
    Finalement, il faut une demande. Je crois que la tendance générale, c'est qu'on se concentre tellement sur l'offre qu'on finit par oublier la demande.
(0915)
    Kevin Lynch, greffier du Conseil privé et secrétaire du Cabinet, a fait un exposé très intéressant l'autre jour. Il a parlé du fait que, de nos jours, on ne met peut-être pas assez l'accent sur la demande en matière de politique publique provenant de la fonction publique, reconnaissant qu'il existe de nombreuses sources. Par conséquent, pour répondre à la demande d'une bonne analyse, tout ministre ou ministère influent veut, de toute évidence, connaître les ramifications de ses actions, que ce soit en matière de politique fiscale....[Difficultés techniques—Éditeur]
    Permettez-moi de conclure, madame la présidente, par une ou deux observations relatives aux concepts.
    Je crois que les mots comptent. Un ex-premier ministre a déjà dit: « Les mots ont toute leur importance », et je pense que nous devons bien saisir les concepts relatifs à l'analyse comparative entre les sexes.
    Tout d'abord, d'après mes lectures, on utilise des expressions comme « budgets de genre » et « budgétisation sexospécifique ». Mais j'estime que nous devrions faire attention lorsque nous utilisons ces expressions.
    Prenons le budget de l'autre jour; selon moi, il ne s'agit pas d'un budget sexospécifique ni d'une budgétisation sexospécifique. Beaucoup d'autres facteurs entrent en jeu dans les budgets. Qualifier un budget de sexospécifique est, je crois, erronné par rapport à son contenu parce qu'il y a de nombreux autres éléments. Et cette opinion peut également être partagée par les gardiens fiscaux du système qui examinent de nombreux autres facteurs: les taux d'intérêt, les investissements, l'impact sur les Autochtones, l'impact sur les sans-abris, les répercussions sur le changement climatique, nos dépenses dans le Nord, les conséquences pour l'unité nationale, les grandes villes, les petites villes, les municipalités rurales, etc. Il y a beaucoup trop de facteurs. Je crois donc qu'on doit faire attention de ne pas se limiter à parler de budget sexospécifique ou de budgétisation sexospécifique.
    J'ai également constaté que l'expression « audit selon le genre » est entrée dans l'usage courant. Je crois que c'est un sujet intéressant, mais je n'en dirais pas plus.
    Parmi les récentes expressions que j'ai observées, il y a aussi les « budgets différenciés selon les sexes » et les « budgets sensibles aux différences entre les sexes ». Là encore, je crois que la prudence est de mise. Dire qu'un budget est différencié selon les sexes est un facteur parmi tant d'autres qui entrent en ligne de compte dans un budget; toutefois, à mon avis, il est exagéré de dire que tous les budgets doivent nécessairement être différenciés selon les sexes. Il y a de nombreux autres facteurs qui seront pris en considération dans le budget.
    Ce que j'aimerais voir, c'est un budget éclairé en fonction des différences hommes-femmes, c'est-à-dire un budget qui est alimenté par l'analyse, les priorités, le dialogue, la réflexion et le débat, pour que les répercussions sur les sexes soient prises en considération, analysées, soupesées et reflétées dans le budget.
    Je veux donc tout simplement souligner que la terminologie joue un rôle important dans la façon dont nous abordons nos budgets et la question cruciale des différences entre les sexes dans la société.
    Je vais m'arrêter là-dessus, madame la présidente. Je ne prendrai pas plus de votre temps, parce que je sais que les questions sont importantes pour le comité.
    Merci beaucoup. Vos dernières observations donnent beaucoup matière à réflexion.
    Nous allons maintenant passer à Mme Young.
    Madame Young, si j'ai bien compris, vous avez reçu des exemplaires de l'analyse comparative entre les sexes du ministère des Finances.
    Tout comme l'a fait M. Good, pouvez-vous nous parler un peu de vous et de votre expérience?
    Je suis professeure de droit fiscal. J'ai travaillé pour des gouvernements dans le passé, en consultation avec le ministère des Finances et, plus récemment, des gouvernements à Singapour, au Royaume-Uni, à Hong Kong, en Australie et en Nouvelle-Zélande, etc., dans le but — pour dire les choses telles qu'elles sont — de prendre les femmes au sérieux en matière de politique fiscale.
    La position et les observations que je présenterai seront probablement un peu plus précises que celles de M. Good, simplement parce j'aborderai le sujet du point de vue du droit fiscal, mais je promets que ce sera facile à comprendre.
    Comme je l'ai mentionné, je suis ravie d'être ici aujourd'hui et je suis surtout emballée que le Canada ait décidé d'appliquer une analyse différenciée selon les sexes aux mesures budgétaires, comme l'ont fait bien d'autres pays. Pour des raisons qui deviendront évidentes, je crois qu'une analyse de ce genre est essentielle pour veiller à ce que les femmes ne soient pas victimes de discrimination par rapport aux hommes dans notre régime fiscal.
    Comme je l'ai dit, j'aborde la question du point de vue du droit fiscal. Je suis avocate fiscaliste, et je m'intéresse surtout à la politique fiscale, et ma déclaration d'aujourd'hui portera sur le régime fiscal.
    Comme je l'ai mentionné, on m'a remis des copies des analyses comparatives entre les sexes des budgets de 2006 et de 2007. Ces deux documents contribuent grandement à reconnaître les réalités socioéconomiques de la vie des femmes et la manière dont les mesures fiscales, surtout ce qu'on appelle les dépenses fiscales — et je vais y revenir dans un instant —, peuvent avoir des conséquences différentes pour ces femmes selon ces réalités.
    Comme l'indique l'analyse, les femmes gagnent habituellement moins et sont beaucoup moins riches que les hommes. Par exemple, nous savons qu'il y a plus de femmes que d'hommes qui s'occupent des soins aux enfants. Nous savons aussi que les femmes âgées seules de plus de 65 ans sont beaucoup plus susceptibles de vivre dans la pauvreté que les hommes dans la même situation. Bien entendu, nous savons aussi que les femmes ne forment pas un groupe monolithique. Par exemple, les femmes autochtones et les femmes handicapées touchent toutes des revenus bien inférieurs à ceux des autres femmes.
    Pourquoi alors le régime fiscal est-il si important? Eh bien, c'est parce que nous ne le considérons pas uniquement comme un instrument pour augmenter les revenus; en fait, nous nous en servons également pour offrir des subventions aux Canadiens.
    Permettez-moi simplement de vous donner un exemple pour faire valoir mon argument sur la façon dont nous utilisons notre régime fiscal comme programme de dépenses. Je ne parle pas de percevoir des recettes fiscales, puis de les redistribuer à divers programmes. Ce dont je parle ici, c'est de la manière dont les allégements fiscaux qui engendrent des recettes cédées par le gouvernement prennent tout simplement la place des programmes de dépenses directes. Par exemple, nous avons consacré 780 millions de dollars en 2007 à la déduction pour frais de garde d'enfants, une déduction fiscale conçue pour aider les familles dont les parents travaillent à l'extérieur du foyer et doivent faire garder les enfants.
    Autrement dit, les Canadiens ont payé 780 millions de dollars moins d'impôts qu'ils n'en auraient payés autrement parce qu'on leur a accordé une déduction fiscale. Ce chiffre correspond aux recettes fiscales auxquelles le gouvernement fédéral a renoncé. Dans ce cas-ci, le régime fiscal est tout simplement utilisé pour octroyer une subvention destinée à couvrir partiellement les frais de garde.
    Le gouvernement aurait bien pu prendre ces 780 millions de dollars pour ouvrir plus de garderies; pour subventionner les garderies existantes; pour offrir une subvention à chaque Canadien ayant un enfant, une subvention directe pour aider à couvrir une partie des frais. Cependant, il a décidé d'octroyer la subvention par l'entremise du régime fiscal.
    Je ne suis pas en train de dire que le gouvernement aurait dû prendre l'une ou l'autre de ces mesures en particulier; il vous incombe, en tant que politiciens, de prendre ces décisions. Mais quand vous envisagez des allégements fiscaux comme la déduction pour frais de garde d'enfants, vous devriez d'abord vous demander si le régime fiscal est le meilleur instrument disponible pour mettre en oeuvre cette politique particulière.
    C'est un aperçu de mon propos, c'est-à-dire que nous avons compté de plus en plus, au fil du temps, sur le régime fiscal pour offrir des programmes sociaux et économiques évolués, et je crois que l'analyse comparative entre les sexes actuellement appliquée aux nouvelles mesures budgétaires doit aussi l'être aux règles fiscales en vigueur. C'est l'essentiel de mon argumentation. Vous devez regarder, comme l'a dit M. Good, la situation dans son ensemble. Il ne suffit pas d'examiner les nouvelles mesures; celles qui sont en place actuellement doivent aussi faire l'objet du même examen rigoureux.
    Si vous vous penchez sur les règles fiscales actuelles en tenant compte de la dimension sexospécifique, cela suscite toutes sortes de questions. Permettez-moi seulement de vous donner quelques exemples simples pour que vous voyiez un peu où vous vous retrouveriez si vous appliquiez une analyse différenciée selon les sexes à certaines de ces règles.
(0920)
    Prenons, par exemple, les régimes enregistrés d'épargne-retraite, les REER. Ils étaient le régime d'épargne favori de tout le monde jusqu'au budget actuel. Le gouvernement dit essentiellement qu'il veut aider les gens à épargner pour leur retraite et qu'il le fera en subventionnant ces économies. En fait, la dépense fiscale pour les REER constitue l'une des plus grandes dépenses fiscales personnelles annuelles, ce qui porte l'allégement fiscal projeté à plus de 16 milliards de dollars pour 2008.
    Plus important peut-être, le REER a en fait été conçu en tenant compte des femmes. L'idée, c'était que parce que moins de femmes que d'hommes cotisaient à des régimes de retraite en milieu de travail, le REER leur permettrait d'épargner pour leur caisse de retraite. C'est une politique louable, mais quand on examine le REER du point de vue des femmes, il est clair que celles-ci ne reçoivent pas leur juste part de cet allégement fiscal de 16 milliards de dollars. De toute évidence, l'un des problèmes, c'est que parce que les femmes gagnent moins que les hommes, elles disposent d'un revenu discrétionnaire moindre pour cotiser, c'est ce qu'on constate en regardant les statistiques.
    Un autre problème, c'est que l'allégement fiscal pour cotiser à un REER est une déduction fiscale, qui rapporte plus aux personnes qui ont un revenu élevé, dont le taux d'imposition est plus élevé. Pour donner un exemple simple, vous et moi versons 10 000 $ dans un REER; je touche un revenu faible et paie de l'impôt à un taux moyen de 10 p. 100; vous avez un revenu plus élevé et payez de l'impôt à un taux moyen de 40 p. 100. J'économiserais 1 000 $ et vous, 4 000 $, en impôt que nous aurions autrement payé. Autrement dit, nous faisons la même cotisation, mais parce que votre revenu est plus élevé, votre subvention est quatre fois supérieure à la mienne. Franchement, vous en avez probablement moins besoin puisque vous gagnez plus.
    Je vous ferai grâce de toutes les statistiques, mais quand on examine les statistiques fiscales, on peut voir que même si plus de femmes que jamais cotisent à des REER, elles reçoivent une part beaucoup moindre que les hommes de cette subvention de 16 milliards de dollars, en partie parce que leur revenu est plus faible.
    Permettez-moi de vous donner un autre exemple qui, d'après moi, soulève certaines questions concernant l'équité de la règle fiscale actuelle quand on l'examine en tenant compte de la dimension sexospécifique. Je parle ici de ce qu'on appelle le crédit d'impôt pour conjoint légal ou de fait.
    Les contribuables qui subviennent aux besoins de leur conjoint ont droit à un crédit d'impôt d'un peu plus de 1 000 $ par année, même si ce crédit est réduit quand le revenu du conjoint dépasse 700 $ environ et baisse graduellement à mesure que le revenu du conjoint augmente. Beaucoup plus d'hommes que de femmes réclament le crédit et ce sont habituellement des hommes touchant des revenus élevés qui subviennent aux besoins de leur conjointe.
    Quand on examine la mesure du point de vue du conjoint — habituellement la femme —, plusieurs questions se posent.
    Tout d'abord, la mesure est clairement conçue pour favoriser la dépendance économique dans le couple, ce qui a poussé des groupes de femmes, entre autres, à en demander l'abrogation, compte tenu des conséquences négatives pour l'autonomie des femmes. Travailler à l'extérieur de la maison engendre des coûts fiscaux — c'est-à-dire, la perte du crédit de 1 000 $ —, ce qui est une réelle mesure de dissuasion pour les femmes qui veulent peut-être se trouver sur le marché du travail. Je pourrai en parler plus tard dans le contexte du partage du revenu si vous avez des questions à ce sujet.
    Ensuite, même si la mesure se justifie du fait que la capacité de payer du contribuable — généralement l'homme — est réduite parce qu'il subvient aux besoins de sa conjointe et devrait donc avoir droit à un allégement fiscal, d'autres prétendraient que c'est préférable ainsi, car la conjointe travaille gratuitement dans la maison à garder les enfants ou à s'acquitter d'autres tâches ménagères. Il en coûterait nettement plus que 1 000 $ au contribuable pour payer quelqu'un qui effectuerait ces tâches ménagères.
    Enfin, certains sont d'avis que si nous voulons offrir une telle subvention, elle ne devrait certainement pas être versée au conjoint qui soutient financièrement le foyer, mais plutôt à la femme qui ne touche aucun autre revenu.
(0925)
    Dès 1970, la Commission royale d'enquête sur la situation de la femme au Canada, la commission Bird, a recommandé l'abrogation de cette disposition. Des dispositions semblables ont été abrogées dans la plupart des pays maintenant, y compris le Royaume-Uni, où les revenus engendrés grâce à l'annulation du crédit ont servi à financer un nouveau crédit d'impôt pour enfants.
    Pour conclure, je parlerai des documents actuels que j'examine. L'un des points que l'on soulève souvent dans l'analyse budgétaire comparative entre les sexes de 2006-2007, c'est que même si les femmes ne profitent pas autant de certaines propositions fiscales en économies d'impôt, elles en profitent peut-être légèrement plus si on examine la question sous l'angle du pourcentage d'impôt payé.
    Par exemple, quand on regarde ces documents, les changements au crédit d'impôt pour enfants signifient que les femmes économisent moins que les hommes au chapitre de l'impôt à payer — elles ne reçoivent pas une part aussi importante de la subvention —, mais si on examine la question du point de vue du pourcentage d'impôt payé, les hommes et les femmes sont pratiquement dans la même situation.
    J'estime que le montant brut est une mesure d'équité beaucoup plus importante que le pourcentage payé. Cela est dû au fait que les mesures que nous examinons sont peut-être intégrées dans les lois fiscales, mais elles sont en fait des programmes sociaux, et le régime fiscal est tout simplement le mécanisme de prestation. Nous devons les considérer comme des programmes sociaux ou économiques — la prestation fiscale pour enfants, la déduction pour frais de garde d'enfants, le crédit pour TPS, et je pourrais continuer. Nous devons les voir comme étant des programmes sociaux ou économiques, et quand c'est ce que l'on fait, ce qui compte vraiment c'est l'avantage que l'on en retire.
    Il est quelque peu incongru d'évaluer une économie par rapport au pourcentage d'impôt payé. Ce qui importe vraiment pour le bénéficiaire, c'est combien il économise réellement en impôt qu'il aurait autrement dû payer. Comme on le voit dans les analyses comparatives entre les sexes de 2006 et de 2007, les femmes reçoivent une part nettement inférieure d'un grand nombre de ces subventions fiscales.
    Pour conclure, ce que je veux que vous reteniez principalement, c'est que l'analyse comparative entre les sexes en cours constitue un excellent départ, mais je crois qu'il est extrêmement important que l'analyse soit élargie et appliquée aux règles fiscales actuelles de même qu'aux nouvelles mesures budgétaires.
    Merci.
(0930)
    Merci beaucoup.
    Je suis certaine que les membres du comité ont beaucoup de questions.
    Commençons par Mme Minna. Allez-y, vous avez sept minutes.
    Merci, madame la présidente.
    Merci à nos deux experts de ce matin. Je suis heureuse d'apprendre que M. Good possède une vaste expérience à tous les paliers de gouvernement. Cela nous aidera certainement pour lui poser quelques questions, et à Mme Young aussi.
    Monsieur Good, vous avez dit que nous devions examiner la désignation, de ce que nous appelons le budget — des expressions comme « différenciée selon les sexes » —, et que nous devrions envisager d'autres possibilités telles que « sensibles aux différences entre les sexes » peut-être. Vous avez mentionné qu'une analyse différenciée selon les sexes a été appliquée aux budgets les plus récents. Vous avez aussi dit qu'il faut des gens pour la défendre.
    Où se trouve le vrai levier de commande pour faire en sorte qu'une vraie analyse différenciée selon les sexes — et je vais expliquer ce que j'entends par là dans un instant — soit bel et bien menée, et qu'elle ne soit pas effectuée de manière superficielle, mais acceptable?
    Pour être honnête avec vous, les analyses qui ont été faites sur les quelques budgets antérieurs n'étaient pas réelles. Soit elles n'ont pas été faites adéquatement, soit la décision politique prise n'y changeait rien, qu'on avait l'intention d'aller de l'avant pour favoriser les hommes de toute manière. Comprenez-vous ce que je dis?
    Quand cette décision fondamentale est-elle prise pour déterminer si une analyse sexospécifique appropriée est réalisée, et qui a le pouvoir de s'assurer qu'elle est faite? Je suppose que vous avez répondu le premier ministre, mais quelle serait la structure?
    C'est une excellente question.
    Si nous devions considérer l'analyse différenciée selon les sexes uniquement comme un document que nous examinerions après la prise d'une décision — et j'ai jeté un coup d'oeil aux analyses comparatives entre les sexes, ou ACS, des budgets de 2006 et 2007 —, je ne pense pas que ce serait suffisant. Les commentaires de Mme Young en ce qui a trait à la politique fiscale sont très importants. Concentrons-nous là-dessus pour un moment, car à certains égards, c'est réellement le plus difficile.
    D'après mes observations, pour véritablement avoir une ACS valable, il faut la présence de deux intervenants, que j'appellerais les chargés des dépenses et les gardiens — autrement dit, il faut des analystes de la politique de l'impôt au ministère des Finances et des responsables des programmes dans le ministère axial — qui participeront à une sorte de processus où l'on examinera les ramifications et les options. Pour ce qui est d'un certain nombre d'initiatives de politique fiscale — et nous avons une grande quantité de dépenses fiscales dans le domaine social et tous les autres — la tendance n'a pas été, par le passé, d'avoir une grande interaction entre les ministères et la politique fiscale. On tend à en faire l'élaboration principalement au ministère des Finances, pour diverses raisons très importantes.
    S'il y a une réforme que nous devons entreprendre, elle consiste à ouvrir le processus de manière plus fondamentale, pour qu'on puisse considérer les options si l'on souhaite mettre en oeuvre une initiative particulière et déterminer s'il y a de meilleures façons de faire, par exemple les dépenses directes; l'utilisation de crédits au lieu de déductions, car nous pourrions éviter une partie des effets des déductions agissant comme une subvention à rebours; et l'utilisation de crédits d'impôt remboursables, qui permettent aux gens de recevoir des montants qui, normalement, ne font pas partie du régime fiscal, que ces gens soient riches ou pauvres, hommes ou femmes. Il y a toute une série d'autres options. Les dépenses directes peuvent être utilisées très efficacement à cet égard.
    Quand il est question de politique fiscale, je pense qu'il n'y a aucune doute à y avoir quant à la personne qui détient le pouvoir. C'est le ministre des Finances; c'est ainsi que notre système fonctionne. Mais s'il y a une chose que nous devrions faire en la matière, c'est ouvrir à la discussion le processus décisionnel, en y faisant participer davantage de gens. Ce processus tend à être extraordinairement technique, de même qu'à être confié aux experts et dominé par le ministère des Finances en particulier, pour toute une série de raisons importantes d'ordre institutionnel.
    Si une chose est nécessaire, c'est un examen plus minutieux de ces éléments par les ministères concernés.
    Par exemple, l'examen de DRHC concernant tout un ensemble de questions liées à la retraite devient très important. Et en ce qui a trait aux questions liées à la santé — on recourt fortement aux dépenses fiscales dans ce domaine —, une interaction nettement meilleure entre ce ministère et celui des Finances devient cruciale dans le cadre du processus. Et les moyens que nous utiliserons pour parvenir à ces résultats quand nous commencerons à examiner les nouveaux budgets et les nouvelles initiatives mises en oeuvre revêtent une grande importance.
    Quant à la question plus générale de savoir comment nous y prendre, à partir des dépenses existantes ou des dépenses fiscales existantes, cela soulève une toute autre question. Nous pourrons peut-être en discuter plus tard au cours de la séance.
(0935)
    Je voudrais seulement dire que j'ai posé cette question parce que je sais qui détient le pouvoir, puisque j'ai été membre du Cabinet et que je suis sur la Colline parlementaire depuis un bout de temps. C'est le ministère des Finances. Bien souvent, celui-ci tend à former les gens et à placer ses employés subalternes dans toutes sortes d'autres ministères, et il est enclin à contrôler beaucoup de choses au moyen de ses petits tentacules. Je sais que c'est là où se trouve le pouvoir; je voulais seulement vous l'entendre dire.
    J'aimerais m'adresser à Mme Young pendant un moment.
    L'une des choses auxquelles nous sommes confrontés ici, madame Young, est la suivante: nous avons parlé d'analyse fondée sur les sexes — et en fait, M. Good est allé au coeur de la question en disant que cette analyse est faite après coup. Or, lors des deux derniers budgets, 1 200 $ ont été versés aux familles — supposément à titre de prestation universelle pour la garde d'enfants —, ce qui, comme nous le savons, ne bénéficie pas à la majorité des femmes. Le supplément au revenu de travail est structuré de manière tellement étrange que certaines femmes à faible revenu n'y ont pas droit. Nous savons où on trouve le fractionnement des revenus de retraite: principalement chez les aînés bien nantis. Maintenant, le dernier budget prévoit le compte d'épargne libre d'impôt qui, encore une fois, profitera à ceux qui ont de l'argent à investir.
    On ne semble pas donner suite à ses paroles... Dites-moi si je me trompe. Est-ce que j'interprète mal la situation lorsque je constate que malgré ce qu'on dit en ce moment au sujet de l'analyse, celle-ci n'est pas effectuée au préalable et, par conséquent, n'a aucune incidence sur les politiques?
    J'en conviens avec vous. Je vais seulement faire quelques remarques, ici.
    J'approuve totalement les propos de M. Good en ce qui a trait au pouvoir du ministère des Finances, et je suis d'accord avec l'honorable députée.
    Il y a un deuxième élément que j'aimerais soulever, et c'est le fait que les gens croient, tout à fait à tort, que le droit fiscal est hautement complexe. En fait, ce n'est pas le cas. Vous devriez suivre le même cours de base que moi; c'est très divertissant. Il existe ce mythe selon lequel le droit fiscal est si compliqué et difficile qu'il doit être confié au ministère des Finances. Je répondrais à cela que le nouveau régime d'épargne de 5 000 $ que vous avez évoqué n'a en fait rien à voir avec le droit fiscal, mais plutôt avec la décision de permettre aux gens de mettre de l'argent de côté sans qu'il soit imposé. Essentiellement, pour arriver au même résultat, on aurait pu envoyer un chèque à ceux à qui on voulait en faire bénéficier en disant voilà votre subvention, mais elle est distribuée par l'intermédiaire du système fiscal.
    Quant à votre remarque sur le fait qu'on procède à l'analyse après coup, c'est assurément vrai. Je ne crois pas que le ministère des Finances ait, de quelque façon que ce soit, pris en considération les différences entre les sexes en élaborant son budget — le dernier ou le précédent — parce que rien ne le prouve. On lui demande maintenant de rendre des comptes, jusqu'à un certain point, mais comme vous le dites, cela a lieu après coup.
    Mais je m'occupe de cette question depuis longtemps, et le seul fait qu'on effectue une analyse constitue un réel progrès, car auparavant, on ne le faisait jamais. Maintenant, vous, en tant que politiciens, et d'autres personnes, pouvez mettre un bémol en signalant que le nouveau régime d'épargne n'est en réalité pas juste car, comme vous l'avez dit, pour pouvoir en bénéficier, il faut avoir un revenu disponible à épargner.
    Alors nous savons maintenant qui perd et qui gagne. Il y a 10 ou 15 ans, nous ne parlions pas du tout de la question; au moins, cela a changé aujourd'hui.
(0940)
    Merci.
    Nous allons maintenant entendre Mme Demers.
    Vous avez sept minutes; allez-y, s'il vous plaît.

[Français]

    Merci, madame la présidente.
    Docteur Good et docteure Young, merci beaucoup d'être parmi nous aujourd'hui. C'est très intéressant et en même temps très confondant pour des personnes qui n'ont jamais eu à travailler dans le domaine des finances, de la fiscalité, etc. Vous nous donnez aujourd'hui des informations qui n'ont rien à voir avec la finance mais qui ont à voir avec le bon sens. Je crois que ces informations nous seront très utiles.
    Docteure Young, vous avez dit avoir étudié le système fiscal de différents pays et les mesures qui y étaient prises pour s'assurer que les femmes et les différents groupes reçoivent leur juste part de l'assiette fiscale. Selon vous, quel pays a mis en place les meilleures mesures au bénéfice des différents groupes? Ces mesures ont-elles eu des répercussions? Si oui, seraient-elles applicables au Canada?

[Traduction]

    Mon Dieu, c'est une question difficile, et je vais vous dire pourquoi.
    Les pays qui s'y prennent le mieux sont ceux qui s'efforcent de traiter les dépenses sociales ou les programmes sociaux distinctement du système fiscal. Notre régime fiscal regorge, comme je l'ai dit, de mesures de dépenses. Il me vient surtout à l'esprit des pays scandinaves et certains autres États de la communauté européenne. Dans une certaine mesure, les États-Unis n'offrent pas de programmes sociaux par le truchement du régime fiscal, mais ils ne fournissent pas, bien sûr, autant de programmes sociaux que nous. Je crois qu'on pourrait considérer que la Scandinavie est bonne première sur ce plan.
    Le problème, c'est qu'on établit une politique, et que la prochaine étape consiste à se demander quel est le meilleur moyen de la réaliser. Mon argument est que si on l'intègre au régime fiscal, ce qui se produit, c'est que toutes les restrictions au sein de ce régime peuvent créer des effets négatifs. C'est principalement dû au fait que le régime fiscal lui-même est fondé sur les niveaux de revenu, et dans la mesure où les femmes tendent à gagner moins que les hommes, l'utilisation d'un mécanisme comme la déduction fiscale est un problème.
    M. Good a affirmé que si l'on utilisait le système fiscal, opter pour des crédits d'impôt remboursables ou simplement des crédits d'impôt était un pas dans la bonne direction. Mais je crois que, par exemple, si l'on souhaite réduire les niveaux de pauvreté des femmes seules de plus de 65 ans, le régime fiscal n'est peut-être pas l'outil qui convient.

[Français]

    Merci beaucoup.
    Docteur Good, vous avez dit qu'un des problèmes actuels est le fait que ce sont des petites unités isolées des ministères qui font l'analyse sexospécifique, et qu'il serait préférable d'avoir une structure qui permettrait de faire les analyses de façon plus complète. Il faudrait aussi que ces analyses soient faites à l'avance et qu'on y ait réfléchi, qu'elles soient mises de l'avant et diffusées ensuite dans les différents ministères.
    Comment voyez-vous cette structure?

[Traduction]

    Je crois que la forme que cela prendrait, c'est la construction, la reconstruction et le renforcement de nos capacités d'analyse des politiques au sein des ministères. Et cela est principalement effectué par les unités des politiques stratégiques et les services d'analyse des politiques des ministères. Dans une certaine mesure, cette fonction a été amoindrie il y a environ 10 ans lorsque le gouvernement, bien sûr, en pleine crise financière, a dû appliquer énormément de réductions dans l'ensemble du gouvernement. Mais on reconstruit tout cela, et plutôt bien, je crois. Cependant, j'estime qu'un meilleur équilibre des individus et des capacités est nécessaire dans le cadre de cet exercice.
    On a mentionné plus tôt que les fonctionnaires du ministère des Finances allaient parfois travailler dans d'autres ministères. Je crois que c'est un aspect très important. D'après mon expérience, lorsque cela se produit, très souvent, l'expertise qui peut être apportée à des ministères axiaux par des responsables des politiques fiscales, des analystes de politiques et autres fonctionnaires des organismes centraux, peut être extrêmement utile pour positionner cette analyse ainsi que le travail d'établissement des priorités. Donc, les interactions — et c'est là où je veux en venir — entre les ministères axiaux, qu'il s'agisse de DRHC, du ministère du Patrimoine canadien, de Santé Canada et ainsi de suite, et le Bureau du Conseil privé et le ministère des Finances, peuvent avoir lieu à un niveau poussé et élevé, de sorte que l'analyse et les faits peuvent faire une différence.
    C'est grâce à une interaction sur ces dossiers qu'on peut régler les problèmes, à mon avis. Cela permet d'avoir un point de vue sur les dépenses et la prestation des programmes, en plus de permettre aux gens qui sont les plus proches des clients, et qui se soucient davantage de ce genre de questions, de s'en occuper au sein du ministère des Finances et autres organismes centraux qui pourraient y être un peu moins sensibles, en grande partie parce qu'ils mettent l'accent sur des questions d'intérêt plus général et sur toutes sortes de préoccupations.
    Je pense que l'interaction au sein du gouvernement devient très importante. Ce contre quoi je m'insurge, c'est l'isolation flagrante de ces unités, que ce soit au sein d'un ministère ou entre les ministères. Ces unités doivent être intégrées à la capacité d'analyse des politiques pour qu'on puisse examiner tous les tenants et aboutissants.
    J'aimerais faire une dernière remarque. S'il y a une question qui a des résonnances politiques, je pense que c'est celle des sexes. Le sexe a une incidence quant aux types d'individus, à leur opinion et à leur vote. Il devrait donc y avoir une demande pour ces types d'analyses, afin de connaître les ramifications et les impacts respectifs pour les hommes et les femmes. Quels seront les effets pour les dames âgées, jeunes, seules ou pauvres, les mamans-soccer de la région du 905, les femmes des collectivités éloignées, les agricultrices, etc.?
    Il y a là un incitatif naturel qui, selon moi, peut être utilisé, et devrait être exploité. Je répète qu'à mon avis, c'est grâce aux interactions entre les organismes centraux et les ministères que cet exercice prend de l'importance, et pas en vase clos, là où ces unités sont en place.
(0945)

[Français]

    Merci, madame Demers. Votre temps est écoulé.

[Traduction]

    Je cède maintenant la parole à Mme Boucher. Vous avez sept minutes, madame, s'il vous plaît.
    J'ai cru comprendre que vous alliez probablement partager votre temps.

[Français]

    Merci d'être ici. Ça nous éclaire beaucoup.
    On nous a toujours parlé du ministère des Finances comme de « la » structure essentielle. Or, vous dites que ce n'est pas tout à fait le cas. Vous avez dit qu'on ne devrait pas se limiter à des modifications fiscales. Comment devrait-on intégrer l'analyse sexospécifique dans tous les ministères pour qu'elle devienne un automatisme? Si la budgétisation sexospécifique déborde le cadre de la fiscalité, dans quels autres secteurs ministériels devrait-on la retrouver?
    Madame Young, voulez-vous répondre?

[Traduction]

    En fait, la question est davantage du ressort de M. Good, mais je vous dirais que si vous déterminez, par exemple, que vous souhaitez contribuer à payer les frais assumés par les femmes pour des services de garde, ce n'est certainement pas le ministère des Finances qui élaborerait un programme en ce sens, disons. Je pense que là est le problème. Il y a vraisemblablement d'autres ministères du gouvernement fédéral — et je ne les connais pas tous, évidemment — qui sont chargés des programmes eux-mêmes.
    Il me semble, comme l'a dit M. Good, qu'il y a une sorte d'écart qui fait en sorte qu'on peut décider, pour diverses raisons, d'accorder davantage de fonds aux femmes qui ont des enfants mais que, lorsqu'on le fait au moyen du système fiscal, celui-ci, comme je l'ai précisé, impose des restrictions. Il y a certainement d'autres ministères où on l'on trouve des fonctionnaires spécialistes des services de garde, qui possèdent une expertise en matière de femmes et de familles qui ont des enfants, etc.
(0950)
    Je me permets de faire une autre observation sur cette même question. Le sujet ne concerne pas uniquement les gouvernements, mais l'ensemble de la société. Il intéresse les groupes de réflexion, les universités, les avocats de divers domaines et les partis politiques.
    Lorsqu'un parti politique effectue une analyse, et qu'il indique qu'il vise la déductibilité des intérêts hypothécaires, comme ce fut le cas en 1979, ou qu'il affirme, comme on l'a fait récemment, que nous devrions maintenant avoir un programme de déduction pour frais de garde, ce qui est en réalité une réduction d'impôt, on peut se demander à quel point on a procédé à une analyse avant de faire une telle déclaration, qui fera ensuite partie de la plateforme du parti concerné.
    C'est très difficile pour les fonctionnaires, qui doivent conseiller les autorités et soutenir qu'il y aura une meilleure façon de faire. Mais quand un parti politique affiche ces idées en tant qu'engagements électoraux, il devient très difficile d'affirmer qu'il existe peut-être de meilleurs procédés. Les fonctionnaires le feront, et je l'ai déjà vu, mais au bout du compte, la plupart des partis politiques — davantage aujourd'hui qu'il y a quelques années — souhaitent respecter leurs promesses électorales.
    Ce que je réclame, ce n'est pas seulement une analyse au sein du gouvernement; c'est aussi qu'au sein des partis politiques et chez d'autres intervenants qui conçoivent les programmes des candidats des partis, notamment, les analyses revêtent une grande importance, de sorte que nous puissions élever le niveau du débat sur la politique. Comme l'a dit Mme Young, nous pourrions ensuite évaluer si les dépenses directes dans un certain nombre de ces domaines pourraient être nettement préférables à ce que nous appelons les dépenses détournées, qui ont des effets de subventions à rebours, et qui ne rejoignent pas vraiment les gens, en plus d'avoir des impacts différents à cause du processus utilisé, par l'intermédiaire des impôts. Ces débats et cette analyse doivent avoir lieu, pas seulement au sein du gouvernement, mais dans les partis politiques et autres entités qui influencent les politiques et orientations publiques.
    Monsieur Stanton.
    Merci, madame la présidente. Bonjour à nos deux témoins. Vos exposés étaient excellents.
    J'aimerais poser une brève question à M. Good. Depuis combien de temps, monsieur, avez-vous quitté la fonction publique? Depuis combien d'années êtes-vous à l'Université de Victoria?
    Je suis arrivé à Victoria pour accomplir cette mission difficile, en abandonnant de ce fait la haute fonction publique, il y a sept ans. Depuis, j'ai eu la formidable possibilité de réfléchir à certaines de ces questions, et j'ai fait paraître un certain nombre de livres, y compris mon plus récent, qui s'intitule The Politics of Public Money, et que les presses de l'Université de Toronto viennent de publier. Si vous me le permettez, je peux même vous le présenter. Je sais que cela ne se fait probablement pas à la Chambre des communes, mais j'espère que vous m'autoriserez à le faire ici.
    Je l'apprécie. Il me tarde d'en obtenir une copie.
    Je n'ai pas beaucoup de temps, monsieur Good, mais j'aimerais connaître votre avis. On a discuté de la notion d'analyse comparative entre les sexes, ou ACS, pour atteindre l'égalité des résultats au lieu de l'égalité d'accès ou des chances. Quand on applique une telle ACS — et je sais qu'il s'agit d'un tableau d'ensemble, à grande échelle — pourriez-vous me dire quels devraient en être les objectifs essentiels? Qu'est-ce qu'on cherche réellement à atteindre?
    Il est certain qu'au bout du compte, nous cherchons tous l'égalité des résultats, mais pour en arriver là, nous devons tenir compte de l'égalité des chances. L'ACS, fondamentalement, élève le niveau du débat éclairé sur ces questions. J'estime que cela doit être effectué de manière tant privée que publique. À mon avis, on doit le faire au sein de la société et du gouvernement, et parmi les organismes. Grâce aux échanges sur ces questions, nous aurons des discussions plus éclairées qu'en nous contentant d'agir discrètement à l'interne. Nous pourrons ensuite commencer à examiner les implications de ces questions et à tenir ces débats.
    Même si les gouvernements tiennent beaucoup à le faire, je pense qu'ils trouvent très difficile d'obtenir des résultats. Bien d'autres facteurs feront en sorte que quelqu'un pourra lire, ou que nous aurons une bonne politique publique sur l'éducation. Il y a de nombreux autres facteurs et ramifications. Il nous faut donc une participation et un engagement beaucoup plus importants que ce dont les gouvernements eux-mêmes sont capables.
    Merci, monsieur Stanton. Vous aurez une autre occasion d'intervenir.
    Merci, madame la présidente.
    Madame Mathyssen; vous avez sept minutes.
    Merci, madame la présidente.
    Merci. Vous avez apporté beaucoup d'éclaircissements en ce qui concerne cette étude plutôt compliquée dont notre comité est chargé.
    L'un des plus grands problèmes, avec l'ACS, c'est le manque de responsabilité et de transparence. Quelles mesures recommanderiez-vous au Conseil du Trésor et au ministère des Finances pour garantir le plus haut niveau de transparence et de responsabilité sur le plan de l'ACS dans le cadre du processus budgétaire?
    J'aimerais beaucoup que vous me répondiez tous les deux.
(0955)
    D'accord; je serai heureuse de répondre en premier.
    Je pense que la clé, c'est le mot « transparence ». M. Good a parlé plus tôt d'effectuer cette ACS avant la mise en oeuvre des politiques, pour l'intégrer à l'élaboration de politiques et la rendre aussi naturelle qu'une analyse qu'on mènerait dans n'importe quel programme, qu'il soit d'ordre social ou économique.
    Il faut se concentrer sur les impacts différents pour les femmes et les hommes, et la documentation est là à cette fin. Nous disposons assurément d'excellents documents statistiques qui nous révèlent toutes sortes de choses sur la situation socioéconomique des femmes. On peut essentiellement en faire usage. On prend des mesures proposées, et on applique cette analyse à tous les niveaux, comme l'a dit M. Good. Ces mesures peuvent résulter d'échanges dans un groupe de discussion, ou encore d'un débat au sein d'un parti politique à une conférence, ou autre. Mais l'application de l'ACS à cette étape est absolument essentielle.
    Je crois que je vous ferais la réponse suivante: je me montrerais très prudent — et je n'ai entendu parler de personne qui l'ait fait — pour ce qui est de demander davantage de plans d'action et de vérifications qu'on a mené une ACS, ainsi que davantage de rapports qui nous apprendront qu'on a effectué une ACS après coup, en inscrivant toute cette information dans un rapport et en l'envoyant quelque part. Dans certains rapports, j'ai même vu qu'on recommandait de faire parvenir l'analyse aux parlementaires. Eh bien, les parlementaires reçoivent déjà des milliers de rapports chaque année. J'ignore si vous les lisez tous; j'en doute. Tout ce que je peux dire, c'est que si je recevais 1 000 travaux de session chaque année, j'aurais bien du mal à faire du bon travail pour ce qui est de les noter. Donc, je crois que nous devons prendre bien garde de laisser place à une approche bureaucratique à cet égard.
    Je pense que ces initiatives qu'on a prises sont valables. L'exigence que les présentations au Conseil du Trésor — qui sont en fait des échanges entre un ministère qui dépense et le Conseil du Trésor en vue d'obtenir de l'argent frais à une fin quelconque, habituellement un petit montant — comprennent une ACS est importante. Cela s'insère dans le processus décisionnel normal. J'estime que nous devons trouver de meilleures façons d'y arriver, particulièrement sur le plan des régions fiscales, dont le ministère des Finances semble pratiquement être le seul à se charger, comme je l'ai précisé. Je renforcerais une partie de la capacité fiscale de certaines unités de politique partout au gouvernement, de façon à ce qu'il y ait une meilleure interaction, et donc, une ACS plus efficace de ces questions dont on est saisi.
    Je ferais très attention pour ce qui est d'adopter une approche de type « liste de vérification » pour ce qui est de l'ACS, ou autrement dit, de demander au gens de montrer leur analyse pour vérifier s'ils l'ont bien faite. Ce n'est pas l'objectif. L'analyse comparative entre les sexes est un outil qui sert à atteindre un objectif élargi, mais qui n'est pas une fin en soi.
    Il est intéressant de parler de droit fiscal, car je sais que l'article 63 de la Loi de l'impôt sur le revenu a fait l'objet de nombreux débats. Je pense à l'affaire Symes c. Canada, où Mme Symes voulait réclamer un remboursement des services de garde à titre de dépenses d'entreprise, mais a perdu sa cause. À partir de là, la Loi de l'impôt sur le revenu a un effet manifestement bien différent pour les femmes et les hommes.
    Nous avons entendu aujourd'hui une déclaration très claire selon laquelle une ACS devait être menée de façon particulière sur la Loi de l'impôt sur le revenu, un point qu'on fait valoir depuis un certain temps. Nous en entendons parler depuis un moment, mais qu'est-ce qui empêche un tel exercice? Pourquoi n'a-t-on pas agi?
    Je pense qu'on agit, mais pas de manière aussi complète que nous le souhaiterions.
    Vous avez mentionné l'affaire Symes, et je dois vous confier que je m'occupais de ce cas. Je crois que c'est un excellent exemple de la façon dont on peut avoir un point de vue complètement différent sur les résultats à la suite d'une analyse comparative entre les sexes.
    Comme vous l'avez précisé, Beth Symes soutenait que les frais de garde qu'elle devait payer constituaient des dépenses d'entreprise, parce qu'elle ne pouvait pratiquer le droit sans confier ses enfants à des services de garde. C'est intéressant, parce qu'il y a là une excellente analyse comparative entre les sexes à la Cour suprême du Canada. Les deux seules juges de sexe féminin ont rendu un jugement favorable à Beth Symes, alors que cela n'a pas été le cas pour leur confrères masculins. C'est assez extraordinaire, car ces deux femmes juges, Claire L’Heureux-Dubé, qui n'est plus dans la magistrature, et Beverley McLachlin, qui est aujourd'hui juge en chef, seraient d'accord pour dire que politiquement parlant, elles se trouvent dans des camps très différents. Et je pense que toutes les deux pourraient le confirmer. Franchement, c'était la première fois que je les voyais tomber d'accord dans le cadre d'une décision. Mais elles avaient toutes les deux vécu des expériences en tant que femmes — et mères monoparentales pendant un certain temps —, expériences qu'elles ont mises dans la balance. En lisant l'arrêt, on peut le constater.
    Elles étaient des juges de la Cour suprême du Canada qui appliquaient leur analyse, et je pense que cela signifie que nous devrions tous agir ainsi. Toute personne qui participe au processus, à n'importe quelle étape, a une contribution à apporter.
    Du point de vue des sexes, par exemple, je crois que nous savons que les femmes seules et âgées sont les plus pauvres au Canada. Nous devons nous demander comment y remédier. C'est évidemment un problème de taille. Mais on étudie le régime fiscal en établissant des liens, et on déclare que l'un des moyens qu'on utilisera pour régler la situation consistera à aider les femmes à économiser pour leur retraite. Cet effort est louable également, mais il ne fonctionne pas, alors on reviendra en arrière, en tentant d'établir encore une fois des liens, etc.
    C'est une courte réponse.
(1000)
    Madame Mathyssen, souhaitez-vous que M. Good réponde?
    Reste-t-il du temps?
    Vous avez 30 secondes.
    Monsieur Good, voulez-vous répondre?
    Je crois que je n'ai rien à ajouter là-dessus.
    Merci.
    Allez-y; vous avez 30 secondes.
    Les gens ont tendance à penser que tout ce processus d'élaboration d'un budget est mystérieux, un peu comme de lire les feuilles de thé. L'une des choses que j'ai découvertes, c'est que l'établissement d'un budget peut être très pratique, et pas du tout compliqué. On détermine les besoins, et on travaille à partir de là.
    Cette semaine, le comité a adopté une motion...
    Veuillez conclure.
    ...pour que le comité de la condition féminine fasse des consultations prébudgétaires et discute avec des experts quant aux mesures nécessaires pour nous assurer que le budget comporte des éléments sexospécifiques et soit équitable. Est-ce une chose que vous considérez positive?
    Tout à fait. Encore une fois, cela élargit le processus de consultation et permet de mettre l'accent sur les sexes à une étape plus précoce, ce qui est la clé. Sans vouloir continuer de m'attaquer au ministère des Finances, j'ajouterais que vraiment, quand on parle de programmes sociaux complexes et importants, on a besoin d'autant d'information de la part des spécialistes de ces questions que des experts en finances.
    Merci.
    Nous allons passer au second tour de table de cinq minutes.
    Je suis navrée, monsieur Good. Souhaitiez-vous intervenir?
    Laissez-moi faire une brève remarque sur cette question. La plupart des budgets, dans un système de type parlementaire, ne font pas l'objet de beaucoup de vérifications par le Parlement. Dans un système comme celui des États-Unis, qui est fondé sur un congrès, un régime présidentiel, le président propose un budget et le Congrès et le Sénat tranchent. Dans un système parlementaire, le ministre des Finances annonce le budget et le Parlement l'approuve, et comme on peut le voir aujourd'hui, cela donne lieu à des cas intéressants en situation de gouvernement minoritaire. Mais les véritables interactions ont lieu à l'étape prébudgétaire, entre les différents ministres et le ministre des Finances, au milieu de divers groupes d'intérêts et de forts avis de l'extérieur.
    L'un des comités les plus importants est celui des finances, parce qu'à la différence des comités qui s'occupent des crédits ou vérifient les budgets après leur établissement, il peut donner forme au budget, l'influencer. J'encouragerais donc les comités à commencer à prendre des mesures pour que le Comité des finances ne s'attaque pas seulement aux questions fiscales — par exemple à l'importance du surplus — mais examine également les ramifications de ces questions concernant les différences entre les sexes, et tout le reste. Et on offre la possibilité d'évoquer ces questions lors des consultations prébudgétaires, et de les soulever avec vigueur auprès du ministre des Finances et autres personnes dans ce processus.
    L'autre processus, bien sûr, et madame Young y a fait allusion, est celui de la consultation, dans le cadre duquel différents groupes d'intérêts, ceux qui représentent les femmes, et bien d'autres, ont l'occasion de soulever ces questions auprès du ministre des Finances. Je pense que c'est significatif lorsqu'un ministre des Finances, comme le précédent, affirme... Je crois qu'il a déclaré qu'il examinerait les implications de ses budgets sous l'angle des différences entre les sexes, au meilleur de ses capacités. C'est une déclaration très importante, qui mérite qu'on l'examine et qu'on y donne suite.
    J'ignore si l'actuel ministre des Finances a dit la même chose, mais ce serait assurément formidable. Cela fournit une base stratégique pour qu'on puisse revenir à ces questions et examiner les engagements que prennent les ministres des Finances quant à la manière dont ils déterminent leurs budgets, étudient les implications et effectuent des analyses.
(1005)
    Merci.
    Pour la prochaine série de questions, vous aurez cinq minutes.
    Monsieur Pearson.
    Merci, madame la présidente.
    Vous avez tous les deux apporté un éclairage remarquable, car il s'agit d'une question très complexe, et je vous en remercie. Ce matin, vous nous avez fait entendre un son de cloche un peu différent par rapport à ce que nous ont dit d'autres témoins. Toute cette notion de collecte de données était très importante pour certains d'entre eux.
    Monsieur Good, vous avez déclaré que le Canada travaillait à ce processus depuis 10 ans, et qu'il était peut-être temps de passer à l'action. Vous avez notamment parlé d'incitatifs. Je m'interroge à ce sujet. Nos autres témoins estimaient que nous devions continuer à compiler des données, encore et encore. Or, selon vous, bien que ce soit important, il vaudrait peut-être mieux envisager des incitatifs.
    J'aimerais que vous illustriez vos propos par des exemples.
    Je pense que pour ce qui est des données et des informations, nous avons le meilleur bureau de la statistique au monde, Statistique Canada, qui a effectué des recherches remarquables sur un certain nombre de ces questions. J'estime que cet organisme est un chef de file mondial pour ce qui est des études et des recherches relatives aux avantages économiques du travail à domicile et à la reconnaissance de cette occupation et de son apport.
    Donc, j'approuve de tout coeur ce que vous dites. Je ne pense pas que nous ayons besoin d'analyses. Je crois qu'il s'agit d'établir des liens et de mettre en place des incitatifs. À mon avis, une bonne partie du travail commence sur le plan politique. Quelle est la position d'un parti quant à la manière dont il souhaite traiter des questions touchant l'égalité des sexes? Nous savons que c'est un sujet qui peut semer la zizanie, mais aussi que c'est une partie importante de la notion d'équité. C'est une part importante de la dignité dans la société, ainsi que de notre identité et du genre de peuple que nous souhaitons devenir. Tous ces aspects deviennent très important.
    Il s'agit ensuite d'examiner ces questions dans un contexte élargi et dans le cadre du débat politique, en se posant des questions fondamentales. Voulons-nous travailler du côté de la demande en ce qui a trait aux services de garde, comme l'a fait un certain gouvernement? Un autre gouvernement souhaitait plutôt s'attaquer à l'aspect de l'offre. Nous devrions fondamentalement analyser les futures implications des mesures sur le plan des sexes, et pas seulement leur degré d'efficacité ou leurs ramifications fédérales-provinciales. Voyons les choses en face: l'une des raisons pour lesquelles il y a des dépenses fiscales fédérales aussi importantes vient en bonne partie du fait qu'elles permettent au gouvernement fédéral de s'ingérer dans des domaines de compétence provinciale.
    En ce qui a trait aux incitatifs, je pense que ce dont nous avons besoin, c'est de meilleures possibilités — et je reviens au terme « interaction » — d'interactions entre les individus et les partis. Je pense que nous ne nous sommes pas rendu compte que le sujet comportait des dimensions humaines et des questions politiques fondamentales. Lorsqu'il faut résoudre des questions politiques, l'analyse permet de faire une bonne partie du chemin pour régler une partie de ces conflits et de ces divergences. En définitive, bien sûr, il pourrait bien s'agir d'une décision politique, comme pour la majorité des décisions importantes et difficiles en matière de budget, et c'est compréhensible; mais il faut que l'analyse et le travail soient effectués. Comme d'autres l'ont dit, en ce qui a trait à ces questions, on ne doit pas se livrer à cet exercice seulement au gouvernement, mais aussi dans les universités, les groupes de discussion, les médias et les partis politiques eux-mêmes.
    Souhaitiez-vous ajouter quelque chose?
    J'ajouterais seulement que j'approuve les remarques concernant Statistique Canada. En tant qu'experte en matière de fiscalité, les données sont là pour moi. Je peux vous dire le nombre exact de femmes qui cotisent à un REER, et à quel point elles en tirent des bénéfices. Toutes les données brutes sont là. C'est une question d'utiliser les données, car je ne crois pas qu'on le fait.
    Il y a deux formes de données que j'utilise particulièrement. L'une est les comptes des dépenses fiscales, qui exposent en détail les coûts de chaque mesure fiscale. Je pense, en fait, que les Canadiens seraient renversés d'apprendre que la plus grande dépense au titre de l'impôt des particuliers va à l'épargne-retraite, de façon générale. Nous dépensons davantage pour cela que pour quoi que ce soit d'autre. Ils seraient également abasourdis d'apprendre que la plus importante de toutes les dépenses fiscales est probablement ce qu'on appelle la déduction pour amortissement, qui est un allègement fiscal pour les entreprises, et ainsi de suite.
    Donc, les gens n'utilisent pas vraiment les données; personne n'étudie de près les statistiques fiscales, en trouvant intéressant de voir que les hommes cotisent au maximum à leur REER, mais pas les femmes; en se demandant ensuite pourquoi il en est ainsi, ce qu'on devrait faire à cet égard et comment cela pourrait modifier la façon dont nous concevons notre politique fiscale.
(1010)
    J'avais une autre question.
    Avec votre permission, j'aimerais ajouter, à ce même sujet, qu'il serait fort utile d'inclure dans chaque budget... Nous incluons déjà les dépenses directes dans chaque budget. Il suffit de consulter le plan financier et les documents qui l'accompagnent. On peut voir où va l'argent. Ce que ne disent pas les budgets, c'est où sont engagées les dépenses fiscales et leur nature. Pour le savoir, il faut aller sur le site Web du ministère des Finances.
    Nous diffusons discrètement les comptes de dépenses fiscales ou les budgets de dépenses fiscales — ils ne font pas partie des budgets — depuis 1979, quand John Crosbie était ministre des Finances. Ce qu'il faudrait faire, c'est exiger que, dans chaque budget, il y ait un budget ou un compte des dépenses fiscales chaque année. On pourrait alors en prendre connaissance et être beaucoup mieux renseigné, comme l'a dit Mme Young, sur les montants faramineux engagés à diverses fins publiques grâce aux dépenses fiscales. Il serait très important de le faire savoir aux Canadiens. En fait, si l'on fait l'addition, nous engageons autant ou presque autant en dépenses fiscales, par la porte arrière, que nous ne le faisons en dépenses directes.
    Monsieur Pearson, j'aimerais que vous posiez votre question, puis qu'on laisse les témoins y répondre plus tard, parce que je ne veux pas empiéter sur le temps alloué aux autres. Donc, posez votre question aux témoins, et ils y répondront plus tard.
    J'avais une autre question à poser à Mme Young.
    Vous avez affirmé qu'il existait certaines solutions à cet égard. J'aimerais en savoir davantage. Donc, j'aimerais que vous répondiez à cette question plus tard.
    Je vous remercie.
    Je vous remercie.
    La parole va maintenant à Mme Davidson, pour cinq minutes.
    Merci, madame la présidente.
    Je tiens à remercier Mme Young et M. Good des déclarations qu'ils nous font ce matin. Comme d'autres l'ont dit, vous nous avez certes fait voir certains problèmes sous un angle différent de ce qu'on obtient habituellement des autres témoins.
    Monsieur Good, j'aurais quelques questions à vous poser.
    Vous avez dit que vous avez quitté la fonction publique fédérale il y a sept ans. Remarquez-vous des changements dans la budgétisation sexospécifique ou l'analyse différenciée selon le sexe depuis lors? Avons-nous fait des progrès à cet égard au fil des ans? Tout le processus a été amorcé il y a dix ans environ. Quel progrès, si progrès il y a eu, avons-nous fait?
    Voilà une excellente question, et je dois reconnaître en toute équité que la situation s'est modérément améliorée. Il y a dix ans, quand j'étais à DRHC et que nous avons commencé à faire des analyses différenciées selon le sexe, tous estimaient qu'il fallait créer un service qui s'en chargerait.
    Je crois que, de plus en plus, on croit qu'il faut intégrer ce service à l'analyse de la politique générale, le mandater pour faire ces analyses, intégrer le processus dans la prise de décisions du ministère et faire en sorte que, dans toute analyse de la politique en matière d'assurance-emploi et des questions touchant à la sécurité de la vieillesse et au supplément de revenu garanti, des questions qui touchent essentiellement les femmes, et des questions relatives à la main-d'oeuvre au ministère, on examine les répercussions selon le sexe.
    Comme il a déjà été mentionné, la tendance bien sûr est de se concentrer sur les décisions nouvelles et supplémentaires sans revenir à la base des dépenses.
    Le deuxième changement, c'est que nous exigeons maintenant, en règle générale, que cette question soit examinée et incluse dans un mémoire au Cabinet. Bien que je n'ai pas eu l'occasion — et je ne voudrais certes pas commettre des indiscrétions — d'assister à des réunions du conseil des ministres au cours des dernières années, il m'est certes arrivé d'y être dans le temps. Je crois qu'un des points essentiels est de faire en sorte que les ministres l'exigent désormais. Si la demande est là, on s'organisera pour y répondre.
    Le troisième changement important, c'est que cette question fait désormais partie des présentations au Conseil du Trésor. Quand une présentation est faite au Conseil du Trésor pour obtenir une nouvelle autorité pour un programme ou de nouveaux fonds — et je vous l'accorde, on ne se concentre pas sur le côté fiscal, mais bien sur le côté dépenses directes —, il faut faire une analyse différenciée selon le sexe. J'estime que c'est important.
    Il y a dix ans, je ne crois pas que de pareilles analyses auraient été faites au ministère des Finances, du moins peut-être pas comme elles se font actuellement. Ce qui est sûr, c'est qu'au cours des dix dernières années, nous avons vu au moins un ministre des Finances affirmer qu'il ferait de son mieux pour qu'il y ait une analyse différenciée selon le sexe dans le contexte de son budget. J'estime donc que nous faisons des progrès. Il y a dix ans, il n'y avait pas de comité parlementaire chargé de la condition de la femme pour examiner ces importantes questions et inviter les gens à témoigner.
    J'estime donc qu'il y a eu certains progrès. Pourrait-on faire plus? Certainement. Il faudrait intervenir au niveau de l'interaction entre les décideurs et les joueurs. Voilà ce qui s'impose: faire en sorte qu'une analyse plus éclairée, plus détaillée et fouillée est intégrée au processus décisionnel.
(1015)
    Je vous remercie.
    J'aimerais revenir pour quelques instants à l'une des questions posées par un collègue qui demandait à savoir si c'est l'égalité des résultats ou l'égalité d'accès ou des chances qui compte. Je crois que vous avez dit que le rôle et la décision finale devraient être l'égalité des résultats, et je crois que nous nous efforçons tous d'y arriver. Puis, vous avez parlé un peu de l'analyse des partis politiques, d'analyser les programmes avant qu'ils soient arrêtés. Cela aiderait-il à atteindre l'égalité des résultats plus rapidement, si les partis politiques analysaient leurs programmes avant de les adopter comme politique officielle du parti?
    Je crois que oui.
    J'ai observé entre autres, au cours des 20 dernières années, que les partis, à leur péril, ne respectent pas les engagements qu'ils prennent durant les campagnes électorales. Il y a des années, il était fort possible de ne pas le faire. De plus en plus désormais, en raison de la reddition de comptes qu'exige l'électorat des partis et des nouveaux gouvernements, ils doivent bien respecter presque tous les engagements pris durant la campagne. En fait, il est intéressant de voir que, dans le dernier budget, en ce qui concerne le compte en franchise d'impôt, les gains en capital sont inclus. Naturellement, nous savons tous que l'engagement pris par l'actuel Premier ministre et l'actuel gouvernement, soit de régler le problème des gains en capitaux — non pas que j'appuie cette proposition particulière — n'a pas été respecté, selon moi à leur péril. La classe politique en est consciente.
    Il faut donc selon moi faire en sorte que l'analyse ait lieu avant que soient pris les engagements électoraux — et les partis politiques la font de plus en plus détaillée — parce qu'elle fixe sensiblement la suite des événements et l'orientation qui sera prise, de sorte que nous pouvons relever le niveau du débat, avec un peu de chance durant la campagne électorale et, à nouveau avec un peu de chance, au moment de former de nouveaux gouvernements lorsqu'ils prennent le pouvoir.
    Madame Davidson, je vous remercie. Le temps file très vite, n'est-ce pas?
    Madame Deschamps, vous avez cinq minutes, s'il vous plaît.

[Français]

    Merci, madame la présidente.
    Je salue nos deux témoins d'aujourd'hui: M. Good, qui est parmi nous par l'intermédiaire d'une vidéoconférence, et Mme Young, qui est présente physiquement.
    Lors d'une session précédente, le comité a travaillé à la sécurité économique des femmes. Plusieurs groupes, des associations et des chercheurs, sont venus témoigner. De façon générale, ces groupes nous faisaient part des grandes inégalités qui existent entre les hommes et les femmes. Tout était dirigé un peu comme Mme Young nous l'a présenté: les femmes plus âgées sont généralement plus pauvres, la majorité des femmes sont responsables de famille et peu d'entre elles arrivent à cotiser parce que, de façon générale, elles gagnent moins que les hommes.
    Monsieur Good, quand vous avez commencé votre présentation, vous avez dit que pour élaborer un budget, il y avait deux processus, soit le processus analytique et le processus politique. Comment peut-on s'assurer que, peu importe les gouvernements, les mesures mises en place vont dans la bonne direction et permettent d'atteindre les objectifs que l'on s'est fixés? Qui peut assurer le leadership? Vous avez parlé de leadership et de volonté. Qui aurait la capacité d'assurer ce leadership?

[Traduction]

    Si c'est à moi que s'adresse la question, il est difficile d'y répondre.
    De toute évidence, sous le régime de gouvernement que nous avons, le premier ministre et le ministre des Finances jouent un rôle absolument fondamental. De plus en plus, les interactions en matière budgétaire entre le ministre des Finances et le premier ministre ont beaucoup d'importance non seulement pour fixer les grandes orientations mais également, de toute évidence, pour décider des initiatives individuelles qui feront partie du budget.
    La question devient donc de savoir, quand on n'aime pas le budget particulier d'un gouvernement particulier, si l'électorat, dans une société démocratique, ira aux urnes la prochaine fois pour changer le gouvernement au pouvoir. C'est ainsi que les choses devraient se faire. Je suppose que je me concentre sur le côté demande. Ce qu'il faut faire, c'est faire en sorte que, lorsque sont éleborées les politiques et les priorités budgétaires — pas seulement les politiques et les programmes, mais en réalité, les priorités budgétaires —, nous en examinons les conséquences selon le sexe et à l'égard d'autres questions.
    Dans la mesure où, comme je le disais tout à l'heure, les partis politiques deviennent plus précis, plus normatifs et plus clairs dans ce que sont leurs priorités et initiatives, je crois qu'il leur appartient de faire en sorte qu'ils ont aussi effectué l'analyse différenciée selon le sexe et les autres travaux dans ce domaine pour avoir l'assurance que leurs politiques sont bien pensées, bien élaborées, que l'électorat peut en débattre et — s'ils prennent le pouvoir — qu'elles peuvent être travaillées, élaborées et améliorées de manière à pouvoir être mises en oeuvre avec efficacité et en temps opportun et obtenir de véritables résultats à la lumière de la politique visée.
(1020)
    Il vous reste une minute.

[Français]

    J'aimerais vous entendre, madame Young. Mon opinion personnelle sur le budget présenté cette semaine est la suivante. Je trouve qu'aucun effort n'est fait pour contrer l'inégalité entre les hommes et les femmes. Je ne sens pas que le budget contient des mesures pour soutenir les femmes pauvres ou les femmes qui se retrouvent dans des situations précaires après 65 ans. Je n'y vois pas beaucoup d'efforts de la part du gouvernement.

[Traduction]

    Quand j'examine les mesures fiscales — et c'est sur quoi porte mon travail —, je conviens avec vous que le dernier budget a été le moins important depuis des années. Par là, j'entends qu'il comporte très peu de mesures fiscales. C'est mon domaine de spécialisation, de sorte que je n'ai pas grand-chose à dire au sujet de l'autre côté de l'équation. Toutefois, comme je le disais à mes étudiants l'autre jour, il n'y a rien à se mettre sous la dent dans ce budget, parce qu'il n'y a pas grand-chose d'un point de vue fiscal. Il n'y a certes pas d'objectif ou de mesure visant à régler certains des problèmes dont vous parlez.
    Nous parlons de l'inégalité de la situation de la femme et des programmes qui, avec un peu de chance, corrigeront certaines de ces inégalités. L'essentiel à retenir, c'est que ces programmes du régime fiscal comportent actuellement des lacunes.
    Le second point, c'est qu'il ne faut pas miser uniquement sur le régime fiscal pour régler divers problèmes. Les subventions directes, les dépenses directes et tout le reste sont aussi des moyens.
    Je vous remercie.
    La parole va maintenant à Mme Mathyssen, pour cinq minutes.
    Merci, madame la présidente.
    Un témoin, soit le représentant du Centre canadien de politiques alternatives, a recommandé la création d'un poste de commissaire à l'égalité des femmes — un peu à l'image du commissaire à l'environnement. Si le gouvernement souhaite prendre d'autres initiatives budgétaires, faut-il charger une personne ou un service de leur mise en oeuvre? Dans l'affirmative, comment faudrait-il s'y prendre, selon vous?
    J'aimerais revenir sur ce qu'a dit M. Good, qui concerne davantage l'intégration. Certes, un commissaire à l'égalité des femmes serait fantastique. J'appuie toute mesure qui attire plus l'attention sur ces questions.
    Toutefois, une personne seule n'arrivera pas à grand-chose. Il faut faire en sorte que la personne ou le bureau a en réalité un rôle important à jouer et que le ministère des Finances ne lui remet pas, deux heures avant le dépôt du budget, tous les documents budgétaires. Si une personne particulière était nommée à un pareil poste, il faudrait qu'elle dispose de certains pouvoirs et de certaines compétences qui lui permettraient de travailler d'égal à égal avec des organismes comme le ministère des Finances et tout le reste.
(1025)
    Je ne crois pas qu'il soit utile d'avoir plus de chiens de garde spécialisés. Beaucoup de postes de surveillance ont été créés, particulièrement récemment. Comme Mme Young l'a dit, ce qu'il nous faut, c'est de l'interaction et du parrainage. Pour que les choses se fassent, il est important que le portefeuille de la Condition de la femme soit reconnu comme tel, ce qui exige en règle générale un ministre puissant.
    Par ces propos, je ne cherche pas à dénigrer les titulaires actuels, mais cela s'est déjà vu au fil des ans. Il y a une quarantaine d'années, des ministres très puissants étaient chargés du portefeuille de la Condition des femmes, et d'importantes réalisations ont été faites durant cette période. Cela prend beaucoup d'importance dans la façon dont nous structurons notre système. Les ministres ont de l'importance. Ils peuvent exercer une influence et avoir beaucoup d'impact, particulièrement sur le côté demande, pour qu'on réclame de meilleures analyses, de meilleurs travaux, et pour défendre les dossiers.
    C'est là, selon moi, qu'il est très important d'agir, étant donné la façon dont les choses se font au Canada.
    Madame Mathyssen, ce sera votre dernière question. Faites vite.
    Il faut donc continuer de lutter contre cette culture de l'inégalité, cette omniprésence. En son absence, nous ne pourrions pas continuer d'adopter des politiques fiscales qui n'aident pas les femmes.
    La bataille est loin d'être gagnée. De toute évidence, il reste encore beaucoup à faire.
    Je vous remercie.
    Est-ce votre réponse définitive?
    Oui.
    Monsieur Good, souhaitez-vous intervenir?
    Non. Je crois que ma réponse antérieure est toujours valable.
    Je vous remercie.
    La parole va à Mme Grewal, pour cinq minutes.
    Merci, madame la présidente.
    Madame Young, j'observe dans votre profil, sur le site Web de la faculté de droit de l'UBC, que vous avez agi comme consultante auprès du ministère des Finances en matière de politique fiscale. Était-ce le ministère fédéral des Finances? Dans l'affirmative, quand l'avez-vous fait et que vous demandait-on de faire au juste? Pourriez-vous nous donner quelques détails à ce sujet?
    J'ai agi comme consultante auprès du ministère des Finances au milieu des années 1980, si ma mémoire est bonne — probablement en 1984-1985 — , soit il y a bien longtemps. J'y ai travaillé à la rédaction des modifications aux règles d'attribution, qui étaient de nature très technique, des règles particulières portant sur le fractionnement du revenu de propriété. Ce travail n'avait rien à voir avec la différenciation selon le sexe. Je venais alors tout juste d'entamer ma carrière universitaire, après avoir travaillé à la rédaction de lois. On faisait donc appel à mes compétences en matière de rédaction, non pas à mes qualités d'universitaire, je crois. C'est la seule fois que j'ai travaillé pour le ministère fédéral des Finances. Je l'ai fait quelques étés, ce qui m'a permis de passer du temps à Ottawa — et cela m'a beaucoup plu.
    Vous avez étudié l'impact sur les femmes du financement des programmes sociaux par l'intermédiaire du régime fiscal, y compris le fait que les femmes en profitent moins que les hommes. Pourriez-vous, je vous prie, nous parler davantage de cette conclusion, en nous parlant plus particulièrement de la Prestation fiscale canadienne pour enfant.
    Dans ce cas, comme M. Good, je vais mettre de côté tout semblant de modestie.
    Des voix: Oh, oh!
    Mme Claire Young: Le document s'intitule Les femmes, l'impôt et les programmes sociaux: répercussions, selon le sexe, du financement des programmes sociaux par l'entremise du régime fiscal. Je dois dire que, lorsque ce document a été rédigé, il portait sur une version antérieure de la prestation fiscale pour enfants. Donc, je n'ai pas beaucoup travaillé à la plus récente, mais je sais que ce qu'on lui reproche essentiellement, c'est que certaines femmes à faible revenu n'y ont pas accès. Je crois que le supplément au revenu gagné a permis jusqu'à un certain point d'y remédier.
    Le ministère des Finances du Canada a effectué une analyse différenciée selon le sexe des changements apportés à la politique fiscale dans le budget 2006-2007. Donc, pouvez-vous nous parler d'autres changements, en plus de ceux qui ont été apportés à la politique fiscale, qu'il devrait également examiner en fonction du sexe?
    Je suis une spécialiste de la politique fiscale. Je crois donc qu'il serait déplacé de ma part, étant donné mon domaine de compétence et mes connaissances, de... Manifestement, en tant que femme, il me vient à l'esprit beaucoup de domaines dans lesquels j'aimerais qu'on fasse davantage, mais du point de vue de la politique fiscale, j'ai certainement essayé de vous nommer les principaux. Ils incluraient les subventions à caractère fiscal pour l'épargne-retraite, qui ne font tout simplement pas ce qu'elles sont censées faire. C'est une des questions qui me vient immédiatement à l'esprit. Je crois aussi que la déduction pour frais de garde d'enfant pose aussi certains problèmes, tout comme le crédit d'impôt pour le conjoint et ainsi de suite.
(1030)
    Aimeriez-vous que M. Good réponde à la question?
    Oui, je vous en prie.
    Monsieur Good.
    Il importe d'examiner tous les instruments de gouvernance qui touchent les Canadiens. De toute évidence, le côté finances représenté à la fois par les dépenses fiscales et par les dépenses directes doit faire partie de l'analyse — c'est alors que les répercussions selon le sexe de ce genre de mesures prend toute son importance.
    Par ailleurs, naturellement, les gouvernements adoptent beaucoup de lois. Ils prennent beaucoup de règlements. Ce sont là des instruments très puissants de gouvernance, et il faut faire en sorte que les répercussions selon le sexe de ce qui est prévu sont clairement cernées.
    Le dernier point que j'aimerais faire valoir, c'est que les gouvernements ont recours à l'« exhortation », comme on l'appelle dans la documentation, ou la persuasion ou la rhétorique, dans le meilleur sens du mot. C'est une orientation, c'est prendre l'engagement de faire certaines choses. Il faut à mon avis examiner également les conséquences de ces mesures selon le sexe pour avoir l'assurance que tous ces instruments de gouvernement n'empêchent pas d'accomplir ces choses.
    Toutefois, cela ne suffit pas. Il faut aussi examiner les pratiques de l'entreprise privée et commencer à prendre conscience de ce qui se fait dans ce secteur. Je vous en donne un mini-exemple.
    Hier, je suis passé chez le teinturier pour prendre des chemises. Il y avait une chemise à moi et un chemisier de mon épouse. Naturellement, le teinturier exige 3,10 $ la chemise pour moi et 4,95 $ pour les chemisiers de mon épouse. Pourquoi est-ce ainsi? Parce que les machines utilisées ici à Victoria ne conviennent qu'aux chemises d'homme, pas aux chemisiers de femme. C'est mal. Donc, de nombreuses choses devraient être améliorées dans l'entreprise privée et être examinées également pour faire en sorte qu'il y a égalité à l'égard des sexes. Il m'est très difficile d'expliquer à mon épouse pourquoi il faut payer davantage pour faire nettoyer ses chemisiers et, pour être très franc avec vous, je ne crois pas que ce soit juste.
    Madame Grewal, je vous remercie.
    Monsieur Good, en tant que présidente, j'aimerais user de mon privilège et vous demander d'expliquer le côté offre et le côté demande. Vous avez affirmé que le côté demande avait perdu de la capacité. Est-ce parce que le grand public ne participe pas à l'élaboration de la politique gouvernementale, même s'il se fait beaucoup de défense des intérêts et de consultations? Pourriez-vous m'aider à comprendre ce phénomène?
    De plus, nous avons entendu des témoins nous dire qu'ils vont avoir recours à des indicateurs de genre, comme le logement et le seuil de faible revenu et ainsi de suite. Ils affirment qu'ils vont travailler avec des pays européens pour voir quelles sortes d'indicateurs existent. Les indicateurs sont-ils utiles? Comme la budgétisation sexospécifique ou l'analyse différenciée selon le sexe est un travail constamment en cours, quand saurons-nous que nous avons...?
    Pour ce qui est de la dernière partie de votre question, ce sera un processus d'évolution constante. Je ne crois pas que nous allons atteindre un stade définitif. La clé est, selon moi, de savoir si nous faisons des progrès mesurés. Y a-t-il des améliorations à l'égard de certains problèmes et quelle est leur évolution? Y a-t-il moins de discrimination? Les effets délétères ont-ils diminué? Découvre-t-on des conséquences non intentionnelles? Les écarts ont-ils diminué? Statistique Canada peut faire de l'excellent travail en ce qui concerne le revenu et d'autres questions. Commençons-nous à observer certains progrès sur ce front?
    Je favorise davantage les grands indicateurs globaux que la mise en place de toute une série d'indicateurs. Ce que je crains, c'est que, si l'on opte pour les indicateurs, la tâche se transforme vite en processus bureaucratique. Chaque fois, il faut que ces indicateurs soient très clairement alignés sur la politique ou la dépense individuelle, ou encore le texte de loi individuel à l'étude.
    Quant à la première partie de votre question, en ce qui concerne la demande et l'offre, j'ai l'impression qu'il y a beaucoup d'offre. L'appareil gouvernemental compte de nombreux nouveaux fonctionnaires, nous avons beaucoup de nouveaux qui font l'analyse, nous avons une grande capacité et d'excellents groupes de réflexion, et il y a beaucoup de choses qui peuvent être faites. Toutefois, rien ne motive autant que de voir la bonne personne poser la question au moment opportun.
    Quand vous soumettez une politique au conseil des ministres, au Conseil du Trésor ou au ministère des Finances, si quelqu'un haut placé dit : « Quel est l'impact de cette politique selon le sexe? Quelles en sont les conséquences? », il agit sur la demande.
    À mesure que ces questions sont de plus en plus posées, je crois que l'offre va s'y adapter. Il devient donc important de bien faire. Voilà qui exige que le gouvernement s'intéresse à la politique gouvernementale, qu'il s'intéresse à son fond et qu'il soit capable de poser les questions fondamentales et de le faire à tous les niveaux au sein même du gouvernement, tant du côté politique que du côté bureaucratique.
    J'estime que ce sont là d'importantes questions sur lesquelles il faut se concentrer. Je ne crois pas que de simplement travailler du côté de l'offre va suffire. En d'autres mots, si vous l'intégrez...
(1035)
    Merci.
    Merci.
    Non, vous pouvez poursuivre. Je ne voulais pas vous interrompre, monsieur Good.
    Ce n'est pas le genre d'entreprise qu'il suffit de créer pour avoir des résultats. C'est une entreprise qui, s'il y a un incitatif, et si la bonne question est posée, suscitera une réponse.
    Merci.
    Madame Young, je pense que Mme  Deschamps avait une question au sujet de la sécurité économique des femmes. Quand les femmes au foyer dont vous parlez sont venues témoigner ici, elles voulaient savoir s'il pourrait y avoir moyen pour elles de cotiser au RPC. Avez-vous, en votre qualité de fiscaliste, pensé à cela et à la valeur que vous attribueriez au travail à la maison?
    Absolument. Cette question fait l'objet de réflexions depuis longtemps. Ce n'est pas, techniquement parlant, une question fiscale, mais il est certain que si on regarde tout ce que le gouvernement dépense sur l'épargne-retraite — nous avons la Sécurité de la vieillesse et le RPC, la Sécurité de la vieillesse étant le régime le plus universel, et puis nous avons des régimes plus privés, les REER et les régimes de retraite professionnels — pour les femmes qui travaillent chez elles, il ne fait aucun doute que l'accès au RPC serait un gain énorme.
    En ce qui concerne la prestation fiscale pour le revenu gagné, on nous a dit que quelqu'un qui gagne 22 000 $ est trop pauvre pour avoir droit à cette prestation, et trop riche pour avoir droit au crédit d'impôt pour enfants.
    Là encore, je n'ai pas les statistiques sous la main, mais cela me semble à peu près juste. Il y a cette brèche dans laquelle tombent certaines personnes. Je pense que le chiffre doit être un peu plus élevé — peut-être 23 000 ou 24 000 $, ou autres — mais il est certain qu'il y a un creux.
    Et ils sont pauvres. C'est être pauvre.
    Absolument.
    Merci.
    Nous entamons maintenant le dernier tour.
    Madame Minna, est-ce que vous partagez votre temps avec M. Pearson, ou prenez-vous tout pour vous?
    Nous allons essayer. J'ai deux ou trois questions, et ensuite, si M. Pearson en a à poser, bien sûr, il le pourra.
    J'aimerais faire une observation, très rapidement, relativement à ce qu'a dit M. Good au sujet des nettoyeurs. Il existe en fait un livre pour le secteur privé, qui a été écrit à Toronto par une activiste qui travaille très fort. Elle s'appelle Yaccato. J'ai oublié son prénom. Elle a justement utilisé l'exemple du secteur du nettoyage. Alors il y en a, de ces gens.
    J'ai une question à vous poser à tous deux. Pour ceux d'entre nous qui nous intéressons à ce que le ministre des Finances et le Conseil du Trésor devraient demander — et nous l'espérons, qui vérifions après s'ils l'ont fait — quand il est question de modifications à la politique fiscale, quel genre de question précisément, le ministère des Finances ou nous-mêmes, en notre qualité de mécanisme de contrôle, devrions-nous poser pour tenir compte de l'incidence des politiques sur les femmes? Quelles questions précises devraient-ils poser?
    Peut-être Mme Young peut-elle répondre.
    Si vous le permettez, je voudrais vous donner un exemple, qui répond en fait à la question de M. Pearson, tout à l'heure, au sujet de l'usage qui est fait des statistiques. Je pense que le genre de question qui devrait vous intéresser c'est, évidemment, quel genre d'incidence les politiques auront-elles sur les femmes?
    Je pense qu'un moyen de le savoir consiste à prendre les statistiques actuelles, et vraiment les appliquer. Par exemple, l'une des politiques qui sont proposées vise le partage des revenus, que nous entendions pour que le gouvernement adopte des règles qui permettront aux couples de mettre en commun leurs revenus à des fins d'impôts, de le partager moitié-moitié, ce qui leur permettra d'économiser de l'impôt. Quand je pense à ce genre de politique, je vois des politiciens qui seraient pour et qui présentent des arguments raisonnés, et d'autres politiciens qui s'y opposent avec véhémence. Je peux vous dire qu'à mon avis, cette politique comporte en fait des conséquences très négatives pour les femmes.
    La raison pour laquelle je vous dis cela, c'est que si vous preniez les statistiques fiscales actuelles et déterminiez ce qu'elles seraient si cette politique était en vigueur aujourd'hui, ce serait très révélateur sur le revenu des femmes, etc. Je peux en fait prendre ces statistiques, les appliquer, et produire pour vous un tableau qui vous montrera qui gagne et qui perd, des points de vue du sexe et du niveau de revenu.
    J'aimerais que cela se fasse plus souvent, pour que l'analyse ne soit pas... si je dis rhétorique, c'est un terme injuste, mais il ne s'agit pas que de dire que des femmes perdent d'un côté ou gagnent d'un autre. C'est en fait que nous prenons des données statistiques qui existent, nous y appliquons les politiques qui sont proposées, et nous regardons le tableau d'ensemble après quelques ajustements.
(1040)
    C'est intéressant.
    Monsieur Good, vouliez-vous dire quelque chose?
    Oui. C'est une excellente question. Je pense que la question qu'il faut, fondamentalement, toujours poser, c'est qui gagne et qui perd. Il faut la poser tant au plan du revenu que du genre.
    Vous pouvez être sûrs que le ministère des Finances voit qui gagne et qui perd, et il y a des dispositions, en vertu de l'accès à l'information, qui font que cette analyse est faite. Souvenez-vous que dans tout document du Cabinet, il y a une section d'analyse qui est accessible en vertu des règles d'accès à l'information, pas les recommandations aux ministres — ce sont des renseignements confidentiels du Conseil privé de la Reine — mais l'analyse peut servir et elle sert.
    Pour l'autre question, dans quelles circonstances est-ce que cela pourrait changer, à propos du partage du revenu? Qu'arrive-t-il quand il y a un divorce, une rupture? Est-ce que cela signifie seulement qu'aux fins d'impôt, on fait passer le revenu de l'autre côté et tout ce qu'on fait, c'est qu'on fait peser une plus grande responsabilité fiscale sur le conjoint dont le revenu est inférieur? Bien que ce ne soit pas le résultat recherché, cela pourrait arriver, alors il faut vraiment poser ces questions.
    Ensuite, il faut penser à la question fondamentale du genre de personnes qui sont touchées. Est-ce que ce sont des habitants des régions rurales? Des citadins? Est-ce que ce sont des immigrants? Des Autochtones? Il y a toute une série d'autres questions qu'il faut constamment se poser pour faire une analyse appropriée de ces questions.
    Ensuite, il faut poser la question fondamentale au bout du compte. Quelles pourraient être les conséquences inattendue de cette mesure? Et nous constatons, de plus en plus, qu'il y a des conséquences imprévues, des effets auxquels on n'avait pas pensé au début, et il faut y réfléchir.
    Ce sont les questions qu'il faut poser, et tout bon ministre, je peux vous l'assurer, les posera, et tout bon fonctionnaire veillera, au mieux de ses capacités, à ce qu'une analyse soit effectuée pour que ces questions trouvent réponse avant qu'une décision soit prise et annoncée en matière de politique.
    Monsieur Pearson, vous avez une minute.
    Très brièvement, madame Young, vous avez dit que le régime fiscal n'est peut-être pas la meilleure voie pour aider les gens dans certaines situations, et vous avez donné en exemple la réduction de la pauvreté parmi les personnes âgées de plus de 65 ans. Pouvez-vous donner d'autres exemples relatifs aux femmes?
    Eh bien, comme je l'ai dit brièvement, une critique est faite du crédit d'impôt pour enfants. La critique, c'est qu'encore une fois, il y a ce groupe au revenu assez faible qui ne reçoit pas autant qu'il le devrait, et il y a cet autre petit groupe qui est quasiment exclu. Mais je pense que ce qu'il faudrait c'est que vous pensiez, sous l'angle des politiques, qu'il y a longtemps, nous avions des allocations familiales et que le crédit d'impôt pour enfants est une espèce d'allocation familiale.
    L'allocation familiale était versée sans passer par le régime fiscal. C'était un chèque qui était posté à chaque mère qui avait des enfants. L'allocation est maintenant intégrée au régime fiscal, ce qui fait intervenir toutes sortes d'autres règles fiscales qui s'appliquent au crédit d'impôt pour enfants. Par exemple, le niveau de revenu, pour le crédit d'impôt pour enfants, est fonction de règles fiscales qui influent sur le mode de calcul du revenu, etc.; alors c'est beaucoup plus complexe.
    Je ne veux pas dire par là que nous devrions rétablir les allocations familiales — je le répète, c'est l'affaire des politiciens — mais ainsi on peut comparer les avantages du versement direct d'un subside spécifiquement à un groupe de personnes au moyen d'une subvention, comparativement à une mesure qui est intégrée au régime fiscal, avec toutes les complexités que créent d'autres règles, lesquelles y font obstacle.
    Merci, madame la présidente.
    Merci.
    Nous laissons maintenant la parole à M. Stanton, pour cinq minutes.
    Merci, madame la présidente. Je l'apprécie.
    Je voulais poser, rapidement, une question à Mme Young.
    L'un des principaux principes que vous posez ici est que les programmes sociaux devraient véritablement aller plus loin que ce à quoi le gouvernement s'engage relativement à ses règles fiscales. Bien que je l'accepte, je me demande ce que vous pensez du principe voulant que les programmes sociaux, généralement, relèvent des compétences et du domaine des provinces, et que constitutionnellement parlant, le gouvernement du Canada, s'il souhaite contribuer à influencer les résultats, ne le peut surtout qu'au moyen de mesures fiscales pour exercer ce type d'influence dans la société en général, tout en offrant un soutien aux provinces par des mesures comme le TCS et le TCPS pour que les provinces puissent faire un peu plus et livrer des programmes au niveau provincial, selon leurs besoins.
    Pourriez-vous commenter cela?
(1045)
    Volontiers.
    Encore une fois, je ne suis pas experte de la répartition des pouvoirs entre le gouvernement fédéral et les provinces. Cela étant dit, je pense que ce que disait M. Good plus tôt est pertinent ici. Dans une certaine mesure, c'est une façon pour le gouvernement fédéral de participer aux programmes sociaux en passant en quelque sorte par la porte arrière — c'est-à-dire au moyen du régime d'impôt sur le revenu.
    Ce que je veux dire, c'est que si on met de côté les compétences fédérales-provinciales et les différends sur le sujet, que je suis tout à fait en faveur de ce que le gouvernement fédéral ait son mot à dire dans les programmes sociaux, mais je pense que le mécanisme qu'il emploie pour le faire comporte de graves déficiences.
    Il y a deux façons de composer avec cela. L'une est de corriger certaines des iniquités dont j'ai parlé, dans le régime fiscal, et parfois cela peut se faire au moyen de règles fiscales. Je pense que ce devrait être fait, et je peux vous donner des exemples.
    À d'autres moments, je pense que le gouvernement fédérale doit faire le constat politique que la règle fiscale n'agit tout simplement pas de manière équitable. Si c'est le seul moyen — si la politique que nous essayons d'appliquer ne peut l'être qu'au moyen du régime fiscal — alors, il faudrait essayer de faire que le régime fiscal soit plus équitable, mais si ce n'est pas possible et il existe un autre moyen, je dirais qu'il serait plus important de tout simplement éliminer ces iniquités. Vous corrigez le régime fiscal si vous le pouvez; si c'est impossible, il faut reconnaître la nécessité de recommencer à zéro, ou du moins d'aller dans un autre sens.
    Très bien.
    C'est tout, madame la présidente.
    Je crois que Mme Boucher avait une question à poser.
    Oui, une petite question.

[Français]

    Je trouve cela très intéressant et, en même temps, je me questionne en tant que femme et députée. On trouve, autour de la table, plusieurs visions de ce qu'est la politique. Qu'il soit libéral, conservateur ou néo-démocrate, chacun a sa vision propre et la défend.
    Une approche apolitique pour faire un budget sexospécifique serait-elle possible pour au moins jeter les bases de budgets qui encadrent les femmes? Une vision apolitique serait-elle plus complète? Est-ce au politique de le faire? En français on dit: « Advienne que pourra. » On vit avec les conséquences. De chaque côté de la table, on trouve des visions différentes: les unes ne sont pas meilleures que les autres. On est dans un dilemme constant.
    Pour moi, parler de la budgétisation sexospécifique, c'est nouveau. Sur le plan personnel, si je laisse parler la femme plutôt que la députée, je reviens de loin. J'étais une femme monoparentale. Si j'avais su qu'un jour je parlerais de budget sexospécifique, j'aurais été la première à être très contente: on se penche enfin sur le problème. Une vision apolitique est-elle pensable dans un tel cas?

[Traduction]

    J'aimerais vous dire oui, mais j'ai presque envie de vous renvoyer la question en disant que c'est vous qui êtes les politiciens; vous avez une meilleure idée du sens des choses.
    Pour être plus sérieuse, tout ce qui concerne l'argent est tout simplement tellement politique. Nous parlons de la répartition des ressources au moyen du régime fiscal. Tout le monde a un avis qui est fondé sur son entendement politique de la situation, et je pense qu'il est impossible de l'exclure. Mais cela ne veut pas dire qu'on ne peut atteindre un certain consensus sur des questions fondamentales. Je crois que vous le pourriez, même entre partis dont les vues diffèrent. Je ne pense pas que la politique puisse disparaître, mais j'ai foi dans la possibilité d'un consensus.
    Prenez, par exemple, ce comité. Les questions que j'ai entendues aujourd'hui ont été, pour moi, tout simplement fantastiques et très intéressantes. Si vous me demandiez de dire, d'après vos questions, qui représente quel parti politique, je ne pourrais même pas vous répondre. En fait je le pourrais parce que j'ai vérifié tout cela avant de venir, mais à entendre, en tant qu'observatrice indépendante, les questions que vous posez, vous avez tous des vues assez similaires — sans vouloir manquer de respect, bien évidemment, à vos allégeances politiques.
    Alors je pense vraiment qu'on ne peut pas faire fi de la politique, mais il y a certainement possibilité pour des gens qui ont vraiment à coeur certains enjeux et qui ont peut-être des avis divergents, de tout de même parvenir à un certain consensus.
(1050)
    Merci.
    Madame Deschamps, une dernière question.

[Français]

    Merci, madame la présidente.
    Ma question s'adresse à Mme Young.
     Vous avez parlé, un peu plus tôt, de l'appareil fédéral et des champs de compétence des provinces. Je vais vous faire part de mon opinion sur cela. Je suis une représentante du Québec. Au Québec, on a fait beaucoup d'avancées sur le plan social et du point de vue fiscal. Depuis quelques années, on voit le gouvernement fédéral s'ingérer davantage dans les champs de compétence des provinces. Cela a souvent pour effet de dédoubler les efforts faits et d'appauvrir les provinces, parce que ces dernières sont dépourvues de ressources. L'appareil provincial, de par ses compétences, est plus près des préoccupations des gens.
    Je pense qu'au lieu d'essayer de dédoubler les mesures et d'empiéter sur les compétences provinciales, le gouvernement devrait rétablir les transferts auxquels les provinces avaient droit et qu'elles recevaient entre 1990 et 1994. Ces transferts soutenaient aussi la santé, l'éducation et les programmes sociaux. Le gouvernement fédéral ayant coupé ces enveloppes, ses surplus s'accumulent et les provinces voient étouffer leur capacité de donner des services à leurs citoyens. Je ne vois pas cela comme une guerre de pouvoir, mais il y aussi une espèce de contrôle du fédéral qui limite la capacité des provinces de répondre aux besoins et de donner les services auxquels s'attendent les citoyens de chacune des provinces.

[Traduction]

    Je ne suis pas avocate spécialiste du droit constitutionnel, alors... Je n'essaie pas d'éviter votre commentaire. Si vous permettez, je donnerai le Québec comme exemple pour illustrer quelque chose dont j'ai parlé tout à l'heure.
    Avec les garderies, le Québec a choisi une voie différente: 5 $ par jour, etc., etc. Ceci revient à ce que j'ai dit plus tôt, personnellement, je pense que le Québec a reconnu qu'il y a des problèmes à passer par le régime fiscal pour livrer ce programme social particulier, ou cette subvention. Il y a d'autres exemples, que ce soit au Québec ou à l'échelle fédérale et dans d'autres provinces, de mesures fiscales qui sont axées sur le régime fiscal ou exécutées par son intermédiaire, et qui sont plus directes.
    Donc, sans commenter la répartition du pouvoir et l'aspect des ressources, je vois le Québec comme exemple d'une province qui a sérieusement réfléchi à certains des programmes sociaux qui ont une incidence sur les femmes. Je pense que les garderies en font partie.
    Si je peux faire un commentaire à ce sujet, n'oublions pas que de toutes les fédérations du globe, le Canada est la plus décentralisée. Quand on regarde la capacité de recettes, la capacité fiscale, et la capacité de prestations de programmes de niveaux de gouvernement sous-nationaux, c'est-à-dire les provinces et territoires, ils ont eux-mêmes de grands pouvoirs de création de programmes.
    Deuxièmement, il y a entre les gouvernements fédéral et provinciaux d'importantes dispositions visant des arrangements relatifs au refus de participer qui, je pense, sont très importantes pour les provinces. Ainsi, elles peuvent recevoir des fonds du gouvernement fédéral pour mettre en oeuvre leurs propres programmes plutôt que de participer à un programme national. Je crois que c'est un facteur des plus importants.
    Troisièmement, n'oublions jamais — je pense que M. Young en a parlé — la possibilité qu'ont les provinces, au sein de la fédération, de faire les choses autrement, comme l'imposition d'une taxe sur le carbone en Colombie-Britannique ou au Québec. Ce sont là des programmes d'action qui peuvent être mis de l'avant à l'échelon provincial même quand on ne veut pas nécessairement agir au niveau fédéral, ou qu'on ne sait pas exactement comment s'y prendre pour le faire.
    Je pense qu'il y a de grands avantages à la fédération, particulièrement pour ce qui est de l'expérimentation des politiques sociales, et de leur modification.
(1055)
    Merci tous deux d'être ici et pour votre apport et votre analyse des plus réfléchis.
    J'ai une question à poser à M. Young, de la part de l'analyste.
     Auriez-vous des exemples précis à donner qui pourraient corriger une mesure fiscale inéquitable?
    Très rapidement, si vous prenez mon exemple des régimes d'épargne retraite enregistrés — et je ne veux pas trop entrer dans les détails techniques — actuellement, l'allégement fiscal a deux formes: l'une est une déduction fiscale pour les cotisations au régime; l'autre forme d'allégement fiscal, qui en fait vaut beaucoup plus, est l'accumulation du revenu dans les régimes, lequel n'est pas imposable. Je devrais ajouter que les régimes de retraite du Canada sont d'énormes bassins de capital qui sont propriétaires de tous les centres commerciaux où vous ne mettrez jamais le pied.
    Veuillez pardonner ce petit commentaire éditorial.
    Là où je veux en venir, c'est que si nous voulons régler le problème de la déduction à l'envers, on pourrait la convertir en crédit d'impôt. Cela signifierait que la valeur de l'allégement fiscal serait la même pour tous les contribuables. Vous direz peut-être qu'en est-il de ces gens qui ne paient pas d'impôt? Par la suite, on pourrait créer un crédit d'impôt remboursable, et c'est ce que nous faisons avec le crédit d'impôt pour la TPS. C'est un exemple de cas où, en fait, même quand on ne paie pas d'impôt, on a quand même la valeur du crédit. On pourrait, par exemple, jouer un peu avec les règles de cette manière.
    Je traite un peu plus en détail de certaines de ces propositions dans mon petit tome, ici.
    Merci.
    Avez-vous des observations à faire pour terminer, monsieur Good?
    Je tiens à féliciter le comité pour le travail qu'il fait. À propos du bipartisanisme et de la nature apolitique, il est bon de voir l'opposition à la tête de ce comité; il y en a relativement peu, à part le comité des comptes publics.
    Il est merveilleux de voir l'intérêt bipartisan. Je pense que c'est un aspect très important de la préparation du budget. Les budgets seront toujours de nature politique, mais la mesure dans laquelle nous pouvons examiner les faits probants des analyses de manière bipartisane, sincère et analytique fera que nous aurons des budgets plus sexospécifique à l'avenir, ce qui, selon moi, doit être l'objectif de ce comité, ainsi que de bien d'autres Canadiens.
    Merci beaucoup.
    Nous vous remercions d'être venu. Nous apprécions beaucoup votre apport.
    Membres du comité, le seul point à notre ordre du jour, aujourd'hui, est une motion de Mme Mathyssen.
    Madame Mathyssen, pouvez-vous lire votre motion pour le comité?
(1100)
    Merci, madame la présidente. La voici :
Que le Comité international olympique devrait inclure le saut à ski féminin dans les épreuves des Jeux Olympiques de Vancouver-Whistler de 2010 et que le gouvernement devrait encourager le Comité international olympique à prendre cette décision.
    J'aimerais ajouter « et que la décision prise soit communiquée à la Chambre ».
    D'accord. Nous passons aux questions et commentaires.
    Madame Davidson.
    Merci beaucoup.
    Je tiens à remercier la députée d'avoir présenté cette motion. Il est certain que nous allons l'appuyer. Nous avons déjà soutenu cela publiquement. La secrétaire d'État, Mme Guergis, a déjà rencontré le CIO et a plaidé en ce sens, et cela a été annoncée publiquement à la Chambre.
    Nous reconnaissions que le CIO est un organe indépendant, mais nous recommandons, c'est certain, cette mesure et nous appuyons la motion.
    Madame Neville.
    Nous l'appuyons aussi, madame la présidente. J'aimerais seulement préciser aux fins du compte rendu que je pense que ma collègue, Mme Fry, la porte-parole pour les sports, en a parlé à plusieurs occasions. Je ne suis pas sûre, mais je crois qu'elle a aussi présenté une motion en comité en ce sens. Alors je pense que cette proposition fait l'unanimité ici.
    Merci.
    Monsieur Pearson.
    Madame Neville m'a enlevé les mots de la bouche, mais j'aimerais ajouter que Mme Fry l'a fait en 2006 et avait demandé des rencontres, qui ont eu lieu. En tout cas, il est sûr que nous appuyons cette motion.
    Merci.
    Sans plus attendre, je mets la question aux voix.
    (La motion est adoptée.)
    Merci.
    La séance est levée.