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FEWO Réunion de comité

Les Avis de convocation contiennent des renseignements sur le sujet, la date, l’heure et l’endroit de la réunion, ainsi qu’une liste des témoins qui doivent comparaître devant le comité. Les Témoignages sont le compte rendu transcrit, révisé et corrigé de tout ce qui a été dit pendant la séance. Les Procès-verbaux sont le compte rendu officiel des séances.

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CANADA

Comité permanent de la condition féminine


NUMÉRO 006 
l
2e SESSION 
l
39e LÉGISLATURE 

TÉMOIGNAGES

Le lundi 3 décembre 2007

[Enregistrement électronique]

  (1535)  

[Traduction]

    Mesdames et messieurs les membres du comité, nous voudrions ouvrir la séance.
    Les témoins d'aujourd'hui sont Mme Ellen Russell, qui enseigne à l'École d'administration et de politique publique de l'Université Carleton, et M. John R. Bartle, professeur et directeur de l'École d'administration publique à l'Université du Nebraska, qui témoigne par vidéoconférence.
    Vous pourrez faire des exposés de dix minutes.
    Vous avez des contraintes de temps, monsieur Bartle?
    D'accord. Très bien.
    M. Bartle fera son exposé le premier, après quoi ce sera le tour de Mme Russell.
    Bienvenue à vous deux, et merci de nous avoir accordé du temps malgré un si court préavis. Merci plus particulièrement à Mme Russell, qui est venue malgré le mauvais temps.
    À vous, monsieur Bartle.
    Merci. C'est un grand honneur de comparaître devant vous aujourd'hui.
    Je me présente: John R. Bartle. Comme on l'a signalé, je suis professeur et directeur à l'École d'administration publique de l'Université du Nebraska à Omaha.
    Mon exposé porte sur les considérations administratives dans l'application des budgets sexospécifiques.
    Comment définir le budget sexospécifique? Pour mon propos, je le définirai comme un budget gouvernemental qui intègre explicitement les différences entre les sexes à une partie ou à la totalité de la prise de décisions sur la répartition des ressources et la production de revenus. Définition large, donc, et je crois que c'est une bonne façon d'aborder la question. Si on se tient à cette définition, on peut dire que plus d'une soixantaine de pays ont pris, aux niveaux national ou infranational de gouvernement, des initiatives budgétaires qui tiennent compte des différences entre les sexes.
    Passons directement aux leçons tirées de l'expérience d'autres pays. Il y a cinq leçons. D'abord, il faut l'adhésion des acteurs de l'État et de la société civile. C'est essentiel à la réussite de la budgétisation sexospécifique: adhésion d'un côté comme de l'autre.
    Deuxième leçon: les budgets sexospécifiques peuvent s'intégrer aux budgets de tous les ordres de gouvernement. Ils ne sont pas efficaces à un seul niveau, local, provincial, fédéral ou central.
    Troisièmement, le contexte politique et les valeurs sociales en place influent beaucoup sur l'acceptation. Dans bien des pays où ces budgets ont bien marché, c'est selon moi en grande partie parce que le contexte politique et les valeurs sociales étaient propices.
    Quatrièmement, et c'est peut-être le plus important — j'y reviendrai —, la budgétisation sexospécifique peut s'intégrer à toutes les étapes du cycle budgétaire: préparation, étude, exécution et vérification ou évaluation. Pour insister encore plus, je dirais qu'il faut vraiment l'intégrer à ces quatre étapes si on veut qu'elle donne vraiment des résultats.
    Cinquièmement, il est essentiel de pouvoir compter sur des compétences techniques et des données. À défaut, l'effort est très difficile, voire voué à l'échec.
    Voici maintenant des exemples de la façon dont la sexospécificité peut s'intégrer aux quatre étapes du cycle budgétaire. Dans la préparation du budget, pour commencer, le Trésor ou le ministère peuvent établir les objectifs en préparant la marche à suivre; comme toute série d'instructions de l'exécutif, cette marche à suivre peut faire partie du message transmis par le budget.
    Au stade de l'approbation du budget, on peut utiliser des objectifs sexospécifiques dans la législation et les crédits. Il est possible d'établir des objectifs précis dans le cadre de la législation.
    Troisièmement, au stade de l'exécution, il peut y avoir des lignes directrices sur les dépenses discrétionnaires de l'organisme. Autrement dit, l'assemblée législative peut encadrer l'utilisation des fonds discrétionnaires.
    À l'étape de la vérification et de l'évaluation, vous savez sans doute que les vérifications sexospécifiques sont assez courantes. On peut alors s'assurer que les objectifs sexospécifiques ont été respectés.
    Ce ne sont là que des exemples, et il y en a beaucoup d'autres. Dans le document que j'ai rédigé — je crois que l'attachée de recherche du comité, Mme Morgan, le connaît —, j'en donne d'autres, et je me ferai un plaisir de les expliquer davantage.
    Pour analyser les dépenses, on a besoin de certains outils, et il existe des outils de budgétisation sexospécifique. Il faut concevoir et utiliser des moyens d'analyse pour établir les effets différents des décisions financières sur les deux sexes. Le cadre conceptuel nécessaire existe depuis longtemps. Ce n'est pas si difficile. Budlender et Sharp y ont travaillé. Ils ont distingué trois catégories de dépenses pour établir les effets différents que les dépenses publiques ont sur les deux sexes.
    Ces trois catégories sont les suivantes: d'abord, les dépenses expressément désignées comme fondées sur les différences entre les sexes; deuxièmement, les dépenses axées sur des objectifs d'égalité des chances visant à modifier la composition de la population active selon le sexe; troisièmement, les dépenses que les auteurs qualifient de générales et qui sont, et de loin, les plus importantes.

  (1540)  

    Dans le cas des dépenses générales, on peut recourir à diverses techniques d'analyse. Je n'entrerai pas dans les détails pour l'instant. Je les énumère simplement. Je me ferai un plaisir d'y revenir plus tard.
    On peut faire ce qu'on appelle une analyse de l'incidence des dépenses pour voir quels sont les effets réels des dépenses sur les personnes. Il est possible d'évaluer la politique sous l'angle de l'égalité des sexes; il s'agit de considérer une politique dans un contexte plus large que celui du budget. Il peut y avoir des énoncés budgétaires attentifs aux différences entre les sexes, des énoncés qui sont un peu en marge du processus budgétaire, mais qui analysent les dépenses dans un domaine particulier. Il peut y avoir des évaluations des bénéficiaires: comment les bénéficiaires sont-ils touchés, quel est l'impact sur les femmes, les hommes, les filles et les garçons? Il y a encore les études de l'emploi du temps: comment les gens utilisent-ils leur temps et quels sont les effets des changements des politiques sur cet emploi du temps?
    Ce qui importe ici, c'est simplement de savoir qu'on peut utiliser divers moyens d'analyser les dépenses.
    Aux États-Unis, je ne suis au courant que d'une seule initiative de budget sexospécifique, jusqu'à maintenant, et c'est à San Francisco. Il y a aussi une amorce en Géorgie, mais il ne s'y est pas encore fait grand-chose.
    En avril 1998, la ville et le comté de San Francisco ont exigé des divers services une analyse sexospécifique. Aux travaux publics, on a remarqué que cela avait suscité une plus grande sensibilisation aux effets sexospécifiques de la prestation des services. Depuis l'analyse s'est appliquée à d'autres secteurs. Il y a eu un effet dans ce cas-là.
    Votre dernière séance a porté plutôt sur les revenus. Je ne m'y attarde donc pas beaucoup, sinon pour dire que, dans la plupart des analyses sexospécifiques, on s'est intéressé un peu moins aux revenus.
    La plupart des lois fiscales ne sont pas neutres à l'égard des deux sexes; elles ne tiennent pas compte, plutôt. Autrement dit, elles ont des effets, mais nous n'y faisons pas attention ou nous ne les connaissons pas. Et il est possible que, si on fait abstraction de ces différences, il y ait de graves injustices.
    Je conclus. La budgétisation sexospécifique peut-elle donner des résultats? Oui. On n'a pas besoin d'une nouvelle formule. Il n'est pas nécessaire d'emprunter une approche unique, uniforme pour l'appliquer. Elle peut s'appliquer dans toutes les formules budgétaires. Inutile d'écarter celle qui est en place pour en adopter une nouvelle. On peut se servir de celle qui est en place, et c'est utile de le faire. La sexospécificité peut être intégrée aux formules en place: budget par objets, budget fondé sur le rendement, etc.
    Les cinq leçons que j'ai énumérées tout à l'heure permettent aussi d'entrevoir les obstacles à lever. Ce sont des facteurs importants qu'il ne faut pas perdre de vue.
    Comme dans toute réforme administrative, il y a, je suis sûr que vous le savez, de nombreuses difficultés à surmonter pour assurer la pleine mise en oeuvre. Pour que la budgétisation sexospécifique s'institutionnalise, il faut qu'elle s'intègre au processus budgétaire ordinaire. S'il s'agit d'un ajout à l'extérieur du processus budgétaire, il n'y a pas une pleine intégration au tissu du budget.
    Le critère, au fond, est de voir si le budget sexospécifique peut survivre aux changements de gouvernement. Cela a toujours été le problème. Il faut justifier le travail nécessaire, mais nous avons constaté que cela fonctionne, et il me semble que, plus que toute autre chose, c'est une question d'engagement.
    Je conclus là-dessus. Merci d'avoir pris le temps de m'écouter.

  (1545)  

    Merci beaucoup, monsieur Bartle.
    Nous écouterons maintenant Mme Russell, qui a dix minutes.
    Le comité entreprend donc l'étude de la budgétisation spécifique. C'est dans cette optique qu'il faut entendre mes observations: vous envisagez toujours cette étude, mais vous n'êtes pas en train de la réaliser.
    Je suis ici, je présume, en raison de mon expérience d'économiste principale au Centre canadien de politiques alternatives, où je me suis beaucoup occupée de la préparation du budget fédéral de rechange. J'enseigne maintenant à l'École d'administration et de politique publique de l'Université Carleton. Depuis un certain temps, je suis assez loin du CCPA. Si vous avez des questions d'actualité sur lui, je peux vous aiguiller.
    Mon travail a beaucoup porté sur les budgets en soi plutôt que sur la budgétisation sexospécifique. Je n'ai pas abordé mon travail sur le budget fédéral de rechange que nous préparons avec une connaissance particulière de la budgétisation sexospécifique ni avec un certain engagement à cet égard. Je cherchais à améliorer l'élaboration des budgets en général et à préconiser des mesures fiscales et des dépenses à la fois efficaces et justes.
    J'ai constaté, en fouillant les questions budgétaires fédérales, qu'il y avait des omissions et des lacunes graves, voire débilitantes, dans la façon dont nous élaborons généralement le budget fédéral. Ces omissions sont coûteuses. Nous prenons des décisions financières de qualité inférieure et nous gâchons des idées prometteuses parce que nous n'employons pas tous les outils à notre disposition pour concevoir une politique d'intérêt public sensée. Le plus troublant, c'est qu'il est possible d'éviter ces erreurs.
    Je me suis intéressée à la budgétisation sexospécifique parce que j'y vois un excellent moyen d'améliorer la politique d'intérêt public. Il est tout à fait possible d'améliorer notablement la politique d'intérêt public au Canada au moyen d'une initiative de budgétisation sexospécifique plutôt modeste et tout à fait réalisable.
    Je vais aborder avec vous aujourd'hui trois sujets. D'abord, pourquoi vous devriez préconiser la budgétisation sexospécifique. Deuxièmement, pourquoi vous ne devez pas vous laisser dissuader par ceux qui s'y opposent. Enfin, à quelle première étape modeste et réalisable pouvez-vous songer dès maintenant?
    Premièrement, la budgétisation sexospécifique fera-t-elle une différence?
    Chaque fois que l'État perçoit des impôts ou fait des dépenses, il y a des conséquences pour tous les Canadiens, et divers groupes de Canadiens sont touchés différemment par les diverses mesures fiscales et dépenses.
    Vous le savez mieux que quiconque au Canada. Vous êtes députés. On peut bien dire que telle mesure est excellente pour les Canadiens, mais votre première réaction de députés est sans doute, il me semble, de vous demander comment elle touche votre circonscription. Chaque circonscription à ses attributs propres. Est-elle rurale? Urbaine? Quelle est la base de son économie? Est-elle très riche ou pas tellement? Tout cela compte, quand on examine les effets d'une mesure donnée.
    Pour analyser un budget du point de vue de votre circonscription, vous devez comprendre la réalité sur le terrain pour saisir les effets que la politique pourra avoir. La politique, quel que soit son objectif, sera fructueuse ou non selon la réalité qui existe sur le terrain. Or, les différences entre les sexes sont une réalité qui compte énormément sur le terrain. Les politiques peuvent couler ou fort bien réussir selon leur interaction avec la dynamique sexospécifique.
    Autrement dit, la politique peut reposer sur les meilleures intentions du monde et échouer parce quelle ne tient pas compte des différences entre les sexes. Ou une politique qui semble acceptable ou, en tout cas, pas ouvertement négative pour un sexe, peut accentuer l'inégalité et même contrecarrer d'autres objectifs politiques parce qu'on n'a pas suffisamment essayé de comprendre l'analyse sexospécifique de cette politique.
    Au Canada, toute politique visant les familles, la pauvreté, l'inégalité ou la plupart des problèmes de la population active ou encore une multitude d'autres questions importantes risque fort de rater, parfois de façon coûteuse, s'il n'est pas tenu compte des différences entre les deux sexes.
    Je me préoccupe tout à fait de l'inégalité entre les sexes. Mais même ceux qui ne sont pas convaincus de la nécessité de l'égalité au point de reconnaître l'importance de la budgétisation sexospécifique devraient tout de même être en faveur, car c'est un excellent moyen de s'assurer que toutes les politiques sont bien conçues, rentables et responsables.

  (1550)  

    Je passe au deuxième point: pourquoi ne pas vous laisser décourager par les opposants. Au cours de votre étude, vous entendrez probablement des objections. Nous n'avons pas les bonnes données, cela va coûter trop cher, ce sera trop lourd, etc. Que votre engagement à l'égard de la budgétisation sexospécifique ne fléchisse pour aucune de ces raisons. Elles ne me semblent pas convaincantes.
    Avons-nous les bonnes données? Demandez à des spécialistes qui passent leur vie à étudier des données s'ils en ont suffisamment. Ils diront toujours non, qu'il leur en faut d'autres sur ceci ou cela. En réalité, on se débrouille toujours, même si les données ne sont pas toujours idéales. Bien sûr, il vaudrait mieux en avoir plus, mais ce n'est pas gratuit.
    Vu ce que nous savons, cela ne veut pas dire qu'il faut renoncer à la budgétisation sexospécifique. Nous pourrions apporter bien des contributions importantes à la compréhension des effets de distribution de beaucoup de politiques existantes à partir des seules données que nous avons. Les problèmes de données ne sont pas une raison de ne pas se mettre à l'oeuvre.
    Cela est aussi lié à la question des coûts. Nous pourrions avoir un impact très important en acceptant des coûts supplémentaires minimes. Nous ne pourrons peut-être pas faire tout ce que nous voudrions, idéalement, ni répondre à toutes les questions, mais nous serions plus avancés qu'aujourd'hui.
    Nous pourrions concevoir des filtres sexospécifiques assez courants, faciles et assez bon marché et les appliquer aux politiques. Ils auraient l'avantage de surcroît que nous pourrions arrêter de consacrer de l'argent à des politiques qui entravent la marche vers l'égalité entre les sexes. L'élaboration du budget pourrait être plus précise et efficace, même si nous ne pouvons obtenir tout de suite tous les avantages que peut donner la budgétisation sexospécifique.
    Voici une première étape qui est possible tout de suite, et à un prix imbattable. L'impact sur l'équité entre les sexes serait très significatif. Voici ce que je propose. Au prochain budget fédéral, demandez au ministre des Finances d'ajouter au budget une page qui résumerait toutes les nouvelles mesures fiscales contenues dans le budget. Oublions les problèmes qui existent déjà dans le régime fiscal. Je m'en tiens aux nouvelles politiques fiscales qui sont adoptées. Dans cette page du budget, le ministère inscrirait le coût de chaque nouvelle réduction d'impôt et les prévisions de répartition de ses avantages selon le niveau de revenu et le sexe.
    Ce n'est pas bien compliqué. Il existe des logiciels qui facilitent l'analyse de la répartition des effets d'une réduction d'impôt. Si vous allez crier dans les couloirs de Finances Canada: « Quelqu'un connaît les logiciels dont je veux parler? », vous aurez plus de gens qu'il n'en faut pour faire cette étude en fort peu de temps.
    Les outils que nous avons aujourd'hui ne sont pas parfaits, mais nous devrions nous en servir parce qu'ils sont là et que nous pouvons faire mieux qu'actuellement. C'est une première mesure qu'il est possible de prendre dès maintenant.
    Le ministère des Finances prépare déjà des graphiques du même genre. On les trouve souvent à la fin des documents budgétaires. Tout ce que je demande, c'est qu'on ajoute le facteur d'égalité entre le sexe et l'information sur le revenu qui est facilement disponible. Ce serait un grand progrès. Il suffit d'avoir la volonté politique.
    Bien sûr, nous pourrions viser plus haut, demander davantage — il y a beaucoup plus à gagner si nous adoptons intégralement la budgétisation sexospécifique. Mais assurément, ce serait une première étape facile, et elle serait très importante.
    Merci beaucoup.
    Je veux simplement informer les membres du comité que Mme Bakker, de l'Université York, a présenté son mémoire. Comme il n'est qu'en anglais, je ne peux pas le distribuer. Malheureusement, elle n'a pu se présenter à cause du mauvais temps.
    M. Bartle a un mémoire également. Il est en anglais seulement. Il sera distribué dès qu'il sera traduit.
    Nous allons entamer la première série de questions.
    Vous avez sept minutes, madame Minna.

  (1555)  

    Merci, madame la présidente.
     Monsieur Bartle et madame Russell, je vous remercie. Nous nous sommes déjà rencontrés pour d'autres discussions et dans d'autres groupes.
    C'est très intéressant. Au Canada, nous n'avons pas fait beaucoup de budgétisation sexospécifique correcte. Nous savons que les dépenses fiscales, qui sont depuis fort longtemps une de mes marottes, désavantagent très souvent les femmes. Nous ne faisons aucune analyse sérieuse de ces mesures à long terme.
    Monsieur Bartle, vous avez parlé de divers outils d'analyse et vous avez dit une ou deux choses au sujet des dépenses. Pourriez-vous donner plus de précisions sur les outils et les compétences nécessaires à une budgétisation sexospécifique correcte? Faut-il s'attaquer à l'ensemble du budget ou pourrions-nous jusqu'à un certain point procéder secteur par secteur?
    Ce qui m'inquiète, dans l'approche sectorielle, c'est que nous risquons de ne jamais nous attaquer à tout le budget. Il faudrait quelques années. Il reste que c'est mieux que rien.
    Pourriez-vous nous en dire un peu plus long sur les outils nécessaires? Vous en avez énuméré quelques-uns, mais pourriez-vous en dire un peu plus pour que nous comprenions les besoins?
    Merci.
    Je suis d'accord avec Mme Russell. Vous pourriez emprunter des approches diverses, en utilisant d'abord les données et les informations que vous avez déjà. Il me semble que c'est la démarche la plus logique.
    Si vous vous adressez au Trésor ou à un autre service responsable et leur demandez de faire des analyses, le plus facile est d'utiliser les logiciels existants, les méthodes et données existantes pour amorcer le travail. C'est ce que je préconise, d'abord, pour que ce soit pratique et le plus simple possible.
    Je préconise une deuxième chose: utiliser différents types d'analyses ou approches adaptées aux divers secteurs de dépenses. Selon moi, c'est normal. Il y aura toujours des moyens d'améliorer le travail déjà fait. Je le répète, le point de vue de Mme Russell me semble excellent et je le reprendrais à mon compte: vous devriez commencer parce que vous avez déjà, en faisant ce que vous pouvez, quitte à apporter des améliorations au fur et à mesure.
    Quant aux analyses effectuées, certains les critiqueront peut-être, disant qu'elles auraient pu être mieux faites. C'est très bien, puisque d'autres essaieront d'apporter des améliorations.
    Voilà comment je m'y prendrais, à dire vrai.
    Monsieur Bartle, vous avez dit que, aux États-Unis, seule San Francisco applique cette approche. Malgré tout, si c'est bien fait, il vaut la peine de s'y intéresser. En dehors de San Francisco, connaissez-vous d'autres villes ou États, ou même d'autres pays qui font la budgétisation sexospécifique raisonnablement bien ou qui, au moins, nous devancent de loin, et où nous pourrions trouver non pas tant un modèle qu'un bon aperçu de ce qui se fait, une formule que nous pourrions reprendre ou adapter à notre situation?
    La Suède a fait du très beau travail, je crois. Un rapport récent du FMI explique en détail ce que ce pays et divers autres ont fait.
    En Suède, par exemple, chaque ministère doit mettre en place des mesures du rendement et des évaluations externes. Parmi les mesures de mise en oeuvre, notons la nomination de coordonnateurs stratégiquement placés de l'égalité entre les sexes, la mise en place d'un organe de coordination dans tous les ministères, une importante formation pour l'unité chargée de l'égalité entre les sexes et la formation des coordonnateurs en la matière.
    On y trouve donc diverses mesures de mise en oeuvre du processus déjà prises et dont le Canada pourrait tirer de bons enseignements.
    Merci, monsieur Bartle.
    Me reste-t-il du temps?
    Il vous reste deux minutes et demie.
    Je voudrais m'adresser un instant à Mme Russell.
    À mon avis, il est parfois plus facile d'obtenir l'adhésion, dans le milieu politique ou dans l'opinion publique, si nous pouvons démasquer les faiblesses de la politique en place ou au moins isoler le problème.
    Savez-vous si quelqu'un a fait une analyse sexospécifique de nos dépenses fiscales, si vous voyez ce que je veux dire: les divers crédits d'impôt, la politique sociale appliquée au moyen du régime fiscal? Savez-vous si on a fait une analyse de la question dans cette optique?

  (1600)  

    Il y a quelques petites choses. J'essaie de voir si le CCPA s'est penché sur la question, car je ne me souviens pas. Quelques années ont passé. Il faudrait que je vérifie, mais je crois que vous pourriez dresser sans trop de mal une liste d'ouvrages à lire sur certaines mesures.
    Pour ce qui est de l'ensemble du régime fiscal, j'ignore si vous allez trouver un ouvrage qui traite systématiquement de chaque élément. C'est peut-être là un travail que le comité devra faire: rassembler des éléments épars pour envisager le régime fiscal dans son ensemble. Il n'est pas si compliqué de passer en revue la littérature pour trouver ce qui existe déjà.
    D'accord.
    Vous nous avez donné...
    Il faudra que ce soit rapide.
    Je vais faire vite. C'est toujours difficile, mais d'accord.
    En ce qui concerne votre première étape, celle que vous qualifiez de facile, proposeriez-vous que nous prenions un ou deux ministères et que, outre les mesures fiscales, nous essayions dans le prochain budget de faire en sorte que tous les facteurs fondamentaux soient bons, dans un ministère, pour voir ensuite comment cela fonctionne?
    C'est une façon de s'y prendre, mais c'est plus ambitieux que ma première étape, qui consiste simplement à demander que soit ajoutée au budget une page d'information qui porte seulement sur ces mesures fiscales.
    Je soupçonne que l'information existe, car je ne suis pas la seule à connaître ce logiciel. Je suis convaincue que bien des gens, au ministère des Finances, font ces analyses des politiques fiscales. Je souhaite simplement qu'elles soient rendues publiques. S'ils décident ou si vous décidez qu'il serait sage d'examiner une partie donnée du budget et d'en faire une importante analyse sexospécifique, bravo. Je souhaite seulement une première étape très modeste.
    Merci.
    Merci à vous, madame Minna.
    Madame Demers, vous avez sept minutes.

[Français]

    Merci, madame la présidente.
    Monsieur Bartle, madame Russell, je vous remercie d'être parmi nous aujourd'hui.
    Monsieur Bartle, vous dites que la budgétisation selon les genres doit se faire à tous les paliers gouvernementaux: au niveau municipal, au niveau de l'État, pour les États-Unis, et au niveau fédéral, pour le Canada.
    Une soixantaine de pays font déjà leur budgétisation selon les genres. Dans ces pays, selon votre expertise et votre expérience, quelles sont les méthodes les meilleures, les plus efficaces et qui donnent les résultats les plus concrets? Parmi ces méthodes, lesquelles seraient les mieux adaptées au contexte nord-américain ou canadien? Si on arrêtait de parler d'analyses, quelles mesures devrions-nous intégrer aux budgets pour que les femmes et les hommes en profitent?

[Traduction]

    Merci.
    Je ne crois pas que cela doive se faire à tous les niveaux de gouvernement. J'ai dit que cela pouvait ou pourrait se faire à tous les niveaux. Il n'est pas obligatoire que ce soit à tous les niveaux; une petite ville ou une petite province pourrait le faire sans grande difficulté.
    Quel pays a le meilleur modèle? Je ne crois pas que quiconque en soit à un stade assez avancé pour pouvoir dire que le budget est vraiment favorable à l'égalité des sexes, que cela a eu une influence à long terme et de façon uniforme.
    L'Australie a amorcé le mouvement. L'Afrique du Sud a suivi. Les Philippines en ont fait autant, à peu près au même moment. Mais dans ces cas, l'effort n'a pas été maintenu. Cela n'a pas duré.
    La Suède a proposé quelque chose de nouveau et, comme je l'ai dit, cela semble très prometteur. Mais cela peut-il durer? C'est la vraie pierre de touche. La question reste ouverte.

  (1605)  

[Français]

    Merci, monsieur Bartle.
    Madame Russell, j'ai bien aimé votre idée d'insérer seulement une page pour expliquer les répercussions des compressions dans les taxes ou les impôts, afin que les gens se rendent compte de l'effet réel que cela avait dans leur vie. On pourrait faire la même chose avec les crédits d'impôt. Je pense, par exemple, au Plan universel pour la garde d'enfants de 1 200 $. On verrait quel effet réel cela a sur la vie des femmes ou des hommes.
    Par exemple, les femmes sont souvent des aidantes naturelles et des gardiennes d'enfants. Elles font bien des choses qui ne sont ni rémunérées ni comptabilisées. Comment peut-on tenir compte de cela quand on pense à faire un budget en tenant compte des genres?

[Traduction]

    À propos du travail non rémunéré que les femmes accomplissent souvent, les budgets peuvent avoir des effets de bien des façons.
    Voici un exemple. Dans le cas de la garde des enfants — assurée sans rémunération à la maison ou, contre paiement, dans une garderie —, la disponibilité de programmes gouvernementaux qui facilitent l'accès aux garderies a un effet sur le travail non rémunéré des femmes à la maison. Par exemple, elles peuvent décider de confier les enfants à la garderie et peut-être d'aller sur le marché du travail, ce qui ne serait pas possible si le coût des garderies était exorbitant.
    Voilà un exemple concret de la façon dont une politique gouvernementale peut influencer les choix des femmes, qui doivent faire un choix entre la garde non rémunérée à la maison et la garderie.
    Diverses politiques peuvent avoir d'autres effets sur les différents travaux non rémunérés qui se font dans l'économie: soin des personnes handicapées ou âgées, garde des jeunes enfants, etc.

[Français]

    En somme, vous dites qu'on ne peut pas penser réduire une taxe ou donner un crédit d'impôt sans s'assurer d'avoir les structures nécessaires pour permettre aux personnes de choisir ce qu'elles veulent une fois la taxe réduite ou le crédit d'impôt accordé.
    On revient toujours à la base: au développement social, aux structures des services de garde, aux logements abordables et à l'éducation facilement accessible. Tout cela doit aller de pair. On ne peut pas seulement réduire les taxes ou accorder des crédits d'impôt. Il faut aussi considérer l'autre côté, quand on prend de telles mesures.

[Traduction]

    Il y a différentes façons d'aborder les problèmes. L'une d'elles est de recourir au régime fiscal. Il peut aussi y avoir des dépenses qui permettent de s'attaquer à tel ou tel problème.
    La question se résume donc à savoir ce qui serait le plus efficace, le plus rentable pour le gouvernement et le plus efficace pour les bénéficiaires visés. On peut se demander par exemple quelle est la meilleure façon d'assurer la garde des enfants.
    Il faudrait vous mettre à l'oeuvre et voir qui profite de tel ensemble de choix politiques par opposition à un autre ensemble. Je vous garantis que, quand on commence à fouiller, on constate que certaines politiques tendent à appuyer certains groupes plutôt que d'autres. Lorsqu'on choisit une orientation, on a tendance, qu'on l'admette ou non, à appuyer certaines personnes plutôt que d'autres.
    Pour rendre des comptes, il est utile d'avoir toute l'information sur ceux qui sont les bénéficiaires probables. Vous proposez une réduction ou un crédit d'impôt? Dites qui, probablement, en retirera quel montant. Vous proposez une dépense? Montrez-nous l'analyse qui montre qui, probablement, en tirera profit. Alors, tout le monde aura l'information voulue.

  (1610)  

    Merci, madame Russell.
    C'est maintenant à M. Stanton. Sept minutes.
    Merci, madame la présidente.
    Bonjour aux deux témoins. Il est remarquable d'avoir deux universitaires, l'une ici, et l'autre en communication avec nous, M. Bartle, depuis l'université.
    Je vous pose à tous deux la question suivante et je le fais en une ou deux minutes, si j'y parviens. J'espère qu'il restera un peu de temps à la fin de la séance. La question peut sembler simple, mais nous entreprenons une étude sur la budgétisation sexospécifique. Nous avons eu jusqu'à présent un aperçu de ce que pourrait être ce processus.
    Comment décririez-vous au mieux le résultat attendu d'un budget sexospécifique? Qu'essayons-nous de faire, sous l'angle de la politique d'intérêt public? Comment saurons-nous que l'objectif est atteint, que le processus d'élaboration des budgets est ce que nous recherchions?
    Je m'adresse d'abord à Mme Russell, puis à M. Bartle.
    Il y a bien des façons de répondre. Je dirais que ma grande priorité serait d'avoir l'information voulue pour que nous connaissions les conséquences des politiques qui tiennent compte des différences entre les sexes.
    Nous pourrions aller plus loin et fixer une sorte d'objectif. Une fois toute l'information réunie, nous dirions que notre objectif est celui-ci ou celui-là. Vous auriez tous un résultat préféré à proposer en matière d'égalité entre les sexes.
    Pour l'instant, je ne parle pas de ce résultat de prédilection. Je demande qu'on veuille bien nous fournir l'information au sujet de l'impact des politiques sur les Canadiens, selon le sexe. Puis, nous aurons un débat public complet. Pour tenir un débat démocratique, il nous faut l'information. Autrement, nous ne faisons que lancer de banalités sur ce que nous souhaitons avoir en place. Nous ne connaissons pas les faits.
    Selon moi, le ministère des Finances a actuellement beaucoup d'outils à sa disposition pour nous donner plus d'information que nous n'en avons maintenant sur les effets des politiques. Pourquoi ne pas rendre cette information publique? Nous en discuterions tous.
    D'accord. Très bien.
    Monsieur Bartle?
    Ma réponse me semble fort simple. Selon moi, vous devriez vous demander si l'innovation a modifié les fondements de la prise des décisions budgétaires.
    Dans un bon processus budgétaire, à mon avis, la bonne information influence au bon moment les bons décideurs. Cela ne veut pas dire qu'il y aurait des résultats concrets particuliers. Il se pourrait que les gens décident: « Il y a des injustices, mais elles nous semblent acceptables. » Ce n'est pas ce que je souhaite, mais c'est possible.
    L'essentiel est que le processus permette d'envisager la bonne décision. Selon moi, vous pourrez dire que l'objectif est atteint lorsque vous aurez l'impression que l'innovation de la budgétisation sexospécifique a eu un effet sur les modalités de l'élaboration du budget.
    J'ai une autre question qui fait suite, monsieur Bartle. Au cours de votre exposé, vous avez parlé de l'« incidence des dépenses ». Je crois que vous parliez des dépenses plutôt que des revenus prévus dans le budget.
    Qu'entendiez-vous par cette expression?
    Je fais une distinction entre « impact » et « incidence ». Le premier est l'effet initial de l'affectation des ressources. L'incidence désigne l'effet à long terme de leur utilisation et de la répartition des avantages.
    Par exemple, si on avait une clinique de santé pour la mère et l'enfant qui n'avait que du personnel masculin — peu probable, mais c'est une hypothèse — l'impact initial serait que tout l'argent serait dépensé pour le salaire des hommes, le matériel, etc.
    Mais l'incidence pourrait être, on l'espère, un avantage important pour les femmes et les enfants.
    L'impact peut donc être différent de l'incidence, sous l'angle de l'égalité entre les sexes.
    D'accord.
    Me reste-t-il du temps?
    Oui, il vous reste deux minutes et 45 secondes.
    Très bien. Je n'ai pas l'habitude de cette longue période pour poser des questions. Merci.
    Madame Russell, vous avez évidemment eu des échanges avec le ministère des Finances au fil des ans, je présume, et établi des contacts. Êtes-vous au courant de certaines des mesures que le Canada a prises depuis un certain temps pour aborder sous l'angle de l'égalité des sexes l'élaboration des budgets et la planification budgétaire?

  (1615)  

    Au ministère des Finances?
    Oui.
    J'ai eu des conversations au cours desquelles on m'a expliqué qu'il se passait des choses. Je n'ai cependant vu aucun rapport ni quoi que ce soit qui me montre concrètement ce qui se passe au juste. J'hésite donc à répondre. On m'a dit qu'il se passait quelque chose, mais je ne sais pas trop en quoi consiste ce quelque chose.
    Vous avez parlé dans votre exposé du début de l'ajout au budget d'au moins une page qui donnerait certains renseignements. Quelle assurance en retireriez-vous, sachant qu'il a été tenu compte des différences entre les sexes dans le budget? En examinant un budget, à quoi reconnaîtriez-vous tout à coup que ce processus sexospécifique a été appliqué?
    Au strict minimum — c'est fort simple —, je verrais un tableau. Une réduction d'impôt donnée serait décrite et on en préciserait le coût. Puis, il y aurait un tableau, avec les hommes d'un côté et les femmes de l'autre, et ensuite diverses catégories de revenu. Les femmes qui gagnent moins d'un certain montant par année recevraient tant d'argent et les hommes de la même catégorie de revenu tel autre montant. Le tableau me donnerait une comparaison pour toutes les catégories de revenus.
    Au bas du tableau, je verrais la valeur que cette réduction d'impôt représente et comment elle se répartit entre les hommes et les femmes.
    D'accord.
    Il ne me reste qu'une question, cette fois pour M. Bartle.
    Lorsque nous entamerons cette étude, quels sont les principaux domaines qu'il faudrait nous assurer d'aborder dans les mois à venir? Quelles questions clés devrions-nous aborder avec les témoins au cours de l'étude?
    Le plus important, selon moi, sera la façon de tenir compte de toutes les étapes du processus budgétaire. Je n'ai pas à vous dire qu'il ne sert pas à grand-chose que l'exécutif énonce des objectifs dans le budget qu'il remet à l'assemblée législative et qu'on s'arrête là. À l'inverse, il ne sert pas à grand-chose non plus de vérifier si les objectifs en matière d'égalité entre les sexes ont été atteints quand, au départ, il n'y avait pas d'objectifs.
    Il importe de considérer toutes les étapes depuis le début, lorsque l'exécutif élabore le budget, puis le soumet à l'assemblée législative, qui l'adopte. Il faut étudier explicitement cette étape également.
    Et puis, l'élément le plus important peut-être, et qui est souvent oublié, c'est ce qui se passe dans les organismes. Lorsqu'ils reçoivent l'argent à dépenser, tiennent-ils compte des objectifs à atteindre? Est-ce qu'il en est tenu compte dans leur prise de décisions? Ce sont eux qui dépensent l'argent, qui font les chèques. C'est donc très important.
    Dans d'autres pays, on a beaucoup progressé en ce qui concerne les vérifications sexospécifiques. Cela me semble plutôt simple. N'importe quel bon vérificateur peut être à l'affût. Si un organisme ne donne pas cette information, il n'est pas conforme, et cela attire l'attention de n'importe quel organisme.
    Merci, monsieur Bartle.
    Nous allons passer à Mme Mathyssen, qui a sept minutes.
    Merci, monsieur Bartle et madame Russell. Vous nous faites profiter de vos compétences exceptionnelles. Je vous suis très reconnaissante de votre présence et de votre aide.
    Je vais poser un certain nombre de questions auxquelles vous pouvez répondre tous les deux, si cela convient, mais si vous n'êtes pas à l'aise pour répondre, c'est très bien aussi.
    Monsieur Bartle, j'ai trouvé très intéressante votre description de la Suède. Vous avez dit que ce pays avait fait du bon travail. Je crois comprendre qu'il reste du travail à faire, et nous ignorons les résultats, mais, pour l'instant, y a-t-il eu une amélioration notable, des changements, un impact sur l'économie suédoise, des avantages d'ordre social découlant du travail de budgétisation sexospécifique?
    J'ignore la réponse et je crois qu'il serait difficile de la trouver, notamment parce qu'il y a deux choses qui se passent: les changements sociaux qui entraînent la mise en place et l'adoption de la budgétisation sexospécifique et, par ailleurs, l'effet de cette budgétisation sur les conditions sociales et l'économie.
    Il serait donc un peu difficile de débrouiller tout cela. Dans le cas de la Suède, je ne sais pas si les Suédois ont pu tirer une conclusion dans un sens ou dans l'autre.

  (1620)  

    Très bien.
    Vous avez dit dans votre exposé que les budgets ne tiennent pas compte des différences entre les sexes, et d'autres témoins ont dit la même chose au comité.
    Pourquoi le Canada devrait-il envisager la budgétisation sexospécifique? Pourquoi aller de l'avant si nous ignorons dans quelle mesure la Suède a réussi et si nous ne sommes pas sûrs des résultats?
    Le mot le plus simple est « équité ». Si vous estimez que la politique de l'État doit être équitable, que les budgets doivent tenir compte de critères comme les objectifs en matière d'équité, si l'égalité entre les sexes est un sujet particulier de préoccupation, alors je crois qu'il faut aller de l'avant.
    Dans les budgets de programme, on dit que, si on ne tient pas le pointage, on ne joue pas vraiment le jeu. Je dirais la même chose ici. Si on ne contrôle pas les progrès accomplis vers les objectifs, comment peut-on savoir si ces objectifs sont atteints?
    Cela déborde un peu votre question, mais j'ajouterais que cela vaut non seulement pour l'équité entre les sexes, mais aussi pour tous les types d'équité, qu'il s'agisse de la race, des classes, des régions, etc.
    Merci.
    Ma prochaine question s'adresse plutôt à Mme Russell. Vous avez parlé des premières étapes et des logiciels disponibles. Avez-vous fait de la modélisation? Si vous avez utilisé ces logiciels, pourriez-vous nous donner une idée de la différence qu'ils pourraient faire, des exemples bons ou mauvais concernant la politique d'intérêt public?
    Bien sûr. Diverses mesures fiscales adoptées récemment ou encore envisagées ou débattues dans l'espace public n'ont pas d'effets évidents... À première vue, en tout cas, on ne dirait pas qu'il y a un lien avec l'égalité entre les sexes.
    En guise d'exemple, et je crois qu'il en a été question aux dernières élections, prenons la possibilité de réduire l'imposition des gains en capital. À première vue, on ne dirait pas qu'il y a une connotation particulière pour l'égalité entre les sexes, sauf si on peut discerner comment se répartissent les gains en capital. Est-il plus probable que ce soient des hommes ou des femmes qui ont des actifs à vendre à profit, réalisant ainsi un gain en capital?
    Si on peut faire des recherches qui montrent qui profitera probablement de la réduction d'impôt, on distinguera des différences entre les sexes. On aura alors un point de vue différent à faire valoir dans le débat sur ces propositions de politique.
    Les divers outils disponibles aident à faire l'analyse de ces mesures avant de les adopter. On peut prévoir les conséquences possibles pour l'équité entre les sexes.
    Je voudrais faire appel à vos compétences dans l'élaboration de budgets de rechange. L'une de mes questions porte sur la politique actuelle en dépenses sociales. Je m'interroge sur les 100 $ pour la garde des enfants, l'absence de politique nationale du logement, l'assurance-emploi, l'impact des modifications apportées à l'assurance-emploi sur les divers groupes de la société. Si nous avions pratiqué la budgétisation sexospécifique, y aurait-il des différences? Lesquelles?
    Bien sûr. Si nous avions analysé ces politiques sous l'angle de l'équité entre les sexes avant de les lancer, et si nous avions accordé une grande valeur à cette équité, nous les aurions conçues autrement.
    On pense par exemple à toute politique touchée par la différence dans la participation à la population active des hommes et des femmes. Il arrive plus fréquemment que les femmes se retirent de la population active à cause de la naissance des enfants, des soins à dispenser aux jeunes enfants ou aux handicapés, par exemple. Leur vie de travail semble différente de celle des personnes dont la participation est constante, du début jusqu'à la retraite.
    Il peut y avoir un effet sur toutes les politiques qui sont fondées sur la durée de la présence dans la population active, comme l'assurance-emploi. Il y a aussi un effet sur l'importance des contributions à des REER, si le travail est constamment interrompu. Donc, si on considère les choses sous l'angle de l'égalité entre les sexes, il y a une énorme différence.

  (1625)  

    Que pensez-vous de la garde des enfants et du logement?
    Le même point de vue s'applique, mais il faut ajouter qu'il y a souvent aussi un lien. Les décideurs doivent choisir les moyens à employer. Nous sommes souvent d'accord sur les objectifs fondamentaux. Le problème, c'est la façon de les atteindre. La question qui surgit souvent est celle de savoir s'il vaut mieux, pour atteindre l'objectif, proposer une réduction d'impôt ou des dépenses.
    Offrir une réduction d'impôt, c'est choisir de ne pas dépenser. On réduit les revenus de l'État, ce qui écarte la possibilité de consacrer à autre chose les revenus sacrifiés. Ce qu'il faut prouver, c'est que la réduction d'impôt permettra d'atteindre l'objectif mieux qu'une dépense.
    Dans bien des cas, il est très difficile de se prononcer. Il est solidement établi que, très souvent, les dépenses publiques sont préférables aux réductions d'impôt comme moyen d'atteindre les objectifs. Si nous possédions une panoplie complète d'outils de budgétisation sexospécifique, la discussion s'appuierait sur une information beaucoup plus fouillée que maintenant. Mais je parie tout de même que, pour toutes ces choses, les dépenses sont préférables aux réductions d'impôt.
    Merci, madame Russell.
    Merci à vous, madame Mathyssen.
    Nous passons au deuxième tour de questions. M. Pearson a cinq minutes.
    Merci, madame la présidente.
    Madame Russell, merci d'être là.
    Le comité a beaucoup réfléchi aux coûts de l'implantation de la budgétisation sexospécifique. Nous savons que c'est coûteux. Par ailleurs, mes collaborateurs et moi avons considéré le point de vue d'organisations comme l'ONU, le FMI et la Banque mondiale. Toutes, elles voient dans ce type de budgétisation un moyen d'accroître la productivité des économies. Le PIB serait supérieur et augmenterait plus vite si les hommes et les femmes pouvaient exploiter pleinement leur potentiel économique et productif dans la société.
    Vous parlez de l'information nécessaire. Je conviens que plus il y en a, mieux c'est. Nous amorçons ici une démarche. Si nous adoptons ce processus et l'intégrons au budget, croyez-vous que les avantages l'emporteront sur les coûts? Il est difficile de le dire, vu le chemin à parcourir, mais quels indicateurs utiliseriez-vous pendant ce parcours?
    Si le comité décide de s'engager dans cette voie et veut pouvoir convaincre, il doit être en mesure de dire aux gens que les résultats seront tels ou tels. Nous sommes conscients de la valeur inhérente du principe, mais nous sommes en politique, et il faut montrer que cette proposition peut faire une différence.
    Avez-vous des réflexions à nous livrer à ce propos?
    Je crois que des gens font ce genre d'analyse. Je suis convaincue que vous pouvez trouver des témoins qui vous expliqueront leur démonstration des coûts et avantages de ces mesures.
    Souvent, l'un des problèmes, c'est que le coût du travail est payé sur le budget d'aujourd'hui, alors que les avantages ne viennent que plus tard. Il se peut que le gouvernement au pouvoir ne perçoive pas les avantages s'il se préoccupe des résultats immédiats plutôt que des résultats qui se concrétiseront plus tard. C'est là une difficulté. J'espère que nous n'aurons pas une attitude à courte vue. Tolérer le manque d'équité entre les sexes à cause des résultats financiers immédiats, c'est très cher payer.
    Deuxièmement, nous ne disons jamais que la reddition des comptes par le gouvernement coûte trop cher, que nous n'allons plus nous en préoccuper. Il serait scandaleux que les parlementaires disent: « Nous n'allons pas nous préoccuper de la façon de dépenser l'argent parce qu'il est très long d'exercer un contrôle. » Politiquement, ce n'est pas acceptable. Ce ne devrait pas l'être davantage de dire que nous sommes prêts à tolérer que l'inégalité entre les sexes se perpétue parce que nous ne voulons pas accorder d'attention à cette analyse.
    Très bien, j'espérais vous l'entendre dire. Je suis d'accord.
    Monsieur Bartle, c'est fascinant, car nous parlons ici de politique. Vous avez parlé d'un des vrais problèmes que nous éprouverions si nous appliquions l'analyse sexospécifique, soit de la maintenir malgré les changements de gouvernement. Vous avez parlé de l'Australie, de l'Afrique du Sud et des Philippines, où on a commencé à faire ce travail, mais où on a progressivement laissé tomber.
    Si nous nous engagions dans cette voie, auriez-vous des moyens à nous proposer pour assurer la pérennité de cette initiative? Ce n'est pas juste une idée en l'air; nous serions en mesure d'assurer la survie de l'initiative malgré les changements de gouvernement.

  (1630)  

    C'est le plus grand défi de toute réforme budgétaire, et pas seulement du point de vue de l'égalité entre les sexes. Un certain nombre de présidents américains sont arrivés en disant: « J'ai un nouveau système budgétaire. Nous allons nous en servir, et les choses vont s'améliorer. » Jimmy Carter a proposé les budgets base zéro. Lyndon Johnson et John Kennedy ont proposé la rationalisation des choix budgétaires, etc. Le budget de programme est lié surtout à Clinton.
    Il existe une tendance politique inhérente à rejeter l'approche du prédécesseur et à proposer quelque chose de neuf qui vous plaît et sera efficace, surtout, pour parler bien franchement, lorsqu'il s'agit d'escamoter le délicat problème politique d'offrir plus de programmes sans augmenter les impôts.
    Par ailleurs, quand nous nous arrêtons à y penser, dans n'importe quelle méthode financière, nous ne cessons pas de faire des vérifications et des affectations; nous n'arrêtons pas de les analyser. En un certain sens, si on considère les innovations qui ont réussi, qui sont simplement des choses comme les budgets par objet de dépense et la vérification et tous les éléments du système normal, on voit qu'elles s'intègrent aux normes professionnelles.
    Par exemple, les comptables savent ce qu'est une bonne base comptable pour analyser un budget gouvernemental. C'est peut-être ce que vous visez, en fin de compte, c'est peut-être votre objectif.
    La question la plus difficile est celle de la pérennité. Là encore, j'essaierai d'intégrer cette innovation au tissu même de l'organisation, et de le faire à toutes les étapes du processus budgétaire. Mais il est vrai que c'est une tâche difficile.
    Merci, monsieur Bartle.
    Merci, monsieur Pearson.
    Nous entendrons Mme Grewal, qui a cinq minutes.
    Merci, madame la présidente.
    Merci, monsieur Bartle et madame Russell, de votre temps et de vos exposés.
    Si le gouvernement fédéral implantait la budgétisation sexospécifique, quels seraient, d'après vous, les objectifs précis à poursuivre? L'un ou l'autre d'entre vous peut répondre.
    Ce que j'ai proposé, c'est une première étape, qui me semble plutôt modeste: qu'on nous donne une ventilation selon le sexe des effets de toute nouvelle réduction d'impôt. Vous pouvez et vous devriez aller plus loin et arriver à une sorte de fiche qui montre les résultats des différentes politiques pour chacun des deux sexes. Cela est particulièrement vrai pour les nouvelles politiques, car lorsqu'il y a une nouvelle politique, il est possible de s'y prendre correctement dès le départ, au lieu de corriger quelque chose qui a été mal fait il y a déjà un certain temps.
    Appliquez l'analyse aux nouvelles politiques. Demandez quelles sont les conséquences sexospécifiques d'une nouvelle politique. S'il s'agit d'une mesure fiscale, qui profite de la réduction d'impôt? Si c'est une dépense, qui en profite? Ce n'est qu'un début. On peut perfectionner l'approche, mais c'est un bon début.
    Monsieur Bartle, êtes-vous au courant de mesures que le Canada a prises pour promouvoir l'idée de la budgétisation sexospécifique?
    Je ne suis pas en mesure de parler de ce qui se passe au Canada, mais j'ai trois idées à proposer.
    Premièrement, vous devriez définir les objectifs d'équité entre les sexes dans des programmes précis et faire ensuite une vérification.
    Deuxièmement, à propos des subventions que le gouvernement fédéral verse aux gouvernements provinciaux ou locaux ou encore aux ONG, j'exigerais que, dans leurs rapports, ils disent s'ils ont atteint ou non des objectifs d'équité entre les sexes.
    Enfin, il faudrait former les analystes. L'idéal serait de constituer tout un groupe d'analystes qui en formeraient ensuite d'autres dans les organismes pour que chacun sache comment s'y prendre. Si on ne sait pas comment, il est difficile de se conformer.
    Madame la présidente, me reste-t-il du temps?
    Plus de deux minutes.
    Je présume que l'hypothèse sous-jacente de la budgétisation sexospécifique est que la politique n'a pas les mêmes effets sur les deux sexes. Les programmes profitent plus à l'un qu'à l'autre, et dans l'ensemble, les hommes l'emportent. Si nous reconnaissons que c'est un fait, faudrait-il accepter aussi que le meilleur moyen de rééquilibrer la politique de l'État est la budgétisation sexospécifique?
    L'un ou l'autre d'entre vous peut répondre.

  (1635)  

    À bien des égards, l'expression « budget sexospécifique » laisse à désirer, en un sens. Elle laisse entendre que le budget est désormais tout à fait différent, qu'il est élaboré différemment et que maintenant, il est...
    Certains d'entre vous ont parlé de l'optique de l'égalité des sexes, ce qui me semble juste. Selon moi, c'est une approche de l'analyse budgétaire et de la répartition des fonds et il s'agit d'un point de vue particulier pour les examiner. Mais, je le répète, cette analyse peut s'adapter à toutes les modalités budgétaires existantes.
    Si j'étais responsable de l'élaboration du budget de votre gouvernement central, je me demanderais: « Qu'est-ce que je fais maintenant? Est-ce qu'il faut que je modifie notre formule de budgétisation? »
    S'il n'est pas nécessaire de modifier les modalités pour se conformer à l'analyse sexospécifique, la tâche est beaucoup plus facile pour les analystes et les responsables des organismes. Je vous exhorte à suivre la démarche la plus simple possible, à utiliser l'analyse comme un filtre, une approche, une méthode d'analyse, mais ce n'est pas vraiment une formule différente.
    Nous avons presque terminé.
    Madame Freeman, vous avez cinq minutes.

[Français]

    Monsieur Bartle et madame Russell, je vous remercie d'être là et de nous avoir fait vos présentations.
     Monsieur Bartle, quelles ont été les premières mesures prises par les gouvernements qui ont entrepris une analyse budgétaire comparative des sexes? Vous nous avez donné des idées et vous nous avez indiqué ce par quoi nous devrions commencer.
    Est-ce par cela que les autres pays ont démarré leur recherche?

[Traduction]

    Je suis désolé, mais je n'ai pas compris la question.

[Français]

    Quelles ont été les premières mesures prises par les gouvernements qui ont entrepris des analyses budgétaires comparatives des sexes dans des budgets sexospécifiques? Avec quels données ont-ils commencé?
    Le comité se lance dans une étude qui ratisse assez large, et on doit essayer de ramener cela dans un domaine concret et être le plus efficace possible.

[Traduction]

    Je crois que les premières mesures ont été prises en Australie, où on a simplement analysé les programmes existants; cette analyse devait livrer des précisions sur les données à recueillir, qu'il s'agisse de données existantes à préciser ou de nouvelles données. Puis, en Afrique du Sud, on est resté un peu plus en marge du processus budgétaire. C'était plutôt une analyse faite par des groupes de l'extérieur, des groupes de la société civile dans le cadre de leur étude du budget, mais cela ne faisait pas vraiment partie du processus budgétaire de l'État.
    Dans ces cas-là, ce sont les premières mesures caractéristiques qui ont été prises.

[Français]

    L'Australie et l'Afrique du Sud ont donc utilisé deux façons différentes d'obtenir les données. D'après vous, qu'est-ce qui a été le plus efficace?
     Dans le cadre de ce comité-ci, quel genre de témoins, quel genre d'experts pourraient venir nous aider à préparer un travail qui nous permettraient d'atteindre les objectifs visés?

[Traduction]

    Il ne s'agit pas tant de recueillir les données que de décider de se mettre à l'oeuvre. Les données peuvent être utiles, mais, comme Mme Russell l'a dit tout à l'heure, vous pouvez faire une analyse à partir des données existantes. Vous constateriez peut-être qu'il faut de nouvelles données, mais je commencerais par l'analyse au lieu d'attendre que les données arrivent.
    Les premières mesures les plus efficaces? Qui il faudrait entendre d'abord? Franchement, je m'adresserais aux fonctionnaires chargés des finances et je leur demanderais: « Que vous faudrait-il pour faire ceci? Avez-vous besoin d'une formation? De plus d'information? Vous faut-il aller rencontrer les représentants des ministères du Trésor à l'étranger pour savoir ce qu'ils ont fait? »
    Du point de vue de l'administration publique, qui est mon domaine, je dirai que si on veut qu'ils fassent ce travail, ils doivent savoir comment s'y prendre et pouvoir le faire.
    Voilà par où je commencerais.

  (1640)  

[Français]

    D'accord. Dans votre exposé, vous avez dit qu'à San Francisco, cela avait été mis en place en 1998. Depuis ce temps, y a-t-il eu des résultats de la mise en place de ce mécanisme de budget sexospécifique?

[Traduction]

    Je crois savoir qu'ils ont commencé par étudier des programmes particuliers. Ils ont examiné six ministères et fait une certaine analyse des programmes pour en vérifier l'impact sur les deux sexes.
    Je ne connais pas tous les détails, mais je crois comprendre qu'il ne s'agissait pas d'un budget sexospécifique au sens où ils se seraient attaqués à l'ensemble du budget pour analyser l'impact sur les deux sexes. L'approche a été plus fragmentaire. C'était plutôt une analyse sexospécifique de dépenses particulières de certains ministères plutôt qu'une approche budgétaire globale.
    Votre temps de parole est terminé.
    J'ignore pourquoi le timbre retentit. Nous allons vérifier. Nous pouvons poursuivre avec la question...
    Une voix: Non, ce n'est rien.
    Ce n'est rien?
    On nous dit que quelqu'un a appuyé sur le bouton par erreur.
    Nous pouvons poursuivre. Madame Mathyssen, vous avez cinq minutes.
    Merci, madame la présidente. On dirait que, par ici, on appuie sur beaucoup de boutons sans raison.
    Je voudrais poser une question sur la CEDEF, la Convention de l'ONU sur l'élimination de toutes les formes de discrimination à l'égard des femmes. J'ignore dans quelle mesure vous vous sentirez à l'aise pour répondre à ces questions, mais le comité a envisagé d'examiner la réponse du Canada aux engagements pris, aux obligations contractées aux termes de cette convention.
    D'abord, si vous connaissez la CEDEF, pourriez-vous nous donner une idée des raisons pour lesquelles ces engagements ont été pris? Que supposent-ils? Quelle était la grande raison d'être du protocole de la CEDEF?
    Je ne peux pas répondre.
    Je dois avouer mon ignorance. Je ne connais pas les détails.
    Dans ce cas, je vais passer à autre chose à propos de l'information que vous avez présentée. Elle est très abondante et il y a bien des choses que nous devrons étudier et assimiler.
    Y a-t-il quelque chose que nous n'avons pas demandé? Quelque chose, dans ce processus, que nous avons négligé et sur quoi vous voudriez donner un complément d'information?
    Trois choses, je dirais. Pour faire ce travail, il faut des coordonnateurs bien placés dans les différents organismes. Il faut quelqu'un dont c'est le rôle, au moins en partie, pour que les gens de l'organisme ou du ministère sachent à qui s'adresser s'ils ont des questions à poser. Il est utile que ce soit un membre de l'organisation plutôt que quelqu'un d'un service central.
    Deuxièmement, il doit y avoir coordination entre les ministères. Certes, il faut accepter différents types d'analyses aux divers endroits, mais il faut tout de même une coordination. Il faut que tout se retrouve dans un même ensemble de chiffres. Si un organisme fait quelque chose de très différent, il peut y avoir des complications. Si l'objectif ultime et d'avoir un plan budgétaire complet — ce qu'est un budget, me semble-t-il, un plan complet des dépenses et des revenus à percevoir —, il faut qu'il y ait coordination entre les organismes sur la façon de s'y prendre.
    Enfin, je ne saurais trop insister sur l'importance de la formation. Je l'ai constatée dans bien des choses, en dehors des budgets. Si les gens ne savent pas comment remplir les formulaires, ils peuvent bien consigner des chiffres et faire des rapports, mais qui sait au juste dans quelle mesure ce sera utile? Il faut une sorte d'éducation, de perfectionnement professionnel, en fait, pour que les préposés au travail sachent comment s'y prendre et discutent entre eux. Il faut qu'il y ait un échange d'idées et une sorte d'amélioration ou de perfectionnement professionnel constant.

  (1645)  

    Merci.
    Je voudrais souligner une chose que M. Bartle a dite, à propos de l'importance de l'engagement initial.
    Je suis persuadée que vous entendrez beaucoup de témoins très enthousiastes qui vous diront une foule de choses importantes. Après, vous ne saurez pas au juste quoi faire, car il y a dans ce domaine beaucoup d'incertitudes. Prenez la décision tout de suite. Nous allons apprendre en nous lançant dans l'entreprise, nous allons apprendre par la pratique. Il y bien des personnes accomplies qui occupent des postes à Ottawa, des personnes qui peuvent travailler intensément dans ce dossier et à qui on n'a pas encore confié le défi de débrouiller cet écheveau compliqué. Mais si vous prenez l'engagement, si vous voulez l'information, des choses merveilleuses vont se produire lorsque les gens mettront la main à la pâte.
    Je ne me laisserais pas dissuader, même si les témoins que vous entendrez au cours des prochaines semaines et des prochains mois n'ont pas de réponses magiques pour vous. Nous n'avons pas besoin de réponses magiques. Seulement d'engagement et nous nous débrouillerons.
    Merci.
    Madame Boucher.

[Français]

    Je salue nos deux invités et je les remercie de s'être déplacés. C'est très intéressant.
    Monsieur Bartle, une fois qu'un pays a implanté un budget tenant compte des genres, comment un gouvernement peut-il mesurer et suivre l'efficacité de ce genre de budget?

[Traduction]

    Je serais porté à revenir à ma réponse de tout à l'heure. Il faut voir si les fondements de la prise de décisions ont changé, si le processus de prise de décisions a changé.
    Ce n'est pas facile à étudier, ce n'est pas facile de savoir, car je présume qu'on ne sait pas ce qui se serait passé autrement. Mais, à mes yeux, c'est ainsi que vous pouvez savoir si l'initiative a donné des résultats, si cela valait le temps et les efforts que vous y aurez mis.

[Français]

    D'accord. Vous avez dit que certains pays avaient commencé la budgétisation selon la spécificité des sexes et que les efforts n'étaient pas soutenus.
    Selon vous, pourquoi les efforts ne sont-ils pas soutenus? Quelles sont les principales contraintes auxquelles les pays qui ont adopté ce genre de budget ont été confrontés?

[Traduction]

    Dans bien des cas, c'était parce que les objectifs des dirigeants ont changé et que le niveau d'engagement à l'égard de l'équité entre les sexes, au moins sous la forme de l'analyse sexospécifique des budgets, n'a pas été maintenu. Voilà pourquoi l'initiative n'a pas été durable.

[Français]

    Si un gouvernement, quel qu'il soit, prend le temps de faire ce genre de budget et qu'il veut qu'il soit soutenu, comment peut-il s'assurer qu'une fois adopté, il ne s'arrêtera pas là et qu'il y aura quand même une continuité d'un gouvernement à l'autre?

[Traduction]

    Ceux qui préparent le budget, qui analysent le budget et les dépenses doivent savoir comment s'y prendre. Cela doit faire partie de leur travail quotidien. Encore une fois, on peut recourir à des moyens divers, à des encouragements à la formation, mais cela doit s'intégrer aux tâches administratives courantes.

[Français]

    Vous avez encore deux minutes.
    Je vais partager mon temps avec M. Stanton.
    C'est bien.

[Traduction]

    Madame la présidente, j'ai une question à poser à Mme Russell, si je puis.
    Ce que vous nous avez dit aujourd'hui tous les deux est plein d'aperçus fascinants. Cela nous a permis de mieux saisir ce que nous devons faire. Il m'est arrivé de me demander si nous ne perdions pas vraiment notre temps.
    J'ai appris aujourd'hui qu'il existe une information abondante, qu'il y en a au moins assez pour que nous mettions à l'oeuvre. Êtes-vous en train de dire que tout ce dont nous avons besoin pour aller de l'avant, c'est de volonté politique et d'une certaine culture. Même M. Bartle y a fait allusion. C'est bien ce qu'il faut comprendre? Nous voici prêts à nous lancer dans une étude qui pourrait demander des mois — car nous allons aller au fond des choses — seulement pour en arriver à la conclusion qu'on nous a présentée aujourd'hui.
    Est-ce que je me trompe?

  (1650)  

    Vous pourriez vous mettre à l'oeuvre dès demain et faire du travail sérieux. Si vous avez la capacité nécessaire pour dire aux gens du gouvernement fédéral, du ministère des Finances et de Statistique Canada qu'ils doivent faire de leur mieux, bien des choses pourraient se produire.
    Vous pourriez fort bien trouver de l'information importante en faisant ce travail, je n'en sais rien, mais je soupçonne que vous entendrez les pour et les contre, qu'on vous dira qu'il n'y a pas d'information concluante, et qu'il n'y a aucune garantie que tout se passera bien... Je suis toujours d'avis que vous devez faire ce travail, car vous réaliserez des progrès, selon moi, malgré ces incertitudes.
    Que vous preniez la décision ce soir ou dans cinq mois, après des heures de travail, vous devriez toujours la prendre, à mon avis.
    Une dernière chose.
    Vous savez sans doute que certaines des mesures que le gouvernement a prises visaient les familles. Comment considérer les familles dans le contexte d'un budget sexospécifique?
    C'est une considération essentielle, bien sûr. Il y a toutes sortes de ramifications du côté des dépenses comme des revenus. Par exemple, les familles ont beaucoup à dire sur la répartition et l'organisation du travail non rémunéré. Les effets des impôts et des dépenses de l'État sur les familles... Il y a une dynamique familiale complexe. La composition des familles varie beaucoup et leur mode de fonctionnement a une influence sur les conséquences des budgets pour l'égalité des sexes.
    Ces questions peuvent devenir très complexes, si voulez vraiment entrer dans les subtilités. Je dis simplement que, dès aujourd'hui, vous pourriez faire beaucoup de choses avant que nous ne nous lancions dans toutes les subtilités du fonctionnement des familles.
    Merci, madame Russell.
    Merci, monsieur Stanton. Je vous ai donné deux minutes de plus.
    La présidence voudrait s'octroyer un privilège avant de donner la parole au prochain député.
    Je n'essaie pas de conclure. J'ai demandé aux témoins s'ils avaient des contraintes de temps, et ils ont dit non.
    Les questions que j'ai entendues sont excellentes, mais je voudrais vous demander ceci.
    Mme Russell a fait des recherches sur le budget fédéral, les prévisions, l'analyse, etc., et M. Bartle est le directeur d'une école d'administration publique. Ils nous ont tous deux proposé une analyse de ce dont nous avons besoin — le gouvernement, la société civile. Je suis convaincue que, dans le monde occidental, le gouvernement, la société civile et le milieu politique sont prêts pour cette initiative, mais que devons-nous faire ensuite?
    Madame Russell, vous avez parlé d'une page à ajouter au budget, mais lorsque nous menons des consultations budgétaires — tous les gouvernements le font —, quels groupes devrions-nous inviter?
    Si vous pouviez tous les deux répondre à la question, ce serait terminé pour le privilège de la présidence. Nous passerons ensuite à Mme Minna.
    Monsieur Bartle, voulez-vous répondre le premier?
    Bien sûr.
    Je vous proposerais de réaliser des projets pilotes. À bien des égards, c'est une innovation que vous envisagez et, comme toujours, on se demande comment s'y prendre. Comment faire le travail?
    D'autres exemples d'innovation en matière de politique nous renseignent sur ce qui fonctionne généralement. Je proposerais un projet pilote avec un organisme ou un ministère en particulier, peut-être, pour voir comment les choses se passent, ce qu'on peut apprendre, où sont les préoccupations et comment on peut en tenir compte.
    Deuxièmement, je réfléchirais aux mesures incitatives. La plupart des administrateurs hiérarchiques sont agacés lorsqu'on leur demande de faire quelque chose de plus sans que rien les y incite. S'ils peuvent y voir une façon de se perfectionner, de participer à une innovation, cela devient intéressant pour eux sur le plan professionnel.
    Comme je l'ai dit dès le départ, on a besoin de l'adhésion à la fois de la société civile et du gouvernement. Les groupes susceptibles de se servir de cette analyse sont ceux qu'il faut consulter. Pour qu'elle s'intègre au processus budgétaire, il faut qu'on s'en serve, et pour qu'on s'en serve, il faut tenir compte des préoccupations des éventuels utilisateurs. Quelle information veulent-ils avoir? Comment veulent-ils qu'elle soit présentée? J'étudierais la question avec eux.

  (1655)  

    Vous avez demandé quels groupes vous devriez inviter...
    Pourriez-vous répéter la question?
    Tous les ministres des Finances mènent des consultations budgétaires, mais il arrive que nous aboutissions à des politiques qui ne tiennent pas debout, du point de vue de l'égalité entre les sexes.
    Voici un exemple classique. Une personne qui gagne 21 000 $ est trop pauvre pour profiter du crédit d'impôt pour enfants, mais trop riche pour obtenir la prestation fiscale pour le revenu gagné. Qui a fait l'analyse sexospécifique?
    Qui les ministres doivent-ils donc consulter? Quels groupes, du point de vue des contribuables, de la comptabilité, de la lutte contre la pauvreté? De quel éventail d'intérêts doivent-ils se préoccuper?
    C'est là qu'on s'y perd: comment équilibrer le yin et le yang?
    C'est un vrai problème, car... Vous semblez présumer dans votre question qu'une multitude de groupes font cette analyse sexospécifique très poussée des budgets, que si nous pouvions les trouver et les faire comparaître, ils nous renseigneraient. Beaucoup de groupes qui s'intéressent de très près à un grand nombre de ces questions n'ont pas la capacité de réaliser l'analyse qui serait utile au comité et au gouvernement.
    Il serait splendide que nous puissions renforcer la capacité de ces groupes pour qu'ils participent à ces processus et nous aident à peaufiner notre analyse sexospécifique des budgets dès le début. Hélas, ces groupes sont souvent sous-financés et, pour l'instant, ils sont incapables de participer à fond. Je parie malgré tout que, aux prochaines consultations prébudgétaires, parmi les questions posées aux témoins, on leur demandera souvent d'établir un lien entre leurs analyses et notre objectif général d'équité entre les sexes. Il faudra écouter les groupes lorsqu'ils établiront un lien entre les propositions qu'ils avancent et l'équité entre les sexes.
    Merci.
    Mme Minna, maintenant.
    Merci, madame la présidente.
    J'ai une ou deux questions à poser, mais, au préalable, j'aurais quelque chose à dire à Mme Russell et à M. Bartle.
    Après avoir entendu les deux témoins de la dernière séance et certains éléments signalés par les deux témoins d'aujourd'hui, il me semble très possible que le comité arrive à une conclusion dans la conception ou la formulation de recommandations précises sur la façon de procéder. Et cela pourrait concerner non seulement le comité et les travaux à entreprendre, mais aussi le gouvernement.
    Certains des paramètres proposés plus tôt par M. Bartle et Mme Russell sont en place, par exemple. Et on a besoin de la formation, etc.
    Je m'adresse d'abord à Mme Russell. Lorsque les représentants du ministère des Finances ont comparu ici, nous leur avons demandé s'ils se servaient de données ventilées. Sauf erreur, ils ont dit que non. Savez-vous ce qui est disponible au ministère? Vous avez dit que l'information existait. Savez-vous vraiment si ce type de données est disponible et s'il serait possible de les utiliser à ces fins?
    Je ne sais pas au juste ce que le ministère des Finances possède sur le bout des doigts, mais j'ai pour ma part au bout des doigts des éléments qui seraient utiles pour faire au moins une première approximation.
    Je plaisante un peu, mais...
    Je comprends...
    ... ce ne sont pas des renseignements classifiés. Dans bien des cas, on peut au moins faire une régression pour déceler beaucoup de conséquences des diverses mesures pour l'égalité entre les sexes, même si on n'a pas sous les yeux les données idéales.
    Si vous pouvez le faire, je suis convaincue qu'ils peuvent le faire aussi.
    Très bien. La seule autre question n'est peut-être pas juste, mais c'est tout de même une question, et nous devons parfois nous intéresser au monde réel.
    Les résultats finals d'une analyse sexospécifique peuvent-ils s'avérer partiaux? Si la prémisse de base de la politique est déjà orientée dans un certain sens, peut-elle influencer l'analyse?

  (1700)  

    Pourriez-vous reformuler la question?
    J'essaie de dire que ceux qui font ce travail dans le système ont tous des convictions personnelles ou des intérêts qui vont dans certaines directions.
    Nous ne sommes pas tous parfaits. Nous avons en place des systèmes imposants. Mettons que le gouvernement dise que nous allons suivre telle orientation, mais qu'il y a certaines idées préconçues ou des convictions idéologiques chez ceux qui établissent les données. Cela peut-il avoir une influence sur l'analyse sexospécifique parce que l'information n'est pas la bonne? On penserait aller dans une direction, alors que ce serait l'inverse. Comment assurer la transparence et comment apporter une correction? Je pose la question parce qu'il est bien certain que nous ne ferons pas le travail nous-mêmes. D'autres le feront.
    Je ne doute pas qu'il y ait des façons de présenter même une information empirique de façon à mettre certains faits en lumière plutôt que d'autres. Il y a donc la partialité de ceux qui effectuent l'analyse. C'est vrai dans tellement de domaines. Nous devons débattre du sens à donner aux chiffres. Nous ne pouvons pas prendre pour argent comptant l'interprétation qu'en propose la personne qui présente les chiffres. Nous devons faire notre travail.
    Vous devrez faire preuve de vigilance pour vous assurer que l'information reçue, si vous commandez une analyse sexospécifique à un ministère donné, reflète l'engagement qui vous guide. Il faudra une vigilance de tous les instants dans l'utilisation de ces outils.
    Madame la présidente, M. Bartle aurait-il l'obligeance de répondre également? Merci.
    Oui, je suis d'accord. Je crois qu'on assure la transparence en communiquant toute l'information. Les analystes expliqueront dans le détail comment ils ont préparé l'annexe technique — ou autre document semblable — qui, probablement, sera étudiée surtout par d'autres analystes. Mais, comme partout ailleurs, si quelqu'un veut vérifier soigneusement les chiffres et discuter d'autres méthodes ou encore les critiquer, très bien. C'est sain.
    Il serait excellent qu'on en soit à discuter de la façon de faire une meilleure analyse sexospécifique du budget plutôt que, comme maintenant, à se demander s'il y a lieu d'en faire une.
    Merci, madame Minna.
    Merci, monsieur Bartle.

[Français]

    Madame Demers, vous disposez de cinq minutes.
    Merci, madame la présidente.
    Professeur Bartle, professeur Russell, plus j'écoute et plus je suis confondue. Nous provenons toutes et tous de milieux différents. Certains d'entre nous sont de la gauche, certains sont de la droite et certains sont du centre. Certains et certaines d'entre nous ont de l'expérience en finances, certains et certaines d'entre nous n'en ont aucune.
    Par contre, j'ai compris ce que vous avez dit plus tôt, madame Russell.

[Traduction]

    Vous avez dit que, pour être efficace, il fallait qu'une réduction d'impôt atteigne l'objectif visé mieux que des dépenses ne le feraient.

[Français]

    Je l'ai compris facilement. Les gens de mon comté le comprendraient aussi facilement. Ce n'est pas tout de vouloir développer un programme pour s'assurer d'une budgétisation sexospécifique, il faut aussi s'assurer que les gens comprennent ce que cela représente. Autrement, je ne suis pas convaincue qu'ils voteraient pour ça, tellement c'est compliqué.
    Dans les analyses de budgets que vous avez faites, y a-t-il des exemples concrets que vous pourriez nous soumettre par écrit? On pourrait les étudier avant de soumettre cette idée aux fonctionnaires qui préparent les budgets. Avant de leur demander d'insérer des feuilles, nous aurions déjà quelque chose qui nous permettrait de leur dire que nous avons devant nous une preuve évidente que si l'analyse avait été faite correctement, telle mesure n'aurait pas été instaurée à cause de telle et telle répercussion. C'est ce que vous avez fait plus tôt en parlant d'un crédit d'impôt pour services de garde.
     Avez-vous fait des analyses, à la suite de mesures mises sur pied dans le passé, que vous pourriez nous donner comme exemples?

  (1705)  

[Traduction]

    Vous considérez des exemples où la réduction d'impôt est comparée à une dépense sous l'angle de l'effet sur l'égalité entre les sexes?

[Français]

    Je cherche des analyses que vous avez déjà faites à la suite d'anciens budgets.

[Traduction]

    Je suis sûre qu'il doit y en avoir, mais je n'ai pas d'exemple qui me vienne à l'esprit pour l'instant.
    Madame Russell, le partage des revenus ou des revenus de retraite est peut-être ce que vous cherchez.
    Il est certain qu'on a beaucoup étudié le partage des revenus sous l'angle de l'égalité entre les sexes, mais je ne vois pas comment, dans ce cas, on peut comparer une mesure fiscale et une dépense. Il y a cependant bien des mesures, notamment fiscales, qui ont été critiquées sous cet angle.

[Français]

     Avez-vous fait une analyse sommaire ou approfondie de mesures, soit des réductions de taxe ou des dépenses budgétaires, pour voir quelle était la meilleure chose à faire? Pouvez-vous nous en faire parvenir? Je ne vous demande pas de le faire aujourd'hui, mais serait-ce possible de le faire dans les semaines à venir?

[Traduction]

    Oui, je peux essayer de fournir de l'information.
    Je crois que vous devez bientôt discuter avec Armine Yalnizyan. Elle a entrepris une étude de dix ans sur le budget fédéral sous l'angle de l'égalité entre les sexes, et elle pourrait fort bien avoir un certain nombre d'exemples en réserve qui auraient un lien avec la question que vous soulevez.
    Madame Demers, vouliez-vous demander à M. Bartle s'il a des idées à proposer?

[Français]

     Professeur Bartle, avez-vous compris la question que j'ai posée au professeur Russell?
    M. John R. Bartle: Yes.
    Mme Nicole Demers: Vous-même, avez-vous fait des analyses de différentiation entre une réduction de taxe et une dépense budgétaire pour résoudre un problème?

[Traduction]

    Non, je n'en ai pas.
    La chose la plus approchante que j'aie faite et qui peut être utile, c'est étudier les données existantes, aux États-Unis, pour essayer de voir comme nous pourrions nous y prendre pour analyser l'incidence fiscale selon le sexe. La réponse est qu'il existe des données, même si nous n'avons jamais essayé de les recueillir dans cette perspective. Il y a, aux États-Unis des données relatives à l'impôt sur le revenu qui pourraient être utiles. Elles ne sont pas complètes, elles ne répondent pas à tous les besoins, mais ce serait un début.
    Encore une fois, ce n'est pas forcément la même chose au Canada, mais il m'a semblé intéressant que, au moins, il existe des données, même si personne n'a jamais vraiment essayé de les utiliser. L'optique de l'égalité des sexes n'a jamais été retenue.

[Français]

    Pourriez-vous nous les faire parvenir?
    Madame Demers, c'est terminé.

[Traduction]

    Monsieur Bartle, madame Demers demande si vous pourriez nous communiquer l'information.
    La greffière communiquera avec M. Bartle.
    Madame Mathyssen, vous avez des questions?
    Oui, il m'en reste une.
    L'une des difficultés de l'analyse sexospécifique est qu'il est parfois difficile de savoir quels segments de la population tirent partie de modifications particulières. Il y a un débat sur les types de prestation... J'ai toujours eu l'impression que, si on tient compte des femmes, si on fait un effort pour garantir leur sécurité économique, leurs enfants et leur famille finissent par en profiter. M. Stanton a dit que le gouvernement était axé sur la famille.
    Est-ce que l'analyse sexospécifique des budgets est avantageuse pour toute la famille?

  (1710)  

    Il me semble assez évident que, lorsqu'on va au-delà des rudiments de la budgétisation sexospécifique, il est difficile de faire abstraction de l'appartenance des femmes à une famille. Il y a dans leur vie des enfants, des personnes âgées. Il y a des conséquences très concrètes, par exemple, si les femmes ne peuvent participer à la population active parce qu'elles sont prises par des activités non rémunérées auprès de ces personnes. Il y a des conséquences si le niveau de revenu devient le facteur décisif lorsqu'il s'agit de donner aux femmes le choix au sujet de... Vous savez, on se retrouve parfois dans des situations où, si le salaire ne rapporte pas assez, on ne peut se permettre d'aller travailler, parce que la garde des enfants, le soin des aînés, etc. coûteraient trop cher.
    Tous ces éléments touchent l'ensemble des membres de la famille, car les familles sont des réseaux inextricables où ce qui touche un membre à des effets sur tous les autres.
    Monsieur Bartle.
    Merci de cette question, qui me paraît très importante.
    Je n'arrive pas à trouver mes notes pour l'instant, mais j'ai remarqué dans mes recherches un pays où on a constaté que des compressions dans un programme de santé qui semblaient se traduire par des économies budgétaires parce qu'elles réduisaient les dépenses en santé, ont provoqué une augmentation appréciable ou radicale du temps que les femmes consacraient aux soins de parents âgés ou d'enfants. Voilà un excellent exemple de ce que je qualifierais de fausse économie budgétaire. On a l'impression d'avoir fait des économies, mais en fait, on a simplement refilé les coûts à d'autres personnes, notamment les femmes.
    Voilà le genre de fait que, si j'étais à votre place, je voudrais connaître pour m'aider à réfléchir à l'impact de la décision que je prends.
    Merci, madame Mathyssen.
    Madame Boucher.

[Français]

    Je reviens aux contraintes auxquelles certains pays ont fait face quand ils ont tenu compte de la spécificité des sexes lorsqu'ils ont fait un budget.
    On va étudier le budget sexospécifique et il est certain qu'il va y avoir quelques contraintes. J'aimerais savoir comment nous, autour de la table, pouvons éviter que ces contraintes ne deviennent un frein au travail et faire en sorte qu'elles soient plutôt un moyen de le continuer de façon positive.
    Je pose la question à M. Bartle.

[Traduction]

    Pourriez-vous donner un exemple de ce que vous voulez dire en parlant de contraintes ou de limites?

[Français]

    Je ne sais pas. Vous avez dit plus tôt que, dans les autres pays, les efforts n'avaient pas été soutenus. Je vous ai demandé quelles avaient été principales contraintes auxquelles ils avaient été confrontés.
     On va étudier un budget sexospécifique. Cela peut être large et toucher plusieurs paliers de la société, tant les pauvres que les riches que les gens du milieu. Il y aura des contraintes différentes pour chacun de ces paliers. Notre comité veut y travailler. Comment peut-on arriver à faire de ces contraintes quelque chose de positif afin de trouver un juste milieu pour toutes les classes?

[Traduction]

    C'est une bonne question.
    C'est sans doute à ce propos que je parlerais de l'importance de l'information. Vous voulez avoir l'information nécessaire pour prendre de bonnes décisions. À bien des égards, on en revient à ce que Mme Russell a dit au début: si on ne connaît pas les conséquences pour l'égalité des sexes de ce qu'on fait, on avance à l'aveuglette.
    Si j'étais vous, je m'en préoccuperais. Il faut connaître l'impact des politiques sur ceux qui sont touchés. C'est peut-être l'une des choses les plus convaincantes pour un député.

  (1715)  

[Français]

    Avez-vous terminé, madame?
    Merci.

[Traduction]

    Voudriez-vous également donner votre avis au sujet des contraintes, madame Russell?
    Je peux peut-être réagir non pas précisément à votre question, mais plutôt à quelque chose qui s'y rapporte.
    Nous discutons des contraintes et des coûts comme s'il y avait une sorte de vernis, comme une charge supplémentaire ou quelque chose qui est lié à la budgétisation sexospécifique. Je ne crois pas que nous ayons assez insisté sur les avantages que ce travail peut apporter.
    Vous pourrez élaborer des politiques beaucoup mieux conçues pour atteindre les objectifs souhaités parce que vous aurez tenu compte des différences entre les sexes dans le contexte où ces politiques doivent s'appliquer. Voici une comparaison. Vous pouvez engager un architecte pour faire les plans d'une maison, et il peut faire un très bon travail du point de vue technique, mais à moins qu'il n'aille voir sur le terrain — y a-t-il une pente, un problème d'écoulement de l'eau, de l'érosion? —, il ne dessinera pas les plans en connaissant bien les obstacles qui existent sur le terrain.
    Si on tient compte des obstacles sur le terrain, comme les différences entre les sexes dans une société donnée, on peut trouver une solution beaucoup plus élégante aux problèmes à résoudre. Vous dites que vous voulez vous attaquer à la pauvreté, par exemple. Bravo. Il faut alors concevoir une politique qui tient compte du fait que les femmes vivant dans la pauvreté ont des difficultés particulières qu'il faut prendre en considération si on veut que la politique soit fructueuse.
    Merci.
    Monsieur Bartle, l'analyste m'a demandé... Dans votre exposé, vous avez dit que les leçons tirées de l'expérience permettent de connaître les obstacles à lever. En auriez-vous quelques-unes à présenter pour que, collectivement, nous puissions les examiner et éviter de commettre les mêmes erreurs ou de réinventer la roue?
    Oui, elles se trouvent à la troisième page de ma présentation. Je me reportais plus précisément à la diapositive intitulée « Lessons learned to date ».
    D'accord, très bien.
    Voilà qui est intéressant. Dans cette diapositive, que vous n'avez pas parce qu'elle était en anglais seulement, on trouve les éléments suivants: adhésion du gouvernement et de la société civile; intégration aux budgets à tous les niveaux; contexte politique; intégration au cycle budgétaire; compétences techniques.
    Je vous remercie, monsieur Bartle et madame Russell, de votre participation, de vos aperçus et votre apport. Vous nous avez donné matière à réflexion, au sujet de la définition des paramètres.
    Dans vos exposés, vous avez présenté les choses simplement. L'idée d'ajouter une page relève d'une bonne analyse. Et quand Mme Demers vous a posé sa question, je me suis demandé si on avait fait une analyse sexospécifique avant de réduire la TPS.
    Le comité doit aller de l'avant. Nous n'essayons pas de nous substituer au ministère des Finances. Tout ce que nous essayons de faire, au Comité permanent de la condition féminine, c'est tenter de voir si... Nous avons fait l'étude sur la dimension économique, sur la sécurité économique des femmes, et l'une des grandes questions qui ont surgi est celle du manque d'équité. Pour rétablir l'équilibre, il nous faut mettre en évidence la budgétisation sexospécifique ou l'analyse sexospécifique du budget, pour que tous en soient conscients, peut-on espérer.
    Merci de nous avoir fait part de votre point de vue. Merci de votre présence et merci de nous avoir communiqué vos connaissances.
    Je vais suspendre brièvement la séance. Nous devons discuter du budget.

    


    

  (1720)  

    La séance reprend.
    À la dernière séance, nous avons proposé une motion prévoyant une étude du Programme de contestation judiciaire du point de vue des femmes. J'ai besoin de quelqu'un qui proposera un budget.
    Le budget est prévu pour l'audition des témoins, qui seront au nombre d'environ 13. Nous aurons une séance supplémentaire demain et le 11 décembre. Nous allons essayer de caser tout le monde. Nous avons la vidéoconférence.
    Le budget s'élève à 19 204 $. Et il a été étudié dans l'optique de l'égalité des sexes.
    Des voix: Oh, oh!
    La présidente: J'ai besoin de quelqu'un pour proposer l'adoption du budget de fonctionnement.
    La motion est proposée par Mme Minna.
    Madame Minna, auriez-vous l'obligeance de lire la motion?
    Que le budget opérationnel proposé pour l'étude sur les femmes et le Programme de contestation judiciaire au montant de 19 204 $, pour la période 2007-2008 soit adopté.
    Voilà qui est simple.
    (La motion est adoptée.)
    Merci beaucoup.
    La séance est...
    Oui.
    Avant que vous ne leviez la séance, j'aurais une idée à proposer que j'allais présenter plus tôt.
    Madame la présidente, j'ai déjà soulevé la question, mais il me semble qu'il serait utile que la greffière nous obtienne la liste de toutes les dépenses fiscales. Lorsque nous discutons des impôts et de leur état actuel, il serait peut-être utile que nous ayons cette liste.
    Je sais qu'elle existe. Je l'ai déjà vue, mais c'était aux environs de 1995, il y a un bon moment. Cela ne nous nuirait pas de voir ce que sont ces dépenses et combien il y en a. Il y en a beaucoup dont nous ne connaissons même pas l'existence. Elles s'accumulent depuis 20 ou 30 ans.
    Il s'agit des revenus prévus dans le budget?
    Des dépenses fiscales.
    Vous voulez plutôt les dépenses.
    Les dépenses fiscales ne sont pas de l'argent qu'on dépense... C'est-à-dire qu'on dépense...
    Les dépenses prévues au budget, c'est ce que vous voulez?
    D'accord. Nous allons donc obtenir l'information sur les revenus, les différentes sources de revenu à la disposition du gouvernement.
    Je veux parler des dépenses fiscales. Par exemple, le crédit d'impôt pour enfants est une dépense fiscale. Je parle des mesures fiscales que nous employons pour offrir certains programmes. On les appelle « dépenses fiscales ».
    Vous savez de quoi je veux parler, n'est-ce pas?
    Cela pourrait toucher tous les ministères.
    Je veux parler de toutes les mesures qui sont prises.
    C'est donc une liste de toutes les exemptions qui figurent dans la déclaration de revenus et qu'on peut utiliser dans un budget.
    [Note de la rédaction—Inaudible] ... savent de quoi je veux parler.
    La liste est très longue. La dernière fois que j'ai vu la liste de ces mesures, elles représentaient une valeur de 25 milliards de dollars.
    Ce sont les exemptions et les crédits qui nous sont accordés. Fort bien, c'est d'accord.
    Les analystes pourraient-elles nous trouver cette liste? Merci beaucoup.
    La séance est levée.