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FEWO Réunion de comité

Les Avis de convocation contiennent des renseignements sur le sujet, la date, l’heure et l’endroit de la réunion, ainsi qu’une liste des témoins qui doivent comparaître devant le comité. Les Témoignages sont le compte rendu transcrit, révisé et corrigé de tout ce qui a été dit pendant la séance. Les Procès-verbaux sont le compte rendu officiel des séances.

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CANADA

Comité permanent de la condition féminine


NUMÉRO 005 
l
2e SESSION 
l
39e LÉGISLATURE 

TÉMOIGNAGES

Le mercredi 28 novembre 2007

[Enregistrement électronique]

  (1530)  

[Traduction]

    Mesdames et messieurs, il vaut mieux ouvrir la séance. Mme Philipps, qui témoigne par vidéoconférence, doit nous quitter au plus tard à 16 h 30. Il faut que tous le sachent.
    Nous allons entendre l'exposé de Mme Philipps. Celui de Mme Lahey suivra, et les questions viendront ensuite.
    Madame Philipps, nous sommes prêts à vous écouter.
    Je vous remercie, madame la présidente et honorables députés. Je vous suis très reconnaissante de me permettre de vous adresser la parole aujourd'hui. C'est un honneur. Je crois comprendre que le comité étudie la question de la budgétisation sexospécifique.
    Je vais me limiter à 10 minutes, comme on m'a invitée à le faire.
    Je dirai d'abord que toute étude de la budgétisation sexospécifique doit tenir compte de l'impôt autant que des dépenses. À l'étranger, la plupart des travaux de cette nature ont porté surtout sur les dépenses, et cela s'explique. Il y a toutefois quelques exceptions.
    Au Canada, le volet impôt est très important, de plus en plus important. C'est que le gouvernement fédéral possède de vastes pouvoirs en politique fiscale, mais des pouvoirs bien plus limités en matière de dépenses de programme, comme vous le savez. La fiscalité revêt donc une importance extrême dans le contexte financier au Canada.
    Deuxièmement, depuis à peu près 1995, il y a eu une évolution très notable dans la politique budgétaire, et l'attention s'est portée moins sur les dépenses et plus vers les réductions d'impôt. Il est donc d'autant plus important d'examiner le volet impôt du budget selon la perspective des femmes.
    Pour les raisons que je viens de signaler, on a de plus en plus tendance à recourir aux dépenses fiscales pour atteindre toute une série d'objectifs sociaux et économiques. Vous savez tous que les dépenses fiscales, ce sont des réductions d'impôt ciblées.
    Une politique fiscale non sexospécifique, ce que nous avons généralement ici, c'est-à-dire une politique qui ne tient pas compte expressément des différences entre les sexes, n'est tout simplement pas bonne. Elle repose sur une information incomplète. Voilà selon moi la meilleure raison de faire une analyse sexospécifique de la politique fiscale. Celle-ci sera plus efficace, comme moyen d'atteindre les objectifs déclarés, et plus équitable.
    Dans mon mémoire, je passe ensuite aux principes qui devraient guider l'analyse sexospécifique du volet impôt du budget.
    Il y a des principes fondamentaux à respecter, peu importe la politique fiscale dont il s'agit. Prenons l'exemple du partage des revenus, car vous êtes saisis d'un autre mémoire que j'ai rédigé avec Nancy Peckford à ce sujet. C'est un excellent exemple des problèmes qu'on éprouve, des erreurs qu'on commet, lorsqu'on ne fait pas une analyse sexospécifique minutieuse avant de modifier la fiscalité.
    Le premier principe que je souhaite voir appliqué dans toute analyse sexospécifique de la politique fiscale est celui de l'effet de distribution et de comportement sur les femmes. L'effet de distribution? Il faut voir qui profite de la modification de la fiscalité. Les femmes obtiennent-elles une juste part des avantages du changement? Par effet de comportement, je veux parler de l'impact sur leurs choix. L'impact sur leurs choix sera-t-il différent de ce qu'il est chez les hommes?
    Il est très probable que l'effet de nombreuses modifications la politique fiscale est différent sur les femmes parce que leur revenu, en moyenne, est inférieur à celui des hommes, parce que leur revenu provient de sources différentes, parce qu'elles ont des responsabilités non rémunérées beaucoup plus lourdes. À cause de ces trois éléments de leur profil économique, les femmes subiront des effets différents, seront touchées différemment par les politiques fiscales.
    Dans le cas du partage des revenus, l'effet de distribution que nous connaissons est que les règles sur le partage des revenus de pension, par exemple, sont beaucoup plus bénéfiques pour les hauts revenus que pour les revenus faibles. Il faut avoir un revenu qui se situe au moins dans la deuxième tranche d'imposition, c'est-à-dire au moins environ 38 000 $ pour tirer quelque avantage du partage des revenus.
    Considérons les revenus des femmes et des hommes. Les femmes gagnent en moyenne quelque 26 000 $. À ce niveau de revenu, le partage ne donne aucun avantage. Par contre, l'homme a plus de chance d'en profiter. On sait aussi que, plus haut dans l'échelle des revenus, ceux qui gagnent plus de 100 000 $ profiteront du gros des avantages. Or, les femmes ne représentent que 23 p. 100 de ce groupe. Il y a donc une distorsion selon la classe et le sexe.
    Quant à l'effet de comportement du partage des revenus, il y a un vrai motif d'inquiétude. Mme Lahey a écrit quelque chose à ce sujet. Il détourne les femmes du travail rémunéré. Le comportement des femmes dans la population active est beaucoup plus influencé par la modification du taux d'imposition que ne l'est celui des hommes. Peut-être Mme Lahey donnera-t-elle de plus amples explications. Le partage des revenus est donc inquiétant par ses effets de distribution et de comportement.

  (1535)  

    Le deuxième principe, c'est qu'il faut toujours tenir compte de l'effet sur les hommes et les femmes comme particuliers. Autrement dit, il faut aller au-delà de l'analyse au niveau des ménages que font généralement les auteurs des politiques fiscales. On présume que, si on accorde une réduction d'impôt à un ménage, tous ses membres en profiteront également. Je ne suis pas d'accord. Accorder une réduction d'impôt au soutien de famille ne garantit pas que la femme aura droit à sa part.
    Ce problème ressort très nettement dans le cas du partage des revenus, car, étant donné les règles, il y a transfert d'une obligation fiscale au conjoint qui gagne le moins — disons que c'est celui qui dispense les soins — sans aucun transfert de revenu. C'est une première au Canada. Toujours, par le passé, les partages de revenus légaux ont exigé que des actifs passent du conjoint à haut revenu à celui qui dispense les soins. Mais voici que, pour la première fois, à cause des règles sur le partage, on peut inscrire des revenus dans la déclaration de la dispensatrice de soins sans avoir l'obligation de partager le revenu avec elle. En réalité, c'est le principal soutien de famille qui a droit à une réduction de l'impôt. L'autre conjoint écope d'une nouvelle obligation fiscale sans qu'il y ait nécessairement augmentation des revenus qu'il contrôle.
     Voilà ce qu'on observe en dépassant le niveau du ménage pour considérer les personnes qui le composent. Si on en reste à l'analyse du ménage, cette inégalité disparaît; elle est cachée. L'analyse au niveau de l'individu la révèle.
    Un troisième principe veut qu'on tienne compte des différences entre les femmes, de l'impact sur différents groupes de femmes. Je donne quelques exemples dans mon mémoire.
    Je m'attarderai seulement au tout premier: le lien entre le sexe et la pauvreté. Les femmes à faible revenu ne profitent pas d'un grand nombre de réductions d'impôt. En 2004, pas moins de 38 p. 100 des femmes qui ont produit une déclaration de revenus n'avaient aucun impôt à payer. C'est que leur revenu était trop faible pour justifier des impôts ou qu'elles avaient déjà droit à d'autres crédits qui ramenaient leur impôt à zéro. C'est dire que ces femmes ne peuvent tirer profit d'aucune autre réduction de l'impôt sur le revenu. Si on abaisse le taux d'impôt ou propose un nouveau crédit d'impôt pour enfants, ces femmes n'en profiteront aucunement.
    Le seul type de réduction d'impôt dont peuvent profiter les femmes à faible revenu, ce sont les crédits remboursables. Ce serait un plaisir de donner plus de détails à ce sujet pendant la période des questions. Vous voudrez peut-être envisager comme stratégie de réforme fiscale favorable à l'égalité entre les sexes la conversion d'un plus grand nombre de crédits non remboursables en crédits remboursables, précisément pour que ces femmes à faible revenu en profitent.
    Un dernier principe doit, selon moi, occuper une place centrale dans une analyse sexospécifique des budgets. Il s'agit, en fiscalité, de tenir compte de l'impact sur les femmes à la fois comme travailleuses rémunérées et comme dispensatrices de soins non rémunérées. J'espère que toute analyse sexospécifique évitera d'isoler ces deux rôles l'un de l'autre, car ils sont étroitement liés entre eux comme problèmes d'égalité des femmes, et la majorité des femmes doivent au cours de leur vie concilier ces deux rôles d'une façon ou d'une autre.
    Selon moi, les politiques fiscales devraient viser à abolir les obstacles qui gênent la participation au marché du travail. Elles doivent aussi appuyer les femmes qui dispensent des soins en leur versant un soutien financier directement et non par l'intermédiaire d'un autre membre du ménage.
    Enfin, pour conclure rapidement, quels processus peut-on adopter pour améliorer la qualité et la transparence de l'analyse sexospécifique du budget? J'ai écrit dans le mémoire qui a été distribué que tout processus avait une dimension interne et une dimension externe. D'excellentes publications parues à l'étranger montrent que les processus les plus efficaces dans le monde associent ces deux dimensions. Ils sont moins efficaces si on ne tient compte que de l'une d'elles.
    Dernier point, puisque mon temps de parole est presque terminé. Le ministère des Finances doit jouer un rôle. C'est lui qui joue le rôle central dans l'élaboration de la politique fiscale. Il prépare le budget de façon hautement confidentielle, comme vous le savez. Au point que des gens de l'extérieur — autrement dit, les fonctionnaires d'autres ministères ou les membres de comités parlementaires — font l'analyse sexospécifique et qu'ils sont très limités dans ce qu'ils peuvent faire, puisqu'ils sont réduits à critiquer après coup la politique, une fois qu'elle a été rendue publique. Ils ne participent pas à l'élaboration de la politique.
    Comme la politique fiscale est une affaire extrêmement complexe et technique, il est très difficile pour les députés, les comités parlementaires ou les autres ministères de saisir, comprendre et analyser à fond les effets sexospécifiques.

  (1540)  

    Nous devons déployer les compétences du ministère des Finances. Si elles ne sont pas exploitées dans le processus d'élaboration d'un budget favorable à l'égalité entre les sexes, l'effet sera limité. Bien sûr, j'appuie tout ce que peut faire n'importe quel autre ministère ou comité, mais le ministère des Finances est essentiel.
    Merci beaucoup.
    Nous allons maintenant passer à Mme Lahey, qui a dix minutes.
    Merci.
    Merci, madame la présidente et honorables députés.
    Je suis très heureuse d'être parmi vous et de pouvoir vous communiquer une information qui, je l'espère, vous aidera à choisir l'orientation que vous voulez donner à cette étude.
    Premier point, il est on ne peut plus urgent de discuter d'une analyse budgétaire sexospécifique de façon très encadrée et faisant appel au Cabinet. Depuis la fin des années 1990, le Canada a perdu son premier rang remarqué dans l'indice du développement humain et l'indicateur sexospécifique de développement humain, dans les rapports de l'ONU sur le développement humain. Il perd du terrain d'année en année, surtout en ce qui concerne les femmes. Il s'est retrouvé récemment au septième rang dans le monde, alors qu'il était au premier il y a à peine quelques années.
    Un nouvel ensemble d'indicateurs qui mettent davantage l'accent sur le fonctionnement économique des indicateurs plaçait le Canada au 14e rang en 2006 et au 18e en 2007 pour ce qui est de l'écart entre hommes et femmes. Les femmes régressent donc au Canada en termes monétaires.
    Je crois, comme bien d'autres personnes, qu'un budget sexospécifique permettra à tous de considérer avec beaucoup plus de réalisme la condition féminine jusqu'à maintenant. J'ai distribué un document marqué Annexe A. C'est une page extraite d'un rapport que j'ai rédigé pour Condition féminine Canada sur des enjeux de cet ordre. J'ai utilisé un logiciel de microsimulation pour établir le profil des revenus relatifs des hommes et des femmes en 2004.
    Selon ce profil, l'écart entre le revenu moyen des hommes et celui des femmes, entre les âges de 16 et 17 ans et la toute fin de la vie, dans les 90 ans, est énorme et impossible à refermer. J'établis ce profil depuis maintenant 20 ans. Les chiffres augmentent un peu, mais le profil ne change pas de forme. L'écart a changé quelque peu, mais je prévoyais il y a 20 ans que, au rythme où il diminuait, il disparaîtrait au plus tard en 2008. Nous sommes en 2007, et je dis maintenant qu'il va revenir aux niveaux d'avant 1986, probablement d'ici 2015. La situation est grave à ce point.
    Mme Philipps a tout à fait raison d'attirer l'attention sur le régime fiscal, qui est bien connu comme moyen d'offrir aux femmes une foule de résultats financiers qui sont très difficiles à percevoir, à définir, à mesurer et à contrôler.
    On pourrait mettre en place un budget qui tient compte de la sexospécificité. Il serait conçu de préférence selon le modèle du budget des dépenses fiscales que le ministère des Finances publie depuis 20 ans et qui rend compte de centaines, voire de milliers de postes concernant les divers impôts perçus par le fisc fédéral. Il serait alors possible de dissocier les divers facteurs fiscaux qui éloignent les salaires moyens des hommes et des femmes les uns des autres et de mettre le doigt avec précisions sur les mesures fiscales et les dépenses qui sont les plus grandes causes de la disparité croissante entre les revenus des hommes et ceux des femmes. Il serait également possible d'imaginer avec une grande exactitude les types d'impôts et de dépenses qui seraient les plus efficaces, au moindre coût, pour commencer à refermer l'écart qui ne cesse de se creuser entre les revenus des hommes et ceux des femmes.

  (1545)  

    Le résultat net, le rapport le plus récent de l'ONU sur les revenus totaux des hommes et des femmes au Canada le donne: globalement, les revenus des femmes ne représentent que 64 p. 100 de celui des hommes. On vous dit peut-être que l'écart salarial est faible et diminue, mais si on considère le montant total que les femmes reçoivent, il n'atteint pas encore les deux tiers de celui que les hommes touchent tous les ans.
    Comme Mme Philipps l'a dit, malgré ces revenus réduits, les femmes ont non seulement des responsabilités plus lourdes — environ 81 p. 100 des parents seuls sont des femmes, et on n'est pas un parent seul si on n'a pas au moins un enfant à la maison —, mais aussi la charge d'une part bien plus importante du travail non rémunéré qu'il faut pourtant accomplir.
    Un sondage réalisé en 2004 par le Barreau du Haut-Canada sur le travail non rémunéré des femmes juristes, qui avaient la même semaine de travail que les hommes, a montré que, en moyenne, l'homme faisait 13 heures de travail non rémunéré par semaine et la juriste 35 heures, tout en abattant le volume de travail nécessaire pour que leur exercice du droit soit rentable. En somme, les Canadiennes sont extrêmement surchargées: revenus faibles, lourde charge de travail et responsabilités plus grandes à l'égard des enfants. Pourtant, le régime fiscal les désavantage encore plus.
    Je voudrais maintenant aborder les éléments précis du régime fiscal qui, à mon avis, sont les principales causes du maintien du statu quo. Le premier est l'effet conjugué des taxes à la consommation et de la structure des taux existante, prévue par la Loi de l'impôt sur le revenu.
    Si on considère la façon dont le revenu aux niveaux les plus bas est réparti et si on regarde l'annexe A, on constate que les revenus moyens des femmes ne dépassent guère environ 30 000 $ par année, ce qui n'est pas beaucoup, au départ. Là-dessus, il faut prélever les 7 p. 100 de la taxe de vente en Ontario, plus la part de la TPS qui, si je suis à jour, est d'environ 6 p. 100 et peut-être bientôt de 5 p. 100. Qui sait? En tout, cela représente environ 13 p. 100 de chaque dollar dépensé par une femme, car tout produit de consommation peut être taxé à ce taux.
    Quant à l'impôt sur le revenu, des modifications ont été apportées en 1987, il y a 20 ans. Le taux le plus bas de l'impôt fédéral était de 6 p. 100 — j'ignore si quelqu'un ici s'en souvient — et de 9 p. 100 en ajoutant la part de la province. Lorsque cet impôt est passé de 6 à 17 p. 100 à cause des modifications apportées en 1987 à la Loi de l'impôt sur le revenu, on a vraiment fait augmenter l'impôt payé par les contribuables les plus pauvres au Canada. Actuellement, l'exemption prévue par la Loi de l'impôt sur le revenu n'est que de 9 000 $.
    Le résultat final, dans ce cas, est qu'un fardeau lourd, écrasant, semble identique pour les deux sexes, mais les femmes sont beaucoup plus touchées en raison de l'effet cumulatif de la TPS, de la TVP, de l'impôt fédéral sur le revenu, de l'impôt provincial sur le revenu. Et les femmes ne peuvent pas s'y soustraire, car elles tirent la majeure partie de leurs revenus d'un emploi, de sorte qu'elles peuvent faire peu de déductions.

  (1550)  

    Ajoutons le nombre croissant de dispositions fiscales visant les conjoints. J'en ai traité en détail dans l'étude réalisée pour Condition féminine Canada et dont vous avez des extraits. Je voudrais confirmer ce que Mme Philipps a dit du partage des revenus, plus expressément. Si on considère la répartition de cet avantage fiscal, on voit que le revenu médian des couples à la retraite est d'environ 40 000 $, ou plutôt de 42 000 $ actuellement. Il est tout à fait vrai que les gens qui ont un revenu de 40 000 $ ou moins ne tireront aucun avantage du partage des revenus. Plus le revenu augmente, plus l'avantage est important. Il peut même atteindre 11 000 $ par couple. Soixante-dix-sept pour cent des Canadiens croient que le partage des revenus est bon pour les contribuables, mais il est bon pour moins de la moitié d'entre eux. Il nous faut mieux faire connaître la fiscalité.
    Merci beaucoup.
    Comme Mme Philipps doit partir à 16 h 30, il nous reste environ 37 minutes. Pouvons-nous poser nos questions surtout à ce témoin ou alors poser des questions succinctes pour que nous puissions en poser le plus grand nombre possible? Merci.
    Ce sera d'abord Mme Minna.
    Merci, madame la présidente.
    Je vais partager mon temps de parole avec M. Pearson, car il doit partir tôt. Je réserverai mes questions à Mme Philipps, puisqu'elle doit nous quitter. J'en ai d'autres pour Mme Lahey, mais j'espère les lui poser au second tour.
    Merci, madame Philipps d'être parmi nous aujourd'hui. Ce sont là des renseignements fabuleux qui font vraiment une grande différence et nous aideront beaucoup.
    Vous avez dit tout à l'heure, à propos du partage... D'abord ceci: j'ai dit quelques fois — pas seulement moi, mais mes collègues et moi — que, si nous voulons partager les revenus, il faut commencer par partager la pension même, de sorte que 50 p. 100 de la pension aille dans les poches de l'autre conjoint, la plupart du temps la femme. Dans ce cas-ci, ce n'est pas ce qui se passe. Pour les personnes âgées — abstraction faite des célibataires, qui n'en retirent aucun avantage —, le partage des revenus est-il une solution à laisser de côté? Tant de contribuables sont laissés pour compte que cette formule n'est pas vraiment utile et ne règle en rien le problème de l'insuffisance des revenus. Auriez-vous une réponse plus générale à donner?

  (1555)  

    Personne ne voudrait jamais préconiser cette mesure comme un moyen d'aider les aînés pauvres, car ils n'en retirent rien du tout. Il reste vrai, toutefois, que nous permettons le partage avec le conjoint des prestations du RPC, par exemple, et nous permettons que ce partage allège la charge fiscale du contribuable qui partage sa pension. Nous permettons également les REER de conjoint. Si un contribuable veut mettre de l'argent de côté au moyen d'un REER qui est inscrit au nom de son conjoint et lui appartient, il peut économiser de l'impôt. Cela est déjà permis pour certains types de revenus de retraite s'il y a un transfert réel des actifs de retraite au conjoint.
    On pourrait soutenir que ce partage doit s'étendre aux pensions de l'employeur, le type de revenu maintenant visé par les règles sur le partage des revenus de pension, mais il faudrait, comme vous le dites, qu'il y ait un partage réel, un vrai transfert au conjoint de ces actifs de retraite.
    Merci.
    Je crois que je vais céder la place à mon collègue, Glen. J'espère avoir le temps de m'adresser de nouveau à vous.
    S'il vous reste du temps, je reviendrai à la charge.
    Merci à Mme Minna de me céder un peu de temps.
    Merci d'être là, madame Philipps.
    Je trouve très intéressants les renseignements sur l'étranger qui se trouvent dans la documentation qui nous a été communiquée. Dans des pays comme la Malaisie, le Mexique, la Corée et le Zimbabwe, on fait l'analyse budgétaire sexospécifique que nous faisons nous-mêmes. Combien de pays du G8 font cette analyse?
    Je crains de ne pouvoir donner un chiffre précis au pied levé, mais je peux vous dire que l'Angleterre progresse de plus en plus en ce sens. On y a commencé par un groupe externe, mais le gouvernement intègre de plus en plus cette fonction. Que je sache, les États-Unis ne font pas grand-chose sur ce plan. Désolée, mais je ne puis vous donner une meilleure réponse à propos du G8. Je voudrais néanmoins faire remarquer que le Canada appuie ce type d'analyse budgétaire dans les pays bénéficiaires de son aide.
    Nous avons reconnu la valeur de cette analyse pour les autres.
    C'est juste. Lorsque Mme Minna était ministre chargée de l'ACDI, c'est une chose à laquelle elle tenait. Voilà qui m'amène à la deuxième partie de ma question.
    J'ai travaillé en développement à l'étranger dans divers pays, mais surtout en Afrique. Il est vrai que l'ACDI, en offrant des fonds pour divers programmes, fait de l'égalité entre les sexes une condition préalable à l'obtention des fonds. Si je pose cette question, c'est parce que, dans ces pays, la promotion des droits est devenue très importante. Les ONG sont intervenues au niveau local auprès des chefs ou conseils de tribu, peu importe, et aussi au niveau du gouvernement national. On ne s'attendrait pas, me semble-t-il, à avoir une analyse budgétaire sexospécifique en Malaisie, mais elle y existe à cause de ces démarches, d'après ce que je peux voir.
    Croyez-vous que, au Canada — selon ce qu'il me semble — cette promotion est toujours très importante? Pour une raison ou l'autre, ce message n'est pas passé. Je présume que, si on peut comprendre en Malaisie, dans des pays comme le Mexique... Mais ici, on ne comprend pas encore, et c'est peut-être parce que les efforts de promotion restent limités. Pourriez-vous mobiliser l'attention sur ce problème?
    Vous avez tout à fait raison. Il y a un lien avec ce que je disais de la participation de l'extérieur. Il doit y avoir des organisations de la société civile qui suscitent des aspirations, réclament l'analyse sexospécifique, proposent une analyse indépendante pour passer en refus ce que le gouvernement fait pour qu'il finisse par, d'abord, faire l'analyse lui-même et, ensuite, la rendre efficace. Je m'inquiète vivement de ce que les organisations féminines au Canada semblent quelque peu démobilisées pour l'instant à cause des coupes dans le financement. Cela nuit certainement à leurs efforts.
    Il y a toutefois un ou deux groupes qui ont vraiment fait porter leur attention sur cette question de la budgétisation sexospécifique et qui, avec leurs ressources limitées, en font une priorité. Il serait magnifique que des organismes gouvernementaux puissent travailler avec eux d'une façon ou d'une autre pour maximiser ces efforts.
    Merci beaucoup.
    Je vous rends la parole, madame Minna.
    Il vous reste une minute et demie.

  (1600)  

    Madame Philipps, dans votre exposé, vous avez parlé de l'impact des dépenses fiscales. J'en ai fait une étude aux environs de 1994-1995. Je ne suis pas en faveur. Ce n'est pas un bon moyen d'offrir un programme social, quel qu'il soit.
    Dans vos travaux, avez-vous étudié les dépenses fiscales, celles qui sont conçues pour appliquer des programmes sociaux? Pourrions-nous prendre connaissance de ces études pour voir quel est l'impact de ces mesures? Je ne crois pas que le gouvernement ait jamais fait une étude semblable. Pas que je sache.
    J'ai étudié quelque peu la question, et ce serait un plaisir de communiquer au comité les résultats de mes travaux. Ma grande préoccupation, au sujet des dépenses fiscales, c'est que leurs modalités ont souvent pour effet d'exclure les femmes parce qu'elles sont très nombreuses à avoir un revenu faible ou à n'en avoir aucun. Quand on ne paie pas d'impôt, quand son revenu n'atteint pas un certain seuil, on ne peut profiter de la plupart des dépenses fiscales. La seule possibilité est de s'en prévaloir par l'entremise du soutien de famille avec qui on vit. Nous savons bien que ce n'est pas une garantie suffisante de la sécurité financière des femmes. Les femmes ont besoin d'avoir leurs propres ressources, à titre individuel.
    Ce serait un plaisir de transmettre mes travaux au comité. Ce serait magnifique.
    Merci.
    Nous allons passer à Mme Demers, qui a sept minutes.

[Français]

    Merci, madame la présidente.
     Madame Philipps, madame Lahey, je vous remercie d'être ici avec nous. Madame Philipps, j'ai une première question à vous poser.
    Quel geste le gouvernement devrait-il poser en priorité pour s'assurer que le budget fédéral soit équitable pour les femmes?

[Traduction]

    Je dois présenter des excuses. Mon français n'est pas assez bon pour que je puisse comprendre parfaitement votre question et y répondre en français.
    Quelqu'un pourrait-il traduire?
    Quelle mesure principale le gouvernement devrait-il prendre pour rendre le prochain budget équitable pour les femmes?
    Madame Philipps, nous avons un service d'interprétation.
    Je ne crois pas avoir d'écouteur pour entendre l'interprétation. Excusez-moi.
    Le service fonctionne. Tout se passera bien si Mme Demers s'exprime en français.

[Français]

    Maintenant, m'entendez-vous?

[Traduction]

    Oui, j'ai compris la question posée en anglais.
    Je dirais que le ministère des Finances doit intégrer l'analyse sexospécifique et expliquer au grand public comment il l'a faite et où. Il n'a pas pu le faire. Il doit l'expliquer. Nous devons savoir que le ministère des Finances, qui est l'expert en politique fiscale au Canada, prend cette analyse en considération. Il doit en discuter avec le Parlement, avec les comités parlementaires, avec le grand public et aller de l'avant. Jusqu'à maintenant, il n'a pas été très empressé. S'il a fait quelque chose, il n'a pas été disposé à en discuter avec des gens de l'extérieur. Il est très difficile de progresser dans ce dossier sans sa coopération.

[Français]

    Je vous remercie beaucoup, madame Philipps.
     Madame Lahey, une jeune stagiaire de l'Université de Sherbrooke m'accompagne aujourd'hui. L'un de ses champs d'intérêt est justement la budgétisation sexospécifique. Elle m'a suggéré quelques questions. J'ai le grand plaisir de vous les poser.
     Outre les problèmes de financement, quels autres problèmes pouvant entraver la réussite de la mise en application de la sexospécificité dans les politiques structurelles du gouvernement envisagez-vous?

[Traduction]

    Une précision. Par problèmes de financement, voulez-vous dire qu'il faut trouver assez d'argent pour que le gouvernement fédéral fasse ce travail ou voulez-vous parler des problèmes de financement des femmes?
    Les problèmes de financement? Le gouvernement doit trouver assez d'argent pour subventionner ces programmes. Quelle autre raison y aurait-il?
    Pour que le gouvernement ne fasse pas de budgétisation sexospécifique?

  (1605)  

[Français]

    Oui.

[Traduction]

    Je crois que, une fois que toute l'ampleur des injustices du régime fiscal sera connue du public, le gouvernement pourrait avoir à répondre à beaucoup plus de questions qu'on ne lui en a posé depuis longtemps.
    Voici un exemple. Mme Philipps a expliqué comment les économies d'impôt réalisées grâce au partage des revenus profitent au contribuable qui a le plus haut revenu et que celui qui a le revenu le plus faible écope de l'obligation fiscale. Non seulement il y a là une répartition inégale des avantages et de l'obligation fiscale qui l'accompagne, mais cela veut dire aussi que celui qui touche l'argent s'enrichit de plus en plus — le conjoint le plus riche s'enrichit encore — et que la capacité de la femme d'accumuler des revenus au long de sa vie diminue, car elle doit payer l'avantage fiscal dont son mari profite.
    C'est un principe de répartition de la propriété du ménage que nous n'acceptons pas au Canada depuis que Irene Murdoch s'est adressée à la Cour suprême du Canada, au début des années 1970. Il y a eu un tollé: la femme travaillait et le mari en bénéficiait. À quoi sert une femme sur une ferme? À produire un revenu, du capital, des économies et maintenant des avantages fiscaux pour son mari.
    C'est l'une des raisons pour lesquels tout gouvernement peut être nerveux devant cette question. J'espère que tous les partis pourront aller au-delà de l'attribution du blâme — car il s'agit en fait d'un système dont nous avons hérité — et se mettront sérieusement à l'oeuvre.

[Français]

    Je vous remercie.
    Je passe à une autre question d'Émilie. À la lumière des expériences étrangères, quels sont les critères que l'on pourrait adopter dès maintenant? À quel type de variante dans les résultats auprès de la population pourrait-on s'attendre? Pourriez-vous me donner un exemple concret?

[Traduction]

    Voulez-vous parler des variables démographiques se rapportant à la répartition entre les sexes?

[Français]

    Oui.

[Traduction]

    Pour en revenir au partage des revenus, le gouvernement lui-même a estimé qu'il allait dépenser 3,6 milliards de dollars au cours des six prochaines années pour le seul partage des revenus de retraite. Nous pouvons faire une analyse sexospécifique de cette mesure et voir qui en tirera profit.
    Dans le document que j'ai produit pour Condition féminine Canada, on peut lire à la page 56 de la version anglaise et aux pages 65 et 66 de la version française, si quelqu'un veut le consulter plus tard, que j'ai utilisé un logiciel de microsimulation pour modéliser les effets du partage des revenus chez les contribuables de l'âge de la retraite et de tous les âges. Il est évident que, seulement à cause de l'autorisation du partage des revenus de retraite, la part du revenu qui revient aux femmes diminuera encore plus qu'il ne l'a fait jusqu'à maintenant.
    J'espère que cette réponse suffit.

[Français]

    Vous savez, on n'a jamais suffisamment de réponses de toute façon.

[Traduction]

    Il vous reste une demi-minute.

[Français]

    Je voudrais vraiment que l'on comprenne que, comme vous l'avez indiqué, madame Lahey, ce problème dure depuis longtemps. On ne peut donc pas prendre une attitude partisane face à ce problème si on veut arriver à des résultats concrets et que les femmes puissent bénéficier de ces résultats. Je n'ai pas du tout posé ces questions dans une attitude partisane.
    Merci.

[Traduction]

    Merci.
    Passons maintenant à Mme Boucher, qui a sept minutes.

[Français]

    Bonjour, mesdames. Je vous remercie de nous expliquer ce que sont les budgets de genre.
    Il y a beaucoup de choses. C'est la première fois que nous l'étudions ici, en comité. Je pense qu'aucun comité n'avait osé s'attaquer à cela. Je pense que c'est bien pour tout le monde.
    Je voudrais comprendre une chose. C'est important aussi pour n'importe quel gouvernement en place de devenir responsable et de s'assurer qu'il y ait des manières de mesurer l'efficacité de ce genre d'initiative.
    Une fois qu'un pays a mis en place un budget tenant compte de la spécificité des sexes, comment un gouvernement, quel qu'il soit, peut-il mesurer et évaluer au fur et à mesure l'efficacité de ce genre de budget?

[Traduction]

    La question s'adresse à moi?
    Oui.
    Merci.
    Il y a bien des façons de mesurer les résultats. Il faudrait sans doute réfléchir à ce qu'on entend par « résultat ».
    On pourrait voir qui reçoit l'avantage d'un programme de dépense ou d'une réduction d'impôt et comparer entre les deux sexes. On pourrait aussi voir si la politique atteint son objectif de la même façon pour les hommes et les femmes. Donc, si une politique est conçue pour accroître la productivité ou la participation à la population active, donne-t-elle des résultats aussi bons pour les deux sexes?
    On en revient à ce que j'ai dit des effets de distribution et de comportement. La question est très vaste. Je ne sais donc pas trop comment orienter ma réponse. Peut-être pourriez-vous préciser votre question.

  (1610)  

[Français]

    Quand un pays a implanté ce genre de budget, qui fait référence à la spécificité des sexes, comment le gouvernement peut-il mesurer, de façon efficace, ce genre de budget pour qu'il soit adéquat à tous les niveaux?

[Traduction]

    Parfois, on peut avoir besoin de recueillir plus d'information, plus de données au sujet de l'effet sur les hommes et sur les femmes. Nous n'avons pas toujours l'information voulue.
    C'est en partie pourquoi les gouvernements doivent intervenir. Les ONG ne peuvent se débrouiller seules. Les gouvernements peuvent recueillir les données, par exemple, où ils peuvent posséder des données confidentielles qu'ils peuvent utiliser pour faire ce type d'évaluation.

[Français]

    Merci, madame Boucher.

[Traduction]

    Monsieur Stanton, vous pouvez poursuivre.
    Pendant le reste du temps?
    Oui.
    Très bien. Merci, madame la présidente.
    Merci aux témoins de cet après-midi de nous avoir consacré du temps pour parler de cette importante question.
    Revenons-en à l'un de nos objectifs. Vous êtes les premières à comparaître aujourd'hui. Nous entreprenons une étude sur la budgétisation sexospécifique. Il s'agit ici de comprendre comment nous devrions orienter l'étude qui nous attend.
    Le comité a consacré un certain temps à l'analyse sexospécifique. Il en a fait une étude assez approfondie pendant la 38e législature.
    Pourriez-vous toutes les deux, si vous le voulez bien, expliquer la différence? C'est une question de vocabulaire. Il y a la « budgétisation sexospécifique » et l'« analyse sexospécifique ». Est-ce la même chose? S'agit-il au fond d'appliquer simplement l'analyse sexospécifique aux mesures fiscales et financières?
    Je me ferai un plaisir de répondre.
    D'abord, je dois dire que ce que vous avez dit à la fin est exact. La budgétisation favorable à l'égalité entre les sexes est bien l'application de l'analyse sexospécifique au budget, comme instrument particulier de la politique gouvernementale.
    D'accord.
    Madame Lahey.
    J'aborderais la question un peu différemment. L'idée de ce type de budget découle du même document que la notion d'analyse sexospécifique, soit le Programme d'action adopté à Beijing en 1995, à la quatrième Conférence mondiale sur les femmes organisée par l'ONU.
    Une bonne partie du Programme d'action montre aux analystes des politiques et chercheurs comment faire une analyse sexospécifique d'à peu près tous les aspects du fonctionnement, tant public que privé, d'une société pour déceler les nombreuses sources compliquées d'injustice qui sont omniprésentes dans le tissu de toutes les sociétés de la planète. Lorsqu'on a appliqué cette analyse aux instruments fiscaux, on a constaté que le budget était le couronnement de toute action gouvernementale, et c'est le processus des consultations budgétaires et ce sont les documents budgétaires qui le constituent et lui donnent un sens.
    Je dirais donc que l'analyse sexospécifique ne peut se terminer tant qu'on n'a pas aussi conçu un budget sexospécifique. L'analyse est appliquée à tous les postes des dépenses et des impôts de façon à en établir les impacts matériels et comportementaux sur les femmes et les hommes. Mais tant qu'un budget sexospécifique n'est pas sur la table, aux côtés des autres documents budgétaires, le processus n'est pas achevé.
    De quoi aurait l'air ce document? Il pourrait ressembler au budget des dépenses fiscales, c'est-à-dire un document budgétaire distinct, relié, que le gouvernement publierait chaque année. Il dirait combien le gouvernement dépense pour les divers postes qui peuvent être considérés comme des concessions fiscales dans les divers instruments fiscaux que le Canada utilise.
    Il pourrait s'agir d'un volume relié, distinct, qui contiendrait exactement le même rapport sur toutes les mesures de dépenses et de fiscalité que le Canada utilise. Cela pourrait s'accompagner de notes d'analyse. Ce serait un document budgétaire typique qui serait également déposé avec le budget, de façon à faire partie des travaux les plus sérieux du gouvernement.

  (1615)  

    Donc, en somme...
    Il vous reste dix secondes.
    Autrement dit, si un gouvernement disait qu'il a examiné le budget sous l'angle de l'égalité entre les sexes et l'a perfectionné en conséquence, le seul élément qui manquerait serait le document nécessaire pour étayer cette affirmation. C'est à peu près ce que vous dites?
    Ce qui manquerait aussi, c'est la transparence qu'on obtient même dans le budget des dépenses fiscales.
    Comme présidente, je vais tirer parti d'une chose, et je crois que cela vient de ce que M. Stanton a dit. Le ministère des Finances a comparu devant le comité. Nous lui avons demandé comment il était possible, s'il a fait une analyse sexospécifique ou tenu compte de l'égalité entre les sexes, qu'une personne qui gagne 21 000 $ soit trop pauvre pour obtenir la prestation fiscale pour le revenu gagné et trop riche pour recevoir le crédit d'impôt pour enfants. Nous n'avons pas obtenu de réponse.
    Passons à Mme Mathyssen. Je vous en prie.
    Merci, madame la présidente, et merci à Mmes Philipps et Lahey. Vos connaissances sont tout à fait précieuses.
    J'ai tant de questions à poser. Voici la première. Madame Philipps, vous avez dit que le régime fiscal n'est pas un moyen satisfaisant de réagir aux problèmes des personnes à faible revenu. Si le régime fiscal ne l'est pas quels autres programmes nationaux seraient plus efficaces? Un programme national de logement, un vrai programme national de garderies, un régime efficace d'assurance-emploi, un crédit d'impôt pour enfants qui ne ferait pas l'objet d'une récupération fiscale?
    Il est vrai que la solution de nombreux problèmes d'égalité passe par des dépenses directes de l'État. On ne peut pas tout faire au moyen du régime fiscal pour corriger les inégalités entre les sexes ou résoudre les problèmes des personnes à faible revenu.
    C'est l'une des raisons pour lesquelles il faut étudier le budget sous l'angle de l'égalité entre les sexes. Il y a eu un tel virage vers les réductions d'impôt comme moyen de s'attaquer aux problèmes. Il faut examiner de près ces réductions pour voir si elles sont aussi efficaces pour les femmes que pour les hommes, pour les petits revenus et les revenus plus élevés.
    Il y a toutefois un recoupement entre la fiscalité et les dépenses. Il est incarné dans cette bête étrange que sont les crédits remboursables, qui sont en fait des paiements de transfert effectués au moyen du régime fiscal. La prestation fiscale pour le revenu gagné dont la présidente vient de parler est un nouveau crédit remboursable; la prestation fiscale pour enfants en est un autre. On pourrait peut-être pousser cette démarche plus loin pour s'attaquer à d'autres problèmes des petits revenus. Le régime fiscal pourrait être utilisé de façon plus conviviale pour les femmes et les hommes à faible revenu.
    Merci.
    L'inégalité entre les sexes a-t-elle un coût économique? Si oui, est-il possible que la budgétisation sexospécifique se traduise par des économies pour le gouvernement et donne des avantages très notables?
    Je le crois, mais je ne peux malheureusement pas vous donner de chiffres.
    Cependant, je suis profondément convaincue qu'une politique fiscale élaborée sans tenir compte de l'effet différentiel sur les deux sexes est forcément de qualité médiocre comme moyen d'atteindre les objectifs déclarés du gouvernement, quels qu'ils soient, puisque le gouvernement ne définit pas sa politique à partir d'une information complète. Pareille politique fiscale ne peut prédire comment les contribuables vont réagir, car la réaction varie selon qu'il s'agit d'hommes ou de femmes. Il faut en tenir compte si on veut obtenir les résultats que vise le gouvernement en place, quel qu'il soit.
    Le Canada a-t-il besoin d'autres outils pour élaborer ce genre de budget? A-t-il assez de données? Sont-elles ventilées correctement? Sinon, que devons-nous faire?
    Le travail est amorcé.
    L'Agence du revenu du Canada publie des données ventilées selon le sexe. Elles sont toutefois limitées, et il faudrait les enrichir considérablement pour faire une analyse sexospécifique approfondie. Il faudrait peut-être de nouveaux types de données pour produire cette analyse, par exemple la répartition des ressources à l'intérieur des ménages. Il faudrait donc recueillir davantage de données pour faire ce travail.
    En jetant un coup d'oeil au document où il est question des pays qui font une budgétisation sexospécifique, j'ai remarqué que, dans tous les cas, le gouvernement s'était associé à des ONG et à la société civile pour faire la recherche et la promotion. Au Canada, il n'y a plus ni recherche, ni promotion; ce n'est plus possible. Notre capacité de faire une budgétisation sexospécifique efficace s'en trouve-t-elle limitée?
    Je le crois. J'ajouterais cependant que des organisations s'occupent de la question, même si leurs ressources sont limitées. Des universitaires s'intéressent à ces questions. Il y a donc dans des organisations de la société civile des gens avec qui les organismes gouvernementaux pourraient certainement travailler. Je suis d'accord pour dire que c'est essentiel.
    Pendant quelques années, en Australie, il s'est fait une analyse sexospécifique du budget, sous la direction d'un très vigoureux organisme chargé de la condition féminine à l'intérieur du gouvernement, mais cela a fini par disparaître, faute de pressions suffisantes de l'extérieur, d'examen, de critique, de discussion. Il faut également un soutien de l'extérieur.

  (1620)  

    Selon des rumeurs qui ont cours de temps à autre, les gouvernements envisagent le partage des revenus. Vous avez dit clairement que cela a des effets négatifs. Est-ce que vous conseilleriez à tout gouvernement de renoncer pour de bon à cette idée?
    En tout cas dans la forme que ce partage a prise selon les règles du partage des revenus de retraite. Il serait catastrophique d'élargir l'application de ces règles. Elles sont mal conçues, surtout sous l'angle de l'égalité entre les sexes. Il est scandaleux qu'elles aient été mises en place sans faire l'objet d'une analyse sexospécifique correcte. Je serais profondément désolée qu'on en étende l'application.
    Ai-je le temps de poser une dernière question.
    Oui, pour une dernière question.
    Le ministère des Finances n'a pas de service distinct chargé de l'analyse sexospécifique. Chaque direction doit faire cette analyse dans son domaine. Selon vous, est-ce suffisant? Faudrait-il que le ministère charge un service distinct de ce travail? Dans quelle mesure cela est-il important?
    J'hésite à parler de la structure du ministère. Ce que je crois cependant, c'est que le ministère des Finances doit acquérir des compétences dans ce domaine, et cela veut probablement dire qu'il a besoin de nouveaux fonctionnaires qui ont une formation en analyse sexospécifique. Il y a une coupure entre le ministère des Finances et les spécialistes de l'égalité entre les sexes du reste de l'appareil gouvernemental. Il faut établir les communications pour que le ministère des Finances dispose des compétences dont il a besoin, non seulement en politique fiscale classique, mais aussi en analyse sexospécifique.
    Merci, madame Mathyssen.
    Passons aux interventions de cinq minutes.
    Ce sera d'abord Mme Minna, suivie de M. Stanton.
    Merci, madame la présidente.
    Dans un document que vous avez signé et que j'ai lu, madame Lahey — et je crois que Mme Philipps a dit la même chose —, vous signalez que les femmes occupent au fond une sphère économique différente de celle des hommes dans notre société. Je comprends bien vos explications. Madame Lahey — ou peut-être vous deux —, pourriez-vous donner un peu plus de précisions pour que nous comprenions quels sont les fondements de cette affirmation et comment nous devons, à mon sens, déconstruire la fiscalité telle qu'elle est structurée et imposée, et aussi mener la bataille sur le terrain, face à des attitudes et à des comportements profondément ancrés qui sont à la base de la structure de notre société? La tâche ne sera pas facile, mais c'est un travail dont, de toute évidence, nous ne pouvons pas faire l'économie.
    Madame Lahey — ou probablement vous deux —, pourriez-vous donner plus de précisions, car c'est très important, vu le travail que nous allons devoir faire? Vous avez parlé de la culture, madame Lahey, disant que le régime fiscal est structuré en fonction de la famille nucléaire, ce qui suppose certains a priori, un certain rôle pour les femmes, des stéréotypes profondément ancrés dans cette structure. Pourriez-vous, vous ou toutes les deux, expliquer davantage et peut-être nous donner des idées sur la façon d'entreprendre cette déconstruction? C'est un travail redoutable. Par où pourrions-nous commencer?
    Je termine en vous demandant de commenter un dernier point. Que pensez-vous du revirement en matière de fiscalité qui s'est fait en 1987, lorsque Mulroney était au pouvoir? Le taux le plus bas est passé de 6 à 17 p. 100 et ce taux s'appliquait à ceux qui gagnaient le moins, la plupart étant des femmes. On a donc placé le fardeau fiscal sur les épaules de la plupart des Canadiens à faible revenu. Cela pourrait bien... Je m'en remets à vous. J'en demande beaucoup, je sais.
    Pourrais-je répondre d'abord à la dernière question? Ce point est très éclairant.
    C'est pourquoi j'ai posé les deux questions en même temps. Elles me semblent liées. Je suis d'accord, allez-y.
    Revenons aux modifications apportées en 1987. Nous avions une structure de taux d'environ 13 ou 14 tranches de revenus. Elles étaient très étroites et s'élargissaient très progressivement. La courbe des taux était donc très lisse. Lorsque le taux de 6 p. 100 a été porté à 17 p. 100 et que le taux le plus élevé a été soudainement ramené de 34 à 29 p. 100, il nous est resté trois tranches, ce qui donnait une courbe presque plate. Mais même là, la restructuration des taux a eu des effets extrêmement différents sur les deux sexes. Par exemple environ 900 000 contribuables qui se trouvaient dans la tranche d'imposition de 23 p. 100 se sont retrouvés du jour au lendemain avec un taux de 17 p. 100. Or, 68 p. 100 de ces contribuables étaient des hommes. Ils ont eu de très belles réductions d'impôt. Mais les femmes qui étaient imposées jusque-là à un taux de 6 p. 100 sont passées du jour au lendemain à 17 p. 100: une augmentation de 11 points sur le taux le plus bas. Et 60 p. 100 de ceux qui sont passés de 6 à 17 p. 100 étaient des femmes.
    Si on passe en revue chacune des tranches d'imposition — ce que j'ai fait, car j'étais scandalisée de ce qui se passait alors —, on constate qu'il y a chaque fois ce double coup dur. Pour les revenus moyens des hommes, il y avait une baisse radicale, mais, comme les femmes ont toujours un revenu plus faible dans les tranches de revenu, leurs taux ont été radicalement majorés. À l'échelon supérieur, environ 77 p. 100 de ceux qui ont vu leur taux d'impôt fédéral ramené de 34 à 29 p. 100 étaient des hommes.
    Il y a donc eu un impact terrible sur les femmes, et cela dure depuis 20 ans. L'effet cumulatif de cette profonde restructuration sur les femmes, du point de vue de l'égalité entre les sexes, a été l'un des grands éléments qui ont beaucoup nui aux femmes.
    J'ignore si cette réponse suffit, mais je vais m'en tenir là.

  (1625)  

    Merci, madame Minna.
    Nous devons maintenant passer à M. Stanton, qui a cinq minutes.
    Merci, madame la présidente.
    Je vais partager mon temps de parole avec Mme Grewal.
    Madame Philipps, je suis intrigué par tout ce que vous avez dit aujourd'hui des dispensatrices de soins non rémunérées. À mes yeux, c'est un élément tout à fait essentiel. Une partie de notre travail, ici, est d'essayer de voir comment nous allons mener cette étude. Avez-vous des idées sur la façon correcte d'aborder ces questions dans une étude? Pourriez-vous proposer... Vous n'avez peut-être pas ce qu'il faut sous les yeux, mais vos idées seraient très utiles au comité. Il ne s'agit peut-être pas d'un groupe de la société dont nous pourrions facilement avoir des représentantes. Avez-vous des idées de la façon de mieux connaître leur situation?
    Il est essentiel de tenir compte de ces aspects dans toute analyse sexospécifique du budget. Je le répète, je serais ravie que le comité puisse tenir compte des deux grands rôles des femmes celui de travailleuses rémunérées et de dispensatrices de soins non rémunérées. D'habitude, elles jouent les deux à un moment donné de leur vie.
    Si vous abordez les femmes comme des personnes, non comme des personnes à charge ou des membres d'un ménage, vous irez beaucoup plus loin pour ce qui est de dire si leurs intérêts de dispensatrices de soins sont défendus ou protégés. Si on se contente de considérer le ménage et les réductions d'impôt des ménages, bien des choses passent inaperçues et la femme ne profite pas nécessairement de ces réductions. Il est vraiment essentiel de voir comment nous pourrions offrir des ressources directement aux femmes qui se chargent des soins, non au moyen de nouveaux crédits pour personnes à charge, mais par des programmes directs. Voilà mon idée.
    Madame Grewal.
    Merci, madame la présidente.
    Merci, mesdames Lahey et Philipps, à la fois du temps que vous nous consacrez et de vos exposés.
    Comme la plupart des Canadiens, je présume, lorsque je pense au budget fédéral, je pense aux dépenses. Mais elles ne sont qu'une partie du budget. Les revenus sont aussi un élément important, nous le savons tous. Étant donné vos fonctions de professeur et de chercheur qui se spécialise en droit fiscal, pourriez-vous dire comment cette budgétisation sexospécifique peut modifier la perception des revenus du gouvernement?
    Désolée. La question s'adresse à moi?

  (1630)  

    À l'une ou l'autre d'entre vous.
    Madame Philipps.
    Je vais peut-être répondre brièvement, après quoi je vais devoir partir.
    Comme Mme Lahey l'a dit, ce serait extrêmement révélateur. Si nous avions une ventilation selon le sexe de l'impact du régime fiscal sur les hommes et les femmes, cela révélerait des injustices qui sembleraient immédiatement intolérables. Pour l'instant, elles sont profondément enfouies dans le régime fiscal.
    Si on mettait ces injustices en lumière, sans même faire de recommandation de politique particulière, on rendrait un immense service et notre processus budgétaire s'améliorerait.
    Avant que vous ne partiez, madame Philipps, j'ai deux choses à vous demander.
    Vous avez dit que, à l'interne, le gouvernement peut recueillir et analyser des données ventilées selon le sexe et les publier. Quelles sortes de données ventilées devrions-nous examiner? Si je vous prends au dépourvu, vous pourriez nous faire parvenir cette information plus tard. Nous vous en serions reconnaissants. Premier point.
    Deuxièmement — vous en avez parlé et tous ont besoin d'y réfléchir —, les ministères qui font les dépenses devraient avoir une responsabilité. Sur quels ministères voudriez-vous que nous mettions l'accent, puisque nous devons nous attarder à cette question? DRHC, par exemple? S'agirait-il seulement des ministères qui ont une nette vocation sociale, des ministères qui appliquent des programmes?
    Je crois que ce serait un ministère important. Le ministère de la Justice est aussi très important, puisqu'il lui incombe d'élaborer des initiatives législatives précises. C'est aussi très important.
    Je suis désolée de ne pouvoir vous dire de façon plus catégorique de quels ministères il s'agit, mais je crois que vous avez mis le doigt sur le plus important, DRHC.
    Je vais réfléchir aux données ventilées selon le sexe qui seraient utiles et je pourrais communiquer avec vous à ce sujet. Ce serait très bien.
    Merci beaucoup. Je vous remercie d'avoir comparu. Je suis persuadée que tous vous en sont reconnaissants.
    Merci beaucoup.
    Madame Lahey, vous n'en avez pas terminé. Nous allons continuer à vous poser des questions.
    Madame Grewal, il vous reste environ une minute et demie, si vous voulez en profiter.
    Bien sûr.
    Merci, madame la présidente. Je vais poursuivre avec la même question.
    Comme nous le savons tous, un certain nombre de pays, surtout des membres du Commonwealth, pratiquent une forme de budgétisation sexospécifique depuis le milieu ou la fin des années 1990. Je présume que cela a permis aux chercheurs d'évaluer le succès de ces entreprises.
    Quel a été l'impact sur l'égalité entre les sexes dans ces pays?
    Question très importante. Le mieux est sans doute de voir quels pays ont adopté ce genre de budget de la façon la plus sérieuse et engagée et de considérer ensuite les indicateurs très complexes que l'ONU, le Forum économique mondial et bien d'autres organisations utilisent pour essayer de faire entrer dans les calculs les mesures de la qualité de vie aussi bien que les indicateurs économiques.
    Il est très prévisible que la plupart des pays nordiques, qui prennent très au sérieux la budgétisation sexospécifique depuis très longtemps sont ceux qui réussissent le mieux à relever leur niveau de développement humain et d'égalité entre les sexes. Ils devancent le Canada, et de loin.
    Voici un exemple. Je n'en ai pas la certitude, mais je crois que la Norvège s'efforce actuellement de refermer l'écart de dix points de pourcentage dans l'indice de développement des femmes par rapport aux hommes. Dans ce pays, il y a une égalité complète pour tous les indicateurs. La Norvège lance une campagne pour expliquer aux hommes qu'ils ont la responsabilité de prendre un congé de paternité pour que les femmes n'assument pas seules le fardeau du travail non rémunéré. C'est la prochaine stratégie la plus importante qui a été mise en évidence au moyen d'une analyse statistique attentive. Quels sont les obstacles qui empêchent de refermer l'écart entre les deux sexes?
    Nous pouvons nous tourner vers divers pays pour nous inspirer.
    Merci.
    Merci à vous, madame Grewal.
    Nous allons passer à Mme Thaï Thi Lac.

[Français]

    Ma question s'adresse à Mme Lahey.
    Pourriez-vous nous expliquer pourquoi les crédits d'impôt ne sont pas une façon efficace d'offrir des programmes sociaux?

  (1635)  

[Traduction]

    C'est également une question très importante.
    La réponse simple, c'est que le ministère chargé de l'impôt applique le programme. S'il s'agit de lutter contre la pauvreté, on ne doit pas confier à ce ministère le soin de régler le problème de la pauvreté. S'il s'agit de l'inégalité entre hommes et femmes, on ne doit pas non plus se fier à ce ministère pour régler le problème. Son travail est de percevoir des revenus.
    Il y a une deuxième considération, outre le fait qu'il faut confier la responsabilité à ceux qui doivent l'assumer, dans ce cas-ci, la ministre de la Condition féminine: lorsqu'on offre des programmes sociaux au moyen d'un instrument fiscal, il y a toujours un segment appréciable de la société qui ne peut se prévaloir des avantages fiscaux ou qui, pour quelque raison, craint de produire une déclaration de revenus pour obtenir cette aide qui atténuerait leur pauvreté. Certains peuvent avoir commis des irrégularités par le passé. D'autres, en raison de leurs antécédents culturels, peuvent craindre les autorités. La liste des raisons est interminable. Quand on décide d'offrir un programme social au moyen d'un crédit d'impôt, on décide de sang-froid de laisser de côté au moins 5 ou peut-être 8 p. 100 du groupe cible.

[Français]

    Je vous remercie.
    Quels indicateurs favorisant un établissement de la sexospécificité ne sont pas pris en compte dans les politiques structurelles?

[Traduction]

    Je crois que l'annexe B, qui vous a été distribuée, énumère un certain nombre de mesures fiscales qui, si on ventilait selon le sexe les données sur leur impact, aideraient à révéler à quel point des dispositions fiscales qui semblent innocentes peuvent avoir un impact négatif sur les femmes. C'est là une série d'exemples de ces mesures fiscales.

[Français]

    Puis-je vous poser une question, madame Lahey?
    Présentement, le gouvernement n'a pas l'obligation de soumettre les programmes déjà en place aux règles de l'analyse des genres. Il le fait seulement pour les nouveaux programmes ou pour ceux qui sont modifiés de façon importante.
    Ne croyez-vous pas qu'il serait important de faire table rase de tout cela et de s'assurer que tous les programmes soient soumis aux critères et aux spécificités de l'analyse des genres, pour s'assurer que ces programmes tiennent compte de vos préoccupations relativement aux crédits d'impôt et qu'ils tiennent compte également des problématiques économiques des femmes?

[Traduction]

    Oui.
    Il certain qu'il serait inacceptable de proposer que, à compter de 2008, on examine toute nouvelle mesure sous l'angle de l'égalité entre les sexes. Celles qui sont déjà en place causent du tort. Je dirais qu'il faut commencer par scruter ces mesures.

[Français]

    Je vous remercie beaucoup.

[Traduction]

    Merci. Vous avez une minute.
    Vous y renoncez? Très bien.
    Madame Mathyssen, vous avez cinq minutes.
    Merci, madame la présidente.
    Madame Lahey, je reconnais que vous avez de grandes compétences en la matière. Selon vous, quels devraient être les objectifs de la budgétisation sexospécifique?
    Songez-vous aux résultats socio-économiques généraux ou me demandez-vous plus concrètement quels documents il faudrait produire?
    Je songe plus précisément aux objectifs socio-économiques. Que devrions-nous viser?
    Idéalement, et il ne faudrait pas que ce ne soit qu'idéalement... Le Canada s'est engagé à assurer aux femmes l'égalité socio-économique complète. Tant que toutes les différences ne seront pas disparues, il faut poursuivre l'analyse sexospécifique des budgets pour examiner, quantifier, analyser et éliminer toutes ces différences. Il n'y a aucune raison de mettre à part un aspect de la société canadienne et de le soustraire à l'analyse. Les différences entre les femmes et les hommes sont trop omniprésentes, liées entre elles et se renforcent trop entre elles pour qu'on puisse jamais en isoler certaines pour les laisser en place.

  (1640)  

    Cela nous amène à ce qui s'est réellement produit. Pour le budget de 2007, des consultations portant spécialement sur les femmes ont eu lieu avec des groupes importants: Association des infirmières et infirmiers du Canada, Association des femmes autochtones du Canada et REAL Women of Canada. Il est certain que les deux premiers groupes sont importants. Le gouvernement devrait-il étendre ses consultations budgétaires davantage et s'adresser à un plus grand nombre de groupes? Si oui, lesquels?
    Selon moi, les consultations budgétaires devraient être menées auprès du plus grand nombre de groupes de femmes possible et du plus grand nombre de groupes de lutte contre la pauvreté. Il ne faut pas se préoccuper uniquement des différences entre les sexes, car un des grands facteurs en cause est la pauvreté. Tout groupe qui s'estime lésé par le fonctionnement du régime fiscal au Canada devrait être autorisé à présenter des mémoires. Limiter et tenter de gérer les témoignages que le Comité permanent des finances finit par entendre, c'est un moyen d'éviter de prendre connaissance de l'ensemble de la situation.
    Le ministère des Finances dit qu'un des obstacles à l'analyse budgétaire sexospécifique est qu'il est très souvent difficile de savoir quel segment de la population profitera de modifications particulières. Peut-on vaincre cet obstacle? Je reconnais qu'il y a des difficultés, mais peut-on les surmonter?
    Sauf votre respect, je crois que le gouvernement du Canada peut s'appuyer sur une extraordinaire compréhension de l'analyse sexospécifique; il n'est donc pas difficile de savoir qui profite de tel ou tel avantage. Le Canada a été dès le départ un des architectes de ce type d'analyse. Elle a débuté à l'ACDI. Elle a été exportée, et l'OIT l'a adoptée. L'ONU également. Les compétences ne sont pas limitées au Canada, mais il s'agit tout à fait d'un produit de la très riche histoire du Canada en matière de respect de la diversité et de soutien pour les moins fortunés. Je ne vois donc pas comment ce serait difficile.
    Vous voulez dire qu'il faut arrêter d'invoquer des prétextes et se mettre à l'oeuvre.
    Tout à fait.
    Il vous reste encore une minute.
    D'accord. Ce sera très rapide et très politique.
    Les budgets sont-ils, de façon inhérente, politiques?
    Oui, ils le sont. Je vais vous donner l'exemple des budgets favorables à l'égalité entre les sexes en Australie. Cette pratique a commencé au début des années 1980, sous un gouvernement travailliste. Cette formule a été adoptée à l'époque et elle était le produit du travail acharné de Yuri Grbich et d'un groupe de fiscalistes qui tenaient à présenter au grand jour la budgétisation sexospécifique.
    L'Australie a longtemps conservé cette pratique. Si on regarde le budget australien de 2007, je dois dire, sauf votre respect, qu'il se présente comme un discours de campagne. Il n'y a aucune analyse; il y a des déclarations sur ce qui se fait pour les femmes et on retrouve des slogans politiques. Il n'y a pas de données. Ce qu'on y trouve ne repose pas sur des faits. C'est un document que tout fiscaliste jugerait avoir été écrit pour un cours de débutant en sciences politiques.
    Merci, madame Mathyssen.
    Passons à Mme Davidson.
    Merci beaucoup, madame la présidente. Merci à Mme Lahey d'être là et de nous communiquer ses connaissances. C'est passionnant. L'étude que le comité a décidé de réaliser est une entreprise énorme. Lorsque l'idée a été avancée et que nous avons accepté d'y donner suite, je crois que nous le savions tous. Votre exposé et celui de Mme Philipps nous l'ont rappelé de belle façon: ce sera une entreprise redoutable.
    Le but de la séance d'aujourd'hui est de nous aider à définir les modalités de cette étude pour qu'elle soit une réussite. Nous savons que plusieurs autres pays pratiquent la budgétisation sexospécifique. L'Australie a été le premier. Vous avez fait une ou deux allusions à ce pays pendant vos interventions, mais il y en a beaucoup d'autres, comme la Suède, la Finlande et d'autres pays de la même région, ainsi que des pays d'Afrique, dont l'Afrique du Sud, et l'Inde, parmi d'autres pays. Je ne vois pas clairement comment amorcer le processus. On a dit que le ministère des Finances a un rôle crucial à jouer. Il a été question de DRHC et du ministère de la Justice, mais quelle serait la première étape du processus?
    Par ailleurs, les autres pays qui ont lancé des initiatives de cette nature ont-ils persévéré? Ont-ils réussi? On a posé une question sur la mesure des résultats, sur la façon de vérifier si nous réussissons. Un pays en est-il arrivé là? D'autres pays ont-ils évalué leur réussite? Si oui, comment s'y sont-ils pris?

  (1645)  

    Je n'ai pas vu de méta-étude qui établirait une corrélation entre les réponses budgétaires et l'évolution des indicateurs internationaux comme l'indice de développement humain et l'indicateur sexospécifique de développement humain, par exemple, mais il est très clair, à l'examen des corrélations, qu'une étude semblable donnerait les preuves que vous cherchez. Je n'en doute aucunement.
    Autre chose: si je peux me servir du logiciel limité de microsimulation que Statistique Canada laisse le public utiliser et dire exactement quels groupes, à quels âges, à quels niveaux de revenu, y gagnent ou y perdent si nous modifions une disposition particulière — une dépense ou un impôt —, que la différence soit de quelques dollars ou de quelques centaines de dollars, peu importe, et si je peux dire qui en profite, qui sont les gagnants et les perdants, il est probable que le ministère des Finances peut en faire autant, probablement même lorsque tout va mal. L'information est là. Le Canada a les compétences voulues. Ensemble, Statistique Canada et le ministère des Finances ont les moyens techniques nécessaires.
    Persévérer, cela dépend beaucoup de la volonté politique. Voilà ce qui s'est passé en Australie. C'est pourquoi la budgétisation sexospécifique est devenue plutôt symbolique, si on compare avec ce qui se fait dans certains pays nordiques.
    La vraie question est de savoir comment s'y prendre. Permettez-moi de revenir au budget des dépenses fiscales. C'est une entreprise énorme dont le ministère des Finances est venu à bout en fort peu de temps, à la fin des années 1970, lorsqu'on s'est aperçu que beaucoup de mesures de dépenses étaient déguisées en mesures fiscales et échappaient aux rigueurs du processus budgétaire. Le ministère a mis sur pied une équipe qui a été chargée d'élaborer un budget des dépenses fiscales et d'expliquer pourquoi il avait retenu les divers éléments. Ce budget a été élaboré en fort peu de temps, et il existe toujours.
    La capacité est là. On dirait que c'est une entreprise énorme, mais c'est en partie parce que c'est une entreprise énorme d'accepter dans le processus budgétaire de parler de l'égalité entre les sexes. C'est presque un obstacle social à surmonter plutôt qu'un obstacle technique.
    Quant à la réalisation de ce type de budget, je dirais que ce devrait être l'oeuvre commune de Condition féminine Canada, du ministère des Finances et d'un groupe d'experts conseils de l'extérieur, un groupe représentant tous les partis, qui peut peut-être, par des changements au gouvernement, avoir un effet modérateur qu'on pourrait décrire comme l'objectivité universitaire. Mais nous comprenons tous que tout le monde ne sera pas d'accord pour reconnaître cette objectivité à telle ou telle personne. Une structure comme celle-là permettrait d'amorcer le travail.
    Si le comité estime qu'il est trop difficile de s'attaquer à l'ensemble de la question tout d'un coup, je lui conseillerais de faire une étude approfondie du partage des revenus de retraite. J'ai fait une microsimulation de ce qui se passerait si le partage des revenus se faisait pour tous les contribuables au Canada. Les effets seraient catastrophiques. Il faut voir la courbe à l'annexe A. En un an, la situation deviendrait beaucoup plus dramatique.

  (1650)  

    Merci.
    Merci.
    Madame Neville.
    Merci beaucoup de votre présence parmi nous aujourd'hui.
    Je veux seulement signaler que votre étude a été réalisée grâce à des fonds de Condition féminine qui, nous le savons, n'existe plus.
    Vous avez terminé par le point que je voulais aborder, le partage des revenus. J'ai remarqué, lorsque Mme Philipps parlait, que vous hochiez de la tête. Je voudrais prendre connaissance de la projection que vous avez faite d'une application plus large de cette mesure, si vous pouvez nous la communiquer. Ce serait très utile et important pour le comité, selon moi.
    Je sais que nous sommes à court de temps, mais pourriez-vous donner plus de précisions sur trois points? Ce sont le partage des revenus, la Prestation universelle pour la garde d'enfants, dont vous parlez ici, et un autre point qui nous a beaucoup étonnés, et c'est peut-être à cause de notre ignorance, soit que les femmes à faible revenu qui touchent la prestation nationale pour enfants doivent rembourser 25 p. 100 des déductions réclamées pour les frais de garde. Je voudrais que vous parliez de ces trois points, s'il vous plaît.
    Vous avez parlé d'abord du partage des revenus, je crois.
    Ce partage a été proposé pour les revenus de retraite dans un effort pour imiter la méthode américaine de partage des revenus, système de déclaration des revenus qui a été adopté délibérément après la Seconde Guerre mondiale pour empêcher les États de continuer à adopter des lois sur la communauté de biens. C'est qu'un certain nombre de gens, au département du Trésor du gouvernement américain étaient très contrariés à la vue de toutes ces lois des États sur la communauté de biens qui donnaient aux femmes 50 p. 100 des biens et des revenus du ménage. C'était inédit.
    On a adopté délibérément le partage des revenus pour faire disparaître l'incitation fiscale à demander, sur le plan politique, la communauté de biens, et un certain nombre d'États ont immédiatement révoqué leurs lois sur la communauté de biens. Donc, les lois qui s'appliquaient à Irene Murdoch ont prévalu dans presque tous les États-Unis, appuyées par le partage des revenus.
    Je dirais que toutes les Canadiennes devraient avoir une compréhension plus poussée du partage des revenus.
    La Prestation universelle pour la garde d'enfants est un bon exemple de dépense directe pour les particuliers qui n'a pas été précédée d'une analyse sexospécifique. Le problème, c'est qu'elle ne représente pas assez d'argent — l'analyse sexospécifique au niveau statistique le montrerait, et des gens l'ont faite — pour permettre à une personne à faible revenu de surmonter les obstacles financiers qui l'empêchent de prendre assez de travail rémunéré pour survivre. Mais pour ceux qui peuvent se permettre de vivre d'un seul revenu élevé, il s'agit au fond d'un cadeau qui n'a pas à être comptabilisé. C'est un cadeau très coûteux à faire aux gros revenus, dans un pays où la pauvreté est encore très répandue.
    Les différentes récupérations dont la prestation nationale pour enfants fait l'objet sont la conséquence de son administration au moyen de la Loi de l'impôt sur le revenu. C'est ainsi que pensent les responsables de la politique fiscale: ils veulent s'assurer que personne ne reçoit plus que ce à quoi il a droit. Mais cela a pour effet d'ajouter d'autres barrières à la participation au travail rémunéré pour ceux qui doivent s'occuper d'enfants et ont aussi des revenus très faibles.
    Que recommanderiez-vous à ce propos?
    L'abrogation dans les trois cas. Ces trois mesures sont discriminatoires pour les femmes. Elles nuisent aux femmes.
    Le partage des revenus, notamment, est de plus en plus souvent abrogé dans tous les pays qui ont la capacité politique de revoir cette formule. En Allemagne, en ce moment, le gouvernement renonce à environ deux milliards d'euros par année à cause du partage des revenus. Et ce sont surtout la classe moyenne élevée et la classe supérieure qui en profitent. Cela ne rapporte rien aux pauvres.
    La réponse? L'abrogation.
    Merci.
    Merci.
    Madame Grewal.
    La budgétisation sexospécifique suppose une analyse de toute forme de dépense des revenus publics. Ce n'est pas une mince tâche de cerner les impacts sur les hommes et les femmes, les filles et les garçons, n'est-ce pas? Les gouvernements ne prennent pas simplement de l'argent à certains pour le donner à d'autres. Non, les gouvernements consacrent des milliards à des programmes dont les deux sexes profitent. Dans quelle mesure? Qui sait?
    Combien la budgétisation sexospécifique coûterait-elle au gouvernement? Combien de fonctionnaires participeraient à cette entreprise compliquée? Je voudrais savoir.
    Deux autres brèves questions. Pourquoi un budget avec pour seul objectif l'égalité entre les sexes? Qu'advient-il de divers autres groupes dans la population? On n'a pas accordé assez d'attention à leurs intérêts.
    Une autre question: qui établit les avantages que les femmes retirent d'une politique donnée et comment ces avantages sont-ils mesurés?

  (1655)  

    La première question est celle du nombre de personnes à engager et des coûts. Je l'ignore, mais il n'est pas étonnant qu'il se soit déjà fait autant de recherche au Canada sur une foule d'enjeux.
    Prenons par exemple les dépenses en défense. Certains diront que, comme les femmes représentent 51 p. 100 de la population, elles reçoivent 51 p. 100 des avantages qui découlent de ces dépenses. C'est une façon de voir. Il y en a une autre, et c'est de commencer à regarder combien de femmes touchent un salaire, reçoivent des prestations d'emploi, ont des occasions de formation précises, etc. grâce aux dépenses militaires. Et aussi combien de femmes reçoivent après le service les soins qui sont offerts aux militaires et comment le soutien public et social est réparti par l'entremise de diverses organisations sur les bases militaires entre les femmes et les hommes. Des questions comme celles-là permettent de commencer à voir comment les dépenses ont des effets différents selon le sexe. Ce travail a un certain coût, mais si l'ONU, le FMI et la Banque mondiale ont raison de dire que le PIB augmentera plus rapidement lorsque les femmes et les hommes travailleront de la façon la plus productive économiquement, je crois que les gains économiques à long terme l'emporteraient sur les coûts.
    Je suis tout à fait d'accord avec vous au sujet de la diversité, mais il a été montré que, tant que l'analyse sexospécifique n'est pas en place, il est très difficile de voir clair dans les autres caractéristiques de cette diversité, car, lorsqu'on analyse les impacts selon la race, le handicap, l'orientation sexuelle, l'âge — on peut prendre toutes les caractéristiques démocratiques qu'on voudra — les femmes sont toujours au deuxième rang. Il faut donc une analyse sexospécifique. On peut commencer par faire une analyse sexospécifique globale, ce qui enrichit toujours l'analyse et aide à mieux cibler les politiques efficaces du gouvernement ou on peut faire la ventilation selon d'autres caractéristiques et réunir à la fin toutes les données sur l'égalité des sexes.
    À mon avis, il faut commencer par le sexe, puisque c'est l'une des divisions les plus fondamentales, homme et femme — on lui donne peut-être beaucoup trop d'importance, du reste. Qui décide de ce qui est un avantage et un inconvénient? Je crois qu'il faut écouter l'avis des gens.
    Me reste-t-il du temps?
    Non. Je vous remercie beaucoup.
    Si le Bloc a une dernière question, nous pouvons l'entendre.
    Madame Demers, vous avez cinq minutes.

[Français]

    Merci, madame la présidente.
     Madame Lahey, je siège depuis peu au Comité permanent de la condition féminine, c'est-à-dire depuis un peu moins d'un an.
    Je n'ai donc pas participé à la rédaction de plusieurs des rapports qui ont été produits. Plus tôt, vous m'avez surprise lorsque vous avez dit que le Canada était un précurseur au chapitre de l'analyse des genres et qu'il avait même fait parvenir ses découvertes dans ce domaine. Vous avez aussi dit que l'ONU s'en servait pour ses propres bases.
    Selon vous, que s'est-il passé entre le moment où on était des précurseurs, où on allait de l'avant avec des analyses, des études et des choix politiques qui avantageaient ce type d'études et ce type de politiques, et le moment où on est passé au 18e rang dans le monde? Que s'est-il passé, selon vous? Qu'est-il arrivé entre ce moment et celui où la CEDAW s'est inspirée de nos études et de nos recherches?
    Conséquemment, puisque tant de travail a été fait d'avance... Les gens semblent beaucoup préoccupés par la quantité de travail que nous aurons à faire pour nous assurer que cette étude soit faite adéquatement. Puisque tant de choses ont déjà été faites, ne pourrait-on pas en profiter et partir d'une base solide? Je pense que votre idée de se concentrer sur le fractionnement du revenu est excellente. Je pense que cela fera fort probablement partie de nos discussions.
    Serait-il important de pouvoir utiliser ce qui a déjà été fait pour continuer et ne pas réinventer la roue?

  (1700)  

[Traduction]

    Oui, pour répondre à la première partie de votre question, je crois qu'un des facteurs qui ont un grand impact sur l'évolution que le Canada doit faire, ce sont les changements dans les courants économiques non seulement au Canada, mais aussi dans le monde entier. À un certain moment de l'histoire du Canada, on a beaucoup insisté sur la limitation des coûts aux niveaux fédéral et provincial. Si on avait fait alors une analyse sexospécifique, les gens auraient pris conscience que certaines compressions avaient un effet bien plus désastreux sur les femmes que sur les hommes, étant donné à la fois la nature des compressions et la vulnérabilité économique générale des femmes.
    Je crois donc que ce qui a fait reculer la cause de l'égalité des femmes, ces dernières années, c'est le fait qu'on n'a pas fait assez tôt une analyse sexospécifique des instruments fiscaux. Il faut se souvenir que le Canada s'est présenté à la conférence de Beijing, en 1995, en disant qu'il avait déjà obtenu l'accord de tous les ministères pour faire une analyse sexospécifique. Et certains ministères ont commencé à la pratiquer immédiatement.
    Je conviens qu'on peut faire beaucoup pour tabler sur le passé et on peut mobiliser dans ce processus une masse énorme de travail déjà fait. Mais nous savons tous que la loi qui semble changer le plus rapidement, c'est la Loi de l'impôt sur le revenu, n'est-ce pas? C'est deux fois par année, c'est aussi régulier que... quoi? Je ne sais pas. C'est probablement la chose la plus régulière que je connaisse.
    Pour cette raison, les règles changent constamment, et il faut toujours les revoir. Chaque fois qu'on modifie une disposition dans un budget, il y a des répercussions sur d'autres dispositions. C'est très fluide. Cette analyse, une fois en place, devra être revue sans cesse lorsque les rapports économiques trimestriels seront publiés, lorsqu'il y aura de nouveaux budgets, etc.
    Merci, madame Demers.
    J'ai un peu privé Mme Grewal. J'ai donc une minute pour M. Stanton.
    Merci.
    Seulement une brève question, madame, au sujet d'une chose que vous avez dite au cours de votre témoignage. Quelle information vous permet de dire que les décisions prises sur le partage des revenus de retraite ont été motivées par ce qui s'est fait aux États-Unis?
    Quelle information...?
    Est-ce simplement une opinion ou y a-t-il quelque chose...?
    Non, ce n'est pas une opinion. J'ai tiré cette conclusion après avoir suivi pendant des années l'évolution du programme du Parti réformiste et après avoir lu le programme du Parti conservateur. Le partage des revenus a toujours été un élément important pour ce secteur particulier du paysage politique, et, dans ces discussions politiques, on mentionne les États-Unis fréquemment, de façon récurrente.

  (1705)  

    Il y a eu une autre observation sur la notion de revenu... Il s'agit du partage des pensions, et je ne suis au courant d'aucune politique que le gouvernement aurait proposée au sujet d'un partage de l'ensemble des revenus, madame la présidente.
    Merci, monsieur Stanton.
    Madame Lahey, je tiens à vous remercier. Vous nous avez donné beaucoup d'information pour alimenter notre réflexion, ainsi que des paramètres pour nous orienter. Vous et Mme Philipps nous avez ouvert les yeux à... Nous pourrions aller dans tous les sens, mais l'accent a été... Nous sommes allés au premier plan. Si nous sommes sincères et si nous voulons obtenir un rendement sur l'argent de nos impôts, il est important de nous préoccuper aussi bien des revenus que des dépenses.
    Je vous remercie donc de nous avoir proposé cette analyse. J'ai une demande à vous faire. Vous avez parlé de Condition féminine Canada, du ministère des Finances et de spécialistes indépendants. Si vous aviez des noms de spécialistes indépendants à proposer, qui nous donneraient des idées sur la façon de mieux encadrer nos travaux, nos greffiers vous en seraient reconnaissants. Merci beaucoup.
    Merci.
    Nous voudrions suspendre la séance un instant.

    


    

    La séance reprend.
    Je signale au comité que, à la dernière séance, nous avons dit que, pour pouvoir étudier le Programme de contestation judiciaire, nous essayerions de voir qui est disponible et à quelles dates.
    Pour le mardi 4 décembre, deux conservateurs, trois libéraux et un néo-démocrate ont confirmé leur présence, mais personne du Bloc.

[Français]

    Je ne sais pas à quelle heure nous devrons quitter, madame la présidente.

[Traduction]

    Il s'agit de mardi, de 11 à 13 heures. La majorité des membres nous ont dit qu'ils seraient ici le mardi 4 décembre pour l'étude du Programme de contestation judiciaire.
    Nous en sommes restés là. Nous avons dit que nous ne pourrions étudier la question que si les membres étaient disponibles. Si vous voulez une séance de plus, ce serait possible. Nous avons demandé quels membres étaient disponibles. Nous avons demandé une liste de témoins, et on nous a soumis le nom d'un seul témoin, une seule personne.
    Oui, madame.

[Français]

    Madame la présidente, je n'ai pas répondu parce que je ne sais pas à quelle heure nous devrons quitter pour Genève, mardi. D'ailleurs, vous devez nous accompagner. Vous ne serez donc pas présente non plus.
    Merci, madame Demers, j'avais oublié.
    Nous revenons le 9 décembre et nous serons de retour au comité le 10 décembre.
    Vouliez-vous être présente pour la discussion sur le Programme de contestation judiciaire?

[Traduction]

    Désolée, madame Boucher.

[Français]

    Mme Demers aurait aimé être présente pour la discussion sur le Programme de contestation judiciaire, puisqu'elle l'avait demandé. Elle ne pourra donc pas être présente le 4 décembre. Il faudrait donc reporter cet item à votre retour de Genève.

[Traduction]

    Elle ne sera donc pas à Ottawa, et c'est vrai, je n'y serai pas non plus, mais nous pouvons toujours demander à Mme Davidson...

  (1710)  

    Je ne serai pas ici mardi. J'ai une autre séance de comité le même jour.
    Elle ne sera pas ici non plus.
    Il y aura une seule séance, et nous en voulons deux. La séance aura lieu le mardi 11 décembre.
    Je dois connaître l'avis du comité. Reportons-nous cette étude en janvier, à notre retour?
    Des voix: Oui.

[Français]

    Je n'ai pas d'objection à cela, si on veut entendre les témoins. Vous partez. Cependant, je sais que Mme Demers avait proposé la motion. Il serait donc bon qu'elle soit présente lors de la discussion sur le Programme de contestation judiciaire.

[Traduction]

    D'accord.
    Il nous faut une liste de témoins. Nous ne pouvons pas faire une étude avec un seul témoin.
    Madame Minna.
    Madame la présidente, je comprends que nous sommes tous occupés. Lorsque nous avons décidé d'ajouter une séance ici et là, nous comprenions qu'il pourrait toujours arriver que tous les membres ne puissent être là, mais il faudrait qu'ils demandent à quelqu'un d'autre...
    Il y a quatre personnes de ce côté-ci et trois de l'autre. À l'exception du NPD, nous avons donc tous plus d'une personne qui pourrait toujours transmettre l'information à ses collègues. Même si Mme Demers n'est pas ici, je présume que ses collègues pourraient la renseigner sur ce que nous avons fait.
    Si Mme Davidson ne peut présider la séance, peut-être Mme Mathyssen pourrait-elle le faire. Je ne sais trop s'il elle va ou non à l'Union interparlementaire.
    Nous n'aurions pas à rater la séance. Je ne comprends pas. Tous les membres qui sont ici aujourd'hui n'ont pas à être présents également à cette séance. Autrement, nous ne pourrons jamais travailler.
    Le mardi matin, je suis disponible, et je le suis aussi le 11 décembre. Cela nous donnerait deux séances et ce serait terminé.
    D'accord. Nous pouvons tous trouver des remplaçants.
    C'est une bonne idée, madame Minna.
    Et pourriez-vous nous présenter des noms de témoins? Nous avons dit que nous en voulions trois en faveur du programme et trois contre.

[Français]

    J'aurais aimé que Mme Demers soit présente, parce que c'est elle qui l'avait demandé.
    Avez-vous les noms?

[Traduction]

Nous avons besoin du témoin.
    Je sais, mais j'ai un léger problème.

[Français]

    Mme Demers a demandé de parler du Programme de contestation judiciaire, mais elle ne sera pas là la semaine prochaine.

[Traduction]

    Nous ferons cela à la deuxième séance.

[Français]

    Madame la présidente, croyez-moi, nous pouvons tenir la rencontre mardi le 4 décembre. Si je ne suis pas ici, je serai à bord d'un avion en train de vous parler.
    Merci, madame.
    Il se peut qu'on soit ici jusqu'à 13 heures. Madame la présidente, j'ai aussi des noms à vous transmettre pour la liste des témoins. Nous ne l'avions pas fait parvenir ce matin, parce que nous devions confirmer la disponibilité de certains témoins que nous n'avions pas joints la semaine dernière, mais c'est fait et vous aurez ces noms.

[Traduction]

    Magnifique. Il est donc convenu que nous aurons deux séances, une le 4 décembre et l'autre le 11, de 11 à 13 heures. Nous convoquerons six témoins pour deux séances ou huit pour deux séances. Nous pourrons liquider cette étude.
    D'accord?
    Des voix: D'accord.
    La présidente: Envoyez le nom des remplaçants, si vous devez vous faire remplacer.

[Français]

    Le 4 décembre, il se peut que vous ne soyez pas là, tout comme Mme Davidson. Mme Mathyssen sera donc présidente.

[Traduction]

    La greffière me dit qu'il est important d'obtenir les noms des témoins et aussi de choisir les témoins.
    Combien de noms avons-nous reçus jusqu'à maintenant?
    Quatre, de Mme Neville. J'ai la liste ici.

  (1715)  

[Français]

    Combien de témoins voulez-vous soumettre, madame Demers? Deux?
    Comme on ne peut pas avoir plus de temps pour les témoins, j'ai soumis les Femmes Autochtones du Québec et les CALAC, avec les coordonnées.

[Traduction]

    Voici ce que j'ai, la liste. Je vous prie de l'écouter attentivement. Je crois qu'il y a des avocates, des militantes et des fédérations du domaine fiscal. Je vais lire la liste: Sharon McIvor, avocate des Premières nations, de la Colombie-Britannique; Shelagh Day, de l'Alliance canadienne féministe pour l’action internationale; Karen Busby, de la faculté de droit à l'Université du Manitoba; Mary Eberts, avocate de renom et spécialiste des droits à l'égalité. Elle est de Toronto.
    Pour les minorités, la liste est la suivante: National Anti-Racism Council of Canada; Association des femmes autochtones du Canada; Ralliement national des Métis; Fonds d'action et d'éducation juridiques pour les femmes; Réseau d'action des femmes handicapées du Canada; Association nationale de la femme et du droit; Alliance canadienne féministe pour l’action internationale; Association canadienne d'études fiscales; Kathleen Mahoney, de l'Université de Calgary; Colleen Shepherd, de la faculté de droit de l'Université McGill.
    Et il y a les deux témoins de Mme Demers.
    Madame Neville.
    Il y a des recoupements, madame la présidente.
    Mary Eberts, dont vous avez donné le nom, représente l'Association des femmes autochtones du Canada. Karen Busby, de l'Université du Manitoba, a fait des interventions au sujet du Programme de contestation judiciaire au nom du Fonds d'action et d'éducation juridiques pour les femmes,
    Tout comme Kathleen Mahoney, qui représente aussi le Fonds d'action et d'éducation juridiques pour les femmes.
    D'accord.
    Madame Davidson.
    J'ai un autre témoin à proposer, Beth Atcheson. Elle a été présidente du Fonds d'action et d'éducation juridiques pour les femmes. Je peux communiquer ses coordonnées à la greffière.
    Elle a été présidente du Fonds, et il y a aussi deux autres membres du Fonds.
    Ces personnes ont des points de vue différents.
    D'accord. Il est excellent d'avoir des points de vue différents. Nous en avons besoin.
    La liste semble bonne. Pourquoi ne commençons-nous pas par cela?
    Oui, c'est une bonne liste. Nous pourrions avoir deux séances et vous pouvez...
    Nous ne serons peut-être pas tous disponibles.
    Non? D'accord.
    Nous allons laisser la greffière s'occuper de la question.
    Nous aurons ceux qui peuvent venir le 4 décembre, et nous pourrons nous attaquer à la question.
    Si vous avez d'autres noms, et s'il n'y a pas des noms en double, puisque nous avons la liste...
    D'autres choses à discuter? Non.
    La séance est levée.