:
Merci, madame la présidente.
Nous sommes ravis d'avoir été invitées à comparaître devant votre comité aujourd'hui. Comme vous l'avez mentionné, je suis accompagnée de Mme Anne Marie Smith, notre conseillère juridique principale. Nous sommes heureuses d'être ici pour vous parler de notre rôle et de notre mandat, ainsique du travail du Bureau du vérificateur général.
Je suis également heureuse de discuter du mandat du commissaire à l'environnement et au développement durable. Si j'ai bien compris, le comité voudrait savoir comment un modèle semblable pourrait s'appliquer aux budgets sexospécifiques.
Comme beaucoup d'entre vous le savent, le vérificateur général est un mandataire du Parlement. Nous vérifions les activités du gouvernement fédéral et nous fournissons au Parlement, de manière indépendante, de l'information, une assurance et des avis sur l'administration fédérale des fonds publics. En tant que bureau de vérification, nous ne pouvons pas commenter le choix des politiques. Certes, nous formulons des commentaires sur la mise en oeuvre d'une politique particulière dans nos rapports de vérification, mais nous ne nous prononçons pas sur le bien-fondé de cette politique en soi. Cela dit, nous préconisons la bonne gestion d'un programme. Madame la présidente, cette distinction est essentielle à notre efficacité. Le fait de ne pas se prononcer par sur le bien-fondé des politiques du gouvernement nous permet de maintenir notre indépendance et notre objectivité, et partant, notre crédibilité.
[Français]
Notre principale activité, bien sûr, est la vérification législative. Nous effectuons des vérifications de gestion des ministères et organismes fédéraux, des vérifications des états financiers annuels du gouvernement et des examens spéciaux et des vérifications des états financiers annuels des sociétés d'État.
Nos vérifications d'états financiers fournissent l'assurance que les états financiers donnent une image fidèle selon les principes comptables généralement reconnus du Canada et d'autres normes pertinentes.
Lors de nos examens spéciaux, nous évaluons les systèmes et les pratiques de gestion des sociétés d'État et formulons une opinion à savoir si l'on a l'assurance raisonnable qu'il n'y a pas de lacune importante.
Lors de nos vérifications de gestion, nous déterminons si les programmes gouvernementaux sont gérés en tenant dûment compte de l'économie, de l'efficience et des répercussions environnementales. Je désire souligner que nous n'effectuons pas d'évaluation de programme, c'est-à-dire que nous n'évaluons pas l'efficacité des programmes.
[Traduction]
Trois ou quatre fois par année, nous présentons au Parlement les résultats de nos audits d'optimisation des ressources, ce qui représente au total une trentaine de vérifications ou de chapitres de notre rapport. Ces chapitres peuvent porter sur des sujets qui touchent un ministère ou un organisme spécifique, comme les soins de santé fournis aux militaires, ou l'ensemble de l'appareil gouvernemental, comme l'utilisation des cartes d'achat et de voyage au gouvernement. Pour chaque audit, nous établissons des objectifs et des critères dont nous discutons avec les ministères avant de commencer. Un audit prend généralement de 12 à 18 mois. Tous nos travaux de vérification sont effectués dans le respect des normes de l'Institut canadien des comptables agréés. Ils sont réalisés selon une méthode rigoureuse et dans un cadre de gestion de la qualité.
[Français]
La Loi sur le vérificateur général donne à notre bureau le choix de déterminer les secteurs du gouvernement qui feront l'objet d'une vérification de gestion. Nous effectuons des évaluations des risques dans les ministères fédéraux et certains secteurs de gestion, par exemple les ressources humaines et les technologies de l'information, afin de cerner les sujets de vérification les plus pertinents.
Depuis 1995, le bureau a également un mandat précis en matière d'environnement et de développement durable, qui lui a été conféré par des modifications à la Loi sur le vérificateur général. Le commissaire relève de la vérificatrice générale et dirige un groupe d'une quarantaine de vérificateurs. Tous les travaux menés par ce groupe font l'objet des mêmes normes que celles appliquées aux autres membres du bureau.
Au nom de la vérificatrice générale, le commissaire fait rapport à la Chambre des communes sur toute question liée à l'environnement et au développement durable qu'il juge devoir porter à son attention. Le commissaire utilise le même processus de vérification que celui qui est utilisé pour toutes les vérifications de gestion. Encore une fois, l'accent est mis sur la bonne gestion d'un programme en matière d'environnement et non sur le bien-fondé de la politique même.
[Traduction]
Le commissaire est également chargé de surveiller et de vérifier le processus de pétitions en matière d'environnement et les stratégies de développement durable des ministères, et d'en rendre compte publiquement. Le processus de pétitions est unique: il permet aux Canadiens d'obtenir rapidement des réponses des ministres fédéraux sur des questions précises liées à l'environnement et au développement durable qui relèvent du gouvernement fédéral. Les pétitions incitent les ministères et organismes fédéraux à agir, notamment à lancer de nouveaux projets environnementaux, à faire le suivi des violations présumées et à modifier ou à clarifier des politiques et des pratiques.
Madame la présidente, voilà qui constitue un bref survol de notre rôle et de notre mandat, y compris celui du commissaire à l'environnement et au développement durable. Nous sommes prêtes à en discuster et à répondre à toutes les questions que pourraient avoir les membres du comité.
Merci.
Je vous souhaite la bienvenue à notre séance. Vous et moi nous sommes déjà rencontrées dans divers comités.
J'ai des questions très précises à vous poser car nous envisageons la possibilité de nommer un commissaire et de présenter une mesure législative en ce sens. Je veux comprendre votre processus de vérification. Votre vérification porte-t-elle spécifiquement sur une politique que le gouvernement a déjà énoncée ou, à tout le moins, sur des programmes spécifiques? Dans ce cas, déterminez-vous s'ils respectent l'objectif visé et si les dépenses respectent les règles, sans vous prononcer sur le bien-fondé de la politique proprement dite?
Jj'envisage dans un premier temps une mesure législative sur l'analyse comparative entre les sexes (ACS), et ensuite, la nomination d'un commissaire qui veillerait à... Un commissaire qui relèverait de votre bureau n'aurait pas un mandat aussi large, n'est-ce pas? J'essaie simplement de comprendre. Comment cela fonctionne-t-il pour le commissaire à l'environnement, par exemple? Quelle est la portée de son mandat? Je sais que vous avez mentionné certaines choses. Les mandataires ne peuvent pas commenter le plan d'ensemble du gouvernement, à savoir s'il...
:
Merci, madame la présidente.
Je vous remercie, madame Fraser et madame Smith, d'être parmi nous. Nous attendions tous et toutes votre venue avec beaucoup d'espoir parce que nous vous respectons énormément. Nous savons le travail que vous avez accompli déjà et nous espérons que par l'entremise de votre bureau, nous pourrons déterminer comment il est possible de s'assurer que l'analyse sexospécifique est réalisée à toutes les étapes de l'élaboration des budgets dans les ministères.
Je sais que parler des politiques et des mesures mises en vigueur n'est pas comme tel de votre ressort, mais j'aimerais quand même savoir si, à votre avis, il y a eu des modifications ou des améliorations au cours des dernières années concernant les mesures pouvant faire progresser la situation des femmes. Par exemple, on sait qu'une loi oblige le ministère de la Citoyenneté et de l'Immigration à mettre en pratique l'analyse sexospécifique. Je présume que votre groupe, quand il fait l'analyse des budgets de ce ministère, peut voir si ces règles sont appliquées.
Est-ce la façon dont ça fonctionne?
:
Merci, madame la présidente.
Nous vous remercions sincèrement d'être venues comparaître devant nous ce matin. C'est toujours un plaisir de vous entendre et de pouvoir bénéficier de votre expertise.
Vous pouvez constater qu'il règne au sein du comité une certaine confusion quant à savoir comment s'y prendre pour s'assurer que l'on effectue bel et bien une ACS. Nous avons effectivement un problème. Nous avons entendu un nombre considérable de témoins. Nous sommes plongés dans à ce dossier depuis un certain temps déjà. Diverses personnes nous ont expliqué quelles sont les attentes, ce qui se fait concrètement et qui est responsable du dossier.
Nous en sommes maintenant au stade où il faut que nous sachions comment déterminer si l'on fait ou non cette analyse. Nous nous posons les questions suivantes: A-t-on besoin d'un commissaire? A-t-on besoin d'une mesure législative? Votre bureau serait-il en mesure d'assumer cette tâche? Voilà les questions auxquelles nous voulons obtenir des réponses ce matin.
Si je ne m'abuse, vous avez dit qu'une mesure législative n'était peut-être pas nécessaire, qu'il suffisait que le gouvernement prenne un engagement ou adopte une politique claire, ou encore que le Cabinet donne une directive en ce sens — et je ne suis pas trop sûre d'où viendra la volonté d'agir —, pour pouvoir accomplir la même chose. Ai-je bien compris?
:
Je faisais référence au fondement sur lequelle nous pourrions fonder un audit. Pour nous, il est généralement important qu'il y ait une directive claire. Avant de demander des comptes aux ministères gouvernementaux et de leur dire qu'ils devraient faire quelque chose, nous préférons qu'il y ait quelqu'un, quelque part, qui leurt dise qu'ils doivent agir, quelqu'un d'autre que nous. Il est beaucoup plus facile de dire: « Voici ce que vous étiez censés faire », et: « Le faites-vous ou non? »
Il n'est pas nécessaire d'avoir une mesure législative pour faire cela. J'ai donné l'exemple des évaluations environnementales stratégiques. Aucune loi ne les exige. Le Cabinet a émis à l'intention des ministères une directive en ce sens et, comme le commissaire à l'environnement l'a signalé dans son rapport de février, les ministères n'ont pas obtempéré, ce qui n'est pas bon.
Par conséquent, s'il y avait une politique claire qui intimait aux ministères de faire cette analyse, comme notre rôle consiste essentiellement à fournir aux parlementaires une information, nous pourrions alors dire que les ministères sont censés faire cela, et vous faire savoir s'ils le font ou non.
Je sais que certains de mes collaborateurs ne seront pas très contents de moi car nous devrons probablement modifier toute notre planification, mais voici ce que nous pouvons faire pour votre comité. Si le comité veut savoir quel est l'état de la situation dans ce dossier, et s'il existe à cet égard une politique, nous pouvons lui communiquer cette information. J'ai pris connaissance de certains témoignages. Des gens affirment faire une ACS. Sur quelle base...? Le font-ils vraiment? Qui le fait et qui ne le fait pas? Nous pourrions peut-être même toucher à la qualité de l'analyse, bien que cela risque d'être plutôt compliqué pour nous d'aborder cela.
Nous pouvons certainement fournir aux parlementaires un état des lieux au chapitre de l'analyse comparative entre les sexes. De toute évidence, il nous faudrait collaborer avec Condition féminine Canada qui a un rôle très important à jouer dans ce domaine.
Cela prendra un certain temps. Comme je le disais, nos audits durent généralement de 12 à 18 mois, mais c'est le genre d'information que nous pouvons vous fournir.
:
En fait, le parcours qui a mené à la nomination du commissaire à l'environnement et au développement durable présente un parallèle intéressant. Le Bureau du vérificateur général a commencé à faire des vérifications sur des questions environnementales à la fin des années 80 et au début des années 90. Notre travail portait surtout sur la gestion de l'environnement. Nous nous sommes donc penchés sur un certain nombre d'aspects, sans doute les plus évidents — les pêches, la gestion des ressources naturelles, des choses de ce genre.
Au milieu des années 90, l'intérêt pour les questions environnementales était évidemment plus marqué, et le gouvernement avait sans doute certaines politiques relatives à la gestion de l'environnement qui remontaient aux années 80, au moins. Mais au milieu des années 90, le gouvernement a fait une déclaration. Il a exprimé sa volonté de renforcer la gestion environnementale, et c'est à ce moment-là que l'on a modifié la Loi sur le vérificateur général. On a exigé des ministères qu'ils présentent des stratégies de développement durable tous les trois ans, on a institué un processus de pétitions et on a créé un commissaire à l'environnement au Bureau du vérificateur général.
En ce qui concerne le travail qu'effectue le commissaire — les vérifications — il n'y a eu aucun changement. Il n'était pas nécessaire qu'un commissaire soit nommé en vertu de notre loi habilitante pour que nous fassions ces vérifications. Notre bureau les faisait déjà depuis plusieurs années. Ce qui était nouveau, c'était l'obligation de faire un audit des stratégies de développement durable, qui étaient nouvelles, et de gérer le processus des pétitions.
En somme, notre bureau n'a pas besoin qu'un commissaire soit nommé par voie législative pour étudier ces domaines.
Madame Fraser, j'aimerais exercer ma prérogative de présidente. J'ai écouté les questions de tous les intervenants; j'ai siégé au comité des comptes publics et je vous ai entendue exprimer beaucoup de frustration au sujet de problèmes qui sévissent dans les communautés autochtones au chapitre de l'optimisation des ressources.
Supposons que vous faites une vérification d'optimisation. Si le gouvernement dépense 200 milliards de dollars pour financer des programmes, des réductions fiscales ou d'autres mesures qui ne débouchent pas sur la justice sociale, étant donné que les Autochtones souffrent toujours de pauvreté, de problèmes d'eau potable, de pénuries de logements, etc., une ACS qui s'inscrirait dans un cadre exigeant que tous les ministères évaluent huit composantes pourrait-elle être un point de départ et un outil, si le vérificateur était mandaté pour faire un audit d'optimisation sur la façon dont le gouvernement dépense son argent?
Condition féminine Canada nous a dit qu'elle offre une formation. D'après leurs représentants, les organismes centraux font une ACS, mais lorsqu'une tierce partie procède à une vérification, il y a un écart considérable entre ce qu'est et ce que devrait être une ACS — vous savez, les budgets sexospécifiques, ses répercussions.
Si l'on vous demandait de faire une vérification de l'optimisation des ressources et que vous trouviez un cadre, cela aiderait-il?
:
Permettez-moi de revenir en arrière.
Comme je l'ai mentionné tout à l'heure, nous ne sommes pas habilités à faire des évaluations de programmes. Nous pouvons simplement déterminer si le gouvernement applique les principes de gestion qu'il est censé appliquer. Si l'on s'attend — et ce pourrait être simplement en vertu d'une politique ou même d'un engagement général du gouvernement — à ce que les ministères soumettent leurs politiques et leurs programmes à une ACS, nous pourrions faire une vérification qui révèlera si c'est effectivement le cas. Nous pouvons aussi leur demander s'ils font les évaluations nécessaires pour savoir s'ils atteignent les objectifs qui ont été établis.
Vous avez parlé des Autochtones. Le cas des Autochtones est différent car le gouvernement fédéral une responsabilité claire à leur égard . Prenons l'exemple de l'éducation: c'est une responsabilité qui lui incombe clairement. Nous avons donc demandé aux responsables s'ils assuraient la prestation de ces services et de quelle façon, et s'ils étaient au courant des résultats. Nous n'avons pas évalué nous-mêmes les résultats au chapitre de l'éducation; nous avons demandé aux ministères s'ils étaient au courant des résultats et comment ils s'y prenaient pour les obtenir.
Nous pourrions adopter la même approche en matière d'égalité entre les sexes, mais nous ne pouvons pas effectuer nous-mêmes l'évaluation des programmes. D'ailleurs, je soupçonne que c'est ce qui explique en bonne partie la frustration des groupes de tierces parties; les résultats ne sont pas à la hauteur de leurs attentes, mais pour parler sans détour, c'est le cas de nombreux programmes.
:
Je ne pensais pas avoir le temps d'intervenir, mais je suis heureuse de le faire.
Je voulais simplement obtenir une précision sur une ou deux choses. Je sais que vous vous êtes déjà exprimée clairement.
Je serai très honnête avec vous. Nous envisageons... Quoi qu'il en soit, j'ai présenté une motion, au nom de notre parti, qui préconise la nomination d'un commissaire, mais nous envisageons aussi de présenter une mesure législative.
Je ne devrais peut-être pas vous poser cette question, mais je vais la poser quand même. Certains témoins que nous avons reçus ont évoqué la nécessité d'une mesure législative. Le Royaume-Uni vient d'opter pour cette voie, et un grand nombre d'autres pays l'ont déjà fait. Il faut adopter une mesure législative pour garantir une ACS. Il faut aussi nommer un commissaire, mais pour qu'il puisse jouir d'une grande latitude, il ne faut pas qu'il soit rattaché au Bureau du vérificateur général. Il faut que cette personne puisse faire des commentaires, un peu comme le fait le commissaire aux langues officielles.
Je ne devrais peut-être pas vous demander votre opinion, mais peut-être pourriez-vous nous dire quelle option serait la plus efficace, étant donné que l'ACS est un dossier à la fois très large et très spécifique qui exige une attention soutenue, une attention qu'il n'a pas reçue jusqu'à maintenant.
:
Effectivement. Il est clair qu'il faut que ce soit un commissaire qui ne relèverait pas d'un bureau de vérification.
En ce qui a trait au rôle du commissaire à l'environnement, une multitude de groupes et d'organisations commentent la politique environnementale, qui compte trois étapes: l'élaboration, la mise en oeuvre et le suivi. Rares sont les personnes qui peuvent vraiment fournir des renseignements ou des conseils sur la façon dont la politique est mise en oeuvre. À notre avis, c'est le rôle que nous pouvons jouer en tant que bureau de vérification. Une fois que les parlementaires se sont entendus sur une politique ou un cadre législatif, nous pouvons leur dire comment le gouvernement réussit à les mettre en oeuvre. Et à vrai dire, il n'y a pas tellement d'autres entités qui peuvent faire cela avec l'indépendance et l'objectivité qui est la nôtre.
Tout dépend de ce qu'on veut. Il faut savoir si l'on veut quelqu'un qui intervienne au début du processus, qui sera là surtout pour fournir des conseils et qui soupèsera la politique envisagée, ou quelqu'un qui évaluera de quelle façon la politique est mise en oeuvre et quel est le bilan du gouvernement. Cela ne signifie pas qu'il faut nécessairement que ce soit l'un ou l'autre. Le bureau de vérification peut quand même se pencher sur la mise en oeuvre, et vous pouvez toujours avoir un porte-parole, mais il va de soi que toute personne qui se fait le champion d'une politique perd son indépendance et son objectivité dans ce dossier. Vous devez donc être très prudent dans votre façon de structurer le rôle de ce commissaire.
:
Bonjour, tout le monde.
Bonjour, madame Fraser. C'est très intéressant d'entendre ce que vous avez à dire.
Nous avons parlé d'un plan d'action dans le budget de 2008. Nous sommes de quatre partis politiques différents, ayant des mentalités différentes. Selon les différents témoignages que nous avons entendus, nous avons constaté qu'il y avait une volonté politique, peu importe le parti au pouvoir, mais il nous semble que plus nous avançons et plus la volonté politique... Je ne sais pas si c'est parce que ça nous paraît trop gros ou trop compliqué. Nous avons de bonnes idées, mais à un certain moment, nous cessons d'avoir des idées et ça s'arrête là.
J'aimerais savoir comment on doit s'y prendre pour avoir des balises afin que, peu importe le parti au pouvoir, ces balises restent en place et que nous ayons quelque chose à nous mettre sous la dent, pas seulement « du rêve », mais quelque chose que nous pourrions faire de longue haleine, sachant qu'il faudra plus de temps que seulement deux ou trois mois. Comme vous le disiez tout à l'heure, ça prend plus de temps que ça.
Quelle serait la meilleure avenue de solution — que le gouvernement change ou pas, peu importe le parti qui gouverne — afin que ce soit automatique qu'on fasse d'un budget sexospécifique quelque chose de durable?
:
C'est une excellente question.
Je crois qu'à la base de tout cela, il faut se demander quels sont, ultimement, les résultats qu'on voudrait atteindre, the outcome, pour la société.
Est-ce que le gouvernement — comme vous l'avez dit, peu importe le parti politique au pouvoir — définit clairement les résultats à atteindre? Quels sont les indicateurs? Il faudrait qu'on définisse clairement les résultats qu'on veut atteindre, avec des indicateurs de performance, et qu'on dresse un plan pour y arriver. Comme vous le disiez, il ne s'agit pas d'une affaire de 6 mois à deux ou trois ans. C'est une entreprise à long terme.
L'analyse est un outil pour arriver à ces résultats. Ce n'est pas l'analyse en soi qui permet d'y arriver, car on peut faire l'analyse mais le gouvernement peut l'ignorer dans une décision sur une politique. Ils n'est pas obligé d'en tenir compte nécessairement, mais si on peut faire le lien entre l'analyse, le programme et le résultat qu'on veut atteindre et que les résultats soient clairs, ce serait peut-être une avenue de solution.
:
Merci, madame la présidente.
Bienvenue, mesdames Fraser et Smith. C'est toujours agréable de vous recevoir aux divers comités auxquels nous sommes appelés à travailler. Votre expertise jette toujours de la lumière sur nos interrogations. Je dois vous dire que je vis beaucoup de frustrations, tout comme M. Pearson en a fait mention un peu plus tôt dans sa présentation.
Nous avons décidé d'étudier, au Comité permanent de la Condition féminine, l'analyse sexospécifique ou l'analyse comparative entre les sexes ou le budget des genres. Plus on avance, plus on découvre de multiples facettes. Lorsqu'on a décidé de vous inviter, c'était un peu afin d'étudier cet appareil qui m'apparaît comme un immense puzzle où chaque ministère est une pièce dans laquelle on essaie justement d'imbriquer cette analyse comparative des sexes. On se demandait comment le Bureau du vérificateur général pourrait trouver sa place dans l'établissement de cette analyse et avoir un certain droit de regard.
D'après ce que j'ai entendu dans le cadre de tous les commentaires et questions de mes collègues, la façon la plus facile serait probablement qu'il y ait une loi qui définisse les indicateurs, le cadre et le mandat, pour que vous, vous ayez une certaine emprise. Ce serait plus facile d'avoir...
:
Merci, madame la présidente.
Mme Minna a soulevé ce point parce que nous envisageons la nomination d'un commissaire à l'analyse comparative entre les sexes. Je voulais être sûre d'avoir bien compris vos propos quant à la meilleure façon de s'y prendre.
Je comprends que si nous nous limitons à une seule personne, le facteur temps entrera en ligne de compte. L'exercice pourrait prendre passablement de temps. Sous les auspices du Bureau du vérificateur général, qui existe déjà, on pourrait procéder de façon plus expéditive. Toutefois, vous avez ajouté que tout dépend du genre de commissaire que l'on veut. Voulons-nous quelqu'un qui intervienne d'entrée de jeu en fournissant des conseils, ou voulons-nous quelqu'un qui assure simplement une surveillance?
Pour couvrir tous les angles, serait-ce une bonne idée de s'assurer qu'à une extrémité, les ONG, les groupes de défense, fassent la promotion de l'égalité en menant des recherches et en exerçant des pressions? À l'autre extrémité, il y aurait le commissaire, qui pourrait déterminer si les recommandations des groupes ont bel et bien été mises en oeuvre par le gouvernement?
:
Merci beaucoup, madame la présidente.
Bonjour. [Le témoin s'exprime dans une langue autochtone.] Je vous apporte mes salutations dans la langue des Pieds-Noirs.
Je vous remercie de me donner l'occasion de prendre la parole devant le comité. Je vous suis reconnaissante de vos efforts de promotion d'un vaste plan d'action en vue de promouvoir l'égalité des femmes.
J'ai un très mauvais rhume que j'ai attrapé à Ottawa. Je serai peut-être forcée de m'arrêter et je m'en excuse à l'avance.
Je vais d'abord me présenter et expliquer brièvement le rôle du Conseil des femmes de l'Assemblée des Premières Nations.
Comme vous le savez, l'APN représente tous les hommes et les femmes des premières nations,indépendamment de leur lieu de résidence. Le rôle du Conseil des femmes est de s'assurer que l'APN défend de façon efficace les intérêts des femmes des premières nations. Le Conseil des femmes compte dix représentantes, une dans chaque région. En tant que présidente du Conseil des femmes, je siège également au comité exécutif de l'APN et je participe à la prise de décisions à ce niveau.
J'aimerais commencer mon exposé en vous présentant des arguments qui militent en faveur d'une analyse comparative entre les sexes culturellement pertinente. Premièrement, je vais énoncer la position de l'APN concernant l'approche intégrée de l'égalité.
En 2005, une commission du renouvellement a consulté les citoyens des premières nations au sujet du rôle et de la pertinence de l'APN. Le message qui est ressorti haut et clair, c'est que l'APN doit veiller à ce que le genre soit pris en compte dans l'ensemble des politiques, des mesures et des programmes. Aux yeux des femmes consultées, il était également important que le genre soit envisagé dans une perspective culturelle. Résultat, l'APN a élaboré un document-cadre sur l'analyse de l'équilibre entre les sexes dans les premières nations qui s'applique au travail de recherche, d'élaboration de politiques et de programmes.
Nous sommes convaincus que notre ACS produira de meilleurs résultats que d'autres approches pour les femmes des premières nations parce qu'est étayée par une compréhension historique de notre culture. On demande aux décideurs de prendre en compte le rôle central que jouaient les femmes dans les cultures amérindiennes avant l'arrivée des Européens, ainsi que les changements survenus, et leurs motifs, après les contacts avec les Européens. On leur demande de proposer des options fondées sur ce contexte. En somme, notre document explique comment les femmes des premières nations se perçoivent à l'heure actuelle et comment elles entrevoient leur l'avenir.
Nous espérons que tous les ministères fédéraux mettront en oeuvre notre ACS dans leur travail ayant trait aux peuples des premières nations. Toutefois, comme il est question aujourd'hui de budgétisation sexospécifique, je vais m'attacher à deux exemples qui démontreront pourquoi le ministère des Finances devrait appliquer une ACS qui tienne compte des différences culturelles.
Ensuite, je discuterai de la sexospécificité, du budget fédéral et du projet de loi C-31.
Permettez-moi de commencer avec un exemple d'une décision budgétaire prise en 2006, soit l'élimination du programme de contestation judiciaire. Si le ministère des Finances avait appliqué à cette décision une grille d'analyse de genre culturellement pertinente, on se serait peut-être demandé quelles conséquences l'élimination de ce programme aurait eues pour les femmes des premières nations. Cela aurait-il eu un effet positif ou négatif? Le seul fait de se poser la question aurait amené les décideurs à l'affaire Sharon McIvor.
Permettez-moi de prendre quelques instants pour expliquer le contexte de cette affaire à travers le prisme du genre et de la culture. Dans de nombreuses cultures des premières nations, l'identité est transmise par la lignée maternelle, un fait qui n'est pas reconnu par la Loi sur les Indiens. Depuis 1876, les femmes des premières nations qui ont épousé des Allochtones ont perdu le droit de vivre sur les réserves. Elles n'ont pas le droit de voter aux élections de bande, ni d'avoir accès aux mêmes services de santé que leurs frères.
En 1985, une modification à la Loi sur les Indiens a corrigé cette injustice, mais uniquement pour un petit groupe de femmes. Nous croyons qu'environ 200 000 femmes souffrent d'avoir été exclues de l'application de la modification de 1985. Sharon McIvor, une descendante de la bande de la Basse Nicola, est l'une d'elles.
Sharon a récemment gagné sa cause devant la Cour suprême de la Colombie-Britannique. Le gouvernement fédéral fait appel de la décision rendue dans l'affaire McIvor. En raison de l'élimination du financement des contestations judiciaires dans le budget de 2006, elle ne pourra peut-être pas assumer financièrement les coûts découlant de l'appel. À mon avis, si le ministère des Finances adoptait une ACS adaptée à la culture, il serait mieux en mesure de prévoir les conséquences des compressions. Encore mieux, il pourrait se fixer des objectifs en se demandant comment ils peuvent favoriser l'égalité pour les femmes des premières nations.
Cela m'amène à mon second exemple: le régime matrimonial de la propriété foncière. Cette année, le budget a raté une belle occasion de venir en aide aux femmes des premières nations. En l'occurrence, je veux parler du projet de loi sur les biens immobiliers matrimoniaux.
En vertu de la Loi sur les Indiens et du droit canadien, il est impossible de diviser les biens matrimoniaux entre les deux membres d'un couple des premières nations vivant sur une réserve en cas de rupture du mariage. Le gouvernement et l'APN ont organisé une série de consultations avec les femmes des premières nations en vue de trouver des solutions. Au cours de ces consultations sur le régime matrimonial de la propriété foncière, les femmes nous ont dit qu'elles voulaient avoir accès à des recours communautaires opportuns qui s'inscrivent dans leurs traditions culturelles. Malheureusement, le projet de loi dont la Chambre est présentement saisi ne renferme pas ces recommandations. Il forcera plutôt les femmes des premières nations à s'adresser aux tribunaux provinciaux.
Si c'est la solution que propose le gouvernement, une analyse budgétaire sexospéficique prenant en compte l'affirmation culturelle pourrait étudier des facteurs comme l'isolement, la langue et d'autres barrières qui entravent l'accès au système judiciaire. Le budget pourrait aussi réserver des fonds pour s'assurer que les femmes qui vivent dans des communautés reculées puissent avoir un accès opportun aux tribunaux et financer des initiatives d'éducation des femmes au sujet de leurs droits en vertu de cette mesure. Enfin, le ministère des Finances pourrait reconnaître la nécessité d'accroître le financement destiné au logement et y donner suite.
En conclusion, j'ajouterais que jusqu'à maintenant, l'APN n'a pas réussi à obtenir de financement pour assurer la mise en oeuvre de notre ACS. Cela dit, nous avons pressenti divers ministères, dont Santé Canada, pour amorcer des discussions. Nous sommes impatients que Santé Canada applique notre grille d'analyse aux enjeux de la santé car cela serait vraiment avantageux pour les femmes autochtones. Ainsi, nous savons que dans tous les groupes d'âge, les femmes affichent un taux de diabète supérieur aux hommes. Nous sommes convaincus qu'en tenant compte du genre et de la culture, on pourra mieux cibler les initiatives de prévention et de traitement pour aider les femmes des premières nations.
En dernier lieu, les approches sexospécifiques seront un thème clé à l'occasion du Sommet national des femmes autochtones 2008, qui se tiendra cet été à Yellowknife. Nous accordons une importance cruciale à l'équilibre entre les sexes car une telle approche nous aidera à bâtir une société plus juste et plus humaine, non seulement pour les premières nations, mais pour l'ensemble des Canadiens.
Merci.
:
Je vous remercie d'être ici ce matin, mesdames.
Madame McHugh, vous avez parlé de votre approche équilibrée, du cadre que vous avez développé pour vous assurer de mettre en place des outils pour aider les femmes autochtones à avoir une plus grande autonomie et une meilleure sécurité économique. Depuis quelques années, le ministère des Affaires indiennes et du Nord canadien, comme tous les ministères, est censé utiliser et introduire l'approche du budget sexospécifique dans les nouveaux programmes ainsi que dans les nouvelles mesures et politiques développées. Vous avez développé une approche spécifique à vos besoins et aux besoins de vos communautés.
L'avez-vous déposée au ministère des Affaires indiennes et du Nord canadien? Celui-ci en tient-il compte dans ses nouvelles politiques et ses nouvelles mesures? A-t-on demandé à vous consulter pour tenir compte de cette approche? Sinon, pouvez-vous expliquer pourquoi?
Mme Frawley-Henry a dit que vous aviez besoin de ressources pour réaliser les différents objectifs que vous vous étiez fixés. Avez-vous songé à appliquer vos programmes de promotion de la femme? Cette année, l'un des buts et des objectifs est-il de promouvoir l'égalité? Je pense qu'il y aura possibilité de déposer des projets d'ici le mois d'août. Vous auriez sûrement de l'aide pour implanter votre programme.
:
Tout le monde en a un exemplaire. D'accord.
Je voudrais apporter une précision à ce sujet. Si j'emploie le terme « indépendant » et que je ne rattache pas le commissaire au Bureau du vérificateur général, c'est que, dès le départ, j'ai toujours été d'avis qu'il fallait que le commissaire puisse travailler en toute indépendance. Après avoir entendu la vérificatrice générale ce matin et le panel d'expertes plus tôt cette semaine, je pense que cela s'impose de toute évidence. Le groupe d'expertes, qui a effectué des recherches, des études et des consultations mutiples, a recommandé de créer un bureau indépendant. En effet, une telle entité aurait les coudées plus franches et serait en mesure d'analyser et de surveiller les orientations stratégiques du gouvernement tout en jouant quelque peu le rôle de défenseur des droits. La vérificatrice générale a elle-même admis ce matin qu'un commissaire relevant de son bureau se limiterait principalement à faire une évaluation après coup. Il ne serait pas partie prenante du processus global.
J'estime que la nomination d'un commissaire est importante. Il existe déjà six mandataires qui font rapport au Parlement à l'heure actuelle, et les femmes représentent 51 p. 100 de la population au pays. D'ailleurs, les femmes ne sont pas les seules touchées. En effet, l'ACS ne concerne pas seulement les femmes, mais l'ensemble de la population, et le bureau du commissaire devrait disposer de l'autorité et des pouvoirs nécessaires pour faire rapport directement au Parlement. J'ai négligé de préciser dans ma formulatioin que le commissaire ferait rapport au Parlement. Je pense que c'est acquis, mais si quelqu'un veut apporter cette précision, fort bien.
:
Nous en sommes au point où nous allons simplement poursuivre nos travaux jusqu'à ce qu'on sache ce qui va arriver.
De fait, on nous a soumis un certain nombre de propositions et de suggestions intéressantes. Ce matin encore, on a préconisé une autre façon d'améliorer nos pratiques et d'intégrer la culture de l'ACS dans nos politiques et nos décisions. Je ne me prononce pas nécessairement pour ou contre cette idée spécifique. Tout ce que je dis, c'est qu'il faut l'examiner dans le contexte général de notre rapport final. Je suis d'avis qu'il serait peut-être préférable d'attendre d'en avoir terminé.
D'après notre plan de travail, il est prévu que le comité passe à l'étude d'autres sujets après le mois de mai. Je sais qu'à l'origine, on avait prévu que nos travaux sur la budgétisation sexospécifique nous occuperaient jusqu'en juin, mais compte tenu des propositions qui nous ont été soumises, si nous passons à un autre volet du plan et que nous commençons à y travailler, il se peut fort bien que nous terminions plus tôt notre étude sur la budgétisation sexospécifique. Chose certaine, les députés pourront intégrer ces recommandations dans le rapport final.
C'était là l'état de ma réflexion et la suggestion que j'avais à faire.