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FEWO Réunion de comité

Les Avis de convocation contiennent des renseignements sur le sujet, la date, l’heure et l’endroit de la réunion, ainsi qu’une liste des témoins qui doivent comparaître devant le comité. Les Témoignages sont le compte rendu transcrit, révisé et corrigé de tout ce qui a été dit pendant la séance. Les Procès-verbaux sont le compte rendu officiel des séances.

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CANADA

Comité permanent de la condition féminine


NUMÉRO 023 
l
2e SESSION 
l
39e LÉGISLATURE 

TÉMOIGNAGES

Le jeudi 13 mars 2008

[Enregistrement électronique]

(0900)

[Traduction]

    La première question à l'ordre du jour est la motion de Mme Demers. Nous avons décidé de régler cette question aujourd'hui, et nous nous donnons 20 minutes pour le faire.
    La motion est simple. Nous pouvons toujours en discuter jusqu'à la saint-glinglin, si tel est le voeu du comité, mais nous avons des témoins à entendre. Je vous incite donc à vous en tenir à des commentaires brefs et succincts en présentant votre point de vue, et si vous faites cela, tout ira bien.
    Vous avez la parole, madame Boucher.

[Français]

    Si on a à discuter de la motion, j'ose espérer que vous nous permettrez d'en parler.

[Traduction]

    Je pensais qu'on l'avait déjà fait. J'ai fait savoir à la greffière du comité que 20 minutes seraient réservées au début de la réunion pour en discuter, étant donné que nous recevons des témoins aujourd'hui.
    Madame Boucher, puisque vous semblez avoir des préoccupations, souhaitez-vous prendre la parole?

[Français]

    M. Stanton avait commencé, la dernière fois. Il avait quelque chose à dire.

[Traduction]

    Très bien. M. Stanton va pouvoir s'exprimer.
    Avez-vous modifié un peu la motion?

[Français]

    Madame la présidente, je m'attends à un amendement amical, que j'accepterai sûrement.

[Traduction]

    Très bien.
    Vous avez la parole, monsieur Stanton.
    Il y a deux éléments.
    Premièrement, je me demande si Mme Demers envisagerait de modifier le texte pour parler de tous les membres du comité permanent, plutôt que de parler uniquement des femmes. Ainsi, le texte serait plus conséquent et inclusif. Je me demande également si elle accepterait de remplacer le mot « dénoncer » par les mots « examiner les conséquences du projet de loi C-484 » et…
    Est-ce que le texte vous aide à comprendre?

[Français]

    Je n'ai jamais besoin de la traduction, madame la présidente.

[Traduction]

    Ah, bon; vous n'en avez pas besoin. Désolée.
    Autrement dit, il s'agirait de dire « examiner les conséquences du projet de loi C-484 pour les femmes du Québec et du Canada ».
(0905)
    Allez-y, madame Demers.

[Français]

    Madame la présidente, je suis favorable à certains aspects de ce que veut faire notre collègue. Je comprends très bien pourquoi il veut le faire et je suis d'accord sur le fond de sa pensée. Je suggère qu'on écrive les mots suivants :
Que tous les membres du Comité permanent de la condition féminine sollicitent l'appui des membres de leurs caucus respectifs pour reconsidérer le projet de loi C-484 et les conséquences dramatiques qu'il pourrait avoir sur les femmes du Québec et du Canada. 
     Je crois qu'on pourrait s'entendre là-dessus.

[Traduction]

    La formulation qu'elle propose est plus modérée. Elle propose de dire « reconsidérer le projet de loi C-484 », au lieu de parler des conséquences, etc.
    Pourriez-vous nous la relire, madame Demers?

[Français]

Que tous les membres du Comité permanent de la condition féminine sollicitent l'appui des membres de leurs caucus respectifs pour reconsidérer le projet de loi C-484 et les conséquences dramatiques qu'il pourrait avoir sur les femmes du Québec et du Canada. 

[Traduction]

    Très bien.
    Donc, vous supprimez… Vous dites: « sollicitent l'appui des membres de leurs caucus respectifs » au lieu de parler de l'appui « des femmes »; c'est bien ça?

[Français]

    Il est question « des membres de leurs caucus ».

[Traduction]

    C'est ça.
    Madame Davidson, vous avez la parole.
    Pourrait-on nous la relire une autre fois?
    D'accord.
    Pourrais-je vous lire le texte que j'ai sous les yeux? Il se lit ainsi :
Que tous les membres du Comité permanent de la Condition féminine sollicitent l'appui des membres de leurs caucus respectifs pour reconsidérer le projet de loi C-484 et les conséquences dramatiques qu'il pourrait avoir sur les femmes du Québec et du Canada.
    Y a-t-il d'autres observations?
    Allez-y, madame Boucher.

[Français]

    Non, je pose une question à mon adjointe.

[Traduction]

    Monsieur Stanton.
    Merci, madame la présidente. À mon avis, cet amendement fait ressortir le fait qu'il s'agit d'une décision que devra prendre chaque député individuellement. Selon moi, ce texte présente un certain point de vue. Il peut ne pas être partagé par d'autres députés, mais il les encourage à examiner la question de plus près, et j'estime que le ton est respectueux.
    Très bien.
    Monsieur Pearson.
    Je voudrais simplement dire à M. Stanton qu'il est préférable, selon moi, d'employer le terme « reconsidérer », puisqu'il s'agit de réfléchir à la question et d'inciter d'autres députés à faire de même. Donc, c'est approprié.
    Madame Mathyssen, avez-vous levé la main?
    J'étais justement sur le point de le faire, madame la présidente.
    À mon avis, cette motion est excellente. Je voudrais également dire que, d'après ce que nous savons de l'incidence du projet de loi C-484 sur les femmes et leur droit de choisir, et de la façon dont des projets de loi semblables ont été utilisés contre les femmes dans 37 États américains, il nous incombe à nous tous de nous informer le plus possible — et il existe beaucoup d'information à ce sujet — afin de nous assurer que les collègues qui font partie de nos caucus respectifs la possède. Il me semble que les décisions qui sont prises dans l'ignorance sont de très mauvaises décisions, même si elles sont prises dans un contexte privé et personnel.
    Madame Boucher.

[Français]

    J'aime beaucoup la façon dont elle a été amenée. Pour moi, le mot « dramatiques » pose problème parce que toutes les femmes connaissent les conséquences. J'enlèverais le mot « dramatiques », afin qu'on voie tous les aspects et pas seulement les aspects dramatiques. Il y a aussi des aspects physiques et psychologiques ainsi que les conséquences générales. J'imagine montrer cela à mes filles. Je ne suis pas certaines qu'elles trouveront le mot « drame »... On connaît les conséquences, alors je préfère utiliser l'expression « pour toutes les conséquences ».
    Comprenez-vous ce que je veux dire?
    Madame la présidente, je comprends très bien les préoccupations de Mme Boucher, mais je ne peux pas me permettre d'enlever le mot « dramatiques », parce que nous savons toutes et tous que les conséquences qui découleraient d'un projet de loi comme celui-là, d'une loi comme celle-là, seraient dramatiques.
    Johanne et moi sommes en train de préparer un document qui montre toutes les ramifications qu'un tel projet de loi peut avoir sur la vie des femmes, sur le droit au libre choix des femmes tel qu'il a été déterminé en 1988. Nous sommes en train de préparer un document que nous déposerons et que vous pourrez utiliser pour discuter avec vos collègues. Ce document présente les deux côtés de la médaille. Il n'expose pas seulement les bons côtés, mais aussi les mauvais. Vous serez alors mieux outillés pour en parler. Par contre, je ne peux vraiment pas me permettre d'enlever le mot « dramatiques ».
(0910)

[Traduction]

    Très bien.
    Monsieur Pearson.
    Étant donné ce que Mme Boucher vient de dire, Mme Demers serait-elle prête à accepter le mot « sérieuses »? Cela lui conviendrait-il?
    Y a-t-il d'autres observations avant que je ne mette la question aux voix?
    Oui, monsieur Stanton.
    Désolé, je n'ai pas bien entendu ce que vous venez de dire.
    Y en a-t-il d'autres qui voudraient faire des observations, avant que je ne mette la question aux voix?
    Pour moi, l'analyse de Mme Davidson du sens du terme « dramatiques » pourrait être bonne ou mauvaise. Il pourrait s'agir de l'un ou de l'autre. C'est un mot que tout le monde accepte. Personne ne dit que tout cela aura des conséquences funestes. Évidemment, si on y trouvait le mot « funestes », cela ferait une différence, n'est-ce pas?
    Je vais donc mettre aux voix la motion modifiée. Quelqu'un voudrait-il qu'on la relise éventuellement?
    Oui, madame Minna. Nous allons donc relire la motion pour votre gouverne.
    Je dois vous présenter mes excuses. J'étais en train de parler, et je n'ai donc pas réalisé que vous aviez commencé. C'est vrai, parce que Mme Demers et moi en avons discuté la semaine dernière et nous nous sommes entendues sur un texte.

[Français]

    Chers collègues, si vous écoutez...

[Traduction]

    C'est la dernière fois que je vais vous la lire, et ensuite nous allons la mettre aux voix.
    La motion se lit ainsi :
Que tous les membres du Comité permanent de la Condition féminine sollicitent l'appui de leurs caucus respectifs, pour reconsidérer le projet de loi C-484 et les conséquences dramatiques qu'il pourrait avoir sur les femmes du Québec et du Canada.
    Ce texte me convient très bien.
    Nous avons déjà discuté de l'opportunité du terme « dramatiques ». Comme la discussion est maintenant close, je vais mettre la question aux voix.

[Français]

    Madame la présidente, je demande un vote par appel nominal, s'il vous plaît.

[Traduction]

    Nous allons donc procéder à un vote par appel nominal sur la motion.
    (La motion est adoptée par 10 voix contre 0.)
(0915)
    Merci.
    Nous pouvons maintenant inviter nos invitées à venir nous rejoindre à la table.
    Nous accueillons ce matin Mme Kathleen Lahey, professeure au Département des études féminines à l'Université Queen's; Mme Armine Yalnizyan, directrice de la recherche au Conseil communautaire de la planification sociale de Toronto; et, Nancy Peckford, directrice des programmes à l'Alliance canadienne féministe pour l'action internationale.
    Je suis convaincue que vous avez été bien occupées la semaine dernière. Au moins, j'ai pu écouter les propos de Mme Lahey, et j'ai rencontré Nancy aux locaux du CRDI.
    Chacune d'entre vous voudrait sans doute faire un exposé de 10 minutes. Après avoir entendu vos exposés, nous allons immédiatement ouvrir la période des questions.
    Peut-être pourrions-nous commencer par vous, madame Lahey?
    Sans vouloir vous contredire, je vous signale que Mme Yalnizyan et moi nous sommes mises d'accord pour qu'elle parle la première, étant donné qu'elle peut vous donner un aperçu général de la situation en tant qu'économiste. Cela vous convient-il?
    C'est parfait. Normalement, nous suivons l'ordre des places occupées par les témoins à la table.
    Merci beaucoup, madame la présidente. Je suis ravie d'être parmi vous.
    Je dois néanmoins apporter deux précisions pour les fins du compte rendu. À l'heure actuelle, je suis l'économiste principale du Centre canadien de politiques alternatives et je ne suis pas non plus docteure.
    Le comité a maintenant l'occasion de dialoguer avec les citoyens et de les amener à réfléchir à ce qui compte par-dessus tout : notre qualité de vie. Et, il ne fait aucun doute que l'égalité des femmes est essentielle à notre qualité de vie.
    Les femmes représentent la moitié de l'électorat et presque la moitié des contribuables canadiens, par rapport à seulement 30 p. 100 il y a une génération. Selon les dernières statistiques, nous avons versé 42 milliards de dollars, seulement sous forme d'impôts sur le revenu, et ce montant continue à grimper. Nous sommes un groupe très important et nous méritons que chaque budget préparé par chaque gouvernement au Canada nous réserve une place de respect et d'égalité. Malheureusement, dans ce budget on semble avoir pensé aux femmes après coup seulement.
    J'ai lu le Budget de 2008, comme vous l'avez demandé, afin de voir quelles mesures pourraient éventuellement profiter aux femmes. J'ai rédigé un rapport exhaustif sur la question, que j'ai déjà soumis à la greffière du comité, mais pour ne pas vous faire perdre du temps, je vais passer directement à l'essentiel.
    Les femmes sont mentionnées six fois en tout dans le budget — deux fois, en tant que pêcheurs, et deux fois en tant qu'anciennes combattantes. Mais ce sont les trois autres mentions qui constituent le véritable bijou du budget. Dans un passage de 52 mots — par rapport à un document budgétaire qui 416 pages — on nous dit que la grande nouvelle budgétaire pour les femmes est une promesse — la promesse de définir un plan d'action destiné aux femmes.
    Mais, le fait est qu'il existe déjà un plan d'action qui a été élaboré par le Canada dans la foulée de la signature de la Plate-forme d'action de Beijing en 1995. Il faut croire que le ministre des Finances n'a pas reçu de note de service à ce sujet. Un plan d'action établi il y a une dizaine d'années dont personne n'a tenu compte est certainement un plan d'inaction, mais certainement pas parce que le plan original ne comportait pas les éléments appropriés.
    D'ailleurs, il ne sera pas nécessaire de réinventer la roue afin d'en arriver à un nouveau plan d'action. Il suffira de vous concentrer sur les mesures qui enfin feront tourner la roue. C'est à des comités comme le vôtre de déterminer ce que le gouvernement doit faire et de définir des projets d'amélioration ayant des résultats concrets positifs pour les femmes, vous avez la possibilité d'agir. En fait, vous auriez dû agir depuis longtemps.
    Nous savons très bien ce qui permettra de faire avancer la cause de l'égalité des femmes et d'améliorer la qualité de vie des Canadiens. Le Centre canadien de politiques alternatives est l'hôte d'un projet de coalition intitulé Alternative budgétaire fédérale. Cette dernière nous a permis d'établir le coût réel de bon nombre des objectifs dont vous allez parler dans les prochains mois. En plus de s'attaquer au problème des changements climatiques, de la remise en état de l'infrastructure communautaire, du régime d'assurance-médicaments et des besoins des membres des premières nations, ce premier budget compte en tout 17 milliards de dollars cette année.
    Vous allez peut-être réagir avec scepticisme en vous disant : « Dix-sept milliards de dollars! Où est-ce qu'on pourra bien trouver une telle somme? » Mais, le Budget de 2008, établi en prévision d'un ralentissement économique et d'une faible marge de manoeuvre, prévoit en réalité 43 milliards de dollars de dépenses sur trois ans. C'est plus de 17 milliards de dollars par année. Donc, il serait tout à fait possible, financièrement parlant, de faire quelque chose qui bénéficierait aux femmes canadiennes tout en agissant sur les changements climatiques et en renforçant nos villes. Mais, cela suppose que le gouvernement fédéral fasse deux choses fondamentales : premièrement, qu'il trouve une certain marge budgétaire, afin de pouvoir investir dans de nouveaux programmes ciblés; et, deuxièmement, qu'il s'assure que ces programmes sont conçus de façon à avantager les femmes. Il s'agit d'un changement d'orientation massif mais, après 20 ans pendant lesquels on a cherché à réduire l'action gouvernementale, c'est un changement nécessaire qui se fait attendre depuis longtemps.
    Le premier objectif du plan de 1995 consistait à intégrer l'analyse comparative entre les sexes dans chaque initiative d'orientation du gouvernement. Permettez-moi donc de vous expliquer les raisons pour lesquelles ce genre d'analyse est tout à fait essentiel pour ce budget, et pour tous les budgets. Quand on parle d'un budget sexospécifique, on ne parle pas uniquement du nombre de fois où l'on mentionne les femmes ou de mesures qui influent exclusivement sur les femmes. Une analyse comparative entre les sexes, effectuée à l'égard d'un budget, permet de lever le voile sur l'action gouvernementale et qui en bénéficie. Elle révèle le coût élevé des programmes politiques qui donnent la priorité aux réductions d'impôts depuis plus d'une décennie.
    Depuis des années, les femmes demandent des mesures de soutien sous forme de services de garde d'enfants, de logements abordables, d'études postsecondaires abordables, de meilleurs programmes d'intégration des immigrants et de reconnaissance de leurs capacités et d'accès à l'aide juridique. Dans les années 1990, on nous a dit qu'il fallait attendre en raison de déficits budgétaires. Eh bien, le déficit est épongé depuis longtemps, nous avons connu beaucoup d'années consécutives d'excédents budgétaires et, malgré tout, aucun investissement n'a été fait dans ces programmes qu'attendent les femmes depuis si longtemps, à cause justement des réductions d'impôts.
    Élu en janvier 2006, ce gouvernement minoritaire a réussi, en 25 mois seulement, à faire disparaître les excédents budgétaires d'autrefois, qui se montaient à plusieurs milliards de dollars, et qu'aucun autre pays industrialisé n'avait connus, si bien que nous avons à présent des budgets à peine équilibrés. Ce gouvernement a réussi à faire cela en utilisant l'excédent pour payer des réductions d'impôts et la réduction de la dette. En fait, le Budget de 2008 établit un nouveau record en ce qui concerne cette approche : il offre aux Canadiens 7 $ de réduction d'impôt et de réduction de la dette pour chaque dollar qu'il investit dans de nouveaux programmes.
(0920)
    D'ailleurs, dans son Budget de 2008, le gouvernement se targue d'avoir réussi, depuis qu'il a pris le pouvoir, à appliquer des réductions d'impôts de presque 200 milliards de dollars et de pouvoir réduire la dette de presque 50 milliards de dollars d'ici 2012-2013. Bon, je sais que la matinée n'est pas très avancée, mais je vous demande de prendre quelques instants pour réfléchir à cet état de choses : nous parlons de 250 milliards de dollars qui ne peuvent pas être investis dans des programmes qui permettraient de s'attaquer aux grandes questions de l'heure : nos villes qui sont en difficulté, les changements climatiques et la croissance toxique de l'inégalité des revenus.
    Pourquoi avons-nous sacrifié l'occasion rêvée que nous avions d'agir? Eh bien, c'était pour pouvoir offrir des réductions d'impôt. Soyons clairs : un programme politique qui privilégie les réductions d'impôt n'est pas un programme neutre; il favorise les plus riches et il favorise les hommes.
    Le Budget de 2008 nous a appris que 3 milliards de dollars par année de réduction de l'impôt sur le revenu des particuliers favoriseront les personnes se trouvant dans la tranche de revenu la plus faible. On voudrait nous faire croire que c'est une somme très importante — et ce n'est pas faux — et que cette somme favorisera les Canadiens à faible revenu.
    Mais, examinons de plus près les statistiques sur les impôts. Le fait est que 58 p. 100 des Canadiens assujettis à l'impôt ne dépassent pas cette première tranche de revenu, pour lequel le maximum est de 37 884 $. Environ 68 p. 100 des femmes, et 50 p. 100 des hommes, se trouvent dans cette catégorie. Cela veut donc dire que ces 3 milliards de dollars par année bénéficieront à la majorité des hommes et femmes canadiens qui sont assujettis à l'impôt. Mais, attendez une seconde : le budget nous apprend que les réductions d'impôt se montent à presque 200 milliards de dollars. Cela veut donc dire que, pour chaque dollar de réduction d'impôt bénéficiant à la majorité — surtout les femmes — 12 $ de réduction d'impôt bénéficieront à la minorité des Canadiens, dont les revenus sont plus élevés, et aux sociétés.
    D'ailleurs, le revenu de certains Canadiens est à ce point faible qu'ils n'ont pas à payer des impôts. Les trois quarts de tous les hommes canadiens profitent des réductions d'impôt, mais presque quatre femmes sur dix ne sont pas du tout touchées par le régime fiscal. Pourquoi? Eh bien, parce qu'elles ne gagnent même pas assez d'argent pour avoir à payer des impôts. Donc, pour quatre femmes sur dix, les réductions d'impôt sont sans intérêt.
    Cette dépendance à l'égard des réductions d'impôt, observée chez des gouvernements successifs, a changé la façon dont le gouvernement prélève ses recettes et à qui il les prélève. Au cours des 15 dernières années, le taux d'imposition du 1 p. 100 des contribuables les plus riches a baissé de quatre points de pourcentage, alors que les 20 p. 100 des contribuables les plus pauvres sont visés à présent par un taux d'imposition qui est plus élevé de trois à cinq points de pourcentage. Et, pour couronner le tout, le taux d'imposition d'une famille à revenu moyen est plus élevé maintenant de six points de pourcentage, par rapport à celui d'une famille se situant dans cette tranche de 1 p. 100 des Canadiens les plus riches.
    Lorsqu'on analyse ce programme politique axé sur les réductions d'impôt dans cette optique, on se rend compte que, chaque année, il devient de plus en plus difficile de le défendre.
    Vous savez, 200 milliards de dollars de réduction d'impôt représentent une somme très considérable. Voilà ce que cet argent n'a pas permis de faire, alors que ce sont les priorités des femmes du Canada : des villes vivables, des mesures de soutien destinées aux familles, des nouveaux débouchés, la réduction de la pauvreté, une vie exempte de violence et l'accès à la justice fondamentale. Et, toutes ces mesures ne profiteraient pas uniquement aux femmes, mesdames et messieurs; elles profiteraient à tous. Le Budget de 2008 et les deux budgets fédéraux précédents ne cherchent aucunement à répondre à aucune de ces préoccupations. Ce sont des budgets conçus pour aider les riches, mais pas nous.
    Les réductions d'impôt coûtent très cher. Elles limitent les ressources dont nous disposons. Elles nous empêchent d'agir. Elles dilapident les investissements réalisés par la génération de nos parents et compromettent l'héritage que nous souhaitons laisser à la prochaine génération.
    Promettre des réductions d'impôt, ce n'est pas une preuve de leadership; les réductions d'impôt sont faciles. Le leadership — le leadership responsable — consiste, lorsqu'on occupe un poste d'influence, à s'assurer d'exercer son pouvoir pour aider les personnes les plus vulnérables. Les vrais chefs de file exercent leur pouvoir pour construire des villes qui sont saines et dynamiques pour tout le monde — des villes qui offrent à tous la possibilité de réussir, de s'instruire et de trouver un juste équilibre entre les exigences professionnelles et les obligations familiales.
    Voilà en qui consiste les préoccupations des femmes du Canada. Ce sont des préoccupations qui sont négligées depuis trop longtemps dans l'exercice budgétaire du gouvernement fédéral. Donc, je vous exhorte à réfléchir longuement à la question que voici : quel genre de budget proposeriez-vous si votre plus grande priorité était le bien-être des femmes, des enfants et des familles?
(0925)
    Le gouvernement actuel a justement promis de proposer un tel plan. Or nous savons ce qu'il faut faire. Il s'agit d'avoir la marge de manoeuvre nécessaire pour le faire. Mais, cela suppose que l'on réfléchisse sérieusement au rôle des gouvernements et à ce à quoi doivent servir les impôts.
     Les prochaines mesures que vous allez prendre sont les plus faciles. En voici quatre que le comité peut prendre dès demain.
    Premièrement, engagez-vous à incorporer dans tous les travaux du comité l'analyse comparative entre les sexes relativement à toute question budgétaire. Demandez au ministère des Finances de faire une analyse comparative entre les sexes des grandes initiatives budgétaires relatives aux impôts et aux dépenses. Demandez qu'une étude soit effectuée de façon à déterminer qui bénéficie des mesures prévues. Demandez-leur aussi de vous donner une vue d'ensemble : c'est-à-dire, les conséquences macroéconomiques, et les coûts et les avantages d'un programme axé en priorité sur les réductions d'impôt et la réduction de la dette, par opposition à de nouvelles dépenses permettant d'exécuter le genre de programmes que revendiquent les femmes.
    Deuxièmement, choisissez exactement les catégories de revenu que vous voulez cibler comme principal bénéficiaire de votre plan. Je vous encourage vivement à cibler les contribuables faisant partie de la dernière tranche de revenu, c'est-à-dire ceux dont le revenu imposable est inférieur à 38 000 $. Pourquoi? Parce que cela correspond à deux tiers des femmes et à la moitié des hommes.
    Troisièmement, choisissez cette année trois mesures prioritaires, de même que trois plans d'action dans chacun de ces secteurs, et discutez-en en comité. Choisissez-en trois autres l'année prochaine, et discutez entre membres du comité de ce que vous allez faire. Quelles sont mes suggestions pour cette année? D'abord, des logements abordables pour les 68 p. 100 des femmes qui se trouvent dans la dernière tranche de revenu; des services de garde d'enfants pour les 74 p. 100 des femmes qui travaillent et qui ont de jeunes enfants; et, des études postsecondaires pour les 57 p. 100 des diplômées féminines accablées par un niveau d'endettement sans précédent lié à leurs études. Il y a toutes sortes de façon d'opérer des changements significatifs dans chacun de ces domaines. Je recommande que vous reteniez l'une ou l'autre de ces options et que vous examiniez l'Alternative budgétaire fédérale, pour avoir une évaluation du coût de ces mesures et d'autres objectifs. J'ai remis une copie du document en question à la greffière du comité.
    Et, la dernière chose que vous pouvez faire, à compter de demain, serait de commencer à préparer les arguments que vous ferez valoir auprès des membres de vos propres caucus concernant les mesures qu'il faudrait inclure dans le prochain budget, mesures qui amélioreront la vie des femmes et de leurs être chers.
    Nous savons tous très bien qu'une bonne partie du véritable travail du gouvernement s'accomplit en comité. Je vous transmets donc mes sincères remerciements pour l'occasion qui m'a été donnée de témoigner de nouveau devant le comité. J'attends avec impatience vos recommandations sur le contenu de ce plan d'action et l'approche adoptée à l'égard du budget de l'année prochaine.
    Merci beaucoup.
    Merci.
    La parole est maintenant à Mme Lahey.
    Je vous remercie.
    Moi, aussi, je voudrais apporter un éclaircissement pour les fins du compte rendu. Je ne suis pas docteure. Je suis professeure à la Faculté de droit de l'Université Queen's, et j'enseigne également au Département des études féminines.
    Madame la présidente et honorables membres du comité, je suis ravie d'avoir aujourd'hui l'occasion d'explorer avec vous cette question très importante. J'espérais qu'on aurait un semblant de budget sexospécifique cette année, au moment où le budget a été déposé, mais comme nous n'en avons pas eu, je vois cette réunion comme présentant l'occasion examiner certains éléments d'information qu'on aurait pu retrouver dans un véritable budget sexospécifique et qui intéressent les personnes préoccupées par l'incidence sur les deux sexes des activités du gouvernement fédéral.
    Je voudrais surtout aborder trois aspects fondamentaux du processus budgétaire. Je vais commenter brièvement le côté dépenses du budget, en m'attardant tout particulièrement aux conséquences fiscales des mesures proposées dans le dernier budget, de même que dans d'autres énoncés économiques du gouvernement actuel. Ce budget prévoit des changements fiscaux structurels pour ce qui est de la structure fondamentale des taux d'imposition, de même que quelques dépenses fiscales nouvelles et inhabituelles qu'il convient, d'après moi, d'éclairer le plus possible.
    S'agissant des dépenses prévues au budget, je voudrais vous raconter quelque chose qui, selon moi, correspond à la réaction que nous devrions tous avoir face à ce budget.
    Le lendemain du dépôt du budget, j'étais dans une réunion à côté d'une jeune femme qui venait de commencer ses études universitaires. Elle s'appelle Jessica Notwell, et elle est membre du Conseil pancanadien du développement économique communautaire des femmes.
    Lorsqu'elle a vu la somme affectée à Condition féminine Canada — et, il convient de préciser qu'il s'agit de 4 millions de dollars de moins par rapport aux crédits dont disposait ce ministère précédemment, et qu'on lui accordait cet argent pour faire un travail qui a déjà été plus ou moins réalisé au niveau ministériel — sa réaction initiale était de se dire que, s'il y a 16,6 millions de femmes au Canada, cela représentait 1,21 $ par femme. Elle m'a dit qu'elle ne comprenait pas ce budget et qu'elle ne comprenait pas ce gouvernement.
    Elle m'a dit : « Ce gouvernement donne 50 millions de dollars aux éleveurs de porcs. J'ai trouvé ce chiffre dans les documents budgétaires. Il y a 14,1 millions de porcs au Canada; cela veut donc dire que le gouvernement fédéral dépense 3,67 $ pour chaque porc au Canada, afin d'aider les éleveurs de porcs à s'adapter aux nouvelles réalités du marché porcin, mais seulement 1,21 $ pour chaque femme canadienne. »
    À l'époque, c'était une sorte de moment de découverte mais, rétrospectivement, je ressens très profondément le désarroi de toutes les femmes du Canada qui ont cherché à s'expliquer, dans un budget qui compte plusieurs centaines de pages, cette infime somme d'argent qui est donnée aux femmes. Je dirais qu'il est beaucoup plus urgent et important de prévoir des mesures qui tiennent compte des nouvelles réalités de la vie des femmes, quelles que soient les difficultés que connaissent actuellement les éleveurs de porcs en raison de changements qui s'opèrent dans les pratiques de commercialisation.
    En novembre dernier, je vous ai donné des chiffres qui correspondaient à une sorte de cliché ou aperçu général de la distribution des revenus entre les femmes et les hommes durant le cycle de vie dans son ensemble mais, depuis que je vous ai fourni ces renseignements, d'autres données ont été publiées qui montrent bien que la situation des femmes canadiennes est de plus en plus grave.
    N'oublions pas que le Canada a l'une des plus grandes économies de la planète. Le Canada est l'un des principaux pays membres de l'OCDE, qui représente les 30 pays les plus industrialisés. Le Canada est extrêmement riche à tous les points de vue, comparativement à d'autres pays. Au milieu des années 1990, le revenu des femmes qui travaillaient à plein temps avait déjà atteint 72 p. 100 de celui des hommes, et les femmes ayant un diplôme universitaire avaient déjà des gains correspondant à 75 p. 100 des hommes à cette même époque.
(0930)
    Mais, comme le démontrent les indicateurs de l'ONU, du Forum économique mondial et Social Watch, le Canada se place à présent bien après d'autres pour ce qui est faire rétrécir l'écart entre les deux sexes, par rapport à l'époque où il se situait au premier rang.
    En 2005, d'après les chiffres comparables les plus récents, les femmes qui travaillaient à plein temps avaient des gains correspondant à seulement 70,5 p. 100 que les hommes, en moyenne. Donc, l'écart entre les deux sexes se creusent de nouveau, et de façon importante. Les femmes ayant fait des études universitaires — qui ont un niveau d'endettement très élevé à la suite de leurs études, comme ma collègue vient de le mentionner — ont en moyenne des gains ne correspondant qu'à 68 p. 100 de ceux des hommes.
    L'écart entre les deux sexes est encore plus grand chez les femmes qui ont fait des études universitaires. On disait autrement qu'une femme devait avoir un grade universitaire pour obtenir autant qu'un homme n'ayant terminé que le 12e année du secondaire; mais, on dirait maintenant que des études supérieures sont également susceptibles de l'aider.
    Donc, la situation est grave et elle ne cesse de s'aggraver, et c'est la raison pour laquelle je voudrais me concentrer sur, d'une part, l'incidence d'une absence totale de dépenses prévoyant une aide directe pour les femmes et, d'autre part, les changements apportés à la structure du régime fiscal. De plus en plus, le gouvernement actuel met ce pays très riche et cette économie très prospère dans une situation où nous risquons de retomber dans une position déficitaire et, dans ce contexte, même l'octroi de moins de 1 milliard de dollars à l'enveloppe budgétaire pour le système d'éducation risquerait de faire retomber le pays en situation déficitaire.
    Permettez-moi donc de vous expliquer brièvement l'incidence négative, sur les femmes tout particulièrement, de l'actuel programme de réduction d'impôt. À cette fin, je me propose de vous présenter un document reproduisant une série de tableaux en espérant que vous l'avez reçu.
    Premièrement, j'aimerais parler des conséquences négatives pour les femmes des réductions structurelles qui ont touché les trois principales sources de revenu du gouvernement fédéral — la TPS, l'impôt sur le revenu des particuliers.
    Et là j'essaie de démontrer la fausseté des proclamations de politiciens qui passent bien lorsque ces derniers prononcent leurs petites phrases devant les journalistes — proclamation que des comités comme celui-ci, qui participent à la définition des politiques, doivent absolument examiner d'un oeil critique.
    Le gouvernement prétend que son programme de réduction d'impôt vise à stimuler l'économie, mais il est incapable de prouver que ce programme a réellement eu un tel effet.
    Le gouvernement affirme que ses réductions d'impôt sont proportionnellement plus importantes pour les personnes à plus faible revenu et présentent même des statistiques à la page 38 ou 90 — je ne me rappelle plus laquelle — du budget qui sont censées faire cette démonstration.
    Or ces statistiques présentent le montant global des réductions d'impôt en tant que proportion des impôts actuellement payés selon les différentes tranches de revenu. D'après ce tableau, la plus forte proportion des réductions d'impôt bénéficie aux tranches de revenu les plus faibles. Mais, c'est un peu comme si l'on disait à quelqu'un qui touche une allocation d'un dollar chaque semaine que vous allez réduire son allocation de 25 ¢. Cela correspond bien à une réduction de 25 p. 100 de l'allocation de cette personne. C'est un plus gros pourcentage que si l'on décidait de réduire de 100 $ l'allocation d'une personne qui touche 1 000 $ par semaine, ce qui correspondrait à une réduction de 10 p. 100; mais, quand vous prenez même un peu d'argent dans la poche de ceux qui en ont le moins, en réalité, vous en laissez davantage entre les mains des personnes les plus privilégiées.
    C'est une conception des avantages fiscaux des réductions d'impôt qui est tout à fait à l'envers, et pour moi, le premier tableau nous le démontre. Ici j'ai reproduit les plus récentes statistiques sur les tendances en matière de dépenses au Canada, indiquant combien d'argent les personnes faisant partie des cinq premières tranches de revenu au Canada consacrent aux biens et services auxquels s'applique la TPS. Ce que j'ai démontré ici, c'est qu'une réduction de 1 p. 100 de la TPS donne aux plus pauvres du Canada un avantage fiscal inférentiel : en moyenne, cet avantage se monte à 140 $ par année, cette somme correspondant au 1 p. 100 de moins qu'ils paient sous forme de TPS au moment d'acheter des biens et services.
(0935)
    Mais si vous regardez la colonne du quintile le plus élevé — les personnes qui dépensent, en moyenne, 62 000 $ ou plus pour des biens de consommation — vous allez voir que cette réduction de 1 p. 100 de la TPS leur met 622 $ de plus dans la poche.
    Maintenant, il faut doubler ces chiffres, étant donné qu'il y a eu deux réductions de 1 p. 100 l'une après l'autre. Les personnes qui font partie du quintile le moins élevé et ceux qui ont les revenus les plus faibles ont droit maintenant à un avantage fiscal global de 280 $ par année. Par contraste, les personnes les plus riches obtiennent un avantage fiscal global de 1 244 $. Ce que nous montrent ces chiffres, c'est que l'avantage fiscal associé à une réduction d'impôt ou de taxe qui s'applique à tout le monde va toujours bénéficier aux personnes les mieux nanties. C'est donc un avantage à l'envers. C'est le contraire de l'assistance sociale, dont le principe consiste à donner le maximum aux personnes qui en ont le plus besoin et qui en ont le moins.
    Or dans cet univers des réductions d'impôt, nous accordons les plus importants avantages financiers qui découlent des réductions d'impôt aux personnes qui en ont le moins besoin. Nous sommes en présence de cette notion tout à fait dépassée qui veut que si l'on permet aux riches de garder plus d'argent dans leur poche, les pauvres vont finir par en bénéficier par effet de ruissellement.
    Il s'agit donc d'une réduction d'impôt globale qui, d'après le gouvernement, coûte 12 milliards de dollars par année, et ce à compter de maintenant. C'est une somme plus importante que celle qu'il a fallu engager pour réduire le déficit. Et ce n'est qu'une réduction d'impôt générale et importante parmi d'autres que prévoit ce budget.
    Je passe maintenant au deuxième tableau, qui illustre le même principe par rapport à l'impôt sur le revenu des particuliers. Au deuxième tableau, je démontre que les personnes — et surtout les femmes dont les gains sont inférieurs à 10 000 $ — ne sont aucunement avantagées par une réduction de 1 p. 100 de l'impôt sur le revenue des particuliers. Il n'y a que les personnes dont le revenu imposable dépasse 47 000 $ par an qui en profitent pleinement; ces dernières vont toucher 378 $ par année. Encore une fois, ce n'est pas beaucoup plus que pour les personnes à faible revenu. Et il n'y a rien, ou presque rien, pour les Canadiens ayant le revenu le moins élevé.
    Le troisième tableau sur lequel j'attire votre attention vous présente les résultats pour l'impôt sur les sociétés. Parallèlement à la réduction du fardeau fiscal des plus riches et des contribuables canadiens à revenu moyen, l'impôt sur les sociétés diminue également très rapidement, plus rapidement que jamais auparavant dans toute l'histoire du Canada. En réduisant le fardeau fiscal des contribuables ayant les revenus les plus élevés et des sociétés, nous créons une situation où les Canadiens à faible revenu et à revenu modique deviennent des membres de la société canadienne qui paient des impôts.
    Le tableau 3 vous indique — à la dernière ligne — le montant global de tous les impôts et taxes: l'impôt fédéral sur le revenu; l'impôt provincial sur le revenu; la TPS; la TVP; l'assurance-emploi; et, les cotisations versées au Régime de pensions du Canada par les Canadiens à faible revenu, par opposition aux sociétés à faible revenu. La charge fiscale en 2008 pour les Canadiens à faible revenu correspond à 38,255 p. 100. La charge fiscale — tous les impôts et taxes compris — pour les sociétés à faible revenu — ce qu'on appelle les PME — correspond à 18,6 p. 100. C'est donc moins de la moitié pour les sociétés, auxquelles s'applique ce taux d'imposition jusqu'à concurrence de 400 000 $ de revenu chaque année. Je vais vous laisser ce tableau également.
(0940)
    J'espère qu'il me sera possible dans le cadre de nos discussions de vous parler brièvement aussi de l'application du principe du fractionnement du revenu aux comptes d'épargne libres d'impôt. Je m'en tiens donc à ces quelques observations en attendant.
    Merci beaucoup.
    Je suis désolée de vous couper la parole. Je suis convaincue que les membres auront beaucoup de questions à poser par la suite, et nous pourrons aborder cette question à ce moment-là.
    Nancy, je vous invite à faire votre exposé en vous en tenant à 10 minutes, si possible.
    Merci beaucoup.
    Tout à fait. Nous avons hâte de pouvoir répondre à vos questions.
    Je suis ravie d'être parmi vous aujourd'hui et d'avoir cette occasion de réfléchir à l'incidence du budget fédéral et à ce qu'il convient de faire à compter de maintenant.
    Comme vous le savez, l'AFAI, un regroupement d'organismes féminins et de défense des droits de la personne, préconise depuis longtemps que l'on adopte la budgétisation sexospécifique. En fait, nous arrivons d'une assemblée de la Commission de la condition de la femme des Nations Unies, à laquelle ont participé activement un certain nombre de délégués de l'AFAI représentant les différentes régions du pays. Le thème de l'assemblée de cette année, pour ceux et celles d'entre vous qui ne le savez pas, était le financement de l'égalité entre les sexes et l'émancipation des femmes. L'une des raisons pour lesquelles nous avons voulu être présentes est notre vif intérêt aux questions de financement d'initiatives visant l'égalité des femmes, des mécanismes qui permettent de le faire et comment il faut procéder concrètement.
    Ce que nous retenons, entre autres, de cette conférence, c'est qu'il y a beaucoup d'activités en ce moment, activités qui sont très sophistiquées, très précises et très bien planifiées touchant le financement de l'égalité entre les sexes.
    Dans ce contexte, bon nombre des discussions, conversations et groupes de réflexion de haut niveau faisaient ressortir la budgétisation sexospécifique comme mécanisme clé permettant de financer de façon concrète l'égalité entre les sexes, de façon à obtenir des résultats significatifs et valables qui profitent à tous les habitants d'un pays, aux familles, etc.
    Juste pour vous donner une petite idée, le Centre de recherches pour le développement international établi ici au Canada a financé une réunion d'experts sur la budgétisation sexospécifique où l'on a présenté le travail réalisé par les organismes établis dans divers pays ou des gouvernements qui utilisent l'analyse comparative des sexes. Ces pays comprenaient les Philippines, la Malaisie et le Kenya. Il y a donc des discussions très sophistiquées qui se déroulent actuellement sur l'impact de la politique fiscale et la façon de concevoir des régimes fiscaux pour que les femmes soient traitées équitablement. Comme Kathleen l'a mentionné tout à l'heure, me semble-t-il, nous constatons actuellement — et d'autres pays du monde font le même constat — que si l'on ne fait pas attention à la façon d'utiliser les deniers publics et de percevoir les recettes, ce sont bien souvent les femmes qui portent le fardeau le plus lourd pour ce qui est de leur contribution au régime fiscal. Donc, il faut vraiment être très bien renseigné lorsqu'on conçoit un régime fiscal de façon à offrir des dégrèvements aux membres de certains groupes, et bien comprendre, même si l'on pense que les mesures prévues auront un impact sur d'autres, ce n'est pas nécessairement le cas.
    L'autre chose qui nous a vraiment frappées était le nombre de pays — et là je parle d'organisations à la fois non gouvernementales et gouvernementales — qui font de la budgétisation sexospécifique, en dehors des projets soutenus par le CRDI; le CRDI est un organisme canadien. Il s'agit d'Israël, du Royaume-Uni, de l'Afrique du Sud, de l'Inde, de l'Ouganda et du Nigeria. Ce que nous trouvons très utile, en réfléchissant à cette question, c'est que ce phénomène ne se manifeste pas uniquement dans les pays du sud du monde; il est présent dans les pays du monde entier. Ce n'est pas uniquement pour améliorer la qualité ou l'efficacité de l'aide au développement que l'on adopte la budgétisation sexospécifique; c'est quelque chose qu'on fait lorsqu'on a à coeur la responsabilisation, la transparence, un gouvernement réceptif et sensible, et la bonne gouvernance, et voilà justement l'un des messages que j'ai retenus de cette conférence et sur lequel j'insiste aujourd'hui.
    Dans le temps qui m'est imparti aujourd'hui avant la période des questions, je voudrais dire que nous avons pris acte de l'inclusion d'un plan d'action dans le budget fédéral et de l'engagement pris par le gouvernement à ce chapitre. Nous sommes très heureuses de voir cet engagement vis-à-vis d'un plan d'action. Comme mes autres collègues vous l'ont déjà fait remarquer aujourd'hui, nous estimons qu'il est très important que ce plan d'action s'appuie sur le programme d'action de Beijing qu'il fasse fond sur le plan d'action qui existe déjà, soit le plan d'action fédéral pour l'égalité des femmes, un exercice très méthodique et exhaustif auquel ont pris part tous les gouvernements au Canada concernant la façon d'effectuer une analyse comparative entre les sexes et d'élaborer de bonnes politiques d'intérêt public qui tiennent compte des besoins des femmes.
    Le plan d'action fédéral pour l'égalité des femmes est encore disponible sur le site Web de Condition féminine Canada. C'est un document tout à fait accessible. Il explique en détail les conditions dans lesquelles l'analyse comparative entre les sexes est indiquée.
    Je voudrais donc vous rappeler brièvement la définition de l'analyse comparative entre les sexes retenue par le gouvernement fédéral. Voilà, et je cite :
L'analyse comparative entre les sexes repose sur l'hypothèse selon laquelle certains arrangements sociaux, économiques, culturels et politiques sont indissociables des politiques gouvernementales. Telle complexité exige un ensemble de réponses stratégiques et celles-ci ne peuvent manifestement négliger la nécessité d'évaluer les répercussions différentes que les politiques peuvent avoir sur les femmes et les hommes.
Une démarche fondée sur les différences entre les sexes assure que, dans l'élaboration, l'analyse et l'application des politiques, on tienne compte de la différence entre les sexes, soit de la nature des relations entre les hommes et les femmes, ainsi que des réalités sociales, de leurs attentes et des circonstances financières différentes des femmes et des hommes.
(0945)
    S'agissant maintenant du budget fédéral de 2008, je crois savoir que le ministère des Finances et d'autres ministères déploient certains efforts en vue d'adopter l'analyse comparative entre les sexes. Malheureusement, je ne vois rien qui me permettrait de conclure que leur conception de l'ACS repose sur ce cadre-là.
    Je m'inquiète de ce que la méthode employée pour effectuer une analyse comparative entre les sexes ne tienne pas compte en premier lieu de l'impératif de l'égalité des femmes. S'il est nécessaire d'assujettir le budget fédéral à une analyse comparative entre les sexes, c'est uniquement parce que nous craignons que la situation des femmes par rapport à l'économie, à la société et à leur famille soit différente et que, par conséquent, les mesures budgétaires — tant du côté des recettes que du côté des dépenses — aient une incidence différente sur elles. C'est un élément qu'il faut absolument garder à l'esprit dans le contexte de l'analyse comparative entre les sexes.
    On nous a dit, et un de nos groupes membres qui a participé à une table ronde ministérielle a reçu ce même message, que tous les aspects du budget fédéral étaient assujettis à une analyse comparative entre les sexes durant la période d'élaboration, avant que le budget ne soit déposé. Malheureusement, nous ne sommes pas convaincues pour le moment que cette analyse soit suffisamment approfondie, significative ou axée sur l'égalité pour déboucher sur des résultats positifs.
    Je voudrais donc vous présenter quelques recommandations avant de m'arrêter pour répondre à vos questions avec mes collègues Armine et Kathleen.
    À l'heure actuelle, l'AFAI préconise la création d'un poste de commissaire à l'égalité des sexes au sein du Bureau du vérificateur général. C'est d'ailleurs un élément de l'Alternative budgétaire pour le gouvernement fédéral qui, comme vous le savez, représente un processus budgétaire parallèle s'appuyant sur les mêmes chiffres et les mêmes réalités économiques.
    À notre avis, il faut un mécanisme de responsabilisation fondamentale, et le Bureau du vérificateur général est bien placé pour assurer cette responsabilisation. Nous avons déjà un Commissaire à l'environnement et, à notre avis, il est tout à fait approprié de songer maintenant à la création d'un poste de commissaire à l'égalité des sexes.
    L'autre chose que je voudrais dire au sujet du budget fédéral de 2008 est que, encore une fois, l'un des principes clés de la budgétisation sexospécifique — et tous les pays qui l'ont adopté l'ont compris — est que ce mécanisme par lequel on élabore des budgets doit être plus transparent et plus participatif.
    Malheureusement, je n'ai guère de preuves que ni l'élaboration du budget, ni l'analyse comparative entre les sexes qui a pu être exécutée dans le cadre du processus budgétaire ont été effectuées après consultation avec des groupes appartenant à la société civile, qu'ils soient de gauche, de droite, ou centristes. Nous croyons savoir qu'un ou deux organismes féminins auraient été consultés dans le cadre de tables rondes ministérielles, mais ce niveau de consultation et les conditions dans lesquelles des consultations de ce genre se déroulent sont tout simplement insuffisants pour permettre d'en arriver à un budget qui tienne réellement compte des besoins des deux sexes et qui reconnaisse les réalités économiques des femmes en essayant d'y réagir de façon positive.
    Nous sommes donc d'avis que, pour tout budget fédéral futur — et il incombe au comité d'expliquer cela en termes très clairs — il faut prévoir un processus de consultation en bonne et due forme qui comprend les organismes féminins et qui s'appuie sur une stratégie cadre pour l'égalité.
    Et, la dernière chose que je voudrais vous dire avant que vous n'ouvriez la période des questions est que l'une des autres raisons pour laquelle il convient d'adopter la budgétisation sexospécifique est d'aider les pays à concilier leurs engagements internationaux et les réalités intérieures.
    Pour le Canada, l'une des meilleures façons d'y arriver consisterait à examiner les recommandations qui ont été faites par le Comité des Nations Unies sur l'élimination de la discrimination contre les femmes en 2003. Il y a toute une série de recommandations qui tiennent compte des réalités féminines, qui englobent, entre autres, les logements abordables, la pauvreté, l'emploi, les services de garde d'enfants et la discrimination contre les femmes autochtones.
    Je peux fournir au comité un exemplaire des recommandations. Il s'agit d'un document public.
    De plus, l'adoption de la budgétisation sexospécifique au Canada signifie qu'il faut examiner notre bilan en matière de défense des droits de la personne, à l'égard des femmes surtout — et, quand je parle des « droits de la personne », je fais allusion à l'égalité, non pas strictement civile ou politique, mais plutôt sociale et économique — et évaluer les budgets en essayant de déterminer comment on peut donner suite à ces recommandations. En l'absence de ce genre d'exercice, je ne suis pas convaincue que la budgétisation sexospécifique sera une activité valable et utile pour les personnes qui la revendiquent et qui seraient susceptibles d'en bénéficier.
    On nous a dit aujourd'hui que les femmes, du fait qu'elles prédominent dans les dernières tranches de revenu, ont besoin de mesures bien spécifiques. Mais, si ces dernières ne s'appuient pas sur une stratégie cadre pour l'égalité qui donne la priorité aux réalités économiques des femmes et qui n'a pas peur de les nommer, elles ne réussiront pas.
(0950)
    Enfin, je vous fais savoir que j'ai préparé des questions qui devraient faire partie d'une analyse comparative entre les sexes. Les voici : quels sont les effets des récentes réformes du régime fiscal sur les deux sexes; quels sont les effets sur les deux sexes de la décentralisation budgétaire; la politique budgétaire est-elle sensible aux besoins des citoyens; les protections sociales et les systèmes d'assurance sociale sont-ils suffisants; et quels sont les effets de différentes stratégies de réduction de la dette?
    Voilà quelques-unes des questions que vous, en tant que comité, devez poser au ministère des Finances et à d'autres ministères, et qui doivent faire partie intégrante d'un exercice de budgétisation sexospécifique rigoureux et valable.
    J'attends donc avec impatience vos commentaires et vos questions, et je vous remercie de m'avoir invitée à témoigner aujourd'hui.
    Merci beaucoup.
    Madame la présidente, pourrais-je demander qu'une copie des questions soit remise à la greffière?
    Je pense que Mme Yalnizyan a parlé d'un document qui nous serait transmis, mais nous ne l'avons pas reçu.
    Il n'a pas été traduit? Ah, bon.
    Merci.
    Nous ouvrons le premier tour de questions.
    La parole est d'abord à Mme Minna, qui dispose de sept minutes.
    Merci, madame la présidente.
    Merci à vous trois d'être revenues nous voir. Nous avons eu des discussions assez intéressantes et rencontré toutes sortes de personnes différentes, et je pense que nous commençons à y voir plus clair.
    J'ai des questions précises à vous poser au sujet de la structure du régime fiscal. Je dois admettre que j'étais assez surprise de voir vos chiffres, car je n'avais même pas songé à la possibilité de ramener le taux d'imposition à 15 p. 100. On a toujours tenu pour acquis que ce genre de mesure profite exclusivement aux personnes à faible revenu, et à personne d'autre.
    Je voudrais donc vous demander de nous expliquer comment il se fait qu'une personne ayant des revenus plus élevés finisse par réaliser une économie plus importante qu'une personne dont le revenu est inférieur, mis à part les membres de la société qui ne paient pas d'impôt du tout et qui n'en profitent donc pas? Pourriez-vous nous aider à bien comprendre cette réalité?
(0955)
    Oui. S'agissant de l'impôt sur le revenu des particuliers, chaque contribuable qui fait une déclaration d'impôt et qui a un revenu imposable est imposé au même taux pour la première tranche de revenu jusqu'à concurrence de 37 800 $. Pour cette première tranche, le taux d'imposition est de 15 p. 100. Si quelqu'un a un revenu imposable de 1 million de dollars, il paiera un taux de 15 p. 100 sur les premiers 37 800 $; autrement dit, on n'applique pas tout de suite le taux le plus élevé à la totalité de son revenu. Pour cette première tranche de revenu de 37 800 $, tout le monde est imposé au taux de 15 p. 100.
    Pour ce qui est de la tranche suivante de revenu, tout le monde au niveau fédéral est imposé au taux de 22 p. 100. Donc, si un contribuable a un revenu imposable qui dépasse 37 800 $, il paiera 22 p. 100 — mais seulement sur ce revenu additionnel — la deuxième tranche.
    La troisième tranche concerne les personnes dont le revenu dépasse environ 78 000 $. Ces dernières sont imposées selon le taux marginal d'imposition le plus élevé, mais seulement pour la troisième ou la quatrième tranche de revenu.
    Pensez à un triangle et à des tranches…
    Un peu comme un gâteau.
    En d'autres termes, tous les contribuables profitent de la réduction de 1 p. 100, mais ce sont les personnes dont le revenu se situe dans la dernière tranche ou la tranche intermédiaire qui ont un vif besoin de revenu supplémentaire. Personne d'autre n'en a réellement besoin.
    Oui. Je comprends.
    Pourrais-je intervenir?
    Il y a plus de 15 millions de contribuables. Il y a 22 millions de déclarants, mais seulement 15 millions de contribuables, environ — j'arrondis les chiffres. Ce taux de 15 p. 100 vise 15 millions de personnes; 50 p. 100 des hommes et 68 p. 100 des femmes se trouvent dans la dernière tranche de revenu, si bien que ce sont surtout ces gens-là qui sont visés par ce taux.
    Mais, il y a un autre élément qu'il convient de prendre en compte. Trente-et-un pour cent de tous les déclarants ont des revenus à ce point faible qu'ils n'ont pas à payer des impôts. Donc, en réalité, les Canadiens les plus pauvres ne retirent aucun avantage de cette réduction du taux de 15,5 p. 100 à 15 p. 100.
    En ce qui concerne les femmes, 38 p. 100 des femmes ne retireront aucun avantage de cette réduction du taux d'imposition, et ce sont les femmes les plus pauvres — disons qu'elles ont les revenus imposables les plus faibles. La plupart d'entre elles sont vraiment pauvres, mais il y a aussi la question du fractionnement du revenu qui entre en ligne de compte.
    Je me permets d'ajouter, pour pousser cette logique un peu plus loin, que j'ai examiné les plus récentes statistiques extraites des déclarations d'impôt en calculant qui aurait quoi. J'ai conclu que 22 p. 100 des déclarants ne retireront aucun avantage de cette réduction de 1 p. 100 du taux d'imposition; il s'agit des Canadiens les plus pauvres. Sur ces 22 p. 100, 63 p. 100 sont des femmes, et il est donc tout à fait juste de parler d'une situation inversée.
    Me reste-t-il du temps?
    Professeure Lahey, j'ai beaucoup de questions à poser, mais je vais les garder pour un troisième tour.
    Pourrais-je prendre une minute pour vous demander un éclaircissement?
    J'essaie de visualiser une déclaration d'impôt. Si le gouvernement augmente le niveau de revenu à partir duquel un Canadien doit payer un minimum d'impôt, est-ce que vous tenez compte de cet avantage-là? Par exemple, si le niveau de revenu passe de 22 000 $ à 38 000 $, en tenez-vous compte?
    Pourriez-vous répéter votre question? Que voulez-vous savoir au juste?
    J'essaie de comprendre pourquoi vous dites qu'un Canadien à faible revenu n'en profite pas, si le gouvernement décide que le seuil le plus faible à partir duquel un citoyen doit payer des impôts passe de 22 000 $ à 38 000 $. C'est ça que j'essaie de comprendre. Vous avez très bien expliqué la notion des tranches, mais je voudrais savoir si ce facteur-là est pris en compte et, deuxièmement, si l'exemption personnelle de base est également prise en compte.
    L'impôt minimum exigible tient forcément compte de l'exemption personnelle; c'est le point de départ, d'ailleurs. Quel que soit le montant, c'est à partir de ce montant que vous commencez à payer des impôts, à moins d'être parent seul ou d'être dans une situation… ou un seul conjoint a des gains.
    Donc, le seuil n'est pas relevé à 38 000 $; c'est la dernière tranche de revenu dont le maximum est relevé. Mais, à cause de l'indexation des tranches de revenu, le montant augmente automatiquement année après année.
(1000)
    Et en tenez-vous compte?
    Oui. Par exemple, d'après le Budget de 2008, au cours de la prochaine année, 700 000 personnes de plus seront exonérées d'impôt, simplement parce que le seuil continue à augmenter. À l'heure actuelle, 7 millions de personnes ne paient pas d'impôt.
     Mais, il y a eu des changements, comme l'augmentation du seuil. Chaque fois qu'on l'augmente, comme cela a été le cas dans les budgets présentés par un autre gouvernement, d'autres personnes cessent d'avoir à payer des impôts, ce qui veut dire que, lorsque vous modifiez le régime de l'impôt sur le revenu des particuliers, ces personnes ne sont pas touchées, étant donné qu'elles n'ont rien à payer. Les seuls à en bénéficier sont les contribuables.
    Merci. Je voulais simplement obtenir ces éclaircissements.
    À l'heure actuelle, 31 p. 100 de la population ne paient pas d'impôt; d'ici 2009, ce sera 34 p. 100.
    Je vous remercie.
    Veuillez continuer, madame Minna.
    Merci. Cette explication m'était bien utile également.
    Professeure Lahey, vous avez dit quelque chose qui m'a intrigué concernant la mesure de fractionnement du revenu prévu dans ce dernier budget. Je pense qu'aucun d'entre nous n'était au courant de cette mesure. Je pensais plutôt au fractionnement du revenu de pension, que prévoyait le dernier budget. La seule chose qui m'est venue à l'esprit était l'économie de 5 000 $.
    Pourriez-vous nous donner d'autres détails à ce sujet? Voilà quelque chose de très important que certains d'entre nous avons manqué — moi, en tout cas.
    C'est l'un des éléments « invisibles » du budget. Le compte d'épargne libre d'impôt étant le principe du fractionnement du revenu aux revenus d'investissement de tous les citoyens, et pas seulement ceux d'un certain âge qui touchent un revenu de pension. Si vous lisez tous les détails de la motion de voies et moyens, vous allez voir que le gouvernement prévoit de créer une exemption légale pour les comptes d'épargne libres d'impôt.
    Donc, si un parent a beaucoup d'argent en banque, ce parent peut verser 5 000 $ à son compte d'épargne libre d'impôt, et les gains réalisés seront exonérés d'impôt pour le reste de la vie de cette personne. Ce même parent peut également mettre 5 000 $ dans le compte d'épargne libre d'impôt de son conjoint ou de son conjoint de fait, et 5 000 $ de plus dans le compte des enfants.
    Donc, pour chaque membre de la famille, ce parent peut mettre 5 000 $ dans un compte d'épargne. Cela veut donc dire, en ce qui concerne la législation fiscale, qu'on considère que ce revenu a été gagné libre d'impôt par les autres membres de la famille, même si le contribuable ou le parent en demeure le propriétaire légal. Il s'agit essentiellement de se servir de tous les membres de la famille comme abri fiscal. Les règles d'attribution…
    Des voix: Oh, oh!
    Mme Kathleen Lahey: Mais, cela correspond bien au rôle historique des femmes en ce qui concerne la planification fiscale. Il y a celles qui cherchent à faire un riche mariage et celles qui servent d'abri fiscal.
    C'est plus grave que je pensais.
    C'est la norme dans les sociétés — mais, elles l'exploitent mieux.
    Ce qui arrive, c'est qu'au fur et à mesure que les années passent, il y a de plus en plus d'argent dans ces comptes d'épargne libres d'impôt et, vu la répartition des revenus au Canada… Premièrement, cette mesure n'avantage aucunement les personnes à faible revenu; deuxièmement, cela voudra dire que, de plus en plus, tous les revenus d'investissement seront exonérés d'impôt; et, troisièmement, les revenus d'investissement seront fractionnés avec les autres membres de la famille pour avoir droit à cette exemption fiscale.
    C'est le complément parfait de la mesure de fractionnement du revenu de pension. Je vous ai présenté des tableaux l'année dernière indiquant que les Canadiens ayant des revenus de 75 000 $ ou de 80 000 $ vont avoir droit à un remboursement se situant entre 8 000 $ et 10 000 $ grâce au fractionnement du revenu. Maintenant, ils pourront simplement investir ce remboursement dans un ou deux comptes d'épargne libres d'impôt.
    Je vous garantis que, d'ici 20 ans, les Canadiens à revenu élevé n'auront plus du tout d'impôts à payer.
    J'en profite aussi pour vous mentionner qu'il y a une section du Budget de 2008 — que je vous ai soumise — qui explique le compte d'épargne libre d'impôt — c'est-à-dire, qui en bénéficie de même que les conséquences à long terme.
    Madame Minna, vous pouvez poser une dernière petite question avant que votre temps ne soit écoulé.
    Vous avez présenté un tableau sur l'impôt sur les sociétés. Pourriez-vous établir une comparaison, si vous en avez le temps, entre les mesures qui touchent l'impôt sur le revenu des particuliers et celles qui touchent l'impôt sur les sociétés? Et, pouvez-vous me dire quels sont les effets sur les investissements au Canada, par exemple?
(1005)
    C'est une question très large.
    Effectivement mais, vous savez, les réductions d'impôt sont nombreuses. Je voudrais savoir maintenant si cet argent reste au Canada ou ce qui se passe au juste. J'ai maintenant une idée de ce qui se passe du côté de l'impôt sur le revenu des particuliers… Et elle avait un tableau sur l'impôt sur les sociétés…
    En fait, les réponses à vos questions sont assez simples. Les excédents enregistrés par les sociétés atteignent à présent 300 milliards de dollars. Il faut bien qu'elles investissent cet argent et, en conséquence, elles l'envoient à l'étranger. Il peut être investi dans un nombre grandissant de pays qui sont des paradis fiscaux. Pour le moment, le Canada ne les empêche toujours pas de le faire.
    D'après mes propres calculs, le Canada a perdu 3,1 milliards de dollars de recettes fiscales qui ont été investis à l'étranger par des sociétés canadiennes l'année dernière, et cela continuera d'être le cas chaque année. En même temps, d'après mes estimations, 3 milliards de dollars de plus sont perdus sous forme de réductions d'impôt intérieures. Donc, des sommes énormes quittent les entreprises ce qui a pour résultat de réduire considérablement les recettes fiscales.
    Comment cette situation se compare-t-elle à celle des particuliers? Eh bien, si les sociétés ne paient pas d'impôts, qui reste-t-il pour les payer?
    Un calcul fort simple qui indique les pertes fiscales permet de répondre à la question. Dans les années 1960, l'impôt sur le revenu des particuliers représentait environ 30 p. 100 des recettes fiscales fédérales. Aujourd'hui, il représente près de la moitié, soit 47 p. 100.
    Examinons maintenant l'impôt sur les sociétés, à titre de comparaison. L'impôt sur les sociétés correspondait à 19 p. 100 des recettes fiscales fédérales dans les années 60, par rapport à seulement 13 p. 100 aujourd'hui. Nous parlons donc d'un changement massif: le gouvernement dépend de plus en plus de l'impôt sur le revenu des particuliers. Cela revient à imposer moins les capitaux et à imposer davantage le travail.
    Donc, ça va de…
    Non, madame Minna. Votre temps est écoulé.
    Madame Demers, sept minutes, s'il vous plaît.

[Français]

    Merci, madame la présidente.
    Merci beaucoup d'être ici, mesdames. C'est avec beaucoup d'intérêt que j'ai écouté vos présentations. Vous nous brossez un tableau très noir. Je ne suis pas étonnée de ce que vous nous dites ce matin. C'est à l'image de la société actuelle. Si 38 p. 100 des personnes qui ne paient pas d'impôt sont des femmes, il y en a 33,5 p. 100 qui n'ont pas accès à l'assurance-emploi. On sait que les femmes de plus 80 ans sont les plus pauvres de notre société.
    Je pense que nos collègues qui sont au gouvernement seront aussi très intéressés par ce que vous nous avez dit. On essaie vraiment de travailler de façon non partisane. J'espère que nos collègues du gouvernement seront d'accord pour que le comité fasse des recommandations afin de nous assurer que toutes les études nécessaires à l'équité et à l'égalité entre les sexes seront faites adéquatement.
    Au cours des dernières semaines, nous avons rencontré dans les différents ministères des personnes nommées championnes qui font l'analyse sexospécifique des nouvelles mesures proposées, avant qu'elles soient renvoyées au ministre ou au ministère des Finances pour y être étudiées une dernière fois, et renvoyées ensuite dans le système et proposées comme mesures. Malheureusement, on s'est rendu compte que ces personnes n'ont pas beaucoup d'influence ni de pouvoir à l'intérieur des ministères. Une de ces personnes nous a dit que leur rôle était de donner, et je cite : « fearless advice and loyal implementation ».
    J'ai trouvé ça spécial de savoir que les personnes qui sont censées faire l'analyse sexospécifique et s'assurer qu'elle est bien incorporée aux programmes et mesures n'ont aucun pouvoir de recommandation autre que celui de dire si cette analyse a été faite et donner les résultats ainsi obtenus. Ça ne va pas plus loin.
    Madame Peckford, en attendant que nous puissions recommander la nomination d'un commissaire et si, par hasard, ce n'était pas retenu, je voudrais savoir ce qu'on pourrait faire pour donner plus de pouvoir à ces personnes au sein des ministères. Quels outils pourrait-on leur donner? Je crois que c'est Condition féminine Canada qui leur fournit les outils et la formation. Êtes-vous au fait de cette formation et de ces outils? Est-ce suffisant? Doit-on modifier ces outils? Pouvez-vous m'éclairer là-dessus?
(1010)
    Merci, madame Demers, pour votre question.
    Je pense que c'est vraiment difficile. Le système est assez faible. Il est vraiment important d'améliorer les outils, bien sûr, mais c'est aussi une question de volonté politique. En ce moment, on ne sait pas s'il y a une volonté assez forte d'assurer l'égalité des femmes. À mon avis, il est vraiment important de nommer un commissaire.

[Traduction]

    Il faudrait que l'on puisse suivre de très près l'excellent travail accompli par ce comité, de même que par le groupe d'experts sur l'égalité des sexes et les mécanismes de responsabilisation. Ce comité a examiné différents aspects de l'activité fédérale par rapport à l'analyse comparative entre les deux sexes et la façon d'améliorer cet exercice.
    L'une des meilleures façons d'obliger

[Français]

les politiciens, les personnes qui prennent les décisions,

[Traduction]

à suivre les conseils qui découlent d'une analyse comparative entre les sexes consiste à établir un cadre législatif. Nous avons fait cela dans le contexte de la Loi sur le bilinguisme. Nous y avons prévu un cadre juridique pour la prise de décisions dans ce domaine.
    Si vous voulez que ce soit une activité obligatoire,

[Français]

si l'analyse qu'on fait comme gouvernement est vraiment cruciale pour les décisions,

[Traduction]

à mon avis, il importe de tout définir dans un cadre législatif, pour que cette activité ne soit pas facultative ou pour qu'elles ne dépendent pas de la bonne volonté d'un sous-ministre. Pour ma part, je ne suis pas convaincue que ces questions soient examinées au niveau ministériel, alors parlons plutôt des sous-ministres. Selon moi, il faut un cadre qui ferait en sorte que l'analyse doive obligatoirement être prise en compte.
    Si je me fonde sur mon expérience — sur ce que j'ai lu, ce que j'ai entendu et ce que d'autres personnes, groupes d'experts, comités et organes des Nations Unies ont examiné — un cadre juridique me paraît extrêmement important. Ce serait très utile d'avoir quelqu'un au sein du Bureau du vérificateur général qui serait chargé de surveiller ce travail.
    Enfin, l'une des recommandations du groupe d'experts faisait état du fait que l'une des meilleures indications de l'engagement d'un gouvernement vis-à-vis de l'égalité des sexes et de l'égalité des femmes est justement la mention de cet engagement dans le discours du Trône. D'après le groupe d'experts, il convient de se servir du discours du Trône pour définir nos objectifs plus généraux et notre vision en ce qui concerne l'égalité des femmes. Or depuis plusieurs années, le discours du Trône de différents gouvernements ne saisit pas cette occasion. Pour moi, le moment est venu de le faire.
    Je crains seulement qu'un plan d'action ne devienne un exercice bureaucratique, qu'il ne soit pas musclé, qu'il donne l'impression d'être parfait d'après la description, et ressembler à toutes sortes d'autres plans d'action exécutés dans le monde entier, mais que Condition féminine Canada soit chargé de le mettre en oeuvre sans pouvoir obliger les décideurs aux niveaux supérieurs du gouvernement à le mettre en oeuvre.
    Merci de m'avoir posé cette question. C'est effectivement un problème très réel.

[Français]

    Madame Peckford, vous dites que la personne la mieux habilitée pour s'assurer que c'est effectivement dans le discours du Trône serait probablement la ministre de la Condition féminine. C'est elle qui devrait convaincre ses collègues du Cabinet que c'est d'une importance capitale et que cela doit être inscrit dans le discours du Trône. Il faut que cette personne ait un leadership sans faille.
    Oui, exactement. Mais je pense que ce n'est pas seulement la ministre qui pourrait faire cela. On doit avoir un projet de loi et un cadre juridique pour s'assurer que certains objectifs sont les mêmes partout au gouvernement. Les objectifs sont donc obligatoires. La ministre de la Condition féminine a un rôle crucial à jouer, mais cela ne serait pas suffisant. Cela ne va pas fonctionner.
(1015)
    Merci beaucoup.

[Traduction]

    Merci.
    La parole est maintenant à Mme Grewal pour sept minutes.
    Merci, madame la présidente.
    Je voudrais commencer par vous remercier toutes les trois d'avoir pris le temps de venir témoigner et de vos exposés.
    Je vais commencer par aborder la question que voici: comme vous le savez, le Budget de 2008 prévoyait un investissement important dans les études postsecondaires, et plus précisément, 350 millions de dollars pour la création d'un nouveau programme de prêts et bourses qui entrera en vigueur en 2009, et dont le financement atteindra presque 430 millions de dollars d'ici 2012-2013. De plus, 25 millions de dollars sont affectés sur deux ans afin d'établir une nouvelle bourse dans le cadre du Programme de bourses d'études supérieures du Canada. Enfin, 123 millions de dollars sont budgétés sur quatre ans pour la simplification et la modernisation du Programme canadien de prêts aux étudiants.
    Étant donné que les femmes sont maintenant majoritaires sur les campus universitaires du Canada, peut-on supposer qu'une analyse comparative entre les sexes de ces affectations budgétaires donnerait des résultats favorables? Pourriez-vous nous expliquer cela?
    Merci beaucoup d'avoir posé cette question très importante.
    Il est vrai que le Budget de 2008 prévoit la somme de 350 millions de dollars, ce qui correspond au montant affecté au Programme des bourses d'études du millénaire, qui a pris fin cette année. Donc, en réalité, le montant net du nouvel investissement sur cinq ans — car, c'est seulement en 2012-2013 qu'on atteint les 423 millions de dollars — et de 123 millions de dollars.
    Le montant global du budget fédéral est d'environ 250 milliards de dollars. Cette année, le gouvernement a enregistré un excédent de presque 18 milliards de dollars. Le programme de prêts aux étudiants qui bénéficiera, comme vous le disiez, de cet argent frais pour les subventions et prêts dessert 425 000 étudiants. À l'heure actuelle, 1,3 million d'étudiants font des études postsecondaires à plein temps. Les frais de scolarité ont triplé au cours des 20 dernières années. Le nombre de prêts aux étudiants a augmenté de façon exponentielle.
    Cette somme est insuffisante. La plupart de ces étudiants sont des femmes. Je comprends qu'il s'agit d'une augmentation mineure — 123 millions de dollars sur cinq ans constituent bien une augmentation — mais, il ne faut pas oublier que, par rapport à la somme globale, 350 millions de dollars étaient déjà octroyés. On a aussi prévu 50 millions de dollars pour les étudiants qui font des études supérieures. Si ma mémoire est bonne, environ 200 étudiants profiteront de cette mesure.
    Je vous rappelle, encore une fois, qu'il y a 1,3 million d'étudiants. Il est vrai que certains d'entre eux vont en profiter, mais cette somme est nettement insuffisante, madame Grewal, étant donné que les étudiants sortent de l'école aujourd'hui en ayant une dette absolument faramineuse qu'il leur faut 10 ou 15 ans pour rembourser. Ils attendent pour fonder une famille; ils sont incapables d'obtenir un logement. Nous pouvons certainement faire davantage en vue de limiter l'augmentation des frais de scolarité ou d'accorder plus de subventions aux étudiants.
    Je me permets également de vous faire remarquer que, au cours de la prochaine décennie, la situation va changer du tout au tout sur le marché du travail. Nous ne sommes pas du tout préparés pour ce qui va se produire au Canada.
    Le fait est que, même maintenant, nous n'avons pas assez de médecins et d'infirmières. Qu'arrivera-t-il dans cinq ou dix ans, étant donné qu'un tiers des médecins et la moitié des infirmiers et infirmières vont prendre leur retraite au cours des cinq prochaines années? Nous n'avons établi aucun plan en vue de les remplacer.
    En réalité, nous devrions élargir considérablement le programme des subventions afin d'aider les gens à faire des études leur permettant de devenir médecins, infirmières ou professionnels de la santé, pour être en mesure d'agir le problème très grave auquel nous serons bientôt confrontés et pour nous assurer de ne pas manquer de personnel, il faut également que nous cessions de les importer d'ailleurs, de prendre le personnel d'autres administrations qui se servent de rares ressources publiques pour former du personnel — pour ensuite perdre leurs employés en faveur de l'Alberta, par exemple, qui organise des foires de l'emploi dans les lobbys d'hôtels d'un bout à l'autre de l'Afrique.
    À mon avis, il y a des considérations liées à la déontologie et à la justice, et tout simplement un désir de bonne gouvernance, de bonne planification et de programmes prospectifs qui devraient vous inciter à élargir ce programme de subventions en investissant davantage.
(1020)
    Très bien. Mais, qu'en est-il des 282 millions de dollars, prévus pour cette année et les deux prochaines années, afin d'élargir le programme pour l'autonomie des anciens combattants et de soutenir ainsi les membres survivants des familles des anciens combattants? Est-ce une bonne nouvelle budgétaire pour les femmes? Pourriez-vous nous en parler?
    Et, combien de temps faudrait-il pour faire une analyse comparative complète entre les sexes du Budget 2008?
    Il existe déjà une analyse complète de l'incidence du budget sur les femmes, que je n'ai pas remise au comité, de certaines mesures d'imposition et de dépense. Je n'ai pas examiné la mesure particulière dont vous parlez. J'en ai pris bonne note, mais je n'ai pas examiné les chiffres ventilés.
    Il s'agit du programme pour l'autonomie des anciens combattants.
    Oui, 282 millions de dollars sont prévus pour les anciens combattants.
    Dans les trois derniers budgets, le gouvernement actuel a beaucoup mis l'accent sur le rôle que joue le gouvernement fédéral par l'entremise des Forces armées et de concert avec elles, ainsi que sur la sécurité, le maintien de l'ordre et certaines questions commerciales. Il est vrai que ce budget prévoit de l'argent frais pour de nouvelles dépenses. Mais, ces nouvelles dépenses nous empêchent d'investir dans des mesures de prévention à long terme qui sont sûres d'améliorer la capacité d'adaptation du pays.
    Le gouvernement a investi beaucoup de temps et d'efforts, avant de déposer ce budget, afin de faire comprendre au public canadien qu'il avait très peu de marge de manoeuvre; il était question d'observations du FMI, on évoquait nos « graves problèmes » et… Cela me rappelle ce qui a été fait dans la période précédant le budget de 1995, lorsqu'on nous a dit que nous étions pratiquement acculés à la faillite en raison de notre dette.
    Donc, le gouvernement investit beaucoup de temps et d'énergie pour nous faire comprendre, à nous, citoyens canadiens, qu'il ne faut pas s'attendre à grand-chose. Mais, les quelques nouvelles dépenses qui sont prévues dans ce budget dénotent une orientation particulière. Ces nouvelles dépenses se montent à 5 milliards de dollars et reflètent une certaine orientation.
    On dit aux femmes, greniers vides ou greniers pleins, qu'il faut attendre. Mais, ne pourriez-vous pas investir dans certains de ces domaines où nous savons déjà que les répercussions des problèmes actuels sont très considérables? De telles mesures permettent d'améliorer la capacité d'adaptation des Canadiens, d'édifier des collectivités fortes, de renforcer la société et de préparer la prochaine génération de travailleurs.
    Ce n'est pas l'argent qui manque : 43 milliards de dollars sont investis dans des mesures qui s'exécuteront au cours des trois prochaines années. Il y avait suffisamment d'argent pour faire quelque chose — pour faire plus que ce que vous avez fait.
    Madame la présidente, me reste-t-il du temps?
    Il vous reste le temps de poser une très brève question.
    J'en ai une brève.
    Je pense que Kathleen et moi aimerions également…
    Désolée; elles voudraient répondre.
    Je regarde votre introduction au « Budget en bref 2008 », qui décrit brièvement les domaines jugés prioritaires pour le budget fédéral de 2008. À mon avis, il conviendrait que le comité demande à la personne chargée d'effectuer l'analyse comparative entre les sexes au ministère des Finances de lui fournir son analyse pour chacune de ces catégories.
    Je vous invite à regarder tout particulièrement le deuxième énoncé, qui est de gérer judicieusement les dépenses « pour veiller à ce que les programmes et les services soient efficients et efficaces, harmonisés avec les priorités des Canadiens, et abordables à long terme », de même que l'énoncé où il est question de « Investir dans l'avenir en améliorant l'aide financière accordée aux étudiants et en augmentant le soutien fourni à la recherche scientifique et technologique ».
    Une analyse comparative entre les sexes serait très révélatrice, puisqu'elle permettrait de savoir quelles étaient les conclusions du ministère des Finances concernant les mesures qui seraient dans l'intérêt des femmes, et de tous les Canadiens. J'ai l'impression que l'analyse qui a peut-être été effectuée n'a jamais été remise au ministre ou aux hauts fonctionnaires du ministère, ou qu'elle a été mise de côté en faveur d'autres priorités.
    Madame Lahey.
    Je voudrais aborder très brièvement la question d'une analyse comparative entre les sexes à l'égard du financement des études postsecondaires. Quand on sait que des femmes munies d'un diplôme universitaire gagnant à présent moins de 70 p. 100, en moyenne, de ce que gagnent les hommes et que les jeunes femmes qui quittent l'école après avoir terminé leurs études ont une dette se situant entre 50 000 $ et 100 000 $, surtout si elles ont un diplôme professionnel… Il faut reconnaître que cela suppose des paiements fort différents lorsqu'on parle de quelqu'un dont les gains ne lui permettent pas de payer davantage.
    À l'heure actuelle, les universités essaient de voir s'il serait possible de définir une sorte de programme de remboursement des frais de scolarité axé sur les revenus, afin d'aider les étudiants à financer cette dette énorme sur une plus longue période. Mais personne ne tient compte d'éventuelles différences entre les deux sexes. Ce sera très lourd pour les femmes diplômées si elles doivent, alors que leurs salaires sont inférieurs, rembourser les mêmes frais de scolarité et frais d'emprunt qui leur sont imposés à l'heure actuelle par les programmes de prêts aux étudiants, tels qu'ils sont structurés en ce moment. Voilà un autre domaine où une analyse comparative approfondie entre les sexes s'impose.
    Je vous remercie.
    La parole est maintenant à Mme Mathyssen, pour sept minutes.
    Merci, madame la présidente.
    Depuis plusieurs semaines maintenant, nous essayons de voir clair dans le discours et les réponses bureaucratiques que nous avons entendus ici, du genre « c'est impossible » et « je ne peux pas répondre à cette question ». Je suis tellement contente que vous soyez là, car j'ai plusieurs questions et je suis convaincue que vous pourrez y répondre.
    Je voudrais commencer par Mme Yalnizyan. Je vous préviens que je ne vais pas être aussi éloquente que vous l'avez été. Vous avez parlé de la possibilité d'obliger le ministère des Finances à analyser l'ensemble du budget et les grandes politiques dans l'optique de l'égalité des sexes et d'effectuer une étude des effets macroéconomiques des réductions d'impôt comparativement aux avantages dont bénéficient les femmes et les personnes à faible revenu.
    Pourriez-vous nous expliquer ce concept?
(1025)
    Je reviens sur ce que Nancy vous a dit. Regardez le « Budget en bref 2008 » où le gouvernement lui-même parle des grandes priorités qui sous-tendent les mesures importantes de ce budget.
    Pour y arriver, madame Mathyssen, il s'agit de rappeler la question posée par Mme Grewal, par exemple. Nous avons parlé de deux programmes — celui qui concerne les études postsecondaires et l'autre prévoyant des services aux anciens combattants — qui, ensemble, coûteront environ 400 millions de dollars au cours des deux ou trois prochaines années. Quant au compte d'épargne libre d'impôt, la valeur de ce programme au cours des cinq prochaines années est de 900 millions de dollars et, d'après les estimations, il coûtera 3 milliards de dollars au Trésor public.
    Il y a une section dans le rapport que je vous ai remis qui est intitulé « Budget 2008 : What's In It For Women? », qui démontre que le compte d'épargne libre d'impôt profitera surtout aux personnes dont les gains dépassent 100 000 $, à cause de la structure de ce programme. À la fin de la période de mise en oeuvre, il coûtera 3 milliards de dollars. C'est une dépense très considérable, mais qui profitera surtout aux personnes qui gagnent plus de 100 000 $.
    Et, selon vous, quelle proportion des contribuables canadiens gagnent plus de 100 000 $? Eh bien, je vais vous le dire : 7,5 p. 100 des hommes et 2,5 p. 100 des femmes. Donc, 5 p. 100 de tous les contribuables profiteront d'environ 70 p. 100 de cette somme de 3 milliards de dollars chaque année. C'est donc un programme très coûteux pour un petit nombre de bénéficiaires… Encore une fois, comme Mme Lahey l'a déjà expliqué, c'est le contraire du concept de l'assistance sociale, puisqu'on donne le plus aux personnes qui en ont le moins besoin.
    Pourtant ce budget prévoit l'engagement de sommes très considérables. Quand vous faites une analyse comparative entre les sexes, elle vous permet de savoir dans quels domaines l'argent est dépensé et qui en bénéficie. Vous pouvez tout de suite voir ce qui se passe, ce que font les gouvernements et pour qui, et y rattacher un chiffre. Vous constatez qu'il y a des mesures destinées aux étudiants, sauf que 57 p. 100 des diplômés sont des femmes et qu'elles ne vont toucher que telle somme; ensuite, vous avez une mesure qui profite aux personnes qui gagnent plus de 100 000 $ par année : vous pouvez voir combien on leur donne et quelle proportion de ces personnes sont des femmes.
    À ce moment-là, vous pouvez leur dire : « Si ces initiatives-là correspondent à vos grandes priorités » — et c'est bien ça que j'ai dit; je n'ai pas parlé de toutes les mesures budgétaires — « dites-nous donc quelles mesures importantes vous pourrez financer grâce à l'excédent », parce que l'excédent est faramineux, « et qui va en profiter. »
    Ma prochaine question s'adresse à Mme Lahey. Je pense que vous avez abordé cette question tout à l'heure.
    En vertu du programme actuel des dépenses du gouvernement, les contribuables qui soutiennent financièrement un conjoint ou un conjoint de fait ont droit à un crédit d'impôt. Le coût de ce crédit d'impôt est d'environ 1,3 milliard de dollars chaque année et une augmentation est prévue.
    Ce qui est intéressant, c'est qu'en 1942, pendant la Seconde Guerre mondiale, le Canada a abrogé cette mesure afin que les femmes entrent sur le marché du travail et participent à l'effort de guerre. Bien sûr, à la fin de la guerre, le crédit d'impôt a été rétabli, présumément pour ramener les femmes au foyer et permettre aux soldats revenant de la guerre de prendre leurs emplois.
    D'autres pays ont abandonné ce crédit d'impôt mais, en 2007, le gouvernement canadien l'a relevé. Je me demande qui bénéficie de ce crédit d'impôt et s'il ne vaudrait pas mieux investir ce 1,3 milliard de dollars dans d'autres initiatives.
    Votre question est excellente, et elle illustre bien les raisons pour lesquelles les cent et quelques dispositions de la Loi de l'impôt sur le revenu et d'autres dispositions fiscales qui touchent les relations familiales ne sont pas appropriées.
    Vous avez tout à fait raison de dire que, au début de la Seconde Guerre mondiale, ce crédit a été éliminé afin d'inciter les femmes à intégrer la population active rémunérée. À la fin de la Seconde Guerre mondiale, ce crédit a été rétabli, et le précurseur de la prestation fiscale canadienne pour enfants a été créé — l'allocation familiale — pour que les femmes aient le sentiment d'avoir encore un peu d'argent et pour atténuer l'opposition politique qui s'était manifestée dès lors qu'il était question d'empêcher les femmes de faire un travail rémunéré.
    Ce crédit d'impôt pour les conjoints à charge est à présent plus important qu'il ne l'a jamais été. Seules peuvent en profiter les familles dont le revenu est assez élevé pour faire vivre tous les membres de la famille. Donc, une proportion relativement faible de la population peut en profiter.
    C'est une forme de fractionnement du revenu. Cette mesure traite les femmes comme une sorte d'abri fiscal. Elle considère qu'on peut s'attendre à ce qu'une femme effectue un travail non rémunéré au foyer qui n'est pas imposé et qui aide la famille, et c'est l'un des mécanismes clés par lesquels le régime fiscal empêche les femmes d'obtenir un travail rémunéré.
    Lorsqu'un couple doit décider si la femme devrait ou non obtenir un travail rémunéré, l'un des calculs visés — les femmes sont parfaitement au courant des impôts qu'elles paient — consiste à déterminer ce que coûtera la perte de ce crédit d'impôt pour conjoint à charge, par rapport à la perte du travail non rémunéré que la femme peut effectuer au foyer et ce qu'elle peut gagner.
    Immédiatement après la Seconde Guerre mondiale, le magazine Chatelaine publiait des articles qui démontraient que ce n'était pas payant pour une femme avocate de retourner au travail parce que, pour les femmes, les gains marginaux nets après impôt procurés par un travail étaient tout simplement trop faibles.
    Il ne fait aucun doute que, si j'avais la possibilité de refaire la Loi de l'impôt sur le revenu, j'abrogerais cette mesure, comme cela a été fait dans de nombreux autres pays et comme c'était prévu au Canada il y a quelques années, de même que plusieurs dizaines d'autres dispositions qui fonctionnent exactement de la même façon.
(1030)
    Merci.
    Me reste-t-il du temps?
    Juste assez de temps pour poser une question très rapide.
    Madame Peckford, vous avez parlé d'une liste de contrôle pour l'analyse comparative entre les sexes qui ne donne pas les résultats escomptés. Je dois admettre que j'ai depuis longtemps cette même impression.
    Nous savons que l'ACDI a recours à l'ACS. Êtes-vous en mesure de nous dire comment fonctionne ce processus, où il donne de bons résultats, et dans quelle mesure il donne de bons résultats?
    L'intérêt du cadre utilisé par l'ACDI pour l'analyse comparative entre les sexes est le fait que ses objectifs stratégiques s'appuient explicitement sur l'égalité des sexes. Ses objectifs consistent à promouvoir la participation équitable des hommes et des femmes en tant que décisionnaires qui orientent le développement durable de la société, à aider les femmes et les jeunes filles à exercer l'ensemble de leurs droits et à réduire l'iniquité entre les deux sexes en ce qui concerne l'accès aux ressources et aux avantages du développement et le contrôle de ces derniers. Il est évident que si vous effectuez une analyse comparative entre les sexes en ayant à l'esprit cette série d'objectifs stratégiques, vous visez nécessairement des résultats bien particuliers.
    Dans notre cas, le cadre stratégique relatif à l'analyse comparative entre les sexes a été mis en oeuvre avec les meilleures intentions, mais d'autres priorités stratégiques se sont rapidement imposées, vers le milieu des années 1990.
    Selon moi, l'analyse comparative entre les sexes ne s'est jamais vraiment imposée. Lorsque la Loi sur l'assurance-chômage a été réformée, une analyse comparative entre les sexes a été effectuée, mais on n'a jamais tenu compte de ces conclusions.
    Mais, vu l'engagement pris par le gouvernement vis-à-vis du plan d'action, nous avons maintenant l'occasion, à mon avis, de l'examiner en profondeur en vue d'améliorer et d'enrichir la stratégie qui sous-tend l'analyse comparative entre les sexes, aussi faible et marginale soit-elle. L'un des moyens clés à prendre pour y arriver — et c'est justement ce qui manquait en action fédérale pour l'égalité des femmes — consiste à élaborer une série d'indicateurs qui vous aident à définir le succès.
    Il me semble qu'il convient de définir ces indicateurs de façon à mettre l'égalité des femmes au centre de tout l'exercice de l'ACS. Ainsi, on devrait être plus à même de savoir vers quoi tendent les efforts et pourquoi il faut atteindre les objectifs fixés.
    Je vous remercie.
    La parole est maintenant à M. Pearson.
    Merci, madame la présidente.
    J'avoue que je trouve tout cela assez frustrant. Je viens du milieu de la promotion et de la défense de certains droits et intérêts, et, depuis quelque temps, nous essayons au comité de venir aux prises avec toute cette idée d'analyse comparative entre les sexes. Pour ma part, je voudrais simplement que cet exercice donne les résultats escomptés.
    Voilà ce que je pense: pour moi, le groupe principal qui pourra nous aider à voir clair dans tout ce processus est Condition féminine Canada. C'est ce ministère qui est censé être le véhicule par lequel on explique tout ce processus. Mais, lorsque les responsables de Condition féminine Canada se présentent devant le comité, elles nous brossent un tableau assez positif de la situation. Elles nous disent que des cours de formation sont donnés dans tous les ministères et que certains services du ministère des Finances font déjà une analyse comparative entre les sexes.
    Nous avons reçu un champion il y a une ou deux réunions, ou peut-être la dernière, et je lui ai posé une question au sujet du compte d'épargne libre d'impôt de 5 000 $. J'ai demandé si on avait analysé cette mesure dans l'optique de l'égalité des sexes. On m'a répondu: oui, absolument.
    Et que c'est une excellente mesure.
    Oui.
    Je vous demande votre indulgence, car j'essaie de comprendre comment il est possible que les personnes qui définissent tout ce processus, et dont nous dépendons comme comité pour y voir clair, puissent nous dire de telles choses.
    Nous avons que, lorsque des représentantes de groupes de défense des droits des femmes viennent nous voir, elles nous présentent un tableau tout à fait différent; nous comprenons très bien cette réalité. En d'autres termes, est-ce que le problème à l'heure actuelle est le fait que Condition féminine Canada n'est pas assez haut placé dans la hiérarchie fédérale? Est-ce parce que, par rapport aux ressources massives que possède le ministère des Finances comparativement à celles de Condition féminine Canada, qui sont minimes, ce ministère n'est tout simplement pas en mesure de bien faire le travail parce qu'il ne possède pas les ressources nécessaires pour effectuer une bonne ACS?
    En tant que comité, nous serons bien obligés d'avoir recours à eux quand vous ne serez plus là, et s'ils nous disent certaines choses alors que vous nous dites quelque chose de tout à fait contraire, alors qu'ils sont censés être les champions…
    Je vous invite à réagir, car je trouve tout cela assez frustrant.
(1035)
    Vous allez vous dire que je suis cynique mais, comme Nancy l'a dit tout à l'heure, c'est tout simplement une question de volonté politique. Lorsqu'on permet à un responsable du ministère des Finances de dire: « Nous n'avons pas de comptes à vous rendre en ce qui concerne le fractionnement du revenu de pension parce que cet avantage bénéficie aux familles, si bien qu'il n'est pas nécessaire de faire une analyse comparative entre les sexes. Une famille est une entité différente par rapport à une femme; les termes employés ne sont pas les mêmes, et par conséquent, on n'a pas besoin d'effectuer une analyse comparative entre les sexes. » Eh bien, si personne chez Condition féminine Canada n'est prêt à contester cette logique, il est certain qu'on n'arrivera jamais à rien.
    C'est une véritable tragédie. Condition féminine Canada était un chef de file mondial dans l'élaboration des éléments de l'analyse comparative entre les sexes et a surveillé de très près la mise en oeuvre de programmes et de politiques de formation dans chacun des 24 ministères de l'administration fédérale jusqu'à la fin des années 1990. Ce travail a été fait, les gens ont été formés et les programmes requis ont été mis en place.
    Donc, au sein de l'administration fédérale, en l'absence d'une véritable volonté politique, vous devrez vous contenter de continuer à en parler le plus possible et de ne jamais cesser de le faire.
    Avant de passer à quelqu'un d'autre, pourriez-vous me dire si, à votre avis, Condition féminine Canada a besoin de ressources supplémentaires — je pense que votre réponse sera oui — afin de pénétrer tous les différents échelons du ministère des Finances?
    Oui, absolument.
    Autrefois je recevais du financement de Condition féminine Canada pour effectuer ce genre de travail. Mais, ce financement n'est plus disponible. Je ne peux pas non plus présenter une demande au CRDI, étant donné que le Canada n'est pas un pays en développement. Les femmes du Canada sont sous-développées, mais nous ne pouvons profiter non plus du financement qui est disponible dans ce contexte.
    J'ai du mal à comprendre comment vous avez pu obtenir une analyse du ministère des Finances. Est-ce bien cela que vous avez dit — à savoir que le ministère des Finances vous a déposé une analyse qui porte sur le CELI?
    Oui, et on nous a dit que tout va très bien.
    C'est non et c'est oui.
    Non. Nous l'avons obtenue pour les budgets de 2006 et 2007. Nous avons ensuite contesté cette analyse, et on nous a fait parvenir…
    Mais, le compte d'épargne libre d'impôt est une mesure qui a été présentée dans le budget de cette année, en 2008.
    Non, on ne nous a rien donné pour 2008.
    Mais, j'avais compris que…
    Je me permets de préciser, cependant, que nous avons bel et bien posé la question de savoir si le ministère avait fait une analyse par rapport au compte d'épargne de 5 000 $. On nous a répondu que oui, et ensuite, ils nous ont donné…
    J'avoue avoir du mal à comprendre comment on peut fournir des renseignements à un comité au sujet des bénéficiaires du compte d'épargne libre d'impôt sans indiquer quelles catégories de revenus et quelle proportion d'hommes et de femmes en profitent.
    À mon avis, si vous posez la question aux bureaucrates — et vous pouvez le faire — en leur demandant de vous fournir —parce qu'ils ont une évaluation du coût… ils nous disent que cette mesure coûtera telle somme dans la première année, et telle somme dans la deuxième année. Ils ont dû faire de la modélisation leur permettant de savoir quel sera le taux de participation et quels contribuables vont en bénéficier.
    Vous pourriez simplement demander des indications, du genre: pourriez-vous nous dire qui, selon vous, touchera ces montants d'argent, qui totalisent presque 1 milliard de dollars sur cinq ans et ce, selon la tranche de revenu, la catégorie de revenu — parce que c'est ainsi qu'on analyse les dossiers des contribuables, par exemple, ceux dont les revenus dépassent 100 000 $, ou se situent entre 50 000 $ et 100 000 $ — quelle proportion des déclarants en profitera et quelle proportion d'hommes et de femmes se situe dans l'une ou l'autre de ces catégories?
    Il s'agit simplement d'obtenir une analyse objective. Quand vous aurez les chiffres sous les yeux… Mes calculs ne sont peut-être pas tout à fait exacts, mais il ne peut pas y avoir un écart aussi important que cela. Si vous leur posez des questions bien précises, il me semble qu'ils pourront difficilement vous dire que tout va bien dans le meilleur des mondes.
(1040)
    Madame la présidente, il y a d'autres problèmes en ce qui concerne Condition féminine Canada. Par exemple, ce n'est que récemment qu'une ministre de premier plan a été nommée à ce poste. Mais cette ministre de premier plan a d'autres responsabilités aussi. Mme Verner — et ce n'est pas inhabituel — doit répartir son temps entre ses tâches à titre de ministre du Patrimoine canadien et à titre de ministre responsable de la Condition féminine… Vous vous doutez bien quel ministère a la priorité.
    L'une des choses que revendiquent les organismes féminins, entre autres, est la nomination d'une ministre qui n'aurait pas d'autres tâches. Cette stratégie a ses avantages et ses inconvénients, étant donné que cette ministre peut se trouver marginalisée. D'une part, on veut qu'une ministre influente soit à la table et, d'autre part, si cette dernière est chargée de portefeuilles différents, il est évident que les questions liées à la Condition féminine vont le plus souvent être reléguées au second plan.
    Je vous rappelle également que, malheureusement, le budget de fonctionnement de Condition féminine Canada a été réduit de 40 p. 100, même si une partie des crédits ont peut-être été rétablis. Mais cette réduction de son financement a véhiculé un message très clair en ce qui concerne l'importance que l'on accorde au travail de ce ministère.
    Heureusement, la nomination de Clare Beckton, qui en est maintenant l'administratrice générale, est un progrès. Mais, malgré l'excellent leadership de Clare, je ne suis pas convaincue que le ministère ait des assises solides et qu'il possède les ressources nécessaires pour faire cette analyse.
    D'après ce que j'ai observé en ce qui concerne Condition féminine Canada, ce ministère ne fait pas du tout partie de la Realpolitik du gouvernement fédéral; ce ministère n'est pas considéré comme un acteur important, contrairement à ce qui devrait être le cas. En l'absence d'autres impératifs et d'autres mécanismes de contrôle, on se contente bien souvent de voeux pieux en ce qui concerne le travail effectué par Condition féminine Canada. On en tient compte de temps à autre mais, en fin de compte, il reste à savoir, pour vous et pour nous, si son travail peut réellement déboucher sur des politiques valables.
    Relever le budget de Condition féminine Canada serait, selon moi, une mesure très constructive, mais il faut également examiner d'autres mécanismes qui permettraient de faire reposer le travail du ministère sur de solides assises. C'est pour cette raison que, quelle que soit la forme qu'elle va prendre, l'analyse comparative entre les sexes doit absolument être bien intégrée à l'ensemble des activités et, au lieu d'être une fin en soi, s'appuyer sur une démarche quelconque, que ce soit le cadre juridique, la création d'un poste de commissaire au Bureau du vérificateur général — qui attire l'attention des gens — ou le leadership inspiré d'une ministre de premier plan qui est bien équipée pour relever les défis. En l'absence de ces éléments, je dois dire que je ne suis pas optimiste.
    Je vous remercie.
    La parole est maintenant à M. Stanton pour cinq minutes.

[Français]

    Merci, madame la présidente.
    D'abord, je voudrais souhaiter la bienvenue à tous nos témoins de ce matin.
    Madame Yalnizyan, j'ai écouté vos commentaires et vos déclarations. J'ai deux questions à vous poser. Si vous croyez qu'il est si mauvais, pensez-vous que le gouvernement aurait dû être défait sur son budget? De plus, pourquoi pensez-vous que le budget de 2008 a reçu l'appui de la Chambre?

[Traduction]

    C'est une excellente question, et je vous remercie de me l'avoir posée.
    J'estime qu'il s'agit d'un usage irresponsable de l'excédent et, si j'étais élue, je voterai contre.
    Pourquoi n'a-t-il pas été rejeté? Comme vous le savez, monsieur Stanton, c'est toujours le calcul politique du moment qui prime. Ce jeu dépasse mes compétences. Les calculs politiques se fondent dans un contexte différent du mien.
    D'après ce que j'ai vu de ce budget, je ne voterais pas en faveur. Pour moi, il prévoit d'utiliser l'énorme excédent budgétaire de manière tout à fait inadéquate. Voilà ma réponse.
    Merci.

[Français]

    Merci.
    Madame Boucher.
    Bonjour, tout le monde. Je ne sais pas trop quoi dire, très franchement. Je n'oserai pas dire ce que je pense. D'habitude, je suis très directe, mais je vais faire attention.
    Je voudrais d'abord remettre certaines choses en perspective. Je suis secrétaire parlementaire à la Condition féminine. Contrairement à ce que vous pouvez penser, je rencontre les représentants de Condition féminine une fois par mois. Je me fais un devoir d'aller m'asseoir avec eux deux heures par mois, et on se voit toutes les semaines pour régler certaines choses.
    Cela dit, j'aimerais, pour mon bénéfice personnel, avoir l'analyse que vous avez faite, madame Lahey. Vous avez fait une analyse sur le budget de 2008. J'aimerais avoir le budget de 2005, le dernier budget de l'ancien gouvernement. J'aimerais avoir la même analyse, s'il vous plaît.
    Êtes-vous apolitique? Au début, j'ai demandé des études apolitiques. Que ce soit moi, que ce soit eux, que ce soit n'importe qui fasse ces études, on veut que le gender budgeting ait une base apolitique afin de servir toutes les femmes. Or, d'après ce que j'ai entendu ce matin, je ne crois pas que vous soyez apolitique, et personnellement, ça me dérange.
(1045)

[Traduction]

    Pour répondre à votre première question, je peux vous faire une analyse partielle des principales caractéristiques du budget de 2005 car, comme le démontre le tableau 6, que je vous ai remis tout à l'heure — et, excusez-moi pour la faute de frappe, car chacune des deux séries de colonnes aurait dû être marquée 2004 et 2008. Donc, 2004 n'était pas le dernier budget libéral, mais il est très semblable, parce qu'il n'y a pas eu de changements bien importants entre 2004 et 2005. Je vous invite donc à regarder la première colonne du tableau 6 concernant les exclusions en matière de gains en capital sous la rubrique « Mesures liées à l'impôt sur le revenu des particuliers ». Dans cette colonne, où on devrait voir la mention 2004, le coût du manque à gagner en recettes fiscales de l'exclusion des gains en capital se monte à 2,8 milliards de dollars pour le gouvernement fédéral en 2004. Selon le budget de cette année, ce coût serait de 5,2 milliards de dollars. Ce chiffre est tiré du rapport du gouvernement intitulé « Rapport de 2007 sur les dépenses fiscales », déposé le 19 février 2008, une semaine avant le dépôt du budget. L'augmentation observée relativement au coût de cette dépense fiscale, et c'est symptomatique des différences entre les budgets de 2005 et de 2008, est liée au fait que les contribuables ont à présent le choix entre différents mécanismes leur permettant d'éviter de payer des impôts sur les gains en capital.
    Pour vous citer un autre exemple, le crédit d'impôt pour dividendes en 2004 — et dans la même colonne — aurait coûté 1,5 milliard de dollars. En 2008, il coûtera 2,5 milliards de dollars chaque année, d'après les estimations. Cette augmentation est liée au fait que les actionnaires bénéficient d'un avantage fiscal à l'égard d'impôts que les sociétés ne sont plus tenues de payer. Dans mon mémoire écrit, qui vous sera distribué après avoir été traduit, vous verrez que, en vertu du régime actuel du crédit d'impôt pour dividendes, une personne dont les revenus proviennent exclusivement de dividendes versés par les sociétés peut recevoir 50 000 $ par année qui sont exonérés d'impôt. C'est un traitement beaucoup plus généreux que celui qu'on réserve aux personnes les plus pauvres, et, en ce qui concerne la réduction du taux de la TPS, etc., il n'y a vraiment pas de comparaison.
    Donc, ce petit tableau vous permettra de vous faire une bonne idée des dépenses fiscales beaucoup plus nombreuses qui bénéficient aux propriétaires de capitaux et d'entreprises. Voilà qui fait augmenter le coût global de l'ensemble des dépenses fiscales, qui correspondent à un manque à gagner pour le gouvernement fédéral. Entre 2004 et 2008, le montant du manque à gagner a doublé, pour atteindre 74 milliards de dollars en 2008.
    Suis-je apolitique? Eh bien, je suis résolue à promouvoir les enjeux qui touchent les femmes.
    Merci.
    Armine.
    Je partage votre frustration, madame Boucher. Au fond, je pense que nous sommes frustrées par les mêmes choses, même si notre optique n'est pas la même.
    Pour répondre à votre question — à savoir, suis-je apolitique — je dois l'être, car je n'aurais jamais voté en faveur du budget, alors que tout le monde l'a fait. Ce budget a été adopté. Mais, sérieusement, s'agissant de politique, madame Boucher, j'aurais dit exactement la même chose à un gouvernement libéral, et j'ai justement dit exactement la même chose à un gouvernement libéral qui donnait la priorité aux réductions d'impôt.
    Entre 1997-1998 jusqu'à la fin de l'horizon actuel — soit 2012-2013, selon les projections du budget — nous aurons eu 340 milliards de dollars de réduction d'impôt. Il n'y a pas que les conservateurs qui aient introduit de telles mesures, mais les conservateurs les ont accélérées. Pour ma part, je suis contre cet usage déséquilibré de l'excédent budgétaire.
    Je ne suis pas contre l'idée de réduire les impôts si les déficits sociaux ont été éliminés. Mais, bon-an, mal-an, on demande aux femmes d'attendre. Ce sont surtout les femmes qui ont subi les contrecoups des réductions proposées par les libéraux en 1995. C'est en 1995 que le gouvernement libéral a réduit le financement de programmes qui sont essentiels aux femmes. J'ai dénoncé ces réductions et maintenant je dénonce les réductions d'impôt proposées par le gouvernement actuel. À mon avis, les femmes attendent depuis trop longtemps qu'on réponde aux besoins, non pas des femmes seulement, mais des familles et des collectivités d'un bout à l'autre du pays.
    Donc, étant donné que je ne suis pas favorable à ce budget, je peux comprendre que vous y voyez une orientation apolitique. Mais, en réalité, quand nous parlons d'analyse comparative entre les sexes et de budgétisation sexospécifique, nous visons tous les gouvernements, quels qu'ils soient, et c'est justement ce que j'ai dit dans mon exposé liminaire. Tous les budgets doivent être examinés du point de vue de l'incidence des mesures proposées sur les hommes et les femmes. Si cela avait pu s'effectuer en 1995, le gouvernement n'aurait pas pu équilibrer son budget sur le dos des femmes. Le gouvernement aurait facilement compris que les mesures qu'il proposait avaient une incidence négative disproportionnée sur les femmes.
    Il faut que l'analyse d'un budget, dans l'optique de l'égalité des sexes, soit apolitique et qu'on s'assure que ni les coûts, ni les avantages ne touchent de façon disproportionnée un groupe ou un autre. Donc, dans ce sens-là, je suis apolitique et mon engagement est aussi ferme que celui de Kathleen. Je fais ce travail depuis 25 ans.
    Enfin, je voulais dire que je ne sais pas par quel miracle vous avez réussi à faire incorporer dans le budget un engagement vis-à-vis de l'égalité des sexes. Si vous avez lu ce passage, vous saurez qu'il compte 52 mots dans un document de 416 pages. Je ne sais pas ce que vous avez dû faire pour que cet engagement soit inscrit. Je vous félicite, vous et vos collègues qui ont réussi à l'obtenir, et j'espère vivement que le gouvernement saisira l'occasion de le respecter. Donc, merci infiniment d'avoir fait cela.
(1050)
    Je vous remercie.
    Madame Peckford.
    Je suis désolée, mais je dois absolument réagir. C'est en 2005 que nous avons commencé à revendiquer la budgétisation sexospécifique. Nous avons demandé à Armine d'effectuer une analyse très détaillée des 10 budgets fédéraux proposés par le gouvernement libéral.
    D'ailleurs, je pense que les gouvernements peuvent facilement nous accuser d'avoir certaines allégeances ou orientations politiques alors que, en réalité, nous nous efforçons d'être aussi neutres et impartiales que possible en menant nos activités. C'est plutôt vous qui nous attribuez des intentions politiques et qui vous permettez de ne pas tenir compte de nos opinions, étant convaincus que nous avons certaines couleurs politiques, et c'est justement là que le dialogue s'arrête bien souvent.
    Nancy, on vient de me poser une question. Seriez-vous en mesure d'effectuer cette analyse? Pourriez-vous obtenir le financement nécessaire pour effectuer cette analyse, si nous souhaitions en obtenir une à l'égard du budget de cette année?
    C'est peu probable, mais nous n'avons pas essayé.
    Très bien. Pourriez-vous essayer?
    La parole est maintenant à Mme Deschamps. Un autre comité arrivera bientôt, et je devrai donc vous limiter à cinq minutes.
    Merci.

[Français]

    Merci, madame la présidente. Je pensais que vous passiez mon tour.
    Je n'ai pas de question. Je voudrais plutôt évaluer ce que j'ai compris de tous les intervenants, que ce soit des fonctionnaires ou des experts de l'extérieur, qui sont venus nous donner leur vision de l'analyse comparative entre les sexes, qu'on appelle aussi budget sexospécifique ou analyse comparative entre les sexes des revenus et des dépenses.
    J'ai fait une sorte de survol, que j'appellerais politique fiscale ou politique sociale 101. Je veux que vous m'évaluiez à la fin.
    Le gouvernement fédéral dispose de voies d'intervention limitées dans les dépenses en matière de programmes qui sont surtout de compétence provinciale. Jusqu'en 1994, le gouvernement fédéral exerçait un certain contrôle sur les dépenses des provinces au moyen de transferts en santé, en éducation et en programmes sociaux. En 1995, les transferts aux provinces ont subi de fortes compressions. Le gouvernement a cessé ces transferts.
    À partir de ce moment, le gouvernement fédéral s'est de plus en plus appuyé sur ses compétences fiscales inscrites dans la Constitution pour faire indirectement ce qu'il ne pouvait pas faire directement. Il en est résulté un nombre croissant de dépenses fiscales conçues pour appuyer certaines catégories ou pour favoriser certaines activités bonnes pour l'économie ou la société.
    Aujourd'hui, la politique sociale est souvent exécutée dans le cadre de réformes fiscales plutôt que dans le contexte d'initiatives de programmes élaborés par des ministères engageant des dépenses du gouvernement. Cette tendance semble beaucoup s'accentuer dans le dernier budget, entre autres. On utilise le régime fiscal comme un instrument central de politique sociale, ce qui a pour conséquence de placer un lourd fardeau sur le ministère des Finances, qui est celui d'effectuer une analyse plus minutieuse des répercussions sur les hommes et les femmes des dépenses fiscales actuelles.
    Toutefois, une analyse comparative entre les sexes — qu'on pourrait appeler une politique sociale — financée à même les fonds des contribuables révèle au moins trois inconvénients pour les femmes: ces mesures fiscales ne sont généralement pas profitables aux femmes à faible revenu, les déductions et les exemptions fiscales ne sont pas d'égale valeur pour les contribuables de sexe féminin et les dépenses fiscales peuvent favoriser des revenus et des dépenses de type masculin.
    Que peut-on faire pour remédier à cette iniquité?
    Voilà, c'était mon analyse.
(1055)

[Traduction]

    Je pense que vous avez parfaitement raison. Une bonne partie des mesures adoptées au cours des 10 dernières années étaient des mesures fiscales, mais il n'y a eu guère d'initiative du côté des dépenses. Dans ce sens-là, je suis apolitique parce que, depuis presque 15 ans, les pouvoirs publics s'efforcent de manipuler le régime fiscal, au lieu d'investir dans la prochaine génération.
    Je ne plaisante pas quand je vous dis qu'il n'est plus possible de songer à des réductions d'impôt. Nous ne pouvons pas continuer à cannibaliser l'assiette fiscale. Notre puissance économique est plus considérable aujourd'hui qu'elle ne l'a jamais été depuis les années 1960, alors que le gouvernement prétend qu'il n'y a plus d'argent. Entre-temps, l'infrastructure des villes tombe en morceaux. Nous ne faisons rien pour régler le problème des changements climatiques. Nous ne faisons rien non plus pour atténuer l'iniquité grandissante. Mais, les ressources budgétaires sont considérables. Il est donc temps de cesser de donner la priorité aux réductions d'impôt. Peu importe le parti qui lancera le processus. Il est temps d'appeler un chat un chat. Dans les villes, les gens savent qu'il faut soit faire payer plus d'impôts, soit réduire les services. Or les Canadiens ne veulent pas qu'on réduise les services. Ils veulent plus de services, et de meilleurs services, et c'est cette équation-là qui doit primer.
    Pour moi, le moment est venu de changer le discours politique. Le pendule est allé au bout de sa caisse. Vous avez parfaitement raison. Le problème que présente l'analyse comparative entre les sexes dans ce contexte est qu'on peut très facilement effectuer une étude des effets d'une réduction d'impôt, parce qu'on parle de sommes bien précises.
    Par contre, on ne peut mesurer l'avantage qui se rattache à une mesure sociale parce qu'on ne doit pas tenir compte uniquement de ce qui va se produire cette année; il faut pouvoir analyser les effets sur toute une vie. Comment donc calculer le taux de rendement d'un tel investissement? C'est une entreprise très ardue. Il est plus facile de réduire les impôts et de dire aux contribuables: « Regardez, nous vous avons donné de l'argent », que de faire une analyse comparative entre les sexes et de leur dire: « Nous constatons que les hommes ont plus d'argent que les femmes »; en réalité, ce genre de dépenses a un tel effet multiplicateur et la courbe de rendement est tellement longue qu'il devient très difficile de dire: « Cette mesure constitue un meilleur investissement qu'une réduction d'impôt ». C'est un travail qu'il faut faire, et il est essentiel que quelqu'un commence à le faire.
    Je dois vous couper la parole pour donner deux minutes à Mme Mathyssen. Ensuite, je vais vous remettre des documents pour lesquels nous avons besoin de votre aide.
    Merci, madame la présidente.
    Je tiens à vous remercier pour vos analyses et pour tous ces renseignements et ces données, parce qu'il est évident que les chiffres et les données sont exempts de partisanerie.
    J'ai sous les yeux l'analyse effectuée par le gouvernement des budgets de 2006 et de 2007, et je pense que vous allez la trouver à la fois très révélatrice et tout à fait insuffisante.
    Ma question est celle-ci: à l'heure actuelle, quelle dépense serait la plus susceptible de faire avancer la cause de l'égalité des femmes du Canada?
    Une dépense sur les logements. Elle toucherait 68 p. 100 des femmes. Elles sont parfois désespérées lorsqu'elles doivent sortir d'une situation difficile. Nous n'avons pas de politique sur le logement. Nous sommes le seul pays industrialisé à ne pas s'être doté d'une politique sur le logement.
    Là nous ne parlons pas uniquement de logements abordables pour les titulaires d'hypothèques. Nous ne parlons pas uniquement de refuges. Nous ne parlons pas non plus uniquement des endroits où finissent les femmes qui fuient la violence. Nous parlons de tout. Commençons par élaborer un programme national approprié de logement.
    C'est à notre logement que nous consacrons la plus grosse partie de notre revenu disponible. Donc, si vous investissiez dans les logements, cela permettrait de réduire la pauvreté.
    À cela, j'ajouterais un programme national de services de garde d'enfants, car les trois quarts des femmes ont à présent un travail rémunéré, d'une forme ou d'une autre, en dehors du foyer Les études de l'OCDE démontrent que c'est un programme de ce genre qui aurait, à lui seul, l'impact le plus important sur les femmes, pour ce qui est de réduire l'écart entre les deux sexes. Une telle mesure influerait également sur la qualité de vie des générations futures.
    Comme vous le constatez, nous sommes vraiment frustrés, parce que nous avons reçu les représentants du Conseil du Trésor et du Bureau du Conseil privé, et nous avons également reçu les champions de l'égalité des sexes du ministère des Finances. Par rapport au document qu'on vous a remis, nous vous invitons à faire une analyse du budget, car certaines des conclusions qu'ils ont présentées…
    La dernière réunion était d'ailleurs assez houleuse parce qu'on leur a dit qu'on ne voulait pas qu'ils nous racontent des histoires, que d'après l'ARC, c'était 15 p. 100, alors qu'ils prétendaient que c'était 16 p. 100, et toutes sortes d'observations de ce genre étaient échangées.
    Nous vous invitons donc à analyser les affirmations du ministère des Finances en ce qui concerne l'incidence sur les deux sexes. Si telle est leur attitude, il faudra qu'on adopte une attitude très ferme, peut-être quand nous recevrons le sous-ministre des Finances.
    Je tiens à vous remercier de votre présence. Vous êtes tellement passionnées par cette question, et j'espère que nous le serons quand nous aurons atteint… parce qu'à ce moment-là, vous n'aurez plus de plaintes à formuler.
(1100)
    Madame la présidente, quand prévoyez-vous de recevoir le sous-ministre des Finances? Quel est le délai? Quand est-ce que nous devons vous remettre ce travail? Dans deux semaines?
    Des voix: Oh, oh!
    Merci.
    La séance est levée.