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Merci beaucoup, monsieur le président.
Je tiens à vous remercier de m'avoir invitée ici aujourd'hui. Je suis heureuse d'avoir l'occasion de comparaître devant le Comité permanent de la procédure et des affaires de la Chambre. J'estime que nous avons un travail important à faire. Je suis consciente du fait que je n'étais pas obligée de témoigner devant le comité aujourd'hui, mais je crois qu'il s'agit d'une question cruciale pour nous tous, en tant que parlementaires. J'ose espérer que mon témoignage sera utile au comité.
J'aimerais maintenant prendre quelques minutes pour retracer les événements tels qu'ils se sont produits.
Le 18 novembre, mon adjoint législatif, Emrys Graefe, m'a signalé que M. Ullyatt avait transmis le projet de rapport sur les consultations prébudgétaires par courriel à Lynne Hamilton. J'ai tout de suite su qu'il y avait eu manquement à l'obligation de confidentialité et que M. Ullyatt devait être congédié. J'ai pris connaissance de la fuite juste au moment où je m'apprêtais à prendre un taxi pour me rendre à l'aéroport. Je suis arrivée juste à temps pour prendre mon avion.
Comme mon vol à destination de Saskatoon faisait escale à Toronto, j'ai alors communiqué avec le whip en chef du gouvernement, à partir de l'aéroport Pearson, pour l'informer du manquement à l'obligation de confidentialité et lui faire savoir que l'individu responsable de cet acte serait renvoyé. De plus, j'ai demandé au whip en chef du gouvernement d'assurer la sécurité de mon bureau pour qu'une enquête appropriée soit menée. Le whip en chef du gouvernement a accepté de m'aider à cet égard.
Avant de prendre mon vol, j'ai également appelé Emrys pour lui demander d'être au bureau le lendemain afin d'informer le service de sécurité que M. Ullyatt ne pouvait pas entrer dans l'édifice. Il a aussi reçu pour instruction d'appeler immédiatement le service de sécurité si jamais M. Ullyatt parvenait à contourner la sécurité, pour qu'on vienne l'expulser des lieux.
Je suis arrivée à Saskatoon vers minuit. Tôt le lendemain matin, j'ai appelé M. Ullyatt avant qu'il parte au travail pour l'informer que j'étais au courant du fait qu'il avait transmis le projet de rapport sur les consultations prébudgétaires à Lynne Hamilton. Il a admis l'avoir fait. Je l'ai ensuite informé qu'il était congédié sur-le-champ.
Après ma discussion avec M. Ullyatt, j'ai communiqué avec le président du Comité des finances, qui m'a encouragée à contacter tous les autres membres du comité. Pendant que je m'occupais à faire les appels, Emrys travaillait avec le bureau du whip en chef du gouvernement pour s'assurer que M. Ullyatt n'aurait aucun accès à distance aux documents, aux ordinateurs ni aux comptes de courriel du bureau. Les mots de passe de tous les comptes de courriel de mon bureau ont été modifiés, et les services de TI ont interrompu le service BlackBerry gouvernemental de M. Ullyatt.
J'ai demandé à Emrys de communiquer avec le bureau de tous les autres membres du Comité des finances et de leur fournir mon numéro de téléphone cellulaire personnel. C'était un vendredi, et bon nombre d'entre nous étions dans nos circonscriptions respectives.
Il a appelé chaque bureau pour demander que le député m'appelle au sujet d'une affaire urgente concernant le Comité des finances. Emrys m'a confirmé qu'il avait parlé au personnel de tous les autres membres du comité — les députés conservateurs, libéraux, bloquistes et néo-démocrates —, à l'exception du bureau de M. Pacetti, où il avait laissé un message vocal.
Au cours de la journée, j'ai parlé avec les membres libéraux du comité, MM. Brison et Szabo, ainsi qu'avec les membres bloquistes, MM. Paillé et Carrier. J'ai également parlé avec tous mes collègues conservateurs membres du comité. Les deux seuls députés avec lesquels je n'ai pas pu m'entretenir vendredi étaient M. Pacetti et M. Mulcair.
Pour autant que je sache, M. Pacetti n'a pas retourné mon appel, mais le président m'a informé qu'ils s'étaient parlé. Malheureusement, j'ai manqué l'appel de M. Mulcair. Il m'a laissé un message vocal avec un numéro qui, je crois, était celui de son bureau de circonscription. Comme j'ai pris connaissance du message vocal de M. Mulcair seulement en fin de soirée vendredi, en raison des activités dans ma circonscription, je ne l'ai rappelé que le lundi et je lui ai laissé un message vocal à son bureau d'Ottawa.
Une fois les mots de passe des comptes de courriel modifiés, Emrys a effectué une recherche dans le fichier des messages envoyés du compte de courriel de M. Ullyatt. C'est à ce moment-là qu'on a découvert que le rapport avait été envoyé à deux autres personnes. J'ai informé le président du Comité des finances de cette nouvelle information.
Le lundi matin, j'ai rappelé le président du comité pour l'informer du nom des membres du comité avec qui j'avais parlé. Lors de notre entretien, le président m'a encouragée à communiquer avec le greffier du comité pour lui demander d'appeler les lobbyistes en question et de les aviser de ne pas acheminer le rapport et de détruire toute copie qu'ils pourraient avoir, et c'est ce que j'ai fait.
Après la réunion du Comité des finances du lundi, je suis retournée à la Chambre pour invoquer le Règlement. C'est à ce moment-là que j'ai présenté mes excuses pour les agissements de mon ex-employé. Plus tard, j'ai été informée qu'un quatrième lobbyiste s'était manifesté et, à la suite d'une autre demande faite aux services de TI, j'ai appris que M. Ullyatt avait envoyé le rapport à un cinquième lobbyiste.
Je tiens à être claire: nul ne peut être plus déçu que moi de voir un tel incident se produire. J'a toujours eu, et je continue à avoir, le plus grand respect pour la nature confidentielle des travaux effectués aux comités, et je pense que les mesures que j'ai prises pour remédier à la situation l'ont bien prouvé.
Il ne fait aucun doute qu'il y a eu atteinte au privilège. Cet incident a nui non seulement à mon travail, mais aussi au travail du Comité des finances et, en fait, à celui de la Chambre dans son ensemble. J'espère seulement que cette terrible situation pourra aboutir à quelque chose de positif.
J'ose espérer que nous élaborerons un processus ou une série de protocoles en vue de prévenir de telles fuites dans l'avenir. J'espère aussi que, grâce à mon témoignage, je pourrai aider d'autres membres du Parlement qui pourraient se retrouver dans une situation semblable.
En résumé, monsieur le président, j'ai appris qu'il y avait eu manquement à l'obligation de confidentialité. J'ai immédiatement congédié l'employé. J'ai communiqué avec tous les membres du comité — conservateurs, libéraux, bloquistes et néo-démocrates. J'ai demandé au greffier d'aviser les personnes ayant reçu le projet de rapport. Et enfin, j'ai présenté mes excuses devant la Chambre pour les agissements de mon ex-employé.
Encore une fois, je tiens à vous remercier, monsieur le président, de m'avoir donné l'occasion de présenter les faits au comité. Je serai heureuse de répondre aux questions des membres pendant l'heure entière.
Madame Block, j'ai quelques observations à faire, puis deux ou trois petites questions à poser.
Je veux que les membres du comité sachent, pour ce que ça vaut, que Mme Block et moi nous connaissons depuis longtemps, peut-être plus longtemps que nous voulons l'admettre. Durant cette période, j'ai eu maintes fois l'occasion de parler avec Mme Block et de travailler avec elle dans diverses fonctions, et j'ai toujours trouvé que c'était une personne d'une grande intégrité et d'une grande honnêteté.
En fait, je pense que son honnêteté est particulièrement manifeste dans le cas que nous examinons aujourd'hui. Je dirais aux membres du comité que, sans les mesures prises par Mme Block, nous n'aurions peut-être pas su qu'il y avait eu cette fuite. Je dit cela parce que M. Ullyatt a affirmé durant son témoignage qu'il avait l'intention de tromper Mme Block, c'est-à-dire lui cacher le fait qu'il avait transmis des courriels à des lobbyistes.
En ce qui concerne les lobbyistes, je crois qu'aucun membre du comité ne pourrait dire, en toute honnêteté, que ces derniers se seraient manifestés volontairement pour fournir de l'information sur cette fuite, si la question n'avait pas été rendue publique à la suite des mesures prises par Mme Block.
Les lobbyistes sont venus comparaître devant nous il y a quelques jours, et je pense que nous nous souvenons tous de leur témoignage. Un lobbyiste a dit qu'il avait attendu cinq jours avant de finalement admettre qu'il avait reçu des renseignements confidentiels, et il s'est manifesté seulement cinq jours plus tard parce que l'affaire avait été rendue publique. Une autre lobbyiste a affirmé que même si elle avait reçu le courriel de M. Ullyatt contenant ces renseignements confidentiels, elle ne l'avait pas ouvert pendant plusieurs heures. Quand elle l'a ouvert, elle a trouvé que l'information n'était pas confidentielle. Elle a pensé que c'était de l'information qui était déjà du domaine public, même si le courriel portait la mention « hautement confidentiel » en caractères gras. Un troisième lobbyiste a affirmé que même s'il savait que les renseignements étaient confidentiels et qu'il ne devait pas les avoir en sa possession, il a quand même fait parvenir un sommaire à un de ses clients.
Pour répondre à ma propre question, pensons-nous vraiment que les lobbyistes auraient divulgué volontairement cette fuite? Je ne le pense pas. Par conséquent, la seule façon dont les membres du Comité des finances, les membres de la Chambre et les membres de notre comité auraient pu être au courant de cette fuite, c'était par l'entremise de Mme Block. Elle a agi immédiatement, comme elle l'a expliqué dans sa déclaration préliminaire; au lieu de camoufler la situation, elle a exposé au grand jour une très grave atteinte au privilège. Pour cela, madame Block, je vous remercie. Je sais que le Président vous a déjà félicitée pour votre geste et je crois sincèrement que les membres de notre comité devraient faire de même.
J'ai quelques petites questions à vous poser parce que, selon moi, il est important que nous déterminions quelle a été votre implication dans toute l'affaire.
Quand vous avez confronté M. Ullyatt, celui-ci vous a confirmé qu'il avait coulé de l'information. Avant cela, saviez-vous qu'une fuite avait bel et bien eu lieu?
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Je vous remercie, monsieur le président, et vous aussi, madame Block.
Vous me pardonnerez si je vous appelle « Kelly », puisque vous et moi siégeons ensemble au comité des finances. Tout le monde, ici, doit comprendre combien votre apport au comité nous est précieux.
Je peux comprendre le président de s'efforcer de revenir sur ce qui s'est passé et, surtout, sur ce que nous pouvons faire pour que cela ne se reproduise plus.
D'après tout ce que vous avez dit et ce que j'ai lu, vous avez fait tout en votre pouvoir pour vous faire pardonner l'erreur d'un autre, et je ne vois pas exactement ce que vous auriez pu faire de plus.
Pour revenir au comité des finances, il a entendu une foule de témoins, et j'aimerais que tout le monde sache que M. Ullyatt n'a peut-être formulé qu'une question pour vous. Je vous observe, au comité, prendre note de vos propres questions au fil des témoignages, alors je m'étonne qu'il se soit donné la peine de formuler même une seule question pour vous. Quoi qu'il en soit, je pense que tous ceux qui sont ici, de même que nos observateurs, doivent comprendre le rôle fondamental que vous jouez au sein de notre comité des finances et surtout, bien entendu, en votre qualité de députée de la circonscription de Saskatoon —Rosetown —Biggar.
Nous serons tous heureux, c'est certain, de rentrer chez nous pour les Fêtes — et je crois avoir compris que votre fils revient de l'Australie. Alors je vous souhaite un Joyeux Noël avec votre fils.
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Nous essayons d'aller au fond des choses, et cela fait surgir de sérieuses questions sur la crédibilité et la prudence.
Mme DeBellefeuille a mis le doigt sur le problème, tout à l'heure. Est-ce que le processus d'embauche de cette personne a été approprié? Et si on regarde la jurisprudence des pays du Commonwealth qui s'inspirent comme nous des modèles de Westminster, vous comprendrez que c'est lié à la question de privilège dont nous avons été saisis.
Maintenant, si vous voulez me mettre des bâtons dans les roues et m'empêcher de poser ces questions, je ne pourrai pas avoir le dessus sur vous et je devrai vous obéir. J'essaie néanmoins de vous faire comprendre qu'il m'apparaît clairement que c'est une question de crédibilité, que tout cela atteint les fondements mêmes de l'administration de ce bureau et qu'il s'agit justement de savoir si M. Ullyatt suivait les règles sur ce plan-ci et sur d'autres plans. Et je maintiens que cela a un rapport avec le travail du comité.
Je vous dirais aussi qu'aux termes de la procédure et de la définition des affaires de la Chambre, quand nous parlons de
[Français]
[...] l'étude de l'administration de la Chambre et de la prestation de services et d'installations aux députés, ainsi que la présentation de rapports à ce sujet au Président et au Bureau de régie interne.
[Traduction]
c'est exactement de cela qu'il s'agit aussi.
Alors je ne vois pas comment vous, le président du comité, pouvez dire que ces questions ne sont pas pertinentes simplement parce qu'elles sont à l'étude ailleurs. Il se pourrait qu'ailleurs, on étudie exactement les mêmes faits sous un tout autre angle. J'aimerais que nous nous penchions sur ces faits sous l'angle de la crédibilité.
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Eh bien, je n'aborderai pas cela.
Ce que je veux dire, monsieur le président, c'est que j'ai vraiment l'impression que le fait que Mme Block ne reste qu'une heure porte atteinte à mes droits en tant que membre du comité. Elle a dit n'avoir été invitée que pour une heure. J'ai parlé à un autre membre du comité directeur, qui ne savait pas que Mme Block ne resterait qu'une heure et qu'elle n'avait été convoquée que pour cela.
J'ai des questions à poser à Mme Block. J'aurais aimé pouvoir discuter de certains aspects. Je pense qu'il serait de son intérêt aussi d'en parler. Pour l'instant, cela m'est impossible, et j'aimerais vraiment savoir, en ma qualité de membre du comité, qui a décidé de ne la convoquer que pour une heure. Ce n'est pas le comité dans son ensemble, dont je fais partie, ni le comité directeur — dont un membre est ici —, alors j'aimerais savoir, en tant que membre du comité, qui en a décidé ainsi. Cette décision n'est certainement pas dans l'intérêt des membres du comité ni de l'institution dans son ensemble, ni même de Mme Block.
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À propos du même rappel au Règlement, comme je l'ai mentionné plus tôt, aucun député ne peut être forcé de témoigner. Mme Block est venue ici de son plein gré. Qu'elle ait été invitée pour deux heures ou pour dix minutes importe peu. J'ignore ce que l'invitation précisait, mais elle a le droit de déterminer combien de temps elle souhaite consacrer au comité.
Je vous ferai remarquer que lorsqu'ils comparaissent devant un comité pour discuter des mesures législatives, la plupart des ministres restent pour une heure. Je me souviens que lors de son témoignage au sujet de l'équité salariale, le chef de l'opposition officielle était resté seulement 40 minutes. Donc, je ne crois pas qu'on ait contrevenu aux droits de quiconque autour de cette table. D'après ce que j'ai déduit de la déclaration d'ouverture de Mme Block, c'était sa propre décision, et elle s'est dite disposée à rester pour une heure. La décision lui revenait; elle n'était en aucune façon obligée de comparaître ici.
J'ajouterais également que lorsque nous avons rencontré M. Ullyatt, qui est la partie adverse, la personne responsable de la fuite, nous disposions d'une heure. Or, je n'ai entendu aucune plainte de la part des membres du comité.
Quand nous avons reçu les lobbyistes qui avaient obtenu les renseignements confidentiels et qui ont refusé de les divulguer de façon proactive — l'un d'eux a même communiqué l'information à l'un de ses clients au lieu de la détruire —, nous les avons reçus tous les quatre pour une heure. Personne ne s'en est plaint à ce moment-là. Donc, je rejette totalement l'argument de Mme Foote selon lequel ses droits ont été brimés parce que Mme Block nous a fait l'honneur de sa présence pendant une heure.