:
Merci, monsieur le président.
Je tiens à signaler pour le compte rendu que, bien que je sois tout à fait d’accord avec le principe voulant que tous les documents présentés à un comité parlementaire soient dans les deux langues officielles — le principe est admis; je l’accepte et, pour être franc, je l’approuve —, bon nombre de gens ont demandé davantage d’information à propos de l’achat des F-35. Comme le président l’a signalé, je pense que le gouvernement a obtenu ces renseignements assez récemment, à moins que j’aie mal compris. Ils ont été recueillis auprès de nations comme les États-Unis et d’autres nations principalement anglophones.
Cela n’a rien d’une insulte. J’ai senti d’après le ton des gens qui ont parlé qu’ils pensaient que le personnel du ministère avait manqué de respect envers le comité.
Je crois qu’ils tentaient simplement de nous dire qu’ils avaient reçu certains renseignements qui pouvaient satisfaire aux demandes d’information, que ces documents n’étaient pas dans les deux langues officielles, mais que, si nous souhaitions mettre la main sur eux et commencer à les examiner — comme nous le demandions depuis des mois —, ils étaient à notre disposition.
Je pense que c’est l’argument que le président cherchait à faire valoir. Manifestement, la position du gouvernement est la suivante: si vous voulez consulter ces documents, ils sont à votre disposition; si vous voulez attendre qu’ils soient traduits, d’accord; c’est votre décision.
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Encore une fois, je ne les ai pas passés en revue moi-même afin de déterminer ceux qu’ils l’étaient et ceux qui ne l’étaient pas. Je crois comprendre…
M. Marcel Proulx: [Note de la rédaction: inaudible]
Le président: Oui, je comprends, monsieur Proulx. J’ai simplement dormi de minuit à 6 heures, et je n’aurais pas dû faire cela. Cela ne se reproduira plus.
Nous allons passer au point suivant.
Il y a une autre question que je souhaite aborder très brièvement. J’aimerais remercier le comité de son travail acharné au cours des 2 ou 3 derniers jours.
Hier après-midi, vers la fin de la séance, j’ai souffert d’un petit problème de santé, et j’aimerais remercier publiquement M. Proulx d’avoir remarqué premièrement que je souffrais un peu, puis d’avoir été très compréhensif et serviable à mon égard.
M. Lukiwski m’a également beaucoup aidé à me maintenir sur la bonne voie à un moment où je voulais vraiment sortir d’ici, et cela a fonctionné.
Je remercie le comité de son indulgence. Nous verrons bien s’il nous est possible de passer toute une journée sans que quoi que ce soit se produise de nouveau.
Monsieur Proulx, vous avez toute ma gratitude. Jamais je n’oublierai que tous les parlementaires sont des gens formidables.
Merci.
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Au début de ma déclaration, j’ai tenté d’indiquer les étapes du processus. Je vais simplement passer en revue ce qui s’est passé, puis je soulèverai la question.
D'après ce que j'ai su, les faits essentiels ne sont pas sérieusement mis en doute. Les événements se sont déroulés plus ou moins de la façon suivante.
Premièrement, une lettre a été présentée au comité de la Chambre des communes. Signée à la fois par la ministre et les deux hauts fonctionnaires, la lettre renfermait le mot « not » écrit à la main qui changeait complètement le sens de la lettre.
Deuxièmement, la ministre semble avoir dit d'abord au comité parlementaire que le ministère n'avait pas recommandé cette subvention, comme l'indique le mot « not » dans la lettre.
Troisièmement, il semble que lorsque les hauts fonctionnaires ont signé la lettre, le mot « not » écrit à la main n'était pas dans la lettre et qu'il y ait été ajouté plus tard.
Quatrièmement, en réponse aux questions, la ministre affirme qu'elle ignore comment le mot choquant « not » s'est retrouvé dans le document.
Cinquièmement, la ministre admet de plus que le mot choquant « not » a été inséré dans le texte à sa demande, mais elle dit ignorer qui l’a fait.
Sixièmement, les députés de l'opposition accusent la ministre d'avoir induit délibérément la Chambre en erreur.
Septièmement, la ministre, à ma connaissance, affirme qu'elle n'a pas menti. Elle dit plutôt que, étant donné qu'elle ignore qui exactement a inséré le mot « not » dans la lettre, elle a répondu honnêtement à la question, et le secrétaire parlementaire l’a appuyée.
Ensuite, dans sa première décision sur l'affaire, le Président Milliken a fait observer que:
L'ensemble de ces documents soulève des questions très inquiétantes. Toute personne raisonnable mise au fait de ce qui semble s’être produit serait certes extrêmement préoccupée, voire outrée, et pourrait même se mettre à douter de l'intégrité de certains processus décisionnels. En particulier, les hauts fonctionnaires concernés de l'ACDI doivent être profondément perturbés de voir qu'on semble leur faire porter la responsabilité d'avoir signé un document trafiqué.
Le Président n’a pas pu tenir compte de l’ensemble des documents à ce moment-là. Par conséquent, il n’a pas pu dire que l’accusation était fondée à première vue.
Finalement, lorsque le Président a pris connaissance de l'ensemble des documents par le truchement d’un rapport, il n'est pas allé jusqu'à dire que l'accusation d'outrage était fondée à première vue. Il a plutôt recommandé que la question soit renvoyée à votre comité.
Je rappelle au comité que l’outrage au Parlement constitue l'acte le plus grave dont puisse être trouvé coupable un particulier, un fonctionnaire, un député ou un ministre. Après avoir trouvé quelqu'un coupable d'outrage, la Chambre peut: premièrement, en rester là, ce qui est la pratique normale, la déclaration de culpabilité étant considérée en soi comme une peine suffisante; deuxièmement, expulser le député ou déclarer son siège vacant — il est arrivé à quatre reprises que le député soit expulsé, y compris Louis Riel (deux fois), et Fred Rose qui, à l'époque (en 1947), était déjà en prison pour avoir contrevenu à la Loi sur les secrets officiels; et troisièmement, incarcérer le coupable. La dernière fois qu’un député a été incarcéré remonte à 1913.
Je ne vais pas m'attarder sur la question de savoir si la ministre en cause, Bev Oda, est coupable d'outrage au Parlement, sauf que je vais probablement le faire en vous faisant remarquer que, à ma connaissance, la ministre a admis avoir induit la Chambre en erreur. Comme le diraient les avocats: res ipsa loquitur. Les faits sont éloquents. La doctrine de la responsabilité ministérielle est l’essence même du pouvoir et de la responsabilité de notre système parlementaire. Peu importe qui a inscrit le mot « not » dans la lettre. Cela a été fait en son nom et apparemment à sa demande. En le faisant, on a falsifié un document. On a essentiellement déformé les conseils que les hauts fonctionnaires avaient donnés à la ministre. Le fait que la signature de la ministre ait été insérée par une machine est également sans importance; il n’en reste pas moins qu’il s’agissait de sa signature et qu’elle était responsable de sa présence sur ce document.
Cela dit, je tiens à signaler au comité que c’est la deuxième fois en très peu de temps qu’on déforme les conseils que de hauts fonctionnaires ont prodigués à leur ministre… qu’un ministre induit la Chambre en erreur à propos de ce qui s’est passé. Cela s’est produit pour la première fois, lorsqu’on a dénaturé les conseils que le statisticien en chef du Canada, Munir Sheikh, avait donnés à son ministre au sujet de l’utilité d’un sondage volontaire par rapport à celle d’un questionnaire obligatoire. M. Sheikh a été forcé de donner sa démission pour protester contre la déformation de ces conseils. Je peux entrer dans les détails de l’histoire, mais c’est déjà du passé.
Dans cette deuxième histoire, la fonctionnaire dont les conseils ont été dénaturés par l’ajout du mot anglais « not » n’a pas démissionné. L’enjeu était beaucoup moins important, car le travail qu’accomplit Statistique Canada à l’intention des Canadiens, du Parlement et de tous les gens qui ont besoin d’utiliser des statistiques repose fondamentalement sur le questionnaire obligatoire.
La question d’une subvention comme celle-ci est un enjeu beaucoup moins grave, mais, encore une fois, les conseils donnés par deux très hauts fonctionnaires ont été dénaturés.
Et je ne crois pas que le Canada se soit déjà doté d'un mécanisme satisfaisant pour traiter les ministres qui ont brisé le lien de confiance en dénaturant les conseils que leur donnent les fonctionnaires. Je voudrais que le Parlement veille de manière plus active à ce que pareil mécanisme soit conçu.
La question de savoir si Mme Oda a menti au Parlement est facile à déterminer. Celle de savoir ce que l'on fait quand des ministres dénaturent les conseils que leur donnent les hauts fonctionnaires, qui est au coeur même des affaires concernant Munhir Sheikh et Bev Oda, l'est beaucoup moins.
Merci, monsieur le président.
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Merci, monsieur le président.
Je vous remercie, monsieur Franks, d'être revenu témoigner.
Monsieur Franks, je remarque que vous commencez votre déclaration préliminaire en disant que d'après ce que vous avez su, les faits essentiels ne sont pas sérieusement mis en doute. Sauf votre respect, je remets en question ce que vous considérez comme des faits, ici, et je voudrais passer en revue certaines de vos affirmations qui ne me semblent pas factuelles.
Au deuxième paragraphe, vous indiquez que la ministre semble avoir dit d'abord au comité parlementaire que le ministère n'avait pas recommandé cette subvention. C'est inexact, monsieur. Lors de la réunion du comité du 9 décembre, la ministre Oda a affirmé à 11 reprises qu'elle avait elle-même, et elle seule, décidé de ne pas financer KAIROS. À aucun moment durant cette réunion elle n'a insinué, laissé entendre ou déclaré carrément qu'il s'agissait d'une décision du ministère. Elle a toujours affirmé que c'était la sienne. Je dirais donc, monsieur, que ce que vous considérez comme des faits n'est pas exact.
Au paragraphe 3, vous dites:
Il semble que lorsque les hauts fonctionnaires ont signé la lettre, le mot « not » écrit à la main n'était pas dans la lettre
— ce qui est vrai —
et qu'il y a été ajouté plus tard.
C'est vrai.
Autrement dit, le document modifié est censé indiquer que les fonctionnaires appuyaient le contraire de la recommandation qu'ils avaient en fait approuvée. Cela est maintenant connu publiquement.
Ce n'est pas vrai, monsieur. Comme la ministre Oda l'a expliqué à maintes reprises, le document qu'elle a reçu de l'ACDI était un document interne, pas un document parlementaire. Autrement dit, en langage profane, ce serait un genre de note interne. C'était une note des fonctionnaires de l'ACDI indiquant qu'ils recommandaient d'accorder la subvention à KAIROS.
Lorsque la ministre l'a reçue, elle a décidé qu'elle ne voulait pas financer KAIROS. Elle a dit à son personnel de transmettre cette information à l'ACDI; elle a chargé son personnel de s'en occuper. L'un des employés a ajouté le mot « not » dans la note et l'a renvoyée aux fonctionnaires de l'ACDI afin qu'ils sachent que la ministre ne voulait pas financer KAIROS. Il n'y a pas eu de déclaration inexacte, ni de tromperie. En fait, Margaret Biggs, la présidente de l'ACDI, a déclaré devant le comité qu'elle comprenait tout à fait les intentions de la ministre. Autrement dit, le mot « not » n'était pas destiné à induire en erreur.
Je conteste votre affirmation selon laquelle il visait à tromper. C'est ce que le paragraphe 3 semble indiquer.
Au paragraphe 4, vous dites: « En réponse aux questions, la ministre affirme qu'elle ignore comment le mot choquant « not » s'est retrouvé dans le document. » Encore une fois, c'est une affirmation inexacte. On ne lui a jamais posé la question: Savez-vous comment ces mots se sont retrouvés là? On lui a demandé: Savez-vous qui a inséré le mot « not »? Elle a répondu la vérité, soit qu'elle ne le savait pas. Elle l'ignorait à ce moment-là, car elle avait simplement demandé à son personnel d'informer le comité de ce qu'elle voulait. En fait, votre affirmation est inexacte.
Si je souligne cela, monsieur, ce n'est aucunement pour laisser entendre que vous essayez d'embrouiller les choses, mais c'est que, malheureusement, vous avez l'impression que d'autres personnes l'ont fait, et c'est pourquoi la ministre sera ici durant deux heures aujourd'hui pour clarifier tout ce qui s'est passé. Il est important que le comité comprenne que certaines des choses que vous écrivez ici et qui sont supposément des faits ne sont pas telles que vous l'avez indiqué.
Si je peux me permettre, en tout respect, je ne suis pas d'accord. En fait, même Mme Margaret Biggs, la présidente de l'ACDI, a admis et déclaré publiquement que dans le document transmis, c'est-à-dire la note interne, il n'y avait pas d'espace prévu pour que la ministre puisse indiquer qu'elle n'approuvait pas la recommandation.
On a admis que cela aurait dû être corrigé, et on prend des mesures pour le faire afin qu'à partir de maintenant, dans les documents — dans lesquels on recommande ou non une subvention — envoyés à un ministre par l'ACDI, il y aura un espace prévu où le ministre pourra indiquer: « Oui, j'approuve votre recommandation » ou « Non, je n'approuve pas votre recommandation ».
Mme Biggs dit que c'était la source du problème. Mais cela ne lui posait pas de problème. Les fonctionnaires de l'ACDI n'ont pas vu de problème à la façon dont la ministre Oda leur a répondu pour leur faire connaître son mécontentement et sa désapprobation.
Ce que j'essaie de dire — et nous pourrions en débattre, mais je ne crois pas que ce soit nécessaire —, c'est que si cela n'a pas posé de problème aux fonctionnaires de l'ACDI, s'ils ont bien compris ce que voulait la ministre, ils n'ont pas été offusqués qu'elle ajoute le mot « not », puisqu'ils ont compris qu'elle leur indiquait simplement son intention de ne pas financer KAIROS. S'ils n'y ont vu aucun problème, s'ils ont compris l'intention de la ministre, alors pourquoi devrions-nous y voir un problème?
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Merci, monsieur le président.
Merci, monsieur Franks, d'être ici parmi nous. Je pense que votre témoignage a été très éclairant.
Je veux d'abord commencer en disant que la ministre a menti et que c'est factuel. Le 23 avril 2010, en réponse à une question inscrite au Feuilleton — donc, c'est écrit; ce n'est pas quelque chose qui a été dit ou qui a pu être interprété —, elle mentionnait que la décision de ne pas financer KAIROS était celle de l'ACDI. Le 9 décembre, donc plusieurs mois plus tard, en comité, elle a dit le contraire. Toutefois, on a sur papier le fait qu'elle a soutenu que c'était la décision de l'ACDI et qu'elle l'avait endossée. On se retrouve donc, comme vous l'avez mentionné, avec deux cas de fausse représentation des positions des hauts fonctionnaires tout simplement pour appuyer la position du gouvernement.
Vous avez parlé de Statistique Canada et du cas du questionnaire obligatoire long. On parle ici évidemment de la déclaration fautive de Mme Oda, en comité et à la Chambre, et même aussi d'écrits fautifs qui laissent entendre que l'ACDI appuyait la décision du gouvernement de couper la subvention à KAIROS. En plus du mensonge, on a ici une falsification d'un document parce que, peu importe qu'il y ait eu un endroit ou non sur le formulaire pour que Mme Oda indique son absence de volonté de financer KAIROS, elle n'avait qu'à ne pas signer le document. Au lieu de cela, quelqu'un a rajouté un « not » et elle a signé. Les deux autres personnes qui avaient signé précédemment avec l'absence du mot « not » se sont trouvées finalement à avoir signé un document qui a été falsifié après coup. Pour moi, il y a à cet égard un problème de gouvernance.
Premièrement, dans le parlementarisme britannique, la confiance est à la base du soutien au gouvernement. Dans ce cas-ci, on a brisé la confiance des parlementaires. Je voudrais savoir si, à votre avis, on pourrait aller jusqu'à un outrage au Parlement sur la base des faits et gestes de Mme Oda? Deuxièmement, il y a la responsabilité ministérielle qui touche la façon dont Mme Oda a agi dans ce dossier. Ne devrait-elle pas démissionner?
Je vous pose la question parce que j'ai vu, à la fin de votre présentation, que vous n'étiez pas prêt à aller jusqu'à nous le recommander. Toutefois, est-ce que cela pourrait aller jusqu'à un outrage au Parlement concernant la gouvernance du gouvernement et à une demande de démission à l'endroit de la ministre qui a brisé le lien de confiance avec les parlementaires?
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Quelque chose m'a frappé dans votre présentation et j'aimerais que vous l'expliquiez davantage.
Voici ce qu'on peut lire au point 1): « Ce changement reflétait le point de vue du sur le caractère souhaitable de la subvention. » Donc, vous laissez entendre que le premier ministre ne souhaitait pas que KAIROS ait la subvention.
Le problème n'est pas tant que le gouvernement abolisse la subvention — quoique cela constitue un autre problème dont on pourrait débattre — que la manière dont ça a été fait. On a présenté ça comme étant le fruit d'une recommandation de l'ACDI, ce qui n'était pas le cas.
Vous faites référence au . Voici ce qui s'est passé, à mon avis. a signé le document qui recommandait la subvention, et lorsque le l'a su, il lui a dit qu'il ne voulait pas que le gouvernement finance KAIROS. À ce moment, elle n'avait plus d'autre choix que de falsifier le document. Que ce soit elle ou quelqu'un d'autre, on s'en fout.
Vous dites que ce changement reflétait le point de vue du . Oui, la ministre est responsable, mais le premier ministre a-t-il aussi, selon vous, une responsabilité dans toute cette affaire?
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Merci, monsieur le président.
Merci, monsieur Franks.
Je vous remercie de nous avoir rappelé, dans votre déclaration préliminaire, la gravité de la situation. Ce n'est pas une question à prendre à la légère. En fait, c'est la décision la plus importante que nous pouvons prendre sur une question: déclarer quelqu'un coupable d'outrage au Parlement.
Je tiens également à vous remercier d'avoir souligné que le Parlement n'a pas toujours raison, qu'il a eu tort dans le passé, que Louis Riel était un héros et non un traître, et qu'il n'aurait probablement jamais dû être déclaré coupable d'outrage au Parlement.
Dans le cadre de cette étude, je crois que nous devrions être conscients de la gravité de ce que nous sommes sur le point d'entreprendre.
Je conviens que l'importance de l'acte n'a rien à voir. Son ampleur, sa portée, n'est peut-être pas aussi large que celle du questionnaire détaillé du recensement, mais je compare cela à un employé qui vole des articles de papeterie. Il peut être sanctionné pour cela, même s'il s'agit d'une infraction mineure, mais on ne sait pas vraiment s'il y a autre chose.
La question que j'aimerais vous poser, monsieur Franks... Il est plausible, d'après ce que nous avons vu, que la ministre Oda ait suivi l'avis de ses hauts fonctionnaires, qu'elle ait approuvé la subvention à KAIROS, mais que quelqu'un d'autre ait inséré le mot « not » par la suite, après que la ministre ait apposé sa signature sur le document.
Nous avons l'impression que le premier ministre Harper utilise son Cabinet comme un groupe de discussion au lieu de lui accorder un pouvoir effectif. Donc, quelqu'un du CPM aurait pu intercepter ce document et y ajouter le mot « not » après que la ministre Oda ait consciencieusement suivi la recommandation de son personnel, n'est-ce pas?
Malheureusement, je vais devoir modifier la nature de cette question, compte tenu du temps imparti.
Dans votre conclusion, vous avez dit que la question de savoir si la ministre a menti est facile à déterminer. Je pense que c'est facile parce que la réponse est non. Il n'y a aucun moment où je l'entends dire que le ministère lui a enjoint ou conseillé de ne pas financer Kairos.
Je lis tout simplement dans le hansard: la question a été posée et elle a répondu:
Après un examen rigoureux, les responsables ont décidé que la proposition de Kairos ne respectait pas les normes gouvernementales.
Elle n'a pas dit « les responsables ont déterminé »; elle a dit « ont décidé ».
En comité, elle a déclaré:
Le ministère achemine une recommandation au ministre. Il ne prend pas de décision; il recommande. Donc, à chaque étape du processus, c'est la recommandation qui suit son chemin. La décision finale, cependant, est prise par le ministre.
C'est « par le ministre ».
Elle a dit:
J'ai signé tous les documents.
Elle a dit:
Je n'ai pas dit que c'était moi qui avais ajouté « non ».
Elle a dit:
La responsabilité du ministère est de conseiller la ministre au meilleur de ses connaissances. La ministre a ensuite le pouvoir de prendre la décision ultime. Comme je l'ai souligné, nous avons eu des discussions avec les gens du ministère dans ce dossier.
Elle a dit:
Monsieur Rae, je n'ai pas ajouté la négation sur le document. Je n'ai pas signé le document. Le document reflète la décision du ministre.
Elle a dit:
Non, j'ai pris la décision. Le document reflète alors la décision du ministre.
Elle a dit:
Personnellement, je n'ai pas signé le document. J'ai pris la décision. Je l'ai communiquée, et le document serait alors fidèle...
Elle a été interrompue par M. Rae avant de terminer sa réponse.
Elle a dit:
C'est la mienne, soit tracée mécaniquement ou par moi à la main. À l'instar de tous les autres ministres, je ne signe pas tous les documents qui doivent être signés...
Donc, elle n'a en aucun temps dit que c'est ce qu'on lui avait conseillé. À un moment donné, M. Dewar semblait...
:
Merci, monsieur le président.
Monsieur Franks, vous nous dites dans votre exposé que vous vous contenterez plutôt de faire remarquer — et c'est ce qu'a soulevé M. Reid — qu'à votre connaissance, la ministre a admis avoir induit la Chambre en erreur. Comme le diraient les avocats, res ipsa loquitur, les faits sont éloquents. Je vais reprendre les deux décisions du Président Milliken.
Dans celle du 10 février, il mentionnait: « En particulier, les hauts fonctionnaires concernés de l'ACDI doivent être profondément perturbés de voir qu'on semble leur faire porter la responsabilité d'avoir signé un document trafiqué. » Il avait déjà mijoté cela le 10 février.
Dans sa décision du 9 mars, il mentionne: « [...] j'ai soigneusement étudié la preuve, vu qu'il s'agit d'allégations très graves concernant la conduite d'une ministre qui, en conséquence, s'est attiré de sévères critiques publiques [...] »
On voit l'importance de l'incident, vous en faites état, mais le Président Milliken aussi fait état de l'importance de la situation dans laquelle s'est placée la ministre.
Pensez-vous que, si notre comité décidait qu'il y avait outrage au Parlement, ce serait exagéré?
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Merci, monsieur le président.
J'ai le plaisir d'avoir l'occasion de répondre aujourd'hui à la décision du Président sur la confusion entourant la demande de Kairos. Pour commencer, permettez-moi de dire que j'assume l'entière responsabilité de la confusion causée par ma réponse initiale, et je m'en excuse.
Je suis ici aujourd'hui pour expliquer au comité, et au grand public, pourquoi — initialement —, je n'ai pas compris comment mes réponses ont pu créer une telle confusion. J'ai dit au Comité des affaires étrangères que je ne savais pas quel membre précis de mon bureau avait tamponné le mot « not » sur la note de financement de Kairos. J'ai également dit que cela avait été fait sous mes directives. La confusion consiste à déterminer le rapport entre ces deux déclarations. C'est le mandat que le Président a donné au comité et je suis ici pour clarifier cette confusion.
Je crois qu'il faut répondre à trois questions: Pourquoi ai-je refusé la demande de Kairos? Comment ma décision a-t-eIle été communiquée aux responsables de l'ACDI? Et, finalement, pourquoi n'ai-je pas été plus loin quand j'ai dit au Comité des affaires étrangères que j'ignorais qui précisément avait inséré le mot « not »?
Permettez-moi de répondre à la première question: Pourquoi ai-je refusé la demande de Kairos? La demande de Kairos m'a d'abord été soumise sous la forme d'un document de 19 pages comprenant l'analyse de la demande faite par du personnel de l'ACDI, et des commentaires du personnel de l'ACDI et d'ambassadeurs du Canada situés dans des régions visées par la proposition. Les responsables de l'ACDI ont également préparé une note de service de deux pages à signer. Il faut être clair là-dessus. C'était une note de service interne, adressée par les responsables de l'ACDI à moi, en tant que ministre.
Avant de rendre une décision, j'ai parlé aux responsables de l'ACDI, de même qu'à mon personnel politique. Même si les deux documents comprenaient des aspects positifs, ils soulevaient également des préoccupations. Par exemple, plus de 880 000 $ devaient être utilisés pour la défense d'intérêts, la formation, des stratégies médiatiques et des activités de campagne au Canada. Ce n'est pas là le meilleur moyen de dépenser les fonds publics visant à aider ceux qui vivent dans la pauvreté dans des pays en voie de développement. Nous croyons que le rôle de l'ACDI est de s'assurer qu'il y a plus à manger sur la table de ceux qui ont faim, plus de garçons et de filles qui vont à l'école, et plus de médicaments dans les parties du monde où ils sont le plus urgemment requis.
Nous recevons des centaines de propositions par année, mais nous ne pouvons pas toutes les financer. Mon travail en tant que ministre est d'établir des priorités qui répondent de façon optimale aux objectifs des Canadiens. Donc, après une considération prudente, j'ai refusé la demande de Kairos. Je n'ai jamais parlé au , au ou à des membres de leur personnel, et je n'ai reçu aucune directive de leur part. C'était ma propre décision.
Je vais maintenant passer à la deuxième question: Comment ma décision a-t-elle été communiquée aux responsables de l'ACDI? Pour bien répondre à cette question, je crois qu'il est important de comprendre le processus utilisé à l'époque par l'ACDI pour obtenir une décision ministérielle. Premièrement, un document interne, comme celui dont j'ai parlé plus tôt, est envoyé à la ministre. Une note de service est également envoyée, présentant un résumé et une recommandation ministérielle, avec un endroit destiné à la signature de la ministre. La pratique en vigueur est que les responsables de l'ACDI demandent à mon bureau de fournir une réponse écrite aux recommandations proposées, clarifiant ainsi ma décision. Quand je reçois la note de service sur la décision, elle a déjà été signée par le président de l'ACDI et d'autres responsables de l'organisme.
Dans le cas présent, j'ai parlé à mon personnel et aux responsables de l'ACDI au cours des deux mois précédant ma décision. Dans le cas de Kairos, j'ai fait part de mes préoccupations et demandé de l'information additionnelle à l'ACDI, qui savait que j'étais peu encline à approuver la demande. Mon personnel et les responsables de l'ACDI ne remettent pas ces faits en question. Après mûre réflexion, quand j'ai estimé que je disposais de suffisamment d'information pour rendre une décision, j'ai appelé mon chef de cabinet pour l'informer que j'avais décidé de rejeter la demande. Je lui ai ensuite demandé de faire part de ma décision au sein du ministère.
À titre de ministre de la Coopération internationale, que je sois en déplacement ou à Ottawa, j'ai le devoir et la responsabilité de superviser l'ACDI. Chaque décision rendue doit être communiquée aux responsables de l'ACDI et, souvent sous mes directives, je m'attends à ce que mon personnel fasse le suivi de mes décisions. Je m'adresse à un membre de mon personnel politique, qui fait ensuite part de mes décisions à l'ACDI sous la forme de notes de service préparées par les responsables de l'ACDI. Pour vous donner une idée de l'ampleur de la tâche, j'ai reçu plus de 750 notes de service l'année dernière.
En décembre, quand j'ai témoigné devant le comité, j'ignorais qui, précisément, au sein de mon personnel avait ajouté le mot « not » ou avait utilisé la signature automatique. Par la suite, mon ancien chef de cabinet, Stephanie Machel, m'a dit que c'était elle qui l'avait fait, conformément à la pratique habituelle à ce moment. Elle a ensuite demandé à l'un des deux fonctionnaires du ministère dans mon bureau qui sont autorisés à utiliser la signature automatique — dans ce cas Claudette Rioux — à l'utiliser pour signer le document.
Il est essentiel d'avoir une copie papier des décisions, et je n'ai pas toujours la possibilité de signer ces documents moi-même. En conséquence, mon bureau utilise ce qu'on appelle une « signature automatique » pour reproduire ma signature lorsque je ne suis pas en mesure de signer un document. Ce processus est utilisé par tous les ministres, et je crois que les gouvernements précédents avaient recours à ce même processus.
À l'époque, les notes de service ministérielles sur mes décisions ne me permettaient pas de désapprouver une recommandation. Elles ne faisaient que présenter la recommandation des responsables de l'ACDI avec un espace pour signer. Pour contrer l'absence d'option de refus, mon bureau indiquait, si je désapprouvais une recommandation, les mots « not » ou « do not » sur la ligne de recommandation. Cependant, pour un observateur ignorant le processus, il peut sembler qu'une personne ayant initialement signé le document ne savait pas qu'elle avait été refusée. Ce n'est pas le cas, car en fait, cette même note de service signée est retournée à ceux qui l'ont signée à l'origine.
Il n'y a jamais eu aucune confusion quant à cette pratique. Les notes de service sur les décisions sont réservées à un usage interne. Et les responsables de l'ACDI n'ont soulevé aucune préoccupation sur la façon dont ma décision leur a été communiquée. De plus, comme c'est une pratique courante au gouvernement, une décision ministérielle est ensuite publiquement citée comme étant une décision du gouvernement, ou du ministère ou de l'organisme visé. J'ai présenté mes excuses pour la confusion créée, et je sais maintenant que j'aurais dû mieux expliquer le processus.
Cela nous amène à la troisième question: Pourquoi n'ai-je pas été plus loin quand j'ai dit au Comité des affaires étrangères que j'ignorais qui précisément avait inséré le mot « not »? Sous un autre angle, pourquoi ai-je répondu à la question précise au lieu de fournir l'information que le comité voulait confirmer?
Quand j'ai dit au comité que j'ignorais qui avait écrit le mot « not » sur la demande de KAIROS, je ne savais pas quel membre de mon personnel avait écrit le mot « not » et signé le document. Avec le recul, je me dis que j'aurais dû donner une réponse plus claire en décrivant le processus comme je l'ai fait aujourd'hui, et en fournissant le nom des personnes lorsque j'ai obtenu l'information. À cette époque, ma réponse me semblait sensée, car je connaissais le processus habituel. Personne ne voulait tromper les membres du comité. Je réalise aujourd'hui que selon un point de vue autre, cela porte à confusion, comme l'a dit le Président.
Ceux qui écoutaient mes réponses ont pu penser que j'avais signé le document et qu'ensuite, quelqu'un avait ajouté le mot « not ». Cette idée ne m'a pas traversé l'esprit, car je savais que ce n'était pas le cas. À l'époque, je n'ai pas réalisé la confusion que ma réponse pouvait causer, et je m'en excuse.
En terminant, monsieur le président, j'aimerais dire que mes réponses originales étaient justes, exactes et précises, mais qu'elles n'étaient pas claires. Je suis ici aujourd'hui pour éliminer toute confusion.
Je respecte grandement le Parlement et les gens avec qui je suis en fonction, notamment le Président, et je crois à la procédure parlementaire.
Monsieur le président, je n'ai jamais mis ma réputation ou mon intégrité en péril, et je ne le ferai jamais. Je sers mes électeurs et mon pays de façon honorable, avec la même intégrité. En aucun cas, je ne veux tromper qui que ce soit.
Merci. Je vais maintenant répondre à vos questions.
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Merci, monsieur le président.
Merci, madame Oda et madame Biggs, de vous présenter devant le comité.
D'abord, je dois vous dire que la confusion dont vous parlez n'est pas pertinente pour nous. Nous n'avons jamais mis en doute le fait que c'était votre décision ou celle de votre gouvernement. Nous n'avons jamais mis en doute le droit du gouvernement de faire ses choix politiques, même si nous sommes en désaccord face à ces choix. Le problème pour nous est que le mot « not » a été ajouté après que les dirigeants de l'ACDI ont eu signé le document, comme vous l'avez d'ailleurs confirmé, ce qui laisse entendre que la direction de l'ACDI était consentante à la décision du gouvernement. C'est la première chose. Voilà le problème. Le problème n'est pas de déterminer si c'est votre décision ou non; on sait que c'est votre décision ou celle du .
Premièrement, d'avoir ajouté le mot « not » au document qui était déjà signé laisse entendre que la direction de l'ACDI était d'accord. Deuxièmement, vous avez fait une déclaration contraire à ce que vous aviez répondu, le 23 avril 2010, à une question au Feuilleton, c'est-à-dire que la décision de ne pas financer KAIROS était celle de l'ACDI. C'était donc faux.
La confusion ne vient pas simplement du fait qu'on n'avait pas trop bien compris si c'était vous qui aviez mis le mot « not » parce que vous ne saviez pas qui l'avait fait. Là n'est pas le problème. Le problème dans cette histoire tient au fait que, pendant des semaines, vous avez laissé entendre ou avez dit, de même que votre secrétaire parlementaire, que la direction de l'ACDI approuvait la décision du gouvernement et la vôtre. Voilà le problème, voilà ce qu'on tente de comprendre.
D'abord et avant tout, pourquoi ne pas avoir tout simplement refusé de signer le document? Les deux dirigeants de l'ACDI ont signé le document en septembre et vous l'avez reçu en novembre. Pourquoi ne pas tout simplement avoir refusé de le signer, si vous n'étiez pas d'accord avec les dirigeants, plutôt que de falsifier le document et de le signer ensuite? Pourquoi ne pas vous être contentée de ne pas signer le document, chose qui me semble tout à fait normale? Si la ministre ne signe pas, il n'y a pas de subvention, donc on annule les 7 millions de dollars, sans tout cet artifice que nous avons devant nous. J'ai d'ailleurs ici cette feuille qui a tant circulé.
Alors, j'attends votre réponse.
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Monsieur le président, par votre entremise, la ministre voudrait nous faire croire qu'il n'y a rien de mal dans toute cette histoire. Elle se présente ici avec une défense à la O.J. Simpson, dans une tentative désespérée de sauver le peu de crédibilité qu'il lui reste et d'en rire comme s'il s'agissait d'une erreur inoffensive, d'un malentendu innocent.
Sincèrement, sur quelle planète vivez-vous, madame la ministre?
Vous avez démontré, par vos actions, que le financement de KAIROS a été refusé parce que l'ACDI estimait que l'organisme ne devrait pas obtenir de fonds. C'est le tableau que vous avez brossé. C'est l'affabulation que vous avez laissé croire et que vous avez défendu avec vigueur jusqu'à maintenant, où ce tribunal risque de vous reconnaître coupable d'outrage au Parlement.
Vous vous êtes miraculeusement convertie sur le chemin de Damas et, tout à coup, vous vous êtes rappelée — eh bien, oui, c'est à Stephanie Machel que vous avez demandé d'insérer le mot « not ». Le lendemain même où vous avez induit en erreur le Comité des affaires étrangères, vous avez découvert le coupable.
Cela ne donne pas un portrait très reluisant, madame la ministre.
Les gens raisonnables concluraient que KAIROS a perdu son financement parce que Margaret Biggs et d'autres ont dit qu'à leur avis KAIROS ne devrait plus recevoir de fonds, alors que nous croyons que KAIROS a perdu son financement à cause de préjugés idéologiques de Jason Kenney qui, pour une raison ou une autre, s'est mis dans la tête que KAIROS était antisémite, ce qui est absurde.
Écoutez, vous avez dit qu'il est monnaie courante d'insérer « not » ou « do not » parce que vos formulaires ne vous donnent pas l'option d'indiquer « la ministre désapprouve ».
Soit dit en passant, j'ai appris cela parce que j'ai réussi à obtenir une copie de votre exposé. Vous l'avez remis à la greffière dans une langue officielle, ce qui n'était pas très utile pour nous parce que nous ne pouvions pas le faire circuler. J'ai dû obtenir une photocopie du document que votre personnel a distribué aux médias.
Monsieur Franks, professeur de sciences politiques à l'Université Queen's, a comparu plus tôt ce matin. Dans son exposé préliminaire, il a fait différentes affirmations au titre desquelles il nous a ensuite présenté des excuses en disant qu'elles étaient erronées. Ces affirmations étaient fondées sur les mêmes idées fausses qui circulent dans les rangs de l'opposition comme peut-être dans la population en général. Il nous a dit qu'il s'agissait d'erreurs factuelles et nous a priés de l'en excuser.
Si j'en parle, c'est parce que M. Laframboise et d'autres députés de l'opposition semblent emprunter la même avenue en affirmant croire que vous avez délibérément induit le Parlement en erreur. Je vous dirais que même si les députés de l'opposition l'affirment, cela n'en fait pas une vérité.
Encore une fois, avez-vous, à un moment ou à un autre, laissé entendre ou essayé de donner l'impression, de quelque manière que ce soit, au Parlement ou au grand public, que la décision de ne pas accorder de financement à Kairos avait été prise par les fonctionnaires de l'ACDI, ou bien avez-vous toujours, à toutes les occasions, indiqué que c'était votre décision, à vous seule, dans vos déclarations à la Chambre et à l'extérieur?
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Merci, monsieur le président.
On va refaire un peu la chronologie des événements. Vous décidez, le 27 novembre, contre l'avis des hauts fonctionnaires, de ne pas accorder la subvention à KAIROS. Cela a fait des vagues. Ce qui a fait encore plus de vagues, c'est que votre collègue , à Jérusalem, le 16 décembre 2009, a dit que c'est à cause de l'antisémitisme de KAIROS que la subvention a été supprimée. Dans vos déclarations, pour justement vous soustraire à cette accusation d'avoir pris une décision purement idéologique basée sur les valeurs rétrogrades des conservateurs, vous laissez entendre et vous écrivez que c'est l'ACDI qui avait pris la décision.
Je vous rappelle que le 23 avril 2010, à la Chambre, vous avez dit ce qui suit:
Les critères auxquels KAIROS doit satisfaire pour obtenir du financement sont les mêmes que pour toutes les organisations qui demandent le même type de financement. KAIROS n'a pas satisfait à ces critères et n'a donc pas reçu de financement. Cela n'a rien de surprenant.
Ce devait être aux critères de l'ACDI que l'on faisait référence. Or on sait que, selon les critères de l'ACDI, KAIROS aurait eu sa subvention. Donc, ce sont d'autres critères, probablement ceux du gouvernement, de M. Harper et de vous-même. J'aimerais savoir à quels critères vous faisiez référence le 23 avril 2010, à la Chambre, lors de la période des questions. Est-ce que c'étaient les critères de l'ACDI? Je relis la phrase à votre intention:
KAIROS n'a pas satisfait à ces critères et n'a donc pas reçu de financement.
De cette manière, est-ce que vous ne faites pas référence au fait que ce sont les critères de l'ACDI alors qu'on sait très bien que l'ACDI avait fait une recommandation positive? Je vous demande de répondre.
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Madame la ministre, avouez qu'à cause de la façon dont c'était écrit, tout le monde a cru que c'étaient les critères de l'ACDI. D'autant plus qu'à la question 106, vous avez répondu ceci:
La décision de l'ACDI de cesser d'accorder un financement à KAIROS a été prise en fonction de l'évaluation globale de la proposition, et non pas d'un critère en particulier.
Je n'accepte pas l'interprétation du secrétaire parlementaire. À l'ACDI, il y a des critères. Globalement, on évalue l'ensemble de la proposition faite par une organisation non gouvernementale et on décide de lui accorder ou non du financement. La façon dont c'est écrit indique clairement que c'est en fonction des critères de l'ACDI que la demande de subvention a été refusée alors que c'est faux: cette demande a été refusée, pour des raisons strictement politiques, par la ministre et le . C'est ça, la réalité.
D'autre part, l'opposition n'est pas la seule à considérer que la façon dont vous vous êtes exprimée était très claire. Ce n'est ni l'ACDI, ni le gouvernement ni la ministre qui ont rendu ce document public. En effet, il a été rendu public en vertu de la Loi sur l'accès à l'information. Or il est clairement ressorti de ce document qu'au mois de septembre, la recommandation de l'ACDI était positive. Selon les critères de l'ACDI, cette subvention aurait dû être accordée à KAIROS.
Vous avez décidé, pour des raisons politiques et selon des valeurs qui vous sont propres, mais que je ne partage certainement pas, de dire non. C'est une chose qu'on ne remet pas du tout en cause. Vous avez donc ajouté le mot « not ».
Ce que je ne comprends toujours pas, madame Biggs, madame la ministre...
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Monsieur le président, d'après moi, on peut reprocher deux faits à la ministre. D'abord, qu'elle a délibérément — c'est ce que je crois — trompé le Parlement, notre comité et le public, soit par omission, soit par commission et, dans les deux cas, c'est aussi grave. La loi dit que l'on peut présumer qu'une personne avait en tête le résultat probable de ses actions.
Vous connaissiez le résultat probable de vos actions.
Monsieur le président, elle savait que le monde croirait que l'ACDI avait mis fin au financement de Kairos, et non que l'idéologie politique du cabinet avait trouvé moyen de s'interposer dans une analyse impartiale d'une demande de financement par une ONG.
Le deuxième fait qu'on peut lui reprocher, qui est presque aussi grave à mes yeux, c'est qu'elle a tiré dans le genou des hauts fonctionnaires qui sont sous sa houlette. Elle a fait un croc-en-jambe à ses agents qui essaient simplement de faire leur travail. C'est ce dont a parlé Ned Franks, aujourd'hui: il nous manque un bon mécanisme pour réagir à ce genre de dilemme au Canada. Si nous étions en Grande-Bretagne... on sait que le secrétaire du Cabinet a réprimandé des ministres pour avoir menti au sujet des avis qu'ils avaient reçus ou, comme il le dit, pour avoir trahi la confiance et l'honneur de la fonction publique.
Malheureusement, ce genre de garde-fou manque à notre système parlementaire. En fait, le greffier du Conseil privé est le sous-ministre du premier ministre, de sorte que personne ne se précipitera à la défense des fonctionnaires dont les opinions ont été travesties par leur ministre. Pour moi, cela est aussi grave que le mépris qu'elle a manifesté au Parlement en trompant délibérément la Chambre des communes.
Je lui demanderai encore une fois si elle déposera les exemples, les documents. Si c'est là l'usage dans son ministère, déposera-t-elle ces documents? Je vous demande, monsieur le président, de prier la ministre de le faire ou de lui en donner la directive.
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Merci, monsieur le président.
Je tiens à remercier Mme Corkery d'être ici aujourd'hui. Nous sommes heureux de vous accueillir.
Je crois qu'il est important de rappeler aux membres du comité, ainsi qu'aux Canadiens, que nous ne sommes pas ici pour discuter de la décision rendue par la ministre. Je pense que nous sommes tous d'avis qu'il incombe aux ministres de prendre le genre de décision qu'a prise la ministre Oda.
Au début, vous avez affirmé, sans doute en réponse à la question de M. McKay, que Kairos reçoit du financement depuis 35 ans. Vous avez aussi affirmé qu'on vous a dit que votre organisme allait cesser complètement d'être financé. Je pense qu'en réalité, ce qui s'est passé, c'est qu'une demande de financement n'a pas été approuvée. À mon sens, ce n'est pas la même chose que de supprimer le financement pendant la réalisation d'un projet.
Plus tôt aujourd'hui, lorsque nous avons discuté avec la ministre Oda, elle a souligné qu'il existe au Canada des milliers d'ONG et que l'ACDI a traité avec environ 700 d'entre elles à différents moments depuis sa création. Je crois que nous conviendrons tous que les récents événements — tsunamis, séismes, inondations, etc. —survenus dans le monde ont amené un grand nombre de ces organismes à accomplir un excellent travail au nom des Canadiens. En effet, je suis certain que tous les députés ici présents ont reçu dans leur bureau de circonscription des représentants d'ONG de toutes sortes pour écouter leurs très bonnes idées quant à ce qu'ils pourraient faire pour alléger la souffrance humaine quelque part dans le monde, que ce soit dans un pays en développement ou dans une région touchée par une catastrophe naturelle.
Nous convenons tous également qu'en raison du nombre élevé de demandes, comme l'a expliqué Mme Oda ce matin, il est littéralement impossible pour n'importe quel organisme gouvernemental de répondre à toutes les attentes, même pour un seul ministère, et encore moins à l'échelle du gouvernement, puisqu'on sait que le ministre des Finances a la responsabilité de dresser un budget.
Donc, croyez-vous qu'uniquement parce qu'un organisme entretient des rapports avec un organisme de financement depuis 35 ans, que ce soit Centraide, dans une circonscription, ou un autre qui fait une demande à l'ACDI, il est réaliste que cet organisme présume, étant donné cette relation, qu'il recevra automatiquement le financement demandé l'année suivante? Je veux simplement qu'on se penche précisément sur le fait que vous avez dit qu'on cessera complètement de vous financer.
J'aimerais bien que vous répondiez à cette question.
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Nous pouvons arrondir ce chiffre à la hausse ou à la baisse, mais ce sont quand même 18 millions de personnes, n'est-ce pas?
Alors, lorsque le ministre Kenney se lève et prononce un discours qui...
Permettez-moi de revenir en arrière quelques instants.
Madame Corkery, je reconnais votre nom de famille, et je suis certain que vous reconnaissez le mien; nous avons probablement les mêmes ancêtres irlandais. S'il y a une chose que les Canadiens d'ascendance irlandaise comprennent, c'est bien le fléau du sectarisme qui a déchiré l'Irlande pendant 450 ans.
J'aimerais revenir au discours que M. Kenney a prononcé, dans lequel il a porté de graves accusations contre votre groupe et, par l'intermédiaire de votre groupe, à 18 millions de Canadiens qui sont représentés par les églises.
Je vais vous poser une question directe. Je sais à quel point ce langage sectaire peut diviser, alors je ne pose pas cette question de façon frivole, madame Corkery. J'aimerais que vous y répondiez avec autant d'honnêteté et de profondeur que vous le souhaitez. Êtes-vous antisémite?
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Je vous remercie, madame Corkery, de comparaître aujourd'hui
J'ai discuté avec le clergé de ma circonscription d'Oakville, où il se trouve notamment une synagogue. J'appelle le rabbin mon rabbin, même si je suis anglican. Nous avons longuement débattu de la question.
J'ai quelques questions au sujet d'un passage d'un de vos documents publié sur le site Web, qui porte sur la dissolution des partenariats, une mesure difficile à prendre. On peut y lire ce qui suit:
Les partenariats que Kairos forme dans le domaine de la justice mondiale sont généralement à long terme. Cependant, il ne sont pas nécessairement éternels. La présente politique vise à pouvoir y mettre fin, au besoin, d'une manière transparente, équitable et juste.
On peut voir ensuite que plusieurs situations peuvent provoquer la dissolution d'un partenariat. Je ne vous lirai que la première, si vous me le permettez.
Des changements du contexte politique, social ou économique — et notre analyse de la manière dont Kairos peut apporter une aide optimale — indiquent que nous accordons la priorité à de nouveaux secteurs d'intervention, compte tenu de nos ressources limitées.
N'est-ce pas là ce que l'ACDI a signifié à Kairos? Si l'on remplace « Kairos » par « l'ACDI », cela donnerait « notre analyse de la manière dont l'ACDI peut apporter une aide optimale... » — vous savez que les priorités du ministre sont les denrées alimentaires, les médicaments, l'éducation et l'aide à l'Afrique, par exemple, plutôt que la défense des droits — « indique que nous devons accorder la priorité à de nouveaux secteurs d'intervention ».
Ainsi, quand l'ACDI met fin à une relation, il agit de la même manière que Kairos en situation semblable.
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Je vous remercie, monsieur le président.
J'ai des remarques liminaires à faire. Je vous invite à m'interrompre lorsque vous en aurez assez de m'entendre et que vous préférez me poser des questions plutôt que de m'écouter encore.
Comme vous le savez — j'espère en tout cas que ce ne sera pas par expérience personnelle —, lorsqu'un avocat a un client qui fait face à des poursuites devant les tribunaux, il doit le conseiller, compte tenu des accusations auxquelles il s'expose, afin qu'il décide s'il veut plaider coupable ou non.
À la fin du procès, les avocats des deux parties représentées résument les faits et présentent leurs arguments. Bien sûr, chacun résumera les faits de la façon qui favorisera le plus son client.
Ce que je vous propose aujourd'hui, ce n'est pas de résumer les faits à l'avantage d'un parti ou d'un autre; je vais m'en tenir aux faits que le comité devrait considérer, selon moi. Je dirais d'emblée, à l'instar d'autres témoins avant moi, qu'il s'agit d'une affaire très importante dans laquelle une députée, en l'occurrence une ministre, est accusée d'avoir induit délibérément la Chambre en erreur — et quand je dis « la Chambre », j'inclus le comité. Si vous me le permettez, en votre nom, en tant que légiste de la Chambre des communes, je dirais que l'infraction est sérieuse et, pour des raisons évidentes, il convient de soupeser les éléments de preuve de façon rigoureuse, équilibrée et convaincante.
La motion dont a été saisie la Chambre vise à renvoyer la question concernant les déclarations de la ministre devant le comité. On ne dit pas de quelles déclarations il s'agit. Alors, la première question qui m'est venue à l'esprit, pendant que je me préparais pour cette comparution, était de savoir à quelles déclarations on faisait référence.
En lisant la décision du Président, il m'est apparu que, dans ce cas, celui-ci n'était pas arrivé à la conclusion que la Chambre avait été induite en erreur, mais que les déclarations ou l'absence de déclarations de la ministre avaient semé la confusion chez les députés, et qu'il estimait que le comité devait se pencher sur la question plus en profondeur et faire rapport à la Chambre pour, comme c'est à souhaiter, dissiper cette confusion et tirer les choses au clair.
Peut-être que les faits sont maintenant clairs, après tous les témoignages qu'a entendus le comité, mais ce dernier a quand même le droit de faire un retour en arrière afin de voir si, à un moment donné, quelqu'un a fait de fausses déclarations à la Chambre, alors qu'il n'aurait pas dû, et ce de manière délibérée; des déclarations auxquelles se sont fiés les députés pendant un certain temps, jusqu'à ce qu'elles soient corrigées.
Ceci étant dit, je considère qu'il y a deux avis, si je puis m'exprimer ainsi, à l'origine de cette accusation d'avoir induit la Chambre en erreur: le premier a été émis à la séance du comité du 9 décembre, et l'autre à la Chambre, à savoir que la décision de l'ACDI découlait de l'examen, par les fonctionnaires de cette agence, de la valeur de la demande présentée.
La première déclaration en Chambre avait été faite par le secrétaire parlementaire et non la ministre elle-même. Par la suite, le secrétaire parlementaire en question s'est corrigé. Il avait fait sa première déclaration le 15 mars et il a rectifié ses propos le 13 décembre. Après cette date, toute confusion était dissipée parce que le secrétaire parlementaire s'était excusé de son erreur. Néanmoins, entre le 15 mars et le 13 décembre, soit pendant plusieurs mois, on a laissé croire à la Chambre que les déclarations du secrétaire parlementaire reflétaient la vérité. Le comité est en droit de se demander si pendant toute cette période, la ministre aurait pu ou aurait dû intervenir pour clarifier les faits. J'ignore si la ministre a pris la parole, à la Chambre ou devant une autre tribune, comme le comité, pour ce faire.
Je tiens à préciser, avant toute chose, que je n'ai pas vu les déclarations que la ministre, le secrétaire parlementaire ou tout autre représentant du gouvernement auraient pu faire ailleurs. Cette affirmation, selon laquelle la Chambre aurait été induite en erreur, repose sur les déclarations faites en Chambre ou en comité. C'est là-dessus que se concentrent mes commentaires d'aujourd'hui.
Pour en revenir à ce qui a été dit en comité, on a demandé à la ministre si c'est elle qui avait inséré le mot « not » dans le document. Elle a répondu que non. On ne lui a pas demandé si elle savait comment le mot « not » s'était retrouvé dans le document. Elle n'a pas fait de témoignage devant le comité à ce sujet.
Ce comité doit se pencher sur le critère de véracité que sont censés respecter les ministres — et bien sûr les témoins — lorsqu'ils comparaissent devant les comités. Peut-on accepter qu'un témoin attende qu'on lui pose la bonne question — ou la mauvaise, tout dépend du point de vue — pour dire toute la vérité? Ou quand on lui pose une question ou une série de questions, le témoin doit-il comprendre qu'il est dans l'intérêt du comité qu'il donne toute l'information et que sa réponse dépasse même la portée des questions pour être la plus exhaustive possible? Je ne vais pas répondre à cette question aujourd'hui, mais, à mon avis, c'est celle que vous devez vous poser à l'égard de ce témoignage.
Pour en revenir à cette autre question de savoir si la décision était fondée sur une recommandation des fonctionnaires de l'ACDI, je dirais que là aussi, il incombe au comité de se pencher sur la gravité de l'intervention. En fait, il s'agit plutôt d'une infraction par omission plutôt que par action, en quelque sorte. Je n'ai rien trouvé permettant de conclure que la ministre avait répété les propos du secrétaire parlementaire. Dans ce sens, il n'y a eu aucune déclaration de la ministre qui aurait pu induire la Chambre en erreur.
On peut néanmoins prétendre que la ministre a eu l'occasion de se prononcer pour tirer les choses au clair avant le 13 décembre 2010, date à laquelle le secrétaire parlementaire a présenté ses excuses à la Chambre et clarifié les propos qu'il avait tenus antérieurement.
Je vais m'arrêter ici, monsieur le président, pour répondre à vos questions.
J'aurais aimé avoir plus de temps.
Je voudrais revenir à certains des commentaires que vous avez faits. Je suis d'accord avec M. McKay quand il dit que la question, ici, c'est l'intention. Est-ce qu'on a voulu induire la Chambre en erreur? Vous avez dit que c'est là le coeur du problème.
Nous avons appris aujourd'hui que le fameux document qui comprend le mot « not » est un document interne et non pas un document parlementaire. Je dirais plutôt que c'est une note interne qui avait pour but de faciliter la communication entre les fonctionnaires de l'ACDI et la ministre, d'élaborer l'intention de la ministre, à savoir de financer ou non Kairos.
Comme vous l'avez indiqué, ce n'était peut-être pas la meilleure façon de procéder. Mais lorsque la ministre a demandé à son personnel de communiquer avec les fonctionnaires de l'ACDI, de leur indiquer qu'elle n'acceptait pas la recommandation de l'agence, qu'elle ne souhaitait pas, en fait, financer Kairos, c'est à ce moment-là que le mot « not » a été inséré. La signature est venue après.
Il n'y a aucune confusion, aucune intention de tromper, d'induire en erreur les fonctionnaires de l'ACDI. Et ce point a été vérifié par la présidente de l'ACDI elle-même. Elle a laissé entendre qu'il s'agissait là d'une procédure normale, qu'ils comprenaient parfaitement bien l'intention de la ministre quand le document leur a été renvoyé.
Cela dit, monsieur Walsh, s'il n'y avait pas intention d'induire en erreur, si la destinataire du document, c'est-à-dire Mme Biggs, était consciente du fait que l'ajout du mot « not » reflétait la décision de la ministre, qu'à son avis, il n'y avait aucune intention de tromper qui que ce soit, est-ce que cela ne réfute pas l'argument selon lequel il y avait intention d'induire en erreur, comme le laisse entendre l'opposition?
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À mon point de vue, la considération déterminante ici, pour en revenir au point que vous soulevez, n'est pas simplement de lire le document, mais de se demander quel usage on en a fait.
Ce n'est pas sans rappeler l'élément qui a été soulevé au cours de la controverse sur les détenus afghans, où une des questions de privilège soulevées était que la lettre de l'avis juridique rédigée par le ministère de la Justice était elle-même, comme le soutenait le motionnaire, une violation du privilège de la Chambre.
N'importe qui peut exprimer une opinion. C'est ce que font les avocats pour gagner leur vie. Une opinion a été exprimée dans cette lettre, mais l'usage que vous avez fait de cette lettre pourrait alors constituer une ingérence.
Maintenant, vous regardez ce document. Eh bien, je comprends le témoignage selon lequel il est vu comme un document interne de l'agence. Les responsables de l'ACDI ne se plaignent pas du fait que leur opinion a été déformée par ce document, alors, vous vous demandez — et ici, c'est l'avocat qui parle —, qui a un intérêt dans ce document? Qui a un intérêt et qui pourrait se plaindre en disant: « Cela déforme mon point de vue. Cela a été utilisé pour déformer mon point de vue »? Eh bien, de toute évidence, les responsables de l'ACDI seraient les premiers à pouvoir dire cela, mais ils ne le font pas.
Ce matin, M. Franks a parlé, en y accordant beaucoup de poids, du fait que la ministre est responsable d'avoir falsifié le document de l'ACDI. C'est le mot qu'il a employé: « falsifié ». Il a parlé d'une présentation de ce document qui était très sérieuse, une représentation très sérieuse. Il a parlé de la présentation du document au comité et ainsi de suite. D'après ce que je crois comprendre, c'est un fait que ce document n'a jamais été présenté par la ministre au comité. Il n'a jamais été utilisé par la ministre pour faire valoir un quelconque point de vue.
Ce qui est arrivé, d'après ce que je crois savoir — et j'ai consulté la greffière du Comité des affaires extérieures —, c'est qu'il y a eu une discussion d'une certaine durée au comité au sujet de ce document. À la fin des délibérations — le comité rédigeait un rapport —, quelqu'un a dit: « Un instant, si nous faisons allusion à ce rapport, peut-être que nous devrions l'avoir. » À ce moment-là, ce qui a été présenté, c'était la dernière page du document, et c'est uniquement cette page qui a été placée en annexe dans le rapport du comité.
Alors, le document a fait son entrée dans le domaine public, je crois comprendre — et qu'on me corrige si je me trompe —, par l'intermédiaire d'une demande d'accès à l'information, et il est devenu depuis l'objet de beaucoup de discussions. Mais en toute justice pour la ministre, il me semble que l'on doit reconnaître, à ma connaissance et d'après l'ensemble du dossier, qu'elle n'a jamais utilisé le document pour étayer une information erronée ou trompeuse. Il a tout simplement fait surface. Il s'agissait d'un document interne du gouvernement et, oui, ce document l'a mise dans l'embarras, et elle a dû elle-même l'expliquer à maintes reprises depuis — il y a eu beaucoup de discussions autour de ce mot « not » —, mais je ne le considère pas comme un élément qui démontre une tentative pour induire la Chambre en erreur.
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Je veux simplement refaire la chronologie des événements.
J'ai vécu cette affaire pendant l'hiver 2010 en tant que . On a posé des questions à ce sujet. La version de la ministre, qui dit ne pas avoir changé ses explications, est difficile à croire.
Le 27 novembre 2009, elle a refusé la recommandation de l'ACDI, et le mot « not » a été ajouté à sa demande. Que ce mot ait été ajouté par elle ou par quelqu'un d'autre n'a pas beaucoup d'importance.
Le 30 novembre 2009, les gens de KAIROS ont reçu un appel téléphonique au cours duquel on leur a annoncé qu'ils ne répondaient pas aux critères. On ne leur a pas dit que c'était de l'ACDI, mais qu'on allait leur faire parvenir un rapport plus exhaustif, rapport que KAIROS n'a jamais reçu. À l'hiver 2010, la question s'est posée: pourquoi le financement de KAIROS avait-t-il été aboli?
À ce moment-là, le gouvernement — le secrétaire parlementaire mais aussi la ministre — a laissé entendre qu'il s'agissait d'une décision de l'ACDI, fondée sur les critères de l'ACDI.
Vous avez parlé de la déclaration faite le 15 mars 2010 par le secrétaire parlementaire et de la réponse à la question au
Feuilleton n
o 106 du 23 avril 2010. Je tiens à vous rappeler une réponse qui a été donnée à la Chambre le même jour, soit le 23 avril 2010:
Les critères auxquels KAIROS doit satisfaire pour obtenir du financement sont les mêmes que pour toutes les organisations qui demandent le même type de financement. KAIROS n'a pas satisfait à ces critères et n'a donc pas reçu de financement, cela n'a rien de surprenant.
Ici, tout le monde a cru qu'elle parlait des critères de l'ACDI. Or elle savait très bien que c'était une décision politique qui, bien que je n'y sois pas favorable, est tout à fait légitime.
Par la suite, la polémique s'est un peu essoufflée. On a cessé d'en entendre parler. En effet, il y a toujours de nouveaux sujets à propos desquels ont peut s'indigner.
Le 9 décembre, en même temps que la sortie du document obtenu en vertu de la Loi sur l'accès à l'information et dans lequel apparaît le fameux mot « not », elle s'est présentée devant le comité pour dire que ça avait toujours été sa décision.
La polémique a continué. Les questions étaient vagues. Finalement, ce n'est que le 14 février dernier, soit plus d'un an plus tard, que la ministre a clarifié la situation. Or le doute a été entretenu pendant toute cette période.
Les partis de l'opposition n'ont pas été les seuls à croire à cette histoire. En effet, le lendemain de la déclaration de la ministre, presque tous les éditorialistes du Canada et du Québec ont demandé sa démission.
Ne pensez-vous pas que tous ces délais soient suffisants pour considérer qu'elle a profité de la situation en vue, à tout le moins, de laisser entendre que la décision était celle de l'ACDI, et non pas la sienne, et que celle-ci avait été prise en vertu des critères de l'ACDI plutôt qu'en vertu de ses propres critères? Serait-on en droit de penser cela?
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Merci, monsieur le président, et merci encore à vous, monsieur Walsh, de nous aider en éclairant nos délibérations.
J'ai bien aimé votre déclaration préliminaire, quand vous avez dit que nous devons tout d'abord établir certaines exigences, dont le critère de véracité à imposer. Tout témoin devrait, je l'espère, satisfaire au critère de véracité le plus strict, surtout les ministres fédéraux. Je vous remercie également de votre commentaire sur la culpabilité par omission, ou l'infraction par omission, par rapport à l'infraction par commission. On dirait que c'est à cela que mèneront nos débats.
En outre, ce principe dont vous avez parlé et selon lequel il faut poser exactement la bonne question, sans quoi vous n'aurez pas la réponse... C'est ce que j'appelle l'effet Tracassin. D'autres l'appelleront même l'effet Mulroney, parce que certains se sont ainsi justifiés de ne pas avoir été tout à fait honnêtes.
Le doute était-il possible, quand M. McKay a demandé ce qu'il voulait savoir à l'occasion d'une séance du comité des affaires étrangères? Il a demandé qui avait écrit « not » sur le document, et elle a répondu: « Je n'en ai aucune idée. Je ne le sais pas. »
Elle a bel et bien ordonné à son chef de cabinet de renverser la recommandation des fonctionnaires de l'ACDI concernant le financement de KAIROS. Elle aurait raisonnablement dû présumer que la personne à laquelle elle avait ordonné de renverser la recommandation était la personne qui avait modifié le document selon ses ordres.
Je crois que c'est de la culpabilité par omission. Je crois qu'elle aurait dû prendre les devants. Elle aurait pu dire: « Je ne sais pas qui a écrit le mot “not”, mais j'ai dit à mon chef de cabinet de renverser la recommandation de l'ACDI. » Cela aurait été tout à fait vrai. Êtes-vous d'accord?
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Le comité doit déterminer dans quelle mesure c'est important quand on parle de propos délibérément trompeurs. C'est une infraction grave pour laquelle la peine est la pendaison. C'est un crime capital, et nous imposions la peine de mort — à l'époque, bien sûr — pour les crimes graves. Et le processus servant à déterminer si un crime avait été commis était long et complexe.
Tout ce que je peux dire au comité, c'est que, pour votre propre bien et pour l'intégrité du régime parlementaire, il faut en fin de compte que les gens qui vont lire votre rapport soient aussi convaincus que vous, selon la preuve que vous possédez, que dans cette histoire de « not », on a gravement induit la Chambre en erreur, plutôt que de n'avoir commis qu'une erreur fortuite pardonnable. Ce n'est pas un commentaire. Je soulève simplement la question pour votre bénéfice.
Cependant, en ce qui concerne la question de savoir si la décision relative au financement a été prise par les fonctionnaires ou à l'échelon politique, oui, à un certain moment, la ministre aurait pu corriger l'erreur commise par le secrétaire parlementaire, mais l'erreur n'a été corrigée que quand le secrétaire parlementaire a présenté des excuses et reconnu son erreur. Même alors, la ministre n'a jamais dit que la recommandation des fonctionnaires avait été renversée. Certains d'entre vous pensent peut-être que c'est ce que la ministre aurait dû faire pour démontrer que c'était une décision politique, plutôt qu'une décision fondée sur les recommandations des fonctionnaires.
Dans quelle mesure est-ce important? C'est vous qui décidez. Des mois ont passé sans qu'aucune explication ne soit donnée. Combien de débats à la Chambre ont-ils pris la mauvaise direction parce que vous n'aviez pas toute l'information qu'il fallait? C'est la nature des questions que vous devriez vous poser, d'après moi. Il n'est pas question de chercher à mettre en évidence le fait, accessoire, qu'il y avait un délai pour dire toute la vérité, mais il est plutôt question de souligner qu'il y avait un délai pour dire toute la vérité sur une question importante, une question importante pour la Chambre et pour le comité, ce qui nous a empêchés d'examiner la question en profondeur parce que la ministre n'a pas été tout à fait honnête. Vous devez peser la gravité, je crois.
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Merci, monsieur le président.
D'après la définition courante de l'« outrage », dans les dictionnaires, il s'agit d'un manque de considération pour quelqu'un, d'une attitude de mépris. C'est un manque de respect, cette fois-ci envers le Parlement. Nous avons, au Parlement, des règles spéciales qui exigent une fidélité à la véracité des faits, la véracité dans tout son sens. Des privilèges spéciaux sont consentis aux députés. Nous agissons au grand jour et nous comptons que tous les témoins qui comparaissent devant nous soient fidèles à la vérité au point, parfois, que cela desservent leurs propres intérêts.
D'après cette norme, je dirais, monsieur, que lorsqu'il s'agit d'un ministre qui témoigne et prend place devant le comité comme vous le faites en ce moment, on s'attend encore plus à ce qu'il dise la vérité au Parlement que si c'était un simple citoyen. Nous comptons que les ministres diront la vérité, toute la vérité, parce que, autrement, il nous serait impossible d'accomplir notre travail.
Voilà donc la norme que je vous invite à commenter. Lorsqu'un ministre répond à une question inscrite au Feuilleton par le député de London-Nord-Centre, s'agit-il d'une réponse complète? Et lorsque c'est la députée de Notre-Dame-de-Grâce, est-ce une réponse complète? Ou donne-t-on à ces députés l'impression qu'il s'agissait en fait d'une décision de l'ACDI?
Ce n'est que le 9 décembre que nous avons appris que, en fait, l'ACDI avait recommandé d'accorder la subvention. Jusque-là, nous pensions tous que c'était l'ACDI qui l'avait refusée. N'était-ce pas une conclusion raisonnable?
Puis, nous découvrons ce fameux ajout du « not ». La ministre aurait pu tout tirer au clair en 24 heures, et elle se serait épargné bien des tourments. Puis, le secrétaire parlementaire, lorsqu'il est cité pour outrage répond: « Je ne savais pas. » Cela se trouvait dans le communiqué. Cela faisait partie de toute l'information que j'ai reçue.
Étant donné la norme très exigeante qui s'applique non seulement aux membres du grand public qui comparaissent devant le Parlement du Canada, mais aussi et encore plus aux ministres, n'est-il pas raisonnable de conclure que, au moins sur ces quatre points, et aussi dans son témoignage d'hier, la ministre n'a pas su respecter la norme qui est imposée à tous ceux qui comparaissent devant un comité ou prennent la parole au Parlement?
Monsieur Walsh, j'en reviens à vos observations, à votre introduction traitant du renvoi de la question au comité par le Président. Vous avez dit, fort justement, que le Président n'a blâmé personne. Je dirais même qu'il n'a rien dit qui puisse ressembler même de loin à une réprimande à l'endroit de la ministre. Il a dit surtout qu'il renvoyait cette affaire au comité pour essayer de tirer les choses au clair, de dissiper la confusion qui avait été créée.
Nous avons reçu dans les témoignages d'aujourd'hui, celui de la ministre elle-même et celui de la présidente de l'ACDI, Margaret Biggs, les réponses à toutes les questions qui ont semblé susciter la confusion: qui a inscrit le mot « not " dans le document? La ministre avait-elle l'intention d'induire quelqu'un en erreur en disant que la décision avait été prise par les fonctionnaires de l'ACDI plutôt que par l'ACDI même?
La ministre soutient, et elle a tout à fait raison, que, lorsqu'elle a dit de façon constante et cohérente que la décision avait été prise par l'ACDI, elle voulait dire que, lorsqu'elle prend une décision à titre de ministre chargée de l'ACDI, cette décision devient celle de l'ACDI. Ces points-là me semblent incontestables.
De toute évidence, l'opposition essaie de laisser entendre que, en affirmant que c'était une décision de l'ACDI, la ministre avait l'intention d'induire les députés en erreur, parce que, d'après eux, cela voulait dire une décision des fonctionnaires de l'ACDI. Honnêtement, je ne peux pas grand-chose pour l'opposition si son interprétation diffère de ce qu'était l'intention de la ministre.
Je ne vous demande pas vraiment de vous exprimer à ce sujet, mais je vous demanderais peut-être quelques observations: à la lumière de tous les témoignages que nous avons entendus aujourd'hui, surtout ceux de la ministre et de Mme Biggs, estimez-vous que les questions que, d'après le Président, il fallait tirer au clair ont été réglées de façon adéquate?
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Cela fait penser au terme « suffisants » que M. Paquette a employé. Cette fois-ci, c'est le mot « adéquate ». C'est justement ce qu'il vous appartient de juger: ont-elles été réglées de manière adéquate?
J'en viens à votre question de terminologie, au sujet de « la décision de l'ACDI » ou « la décision du ministère ». Ce sont des façons de parler d'une décision prise avec l'approbation d'un ministre. Le plus souvent, on parle de « décision ministérielle » ou de « décision de l'ACDI ». Il se peut que ce soit l'usage, et je ne veux pas soutenir le contraire. Il se peut que, dans la réponse à la question 106, certains députés aient interprété le passage « la décision de l'ACDI » comme voulant dire que la décision était fondée non seulement sur l'approbation de la ministre ou sur sa proposition, mais sur la proposition de l'ACDI. Je ne peux rien répondre au sujet de l'interprétation des députés.
Toutefois, je ne crois pas qu'il faille invoquer cette façon de s'exprimer — décision de l'ACDI, décision ministérielle — comme prétexte pour brouiller la distinction entre une décision prise ou une recommandation faite au niveau professionnel, au niveau ministériel, et la décision d'un ministre, qui est de nature politique. Il y a là une distinction importante.
Les députés donnent un certain poids au fait qu'une décision du gouvernement est appuyée par des professionnels qui font carrière dans le domaine en question. Ils ne veulent pas dire que l'avis des fonctionnaires doit être suivi, mais ils veulent savoir s'il est suivi ou non. Si la décision d'un ministre ne correspond pas à ce qui est recommandé, cela soulève des questions chez les parlementaires, et on peut le comprendre, car ils ont un grand respect pour les fonctionnaires et les ministères.
Il incombe alors au ministre d'expliquer pourquoi il n'a pas suivi la recommandation des fonctionnaires, et il ne faut pas perdre de vue que les parlementaires ne savent pas forcément que telle décision a été prise à l'encontre des fonctionnaires du ministère. On peut soutenir qu'ils n'ont pas le droit de le savoir, puisque les seuls qui rendent des comptes à la Chambre, ce sont les ministres. Ce sont eux qui prennent les décisions. S'ils refusent des fonds, ils doivent répondre de leur décision. Ils ne peuvent reprocher aux fonctionnaires d'avoir fait la mauvaise recommandation ni prétendre qu'ils ont agi de telle façon parce des fonctionnaires leur ont dit d'agir de la sorte. Ce sont les ministres qui sont responsables, ce sont eux qui rendent des comptes.
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Merci, monsieur le président.
Monsieur Walsh, je vais prendre le temps de passer en revue la décision du Président Milliken du 9 mars. Vous y avez sûrement contribué. Vous lui avez sûrement donné des conseils et des avis. Le Président a dit ceci:
Le 14 février 2011, la ministre de la Coopération internationale a fait une déclaration à la Chambre pour apporter des éclaircissements sur la demande de financement de KAIROS. Bien qu’elle ait reconnu que la façon dont ce dossier avait été traité était regrettable, elle a nié avoir intentionnellement ou volontairement induit la Chambre ou le comité en erreur. Elle a également affirmé ceci:
Si certains ont conclu que la formulation que j’ai employée sous-entendait que le ministère et moi partagions le même point de vue, je m’en excuse.
Le Président dit qu'il est vrai qu'elle n'a jamais reconnu être coupable de quelque chose, par contre elle s'est excusée de quelque chose qui a fait l'objet d'une mauvaise interprétation. Cela est clair, je pense que c'est reconnu. Le Président en rajoute plus loin, en se basant sur une décision rendue en 1978 par le Président de l'époque. Il précise ensuite ceci:
C'est en gardant à l'esprit ce principe que j'ai soigneusement étudié la preuve, vu qu'il s'agit d'allégations très graves concernant la conduite d'une ministre qui, en conséquence, s'est attiré de sévères critiques publiques [...]
Il y a tout un facteur important, et mon collègue M. Paquette l'a souligné toute la journée: il n'y a pas que nous, du Bloc québécois, qui demandions la démission de la ministre. Des éditorialistes et d'autres personnes de la presse le demandaient aussi. En effet, c'est une grosse affaire que d'essayer de faire endosser à l'ACDI une décision politique du gouvernement conservateur.
Cela a amené le professeur Franks à dire que, selon lui, il était clair que la ministre avait admis avoir induit la Chambre en erreur. À la lecture de la décision du Président, et compte tenu de la déclaration que la ministre a faite le 14 février, il est d'avis que, de toute façon, elle a admis avoir induit la Chambre en erreur. Je lui ai demandé s'il trouverait exagéré qu'on aille jusqu'à soulever la question de l'outrage au Parlement. Il a répondu qu'il fallait scinder la question en deux éléments. Pour ce qui est de la décision politique, ce serait exagéré, selon lui. Nous en avons tous convenu. En effet, elle avait le droit, politiquement, de dire qu'elle et le Parti conservateur étaient contre cette idée. L'autre volet, par contre, c'est d'essayer de faire endosser cela à l'ACDI. Je vous ai bien compris, vous avez dit qu'il ne s'agissait pas de déterminer l'importance ou non du mot « not ». C'est vrai que, dans le fond, ce qu'il faut chercher à comprendre, c'est si, en tant que parlementaires, nous croyons la ministre qui affirme qu'elle n'était au courant de rien. Pourtant, tous ses agissements pendant plus d'un an nous donnent à penser, effectivement, qu'on a essayé de faire croire que cette décision n'était pas une décision libre du Parti conservateur, mais qu'elle émanait plutôt de l'ACDI. Évidemment, quant à cet élément, M. Franks a répondu que, selon lui, cela constituait clairement un outrage au Parlement.
En quelque sorte, vous nous dites la même chose. En fait, vous n'avez pas dit que cela constituait un outrage au Parlement, mais vous nous dites de faire attention et d'être sûrs de ce que nous avançons avant d'aller jusqu'à invoquer qu'il y a eu outrage au Parlement.
Il est important de connaître les faits, et c'est pourquoi il était important pour moi qu'on entende le professeur Franks. C'est un connaisseur, un professeur émérite et, surtout, il ne donne pas dans la partisanerie politique. Il souligne simplement qu'on se trouve sur une pente dangereuse et que quelque chose a été commis. Selon lui, la ministre a induit la Chambre en erreur, et une partie de ce qui s'est passé constitue un outrage au Parlement.
Je voudrais simplement que vous nous confirmiez de nouveau s'il serait exagéré que nous prenions position jusqu'à invoquer l'outrage au Parlement.
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Merci, monsieur le président.
Nous tenons tous à aller de l'avant.
Monsieur le président, j'ai un ou deux points à tirer au clair, et cela se rapporte à la motion et à l'inclusion ou non des témoignages.
Plus tôt aujourd'hui, M. McGuinty a signalé que j'étais membre de l'Église mennonite. On pourrait demander d'où il tient cette information. Il me semble, monsieur le président, que cela vient de son personnel.
Voici ma question: est-ce le genre d'activité auquel son personnel se livre? Passe-t-il son temps à chercher à quel groupe confessionnel les députés appartiennent? Est-ce que cela sert à renforcer leurs arguments sur des éléments personnels?
Monsieur le président, je n'ai jamais été un fidèle de l'Église mennonite. J'ai des relations solides avec un grand nombre de mennonites et d'églises mennonites, mais en réalité, monsieur le président, j'ai aussi de solides relations avec beaucoup de catholiques, de luthériens, d'anglicans, etc. Ce qui me préoccupe le plus, monsieur le président, c'est que, lorsque je lui ai demandé d'où il tenait cette information, M. McGuinty a dit que cela venait de mon site Web. Je vous assure, monsieur le président, que mon site Web ne dit rien de tel. Où a-t-il déniché cette information? Il se trouve que c'est sur Wikipédia.
Je me demande si c'est là que M. Martin a aussi trouvé son information sur la Bibliothèque du Parlement hier. Mais passons.
Tous les députés savent que Wikipédia est une source d'information collective dont les renseignements ne sont pas vérifiés. Il peut donc y avoir manipulation. Cela fait penser à ce que nous avons vu hier: la coalition a resserré les rangs pour exclure tous les témoins experts de la question d'outrage. Aujourd'hui, nous apprenons que la source privilégiée de ses faits ou de ses commérages, c'est Wikipédia.
Je demande au député, sauf son respect, de présenter des excuses pour ses erreurs, de retirer ce qu'il a dit plus tôt et de donner au comité l'assurance que les autres affirmations qu'il a tenté de faire ces trois derniers jours ne trouvent pas leur source dans Wikipédia.
J'espère que nous parviendrons rapidement à un règlement, et je le dis sincèrement. Je ne suis pas là pour faire de l'obstruction. Ceux d'entre vous qui me connaissent...
Monsieur Paquette, je vous en prie, écoutez-moi.
Ceux d'entre vous qui me connaissent — comme c'est le cas de M. Proulx et d'autres qui ont siégé avec moi au Comité de la procédure et des affaires de la Chambre — savent que lorsque je vais faire de l'obstruction, je l'annonce. Je le fais savoir aux membres. Je l'ai toujours fait. Ce n'est pas mon intention aujourd'hui.
Hier, j'étais fâché, et je le suis toujours, contre la motion telle qu'elle a été présentée et son contenu même. Cependant, cela étant dit, je peux vous assurer que nous, du côté gouvernemental, sommes résolus à voir un rapport déposé à la Chambre, lundi 21 mars, comme le prévoit la motion qui a été adoptée. J'aimerais donc parvenir à un résultat aujourd'hui, afin qu'un rapport puisse être déposé.
Je demande à mes collègues du Bloc et du NPD de m'indiquer si la motion telle qu'elle a été présentée hier devrait être modifiée ou non. Malheureusement, deux des membres qui siégeaient au comité hier sont absents aujourd'hui. Mme DeBellefeuille avait indiqué hier que le Bloc serait éventuellement disposé à modifier, ou même à supprimer, cette dernière partie qui dit « qu'aucun résumé des témoignages » ne sera inclus. M. Godin avait manifesté la même disposition — du moins, c'est mon interprétation.
Je conviens avec mon collègue, M. Albrecht, que le fait de limiter arbitrairement le rapport à deux pages semble être antidémocratique, c'est le moins que l'on puisse dire, car si l'on veut refléter les témoignages entendus, en toute probabilité il fera plus de deux pages.
Tout cela étant dit, je ne puis évidemment pas ignorer que si l'opposition unie veut tirer la conclusion qui est énoncée dans le corps de la motion — à savoir que le gouvernement commet un outrage au Parlement —, elle peut certainement le faire. Il n'y a pas grand-chose que nous puissions faire pour l'empêcher, et je ne vais pas faire de l'obstruction pour essayer d'empêcher un vote sur cette motion, comme je l'ai dit. Mais j'aimerais entendre l'avis de mes collègues du Bloc québécois sur au moins ces deux points. Ne pourrions-nous pas au moins avoir un rapport qui contienne un résumé des témoignages, et aussi qui ne soit pas limité à deux pages au maximum?
J'espère donc entendre quelques commentaires de mes collègues d'en face à ce sujet.
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Merci, monsieur le président.
Lorsque je cherche un subterfuge, je ne regarde habituellement pas le début d'un document; je regarde habituellement la fin, car c'est là où ils aiment le cacher. Et c'est là où réside généralement l'intention mauvaise.
Je regarde donc la dernière ligne de cette motion et je lis: « Qu'aucun résumé des témoignages soit inclus dans l'ébauche du rapport ». Les résumés des témoignages sont riches de détails, aident à comprendre les nuances de ce qui s'est passé pendant ces audiences, et permettent au public canadien de comprendre ce qui a été dit.
Je me pose la question: dans quels pays les comptes rendus de délibérations gouvernementales sont-ils exempts de résumés des témoignages? Je pense qu'à Cuba il n'y aura pas de résumés des témoignages, car à Cuba on vient frapper à votre porte au milieu de la nuit, et vous disparaissez et personne ne vous renvoie pendant des années. Bien sûr, c'est le genre de chose qui se fera également en Corée du Nord, le même genre de pratique. Il n'y a pas de résumés des témoignages parce qu'ils trahiraient ce qui se passe. Et bien sûr, il n'y a pas de résumés de témoignages en Iran parce que ces gens-là sont des dictateurs — les ayatollahs et Ahmadinejad — et si vous leur déplaisez, votre vie ne vaut plus rien, et il n'y a donc pas de résumés de témoignages.
Il est évident, monsieur le président, que la coalition va user de sa majorité pour censurer ce que les Canadiens entendent. Nous avons siégé ici pendant trois jours, dans ce comité, à leur demande, et avons entendu les témoignages, maintenant, de quatre ministres. Je n'ai pas compté les heures. Je pense que cela faisait 9 ou 10 heures. Ils ne veulent pas que le public canadien, par le biais des médias qui sont là aujourd'hui, entendent cela.
Je regarde ensuite le haut de la page, et j'aurais peut-être dû commencer par là, car en haut de la page je lis: « Que l'ébauche du rapport ne soit pas plus longue que deux pages dans chacune des deux langues officielles ». C'est là une tentative inouïe de réduire le Parlement au silence. Lorsqu'un comité entend autant de témoignages, l'on a normalement un rapport de 15, 20 ou 30 pages. La coalition de l'opposition exige que notre comité produise un rapport sans résumé et ne faisant pas plus de deux pages. La motion elle-même occupe une pleine page, une page de format écolier.
L'opposition a l'information qu'elle réclamait, tous les témoignages que nous avons entendus au cours des derniers jours et demi, trois jours maintenant, et elle est en possession de tout cela. Elle se plaint maintenant d'avoir trop d'information, après s'être plainte de ne pas en avoir assez.
Monsieur le président, s'il y a un outrage au Parlement quelque part, c'est un outrage à ce comité, commis ici et maintenant par la coalition de l'opposition, et indirectement un outrage au Parlement par l'intermédiaire du comité. Elle nous demande de travailler dans le noir. Elle demande de garder les Canadiens dans l'ignorance de ce que nous avons fait ici pendant ces trois jours. Je dis simplement aux Canadiens: voici la coalition. Comment aimez-vous ce que vous voyez jusqu'à présent?
Merci.
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Merci, monsieur le président.
Je suis heureux que nous ayons cette discussion. Elle est importante. Je veux simplement que tout le monde, les membres et les Canadiens, sachent que la raison pour laquelle la mention « qu'aucun résumé des témoignages soit inclus dans l'ébauche du rapport » a été placée là initialement, c'est que nous avions été informés par les greffiers au Bureau que la Chambre des communes ne peut traduire plus de huit pages par jour. Or, nous avons une échéance très serrée. Nous avons jusqu'au 21.
Voici la bonne nouvelle. Mon collègue, M. Proulx, a eu une conversation avec la greffière de la Chambre, Mme O'Brien, qui l'a informé que ses services sont prêts à déroger à cette règle. Ils affecteront toutes les ressources nécessaires à la traduction de ce texte pour lundi matin. Donc, en dépit de toutes les calomnies et de tous les spectres conjurés par M. Young et d'autres, la seule raison pour laquelle cette restriction avait été mise là initialement était de faciliter et d'accélérer le travail des rédacteurs, afin de pouvoir boucler le rapport d'ici lundi.
Nous sommes certainement prêts à accepter des amendements à cette motion, comme nous l'avons dit hier. Je l'ai dit ouvertement, ici même. Nous l'avons dit dans les médias. Je le répète aujourd'hui. Il n'y a pas de spectre. Il n'est pas question de limiter le débat. Nous venons d'avoir trois jours entiers de débat. Toutes sortes de renseignements sont du domaine public. Si M. Young ne le sait pas, tout cela a été télédiffusé. Les transcriptions sont toutes disponibles. Elles sont partout sur Internet, et la documentation papier est publiée. Tout cela est donc accessible à tout Canadien qui veut en prendre connaissance et former sa propre opinion.
Je suis prêt à accepter un amendement amical, qu'il vienne de M. Paquette, du Bloc, ou d'un membre du Parti conservateur, ou de M. Martin là-bas, sur la question d'un résumé des témoignages, afin que nous puissions achever notre travail.
J'implore mes collègues de ne pas lancer des accusations sans fondement.