Monsieur le président, membres du comité, c'est un plaisir de comparaître à nouveau devant le comité pour parler des mesures d'urgence concernant l'exploitation des hydrocarbures extracôtiers au large de la région de Terre-Neuve et Labrador.
Quand on parle de mesures d'urgence, il faut interpréter largement la notion de situation d'urgence. En règle générale, un plan d'urgence comprend au moins une dizaine d'événements pouvant être considérés comme des situations d'urgence exigeant toutes une intervention. Bon nombre présenteront des dangers beaucoup plus graves pour la sécurité humaine qu'un déversement de pétrole.
Les plans d'intervention d'urgence sont conçus pour obliger les exploitants à répondre à tous les types d'urgence se produisant sur leurs installations ou à proximité.
Quand je parle d'exploitants, je veux parler des sociétés de pétrole et de gaz naturel extracôtiers détenant un permis d'exploitation dans un secteur donné. Durant tout cet exposé, quand je parlerai d'exploitants, je parlerai de sociétés pétrolières.
Les exploitants sont tenus d'activer le même type de plan d'intervention d'urgence pour une éruption de pétrole que lors de l'accident de l'hélicoptère Cougar en 2009. À cette occasion, vous devez savoir que les premiers répondants sur place ont été un avion à ailes fixes et deux hélicoptères loués par les exploitants, et non pas les hélicoptères de recherche et de sauvetage du ministère de la Défense nationale, qui sont arrivés beaucoup plus tard. Cela a manifestement démontré l'existence d'une très solide capacité de réaction dans notre secteur extracôtier.
L'éruption de Macondo dans le Golfe du Mexique a suscité beaucoup d'intérêt dans la presse du fait de ses conséquences environnementales et économiques, à juste titre. Toutefois, il est très important de rappeler que la première chose qui est arrivée lors de cette tragédie est que 11 personnes ont trouvé la mort et 17 autres ont été blessées. Ce fait a peut-être été peu à peu oublié dans beaucoup des reportages consacrés à cet accident de Macondo, mais pas par les organismes de réglementation. La sécurité est et sera toujours primordiale dans toutes les décisions prises par mon Office et par mes collègues des autres.
Lorsque nous évaluons une demande de permis de forage, nous examinons essentiellement trois choses : si l'exploitant possède un équipement adéquat pour faire le travail en toute sécurité, si son personnel a reçu une formation adéquate, et s'il a prévu les procédures nécessaires pour assurer la sécurité des opérations. Avant de délivrer un permis, plusieurs obligations légales doivent être satisfaites, notamment celles figurant dans la Loi sur les opérations pétrolières au Canada et la Loi de mise en oeuvre de l'Accord atlantique Canada-Terre-Neuve, ainsi que dans les textes et les règlements de Transports Canada et de la tierce partie indépendante de certification. L'exploitant doit déposer un plan de sécurité, un plan de protection de l'environnement et un plan d'urgence comprenant un plan d'intervention en cas de déversement. Il doit par ailleurs fournir une documentation sur sa responsabilité financière.
Finalement, l'exploitant doit produire une déclaration de conformité attestant que l'équipement et les installations devant être utilisés pendant ses activités sont adéquats pour le travail envisagé, que les procédures opérationnelles correspondantes sont appropriées, que le personnel employé est qualifié et compétent, et que l'installation répond à toutes les normes canadiennes nécessaires. C'est seulement une fois que toute cette documentation a été présentée et que l'Office l'a approuvée que l'exploitant peut se mettre à pied d'oeuvre.
Le forage et la maîtrise du puits sont des aspects cruciaux des opérations extracôtières et sont traités en détail dans la réglementation. Cela englobe l'examen du plan technique de forage du puits par l'exploitant et de ses capacités techniques touchant la conception du puits, le contrôle du puits, la prévention et le dépistage des venues, et la limitation des opérations par temps violent, ainsi que l'examen des exigences de découplage d'urgence et l'évaluation des dispositions de forage de puits de secours. On attache également beaucoup d'importance à la vérification du fait que le personnel a reçu la formation requise relativement au contrôle du puits et à la prévention des éruptions. On vérifie attentivement la redondance des systèmes d'activation et de contrôle du bloc obturateur du puits en cas de situation exigeant le découplage du puits.
La supervision de ces questions est assurée de manière systématique par l'Office au moyen d'un dispositif d'évaluation de la sécurité comprenant la revue du système de gestion de la sécurité de l'exploitant et la confirmation que ce dernier a bien identifié les dangers ainsi que les mesures devant être prises pour ramener le risque à un niveau aussi bas que raisonnablement possible.
Bien que nous ayons un régime de réglementation rigoureux et exercions une surveillance attentive des activités extracôtières, un accident peut malheureusement toujours arriver. Par conséquent, il est important que des plans aient été dressés pour faire face aux conséquences des accidents éventuels. Les exploitants doivent fournir à notre Office des hydrocarbures extracôtiers un plan d'urgence comprenant un plan d'intervention en cas de déversement de pétrole. Les professionnels de la sécurité et de l'environnement de l'Office analysent ces plans pour chaque projet.
Les plans d'intervention comprennent des détails sur la manière dont les puits de secours seront forés si cela s'avère nécessaire. Toutefois, ce que les plans d'intervention n'ont encore jamais inclus jusqu'à présent, ce sont des détails sur le confinement d'une éruption sous-marine. Comme nous l'avons vu dans le cas de Macondo, c'est le confinement qui a mis fin à l'éruption avant l'achèvement du puits de secours.
Nous suivons actuellement avec un vif intérêt la mise au point d'une nouvelle capacité de confinement par Marine Well Containment Company, une société créée en juillet par Exxon Mobil, Chevron, Shell et ConocoPhillips à laquelle BP vient de se joindre. Collectivement, ces sociétés ont engagé plus de 1 milliard de dollars US pour se doter d'une capacité avancée de confinement, avec le matériel nécessaire et un personnel spécialement formé pour lutter contre toute éruption sous-marine future ou toute autre perte de confinement dans le Golfe du Mexique. Comme toutes les autres instances de réglementation des hydrocarbures extracôtiers, je suppose, nous examinons toujours la possibilité de faire appel à cette capacité, ou à une capacité similaire, en cas d'éruption au large de nos propres côtes.
Les plans d'intervention en cas de déversement pétrolier comprennent trois paliers. Le premier palier comprend l'activation de l'équipement d'intervention embarqué qui est suffisant pour faire face à un petit déversement de moins de 100 barils. Si cet équipement est insuffisant, l'exploitant passe au deuxième palier, qui comprend la mobilisation de l'équipement situé à St. John's dont peuvent se prévaloir les exploitants par le truchement de la Société d'intervention Maritime, Est du Canada Ltée, et qui est typiquement prévu pour réagir à un déversement pouvant atteindre 100 000 barils. Si l'équipement embarqué et l'équipement de la SIMEC s'avèrent insuffisants, on passe au troisième palier, c'est-à-dire que l'exploitant doit acquérir de l'équipement d'intervention ailleurs au Canada ou à l'étranger, équipement qui se trouve en grande mesure dans des hangars spécialisés, comme à Southampton, au Royaume-Uni, et peut être mobilisé à Terre-Neuve-et-Labrador dans les 24 heures. Chaque exploitant réalise chaque trimestre des exercices d'activation de son plan d'intervention d'urgence, et tous les exploitants réalisent collectivement un exercice de terrain chaque année, comprenant le déploiement de l'équipement d'intervention en cas de déversement.
La question que tout le monde se pose, surtout depuis l'incident de Macondo, est de savoir si nous sommes prêts à réagir à un vaste déversement d'hydrocarbures dans l'environnement par suite de l'activité d'exploitation du pétrole extracôtier en cas d'un tel accident regrettable. Certaines personnes pensent que le concept de préparation signifie que les sociétés seront capables de récupérer la plupart ou la totalité du pétrole déversé, ce qui n'est tout simplement pas possible à l'heure actuelle. Nous nous attendons à ce que la tragédie de Macondo entraîne une forte intensification des travaux de recherche et de développement pour améliorer la capacité d'intervention en cas de déversement.
La réalité est que les déversements d'hydrocarbures dans l'environnement marin sont traités au moyen de plusieurs processus, à la fois naturels et mécaniques. L'océan de l'Atlantique Nord est un environnement très rude où la récupération du pétrole est très difficile, même par temps idéal. Toutefois, la plus grande menace pour les mammifères et les oiseaux marins émane des nappes de pétrole. Par conséquent, les mesures d'intervention d'urgence doivent aussi tenir compte de la valeur de la dispersion du pétrole pour minimiser les impacts. À l'heure actuelle, nous n'approuvons pas l'utilisation de dispersants chimiques mais nous sommes en train de revoir notre position à la lumière de l'expérience de Macondo et en consultant des experts d'Environnement Canada et de Pêches et océans.
S'il y avait un déversement grave sur les Grands Bancs, les évaluations environnementales réalisées jusqu'à présent pour les projets comprennent une modélisation détaillée de l'évolution potentielle d'un déversement au large de Terre-Neuve-et-Labrador. Au moyen de 40 années de données climatologiques, ces modèles indiquent qu'il serait peu probable, même en cas de déversement grave, que le pétrole s'approche des côtes de la province. Certes, les conséquences d'un déversement se produisant aussi loin des côtes canadiennes seraient quand même graves et appelleraient une réaction immédiate, mais la situation serait sensiblement différente de ce que nous avons vu dans le Golfe du Mexique.
Deux brèves remarques avant de conclure.
La production de pétrole au large de nos côtes a débuté en 1997. Fin mars 2010, près de 1,2 milliard de barils de pétrole ont été produits et, durant cette période, 1 100 barils de brut se sont déversés, soit moins de un baril par million de barils produits. Dans le Golfe du Mexique, avant la tragédie de Macondo,13 barils avaient été déversés dans l'océan pour chaque million de barils produits, et ce chiffre ne concerne que les déversements de plus de 50 barils. Il n'y a eu aucune éruption de pétrole dans notre zone extracôtière. Évidemment, nous préférerions qu'il n'y ait jamais ni blessure, ni déversement, mais nous pensons que les résultats dans notre zone extracôtière sont tout à fait raisonnables.
Dans le sillage de l'incident de Macondo, l'Office Canada-Terre-Neuve et Labrador des hydrocarbures extracôtiers, comme tous ses homologues, examine attentivement les leçons tirées, ce qui nous aidera à améliorer notre performance comme instance de réglementation, ainsi que celle des entités que nous réglementons. Nous avons confiance dans notre solide régime de sécurité et de protection environnementale mais nous sommes toujours à l'affût de ce qui nous permettrait de l'améliorer.
Merci de votre attention. Je répondrai avec plaisir à vos questions.
:
Le projet de mise en valeur du gisement extracôtier de gaz Deep Panuke de la société Encana est actuellement en cours de développement; il vise également l'extraction de gaz naturel d'une zone extracôtière située en eau peu profonde à environ 250 km au sud-ouest de Halifax. La production doit commencer au cours du dernier trimestre de 2011. La région extracôtière de la Nouvelle-Écosse est riche en gaz et, jusqu'à maintenant, seules de petites quantités d'huile légère y ont été découvertes.
Lorsqu'il autorise l'exécution de travaux au large de la Nouvelle-Écosse, l'Office impose aux opérateurs l'obligation de prendre les mesures nécessaires pour prévenir les déversements ou les situations comportant des risques. Cependant, si un accident grave, un déversement accidentel ou une émission incontrôlée d'hydrocarbures devaient se produire pendant une activité autorisée, l'exploitant devrait assumer l'entière responsabilité des conséquences, notamment pour ce qui est de réparer les dommages. Dans de telles situations, il incomberait normalement à l'Office de prendre la tête de la réponse gouvernementale et d'en assurer la coordination avec d'autres ministères et organisations des gouvernements fédéral et provincial. L'exception à cette façon de faire serait la rupture des pipelines d'exportation : dans ce dernier cas, la réponse gouvernementale serait dirigée conjointement par notre Office et nos collègues de l'Office national de l'énergie.
Le projet Sable et le projet Deep Panuke produisent tous deux du gaz naturel. Toutefois, certains des réservoirs contiennent une quantité d'hydrocarbures légers liquides appelés condensat. Étant donné les propriétés du condensat que l'on peut comparer à un mélange de kérosène et de naphta, l'épaisseur de l'irisation en surface qui résulterait du déversement serait mesurée en microns, ce qui est très mince, et sa taille serait limitée puisque le tout se dissiperait rapidement par évaporation et par dispersion à l'intérieur de la partie supérieure de la colonne d'eau. Un tel déversement est fort différent d'un déversement de pétrole brut.
Tous les opérateurs doivent conclure un contrat avec une organisation d'intervention environnementale, par exemple la Société d'intervention Maritime, Est du Canada, pour disposer de ressources et de compétences additionnelles lorsqu'elles sont nécessaires pour intervenir en cas de déversement. Le régime réglementaire en place pour prévenir la survenance d'incidents comportant des risques et des déversements et pour assurer l'intervention appropriée à la suite de tels incidents est exhaustif et bien structuré.
Il est intéressant de souligner qu'en réponse à la catastrophe de la plate-forme de forage Deepwater Horizon, le gouvernement des États-Unis a récemment adopté de nouveaux règlements pour les activités gazières et pétrolières menées dans la zone externe de leur plateau continental. Le premier règlement exige que les opérateurs élaborent et mettent en place des systèmes de sécurité et de gestion environnementale; les offices canadiens des hydrocarbures extracôtiers imposent cette exigence aux opérateurs depuis de nombreuses années. L'exigence concernant les systèmes de sécurité et de gestion environnementale fait partie intégrante du nouveau Règlement sur le forage et la production de pétrole et de gaz promulgué au Canada en décembre dernier. Ce règlement va plus loin que le règlement adopté aux États-Unis parce qu'il impose aux opérateurs l'obligation d'élaborer et de mettre en place des plans de sécurité et des plans de protection de l'environnement qui doivent, entre autres, décrire comment leurs systèmes de sécurité et de gestion environnementale seront appliqués aux activités qu'ils entendent mener.
Le second nouveau règlement américain modifie le règlement sur le forage pour ce qui est du contrôle des puits. Le personnel de conseil reconsidère actuellement ces nouvelles exigences américaines en détail pour déterminer s'il y a des changements que nous devons faire sur le fait d'aller la base avancée.
Le nouveau règlement sur le forage et la production de pétrole et de gaz tient les opérateurs entièrement responsables pour leur comportement en matière de sécurité et d'environnement, et les force à adopter des normes et des pratiques exemplaires. Un élément-clé des mesures législatives en place est la capacité donnée à l'Office d'adopter des lignes directrices complètes pour aider les opérateurs à comprendre et à interpréter les règlements afin de s'y conformer le. De pair avec l'adoption du récent Règlement sur le forage et la production de pétrole et de gaz, quatre lignes directrices ont été émises pour observations et application provisoire. Les lignes directrices font état, entre autres, des normes des pratiques exemplaires reconnues pour la réalisation de travaux, ainsi que des exigences concernant le dépôt réglementaire de documents lorsque les autorisations et des approbations sont demandées à l'Office.
Une autre mise à jour importante dont je veux vous faire part aujourd'hui a trait à la réponse réglementaire internationale à l'incident qui s'est produit dans le Golfe du Mexique. L'OCNEHE et l'OCTNHE sont membres de l'International Regulators Forum, groupe de neuf organismes de réglementation en matière de santé et de sécurité dans la plupart des grandes régions extracôtières de production d'hydrocarbures, dont le Royaume-Uni, la Norvège, l'Australie et les États-Unis. L'International Regulators Forum, ou IRF, a été mis sur pied en 1994 afin de promouvoir des améliorations en matière de santé et de sécurité dans ce secteur d'activités grâce à la collaboration à des programmes conjoints et au partage de l'information et des pratiques exemplaires. L'Office national de l'énergie a été un chef de file des initiatives de l'IRF aussi et s'est activement impliqué dans trois de ses conférences depuis 2005.
En septembre, l'IRF a tenu une rencontre extraordinaire de deux jours organisée par le Bureau of Ocean Energy Management, Regulation and Enforcement, la nouvelle division du MMS à Washington. Il s'agissait de la première rencontre extraordinaire de l'IRF depuis sa fondation, 17 ans auparavant, et elle a été expressément convoquée pour discuter des questions liées aux récents accidents mettant en cause les hydrocarbures en zone extracôtière, plus particulièrement la perte de contrôle des puits Montara en Australie et Macondo dans le Golfe du Mexique. Pendant la rencontre, les membres de l'IRF ont discuté comment le mieux répondre à ces incidents d'une perspective de contrôle. En outre, bon nombre des associations de l'industrie en ont profité pour présenter diverses initiatives destinées à améliorer la sécurité des opérations extracôtières.
À la fin de la rencontre, l'IRF a confirmé sa détermination à améliorer la sécurité des activités extracôtières et à exercer du leadership en matière de réglementation mondiale de sécurité. Ces questions ont aussi fait l'objet de discussions lors de la troisième conférence de l'IRF sur la sécurité en zone extracôtière tenue à Vancouver début octobre. Organisée par le Canada, la conférence a regroupé, pendant trois jours de discussions productives sur un large éventail de sujets en matière de sécurité extracôtière, près de 200 représentants de l'industrie et d'organismes de réglementation de 17 pays. Après la conférence, les membres de l'IRF se sont rencontrés et ont approuvé un programme stratégique centré sur les points suivants : sécurité, culture, leadership, intégrité des blocs obturateurs de puits, questions opérationnelles, indicateurs de rendement, compétence des exploitants, critères de capacité, utilisation de normes et pratiques exemplaires de l'industrie.
J'espère que cette mise à jour permettra de maintenir la confiance du comité et du public canadien dans le régime réglementaire du Canada sur les activités extracôtières.
Merci pour la possibilité que vous nous avez offerte.
:
Merci, monsieur le président.
Bonjour, honorables députés.
[Français]
Je vous remercie de votre invitation à me présenter devant vous aujourd'hui pour vous faire part des plus récents développements au chapitre d'éventuelles interventions d'urgence pendant des forages pétroliers et gaziers en mer.
[Traduction]
Le 11 mai, quelques semaines à peine après l'éruption incontrôlée dans le Golfe du Mexique, l'Office national de l'énergie a pris l'engagement de passer en revue les exigences en matière de sécurité et d'environnement pour les forages extracôtiers dans l'Arctique canadien.
Depuis ma visite précédente en mai, plus de 115 groupes et organismes distincts se sont inscrits afin de prendre part à cette revue, dont des collectivités du Nord, des groupes autochtones, des organisations non gouvernementales de l'environnement, d'autres organismes de réglementation et des représentants de l'industrie.
Le 20 septembre, l'ONE a annoncé que la revue du dossier Arctique se ferait en trois étapes. À la première étape, qui est en cours, il s'agit de rassembler les meilleures connaissances disponibles sur les forages extracôtiers dans un milieu arctique. De manière à élargir encore plus son champ de connaissances, l'Office a également, par la voie d'un appel public le 30 septembre, invité quiconque possédant une expertise ou de l'information pertinente à lui en faire part. D'autres demandes d'information de ce type sont prévues.
L'Office examinera en outre les recommandations de la commission nationale créée par le gouvernement américain sur le forage et le déversement au puits Deepwater Horizon de BP, qui devrait normalement être rendu public en janvier 2011.
La deuxième étape de la revue du dossier Arctique donnera aux participants l'occasion de se pencher sur l'information recueillie en plus de poser des questions et de faire part de leurs commentaires sur les éléments étudiés. À la conclusion de cette deuxième étape, l'Office produira un rapport public après avoir pris en considération tous les renseignements à sa disposition, et ce rapport servira au moment de l'examen de futures demandes de forage extracôtier dans l'Arctique canadien. La revue de ce dossier sera publique. Il s'agira d'un processus transparent et les personnes que ces questions préoccupent auront l'occasion d'y prendre part.
Des réunions avec des collectivités du Nord sont déjà prévues pour discuter de la revue du dossier arctique. Par exemple, le 24 novembre, nous serons à Inuvik afin de rencontrer l'Inuvialuit Regional Corporation. Tôt en décembre, nous rencontrerons aussi des membres du Conseil inuvialuit de gestion du gibier et du Conseil consultatif de la gestion de la faune.
L'Office a l'intention de se rendre dans d'autres collectivités du Nord, notamment au Nunavut, pour prendre connaissance des préoccupations qui prévalent à ces endroits.
Je tiens à souligner que l'Office a à coeur de rencontrer ces collectivités et de les écouter. Ce sont leurs habitants qui seront les plus touchés par les décisions prises à l'égard du forage extracôtier dans l'Arctique canadien.
Dans la trousse d'information qui vient d'être rendue publique jeudi dernier, nous décrivons comment demander la tenue de réunions dans le cadre de la première étape de la revue visant à recueillir de l'information pour bien cerner la situation. Nous avons indiqué que de telles demandes devraient nous être présentées d'ici le 31 janvier 2011.
Nous avons également annoncé que nous avions l'intention de retenir les services de conseillers et de spécialistes pour que nous puissions acquérir certaines des connaissances dont nous avons besoin, et nous avons demandé à quiconque participait à la revue de nous indiquer d'ici la fin novembre les domaines pour lesquels, à leur avis, les renseignements actuels, s'ils ne sont pas inexistants, présentent du moins des lacunes.
Enfin, nous avons précisé qu'une aide financière pouvant atteindre 300 000 $ au total allait être disponible pour aider les participants à acquitter les frais de déplacement découlant de la participation aux réunions à la deuxième étape de la revue. Ces réunions sont prévues pour le printemps à Inuvik, Iqaluit, Yellowknife et Whitehorse, et d'autres endroits seront ajoutés au besoin. Elles donneront aux Canadiens l'occasion de se pencher sur l'information recueillie et de poser des questions aux autres participants.
Un des éléments qui sera examiné par l'Office à l'occasion de la revue du dossier Arctique a trait aux interventions en cas d'urgence. Notre rôle premier est de prévenir les accidents. L'Office doit tout de même être prêt à intervenir quelle que soit la situation d'urgence et peu importe quand elle pourrait se produire. En cas de déversement ou d'incident attribuable à un forage en mer dans l'Arctique canadien, l'Office serait l'organisme fédéral responsable. En cette qualité, c'est à nous qu'il incombe de responsabiliser l'exploitant lorsqu'il s'agit de prévoir, d'atténuer et de gérer les accidents et les déversements de pétrole, peu en importe l'ampleur et la durée.
Pour s'assurer qu'une société est parfaitement prête à réagir en cas d'incident, l'Office impose le respect d'un vaste ensemble de règles en ce qui concerne la capacité d'intervention en cas d'urgence. En matière de forages extracôtiers, l'article 6 du Règlement sur le forage et l'exploitation des puits de pétrole et de gaz au Canada exige expressément des sociétés qu'elles proposent un plan d'intervention en cas d'urgence, lequel est examiné en détail par l'Office avant toute autorisation de forage. En présence de lacunes, il incomberait à la société de les combler pour pouvoir obtenir l'autorisation de forer.
Le Règlement exige par ailleurs de préciser l'étendue et la fréquence des exercices d'intervention en cas de rejet de pétrole, qui doivent en outre être coordonnés entre les différents organismes d'intervention fédéraux, territoriaux et municipaux. En tant qu'organisme responsable, nous jouerions un rôle de premier plan à l'occasion d'une éventuelle intervention d'urgence. Pour se préparer dans le contexte de futurs forages en mer possibles, le personnel de l'Office a pris part à six exercices d'intervention uniquement au cours des six derniers mois. D'autres exercices seront tenus ultérieurement.
[Français]
Avant d'approuver un projet, l'office doit être convaincu que le programme de forage de l'exploitant intègre des plans de sécurité, d'intervention d'urgence et de protection environnementale qui répondent à nos normes. L'office passe en revue chaque demande soumise pour s'assurer que la sécurité des travailleurs et des travailleuses, du grand public et de l'environnement sera respectée.
Comme c'est clairement expliqué dans l'objet de la Loi sur les opérations pétrolières au Canada, la sécurité, la protection de l'environnement et la conservation des ressources sont les seuls éléments pertinents lors de l'examen d'une demande présentée aux termes de cette loi.
[Traduction]
Dans le cadre de la revue du dossier Arctique, l'Office étudiera de très près les nouvelles règles américaines sur la sécurité adoptées vers le début d'octobre. Un premier regard, comme l'a dit mon collègue M. Pinks, m'a permis de constater que nombre des changements mis en oeuvre depuis que le moratoire a été levé aux États-Unis font déjà partie intégrante du régime de réglementation canadien. Par exemple, les nouveaux règlements américains exigent des sociétés qu'elles obtiennent une attestation d'un tiers indépendant établissant que les plates-formes peuvent être utilisées sans danger, ce qui est déjà exigé dans notre législation. Toujours aux termes des nouveaux règlements américains, l'industrie est tenue d'élaborer un système intégré de gestion des questions de sécurité et d'environnement. Encore une fois, au Canada, les exploitants sont déjà tenus de disposer de tels systèmes de gestion. En d'autres termes, les États-Unis se rapprochent de la position canadienne.
Je conclurai, monsieur le président, en parlant de ce que nous pouvons apprendre des autres. Comme l'a dit M. Pinks, le Canada est un membre actif de l'International Regulators Forum. L'IRF a justement tenu sa plus récente en conférence à Vancouver il y a deux semaines. Plusieurs membres du personnel de l'Office étaient à Vancouver à l'occasion de cette conférence de trois jours, y compris M. Dixit et moi-même.
J'en ai personnellement retiré ce qui suit : les organismes de réglementation des pays touchés de près par les forages extracôtiers, notamment les États-Unis, la Norvège, le Danemark, le Royaume-Uni, l'Irlande, l'Australie, le Mexique, le Brésil, les Pays-Bas et le Canada, font front commun autour de la notion de promotion d'une culture qui met la sécurité à l'avant-plan, du besoin de s'en remettre à des systèmes de gestion pour promouvoir une telle culture, du rôle que doivent jouer les organismes de réglementation pour responsabiliser l'industrie afin d'atteindre les résultats souhaités en matière de sécurité, d'environnement et d'intervention en cas d'urgence, des vérifications des systèmes de gestion voulus qu'il faut mener et des inspections sur le terrain qu'il faut effectuer, qui sont là autant d'outils clés dont nous disposons pour assurer la sécurité dans le contexte du forage en mer.
Je vous remercie, mesdames et Messieurs les députés, de m'avoir donné l'occasion de vous faire part des plus récents développements au chapitre d'éventuelles interventions d'urgence pendant les forages pétroliers et gaziers en mer.
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Merci, monsieur le président. Merci aux témoins d'être ici.
Nous venons de recevoir des informations très complètes et intéressantes. On aimerait parfois, monsieur le président, que le public soit dans la salle durant de tels exposés car je pense que cela le rassurerait sur le fait que les dispositifs de réglementation mis en oeuvre par le Canada et par la communauté internationale représentent absolument ce qu'il y a de mieux en la matière.
Cela dit, comme je suis un néophyte, je ne connais pas bien les détails concrets du confinement, des puits de secours et des aspects techniques des interventions d'urgence. Je vous remercie beaucoup de nous avoir donné un aperçu du processus de gestion et de redevabilité.
Monsieur Ruelokke, en ce qui concerne les plans d'urgence, vous avez souligné que les forages dans les régions du Nord et dans l'Arctique extracôtier se font souvent dans un climat et un contexte très différents de ceux du Golfe du Mexique.
Vous avez parlé de confinement en nous donnant presque l'impression que le confinement et la recherche en la matière sont nécessaires, et peut-être même plus que le forage de puits de secours en guise de précaution. C'est en tout cas ce que j'ai compris.
Pourriez-vous nous donner quelques précisions à ce sujet?
:
Certainement. C'est une très bonne question. Je vais essayer d'y répondre.
Quand je parle de confinement, je parle des efforts déployés après un incident, c'est-à-dire après une défaillance quelconque de l'équipement et des procédures comme nous l'avons constaté à Macondo. Vous vous souviendrez — comme nous tous — que plusieurs choses se sont produites simultanément dans le sillage de Macondo. La première est qu'on a immédiatement commencé à forer deux puits de secours dans la zone adjacente pour s'assurer qu'au moins l'un des deux serait efficace. Chacun savait que cela prendrait plusieurs mois, ce qui a été le cas.
On a également entrepris simultanément un certain nombre d'activités pour essayer de contenir le pétrole à la tête du puits, là où il s'échappait du bloc obturateur. La première tentative a été faite avec une grande structure. Étant donné la présence de gaz s'échappant en bordure du puits, il y avait formation d'hydrates entraînant de la congélation, ce qui avait obligé à retirer cette espèce de grand chapeau qu'on avait placé au-dessus du puits.
On a fait d'autres tentatives pour installer d'autres structures au-dessus du puits, et c'est ce qui a finalement réussi. Le dernier appareil placé au-dessus a finalement fait cesser l'éruption.
Pour faire tout cela, cependant, on a dû tout inventer sur le moment. On n'avait jamais dressé de plan cohérent pour contenir une éruption de cette nature. Évidemment, BP a tiré beaucoup de leçons de cet événement, tout comme les autres exploitants qui ont aidé la société dans ce travail.
J'ai parlé tout à l'heure de Marine Well Containment Company, une nouvelle société créée à l'origine par quatre sociétés pétrolières — Shell, Exxon Mobil, Chevron et ConocoPhillips — auxquelles BP vient de se joindre. Elles ont engagé plus de 1 milliard de dollars pour concevoir et construire un équipement de confinement similaire à celui utilisé à Macondo mais qui pourrait être déployé presque instantanément ou en quelques jours, mais en tout cas pas au bout de quelques semaines ou mois.
:
Merci, monsieur le président.
Bonjour, messieurs. Ça me fait plaisir de vous rencontrer.
Monsieur Ruelokke, j'ai été intéressée par votre présentation. Les citoyens des Îles-de-la-Madeleine, au Québec, ont beaucoup d'inquiétudes. On est situé à seulement 80 km de votre gisement, et ce territoire du Québec dépend de la pêche et du tourisme. On est vraiment très près de vos côtes, à environ 100 km.
Vous devez être au courant du fait qu'il y a un moratoire sur toute exploitation jusqu'en 2012. Ce moratoire a été décrété par le gouvernement du Québec.
Il y a une préoccupation. On veut attendre d'avoir fait une étude environnementale et stratégique; on veut attendre que ce soit terminé. En effet, les écosystème dans le golfe du Saint-Laurent sont très fragiles. L'industrie de la pêche est la principale industrie et elle est importante pour les populations.
Il y a aussi une autre chose qui nous inquiète. On s'aperçoit que Terre-Neuve-et-Labrador aura les avantages de ce gisement. Certains se demandent même si on va pomper le pétrole du Québec. On sera peut-être tributaires des inconvénients; c'est une supposition.
Je me demande pourquoi vous continuez d'autoriser les travaux effectués par Corridor Resources Inc., plutôt que d'attendre que soit terminée l'évaluation environnementale stratégique québécoise.
Permettez-moi d'expliquer ce qui s'est produit dans le secteur englobant la structure qu'on appelle « Old Harry ». Il s'agit d'un permis de prospection qui a été délivré à Corridor Resources il y a un certain temps et qui ne vaut que dans la région extracôtière de Terre-Neuve-et-Labrador.
La seule activité entreprise là-bas jusqu'à présent est la suivante : Corridor Resources a très récemment entrepris une étude des risques géologiques, une étude sismique superficielle pour examiner les sédiments se trouvant immédiatement sous le plancher marin. Aucune demande de forage n'a encore été présentée et, si Corridor Resources en présente une, l'entreprise sera tenue de produire une évaluation environnementale des effets que pourrait avoir un forage.
Pour le moment, nous n'avons pas reçu de demande de forage. Si nous en recevons une, nous exigerons une évaluation environnementale qui devra porter sur l'ensemble du secteur de forage et de la région environnante. Je veux dire par là qu'elle ne devra pas porter seulement sur la région de Terre-Neuve mais aussi, par exemple, sur l'activité de pêche qui est tellement importante pour les gens des Îles de la Madeleine.
Une évaluation environnementale stratégique avait été effectuée il y a quelques années sur toute la zone englobant ce permis et il y avait eu à l'époque une certaine coopération, bien sûr, comme toujours, avec d'autres instances de réglementation. Je ne suis cependant pas très au courant car c'était avant mon époque, mais je crois que l'évaluation avait été exhaustive et que des gens du Québec y avaient participé.
Donc, pour résumer, aucun puits n'a encore été foré dans ce secteur et aucun puits n'y sera foré tant qu'on n'aura pas effectué une étude environnementale concluant qu'on peut entreprendre le forage sans causer de dommages indus à l'environnement.
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J'ai mentionné tout à l'heure tous les documents qu'il faut présenter au sujet des plans et des procédures. Je pense que vous posez deux questions et je répondrai d'abord à la deuxième.
La question est de savoir si les sociétés font tout le travail exigé pour se préparer aux urgences et s'il y a une sorte d'analyse des coûts. Nous ne faisons aucun calcul de ce que ça coûte à une entreprise de se préparer. Nous exigeons qu'elle soit préparée et qu'elle nous en donne la preuve en nous fournissant des plans et des procédures détaillés indiquant la manière dont elle agira en cas d'urgence, quelle qu'elle soit. Je veux parler ici des plans d'urgence, des plans d'intervention d'urgence, et des plans de réaction à un déversement de pétrole. Tous ces documents sont examinés à la loupe par nos experts et par les experts des autres organismes avec lesquels nous travaillons.
En ce qui concerne le scénario d'intervention en cas de déversement grave, vous vous souviendrez que j'ai parlé de trois paliers de réaction. Le premier palier concerne un petit déversement de moins de 100 barils. Dans un tel cas, on peut réagir avec l'équipement qui se trouve toujours à bord et avec les navires qui sont sur place. Au deuxième palier, il faut pouvoir réagir à un déversement pouvant atteindre 100 000 barils. Dans ce cas, on fera uniquement appel aux ressources qui sont disponibles à Terre-Neuve. Au troisième palier, c'est-à-dire pour un déversement de plus de 100 000 barils, on devra probablement faire appel à des ressources nationales et, peut-être, internationales. Ce serait une situation similaire à celle de Macondo.
Le message que je tiens à vous communiquer est que, si l'intervention traditionnelle en cas de déversement est encore adéquate et importante, on se concentre beaucoup plus aujourd'hui sur la prévention des accidents. Toutefois, s'il y a un accident, nous analyserons l'effort de confinement qui a réussi à Macondo pour voir comment il pourrait s'appliquer à cette situation.
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Merci de cette question.
Je commence par l'effort de confinement. L'exercice a débuté en juillet. BP s'y est jointe il y a environ un mois et on n'en est donc encore qu'au tout début. Ce qu'on fait essentiellement en ce moment, pensons-nous — même si nous n'y participons pas activement puisque c'est fait par les sociétés —, consiste à revoir ce qui s'est fait, à tirer les leçons de la situation, si vous voulez, à Macondo, parce que ce fut le premier cas de ce genre de grande opération de confinement sous-marin.
Nous allons en profiter de plusieurs manières. Mes deux collègues ont mentionné le International Regulators Forum dont nous sommes un membre très actif. Aux États-Unis, l'organisme de réglementation est le Bureau of Ocean Energy Management. Je peux vous dire que nous avons rencontré son directeur il y a quelques semaines, lors de la conférence de Vancouver, et que nous rencontrons son personnel opérationnel pour discuter de questions diverses. Nous allons donc rester au courant et suivre de près les efforts déployés à ce sujet parce que c'est essentiellement ce qui se fait en ce moment dans le Golfe du Mexique.
La deuxième chose est que, lorsque des sociétés préparent à notre intention un plan d'intervention d'urgence pour un nouveau puits de prospection en eau profonde, nous leur demandons ce qu'elles ont l'intention de faire en matière de confinement, notamment où elles obtiendront les ressources nécessaires pour ce faire. C'est une chose qui ne se faisait pas jusqu'à maintenant. Voilà donc une leçon que nous tirons directement de l'accident. Je soupçonne que nos collègues de la Nouvelle-Écosse et de l'Office national de l'énergie appliqueront la même leçon.
Votre deuxième question était de savoir ce que nous faisons des leçons apprises. L'une des choses que nous avons tirées de l'incident de Macondo, c'est que la question fondamentale n'était pas tellement l'absence de règlement adéquat mais plutôt l'absence d'une culture de la sécurité, et aussi qu'il n'y avait pas à notre avis un degré adéquat de supervision de ce qui se passait, ce qui avait permis à un certain nombre de choses de se faire largement en dehors des pratiques normales.
Il y avait eu plusieurs occasions d'intercession qui auraient été couronnées de succès si elles avaient été exploitées plus tôt pour prévenir l'incident mais, pour diverses raisons… En fait, nous ne connaissons pas encore les raisons.
Certains d'entre vous savez peut-être que BP est venue à Ottawa il y a trois ou quatre semaines faire un exposé sur l'incident de Macondo par l'intermédiaire du ministère des Ressources naturelles. On nous a fait un exposé en trois parties. Il y avait dans le groupe un membre de l'équipe d'enquête sur l'ingénierie. Il nous a parlé avec franchise de ce qui n'avait pas marché et de ce qu'on aurait pu faire pour arrêter les opérations. Un autre membre de l'équipe nous a parlé de l'effort de confinement, et le troisième, de la réaction au déversement. Les leçons tirées ont été que nous avons de bons régimes de réglementation et que nos exploitants possèdent une bonne culture de la sécurité, avec des pratiques et des procédures adéquates. Il y a cependant une leçon plus importante que toutes les autres à tirer de tous ces incidents. Je sais de quoi je parle parce que j'étais personnellement concerné lorsque ma société avait des employés au sein de l'équipage de l'Ocean Ranger. Nous avons perdu cinq de nos employés à cette occasion. Aucun de ces incidents ne s'est produit parce qu'il y a une chose particulière qui n'a pas marché et qui a causé la catastrophe. Dans tous les cas, il s'est agi d'un certain nombre de choses qui, individuellement, n'auraient pas eu de conséquences aussi tragiques mais qui, prises ensemble et se déclenchant l'une après l'autre, entraînent la catastrophe.
La meilleure manière d'éviter cela est d'adopter et d'imposer une culture adéquate de la sécurité. Je vous donne un petit exemple : le pouvoir de faire cesser le travail dont je parlais tout à l'heure. Sur la plate-forme de forage de Chevron, chaque employé a la possibilité, à n'importe quel moment, de faire cesser le travail s'il constate quelque chose qui lui semble dangereux ou s'il croit que cela risque de poser un problème de sécurité.
Une semaine et demie avant l'éruption de Macondo, il y avait un véhicule télécommandé qui surveillait continuellement le bloc obturateur de puits et le tube goulotte. On avait constaté que des bulles sortaient de l'un des modules de contrôle du BOP, ce qui est totalement anormal. Ça ne doit pas se produire. Ça veut dire que quelque chose ne va pas mais on n'en a pas tenu compte. Personne n'a rien fait. Si quelqu'un avait dit : « Il faut aller voir ce qui ne va pas »... Certes, cela aurait coûté cher. En eau profonde, il aurait fallu plusieurs jours pour remonter le tube goulotte et le BOP afin de les inspecter pour cerner le problème. Cela aurait pu coûter 10 ou 15 millions de dollars. C'est un investissement qui aurait à l'évidence valu la peine s'il avait permis d'éviter cette catastrophe. Dans une culture de la sécurité, c'est ce qu'on aurait pu faire.
C'est vraiment là que nous déployons nos efforts maximum, et nos exploitants font le nécessaire pour instaurer une culture adéquate de la sécurité sur chaque installation de notre secteur.
Je pourrais vous en parler encore pendant longtemps mais j'en reste là.
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Nous menons des inspections et vérifications de routine mais nous n'avons personne en permanence sur aucune des plates-formes. Nous déployons notre personnel en fonction d'une analyse de risque, ce qui veut dire que les activités ou secteurs qui nous semblent poser plus de risques que les autres retiennent plus notre intérêt et sont plus supervisés.
Si vous me permettez de revenir à la question que vous avez posée au sujet de ce qui s'est passé sur la plate-forme Stena Carron lors du forage du puits Lona-055, nous avions dressé un plan de supervision renforcé et en avions informé Chevron, la société exploitante. Cela veut dire que nous avions un observateur à bord pendant les phases critiques du forage.
Avant le déclenchement de ces activités critiques, nous avions appliqué ce que nous appelons une pause opérationnelle. Autrement dit, nous nous étions assurés officiellement, avec l'exploitant et avec la société de forage, Stena, que tout l'équipement et toutes les procédures nécessaires étaient en place pour faire face à tout ce qui pouvait arriver pendant la phase suivante de forage.
Comme il s'agit d'un puits de prospection, l'information le concernant reste confidentielle pendant deux ans mais je peux vous dire que, pour tout puits de prospection, l'une des choses qui nous intéressent du point de vue de la sécurité et de la protection de l'environnement est ce qui se passe quand on entre dans les zones cibles du substrat où l'on s'attend à trouver des hydrocarbures.
Donc, avant d'entrer dans la cible, nous imposons une pause opérationnelle pour nous assurer qu'on est parfaitement prêt à faire face à tout ce qui pourrait arriver. S'il y a une poussée de pression, comment réagira-t-on? Possède-t-on l'équipement voulu pour réagir? Le personnel a-t-il reçu la formation voulue et est-il certifié? Toutes ces vérifications étaient faites de manière continue pendant le forage de ce puits.
Nous appliquons le même genre de surveillance à n'importe quel puits, en particulier aux puits de prospection. Nous ne plaçons cependant pas l'un de nos employés sur chaque plate-forme 24 heures sur 24.
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Je vais répondre en premier, madame Gallant.
Nous aurons la réponse à cette question dans le rapport de janvier 2011 que publiera une commission indépendante convoquée par le président Obama.
Je vais citer le professeur Mark Fleming, de l'université Saint Mary's, qui s'était adressé à la conférence de l'IRF à Vancouver il y a deux semaines. Il a déclaré — et c'est à mon avis la meilleure leçon que j'ai apprise à Vancouver — que les accidents arrivent parce que les gens ne font pas ce qu'ils sont censés faire.
Cela nous ramène d'ailleurs à ce que disait M. Pinks, c'est-à-dire qu'il faut qu'il y ait des systèmes de gestion. Nous, les offices de réglementation, devons tenir l'industrie responsable non seulement d'avoir un système de gestion documenté, mais aussi de l'améliorer continuellement, en vérifiant que le PDG s'y consacre pleinement, que les travailleurs s'y consacrent autant, et que, si les employés de première ligne constatent une lacune sur le plan de la sécurité, ils en parlent.
La leçon que je tire jusqu'à présent du golfe, à partir de ce que j'ai lu — et nous n'avons lu qu'une toute petite partie de ce que nous lirons en janvier —, concerne cette notion de culture de la sécurité. Notre office participe pleinement à l'instauration de cette culture qui doit exister sur une plate-forme de forage en haute mer et, si elle n'existe pas, il le sait. Nous avons le pouvoir de faire cesser les activités si nous constatons un problème.
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Merci, monsieur le président.
Merci à vous d'être venus nous rencontrer aujourd'hui.
Ma question sera celle d'un parfait néophyte dans ce domaine. Elle va dans le même sens que celle de mon collègue M. Allen.
Du point de vue du public, British Petroleum, une compagnie sérieuse, connue, riche, avait certainement les équipements sécuritaires requis pour faire des forages. Il y avait certainement du personnel formé. Il y avait certainement un plan d'urgence, j'en suis convaincu. On doit admettre aussi qu'il y avait des procédures connues d'intervention. Il y avait certainement des contacts internationaux en cas de problèmes majeurs, comme en ont toutes les autres compagnies. Il y avait certainement beaucoup d'expérience et beaucoup de données accumulées au fil du temps sur des choses possibles.
Pourtant, il s'est produit un déversement qui a duré plusieurs mois. Et aujourd'hui, dans les journaux, la dernière estimation du coût de l'opération faisait état de 40 milliards de dollars, mais ce n'est peut-être pas fini non plus.
A l'Office national de l'énergie, vous parlez de resserrer la réglementation au Canada. À l'intention du public, qu'est-ce qui vous rend aussi certain d'arriver à quelque chose de mieux que cela, compte tenu surtout — Mme Galant en a parlé — du forage en Arctique, qui est une tout autre problématique, beaucoup plus complexe et plus dangereuse, à mon avis?
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Monsieur Pomerleau, je suis d'accord sur toutes les hypothèses que vous avez émises. Comme nouveau membre du comité, vous posez les questions pertinentes. Je n'oserais vous dire que je suis certain de quoi que ce soit, sauf qu'il faut demeurer vigilant.
Je dis aux Canadiens et aux Canadiennes, aux Québécois et aux Québécoises que nous avons un régime réglementaire qui, par définition, se concentre sur trois choses.
D'abord, nous devons faire tout ce que nous pouvons, à titre d'organisme de réglementation en matière de sécurité et d'environnement, pour que le forage se fasse de façon sécuritaire, protège l'environnement et protège les communautés autochtones, qui seraient les premières affectées par un incident. Par ailleurs, je ne peux vous promettre qu'un accident ne se produira jamais. Les Canadiens et les Canadiennes ne peuvent pas croire qu'un accident ne se produira jamais.
En ce qui concerne la deuxième étape de notre démarche réglementaire, s'il y avait accident, même si la probabilité est très faible, la conséquence d'un tel accident serait très importante. Donc, il faut que nous soyons prêts, comme régulateurs, pour nous assurer que l'entreprise, aidée au besoin par la société civile, les ministères et les organismes publics, sera prête d'avance de telle sorte que, si un accident se produisait, on puisse contenir et interrompre cet événement le plus tôt possible.
La troisième démarche, c'est de supposer qu'on peut toujours apprendre et faire mieux. Alors, j'offre aux Canadiens et Canadiennes une volonté réglementaire de ne jamais être satisfait de la réglementation et d'aller chercher le nouveau milligramme de sagesse qu'on peut incorporer dans un processus qui, par définition, veut l'amélioration continue dans tout ce qu'on fait.
Pour le reste, en tant qu'organisme de réglementation, nous sommes indépendants du gouvernement. Nous ne sommes donc pas partie prenante des questions de politiques. Cependant, nous nous inscrivons dans un processus, à savoir que s'il y avait une demande — on s'attend à en recevoir peut-être en 2012 ou plus tard — pour un forage qui aurait peut-être lieu en 2014 ou au-delà de cela, notre travail consisterait à regarder cela froidement et à nous demander si cela répond à nos normes spécifiques en matière de réglementation. Et, même si l'entreprise nous dit que cela va bien fonctionner, on va demander de quelle façon, advenant le cas où cela ne fonctionnerait pas, on pourrait recourir à toutes les infrastructures nécessaires pour répondre de façon adéquate, dans l'intérêt public.
Notre examen public de l'article vise essentiellement cette grande question que vous posez.
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Merci, monsieur le président.
Je remercie les témoins d'être venus partager leurs informations avec nous sur leur spécialité. Évidemment, il s'agit là d'un sujet dont je ne me serais probablement pas occupé si je n'étais pas député et membre de ce comité, et je vous remercie de toutes ces informations.
Je sais que notre gouvernement est évidemment déterminé à assurer l'exploitation sécuritaire et durable des ressources naturelles, ce qui comprend les forages extracôtiers. Je crois comprendre aussi que vous êtes tous des organismes de réglementation indépendants du gouvernement. Il y a des lignes directrices rigoureuses, il y a un processus de demande, il y a certaines exigences rigoureuses de formation professionnelle, et il faut que les demandes soient approuvées par les organismes de réglementation avant que le travail puisse commencer.
Je pense que nous tous, Canadiens, sommes très sensibles à ce qui s'est passé en avril aux États-Unis avec l'éruption du puits de pétrole, et que nous tenons à savoir si nous sommes préparés à faire face a ce genre d'accident. C'est une question cruciale que je me pose. Je sais également que l'ONE, après cet accident, a annoncé la révision de notre processus de forage.
Ma question sera triple. Qu'est-ce que l'ONE espère obtenir de cette révision? Est-il possible que les règlements actuels seront modifiés si c'est nécessaire? Quand pouvons-nous espérer que cette révision sera terminée?
Notre objectif est de pouvoir, à la fin de la phase trois, avec la publication d'un rapport public, préciser très clairement ce que les exploitants devront nous fournir à l'avenir pour nous convaincre d'approuver le forage d'un puits extracôtier dans l'Arctique. Nous indiquerons les informations qu'ils devront nous fournir à cet effet.
Comme vous le savez, monsieur Shory, nous sommes un tribunal administratif indépendant quasi judiciaire, ce qui nous donne le pouvoir légal d'approuver ou de rejeter une demande de forage à partir des informations que nous fournit l'entreprise. Si nous approuvons, nous avons aussi le pouvoir d'imposer les conditions que l'Office national de l'énergie estime nécessaires pour que ce puits soit foré en toute sécurité, pour protéger l'environnement et pour protéger les collectivités.
Heureusement, lorsque le législateur a adopté la Loi sur les opérations pétrolières au Canada, l'objectif de cette loi a été clairement énoncé dans le préambule. Donc, en qualité d'office indépendant, nous sommes guidés, et même liés, par cette loi qui nous oblige à tenir compte de trois choses : la sécurité, l'environnement et la conservation de la ressource, c'est-à-dire son exploitation sans gaspillage. Une quatrième chose a été ajoutée récemment, la liberté d'accès. Dans le cas d'un pipeline, l'intérêt public exige qu'il soit partagé afin d'éviter de devoir construire des équipements inutiles.
Voilà donc ce que nous espérons réaliser, monsieur Shory. Il y aura un débat public qui permettra aux gens de poser d'autres questions. L'objectif ultime sera de dire aux requérants ce qu'ils sont tenus de nous fournir pour essayer de nous convaincre d'approuver un forage.
Quant à savoir si les règlements devraient être modifiés, le processus de modification est une question de politique gouvernementale, ce qui veut dire que les ministères s'en occupent. Comme l'a dit M. Pinks, nous sommes toujours là pour offrir notre assistance technique en cas de besoin. Les textes réglementaires nous donnent de vastes pouvoirs. De ce fait, nous n'effectuons par cette révision dans le but de demander des modifications aux règlements mais, si nous découvrons des choses importantes pour améliorer le dispositif, les responsables des politiques participeront à notre révision. Les grands ministères d'Ottawa — MPO, RNCan, AINC, et j'en oublie beaucoup — se sont inscrits pour participer à notre révision et ce sont eux qui décideront s'ils veulent lancer un processus réglementaire, et nous fournirons notre assistance technique s'ils la demandent.
Quand cela se fera-t-il? Notre réponse jusqu'à présent, monsieur Shory, est que nous prendrons le temps nécessaire pour bien faire. La première phase est en cours et elle ne saurait se conclure tant que le rapport de la commission publique indépendante des États-Unis n'aura pas terminé son travail. Si les gens ont encore des choses à nous dire, nous continuerons de les écouter.
La deuxième phase consistera à nous poser mutuellement des questions. Elle débutera au printemps et durera probablement quelques mois. Nous n'avons pas encore fixé de date, monsieur Shory, et je ne peux donc pas vous en donner, si vous le permettez, parce que notre objectif primordial est que tout soit bien fait.
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Merci, monsieur le président.
Je vous remercie de vos témoignages, messieurs. Ce que vous nous dites aujourd'hui est essentiellement la même chose qu'au mois de mai, si je me souviens bien, c'est-à-dire que la technologie de l'équipement qui est utilisé — dans notre cas, pour forer en eau profonde — est une technologie de pointe. Vous semblez répéter ce que vous disiez en mai, c'est-à-dire que les accidents arrivent quand les exploitants utilisent mal leur équipement ou ne tiennent pas compte des dangers éventuels qui apparaissent ou qui sont déjà présents dans l'environnement dans lequel l'équipement est utilisé.
En ce qui concerne l'équipement lui-même et les méthodes de forage, on peut bien les étudier en long, en large et en travers mais, comme vous l'avez dit, monsieur Caron, les accidents arrivent parce que quelqu'un fait quelque chose qu'il n'était pas censé faire ou ne tient pas compte des dangers éventuels. Donc, ce sont les erreurs humaines qui causent beaucoup d'accidents, pas seulement l'industrie du forage.
Je suis vraiment très heureux de vous entendre parler de ce régime de culture de la sécurité dans lequel l'industrie s'est engagée. Cela va, dans un certain sens, au-delà des règlements déjà en vigueur. En ce qui concerne ce pouvoir de faire cesser le travail, si j'ai bien compris, cela veut dire que si quelqu'un, sur la plate-forme de forage, constate quelque chose, il a le pouvoir en vertu de cette nouvelle structure de faire tout arrêter et d'expliquer après pourquoi il a fait cela. Il peut prendre cette décision individuellement.