HESA Réunion de comité
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Comité permanent de la santé
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TÉMOIGNAGES
Le mardi 4 avril 2017
[Enregistrement électronique]
[Traduction]
Je vous souhaite la bienvenue à notre troisième réunion consacrée à la motion M-47.
Voici le libellé de la motion M-47 :
Que le Comité permanent de la santé reçoive instruction d'étudier les effets de santé publique liés à la facilité de trouver et de visionner en ligne du contenu violent et sexuellement explicite avilissant sur les enfants, les femmes et les hommes, en reconnaissant et en respectant la compétence des provinces et des territoires à cet égard et que ledit Comité fasse rapport de ses conclusions à la Chambre au plus tard en juillet 2017.
Nous accueillons aujourd'hui M. William Fisher, éminent professeur au Département de psychologie de l'Université Western, ainsi que Mme Kim Roberts, professeure et chef du Child Memory Lab au sein de l'Université Wilfrid Laurier.
M. Neil Malamuth, de l'Université de Californie, devrait également se joindre à nous par vidéoconférence. Nous attendons qu'il se mette en communication.
Monsieur Fisher, nous vous écoutons.
Bonjour, mesdames et messieurs. Je vous remercie de m'avoir invité à présenter mes observations concernant les effets sur la santé publique du matériel sexuellement explicite à caractère violent et avilissant offert sur Internet.
Je présente ces observations en ma qualité de professeur de psychologie à l'Université Western Ontario et en me fondant sur mes 40 années de recherche dans ce domaine. Mes recherches ont été appuyées par diverses subventions et je suis l'auteur de publications examinées par des pairs dans ce domaine.
Je vais décrire brièvement les méthodes scientifiques qui ont été utilisées pour étudier les effets de la pornographie. Je vais aussi expliquer ce que la science peut et ne peut pas nous apprendre à ce sujet.
Permettez-moi tout d'abord de décrire certaines études expérimentales des effets de la pornographie. Dans le cadre de ces études, on demande aux participants de visionner du matériel sexuellement explicite ou du matériel de comparaison afin d'évaluer et de comparer leurs réponses comportementales. Ce faisant, la science cherche à établir la relation de « cause à effet » entre l'exposition à du contenu sexuellement explicite et un certain type de comportement.
À l'origine, les études expérimentales sur les effets du contenu sexuellement explicite violent sur le comportement agressif des hommes ont été considérées comme une confirmation du fait que l'exposition à la pornographie violente amenait les hommes à agresser les femmes.
Les études expérimentales qui affirment l'existence d'un lien de cause à effet entre la pornographie violente et les actes d'agression utilisent généralement une variante quelconque des méthodes décrites ci-après.
Pour commencer, un participant masculin, la plupart du temps un jeune universitaire, subit la violence verbale et physique — une série de neuf décharges électriques douloureuses — de la part d'une jeune femme. Le jeune homme est ensuite exposé à une brève représentation de pornographie violente — environ cinq minutes —, après quoi l'expérimentateur lui ordonne d'envoyer des décharges électriques à son agresseuse. En règle générale, les participants masculins qui ont visionné des scènes de pornographie violente envoient à leur agresseuse des décharges plus intenses que ceux qui ont regardé du matériel pornographique non violent.
Je souligne à grands traits que dans ces études, les participants masculins ont reçu la directive d'envoyer des décharges électriques à la jeune femme, et qu'on ne leur a offert aucune possibilité de répondre de manière non agressive.
On a constaté que ces études expérimentales sont tellement artificielles et limitées qu'elles nous apprennent bien peu de choses sur les effets de la pornographie violente dans la vie réelle.
Dans ces études expérimentales, les hommes ayant été attaqués verbalement et physiquement par une femme et ayant visionné de la pornographie violente n'ont pas eu la possibilité de répondre autrement que de manière agressive.
Dans des recherches ultérieures, mes collègues et moi-même avons montré qu'en répétant ces études dans un contexte qui prévoit la possibilité de réponse non agressive, très peu de participants masculins ayant subi les agressions et visionné de la pornographie violente ont choisi de répondre à l'attaquante de manière agressive.
Une recherche expérimentale menée par Neil Malamuth et son collègue, Joseph Ceniti, a également démontré que même une exposition prolongée de quatre semaines à un grand volume de matériel pornographique violent n'avait pas pour incidence d'inciter les hommes à agresser une femme si on leur en offrait l'occasion une semaine plus tard.
Une autre méthode repose sur les études corrélationnelles de la pornographie, qui consistent à évaluer l'exposition autodéclarée d'un homme à la pornographie et son comportement sexuel agressif autodéclaré. Les études corrélationnelles évaluent la relation entre A et B, mais elles ne peuvent pas établir de lien de cause à effet. Quand on constate une relation entre A et B, A peut provoquer B autant que B peut provoquer A ou, très souvent, une variable non mesurée, C, peut provoquer à la fois A et B.
De nombreuses études de corrélation établissent une relation entre l'exposition autodéclarée des hommes à la pornographie et les comportements sexuels agressifs autodéclarés.
Les constatations des études corrélationnelles sur l'existence d'un lien entre la pornographie et le comportement sexuel agressif sont compatibles avec la possibilité que la pornographie contribue aux agressions sexuelles. Les constatations des études corrélationnelles sur l'existence d'un lien entre la pornographie et les agressions sexuelles sont également compatibles avec la possibilité que les hommes qui ont un comportement sexuel agressif recherchent l'exposition à la pornographie. Les constatations des études corrélationnelles sur l'existence d'un lien entre la consommation de pornographie et les agressions sexuelles sont elles aussi compatibles avec la possibilité qu'un facteur non mesuré — par exemple, la libido des hommes ou des antécédents de personnalité antisociale — soit la cause d'origine commune du comportement sexuel agressif et du choix de consommer de la pornographie.
Dans notre laboratoire de recherche et dans un article publié dans lesquels nous avons tenu compte de la libido masculine, des traits de personnalité antisociale préexistants et de la consommation de pornographie, nous avons constaté que c'est la combinaison de la libido et des traits de personnalité antisociale qui s'avère le meilleur prédicteur des comportements agressifs contre les femmes, mais que la pornographie n'y joue aucun rôle.
Un certain nombre d'études ont été menées sur la consommation de pornographie chez les délinquants sexuels. Dans trois de ces études, il a été constaté que chez les délinquants sexuels reconnus coupables, la consommation autodéclarée de pornographie est moindre que celle des échantillons de comparaison. Une autre étude a constaté que sur un échantillon de 259 délinquants sexuels, 1 % seulement avaient été influencés par la pornographie au moment de commettre le délit.
Une recension des publications portant sur les délinquants sexuels et la pornographie a amené l'auteur à conclure que comparativement aux non-délinquants, les délinquants sexuels ne sont pas autrement plus exposés à la pornographie, pas plus qu'ils ne l'ont été à un âge plus précoce de l'enfance ou de l'adolescence
La comparaison des taux de crimes sexuels dans un même pays avant et après qu'il a légalisé la pornographie est également révélatrice. Le Danemark a légalisé la plupart des formes de pornographie en 1969. Après cette date, le nombre de viols signalés à la police avait très peu changé. La même constatation s'applique à la Suède, où la pornographie a été légalisée en 1970, et à l'Allemagne de l'Ouest, qui l'a légalisée en 1973.
L'une des questions qui nous intéressent au plus haut point est celle de l'incidence de l'accès quasi illimité à du contenu pornographique de toutes sortes depuis le milieu des années 1990 sur les taux d'agressions sexuelles au Canada et aux États-Unis. Les taux d'agressions sexuelles aux États-Unis ont diminué sans cesse après que l'accès à toute forme de pornographie dans Internet est devenu généralisé. Au Canada, les taux d'agressions sexuelles n'ont pas augmenté selon des enquêtes menées en 1999, 2004, 2009 et 2014, soit sur une quinzaine d'années d'accès illimité à toute forme de pornographie dans Internet pour la très grande majorité des Canadiens.
Les conclusions concernant la disponibilité de la pornographie en ligne et les agressions sexuelles aux États-Unis et au Canada ne corroborent pas l'hypothèse d'un lien entre les deux. Nous pouvons également nous pencher sur la relation, si elle existe, entre la disponibilité de la pornographie en ligne et les taux d'activité sexuelle des jeunes Canadiens et Américains. Les taux de grossesse et d'accouchement chez les adolescentes canadiennes diminuent depuis des décennies, une diminution qui se poursuit malgré la généralisation de l'accès à la pornographie en ligne. Au Canada, les taux de relations sexuelles des adolescents avec un seul partenaire ou des partenaires multiples, ainsi que le taux d'utilisation du condom, n'ont pas changé depuis la généralisation de l'exposition à la pornographie dans Internet.
Par ailleurs, un rapport publié par les centres de contrôle et de prévention des maladies des États-Unis indique que depuis l'avènement d'Internet et de l'accès illimité à la pornographie en ligne, la proportion d'adolescents américains sexuellement actifs a diminué, et que ceux qui le sont utilisent davantage le condom.
J'aimerais faire quelques observations finales à l'égard des consommateurs de pornographie et de leurs attitudes à l'égard des femmes. Notre groupe de recherche a analysé, avec l'appui du Conseil de recherches en sciences humaines, des données représentatives à l'échelle nationale qui ont été recueillies dans le cadre de l'Enquête sociale générale des États-Unis de 1975 à 2010. Selon cette analyse, les répondants ayant affirmé avoir regardé de la pornographie au cours de l'année précédente avaient des attitudes plus égalitaires envers les femmes. Ces résultats sont compatibles avec les constatations de plusieurs autres études qui montrent que les hommes qui louent ou visionnent souvent des vidéos sexuellement explicites ont une vision plus égalitaire des femmes.
J'aurais aussi quelques mots à dire au sujet de l'effet de la pornographie sur les relations de couple. Notre groupe de recherche a mené 2 études auxquelles ont participé quelque 700 hommes et femmes faisant partie d'un couple dont un ou les 2 partenaires consommaient de la pornographie. Quand on leur a posé la question ouverte concernant les conséquences, le cas échéant, que la pornographie pouvait avoir sur leur relation de couple, la très grande majorité a répondu qu'elle n'en avait pas. La deuxième réponse la plus fréquente était qu'elle était bénéfique, et une minorité a répondu qu'elle était nocive.
Un autre point pertinent quant à l'incidence de l'accès généralisé à la pornographie en ligne sur la relation de couple est le fait que tant au Canada qu'aux États-Unis, les taux de divorce pour 1 000 mariages ont continué de reculer de manière prononcée.
Combien de temps me reste-t-il?
Permettez-moi de conclure en vous remerciant de votre attention. Je serai ravi de poursuivre la discussion avec vous durant la période de questions.
Je vous remercie pour ces commentaires très dynamiques.
Nous entendrons maintenant l'exposé de Mme Kim Roberts. Vous avez dix minutes.
Merci de votre invitation. Je me réjouis de voir comment je pourrai contribuer aux travaux du Comité.
Mon regard diffère un peu de celui de M. Fisher. Je suis professeure de pédopsychologie à l'Université Wilfrid Laurier, à Waterloo. Mes sujets de prédilection sont la mémoire et l'apprentissage chez l'enfant, et j'applique les résultats de mes recherches aux domaines de la médecine légale et de l'éducation.
Les taux de poursuite des agresseurs d'enfants sont extrêmement faibles. Selon certaines estimations entendues, le taux de poursuites menant à des condamnations se situe autour de 2 % au Canada, pour diverses raisons. Les poursuites pour exploitation sexuelle d'enfants ne sont pas aussi médiatisées que les poursuites pour homicide ou une autre infraction du genre. Contrairement à d'autres infractions criminelles, l'exploitation sexuelle des enfants laisse peu de preuves. Les preuves physiques sont rares et il est difficile de recueillir d'autres preuves médicales, sauf si un enfant a contracté une maladie transmise sexuellement de même souche que celle dont souffre un agresseur présumé ou quelque chose du genre. Le plus souvent, il n'y a pas d'autre témoin que l'enfant, et l'agresseur présumé nie presque systématiquement les allégations. La seule preuve dont disposent les policiers est le témoignage de l'enfant.
Beaucoup de jeunes enfants ne comprennent pas ce qui leur arrive. Il est difficile pour eux de faire la distinction entre les caresses normales ou des attouchements pendant le bain, par exemple. Et malheureusement, la qualité des enquêtes laisse beaucoup à désirer. Je viens de terminer une étude pancanadienne, financée par le ministère du Procureur général, sur la formation donnée aux enquêteurs dans chaque territoire et dans chaque province. Que savent-ils du développement de l'enfant et dans quelle mesure mettent-ils en pratique ce qu'ils ont appris? Il se trouve qu'ils ont beaucoup de connaissances. Ils savent ce qu'ils devraient faire pour amener les enfants à donner une description juste des événements. Pourtant, rien ne change dans leur pratique. Je pense que les lacunes sont dues au manque de ressources, principalement. Aucune formation de suivi n'est donnée.
Beaucoup d'enfants n'obtiennent jamais justice. De toute évidence, cela entraîne des répercussions psychologiques, notamment sur la façon dont ils composeront avec ce qui leur est arrivé durant le reste de leur vie. C'est pire encore quand on sait que les plus vulnérables à l'exploitation sexuelle sont les enfants handicapés, dont ceux que l'on dit non verbaux ou qui ont une déficience intellectuelle. Dans la plupart des cas, les procureurs du ministère public renoncent à défendre les causes sous prétexte qu'il sera impossible de les porter devant les tribunaux.
Je trouve important de souligner que j'ai travaillé avec la police. J'ai enseigné pendant huit ans au Collège de la police de l'Ontario. J'ai collaboré à la mise au point du protocole d'entrevue avec les enfants du National Institute of Child Health and Human Development, ou NICHD, qui repose sur les connaissances développementales. Ce protocole est utilisé partout au Québec par les enquêteurs appelés à interroger des enfants. Comme j'ai analysé, littéralement, des milliers de descriptions que des enfants ont données de ce qu'ils ont vécu ou non, je peux affirmer que je comprends les répercussions psychologiques. Je ne pense pas qu'il soit nécessaire de vous expliquer à quel point elles peuvent être graves pour beaucoup de ces enfants.
Si nous abordons la question dans le contexte de l'ère numérique, force est de constater que tout est beaucoup plus complexe et plus sérieux. Un enfant peut être exploité pendant des années, qu'il y ait ou non des interventions juridiques. Quoi qu'il en soit, il a peut-être eu la possibilité de suivre une thérapie ou il est passé au travers par lui-même, ou il a essayé de comprendre sa situation familiale — qui vit avec lui, qui est parti, ce genre de choses. Prenons l'exemple d'un enfant qui été victime d'exploitation sexuelle, qui est maintenant un adolescent, une jeune personne ou un adulte, qui a peut-être des enfants lui-même, et qui se fait dire par un inconnu: « On se connaît? J'ai l'impression de t'avoir vu quelque part. » Pouvez-vous imaginer ce qui se passe alors dans la tête de cette personne, qui sait que des photos embarrassantes la représentant nue, dans des positions sexuelles compromettantes, ont circulé dans Internet à Dieu sait combien de reprises?
La propagation de ces photos est l'oeuvre d'un réseau clandestin, qui transmet du matériel seulement à ses membres qui fournissent leur propre matériel en échange.
C'est pourquoi des pères, des oncles, des grands-pères filment des actes sexuels auxquels participent des enfants qui sont sous leur responsabilité. Leurs vidéos peuvent montrer comment pénétrer un enfant de huit ans, ou ce genre de trucs. Je vous épargne les détails parce que je sais ce qui se passe quand une image comme celle-là entre dans notre cerveau. Je pourrai donner plus de détails tout à l'heure, si vous le souhaitez.
Ces crimes sont très graves. Cet enfant a peut-être entrepris une démarche pour retrouver son équilibre psychologique, ce qui est déjà tout un défi, mais il se retrouve encore coincé dans l'engrenage lorsque des photos refont surface ou que la personne qui les a fait circuler est poursuivie, parce que la victime doit être avisée.
Ce que je tente d'expliquer, c'est que le traumatisme infligé n'est pas figé dans le temps. Le cauchemar ne se limite pas aux moments où les enfants se rappellent ce qu'ils ont subi. Il dure toute leur vie. Leur estime de soi est atteinte, et toutes leurs tentatives pour définir leur identité personnelle à l'adolescence et nouer des relations affectives seront perturbées parce que l'exploitation est généralement commise par une personne connue. Souvent, l'agresseur est un membre de la famille, un beau-parent ou un autre proche. Les ravages qui perdurent jusque dans leur vie d'adulte coûtent extrêmement cher au Canada.
Il faudra poursuivre les recherches, car ce phénomène est encore récent et les conséquences réelles restent à découvrir. Des problèmes comme la dépression, la longue attente pour l'obtention de soins de santé, le financement insuffisant des services de santé privés, les années de démêlés avec la justice, l'absentéisme au travail, le nombre accru de travailleurs non qualifiés — parce que beaucoup de victimes ne peuvent tout simplement pas se concentrer pour étudier ou travailler —, tout cela coûte très cher à la société.
Je conclurai en disant que le problème dure toute une vie, et les conséquences aussi.
Merci beaucoup.
J'aimerais maintenant souhaiter la bienvenue à M. Neil Malamuth. Nous entendez-vous?
M. Malamuth est professeur en communications, en psychologie et en études féminines à l'Université de la Californie. Si j'ai bien compris, vous vous trouvez actuellement à Peoria, en Arizona. Est-ce exact?
Merci énormément de vous joindre à nous. Nous vous accordons 10 minutes pour présenter vos observations préliminaires, puis les membres du Comité vous poseront tour à tour leurs questions.
Merci de votre participation.
Merci de me donner l'occasion de partager avec vous certains des résultats de nos recherches.
Je collabore au programme de recherche dont je vais vous parler depuis une quarantaine d'années. Essentiellement, nous étudions les caractéristiques des hommes de la population générale qui sont plus susceptibles de commettre des actes d'agression sexuelle contre des femmes. Dans le cadre de nos recherches, nous avons mis au point un modèle que nous disons « de confluence » pour analyser les divers facteurs de risque et de protection pouvant expliquer pourquoi un individu sera plus enclin à commettre des agressions sexuelles.
En appliquant le modèle de confluence pour étudier l'interdépendance de facteurs multiples, nous avons dégagé ce que nous avons appelé des facteurs « primaires », ainsi que les facteurs secondaires. À l'intérieur de ce cadre général, nous avons étudié comment l'exposition à la pornographie peut accroître le risque de commettre des agressions sexuelles.
De manière globale, l'exposition à la pornographie est considérée comme un facteur secondaire. D'autres facteurs qui semblent avoir plus d'influence sont considérés comme primaires. Dans l'ensemble, nous avons constaté que l'exposition à la pornographie, particulièrement si l'accent est mis sur la pornographie non consensuelle — nous avons aussi étudié d'autres formes de pornographie et, plus récemment, la pornographie juvénile —, peut raviver ou activer des caractéristiques de risque latentes chez un individu, telles que révélées par certains facteurs primaires.
La conclusion générale donne à entendre que chez certaines personnes qui présentent un risque relatif élevé en fonction des facteurs primaires que nous avons étudiés, l'exposition à certains types de pornographie, et notamment à la pornographie non consensuelle et, dans certains cas, à la pornographie juvénile et à d'autres types de pornographie, met pour ainsi dire de l'huile sur le feu. Si le risque est déjà présent, alors l'exposition intensive à la pornographie peut augmenter considérablement la propension à adopter des attitudes de tolérance à la violence envers les femmes, voire des comportements sexuels agressifs dans certaines situations.
Parce qu'il est impossible de mener l'étude scientifique idéale, nous recourons à diverses méthodes. Évidemment, l'étude idéale serait contraire à l'éthique, puisqu'elle supposerait par exemple d'exposer un échantillon aléatoire de jeunes garçons à une grande quantité de matériel pornographique ou non pornographique, et de faire le suivi de leurs comportements sur plusieurs années. Étant donné le caractère non éthique et infaisable de cette démarche, nous combinons plusieurs types de méthodes, dont les enquêtes, les recherches en laboratoire avec distribution aléatoire, ainsi que des expériences de terrain qui comprennent également une certaine mesure de distributions aléatoires et des études longitudinales.
Dans une large mesure, les résultats de ces diverses méthodes complémentaires convergent vers le résultat suivant: si une personne présente déjà un risque relativement élevé, l'exposition à certains types de pornographie — et surtout, comme je l'ai déjà dit, si l'exposition est intensive — augmente le risque, de sorte qu'elle aura plus tendance à adopter des attitudes de tolérance à la violence contre les femmes et, dans certains cas, des comportements sexuels agressifs.
Je conclurai ici mes observations préliminaires. Je serai heureux de vous donner plus d'explications et de répondre à vos questions. Permettez-moi de préciser que le technicien qui doit s'occuper du matériel d'enregistrement n'arrivera pas avant une douzaine de minutes.
Merci beaucoup.
Merci à vous trois pour vos témoignages et votre venue à Ottawa, ou de participer depuis l'Arizona.
Selon le parrain de la motion, celui qui a saisi le Comité de la question à l'étude, le gouvernement fédéral devrait jouer un rôle de chef de file dans la gestion des effets de santé publique liés au contenu violent et sexuellement explicite avilissant dans Internet.
Monsieur Fisher, si j'ai bien compris votre témoignage, aucune étude ou preuve n'a démontré cette corrélation. Ai-je bien entendu ce que vous avez dit? Êtes-vous parvenu à la conclusion qu'il n'existe aucun effet sur la santé publique?
Comme l'a suggéré mon collègue, M. Malamuth, il n'existe pas d'études parfaites. La question préoccupe beaucoup de scientifiques, qui l'ont abordée de différentes façons. Il n'y a pas d'étude parfaite.
Dans mon exposé de 10 minutes, j'ai passé en revue plusieurs sources de données probantes. J'ai expliqué que les études corrélationnelles peuvent indiquer soit que la consommation de pornographie contribue à l'agressivité, soit que les personnes agressives aiment consommer de la pornographie. Nous avons notamment reproduit l'étude fondée sur le modèle de confluence évoqué par M. Malamuth.
Ainsi, les individus qui, au sens large, présentent des traits de personnalité antisociale et qui consomment plus de pornographie ont tendance à déclarer qu'ils commettent plus d'agressions contre les femmes. Le problème évident est qu'il s'agit d'une étude corrélationnelle qui ne permet pas de savoir ce qui cause quoi.
Comme je l'ai mentionné dans mon exposé, si nous ajoutons par exemple le paramètre de la libido masculine, l'incidence de la pornographie est tout simplement inhibée en présence de traits de personnalité antisociale. Il est clair que la science est loin d'avoir dit son dernier mot.
Tout ce que je peux dire, c'est que depuis 1995 environ, l'accès illimité à Internet a procuré à tous les Canadiens, hommes, femmes et enfants, une expérience naturelle incomparable sur un plateau d'argent, qu'ils aient des traits de personnalité antisociale, sociable, neutre, ou que sais-je. Comme je l'ai déjà souligné, nous avons étudié différents marqueurs possibles des répercussions. Ces données à l'échelle de la population ne peuvent pas nous dire ce qui se passe à l'échelon individuel, mais elles peuvent certainement nous éclairer, aux fins de l'élaboration de politiques, sur les répercussions de l'accès illimité à Internet au sein des populations canadiennes et américaines.
Notre examen des données révèle que les taux d'agressions sexuelles ont nettement reculé. Ces chiffres ne proviennent pas d'enquêtes sur les agressions sexuelles signalées à la police, mais d'enquêtes auprès des victimes. Il s'agit des résultats d'une surveillance active, que les États-Unis effectuent en continu depuis que la cyberpornographie existe. Les taux d'agressions sexuelles n'ont pas bougé au Canada. Nous avons aussi observé que l'activité sexuelle des adolescents canadiens n'a pas augmenté, qu'elle ne débute pas plus tôt, et qu'ils n'ont pas plus de partenaires. Le taux de divorces par milliers de Canadiens et d'Américains continue de diminuer. Et qui plus est, lorsque nous avons analysé des données représentatives à l'échelle nationale pour les États-Unis dans notre laboratoire, nous avons constaté une covariation ou une corrélation de la consommation de la pornographie avec des attitudes plus égalitaires.
De façon générale, le problème vient de la confusion dans les données probantes. Tout ce que je vous ai dit au sujet des données est fondé sur une étude publiée. C'est l'état de la situation.
Merci.
Après réflexion, j'estime que la question en est une de santé publique. Qui sont les plus vulnérables? Qui sont les plus à risque? Outre les personnes agressées sexuellement qui se retrouvent sur des images, il me semble que les enfants qui tombent accidentellement sur ce genre de matériel pornographique peuvent aussi être perturbés.
Mme Roberts, la question de l'exploitation sexuelle des enfants ne relève pas vraiment de notre comité. Ce qui nous intéresse, c'est l'effet sur la santé publique de l'exposition à du matériel sexuellement explicite violent ou avilissant dans Internet. Avez-vous recensé des données probantes ou reçu des témoignages sur cette question précise, sur ce que peut vivre un enfant qui tombe sur telles images ou qui y est exposé? Avez-vous reçu des témoignages qui porteraient sur cette question précise et non sur l'exploitation sexuelle en général?
Tout d'abord, il est difficile de départager l'exploitation sexuelle des enfants de la question à l'étude concernant les adultes, car les deux vont souvent de pair. Si un enfant subit de l'exploitation sexuelle dans une maison, sa mère sera très souvent victime d'une forme de violence, et seule cette violence pourra déclencher les poursuites contre l'agresseur de l'enfant.
Je voudrais clore rapidement ce volet.
Ma question portait surtout sur l'exposition accidentelle d'un enfant à du matériel sexuellement explicite violent et avilissant dans Internet. Avez-vous des commentaires à formuler sur les conséquences précises qu'un enfant peut subir après avoir vu ce genre de matériel?
Je n'ai jamais fait de recherche sur cette question. Cependant, j'ai lu les écrits d'autres chercheurs qui abordent ce sujet. Souvent, tout dépendra de l'identification de l'enfant au contenu. Si un enfant voit une victime de son âge dans Internet, par exemple, il sera beaucoup plus fortement impressionné et susceptible d'avoir peur, de ne pas se sentir en sécurité dans le monde.
Merci.
Messieurs Fisher et Malamuth, l'un de vous a-t-il quelque chose à dire concernant l'exposition accidentelle des enfants? Pourriez-vous nous indiquer des études, des recherches qui pourraient nous aider à mieux comprendre cette question précise?
Je n'ai jamais vu de recherche sur ce sujet. Des personnes m'ont souvent rapporté des exemples concrets d'enfants de leur famille qui avaient avait fait cette expérience, mais je n'ai pas vu d'étude systématique.
Puis-je revenir sur une remarque précédente de M. Fisher?
M. Fisher et moi, nous avons des interprétations assez éloignées de ce qui a été publié sur la question. J'aimerais commenter brièvement deux aspects dont il a parlé.
L'étude qu'il a dirigée et qui tient compte de la libido et du fait que ce paramètre inhibe l'incidence de la pornographie comporte une importante confusion, qui découle du fait que l'un des principaux éléments de la définition de la libido tient à la fréquence de la masturbation. Or, la masturbation est essentiellement pratiquée au cours du visionnement de matériel pornographique. Il est donc évident qu'une fois établi ce paramètre précis, les effets de la pornographie ou son rôle seront absorbés une fois que nous aurons divisé ces deux aspects dans une semi… [inaudible] … la rédaction du rapport sur les résultats et, en fait, on constate que la pornographie continue d'avoir un effet.
Par ailleurs, je tiens à souligner que les conclusions que j'ai citées ne sont pas tirées d'une étude unique. Il existe maintenant de nombreuses méta-analyses qui ont porté sur différentes méthodes appliquées, et qui résument toutes les études pertinentes, les méthodes d'entrevue et l'impressionnante panoplie d'études qui pointent vers la même conclusion. Mieux encore, M. Fisher a lui-même défendu, dans un article qui remonte à quelques années et dont je vous donnerai la référence avec plaisir, mes conclusions selon lesquelles certains individus sont plus antisociaux, et que leurs propensions peuvent effectivement être touchées, mais que la majorité des personnes qui ne le sont pas ne seront pas touchées.
De plus, M. Fisher a présenté des résultats de ce que nous appelons des études combinées, qui ne nous permettent pas, comme il l'a mentionné, de conclure que la hausse de la consommation de pornographie à l'échelle de la société ne semble pas avoir entraîné de hausse correspondante des crimes à caractère sexuel et autres phénomènes.
Les études combinées groupées soulèvent plusieurs réserves, c'est bien connu, parce que la société peut se transformer de plusieurs façons en même temps. Ainsi, on sait qu'au cours des 10 dernières années, le nombre d'armes à feu a explosé aux États-Unis — j'ai des données qui le démontrent —, mais que les taux de criminalité ont reculé assez nettement. C'est un phénomène connu, mais personne à ce jour n'a réussi à l'expliquer. Est-ce que nous pouvons conclure pour autant que la multiplication des armes à feu contribue à une baisse de la violence, pour telle ou telle cause, ou que cette multiplication n'a pas entraîné à un surcroît de violence? Selon moi, ce genre de raisonnement serait un peu tiré par les cheveux.
Comme je l'ai dit précédemment, personne ne prétend que la pornographie constitue une cause primaire de la violence sexuelle et que la croissance constante de la disponibilité de matériel pornographique se traduit forcément par une hausse de cette violence. À vrai dire, dans les affaires d'agressions sexuelles signalées à la police ou portées devant les tribunaux, les délinquants sont très souvent ce que nous appelons des généralistes, soit des individus antisociaux susceptibles de commettre toutes sortes d'actes illicites et antisociaux, mais qui ne sont pas forcément de purs délinquants sexuels.
Les groupes que nous avons étudiés, constitués d'hommes de la population générale, sont plus souvent des spécialistes. Comme je l'ai déjà dit, les données indiquent que pour la majorité d'entre eux, l'exposition à la pornographie n'a pas véritablement d'incidence sur leurs attitudes agressives ou leurs tendances et leurs comportements sexuellement agressifs. Toutefois, dans un sous-groupe important dont les sujets présentaient déjà un risque relativement élevé, les données indiquent très clairement — ce qui cadre, comme je l'ai mentionné, avec les propos de M. Fisher dans ses écrits antérieurs et les résultats de notre propre modèle de confluence — que l'exposition à certains types de pornographie peut accroître le risque.
Pour revenir à votre question concernant l'exposition accidentelle, comme je l'ai indiqué tout à l'heure, je n'ai jamais vu de rapport de recherche publié à ce sujet. C'est une expérience assez fréquente, et je pourrais vous donner des exemples concrets qui m'ont été rapportés par des collègues et d'autres personnes que j'ai rencontrées.
Merci, monsieur le président.
Et merci à nos invités. Votre participation est grandement appréciée.
Si vous voulez poursuivre avec un exemple concret ou une anecdote, ce serait très bien.
J'ai quelques anecdotes. Par exemple, la fille d'une collègue de la faculté de droit a été inondée de contenu pornographique alors qu'elle faisait des recherches sur le livre Little Sisters, ou « petites sœurs » dans Internet. Sa fille a neuf ans.
Une de mes élèves de deuxième cycle m'a raconté que son fils, qui lui aussi faisait des recherches dans Internet, est tombé sur du matériel pornographique extrêmement violent, apparemment sans raison.
Les exemples de ce type ne manquent pas. Les gens savent que je fais de la recherche dans ce domaine et ils abordent souvent le sujet avec moi, ou ils y font allusion. C'est le genre de témoignages personnels que je reçois.
Je vis la même chose. Dans le contexte canadien, il semblerait que l'âge moyen de la première exposition se situe autour de neuf ans, et qu'elle est généralement accidentelle, comme dans les deux cas que vous avez cités. Merci.
Monsieur Fisher, selon les corrélations présentées par Peter Silverstone, de l'Université de l'Alberta, les cas d'exploitation sexuelle des enfants auraient augmenté de plus de 300 % dans les deux dernières années. Nous savons qu'aujourd'hui, 1 fille sur 6 et 1 garçon sur 12 sont victimes d'exploitation sexuelle. C'est énorme. Si tous les types d'exploitation sexuelle sont combinés, y compris l'exposition à la pornographie et à d'autre matériel à caractère sexuel, la proportion des jeunes victimes grimpe à une fille sur trois et un garçon sur quatre.
Pensez-vous que l'exposition des enfants à du matériel sexuellement explicite représente une forme d'exploitation sexuelle? Et pensez-vous que nous devons prendre des mesures pour contrer ce phénomène?
Vous me demandez si l'exposition des enfants à la pornographie est une forme d'exploitation sexuelle. Le contexte fait foi de tout. Si un rôdeur utilise la pornographie pour leurrer quelqu'un ou si une personne qui fréquente les arénas — j'ai trois enfants qui fréquentent les arénas, que je surveille de très près — est attirée... Il s'agit d'un élément constitutif d'une infraction criminelle et d'un acte d'exploitation.
Malheureusement, le risque qu'un enfant tombe accidentellement sur du contenu pornographique quand il fait des recherches dans Internet pour rédiger un compte rendu de livre est le prix à payer pour vivre dans l'ère numérique. Quand mes enfants regardent les nouvelles, ils voient aussi des images aussi désolantes que les attaques chimiques en Syrie.
Pour ma part, je m'en tiendrais aux cas flagrants d'exploitation criminelle. Dans le matériel dont ma collègue a parlé, il est clair que l'exploitation sexuelle des enfants est criminelle. Il est clair que la production et la possession de matériel de pornographie juvénile sont criminelles, autant que l'utilisation de la pornographie pour leurrer, l'exposition forcée d'une personne non consentante et l'incitation. Il faut diriger notre attention vers la nature criminelle de ces actes, et non sur leur caractère pornographique en soi. Pour ce qui est de savoir si un enfant qui tombe accidentellement sur du matériel pornographique est victime d'exploitation sexuelle, j'attendrais de voir si des conséquences très négatives s'ensuivent.
Le débat sur l'exposition des enfants à la sexualité est imprégné de la pensée freudienne, aujourd'hui vastement critiquée. Freud a parlé abondamment de la scène primitive et des préjudices subis par l'enfant qui voit maman et papa faire l'amour. Nous savons maintenant que c'est une expérience assez commune, jusqu'à ce que vous mettiez un cadenas sur la porte, et qu'elle n'est pas uniformément préjudiciable.
Concernant ce que mon collègue, M. Malamuth, a dit, il est vrai que j'ai écrit un article au début de l'ère numérique dans lequel je disais « Un instant! », parce que je suis un scientifique ouvert d'esprit et un sceptique. Dans mon exposé, j'ai parlé de ce que la science peut nous dire ou non. Oui, j'ai écrit un article où je disais que la cyberpornographie était peut-être différente. C'est à cause des travaux de M. Malamuth que j'ai dit qu'un individu, selon qu'il a une personnalité sociable, antisociale ou que sais-je, peut choisir du matériel dans Internet qui renforce ces traits. Il se peut qu'Internet soit différent à cause de l'éventail infini de matériel qu'il propose et qui peut trouver un écho chez des personnes méchantes. Toutefois, jusqu'ici, je n'ai rien trouvé qui me le prouve.
Dans une optique d'ouverture, j'ai dit que c'était plausible. Si c'était plausible et reflété par des hausses importantes des taux d'agressions sexuelles — révélés non pas par les rapports de police, mais par les enquêtes de Statistique Canada sur la victimisation, dans lesquelles les agressions sexuelles sont définies très largement, allant des attouchements non sollicités aux baisers et à des comportements beaucoup plus violents —, alors je dirais que j'ai écrit cet article au début, que le modèle de confluence pourrait progresser dans Internet, et qu'il s'agit d'une possibilité plausible. Mais je n'ai pas vu les données.
Les questions concernant l'exposition des enfants, ou de toute nature, les anecdotes de tout acabit et les expériences cliniques tous azimuts doivent nous inciter à mener des recherches globales systématiques. J'aimerais bien avoir la réponse à votre question.
Madame Roberts, avez-vous autre chose à ajouter? Avez-vous eu connaissance de cas d'exploitation sexuelle d'enfants par des enfants?
C'est très difficile à dire. Jamais nous n'avons accès à la totalité des données utilisées pour une étude épidémiologique. Notre seule source d'information sont les personnes qui disent avoir été exploitées. Cela ne signifie pas que des personnes qui n'ont pas participé à l'étude n'ont pas été victimes d'exploitation. Il est fort probable que nous sous-estimions le nombre d'enfants qui sont victimes d'exploitation.
J'ajouterai que, selon moi, la question n'est pas de savoir si un enfant qui voit de la pornographie est victime d'exploitation sexuelle. L'important est de déterminer si cet enfant subit des préjudices. Criminalité et préjudice ne vont pas forcément de pair.
Je m'inquiète de la banalisation. Les enfants apprennent les normes que se donne la société. Il leur faut des années pour y parvenir. Tout commence par les parents, puis l'école prend le relais, les pairs, et ainsi de suite. Surtout à l'adolescence, la connaissance des normes joue un rôle central dans le développement de l'identité. Tous les adolescents veulent faire partie des cools. Le groupe des pairs a beaucoup d'influence à cet âge.
Il est devenu banal pour des enfants d'afficher leurs propres photos — et je peux vous assurer que c'est extrêmement courant. Je suis préoccupée de savoir que toutes les filles en viennent à trouver normal d'afficher des photos d'elles-mêmes en bikini alors qu'elles ne sont pas à la plage. Ce n'est qu'un exemple. Cela devient la norme. À mon avis, les répercussions sont beaucoup plus larges. L'important n'est pas ce qu'ils ont vu à un moment donné, qu'il y ait eu ou non des préjudices. Ce qui compte, ce sont les répercussions sur le restant de leur vie, sur la façon dont ils se voient eux-mêmes, dont ils voient les femmes.
Sans vouloir vous manquer de respect, je tiens tout de même à souligner que la plupart d'entre vous êtes des hommes. Les femmes sont peu nombreuses. Elles jouent très souvent les adjointes dans les fonctions administratives, elles sont journalistes, ou ce genre de métiers. Cependant, les principaux joueurs à la table sont des hommes. Je ne vais pas me lancer dans un discours féministe, mais je pense que lorsque des enfants ont été socialisés de cette façon et que des femmes qui ont été des victimes essaient de faire leur place sur le marché du travail, la confiance requise leur manque. Elles n'arrivent pas à croire qu'elles seront traitées d'égales à égales par les mâles. Selon moi, le coût est énorme. Cette situation a des conséquences néfastes.
Merci, monsieur le président, et merci à tous nos témoins.
Si je repense au dernier Parlement, j'ai l'impression que nous faisons de la « psychologie engagée », du bon boulot de la part de l'actuel Parlement.
J'aimerais poursuivre sur le dernier thème abordé par Mme Roberts et interroger M. Malamuth sur, l'un des thèmes de la présente étude, celui des effets sur la santé publique de la violence en ligne, de la présentation de matériel sexuellement explicite pour les enfants, les femmes et les hommes. Que nous révèle la recherche relativement aux effets du matériel pornographique violent et avilissant sur les femmes?
La recherche s'est peu penchée sur les effets pour les femmes, probablement parce qu'il s'agit d'un domaine assez pointu. Je suis probablement le chercheur le plus prolifique en la matière. Voilà bien des années, j'ai passé des entrevues à l'Université du Manitoba et le président de l'époque, John Adair, m'avait pris à part pour me dire qu'il serait ravi de me compter dans son équipe et que je pourrais faire toutes les recherches que je souhaitais. Cependant, en sous-texte, il tentait de me dire qu'en tant qu'homme, je serais dans le pétrin et lui aussi si jamais je m'intéressais à des sujets féminins. Il m'a demandé de lui rendre service, sans aller jusqu'à me l'imposer, et de m'abstenir de mener des études axées sur les femmes.
Il existe quelques études, mais, proportionnellement, elles sont assez rares. Je dois dire que j'ai bien tenté d'amener des étudiantes de deuxième et troisième cycles à s'investir dans ce champ de recherche. La plupart ont refusé parce que l'exposition à la pornographie violente s'avérait trop troublante pour elles.
Je vous interromps ici, monsieur Malamuth. Vous avez répondu à ma question et mon temps est compté.
Monsieur Fisher, vous avez parlé des recherches menées sur les effets de la pornographie. Je vais revenir sur la distinction entre simple pornographie et pornographie violente et avilissante, mais pas maintenant.
Apparemment, beaucoup d'études tentent d'établir un lien entre la pornographie, peu importe le type, et les agressions sexuelles. A-t-on étudié l'incidence du visionnement de matériel pornographique violent et avilissant sur la santé mentale et les relations en général? Je pense notamment à la capacité d'attachement, d'avoir une vie sexuelle saine, peu importe la définition qu'on lui donne, et à l'attitude des hommes à l'égard des femmes, de manière générale et non sous l'angle des agressions sexuelles.
Votre question porte sur la pornographie violente. Le premier point que je voudrais souligner — et je pense que M. Malamuth et mes autres collègues acquiesceront — tient au fait que dans ce domaine de recherche, il n'existe pas de définition unique de la pornographie. Au contraire. Une recension récente de 42 études a révélé qu'aucune d'entre elles ne définissait la pornographie de la même façon. C'est le premier point, qui constitue une contrainte dans notre champ de recherche. Une autre contrainte, encore plus grave et qui se rapporte directement à votre question, a trait à l'extrême rareté des travaux sur la pornographie violente.
J'aurais ajouté quelques commentaires. Dans son mémoire de thèse, un de mes étudiants diplômés, Tony Bogaert, maintenant professeur principal au Canada, explique qu'il a demandé à de jeunes hommes de dire quel type de pornographie ils aimeraient voir traiter dans le cadre d'une étude de recherche. Le choix le moins commun était la pornographie violente. C'est le choix le moins populaire en général, sauf peut-être auprès de personnes présentant des traits de personnalité antisociale. Très peu d'études ont été faites à l'extérieur des études de laboratoires ayant créé de la pornographie violente.
Dans l'étude dont M. Malamuth et moi-même avons parlé et dont l'un des paramètres était la libido, nous avons constaté que les hommes dont la libido est très forte avaient en fait plus tendance à consommer de la pornographie violente. Dans l'étude sur les couples, menée auprès de 700 personnes, aucun commentaire n'a été recueilli sur la pornographie violente. Je rappelle que toutes les questions étaient ouvertes, et que les commentaires reçus se comptent par milliers. Bref, c'est un domaine de recherche qu'il faut explorer.
Nous savons que l'exposition des femmes et des hommes à de la pornographie non violente entraîne généralement une légère hausse des activités sexuelles qu'ils pratiquaient déjà avec leur partenaire ou en solo. Nous savons, dans la foulée des recherches en laboratoire de Meredith Chivers, de l'Université Queen's, qu'autant les femmes que les hommes sont excités par la pornographie non violente. Nous savons, d'après la thèse non publiée de Wendy Stock, que les femmes sont excitées sexuellement lorsqu'elles visionnent du matériel pornographique comportant des scènes de viol, malgré leur dégoût. Nous disposons de très peu de données précises sur les réactions hors des études de laboratoire, les études expérimentales. Il faut pousser les recherches dans ce domaine.
J'abonde tout à fait dans le sens de ma collègue quand elle affirme que la question posée n'est pas tout à fait la bonne. Comment les femmes sont-elles affectées? Personne ici ne semble en mesure de répondre à cette question.
J'aimerais terminer avec vous, madame Roberts, mais j'aimerais aussi poser une dernière question à M. Malamuth
Vous avez soulevé la dimension éthique de la recherche. À l'évidence, il est impossible de constituer un groupe témoin d'enfants qui serait exposé à de la pornographie violente et avilissante, et suivi sur plusieurs années, comme vous l'avez mentionné. Au vu de cette contrainte, pourra-t-on un jour obtenir une preuve scientifique de l'incidence de la pornographie violente et avilissante sur les enfants?
Dans le domaine scientifique, il n'est jamais possible de prouver quoi que ce soit, mais nous pouvons recueillir des données à l'appui d'une hypothèse. En l'occurrence, M. Fisher et moi-même sommes en désaccord sur le poids à donner à la preuve parce que, avec mes collègues, nous avons publié une vingtaine d'études au moins sur la pornographie violente. Certaines ont été menées en laboratoire, mais pas toutes. Par contre, M. Fisher et moi nous entendons sur le fait que quand les recherches sont menées dans un contexte naturel, dans le monde réel, les sujets ne visionnent pas seulement de la pornographie violente ou non violente. Le départage est difficile. On pourrait dire que les personnes qui, de manière générale, consomment plus de pornographie, de la pornographie plus extrême, une partie du contenu visionné sera violent. La Cour suprême du Canada a cité notre recherche et d'autres dans le fameux arrêt Butler, qui milite pour une réforme législative. En fait, la Cour affirme que la preuve est suffisante pour affirmer que la pornographie violente a bel et bien des effets qui devraient préoccuper les Canadiens pour ce qui a trait aux attitudes à l'égard des femmes et à a violence à leur endroit, du moins potentielle.
Je dois vous interrompre de nouveau parce que je tiens à poser une dernière question rapide à Mme Roberts.
Apparemment, les enfants reproduisent intuitivement les comportements d'autrui. Les enfants battus sont plus à risque de battre leurs enfants à leur tour. Ceux qui grandissent dans un foyer où les parents fument auront plus tendance à fumer. C'est une question d'intuition. Je comprends les questions de causalité, de corrélation, les problèmes de définition, tous ces aspects. Toutefois, peut-on raisonnablement faire l'hypothèse que des adolescents ou des enfants qui sont exposés régulièrement à de la pornographie violente ou à des images qui, nous en conviendrons tous — à supposer que ce soit possible —, sont avilissantes seront plus enclins à penser qu'il s'agit de comportements normaux? Cette exposition risque-t-elle d'interférer avec leur développement psychosexuel et social, à cause de l'intuition? Pouvons-nous tirer cette conclusion?
Il peut s'agir d'un type quelconque d'image dite dérangeante, par exemple une image d'agression physique qui est vue par des enfants.
Mille et une études ont été menées sur ce type d'images dans les années 1980 et 1990, époque où la principale source d'inquiétude était la télévision. Plus une image est vue souvent, plus elle perd de sa force. La désensibilisation fait en sorte qu'elle devient banale.
Sur le plan des processus psychologiques, oui, je serais portée à croire qu'une personne souvent exposée peut en venir à penser que ces comportements sont normaux. Elle aura besoin de voir des choses de plus en plus avilissantes pour obtenir le même plaisir.
[Français]
Merci, monsieur le président.
Je remercie les témoins de nous livrer leur témoignage sur ce sujet.
Une des choses qui ressort de vos témoignages est qu'il serait naïf de penser qu'il n'y a aucune influence de quoi que ce soit dans notre société. Lorsqu'on est exposé à quelque chose, il y a certainement une influence. L'influence peut être positive ou négative et avoir des répercussions sur la vie réelle ou la vie virtuelle. Présentement, on discute de la disponibilité de la pornographie sur Internet. L'éducation, la culture, la liberté et même la religion ont une influence sur les critères d'appréciation de ce qu'on peut découvrir sur Internet en termes de pornographie.
Je me pose cette question: y a-t-il une pornographie légale et une pornographie illégale? Je pense que oui. Peut-on donner un ranking, un classement, en ce qui a trait à la facilité d'accès à la pornographie ou à la disponibilité de celle-ci sur Internet? Je n'ai pas fait le test et je ne suis pas allé aussi loin que d'aller voir des choses qui pourraient être potentiellement illégales. Mais est-ce que c'est disponible? Peut-être.
Il est difficile d'avoir des études qui prouvent jusqu'à quel point le fait de regarder de la pornographie sur Internet a une incidence sur les gens, et je serais intéressé à poursuivre dans ce sens.
Madame Roberts, vous avez parlé tout à l'heure du nombre de femmes et d'hommes qu'il y a autour de la table ou dans la salle. Je serais curieux de savoir combien de personnes dans cette salle ont déjà vu de la pornographie sur Internet et quelle influence cela a eu sur elles. Quelles conséquences cela a-t-il sur notre vie? J'irais même plus loin. Je vais laisser les éminents scientifiques et professeurs présents répondre à cela. Le fait d'étudier, de participer à ces études et de voir plus de pornographie que le commun des mortels a-t-il une influence sur votre comportement? Cela peut-il aussi avoir une influence sur le comportement des gens qui sont à l'étude?
Y a-t-il une pornographie légale, une pornographie illégale?
Madame Roberts, vous pouvez peut-être répondre en premier.
[Traduction]
Je ne suis pas certaine d'avoir bien compris la question
Voulez-vous savoir s'il existe différents degrés de préjudices attribuables à la pornographie plus extrême, ou à la pornographie plus légale ou illégale?
La pornographie existe, et il existe un système de cotation du type de pornographie qu'une personne peut visionner sur Internet.
Je veux savoir s'il existe des formes légales de pornographie, ou si toute la pornographie est illégale. Peut-on avoir accès à de la pornographie illégale? Et quel effet ou quelle incidence le visionnement de matériel pornographique a-t-il sur l'ensemble de notre comportement?
C'est un sujet multidimensionnel.
Tout d'abord, mes travaux portent sur du contenu pornographique qui n'est pas accessible à la plupart des gens. Il circule sur le Web invisible, de façon très clandestine. Pour trouver ce matériel, il faut savoir exactement où aller. C'est une communauté mondiale.
Comme je l'ai dit, il existe des règles. Par exemple, pour obtenir du matériel pornographique, il faut aussi en fournir. Les utilisateurs peuvent téléverser des photographies, des images ou des vidéos d'eux-mêmes, ou en créer d'autres.
Oui, c'est illégal.
Pour ce qui est de la pornographie légale, je ne peux pas répondre à la question. Je ne sais pas ce qui peut être qualifié de légal ou d'illégal. Comme mes collègues l'ont dit, il est extrêmement difficile de trouver une définition de la pornographie. Je ne sais pas s'il existe des lignes directrices sur ce qui est légal et ce qui ne l'est pas. Peut-être mes collègues seront-ils mieux placés que moi pour répondre à la question.
Je voulais parler d'une autre dimension, mais j'ai oublié. Comme le temps est compté, je vais passer la parole à mon collègue.
Effectivement, comme je l'ai mentionné précédemment, le Canada a tenté, dans la foulée de l'arrêt Butler et d'autres jugements qui ont suivi, de tracer une démarcation entre ce qui est légal et ce qui ne l'est pas, la violence étant le principal critère de l'illégalité, et tout le restant étant perçu comme légal. Bien entendu, tout ce qui touche de près ou de loin à la pornographie juvénile est illégal.
Les tribunaux canadiens ont déjà eu à trancher des affaires de pornographie violente, mais les poursuites sont aujourd'hui très rares parce qu'elles sont devenues quasiment impossibles. Dans Internet, il suffit d'entrer des mots clés comme viol ou forcée pour avoir accès à une pléthore de contenus pornographiques violents. Les poursuites sont devenues quasiment impossibles si l'on compare à quelques années en arrière, alors que le Canada se concentrait surtout sur la pornographie violente en provenance des États-Unis. Bref, une grande partie de ce qui techniquement est illégal au Canada ne déclenche plus de poursuites.
Les États-Unis ne font pas cette distinction. Toute la pornographie, violente ou non, est légale. Si vous tapez des mots précis, vous aurez accès à tous les types de pornographie imaginables sur des sites courants et ouverts, sauf la pornographie juvénile. Celle-ci, comme je l'ai dit, se trouve dans un monde clandestin réservé aux initiés. Mais dans les sites les plus courants de vidéos, dont je peux vous donner les noms — en fait, je devrais peut-être vous les donner —, il suffit de taper le mot anglais forced, « forcée », pour obtenir des centaines de scènes de viols. Ce n'est plus… [inaudible]
M. Fisher a évoqué le travail de ses anciens étudiants diplômés sur l'attrait pour ce type de pornographie. Cependant, une étude publiée de Boeringer et celles d'autres chercheurs montrent bel et bien qu'une minorité appréciable d'hommes de la population générale sont sexuellement excités par la pornographie violente en particulier — le meilleur prédicteur de risque individuel. Aucun prédicteur de risque n'étant suffisant ou très précis à lui seul, il faut en analyser six ou sept. Cependant, si un seul de ces facteurs devait être choisi, l'excitation sexuelle provoquée par des images sexuelles violentes indiquerait la plus forte corrélation avec la commission réelle d'agressions sexuelles.
Merci.
Nous passons maintenant aux tours de questions de cinq minutes, en commençant par Mme Harder.
Ma première question s'adresse à Kim Roberts. À votre avis, quel lien faut-il faire entre la pornographie violente ou la violence dans le matériel pornographique et les cas d'agressions sexuelles contre des femmes et des jeunes filles, mais particulièrement contre des enfants, puisque c'est votre champ d'expertise?
À cause du réseau clandestin de pornographie dont j'ai parlé et qui oblige les utilisateurs à fournir leur propre matériel, ceux qui n'en ont pas doivent en créer. Dans les faits, lors de mes discussions avec les policiers que je forme, des travailleurs sociaux et des médecins urgentologues, j'ai l'impression que j'entends plus fréquemment parler de gens qui exploitent leurs propres enfants. Dans la plupart des cas, leurs victimes sont leurs propres enfants, qu'ils utilisent pour produire le matériel qu'ils doivent fournir pour obtenir d'autre contenu pornographique pour leur usage personnel.
[Difficultés techniques]
Désolée, avez-vous terminé?
Mme Kim Roberts: Oui.
Mme Rachael Harder: J'ai étudié différentes statistiques, et je sais que nous sommes au Canada, mais je crois que les chiffres suivants pourraient s'appliquer ici. Aux États-Unis, le FBI a déclaré que du matériel pornographique a été trouvé dans 80 % des scènes de crimes sexuels violents — 80 %. Je comprends ce que vous dites, monsieur Fisher, concernant la corrélation et la causalité. J'ai moi-même fait de la recherche, à titre de sociologue. Cependant, je vois mal comment on pourrait expliquer ce taux de 80 % sans y trouver de lien de cause à effet. Pourriez-vous commenter cette statistique américaine, publiée par le FBI, selon laquelle du matériel pornographique est trouvé dans 80 % des scènes de crime sexuel?
Je vais commencer, veuillez m'en excuser, par une question. Quel pourcentage d'étudiants universitaires du premier cycle consomment de la pornographie sur une base quotidienne ou hebdomadaire?
Ils sont au moins 80 %. Ce constat n'est donc pas remarquable. Le taux de base des hommes non violeurs qui consomment de la cyberpornographie est extrêmement élevé, mais il l'est aussi chez les délinquants sexuels.
La seconde question est de savoir si les délinquants sexuels qui présentent divers traits de personnalité antisociale, par exemple, sont attirés par la pornographie et la criminalité à caractère sexuel, ou s'il s'agit d'une association fallacieuse. Ce lien existe, mais il n'est pas causal.
La meilleure preuve que je puisse vous offrir, toujours dans un esprit scientifique systématique, est que de nombreuses études sur les délinquants sexuels déclarés coupables, contrairement à ce que le FBI affirme, révèlent qu'ils consomment moins de pornographie que d'autres sujets de leur groupe de référence. Que le facteur soit causal ou non, je ne saurais le dire. Je l'ignore pour ce qui concerne ces situations précises. Ce que je peux dire, c'est que le taux de base de la consommation de pornographie dans le groupe des jeunes hommes qui est représentatif des délinquants sexuels, du moins sur le plan de l'âge, est très élevé. De plus, les études systématiques tendent à indiquer que les délinquants sexuels ne se distinguent pas des autres pour ce qui est de la consommation de pornographie.
Je souligne également que les taux généraux d'agressions sexuelles n'ont pas augmenté depuis la généralisation de l'accès à la pornographie.
Neil, pensez-vous que le gouvernement devrait investir plus dans la recherche sur l'incidence de la pornographie violente sur la façon dont les hommes et les garçons agissent envers les femmes?
Nous sommes toujours ravis lorsque les budgets de recherche augmentent.
Je dois dire qu'il est aujourd'hui beaucoup plus difficile de conduire des études expérimentales à cause des commissions d'éthique. Comme elles font confiance à nos conclusions, disent-elles, elles ne veulent pas que des hommes à risque soient exposés à du matériel pornographique violent. Nous sommes dans une impasse. Cependant, pour ce qui est des enquêtes et d'autres types d'études, oui, la poursuite des recherches est toujours valable, même si nous ne pouvons pas constituer un échantillon aléatoire qui sera exposé à du contenu pornographique.
Encore là, et au risque de m'opposer trop souvent à mon estimé collègue, M. Fisher, je ne suis pas d'accord pour associer corrélation et causalité, loin s'en faut, mais je ne connais pas la statistique du FBI que vous avez mentionnée. Toutefois, les recherches sur les violeurs et les autres délinquants sexuels montrent qu'ils n'ont pas été moins exposés à la pornographie. Ils y ont été exposés plus souvent et à un plus jeune âge et, surtout, ils déclarent y être plus sensibles.
Selon les résultats de nos recherches, et moyennant une confluence de facteurs, des personnes exposées à la pornographie peuvent ne pas en être affectées du tout, ou tout simplement être portées à se masturber. Dans un certain contexte, ces personnes peuvent même éprouver plus de désir sexuel à l'égard de leur partenaire. Par contre, chez d'autres personnes présentant des facteurs de risque, la même exposition peut avoir un effet tout autre et exacerber leurs tendances antisociales. C'est l'élément pivot de nos conclusions — par conséquent, l'intensité de l'exposition n'est pas l'élément déterminant.
Les premières études de Goldstein et collaborateurs, auxquelles M. Fisher a fait référence je crois, ainsi qu'une panoplie de recherches ultérieures ont constaté que les délinquants sexuels ont souvent été exposés à plus de pornographie à un plus jeune âge. Ils en ont été plus affectés et, durant leur vie, l'exposition tend à être non pas moins, mais plus importante, contrairement à ce que l'on croyait. Toutefois, les études systématiques qui font une méta-analyse de différentes recherches, dont je serai ravi de vous donner les références, révèlent que l'exposition à la pornographie est plus importante chez les délinquants sexuels, et davantage chez les délinquants sexuels violents.
De nouveau, je précise que cela ne prouve pas qu'il y ait un lien de causalité. Je conviens avec M. Fisher que les nombreux étudiants universitaires, la majorité en fait, qui consomment régulièrement de la pornographie ne sont pas affectés de la même manière. Par contre, chez ceux qui présentent des tendances antisociales marquées, si l'on en croit les recherches, la consommation de pornographie peut renforcer et canaliser ces tendances.
Merci à vous tous de vous être joints à nous.
Ma première question sera pour vous, madame Roberts, parce que vous êtes spécialisée dans l'enfance et la mémoire chez les enfants. Le 23 mars dernier, nous avons entendu le témoignage de Mme Gahagan, de l'Université Dalhousie. Elle a fait ressortir la nécessité d'adopter une stratégie de promotion de la santé sexuelle pour mieux outiller les enfants, les enseignants et les parents, en particulier en raison du risque d'exposition accidentelle.
À votre avis, avons-nous besoin d'une stratégie nationale de promotion de la santé sexuelle et d'éducation à cet égard?
Ce serait une excellente idée. Toutefois, rappelez-vous qu'une bonne partie de l'éducation sexuelle donnée aux enfants a été retirée du programme scolaire à cause des pressions de parents inquiets, entre autres. Je sais que ce volet fait toujours partie du programme ontarien, celui que je connais le mieux. On insiste beaucoup sur la responsabilité des enfants à l'égard d'Internet. Par exemple, on leur explique que leur page existera toujours, qu'il faut faire attention à ce qu'ils affichent, ce genre de choses.
Malheureusement, les résultats sont nuls. Cette éducation n'a eu aucun effet.
Est-il possible que certains des bénéfices que pourrait avoir ce type d'éducation sont compromis parce que beaucoup de parents ne permettent pas à leurs enfants d'y avoir accès?
C'est tout à fait possible. Si l'enseignement ne provient pas d'une source crédible comme les parents, les enseignants ou quiconque est qualifié pour donner cette éducation, les enfants apprennent toutes sortes de choses à travers les branches, qui ne sont pas toujours vraies. Des adolescentes viennent me dire qu'elles ont pris deux pilules parce qu'elles avaient fait l'amour deux fois dans une soirée. C'est le genre de choses qu'ils apprennent. Ils s'éduquent à coups de rumeurs et d'information déformée.
Donc, pour répondre à votre question, je pense effectivement qu'une réflexion s'impose sur la manière d'outiller nos enfants. C'est difficile parce que seule l'expérience permet de développer les aptitudes requises. Il faut apprendre à mettre les choses en perspective. Quand on publie impulsivement du contenu dans Snapchat, et c'est pire encore dans Facebook — on apprend avec l'expérience que ce contenu ne disparaît jamais. C'est vrai dans les cas extrêmes, mais c'est vrai aussi pour de petites choses comme l'expression d'une opinion politique. Ces petits gestes peuvent revenir hanter une personne plus tard dans sa vie.
Cette mise en perspective est très difficile. Je pense que cette difficulté tient au fait que nous entrevoyons toujours la mise en perspective sous l'angle de l'opposition entre l'opinion de l'autre et la mienne, alors qu'elle doit aussi s'inscrire dans une chronologie. Mettre les choses en perspective, c'est réfléchir à ce qui se passe maintenant, mais aussi à ce qui adviendra dans 10 ou 20 ans. Selon moi, c'est cet aspect que les enfants n'arrivent pas à saisir.
Je comprends. Merci.
J'aimerais citer de nouveau Mme Gahagan, à qui la même question a été posée. Comme vous, nous pensons aussi que c'est un problème. Mme Gahagan nous a dit que cette éducation ne devrait pas être facultative, parce qu'elle concerne une importante question de santé publique. Il faut mettre cette matière sur le même plan que les mathématiques. Le cours de mathématiques n'est pas facultatif. Le cours d'anglais non plus, ni celui d'histoire.
Le problème est-il assez grave pour que cette éducation devienne obligatoire?
J'ai beaucoup de difficulté à répondre à cette question. Il existe tellement d'opinions divergentes, dont certaines sont fondées sur des valeurs culturelles. Les parents ont toutes sortes de raisons d'agir ainsi. À mon avis, c'est une question qui touche à la santé, au développement sanitaire, au respect et à la protection de soi-même, au même titre que tout autre aspect de la santé. C'est aussi une question de responsabilité envers soi-même.
Très bien. Merci.
Monsieur Malamuth, je vois dans les références un article intitulé « The Importance of Individual Differences in Pornography Use ». Vous parlez de l'influence des médias plus larges, du matériel qui n'est pas sur le Web, mais plutôt à la télévision et dans les magazines. Y a-t-il des incidences sur les médias sociaux plus larges? L'exposition ne serait-ce qu'à la suggestion de ce matériel violent et avilissant est-elle suffisante pour que l'on présume que les enfants pourraient être affectés?
J'essaie de me concentrer sur ce que je peux affirmer en connaissance de cause, en me fondant sur des résultats de recherche. Il est très difficile, voire impossible, en Amérique du Nord de reproduire auprès des enfants le genre de recherches que nous avons menées auprès d'adultes. Mes écrits concernant les effets sur les enfants se fondent sur des extrapolations à partir de mes recherches auprès d'adultes. J'y pose l'hypothèse que les effets sont probablement aussi susceptibles, sinon plus susceptibles de se produire chez les enfants parce qu'ils ont moins d'expérience et sont peut-être moins aptes à aller chercher d'autres types d'information.
Selon moi, l'analyse de l'exposition à la pornographie doit aussi tenir compte de nombreuses autres influences, y compris celles de plusieurs autres médias, tout en gardant à l'esprit que le contenu auquel les enfants sont exposés a évolué au fil des années. Vous serez certainement d'accord avec moi que nous devons au moins faire des études par enquêtes pour obtenir plus d'information à ce sujet.
Pour en revenir aux exemples concrets et à mes discussions avec des parents et des mineurs, je suis toujours surpris de constater la diversité du matériel pornographique qu'ils peuvent trouver et qui n'était pas disponible dans ma jeunesse — ou, s'il était disponible, il n'était certainement pas facile à trouver. Comme parent, oui, je suis inquiet des répercussions sur nos enfants.
Pour ce qui est de la question du contrôle légal, je pense que ce n'est plus possible. Ce matériel est si répandu et si facile à trouver que le mieux que nous puissions faire est de tenter d'éduquer nos enfants pour qu'ils comprennent les effets négatifs de la pornographie sur certaines personnes. C'est la voie que je préconise pour ce qui concerne les enfants, jumelée à la prise de mesures pour réduire le risque d'exposition accidentelle et rendre l'accès moins facile.
De façon générale, dans le cas des enfants, je pense que nous devons nous concentrer sur l'éducation sexuelle de base, sur les saines pratiques sexuelles.
Merci, monsieur le président.
J'aimerais adresser ma question à Mme Roberts.
Vous nous avez envoyé à tous une belle lettre dans laquelle vous exprimez votre appui à la motion M-47. En voici un passage: [Traduction] « Au nom de tous les enfants du Canada, je vous remercie d'envisager la prise de mesures concrètes pour atténuer l'influence dommageable de ce matériel dans leur vie. »
M. Eyolfson a posé des questions sur l'éducation sexuelle et les meilleurs moyens pour éduquer les enfants dans le cadre scolaire, un domaine qui est essentiellement de compétence provinciale. Avez-vous d'autres suggestions concernant des mesures concrètes pour atténuer les problèmes liés à la pornographie juvénile?
Il faut réfléchir à la question dans des perspectives à court et à long terme. Les mesures à long terme, selon moi, doivent viser à modifier l'acceptabilité d'une bonne partie de ces pratiques. Il est clair que personne ici n'accepte les effets dommageables ou dégradants que peuvent subir des enfants, mais je ne crois pas que c'est le cas de l'ensemble de la population. L'implication d'enfants n'est peut-être pas tout à fait correcte, mais la pornographie en général est quand même très présente un peu partout.
Si vous abordez un groupe de garçons dans une école, vous réaliserez que la très grande partie d'entre eux, comme vous l'avez mentionné, ont accès à la pornographie. On pourrait faire des parallèles avec la cigarette et l'alcool, pour lesquels des restrictions selon l'âge ont été imposées. Je ne crois pas que de telles restrictions empêcheraient les jeunes d'accéder à la pornographie, mais elles seraient un obstacle de plus.
Le plus important est de changer les opinions. Par exemple — peut-être en avez-vous entendu parler —, une capsule animée sur le thème du consentement sexuel a été diffusée au Royaume-Uni. On y utilise la symbolique de la tasse de thé pour faire passer le message. Essentiellement, il y est expliqué que si vous offrez une tasse de thé à une autre personne qui la refuse, il ne faut pas lui en donner. Si vous invitez une personne à prendre le thé et que celle-ci accepte, mais qu'elle a changé d'idée une fois à la maison, il ne faut pas non plus lui donner de thé. Et il ne faut pas se présenter chez cette personne avec une tasse de thé, ni la forcer à boire le thé.
Tout le monde a très bien compris le message parce que le parallèle est très fort. Tout le monde sait ce qu'est une tasse de thé, mais il faut bien réfléchir pour déduire que la capsule parle du consentement sexuel. Elle élimine tous les « Oui, mais… ». J'ai entendu des juges dire toutes sortes de choses dans des affaires d'exploitation sexuelle d'enfants. Des choses comme « Oui, mais le sexe était dans l'air », dans une affaire mettant en cause une adolescente de 14 ans, ou « Oui, mais si c'était réellement arrivé, elle s'en souviendrait », ou encore « Pourquoi est-elle allée à cet endroit? Elle savait ce qui se passe là-bas ». Ce genre de remarques a pour effet de mettre sur la sellette la personne qui a été violée, au lieu de rappeler que la personne qui a posé le geste a commis le crime, personne d'autre.
Je crois que ce genre de démarches très créatives serait très efficace. Apprendre aux enfants à se respecter eux-mêmes est déjà tout un défi. Dans le cas des enfants qui ont été victimes d'exploitation sexuelle, c'est extrêmement difficile. La barre est très haute pour eux. Pour ce qui est des enfants qui n'ont pas été exploités, il faut tout simplement leur enseigner que c'est toujours eux qui ont le dernier mot sur ce qu'ils voient et sur ce qu'ils font.
J'appuie entièrement la prise de mesures qui s'attaqueront directement aux contenus présentant des actes de contrainte sexuelle, par la voie réglementaire ou non, et je suis d'accord avec M. Malamuth quand il dit qu'il est impossible de réglementer le Web. Je crois que nous conviendrons tous ici que le contenu présentant des pratiques de contrainte et de violence sexuelles, contre les femmes le plus souvent, mais pas toujours, atteint des proportions tout simplement inacceptables.
Cela étant dit, et la question nous concerne tous, comment attaquerons-nous le problème de front? Les études sur la pornographie, les agressions et les interactions triangulaires avec la personnalité antisociale parviennent à des conclusions théoriques intéressantes selon lesquelles elles entraîneraient une très faible variation des taux d'agressions sexuelles, de l'ordre des 4 % à peine.
J'ai été ravi de présenter la capsule sur la tasse de thé dans ma classe. Nous consacrons un temps disproportionné aux femmes, à leur montrer comment modifier leur comportement et à faire toutes sortes de compromis pour éviter les agressions sexuelles, mais ridiculement peu de temps à parler directement aux hommes. C'est un énorme problème.
J'ajouterai que je suis l'auteur principal des Lignes directrices canadiennes pour l'éducation en matière de santé sexuelle, que j'ai rédigées avec Mike Barret et Alex McKay quelque part vers la fin des années 1980, ou je ne sais plus. J'ai un trou de mémoire. Ce document, fondé sur des recherches concluantes, offrait en quelque sorte une immunisation par l'éducation contre la surenchère de violence sexiste, dirigée surtout contre les femmes qui, malheureusement, mine notre société.
J'ai déjà dit, avec un brin de tristesse, que la pornographie peut nous être bénéfique. Lorsque nous voyons du matériel pornographique, nous savons que ce n'est pas quelque chose de tout à fait ordinaire. Par contre, le sexisme ordinaire qui imprègne tant d'émissions de télévision ne semble pas nous préoccuper, et c'est ce qui me fait peur. Quand des livres pour enfants présentent des femmes qui restent à la maison, qui n'ont pas de profession et qui font le repassage, c'est très grave.
De façon générale, je suis très favorable à l'éducation. Je m'inquiète de la stigmatisation de la sexualité dans son ensemble, qui pourrait être une conséquence inévitable de nos tentatives avortées de réglementer Internet. Que savons-nous? Nous savons que les personnes plus angoissées sur le plan sexuel sont aussi celles qui seront les moins enclines à adopter de saines pratiques sexuelles. J'appuie donc fortement, et je suis heureux de constater que tout le monde est d'accord ici, la prise de mesures qui s'attaqueront directement au problème à l'arrière-plan de la discussion : la pornographie est-elle la cause de X, ou est-elle la cause d'Y? Les avis à cet égard sont partagés.
Cependant, personne ne conteste que les actes de coercition, le sexisme et la maltraitance que subissent les femmes ont pris de telles proportions qu'il faut trouver des moyens d'attaquer le problème de front, par la voie de l'éducation ou une autre.
Merci, monsieur le président.
Je remercie également tous les intervenants.
Des études ont montré que le fait de visionner de la pornographie est associé à des modifications cérébrales semblables à celles observées dans le cas de dépendances. Pouvez-vous nous expliquer l'état des recherches sur les répercussions possibles du visionnement de contenu sexuellement explicite sur la santé mentale? Quel est son effet à différentes périodes de la vie?
En effet, on cite souvent des « travaux de recherche », entre guillemets, qui corroborent ce que vous venez de dire au sujet des répercussions sur le cerveau analogues à celles des dépendances, à l'héroïne par exemple. La meilleure réponse est sans doute donnée par Nicole Prause, une neuropsychologue anciennement à la UCLA, qui a assimilé les effets dans le cerveau du visionnement de la pornographie à ceux qui se produisent lorsque nous voyons une photo d'une personne aimée. La production de dopamine et d'autres substances chimiques n'est pas l'apanage des dépendances ou du visionnement de matériel pornographique. C'est un phénomène distinctif des événements heureux.
Vous soulevez par ailleurs la question de la « dépendance à la sexualité » ou de « dépendance à la pornographie », entre guillemets. En fait, l'un des mémoires qui vous ont été soumis a été rédigé par un soi-disant thérapeute certifié en dépendance sexuelle. Or, la bible de l'American Psychiatric Association en matière de troubles psychiatriques, soit la cinquième édition, assez récente, du Diagnostic and Statistical Manual of Mental Disorders, propose une analyse du diagnostic d'hypersexualité et de dépendance sexuelle et le rejette. L'American Association of Sex Educators, Counselors and Therapists, le regroupement le plus important de sexothérapeutes, a aussi rejeté le concept de la dépendance sexuelle.
De toute évidence, certaines personnes utilisent la pornographie et beaucoup d'autres choses d'une manière intrusive et compulsive, et le restant de leur vie s'en ressent, mais le concept de la dépendance ou des réactions neurochimiques particulières est loin de faire l'unanimité.
Et qu'en est-il de l'affirmation de Mme Roberts selon laquelle il y aurait une incidence sur le développement des enfants? Qu'en pensez-vous?
Du point de vue développemental, c'est le cerveau adolescent qui nous intéresse ici. Durant l'adolescence, le lobe frontal, le centre décisionnel où sont soupesés les pour et les contre des risques, notamment, fonctionne… Ou plus simplement, disons que le complexe amygdalien, à l'origine de l'excitation, des montées de dopamine et ce genre de choses, fonctionne beaucoup plus rapidement que le lobe frontal à l'adolescence. Les deux continuent de se développer, mais le développement du lobe frontal peut se poursuivre jusqu'au milieu de la vingtaine, et même jusqu'à 26, 27 ou 28 ans. C'est une découverte assez récente, et c'est ce phénomène qui explique en partie pourquoi les adolescents sont enclins à prendre des risques. Leur cerveau ressent plus de plaisir s'ils réagissent impulsivement que s'ils réfléchissent aux risques réels. Il est donc possible que le visionnement d'une forme quelconque de pornographie leur procure cette exaltation, qui ira en s'intensifiant et qui pourrait les entraîner à adopter des comportements encore plus à risque.
Est-ce que je réponds à votre question?
À vrai dire, la faible estime de soi est essentiellement le résultat de la manière dont l'enfant a été traité par ses parents. C'est la relation la plus déterminante de l'estime de soi. Ce que ses parents disent à l'enfant au sujet de ce qu'il est détermine ce qu'il pensera de lui-même. L'enfant intériorise ce qu'il entend et s'approprie la voix de ses parents comme étant la sienne. Puis, éventuellement, adolescent, il travaillera plus fort, disons, pour se forger une identité propre et bâtir son estime de soi, qui restent très fragiles jusqu'à 18 ou 19 ans. À cet âge, il commencera à comprendre qu'il peut être un individu, qu'il peut avoir des opinions personnelles, et qu'il en a tout à fait le droit.
Merci.
Monsieur Fisher, dans un autre article publié dans votre Journal on Sex Research, vous affirmez qu'il faut améliorer la façon dont l'éducation sexuelle est présentée aux adolescents et aux jeunes adultes. Comment ce changement doit-il s'opérer selon vous?
Je voudrais revenir sur le thème de l'éducation. J'ai été l'un des créateurs, de concert avec la Société des obstétriciens et gynécologues du Canada, du site Web SexualityandU.ca. Notre intention, si vous voulez, était d'inonder le Web de contenu positif pour faire contrepoids à l'infestation de contenu horrible. Les nouvelles générations sont nées avec le Web. Nous avons créé SexualityandU.ca et nous avons fait une vaste campagne publicitaire, qui a culminé à la Saint-Valentin. Les versions anglaise et française du site ont reçu 450 000 visites uniques, qui ont duré de 10 à 11 minutes en moyenne, au fil des années. Nous venons de lancer une nouvelle mouture du site, qui s'appelle dorénavant Le Sexe et Moi, toujours sous l'égide de la Société des obstétriciens et gynécologues du Canada. Il présente essentiellement du contenu pertinent pour encourager la responsabilité chez les adolescents, fournir des outils pour aider ceux qui ne souhaitent pas avoir de contacts sexuels, et promouvoir les pratiques sexuelles sans risque et, un volet très important, le consentement des partenaires.
Nous avons aussi mis sur pied un autre projet intitulé — toutes mes excuses — le Peggy's Porn Guide. Une de mes étudiantes diplômées, très habile dans le domaine des animations dans Internet, a choisi des extraits de films illustrant plusieurs mensonges colportés par la pornographie, par exemple que les femmes veulent toujours avoir des relations sexuelles ou sont prêtes à faire n'importe quoi dans n'importe quelle situation. Ces extraits ont été présentés à de jeunes hommes par un personnage animé, et ils étaient ensuite invités à répondre à la question suivante: Est-ce la réalité ou est-ce de la fiction? Ceux qui ajoutaient foi d'une façon ou d'une autre aux « mensonges » véhiculés dans un segment pornographique devaient aller discuter avec Peggy, une plantureuse créature animée qui inversait les rôles en posant des questions du genre « Comment aimerais-tu être forcé sexuellement? ».
J'encourage le recours aux technologies interactives parce qu'elles peuvent toucher un très large public et, si on y consacre les ressources voulues, être de très grande qualité et être vastement diffusées. De plus, ces technologies offrent, pardonnez-moi l'expression, une solution de contournement. Plus besoin d'espérer que des éducateurs compétents et à l'aise soient en poste dans chaque école et dans chaque pays. Il est maintenant possible de faire un suivi de l'éducation sexuelle offerte et d'apporter les améliorations requises pour qu'elle soit de la meilleure qualité possible. Pour ma part, j'intégrerais la capsule de la tasse de thé. Il faut suivre cette voie de progrès, j'en suis farouchement convaincu. Soit dit en passant, il se fait d'excellentes recherches dans ce domaine. Doug Kirby et d'autres ont mené des travaux de grande qualité sur l'efficacité de l'éducation sexuelle.
Au Canada, l'amélioration de l'éducation sexuelle a en quelque sorte fait contrepoids au phénomène de l'accès illimité à des contenus en tout genre sur le Web. C'est un des facteurs concurrents qui interviennent dans les estimations à l'échelle de la population. Lorsque nous analysons l'incidence de la cyberpornographie dans un contexte global, nous en venons à nous demander où se trouve le problème. S'il y avait une incidence importante sur l'évolution des normes, au point où il serait devenu acceptable d'avoir des relations sexuelles très jeune avec de nombreux partenaires, nous aurions observé un tel changement. Or, le changement s'est opéré en sens inverse.
Oui, nous entendons beaucoup parler de l'évolution des normes, pas toujours dans le même sens, de ce qui est considéré comme normal, etc. Mais il arrive un moment où il faut aussi se demander s'il y a vraiment un problème. Où peut-on observer les changements spectaculaires que le phénomène est censé provoquer? Les réponses sont encore fragmentaires.
Merci, monsieur le président.
Monsieur Fisher, je crois que je vous ai promis de revenir sur la différence que fait la recherche entre le matériel sexuellement explicite et le matériel violent et avilissant. Vos travaux de recherche, je crois, portent sur l'exposition à la pornographie ordinaire. Dans vos recherches, ou dans votre esprit, faites-vous une différence entre la pornographie ou le matériel sexuellement explicite et la pornographie violente ou avilissante?
Il existe une différence très nette entre la pornographie violente et avilissante et d'autres formes de matériel sexuellement explicite, mais c'est loin d'être simple.
Tout d'abord, je tiens à souligner que j'ai réalisé des expériences sur le thème de la pornographie violente. Ce type de pornographie n'est absent ni de mes recherches expérimentales ni de mes recherches corrélationnelles, dans lesquelles j'ai constaté que les personnes ayant une forte libido ont tendance à consommer de la pornographie plus violente que celles dont la libido est plus faible. J'ai réalisé une étude auprès d'hommes qui subissaient des décharges électriques et des agressions verbales de la part d'une femme, et à qui on présentait ensuite de la pornographie violente. Nous leur présentions de la pornographie violente classique, dans le cadre d'une recherche classique, puis nous leur donnions la possibilité d'être agressifs ou non dans leurs échanges avec la femme ou dans d'autres situations. Il y a bel et bien une différence.
J'aimerais cependant souligner deux autres éléments. Il existe une communauté d'hommes, dont nous ignorons le nombre, qui se disent eux-mêmes amateurs de pratiques de bondage et discipline, de domination et soumission, de sadomasochisme, ou BDSM. Cette communauté accorde une très grande importance au consentement. En fait, ses membres pourraient nous en apprendre beaucoup sur l'obtention du consentement. Quiconque viole la règle du consentement est exclu et ostracisé. Il existe beaucoup de matériel pornographique ou sexuellement explicite qui présente des pratiques BDSM, mais la question de savoir s'il répond à la définition de pornographie violente reste à trancher.
La pornographie violente classique colporte un mensonge — pas trop commun, heureusement, mais néanmoins problématique — selon lequel les agressions sexuelles satisfont autant l'homme, parce qu'il a une relation sexuelle, que la femme, parce qu'elle atteint l'orgasme, et personne n'est puni. Vous me suivez? Si vous voulez, cette pornographie fait la promotion des infractions sexuelles. Il faut se méfier toutefois de l'école de pensée qui envisage la pornographie dans une perspective selon laquelle les individus se singent les uns les autres. De façon générale, chaque individu a son historique d'apprentissage, son propre cerveau, il sait qu'il peut être puni, se sentir coupable. Si un individu ne ressent aucune empathie, n'a aucun historique d'apprentissage des punitions et d'autres conséquences, le problème est énorme.
La pornographie peut soulever d'immenses problèmes dans le contexte du modèle de confluence. Elle peut causer d'énormes problèmes dans presque tous les scénarios propices aux agressions, qui sont légion dans notre société.
Monsieur Malamuth, ma dernière question sera pour vous.
Je sais qu'avant la projection de films pornographiques, un avertissement apparaît souvent à l'écran. Je pose l'hypothèse que l'effet est très limité. Je crois qu'en Grande-Bretagne, une réflexion est en cours sur l'intégration de filtres pour réglementer le Web, que M. Fisher, je crois, a qualifié d'impossible à réglementer.
En sachant que la réglementation est impossible, vous avez proposé de faire de l'éducation. À quel âge devrait-on commencer à éduquer nos enfants sur la santé sexuelle, et pensez-vous que l'éducation publique a un rôle à jouer? Puisque nous ne pouvons pas réglementer leur exposition à du contenu nocif pour eux, est-il possible de sensibiliser les jeunes à une certaine norme en matière de comportements sexuels sains?
Je vais innover et renvoyer la question à M. Fisher, car ce domaine ne fait pas vraiment partie de mon expertise. Dernièrement, j'ai donné à mon fils de 13 ans un livre d'éducation sexuelle spécialement conçu pour les jeunes de son âge. Il a lu le premier chapitre, et il a réalisé qu'il n'était pas prêt pour ce genre de lecture.
Je crois que chaque personne est différente, mais je ne suis pas un expert sur cette question précise.
La réponse simple est que la cible est mouvante. J'ai passé 30 ans à faire de la recherche sur la prévention du VIH dans diverses communautés, depuis l'Afrique du Sud jusqu'aux quartiers défavorisés. J'ai effectué une recherche à grande échelle dans des quartiers défavorisés où des filles de 13 ans et demi commencent à penser à avoir des enfants. Bien évidemment, il faut adapter l'éducation en conséquence.
Donc, rien n'est coulé dans le béton. Je vous suggère fortement de vous éloigner de tout modèle d'éducation sexuelle qui risque de corrompre l'esprit des jeunes. On ne peut pas voler leur innocence aux enfants. Ils décrocheront, tout simplement. Il est possible d'adapter l'éducation à l'étape du développement, par des moyens analogues à ceux que l'Ontario instaure graduellement, je crois, et qui consistent à nommer exactement les parties du corps, à respecter les limites de l'autre, à distinguer les contacts appropriés de ceux qui ne le sont pas, des choses du genre. Je crois que cette éducation peut être efficace si elle est modulée de manière très précise selon l'étape du développement.
J'aimerais clore sur un autre élément important. Il y a de cela très longtemps, j'ai participé à une étude à laquelle participait près de la moitié des éducateurs en sexualité exerçant dans l'État de l'Indiana. La conclusion: le programme ne fait aucune différence. Ce qui compte est l'aisance de l'éducateur par rapport à la matière. Par conséquent, en plus du programme, nous devons investir massivement dans la sélection du personnel, le soutien et la formation. Nous ne pouvons pas nous contenter de larguer un guide de programme aux enseignants. C'est injuste.
L'important est d'unir nos forces pour mener une attaque dirigée contre les effets potentiellement indésirables de la pornographie. Ensemble, attaquons de front les comportements injustes, coercitifs et malsains. Allons droit au but et arrêtons de gaspiller notre temps.
Je vous remercie tous infiniment.
Voilà qui met fin à la séance et à la collecte d'information.
Mme Kim Roberts: Puis-je ajouter quelque chose?
Le président: Bien sûr, je vous en prie.
J'aimerais aborder brièvement le sujet de l'éducation des enfants. Actuellement, nous voyons l'éducation sexuelle comme un « événement ». Lorsque les élèves arrivent en sixième année, ils savent que c'est imminent. Parfois, ils sont séparés pour que les garçons soient éduqués par un homme et les filles, par une femme. À mon avis, il faut abandonner ce modèle et faire en sorte que cette matière soit récurrente tout au long du programme scolaire. C'est un sujet qui touche toutes les dimensions de notre être, pas seulement notre corps. Notre psychologie, nos relations, toutes nos facettes sont concernées. Je crois que vous avez mentionné que les enfants devraient être en mesure de nommer les parties du corps par leur nom dès la maternelle. Cela ne devrait pas poser de problème. À aucun âge de la vie. Il faut commencer à la maternelle et continuer progressivement année après année, pour que l'éducation sexuelle cesse d'être un « événement » et que tous soient à l'aise. Les enseignants en viendraient sans doute à être plus à l'aise. Il faut également outiller les parents afin qu'ils puissent faire partie prenante de cette éducation. Ils doivent participer à l'aventure. Toutes les études en sciences de l'éducation montrent que la participation des parents à la vie scolaire est garante de meilleurs résultats.
Merci encore.
Monsieur Fisher, vous avez affirmé tout à l'heure que ce n'était pas simple. Je dois dire que je suis assez d'accord avec vous. J'aimerais vous remercier tous de faire des recherches sur ce sujet, qui est loin d'être simple. C'est compliqué et la cible est mouvante.
J'aimerais vous remercier tous, les membres du Comité pour vos excellentes questions, et nos témoins pour vos excellentes réponses.
Nous allons suspendre la séance pendant une minute. Nous devons régler quelques détails concernant nos travaux. Auparavant, j'aimerais prendre congé des témoins. De nouveau, merci de vous être déplacés.
Monsieur Malamuth, en Arizona, je vous remercie.
Merci.
Nous reprenons nos travaux. Nous en avons pour quelques minutes à peine.
Hier, la Chambre a adopté une motion portant sur le déplacement de l'horaire habituel du vendredi à jeudi. Ce faisant, nous devons décider si le Comité se réunira jeudi, comme prévu. Je crois que oui, ou du moins je le suppose. Souhaitons-nous maintenir la séance du Comité prévue ce jeudi?
Une voix: Jeudi prochain?
Le président: Oui, jeudi prochain. Je suis désolé. C'est une longue fin de semaine, c'est pour cette raison.
Je n'ai pas vraiment de préférence. Je vais me ranger derrière la majorité de mes collègues. Cependant, étant donné que la période des questions aura lieu à 11 heures, nous devrons probablement annuler la réunion du Comité.
J'ai du mal à suivre. Si jeudi, nous suivons l'horaire du vendredi, ceux d'entre nous qui ne sont pas de service à la Chambre seront absents. Proposez-vous que nous restions ici pour assister à la réunion du Comité même si nous ne sommes pas de service à la Chambre?
Je ne peux pas vous donner de réponse pour ce qui est des fonctions à la Chambre. Jeudi, nous suivrons l'horaire du vendredi. Êtes-vous d'accord pour tenir la réunion du Comité une heure plus tard, à la fin de la période des questions?
Monsieur Eyolfson, nous vous écoutons.
À mon avis, la logistique sera complexe. Si nous adoptons l'horaire du vendredi et qu'il y a un conflit avec la période des questions, je crois qu'il vaudrait mieux annuler notre réunion.
Pour ce qui est des fonctions à la Chambre jeudi, je devrai, et j'imagine que je ne suis pas le seul, trouver quelqu'un pour me remplacer soit à la période des questions, soit ici. C'est un problème.
Très bien. Êtes-vous tous d'accord avec la motion portant annulation de notre réunion?
(La motion est adoptée.)
Le président: Vous avez la parole, monsieur Kang.
J'ai un commentaire à ce sujet. Dans mon calendrier, il est inscrit que le 13, notre réunion est à 11 heures, que la période des questions est à 14 heures et que le service à la Chambre commence à 15 heures.
Nous avons adopté une motion. La réunion est annulée, et nous devrons adapter notre horaire en conséquence.
Nous devons déplacer la réunion prévue le 13… Proposez-vous de la reporter au 4 mai? Cela signifie que notre étude sur la drépanocytose et le projet de loi C-211 seront reportés au 4 mai.
Passons au point suivant. Nous avons fait circuler un budget pour l'étude de la motion M-47 qui totalise 27 700 $. Je suis prêt à recevoir une motion d'adoption de ce budget.
Monsieur le président, est-ce que nous discuterons de l'horaire aujourd'hui? Je vous le demande parce que j'ai une question sur quelques éléments laissés en suspens dans l'horaire.
Merci, monsieur le président.
J'ai une question concernant les repas. Dans la rubrique des frais divers, il est question de trois repas de travail, puis il est indiqué un prix unitaire de 500 $, pour un total de 1 500 $. Est-ce que chaque repas coûte 500 $?
Donc si un repas coûte 380 $, la budgétisation de 500 $ est excédentaire. C'est notre plafond de dépense, mais nous ne prévoyons pas dépenser autant.
Y a-t-il d'autres questions? Est-ce que quelqu'un veut déposer une motion d'approbation du budget pour l'étude de la motion M-47?
(La motion est adoptée.)
Le président: Madame Harder, vous pouvez poser votre question sur l'horaire.
Monsieur le président, dans le calendrier que vous avez proposé, il est indiqué que les témoins seront convoqués les 9 et 11 mai dans le cadre de notre étude sur la thalidomide. Comme le Comité n'a pas encore pris de décision à ce sujet, je voudrais m'assurer que ces dates seront bloquées pour l'étude de la thalidomide.
Si j'ai bien compris, le Comité a approuvé ces dates sous réserve de l'obtention de certains renseignements de Santé Canada, mais nous les attendons toujours. Si nous recevons ces renseignements, ces deux réunions auront lieu.
Je n'ai pas le libellé exact de la demande. Notamment, nous avons besoin de savoir combien de personnes ont vu leur demande d'aide refusée. La deuxième partie est plus complexe — elle porte sur la justification des facteurs de non-admissibilité à l'aide.
Essentiellement, il s'agit de statistiques et d'explications des justifications des critères d'approbation ou de refus. Nous n'avons pas encore reçu de réponse. Si nous recevons les renseignements demandés, le Comité a convenu de bloquer ces dates pour l'étude.
Monsieur le président, je vois que Santé Canada fournira une réponse à la question sur la thalidomide le 10 avril.
C'est l'échéance que nous avons fixée, mais Santé Canada ne l'a pas approuvée. Si nous n'avons pas reçu la réponse à ce moment, je crois que nous ferons des pressions.
Est-ce qu'il serait indiqué que je dépose une motion portant que cette étude se fasse bel et bien les 9 et 10 mai?
Et si nous n'avons pas reçu l'information de Santé Canada à l'échéance du 10 avril, qu'adviendra-t-il?
Je suggère que nous reportions les réunions jusqu'à ce que nous obtenions l'information. C'est ce que je propose. Le Comité devra décider, mais c'est ce que je pense. Nous avons besoin de ces renseignements très précis.
D'autres questions?
Le greffier rappelle que l'échéance pour donner les noms des témoins qui participeront à l'étude du projet de loi S-211 sur la drépanocytose était hier. Il propose de reporter l'échéance à vendredi. L'échéance pour donner les noms des témoins dans le cadre de l'étude du projet de loi sur la drépanocytose est fixée à vendredi prochain, le 7 avril.
Nous avons demandé à Mme Gahagan de nous transmettre une étude à laquelle elle a fait référence. Elle nous a envoyé 124 pages, qui seront très longues à traduire. Elle est accompagnée d'un résumé scientifique. Nous proposons d'envoyer ces quatre pages à la traduction en vue de leur distribution. Êtes-vous d'accord pour que nous fassions traduire ces 4 pages plutôt que les 124 pages de l'étude?
Je n'y vois pas d'inconvénient, monsieur le président, mais aurons-nous également un lien à cette étude? Serait-ce possible, même s'il donnera accès seulement à la version anglaise?
Je vais me renseigner. Je ne sais pas si nous avons un lien. Si ce lien existe, je vous en informerai.
C'est tout pour les affaires officielles du Comité, à moins que vous ayez autre chose à ajouter.
Madame Harder.
Monsieur le président, j'aimerais faire une proposition. Pour ce qui a trait à l'étude sur la thalidomide, pour gagner du temps advenant que le ministère ne nous ait pas transmis les renseignements demandés d'ici au 10 avril, je pense que nous devrions proposer d'aller de l'avant avec l'étude les 9 et 11 mai, et de convoquer le ministère comme premier témoin.
Nous connaissons déjà la réponse à l'une des questions. Lorsque la ministre est venue nous rencontrer dans le cadre de l'étude sur les opioïdes, elle a dit que 24 personnes étaient touchées. C'est consigné au compte rendu. Nous pouvons nous reporter à ce compte rendu si vous le désirez, mais il n'y a aucune raison pour que Santé Canada ne comparaisse pas comme premier témoin dans le cadre de cette étude et que nous ne la faisions pas les 9 et 11 mai. Je propose que nous bloquions ces dates.
Souhaitez-vous débattre de cette motion?
Êtes-vous tous d'accord pour tenir les réunions sur la thalidomide, peu importe que nous ayons reçu ou non la réponse du ministère de la Santé?
Veuillez dire « pour » ou lever la main si vous êtes d'accord.
Monsieur le président, j'invoque le Règlement. Si j'ai bien compris, la motion de Mme Harder porte que nous tenions les séances sur la thalidomide, peu importe que nous ayons reçu ou non une réponse le 9 avril, et que nous convoquions Santé Canada comme premier témoin. Est-ce exact? Est-ce que c'est bien la motion? D'accord.
Mme Rachael Harder: Merci.
Si nous ne recevons pas la réponse de Santé Canada et que nous allons quand même de l'avant avec l'étude, nous en tiendrons-nous là? Nous ne fixerons pas d'autres échéances ultérieures pour obtenir de l'information? Et nous aurons terminé l'étude en deux jours? Ou entendrons-nous d'autres témoins plus tard?
Notre objectif est de nous assurer que ces personnes soient dédommagées dès que possible. Malheureusement, les choses ont traîné. Je pense que nous pourrons clore le dossier en deux réunions si nous entendons les bons témoins.
Une motion a été déposée. Que ceux qui sont d'accord pour tenir les réunions sur la thalidomide, que nous…
La motion propose de faire l'étude les 9 et 11 mai, que ces dates soient confirmées, et que si Santé Canada refuse de nous fournir l'information demandée d'ici au 10 avril, ou ne nous la fournit pas pour une autre raison, que nous convoquions Santé Canada comme premier témoin le 9 mai.
Pouvons-nous attendre? Nous pouvons peut-être demander l'information à nos responsables de la santé quand ils nous donneront leur rapport.
Nous leur avons demandé de nous donner l'information avant le 10 avril. C'est tout ce que je peux dire. Nous leur avons fait cette demande.
Monsieur le président, j'invoque le Règlement. Je ne suis pas généralement du genre pointilleux, mais nous sommes en plein milieu d'un vote.
Le président: Vous avez raison.
M. Don Davies: Ce n'est pas vraiment le temps de débattre ou de poser des questions.
(La motion est adoptée par 5 voix contre 2. [Voir le Procès-verbal])
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