NDDN Réunion de comité
Les Avis de convocation contiennent des renseignements sur le sujet, la date, l’heure et l’endroit de la réunion, ainsi qu’une liste des témoins qui doivent comparaître devant le comité. Les Témoignages sont le compte rendu transcrit, révisé et corrigé de tout ce qui a été dit pendant la séance. Les Procès-verbaux sont le compte rendu officiel des séances.
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Comité permanent de la défense nationale
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TÉMOIGNAGES
Le lundi 16 octobre 2017
[Enregistrement électronique]
[Traduction]
Bienvenue à tous à la séance d'aujourd'hui, laquelle porte sur la crise en Ukraine et l'aide que le Canada pourrait apporter à cet égard.
Nous recevons trois témoins pour poursuivre notre discussion. M. Taras Kuzio, associé non résidant au Centre for Transatlantic Relation de la Johns Hopkins University, comparaît par vidéoconférence. Merci de vous joindre à nous. Nous entendrons également M. Lickuk, professeur au Département de science politique du Collège militaire royal du Canada, ainsi que Mme Peggy Mason, de l'Institut Rideau sur les affaires internationales.
Merci de témoigner.
Juste pour qu'il n'y ait pas de surprise, des votes pourraient avoir lieu au cours de la séance. Donc, si vous voyez une lumière clignoter, je pourrais devoir vous interrompre au milieu d'une phrase pour que nous quittions l'édifice. Ne soyez donc pas surpris.
La dernière chose, mais non la moindre, nous réserverons 10 minutes à la fin de la séance pour examiner les affaires du Comité. Nous continuerons jusqu'à environ 17 h 20, en présumant que nous ne serons pas interrompus pas les votes.
Cela étant dit, monsieur Kuzio, comme vous témoignez par vidéoconférence et que la communication est parfaite, nous vous accorderions la parole pour que vous fassiez votre exposé. La parole est à vous.
Je voudrais tout d'abord indiquer qu'il existe approximativement cinq explications à la crise en Ukraine.
La première explication, selon une alliance plutôt étrange de détracteurs de gauche de la politique étrangère américaine et de l'OTAN, et de réalistes de droite, c'est que cette crise est la faute de l'Occident. Ces deux groupes considèrent que l'Union européenne, l'OTAN et la promotion de la démocratie ont provoqué une contre-réaction de Vladimir Poutine et de la Russie. Tant les réalistes que les détracteurs de gauche appuient une sorte d'entente globale, un deuxième accord de Yalta qui, comme en 1945, unit les grandes puissances et intégrerait l'Ukraine au sein de la sphère d'influence de la Russie. Ces deux groupes tendent à faire fi des influences qui se font sentir au sein même du pays.
Selon d'autres, la crise en Ukraine est le résultat d'un bras de fer géopolitique, particulièrement entre l'Union européenne et la Russie.
Une troisième explication, celle du bâtisseur d'empire, veut que Poutine soit en train de rebâtir l'URSS à échelle réduite, comme dans l'Union eurasiatique, et est un fauteur de troubles.
La quatrième explication, que je considère comme fort pertinente, attribue la crise au régime national de la Russie, particulièrement ce que les politicologues occidentaux appellent une militocratie. Ce régime est dirigé par d'anciens agents du renseignement du KGB portés par un fort nationalisme russe.
L'explication que je préfère, dont il n'est ironiquement pas beaucoup question en Occident, est celle de l'identité nationale. Si Vladimir Poutine acceptait demain que les Ukrainiens constituent un peuple distinct des Russes et que l'Ukraine est un pays souverain ayant le droit de décider de sa propre destinée, de son propre avenir et de la voie qu'il entend suivre, la guerre prendrait probablement fin très rapidement. Je pense que c'est une explication que l'on n'examine pas suffisamment en Occident. Henry Kissinger n'a-t-il pas affirmé ne jamais avoir rencontré un Russe qui accepte que les Ukrainiens soit un peuple distinct?
L'identité nationale est à l'origine de la crise en Ukraine et de l'incapacité des dirigeants russes à accepter que les Ukrainiens constituent un peuple distinct. Poutine a répété que les Russes et les Ukrainiens forment un seul peuple; que l'Ukraine est un État artificiel et un échec; que les régions russophones de l'Ukraine sont en fait russes et que leur intégration dans l'Ukraine constitue une erreur; et — tout amusant que cela puisse être, c'est vraiment ce que l'on croit à Moscou — que les Ukrainiens voudraient s'unir aux Russes, mais qu'ils en sont empêchés par des oligarques et d'autres élites corrompues qui sont à la solde de l'Occident. C'est ce que l'on croit vraiment.
Voilà pourquoi je considère que la Russie ne comprend pas vraiment la dynamique interne de l'Ukraine. En fait, je dirais que les experts et les diplomates occidentaux comprennent mieux ce qu'il se passe à l'intérieur de l'Ukraine que ceux de Moscou, car ces derniers considèrent l'Ukraine en s'appuyant sur des stéréotypes et des mythes.
À Moscou, on ne comprend pas que les Ukrainiens russophones sont des patriotes, comme on a certainement pu le constater en 2014. Ils sont incapables de comprendre qu'on peut être Ukrainien russophone et patriote de l'Ukraine. Selon eux, un Ukrainien russophone devrait être favorable à la Russie et à Poutine. Or, ce n'était pas le cas en 2014 et ce ne l'est pas aujourd'hui.
J'ai été sur la ligne de front à quelques reprises l'an dernier. De nombreux russophones y combattant pour l'Ukraine. Environ 50 à 60 % des soldats sont russophones et combattent du côté de l'Ukraine. Certains experts et journalistes, particulièrement à Moscou, sont donc dans l'erreur quand ils affirment que le conflit est une guerre civile entre deux groupes linguistiques: ceux qui parlent ukrainien et ceux qui parlent russe. Ce n'est certainement pas le cas, car il se trouve des combattants qui parlent russe et ukrainien du côté de l'Ukraine. Selon les sondages, les Ukrainiens ne considèrent pas le conflit de cette manière.
Au bout du compte, le problème vient du fait que les dirigeants russes n'acceptent pas que les Ukrainiens forment un peuple qui a le droit de décider de sa propre destinée géopolitique et dont la place se trouve naturellement au sein de l'Union eurasiatique et du monde russe, et que c'est une personne comme le président de la Biélorussie, Alexander Lukashenko, qui devrait diriger l'Ukraine.
Le problème, c'est que l'idée que ceux qui sont à Moscou se font de l'Ukraine ne correspondait pas à la réalité jusqu'en 2014. Il y a donc eu une révolution, un soulèvement populaire, et l'idée ne cadre certainement pas avec la situation d'aujourd'hui. Les conflits et la guerre accélèrent inévitablement la formation de l'identité nationale. Aujourd'hui, 75 % des Ukrainiens ont une opinion défavorable de Vladimir Poutine.
Je passerai à la dernière ligne, car j'arrive à la fin. Si on pose un regard sur l'avenir, je pense que le conflit est très profond et durera donc longtemps, car les choses mettent bien du temps à changer lorsque des questions d'identité nationale sont soulevées dans des régions données. La majorité des Russes — et, soit dit en passant, de la soi-disant opposition démocratique — appuie l'annexion de la Crimée, et très peu de voix critiquent les politiques de Poutine à l'égard de l'Ukraine.
Si demain, Poutine n'était plus président de la Russie, pas grand-chose ne changerait en Russie. Ce pays maintiendrait sa position à l'égard de l'Ukraine, une attitude que je considère comme agressive et contre l'Occident. La Russie considère que sa guerre en Ukraine fait partie de son conflit avec l'Occident. Les dirigeants russes sont convaincus que pour être vue comme une grande puissance et l'égale des États-Unis, la Russie doit dominer son environnement et ses voisins, notamment l'Ukraine.
Selon moi, ce conflit durera longtemps. Je ne pense pas qu'il se réglera à court terme, car ce ne sont pas des questions d'identité nationale qui changeront du jour au lendemain. Elles prennent bien du temps, peut-être une génération, à changer.
Merci.
Merci beaucoup de m'avoir invitée à témoigner aujourd'hui.
Je vous demande de m'excuser de ne pas avoir de texte écrit, mais j'ai remis une copie de mes notes aux interprètes.
Je veux traiter très précisément de ce qui pourrait être possible en ce moment. Il me semble qu'il soit urgent de mettre l'accent sur la possibilité qui s'offre après que l'Ukraine et la Russie ont toutes deux proposé une opération de maintien de la paix des Nations unies à l'appui de l'accord de Minsk. Bien entendu, leurs propositions sont très différentes l'une de l'autre, mais elles ouvrent néanmoins la porte au dialogue afin d'appuyer cet accord.
Je soulignerais que tout récemment, le ministre ukrainien de la Défense, le président Poutine et la chancelière Merkel ont tous réitéré fermement qu'il n'existe pas de solution de rechange à l'accord de Minsk; il me semble donc que le Canada, mais particulièrement l'Occident, doit insister pour que la Russie et l'Ukraine en fassent beaucoup plus pour organiser et mettre en oeuvre des cessez-le-feu, y compris des cessez-le-feu humanitaires. La situation humanitaire est terrible sur place, mais les Nations unies possèdent une longue expérience quand il s'agit de faciliter et d'instaurer des cessez-le-feu locaux, y compris des cessez-le-feu humanitaires, ainsi que des négociations concernant la dernière des trois zones de désengagement. L'expérience de l'OSCE n'est peut-être pas aussi longue, mais elle est néanmoins importante. Ces démarches amélioreraient la vie des civils dans la zone de guerre, mais contribueraient également à atténuer le grave danger de déploiement de forces hostiles et de systèmes d'armement à proximité de la ligne de séparation qui existe actuellement. Il ne fait aucun doute que dans le cadre de discussions de bonne foi sur une opération de maintien de la paix des Nations unies, la portée et le mandat de l'initiative aideraient les régions touchées.
Pour que cette occasion fragile puisse porter ses fruits, il faut éviter les démarches qui pourraient envenimer les choses, comme la livraison d'armes, même défensives, car selon toutes les conclusions que je peux tirer de mon examen de la situation, elles offrent bien peu d'avantages militaires, tout en pouvant nuire aux fragiles possibilités de progrès. La situation s'envenimerait, car les deux côtés auraient l'impression qu'ils doivent réagir à la démonstration de force de l'autre. À cet égard, il me semble que le Canada devrait s'inspirer de la prudence dont les Européens ont fait preuve au chapitre de la livraison d'armes à l'Ukraine.
En ce qui concerne le rôle du Canada, même si certains le réclament, ce qui est regrettable à mon avis — et je parle forte de mes 20 années d'expérience aux Nations unies et dans l'OTAN, et de ma formation en maintien de la paix en Union européenne —, je ne pense pas que le Canada puisse participer à une opération de maintien de la paix potentielle des Nations unies en raison du rôle militaire qu'il joue en Ukraine dans le cadre de l'OTAN. Ce rôle ne lui permet pas de respecter l'exigence d'impartialité, et l'adoption potentielle de la version canadienne de la loi Magnitsky ne pourrait qu'exacerber ce qui est perçu comme de l'hostilité envers la Russie. J'en dirai plus à ce sujet.
Cette loi, dont je traiterai à titre d'avocate possédant une longue expérience de la manière dont le Canada a géré de telles situations par le passé, oblige le Canada à adopter l'unilatéralisme américain et à appliquer sa propre loi en terre étrangère, ce qu'il a toujours évité de faire, sauf en deux ou trois occasions, en cas de sanctions ou d'embargos sur les armes des Nations unies, ou, je pense, de trafic d'enfants. Ce sont là les seules situations où nous avons appliqué notre loi à l'extérieur de notre territoire. En outre, le Canada devrait utiliser l'approche américaine du « deux poids, deux mesures » quand vient le temps de réagir à des violations flagrantes des droits de la personne par des amis et des alliés.
Je parle de l'approche américaine du « deux poids, deux mesures », car est-ce que quelqu'un pense sérieusement que nous allons appliquer cette loi à l'Arabie saoudite, qui figure régulièrement sur la liste des pires pays au chapitre de la violation des droits de la personne? Et comment agir à l'égard d'Israël et de ses actions dans les territoires occupés par les Palestiniens ou dans la bande de Gaza? La Russie a demandé si quelqu'un pensait que le Canada allait sanctionner les États-Unis pour la torture légalisée et la détention illégale de prisonniers dans la baie de Guantanamo et dans des prisons secrètes d'Europe. C'est une question très délicate, car la CIA a récemment rayé de la liste des documents secrets des renseignements qui révèlent la vaste portée et l'horreur des gestes posés, lesquelles dépassent ce que nous pensions savoir.
À moins qu'il y ait un lien juridictionnel préjudiciable pour les Canadiens, le Canada a toujours respecté le droit international et adopté les approches multilatérales par l'intermédiaire du Conseil de sécurité et du Conseil des droits de l'homme des Nations unies.
J'aimerais terminer en parlant du contexte de la crise en Ukraine qui, selon moi, est le plus problématique. En fait, c'est la principale raison pour laquelle je voulais témoigner devant vous aujourd'hui. Je vous en suis d'ailleurs très reconnaissant. Il s'agit du contexte général dans lequel nous examinons la crise ukrainienne.
J'ai suivi très activement ce dossier, en tant que fonctionnaire canadien, durant la guerre froide, et j'ai participé à de nombreuses tables multilatérales et bilatérales. Il s'agit de la nouvelle guerre froide, comme on l'appelle, et à bien des égards, elle est plus dangereuse que la première.
L'épicentre du conflit n'est pas Berlin ni le tiers monde, mais directement sur les frontières de la Russie, d'où l'urgence de faire respecter le protocole de Minsk. Il y a d'autres enjeux, et la possibilité, compte tenu des récentes activités, d'une collaboration directe entre la Russie et les États-Unis en Syrie. On assiste à une détérioration sans précédent des relations entre ces deux pays. Cela n'était pas le cas, au plus fort de la guerre froide.
Aux États-Unis, on diabolise le président russe Poutine comme jamais on l'a fait durant la guerre froide. Des analystes ont indiqué que si cette campagne de diabolisation avait eu lieu au moment de la crise des missiles de Cuba, le président Kennedy n'aurait jamais pu prendre les mesures qu'il a prises pour éviter cette crise. Le Russiagate paralyse la capacité de Trump d'engager des négociations avec la Russie.
L'autre chose, c'est qu'il n'y a aucun média anti-guerre-froide. Durant la première guerre froide, il y a eu un débat vigoureux sur l'approche que nous devions prendre à l'égard de la Russie. Il y avait ceux qui prônaient la ligne dure et ceux qui voulaient adopter une approche très différente, et évidemment, le Canada privilégiait souvent cette dernière approche, comme dans le cas de l'initiative de paix des cinq continents de Pierre Elliott Trudeau, en pleine guerre froide.
Je termine malheureusement avec un éditorial très intéressant paru aujourd'hui dans le Globe and Mail et rédigé par l'ancien secrétaire général de l'OTAN, Anders Rasmussen. Il a demandé que le Canada joue un rôle de médiateur à l'appui du protocole de Minsk et dans le cadre des discussions entourant les activités de maintien de la paix de l'ONU visant à aider l'OSCE à surveiller et vérifier le cessez-le-feu. Or, le projet de loi S-226, s'il est adopté, nous prive de notre capacité de jouer ce rôle de médiateur et de faciliter les relations, ce qui est grandement nécessaire.
Merci beaucoup.
Merci. Je vous remercie de me donner cette occasion de m'adresser au Comité permanent de la défense nationale au sujet de la crise en Ukraine. Sachez que je témoigne devant vous aujourd'hui à titre personnel et non pas à titre de représentant du Collège militaire royal.
Lorsqu'on m'a invité à comparaître, j'ai cru qu'il serait bon de vous faire part des observations et des réflexions que j'ai faites au fil des années sur la situation en Ukraine. Je n'ai pas eu le temps de les faire traduire, mais j'ai remis un document à la greffière, qui m'a assuré qu'il sera traduit en temps et lieu.
Dans un premier temps, je vais vous présenter mes observations, et je vais ensuite vous laisser décider si j'ai été clairvoyant ou non dans mon analyse. À la fin, je formulerai quelques recommandations qui pourraient aider le Canada à faire face à la guerre d'agression que mène la Russie contre l'Ukraine depuis trois ans déjà.
J'étais en Crimée en juillet et août 2010. À l'époque, j'avais remarqué que plusieurs affiches et panneaux sécessionnistes étaient placardés partout dans la région de la Crimée. Par conséquent, même plusieurs années avant la prise de contrôle illégale de la Crimée par les troupes russes, on préparait déjà le terrain. À Kiev, le président de l'Ukraine de l'époque, Viktor Ianoukovitch, qui est actuellement un citoyen de la Fédération de Russie, ne faisait absolument rien.
Lorsque le mouvement EuroMaïdan est né en 2014, cette révolution inspirée par la dignité, c'était en partie dans le but de faire tomber un homme qui était devenu le satrape de Moscou, un homme qui alimentait une corruption omniprésente. Son propre fils, Alexandre, était surnommé le « roi du charbon », un dentiste devenu multimillionnaire pratiquement du jour au lendemain. À l'époque, dans les médias d'ici, je me demandais à quel moment l'Ukraine serait enfin libre et trouverait son Moïse, c'est-à-dire quelqu'un pour diriger les Ukrainiens vers la terre promise qui, selon ce que tout le monde disait, serait l'Europe. J'avais prédit qu'une fois qu'ils auraient commencé, on ne pourrait plus les arrêter. En même temps, j'avais également écrit que le projet du Kremlin de rétablir l'Empire soviétique était un projet utopique qui avait peu de chances de réussir, malgré tous les chevaux et soldats du roi.
En mars 2014, lorsque la Crimée était finalement sous occupation russe, il était intéressant de voir à quel point le président Ianoukovitch semblait avoir oublié le fait que le 9 juillet — sa date de naissance et la mienne — 1997, on avait accordé à l'Ukraine des garanties de sécurité pour avoir abandonné ses armes nucléaires en vertu du Traité sur la non-prolifération des armes nucléaires. J'ai également abordé cette question dans un article paru, en novembre 1991, dans le Globe and Mail, et intitulé « Moderation and Neutrality — but hang on to the nuclear arms », dans lequel je faisais valoir que l'Ukraine ne devait pas abandonner ses armes nucléaires, sans quoi elle perdrait son indépendance, et sa souveraineté territoriale serait violée. À ce moment-là, je me souviens qu'on m'avait qualifié de belliqueux. Je ne crois pas que c'était le cas.
Bien entendu, Poutine affirmait avoir envahi l'Ukraine sous prétexte qu'une minorité russe était menacée par des fascistes ukrainiens. Personne n'a jamais trouvé ces fascistes, et lorsqu'il a déployé ses troupes en Crimée, les seuls fascistes présents étaient les voyous de l'Unité nationale qui brûlaient les livres des Juifs et des Ukrainiens dans les rues de la Crimée. Rien de tout cela n'avait été vu en Europe depuis avril 1933, lorsque les nazis avaient fait la même chose.
Évidemment, certains Russes affirment avoir la responsabilité de protéger les minorités russes dans les États baltes, particulièrement en Estonie et en Lettonie. Cependant, si on soutient que l'Estonie et la Lettonie, soit deux alliés de l'OTAN, peuvent être démantelés parce qu'on y trouve des minorités russes, qu'en est-il de la Fédération de Russie comme telle? La Tchétchénie, par exemple, est peuplée à 95 % de Tchétchènes. Les Tatars constituent 53 % de la population du Tatarstan. En Kalmoukie, 57 % de la population est bouddhiste. Par conséquent, si l'Ukraine ou d'autres États doivent être démantelés pour des raisons de minorité, la Fédération de Russie devrait assurément faire la même chose.
Chose certaine, l'Occident a beaucoup d'excuses pour justifier son inaction. En mai 2014, j'ai écrit au sujet de la passion de l'Ukraine et du fait qu'elle avait été trahie par l'Occident pour des raisons de pétrole, de gaz et d'argent. On a fermé les yeux sur le sang que des Ukrainiens innocents ont versé à cause de l'ex-agent du KGB, le chef du Kremlin, aujourd'hui président à vie. Ironiquement, l'Église orthodoxe russe considère M. Poutine comme un miracle de Dieu. Il me semble que ce titre est on ne peut plus inapproprié.
En septembre 2014, j'ai écrit sur ce que le Canada devrait faire face à l'invasion russe de l'Ukraine. L'Ukraine n'a jamais envahi la Russie; c'est plutôt l'inverse. Avant février 2014, soit avant l'invasion par ces petits hommes verts, il n'y avait pas eu de morts en Ukraine. L'Ukraine continue de payer le prix de sa naïveté. Elle n'aurait pas dû croire aux garanties de l'Occident. À ce moment-là, en septembre 2014, j'avais indiqué que nous devrions déployer des troupes canadiennes sur le terrain afin de surveiller la frontière internationale entre la Russie et l'Ukraine. Pourquoi M. Poutine s'y opposerait-il puisqu'il est en faveur de la paix?
Ma collègue vient de parler d'un article rédigé par l'ancien secrétaire général de l'OTAN, Anders Fogh Rasmussen, paru dans l'édition d'aujourd'hui du Globe and Mail. L'article s'intitule « Peace in Ukraine requires a carrot and stick approach ». Autrement dit, si on veut rétablir la paix en Ukraine, il faut avoir recours à la méthode de la carotte et du bâton. Je recommande cet article au Comité. Je l'ai lu ce matin et je me suis dit que je ne devrais peut-être pas comparaître aujourd'hui, étant donné que nous partageons le même avis là-dessus. Toutefois, je ne crois pas que c'est le cas de l'ancienne ambassadrice.
La Russie a mené une vaste campagne de désinformation au sujet de la ministre des Affaires étrangères, Chrystia Freeland. Cette opération de salissage a trouvé écho dans quelques publications de l'Institut Rideau, qui a accusé Mme Freeland d'adopter une approche intransigeante à l'égard de la Fédération de Russie. Je suppose qu'elle agit selon ses principes.
Je suis moi-même allé en Ukraine en juillet dernier. Comme mon collègue, M. Kuzio, je me suis rendu aux premières lignes en tant que simple citoyen. J'ai eu l'occasion de parler aux troupes canadiennes et américaines, entre autres, qui étaient à Yavoriv, dans l'Ouest de l'Ukraine et à Kamianets-Podilskyi, le centre minier. Je faisais partie d'une délégation dirigée par le général Paul Wynnyk. La grande majorité des militaires canadiens m'ont dit que leur déploiement leur avait été très utile. Il leur a permis d'apprendre des Ukrainiens, qui apprennent à leurs dépens à combattre au front, face aux attaques russes. Il était assez étonnant de voir le professionnalisme et le cran des soldats ukrainiens de première ligne.
Il y a beaucoup d'insultes qui sont lancées d'un côté comme de l'autre, et cela peut parfois être drôle. J'ai d'ailleurs écrit à ce sujet. Mais il reste que ce dont l'Ukraine a vraiment besoin aujourd'hui, ce sont des armes défensives pour lutter contre les armes offensives que la Fédération de Russie a déjà déployées contre eux. Je suis convaincu que si les Ukrainiens bénéficiaient de ce type de soutien, ils remporteraient ce que je décrirais comme une guerre juste devenue une guerre d'indépendance.
Le dernier article que j'ai écrit à ce sujet — et je suis désolé de ne pas pouvoir vous le remettre aujourd'hui — a été publié dans plusieurs journaux, dont le Jerusalem Post. Il portait sur le décès d'un bénévole de 20 ans qui oeuvrait en première ligne. Son véritable nom était Maxim; son pseudonyme était Okun. Je l'ai rencontré le 18 juillet sur la ligne de front à Donetsk, et il est mort le lendemain exactement au même endroit où je l'ai photographié pour la dernière fois. Sa photo figure d'ailleurs dans mon document. Comme il m'a dit avant de mourir, il est mort en défendant l'Ukraine contre l'ennemi envahisseur, en parlant de la Russie.
Quelles sont mes recommandations? Elles sont très simples et évidentes. Je crois que nous devrions maintenir la présence des troupes canadiennes en Ukraine et dans les États baltes afin d'appuyer nos alliés de l'OTAN et les Ukrainiens à des fins de formation. Nous devrions maintenir, voire accroître, les sanctions économiques que nous avons imposées aux responsables de la guerre actuelle en Ukraine. Nous devons continuer de refuser de reconnaître l’occupation militaire illégale de la Russie en Crimée. Je pense que nous devons réclamer le retrait de toutes les forces armées russes des parties occupées des régions de Donetsk et de Louhansk. Nous devons fournir des armes défensives à l'Ukraine pour lui permettre de lutter contre l'équipement offensif que la Russie a déjà déployé. Nous devons continuer de communiquer avec l'Ukraine tous les renseignements politiques ou militaires possibles pour lui permettre de continuer à se défendre contre la Russie.
Enfin, après le retrait des troupes russes des régions de Louhansk et de Donetsk, comme M. Poutine a dit qu'il ferait, nous devons déployer des soldats canadiens le long de la frontière internationale qui sépare la Russie de l'Ukraine pour empêcher les forces armées russes de faire d'autres incursions en territoire ukrainien et de ravitailler des groupes criminels et terroristes qui pourraient demeurer actifs en Ukraine une fois que les forces russes se seront retirées.
Merci.
Merci.
Nous allons maintenant amorcer notre première série de questions. Monsieur Robillard, la parole est à vous.
[Français]
Merci, monsieur le président.
Mes questions s'adressent à M. Luciuk.
Quelles tactiques les groupes séparatistes prorusses ont-ils employées contre les forces armées ukrainiennes dans la région du Donbass?
Quels aspects des accords de paix Minsk I et Minsk II n'ont pas été mis en oeuvre par la Russie et par les groupes séparatistes prorusses en Ukraine? Pourquoi ces aspects n'ont-ils pas été mis en oeuvre?
Quel est l'objectif à long terme de la Russie en ce qui a trait à la région du Donbass?
Dans quelle mesure l'intervention de la Russie dans la région du Donbass s'inscrit-elle dans de plus grandes ambitions d'expansion territoriale?
Bref, quelles leçons tire-t-on à ce jour du conflit en Ukraine?
[Traduction]
J'ai raté la première partie de votre question, mais en gros, d'après ce que j'ai compris, en ce qui concerne les soi-disant groupes prorusses en Ukraine, particulièrement à Donetsk et à Louhansk, il s'agirait d'une histoire montée de toutes pièces par la Fédération de Russie. N'empêche qu'il y a des enjeux liés aux langues minoritaires qui doivent être réglés. Certains l'ont été, d'autres non. C'est un problème que l'Ukraine devra sans aucun doute résoudre à l'avenir. Les russophones en Ukraine n'ont subi aucune persécution. En fait, ils bénéficient des mêmes libertés que tous les autres citoyens ukrainiens.
L'invasion russe sur le territoire ukrainien visait, selon moi, à déstabiliser l'Ukraine, là où une majorité importante d'Ukrainiens souhaitaient que le pays se tourne vers l'Europe; là où le gouvernement du président Ianoukovitch a riposté par la violence, comme on l'a vu avec le mouvement EuroMaïdan, ce qui a ensuite mené à l'invasion de certaines régions de l'Ukraine, y compris l'occupation de la Crimée; là où un référendum a été tenu sous occupation militaire, et dont les résultats n'ont été reconnus par aucun pays, sauf évidemment la Russie. Il y a ensuite eu l’annexion illégale de la Crimée par la Russie qu'aucun pays occidental n'accepte.
Dans cette optique, je suis en partie d'accord avec mon collègue, M. Kuzio. Il a énoncé cinq théories sur la guerre en Ukraine. Il y a une combinaison de plusieurs facteurs, mais chose certaine, l'un des principaux problèmes est le refus de nombreux Russes, y compris M. Poutine, bien entendu, à la tête, d'abandonner la notion archaïque selon laquelle les Ukrainiens et les Russes forment un seul et même peuple. Il s'agit d'un fantasme créé par Moscou il y a plusieurs siècles qui s'est perpétué pendant la période soviétique et jusque dans la période postsoviétique actuelle. Le choc ressenti par de nombreux Russes en 1991 lorsque l'Union soviétique s'est effondrée et que l'Ukraine a déclaré son indépendance, et la notion selon laquelle l'Ukraine pourrait être un État légitime en Europe sont deux choses que beaucoup n'ont pas pu accepter.
D'un autre côté, Poutine, de par ses mesures agressives visant l'Ukraine, a peut-être rallié sa propre nation, mais les Ukrainiens se sont serré les coudes. Cela a suscité chez les Ukrainiens russophones non seulement un fort patriotisme, mais aussi un désir de voir tous les envahisseurs russes chassés de leur territoire. Par conséquent, ironiquement, Poutine, comme on l'a parfois soutenu, est presque à l'origine de l'Ukraine moderne dans le contexte de cette guerre d'indépendance. Quant à ses objectifs à long terme visant à déstabiliser l'Ukraine afin de garder un grand pays potentiellement prospère en dehors de l'Union européenne et pour entretenir le projet d'une Russie impériale, c'est-à-dire le projet utopique dont j'ai parlé plus tôt.... Contrairement à M. Kuzio, je ne crois pas que le projet va réussir. En fait, je suis convaincu qu'il va échouer, au prix de grands efforts.
[Français]
Quelles sont les chances que l'Ukraine parvienne à réformer son ministère de la Défense d'ici la fin de 2018 et que l'interopérabilité militaire complète avec les membres de l'OTAN soit assurée d'ici 2020? Est-il vraisemblable que l'Ukraine puisse devenir membre de l'OTAN d'ici 2020?
Comment la Russie réagit-elle à l'aide et à la contribution de l'OTAN dans le cadre des réformes en Ukraine?
[Traduction]
Personnellement, je sais que l'Ukraine souhaiterait vivement adhérer à l'OTAN. Le professionnalisme des troupes de première ligne ukrainiennes et des unités de la Garde nationale ukrainienne qui, à certains égards, est mieux préparée que les troupes de première ligne, est tel qu'elles se comparent aux troupes occidentales.
Le degré d'interopérabilité est une question légèrement différente, et c'est une chose sur laquelle on travaille, mais d'après ce que j'ai vu, je ne crois pas qu'on sera prêt d'ici 2018. Cela dit, les militaires ukrainiens sont très bien en mesure de gérer la situation, selon mes observations aux premières lignes. Les professionnels qui sont là sont très compétents et tirent des enseignements très rapidement. On m'a dit — et je peux uniquement me fier à ce que m'ont dit les troupes ukrainiennes de Spetsnaz et les troupes chargées du renseignement — que contre leurs équivalents russes, ils sont sur un pied d'égalité. Contre des conscrits russes, ils remporteraient la guerre.
Merci, monsieur le président.
Je remercie les témoins de participer à notre étude, qui est bouleversante pour bon nombre d'entre nous qui sont d'origine ukrainienne.
Il a coulé beaucoup d'eau sous les ponts depuis 2014, mais je sais que l'Ukraine et la Russie se sont opposées aux missions de maintien de la paix de l'ONU. Pouvez-vous nous parler de ces deux pays?
Je vais demander à l'ambassadeur Mason et à M. Kuzio de m'aider à répondre à cette question.
Je crois savoir que la Fédération de la Russie et l'Ukraine se sont initialement opposées à ces missions, mais au cours des derniers mois, si je ne m'abuse, l'Ukraine a réclamé le déploiement de troupes de maintien de la paix à la frontière internationale entre la Fédération de la Russie et l'Ukraine, pas à la ligne de séparation. Le fait de déployer des Casques bleus ou des observateurs à la ligne de séparation pourrait amener certains à croire que c'est la frontière légitime, mais c'est en fait un territoire occupé, une ligne de séparation à proximité de laquelle j'ai failli être tué. Ce serait comme reconnaître un territoire acquis illégitimement.
Le problème, et je crois qu'il en a été question dans un article paru dans le Globe and Mail aujourd'hui, est la façon de déterminer les endroits où ces Casques bleus ou observateurs devraient aller. Selon l'Ukraine, ils devraient aller à la frontière internationale initiale, une frontière, soit dit en passant, que la Fédération de la Russie a reconnue comme étant inviolable lorsqu'elle a appuyé les accords de Minsk et les ententes de Budapest. C'était censé être la frontière. Le territoire de l'Ukraine était censé être souverain. La Crimée était occupée — la première violation de la souveraineté —, et les régions de Donetsk et de Louhansk sont maintenant occupées aussi. Je pense que la position de l'Ukraine est de dire, « Nous allons revenir à ce qu'il en était avant la guerre, puis nous discuterons ». La position de la Russie est évidemment de dire, « Nous avons acquis ce territoire ».
Je peux également ajouter un point. De nombreuses personnes de l'autre côté — ce que j'appelle les régions de Donetsk et de Louhansk occupées — traversent la frontière chaque jour. C'est presque bizarre de rencontrer ces personnes comme dans un Starbucks, qui sont à 50 mètres de la frontière. Vous discutez et buvez un café, et vous demandez quelle est la situation de l'autre côté de la frontière.
Il y a eu très peu d'efforts de reconstruction, très peu de tentatives de réparer les dommages causés par les deux parties durant la guerre. Par conséquent, les gens de l'autre côté de la frontière, en territoire occupé, souffrent vraiment — c'est indéniable — tandis que les gens du côté ukrainien ne semblent pas souffrir, sauf ceux le long de la ligne de démarcation. De l'autre côté de cette ligne, la vie continue normalement. J'ai visité des écoles, des églises, des résidences privées, et j'ai vu des gens mener leur vie du mieux qu'ils peuvent, sachant qu'il y a des tirs d'artillerie à l'occasion.
Je pense que les deux parties ont fait un appel à la paix; les deux parties ont réclamé des observateurs; les deux parties ont demandé la présence d'une force internationale quelconque. Reste à concilier l'orientation qu'elles veulent prendre. Je crois que l'ancien secrétaire général a dit exactement la même chose.
Pour revenir à la question qui a été soulevée sur les accords de Minsk — car toute cette question est liée aux accords de Minsk également —, dans les diapositives de ma présentation PowerPoint que j'ai envoyées ce matin et que le Comité a sans doute, l'avant-dernière diapositive porte sur ces accords. Lorsque les gens disent qu'il n'y a aucune autre solution de rechange, le problème est qu'aucune mesure prévue dans les accords de Minsk n'a été mise en oeuvre, et la Russie, l'Ouest et l'Ukraine ont des idées très différentes concernant les prochaines étapes à suivre.
La Russie propose de procéder d'abord à des changements et à des réformes politiques, puis de mettre des mesures de sécurité en place. L'Ouest et l'Ukraine estiment que la sécurité doit être assurée avant d'effectuer des réformes politiques. C'est parce que la Russie ne veut pas incorporer le Donbass de l'Est de l'Ukraine à la Russie. Elle veut utiliser cette région comme levier face à Kiev pour avoir un droit de veto quelconque sur les politiques nationales et étrangères de l'Ukraine en vue de balkaniser en quelque sorte l'Ukraine.
Lorsque vous dites qu'il n'y a aucune solution de rechange aux accords de Minsk, eh bien, aucune mesure prévue dans ces accords n'a été mise en oeuvre. Entre l'accord de Minsk I et l'accord de Minsk II, entre 2014 et 2015, Poutine, durant ce vaste processus, a créé diverses milices qui sont devenues l'une des plus grandes armées de l'Europe. À l'heure actuelle, les séparatistes, ou les forces interposées russes, comptent 35 000 membres. Avec les forces russes et leurs 5 000 militaires, le nombre s'élève à 40 000. C'est plus que la moitié de l'armée de l'OTAN.
Le problème avec la mission de maintien de la paix, c'est qu'en Ukraine, on ne fait aucunement confiance à Poutine, ce qui n'est pas étonnant. Ce n'est pas seulement à cause de ce qui s'est passé en Ukraine. C'est aussi à cause — rappelons-nous — de la Moldavie, de la Géorgie, de l'Azerbaïdjan et d'autres régions de l'ancienne URSS qui ont fait ce genre de choses dans le passé, ce qui a créé et gelé un conflit par la mise sur pied de leurs propres forces de maintien de la paix. L'Ukraine n'accepterait jamais que des soldats russes fassent partie de cette force de maintien de la paix. Comme M. Luciuk l'a dit, les Casques bleus devraient être à la frontière entre l'Ukraine et la Russie, et non pas à la ligne de cessez-le-feu.
Le plus important pour Poutine, c'est d'avoir l'air d'un artisan de la paix avec cette proposition afin que l'Europe renonce à ses sanctions contre la Russie. C'est son but. Nous ne devrions pas lui permettre de s'en tirer à bon compte, car il ne se préoccupe pas vraiment de la paix.
Merci.
J'ai eu des conversations avec de nombreuses personnes. Les gens ont l'impression que si l'armée ukrainienne avait été beaucoup mieux équipée et avait été plus présente en Crimée avant l'invasion de 2014, cette crise aurait été évitée. Pourriez-vous vous prononcer là-dessus?
Je pense que l'armée ukrainienne a été affaiblie durant le régime Ianoukovitch et, par conséquent, n'était pas préparée pour gérer la crise lorsqu'elle est survenue, et plus particulièrement dans les rangs de sous-officiers. De plus, aux rangs supérieurs de l'armée, il y avait un grand nombre de vieux surnuméraires de la période soviétique, qui ont nui à la jeune génération d'officiers dans leur travail.
Ce que j'ai entendu dire, c'est que ceux qui occupent les postes de colonel et de major-général sont tous très compétents. Ils sont tous très aptes à affronter l'armée russe, mais ils n'ont pas l'appui des vieux surnuméraires et n'ont pas suffisamment de sous-officiers pour transmettre leurs ordres. C'est un problème de taille, et ils le reconnaissent.
Merci, monsieur le président, et merci à nos témoins de comparaître aujourd'hui.
Je veux m'attarder sur les témoignages diamétralement opposés de M. Luciuk et de l'ambassadrice Mason concernant l'approvisionnement en armes en Ukraine à l'heure actuelle. Je suppose qu'il y a deux aspects à cette question. L'une est l'incidence sur le conflit. L'autre est le fait qu'il y a des allégations selon lesquelles l'Ukraine a déjà été impliquée dans des transactions d'armes assez douteuses avec d'autres partenaires, qu'elle aurait fourni des pièces de missiles à la Corée du Nord, et qu'elle aurait approvisionné en armes des États d'Afrique qui sont visés par des blocus d'armes.
Je vais commencer avec M. Luciuk, puis je céderai ensuite la parole à l'ambassadrice Mason. Pouvez-vous parler de l'incidence immédiate de l'ajout d'armes dans le conflit et de l'utilisation finale des exportations possibles?
L'incidence immédiate serait de rendre l'armée ukrainienne plus apte à combattre les envahisseurs. C'est aussi simple que cela. Bien franchement, j'imagine qu'il y aurait plus de morts russes. C'est la guerre.
L'Ukraine est aux prises avec des problèmes de corruption dans l'armée et la vie civile. C'est indéniable, mais la situation s'améliore. L'Ukraine est certainement moins corrompu que la Fédération de la Russie. M. Poutine est un milliardaire. Comment devient-on un milliardaire en touchant un salaire d'un ancien membre du KGB et en étant le président à perpétuité de la Fédération de la Russie? Il gagne un bon salaire, j'en conviens, mais de là à devenir un milliardaire? C'est un cas flagrant de corruption.
En ce qui concerne les armes, une histoire a circulé... Je pense que cela fait partie d'une campagne de désinformation contre l'Ukraine. Il n'existe aucune preuve que l'Ukraine a aidé la Corée du Nord à se doter d'armes nucléaires. L'Ukraine a une industrie d'armements très importante — c'est vrai —, et quelques troupes de première ligne s'en sont plaintes. Pourquoi des armes fabriquées en Ukraine sont-elles vendues sur les marchés internationaux? Cela fait partie du processus. Les gouvernements de partout dans le monde vendent des armes. Le Canada en vend. Nous avons vendu des armes à l'Arabie saoudite, ce que madame l'ambassadrice a dénoncé. Tous les pays le font. Si les Ukrainiens l'ont fait, et je ne connais pas les détails, c'est regrettable, mais c'est surtout regrettable pour les troupes de première ligne qui pourraient utiliser ces armes.
Merci beaucoup.
Je veux juste revenir à la déclaration selon laquelle il n'y a aucune solution de rechange à l'accord de Minsk et souligner que je citais le ministre ukrainien de la Défense, qui a fait cette déclaration en mai, et le président Poutine et Angela Merkel ont également déclaré qu'il n'y a pas de solution de rechange à l'accord de Minsk.
En ce qui concerne le deuxième point, l'incidence sur le conflit, la question a été étudiée de façon approfondie, et je m'en remettrais aux experts indépendants très respectés qui font partie du groupe qui se penche sur la crise internationale. Ils ont été très actifs pour analyser ce conflit. Je pense que tout le monde peut constater qu'ils ont été très impartiaux et ont formulé des critiques lorsque c'était nécessaire. Ils se sont rendus sur place et ont mené un très grand nombre d'entrevues avec divers conseillers militaires et diplomates pour connaître l'incidence sur le terrain et recueillir tous les arguments. Ils ont conclu qu'en raison de la dynamique sur le terrain, chaque partie doit répondre à une action militaire perçue par l'autre — et nous parlons d'armes défensives et de toutes les recommandations de l'ancien secrétaire général de l'OTAN. Il a dit qu'il n'y aurait aucun avantage militaire important, mais que ce serait perçu comme étant une mesure militaire. Par conséquent, les forces séparatistes réagiraient et il y aurait une montée de la violence, ce qui ne serait pas la direction que nous voulons emprunter.
Je veux revenir à l'observation selon laquelle il ne pourrait pas y avoir de Casques bleus à la ligne de séparation, ce qui est bien entendu énoncé dans l'accord de Minsk, signé par toutes les parties, car ce faisant, on légitimiserait cette ligne davantage que l'accord de Minsk le fait déjà. Cela dénote fondamentalement une mauvaise compréhension de ce que les Casques bleus sont censés faire. Bien entendu, je m'empresse d'ajouter que ce n'est pas le seul endroit où les Casques bleus doivent être, mais s'ils veulent passer d'un cessez-le-feu à un accord plus significatif, ils doivent être en mesure de vérifier que tout le monde respecte l'accord de Minsk. Ils doivent donc être là où sont les forces. C'est en fait ce que l'OSCE est censée faire, et tout le monde en a convenu, mais ces intervenants n'ont tout simplement pas la capacité de se protéger. C'est la raison pour laquelle toute cette proposition concernant les opérations de maintien de la paix de l'ONU est si ingénieuse, car elle assure la sécurité et la protection de ces observateurs de l'OSCE pour qu'ils puissent faire leur travail.
Je veux revenir au point que l'autre témoin a soulevé selon lequel on ne veut pas se trouver dans une situation où le conflit est gelé. Je suis tout à fait d'accord. Je pense que personne ne laisse entendre ou ne devrait laisser entendre que les forces russes participeraient à ce conflit d'une quelconque façon. C'est pourquoi je dis qu'il ne pourrait évidemment pas y avoir des forces canadiennes, car une mission de maintien de la paix de l'ONU adéquate a des forces impartiales. Je pense que nous avons beaucoup appris des conflits gelés, et je pense que c'est ce que nous essayons d'éviter ici.
Merci.
Madame l'ambassadrice, vous avez dit que le Canada ne pourrait pas jouer le rôle de gardien de la paix. Nous contribuons à la mission de l'OSCE, et le Canada, comme nous l'avons appris, n'a pas respecté pleinement son engagement à envoyer des observateurs.
Croyez-vous que notre position nous permettrait de fournir du matériel additionnel à la mission de surveillance?
Bien entendu, la mission de l'OSCE, si... Je devrais revenir en arrière et dire qu'un élément clé dans le choix des forces pour une opération de maintien de la paix de l'ONU, c'est que ces forces doivent être acceptables pour toutes les parties. Alors, oui, si nos forces étaient acceptables pour toutes les parties, alors nous pourrions les déployer. Dans le cadre de l'OSCE, en raison de notre travail de longue date là-bas, les gens n'ont aucun problème avec nous. Mais c'est l'élément clé. La formation de toutes les opérations de maintien de la paix de l'ONU repose sur le fait que tous les éléments doivent être acceptables pour toutes les parties.
Merci beaucoup, monsieur le président.
Merci beaucoup à vous tous de vos témoignages. Lorsque nous entendons trois positions divergentes, cela intensifie la complexité du dossier.
Je pense que nous sommes tous d'accord que les attaques de la Russie envers l'Ukraine vont au-delà du simple fait qu'elle voit l'Ukraine comme faisant partie de la sphère d'influence russe.
Monsieur Kuzio, vous avez mentionné l'intérêt de l'Ukraine à l'égard de l'Union européenne et de l'OTAN, et vous avez utilisé trois expressions intéressantes que j'ai notées: bras de fer géopolitique, bâtisseur d'empire et unité nationale. Ce sont tous des concepts qui, je pense, ont peut-être mené à ces attaques — surtout le premier, l'Union européenne et l'OTAN.
Vous avez mentionné qu'à Moscou, les gens estiment que les Ukrainiens adoreraient retourner — faute d'un meilleur mot — à la mère patrie. Nous savons que ce n'est pas le cas, mais je m'intéresse à la grande capacité de la Russie de mener des guerres de l'information et à la façon dont elles peuvent avoir une incidence sur ce que pensent les Ukrainiens, surtout le long de la frontière.
Pensez-vous que cela a une incidence? J'aimerais connaître votre opinion.
Monsieur, je vais céder mon temps de parole qu'il me restera après que vous aurez répondu à ma question à mon collègue, M. Wrzesnewskyj. J'aurais d'autres observations à ajouter, mais j'aimerais entendre ce que M. Wrzesnewskyj a à dire également.
La guerre et le conflit, comme dans n'importe quelle guerre et n'importe quel conflit, ont fondamentalement changé l'Ukraine, et les sondages d'opinion le démontrent sans l'ombre d'un doute. Si l'on tenait un référendum en Ukraine aujourd'hui sur la composition de l'OTAN, 78 % des gens l'appuieraient. C'est une hausse marquée par rapport aux quelque 30 % en 2014. C'est la même chose pour l'Union européenne.
L'idée que les Ukrainiens veulent retourner à la mère patrie est une fabulation à Moscou. Ce n'est pas ce que révèlent les sondages d'opinion en Ukraine. Les pro-Russes, pour ainsi dire, les camps politiques, sont actuellement à l'extérieur des frontières de l'Ukraine dans des territoires occupés ou sont complètement marginalisés à cause de l'époque d'Ianoukovitch.
La guerre de l'information est un excellent argument. Je pense que la raison pour laquelle les manifestations contre la révolution EuroMaïdan à Donetsk se sont transformées en insurrections violentes était en partie à cause de la guerre de l'information. Les gens regardent la télévision russe, les médias sociaux, etc. Les Ukrainiens qui ont appuyé Euromaïdan ont été qualifiés de fascistes. Si quelqu'un est un fasciste au sens de la définition du terme lors de la Seconde Guerre mondiale, il peut être traité de façon inhumaine ou être exécuté, et c'est ce qui s'est produit en fait. La guerre de l'information visait à modérer les manifestations et à empêcher les gens de prendre les armes, ce qui a ensuite été appuyé par les petits hommes verts, les forces spéciales russes qui sont arrivées en avril 2014.
La guerre de l'information est très importante ici, surtout parce que c'était une pratique courante pendant très longtemps dans l'Union soviétique, et les gens ont tendance à l'oublier. Ils pensent que Poutine a tout inventé en 2014. En fait, non. La désinformation faisait partie de l'expérience soviétique et il y a toujours eu une vaste campagne de désinformation contre le prétendu nationalisme ukrainien et les émigrés ukrainiens, y compris ceux au Canada. La campagne de désinformation actuelle s'inspire de cette campagne et, aux yeux de Moscou, vous étiez soit un bon Russe qui appuyait le monde russe, soit un fasciste qui appuyait l'intégration de l'Ukraine dans l'Ouest.
C'est le monde simple que l'on dépeignait à la télévision russe. Donc, la guerre de l'information, de la manière dont elle a été menée, a fait des morts et a infligé à des gens, dont des soldats ukrainiens, des traitements inhumains.
Je remercie mon collègue de partager son temps de parole avec moi.
Madame Mason, vous avez dit que vos observations étaient fondées sur 20 ans d'expérience. Avez-vous déjà travaillé à des projets sur le terrain en Ukraine?
Je n'ai pas travaillé à des projets sur le terrain en Ukraine, mais j'ai formé des militaires ukrainiens, et j'ai passé du temps en Ukraine pour m'occuper d'autres dossiers, notamment celui des armes nucléaires, dont mon collègue a parlé.
Vous n'avez donc pas d'expérience réelle sur le terrain en Ukraine. Avez-vous travaillé avec des organisations qui militent pour la démocratie et les droits de la personne en Russie?
Non. Ce n'est pas sur cela que mes observations sont fondées. J'ai parlé de formation en maintien de la paix sur le terrain avec l'ONU et l'OTAN à divers endroits — voilà ce que j'ai dit —, ainsi que de nombreuses activités diplomatiques, y compris en Russie et en Ukraine...
Merci.
Vous avez critiqué l'adoption unanime par la Chambre du projet de loi S-226. Dans un rare geste d'unanimité, les cinq partis ont adopté cette loi, la loi Magnitsky contre les auteurs de violations graves de droits de la personne.
J'aimerais comprendre votre raisonnement. Vous avez dit que l'adoption de cette loi nous empêche d'aller en Ukraine pour faire certains travaux dont nous parlons ici aujourd'hui. Est-ce que la loi nous empêche aussi de travailler au Venezuela et au Myanmar? Disons que nous suivions la tactique contraire et que nous n'adoptions pas de loi qui sanctionne les auteurs de violations graves de droits de la personne, peu importe où ils se trouvent. Nous ne devrions pas fournir d'armes défensives à un pays qui a été envahi par l'armée et dont le territoire a été annexé, une situation que nous n'avons pas vue en Europe depuis les années 1930. Nous ne devrions pas non plus appuyer les gens qui luttent pour les droits de la personne et qui tiennent tête aux dictateurs et aux régimes corrompus pour défendre les droits fondamentaux de la personne. Or, n'est-ce pas là la définition même de l'apaisement diplomatique?
Je vais devoir vous arrêter là. Je dois donner la parole à M. Gerretsen. Il peut poursuivre la question, s'il le souhaite. Nous aurons le temps d'y revenir, mais je dois passer au prochain intervenant.
Merci beaucoup, monsieur le président.
Je vous demande pardon pour mon retard. J'étais à une autre réunion, et comme je viens d'arriver, j'ai manqué les déclarations préliminaires. Je vous prie à l'avance de m'excuser si je répète ce qui a déjà été dit ou si je demande aux témoins de se répéter.
Monsieur Luciuk, je suis ravi de vous revoir. J'ai une question pour vous concernant le rôle du Canada en Ukraine. Nous sommes là pour contribuer à la formation des troupes ukrainiennes et pour les aider. Durant notre récente visite, nous avons constaté la différence majeure et flagrante dans la manière de procéder des dirigeants des armées ukrainienne et canadienne. Il semble y avoir de réelles différences culturelles entre les structures. Quel rôle le Canada peut-il jouer pour tenter de former l'armée ukrainienne et de transformer son fonctionnement, de la direction aux grades inférieurs?
Je présume que vous étiez à la base d'instruction de Yavoriv, dans l'Ouest de l'Ukraine, ou à Kamyanets-Podilsky. Ce sont les deux endroits principaux où les troupes canadiennes forment actuellement leurs homologues ukrainiens, en commençant par la base, un bataillon à la fois. Les sergents et les caporaux forment les sergents et les caporaux, et ainsi de suite jusqu'aux grades supérieurs. Ils apportent une certaine uniformité à la façon dont les soldats des deux forces armées gèrent les mêmes situations. À l'heure actuelle, des officiers ukrainiens reçoivent de l'instruction au fort Frontenac, à Kingston, dans votre propre circonscription.
Ce processus d'instruction et de formation est en place, et comme je l'ai dit avant que vous arriviez, c'est quelque chose que les soldats canadiens auxquels j'ai parlé, y compris des anciens du CMR qui sont maintenant déployés sur le terrain, et... Les Canadiens et les Ukrainiens apprennent les uns des autres. La situation semble être mutuellement avantageuse.
Je suis convaincu qu'elle fonctionne et je cite les paroles d'un officier canadien qui était stationné...
C'était fascinant. Un soir, nous avons soupé avec les troupes, et j'étais assis en face d'un soldat ukrainien. Il ne savait pas d'où je venais et il a dit: « Je suis allé à un endroit appelé Kingston au Canada pour recevoir une formation. » C'était très intéressant d'établir un tel contact en Europe de l'Est.
Monsieur Kuzio, je veux vous poser une question sur la corruption. Je pense que nous pouvons affirmer que la corruption est présente en Ukraine. J'ai trouvé extrêmement fascinant de constater que dans le milieu de la politique, il y a encore de la corruption dans la façon dont les gens sont élus ou dont ils évoluent au sein du gouvernement.
Or, à Kiev, nous avons rencontré le nouveau chef de police — qui ne devait pas avoir beaucoup plus de 30 ans —, et il nous a parlé des réformes et des changements qui ont été apportés au sein de la police. En gros, il nous a dit que les personnes de plus de 30 ans n'ont plus le droit d'être là. Si elles ont moins de 30 ans, elles peuvent postuler à nouveau. On tente d'apporter des changements et d'éliminer la corruption à la base, mais aux échelons plus élevés, dans le milieu de la politique ou au sein de la direction, si je peux le dire ainsi, la corruption semble encore fermement enracinée.
Il me reste environ une minute. Pouvez-vous prendre ce temps pour expliquer comment ces deux mondes survivront ensemble? Quel sera le résultat? Comment le Canada peut-il aider?
Merci pour cette énorme question.
Très brièvement, depuis 2014, ce qui a été mis en place avec l'aide de partenaires occidentaux — le FMI, par exemple, et l'Union européenne —, c'est que toutes les institutions ont l'obligation de lutter contre la corruption. Le prochain objectif est le tribunal spécial de lutte contre la corruption. Tout cela a été mis en place et ne pose pas vraiment problème.
Ce qui pose problème, c'est envoyer les gens en prison — obtenir des condamnations. Je pense que c'est cela que les Ukrainiens veulent: de la justice. Ils veulent que les élites dirigeantes soient obligées de répondre de leurs actions, ce qui n'a jamais été le cas dans cette partie du monde.
Ce qui différencie l'Ukraine du reste de l'ex-URSS, c'est sa société civile très dynamique, comme vous l'avez dit; c'est la présence de jeunes très actifs et de très bons journalistes qui font du travail d'enquête de qualité. Vous pouvez monter dans un taxi en Ukraine, et le conducteur vous dira tout ce qu'il y a à savoir au sujet de la corruption en politique. Les gens s'intéressent beaucoup plus à la politique en Ukraine que dans un pays occidental typique.
Le plus gros problème, c'est que malgré la quantité énorme d'information qui circule sur les abus de pouvoir, ce qui n'est pas le cas en Russie ou dans un endroit semblable parce que les médias ne sont pas libres — en Ukraine, les médias sont libres —, les gens ne sont pas envoyés en prison.
Merci, monsieur le président.
C'est la première question que je pose au Comité de la défense. Je vous demande donc votre indulgence comme je suis en train de prendre connaissance du dossier.
Oui, exactement. C'est certainement un peu différent du Comité du commerce.
Un de nos objectifs, c'est de comprendre ce que le Canada peut faire pour renforcer les moyens de défense de l'Ukraine afin qu'elle ait les ressources dont elle a besoin. J'essaie de trouver comment contourner les fausses nouvelles et le jeu de relations publiques joué par les deux camps, à l'extérieur comme à l'intérieur de la région.
Monsieur Luciuk, pouvez-vous nous donner des exemples de fausses nouvelles? Comment pouvons-nous distinguer le vrai du faux? Avez-vous des conseils à nous donner à cet égard?
J'ai déjà parlé d'un exemple concernant la Crimée, qui remonte à 2010. À en croire les affiches qui étaient posées partout, les gens de la Crimée voyaient leur future prospérité dans la Fédération de Russie. Le gouvernement à Kiev ignorait complètement les affiches et les pancartes des séparatistes parce qu'à l'époque, il était pratiquement complice de Moscou.
Or, ce qui est plus important, c'est la campagne de désinformation et de diffamation qui a été orchestrée dans l'Ouest. Je ne suis pas spécialiste de la politique américaine; je n'en parlerai donc pas. Toutefois, je peux parler précisément de ce qui est arrivé à notre ministre des Affaires étrangères, Mme Chrystia Freeland, qui a été accusée, sur les fondements d'une histoire fallacieuse, d'être cryptofasciste parce que son grand-père aurait peut-être collaboré avec les nazis durant la Deuxième Guerre mondiale. C'est comme si la fille devait payer pour les péchés de son père, et même si l'on croit cela, il n'y a aucune preuve. De fait, j'ai interviewé indépendamment un des collègues de cet homme durant les années 1980. À l'époque, j'ignorais totalement qui était Chrystia Freeland. J'ai interviewé un collègue du Krakowski Visti, le journal en question, et je lui ai demandé comment il avait pu travailler pour l'administration nazie. Il a dit que c'était une couverture pour une organisation nationaliste ukrainienne. C'est simple. Il faut le croire.
Il y a aussi le genre de désinformation dont M. Kuzio a parlé concernant les fascistes ukrainiens qui courent les rues de Kiev. Oui, il y a des partisans de la droite en Ukraine. Il y en a aussi aux États-Unis, comme nous le savons tous. Et après? Ils forment une infime minorité. Oui, certains d'entre eux se sont ralliés pour défendre l'Ukraine en 2014. Ils ont pris leurs carabines de chasse, ils se sont rendus au front et ils ont été de braves soldats, des miliciens si vous voulez, de la guerre d'indépendance. Toutefois, aujourd'hui, la grande majorité des soldats de première ligne sont des professionnels. La désinformation selon laquelle le gouvernement de l'Ukraine est dirigé par des nazis et des fascistes est exactement cela: un mythe que les propagandistes russes et soviétiques propagent depuis les années 1950 et la première guerre froide.
Je suis désolé, j'ai seulement droit à cinq minutes. Les questions et les réponses doivent donc être très brèves.
Nous tentons de trouver ce que nous pouvons faire. Avant, nous offrions du soutien au moyen de RADARSAT, ce qui permettait d'utiliser les renseignements recueillis par satellite.
D'après vous, est-ce quelque chose qui devrait être fait immédiatement? Je sais que c'est ce que M. Porochenko a demandé lorsqu'il est venu ici il y a quelques semaines.
Y a-t-il autre chose? La question est liée aux fausses nouvelles. Sans données et informations fiables, comment prendre de bonnes décisions? D'après vous, y a-t-il d'autres mesures que nous devrions ajouter à...
C'est une question intéressante qui a déjà été soulevée durant les séances. Ce serait certainement très important de fournir des renseignements aux forces ukrainiennes de première ligne. Nous parlons de fournir des armes en préparation pour une intensification, mais le conflit s'intensifie depuis les trois dernières années. Chaque jour, des soldats et des civils sont tués. Ce n'est pas comme si on avait connu la paix durant les dernières années.
J'aimerais aborder un sujet un peu délicat, mais lié à votre question. Si nous proposons — et je pense que c'est une bonne idée — d'échanger des renseignements et de l'information entre le Canada et l'Ukraine, j'aimerais attirer l'attention du Comité sur un fait. La politique du gouvernement canadien semble contradictoire. En effet, une branche du gouvernement canadien soutient, par l'intermédiaire de l'OTAN ou de manière bilatérale, la réforme de la police, des forces armées et du service de sécurité de l'Ukraine, tandis qu'une autre branche croit que le service de sécurité de l'Ukraine représente une menace pour la sécurité nationale du Canada. Je travaille à la question avec un avocat à Montréal en ce moment. Nous pouvons fournir les détails au Comité. Il semble y avoir une divergence. Une branche du gouvernement canadien affirme que nous voulons travailler avec les forces ukrainiennes, tandis qu'une autre branche déclare que nous devrions nous tenir loin parce que les forces ukrainiennes sont une menace et qu'elles pourraient faire de l'espionnage au Canada. Laquelle est la vraie? Il devrait y avoir une seule politique à cet égard, et non deux.
Je vais m'adresser à vous à nouveau, monsieur Luciuk. Concernant les garanties de sécurité et leurs conséquences, on a garanti à l'Ukraine qu'elle serait protégée si elle signait. Comment les gens se sentent-ils par rapport à cela? Évidemment, l'Ukraine n'a pas été protégée.
C'est exact.
J'ai parlé à des soldats de première ligne et à des jeunes des mouvements prodémocratie de Kiev et de Lviv, et ils sentent vraiment qu'ils ont été trahis.
Oui, car je ne pense pas que les plans de la Fédération de Russie dépendaient vraiment des garanties de l'Ouest. D'après moi, les Russes ont compris dès le début que ce n'était pas vrai ou que c'était certainement... Nous devons faire très attention. Les garanties n'étaient pas des obligations conventionnelles et elles n'étaient pas juridiquement contraignantes. Il s'agissait de déclarations du genre: « Ne vous inquiétez pas, nous allons prendre soin de vous. » Les Ukrainiens ont eu la naïveté d'y croire.
Je peux vous dire une chose. Mes étudiants et d'autres me demandent toujours pourquoi ils ne sont pas comme nous aujourd'hui. Ils ont l'indépendance depuis plus de 25 ans, depuis 1991. Pourquoi sont-ils encore comme cela? Je leur réponds toujours de songer aux Saintes Écritures. Pensez à Moïse, qui a libéré les israélites de l'esclavage. Ils ont dû errer dans le désert pendant 40 ans avant d'arriver à la terre promise, et Moïse ne s'y est jamais rendu. L'Ukraine a besoin d'un Moïse; elle cherche ce genre d'assistance pour arriver à la terre promise, qui, pour elle, se trouve en Europe. Or, il faudra peut-être attendre 40 ans, soit jusqu'en 2031. Il faudra encore du temps.
[Français]
Merci, monsieur le président.
Quelles ont été les stratégies de communication de la Russie concernant ses activités en Europe de l'Est et en Ukraine? Ces stratégies ont-elles été efficaces?
À l'inverse, quelles ont été les stratégies de communication de l'OTAN concernant ses opérations en Europe centrale et en Europe de l'Est? De quelle façon pourraient-elles être améliorées?
[Traduction]
J'ai appris, lors de mes nombreux voyages en Ukraine en 2010, que le message de l'OTAN ne rejoignait pas la collectivité, qu'il était inefficace et limité, et qu'il ne passait pas. À l'époque, une proportion importante d'Ukrainiens était angoissée à l'idée de se joindre à l'Union européenne, mais très réticente à l'idée de se joindre à l'OTAN, en raison de l'image véhiculée par la Fédération de Russie et ses partisans selon laquelle l'OTAN représentait une alliance offensive, l'ennemi occidental de la Guerre froide. De nombreux Ukrainiens souhaitaient accéder à la zone économique de l'Europe en raison des avantages évidents que cela leur procurerait; ils étaient moins enthousiastes en ce qui a trait à l'OTAN.
Depuis 1991, il y a toujours eu un petit pourcentage d'Ukrainiens qui souhaitaient se joindre à l'OTAN, un pourcentage limité, à mon avis, probablement jusqu'en 2014, comme l'a souligné le professeur Kuzio. Aujourd'hui, j'en suis moins sûr. Selon le professeur Kuzio, 78 % des Ukrainiens seraient ravis de se joindre à l'OTAN. Selon ce que je peux comprendre, ce serait plutôt près de 75 % des Ukrainiens, mais inutile de couper les cheveux en quatre. Je vais accepter le pourcentage plus élevé.
[Français]
Merci.
Je remercie les témoins de leur présence.
Je suis allé en Ukraine l'été dernier. D'après ce que je comprends, le conflit là-bas pourrait être long.
Monsieur Luciuk, j'ai cru comprendre de votre présentation que si davantage de capacités étaient fournies aux Ukrainiens, nous serions probablement en mesure de faire reculer les forces prorusses jusqu'à la frontière. De fait, la présence de ces groupes séparatistes prorusses dans la région du Donbass découle d'un manque de capacités de la part des Ukrainiens. Est-ce que j'ai bien compris?
[Traduction]
La fourniture d'armes défensives aiderait les Ukrainiens à faire de l'incursion russe une opération coûteuse et dispendieuse, à la fois au chapitre du matériel et de l'effectif. Je ne crois pas que la Fédération de Russie soit prête à pénétrer plus loin en territoire ukrainien.
Elle souhaiterait plutôt maintenir un conflit gelé et déstabilisé de façon à ce que l'Ukraine chancelle entre la stabilité et l'instabilité. En ce qui a trait aux prétendus séparatistes, je refuse de les appeler ainsi. Oui, certains sont vraiment des séparatistes, mais la majorité de ceux qui participent au conflit sont essentiellement des criminels. Je ne parlerai pas de terroristes, car le terme est surutilisé, mais ces individus, qui disposent de beaucoup d'armes que n'ont pas les membres de l'armée ukrainienne, ont été recrutés par la Fédération de Russie pour exacerber ce conflit.
À mon avis, si les troupes ukrainiennes disposaient des armes défensives dont elle a besoin — c'est ce qu'on me dit —, elles pourraient vaincre ces armées mandataires sur le terrain et rendraient très coûteuses pour ces armées la poursuite de leurs activités. Cela pousserait peut-être la Russie à se retirer du territoire. Étant donné les ressources dont elle dispose, je ne crois pas que l'armée ukrainienne puisse expulser l'armée russe. Il s'agirait d'un affrontement très inégal. Toutefois, l'armée ukrainienne réussit à tenir bon, à améliorer sa position sur le terrain et à causer des pertes importantes à la Fédération de Russie.
Comme vous avez peut-être pu le constater, puisque certains d'entre vous ont visité l'Ukraine, l'armée ukrainienne est incroyablement professionnelle. J'ai pu moi-même constater l'efficacité des troupes; les unités sont plus efficaces, car elles ont profité de programmes d'éducation et de formation canadiens, notamment pour l'exécution d'activités de paix, comme le déminage. Le centre de déminage Kamianets-Podilskyi est superbe. Ces activités permettent de sauver beaucoup de vies. Former les soldats afin qu'ils puissent prodiguer de meilleurs soins médicaux et premiers soins permet de sauver des vies et améliore également le niveau de professionnalisme des soldats qui sont en mesure de défendre l'intégrité de leur territoire et la souveraineté de leur pays.
[Français]
[Traduction]
Votre temps est écoulé.
Je crois que nous aurons suffisamment de temps à la fin pour permettre à ceux qui souhaitent intervenir, mais qui n'en ont pas encore eu l'occasion, de poser leurs questions. Pour le moment, je vais laisser la parole à M. Bezan.
Merci, monsieur le président. Je tiens à remercier les témoins pour leurs exposés et leur reconnaissance de l'importance de cette étude. Pour ceux d'entre nous qui se sont rendus à plusieurs reprises en Ukraine et qui sont d'origine ukrainienne, cette question nous passionne beaucoup. En tant que parrain du projet de loi S-226, je suis fier de voir que les députés de tous les partis ont appuyé à l'unanimité ce projet de loi à la Chambre des communes, tout comme au Sénat, j'en suis convaincu. À mon avis, cela envoie un message à tous les auteurs de violations des droits de la personne selon lequel le Canada n'est pas un endroit sûr où placer l'argent qu'ils ont obtenu en abusant de leurs pouvoirs et en piétinant les droits de leurs propres citoyens.
J'aimerais revenir à l'idée selon laquelle il faudrait s'assurer que l'Ukraine dispose des armes dont elle a besoin pour défendre son territoire. Professeurs Luciuk et Kuzio, vous avez tous les deux étudié l'histoire de l'Europe de l'Est. En examinant les armées et leur impact sur l'avenir, selon vous, le fait de disposer d'une armée puissante facilite-t-il la diplomatie à la table des négociations?
Depuis 2014, l'armée ukrainienne est devenue l'une des plus puissantes en Europe. Elle compte aujourd'hui environ 300 000 membres, plus la garde nationale. Officiellement, l'Ukraine dépense 5 % de son PIB en défense. Il s'agit d'une somme colossale. En un sens, l'agression de Poutine a poussé l'Ukraine à investir dans son armée... avec l'aide du Canada et de la police, notamment, l'Ukraine a effectué une réforme de son ministère de l'intérieur.
À mon avis, le plus important en ce qui a trait à la fourniture d'équipement militaire en Ukraine — le premier pays à envoyer de l'équipement militaire serait probablement les États-Unis, suivi d'autres pays, comme le Canada, la Grande-Bretagne et la Pologne —, c'est que cela enverrait un message, un message essentiel, à Moscou selon lequel, au besoin, l'Occident apportera son soutien à l'Ukraine.
L'Ukraine est un endroit où les troupes occidentales et l'OTAN, y compris les troupes canadiennes, peuvent acquérir beaucoup d'expérience, car le pays est aux prises avec une guerre hybride. Comme l'a souligné le docteur Luciuk, je crois que les troupes ukrainiennes aident... il s'agit, en ce sens, d'un processus bidirectionnel. Il est tout aussi important, à mon avis, d'envoyer ce message que d'accroître l'arsenal de défense. De plus, il ne faudrait pas sous-estimer les propos de M. Luciuk, soit que les Ukrainiens croient que l'Occident a un devoir moral de les soutenir en raison de la question des armes nucléaires.
Après l'effondrement de l'URSS, l'Ukraine a hérité de la troisième plus importante réserve d'armes nucléaires au monde. Elle a tout abandonné entre 1994 et 1996. En retour, l'Ukraine n'a reçu aucune garantie, mais bien des assurances selon lesquelles, au besoin, comme c'est le cas en ce moment, elle pourrait profiter d'un grand soutien de la part de l'Occident.
L'OTAN, tout comme le Canada, d'ailleurs, a un choix: soit le conflit avec la Russie se déroulera sur le territoire ukrainien, soit ce conflit aura lieu dans les pays Baltes.
Je suis tout à fait d'accord avec vous.
Monsieur Luciuk, selon vous, le Canada devrait-il ajouter l'Ukraine à sa Liste des pays désignés, armes automatiques? Vous vous êtes rendu au front et avez constaté vous-mêmes les armes dont dispose l'armée ukrainienne. Quel type d'armes défensives pourraient l'intéresser? Qu'est-ce que le Canada pourrait faire de plus par l'entremise de l'accord Canada-Ukraine sur la défense militaire et la coopération?
Aussi, quels sont les contextes industriels dont dispose l'Ukraine pour développer ses propres armes et quel genre de partenariat les entreprises canadiennes pourraient-elles conclure pour participer au développement d'armes défensives?
Vous avez posé plusieurs questions. D'abord, en ce qui a trait à la liste d'équipements que demandent les Ukrainiens, je vous renverrais à l'article publié aujourd'hui dans The Globe and Mail, où l'ancien secrétaire général Rasmussen dresse cette liste. Je ne vais pas la répéter.
Je crois que l'Ukraine dispose d'une capacité industrielle nécessaire. Par exemple, Kharkiv est l'une des principales villes pour la construction de chars d'assaut et de véhicules blindés de transport de troupes. Cette capacité existe. J'aimerais revenir aux propos qu'a tenus il y a quelques instants le professeur Kuzio. Il est très important pour le comité de ne pas oublier qu'il y a une nouvelle génération d'Ukrainiens, dans la trentaine, qui se considèrent sincèrement comme des Européens, qui souhaitent intégrer le monde civilisé occidental, qui ne souhaitent pas faire partie d'une fédération eurasienne, mais qui se sentent néanmoins trahis, car ils ont appris à leur dépend ce qu'il advient des promesses et des assurances. Il ne faut pas perdre ces gens. Il ne faut pas perdre l'Ukraine.
Merci beaucoup.
Monsieur Luciuk, j'ai été l'une de vos étudiantes. Je suis heureuse que vous ayez accepté notre invitation. Je vais m'appuyer sur les propos de mon collègue et vous poser des questions semblables à celles que je vous ai posées il y a 25 ans.
Ce conflit semble être au point mort. On dirait qu'une percée serait nécessaire. En tant que parlementaires, il nous revient de faire des recommandations sur les prochaines étapes et de tenter de fixer l'ordre de priorités quant à la suite des choses.
Vous avez formulé quelques recommandations, y compris la fourniture d'armes défensives, le partage de renseignements recueillis par RADARSAT, et, bien entendu, l'envoi de soldats de la paix. Nous savons qu'il y a un conflit interne, que celui-ci a un impact sur les citoyens, sur l'armée et sur la guerre de l'information, et qu'il risque de mettre en péril l'aide que nous apportons.
Sur le plan judiciaire, quel avantage avons-nous à apporter notre soutien? Je me tourne également vers l'ambassadrice Mason à ce sujet, car elle a déjà dressé la liste des éléments qui ne devraient pas être inclus dans le rôle du Canada. Peut-être devrions-nous soutenir et renforcer la primauté du droit.
Quelle devrait être la priorité? Devrait-on accorder la priorité à la fourniture d'armes défensives, au soutien interne de la structure et de la primauté du droit ou à la guerre d'information, ou à toutes ces composantes? Selon vous, quelle devrait être la priorité et quelles seraient les prochaines étapes?
L'Ukraine est en guerre. Donc, à mon avis, la priorité devrait être de fournir au pays les armes défensives dont il a besoin. C'est ce que diraient les autorités ukrainiennes.
Ceci dit, le Canada présente un bilan élogieux, très positif et très apprécié à la suite de son soutien aux réformes démocratiques et au développement de la société civile en Ukraine. Ce bilan est indéniable et très apprécié. De nombreux Ukrainiens et Américains d'origine ukrainienne se sont rendus en Ukraine pour y travailler. Par exemple, la ministre de la Santé, Ulana Suprun, fait un excellent travail pour réformer le système de soins de santé. Elle doit composer avec une certaine résistance, mais elle fait de son mieux.
Nous pouvons soutenir ces gens et soutenir les réformes judiciaires.
Comme nous l'avons déjà souligné, le problème, c'est qu'il est très facile de savoir qui sont les personnes corrompues. Comme l'a souligné le professeur Kuzio, tous les chauffeurs de taxi vous diront qui vole qui, mais le problème, c'est d'arrêter ces gens. C'est certainement un problème. Toutefois, avant de jouer à Eliot Ness, je crois qu'il faudrait aider les Ukrainiens aux premières lignes, dans l'arène politique, à sauver leur pays contre cette attaque sans précédent à leur souveraineté nationale et à l'intégrité de leur territoire.
Bref, tout tourne autour de la guerre. Ce n'est pas l'Ukraine qui a commencé cette guerre. Elle n'a rien fait pour mériter la situation dans laquelle elle se trouve. L'Ukraine s'imaginait devenir un pays normal au sein de l'Europe. Oui, il y a de la corruption et le pays accuse du retard à bien des égards, mais il se dirigeait dans la bonne direction.
Honnêtement, et je tiens à être très clair à ce sujet, de nombreux Russes pensaient de la même façon. Nous avons tendance à l'oublier, mais le méchant dans ce conflit, c'est la Fédération de Russie. En réalité, ce n'est pas la Fédération, le méchant; les méchants, ce sont M. Poutine et ses copains du KGB ainsi que les éléments criminels corrompus de la société russe qui contrôlent les médias et qui ont mené la Russie à la guerre, mais, dans quel but? Disons que la Russie gagne la guerre. Luhansk et Donetsk seraient dévastées et les Ukrainiens détesteraient les Russes. Que gagnerait la Russie?
Merci beaucoup.
Je suis certainement d'accord avec les propos qui ont été tenus au sujet de la réforme judiciaire et de la gouvernance en général. Le Canada a beaucoup d'expérience et pourrait aider l'Ukraine à effectuer une réforme judiciaire et à renforcer sa capacité. Nous le faisons constamment et nous pourrions certainement le faire en Ukraine. J'appuierais donc une telle initiative.
Mais, pour revenir à l'accord de Minsk, je tiens à souligner qu'en réalité, l'Ukraine n'est pas en guerre. Le pays a signé un accord de cessez-le-feu. Il y a des problèmes sur le terrain avec...
Mais, madame l'ambassadrice, avec 852 infractions au cessez-le-feu, il est difficile de parler d'un cessez-le-feu.
Oui, mais aucune des parties n'a encore tourné le dos à l'accord, et c'est ce qui est important. Si nous souhaitons vraiment que la situation progresse, j'espère sincèrement que les Canadiens ne seront pas les premiers à tourner le dos à l'accord.
Je tiens à réitérer que c'est en réalité le ministre ukrainien de la Défense, ainsi que d'autres signataires de l'accord, qui a dit que c'est la seule façon de faire progresser ce dossier. Souhaitons-nous les aider, oui ou non?
Si oui, je crois que.... Le seul point sur lequel je ne suis pas d'accord avec l'ancien secrétaire général de l'OTAN, Anders Rasmussen, c'est au sujet des armes défensives — et je ne parle que des armes défensives, comme des lunettes de vision nocturne, et non d'une liste de contrôle des armes à feu automatiques — qu'il recommande. Je ne suis pas d'accord avec lui en raison de la possibilité d'une escalade, mais je conviens qu'il faudrait soutenir davantage l'accord de Minsk.
N'oublions pas que l'Occident a imposé une grande variété de sanctions à la Russie pour son agression en Ukraine. Il a été convenu que le retrait de ces sanctions est maintenant lié à la mise en oeuvre de l'accord de Minsk. Donc, cet accord devient un élément central de la suite des choses.
Merci.
Merci beaucoup, monsieur le président.
Malheureusement, nous avons été témoin cet après-midi d'une chose que nous n'avions pas encore vue sous ce gouvernement, mais dont nous avons été fréquemment témoins sous le gouvernement précédent: lorsque les députés ministériels n'étaient pas d'accord avec les témoins, ils ont attaqué leur expertise ou leur intégrité sans leur donner l'occasion de réagir.
J'aurais quelques questions à poser, mais, auparavant, j'aimerais donner la chance à notre ancienne ambassadrice distinguée pour le désarmement de 1989 à 1995, si je ne m'abuse, et quelqu'un qui a travaillé pour le désarmement, la démobilisation et la réintégration des troupes à l'ONU, de réagir aux attaques qu'elle a essuyées au sujet de ses compétences.
Merci beaucoup. Je vous en suis reconnaissante. Tout comme vous, je suis déçue de ce qui s'est produit.
Je dirais, et je fournirai des notes à ce sujet, que la question n'est pas de ne pas punir les auteurs de violations graves des droits de la personne; la question est de définir comment les punir.
Ce que je dis, c'est que le Canada devrait adopter l'approche uniforme qu'il a toujours adoptée par le passé. Lorsqu'il n'y a aucun lien juridique ou administratif avec le Canada, des approches multilatérales et conformes au droit international devraient être adoptées. Cela contraste vivement avec la position des États-Unis qui privilégient généralement des approches unilatérales et qui cherchent à imposer ses points de vue au reste du monde.
L'embargo sur les armes imposé à Cuba dans le cadre de la Guerre froide est un très bon exemple de la différence entre le Canada et les États-Unis. Ce n'est pas que le Canada ne voyait pas les violations des droits de la personne comme étant un problème grave, mais simplement qu'il croyait qu'il y avait une autre façon d'aborder la question. J'ai fait référence au Conseil des droits de l'homme, mais également au Conseil de sécurité des Nations unies, car lorsque les sanctions sont appuyées par le Conseil de sécurité des Nations unies, elles ont plus d'impact.
Le problème, c'est que certains pays membres du Conseil de sécurité des Nations unies ont un droit de veto et permettent l'imposition de ce genre de sanctions contre certains pays, mais pas contre les autres. C'est la raison pour laquelle je regrette tant que le Canada ait adopté cette approche. Je sais qu'il vous est difficile en tant que parlementaires de vous opposer à ce que la personne moyenne considère comme étant une évidence. Bien sûr, nous nous opposons aux auteurs de violations des droits de la personne. Il faut les arrêter.
Je reviens au point soulevé au sujet de l'Arabie saoudite. Chaque année, ce pays figure parmi les 10 pires pays en ce qui a trait aux violations des droits de la personne. Le Comité va-t-il vraiment recommander le recours à la version canadienne de la Loi Magnitsky pour geler les avoirs saoudiens au Canada? J'en doute.
La méthodologie ne peut pas être efficace, car si l'on fait preuve de discrimination à l'égard de certains pays, mais pas à l'égard des autres, cela nuit à l'intégrité du mécanisme international des droits de la personne.
Merci.
C'est ce qui met fin à nos séries de questions.
La sonnerie ne s'est pas encore fait entendre, ce qui m'étonne, mais cela se produira peut-être au cours des 20 prochaines minutes. Puisqu'il nous reste environ 20 minutes avant que nous passions à huis clos, j'aimerais que nous commencions par trois interventions de cinq minutes chacune. Je vais répartir le temps de parole équitablement de sorte que chaque parti dispose de cinq minutes. L'ordre sera le suivant: Parti libéral, Parti conservateur, NPD. Je vais céder la parole à Mme Young. Vous pouvez prendre la parole et également céder une partie de votre temps. Vous disposez de cinq minutes.
Merci beaucoup, monsieur le président. Je partagerai mon temps de parole avec M. Gerretsen.
Je vous remercie tous de comparaître devant le Comité. Je ne suis que remplaçante aujourd'hui, et c'est donc la première occasion que j'ai de parler de ce sujet très important.
Monsieur Kuzio, je veux revenir sur ce que vous avez dit au sujet du temps qu'il faudra pour que le conflit se règle, à votre avis. Vous en avez parlé également, monsieur Luciuk. C'est très décourageant de vous entendre parler de génération...
Est-ce que vous dites cela peu importe ce que fait l'Occident?
Non, je crois que l'Occident peut faire bien plus que ce qu'il fait présentement. Par exemple, nous venons de parler de l'exportation d'argent sale, disons, provenant de divers pays. Les Européens ont été terribles, et je le dis en tant qu'Européen. L'Union européenne se plaint constamment de la corruption en Ukraine, mais en même temps, où va cet argent sale qui provient de la Russie et de l'Ukraine? En Europe de l'Ouest. Chypre est une machine à blanchiment d'argent. L'argent va aussi à « Londongrad », surnom donné à Londres, et en Autriche, au Liechtenstein, en Suisse, etc. Si nous voulons vraiment leur faire mal et ramener Poutine à la raison, nous pourrions le faire en s'en prenant à son portefeuille.
Comme l'a dit M. Luciuk: c'est un régime de mafia; voilà comment les États-Unis appellent la Russie dans les documents diplomatiques depuis 2010. C'est fondé sur les fuites massives d'argent sale. Cet argent se retrouve en Europe occidentale, ou dans les Caraïbes et au Panama. Nous voulons leur nuire. Nous voulons les ramener à la raison, si je puis dire, au sujet de l'est de l'Ukraine. Pour la Russie, la grande différence entre la Crimée et le Donbass, c'est que l'annexion de la Crimée était très bien vue au pays, y compris du côté de l'opposition, tandis que les gestes de Poutine dans l'est de l'Ukraine ne sont pas aussi bien vus. Voilà pourquoi Poutine cache une grande partie de ce qui se passe là-bas et pourquoi les soldats russes tués dans l'est de l'Ukraine sont enterrés secrètement la nuit, tout comme l'ont été les soldats soviétiques qui ont péri en Afghanistan.
Nous avons plus de poids que nous le pensons, et il s'agit entre autres de frapper Poutine là où cela lui fait le plus mal, et il s'agit de l'argent qu'il a volé.
Merci.
Je veux revenir à la discussion entre Mme Alleslev et M. Luciuk.
Lorsque nous parlons du « cessez-le-feu » — et je crois qu'elle a parlé de 800 points de contact —, en réalité, la ligne de front, du moins selon la description qu'on nous en a faite, à certains endroits, correspond littéralement à la largeur d'une rue. Cela fait en sorte qu'il est extrêmement difficile de maintenir le cessez-le-feu lorsque les troupes sont si près les unes des autres. On se trouve dans une impasse et rien ne semble utile.
Quelle est la prochaine étape? Ont-ils besoin d'une zone tampon? Comment vont-ils s'entendre pour qu'il y ait de vrais changements menant à la résolution du conflit? Pensez-vous que ce n'est même pas vraiment ce qu'ils visent?
Je crois que là où je me trouvais, à Donetsk, et ensuite à Louhansk, la zone tampon, la zone neutre, couvrait plus qu'une large rue. Néanmoins, pendant que j'étais sur le terrain, des violations ont été commises. Des pièces d'artillerie russes tiraient vers notre position ou pas très loin de là lorsque nous étions là-bas et nous avons dû battre rapidement en retraite. De nombreuses violations ont été commises, comme on l'a mentionné. Séparer les parties belligérantes nécessitera beaucoup d'efforts, évidemment, et il y a probablement l'idée de dire à MM. Poutine et Porochenko qu'ils ont tous les deux fait un appel à la paix, à des pacificateurs. Je crois que le problème — et c'est sur ce point que je suis en désaccord avec l'ambassadrice —, c'est de déterminer où l'on envoie ces pacificateurs? Les envoie-t-on dans la zone tampon ou à la frontière internationale? À mon avis, de toute évidence, il ne faut pas récompenser les actes d'agression. On les envoie à la frontière.
Je veux seulement souligner qu'un certain nombre de stagiaires ukrainiens sont ici dans la salle en train de travailler avec des députés. Ils sont le visage de la révolution de la dignité. Ce n'est pas un coup militaire qui s'est produit sur la place Maïdan. Des jeunes ont défendu leurs droits, leur liberté et leurs aspirations. Je suis ravi qu'ils écoutent les témoignages d'aujourd'hui.
Je vais céder le reste de mon temps à Mme Gallant.
Merci, monsieur le président.
Il y a environ un an, un certain nombre de parlementaires et de représentants de pays membres de l'OTAN se sont rencontrés et nous avons été frappés par ce qu'ont dit nos compagnons des pays baltes et de l'Ukraine. Ils nous ont dit qu'on déployait des armes nucléaires en Crimée. Cela a-t-il été vérifié et si c'est le cas, pour quelle raison en déploie-t-on?
Si l'on déploie des armes nucléaires tactiques — parce que c'est ce dont il s'agit — en Crimée et à Königsberg, où je crois qu'il y en a déjà, à Kaliningrad, l'enclave de la Fédération de Russie, c'est bien entendu pour avoir un avantage par rapport à l'OTAN et dominer la mer Noire. La mer Noire... avec la possibilité que la Fédération de Russie doive défendre le flanc sud contre l'OTAN, déployer ces armes lui donne un levier contre l'indépendance de l'Ukraine. Cela lui donne, dans le nord, du poids contre les États membres de l'OTAN et les États baltes. C'est simplement pour des raisons géostratégiques.
En ce qui concerne la cyberguerre, nous savons que l'Ukraine a vécu deux attaques, mais avec les progrès qu'ils semblent faire et dont ils se servent de façon expérimentale pour le reste du monde, ils s'en prennent maintenant à l'infrastructure, non pas seulement à Internet, mais à l'Internet des objets également. Que pouvez-vous nous dire au sujet des progrès qu'ils ont faits en utilisant l'Ukraine comme laboratoire expérimental de cyberattaques?
Je ne peux pas répondre à cette question. Je ne me sens pas à l'aise de répondre à une question sur le sujet, mais peut-être que M. Kuzio le peut.
Ce qui est intéressant au sujet de la cyberguerre, c'est que cela n'a rien de nouveau. La première cyberattaque que la Russie a menée visait un pays membre de l'OTAN et de l'Union européenne, soit l'Estonie, en 2007. Je pense qu'on s'est fait beaucoup d'illusions concernant la Russie. On a essayé de remettre le compteur à zéro une troisième fois à l'époque du président Barack Obama et de la secrétaire d'État Hillary Clinton. Une grande partie des choses qui se sont passées en Russie ont été ignorées. La Russie mène ce type d'activités depuis longtemps.
Dans le cas de l'Ukraine, comme vous l'avez dit, les cyberattaques étaient principalement dirigées contre des services collectifs, et il s'agissait de recueillir de l'information en piratant divers comptes Web du gouvernement. C'est semblable à ce qui s'est passé aux États-Unis au cours des élections présidentielles de l'an dernier. Je ne crois pas qu'il y ait une grande différence. Tout cela est indissociable de l'information hybride de la Russie et d'autres types de guerre. C'est indissociable du point de vue de la Russie ou de Poutine selon lequel il est menacé. C'est ce que nous devons comprendre. Poutine croit qu'il est menacé par l'Occident agressif, et il ne fait que défendre la Russie contre lui. Telle est la mentalité, le type de mentalité d'assiégé qui règne à Moscou présentement. Or, cela ne date pas d'hier. Cette situation dure depuis au moins 10 ans. Pendant la révolution orange — sans parler de l'EuroMaïdan — en 2004, les prétendus conseillers politiques russes étaient actifs en Ukraine à l'époque et faisaient certaines choses comme diffuser de fausses informations, également. Bon nombre de ces choses se passent. La situation a maintenant atteint un point critique en particulier en raison de ce qui s'est produit aux élections américaines l'an dernier. Je crois qu'avec les élections américaines, l'Occident a pris conscience que la Russie faisait des siennes et que Poutine faisait des siennes, mais il a fallu beaucoup de temps.
Merci.
Merci, monsieur le président.
Je veux revenir sur la question des exportations d'armes. Nous savons qu'en 2015, le président Porochenko a annoncé qu'il voulait faire de l'Ukraine l'un des cinq plus grands exportateurs d'armes au monde. En 2016 je crois que le pays a atteint le 11e rang. Les pays auxquels l'Ukraine vend des armes ne sont pas toujours de grands défenseurs des droits de la personne: Éthiopie, Nigéria, Ouganda, etc. En fait, il semble que la majeure partie du matériel militaire ukrainien est encore envoyée en Russie dans le cadre d'ententes concernant des tiers, malgré le boycottage officiel de ventes à la Russie.
Je vais poser une question à l'ambassadrice Mason, qui a la plus grande expérience sur le plan du désarmement, encore une fois, sur l'utilisation finale. Si l'on décidait de vendre des armes meurtrières à l'Ukraine, qu'est-ce qui nous garantit que ces armes ou leurs substituts ne seraient pas exportés ailleurs dans le monde?
Premièrement, bien entendu, je dirais que l'information selon laquelle la majorité des produits se retrouvent en Russie témoigne vraiment de la dure réalité économique, en ce sens qu'il existe des liens qu'on ne peut nier. En fait, c'est ce que reconnaît l'Accord de Minsk.
Je veux également revenir à la question de savoir où les casques bleus de l'ONU doivent être déployés. Bien sûr, il appartient aux parties de le déterminer dans le cadre des négociations concernant le mandat, mais si la proposition que les deux parties ont acceptée, c'est que les casques bleus agiraient en soutien à l'accord de Minsk, si les casques bleus appuient l'accord de Misk, ils doivent alors pouvoir vérifier l'accord. Par conséquent, ils doivent pouvoir vérifier si le cessez-le-feu est maintenu et surveiller la ligne de séparation. On parle ici de ce qui est à la base des opérations de maintien de la paix de l'ONU.
Pour revenir à votre question sur le certificat de l'utilisateur final, cela nous ramène à la question de la gouvernance et de la façon dont le Canada peut aider au renforcement des capacités de l'Ukraine parce que ce serait nécessaire. Il faut un système très sophistiqué pour garantir qu'il n'y a pas de fuites ou de détournement. Je ne crois pas que l'Ukraine est prête d'en arriver là. C'est une capacité qu'il faudrait construire au fil du temps et nous pourrions l'aider à cet égard.
Messieurs Luciuk et Kuzio, qu'en est-il de l'allégation selon laquelle la Russie est toujours le principal acheteur d'armes ukrainiennes, malgré le boycottage officiel?
Je ne crois pas que ce soit toujours vrai, en fait. Il y a eu une période où, en effet, l'Ukraine exportait des armes à la Fédération de Russie en raison des relations durables qui avaient été bâties durant la période soviétique et qui se sont poursuivies après 1991. Je vais m'en remettre à M. Kuzio à cet égard parce que je sais qu'il a étudié le sujet plus que moi, mais sauf erreur, ce n'est plus le cas.
L'Ukraine n'a jamais exporté d'armes en Russie. Il y a eu de la coopération entre différentes branches des complexes militaro-industriels. L'Ukraine produisait certaines parties; la Russie en produisait d'autres. Cela, et il en est de même pour beaucoup d'autres aspects du commerce entre la Russie et l'Ukraine, s'est terminé il y a au moins deux ans. L'idée selon laquelle l'Ukraine exporte en quelque sorte des produits militaires, eh bien ce serait nouveau pour elle de le faire — elle ne l'a jamais fait — et cela ne se produit certainement pas. Je pourrais revenir à la question de la Corée du Nord. Je suis ravi de fournir au Comité des documents qui indiquent que c'est un article du New York Times subjectif et mensonger qui a mis le feu aux poudres. Il se fonde sur des recherches d'un groupe de réflexion basé à Londres, et il a été complètement démenti. Ainsi, la Corée du Nord...
En ce qui concerne les armes que l'Ukraine exporte vers des pays respectant peu les droits de la personne, comme l'a dit M. Luciuk, la plupart des pays occidentaux le font, dont le mien, la Grande-Bretagne.
Étant donné qu'il me faudra quelques minutes pour préparer la salle pour les travaux que le Comité mènera à huis clos, je vous remercie tous de vos témoignages.
Ces discussions sont vraiment importantes puisque nous pouvons parler de la réalité, de ce qui se passe concrètement en Ukraine. Nous allons également débattre de ce que nous pouvons faire de mieux pour l'avenir. Nous ne nous entendons pas sur tout, mais nous y travaillerons. Je suis sûr que nous présenterons de bonnes recommandations au gouvernement du Canada.
Je vous remercie beaucoup de votre présence. Nous sommes très fiers de nos liens avec l'Ukraine, et nous appuyons fièrement ce pays en tant qu'allié.
Je suspends la séance pour laisser nos invités partir.
[La séance se poursuit à huis clos.]
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