:
Bonjour, distingués membres du Comité permanent, et mesdames et messieurs.
J'ai déjà été présenté par le président. Je vous en remercie infiniment.
Je pourrais ajouter que je suis également actif à l'échelon de l'industrie depuis maintenant environ 10 ans, c'est-à-dire depuis ma retraite. J'ai aussi apporté cela à ce secteur. J'ai également eu le grand privilège, l'an dernier, de faire partie des quatre membres du conseil consultatif du ministre qui ont procédé à l'examen des politiques de défense, lequel a été publié en juin dernier.
Évidemment, je suis très heureux d'être des vôtres ce matin. Merci infiniment de m'avoir invité à parler de l'OTAN.
[Français]
Monsieur le président, je vais faire mes commentaires principalement en anglais. Une traduction vous a déjà été transmise. Ensuite, je serai heureux de répondre à vos questions dans la langue de votre choix.
[Traduction]
J'ai servi longtemps au sein de cette organisation. Comme la plupart d'entre vous le savent — selon moi —, j'ai notamment commandé un escadron d'hélicoptères en Allemagne — que Charlie a également commandé — à la fin des années 1980, et assuré la surveillance de la contribution canadienne à l'OTAN en tant que chef d'état-major adjoint de la Défense, et, plus tard — de 2001 à 2005 —, en tant que chef d'état-major de la Défense. J'ai été président du Comité militaire de l'OTAN, le plus haut poste militaire au sein de l'alliance, de 2005 à 2008. Ce poste est occupé par un chef de la Défense en exercice élu par ses pairs.
En passant, à titre de président, j'avais pour responsabilité de représenter tous les chefs de la Défense de l'OTAN au quartier général de l'organisation, de fournir des avis militaires consensuels au Conseil de l'Atlantique Nord, et de transformer — par l'intermédiaire du comité militaire — l'orientation politique en ordres militaires pour les forces et les partenaires de l'OTAN.
[Français]
Comme plusieurs d'entre vous le savent, j'étais le chef d'état-major de la Défense le jour des attaques du 11 septembre 2001. Ces attaques ont été perpétrées seulement quelques mois après ma prise du commandement. Évidemment, elles ont grandement défini mes priorités et mes actions comme chef d'état-major au cours des quatre années qui ont suivi.
[Traduction]
Mon service subséquent au quartier général de l'OTAN en tant que président du Comité militaire a également été fortement marqué par la mission subséquente en Afghanistan — la FIAS, comme on l'appelle couramment — et par le passage à la phase de combat de la mission de l'Alliance en Afghanistan, que vous connaissez très bien, je le sais. Par conséquent, j'ai eu le privilège de participer directement aux activités menées par l'OTAN à maints égards durant et après la Guerre froide ainsi que durant la période de l'après-11 septembre, au cours de laquelle l'OTAN s'est fortement mobilisée dans le cadre d'opérations hors zone.
L'évolution de la mission régionale de l'OTAN, dont la portée a été étendue à l'échelle mondiale, a été difficile pour l'Alliance, comme je pense que nous le savons tous. Elle a mis à rude épreuve le centre de gravité de l'OTAN, qui a toujours été, de mon point de vue, la solidarité sur les plans politique et militaire.
Les membres du Comité ici présents sont sûrement au courant de la participation et du dévouement de l'OTAN et du Canada dans le cadre du conflit des Balkans, dans les années 1990, y compris la campagne aérienne du Kosovo, dans laquelle j'ai joué un rôle important pour ce qui est de montrer ce qui se passait au public. Nombre d'entre vous savent également que la mission au Kosovo représentait la toute première fois que l'OTAN participait à des opérations de combat sans qu'une résolution ait été adoptée au Conseil de sécurité de l'ONU, sous le régime du droit humanitaire international. En passant, cette mission est encore en cours à ce jour, après maintenant 18 ans de présence au Kosovo, avec près de 4 000 soldats.
Il ne faudrait également pas oublier que la réaction de l'OTAN aux attentats terroristes du 11 septembre, après lesquels l'article 5 a été invoqué pour la première fois dans l'histoire de l'Alliance, a entraîné le déploiement d'avions d'alerte et de contrôle de l'OTAN aux États-Unis, immédiatement après les attaques. En conséquence de cette intervention, des ressources maritimes ont également été consacrées à la mission antiterroriste menée dans la Méditerranée, laquelle a duré jusqu'en 2016 et s'est maintenant transformée en opération de sécurité maritime. Quoi qu'il en soit, dans ce cas-là, ce qui a compté, c'était la longévité.
La Force internationale d'assistance à la sécurité, ou la FIAS, est une mission qui est fermement ancrée dans notre esprit à tous, en tant que Canadiens, en raison de la forte participation canadienne aux côtés de tous les membres de l'OTAN, et, bien entendu, des coûts très élevés. J'ajouterais à votre intention que l'OTAN a récemment annoncé qu'elle ajouterait 3 000 formateurs à cette mission, ce qui portera encore une fois le total de soldats à 16 000, ce qui représente tout de même un engagement important pour l'OTAN dans ce pays.
Plus récemment, la réaction de la Russie au bouclier antimissile européen, son annexion de la Crimée, la déstabilisation de l'Ukraine qui en a découlé et les menaces qui pèsent sur le flanc oriental de l'OTAN ont créé de nouvelles tensions importantes pour l'Alliance. Encore une fois, le Canada est admirablement monté au créneau à l'égard de tous ces enjeux en apportant une contribution aérienne, navale et terrestre appropriée à la présence militaire avancée accrue en Europe orientale et centrale, et plus particulièrement dans les pays baltes. Enfin, n'oublions pas le leadership et la contribution des forces au sein du groupe tactique multinational en Lettonie, qui connaît beaucoup de succès, jusqu'ici.
Je devrais vous mentionner le fait que la décision prise par le Canada de diriger ce groupe tactique multinational en Lettonie était très importante du point de vue de la crédibilité du Canada. Cette décision a rétabli une grande part de sa crédibilité, qu'il avait perdue en conséquence d'un certain nombre d'événements, notamment à cause de son retrait de la mission aérienne d'alerte et de contrôle de l'OTAN à Geilenkirchen, à laquelle le Canada — comme je sais que vous le savez — a recommencé à participer, du moins, en partie, du point de vue du financement; de son retrait du projet de surveillance aérienne et terrestre; et de son retrait de l'Afghanistan.
[Français]
La majorité des représentants de pays que nous avons rencontrés pendant notre séjour à Bruxelles nous ont manifesté leur gratitude. Les consultations publiques avec l'Alliance ont été très productives. Tous les représentants de pays à qui nous avons parlé de l'Afghanistan et de l'OTAN étaient très contents que le Canada se soit réengagé envers l'OTAN.
[Traduction]
Ces mesures prises par le Canada, surtout les actes de leadership que nous avons accomplis en Lettonie, ont envoyé un message très fort à l'OTAN.
Beaucoup de pressions sont exercées, comme vous le savez très bien. Les opérations comme celle qui a été menée en Libye il y a maintenant un certain temps, mais dont Charlie a été commandant; l'expansion continuelle de la capacité militaire chinoise, qui a causé des problèmes à de nombreux pays de la région de l'Asie-Pacifique; tout ce que nous avons vu en Iraq, en Syrie et dans d'autres régions du Moyen-Orient; une Union européenne divisée, même si j'ajoutais que les relations entre l'OTAN et l'Union européenne sont bien meilleures maintenant qu'elles ne l'étaient durant ma période à l'OTAN et qu'elles s'améliorent constamment; la menace de la Corée du Nord; les pressions liées aux changements climatiques, qu'on oublie souvent; la migration de masse; et l'expansion du terrorisme ont certainement mis l'Alliance à rude épreuve depuis un certain temps.
Malgré tout, les États membres, y compris le Canada — à mesure que ces événements se déroulaient —, ont suivi un processus de transformation très important. Tous se sont adaptés à divers degrés à cet environnement de sécurité changeant.
De mon point de vue d'ancien militaire et de personne qui se tient au courant de la situation relative à la défense et à la sécurité en raison du poste que j'occupe actuellement dans l'industrie, je demeure certes un ardent défenseur de l'OTAN en tant qu'organisation régionale et politico-militaire qui, selon moi, est la gardienne de la primauté du droit et de la démocratie, bien sûr.
[Français]
Aussi, je crois fermement au processus de prise de décision par consensus de l'OTAN, en dépit des problèmes qui y sont associés, surtout au Conseil de l'Atlantique Nord et au comité militaire. Les décisions qui sont prises rehaussent beaucoup la crédibilité de l'OTAN, surtout lors des opérations.
[Traduction]
C'est une façon difficile de prendre des décisions, je peux vous l'assurer, mais qui est très importante. Elle assure non seulement la crédibilité qui est requise, mais aussi l'engagement et la conviction des pays à l'égard du fait qu'il faut poursuivre les missions, surtout lorsqu'elles deviennent plus difficiles.
Tout cela a permis de maintenir avec pas mal de succès l'OTAN dans son consensus politico-militaire — si on veut —, du fait qu'elle a gagné la guerre froide sans qu'un coup de feu soit tiré, pour ainsi dire. Elle s'est vraiment adaptée et se transforme continuellement. Elle le faisait quand j'y étais, et elle continue de se transformer à notre époque.
En passant, certains ne sont pas d'accord. Je sais que certains ne sont pas d'avis que l'OTAN est aussi utile qu'auparavant. De mon point de vue, toutefois, elle est très importante d'un certain nombre de points de vue, notamment celui de l'établissement et du maintien du lien transatlantique, qui, à mes yeux, compte parmi les forces directrices de l'OTAN.
Dans ce contexte, je veux simplement mentionner rapidement quelques éléments au sujet de la façon dont l'OTAN s'est transformée depuis un certain temps, tout en continuant de se concentrer clairement sur les trois missions principales suivantes: la défense et la dissuasion collectives, la gestion de crise et la sécurité coopérative au moyen de partenariats stratégiques.
Le sommet du pays de Galles qui a eu lieu dans une période de grande incertitude, a néanmoins été décisif, car il s'agissait d'un moment important, où il fallait absolument reconnaître le terrorisme et ses conséquences, ainsi que les problèmes liés à la migration de masse, soit des questions de premier plan à ce moment-là. Ce sont des défis complexes. Ils continuent de mettre à l'épreuve les capacités collectives de l'OTAN, et l'organisation y a vraiment réagi comme elle le devait.
Afin de régler ces problèmes, et surtout de tenir compte de l'environnement de sécurité qui évoluait, les partenaires et les alliés de l'OTAN ont établi un plan visant à créer le plan d'action pour la réactivité. C'était un plan très important, à mon avis: une extension de la force d'intervention de l'OTAN, qui était une excellente initiative, mais dont la mise en place a pris beaucoup de temps.
Ce plan d'action pour la réactivité comprend des mesures d'assurance et d'adaptation qui augmentent vraiment l'état de préparation et la réactivité de l'Alliance. L'assurance représente un certain nombre de mesures. Il s'agit d'un vaste éventail d'exercices terrestres, maritimes et aériens que nous observons continuellement. L'adaptation, ce sont les changements auxquels on s'attend à long terme, y compris la force d'intervention de l'OTAN, le plan d'action pour la réactivité dont je viens de parler, la force opérationnelle interarmées, qui jouit d'un état de préparation très élevé, et le renforcement des forces navales permanentes.
En outre, comme j'ai parlé au commandant de la Marine pas plus tard qu'il y a quelques jours, je sais que le volet de la Marine demeure très actif, tout comme le volet aérien des Forces canadiennes.
Plus récemment, et en conséquence du sommet de 2016, on a renouvelé l'accent sur la défense, sur la dissuasion et sur la projection de la stabilité, qui seront les éléments clés du sommet qui se tiendra en juillet prochain. L'OTAN a clairement respecté son engagement à l'égard de la défense et de la dissuasion grâce à la présence militaire avancée accrue dans les pays baltes, dont nous avons connaissance.
[Français]
Comme cela a été mentionné, le leadership du Canada en Lettonie est absolument crucial et a été très bien reçu encore une fois.
[Traduction]
De plus — encore une fois, ces éléments ne sont pas très visibles, mais il importe de les souligner —, ces derniers temps, les alliés ont établi une présence militaire avancée dans la région de la mer Noire en augmentant le nombre de soldats et grâce à des exercices et à un entraînement sous la direction de la Division multinationale sud-est, qui est située en Roumanie. Ce quartier général a atteint sa pleine capacité opérationnelle pas plus tard que l'an dernier, en juin 2017.
En raison d'autres problèmes et menaces dans la région méridionale de l'OTAN, les alliés ont également établi un volet appelé « cadre pour le sud », qui améliore la connaissance de la situation et les efforts de coopération sur le flanc sud. C'est très important en raison de ce qui se passe en Irak, en Syrie et ailleurs. Ce cadre est créé grâce à une plaque tournante qui est située à Naples et qui a atteint sa capacité opérationnelle en septembre 2017. Tout cela est très important aux fins du maintien complet — si on veut — de la posture de dissuasion et de défense et est complété par d’autres éléments, comme les capacités de préparation cybernétiques, nucléaires et civiles.
Enfin, en ce qui a trait à la projection de la stabilité — encore une fois, cela correspond aux accords conclus lors du sommet de Varsovie tenu en 2016 —, l’OTAN a mis tout autant l’accent sur ce volet, qui sera important dans le cadre du sommet à venir.
Sans vous donner trop d’exemples, cette projection de la stabilité est très importante et exige beaucoup de soldats, bien entendu. Cela englobe les opérations menées en Afghanistan — l’opération Resolute Support —; les Balkans, que j’ai mentionnés; le renforcement des capacités en Irak; l’entraînement, qui est à venir; la lutte contre le terrorisme; et la coopération avec quelque 40 partenaires de partout dans le monde. L’établissement, le maintien et l’entretien de ces relations, non seulement avec les membres, mais aussi avec les pays partenaires, ont été un volet important du travail que je faisais durant ma période à l’OTAN.
Dans cet environnement, l’organisation est certainement très consciente, elle aussi, de la lutte contre le terrorisme et de ce qu'elle suppose, et elle se concentre beaucoup sur le combat, mais aussi sur le fait de s’assurer que ses États membres en particulier sont capables de le faire par eux-mêmes. À mon avis, le Canada a montré très adroitement son approbation de l’approche de l’OTAN que je viens tout juste de décrire, au moyen des engagements qu’il a pris à l’égard de la défense dans la nouvelle politique de défense intitulée « Protection, Sécurité, Engagement » publiée l’an dernier.
En conclusion, je demeure fermement d'avis que l'OTAN compte parmi les principales organisations qui contribuent à la paix, à la sécurité et à la stabilité dans le très vaste spectre des menaces et des problèmes que nous connaissons. La solidarité entre les 29 États membres actuels — il y en avait 26, quand j'y étais — est ancrée dans les rouages politiques et militaires qui régissent ce processus décisionnel, le processus relatif au consensus dont j'ai parlé. L'organisation a atteint une interopérabilité importante avec ses partenaires de partout dans le monde et connaît du succès depuis maintenant près de sept décennies, ce qui, encore une fois et à mon avis, en fait l'une des alliances les plus fructueuses de l'histoire.
Il se passe également un certain nombre de choses du point de vue du dialogue, et je ne veux pas trop m'y attarder, compte tenu du temps. Certes, le Conseil OTAN-Russie est encore un élément important. Malgré toutes les pressions actuelles liées à la Russie, ce conseil s'est réuni six fois au cours des deux dernières années, dont trois en 2017. Ce dialogue, que l'OTAN est très déterminée à maintenir, demeurera très important, surtout compte tenu de la capacité de défense antimissiles qui existe maintenant dans le secteur européen.
Bien entendu, en tant que pays fondateur, à mon avis, nous avons un engagement et une responsabilité à l'égard du maintien du succès qu'a connu l'OTAN et qu'elle a maintenu tout au long de son existence. À mes yeux, le maintien de la force de notre lien transatlantique avec l'Alliance revêt toute son importance grâce à la contribution efficace et significative que nous continuons d'apporter sous la forme de capacité, de gens et de fonds.
J'ai le privilège de servir l'Alliance à l'échelon le plus élevé de sa structure de commandement militaire. Comme vous pouvez le constater, je demeure l'un de ses plus fervents et loyaux partisans. J'en parle très souvent. J'ai hâte de connaître le résultat du sommet de Bruxelles, qui, je l'espère, lancera l'organisation dans une direction de plus en plus positive.
Sur ce, je vous remercie infiniment.
:
Monsieur le président, mesdames et messieurs, je vais m'adresser à vous dans la langue de Shakespeare, mais je pourrai répondre à vos questions dans la langue de Molière, si vous le désirez.
[Traduction]
Vous savez tous qui je suis, d'une certaine manière. J'ai eu l'insigne honneur de servir mon pays au sein des Forces canadiennes pendant plus de 37 ans. J'ai pris ma retraite en 2012. Depuis, j'ai continué à participer aux affaires liées à la défense et à la sécurité en offrant un soutien aux Forces canadiennes en tant que mentor principal. Mon engagement à l'égard de la sécurité et de la défense du Canada perdure aujourd'hui, car j'occupe actuellement le poste de président-directeur général de Lockheed Martin Canada.
Je suis ravi de comparaître aujourd'hui afin d'aborder cette question importante. En 2001, j'ai rédigé au Collège d'état-major un document qui concluait essentiellement que l'Alliance était vouée à l'échec si aucun changement majeur n'était apporté. Les événements du 11 septembre, mon affectation au Commandement de la force interarmées de Naples de l'OTAN, en Italie, et ma nomination subséquente au théâtre de commandement aux fins de l'opération Protecteur unifié ont changé radicalement la face de l'OTAN et mon attitude à son égard. J'ai été témoin de l'éveil d'une alliance vibrante, quoique lente. Aujourd'hui, je crois que l'OTAN demeure pertinente et qu'il s'agit d'un pilier de la politique en matière de défense et de sécurité du Canada.
Ma relation avec l'OTAN remonte à 1977, époque où je pilotais, à titre de jeune lieutenant, des hélicoptères tactiques dans le cadre de l'Exercice de l'OTAN de transfert aérien de troupes américaines vers l'Europe, en Allemagne. Quelques années après le général Henault, j'ai aussi commandé le 444e escadron. De fait, j'ai été le dernier officier commandant, et j'ai ramené l'escadron au Canada à la fin de ma période de service. Le matin du 11 septembre, j'exerçais mes fonctions de commandant adjoint pour la région américaine du NORAD. Dans le cadre d'une intervention au titre de l'article 5 — comme l'a mentionné le général —, nous avons vu les appareils AWACS de l'OTAN arriver en Amérique du Nord pour contribuer à la défense des États-Unis. Comme m'a dit un général américain à l'époque, c'est comme si le sang coulait en sens inverse. J'ai également servi en tant que commandant de la région canadienne du NORAD et commandant adjoint du NORAD, et j'ai été témoin de la résurgence d'activités de bombardiers russes sur les versants septentrionaux de l'Amérique du Nord.
Mon collègue, le général Henault, vous a parlé des impératifs stratégiques de l'OTAN. Je concentrerai mes commentaires à l'échelon du théâtre, où la stratégie rencontre les opérations et donne lieu à l'application d'une force contrôlée.
Je suis heureux de constater que les forces de l'OTAN sont engagées sur de multiples fronts terrestres, maritimes et aériens. Le général les a mentionnés, alors je ne le ferai pas. Ce sont tous des exemples éclatants des nombreuses capacités polyvalentes de l'Alliance. Nous devons rester mobilisés, sans quoi nous allons céder notre liberté démocratique à des entités malveillantes.
Pour être clair, la menace reste présente. À la lumière des activités hostiles de la Russie, je vous dirais que nous sommes dans une deuxième guerre froide. Toutefois, ce qui me préoccupe, c'est la possibilité qu'il n'y ait qu'un côté qui y consacre de l'argent. L'OTAN a subi une longue période de financement réduit, et nous observons certains des résultats aujourd'hui. Au Canada, nous avons des Forces armées canadiennes disposées à intervenir, mais qui ne font pas l'objet d'un financement approprié, ce qui entraîne une réduction de ses capacités en raison d'une absence de modernisation.
Les mesures prises par la Chine, la Corée du Nord et l'Iran sont d'autres indicateurs clairs du fait qu'une menace pèse sur notre société, laquelle se concrétisera par des actes directs, par des attaques indirectes ou par la simple possibilité de passage à l'acte.
Les mesures prises par des gouvernements despotiques et les actes criminels qu'ils commettent contre leur propre peuple doivent également être pris en considération. Ces actes ont occasionné des migrations de masse de réfugiés. Aujourd'hui, plus de 66 millions de personnes sont déplacées. Les pertes militaires diminuent, mais le nombre de victimes civiles augmente. Les attaques fréquentes et à petite échelle contre des civils sans défense sont plus faciles à cacher, mais elles causent autant de dommages que toute mesure de combat conventionnelle. Nous avons la responsabilité de protéger les personnes qui ne peuvent pas se défendre et de créer un environnement dans lequel la diplomatie et l'autonomie gouvernementale peuvent prendre racine. Il est difficile de se défiler devant la responsabilité de protéger, mais il faut l'aborder d'une manière holistique.
Ces menaces existeront pour les prochaines décennies; par conséquent, au moment de combler nos besoins et de renforcer nos capacités, nous devons établir une force armée qui pourra garder notre pays en sécurité pour les 40 prochaines années et au-delà. La composition, la posture et l'équipement de notre force doivent être adaptés à ces besoins à long terme qui transcendent le mandat d'un seul gouvernement.
De nombreuses personnes et moi-même appuyons pleinement la nouvelle politique de défense relative à la protection, à la sécurité et à l'engagement du Canada. Je félicite le gouvernement d'avoir établi la nouvelle politique, et je peux seulement demander que l'engagement à l'égard de sa mise en oeuvre demeure, quel que soit le parti politique au pouvoir. Nous avons déjà entendu de tels plans, et j'espère que nous tirerons des leçons du passé et que nous verrons son évolution se poursuivre.
Du point de vue d'un commandant, la mission à laquelle j'avais été affecté en Libye était une opération liée à la responsabilité de protéger menée en dehors du théâtre. On nous avait donné pour tâche de prendre toutes les mesures nécessaires pour protéger la population. Il ne s'agissait pas d'un changement de régime, comme certains l'ont mentionné. De fait, ce que je souhaitais, c'était voir Kadhafi comparaître devant la Cour internationale de Justice afin de clore cette triste période dans la vie des Libyens. Il s'agissait d'une véritable mission liée à la responsabilité de protéger menée par l'OTAN.
Un état final clair brillait par son absence dans les directives fournies. C'est la deuxième question à laquelle il faut répondre avant de s'engager à fournir des soldats. Compte tenu de ce manque, nous avons fini par énoncer notre propre interprétation de l'état final, laquelle a par la suite été approuvée par le Conseil de l'Atlantique Nord. Il est important pour moi d'affirmer que l'état politique final est essentiel pour tout commandant militaire.
Je considère le fait qu'on m'a choisi comme commandant de la mission comme le résultat d'une longue carrière dans l'armée, mais aussi — et, en réalité, c'est ce qui est important, à mes yeux — du fait que le président des chefs d'état-major interarmées, le Commandant suprême des Forces alliées de l'OTAN en Europe et le commandant de la force interarmées de Naples me connaissaient. Je crois que mettre un Canadien aux commandes était politiquement acceptable pour l'Alliance et, comme j'avais servi aux États-Unis pendant de nombreuses années, pour le pays également. Là où je veux en venir, c'est que, quand des Canadiens sont affectés au NORAD, ils contribuent à l'amélioration de la situation dans son ensemble également, car nous pouvons ainsi affecter des gens à des postes de leadership.
Comme dans le cas de toutes les opérations militaires aujourd'hui, cette mission s'étendait au-delà du domaine purement militaire. Nous avions adopté l'approche complète englobant les points de vue politique, militaire, économique, social, informationnel et infrastructural comme point de départ de notre analyse visant à évaluer l'environnement opérationnel. Il s'agit d'un argument important que je souhaite formuler, car, de nos jours, la résolution de conflit requiert une approche holistique, pas seulement une intervention militaire.
Mon équipe et moi avons tiré trois leçons majeures. C'est une question de relations, et on ne devrait pas échanger de cartes professionnelles le premier jour du conflit. De fait, il s'agit d'un travail qui doit avoir lieu aujourd'hui.
Je sais que le Comité le fait dans le cadre de ses déplacements. Je vous félicite, monsieur, ainsi que votre équipe.
La doctrine et les procédures servent à orienter les sages et suscitent l'obéissance aveugle des idiots. Nous devons demeurer souples et nous ne pouvons pas adapter le prochain conflit en fonction du dernier. C'est nous qui devons nous adapter.
L'agilité de l'esprit n'est pas quelque chose qui vient facilement, parfois, lorsque 32 pays sont rassemblés, surtout au sein de grandes alliances comme l'OTAN.
J'utiliserai les prochaines minutes pour aborder certaines leçons précises que nous avons tirées. J'espère qu'elles s'appliquent autant aujourd'hui qu'en 2011.
La première, c'est la préparation. Il a fallu à l'OTAN 12 mois pour commencer les opérations de combat dans les Balkans. Nous disposions de trois semaines pour nous préparer et assumer le commandement de la mission. Si une crise survient aujourd'hui, il ne faudra pas des mois pour nous décider à agir. Nous ne disposons que de quelques semaines, au mieux, sans quoi plus de gens vont mourir. Nous devons disposer d'une force adéquatement structurée et préparée, qui pourra procéder à des interventions rapides et décisives. Il nous faut des Forces armées canadiennes facilement déployables et interopérables.
La deuxième leçon concerne le renseignement. La connaissance de la situation est la clé. Le « besoin de savoir » est une chose du passé. Aujourd'hui, il y a un besoin pressant de communiquer. Durant la mission, je faisais partie du Groupe des deux, le Canada et les États-Unis; du Groupe des cinq, le Canada, les États-Unis, le Royaume-Uni, la Nouvelle-Zélande et l'Australie; et, bien entendu, des divers groupes de l'OTAN. Ainsi, il y a eu des situations où les membres de l'équipe n'avaient pas tous accès à l'information. J'ai pris délibérément la décision d'étendre la transmission de l'information à tous les pays membres qui affectaient des aéronefs à des missions de combat. Je ne pouvais pas accepter de perdre des membres de la force parce que nous ne communiquions pas l'information, ce qui aurait pu influer sur mon propre centre de gravité, c'est-à-dire la cohésion de l'Alliance. Cette situation a également suscité du ressentiment de la part de certains pays qui faisaient partie de l'Alliance, car leurs responsables estimaient qu'on ne leur présentait pas la situation dans son ensemble. En reconnaissant les accords actuellement en vigueur, nous devons conserver la souplesse nécessaire pour communiquer et ne pas être encombrés par des politiques.
La troisième leçon est celle de la présence sur le terrain. Nous avons mené la mission sans que des soldats de l'OTAN se trouvent sur le terrain. Cette exigence avait été imposée par une résolution du Conseil de sécurité de l'ONU, selon laquelle il ne fallait pas que des forces d'occupation soient déployées dans le théâtre. Cette limite artificielle, établie pour des raisons politiques valables, à ce moment-là, nous a forcés à nous adapter d'une manière dont nous n'avions jamais procédé auparavant. Nous devrions faire attention avant d'imposer de telles limites à des commandants à l'occasion de missions ultérieures. Par contre, je crois que nous avons montré qu'une mission pouvait être accomplie à l'aide d'une projection de la puissance aérienne et maritime et sans pertes pour nos propres forces. De plus, le retrait des forces s'est fait en quelques secondes.
En ce qui concerne les systèmes d'armes, l'interopérabilité est essentielle. Nous devons maximiser le potentiel des structures et de la composition de la force à venir. Plus nous aurons de choses en commun avec les forces de l'OTAN, plus nous serons efficaces. Par ailleurs, les conflits ont maintenant lieu au sein de la population. Nous devons donc posséder les bonnes armes à faible puissance qui réduiront au minimum les dommages collatéraux. Même une erreur tactique aura des conséquences stratégiques en quelques heures et mettra l'ensemble de la mission à risque.
La quatrième leçon concerne la sensibilité culturelle. Nous ne pouvons plus imposer nos propres normes aux pays que nous tentons d'aider. Nous avons mené des opérations durant le carême chrétien et le ramadan. Nous nous sommes adaptés en conséquence. J'aurais considéré que nous avions échoué si nous avions dû mener une campagne pour gagner le coeur et l'esprit des gens durant la mission. Nous risquions de perdre dès le départ, et cela a influé sur la façon dont nous avons mené les opérations. Une force diverse, que ce soit du point de vue des genres, de la religion ou des opinions politiques, doit être la nouvelle norme.
En ce qui concerne les opérations d'information, l'utilisation de tous les moyens pour atteindre les objectifs doit comprendre des activités dites non cinétiques. Les médias sociaux constituent maintenant un élément essentiel de l'arsenal d'un commandant. Il existe le risque que les opérations dépassent le lieu géographique visé, et nous devons y être préparés. Il est possible d'avoir à composer avec un serveur situé en Chine ou en Russie, à l'extérieur du lieu géographique où nous avons été affectés par des autorités politiques pour effectuer une tâche. À mon avis, il faut consentir plus d'efforts pour comprendre ce concept, ce problème, et la façon d'y faire face, parce que les activités liées aux communications stratégiques sont très importantes.
Je vais manquer de temps, donc permettez-moi de conclure. Il s'est écrit beaucoup de choses quant à la question de savoir si l'intervention en Libye était un succès ou non. À ce sujet, je vais citer les responsables de l'OTAN: le mandat de l'ONU a été exécuté à la lettre, et la mission a pris fin le 31 octobre 2011 une fois les objectifs atteints. J'étais sûr d'avoir le soutien du gouvernement du Canada et des dirigeants de l'OTAN et de ses pays partenaires. Toutefois, le défi tenait au fait que, même si le volet militaire était terminé, il restait beaucoup à faire, et ce sera encore le cas à l'avenir. Des réformes sur les plans social, politique, constitutionnel, juridique et éducationnel, notamment, n'ont jamais été mises en place.
Il s'agit d'un sujet de discussion important qui doit être abordé maintenant, avant la prochaine mission. Nous devons avoir un plan concernant les mesures à prendre après les opérations militaires. De toute évidence, c'était une lacune. Je vous dirai que nous n'avons pas tiré de leçon des événements survenus en Bosnie, au Kosovo, en Irak, en Afghanistan et en Libye. Les militaires ont fait un bon travail, mais qu'en est-il de l'approche globale? Peu importe où nous enverrons nos filles et nos fils à l'avenir, nous devrons planifier l'étape qui suivra la campagne ou accepter que notre effort sera peut-être vain.
L'OTAN offre au monde une capacité politique, diplomatique et militaire sans égale, et nous devons la préserver. L'organisation permet d'apporter une légitimité internationale aux conflits et d'envoyer le message que nous ne resterons pas à rien faire pendant que des civils innocents souffrent ou que notre souveraineté et notre liberté sont menacées. Aujourd'hui, l'OTAN est plus forte, mais elle doit continuer à évoluer. Je crois que le Canada doit continuer de chercher à maintenir, et à accroître, sa contribution et à guider le changement.
Mon temps est presque écoulé. On pourrait, et devrait, en parler encore beaucoup, et je suis heureux de constater que vous tenez des discussions à ce sujet aujourd'hui. Je tiens à vous exprimer mon soutien à l'égard de vos démarches en ce sens. Je vous félicite pour votre travail et votre engagement à l'endroit de l'OTAN. C'est un cheminement, et non une destination.
[Français]
Merci beaucoup.
:
Je remercie beaucoup le président et les membres du Comité de m'avoir invité à témoigner aujourd'hui et à fournir des informations sur l'OTAN et l'Agence d'information et de communication de l'OTAN, dont je suis le directeur général.
C'est un honneur d'être ici ce matin. Je suis venu pour la première fois à Ottawa en 1983, comme étudiant diplômé de l'Université du Texas. Je suis venu grâce à une petite bourse de votre gouvernement pour étudier le Pacte de l'automobile, qui, bien entendu, a précédé l'ALENA. Depuis, j'ai entretenu des rapports chaleureux au Canada et j'y suis venu plusieurs fois. C'était un heureux hasard que mon voyage à partir de Bruxelles soit au même moment que l'audience de ce comité, donc je suis ravi d'être ici.
Je m'appelle Kevin Scheid. Je suis Américain et originaire de la Pennsylvanie, mais je vis à Alexandria, en Virginie, depuis 30 ans. J'ai récemment pris ma retraite de la fonction publique aux États-Unis, où j'ai travaillé pendant 10 ans à l'Office of Management and Budget, à la Maison Blanche; j'ai occupé des fonctions pendant 10 ans au sein de la communauté du renseignement des États-Unis; et, pendant environ 10 ans, j'ai travaillé au Département de la défense. Je suis arrivé en poste à titre de directeur général de l'Agence d'information et de communication de l'OTAN le 1er juillet 2017. Maintenant, j'habite à Bruxelles, en Belgique.
Je suis accompagné ce matin par le président du comité de surveillance de notre Agence, M. Guy Charron, du Canada. Il fait partie de votre ministère de la Défense nationale. J'ai aussi avec moi le colonel Joyce LuGrain, de l'armée américaine, qui dirige le bureau de direction, et Mme Virginie Viscardy, qui est notre représentante en Amérique du Nord et qui reviendra à Ottawa, en plus de visiter Washington. Elle travaille à Norfolk, où est situé le Commandement allié Transformation de l'OTAN.
Comme vous le savez, l'OTAN est composée du siège politique, à Bruxelles, et de deux commandements militaires: celui chargé des opérations, situé à Mons, en Belgique, au SHAPE; et l'autre, chargé de la transformation, situé à Norfolk, en Virginie. Il y a aussi deux agences. Une est chargée du soutien et des acquisitions, et l'autre, de l'infrastructure de communication et d'information et d'autres capacités technologiques. Je suis le directeur général de cette dernière agence.
Dans son ensemble, l'OTAN, à titre d'organisation, de structure, compte environ 17 000 employés civils et militaires et possède un budget de fonctionnement annuel d'environ 2 milliards d'euros. Nous nous efforçons de soutenir les nations qui protègent plus d'un milliard de citoyens, d'Ankara à Honolulu.
L'Agence d'information et de communication de l'OTAN a été créée à la suite d'une importante réforme menée en 2012 dans le cadre de laquelle cinq agences et organismes de l'OTAN ont été fusionnés afin qu'on puisse réaliser des économies, réduire le personnel et augmenter l'efficacité. L'agence que je dirige soutient les décideurs politiques et militaires de l'OTAN. Nos responsabilités découlent directement du Traité de l'Atlantique Nord, qui aura 69 ans la semaine prochaine, et sont axées sur la consultation des 29 pays membres de l'OTAN, ce qui relève de l'article 4 — nous fournissons les capacités de communication pour permettre cette consultation à l'échelle politique — de même que sur la défense collective, mentionnée dans l'article 5. Nous offrons du soutien aux forces de l'OTAN sur le terrain, en particulier en Afghanistan, où environ 200 membres du personnel de l'agence et employés contractuels sont présents.
Notre histoire remonte à 1955, au moment de l'établissement à La Haye, aux Pays-Bas, du Centre technique de la défense aérienne du SHAPE, un centre qui, j'en suis certain, a fourni du soutien à ces deux messieurs quand ils prenaient part à une mission de combat et dirigeaient différents organismes de l'OTAN. De nos jours, nos activités nous permettent de nous assurer que les attaques par missile sont contrecarrées, que les avions militaires peuvent voler de façon sécuritaire dans l'espace aérien européen et nord-américain, que les troupes sous l'égide de l'OTAN ont accès à des communications sécurisées et accessibles pour mener leurs opérations, et que le secrétaire général de l'organisation dispose d'une communication cellulaire sécurisée.
Notre agence, la NCIA, ne reçoit pas d'affectation de fonds chaque année, mais tire son financement de revenus provenant de la prestation de services et de programmes techniques pour les commandements de l'OTAN et les différents sièges de l'organisation. Nous pouvons aussi travailler directement avec les pays membres. Au cours du présent exercice, on prévoit que la NCIA aura des revenus d'exploitation d'environ 250 millions d'euros et qu'elle donnera en sous-traitance à des sociétés des pays membres de l'OTAN des contrats totalisant environ 630 millions d'euros pour des biens et services, dont, notamment, des réseaux de communications en Afghanistan, comme je l'ai mentionné, des réseaux partout en Europe, des capacités en matière de cybersécurité, des programmes à forte composante logicielle, comme dans le domaine du commandement et du contrôle aériens, et des capacités « C2 » utilisées pour la défense antimissile.
La NCIA compte environ 3 000 employés, dont environ 1 500 civils, 1 000 militaires et 500 employés contractuels. L'Agence possède trois sites situés à Bruxelles, à La Haye et à Mons. Nous ajoutons aussi une nouvelle installation de formation, dans laquelle les pays ont investi. Comme il s'agit de financement collectif, le Canada participe à ce projet. Il s'agit d'une installation de formation à Oeiras, au Portugal.
La NCIA compte parmi ses effectifs 61 Canadiens, soit 51 civils et 10 militaires. Selon les chiffres les plus récents, datant de ce matin, il y a 435 Canadiens parmi les 17 000 employés de l'OTAN; donc, le Canada est bien représenté tant à l'échelle de l'organisation qu'au sein de la NCIA. Je crois que nous avons le pourcentage de Canadiens le plus élevé parmi toutes les organisations. Ils travaillent, pour la plupart, à La Haye et à Mons, dans des secteurs techniques. Leurs responsabilités sont variées, et vont de l'exécution de programmes de logiciels et de travaux d'ingénierie très techniques, comme le programme maritime pour lequel une société canadienne vient de décrocher un contrat, à la gestion et à la surveillance de projets et de programmes, en passant par la réalisation de projets de planification de la défense à l'échelle de l'OTAN, y compris le programme de planification de la défense, qui est mené par un Canadien.
Les Canadiens contribuent grandement à la NCIA et à l'OTAN, et ils sont d'excellents représentants de leur pays grâce à leur dévouement discret, à leur professionnalisme et à leur ténacité. Je suis sérieux en disant cela. Certains ont servi en Afghanistan avec nos forces, et ils font leur part.
De nos jours, la transformation numérique de l'OTAN constitue la priorité de la NCIA. Les membres de l'OTAN, y compris le Canada, ont fait d'importants investissements pour la construction du nouveau siège de l'organisation, ce qui constitue une grande amélioration des capacités de l'OTAN en matière de TI. Dans les faits, le nouveau siège de l'organisation est un réseau entouré d'une structure de verre et d'acier, et il comprend des centres de données modernes, des mesures de cybersécurité sophistiquées et des milliers d'ordinateurs de bureau et d'appareils mobiles.
Comme le secrétaire général l'a dit récemment, le nouveau siège est un édifice moderne pour accueillir une alliance moderne. Cela renvoie aux propos de ces messieurs, c'est-à-dire qu'il faut moderniser les capacités de l'OTAN et nous assurer que nous faisons de notre mieux pour faciliter la mobilisation des membres quand ils doivent déployer des troupes. À la NCIA, nous sommes très fiers de notre rôle central dans la transformation qu'a supposée le nouveau siège de l'organisation.
De la même façon, nous transformons l'infrastructure numérique des commandements de l'OTAN au moyen d'un projet que nous appelons — judicieusement, je dois dire — la « modernisation des TI ». Nous installons une infrastructure moderne comprenant de multiples centres de données redondants et transférons les activités de l'OTAN vers le nuage, ce qui nous permet de centraliser les services et le soutien à l'endroit des commandements, afin de réduire notre vulnérabilité en matière de cybersécurité tout en améliorant l'efficacité. Toutes ces initiatives sont protégées par environ 200 employés, qui surveillent et protègent les réseaux de l'OTAN 24 heures sur 24, 7 jours sur 7 , que ce soit en Europe, en Afghanistan ou en Amérique du Nord, de même que sur les navires et les aéronefs utilisés dans le cadre de missions de l'OTAN.
Ces initiatives, entre autres, représentent ce que j'aime appeler l'effort numérique de l'OTAN, soit la transformation numérique de l'organisation pour que nous puissions mieux soutenir les pays membres de l'Alliance et devenir plus efficaces et efficients. Cela se produira non pas immédiatement, mais au cours des prochaines années.
À titre de directeur général, un des éléments essentiels de ma fonction consiste à consulter les responsables des entreprises des pays membres de l'OTAN, soit celles qui nous permettent d'avoir ces capacités. Hier soir, et même ce matin, juste avant d'arriver ici, j'ai rencontré plusieurs dirigeants de l'industrie de la défense au Canada pour en apprendre davantage à propos de leur expérience de collaboration avec l'OTAN. Cette consultation suit une conférence tenue par la NCIA à Ottawa l'an passé, à l'intention de l'industrie, qui a attiré plus de 700 participants de l'Europe et de l'Amérique du Nord. Cet événement de l'Agence a été celui qui a remporté le plus de succès jusqu'à maintenant parmi les événements du même type, et le premier du genre à être tenu en Amérique du Nord. La prochaine conférence de l'Agence à l'intention de l'industrie, la NITEC 2018, aura lieu à Berlin, du 22 au 24 mai.
En décembre dernier, j'étais très fier d'octroyer le plus important contrat de l'OTAN jamais confié à une entreprise canadienne, la société MDA. Il s'agit du projet Triton, qui soutient nos opérations maritimes. Votre représentante permanente au Conseil de l'Atlantique Nord, l'ambassadrice Kerry Buck, a participé à la cérémonie de signature du contrat au siège de l'OTAN, juste avant les congés du temps des Fêtes. De fait, j'ai rencontré les dirigeants de MDA ce matin, simplement pour obtenir l'assurance, en personne, que l'échéancier était respecté et que le programme avançait.
Le projet Triton, qui fait l'objet du contrat décroché par l'entreprise canadienne, servira à remplacer la fonctionnalité à l'échelon opérationnel de l'actuel Système maritime d'information de commandement et de contrôle, le MCCIS, et d'autres fonctions de soutien opérationnel. Une fois que le projet Triton aura atteint sa pleine capacité opérationnelle, il deviendra la plateforme principale pour mener toutes les opérations maritimes militaires à l'échelle de l'Alliance. Les pays membres et les commandements seront en mesure de partager leurs informations maritimes en temps réel; ils pourront ainsi bénéficier mutuellement des données échangées, pour que le projet Triton porte bien son nom, soit « le messager des flots ».
Pour terminer, à mes yeux de personne qui travaille quotidiennement dans la bureaucratie de l'OTAN, le Canada est une composante essentielle de l'Alliance. Cela a toujours été le cas; cela devrait continuer de l'être. À mon avis, l'OTAN tire avantage des talents exceptionnels des militaires et des civils que votre pays envoie dans le cadre des opérations et à Bruxelles. L'Alliance bénéficie aussi de votre soutien direct grâce à des activités comme celle de la police aérienne. L'Alliance ne serait pas en mesure de lutter contre les menaces qui planent sur le flanc est de l'OTAN, ou sur le flanc sud, dont ces messieurs ont parlé, sans la participation indéfectible du Canada.
Je vous remercie, encore une fois, de m'avoir offert l'occasion de parler de l'agence que je dirige et de la vanter un peu.
Je serai heureux de répondre à vos questions.