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SECU Réunion de comité

Les Avis de convocation contiennent des renseignements sur le sujet, la date, l’heure et l’endroit de la réunion, ainsi qu’une liste des témoins qui doivent comparaître devant le comité. Les Témoignages sont le compte rendu transcrit, révisé et corrigé de tout ce qui a été dit pendant la séance. Les Procès-verbaux sont le compte rendu officiel des séances.

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Emblème de la Chambre des communes

Comité permanent de la sécurité publique et nationale


NUMÉRO 006 
l
2e SESSION 
l
43e LÉGISLATURE 

TÉMOIGNAGES

Le lundi 16 novembre 2020

[Enregistrement électronique]

(1610)

[Traduction]

    Je déclare ouverte la sixième réunion du Comité permanent de la sécurité publique et nationale.
    Je m’excuse auprès de nos témoins pour ce retard de 40 minutes.
    Chers collègues, je propose que nous leur accordions une certaine prolongation de délai. Je pense que nous devrions honorer les efforts qu’ils ont déployés pour venir nous parler de ce qui les préoccupe au sujet du racisme systémique dans les services de police au Canada.
    Je mentionnerai également qu’un rapport du sous-comité doit être présenté. Je proposerai de le faire vers la fin de la réunion.
    Sur ce, j’invite Kent Roach, professeur à la faculté de droit de l’Université de Toronto, à prendre la parole, ainsi que Melanie Omeniho, présidente de Women of the Métis Nation — Les Femmes Michif Otipemisiwak.
    Je vais leur demander de parler pendant sept minutes dans l’ordre où ils sont inscrits sur l’avis de convocation.
    Monsieur Roach, la parole est à vous pour sept minutes.
    Merci beaucoup, monsieur McKay, et merci de m’avoir invité.
    Je vais faire sept propositions concrètes pour lutter contre le racisme systémique dans les services de police.
    Premièrement, il faut recueillir et diffuser des données fondées sur la race. Bien que nous sachions que le problème du racisme systémique existe depuis longtemps, nous avons besoin de statistiques pour déterminer si la situation s’améliore ou empire, tant en ce qui concerne les personnes accusées de délits que les victimes. La GRC devrait tout spécialement collaborer avec Statistique Canada pour recueillir et publier des données.
    Deuxièmement, le Parlement devrait réglementer les pratiques policières. Au cours des 30 dernières années, le Parlement a largement laissé cette tâche aux tribunaux. Au Royaume-Uni, le Parlement réglemente de manière proactive la conduite de la police et la relie ensuite à la collecte de statistiques. Dans ce pays, par exemple, on sait chaque année combien d’interpellations et de fouilles ont été effectuées par les policiers et qui en a fait l’objet.
    Troisièmement, je modifierais les règles relatives à la légitime défense et les politiques de recours à la force. Les Autochtones, les personnes racialisées et les personnes souffrant de problèmes de santé mentale sont surreprésentées parmi les personnes tuées et blessées par la police. En 2012, le Parlement a libéralisé les règles relatives à la légitime défense de sorte que, sur papier, elles vont au-delà de l’article 25 concernant le recours à la force par la police. Le Parlement devrait préciser que la légitime défense raisonnable ne peut pas être fondée sur des craintes racistes, même si celles-ci sont réelles et subjectives. Nous devons également réexaminer non seulement l’usage de la force par la police, mais aussi les tactiques et le désamorçage.
    Quatrièmement, nous devrions faire le lien entre la police et les autres services sociaux et faire des services de police autochtones autogérés une priorité et un service essentiel. Nous demandons à la police de composer avec des traumatismes intergénérationnels, des dépendances et des problèmes de santé mentale. Elle devrait être tenue de travailler avec d’autres organismes publics et communautaires ayant plus d’expertise et moins de force coercitive. Le nombre de services de police autochtones est passé de 58 en 1992 à 36, alors que le nombre devrait aller dans la direction opposée. De tels services de police ont besoin de ressources et de latitude pour travailler avec d’autres membres de la communauté, et, espérons-le, prendre la relève de la GRC, de la Police provinciale de l’Ontario et de la Sûreté du Québec.
    Cinquièmement, nous devons améliorer la gouvernance à l’intérieur et à l’extérieur de la GRC. Le Conseil des services de police du Yukon, composé de sept personnes, dont trois membres des Premières Nations, et présidé par le sous-ministre de la Justice, est un modèle que vous devriez examiner de près. La GRC, en particulier dans son rôle de police contractuelle, ne peut plus compter sur une gouvernance descendante, allant d’un ministre de la Sécurité publique très occupé au commissaire. Par exemple, Surrey exerce un contrôle beaucoup plus local sur le maintien de l’ordre en se retirant de la police contractuelle. Nous devons trouver un moyen d’améliorer la gouvernance locale de la GRC lorsqu’elle offre des services de police contractuelle, ainsi que la gouvernance de la GRC en général. Le nouveau comité consultatif est là pour gérer les risques de l’organisation, et non pour apporter une contribution citoyenne.
    Sixièmement, nous devons améliorer le système de plaintes des citoyens et leur examen en général. Comme vous le savez, l’organe d’examen de la GRC est sous-financé et manque de moyens, comme l’illustre la mascarade entourant la non-publication du rapport sur l’interaction de la GRC avec la famille de Colten Boushie. J’espère vraiment que les conclusions de la GRC ne seront pas publiées un vendredi après-midi ou pendant une journée chargée. La Loi sur la GRC a besoin d’être repensée en profondeur, et si cela n’est pas possible, il faudrait alors que cet organisme fédéral se retire et laisse les organismes provinciaux assumer la responsabilité des plaintes contre la police et, comme ils l’ont fait dans de nombreuses administrations, assumer la responsabilité des enquêtes.
    Septièmement — et c’est probablement la demande la plus importante — nous devons abandonner le modèle paramilitaire du maintien de l’ordre, qui est peut-être plus ancré dans la GRC que dans toute autre force policière. Nous devons évoluer vers un modèle professionnel et instruit. Les policiers sont des professionnels instruits, tout comme les enseignants, les infirmières et les avocats. Ils ont besoin de formation continue, d’embauche, de spécialisation et d’une suspension plus facile de leur droit d’exercer.
    Actuellement, nous avons un processus disciplinaire quasi pénal. Je crains qu’avec la syndicalisation de la GRC, il ne se complique davantage. À juste titre, les policiers sont des professionnels instruits. Ils sont payés en tant que tels, mais ils devraient également être soumis à une suspension de leur droit d’exercer, tout comme les enseignants et les avocats.
    Merci beaucoup.
    Merci.
    Madame Omeniho, la parole est à vous pour sept minutes.
    Je représente la nation des Métis, l’un des trois peuples autochtones distincts du Canada. Nous avons notre propre histoire, nos coutumes, nos lois, notre langue, notre culture et nos traditions. Les femmes métisses sont dynamiques, fortes, résilientes et ingénieuses, et constituent l’épine dorsale de la nation des Métis. L’organisation que je représente, Les Femmes Michif Otipemisiwak, est la voix des femmes métisses au Canada et sur notre terre natale, c’est-à-dire l’Ontario, le Manitoba, la Saskatchewan, l’Alberta et la Colombie-Britannique.
    J’aimerais rappeler au Comité qu’aujourd’hui est une journée des Métis. C’est le 135e anniversaire de la pendaison de Louis Riel, et nous lui rendons hommage. Je suis honorée d’être ici aujourd’hui pour traiter de cette question.
    Les politiques et pratiques gouvernementales créent et renforcent la discrimination. Le Canada est depuis longtemps doté de politiques et de pratiques qui ont institutionnalisé le racisme à l’égard des femmes et des filles métisses et des personnes de genres différents. Bien que le gouvernement actuel travaille à la réconciliation, de nombreuses politiques et pratiques discriminatoires existent encore aujourd’hui et n’ont pas encore été abordées.
    De 2001 à 2004, le Service correctionnel du Canada a publié une série de rapports de recherche portant sur les hommes et les femmes métis incarcérés dans des établissements fédéraux en Colombie-Britannique et dans la région des Prairies.
    Dans le cadre de ces études, les chercheurs ont enquêté sur les expériences des délinquants pendant leur enfance et au sein de leur famille. La plupart des répondants métis ont déclaré avoir été victimes ou témoins de violences et de toxicomanies dans leur foyer et dans leur communauté pendant leur enfance. La plupart des répondants métis ont signalé que, dans leur jeunesse, des membres de leur famille avaient été impliqués dans des actes criminels. Les femmes métisses continuent d’être l’un des groupes les plus à risque de violence au Canada et de vivre ces conflits tout en faisant face à la discrimination des services de police.
    Pour de nombreuses femmes métisses, les circonstances ayant conduit à leurs démêlés avec le système de justice pénale sont le résultat d’un ensemble conflictuel de circonstances de vie collectives et individualisées, marquées par la discrimination systémique, le silence et la pauvreté.
    Le racisme systémique dans les services de police continue d’exister en raison de la loi, du racisme et des pratiques policières qui ne reconnaissent pas toutes les conséquences des préjugés contre les femmes métisses.
    L’une des pratiques policières qui visent directement les hommes et les femmes métis est le fichage. Une multitude d’études ont prouvé que cette pratique cible de façon disproportionnée les communautés racialisées et marginalisées. Cependant, le problème va au-delà du fichage. La véritable raison est que les femmes métisses sont traitées différemment des autres femmes au sein du système, et j’entends continuellement dire que les femmes métisses ont été ciblées par la police dans de nombreux cas.
    Dans leurs interactions avec la police, les femmes métisses sont considérées comme une tare dans notre société plutôt que comme des personnes dynamiques qui contribuent à leur nation, à leur famille et à leur communauté.
    Les services de police au Canada refusent de reconnaître les préjugés raciaux et le racisme comme un problème dans leurs pratiques et leurs politiques, et la police n’est pas tenue d’enregistrer les données raciales dans ses rapports, ce qui fait en sorte qu’il est encore plus difficile pour les populations autochtones et les défenseurs des droits de la personne de faire pression pour que les pratiques policières changent.
    Il est nécessaire de procéder à une rééducation complète de l’ensemble du système policier. Cette formation doit aller au-delà d’une simple formation interculturelle et doit amener le système et les participants à examiner pleinement leurs préjugés, qu’ils soient manifestes ou inconscients.
    Les services de police doivent élaborer un protocole de pratiques exemplaires pour leurs interventions en cas de signalement de disparition de Métis, y compris les mesures que la police doit prendre lorsqu'elle reçoit un signalement de disparition pour tout Métis.
(1615)
    En plus des 62 appels à miskotahâ et de nos perspectives métisses dans le rapport sur les femmes et les filles autochtones disparues et assassinées, l’enquête nationale a formulé les trois recommandations suivantes concernant expressément le peuple métis et le maintien de l’ordre:
17.12 Nous demandons aux services de police de former des partenariats avec les communautés, les organisations et les personnes métisses pour assurer un accès à des services de police sécuritaires et adaptés à la culture.
17.13 Nous demandons aux services de police de participer à des initiatives de sensibilisation portant sur l’histoire et les besoins uniques des communautés métisses.
17.14 Nous demandons aux services de police d’établir de meilleures communications avec les communautés et les populations métisses par l’entremise de conseils consultatifs représentatifs qui font participer les communautés métisses et qui répondent à leurs besoins.
    Les services de police qui établissent des liens de confiance avec les communautés métisses connaissent bien la culture métisse, répondent aux besoins particuliers des Métis et sont en mesure de protéger et d’aider les victimes métisses vulnérables, ce dont on a tant besoin. Des services de police adaptés aux Métis peuvent permettre de remédier au sous-signalement — problème particulièrement important pour les femmes métisses —, de protéger les communautés métisses et de réduire la surreprésentation des Métis dans la criminalité et la victimisation.
(1620)
    Madame Omeniho, pouvez-vous conclure, s’il vous plaît? Nous approchons des sept minutes.
    Je voudrais simplement terminer en disant que, lorsque nous travaillions sur le dossier des femmes et des filles autochtones disparues et assassinées, nombre de nos femmes nous ont signalé que beaucoup d’entre elles avaient fini par être aussi victimes des services de police, de sorte qu’elles ne se sont jamais senties en sécurité de faire appel à la police lorsqu’elles étaient elles-mêmes victimes de violence. Changer les services de police et notre façon de travailler constitue une partie très importante de ce que nous voulons accomplir.
    Je vous remercie de m’avoir donné la possibilité de m’adresser à vous.
    Merci.
    Je ne veux pas interrompre les gens au milieu de leurs exposés, car ils consacrent beaucoup d’efforts à les préparer. Malheureusement, notre temps est limité.
    Sur ce, je vais demander que l’on débute les séries de questions.
    Sur ma liste, j’ai Mme Stubbs, M. Anandasangaree, Mme Michaud et M. Harris, qui disposent chacun de six minutes.
    Madame Stubbs, la parole est à vous pour six minutes.
    Merci, monsieur le président.
    Je sais gré aux deux témoins d’être ici et je les remercie. Sachez que j’aurais aimé que nous ayons plus de temps avec vous, et je suis sûre que les autres membres sont du même avis que moi.
    J’ai juste quelques questions, principalement pour M. Roach.
    Je note que, dans un article conjoint du 17 juin, vous avez dit que l’indépendance de la GRC devrait être définie dans la Loi sur la GRC. Je voudrais vous inviter à vous étendre un peu plus sur ce point et à entrer dans les détails.
    En outre, le rapport Brown recommande la création d’une commission de surveillance et d’examen des plaintes, indépendante du commissaire de la GRC et du ministre. Pourriez-vous également nous parler du concept d’une commission indépendante de surveillance et d’examen des plaintes, nous expliquer pourquoi il est important, quels en sont les principaux éléments et quels en sont les effets?
    Merci beaucoup, madame Stubbs.
    Je pense qu’il est important de définir l’indépendance de la police parce que, franchement, il y a une certaine — comment dire — réticence à ce qu’un ministre donne des consignes ou envoie des directives à la GRC. L’indépendance de la police a parfois été exagérée pour intégrer toutes sortes de degrés d’indépendance opérationnelle, alors que j’estime que le ministre devrait vraiment assumer plus de responsabilités et donner des directives publiques.
    Pour les recherches que je fais en ce moment, j’ai présenté une demande d’accès à l’information pour toutes les directives ministérielles à la GRC. Je n’ai pas eu de nouvelles depuis plus de trois mois. À mon avis, toutes ces directives, à l’exception des renseignements délicats, devraient être facilement accessibles sur le Web.
    En ce qui concerne l’indépendance de la police, nous ne voulons pas que le ministre dise à la GRC d’enquêter sur M. X, mais pas sur M. Y — ou de porter des accusations à l’encontre de l’un et non de l’autre. Cependant, avec tout le reste, des choses comme les opérations « Monsieur Big », qui sont propices aux poursuites, je ne vois pas pourquoi le ministre ne peut pas dire qu’à partir de maintenant, nous n’allons pas les faire, ou que nous allons seulement les faire de telle manière. Je crois en un maintien de l’ordre démocratique.
    Quant au rapport Brown, nous ne devons pas seulement penser à la surveillance. J’ai déjà dit que l’organe actuel de traitement des plaintes de la GRC manque de ressources et de moyens. Il n’a pas le pouvoir d’imposer un quelconque recours et, franchement, la plupart des facultés de droit disposent de trois ou quatre fois son budget. Les gens font de leur mieux, mais ils doivent traiter ou superviser les plaintes d’un bout à l’autre du pays.
    Je pense également que nous avons besoin d’un véritable conseil de police pour la GRC. Je pense que la société actuelle est plus complexe que jamais, et l’idée que le ministre ici, le commissaire là et que, d’une certaine manière, tout fonctionne avec les provinces et les territoires ne me paraît pas suffisante.
    Je pense également que la GRC doit travailler avec d’autres secteurs du gouvernement fédéral — la santé, les affaires autochtones et ainsi de suite — à adopter une approche plus globale de la sûreté et de la sécurité.
(1625)
    Vous avez environ deux minutes, madame Stubbs.
    J’apprécie vos commentaires. Je prends également note de vos recommandations précédentes sur l’importance de la surveillance civile et de la démocratisation de la GRC, que vous avez évoquées ici. Je pense que c’est important dans ce contexte, car je constate que le premier ministre, le ministre de la Sécurité publique, le ministre de la Justice et d’autres membres de ce gouvernement ont déclaré qu’il existe un racisme systémique au sein de la GRC. C’est une préoccupation extrêmement grave.
    Il se trouve que j’ai un parent très proche qui a été adjoint de détachement pendant plus de quatre ans. Je connais beaucoup d’agents de première ligne et de personnel de soutien dévoués qui sont bons, et ils sont extrêmement frustrés. Il y a des pommes pourries, comme dans toute institution, et les actes de racisme doivent être éradiqués et les racistes doivent en subir toutes les conséquences.
    Cependant, il me semble que si le premier ministre et ces ministres ont porté ces accusations — et il semble qu’ils aient pu faire pression sur la commissaire de la GRC pour qu’elle corrige ses commentaires précédents pour dire la même chose — alors où sont les directives? Où sont les informations concrètes, les faits et les consignes du ministre pour offrir des solutions concrètes?
    Souhaitez-vous également évoquer l’importance de la question de la transparence, pour ce qui est d’obtenir des résultats et de susciter la confiance de tous les Canadiens à l’égard des institutions?
    C’est une question très importante, mais elle ne vous a laissé qu’une quinzaine de secondes pour y répondre, donc soyez très bref, je vous prie.
    Désolée.
    Écoutez, la GRC a une tâche très difficile, et nous espérons que lorsqu’elle finira par publier le rapport Boushie, elle présentera un plan. Chaque institution doit faire face au racisme institutionnel, donc je ne pense pas que cela doive être considéré comme une mise en cause de la GRC en particulier.
    Merci, monsieur Roach et madame Stubbs.
    La parole est à M. Anandasangaree, pour six minutes.
    Merci, monsieur le président, et merci à mes collègues.
    Merci à vous deux d’être ici aujourd’hui.
    Je tiens également à souligner la Journée Louis Riel. C’est une journée très importante au Canada.
    Monsieur Roach, je vais commencer par vous. J’espère que j’aurai un peu plus de temps.
    En ce qui concerne les problèmes de racisme systémique, pouvez-vous nous donner de bons exemples d’autres services de police ou organismes qui s’y sont attaqués? Quelles mesures concrètes, à part les sept que vous avez mentionnées, la GRC devrait-elle prendre?
    Eh bien, je trouve primordial de donner du pouvoir aux personnes racialisées au sein de la GRC pour que des groupes de soutien soient mis en place. Je sais que c'est ainsi au Service de police de Toronto et à celui d'Ottawa, où des groupes de policiers racialisés peuvent non seulement servir de mentors, mais aussi répondre aux problèmes qui surviennent au sein de l'organisation. C'est une des mesures.
    En deuxième lieu, je pense qu'il faut des comités consultatifs communautaires. Nous devons prendre conscience qu'il ne suffit jamais de parler à deux ou trois membres d'une communauté; il faut plutôt organiser des assemblées publiques. Je pense que la commissaire doit écouter dans certains cas — je sais qu'elle est très occupée. Elle doit aussi avoir des collaborateurs issus de différentes communautés avec qui elle maintient une relation, mais qui peuvent aussi l'emmener visiter différents milieux pour tenir une assemblée publique.
    Les services policiers doivent être démocratiques, et la commissaire doit en prendre conscience. Un chef de police travaille pour une commission de police. Dans ce cas-ci, la commissaire travaille pour le ministre. Si les choses ne fonctionnent pas, comme c'est toujours le cas, il est peut-être temps de trouver quelqu'un qui aura une vision différente.
(1630)
    Monsieur, j'aimerais revenir sur la démocratisation des services policiers, dont vous avez parlé deux ou trois fois.
    Un organisme comme la GRC est en activité d'un bout à l'autre du pays. Comment veillez-vous à ce que les besoins des habitants de Surrey soient pris en compte dans un contexte local, au même titre que ceux des habitants d'Halifax ou de la Nouvelle-Écosse? N'est-il pas fondamentalement difficile de réussir sur les deux plans?
    J'ai également une question plus vaste à poser, et j'aimerais que vous y répondiez aussi. Le temps est-il venu pour nous ou pour la GRC de délaisser complètement les services de police à contrat?
    En fait, je pense que ce serait un grand pas en avant. Je ne suis pas nécessairement contre, mais je doute que le changement se fasse du jour au lendemain. Comme vous l'avez dit, Surrey est en train de créer son propre service de police.
    Vous pouvez songer au Conseil des services policiers du Yukon. Voilà un exemple de territoire qui a pris des mesures proactives sur le plan démocratique.
    Si vous regardez la Loi de 2019 sur la sécurité communautaire et les services policiers de l'Ontario, vous constaterez que l'Ontario a un conseil de détachement pour chaque détachement de la Police provinciale de l’Ontario et pour les Premières Nations bénéficiant de ses services policiers. Lorsque nous avons de tels conseils de détachement, nous devons également former les citoyens qui servent dans une capacité démocratique afin qu'ils ne soient pas complètement dominés par le coordonnateur du détachement. Je pense tout de même que nous avons besoin d'une structure semblable.
    Je regarde la Loi sur la GRC, et je constate qu'il s'agit à ma connaissance de la loi sur les services de police la moins démocratique du Canada. Je crois que celle de l'Ontario est beaucoup mieux sur le plan démocratique.
    À titre comparatif, prenons l'exemple de l'Unité des enquêtes spéciales, ou UES, et de la Commission des services policiers de Toronto. Ce sont deux organismes essentiellement indépendants qui surveillent à certains égards le travail du Service de police de Toronto.
    De quel mécanisme pensez-vous que la GRC a besoin? Je sais que vous en avez parlé plus tôt, mais en ce qui concerne l'UES, que faudrait-il mettre en place selon vous pour qu'il y ait des enquêtes et des accusations en cas de comportement inapproprié ou répréhensible?
    Nous avons évidemment besoin de mécanismes similaires à l'UES pour les provinces qui n'ont encore rien de semblable. Je crois savoir que l'Alberta, par exemple, possède sa propre UES qui s'occupe des enquêtes. Le problème qui se présente au Nunavut, par exemple, c'est que si un agent de la GRC tire sur quelqu'un là-bas, ce qui est arrivé souvent, c'est le Service de police d'Ottawa qui mène l'enquête.
    Je vous rappelle que je suis un professeur de droit pénal. Même si je trouve que l'UES est importante, je sais aussi que le doute raisonnable sur la culpabilité s'applique à tout le monde. C'est pour cette raison que j'ai parlé de modifier les dispositions législatives en matière de légitime défense et les politiques sur le recours à la force. Je pense que c'est encore plus important que de simples poursuites criminelles [Difficultés techniques]
     Je vous remercie, monsieur Anandasangaree.
    Nous allons maintenant écouter Mme Michaud.

[Français]

     Madame Michaud, vous avez la parole pour six minutes.
    Je vous remercie, monsieur le président.
    Monsieur Roach, je vous remercie d'être avec nous aujourd'hui.
    Vous avez donné d'autres exemples, dont les mesures adoptées au Royaume-Uni.
    Pour combattre le racisme systémique dans nos institutions, notamment au sein de la police, vous pensez que nous devrions intervenir sur le plan législatif, entre autres en modifiant les directives sur l'usage de la force qui sont destinées à la police. Vous proposez également de ne plus avoir recours à l'approche descendante, selon laquelle les directives viennent du haut et descendent vers le bas.
    Pouvez-vous nous en dire un peu plus sur l'approche législative que le ministre de la Justice et son ministère devraient adopter?
(1635)

[Traduction]

    Je n'entendais malheureusement pas l'interprétation, mais je pense avoir compris. Je pourrais tout de même me ridiculiser, dans quel cas je vous demande pardon.
    Au sujet de l'approche descendante, lorsque le ministre de la Sécurité publique est venu très récemment vous parler de sa lettre de mandat, il était probablement accompagné des dirigeants de cinq ou six organismes, j'en suis pratiquement certain. Son portefeuille est immense, et je crains qu'il ne dépasse la capacité d'un seul être humain. Peut-être faudrait-il qu'un ministre soit dédié à la GRC, ou que le dossier soit retiré de la Sécurité publique et confié à un autre ministère.
    Je suis d'avis que c'est un véritable problème. Nous avons un ministère titanesque, alors que la GRC compte à elle seule 20 000 membres, dont certains participent aux services de police à contrat, et d'autres, aux services nationaux de police. C'est un problème énorme avant même d'aborder les questions du Service correctionnel et de l'Agence des services frontaliers du Canada. Une de mes préoccupations, c'est que nous allons ajouter l'ASFC à l'organisme actuel d'examen et de traitement des plaintes pour la GRC — qui éprouve vraiment des difficultés, de son propre aveu. Cette modification n'améliorera pas nécessairement les choses. Je crois qu'il y a seulement deux commissaires au sein de l'organisme. Il est donc important de prendre conscience que la présence du gouvernement fédéral est forte.
    Si le gouvernement fédéral commence à délaisser les services de police à contrat, je pense qu'il doit aussi réfléchir à récupérer ces fonds. Ils sont moindres étant donné que le gouvernement fédéral subventionne beaucoup moins la police contractuelle. Avec la syndicalisation de la GRC, je crois que vous verrez plus de situations comme celle de Surreys.
    La COVID a évidemment mis du sable dans l'engrenage, mais si les services de police à contrat sont délaissés, j'espère que le gouvernement fédéral utilisera son pouvoir de dépenser pour inciter tous les corps policiers existants à s'associer à d'autres organismes publics et communautaires, dont les méthodes sont moins coercitives et exemptes de discrimination, ou moins discriminatoires, pour fournir des services de police essentiels. Comme l'autre témoin l'a dit, cela comprend aussi les victimes d'actes criminels, qui est un autre problème de taille.

[Français]

    Je vous remercie.
    Avant de poser ma prochaine question, je veux m'assurer que M. Roach a accès à l'interprétation.
    Est-ce que cela fonctionne, monsieur Roach?

[Traduction]

    Un instant. Veuillez m'excuser, mais je n'entends toujours pas l'interprétation.
    Il y a une icône de globe au bas de l'écran. Si vous sélectionnez « anglais », vous devriez entendre l'interprétation.
    C'est juste à côté de « participants ».
    Un globe? Je ne l'ai pas. Je vois un téléphone, un plus, un moins et un microphone coupé, mais je n'ai aucun globe.
    Regardez-vous au bas de l'écran?
    Veuillez m'excuser, mais j'ai bien peur qu'il n'y soit pas.
    Il devrait y avoir une icône « interprétation » au bas de l'écran.
    Vous voyez les touches « sourdine », « arrêter la vidéo » et « participants » au milieu. Il y a ensuite « interprétation », « restrictions », puis « quitter » en bas.
    Vous êtes maintenant en sourdine.
    Veuillez m'excuser, mais la fonction ne semble pas être présente.
    Eh bien, voilà le problème qui se pose quand on est un professeur.
    Des voix: Ha, ha!
    Le président: Nous allons devoir poursuivre.

[Français]

     Madame Michaud, vous avez la parole pour deux minutes.
    Monsieur Roach, pensez-vous pouvoir comprendre la question en français?
(1640)
    Je l'espère.
    Ce que vous avez dit au sujet de la charge de travail du ministre est intéressant, à savoir que cette charge est sans doute trop importante pour qu'il puisse s'occuper réellement de la Gendarmerie royale du Canada, ou GRC, et trouver une façon d'éradiquer le racisme systémique au sein des institutions.
    Vous avez parlé de l'importance d'abandonner le mode paramilitaire, en quelque sorte, pour aller vers un mode éducatif. Tout au long de cette étude, on a parlé d'une solution qui consisterait à faire accompagner les agents sur le terrain par des intervenants sociaux ou des gens spécialisés en santé mentale, par exemple.
    Croyez-vous que c'est une bonne idée? Qu'est-ce que le gouvernement fédéral devrait faire? Devrait-il accorder plus de financement à ces programmes pour avoir ces gens de plus sur le terrain?

[Traduction]

    Comme vous l'avez remarqué, je pense en effet qu'il nous faut un modèle plus souple. J'ai fait partie d'un comité d'experts sur l'avenir des modèles de maintien de l'ordre qui a été mandaté par le Conseil des académies canadiennes. Nous avons entendu des témoignages de partout dans le monde selon lesquels le maintien de l'ordre doit être beaucoup plus spécialisé. Ce qui fonctionne pour les cybercrimes ne fonctionnera pas nécessairement en tout temps.
    Je trouve anachronique que tous les membres de la GRC ou tous les agents doivent passer par la Division Dépôt, à Regina. Même s'il y a des défis financiers, auxquels je crois que vous faisiez allusion, je pense qu'un effectif plus souple à la GRC permettrait de réaliser des économies. Il n'est pas réaliste de s'attendre à ce que tous les membres soient des agents de police le plus clair de leur vie professionnelle, dans un horizon de 10, de 20, voire de 30 ans. Je comprends que la Cour suprême a autorisé la syndicalisation de la GRC, mais je crains un peu qu'elle devienne un corps policier moins agile en raison de cette décision, de la philosophie paramilitaire et du fait que tout le monde doit passer par une sorte de période d'entraînement à Regina.
    Plusieurs municipalités…
    Nous allons malheureusement devoir nous arrêter ici. Veuillez m'excuser. C'est apparemment ce que je fais de mieux. Je parlerai des limites de temps lorsque M. Harris aura terminé.
    Monsieur Harris, vous avez six minutes, je vous prie.
    Je vous remercie, monsieur le président.
    Je remercie nos deux témoins d'aujourd'hui.
    Pour commencer, j'aimerais joindre ma voix à celle de M. Anandasangaree pour souligner aujourd'hui l'anniversaire de Louis Riel.
    Madame Omeniho, présidente des Femmes Michif Otipemisiwak, vous avez parlé de l'importance de comprendre la culture pour dispenser des services policiers. Je pense que je saisis très bien, mais permettez-moi de vous poser une question: que pensez-vous du rôle que pourrait jouer un corps de police autochtone dans les communautés métisses, et de la présence des Métis au sein du service de police pour le type de surveillance locale dont M. Roach parlait? Pensez-vous qu'une telle mesure serait utile? Avez-vous des commentaires là-dessus?
    À vrai dire, nos membres dirigeants envisagent cette possibilité. C'est toutefois beaucoup plus difficile que pour certaines collectivités des Premières Nations qui ont des services policiers. Le problème, c'est que nous n'avons pas de public captif à un endroit donné. Je sais que la nation métisse et ses gouvernements envisagent de créer leurs propres processus de justice.
    Nous avons de nombreux membres qui jouent un rôle en étant au service de la GRC. Beaucoup de mes amis et de mes proches se sont joints aux services policiers au fil des ans pour essayer de changer ces institutions. Que vous soyez prêts à l'entendre ou non, je veux vous assurer qu'ils me racontent des histoires: le racisme est enraciné dans ce système. L'objectif n'est pas de dire que tout le système est corrompu, mais plutôt de l'améliorer, si c'est le corps policier que nous voulons utiliser.
    Si nous allons de l'avant, je voudrais au moins qu'il y ait une relation entre les différents corps de police et la nation métisse de même que ses gouvernements. Sans relation, je pense que nous serons à jamais les victimes du service, plutôt que de contribuer à l'améliorer au moyen d'une approche axée sur les forces et les atouts.
(1645)
    Je vous remercie infiniment de ces réflexions.
    Monsieur Roach, je sais que nous avons beaucoup de pain sur la planche dans le cadre de notre étude sur le racisme systémique au sein des services policiers au Canada. Vous avez notamment parlé de surveiller la GRC. Je vois deux volets à ce chapitre. Y a-t-il de la place pour une commission nationale quelque part dans les hautes sphères? Elle aurait le rôle que vous proposez sur le plan de la politique et de la surveillance locale. Ce serait peut-être la valeur par défaut des collectivités où la GRC est en activité. Ces deux modèles peuvent-ils coexister? Devraient-ils être enchâssés dans la loi?
    Monsieur Harris, je pense que la réponse à votre question est oui. Sur le plan législatif, l'Ontario se tourne maintenant vers un comité consultatif pour l'ensemble de la Police provinciale, ainsi que vers des conseils de détachement et des commissions de Premières Nations. Je pense que cette structure cadrerait encore plus naturellement avec les activités de la GRC, qui assure beaucoup de services de police nationaux.
    Je pense que la commission nationale de la GRC s'occuperait des problèmes d'interventions policières excessives et insuffisantes qui touchent les musulmans canadiens, notamment en raison des stéréotypes qui les associent au terrorisme, et aussi des crimes haineux dont ils sont malheureusement la cible. Je constate que ces deux phénomènes sont interreliés. Il serait toutefois important aussi que la GRC soit moins rigide et moins paramilitaire afin que les commissions locales aient un certain pouvoir. De toute évidence, le maintien de l'ordre au Yukon est très différent du maintien de l'ordre en Colombie-Britannique.
    J'aimerais également poser une question à propos de la Commission d'examen et de traitement des plaintes relatives à la GRC. Ce système me semble être défectueux ou manquer d'efficacité. Je vois encore 175 rapports sur le bureau de la commissaire. Ce n'est bon ni pour elle ni pour les gens qui attendent que leurs plaintes soient entendues. Serait-il possible de mettre en place une sorte de mécanisme de libération automatique des rapports après deux mois, ou encore après 60 à 90 jours pour dégager la voie? Devrions-nous procéder ainsi ou revoir le système? Il ne devrait pas falloir conclure un protocole d'entente entre la commissaire et la dirigeante de la Commission d'examen des plaintes pour faire bouger les choses. Dans le texte législatif qui a été déposé avant la prorogation, nous y avons pourtant ajouté un autre organisme, à savoir l'Agence des services frontaliers du Canada. Voilà qui ne semble mener à rien. Que pouvons-nous recommander pour remédier à la situation?
    Vous avez une trentaine de secondes.
     Je pense ici à une date butoir qui permettrait à la Commission de libérer ces rapports, mais l'objectif, c'est que la commissaire en assimile le contenu et en tire des leçons.
    La Commission a fait du très bon travail sur le caractère systémique... Une solution serait peut-être de laisser cette structure en place pour les enjeux systémiques, mais de permettre au besoin aux organismes provinciaux de traitement des plaintes de s'occuper des plaintes individuelles contre les agents de la GRC.
    Encore une fois, je m'excuse de devoir interrompre les intervenants. Nous avons déjà dépassé le temps imparti de 20 minutes. Je propose de procéder à un deuxième tour: quatre minutes seront accordées aux deux premiers intervenants et à Mme Michaud, puis M. Harris bouclera la boucle. Mme May me demande de poser une question aussi, mais j'hésite à l'autoriser simplement parce que nous avons déjà beaucoup de retard.
    Les conservateurs ont la parole quatre minutes pour le deuxième tour, mais j'ignore qui posera les questions.
    Monsieur le président, je vais me joindre à vous, et je suis désolé d'avoir manqué les déclarations d'ouverture de Mme Omeniho et de Mme Pigeau en raison de problèmes de connexion.
    Comme vous le savez, nous célébrons aujourd'hui la Semaine nationale des Métis. J'ai eu l'occasion de reconnaître le peuple métis et de remercier ceux qui s'investissent autant pour changer les choses. Mesdames Omeniho et Pigeau, je tiens donc à vous remercier de votre contribution personnelle au fil des ans. Nous sommes peut-être parents, car je suis moi-même métis originaire de Villeneuve et du lac Sainte-Anne, dans la région de St. Albert, et descendant de L'Hirondelle et de Cunninigham. Nous sommes certainement apparentés. Cela ne fait aucun doute.
     J'ai seulement quelques questions. Tout d'abord, quels obstacles empêchent les femmes métisses de faire carrière dans les forces de l'ordre? Voyez-vous des embûches?
(1650)
    En toute franchise, de nombreux obstacles empêchent les femmes métisses de se joindre aux forces de l'ordre. J'ai de très bonnes amies et alliées qui sont des femmes métisses.
     En passant, mon grand-père est un Cunningham. Je sais que je digresse, mais il y a bel et bien des femmes au sein du système. Même si je vous assure que le système est teinté de racisme, nous savons aussi qu'il présente de nombreux problèmes liés à l'équité entre les sexes, compte tenu de la façon dont les femmes sont traitées et dont la question est gérée. Le milieu est loin d'être facile, et il faut être très coriace. Les obstacles se rapportent à l'accueil qui est réservé aux femmes et à la façon dont elles sont traitées.
    Il s'agit d'un système archaïque qui repose sur des principes révolus régissant des questions comme le féminisme. Nous devons changer la perception. À l'époque où la GRC a été créée, nous avons entendu des histoires remontant aux années 1800 où des agents de la GRC violaient nos femmes. Le problème ne date pas d'hier; il perdure déjà depuis des siècles.
    Nous devons commencer à envisager un système qui ne serait pas fondé sur l'absence de valeur des femmes. À l'époque, les femmes n'avaient même pas le droit de vote ou de parole. Nous devons maintenant changer ces systèmes pour qu'ils reflètent exactement notre avenir afin que tous soient traités de manière équitable au sein du système.
    Pour faire suite à ce que vous avez dit, avez-vous d'autres remarques ou d'autres observations sur ce que le Comité devrait rechercher ou inclure dans une première loi sur les services de police des Premières Nations? Y a-t-il quelque chose que nous devons éviter?
    Je ne suis pas spécialiste des services de police des Premières Nations, mais ce que nous devons éviter au moment de trouver une solution de rechange à ces services, c'est le manque de ressources. Nous devons veiller à ce qu'ils aient assez de ressources pour faire leur travail. Ils ne devraient pas représenter qu'une fraction d'autre chose. Il faut plutôt qu'ils aient le pouvoir de faire leur travail sans être supervisés par un autre service de police au régime autoritaire.
    Un mécanisme de surveillance des services de police plus diversifié et plus responsable à l'échelle locale accroîtrait-il la reddition de comptes et la confiance de la communauté dans la police?
    Je crois que oui. Il existe des modèles d'engagement communautaire, et les organismes de surveillance aident. Je crois que certains d'entre eux misent sur l'engagement d'Autochtones. Les gens font alors plus confiance à leurs services de police, et on contribue ainsi à une surveillance saine au sein du système.

[Français]

    Je vous remercie.

[Traduction]

    Il faudra créer une nouvelle section à ancestry.ca.
    Nous passons maintenant à M. Lightbound, pour quatre minutes.

[Français]

     Je vous remercie beaucoup, monsieur le président.
    Je vais également faire écho aux commentaires de mes collègues. Je ne pourrais pas omettre de souligner l'anniversaire de la mort de Louis Riel aujourd'hui, lequel résonne partout au pays, mais particulièrement au Québec et dans le cœur des Québécois. Je veux donc souligner cette journée importante.
    Mes deux questions vous sont destinées, professeur Roach. Permettez-moi de vous les poser en français, car je pense qu'il ne faut pas sous-estimer votre capacité à comprendre cette langue, comme vous l'avez démontré pour les questions de Mme Michaud. Je vais d'ailleurs un peu reprendre le sens de sa dernière intervention.
    À l'inverse de ce modèle paramilitaire que semblent favoriser la GRC et divers corps policiers, j'aime beaucoup cette approche que vous préconisez, qui serait de les professionnaliser. Pourriez-vous nous parler des meilleurs exemples que vous avez observés, que ce soit dans les forces de police à l'échelle municipale ou dans celles à l'étranger?
    Ma deuxième question concerne l'attribution de contrats pour les services de police. Quels en sont selon vous les plus grands avantages? Pourriez-vous nous en faire un bref survol?
(1655)

[Traduction]

    À propos de la deuxième question, la Ville de Surrey a fait beaucoup de travail et a constaté qu'en abandonnant les services de police contractuels, elle aurait sa propre commission de police que le maire présiderait, et pourrait nommer des gens qui représentent la diversité géographique de la ville. Elle a aussi constaté qu'elle aurait plus de latitude en matière d'embauche et qu'il n'y aurait plus de cycle de trois ans. De nombreux agents de la GRC seront détachés à 1 000 ou 2 000 miles de chez eux; ils resteraient trois ans et repartiraient. L'inconvénient de l'abandon des services de police contractuels est la nécessité évidente d'avoir des fonds de démarrage. La Ville de Surrey estime qu'elle économisera de l'argent, ce qui est en partie attribuable à des projections voulant que les agents de la GRC doivent recevoir une augmentation salariale. Comme ils ont maintenant un syndicat, ils en recevront probablement une. De toute évidence, tout cela s'est fait avant la COVID.
    Je ne suis pas certain d'avoir bien compris votre première question, mais je vous remercie d'avoir rendu hommage à ma compréhension du français. J'ai essayé toute ma carrière, mais pas avec le plus grand succès.
    Le modèle paramilitaire... Je pense que cela renvoie au problème soulevé par ma collègue, l'autre témoin, à savoir le sexisme et le racisme vécus par des agents de police dans les rangs. La structure hiérarchique est une des raisons pour lesquelles ce climat perdure. La GRC ne repose même pas sur le modèle de police civile de sir Robert Peel. On s'est plutôt inspiré de la force constabulaire irlandaise, c'est-à-dire une force d'occupation coloniale en Irlande, qui portait le rouge parce que c'est ce que l'armée portait. Je suis d'accord avec ma collègue quand elle dit que les racines du paramilitarisme au sein de la GRC sont très profondes. Elles remontent au début de la GRC. Elles sont renforcées à Regina où tout le monde s'entraîne, et elles le sont également dans la structure de commandement. Il faudra un dirigeant brave et inspiré pour vraiment s'y attaquer. Nous n'avons eu qu'un seul dirigeant civil à la GRC, ce qui n'a pas très bien fonctionné. Je pense que ce qu'on constate, c'est que l'institution et son paramilitarisme sont très durables.
    Monsieur Roach, monsieur Lightbound, merci.

[Français]

    Madame Michaud, vous avez la parole pour une minute.
    Je vous remercie, monsieur le président.
    Je m'adresserai à vous, madame Omeniho.
    Vous avez mentionné que le Canada avait connu de longs épisodes de racisme envers les femmes autochtones et métisses, et c'est bien vrai. Nul besoin d'en dire plus. Vous disiez que les femmes ne s'étaient jamais vraiment senties en sécurité ou protégées par les agents de police. C'est un grave problème, parce que tous les Québécois et tous les Canadiens, peu importe leur origine, méritent de se sentir en sécurité dans leur milieu.
    Que pouvons-nous faire, selon vous, pour rétablir ce lien de confiance entre les femmes métisses et les agents de police?

[Traduction]

    J'estime que lorsque les agents de police font affaire avec des personnes, plutôt que de les percevoir d'abord comme des criminels potentiels, ils doivent écouter ce qu'elles ont à dire et être en mesure de déterminer ce qu'elles peuvent faire et comment les aider. Dans une communauté... Je peux vous donner de nombreux exemples de femmes victimes de violence ayant été incarcérées. Elles n'ont pas été traitées en fonction des mêmes valeurs qui auraient été appliquées à d'autres groupes raciaux. Je ne dis pas que je crois qu'aucune personne blanche n'a eu d'ennuis avec la police, mais il arrive trop souvent dans notre communauté que les policiers n'aient pas recours aux mêmes valeurs ou aux mêmes mesures de soutien lorsqu'ils appréhendent des femmes. Lorsqu'elles ont des problèmes de santé mentale, le traitement qu'on leur réserve est vraiment horrible. Encore la semaine dernière, on a vu la vidéo d'une femme autochtone qui s'est fait enlever ses vêtements dans un poste de police — elle était soûle et intoxiquée —; elle a subi une commotion et a dû être conduite à l'hôpital.
    Ces problèmes sont réels. Ce ne sont pas des choses obscures qui se produisent. Grâce aux nouvelles caméras, c'est ce que nous voyons dans les médias, et nous en sommes horrifiés, mais c'est la situation que nous vivons.
(1700)
    Nous devons malheureusement nous arrêter ici.
    Monsieur Harris, vous avez une dernière minute, s'il vous plaît. Mme May en aura peut-être une après, et nous devrons ensuite mettre fin à cette partie de la séance.
    Allez-y, monsieur Harris.
    Merci, monsieur le président.
    Monsieur Roach, dans vos recommandations, vous avez dit que le Parlement devrait réglementer les pratiques policières, y compris le recours à la force.
    Faites-vous allusion à une norme dans le Code criminel ou dans la Loi sur la Gendarmerie royale du Canada qui porterait sur les services de police contractuels? De quelle façon exactement la législation du Parlement devrait-elle réglementer ces normes nationales ou [Difficultés techniques] résultats?
    Je pense qu'il faudrait passer par le Code criminel, peut-être au moyen d'un règlement qui comprend une norme comme au Royaume-Uni.
    Dans l'affaire Golden, la Cour suprême a pratiquement supplié le Parlement de réglementer les fouilles à nu. Nous savons que cette pratique pose problème dans certains services de police, mais pas dans d'autres.
    Il faudrait aussi que ce soit associé à la collecte de données. Au Royaume-Uni, lorsqu'ils exercent le pouvoir d'arrêter et de fouiller les gens, les policiers doivent noter le moment et l'identité de la personne, et ces données sont publiées.
    Merci, monsieur Harris.
    Madame May, vous avez une minute, s'il vous plaît.
    Merci, monsieur le président.
    Compte tenu du temps limité, veuillez m'excuser, monsieur le professeur, de ne pas prendre la peine de vous exprimer l'énorme respect que j'ai pour votre travail et la reconnaissance que j'ai envers vous.
    Je veux passer tout de suite à l'Agence des services frontaliers du Canada, l'ASFC. La GRC fait l'objet d'une surveillance inadéquate, tandis que l'ASFC n'est aucunement surveillée.
    Que devrions-nous faire selon vous pour lutter contre le racisme et les mauvais traitements d'agents de l'ASFC?
    Eh bien, je pense que vous devez envisager une formation. Vous devez créer une sorte de conseil consultatif qui s'entretiendrait avec des spécialistes des migrants et des difficultés qu'ils éprouvent.
    Je ne pense pas que l'organe de surveillance de la GRC devrait être saisi de la question, car il est déjà en proie à des difficultés.
    Merci, madame May.
    Malheureusement, chers collègues, nous devons maintenant mettre fin à la séance. En votre nom, je veux remercier M. Roach et Mme Omeniho de leur contribution.
    Comme vous pouvez le voir, les députés aimeraient vraiment vous poser d'autres questions, mais le temps nous impose malheureusement son régime tyrannique.
    Sur ce, nous allons suspendre la séance et changer de témoins. Je vous prie donc de ne pas fermer vos ordinateurs.
    Merci.
(1700)

(1705)
    Nous entamons la deuxième partie de notre séance. Comme vous pouvez le voir, nous avons malheureusement accusé un retard de 40 minutes, mais c'est la démocratie à l'œuvre.
    Pour la deuxième partie de la séance, nous avons parmi nous Mme Samuels-Wortley, professeure à l'Université Carleton; et Mme Gerri Sharpe, vice-présidente de Pauktuutit Inuit Women of Canada, qui est accompagnée de Mme Samantha Michaels.
    Vous avez chacune sept minutes, et je vous demanderais de prendre la parole dans l'ordre qui figure sur l'avis de convocation.
    Madame la professeure, vous avez sept minutes, s'il vous plaît.
    Je remercie le Comité de m'avoir invitée à parler des problèmes de racisme systémique dans les services policiers au Canada.
    Avant de commencer, je tiens à souligner que je me trouve sur les terres ancestrales des Mississaugas de Credit, des Anishinabes, des Chippewas, des Haudenosaunees et des Wendats.
    Je m'appelle Kanika Samuels-Wortley, et je suis professeure adjointe à l'Institut de criminologie et de justice pénale de l'Université Carleton. Ma recherche porte sur les services de police dans les communautés racialisées ainsi que sur la criminalité et la victimisation chez les jeunes.
    Aujourd'hui, je vous adresse la parole non seulement en tant que chercheuse, mais aussi en tant que membre noire de la société canadienne.
    En tant que Canadiens, nous percevons souvent la diversité comme notre force. Toutefois, à ce moment-ci de l'histoire, nous ne pouvons plus ignorer qu'il est de plus en plus évident que l'inégalité sociale dans notre pays est hautement racialisée. Les Noirs et les Autochtones sont plus susceptibles de vivre dans la pauvreté, ce qui crée des obstacles à la mobilité sociale.
    Les récipiendaires des bourses canadiennes dans le domaine de la justice pénale se sont penchés sur la façon dont les inégalités sociales interviennent dans le crime, mais ils oublient souvent de prendre en considération le rôle de la race et du racisme ainsi que la façon dont la discrimination entre en jeu dans le dépôt d'accusations criminelles, surtout en raison...
    [Difficultés techniques]
    J'invoque le Règlement.
    Oui, monsieur Kurek.
    Monsieur le président, j'ai perdu l'audio, et je ne veux absolument pas manquer ce témoignage.
    Mon audio fonctionne très bien.
    Quelqu'un d'autre a perdu l'audio?
    Je crois que c'est dans la pièce que nous avons perdu l'audio.
    Est-ce que Mme Samuels-Wortley pourrait dire quelques mots, pour voir si nous avons du son?
    Certainement. Pouvez-vous m'entendre, maintenant?
    Oui.
    Pourriez-vous reprendre les 20 secondes précédentes de votre déclaration? Nous devrions pouvoir entendre ce que nous avons manqué.
    Certainement. Je suis désolée pour ceux qui vont devoir réentendre ce passage.
    Avant, pouvez-vous me dire où nous en sommes, monsieur le greffier? J'ai oublié d'arrêter le chronomètre.
    Aimeriez-vous que je reprenne du début?
    Normalement, je vous dirais oui, mais nous avons pris tellement de retard.
    Nous avons perdu à peu près une minute. Cela devrait aller.
    Je vais commencer le temps à une minute. Est-ce que ça ira?
    D'accord.
    Il vous reste six minutes. Je vous remercie.
    Je vais commencer par les services de police. C'est un aspect qui mérite une attention particulière dans le processus de justice pénale, simplement parce qu'il s'agit du premier point de contact avec les membres de la collectivité. Bien entendu, la police a également le pouvoir discrétionnaire et coercitif de déterminer si le comportement d'une personne est criminel ou non. La police est le gardien du système de justice.
    Certains universitaires et défenseurs diront que la police ne s'en prend qu'aux individus qui commettent des crimes, ce qui explique le taux de délinquance plus élevé chez les Noirs et les Autochtones. Cependant, un nombre croissant de travaux de recherche canadiens révèle que les comportements et les pratiques entachés de préjugés raciaux des services de police contribuent également aux disparités raciales dans notre système de justice.
    Le reste de ma déclaration va porter plus particulièrement sur les recherches visant les communautés noires au Canada, notamment sur les préoccupations relatives au profilage racial, au pouvoir discrétionnaire de la police et au manque de soutien policier concernant la victimisation des Noirs.
    Depuis des décennies, les communautés noires du Canada se disent préoccupées par la surveillance policière accrue dont elles font l'objet. Le profilage racial cadre avec l'idée voulant que les policiers se concentrent souvent sur la race des civils plutôt que sur des soupçons ou des comportements précis. Ces allégations sont étayées par un nombre croissant d'études menées à Toronto, Ottawa, Halifax, Montréal et Vancouver, qui révèlent que les Noirs — plus précisément les hommes noirs — sont largement surreprésentés dans les statistiques officielles des contrôles de routine.
    En outre, selon diverses études, les Noirs sont plus susceptibles de signaler de multiples contrôles de police et fouilles que les personnes interrogées qui appartiennent à d'autres groupes raciaux. Il est important de noter que les différences raciales en matière d'interaction avec la police subsistent même après la prise en compte d'autres facteurs pertinents tels que le sexe, la classe sociale, les caractéristiques du quartier et le comportement criminel.
    Autrement dit, on ne peut expliquer par la pauvreté ou la criminalité les différences raciales dans les interactions avec la police. La race est un facteur important. Si vous êtes un Noir au Canada, la question n'est pas de savoir si vous serez arrêté, mais quand.
    À cause de ces pratiques, les Noirs sont plus susceptibles d'être arrêtés pour avoir commis des délits mineurs que les personnes d'autres origines raciales qui ont exactement le même comportement. Il s'agit d'une forme de racisme systémique.
    Les recherches indiquent aussi que lorsque les Canadiens blancs sont pris à enfreindre la loi, ils sont traités avec plus de clémence par la police que les Noirs. Mes propres recherches démontrent que les préoccupations concernant le pouvoir discrétionnaire de la police et son impact sur la décision de procéder à une arrestation sont justifiées.
    Par exemple, notre Loi sur le système de justice pénale pour les adolescents ne fait pas que conseiller aux policiers le recours à des solutions de rechange à la judiciarisation, lorsqu'ils appréhendent un jeune qui a commis un crime, mais elle leur en donne le pouvoir. Cela s'appuie sur des recherches qui concluent que le système judiciaire est non seulement coûteux, mais inapproprié pour la plupart des jeunes qui commettent des délits. Pourtant, mon analyse des données de la police révèle que, par rapport aux jeunes d'autres origines raciales, les jeunes de race noire sont plus susceptibles d'être accusés et moins susceptibles de bénéficier d'une solution de rechange.
    Les antécédents judiciaires peuvent entraîner toute une série de conséquences négatives, notamment la stigmatisation sociale. En outre, un casier judiciaire peut avoir un impact négatif sur l'accès à l'éducation et à l'emploi et, en fin de compte, mener à d'autres infractions criminelles. Par conséquent, les Noirs risquent plus de faire l'objet d'accusations criminelles et d'interventions devant les tribunaux, comme l'indiquent mes données. Ils sont également plus susceptibles de subir les conséquences négatives de la criminalisation et de l'étiquetage.
    Les taux disproportionnés d'inculpation de personnes racialisées donnent à croire que les préjugés en sont venus à faire partie intégrante du pouvoir discrétionnaire de la police. Ce sont ces systèmes qui sont responsables du racisme systémique.
    Enfin, je vais passer à un autre sujet et aborder la question de la victimisation. Alors que la communauté noire fait l'objet d'une surveillance excessive à bien des égards, ses membres se disent depuis longtemps préoccupés par l'inaction ou l'insensibilité de la police lorsqu'il s'agit de leur propre victimisation.
    Bien qu'il y ait très peu de recherches à ce sujet, les données existantes indiquent que les Noirs sont plus exposés à la victimisation que les personnes d'autres origines raciales. Cependant, les recherches donnent également à croire que les Noirs du Canada sont moins susceptibles de signaler les crimes à la police, y compris quand ils sont eux-mêmes des victimes. Le but de mes travaux de recherche actuels est d'en comprendre les raisons. Il est très important de mieux comprendre ce qui explique que les gens ne signalent pas les crimes à la police. Les signalements des civils sont nécessaires pour établir les taux de criminalité dans les collectivités. La coopération civile aux enquêtes policières est également nécessaire pour résoudre les crimes et traduire les délinquants en justice.
     Mon analyse des données nationales sur la victimisation montre que les Canadiens noirs font peu confiance à la police. Mes entretiens individuels avec de jeunes Noirs à Toronto montrent que les jeunes sont moins motivés à signaler les crimes à cause de ce manque de confiance, lequel est directement lié aux traitements rudes et inadéquats que leur ont fait subir ceux qui sont responsables de l'application de la loi.
    Par exemple, de nombreux jeunes déclarent que lorsqu'ils ont signalé un crime à la police dans le passé, la police les a traités comme des suspects plutôt que comme des victimes. D'autres craignent que la police fasse un usage de la force contre eux ou les membres de leur famille s'ils signalent avoir été victimes d'un acte criminel. Cela place les jeunes Noirs dans une position vulnérable en raison de leur risque accru d'être victimes de violence ainsi que du manque de confiance dans une institution qui est censée les servir et les protéger. Il ne s'agit pas que d'un exemple de racisme systémique; c'est aussi un enjeu de sécurité publique.
(1710)
    Nous sommes à une époque où les citoyens s'inquiètent des préjugés raciaux au sein des services de police canadiens. En fait, un récent sondage révèle que 40 % des Canadiens estiment que la police traite injustement les Noirs, les Autochtones et les personnes de couleur. Depuis des décennies, les services de police et les décideurs politiques esquivent les préoccupations exprimées au sujet des préjugés raciaux et négligent de mener les recherches et d'apporter les réformes nécessaires. Vous avez aujourd'hui une occasion cruciale de démontrer que vous êtes à l'écoute des Canadiens en général, et des membres de la communauté noire en particulier.
    En tant que chercheuse, je soutiens que les services de police doivent faire preuve de plus de transparence pour qu'il soit possible de documenter le racisme et d'évaluer les effets des initiatives de lutte contre le racisme. Il faut améliorer la collecte, l'accès et la diffusion des données fondées sur la race. Il faut aussi un engagement à travailler avec des chercheurs, y compris des chercheurs de couleur, qui sont prêts à mener des enquêtes cruciales sur les pratiques en matière de maintien de l'ordre. Nous ne pouvons plus compter sur des chercheurs qui se contentent de donner à la police les réponses qu'elle veut.
    Je voudrais terminer par une citation d'un participant à mon étude, qui a déclaré ceci:
Les agents ne sont pas tous mauvais, mais en tant qu'institution, la police donne à ceux qui ont des préjugés l'espace et la plateforme nécessaires pour cibler les personnes qui appartiennent à ces groupes et qui sont sans recours.
    Ce sont des propos que je trouve percutants, car pour moi, en tant que membre de race noire de la société canadienne, ces enjeux ont des répercussions sur mon sentiment de sécurité et de bien-être.
    Je remercie le Comité.
(1715)
    Merci.
    Vice-présidente Sharpe, vous disposez de sept minutes, que vous allez partager, je présume, avec Mme Michaels.
    Mme Michaels va m'offrir du soutien pendant la période des questions.
    Qujannamiik, monsieur le président.
    Ublaahatkut, mesdames et messieurs les députés, monsieur le président, les vice-présidents, les invités et les membres du personnel.
    Je m'appelle Gerri Sharpe et je suis la vice-présidente de Pauktuutit Inuit Women of Canada. Je suis heureuse d'être ici avec vous aujourd'hui au nom de notre présidente, Rebecca Kudloo.
    La majorité de la population inuite vit dans 51 communautés qui sont réparties dans quatre régions de l'Inuit Nunangat: le Nunavut, le Nunavik, l'Inuvialuit et le Nunatsiavut.
    La violence est une cause majeure de mortalité chez les femmes inuites, le taux étant de 14 fois supérieur à la moyenne nationale.
    Dans l'Inuit Nunangat, le maintien de l'ordre relève de la Gendarmerie royale du Canada, sauf au Nunavik, où le maintien de l'ordre est assuré par le Corps de police régional Kativik depuis 1996.
    Selon les déclarations officielles de la GRC et du CPRK, les activités de maintien de l'ordre sont menées de manière à garantir la justice et la sécurité de tous les citoyens.
    Un certain nombre d'éléments justifient qu'on remette en question l'affirmation selon laquelle le maintien de l'ordre dans l'Inuit Nunangat réussisse à protéger les femmes. Parmi les préoccupations, citons le manque de personnel et la courte durée des affectations des agents de la GRC, le manque d'expérience des agents concernant la population et leur manque de compétences culturelles, les barrières linguistiques, le manque d'agents de police inuits, le manque de ressources et le sous-financement, ainsi que le manque de services intégrés.
    Comment en sommes-nous arrivés là?
    En quelques décennies seulement, nos vies et nos moyens de subsistance ont subi une profonde transformation organisée par des forces coloniales échappant à notre contrôle. La GRC a joué un rôle clé dans ces opérations. Ils nous ont déplacés de colonies permanentes en colonies permanentes, ont emmené les enfants inuits dans des pensionnats et ont abattu les chiens de traîneau inuits.
    En termes simples, dans l'Inuit Nunangat, le maintien de l'ordre est une structure fondée sur le racisme systématique. Il s'agit d'une culture fondée sur des opinions profondément ancrées qui se traduit par des réponses défaillantes à la violence que subissent les femmes et les filles inuites.
    Les communautés inuites ont une culture inclusive, mais la culture du maintien de l'ordre est différente, basée sur le colonialisme.
    En janvier 2020, Pauktuutit a publié un rapport intitulé « Addressing Gendered Violence against Inuit Women: A review of police policies and practices in Inuit Nunangat ». Le rapport a révélé des problèmes fondamentaux qui mènent tous à la normalisation de la violence sexiste contre les femmes inuites. La police se heurte à d'importants problèmes, dans l'exercice de son rôle, notamment quand elle fait face à des situations violentes à haut risque sans pouvoir compter sur des ressources d'aiguillage à l'appui des personnes qui doivent échapper à la violence familiale. Les investissements insuffisants dans les services sociaux, les services de santé et les infrastructures générales telles que les logements et les refuges dirigés par les Inuits ajoutent également à la lourde responsabilité que doivent assumer les forces de l'ordre. Les agents, individuellement, peuvent changer énormément les choses et ils le font. Nous avons entendu des récits positifs d'interactions avec la police, mais le tableau général qui se dégage de notre rapport met en évidence un modèle de maintien de l'ordre largement défaillant.
    Les policiers sont mal intégrés dans la communauté et ne sont donc pas considérés comme dignes de confiance. Ils ont une compréhension limitée de l'histoire des communautés inuites et des causes profondes des problèmes, notamment en ce qui concerne la consommation de drogue et d'alcool et la violence familiale.
    Comme l'a souligné un policier, la communication est fondamentale dans le maintien de l'ordre. Pourtant moins de 5 des 150 agents de la GRC qui sont au Nunavut parlent couramment l'inuktitut. Le système de répartition n'offre pas de personnel parlant l'inuktitut. Le décalage linguistique constitue une barrière pour les femmes inuites lorsqu'elles signalent des violences fondées sur le sexe. Ce fait, à lui seul, nuit à la confiance dans le maintien de l'ordre.
(1720)
     Notre rapport indique en outre que plusieurs femmes ayant besoin d'être protégées contre la violence sont retirées de leur foyer à la place des agresseurs. Cette injustice supplémentaire qu'elles subissent accentue leur traumatisme. Les sanctions imposées par les tribunaux ne sont pas convenablement surveillées, ce qui suscite la méfiance et met les femmes en danger.
    Le racisme persiste au sein des forces policières lors des interactions avec les femmes. Vous vous souviendrez peut-être de l'enquête explosive que la CBC a réalisée cet été au sujet du comportement des agents de la GRC servant 25 communautés du Nunavut, laquelle a révélé des détails choquants sur plus de 30 cas allégués d'inconduite, de violence et de traitement inhumain de la part de la GRC à l'égard des Inuits, particulièrement des femmes.
    Nous préconisons une modification fondamentale de la manière dont les services de police sont exécutés dans le Nord. Notre rapport contient 15 recommandations, dont voici les faits saillants: une formation sur les compétences culturelles, portant notamment sur l'histoire et la culture inuites et sur le dialecte inuktitut; des agents de sexe féminin, avec une agente présente lors du processus de prise de déclaration, qu'elle pourrait même diriger; des comités consultatifs inuits composés d'aînés, de dirigeants communautaires et d'animateurs culturels pour faire en sorte que les pratiques et les procédures de la police intègrent les principes de l'Inuit Qaujimajatuqangit; des services de police sensibles aux traumatismes avec une formation sur les traumatismes et le vécu antérieur et actuel des Inuits afin de désamorcer les situations et de nouer des relations positives; en ce qui concerne la durée des affectations, une révision de la durée de deux ans des affectations des agents de la GRC afin de la prolonger; une formation sur la violence fondée sur le sexe, offerte au moins en partie par des défenseurs des droits des victimes et incluant des survivants inuits de la violence familiale; dans chaque poste de police, des postes civils inuits occupés par des Inuits à titre d'interprètes, de guérisseurs naturels et de patrouilleurs communautaires ou de gardiens de la paix...
    Madame Sharpe, pourriez-vous clore votre exposé? Nous avons dépassé vos sept minutes. Je suis désolé.
    Bien sûr.
    Mon dernier point concerne l'accessibilité de la police. Nous avons besoin de financement d'urgence pour que des préposés parlant inuktitut puissent répondre aux appels en tout temps dans l'Inuit Nunangat.
    Nous savons qu'il faut en faire bien plus. Chaque femme et fille inuite mérite de vivre sans violence.
     Qujannamiik. Je répondrai à vos questions avec plaisir.
    Je vous remercie.
    Nous entamerons maintenant le tour de questions.
     Monsieur Motz, vous êtes le premier. Vous disposez de six minutes.
    Je vous remercie, monsieur le président.
    Madame Samuels-Wortley, madame Sharpe et madame Michaels, je vous remercie beaucoup de vos exposés d'aujourd'hui.
    Je poserai mes questions sans tarder, car le président m'interrompt toujours trop tôt.
    Madame Samuels-Wortley, vous avez indiqué que le service de police communautaire est une approche couramment adoptée pour améliorer les relations avec la police dans une communauté. Mais parfois, cela n'a pour effet que de faire augmenter le nombre d'agents, lesquels n'interagissent pas, et la communauté se retrouve avec un trop grand nombre d'agents. Il me semble que cette approche mène à un excès de forces policières au lieu d'avoir l'effet escompté. Comment amélioreriez-vous la présence policière dans une communauté sans créer cette atmosphère de présence excessive de la police?
    Je vous suis certainement reconnaissante de poser cette question, et je suis d'accord avec vous: une police communautaire semble avoir un aspect bénéfique qui peut contribuer à l'établissement de relations positives avec la communauté. Les jeunes que j'ai interrogés ont fait remarquer qu'ils savent parfaitement quels agents ont été engagés à cette fin. Souvent, on réclame des agents ou de la formation supplémentaires, mais ces interventions ne s'inscrivent pas toujours dans une approche communautaire. Je pense que le problème vient du fait qu'on pense que la présence d'agents supplémentaires sur la rue donne une impression de renforcement de l'exécution de la loi.
    Je pense essentiellement que nous devons commencer directement au début, quand la formation commence. Il faut adopter une approche communautaire dans la manière dont les agents de police agissent en interaction avec la communauté. Ils ne doivent pas seulement chercher à nouer une relation avec la communauté; ils doivent porter attention à la manière dont ils agissent en interaction avec toutes les personnes qu'ils doivent servir.
(1725)
    Je vous remercie beaucoup.
    Je vais tenter de vous poser une autre question, madame, après quoi j'ai d'autres questions pour les autres témoins, si je peux les poser rapidement.
    Dans un article publié en juin, vous vous dites en faveur de l'abandon des services de police contractuels pour privilégier les services de police nationaux. En une minute ou moins, pouvez-vous me fournir plus de détails sur la raison pour laquelle il ne faudrait plus conclure de contrats de services de police avec la GRC? Quel rôle permanent devrait-elle jouer dans nos services de police nationaux?
     Je vous remercie certainement de cette question et je ferai de mon mieux pour y répondre en une minute.
    La raison pour laquelle je réagis ainsi, c'est parce que j'admets que toutes les communautés sont différentes. Comme les autres témoins l'ont souligné, quand on a affaire à des communautés individuelles, chacune a des problèmes et des préoccupations différentes auxquels il faut s'attaquer. Voilà pourquoi je pense que la GRC n'est pas l'organisme le mieux habilité à assurer les services de police dans les régions où elle ne connaît peut-être pas bien les préoccupations de l'ensemble de la communauté. Par conséquent, je juge préférable de commencer à intégrer des services de police qui connaissent mieux les problèmes propres aux communautés.
    Je vous remercie beaucoup. C'était une réponse fort succincte au lieu de ce qui aurait pu être, j'en suis sûr, une réponse de plusieurs jours. Je vous remercie.
    Madame Sharpe ou madame Michaels, il existe un rapport intitulé Contrer la violence fondée sur le sexe à l’égard des femmes inuites: un examen des politiques et des pratiques policières dans le Nunangat inuit, préparé par votre organisation et une certaine Mme Comack. Ce rapport contient un certain nombre de recommandations visant à améliorer les services de police dans les communautés inuites.
    Est-ce que certaines de ces recommandations devraient, selon vous, se voir accorder la priorité immédiatement? Je sais qu'une de vos présidentes a rencontré récemment la commissaire Lucki à ce sujet. Est-ce que certaines recommandations sont essentielles et devraient être appliquées le plus tôt possible?
    Je dirais que quelques-unes d'entre elles devraient être mises en oeuvre de manière urgente.
    À mon avis, il est crucial de revoir la durée des affectations des agents de la GRC dans les communautés. Pour s'intégrer à la communauté, les membres doivent être présents. Ils doivent être vus et participer aux activités de la communauté. Or, dès que c'est chose faite, ils sont retirés de la communauté après deux ans. C'est merveilleux de voir les agents dans la communauté, participant à des activités comme des jamborees ou à des parties de basketball ou de hockey. Ils finissent par faire partie de la communauté, qui en vient à leur faire confiance. Mais dès que cela arrive, ils sont envoyés dans une autre communauté, et tout le processus recommence. La confiance doit être là. Les agents doivent être considérés comme faisant partie de la communauté.
    L'une des caractéristiques qui démarquent les communautés inuites de celles du Sud, c'est le fait qu'elles sont holistiques. Elles fonctionnent comme un tout. Je dis souvent aux gens que ce qui se passe à Inuvik ou à Iqaluit aura une incidence sur ce qui se passe à Yellowknife. C'est un fait, car c'est ainsi que les familles fonctionnent. C'est comme cela que les communautés fonctionnent: comme un tout.
    Je demanderai à Mme Michaels si j'ai omis quelque chose, car je suis certaine que c'est le cas.
    Elle dispose d'une trentaine de secondes.
    J'ajouterais qu'une recommandation très concrète consiste à accorder immédiatement plus de financement pour pallier le manque de services de répartition locaux officiels. Sachez que si quelqu'un appelle à partir d'une des cinq communautés du Nunatsiavut après les heures de service, son appel est transféré à St. John's. Le temps que prend un agent pour se rendre à la résidence pourrait faire la différence entre la vie ou la mort d'une femme, particulièrement dans des affaires de violence fondée sur le sexe.
(1730)
    Je vous remercie.
    Je dois malheureusement vous interrompre.
    Vous voyez, je vous l'avais dit. Il m'interrompt toujours trop tôt. Cela ne fait même pas près de six minutes.
    L'horloge de M. Motz est très lente.

[Français]

    Madame Michaud, vous avez la parole pour six minutes.
    Je vous remercie, monsieur le président.

[Traduction]

    Monsieur le président, je pense que ce sont les libéraux qui sont censés être les suivants.
    Je suis désolé. Veuillez m'excuser.
    M. Motz m'a tellement dérangé que j'ai oublié Mme Damoff. Comment ai-je pu faire une chose pareille?
    Je suis désolé de cet impair. Vous avez la parole.
    Je vous remercie, monsieur le président.
    Je remercie nos deux témoins.
    Je m'adresserai à vous deux. Je veux revenir aux services de police contractuels, car comme nous l'avons constaté dans un certain nombre d'affaires — les problèmes des Wet'suwet'en avec la GRC et maintenant les déboires des pêcheurs micmacs —, les agents de la GRC sont engagés aux termes de contrat par la province. À titre de représentants du gouvernement fédéral, ils trouvent leur situation délicate, car ils relèvent en fait de la province ou, dans le Nord, du territoire. Vous l'avez d'ailleurs souligné.
    Madame Samuels-Wortley, je commencerai par vous et vous accorderai plus d'une minute. Si la GRC cessait d'offrir des services de police contractuels, cela lui permettrait de s'occuper d'autres priorités relevant réellement du champ de compétences fédéral. Je me demande si vous pourriez peut-être nous en dire un peu plus sur toute la question du rôle du gouvernement fédéral dans les services de police contractuels et sur les avantages. Nous savons que Surrey vient d'instaurer son propre service de police et abandonne les services contractuels.
    Je commencerai par vous, madame Samuel-Wortley, puis nous poursuivrons.
     Certainement. Pour en revenir à ce que j'ai mentionné plus tôt et à la raison pour laquelle je suis favorable au fait que la GRC n'ait plus à conclure de contrats avec les communautés, c'est que, comme l'a fait remarquer ma collègue, un grand nombre de nos communautés manquent cruellement de fonds à l'heure actuelle. On a donc l'idée ou l'impression que si on cessait d'y faire affaire avec la GRC, les fonds pourraient servir à soutenir des programmes nécessaires aux communautés individuelles.
    Je peux également voir pourquoi on envisage actuellement d'abolir le financement des services policiers, mais je prends soin ici de souligner que je ne dis pas que je soutiens sans réserve ce mouvement. Je suis toutefois d'accord pour qu'on mette l'accent sur la communauté, simplement parce que quand on démontre qu'on s'emploie à édifier une communauté plus saine, on constate que le niveau de criminalité y diminue. Je pense donc qu'il importe que nous examinions réellement de quelle manière nous pouvons utiliser l'affectation des fonds pour aider les communautés à devenir beaucoup plus saines afin que leurs citoyens prospèrent au lieu de se tourner vers la criminalité.
    Je vous remercie.
    Madame Sharpe, vous n'avez pas exactement prononcé les mots « mettre fin aux services de police contractuels », mais, comme vous le savez, la lettre de mandat du ministre Blair indique qu'il doit « co-développer un cadre législatif qui reconnaît que les services de police des Premières Nations sont un service essentiel ». Je me demande si ce modèle de service de police pourrait être élargi pour inclure les Inuits et les Métis, mais les Inuits en particulier. Plutôt que d'être confié à la GRC, ce service essentiel serait assuré par des gens qui vivent dans la région. Qu'en pensez-vous?
    Je sais que vous n'avez pas dit « mettre fin aux services de police contractuels », mais c'est un peu ce dont vous avez parlé. Je me demande si vous auriez des observations à formuler à cet égard également.
    Avant de céder la parole à Mme Michaels pour fournir une réponse plus exhaustive, je tiens à préciser que le mot « abolition » ne m'est guère familier. Je dirai que tout passe par la réconciliation, laquelle commence par le dialogue. Quand je parle de dialogue, je veux dire qu'il faut travailler ensemble vers un objectif commun en ce qui concerne la manière dont nous vivons actuellement.
     Je demanderai à Mme Michaels de terminer ces explications pour nous, si vous le voulez bien.
    Je le répète, l'Inuit Nunangat compte quatre régions. Bien entendu, le Nunavut, l'Inuvialuit, et le Nunatsiavut sont tous servis par la GRC, mais le Nunavik l'est par le Corps de police régional Kativik, ce qui rend la situation particulière dans un territoire aussi vaste.
    Mais c'est vrai: je ne pense pas que nous ayons eu le temps ou l'occasion de mener des consultations et de réellement trouver une réponse au sujet des services de police contractuels. Selon moi, le rapport fait clairement ressortir le besoin de créer des postes civils inuits au sein de la GRC. Je ne suis pas certaine que la GRC et le Corps de police régional Kativik... ou plutôt, je devrais être plus affirmative: je suis certaine que cela ne fonctionne pas. Cette approche ne fonctionne tout simplement pas.
    Ici encore, je pense que nous devons réellement commencer à repenser les services de police, et quand je dis « nous », je parle des Inuits. Il faudrait, selon moi, mener une consultation de masse auprès des Inuits, écouter la voix des femmes et des jeunes avant tout et comprendre comment ils perçoivent ou veulent percevoir l'évolution des services de police. Notre rapport met toutefois en lumière le besoin d'instaurer des postes civils inuits.
(1735)
    Je vous remercie.
    Madame Samuels-Wortley, il ne me reste que 45 secondes environ.
    En ce qui concerne les caméras corporelles, une étude réalisée en 2019 — qui constitue la plus importante effectuée à ce jour — indique que ces dispositifs ont peu ou pas d'incidence sur l'éradication du racisme systémique. Je me demande si vous avez des opinions à ce sujet.
     Je peux certainement traiter de la question. Les recherches menées sur les caméras corporelles ne sont pas concluantes. Certaines appuient leur utilisation, alors que d'autres, comme celle que vous évoquez, ne la soutiennent pas.
    Je dirais que le port de caméras corporelles par la police ne sonnera pas le glas du racisme systémique, comme l'illustre le fait qu'un certain nombre de mauvais usages de la force ont été captés par des caméras et que rien n'a été fait.
    Je pense qu'il faut renforcer la reddition de comptes quand l'interaction d'un agent avec un membre de la communauté pose un problème ou suscite des préoccupations. Comment cet agent est-il tenu responsable de ses actes? Le simple fait de capter son comportement sur une vidéo ne semble pas changer grand-chose. Cette vidéo constitue une preuve, mais le problème, c'est que c'est souvent la police qui décide comment cette preuve sera utilisée. Comme...
     Je vais malheureusement devoir vous interrompre ici. Je suis désolé.

[Français]

    Madame Michaud, vous avez la parole pour six minutes.
    Je vous remercie, monsieur le président.
    Je remercie les témoins de leur présence, particulièrement Mme Samuels-Wortley.
    Madame Samuels-Wortley, vous travaillez actuellement sur une étude qui explore comment les perceptions et les expériences de discrimination raciale par les agents des forces de l'ordre peuvent contribuer à la victimisation et à la délinquance chez les jeunes Noirs et les jeunes Autochtones, et comment cela contribue à leur oppression et à leur marginalisation dans la société. Dans la présente étude, il est peu question des jeunes. On parle souvent des femmes autochtones et on a raison de le faire, mais il y a aussi les jeunes qui sont visés.
    Je suis la porte-parole du Bloc québécois en matière de jeunesse, d'où mon intérêt pour cette question. J'aimerais que vous alliez plus en détail sur la façon dont les perceptions de l'injustice peuvent conduire à une victimisation ou à des valeurs liées à la procriminalité chez les jeunes issus de la communauté noire et des communautés autochtones.

[Traduction]

    Avant de répondre à cette question, madame Samuels-Wortley, je veux m'assurer que tous nos témoins entendent l'interprétation. La recevez-vous?
    Je suis désolée, non.
    Allez jusqu'au globe en bas de votre écran et cliquez dessus. Cela vous donnera accès à l'interprétation anglaise.
    Pardonnez-moi. Je n'avais pas l'interprétation.
     Je demanderai à Mme Michaud de répéter sa question en version abrégée.
    Madame Michaud, allez-y en 15 secondes.

[Français]

    Est-ce que mon temps de parole repart de zéro, monsieur le président?

[Traduction]

    Je vais doubler votre temps. J'ai arrêté le chronomètre.

[Français]

    Je vous remercie, c'est gentil.
    Madame Samuels-Wortley, je vous remercie du travail que vous accomplissez. Vous travaillez sur une étude en ce moment qui explore comment les perceptions et les expériences de discrimination raciale par les agents des forces de l'ordre peuvent contribuer à la victimisation et à la délinquance chez les jeunes Noirs et les jeunes Autochtones, ce qui contribue ainsi à leur oppression et à leur marginalisation dans la société.
    Je suis la porte-parole du Bloc québécois en matière de jeunesse. Je trouve qu'on ne parle pas beaucoup des jeunes dans la présente étude. On parle beaucoup des femmes autochtones, et c'est très bien, voire nécessaire. J'aimerais cependant que vous nous parliez plus en détail de la façon dont les perceptions de l'injustice peuvent conduire à une victimisation accrue ou à des valeurs liées à la procriminalité chez les jeunes issus des communautés noires et des communautés autochtones.
(1740)

[Traduction]

    C'est une excellente question, et je me réjouis d'avoir l'occasion d'approfondir la question.
    Les perceptions d'injustice sont effectivement à l'étude actuellement afin de voir s'il s'agit d'un facteur criminogène. Il y a, particulièrement chez les jeunes noirs, une perception d'un certain degré d'injustice. Quand on examine chaque indicateur social, la population noire affiche les niveaux les plus bas d'emploi, de revenu, de logement et de santé, comme on peut le constater avec la COVID-19.
    Un sentiment d'aliénation et de désespoir règne réellement au sein de la communauté noire. En raison de ces perceptions d'injustice, lorsqu'il est question des services de police — et plus précisément du racisme systémique qu'on y observe —, les gens ont l'impression que la société est injuste.
    Par conséquent, certains jeunes peuvent développer une attitude procrime. Cela ne les rend que plus vulnérables, car s'ils ne font pas confiance à la police, qui est censée être là pour les servir et les protéger, ils risquent d'élaborer des stratégies d'autoprotection. Ils pourraient recourir à des comportements criminogènes lorsqu'ils portent des armes pour se protéger ou chercher à se faire justice eux-mêmes, car ils ne considèrent pas que la police est de leur côté ou les protège quand ils en ont besoin.
    C'est une question que j'entends examiner plus en profondeur. Je pense que c'est un aspect que nous devons étudier, car le fait d'avoir un casier judiciaire ajoute des obstacles sur la route de l'obtention des facteurs sociaux qui favorisent la mobilité. Un sentiment extrêmement puissant d'aliénation règne donc au sein de la communauté noire, particulièrement chez certains jeunes.

[Français]

    Je vous remercie.
    C'est souvent la façon dont les gens interagissent entre eux. Selon vous, comment les agents devraient-ils interagir avec les jeunes des communautés noires et des communautés autochtones? Y a-t-il une façon de diminuer les perceptions négatives à leur égard?

[Traduction]

     Voilà encore une excellente question.
    Je demande simplement à tous les jeunes que j'interroge ce qu'un agent de police peut faire pour qu'ils aient l'impression qu'un lien se fait ou pour qu'ils n'éprouvent pas de sentiments négatifs à leur égard.
    Sachez que chaque jeune comprend l'importance d'avoir des agents de police. Pas un seul n’a indiqué qu'il voulait qu'on leur coupe les fonds ou considérait qu'ils sont inutiles.
    Ce qu'ils veulent littéralement, c'est être traités avec respect. Chaque jeune a fait savoir que tout ce qu'il souhaite quand il rencontre un agent, c'est d'avoir le sentiment d'être traité avec équité et respect. On pourrait croire que c'est quelque chose de facile à faire, mais ce n'est manifestement pas le cas.
    Je considère qu'il faut commencer par s'attaquer à la culture au sein de la police et modifier la manière dont cette dernière pense qu'elle doit agir en interaction avec la communauté. Il faut mettre davantage l'accent sur le développement communautaire et l'interaction positive avec la communauté.
    Comme les autres témoins l'ont souligné également, il arrive que des membres de la communauté indiquent avoir eu des interactions positives. Je pense que cela arrive, mais une interaction négative peut complètement annihiler l'effet d'une interaction positive et changer complètement la manière dont une personne perçoit la culture et l'institution de la police.
    Je suis convaincue qu'il faut revenir à la case de départ et repenser ce que cela signifie d'être agent de police et ne pas voir cela comme un exemple de mollesse, mais comme une démarche essentielle.
    Vous disposez d'une minute et demie.

[Français]

    Dans le cadre de vos études, vous travaillez avec les jeunes et vous êtes à leur écoute. Croyez-vous qu'il faudrait leur donner une plus grande place pour ce qui est de l'élaboration de stratégies visant à améliorer la relation entre eux et les agents de police? Si c'est le cas, comment pourraient-ils agir comme vecteurs de changement afin de nous permettre d'améliorer les systèmes policiers au Canada?
(1745)

[Traduction]

    Je considère certainement que les jeunes doivent être mis à contribution, car ce sont eux qui agissent en interaction avec la police. Je suis honnêtement épatée chaque fois que je parle à un certain nombre d'entre eux quand je suis dans la communauté et que je parle aux gens et que je recueille leurs opinions et leurs perceptions.
    Je pense qu'il existe des comités consultatifs de jeunes. J'ignore simplement quel pouvoir ils ont. Ils devraient en avoir beaucoup plus afin de proposer des solutions concernant la manière d'établir une relation plus positive avec la police. Selon moi, il faut s'assurer que leur voix est entendue et leur confier un rôle plus important afin d'édifier une communauté plus forte.
    Je vous remercie.
    Nous allons devoir nous arrêter là.
    Monsieur Harris, vous disposez de six minutes.
    Je vous remercie, monsieur le président.
    Je remercie de nouveau nos deux principaux témoins, ainsi que Mme Michaels, de leur contribution.
    Madame Sharpe, j'ai écouté attentivement votre description du rôle qu'a joué la GRC dans vos communautés au fil de l'histoire sur le plan culturel et à d'autres égards, puis à la liste d'une partie très fondamentale des 15 recommandations que contient votre rapport de janvier dernier.
    Conjurant les images que nous avons vues au cours des derniers mois, lesquelles sont en partie à l'origine de l'étude de notre comité, je me dois de vous poser la question suivante. À votre avis, la GRC est-elle un corps de police capable de gagner la confiance des gens, avec tout ce qu'elle a fait à cette fin, pour surmonter le passé, ou devons-nous peut-être porter notre regard ailleurs?
    Mme Damoff a effleuré la question d'une certaine manière en parlant des services de police contractuels, mais peut-on espérer que la GRC soit l'organisme qui convient pour assurer un service de police adéquat dans les communautés inuites?
    Pauktuutit n'a pas discuté pour déterminer si la GRC est l'organisme pour le faire. Tout corps de police devant servir des communautés inuites devra suivre une formation spécialisée, qui doit être offerte dans les communautés pour que les agents, qu'ils soient Inuits ou qu'ils viennent du Sud et ne sont pas Inuits, aient la somme de...
     Vous n'êtes pas le seul témoin à avoir éprouvé ce problème. Ce sont surtout les membres du Comité qui le rencontrent, toutefois.
    Je veux en venir au fait qu'outre la formation nécessaire pour notre bassin de population et les services qu'il faudrait offrir, il faudra encore que des non-Inuits assurent des services de police. Qu'il s'agisse d'une entreprise contractuelle ou de la GRC, l'intervention de non-Inuits sera encore nécessaire. Il faut donc veiller à ce qu'ils possèdent des compétences culturelles.
    Si vous aviez une solution de rechange, avec un modèle de gouvernance inuit relevant de votre autorité, est-ce une voie qui pourrait intéresser vos communautés?
    Madame Michaels, voulez-vous tenter de répondre à cette question?
    Oui. Ici encore, je pense que cela nous ramène au fait qu'on n'a pas mené de consultation exhaustive ou eu l'occasion d'examiner la question en profondeur. Je pense que c'est la prochaine démarche à entreprendre dans la foulée de notre rapport, où nous signalons un certain nombre de façons dont les services de police ne sont pas efficaces ou même équitablement financés.
    Il faut procéder à la consultation. C'est urgent, selon moi.
    Il faut en outre investir massivement dans les communautés. On compte 51 communautés, lesquelles ne sont servies que par 15 refuges, tous accessibles par avion.
    Dans des affaires de violence fondée sur le sexe — qui surviennent fréquemment, nous le savons —, que peuvent faire les quelques agents de la GRC en poste dans les communautés? Les ressources communautaires sont terriblement limitées. Je pense qu'il faut en faire énormément au chapitre des services de police, mais à d'autres égards également.
(1750)
    J'ajouterai quelque chose à ce sujet. Gardez à l'esprit que quand je parle d'Inuit Nunungat, je fais référence au Nord des Territoires du Nord-Ouest et à l'ensemble du Nunavut et du Nunavik. Essentiellement, l'Inuit Nunungat englobe le tiers du Canada.
    Oh, oui. Au Labrador, il y a aussi le Nunatsiavut, que je connais mieux, même si je me suis rendu au Nunavut également. C'est indubitablement un vaste territoire. Il existe un large éventail de problèmes dont nous avons parlé aujourd'hui. Voyons voir.
    Il ne me reste plus beaucoup de temps, mais je voulais interroger Mme Samuels-Wortley au sujet d'un point qu'elle a soulevé à propos de la discrétion du service de police. Je sais qu'il s'agit d'un outil très puissant dont disposent les agents de police quand ils agissent en interaction avec des membres de la population, un outil qui influence notamment la manière dont ils pourraient faire preuve de partialité systémique.
    Comment jugulez-vous ce problème, si ce n'est en offrant une meilleure formation? Existe-t-il une autre manière, dans le système de justice peut-être, de faire en sorte que si cette discrétion est mal exercée, il y ait un genre de solution de rechange à l'imposition d'un casier judiciaire, qui stigmatise encore plus les gens... Est-ce absent ou s'agit-il d'une voie à suivre? Est-ce quelque chose que vous recommanderiez?
    Vous disposez d'environ 30 secondes.
    C'est une autre excellente question, mais comment y répondre en 30 secondes?
    En ce sens-là, je dirais que la police est manifestement un produit de notre environnement. Nous devons donc nous attaquer au racisme systémique au sein de notre propre société.
    Ici encore, on peut s'y attaquer en commençant dès le début avec de la formation et en montrant que les personnes issues de communautés racialisées se heurtent à des obstacles structurels supplémentaires qui influencent le comportement. Ainsi, nous considérons tous que nous devrions être traités de manière égale, mais il faut admettre que certains segments de la population n'ont pas droit à ce traitement équitable. La police doit bien connaître le passé colonial et esclavagiste du Canada. Cela l'aidera peut-être à mieux comprendre le contexte social des Noirs et des communautés autochtones.
    Je vous remercie, monsieur Harris.
    Chers collègues, comme vous pouvez le voir, nous avons considérablement dépassé le temps prévu. Je propose de tenir un deuxième tour de questions et de procéder comme nous l'avons fait pour le premier groupe de témoins, c'est-à-dire avec des interventions de quatre minutes, quatre minutes, d'une minute, une minute. Je ferai remarquer que nous devons examiner brièvement une affaire relative aux travaux du Comité et adopter le rapport du sous-comité.
    Sur ce, je demanderai à Mme Stubbs de prendre la parole pour quatre minutes.
     Je vous remercie, monsieur le président.
    Je tenterai de parler brièvement et de partager mon temps avec mon collègue, M. Kurek, si le temps le permet.
    Je veux remercier tous les témoins de comparaître aujourd'hui.
    Je pense que deux éléments clés ressortent clairement de votre témoignage: la confiance et, dans certains cas, la crainte de faire affaire avec la police. D'une part, il est fort préoccupant d'entendre que des gens ont peur et sont moins susceptibles de signaler des crimes en raison de la victimisation. D'autre part, en raison de générations d'expériences, d'un manque de connaissances culturelles, d'obstacles linguistiques et d'autres facteurs, la confiance et la peur constituent manifestement un problème.
    Pour pouvoir apporter des améliorations à cet égard et pour renforcer la responsabilisation, je poserais la question suivante à tous les témoins. Si vous deviez instaurer un modèle révisé de supervision de la GRC, quels éléments y incluriez-vous compte tenu du fait que le processus de plaintes accuse des retards et est indûment complexe, exigeant souvent l'intervention de juristes? Existe-t-il des modèles de pratiques exemplaires, que ce soit au Canada ou ailleurs dans le monde, qu'il serait nécessaire d'utiliser? Est-ce qu'une d'entre vous a été consultée au sujet d'un de ces problèmes ou de tous ces points par le gouvernement actuel?
    Je vous remercie.
    Cette question s'adresse-t-elle à quelqu'un en particulier?
    Elle s'adresse à tous les témoins, et je vous laisserai le soin de leur accorder la parole.
    D'accord.
    Nous commencerons par Mme Samuels-Wortley.
    Certainement.
    Je pense qu'il faut vraiment commencer par la responsabilisation et au fait que la communauté devrait pouvoir avoir le sentiment que la police va régler le problème si elle soulève des préoccupations. Nous ignorons presque tout du processus. Il existe indubitablement un manque de transparence. Nous devons donc bénéficier d'un plus grand sentiment de transparence en ce qui concerne les mesures prises à l'égard des agents aux comportements répréhensibles, qu'il s'agisse de recours exagéré à la force ou de quelque inconduite que ce soit.
    Je sais que c'est une situation propre à l'Ontario, mais il continue d'y avoir des agents qui sont rémunérés même s'ils sont suspendus de leurs fonctions. Voilà qui hérisse de nombreuses personnes dont la vie a littéralement changé après une interaction avec un agent, puisque ce dernier continue de recevoir son salaire malgré sa suspension. La communauté doit vraiment avoir le sentiment que si quelque chose a été fait, la police fera l'objet d'un examen pour qu'elle soit davantage tenue responsable de ses actes, puisque les agents peuvent vraiment ruiner la vie de quelqu'un.
(1755)
    Madame Stubbs, vos quatre minutes sont presque écoulées et vous vouliez partager votre temps avec M. Kurek. Voulez-vous une deuxième réponse ou devrions-nous accorder la parole à M. Kurek?
    Je pense qu'il serait important d'entendre les autres témoins également. M. Kurek donne son accord.
    Cela lui convient. D'accord.
    Madame Sharpe, vous avez la parole.
    Je vous remercie.
    Je veux souligner le fait que vous avez parlé de générations d'inconduites de la part de la GRC. Sachez toutefois qu'ici, dans le Nord, la GRC n'a commencé à servir la région que peu de temps avant mon époque. Même si on peut considérer que cela englobe plusieurs générations, elle est arrivée dans le Nord quand mon grand-père était un peu moins âgé que je le suis maintenant, un peu avant ma naissance. Je ne suis pas si vieille: je suis une jeune grand-mère.
    Je vais vous raconter une histoire à propos de M. Simon Tookoome, de Baker Lake. Il a écrit une histoire sur la première fois où il a vu une maison en bois, une construction appartenant à la GRC. Il y a vu un chat; il est donc entré et il dit qu'il a trouvé l'endroit trop bruyant, habitué qu'il était de vivre dans un igloo.
    Quand il est question de méfiance, les membres qui sont affectés dans nos communautés... Vous pouvez probablement jeter un coup d'œil aux dossiers de Deline, où sont envoyés les membres dont les condamnations pour voies de fait ont été suspendues. Ces membres vont dans nos communautés afin d'y assurer les services de police. C'est un problème. Nous devons être certains que les membres affectés dans les communautés sont sans reproche pour qu'ils ne puissent pas être déclarés coupables d'infractions pour lesquelles ils arrêtent des gens.
    Nous allons malheureusement devoir nous en tenir là. Je suis désolé.
    M. Iacono ou Mme Khera peuvent intervenir pour quatre minutes.

[Français]

    Je vous remercie, monsieur le président.
    Madame Samuels-Wortley, tellement de choses ont été dites ce soir sur la confiance du public envers les policiers. Si nous devions faire trois choses le plus rapidement possible pour apporter des changements, quelles seraient-elles?

[Traduction]

    Il faudrait certainement qu'il existe un degré de responsabilisation, et par là, j'entends que lorsqu'un agent... Pour faire suite aux propos de la dernière intervenante, si des agents ont été accusés de quelque chose, ils ne peuvent pas passer d'un service de police à un autre. Ils doivent êtes tenus responsables de leurs actes. Une fois qu'ils sont accusés de quelque chose et qu'il y a suffisamment de preuves démontrant l'existence de motifs de renvoi suffisants, ils doivent être congédiés et ne plus participer à l'exécution de la loi, puisqu'ils sont assujettis à des normes supérieures.
    Il faut aussi offrir de la formation, dès le départ. Cette formation doit porter sur les relations avec la communauté, pas seulement sur l'utilisation d'une arme ou la technique de contrôle par l'encolure. Il faut complètement modifier ce qu'un agent de police est censé faire dans la communauté.
    En outre, pour ce qui est de la troisième chose à faire, je pense aussi qu'il faut mieux comprendre le passé colonialiste et esclavagiste du Canada. On tend à penser que cela n'a jamais posé de problème ici. Il est fort surprenant que plusieurs s'étonnent qu'il y ait du racisme systémique au Canada. Il faut changer cette perception dès le départ. Il faut donc intervenir dès qu'un agent est envoyé en formation.
(1800)
    Vous avez la parole, madame Khera.
    Je vous remercie, monsieur le président.
    Je vous remercie de nouveau tous les témoins de comparaître et de nous livrer des témoignages très importants.
    Madame Samuels-Wortley, je veux sonder votre opinion. Nous savons que la collecte de données fondées sur la race dans un contexte policier pourrait nous aider considérablement à améliorer la reddition de comptes au public et à étayer les politiques de la police. Peut-être pourriez-vous nous expliquer pourquoi c'est si important et traiter aussi de tous les points à considérer — comme la manière dont les données sont recueillies et peuvent être utilisées — et de toutes les préoccupations afin d'éviter que les données ne soient utilisées pour ternir davantage la réputation de la communauté ou pour renforcer les stéréotypes racistes. Si vous pouviez faire la lumière sur ce point, je vous en saurais gré.
    Je vous remercie.
    Je vous remercie de la question, car c'est quelque chose qui doit absolument être mis en œuvre aussi. Donc, il n'y en a pas seulement trois, mais quatre. Il est important de collecter suffisamment de données fondées sur la race, car cela nous permet de connaître l'expérience des différents groupes raciaux avec les services d'application de la loi. Cela peut aussi nous permettre de cerner les facteurs de discrimination potentiels dans les interventions des policiers auprès de certaines communautés.
    Dans mes propres recherches, il est essentiel de recueillir les témoignages des gens sur leur vécu avec la police. Toutefois, des données fondées sur la race et des données quantitatives suffisantes permettent de dégager les tendances et d'avoir une compréhension plus nuancée de l'interaction entre la police et la communauté.
     Je comprends que le risque que les données fondées sur la race soient utilisées pour stigmatiser davantage certaines communautés suscite des préoccupations. Mes collègues, MM. Akwasi Owusu-Bempah et Scot Wortley peuvent en parler de manière bien plus éloquente que moi, mais il est important de souligner que des facteurs contextuels expliquent pourquoi certaines communautés peuvent avoir des taux d'infraction plus élevés. Voilà pourquoi nous devons avoir des discussions plus approfondies sur les facteurs structurels qui mènent à des facteurs criminogènes.
    Vos quatre minutes sont malheureusement écoulées.

[Français]

    Madame Michaud, vous avez la parole pour une minute.
    Je vous remercie, monsieur le président.
    Cette fois-ci, je vais m'adresser à vous, madame Sharpe. Dans un rapport sur la violence genrée contre les femmes inuites, votre organisation recommande la création de protocoles de lutte contre la violence fondée sur le sexe, de formations sur cette violence et d'approches policières adaptées aux traumatismes afin de mieux répondre aux besoins des Inuites en fonction des niveaux élevés de violence, de la victimisation fondée sur le sexe et de l'expérience du colonialisme chez les Inuits.
    Pouvez-vous nous donner plus de détails sur la meilleure façon de mettre en oeuvre ces recommandations?

[Traduction]

    Je vous remercie.
    Je m'excuse, mais j'ai été déconnectée. J'ai entendu la question au complet, mais j'aimerais que Mme Michaels réponde en premier.
    Très brièvement, s'il vous plaît.
    Je pense que cette recommandation porte sur la nécessité que les forces policières comprennent la violence genrée et son incidence sur les femmes inuites. Bon nombre de nos propositions à cet égard englobent l'affectation d'un agent de liaison spécialisé en violence familiale dans chacune des communautés, étant donné les taux de violence disproportionnellement élevés chez les femmes inuites, et la présence d'une policière, notamment pour diriger les interrogatoires. Il y a beaucoup de facteurs différents.
    Je pense que cela nous ramène encore une fois à la formation en compétence culturelle et à la question de savoir qui est chargé de son élaboration, en particulier en ce qui concerne l'impact et l'expérience de la violence envers les femmes inuites.
    Merci, madame Michaud.
    Monsieur Harris, la dernière minute est à vous.
    Merci, monsieur le président.
    Madame Samuels-Wortley, vous avez parlé de la nécessité de créer des initiatives antiracistes d'application élargie. Par ordre d'importance, parmi les choses qui permettraient de lutter contre le racisme systémique, quelles seraient vos priorités? Je déteste simplifier à outrance, mais nous n'avons pas beaucoup de temps.
    Bien sûr.
    Encore une fois, ces initiatives doivent être évaluées. Il faut démontrer qu'elles fonctionnent, quelle que soit leur nature. Je pense que le problème, souvent, c'est que la formation aux services de police est souvent bâclée et que cette formation suffit pour que tout soit réglé. Toutefois, on constate clairement qu'il n'y a aucun changement dans les interactions au sein de la communauté. Donc, je ne saurais dire avec précision quelle forme particulière de formation antiraciste donne des résultats. Il convient de mieux évaluer les facteurs qui peuvent avoir une incidence sur la façon dont la police sert la communauté.
(1805)
    Merci, monsieur Harris.
    Malheureusement, chers collègues, nous devons arrêter là.
    Madame Samuels-Wortley, madame Sharpe et madame Michaels, je tiens à vous remercier, au nom de mes collègues, de vos efforts pour être ici, de vos témoignages et de vos commentaires réfléchis.
    Comme vous pouvez le constater, le Comité a écouté vos témoignages avec grande attention.
    Je vois que M. Dalton est très satisfait. Je pense qu'il communiquera avec vous, madame Sharpe, pour savoir si vous avez des ancêtres communs, ce qui n'est pas mauvais en soi.
    Cela dit, chers collègues, je vais mettre fin à la réunion. Je vais demander au greffier si nous devons nous réunir à huis clos pour adopter le rapport du sous-comité.
    Il appartient au Comité de décider de la marche à suivre.
    À moins qu'il y ait de folles objections, je vais continuer et demander à nos témoins de se déconnecter.
    Chers collègues, je vais supposer que vous avez le rapport du sous-comité. Avant de passer à la présentation d'une motion et à la discussion, je précise qu'au moment de faire le rapport, nous avions prévu que le ministre Blair serait disponible mercredi prochain. Il n'est pas disponible à ce moment-là, mais il le sera le mercredi suivant, le 25. Outre cela, le rapport correspond assez bien à ce dont nous avons discuté au sous-comité.
    Y a-t-il des commentaires au sujet du rapport? L'avantage de présenter un rapport à la toute fin d'une réunion, c'est que personne ne veut en parler.
    Cela dit...
    La réunion du 23 avec M. David McGuinty tient-elle toujours?
    Oui.
    Madame Damoff, allez-y.
    Je propose que nous adoptions le rapport.
    Je suis certain que M. Oliphant sera enchanté d'appuyer la motion.
    Est-ce que vous vous ennuyez de moi?
    Y a-t-il d'autres commentaires?
    Il semble qu'on s'ennuie de moi au Comité de la sécurité publique.
    Oui, vous me manquez; tout le monde s'ennuie de vous, monsieur Oliphant.
    Bonjour, monsieur Oliphant. J'ignorais que vous étiez là. L'homme invisible.
    Merci d'être restée, madame May.
    Y a-t-il d'autres commentaires?
    Que ceux qui appuient la présentation du rapport lèvent la main.
    (La motion est adoptée.)
     Merci beaucoup, chers collègues.
    Mercredi, nous essayerons de commencer à 15 h 30, mais nous serons probablement retardés par...
    Je remercie sincèrement tous les membres de leur accueil, et je remercie plus particulièrement le président de m'avoir accordé une minute. J'en suis extrêmement reconnaissante.
    Il n'y a pas de quoi.
    La séance est levée.
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