CIIT Réunion de comité
Les Avis de convocation contiennent des renseignements sur le sujet, la date, l’heure et l’endroit de la réunion, ainsi qu’une liste des témoins qui doivent comparaître devant le comité. Les Témoignages sont le compte rendu transcrit, révisé et corrigé de tout ce qui a été dit pendant la séance. Les Procès-verbaux sont le compte rendu officiel des séances.
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Comité permanent du commerce international
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TÉMOIGNAGES
Le mardi 11 décembre 2012
[Enregistrement électronique]
[Traduction]
La séance est ouverte.
Nous remercions les témoins d'être venus nous rencontrer. Nous sommes heureux de pouvoir connaître votre opinion sur l'accord de partenariat économique global avec la Chine.
Monsieur Pomerleau, vous n'êtes plus un étranger pour notre comité. Merci d'être ici. Vous représentez Canada Porc International. M. Eugene Beaulieu, de l'Université de Calgary, est aussi des nôtres. Merci d'être ici.
Nous allons vous céder la parole en premier. Votre opinion nous intéresse. Nous vous écoutons, monsieur.
Merci beaucoup. Je suis heureux d’être ici, merci de m’avoir invité. Je suis économiste à l’École de politique publique de l’Université de Calgary.
Je pense que vous venez de parler de l’APEG avec la Chine, mais que vous vouliez dire avec l’Inde. J’espère que c'est bien ça, parce que je…
Oui, je suis désolé. On discutera à un moment donné de l’accord avec la Chine, mais traitons d’abord de l’accord avec l’Inde.
Ma présence ici est en grande partie attribuable à un communiqué que j’ai écrit au nom de l’École de politique publique sur cette question du commerce entre le Canada et l’Inde. Je veux seulement faire part de ma position et formuler quelques observations. Ensuite, je répondrai aux questions.
Ce que je fais valoir, c'est que le Canada devrait faire tous les efforts possibles pour obtenir un accord avec l’Inde. C'est clair que ce genre d’accord facilitera et stimulera nos relations économiques, non seulement avec l’Inde, mais avec toute l’Asie.
L’APEG s’inscrit bien dans notre stratégie commerciale mondiale. Je sais qu’on est en train de mettre cette stratégie à jour. On la renouvelle et on l’améliorera peut-être, mais l’important, c'est qu’elle corresponde à nos intérêts commerciaux et à notre stratégie commerciale dans le cadre d’une stratégie globale. Je pense qu’il ne faudrait pas signer des accords avec n’importe quel pays intéressé. Nous voulons que tout accord soutienne notre stratégie.
Je signale aussi que nous ne devons pas trop vanter les effets d’un tel accord. Il est parfois facile de faire des déclarations enthousiastes sur l’efficacité ou les répercussions d’un accord par rapport aux emplois canadiens, par exemple. Je dirais que les intérêts commerciaux du Canada doivent demeurer la grande préoccupation qui motivera notre politique d’accroissement des échanges avec l’Inde, et non le contraire. Le commerce et les investissements canadiens en Inde ont déjà augmenté sensiblement, et c'est ce qui a entraîné l’intérêt accru. Mais comme je l’ai dit au départ, la signature d’un accord avec l’Inde sur l’investissement et le commerce peut faciliter les échanges qui sont déjà croissants et en expansion. Ce n’est pas ce qui motivera ce commerce.
Enfin, je crois qu’il est très important de continuer à favoriser de solides relations gouvernementales et commerciales avec l’Asie, et particulièrement avec l’Inde. Les faits montrent clairement que ce ne sera pas facile. Il est difficile pour une entreprise de se lancer sur un nouveau marché. Il importe d’avoir des réseaux et des relations étendues. Le gouvernement du Canada peut favoriser cela en ayant des fonctionnaires à l’étranger qui veillent à créer et à étendre ces réseaux, car c'est un travail difficile. Or, nous avons la capacité de le faire, et nous devrions continuer à chercher à étendre ces réseaux.
J’ai quelques observations supplémentaires à formuler sur ces positions.
J’ai fait valoir dans un récent communiqué publié par l’École de politique publique qu’il semblait évident que nous devrions avoir une mission en Inde et un accord avec ce pays. L’Inde est un grand pays en pleine croissance, et nous avons beaucoup de points communs sur le plan de notre histoire démocratique et coloniale.
C’est pourquoi tout indique que nous devrions vraiment avoir une mission là-bas — à l’époque, je parlais de mission — mais aussi un accord. Toutefois, l’efficacité de ce genre d’accords est compromise par certains facteurs, notamment la distance. L’Inde est loin, et des données économiques très claires, des données empiriques, montrent que la distance est encore un facteur. Bien sûr, les coûts des déplacements et des communications ont diminué, mais la distance reste un élément majeur. Par conséquent, même si nous signons un accord commercial avec l’Inde, il reste que c'est un pays éloigné, et les échanges commerciaux demeureront compliqués. Encore une fois, ce n’est pas ce qui va stimuler le commerce et l’investissement, mais cet accord facilitera les choses.
J’ai dit qu’il était important d’avoir des réseaux. Encore une fois, beaucoup de données empiriques confirment qu’ils sont importants. L’une des raisons d’appuyer des échanges accrus avec l’Inde, c'est qu’il existe une importante diaspora indienne. Certains affirment que nous avons de bonnes raisons, sur le plan politique, de vouloir stimuler les échanges avec l’Inde, mais c'est vrai aussi sur le plan économique. Les données montrent que les migrations, le nombre d’immigrants dans un pays, stimulent le commerce et l’investissement. Ce phénomène est dû à l’effet des réseaux, dont je parlais plus tôt.
Donc, les relations comptent, les réseaux sont importants, et il importe d’avoir de solides relations et de les développer. L’immigration de ressortissants de l’Inde au Canada et, encore une fois, des éléments de notre passé colonial, font partie intégrante de notre histoire, et cela constitue un argument valable en faveur de la conclusion de ce genre d’accord commercial.
Le dernier point que je veux faire valoir, c'est que notre relation avec l’Inde est quand même semée de difficultés. C'est une relation compliquée, et cela continuera d’être le cas. Je pense toutefois que la récente politique de Harper sur l’investissement étranger direct pourrait nous aider sur le plan du commerce avec l’Inde. L’Inde s’intéresse maintenant à nous. La décision récente, annoncée vendredi, de permettre à des entreprises d’État d’investir au Canada a été remarquée en Inde. Les autorités indiennes ont clairement noté que nous avions fermement établi que de telles ententes ne seraient autorisées que dans des circonstances exceptionnelles.
Je pense que l’Inde a remarqué le Canada, peut-être pour la première fois — peut-être encore davantage que lors de la récente mission commerciale en Inde. Je pense que c'est vendredi qu’ils ont vraiment remarqué les possibilités d’échange avec le Canada.
Je dirais qu’il faut battre le fer pendant qu’il est chaud. L’occasion se présente maintenant, et il faut tout faire pour en profiter. L’Inde nous a remarqués, et c'est peut-être le bon moment pour tout tenter afin d’arriver à la conclusion d’un accord.
Merci.
Avant de donner la parole à M. Pomerleau, je me permets de revenir sur le fait que vous avez dit que l’Inde nous avait « remarqués ». Le dites-vous dans un sens positif ou négatif?
Selon moi, c'est positif, en grande partie. L’un des défis était justement de nous faire remarquer. L’Inde défend beaucoup d’intérêts différents et le Canada n’est pas très haut sur sa liste des priorités. Les médias indiens parlent beaucoup de nous en ce moment, et je pense qu’un grand nombre de représentants du gouvernement ont vraiment remarqué… L’une des choses qui les intéressent chez nous, c'est nos ressources. Ils sont donc intéressés à approfondir cette relation. Ils nous ont remarqués, et je pense que c'est une bonne chose parce que, auparavant, ils ne remarquaient pas tellement notre existence.
Quoi qu’il en soit, c'est un plaisir pour moi d’être ici pour parler de l’Inde. Au sujet de l’Asie, je suis passablement certain que vous nous reverrez au cours des mois à venir, quand vous discuterez du Japon et de la Chine — ce qui se fera très bientôt, je pense — et peut-être de l’Union européenne. Je m’attends à ce que nous revenions pour discuter de tels accords.
Mais aujourd'hui nous parlons de l’Inde. Premièrement, même si je pense que vous commencez à savoir ce qu’est CPI, permettez-moi de vous dire que nous sommes l’agence de développement du marché des exportations pour l’industrie canadienne du porc. L’agence a été fondée en 1991. C'est le fruit d’une initiative conjointe du Conseil canadien du porc et du Conseil des viandes du Canada. Il est établi clairement que notre organisme s’intéresse surtout aux questions d’accès aux marchés, à la promotion du porc canadien à l’étranger, à l’obtention de renseignements sur les marchés et, enfin, à divers enjeux importants dans le domaine de l’exportation, comme les transports ou tout autre élément d’intérêt pour nos membres.
Bien qu’une portion importante des habitants de l’Inde ne consomment pas de porc pour des raisons religieuses ou en raison du mode de vie qu’ils ont adopté — on dénombre environ 200 millions de musulmans et 300 millions de végétariens en Inde —, la majorité de la population n’a rien contre l’idée de manger du porc. Il reste environ 600 millions d’intéressés. C'est beaucoup de monde, en tout cas c'est beaucoup plus que ce que représente le marché canadien. Les produits du porc sont extrêmement rares dans les commerces indiens. Il n’existe qu’un petit nombre de commerces spécialisés qui en ont un peu sur leurs tablettes.
Pendant que j’étais en Inde, il y a quelques semaines, la fédération indienne des importateurs d’aliments a précisé que de 80 à 90 p. 100 de tout le porc vendu à Delhi se trouvait dans trois magasins. Le seul abattoir approuvé par le gouvernement pour le porc se trouve à Chandigarh, qui est située à quelque trois heures de route de Delhi. En passant, le Canada a un consulat dans cette ville.
La plus grande partie du porc se trouvant dans les commerces provient d’abattoirs locaux opérant parfois dans des conditions qui sont loin d’être idéales, surtout quand on sait comment se font ces choses en Inde. Les cochons sont généralement élevés dans de petits enclos gérés de façon artisanale, et on a très peu de contrôle sur ce qu’ils mangent. Autrement dit, ils peuvent manger tout ce qu’ils trouvent. On trouve en Inde un petit éventail de produits préemballés, par exemple du bacon, du jambon et de la saucisse. Des produits semblables à base de poulet sont offerts dans les mêmes comptoirs.
Durant notre visite, la fédération a organisé une table ronde regroupant plusieurs importateurs et distributeurs de produits alimentaires importés. Les participants ont confirmé qu’ils étaient vivement intéressés à importer du porc canadien. CPI leur a donné une idée générale du prix de certaines coupes canadiennes, et ils ont confirmé que ces prix étaient concurrentiels. Malgré les droits d’importation de 37 p. 100 qui sont actuellement imposés sur le porc importé, la TVA de 5 p. 100 sur la viande crue et la TVA de 12 p. 100 sur les produits transformés, tous disaient qu’ils pourraient trouver des marchés pour les produits canadiens.
Les participants à la réunion nous ont donné une idée du marché de Delhi. Il faut savoir qu’en Inde, en raison des difficultés de transport, il n’y a pas de communication entre les principaux marchés — entre Mumbai, Delhi et Chennai et chacune de ces régions. Il faut donc chercher à s’établir sur des marchés très délimités, un par un.
Certains des participants croyaient bien pouvoir importer un conteneur complet de porc, mais d’autres, surtout ceux qui représentaient de petites entreprises, ont dit préférer pouvoir acheter un conteneur qui contiendrait, à parts égales, du porc, des produits transformés du porc et des fruits de mer. Donc, les mêmes acheteurs s’intéressent aussi aux fruits de mer.
Au cours des dernières années, nous avons également eu la chance de rencontrer les acheteurs des principales chaînes hôtelières de l’Inde, comme Taj Mahal et Oberoi. Elles ont toujours dit, sans exception, que les produits du porc de grande qualité provenant du Canada les intéressaient vraiment. Nous croyons que, si on leur donnait accès au marché indien, les exportateurs de porc du Canada obtiendraient de bons résultats.
Nous savons également que certains produits sont déjà acheminés directement à l’Inde à partir du Canada. Si l’on examine les statistiques canadiennes, on y voit des exportations de porc canadien vers l’Inde. Ces exportations sont réelles, mais elles ne sont pas assorties d’un certificat d’exportation. Je n’ai jamais demandé comment ces produits étaient acheminés là-bas, mais il y en a qui se sont rendus, et cela se produit encore.
Notre industrie tente sans succès depuis des années d’avoir accès à l’Inde — je veux dire un accès officiel à l’Inde. L’ACIA a eu beaucoup de difficulté à obtenir de ses homologues indiens que soit négocié un certificat d’exportation pratique pour les produits du porc du Canada. Depuis qu’on a annoncé que les deux pays amorceront les négociations en vue d’un accord commercial, nous avons l’impression que les autorités vétérinaires de l’Inde sont plus ouvertes à l’idée de mener de telles négociations.
À la lumière de tout ce que je viens de dire, l’industrie porcine canadienne demande aux négociateurs canadiens de chercher à obtenir ce qui suit. Premièrement, un engagement ferme de la part des autorités indiennes à entreprendre des négociations pour résoudre les enjeux sanitaires selon un calendrier précis. En fait, nous discutons avec l’Inde depuis plus de 10 ans sans succès.
Ces négociations devraient porter sur les éléments suivants. D'abord, une entente sur les exigences d’exportation liées aux normes sociétales prévalant en Inde, c'est-à-dire les exigences liées aux pratiques religieuses comme celles demandant que les porcs ne soient pas nourris avec des protéines provenant de ruminants. Ensuite, l’élaboration d’un certificat d’exportation pour le porc canadien expédié en Inde. Enfin, l’approbation complète du système canadien d’inspection des viandes.
Il y a un dernier élément: un accès libre, sans tarif, ni contingent, pour le porc et les produits transformés, tels qu'ils sont décrits dans les chapitres 2 et 16 des codes de normes harmonisées.
Merci beaucoup. Je suis ouvert à toutes vos questions.
Merci.
Nous passons maintenant aux questions et observations.
Nous allons commencer avec M. Davies. Vous avez sept minutes.
Merci, monsieur le président.
Je remercie nos deux témoins d’être venus nous rencontrer.
M. Beaulieu, j’aimerais commencer avec vous.
La présentation d’une idéologie et de chiffres douteux avec beaucoup d’emphase et de beaux discours caractérise trop souvent tout le concept de commerce dans notre pays. Ça fait du bien d’entendre un discours sensé, fondé sur des chiffres vérifiés.
Dans votre article, vous posez une question: qu’est-ce que le Canada peut réellement attendre de ces négociations? Et vous y répondez: malheureusement, pas grand-chose.
Je veux commencer par vous demander ceci: Avez-vous vu ou réalisé des projections économiques concernant l’impact d’un accord de commerce avec l’Inde?
Non, je n’en ai pas fait moi-même.
J’ai examiné le rapport du comité mixte Canada-Inde. C'est le seul document que j’aie vu. Je n’ai vu aucune analyse économique sur le sujet.
D'accord.
Dans cette évaluation, y avait-il des chiffres indiquant une tendance quant à ce qui serait le plus avantageux pour le Canada?
Certains chiffres y étaient présentés quant aux objectifs visés, par exemple doubler le volume d’échanges, des choses comme ça.
Si l’on examine les données dans le contexte où il n’y a pas d’accord, le commerce a déjà doublé, ou a grandement augmenté. L'idée que l’accord lui-même engendrera un boom commercial serait bien difficile à défendre. Le lien est assez flou entre un accord commercial et le taux d’emploi, ou les emplois réellement créés. On entend souvent dire que cela va créer de l’emploi. Selon les analyses économiques, les accords commerciaux n’ont pas un effet énorme sur la création d’emplois — peut-être un peu à court terme, mais pas à long terme. Des effets sur la croissance économique, ce genre de choses, sont possibles, ce qui peut, à long terme, assurer une économie plus forte. Pour ce qui est des véritables effets sur l’emploi, l’affirmation qu’un tel accord créera de l’emploi est discutable.
Je ne sais pas si j’ai répondu à votre question.
Oui, je pense que oui. Merci.
Vous signalez qu’entre 1995 et 2004, la politique d’import-export de l’Inde a clairement changé, que ce pays a vraiment pris ses distances par rapport à l’Amérique du Nord. C'est sûr que les États-Unis occupent une place un peu moins élevée sur la liste des pays faisant du commerce avec l’Inde, puisque cette dernière a augmenté ses activités d’import-export avec d’autres pays, notamment la Chine, qui est maintenant son plus important partenaire commercial, les Émirats arabes unis, l’Arabie saoudite, la Suisse, l’Irak, l’Allemagne ainsi que l’Australie. Je remarque que le Canada ne figure pas sur la liste des 10 principaux partenaires de l’Inde.
Vous avez parlé de la distance, et je pense aussi au coût de l’énergie, qui augmente sans cesse. Je pense que c'est assez évident que, au cours des 20 à 40 prochaines années, l’énergie coûtera probablement plus cher, et non moins.
Pensez-vous que cette tendance de l’Inde à accroître ses échanges avec des pays autres que ceux de l’Amérique du Nord se maintiendra, étant donné, comme vous l’avez dit, la distance qui nous sépare?
Je ne veux pas faire de commentaires sur la hausse ou la baisse du coût de l’énergie, mais c'est certain que la distance est un facteur non seulement en raison du coût de l’acheminement des produits, mais aussi en raison de la difficulté d’établir des réseaux et des relations.
Les coûts des communications et des transports ont diminué. Quoi qu’il arrive quant au prix du pétrole, la logistique ainsi que le temps et le coût de l’acheminement de produits à un marché éloigné ne changeront pas beaucoup, selon moi.
D'accord. Vous indiquez aussi que les deux pays ne sont pas ce qu'on pourrait appeler des partenaires commerciaux naturels, que les niveaux d'intégration économique relativement faibles ne sont pas le résultat d'un protectionnisme marqué ou d'obstacles au commerce découlant de politiques, car l'Inde a beaucoup libéralisé son économie pour répondre aux exigences de l'Organisation mondiale du commerce dans les années 1990.
Mais vous ajoutez que les obstacles ont déjà sensiblement diminué. Les échanges commerciaux et les investissements du Canada en Inde se sont accrus, mais ils accusent un retard par rapport aux relations que l'Inde entretient avec les grands pays qui l'entourent. Vous dites que les négociations commerciales semblent s'éterniser, car le Canada cherche notamment à améliorer son accès au marché indien, alors que l'Inde n'y voit aucun avantage. J'aimerais que vous nous en disiez plus à ce sujet.
Selon vous, l'Inde utilise activement des politiques commerciales et des politiques d'investissement conçues pour atteindre ces objectifs domestiques. À l'heure actuelle, l'Inde n'est pas prête à aller plus loin dans ce dossier, et le Canada devra lutter âprement pour chaque gain. Vous dites aussi que le Canada souhaite négocier la libéralisation des services et de l'approvisionnement, mais qu'aux yeux de l'Inde, la question est close.
Si je me fie à ces propos, il me semble que vous en concluez que la signature d'une entente globale de partenariat économique avec l'Inde pourrait être souhaitable, mais qu'elle n'entraînera pas de gains considérables.
Oui, je n'ai pas changé d'avis. Je le répète, la distance et la taille de l'économie sont des facteurs fort importants dans les relations commerciales. Pourquoi avons-nous autant d'échanges commerciaux avec les États-Unis? Certes, nous les apprécions, mais il s'agit avant tout d'un très grand pays, qui est notre voisin immédiat. C'est donc dans l'ordre des choses.
L'Inde a des échanges commerciaux avec la Chine, ainsi qu'avec d'autres pays asiatiques, l'Iran et d'autres grands pays voisins, car ils sont les moteurs de ses échanges commerciaux. Quand l'Inde a commencé à libéraliser son économie, elle a commencé par commercer davantage avec les grands pays qui l'entouraient. Le Canada n'était pas vraiment dans sa mire. Les choses ont un peu changé, et l'Inde s'emploie maintenant activement à conclure des accords en matière de commerce et d'investissement avec de nombreux pays. Je le répète, il me semble assez clair que le Canada ne fait pas partie des priorités de l'Inde.
Pour ce qui est de l'autre point que vous avez mentionné, de quoi s'agissait-il déjà?
Ah oui, c'est vrai.
Les intérêts de ces deux pays sont donc divergents. On a répété aujourd'hui que nous voulons avoir accès à ce marché, pas seulement à celui des biens, mais aussi à celui des services et des autres secteurs. Même si l'Inde se prétend libérale, et dit avoir libéralisé ses échanges commerciaux et ses investissements, un examen du plus récent rapport de l'Organisation mondiale du commerce sur les politiques commerciales de ce pays montre que l'Inde utilise ces dernières comme des outils. Ces politiques font partie de sa stratégie de développement. L'Inde utilise ces outils à son avantage, elle n'y renoncera pas aisément.
À mon avis, nous voulons certaines choses, mais l'Inde n'est pas prête à abdiquer. L'Inde à d'autres intérêts. Selon moi, nous sommes loin d'être une priorité. Il est possible que les choses aient changé, possiblement en raison de la mission commerciale, et aussi de l'accord avec la CNOOC et des politiques canadiennes à l'égard des entreprises d'État annoncées récemment. Je crois que nous avons capté son attention. Par conséquent, il est possible que l'Inde se montre plus disposée à discuter avec nous.
Merci beaucoup, monsieur le président.
Je souhaite la bienvenue aux témoins.
J'aborderai la question sous un angle légèrement différent. J'ai lu et écouté vos remarques. Je ne les ai pas trouvées aussi négatives que l'opposition, mais peut-être ai-je mal compris.
Monsieur Pomerleau, je suis heureux de vous revoir. C'est toujours un plaisir. La discussion porte notamment sur les tarifs douaniers de l'Inde et la difficulté de ne pas seulement lorgner ce marché, mais aussi d'y faire notre entrée. Je comprends les arguments concernant la distance. Il est évident que nos plus proches voisins sont toujours nos plus grands partenaires commerciaux. L'Inde se situe presque à égale distance de la côte Est et de la côte Ouest du Canada. En fait, la côte Est est légèrement plus proche. L'Inde est probablement l'un des marchés les plus éloignés pour le Canada.
Je veux simplement savoir si j'ai bien compris vos remarques sur les tarifs douaniers appliqués au porc. Si je ne m'abuse, vous avez dit qu'ils étaient de 37 p. 100, auxquels s'ajoute — et c'est ce que je veux bien comprendre — un tarif de 5 p. 100 sur la viande crue et de 12 p. 100 sur la viande emballée. Parle-t-on vraiment de tarifs douaniers de 43 et de 49 p. 100?
Voici comment ils procèdent. Il y a un tarif douanier de 37 p. 100, auquel s'ajoute une taxe sur la valeur ajoutée de 5 % sur la viande crue et de 12 p. 100 sur la viande transformée. L'acheteur final devra payer une tarification de 49 p. 100 sur les produits transformés.
Exactement. Je crois que cela dément l'idée que les tarifs douaniers diminuent. Il s'agit d'un tarif douanier punitif — une barrière douanière —, mais malgré tout, il y a un marché. À mon avis, personne ne peut prétendre qu'il n'y a pas d'obstacle. Il s'agit d'un obstacle de taille pour le commerce.
Vous semblez vouloir ajouter quelque chose.
En fait, il ne s'agit pas du principal obstacle. L'obstacle, c'est plutôt l'absence d'un accord vétérinaire. Nous n'arrivons pas à les convaincre de négocier. Cela fait maintenant plus de 10 ans que nous travaillons avec l'ACIA pour accéder au marché. En Inde, il y a ce qu'on appelle la bureaucratie. Je vous assure qu'il n'est pas facile d'en suivre les méandres. On y trouve aussi des vestiges d'anciennes politiques remontant à l'époque où l'Inde voulait à tout prix être autosuffisante. Certains bureaucrates, surtout ceux avec lesquels nous faisons affaire, voient d'un mauvais oeil les importations dans ce secteur. Ils nous mettent des bâtons dans les roues.
Mais ce que je voulais faire valoir, c'est qu'il y a un marché, malgré le système tarifaire punitif.
M. Jacques Pomerleau: Oui.
M. Gerald Keddy: J'aimerais revenir au premier témoin.
Il y a un certain nombre de questions. Je vais les aborder sous un angle légèrement différent de celui de l'opposition officielle. Si nous parvenons finalement à signer un accord sur la promotion et la protection des investissements étrangers avec toutes les parties en cause, cela ouvrira des portes qui étaient fermées depuis un certain temps. Le Canada pourra ainsi coordonner ses investissements en Inde. Nous avons donné un second souffle à l'accord de libre-échange, qui était moribond depuis de nombreuses années. Celui-ci est loin d'être terminé, mais à tout le moins, on l'a tiré de l'oubli.
Nous avons certains points communs avec l'Inde, notamment une langue commune, l'anglais. Des millions d'Indiens parlent l'une de nos langues officielles. À vrai dire, je crois que c'est la langue la plus couramment parlée en Inde.
De plus, nous sommes confrontés à des défis, notamment la distance, le protectionnisme du pays — surtout à l'échelon infranational —, et des politiques étrangères prévoyant des tarifs prohibitifs.
Voici la question que je vous pose. Le PIB du Canada et le PIB de l'Inde s'élèvent à environ 3,7 billions de dollars, 3,8 billions de dollars ou 3,9 billions de dollars. Nos échanges commerciaux s'élèvent à quelques milliards de dollars. Lorsque nous avons entrepris des discussions avec l'Inde, à notre arrivée au pouvoir, il me semble que la valeur conjointe de nos échanges commerciaux était d'environ 6 milliards de dollars. Nous avons dépassé ce montant, nous sommes donc sur la bonne voie.
Même si l'on considère les défis, quel potentiel cela représente-t-il?
Je le répète, j'ai indiqué clairement qu'il y avait un potentiel, un fort potentiel. Je crois que les entreprises sont en train de s'en rendre compte. Voilà pourquoi nous tentons de tisser des liens plus étroits.
Soyons clairs. Je suis entièrement en faveur de cette initiative, comme le montrent l'article que j'ai écrit et mes remarques d'aujourd'hui. Selon moi, c'est ce que nous voulons, c'est important, et il y a un énorme potentiel.
Comme le montre le témoignage d'aujourd'hui, il y a des barrières tarifaires, ainsi qu'une protection des investissements. Je n'ai jamais dit que ce n'était pas le cas. L'aspect sur lequel je reste un peu sceptique ou prudent, c'est notre capacité à convaincre l'Inde d'aller de l'avant sur certains de ces dossiers.
La décision en matière d'investissement de vendredi sera peut-être utile dans le cadre de nos négociations avec l'Inde à d'autres égards. C'est possible, car l'Inde s'intéresse beaucoup à cette partie de notre économie, à nos ressources, pour différentes raisons. Toutefois, comme vous et M. Pomerleau l'avez fait remarquer, le système politique en Inde est complexe. Il est très difficile de ne pas se buter à la bureaucratie, sans compter les autres problèmes. Il est difficile de progresser. Par conséquent, même s'il est question de faire avancer les choses, celles-ci n'avanceront pas nécessairement très rapidement.
Je ne suis pas convaincu que nous obtiendrons de grands résultats, d'autant plus que nous sommes loin d'être une priorité pour eux, mais le potentiel est là, c'est indéniable. La distance n'est qu'un facteur parmi d'autres. Si l'on regarde les faits, la langue a son importance, car les points que nous avons en commun sont à notre avantage. La distance est simplement un léger désavantage.
Je voulais principalement faire valoir que nous accroissons nos échanges commerciaux avec eux sans accord sur le commerce et l'investissement. À mon avis, il est important de conclure ce genre d'accord afin de faciliter le commerce. Je ne crois pas que nous serons à la barre de cet accord, mais je crois que si nous abandonnons la partie, d'autres personnes continueront d'avoir...
L'accès au marché est un problème, mais, je le répète, l'Inde ne voit pas l'intérêt de renoncer à cet égard, alors que nous sommes fort intéressés à accéder à son marché.
Monsieur le président, merci.
Je remercie les deux témoins de leur présence. Je vous souhaite la bienvenue.
Jacques, je vais débuter avec vous. Vous avez évoqué le potentiel en Corée. À court terme — vous avez déjà témoigné devant ce comité —, l'accord crucial pour l'industrie canadienne du porc, c'est manifestement l'accord commercial avec la Corée. Comme vous le savez bien, les Américains ont déjà mis en place leur accord de libre-échange. Par conséquent, nous prenons du retard.
Je me demande si vous pourriez nous dire à quelle étape nous en sommes rendus à cet égard, et si vous considérez urgent que le Canada agisse un peu plus rapidement pour protéger un marché auquel nous avons déjà accès.
Il ne faut pas oublier qu'il y aura des élections présidentielles en Corée le 19 décembre. Étant donné qu'on a usé de slogans dénonçant le libre-échange pendant la campagne électorale, nous croyons qu'il est urgent de conclure l'accord de libre-échange entre le Canada et la Corée du Sud avant l'élection du nouveau président.
Nous sommes également conscients que nous n'obtiendrons pas nécessairement ce que nous voulons, car les États-Unis et l'Union européenne nous ont devancés. Parallèlement, nous devons faire en sorte de ne pas être exclus à jamais de ce marché si nous ne parvenons pas à un accord. Tout est question d'équilibre à cet égard. Nous sommes en étroit contact avec les négociateurs canadiens.
Je plaiderai aujourd'hui pour l'obtention d'un aussi bon accord que possible, le plus rapidement possible, afin de ne pas risquer de nous retrouver le bec à l'eau. Nous avons besoin de cet accord, et, connaissant la situation en Corée du Sud, nous devons nous dépêcher.
Monsieur le président, nous siégeons au Comité du commerce international. À mon avis, si nous disons au gouvernement de s'activer, le gouvernement devrait obtempérer. Je crois que c'est ce que Jacques veut dire. Il ne l'a pas dit en ces mots, mais je vais le faire pour lui.
Merci.
En ce qui concerne l'accord commercial avec l'Inde, qui vend du porc sur ce marché à l'heure actuelle?
Vous voulez parler de l'Australie ou d'autres pays?
Non, le ministre de l'Agriculture de l'Inde et les personnes qui s'occupent du contrôle vétérinaire sont très protectionnistes. Par conséquent, pratiquement personne n'arrive à intégrer ce marché. Nous avons découvert qu'on trouve de nombreux produits en Inde, mais il s'agit de marchandise de contrebande qui arrive de Dubaï, par tous les moyens imaginables. Parallèlement, il ne faut pas oublier que beaucoup de personnes en Inde ont étudié en Occident. Bon nombre d'entre elles voient la qualité des produits offerts dans leurs marchés; elles se demandent s'il sera un jour possible de se procurer du délicieux bacon canadien ou différents autres produits. Voilà ce que nous avons appris.
L'Inde serait un marché où nous pourrions écouler des produits de haute valeur, des produits transformés, pour lesquels les marchés ne sont pas légion.
Voilà l'une des raisons pour lesquelles nous voulons pénétrer le marché de l'Inde.
Bref, l'Inde recèle un potentiel.
Je m'adresse à M. Beaulieu. J'ai lu votre article, Eugene, « The Comprehensive Trade Agreement with India: What's in it for Canada? » portant sur l'accord commercial global avec l'Inde et sur ce qu'il offrirait au Canada.
Don vous a posé des questions sur ce que le Canada peut vraiment attendre de ces négociations. La réponse, malheureusement, c'est pas grand-chose.
Vous avez écrit cet article en novembre, mais vos remarques d'aujourd'hui semblent indiquer que vous êtes désormais un peu plus favorable à cet accord. Étant donné vos arguments initiaux dans cet article, je ne crois pas que vous soyez contre un accord commercial avec l'Inde. Je dois dire que l'une de mes préoccupations concernant tous les accords commerciaux que le gouvernement actuel a cherché à conclure jusqu'ici, c'est que ce dernier semble surtout intéressé par la quantité — concluons un accord.
Par le passé, au Canada, les accords commerciaux n'ont jamais contribué à améliorer l'égalité des revenus, à créer plus d'emplois dans le secteur manufacturier ou de produits à valeur ajoutée. En fait, le bilan du pays est franchement mauvais. Par conséquent, quelles sont, à votre avis, les politiques gouvernementales nécessaires pour tirer parti d'un accord commercial avec l'Inde?
Je ne suis pas certain de saisir ce que vous voulez dire quand vous parlez d'inégalité et d'emplois.
Eh bien, il faudrait que les chiffres nous permettent d'être certains des répercussions.
L'inégalité des revenus — l'écart entre les riches et les pauvres au Canada — s'accentue rapidement, même si nous effectuons tous ces échanges commerciaux. Notre secteur manufacturier connaît un déclin. Nous n'en faisons pas assez pour assurer une valeur ajoutée au pays. Voilà le genre de choses dont je parle. Il ne s'agit pas simplement de signer un accord commercial. Nous avons besoin d'une politique en matière de stratégie industrielle au Canada.
Mais voici la question que j'aimerais vous poser. Étant donné que vous craignez que le Canada ne retire pas assez d'avantages d'un accord commercial avec l'Inde, que pourrions-nous faire pour compenser cela? Que pourrions-nous faire pour veiller à ce que les Canadiens retirent, en fait, des avantages d'un accord commercial avec l'Inde?
Avant de répondre à cette question, monsieur Easter, pourriez-vous nous donner les chiffres auxquels vous faites allusion?
Monsieur le président, pourrais-je également ajouter quelque chose? Pardonnez-moi, mais un certain nombre d'entre nous avons parlé de l'article de M. Beaulieu. Est-ce que celui-ci pourrait être déposé en comité à un moment donné? Cela nous aiderait tous.
Oui, Je pense qu'il serait bon de déposer l'article auprès du greffier au cas où nous aurions à rédiger un rapport.
Vous avez une copie de...?
Le président: Non, il l'a obtenue par lui-même.
M. Ed Holder: Si vous pouviez le partager, ce serait apprécié...
Si vous pouviez en déposer une copie auprès du greffier, nous la ferions traduire et distribuer. Je l'apprécierais.
Comme je l'ai dit plus tôt, mon objectif n'est pas d'exagérer les mérites de cet accord. Dire que les accords commerciaux ont comme répercussion de considérablement augmenter ou diminuer l'inégalité n'est probablement pas la bonne approche. Très peu d'indices nous permettent de prouver que l'accord aura l'une ou l'autre de ces conséquences sur l'inégalité.
D'un côté, l'accord pourrait peut-être avoir des conséquences positives, car si les échanges commerciaux et les investissements favorisent la croissance économique et le développement en Inde, celui-ci atténuera l'inégalité à l'échelle mondiale. Au Canada, il est peu probable que l'accord ait une incidence quelconque sur ce plan.
En matière d'emploi, c'est la même chose. Quant à un accord commercial avec l'Inde, d'après ce que je comprends des données dont nous disposons — et je n'ai pas analysé les chiffres; d'ailleurs il en existe peu. Même dans le cas des accords commerciaux avec des grands pays comme les États-Unis — et je me suis penché tout particulièrement sur les répercussions de ces accords sur la main-d'oeuvre —, rien ne prouve que l'inégalité a augmenté suite à l'accord de libre-échange avec les États-Unis et le Mexique. Rien ne prouve que celui-ci a eu des répercussions sur les emplois de longue durée. Le secteur manufacturier connaît un déclin, mais non pas à cause des échanges commerciaux.
Dans mon article, j'ai demandé « Qu'avons-nous à gagner? », et j'ai répondu « Pas grand-chose », parce que je ne pense pas que l'Inde souhaite conclure un accord de libre-échange avec le Canada — ce qui ne veut pas dire que nous ne devrions pas le faire. Je n'ai pas changé d'idée sur ce point, mais je suis peut-être un peu plus optimiste que cela va se faire puisqu'un des obstacles à un accord avec l'Inde, soit le dossier de l'énergie nucléaire, a été éliminé.
La mission semble avoir été un succès, et maintenant, avec l'accent que nous mettons sur les entreprises d'État, nous avons vraiment capté l'attention de l'Inde. Cela nous permettra peut-être d'aboutir à quelque chose.
L'accès aux marchés est un élément clé, comme nous l'avons entendu aujourd'hui. Le Canada pourrait profiter de l'accord si celui-ci nous donnait accès aux marchés indiens. Or, je doute que l'Inde soit prête à céder sur ce plan.
Voilà ce que je pense.
Merci beaucoup.
Je vous remercie tous les deux de comparaître devant le comité aujourd'hui.
Monsieur Beaulieu, j'aimerais revenir sur ce que vous avez dit, parce que vous avez soulevé un point intéressant relativement à l'annonce faite vendredi dernier par le ministre de l'Industrie et le premier ministre. Vous avez indiqué que celle-ci avait attiré l'attention des gens.
Une des questions formulées par d'autres témoins devant le comité est la suivante: comment faire en sorte que les gens de l'Inde entendent parler du Canada? Il existe un problème de distance et, de plus, notre pays compte seulement 34 millions d'habitants, comparativement à 1,2 ou 1,3 milliard d'habitants.
Vous avez indiqué que vous doutez que l'accord crée des emplois. J'ai une question pour M. Pomerleau, étant donné que nous ne vendons pas du tout de porc en Inde. J'aimerais parler de cela.
Des représentants des manufacturiers et des exportateurs du Canada ont comparu devant le comité la semaine dernière. Ils ont dit — je n'ai pas les chiffres en main, mais vous les connaissez peut-être en raison de vos travaux de recherche — que leurs membres pourraient facilement doubler leurs revenus. Je suppose que si les revenus sont assez faibles pour commencer, il est plus facile de les doubler.
Ils ont aussi dit que, pour ce faire, il faudra être en mesure d'exporter des produits à valeur ajoutée en Inde.
Quand vous dites que vous doutez que l'accord crée des emplois... il est intéressant de voir que lorsque nous avons parlé des sciences et de la technologie, du développement des ressources, alors que nous nous préparons à exporter en Asie, et aussi du développement... ils ont dit que, si nous voulons effectuer des échanges commerciaux avec l'Inde, il faudra veiller à avoir une infrastructure de transport — non seulement là-bas, mais ici aussi — qui permette d'acheminer les produits.
Pouvez-vous nous dire ce que vous en pensez?
Si vous regardez les preuves des répercussions des accords — pas spécifiquement de l'accord avec l'Inde puisque je n'ai pas étudié celui-là particulièrement —, si vous regardez la foule de publications consacrées à la libéralisation des échanges, celle-ci provoque généralement une redistribution des emplois entre les entreprises. Typiquement, de plus petites entreprises moins productives ferment leurs portes, tandis que de plus grandes entreprises productives pénètrent des marchés étrangers, comme l'Inde, et prospèrent. Il y aurait donc une redistribution des emplois, mais pas d'effet net.
Encore une fois, si vous regardez l'accord entre le Canada et les États-Unis, l'ALENA, celui-ci n'a pas eu de répercussions sur le taux de chômage au pays. Cela a contribué à une diminution du nombre d'emplois dans le secteur manufacturier, mais ces emplois ont été redistribués à d'autres industries du secteur ou bien au secteur des services. Par conséquent, certaines entreprises ont enregistré une croissance, d'autres une décroissance, et le résultat net, c'est que cela n'a pas changé grand-chose.
Voilà pourquoi je dis que dans le cas d'un accord avec l'Inde, vous avez raison, celui-ci générerait des emplois et des perspectives commerciales pour certaines entreprises, mais pour d'autres, cela pourrait aller dans le sens contraire.
Serait-il juste de dire que ces accords favorisent la promotion des entreprises du secteur manufacturier ou d'industries de toutes sortes, et leur donnent beaucoup de possibilités de réaliser des profits, à défaut de ne pas générer d'emplois, comme vous le dites? En produisant une valeur ajoutée, on monte la barre. Cela créerait des débouchés dans les domaines qui exigent des compétences plus spécialisées. Est-ce là l'objectif?
Il serait probablement important d'établir une distinction entre les conséquences à court terme et à long terme. Nous avons déjà parlé du fait que cet accord ne représentera pas un gros volume d'échanges; toutefois, il présentera de nouvelles possibilités. Il offrira un potentiel de croissance. À plus long terme, il est probable que l'accord augmente la productivité et améliore les conditions de travail en Inde. À plus court terme, cela pourrait mener à des conséquences transitoires où certaines entreprises effectueraient des mises à pied, tandis que d'autres relanceraient l'embauche parce qu'ils connaissent une expansion. Par exemple, si l'industrie du porc connaissait une expansion à cause des échanges avec l'Inde, certaines entreprises de l'industrie pourraient prospérer tandis que d'autres pourraient être en difficulté, ou peut-être qu'il y aurait une certaine redistribution au sein de l'industrie du porc. Peut-être que notre production sera désormais axée sur des produits hauts de gamme, comme le bacon.
J'y viens donc.
M. Pomerleau, la valeur de nos exportations actuelles vers l'Inde, de nos ventes là-bas est essentiellement négligeable; elle est nulle. Cela dit, nous reconnaissons qu'il faut conclure une entente relative aux soins vétérinaires par l'entremise de l'ACIA. Nous le savons. Nous espérons que la reconnaissance dont il a déjà été question... maintenant que des pourparlers sont en cours, les élus signaleront aux fonctionnaires que nous allons de l'avant.
Selon vous, quel est le potentiel de l'industrie porcine et quels types de produits pourraient être exportés?
En ce qui concerne les produits, c'est assez simple. Il s'agirait de produits de seconde transformation très haut de gamme, comme les jambons, le bacon, les saucisses, ces genres de choses.
Il faut toutefois savoir qu'il n'y a pas encore de grands détaillants en Inde. Dès que les Métro et les Walmart de ce monde s'établiront là-bas, il y aura une demande pour ces types de produits, qui ne se trouvent pas en Inde.
C'est un gros problème en Inde. On ne peut pas simplement acheminer des produits de Mumbai à Delhi. Ce n'est pas possible, sauf si on peut attendre des jours. C'est une des choses dont il faut avoir conscience. Il faut adopter une approche multidimensionnelle.
C'est très gentil, merci.
J'en viendrai rapidement à ma question. M. Beaulieu, vous avez observé qu'aux yeux des Indiens, le Canada n'est pas vraiment un partenaire prioritaire. Pourtant, vous avez aussi dit qu'il a maintenant attiré leur attention. Il y a ONGC Videsh, une société indienne qui a installé des bureaux à Calgary et qui cherche à acheter du pétrole et du gaz naturel.
Vous avez ensuite indiqué que la distance n'est pas un élément anodin. Voici ma question: étant donné que tout se fait en ligne, compte tenu du volume, des réductions de droits de douane et tout ça, et puisque les distances raccourcissent de jour en jour, les choses n'en seront-elles pas facilitées lorsque nous aurons signé l'entente?
Je pense, en effet, qu'un accord de commerce et d'investissement facilitera et stimulera le commerce entre les pays. La distance ne sera pas éliminée, mais il ne s'agit que d'un obstacle parmi d'autres — les droits de douane et l'investissement. On vient d'évoquer Walmart. Actuellement, l'Inde ne veut pas de grandes surfaces sur son territoire. Elle y résiste. C'est un problème, n'est-ce pas? Voilà un domaine où il n'y a pas de libéralisation. L'Inde reste inflexible, ce qui, indirectement, aurait des répercussions sur les entreprises canadiennes.
Merci. La discussion est passionnante.
J'ai une question pour vous, M. Beaulieu. Étant donné que les produits primaires que nous exportons actuellement en Inde — les pois, les lentilles, la potasse, le chlorure et le papier journal — représentent, disons, 45 p. 100 de nos activités commerciales avec ce pays, quelles seront, selon vous, les répercussions relativement aux produits à valeur ajoutée que nous pourrions exporter grâce au nouvel accord commercial? Croyez-vous qu'il y aura une expansion à ce chapitre? Anticipe-t-on d'énormes retombées pour les Canadiens?
Je ne le sais pas vraiment. Je n'ai pas de réponse précise à fournir à cette question. Ce que nous venons d'entendre à propos de l'industrie porcine constitue un bon exemple: il y a un potentiel. Je ne me serais pas attendu à ce que cette industrie s'en sorte gagnante, mais M. Pomerleau a parlé de l'accès au marché, qui influe non seulement sur le volume des échanges, mais aussi sur la valeur ajoutée ou les produits qui font l'objet d'activités commerciales — l'exportation de produits haut de gamme en Inde. Je crois qu'il y a certainement un potentiel, mais je n'ai pas analysé les chiffres.
Je ne connais pas l'industrie du pois chiche. J'ignore si elle a des possibilités de valeur ajoutée. Il y a toutefois des possibilités de valeur ajoutée dans d'autres secteurs, alors nos activités commerciales prendront de l'expansion, non seulement dans ces industries, mais aussi dans d'autres.
J'ignore la réponse en ce qui concerne la hausse de la valeur ajoutée.
Vous avez dit que signer un accord de commerce, ce n'est pas que signer un accord de commerce: c'est prendre sa place sur le plan stratégique. Pouvez-vous en dire davantage à ce sujet?
Voici l'un des éléments en cause: avec qui devrions-nous signer des accords? Je suis un économiste, alors je crois qu'il y a des contraintes sur le plan des ressources. La négociation d'ententes doit comporter certaines restrictions sur le plan des ressources. Alors, comment décider des pays avec lesquels conclure des accords?
Il y a quelques semaines, j'ai lu dans le journal que le Canada doit intensifier ses activités commerciales avec le Vietnam parce qu'il s'agit d'un pays en forte expansion et que nous ratons le coche. Nous pourrions classer les pays dans une liste, puis la suivre dans l'ordre, mais je crois que nous devons systématiser davantage notre approche afin de définir les États avec lesquels nous devrions conclure un accord et les éléments qui produiront le rendement le plus intéressant. Je pense qu'il faut procéder à ce genre d'analyse dans le cadre de la Stratégie commerciale mondiale. Nous pourrions ensuite suivre la liste dans l'ordre. J'ignore s'il existe un système pour établir cet ordre de priorité. J'estime simplement qu'il doit exister un moyen de le faire.
Dans le document que vous évoquez, je mentionne certains des motifs pour lesquels l'Inde revêt une grande importance pour nous, notamment parce qu'il s'agit d'un vaste pays qui croît rapidement. C'est le genre de motif, renforcé par notre histoire commune et nos points communs, qui justifie la conclusion d'un accord avec cet État. Mais, je le répète, il faut par ailleurs tenir compte d'autres difficultés.
Si l'Inde se trouve en position avantageuse, c'est entre autres parce que, même sans accord, nous avons intensifié nos activités commerciales avec elle. Je pense que si les entreprises témoignent de leur intérêt dans une région que le gouvernement considère, preuves à l'appui, comme un marché potentiel... Je crois que c'est ce qui se passe pour le Canada et l'Inde. Nous commençons à intensifier nos activités commerciales, même en l'absence d'un accord.
Notre porte-parole en matière de commerce et nous, les députés de l'opposition, avons discuté de la possibilité de mener des activités commerciales dans des pays qui revêtent une importance stratégique pour le Canada, comme le Japon et le Brésil, mais aussi l'Inde ainsi que l'Afrique du Sud. Ce sont des pays émergents, comme le Vietnam. Selon moi, ce peut être avantageux sur le plan stratégique compte tenu des ressources dont nous disposons.
Je sais que le gouvernement actuel est prêt à négocier avec n'importe quel pays, et tant pis si notre ratio croissance-PIB avec un État n'est que de 0,3 p. 100. Pourtant, certains pays peuvent avoir un passé un peu trouble.
J'adresse maintenant une question à Jacques.
Vous avez parlé du marché indien. Comment se porte la réfrigération en Inde?
C'est un problème, un énorme problème. J'ai visité le plus grand entrepôt frigorifique de Delhi; il est plus petit que la pièce où nous nous trouvons. C'est un énorme problème, mais c'est également une occasion en or pour le Canada. Au Canada, nous avons l'habitude des longues distances et tout ça. C'est le genre d'expérience dont nous devons faire profiter l'Inde. Nous avons une vaste expertise qui pourrait s'avérer utile aux Indiens.
Au lieu de se contenter de chercher à ouvrir la porte, il faudrait peut-être trouver comment devenir un partenaire cordial qui saura aider l'Inde à développer ce qui lui fait le plus cruellement défaut, notamment dans les domaines du transport et de la distribution.
Merci, monsieur le président.
Je remercie nos invités d'être parmi nous aujourd'hui. La séance se révèle vraiment fort intéressante. Je vous sais gré d'y avoir témoigné.
C'est toujours amusant d'écouter les discussions de ceux d'en face. Lorsque j'ai entendu le membre du tiers parti faire dévier le sujet de l'Inde à la Corée du Sud, ça m'a rappelé ce que disait ma mère, qui était originaire du Cap-Breton, lorsqu'elle négociait: « Si c'est possible, il faut gagner le débat; autrement, il faut attaquer son adversaire. Si ça ne fonctionne pas, il faut changer de sujet. » Soit il est passé maître en la matière, soit il a écouté les conseils de ma mère.
Des voix: Oh, oh!
Une voix: Voilà une femme pleine de sagesse.
M. Ed Holder: C'est intéressant d'entendre que la clé réside dans l'accès au marché.
Monsieur Beaulieu, vous l'avez mentionné et vous avez indiqué douter que l'Inde abandonne ce critère. Je me suis senti interpellé, car lorsque je repense aux propos d'un membre de l'opposition officielle selon lesquels le Canada ne compte pas parmi les 10 principaux partenaires commerciaux de l'Inde, j'ai l'impression que cela justifie d'autant plus la conclusion d'une entente comme celle dont il est ici question. Nous pourrions ainsi nous hisser plus haut dans la liste.
Restons dans les chiffres: Exportation et développement Canada a livré un témoignage intéressant dernièrement. Je tiens simplement à vous en faire part au cas où vous ne l'auriez pas entendu. C'était très convaincant. Laissez-moi simplement retrouver la statistique précise afin de ne pas vous induire en erreur, ce qui serait malséant. J'y reviendrai dans un instant, mais laissez-moi seulement dire ceci.
Voici qui vous intéressera, monsieur Beaulieu: vous avez demandé si la conclusion d'un accord de partenariat économique global aurait des répercussions économiques majeures pour le Canada. Selon l'Association des produits forestiers du Canada, ce sera le cas; pour l'Association des universités et collèges, il s'agit d'une occasion hors du commun... à mon avis, vous devriez vous inspirer d'organismes comme ceux-là. Exportation et développement Canada dispose de statistiques susceptibles de vous intéresser. Le Conseil de commerce Canada-Inde a annoncé la même chose, l'Indo-Canada Chamber of Commerce... Spirits Canada a mentionné l'ampleur des possibilités. J'ai l'impression que les possibilités sont aussi phénoménales que celles dont jouit l'industrie porcine.
Monsieur Pomerleau, si vous pouviez exporter du porc en Inde comme vous le voulez, quelles seraient les retombées pour l'emploi au Canada?
Une chose est sûre: nos usines deviendraient plus concurrentielles, surtout celles qui font dans la seconde transformation, étant donné leurs capacités et leur marché très restreints. Dès le départ, comme l'a dit M. Beaulieu, la compétitivité et l'expertise de nos usines s'accroîtront.
Donc, si vous vendez davantage de porc, on peut présumer que vous engagerez du personnel aux fins de sa transformation.
D'accord, je tenais simplement à préciser ce point.
Vous pourriez éventuellement en discuter avec M. Beaulieu, car je crois que, parfois, dans les cas concrets, surtout lorsqu'il y a des possibilités qui sont... je vais les qualifier de possibilités épicentres.
Je reviens à Spirits Canada... qui a un effet d'entraînement incroyable sur divers segments de l'industrie céréalière et d'autres secteurs, avec tout ce que cela implique pour les producteurs de partout au pays. C'est vraiment très convaincant.
D'ailleurs, c'est souvent nous qui vous demandons de l'information, mais vous devriez chercher à obtenir — ou nous devrions vous remettre — l'information et le témoignage de Spirits Canada.
Vous savez, monsieur Pomerleau, je vous ai entendu parler de la situation actuelle entre le Canada et l'Inde, et j'aimerais connaître votre stratégie. En fait, je vous signale que nous avons une stratégie, d'ailleurs appelée Stratégie commerciale mondiale.
Cela veut dire que nous avons cherché à assurer notre position en Amérique du Nord. Nous avons commencé par les États-Unis, il y a 25 ans, puis nous sommes passés à l'ALENA. Regardez ce que nous avons fait pour parvenir à la même fin en Amérique centrale et en Amérique du Sud. L'accord économique et commercial global nous ouvrira un marché de 500 millions de personnes — et je précise, puisque vous êtes parmi nous, monsieur, que les possibilités sont également immenses pour l'industrie porcine.
Nous passons ensuite à l'Inde, un marché de 1,1 milliard de personnes. Nous négocions aussi avec le Japon actuellement. Honnêtement, nous négocions avec des pays stables sur le plan politique, ce que nous jugeons important. Ce sont des régions où nous avons la possibilité d'étendre nos marchés — pas tous les marchés, mais c'est ce qui explique que nous fassions ce genre de choses. Il y a aussi des possibilités d'ordre géographique.
J'analyse la balance commerciale entre le Canada et l'Inde: d'environ 400 millions de dollars en 2005, elle a atteint 2,6 milliards de dollars en 2011. Je considère simplement ces chiffres... et il n'y a même pas encore d'accord. Imaginez ce que nous pourrions accomplir avec un accord.
Monsieur Pomerleau, si nous parvenions à redéfinir les normes d'une manière ou d'une autre, si nous avions la possibilité de nous débarrasser des gouvernements infranationaux... qui coopèrent, croyez-vous que cela ferait la différence pour votre industrie? Ne pensez-vous pas que cela vous aiderait?
Monsieur le président, si nous devions nous lancer en affaire, j'aimerais que ce soit en Inde, dans le domaine de la réfrigération.
Merci.
Je vous remercie beaucoup de votre témoignage et de votre présence.
Nous suspendons maintenant la séance pour laisser les prochains témoins se joindre à nous. Nous devons installer l'équipement de téléconférence. Un autre témoin se trouvera ici même.
Reprenons la séance.
Je présente nos témoins. Il y a tout d'abord Ron Bonnett, président de la Fédération canadienne de l'agriculture.
Bienvenue parmi nous. Ce n'est pas la première fois que vous témoignez à un comité. J'ignore si vous êtes un habitué de celui-ci, mais je suis ravi de vous accueillir parmi nous.
Ensuite, voici M. Mahajan, de Canaccord Genuity.
La communication est-elle établie? Nous entendez-vous bien?
Au nom de la Fédération canadienne de l'agriculture, je vous remercie de me permettre de faire cette présentation.
Aujourd'hui, nous parlons plus particulièrement de la possibilité de conclure un accord avec l'Inde. Je pense que cela fait partie d'une initiative globale du Canada visant à conclure des accords commerciaux avec des pays du monde entier. J'ai d'ailleurs rencontré récemment certains d'entre vous au Japon lors des pourparlers qui y ont eu lieu.
Pour ceux d'entre vous qui l'ignorent, la Fédération canadienne de l'agriculture est une organisation agricole à vocation générale qui représente des groupes de producteurs spécialisés et des organisations agricoles générales qui comptent plus de 200 000 agriculteurs d'un bout à l'autre du pays. Comme la fédération représente différents groupes de producteurs de diverses provinces, une bonne part des observations que je formulerai ne seront pas nécessairement spécifiques à un groupe, mais elles concerneront des domaines d'intérêt généraux pertinents dans le cadre de la relation commerciale que nous entretenons avec l'Inde.
Actuellement, l'Inde représente le sixième marché en importance pour les exportations de produits agricoles canadiens. Au cours des cinq dernières années, le Canada a exporté vers l'Inde des produits agricoles et agroalimentaires d'une valeur s'élevant en moyenne à 503 millions de dollars, alors que les importations en provenance de ce pays s'élevaient en moyenne à 245 millions de dollars. Nos principales exportations étaient les pois, les pois chiches, les lentilles, le poisson gelé, le lactosérum et la graine de moutarde. Les importations incluaient le riz, la farine de céréale -— non à base de blé —, le thé, les oléagineux et les produits alimentaires. La relation commerciale du Canada avec l'Inde s'est étendue graduellement durant la dernière décennie, la hausse des exportations s'approchant des 300 p. 100.
Le marché indien continue d'offrir un énorme potentiel au secteur canadien de l'agriculture. Selon les données du recensement de 2011, la population actuelle de l'Inde est de 1,21 milliard de personnes. Au cours de la dernière décennie, 181 millions de personnes s'y sont ajoutées, ce qui signifie que l'Inde est l'un des marchés qui croît le plus rapidement au monde.
Selon une récente étude du National Council of Applied Economic Research, un organisme basé en Inde, le pourcentage de consommateurs de la classe moyenne au sein de la population totale passera des 13,1 p. 100 actuels à 20,3 p. 100 d'ici 2015-2016, et à 37,2 p. 100 d'ici 2025-2026. La croissance de la classe moyenne créera une demande accrue et diversifiée d'aliments et de produits alimentaires et accroîtra les possibilités d'accès au marché indien pour les producteurs canadiens.
Quand on parle d'accès au marché indien, il faut reconnaître que ce pays est l'un des principaux producteurs de céréales et de légumes dans le monde et un exportateur net de produits agricoles. Plus de 50 p. 100 de la population indienne obtient son revenu de l'agriculture. L'autosuffisance alimentaire et l'augmentation de la productivité sont des politiques centrales du gouvernement indien et, par conséquent, le secteur indien subvient à 97 p. 100 aux besoins des consommateurs du pays.
Tandis que les points de vue divergent quant à la viabilité de cette politique, les producteurs en Inde font face à des pénuries de terres et d'intrants et à la nécessité d'augmenter la production. Déjà, la demande l'oléagineux et de légumineuses à grain est supérieure à la production et il faut en importer pour combler l'écart.
Pour assurer la conclusion d'un accord commercial qui fournirait des résultats positifs pour l'agriculture canadienne, il est impératif que les négociateurs comprennent à la fois les politiques agricoles nationales de l'Inde et ses règlements sur les importations et les exportations. Le marché indien est complexe, de même que les règles qui y sont appliquées.
Le gouvernement joue un rôle actif dans le secteur de l'agriculture et exerce un contrôle serré sur la production et le commerce à l'intérieur de ses frontières. Selon le produit, les politiques peuvent prévoir des prix de soutien minimums, le commerce d'État, l'établissement de contingents tarifaires au chapitre des importations, l'application de règlements sur les importations, l'imposition de contingents pour les exportations et l'octroi de subventions à l'exportation.
Selon l'Examen des politiques commerciales effectué en 2011 par l'Organisation mondiale du commerce, la protection tarifaire moyenne des produits agricoles dans ce pays était de 33,2 p. 100 en 2010-2011, ce qui était nettement supérieur à celle visant les produits manufacturés, fixée à 8,9 p. 100. Les tarifs appliqués varient d'un produit à l'autre et selon la situation du produit sur le marché intérieur. Par exemple, les importations de morceaux de poulet frais et gelés sont assujetties à un tarif de 100 p. 100, essentiellement pour protéger l'industrie nationale. Par contraste, les taux tarifaires ont été éliminés temporairement dans le cas des légumineuses à grain et ont été ramenés en moyenne à 9,7 p. 100 pour les huiles végétales, en réponse à la demande et à l'inflation.
Étant donné que la majeure partie de la population suit un strict régime végétarien, les légumineuses à grain constituent une source essentielle de protéines. L'Inde figure continuellement parmi les principaux marchés pour les légumineuses à grain canadiennes — par exemple les pois chiches, les lentilles et les pois —, les ventes étant évaluées à 632,7 millions de dollars en 2011.
Les légumineuses à grain représentaient 98 p. 100 des exportations agricoles canadiennes vers l'Inde. Les droits de douane consolidés sont de 50 p. 100, dans le cas des pois, et de 100 p. 100, dans les cas des lentilles et autres légumineuses à grain. L'élimination permanente des droits d'importation et un mécanisme visant à régler les questions entourant l'accès au marché amélioreraient considérablement la situation à l'égard de cet important marché des légumineuses à grain.
L'Inde est également un importateur significatif d'huiles végétales, puisqu'elle en a importé 10,2 millions de tonnes en 2011-2012. Tandis qu'il ne s'agit pas d'un important marché traditionnel pour le canola canadien, l'élimination des tarifs sur les graines, l'huile et la farine de canola aiderait beaucoup les producteurs à promouvoir les avantages du canola en tant que solution de rechange à d'autres huiles végétales et créerait une nouvelle base de consommateurs. Il faudra aussi obtenir les approbations biotechniques pertinentes.
Durant certaines années, il y a eu des possibilités d'exportation de blé. Selon les niveaux de production et les réserves accumulées, l'Inde soit importe du blé en réponse à des pénuries, soit en exporte, lorsqu'il y a un excédent. La dernière fois que ce pays a importé du blé remonte à 2006-2007, quand il a acheté un million de tonnes de blé au Canada.
Le gouvernement contrôle étroitement le marché du blé, et fixe des prix de soutien nationaux minimums, émet des appels d'offres pour l'achat de blé au pays et à l'étranger et contrôle les quantités exportées. Étant donné les importantes réserves actuelles, en 2011, le gouvernement de l'Inde a levé son interdiction d'exportation de quatre ans et a établi un contingent d'exportation. Selon les attentes, les exportations devraient se poursuivre en 2012-2013.
Tandis que l'Inde n'est pas considérée traditionnellement comme un marché pour le porc, une industrie de tourisme croissante, une classe supérieure aisée et la présence d'étrangers ont le potentiel de créer des créneaux nouveaux et intéressants pour le porc canadien. Le marché pour les importations se limite actuellement aux hôtels, restaurants, institutions et produits transformés. Alors que la consommation de viande continue d'augmenter, si un accès complet au marché est obtenu, les possibilités pour les éleveurs de bétail canadiens augmenteront également. À l'heure actuelle, les importations de porc sont assujetties à des tarifs de base de l'ordre de 30 p. 100.
L'accès aux marchés n'est pas strictement une question tarifaire. Dans le cadre des négociations, il est crucial aussi de se pencher sur les obstacles non tarifaires découlant des règlement sanitaires et phytosanitaires et sur les mesures touchant les importations, et d'instituer un mécanisme aux fins de discussion des questions futures. À moins qu'on en arrive à des solutions, les produits agricoles canadiens ne bénéficieront pas d'un assouplissement des tarifs. Par exemple, l'Inde a accepté d'étendre l'exemption en matière de fumigation des légumineuses à grain canadiennes jusqu'à la fin de mars 2013.
Le Canada et l'Inde font des efforts pour trouver une solution plus viable, et les négociations en cours pourraient servir à gérer ce dossier. Il y a également diverses questions sanitaires et phytosanitaires à régler dans les secteurs de la volaille et du bétail.
En général, les produits céréaliers canadiens répondent aux exigences de l'Inde en matière d'importation. Or, dans le passé, l'Inde a assoupli ces mesures lorsque des importations étaient nécessaires et les a resserrées quand elles ne l'étaient pas. Une amélioration de la transparence et de la prévisibilité rendrait le marché indien plus attrayant pour les exportateurs canadiens.
Les politiques agricoles et commerciales internes de l'Inde ont un impact qui ne se limite pas à ce pays, mais qui créent un effet de distorsion des échanges commerciaux à l'échelle mondiale en ce qui concerne les produits visés. La volatilité sur le marché international du sucre s'explique en partie par les importantes variations de production imposées par des politiques adoptées dans certains pays d'Asie, particulièrement en Inde. Comme pour le blé, l'Inde est tantôt un exportateur, tantôt un importateur, selon les niveaux de production du pays et les réserves dont il dispose. Les politiques visant à stimuler la production nationale, à établir une structure tarifaire, à assouplir les restrictions à l'exportation ou à délivrer des permis d'importation sont autant de mesures qui se répercutent sur le commerce du sucre à l'échelle mondiale
Le Canada n'importe actuellement pas de sucre produit en Inde ni n'en exporte vers ce pays, mais les États-Unis en importent une petite quantité dans le cadre d'un contingent tarifaire.
En conclusion, l'Inde est un marché en pleine expansion et offre un potentiel aux producteurs agricoles canadiens. Des conditions d'accès favorables à ce marché, y compris un mécanisme de règlement des questions liées aux obstacles non tarifaires, et des règles prévisibles touchant les échanges commerciaux seraient avantageuses pour les producteurs agricoles canadiens.
Merci.
Je vous remercie.
Je n'ai pas vraiment préparé d'allocution, mais en bon spécialiste en services bancaires d'investissements, j'ai noté les points principaux que je souhaite aborder. Je serai heureux d'avoir une discussion plus interactive sur ces points.
Pour vous donner une idée de mon parcours, j'ai passé les quelque 23 premières années de ma vie en Inde et je vis au Canada depuis environ 13 ans. J'ai eu la chance d'étudier à la fois en Inde, puis au Canada lorsque j'ai fait ma maîtrise en administration des affaires. Je suis directeur général chez Canaccord Genuity. Nous sommes la plus grande banque d'investissement indépendante au Canada et nous avons aussi des bureaux partout dans le monde.
L'Inde est l'un des pays où nous n'avons pas encore de bureau, mais nous sommes la seule banque d'investissement canadienne à avoir effectué des transactions entre l'Inde et le Canada. C'est l'acquisition de l'entreprise Birla Minacs, d'une valeur approximative de 300 millions de dollars, qui a été notre première transaction en 2007. Nous avons aussi conclu la transaction d'environ 1,8 milliard de dollars entre Algoma et Essar.
Le marché de la consolidation et des acquisitions est passablement actif, mais il est surtout axé sur le Canada, c'est-à-dire que ce sont des Indiens qui achètent des actifs canadiens. Il y a assez peu d'activité dans le sens inverse, soit l'achat d'actifs indiens par des Canadiens. Une partie importante de mon travail consiste à conseiller les grandes sociétés canadiennes sur la façon de faire des affaires au Canada. C'est un élément essentiel du rôle que je joue chez Canaccord Genuity et, avant cela, chez Genuity Capital Markets. C'est à cela que je m'emploie depuis une douzaine d'années.
J'ai dressé une sorte de recueil des défis auxquels j'ai été confrontés au fil des ans. Je suis certain que ce comité a probablement déjà entendu parler de ces défis, dont certains ont été abordés par M. Bonnett pour le secteur agricole. J'aimerais souligner que j'ai accompagné les représentants de Viterra en Inde à plusieurs reprises pour les aider à élaborer leur stratégie. Je les ai aussi accompagnés en Arabie saoudite.
L'un des principaux défis auxquels Viterra a été confrontée, comme c'est le cas pour d'autres conglomérats qui veulent établir des relations d'affaires avec l'Inde, a été la protection de l'investissement. Les sociétés canadiennes ont la volonté d'investir. Elles comprennent que l'Inde fait partie intégrante de l'ordre économique mondial de l'avenir et que sa présence se fait de plus en plus importante. Elles veulent investir, mais l'un de leurs principaux problèmes est le suivant. Disons que je dispose d'un certain capital — 100 ou 200 millions de dollars, par exemple — et de l'approbation du conseil d'administration de ma société. Comment puis-je m'assurer que cet argent peut être acheminé en Inde, que je peux investir dans certains actifs, tout en ayant la garantie que j'obtiens le titre de propriété légitime de ces actifs? Comment puis-je m'assurer que je peux retirer cet argent en cas de problème — qu'il s'agisse de problèmes internes au Canada ou de problèmes politiques en Inde — si la situation économique m'incite à récupérer cet investissement?
Il y a des problèmes relatifs au cadre légal et à l'arbitrage. Nous savons tous que le système juridique indien utilise l'anglais, ce qui est fantastique — et qui diffère du système chinois —, mais, en Inde, le règlement des litiges peut prendre des années.
De façon générale, je pense que ce sont les deux points essentiels qui reviennent, parmi d'autres, lorsque je fais la promotion des échanges commerciaux avec l'Inde et que j'essaie de convaincre un conseil d'administration ou une équipe de gestion d'y investir.
Par ailleurs, en ce qui concerne les exigences en matière de permis, il n'y a pas de culture du guichet unique. Une société agricole, une société comme McCain ou toute autre société qui veut ouvrir un entrepôt, n'a accès à aucune entité pourvant l'informer d'avance qu'il lui faut 10 permis différents et lui dire comment obtenir ces permis.
Les choses sont difficiles à l'échelle nationale, mais certains états sont plus coopératifs, ce qui ne devrait pas être le cas. Les Canadiens qui veulent établir des relations commerciales veulent le faire avec l'Inde en entier, pas seulement avec des États comme le Gujerat — qui est plus proactif et a établi d'excellentes normes pour effectuer des transactions avec des sociétés étrangères — et peut-être deux ou trois autres États au Sud du pays. Je pense que les règles doivent être plus universelles et espérons que c'est l'un des objectifs que cet accord permettrait d'atteindre.
L'autre problème que l'on voit constamment est celui des visas. Un cadre supérieur canadien qui veut se rendre en Inde et qui remet son passeport veut le ravoir dans les deux ou trois jours, car il a besoin de voyager. Je sais que ce sont des questions plutôt terre-à-terre, mais je crois qu'elles sont néanmoins fondamentales. Le cadre dirige une entreprise au chiffre d'affaires de plusieurs milliards de dollars, et il doit ravoir son passeport.
Alors, nous devons alléger la procédure pour obtenir un visa au Canada, comme les Chinois l'ont fait. Je me suis rendu cinq fois en Chine. Pour obtenir mon visa, j'en fais la demande au consulat chinois le matin et je l'ai en main dès l'après-midi. Nous devons voir à ce que le consulat indien fonctionne de cette façon.
Il en va de même du côté canadien. Nous devons être capables de traiter les demandes de visa en Inde dans un délai de deux ou trois jours. Les gens d'affaires importants ne peuvent pas se permettre de laisser leur passeport au consulat pendant une semaine ou dix jours avant d'avoir leur visa.
Il y a aussi le problème important de l'économie parallèle en Inde, où l'argent comptant est roi et maître. Cela a toujours été un gros obstacle. Lors d'un voyage en Inde, une entreprise voulait y faire un investissement important. Elle voulait acheter un terrain, ce qui est très problématique, sauf si le terrain appartient à l'État. S'il s'agit d'une propriété privée, il est presque impossible de régler la totalité de la transaction par chèque, en roupies indiennes ou en dollars canadiens. Aucun propriétaire ne souhaite se faire payer ainsi, à moins d'augmenter probablement de quatre à cinq fois le prix par rapport au prix annoncé.
Ce n'est qu'un exemple. Il y en a beaucoup d'autres. Walmart vit ce problème en Inde actuellement. Elle a consacré 25 millions de dollars à ce qu'elle appelle des « discussions » avec l'Inde au cours des deux ou trois dernières années, pour pouvoir ouvrir des magasins dans ce pays. On se demande maintenant pourquoi Walmart a dépensé 25 millions de dollars en discussions. La question est posée à Walmart.
Pourtant, ce genre de chose est normal quand on veut faire des affaires en Inde. C'est un problème difficile, mais il se trouve de l'autre côté de l'équation. Pas du côté canadien, mais du côté indien. C'est un problème dont les gouvernements doivent s'occuper. Cependant, les deux pays ont des arguments à faire valoir.
Chaque fois que je suis allé en Inde, j'ai entendu principalement la plainte suivante de la part des grands conglomérats: « Sachin, nous sommes allés au Canada. Vous nous avez montré des actifs très intéressants. Nous avons effectué des transactions. Nous avons acheté des milliards de dollars d'actifs, qui appartiennent maintenant à des Indiens. Nous voudrions qu'une partie de ce capital revienne chez nous, c'est-à-dire que des fonds de pension ou des sociétés canadiennes investissent en Inde. »
C'est l'un des thèmes principaux qu'abordent avec moi des sociétés comme Tata, Birla ou le groupe Essar, qui me disent ceci: « Nous avons beaucoup d'actifs performants. Pourquoi les sociétés canadiennes ne s'y intéressent-elles pas? Les fusions et les acquisitions doivent se faire dans les deux sens. Ce ne devrait pas être un commerce à sens unique. »
Ils ne sont pas du tout rassurés par le critère de l'avantage net. Lorsque j'étais en Inde, il y a environ deux semaines, on se préoccupait beaucoup des implications de ce critère dans le cas d'une société indienne qui essaierait d'acquérir des droits d'exploitation des sables bitumineux, une participation dans une telle exploitation ou une entreprise de services.
J'ai répondu aux Indiens que ce critère concernait surtout les sociétés pétrolières nationales ou les sociétés d'État en général, et que les examens futurs se feraient probablement au cas par cas. Que l'acquéreur soit indien ou étasunien, toute acquisition d'une société canadienne fait l'objet du même examen. Espérons que l'on appliquera ce critère uniquement lorsque l'acquéreur est une société d'État et qu'on ne l'appliquera pas aux investisseurs privés. C'est ainsi que j'interprète les propos tenus par le premier ministre vendredi ou jeudi.
J'ai noté un autre point dans ma liste. Lorsque, il y a un an et demi, je suis parti en Inde avec les gens de la Bourse de Toronto pour y rencontrer des sociétés indiennes et la commission indienne des valeurs mobilières, une question a principalement été soulevée concernant les sociétés indiennes au Canada. Elles n'ont pas le droit de réunir des capitaux sur les marchés canadiens.
Prenons le cas d'une société indienne ayant des actifs indiens, mais appartenant à une société de portefeuille de l'Île Maurice. Cette société peut être inscrite à la Bourse de Toronto. Mais une société indienne ayant des actifs indiens et appartenant à des Indiens doit être inscrite à la bourse en Inde avant de pouvoir être inscrite à la bourse au Canada. Selon moi, c'est le principal problème à régler en ce qui a trait aux marchés des capitaux. Je crois qu'il nous faut des marchés des capitaux plus robustes.
L'obtention de capitaux est un enjeu très important, et le Canada a très bien réussi pour ce qui est d'acquérir des actifs un peu partout dans le monde, y compris dans des endroits très éloignés, comme la Mongolie, l'Afrique et l'Amérique du Sud. Des sociétés minières, pétrolières et gazières étrangères sont inscrites à la bourse au Canada. Mais les Indiens ne peuvent pas le faire. Les sociétés indiennes elles-mêmes trouvent cette disposition de la loi indienne déconcertante.
Je dois vous arrêter ici, car nous allons manquer de temps. Nous passons à la période de questions, et nous vous permettrons d'en dire davantage dans vos réponses à ce sujet.
Nous commençons avec les questions de M. Morin.
Vous avez la parole.
Monsieur Mahajan, les barrières dont vous parlez, dans les États de l'Inde, font-elles partie de la structure économique de l'Inde, au même titre que toutes les structures économiques et politiques?
Ces barrières ne font manifestement pas partie de la structure. En effet, j'ai vu, par exemple, le premier ministre d'un État comme le Gujarat accepter avec joie de rencontrer l'une de nos grandes entreprises. Au cours de la rencontre, il a indiqué à ses sous-ministres de veiller à ce que les permis soient délivrés. Les sous-ministres se sont exécutés immédiatement. Alors, si les choses peuvent se passer ainsi dans un État comme le Gujarat, je suis certain que les barrières ne sont pas enchâssées dans le système juridique. Elles correspondent plutôt à la façon habituelle de faire des affaires en Inde, et la mécanique est tout simplement mieux huilée dans certains États que dans d'autres, qui procèdent moins efficacement. Je souhaiterais que ce soit une pratique plus répandue. Pourquoi les 24 autres États ne font-ils pas de même?
J'ai entendu de bonnes choses à propos de deux ou trois autres États, mais il y en a encore 20 qui pourraient suivre leur exemple, mais ne le font pas.
Le gouvernement national indien peut-il influencer les États? A-t-il une influence sur les États dans une négociation?
Oui, tout comme notre gouvernement fédéral peut avoir une influence sur le Québec ou la Colombie-Britannique, par exemple. Certains domaines relèvent des États, tandis que d'autres sont de compétence fédérale. Le gouvernement de l'Inde a un certain pouvoir, mais il est limité, car, en fin de compte, il faut travailler avec le territoire ou l'État où l'on veut s'établir. Le gouvernement fédéral peut donner un coup de main dans l'obtention des permis au départ, mais l'entreprise a besoin de pouvoir compter sur une collaboration continuelle par la suite.
Puisque vous habitez au Canada depuis des années, vous avez pu constater que ce n'est pas si facile que cela dans notre pays non plus, alors je me demande quelle est, par comparaison, la situation en Inde.
C'est vrai. Mais, par exemple, je peux vous dire que mes homologues indiens qui ont oeuvré au Québec, par exemple, n'ont éprouvé aucune difficulté à obtenir des permis ou des autorisations. Les démarches s'effectuent très rapidement. Par exemple, s'ils veulent acquérir une entreprise ou un terrain, nos lois sur les valeurs mobilières leur permettent de le faire très facilement. La démarche est aussi simple, qu'elle se fasse ici, au Nouveau-Brunswick ou en Colombie-Britannique. Je pense que c'est généralement plus simple. Je parle seulement de l'obtention des permis, et non des bénéfices nets et des questions de cette nature, qui peuvent varier d'un endroit à l'autre. Je parle simplement de la démarche consistant à établir une entreprise au pays.
Par exemple, au Québec, il y a quelques mois, on a annoncé la construction d'une grande usine. La Coop fédérée, qui regroupe des agriculteurs du Québec, s'associe à la plus grande coopérative agricole de l'Inde.
M. Sachin Mahajan: Oui, il s'agit d'IFFCO.
M. Marc-André Morin: Apparemment, c'est une excellente transaction. Je n'ai entendu personne s'y opposer.
Permettez-moi maintenant de poser une question à M. Bonnett.
Je ne voudrais pas critiquer l'Inde en raison de la nature de son économie, mais ce n'est pas un pays industriel comme le Japon ou la Corée. Dans le domaine agricole, comment pourrions-nous, selon vous, augmenter notre part de marché en exportant autre chose, comme des denrées périssables, sans chaîne d'approvisionnement? La classe moyenne n'est pas très importante. Il n'y a pas beaucoup de gens avec un revenu plus élevé que... Ce n'est pas ce que nous qualifierions de classe moyenne.
Je pense que certains changements sont en train de se produire à ce chapitre dans la société indienne. Une classe moyenne est en train de se former en Inde. Si vous prenez une population de 1,2 milliard de personnes, même un petit pourcentage constitue un nombre de personnes assez substantiel. Je pense que nous devrions commencer par cibler les marchés lucratifs où des produits canadiens pourraient valoir un bon prix.
Toutefois, pour que cela fonctionne, nous avons besoin d'un système reposant sur des règles. Il me semble assez juste de dire, compte tenu de l'expérience que nous avons dans le commerce des produits agricoles avec l'Inde, que la politique y intervient davantage que les règles permettant de savoir à quoi s'attendre. Je pense que c'est une question centrale: lorsqu'on veut s'organiser pour approvisionner un marché, il faut que la prévisibilité y soit. Je pense qu'il serait essentiel de faire de la prévisibilité un résultat obligé des négociations en vue de conclure un accord entre le Canada et l'Inde.
Merci, monsieur le président.
Je remercie les témoins pour leur disponibilité.
Monsieur Mahajan, je m'intéresse particulièrement à votre témoignage, puisque nous avons en commun, vous et moi, nos origines indiennes. J'ai passé en Inde les premières années de ma vie, comme vous. Nous comprenons la culture de ce pays. Nous sommes conscients des barrières que vous avez mentionnées. Vous avez mis l'accent sur les problèmes, et il y en a effectivement.
Par ailleurs, je connais un peu la question des transferts de propriété foncière, dont vous avez parlé. Je suis d'accord avec vous pour dire qu'en général, le prix des terrains est différent de ce qui est indiqué lors de l'enregistrement. Toutefois, si une entreprise, par exemple la vôtre, veut que le prix exact payé lors du transfert de propriété soit inscrit, vous pouvez le faire lors de l'enregistrement. C'est possible.
Au sujet des difficultés en Inde dont il est question aujourd'hui, vous dites ceci dans votre témoignage devant notre comité:
Bien que les gens qui veulent faire des affaires en Inde y rencontrent des difficultés bien réelles, on aurait tort de les présenter comme des obstacles insurmontables.
J'aimerais que vous nous disiez quelques mots à ce sujet.
Je commencerai par la conclusion que j'ai écrite ici et qui dit exactement cela. Il y a toujours eu un débat entre ceux qui pensent que l'Inde a davantage besoin du Canada et ceux qui croient l'inverse. Je suis canadien, mais je tiens à vous dire que nous représentons moins d'un pour cent du commerce extérieur de l'Inde. Les Indiens ne nous considèrent pas comme un partenaire commercial majeur. Toutefois, nous devons à l'inverse considérer l'Inde comme un partenaire commercial majeur. Si nous nous croisons les bras devant les problèmes, sans essayer de trouver les solutions pour eux, ce sera le Canada qui en souffrira, et non l'Inde, dont la croissance suit une courbe exponentielle.
Le Canada a besoin de diversifier ses échanges commerciaux au lieu de s'en tenir aux États-Unis et à la Chine. Je pense que l'économie indienne sera la prochaine à connaître un essor explosif, et nous devons en profiter. Les Indiens ont besoin de nos produits et services, mais ils iront les chercher ailleurs si nous ne les leur fournissons pas.
Vous avez tout à fait raison. Je suis entièrement d'accord avec vous là-dessus. Il n'y a aucun doute dans mon esprit, et c'est la raison pour laquelle je crois que c'est un projet de loi essentiel. Nous devons réussir et nous devons travailler sur ce dossier. Je continuerai à essayer de convaincre les gens. Chaque fois que j'emmène un grand conglomérat canadien en Inde, je dois toujours répondre à des questions difficiles. Mais il reste que ce sont des questions difficiles et que nous trouverons certainement des solutions bientôt.
Concernant la réglementation sur le marché indien, si vous avez remarqué, je faisais partie de la délégation du premier ministre cette fois-ci également. Lorsque nous étions en Inde, le premier ministre a clairement dit, comme vous, que nous avons des produits et des services dont l'Inde a besoin et que ce pays constitue un marché au fort potentiel. C'était très clair. Il l'a dit lors de la réunion et il l'a dit en public. Lorsque le premier ministre s'est adressé aux délégués et représentants d'entreprises, qui étaient plus de 400, il a répété la même chose, à savoir que nous sommes conscients du potentiel du marché indien.
Pendant ce voyage, je lisais les journaux canadiens. Il y a été question d'une déclaration de Rahul Gandhi sur les investissements directs étrangers. J'ai remarqué que, bien que le gouvernement soit minoritaire en Inde, la discussion va bon train au Parlement indien. Donc, je crois que nous avons de bonnes raisons d'espérer qu'ils adopteront des règlements ou des lois un jour ou l'autre, ou encore qu'ils adapteront leurs politiques aux multinationales et aux détaillants. Nous avons parlé de Walmart, et même s'il y a un problème, le gouvernement, le premier ministre et le Parlement indiens parlent constamment d'ouvrir les marchés. Ils parlent aussi des investissements étrangers.
Pensez-vous qu'il y a de l'espoir?
Cela ne fait aucun doute dans mon esprit.
Je ne sais pas quand vous avez vécu en Inde, mais vous vous rappelez peut-être que Pepsi a essayé de pénétrer le marché indien au cours des années 1970, je crois. Elle s'est fait éjecter. Le premier restaurant PFK ouvert là-bas a été accueilli par des jets de pierre. Lorsque Walmart a essayé d'ouvrir des magasins, elle a été ridiculisée à Maharashtra. IKEA a énoncé les règles qu'elle suivrait. Aujourd'hui, Coke et Pepsi ont conquis, je crois, 90 % du marché, et elles sont en pleine croissance. C'est l'un des plus grands marchés du monde. Il y a des restaurants PFK dans toutes les villes de l'Inde. McDonald est partout. J'ai oublié de mentionner McDonald, mais ses restaurants sont partout.
Je pense qu'en fin de compte, les gens trouveront un moyen de s'installer sur ce marché. Si on a pu trouver un moyen d'ouvrir des entreprises capitalistes en Union soviétique, je suis certain qu'on y arrivera en Inde sans peine, car c'est une société à la culture entrepreneuriale très forte. Ils nous accueilleront à bras ouverts.
Je suis d'accord avec vous.
Soit dit en passant, je suis arrivé au Canada seulement en 1989.
Vous parliez de McDonald. On nous a dit, dans les témoignages précédents, que l'Inde comptait 300 millions de végétariens. McDonald a ouvert ses deux premiers restaurants végétariens en Inde, et c'est une grande réussite.
Je m'y suis rendu avec une autre délégation. Nous avons visité l'usine McCain et nous avons rencontré les gens de Viterra. Ces entreprises obtiennent de très bons résultats. D'autres témoins nous ont dit par ailleurs que, lorsqu'on cherche à faire des affaires en Inde, il faut avoir des objectifs à long terme. Il faut être sur le terrain. Il faut comprendre la culture. Il faut tenir compte de la culture et des paramètres juridiques.
Êtes-vous d'accord avec moi là-dessus?
C'est très bien. Il est difficile de ne pas être d'accord.
Des voix: Oh, oh!
Le président: Monsieur Easter.
Merci, monsieur le président.
Vous vouliez connaître mes intentions concernant les motions. J'ai l'intention de n'en présenter qu'une seule pour gagner du temps plus tard, et ce sera celle qui porte sur la gestion de l'offre.
Monsieur Mahajan, vous avez indiqué que le critère de l'avantage net des investissements pour le Canada inquiétait l'Inde. Pendant un certain temps, nous avons cru que l'APIE était signé à cause de l'information se trouvant dans le site Web du ministère du Commerce international, mais il n'a manifestement pas été signé. Quel est le point de vue des Indiens maintenant, vu les négociations qui se poursuivent sur l'APIE et l'annonce faite vendredi concernant l'acquisition par CNOOC? Savez-vous si leur point de vue a changé, parce que...
Pardon, mais le dernier témoin a semblé indiquer que les points de vue avaient peut-être changé en raison des dernières nouvelles. Qu'en pensez-vous?
En fait, on verra sûrement deux points de vue différents. D'un côté, il y aura les entreprises qui sont contrôlées par un État et ont déjà tenté de faire affaire avec les Canadiens. Dans le secteur minier, par exemple, NMDC est venue plusieurs fois au Canada. ONGC Videsh tente d'acheter des sables bitumineux depuis quelques années. De toute évidence, ces entreprises seront particulièrement mécontentes des déclarations qui ont été faites. De l'autre côté, les entreprises privées telles que Tata, Reliance, Essar ou Birla considéreront probablement que ces commentaires ne les concernent pas, puisqu'elles n'appartiennent pas à un État. Oui, elles savent que nous devons protéger nos emplois et notre industrie, mais elles ont déjà conclu des transactions fructueuses au Canada en tant qu'entreprises privées.
Les entreprises indiennes n'ont pas encore fait de transactions de ce genre. Elles pourraient donc avoir des défis à relever. Certaines entreprises indiennes sont des sociétés d'État, et ce sont celles-là qui seront confrontées aux plus grands défis et soumises à la surveillance la plus serrée, à mon avis. À mon souvenir, aucune société d'État indienne n'a conclu de transaction importante au Canada; je suis certain qu'elles auront des défis à relever.
Ces commentaires sont très utiles.
Vous avez aussi mentionné des inquiétudes à propos du cadre juridique, de l'arbitrage et du temps que requièrent les poursuites judiciaires en Inde. C'est vrai. Les Indiens ont-ils aussi des inquiétudes au sujet de notre cadre juridique? Je ne crois pas que notre système soit particulièrement rapide. Ils n'ont pas d'inquiétudes à ce sujet? J'aimerais simplement éclaircir le contexte.
Non. En fait, je n'ai rien entendu à ce sujet. J'ai fait beaucoup de voyages avec des cabinets d'avocats canadiens qui se rendaient en Inde, et vice-versa. Ce qui a toujours posé problème, c'est que les cabinets canadiens ne peuvent pas ouvrir de bureaux en Inde. Le système juridique indien est aussi une source de préoccupation, bien sûr. Mais je ne crois pas que ces préoccupations soient réciproques: les Indiens sont très satisfaits de notre système juridique.
Merci beaucoup.
Ron, je vous souhaite la bienvenue, à vous aussi.
J'aimerais tout d'abord poser une question qui m'apparaît essentielle. Je crois que l'accord commercial avec l'Inde n'est pas une priorité immédiate, alors que l'accord avec la Corée du Sud pourrait être prioritaire. Que pourriez-vous nous dire à propos du degré d'urgence?
Eh bien, je crois que l'accord avec la Corée du Sud est extrêmement urgent, surtout pour les producteurs de porc qui veulent avoir accès à ce marché. Maintenant que les États-Unis ont conclu un accord, ils auront soudainement un accès préférentiel à ce marché. Donc toute démarche visant à accélérer les négociations serait la bienvenue.
Très bien. Merci.
Vous mentionnez dans votre mémoire que les droits de douane relatifs aux légumineuses ont été éliminés temporairement, comme nous le savons. Est-ce la principale raison qui explique la réussite de nos légumineuses sur le marché indien et la croissance continue de ce marché? Est-ce parce que les droits de douane ont été éliminés, ou parce qu'il y a des pénuries ou pour une autre raison?
Je pense que l'élimination des droits de douane est l'un des facteurs. L'autre raison, c'est que nous nous sommes fait connaître comme un fournisseur fiable dans un marché de qualité.
Je crois que les droits de douane temporaires et leur élimination temporaire posent un problème parce qu'ils ne procurent pas la stabilité dont on a besoin pour établir une infrastructure à long terme. Si on examine les exportations de divers produits vers l'Inde, on voit que la politique de ce pays est fondée sur ce qu'il désire accomplir à l'échelle nationale, plutôt que sur l'établissement de règles à long terme qui aideraient les exportateurs à comprendre quelle sera la situation s'ils s'engagent dans ce marché.
Donc, en résumé — et vous êtes la deuxième ou la troisième personne à nous le dire —, si nous sommes présents dans un marché mais qu'il n'y a pas d'accord commercial, la situation n'offre pas la stabilité qui nous convaincrait d'investir dans l'infrastructure, ou qui encouragerait les producteurs à accroître leur production pour mieux cibler ce marché.
Je crois que ce serait plus « prévisible », c'est le mot que j'emploierais. Pour le moment, on ne sait pas quelles seront les règles. Il est clair que le gouvernement indien a déployé beaucoup d'efforts pour s'assurer d'avoir une capacité intérieure. La capacité intérieure est importante, bien sûr. Mais nous savons aussi que, comme c'est un très gros marché, il y aura nécessairement beaucoup d'échanges commerciaux concernant les produits agricoles. Nous avons besoin d'un système fondé sur des règles afin que les producteurs puissent se sentir assez confiants pour faire les investissements nécessaires.
Merci, monsieur le président.
Merci encore à nos témoins. Bienvenue au Canada pour ce nouveau séjour.
Nous nous sommes déjà rencontrés au Japon; nous étions alors les deux Ronnies.
J'aimerais revenir sur le commentaire de M. Easter à propos des droits de douane.
Vous avez mentionné que les droits applicables aux lentilles avaient été éliminés en grande partie. Quels produits sont encore soumis à 100 p. 100 des droits de douane?
Je devrai consulter mes notes pour le vérifier. Je ne connais pas tous les secteurs en détail, comme je l'ai dit.
Je crois que l'élimination touchait les lentilles et les autres légumineuses. Il y a des droits de douane de 50 p. 100 sur les pois.
D'accord.
Nous parlons de commerce libre et équitable, et nous voulons offrir plus de débouchés à nos produits agricoles. Quelles sont les possibilités offertes aux agriculteurs indiens qui exportent vers le Canada?
L'exportation d'épices offre certaines possibilités aux agriculteurs indiens. Pour ce qui est des autres genres de denrées, ils ont probablement moins de chances de faire des affaires ici. Mais ils pourraient trouver des marchés pour certaines épices et certains produits spécialisés.
Des représentants de l'association du porc viennent de témoigner. Ils ont dit que la réfrigération causait beaucoup de préoccupations. Votre association a-t-elle le même problème? Est-ce que les questions de réfrigération vous empêchent de commercialiser vos produits?
Tout dépend des produits. Quand on parle de viandes et de légumes, la réfrigération est d'une importance capitale. Pour les pois, les lentilles et les produits céréaliers, c'est moins important. Je crois que notre défi, c'est de faire le nécessaire pour que nos produits puissent se rendre jusqu'à leur marché final. C'est bien de pouvoir les amener jusqu'à la frontière du pays, mais on a ensuite besoin d'une infrastructure, qu'il s'agisse de réseaux ferroviaires ou de systèmes d'entreposage, pour que les produits puissent se rendre jusqu'au client. Ce défi ne date pas d'hier: il faut s'assurer que les produits puissent parcourir les derniers milles et arriver jusqu'au client.
Merci.
Monsieur Mahajan, je vous remercie d'être avec nous aujourd'hui par vidéoconférence.
Vous dites que vous avez passé les 13 dernières années au Canada et que vous avez encore beaucoup d'échanges réciproques avec l'Inde. Avez-vous aussi fait affaire avec d'autres pays? En quoi ces expériences sont-elles semblables ou différentes selon le marché émergent? Comment acceptent-ils la primauté du droit contractuel dans sa forme nord-américaine?
J'ai eu des relations d'affaires qui m'ont fait connaître la culture indienne. Les Indiens ont une façon différente de faire des affaires. Je me demandais simplement comment... Vous comprenez ma question?
Tout à fait. J'ai aussi fait affaire avec deux autres régions, soit la Chine — je ne sais pas si on peut encore la qualifier de marché émergent; peut-être est-ce maintenant un marché « émergé » — et le Moyen-Orient. J'aimerais souligner quelques points.
Chacune de ces régions présente des défis particuliers. En Chine, outre les difficultés liées à la langue, le système juridique pose des problèmes. L'intervention des sociétés d'État crée une situation très difficile pour les entreprises canadiennes qui vont dans ce pays. Ce contexte a des aspects positifs et des aspects négatifs. D'un côté, le financement est plus facile, tout comme l'obtention des permis. Mais on traite avec une entité appartenant à l'État, ce qui n'est pas notre façon habituelle de faire des affaires ici, au Canada. Et même si vous faites affaire avec une entreprise chinoise « privée », elle reçoit un certain soutien de l'État. D'après mon expérience, ces situations entraînent toujours des défis en Chine.
Au Moyen-Orient, on semble surtout s'attarder à des questions de perception générale, à ce que les gens désirent et à ce qui fera leur bonheur à l'intérieur de l'État. L'aspect commercial n'est pas le principal moteur des interactions. On sent des forces sociales et commerciales, qui sont très différentes de la situation qui existe en Inde. En Inde, quand on traite avec une entreprise privée, c'est le désir de conclure une transaction et de faire des bénéfices qui motive la démarche. Au Moyen-Orient, les gens d'affaires se demandent plutôt: « Si je pose tel geste, comment serai-je perçu par le parti au pouvoir, ou par le cheik ou par l'instance suprême, quelle qu'elle soit? » C'est l'aspect le plus important de la transaction commerciale.
Chaque région a ses caractéristiques. D'une certaine manière, il est beaucoup plus facile de faire des affaires en Inde; mais il existe tout de même des défis. Si j'avais à établir un classement en fonction de la facilité de faire des affaires, je dirais que le Moyen-Orient vient en tête, suivi de l'Inde puis de la Chine.
Dans ce cas, comment peut-on amener les entreprises canadiennes à investir en Inde? Vous dites qu'il y a des possibilités. Outre l'accord sur la promotion et la protection des investissements étrangers, y a-t-il d'autres façons de supprimer les obstacles?
Je crois qu'il faudrait surtout adopter une attitude différente. D'après mon expérience, les entreprises américaines sont toujours plus prêtes que les Canadiens à prendre des risques. Les Canadiens sont généralement plus conservateurs. Pour faire affaire en Inde, il faut...
Je ne veux pas semer la controverse, mais je pourrais probablement le faire. Je suis Canadien depuis peu de temps. Dans les conseils d'administration canadiens, j'ai constaté, en général, qu'il faut présenter les risques et les avantages. Et évidemment, à court terme, il y a généralement plus de risques que d'avantages.
Je crois que M. Shory a souligné qu'il fallait adopter une perspective à long terme. Je suis convaincu que, si vous avez un échéancier de un à trois ans, ce sera pratiquement impossible et très frustrant de faire des affaires en Inde. Mais si vous avez un horizon de 5 à 15 ans, vous pourrez faire des miracles. Demandez à des entreprises telles que SNC-Lavalin; elles ont eu la même expérience. Si vous discutez avec le PDG de McCain, il vous dira la même chose: les premiers mois ou les premières années ont été absolument horribles, mais depuis, les résultats sont phénoménaux.
Je remercie nos témoins, MM. Bonnett et Mahajan, d'avoir participé à cet échange. Merci d'avoir offert votre témoignage et d'avoir répondu à nos questions. Vos commentaires étaient très pertinents et très utiles.
Nous poursuivons maintenant la séance à huis clos.
[La séance se poursuit à huis clos.]
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