[Français]
En premier lieu, je voudrais remercier les membres du Comité permanent des anciens combattants de m'avoir invitée à partager avec eux mes connaissances sur l'uranium appauvri. Sachez qu'en tant que Canadienne, membre de la fonction publique et membre de l'équipe qui assure les services de santé des Forces canadiennes, j'ai à coeur le bien-être des membres des Forces canadiennes ainsi que celui des vétérans. Du même souffle, je tiens à souligner qu'en tant que scientifique, je me préoccupe de la véracité, de l'exactitude et de la pertinence de toute preuve scientifique soumise à mon examen.
Mon parcours académique a débuté à l'Université d'Ottawa, où j'ai fait un baccalauréat en science avec une spécialisation en biologie. Dans le cadre de mes études de maîtrise et de doctorat, je me suis spécialisée en toxicologie chimique et environnementale, en particulier sur les métaux lourds, dont fait partie l'uranium. Au cours de mes études de maîtrise à l'Université d'Ottawa, j'ai développé une méthode d'analyse de risque probabiliste pour déterminer la quantité de poisson qui pouvait être consommée par l'humain avant d'atteindre une dose de métaux lourds nocive pour la santé. Pour l'obtention de mon doctorat à l'INRS, je me suis tournée vers la chimie analytique et le caractère potable de l'eau pour mieux quantifier l'étendue de la contamination environnementale des métaux lourds.
[Traduction]
Après mes études supérieures, j'ai commencé à travailler au ministère de la Défense nationale à titre d'écotoxicologue. Depuis 10 ans, j'occupe le poste de conseillère principale en toxicologie à la Direction de la protection de la santé de la force, au sein du groupe des Services de santé des Forces canadiennes.
C'est dans Ie cadre de ces fonctions, avec la collaboration d'une équipe multidisciplinaire, que je réalise une évaluation des risques de l'environnement sur la santé. L'équipe comprend des hygiénistes industriels, des médecins spécialisés en santé au travail et en hygiène du milieu, des techniciens en médecine préventive et des membres de l'Équipe déployable d'évaluation des risques sanitaires. À l'expertise de cette équipe multidisciplinaire s'ajoute celIe d'officiers du renseignement médical qui surveillent les éventuels dangers liés au travail et à I'environnement sur Ie terrain.
Là où se déploient des membres des Forces canadiennes, I'Équipe déployable d'évaluation des risques sanitaires les accompagne afin de prélever des échantillons d'air, d'eau et de sol qui sont analysés en vue de détecter une série de contaminants. À la lumière de ces résultats et sur la base de scénarios d'exposition prudents, nous déterminons si les soldats ont été exposés à des contaminants à des niveaux assez élevés pour nuire à leur santé.
Ces évaluations sont généralement prudentes puisqu'elles reposent sur les pires scénarios d'exposition à des contaminants environnementaux. En utilisant des hypothèses prudentes, nous réduisons la probabilité de sous-estimer les effets indésirables possibles sur la santé.
Un protocole d' entente conclu avec nos alliés nous permet de leur communiquer les résultats d'analyses effectuées par les Forces canadiennes et de comparer ces résultats avec ceux qu'eux-mêmes ont obtenus à la suite d'analyses semblables. En plus d'examiner les évaluations environnementales de nos alliés, nous surveillons celles faites par des organismes internationaux fiables tels que Ie Programme des Nations Unies pour l'environnement, le PNUE et l'Organisation mondiale de la Santé. Cet échange d'information et la revue de la littérature consacrée à la question appuient notre surveillance environnementale et nous donnent l'assurance qu'aucun problème possiblement dangereux lié au travail et à l'environnement ne nous a échappé.
Parmi tous les échantillons analysés à ce jour, nous n'avons trouvé aucun niveau excessif d'uranium dans l'environnement des théâtres d'opérations. Ces observations ont été corroborées par nos alliés et par les auteurs des rapports du PNUE sur les menaces pour la santé et l'environnement associées à l'utilisation des munitions à l'uranium appauvri en Bosnie, au Kosovo et en Serbie.
Les trois rapports concluent que l'emploi des munitions à l'uranium appauvri ne représente pas une menace importante, ni pour l'environnement ni pour les populations locales. L'Organisation mondiale de la Santé a également conclu que l'uranium appauvri ne constitue pas une menace pour les populations locales dans les pays où il a été utilisé et qu'il n'est pas nécessaire d'assurer une veille biologique des citoyens vivant à proximité des sites d'impact des munitions à l'uranium appauvri.
[Français]
En plus de participer à ces évaluations environnementales, j'ai assuré, à compter de 2005, la gestion du dépistage d'uranium appauvri auquel se soumettent volontairement des membres des Forces canadiennes.
Le a annoncé, le 7 février de l'an 2000, que les Forces canadiennes offriraient le dépistage d'uranium appauvri à tous les vétérans et militaires en service qui en feraient la demande. Cette offre répondait aux préoccupations exprimées par certains militaires ayant été déployés dans des régions où l'uranium appauvri avait été utilisé. Un laboratoire externe accrédité a effectué toutes les analyses d'uranium pour les Forces canadiennes.
[Traduction]
À ce jour, plus de 200 vétérans canadiens de la guerre du Golfe et des opérations de maintien de la paix dans les Balkans se sont soumis volontairement aux analyses de dépistage d'uranium appauvri et aucun n'a obtenu un résultat positif. Les concentrations totales d'uranium se sont toutes avérées normales et les analyses des radio-isotopes n'ont révélé aucune exposition importante à l'uranium appauvri. Les analyses n'ont pas permis de montrer qu'il y avait des concentrations particulièrement élevées d'uranium chez les vétérans des Forces canadiennes de la guerre du Golfe et des opérations de maintien de la paix dans les Balkans.
Ces résultats ont été publiés dans une revue spécialisée et un résumé a paru sur Ie site Web des Services de santé des Forces canadiennes.Selon les résultats du dépistage d'uranium appauvri effectué par les Forces canadiennes, les membres des Forces canadiennes n'ont pas été exposés à des niveaux élevés d'uranium appauvri, ce qui correspond aux résultats de nos alliés, notamment des États-Unis, de la Belgique, de la France et de l'Allemagne. Les seuls rapports faisant constamment état de résultats positifs au dépistage de l'uranium appauvri sont ceux qui concernent des soldats américains impliqués dans un incident de tir fratricide pendant la guerre du Golfe. Certains d'entre eux ont encore dans leur organisme des fragments de munitions à uranium appauvri et continuent d'excréter des concentrations élevées d'uranium dans leur urine. Malgré ce niveau d'exposition et les concentrations élevées d'uranium dans l'urine, les effets sur la santé liés à l'uranium sont jugés non cliniquement significatifs. Comme aucun membre des Forces canadiennes n' a été victime d'un incident de tir fratricide dans lequel des munitions à l'uranium appauvri ont été employées, aucun n'a obtenu de résultat positif au dépistage d'uranium appauvri.
Le Comité consultatif scientifique sur la santé des anciens combattants m'a invitée, l'an dernier, à lui présenter les résultats du dépistage volontaire de l'uranium appauvri des Forces canadiennes. Le comité m'a demandé de lui fournir une courte liste des principaux ouvrages traitant des effets possibles de l'uranium sur l'environnement et la santé. Toutefois, je ne faisais pas partie des examinateurs externes du rapport consacré à l'uranium appauvri et à ses effets sur la santé des vétérans canadiens. Néanmoins, après en avoir pris connaissance, je puis affirmer que je suis d'accord avec les conclusions des auteurs. Comme eux, j'estime qu'il est peu probable que des membres des Forces canadiennes aient été exposés à des niveaux d'uranium appauvri nocifs pour leur santé.
[Français]
De nombreux comités d'experts des domaines médical et scientifique sont arrivés à la conclusion que l'uranium appauvri ne pose pas de danger pour les militaires, à moins qu'ils soient à bord d'un véhicule atteint par des munitions à l'uranium appauvri.
En résumé, je réitère qu'il est improbable que l'exposition à l'uranium appauvri chez les membres des Forces canadiennes ait été assez importante pour causer des problèmes de santé.
Je pense que cela fait le tour de la question.
Quand nous avons entamé ce processus — quand le ministre a lancé cette étude, mais longtemps avant que le comité n'en voie les résultats — je pense que l'opinion publique voulait que nous examinions les effets de la substance en question sur les anciens combattants des Forces canadiennes.
Maintenant que les faits scientifiques ont été présentés, les personnes malades à cause de l'uranium appauvri doivent se sentir très soulagées de pouvoir poursuivre leur guérison et rechercher la cause de leurs symptômes, qu'ils soient dus à une cause physique profonde ou un trouble mental nécessitant un traitement.
J'estime que cette étude a été utile. Les témoignages comme celui que vous nous avez présenté aujourd'hui nous réitèrent, pour la dixième fois, que l'uranium appauvri n'est pas à l'origine des troubles de santé des anciens combattants des Forces canadiennes.
Je vais en rester là, monsieur le président.
Mon nom est Rosanne Dornan et je vous remercie de me donner l’occasion de prendre la parole ici aujourd’hui. Je suis la femme de Steven Dornan, et il est ici avec moi.
Steven a pris sa retraite il y a deux ans après avoir travaillé comme militaire pendant 27 ans. Il a servi en Bosnie et en Afghanistan et, pendant une de ses périodes de service, il suivait des traitements de chimiothérapie orale. Je tiens à préciser ce dont nous parlerons surtout aujourd'hui, car il semble que deux questions se posent: l'uranium appauvri cause-t-il le syndrome de la guerre du Golfe ou cause-t-il des cancers lymphatiques ou ce genre de maladie? Comme Steven souffre d'un cancer lymphatique, nous parlerons surtout du lien entre l'uranium appauvri et le cancer.
Il a été libéré en raison d’un diagnostic de lymphome non hodgkinien, et on lui a versé une pension en raison d’une erreur médicale, bien que nous prétendons qu’il a été exposé à de l’uranium appauvri. Le montant de la pension n’a été fixé qu’après que j’aie occupé le bureau de Greg Kerr, dans notre circonscription, pendant trois semaines.
Nos vies personnelles et les luttes que nous avons livrées contre Anciens combattants Canada et le gouvernement du Canada sont décrites dans les documents que je vous ai remis. J’attire votre attention sur la lettre ou le courriel adressé à M. Peter MacKay, ministre de la Défense nationale, qui relate la majeure partie de notre histoire. Je crois que vous en avez reçu une copie que vous trouverez à la Section 6, pièce 2.
:
Certainement. Vous n'avez donc pas le document en question, mais quand vous le recevrez, il relate une bonne partie du contexte. Il s'agissait d'une conversation très approfondie avec le ministre MacKay.
Notre histoire est publique et elle sera toujours publique. Rien n'a été modifié dans les documents que nous vous avons remis.
Je vais commencer par ces résultats. Capitaine Terry Riordon: résultats positifs pour l'uranium appauvri; Pascal Lacoste, résultats positifs pour l'uranium; Frank Stansbury, résultats positifs pour l'uranium appauvri; Capitaine Terry Riordon, décédé; Adjudant-maître John Michael Peace, décédé; Sergent Larry Robertson, décédé; Caporal Ken Burneau, lymphome non hodgkinien; Sergent Larry Robertson, lymphome non hodgkinien; Adjudant-maître Steve Dornan, lymphome non hodgkinien et Caporal Dave Sherbanowski, lymphome hodgkinien.
Tous étaient âgés de moins de 40 ans quand ils ont reçu un diagnostic de lymphome non hodgkinien, ce qui est très jeune pour avoir un tel diagnostic. En effet, l’âge moyen pour ce genre de cancer est de 66 ans. Y a-t-il autre chose que nous ignorons? Il se peut que nous ne le sachions jamais parce que le ministère des Anciens Combattants ne garde pas de tels registres.
Tous ces hommes ont participé soit à la Première guerre du Golfe, soit à la guerre en Bosnie ou bien ils ont servi sur des navires de la Marine canadienne où on sait que des armes à uranium appauvri étaient utilisées. Contrairement à ce qu'a déclaré le Dr Morisset, à savoir que les Canadiens n'ont jamais utilisé d'armes à l'uranium appauvri, ces armes ont été utilisés lors d'essais, jamais pendant le combat, mais lors d'essais.
J'ai d'autres noms dans ma base de données personnelle. Nous étudions la question depuis 10 ans; nous savons ce qu'il en est: il y a davantage d'hommes et de femmes qui savent qu'ils ont été exposés à l'uranium appauvri pendant qu'ils étaient au service des Forces canadiennes et qui sont malades, morts ou mourants.
Il y a certaines choses auxquelles je voudrais que vous réfléchissiez. Premièrement, comment notre gouvernement explique-t-il une telle situation? De toute évidence, il ne peut s’agir d’une coïncidence ou comme l'a laissé entendre Mme Lalonde, d'un événement sporadique. Il y a trop de facteurs communs pour cela. Deuxièmement, Comment se fait-il que je dispose d’une base de données sur ces hommes et ces femmes et qu'aucune base de données de ce genre n'existe au sein d'Anciens Combattants Canada? J'ajouterais à cela, pourquoi les membres des Forces canadiennes et les anciens combattants qui signalent eux-mêmes leur maladie ou qui subissent des tests à leurs frais ne font-ils partie d’aucune base de données ou cohorte d’études canadiennes, surtout quand leurs résultats sont positifs? Pourquoi Anciens combattants Canada ou notre gouvernement ne paient-ils pas pour que les tests soient faits dans des laboratoires externes, équipés de détecteurs à spectrométrie de masse, capables de détecter l'uranium appauvri et d'isoler les isotopes 238U, 235U et 234U?
En dernier lieu, comment un rapport comme celui dont nous discutons aujourd’hui peut-il être rédigé sans tenir compte des personnes qui sont décédées, qui ont été diagnostiquées d’un cancer qui se manifeste rarement chez les jeunes hommes, ou qui ont passé des tests qui prouvent qu’ils ont été contaminés à l’uranium appauvri? Comment a-t-on pu écrire ce rapport sans tenir compte d'importantes études animales ou de leurs résultats?
Si cela avait été fait, les arguments présentés dans le rapport selon lesquels — et je cite le rapport: « Il est peu probable que des militaires canadiens aient été exposés à des concentrations d'uranium appauvri qui pourraient représenter un danger pour leur santé. » seraient accueillis avec beaucoup plus de scepticisme.
Pour ce qui est du rapport, personnellement, j'estime qu'il est tendancieux, incomplet, trompeur et qu'il manque d'objectivité. Il ne dit pas toute l'histoire. Il vous dit ce qu'on veut vous faire entendre. Des soldats sont morts. Des résultats d'analyses sont positifs et l'uranium appauvri est très probablement le coupable. Le bénéfice du doute nous revient.
Notre fils est dans l'armée et nous voulons l'assurance que lui et sa femme, qui est également dans l'armée, n'auront pas à subir ce que nous avons subi.
Je voudrais seulement parler d'une chose que Peter MacKay a dite au sujet des autopsies. Nous avons pris des dispositions pour que Steven fasse l'objet d'une autopsie lorsqu'il décédera, une analyse de la moelle…
:
Oui, certainement, et en tant qu'ancien sergent-maître, je vais également faire une petite présentation sur PowerPoint.
Une des choses que je voudrais souligner et qui ont été laissées de côté en ce qui concerne les autres soldats dont le cas a été examiné est qu'un autre militaire du Royaume-Uni, un certain Stuart Dyson, a porté sa cause devant un tribunal. Après son décès, les Britanniques lui ont accordé une pension complète en raison de son exposition à l'uranium appauvri. Par conséquent, en plus des Italiens, il y a aussi un Britannique.
Pour commencer, je suis un ancien combattant considéré statistiquement insignifiant. Telle est la réalité. Rosanne et moi ne sommes pas médecins, mais nous faisons ce travail depuis maintenant 12 ans. Nous avons établi la base de données, pour laquelle le sous-comité s'est adressé à nous et cette base de données contient 70 pages. Elle est constituée de recherches scientifiques examinées par les pairs qui ont été réalisées un peu partout sur l'uranium appauvri.
Nous retrouvons une partie de cette recherche dans ce rapport, mais ce n'est pas complet. C'est très sélectif et cela pose un gros problème. Nous connaissons le sujet. Nous croyons que ce rapport manque d'objectivité et je pense que certaines de vos questions le soulignent. D'autre part, nous n'avons pas d'intérêt personnel en jeu. J'ai une pension et je ne suis donc pas là pour obtenir quoi que ce soit. Mon cancer va me tuer: j'ai un cancer en phase terminale.
Pour ce qui est des questions que j'ai posées à la communauté scientifique, l'une d'elles portait sur les effets potentiels sur la santé de l'uranium appauvri et les scientifiques y ont répondu. C'est potentiellement dangereux. Nous le reconnaissons tous. L'Organisation mondiale de la Santé a catalogué « l'uranium appauvri » comme une catégorie confirmée de carcinogène pour l'homme.
Voici la question que je vous pose: que faites-vous de moi, le gars qui s'est trouvé dans un véhicule où il a inhalé de l'uranium appauvri? Car c'est ce que j'ai fait. J'étais inspecteur des armements. Y a-t-il eu un très grand nombre de membres des Forces canadiennes qui ont été exposés? Probablement pas, mais il y a eu des gens qui l'ont été, des gens comme moi et comme ceux dont nous vous avons lu les noms. Le problème est qu'Anciens Combattants Canada recherche un rapport de cause à effet et que si vous ne pouvez pas prouver la cause, il n'y a pas d'effet. C'est oui ou c'est non.
Alors où en sommes-nous?
En août 2012, Santé Canada a dit que le niveau de risque dépend de l'exposition et de la solubilité. Lorsque l'uranium appauvri brûle, cela dégage deux types d'oxydes, solubles et insolubles. Non seulement l'Organisation mondiale de la Santé classifie l'uranium appauvri comme un carcinogène confirmé pour l'homme, mais c'est aussi le cas du NTP, du Centre international de recherche sur le cancer et de l'OSHA qui travaille en collaboration très étroite avec le programme du travail. Ils sont tous d'accord. C'est dans la fiche signalétique du fournisseur pour l'uranium appauvri. C'est tout simplement un carcinogène.
Je vais vous lire un extrait du rapport de la Royal Society, qui a été cité:
Les principaux organes exposés au rayonnement résultant de l'inhalation de particules d'uranium appauvri sont les poumons et les ganglions lymphatiques qui y sont associés et l'augmentation du risque de cancer du poumon est considérée comme le principal risque. Dans la pire des hypothèses, les doses de rayonnement que reçoivent les ganglions thoraciques sont environ dix fois supérieures à celles que reçoivent les poumons…
Si c'était écrit dans le rapport, cela lui conférerait un certain équilibre. Un des rapports a été cité, mais tout ce qui conduit à une corrélation entre l'uranium appauvri et le cancer a été omis.
Une dernière étude, très intéressante, et qui date de septembre 2010, a été réalisée par des Français. Ils ont décidé de comparer des pommes avec des pommes et d'examiner les travailleurs de l'uranium et également les travailleurs des installations de retraitement de l'uranium. Ce qu'ils ont constaté était entièrement différent et c'était la première fois qu'ils le constataient. Ils se sont rendu compte que les travailleurs exposés à de l'uranium appauvri retraité lentement soluble ou à de l'oxyde d'uranium étaient ceux pour lesquels le risque était le plus élevé. C'est la première étude qui fait la distinction entre l'uranium naturel et l'uranium retraité et elle conclut à un risque accru de tumeurs malignes pulmonaires et hématologiques. L'incidence du cancer a tendance à augmenter au fur et à mesure que diminue la solubilité du composé d'uranium et en fonction de la forme sous laquelle vous y êtes exposé.
C'est un énorme changement, car jusque-là, nous n'avions pas suffisamment d'études portant sur l'homme et on tenait donc compte des travailleurs de l'uranium. Les Français ont, en fait, examiné les travailleurs de l'uranium d'une installation de retraitement. Ils les ont tous suivis sur une longue période et c'est la conclusion qu'ils ont tirée.
Le comité scientifique d'Anciens Combattants Canada a dit que les preuves de risque accru de mortalité par le cancer sont limitées. Qu'est-ce que cela signifie? Les comités scientifiques du gouvernement qui mènent ces études doivent suivre la monographie. Le Centre international de recherche sur le cancer de l'Organisation mondiale de la santé, le CIRC, qui est cité à de nombreuses reprises dans ce document, précise ce que cela signifie. Qu'entend-on par « preuves limitées de cancérogénicité »? Il y a quatre niveaux, du plus élevé au plus bas.
Le premier niveau « preuves suffisantes de cancérogénécité » signifie que vous avez laissé tomber quelqu'un dans une cuve de plutonium et que cette personne est morte. La relation de cause à effet a été clairement établie.
Le deuxième niveau signifie que nous savons qu'il y a suffisamment de preuves et que le groupe de travail considère qu'une interprétation causale est crédible. C'est ce que reflète sa première conclusion.
Le troisième niveau correspond à des « preuves insuffisantes » et le quatrième a des « preuves suggérant une absence de cancérogénicité ». Avant cette étude, Anciens Combattants Canada estimait que nous en étions au niveau trois ou quatre, à savoir que l'uranium appauvri n'est pas dangereux. Un astérisque renvoyait à une note au bas de la page précisant « à moins d'être inhalé ou ingéré », un point c'est tout. C'est contre cela que nous nous sommes battus pendant 10 ans. Ce rapport nous fait maintenant passer du niveau quatre au niveau deux. Il dit qu'effectivement cet agent peut vous causer un cancer. Voilà ce qu'il dit.
Dans le contexte de la Loi sur les pensions qui régit nos rapports avec Anciens Combattants Canada, nous avons ce qu'on appelle une causalité présumée à l'alinéa 21(3)g) qui porte précisément sur ce dont nous parlons ici aujourd'hui. L'exposition à l'uranium appauvri aurait raisonnablement pu causer la maladie, ou la blessure ou son aggravation. J'ai remarqué que le mandat du comité scientifique des Anciens combattants avait omis le dernier élément. Il s'est seulement penché sur la cause. Si vous recherchez le rapport de cause à effet, l'uranium appauvri cause-t-il le cancer? Il cause le cancer autant que le tabagisme cause le cancer. Si vous prenez l'analogie du tabagisme, une bouffée de cigarette constituerait la cause et aurait pour effet d'entraîner un cancer, mais ce n'est pas ce qui se passe. Le plus longtemps vous êtes exposé, le plus vous êtes exposé, plus vous risquez d'avoir un cancer. Voilà ce dont il s'agit. Le rapport s'est très peu intéressé au risque.
Voyons ce que font les États-Unis. Aux États-Unis j'aurais obtenu une pension simplement parce que j'ai le cancer et que j'ai été dans une zone où l'on a utilisé de l'uranium appauvri. Si j'étais un employé du gouvernement fédéral travaillant dans une installation de retraitement de l'uranium et si j'avais l'un des 22 cancers figurant sur les listes américaines, je serais indemnisé et on s'occuperait de moi. Comme je suis Canadien… nous avons passé 10 ans à essayer de prouver tout cela, mais on m'a dit: « Ce n'est pas la cause irréfutable; par conséquent, vous ne pouvez pas obtenir de pension ». Voilà à quoi nous sommes confrontés en tant qu'anciens combattants.
Les États-Unis ont consacré jusqu'ici 8,3 milliards de dollars à l'indemnisation des travailleurs de l'uranium appauvri et aux anciens combattants comme moi. Dans notre documentation, nous vous avons donné les liens avec les sites de l'administration des anciens combattants des États-Unis qui désignent nommément l'uranium appauvri comme source de rayonnement ionisant et les anciens combattants ont droit à une pension aux États-Unis. Pourquoi la situation est-elle si différente au Canada? Qu'est-ce qui nous rend si différents?
J'ai écouté très attentivement le témoin précédent dire que les Canadiens n'ont pas été exposés. Un groupe important a-t-il été exposé? Non. L'ai-je été? C'est ce que dit le TACRA. Après 10 ans de contestation, il a reconnu que j'avais été exposé. J'étais inspecteur des armements à l'intérieur des véhicules, à Han Pijesak et Hadzici, les deux sites mentionnés dans le rapport du PNUE où le niveau d'uranium est 100 fois supérieur à la normale dans certaines zones. Cela a été reconnu 10 ans plus tard. J'étais là-bas dans les mois qui ont suivi les événements. Je suis allé dans des véhicules plein de poussière pour inspecter les armements et comme j'étais le seul Canadien là-bas, cela me rend insignifiant. Vous pouvez voir, d'après la photo, que nous n'avions aucun équipement de protection, ni masques ni gants ou autres protections qu'exigent les Forces canadiennes et les autres organisations.
À quoi ressemble l'uranium appauvri?
Voici à quoi cela ressemble dans un poumon. Vous voyez les étoiles? Ce n'est pas normal. Voilà ce que les particules d'UA font aux poumons. Ne vous leurrez pas, ce n'est pas inoffensif. On a maintenant découvert que c'est cancérigène et mutagène.
Dans cette étude — l'étude française qui n'a été ni mentionnée ni mise de l'avant — il est question de « Ratios de risque et d'intervalles de confiance de 95 p. 100 pour la mortalité causée par des tumeurs malignes des tissus lymphoïdes et hématopoïétiques… » C'est chez l'homme, soit dit en passant. Ce n'est pas chez l'animal, mais dans l'organisme humain.
Jusqu'à présent, jusqu'à ce rapport, l'uranium naturel était mis sur le même pied que l'uranium appauvri. Nous savons maintenant que ce n'est pas pareil. Vous voyez l'uranium naturel à gauche, l'uranium retraité à droite. Les lettres « F », « M » et « S » correspondent à une solubilité rapide, modérée et lente. Ces deux graphiques devraient être identiques, mais ils ne le sont absolument pas.
:
Merci, monsieur le président.
Je remercie les témoins d'être parmi nous aujourd'hui.
Monsieur Dornan, madame Dornan, je vous remercie d'être venus nous faire part de votre perspective à cet égard.
Depuis le début de l'étude — quelques séances y ont déjà été consacrées —-, des anciens combattants nous ont dit être certains que leurs problèmes de santé étaient liés à l'uranium appauvri. D'autres témoins ont affirmé que, selon les études qu'ils avaient vérifiées, on pouvait écarter presque certainement la possibilité que l'uranium appauvri soit la source des problèmes des vétérans.
Vous étiez ici plus tôt. Vous avez entendu le témoignage de l'experte en toxicologie. Elle a dit qu'à la suite des années 2000, on avait offert aux anciens combattants et aux militaires la possibilité de faire tester leur urine par une firme. Cette firme, qu'elle a nommée, analysait les résultats et faisait une étude toxicologique de l'urine.
Est-ce que vous avez pu participer à cette étude ou subir ces tests toxicologiques?
:
Mes expériences? Même si j'ai un cancer mortel, même s'il va raccourcir ma vie — on m'avait donné huit ans à vivre il y a dix ans et je suis encore là — est-ce que je changerais quoi que ce soit?
Non. Si j'avais été mieux informé de certains risques à l'époque, j'aurais pris des précautions, mais c'est une chose à laquelle je ne peux rien changer. En fait, mon fils est dans l'armée et je suis fier qu'il soit soldat.
Ce que je n'aime pas, c'est la façon dont Anciens Combattants Canada traite les anciens combattants comme moi, car une fois que vous quittez les Forces canadiennes et que vous relevez des Anciens combattants, vous n'êtes plus personne. Vous devez d'abord prouver au ministère que vous existez. Nous nous sommes battus pendant 10 ans, rien que pour obtenir une pension, parce qu'il voulait une causalité irréfutable. Il n'a pas respecté les règles à l'égard des pensions. Il n'a pas respecté la Loi sur les pensions. En fait, la Cour fédérale ne voulait même pas recevoir sa cause; elle nous a donné raison, car il s'est extrêmement mal conduit.
Vous nous avez peut-être vus, car nous avons fait les nouvelles nationales à ce sujet. Ma femme a dû organiser une occupation de bureau juste pour obtenir une pension et nous l'avons obtenue pour mauvaise gestion médicale. Vous avez reçu 300 pages; le TACRA en a reçu des milliers et il n'y était question nulle part d'une mauvaise gestion médicale, mais c'est ce que le ministre — qui était à l'époque M. Blackburn — nous a accordé. Il a fallu deux semaines pour que ses juristes examinent les documents et toutes nos preuves pour dire: « Oui, c'est une mauvaise gestion médicale » et qu'on nous accorde une pension.
Comme vous avez voyagé jusqu'ici, je voudrais prendre 30 secondes pour que votre charmante épouse puisse nous faire un résumé en 30 secondes.
Pouvez-vous nous accorder simplement 30 secondes…?
Au nom du comité et de Greg Kerr, le président de notre comité, nous vous souhaitons, de tout coeur, d'être en bonne santé, monsieur Dornan. Comme l'a dit M. Lizon, nous espérons que vous resterez parmi nous pendant encore 56 ans.
Je dois vous dire que vous avez rempli un de mes classeurs avec tous vos documents…
Des voix: Oh, oh!
Mme Rosanne Dornan: Ce n'est pas la totalité…
Le vice-président (M. Peter Stoffer): Je le sais. Je plaisantais seulement.
Madame Dornan, vous avez 30 secondes pour conclure.