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HUMA Réunion de comité

Les Avis de convocation contiennent des renseignements sur le sujet, la date, l’heure et l’endroit de la réunion, ainsi qu’une liste des témoins qui doivent comparaître devant le comité. Les Témoignages sont le compte rendu transcrit, révisé et corrigé de tout ce qui a été dit pendant la séance. Les Procès-verbaux sont le compte rendu officiel des séances.

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STANDING COMMITTEE ON HUMAN RESOURCES DEVELOPMENT AND THE STATUS OF PERSONS WITH DISABILITIES

COMITÉ PERMANENT DU DÉVELOPPEMENT DES RESSOURCES HUMAINES ET DE LA CONDITION DES PERSONNES HANDICAPÉES

TÉMOIGNAGES

[Enregistrement électronique]

Le mardi 29 mai 2001

• 1110

[Traduction]

Le président (M. Peter Adams (Peterborough, Lib.)): Chers collègues, la séance est ouverte. Conformément au paragraphe 108(2) du Règlement, nous poursuivons notre étude de l'enseignement postsecondaire (financement et mobilité).

Avant que nous ne commencions, j'attire votre attention sur le budget qui vous a été remis. Permettez-moi de vous donner quelques précisions à son sujet. Le montant demandé est de 77 300 $. Je vous rappelle que nous avons adopté un budget plus tôt au cours de l'année qui a disparu à la fin de l'année financière. Nous n'avions dépensé que la moitié de ce budget à la fin de l'année financière. Nous présentons donc un budget qui comprend la somme que nous n'avons pas dépensée ainsi qu'une somme supplémentaire pour permettre à nos deux sous-comités, celui des enfants et jeunes à risque et celui de la condition des personnes handicapées de mener leurs activités. Le budget n'exige aucune explication. Je vous signale simplement que la majeure partie de la somme demandée ira à rembourser les dépenses engagées par les témoins pour comparaître devant le comité et les sous-comités.

Quelqu'un veut-il proposer l'adoption de ce budget?

Mme Anita Neville (Winnipeg-Centre-Sud, Lib.): Je propose l'adoption du budget.

(La motion est adoptée)

Le président: Chers collègues, je souhaite en votre nom bienvenue à tous nos témoins d'aujourd'hui. Nous sommes très heureux de vous voir tous.

Si les témoins n'y voient pas d'inconvénient, je vais leur demander de se présenter eux-mêmes au lieu que je le fasse. Je leur accorderai ensuite cinq minutes pour faire un exposé. Veillez préciser clairement votre nom et le nom de l'association que vous représentez. Vous pouvez nous dire quelques mots au sujet de cette association. Je pense que vous savez que la séance est télédiffusée. Quand un témoin aura fini de se présenter, attendez un moment avant de vous présenter vous-même. Commençons par Arpi. Ce sera ensuite au tour de Jim et ainsi de suite.

Arpi Hamalian.

[Français]

Mme Arpi Hamalian (présidente, Fédération québécoise des professeures et professeurs d'université): Je suis Arpi Hamalian, présidente de la Fédération québécoise des professeures et professeurs d'université, la FQPPU.

La fédération a été fondée le 16 mai 1991. Elle regroupe 20 syndicats rassemblant 8 000 professeurs, soit la grande majorité des professeurs et professeures des universités du Québec. Merci.

[Traduction]

M. James L. Turk (directeur administratif, Association canadienne des professeures et professeurs d'université): Je m'appelle Jim Turk. Je suis directeur administratif de l'Association canadienne des professeures et professeurs d'université.

M. Frank Smith (coordonnateur national, Association nationale des étudiants handicapés du niveau postsecondaire): Je m'appelle Frank Smith. Je représente les étudiants handicapés canadiens du niveau postsecondaire.

M. Ian Boyko (président, Fédération canadienne des étudiants et étudiantes): Je m'appelle Ian Boyko. Je suis président national de la Fédération canadienne des étudiants et des étudiantes qui compte plus de 400 000 membres dans les universités et les collèges de Victoria à St. John's.

M. William A. Easton (président, groupe de travail de l'AMC sur les frais de scolarité, Association médicale canadienne): Je m'appelle Bill Easton. Je suis président du groupe de travail de l'Association médicale canadienne sur les frais de scolarité et je suis aussi membre de la coalition des associations professionnelles nationales au sujet des frais de scolarité.

[Français]

Mme Lucille Auffrey (directrice générale, Association des infirmières et infirmiers du Canada): Bonjour, je suis Lucille Auffrey, directrice générale de l'Association des infirmières et infirmiers du Canada, the Canadian Nurses Association.

[Traduction]

M. Liam Arbuckle (directeur national, Alliance canadienne des associations étudiantes): Je m'appelle Liam Arbuckle. Je représente l'Alliance canadienne des associations étudiantes qui compte actuellement 22 membres.

M. Robert Giroux (président, Association des universités et collèges du Canada): Je m'appelle Robert Giroux.

[Français]

Je représente l'Association des universités et collèges du Canada.

[Traduction]

Nous représentons 92 universités et collèges décernant des diplômes dans l'ensemble du pays.

M. Bill Conrod (vice-président retraité, Collège Algonquin; représentant, Association des collèges communautaires du Canada): Je m'appelle Bill Conrod. J'ai dernièrement pris ma retraite après avoir travaillé pendant 38 ans dans le domaine de l'éducation publique. J'ai passé les 30 dernières années de ma carrière à enseigner dans des collèges situés dans trois provinces. Je représente l'ACCC, l'Association des collèges communautaires du Canada. Je ferai un exposé plus tard.

M. Claude Paul Boivin (porte-parole, Coalition des associations professionnelles nationales au sujet des frais de scolarité): Bonjour. Je m'appelle Paul Boivin. Je représente aujourd'hui la Coalition des associations professionnelles nationales au sujet des frais de scolarité, une coalition qui regroupe neuf associations nationales. Je suis également directeur administratif de l'Association canadienne des médecins vétérinaires.

Le président: Je vous remercie tous.

• 1115

Avez-vous tous un exemplaire de l'ordre du jour? Si vous n'en avez pas, nous allons vous en remettre un.

Si vous n'y voyez pas d'inconvénient, je propose que vous fassiez votre exposé dans l'ordre qui est prévu à l'ordre du jour.

J'accorde donc d'abord la parole à M. Bill Conrod de l'ACCC, l'Association des collèges communautaires du Canada. Vous avez tous cinq minutes pour faire votre déclaration préliminaire.

M. Bill Conrod: Je vous remercie, monsieur le président, et mesdames et messieurs. Tous les membres de l'association que je représente, l'ACCC, sont actuellement réunis à Windsor en Ontario. Comme j'étais libre, on m'a demandé de représenter l'association.

L'Association des collèges communautaires du Canada a rencontré le comité en avril. Mme Terry Anne Boyles, vice-présidente des services aux membres, a alors pris la parole devant le comité. Pour votre gouverne, nous représentons 175 collèges, instituts et cégeps dont les campus sont répartis dans environ 900 collectivités canadiennes. Plus de 800 000 étudiants à temps plein et près de 1,5 million d'apprenants à temps partiel fréquentent ces collèges, instituts et cégeps. Nous pensons vraiment avoir une vue pancanadienne de la question à l'étude.

Lorsque Terry Anne a pris la parole devant vous, elle vous a parlé d'un groupe de travail qui étudiait les questions dont vous êtes saisis. Le groupe de travail fait actuellement rapport de ces conclusions à l'assemblée générale annuelle de l'association qui a lieu à Windsor. Je sais qu'on vous a déjà remis des exemplaires de ce rapport. Si vous ne l'avez pas reçu, je verrai à ce que vous le receviez. Le rapport comporte aussi un résumé de deux pages à l'intention des membres de l'association.

L'ACCC a créé un groupe de travail sur l'endettement étudiant en 1998 et lui a confié le mandat de lui soumettre des recommandations à cet égard. Le groupe de travail n'a eu accès qu'à très peu d'études faisant état des difficultés financières des apprenants. Au cours des deux dernières années, la question de l'endettement étudiant a retenu l'attention de la presse populaire ainsi que de divers groupes d'étudiants. Le groupe de travail n'a cependant pu se reporter qu'à des expériences individuelles. Comment le groupe de travail a-t-il donc défini le problème? Il s'est servi de données qualitatives provenant de tout le pays pour cerner les principales questions devant être examinées ainsi que les lacunes dans la recherche. En outre, le groupe de travail a mené au printemps dernier des consultations auprès d'une vaste gamme de groupes intéressés. J'ai participé à ces consultations. Le groupe de travail a également organisé plusieurs ateliers lors de conférences annuelles. Le groupe de travail a tiré plusieurs conclusions de ce processus.

Je ne crois pas vous apprendre quoi que ce soit en vous disant que l'une des grandes conclusions du groupe de travail a été qu'une grande confusion existe dans le domaine depuis que de nombreuses autres sources d'aide financière se sont ajoutées au Programme canadien de prête aux étudiants. Une bonne part de cette situation est attribuable à la complexité de nos établissements et à la nature de notre clientèle. En 1960, lorsque j'ai terminé mes études universitaires, l'âge et l'expérience des étudiants adultes étaient complètement différents de ce qu'ils sont à l'heure actuelle. J'étais jusqu'à tout récemment vice-président de l'éducation permanente au collège Algonquin à Ottawa. Je comptais parmi mes étudiants des dirigeants communautaires qui payaient des impôts depuis des années et qui avaient décidé de retourner aux études. La situation a beaucoup évolué.

C'est exactement ce qu'a constaté le groupe de travail. Après avoir répertorié les problèmes qui se posent, lesquels sont exposés dans le rapport, le groupe de travail a conclu que le moment était venu de complètement revoir le système. Que pouvait donc faire le groupe de travail? Il a proposé d'établir certains principes en fonction desquels ce réexamen pourrait être effectué.

Voici les principes sur lesquels le groupe de travail pense que ce réexamen devrait se fonder. Premièrement, le système doit être universel et accessible à tous les apprenants quelle que soit l'étape de leur vie au cours de laquelle ils font des études.

• 1120

Le deuxième principe à prendre en compte est celui de la responsabilisation. La société canadienne doit assumer ses responsabilités à l'égard des apprenants et les apprenants doivent assumer leurs responsabilités envers les collectivités en remboursant leurs dettes. Personne ne demande un cadeau.

Ce qu'il faut savoir lorsqu'on cherche à encourager les gens à poursuivre leur formation... J'ai appris la semaine dernière qu'aux États-Unis, on allait dans les prisons pour encourager les détenus à songer à se réintégrer à la population active. Les pénuries de travailleurs se pointent à l'horizon. David Foot nous a dit que la population active ne se renouvelait pas au même rythme que par le passé. Nous faisons maintenant face à cette situation.

Il y a ensuite la question de la portabilité. Les apprenants doivent pouvoir se prévaloir de l'aide financière qui leur est accordée dans n'importe quelle partie du pays ou dans un autre pays lorsque cela est justifié. Pourquoi dans un autre pays? De nombreux emplois dans ce pays exigent une expérience internationale, en particulier dans le domaine de l'exportation de biens manufacturiers.

Il faut viser la simplicité: un programme, un formulaire, une évaluation, c'est-à-dire un système complet et facile à administrer.

Le système doit aussi être rationnel. Nous connaissons le problème que pose dans ce pays la rationalisation d'un système qui comporte... ce défi doit cependant être relevé.

Le système doit également être souple. Le système d'aide financière aux étudiants doit permettre de répondre à des besoins croissants et diversifiés.

Combien de temps me reste-t-il, monsieur?

Le président: Votre temps est presque écoulé, Bill. Compte tenu de votre ancienneté, je vous accorde 30 secondes.

M. Bill Conrod: Je ne lirai pas nos recommandations qui sont clairement exprimées dans notre mémoire. Elles peuvent servir de cadre à un nouveau système. Nous ne proposons pas de solution révolutionnaire. Nous offrons certains principes directeurs ainsi qu'une liste de souhaits, mais il faudra des magiciens pour concevoir un système qui reflétera ces recommandations. Je sais que le pays compte beaucoup de gens brillants. Nous devons tenir compte des atouts des pays auxquels nous faisons concurrence sur la scène internationale et proposer un système dont d'autres pays voudront s'inspirer. Bonne chance à tous.

Le président: Je vous remercie beaucoup, Bill.

Permettez-moi d'abord de dire que nous regrettons que cette table ronde coïncide avec la tenue de la conférence à Windsor. Nous savions que ce serait le cas, mais nous n'y pouvions rien. Merci d'être venu.

Je vous signale à tous que les documents que vous nous remettez seront versés aux dossiers du comité. Les principes directeurs et les recommandations qui figurent dans le mémoire sont très clairs et nous vous en remercions.

J'accorde maintenant la parole à M. Robert Giroux, de l'Association des universités et collèges du Canada. Vous avez la parole.

[Français]

M. Robert Giroux: Bonjour. C'est un plaisir de représenter l'Association des universités et collèges du Canada et de participer à l'examen important et permanent de l'accès à l'éducation postsecondaire au Canada mené par ce comité.

Le Canada possède un système d'éducation postsecondaire largement accessible dont il peut être fier. Nos effectifs, qui n'ont jamais été si nombreux, continuent à grossir. Les prévisions démographiques permettent en outre de présager un essor encore plus rapide. Il ne semble pas y avoir de pénurie d'étudiants pour occuper les places disponibles.

Pourtant, aussi brillant que ce tableau puisse être, la question de l'accès cause de plus en plus de soucis. Pour l'AUCC, ces préoccupations concernent trois volets: capacité, qualité et équité.

[Traduction]

Un des grands défis présents et futurs des universités canadiennes a trait à la capacité: veiller à ce qu'il y ait assez de places pour tous les étudiants qualifiés qui désirent s'instruire, et assez de professeurs pour leur offrir l'éducation et les compétences dont ils ont besoin. Les universités canadiennes se préparent à une hausse des inscriptions de 20 à 25 p. 100 d'ici 2010. Elles devront effectuer des investissements substantiels dans de nouvelles salles de classe, des bibliothèques et d'autres installations d'enseignement, à une époque où elles affichent plus de 3 milliards de dollars d'entretien et de rénovations différés des installations actuelles.

En plus de fournir des installations adéquates, elles doivent recruter plus de 30 000 nouveaux professeurs afin de faire face aux départs à la retraite et au roulement de personnel, mais aussi pour servir tous ces nouveaux étudiants. Le Canada n'est pas le seul à se trouver dans cette situation, d'autres pays connaissent le même sort et lui font une concurrence acharnée. La croissance de l'économie du savoir signifie aussi que les universités doivent vaincre les obstacles pour attirer et retenir des professeurs au Canada.

Les étudiants des cycles supérieurs sont de plus en plus en demande. Il sera important d'offrir des bourses d'études à ces cycles afin d'encourager plus d'étudiants à obtenir des maîtrises et des doctorats et les préparer non seulement à embrasser les professions libérales mais aussi à répondre aux besoins de l'industrie et du gouvernement qui recherchent du personnel hautement qualifié pour respecter l'impératif de l'innovation.

• 1125

Nous devons surmonter ces difficultés à une époque où le soutien gouvernemental général au fonctionnement de base des universités demeure, en termes réels, bien en dessous de ce qu'il était il y a dix ans. Les gouvernements ont admis ce fait dans une certaine mesure et ont recommencé à investir un peu après l'élimination du déficit, mais nous prenons de plus en plus de retard sur d'autres pays industrialisés, surtout les États-Unis. Le problème est exacerbé par le non-remboursement des coûts indirects de la recherche financée par le gouvernement fédéral. Les universités sont tout à fait disposées à jouer le rôle que les gouvernements attendent d'elles, en produisant de plus en plus de diplômés hautement qualifiés et en effectuant la recherche de pointe nécessaire pour assurer la place du Canada dans l'économie du savoir. Mais si les gouvernements s'attendent à ce que les universités réalisent ces objectifs tout en préservant et en élargissant l'accès, ils devront donner un soutien financier beaucoup plus important.

Les questions de capacité sont certes urgentes, mais celles liées à la qualité le sont aussi. Nous nous efforçons bien entendu d'offrir l'accès à une éducation de qualité. Les années de compressions financières décrites plus tôt ont inévitablement provoqué l'érosion de la qualité dans nos établissements car la taille des classes a dû être augmentée et les interactions entre les professeurs et les étudiants dans les séminaires et les rencontres en face-à-face ont diminué. La question de la qualité n'a cependant pas trait uniquement au déclin du soutien; elle concerne aussi les occasions perdues d'améliorer la qualité. Dans une expérience universitaire de qualité, les étudiants peuvent choisir ce qu'ils veulent étudier, et toutes les disciplines (les arts, les sciences, les disciplines professionnelles) disposent de ressources suffisantes. Une expérience universitaire de qualité consiste aussi à faire en sorte que les étudiants qui le désirent puissent obtenir une formation étendue dans des domaines divers.

De nos jours, offrir une éducation supérieure de qualité signifie donner une dimension internationale, à un nombre accru d'étudiants une dimension internationale. Y compris des occasions d'effectuer une partie de leurs études à l'étranger. Ce genre d'expérience les expose aux «meilleures pratiques» d'autres pays et leur apprend la tolérance et le respect, en plus de les initier à d'autres cultures (compétences importantes dans un monde multiculturel et mondialisé et dans un pays tourné vers l'extérieur comme le Canada). Plus important encore, peut-être, cette expérience améliore grandement la capacité d'adaptation et les compétences en entrepreneuriat des étudiants, en les amenant à dire: «si je peux le faire, je peux faire n'importe quoi».

Offrir une éducation supérieure de qualité signifie offrir un environnement où la technologie améliore l'expérience d'apprentissage, ce sur quoi nous sommes tous d'accord mais dont nous oublions parfois le coût élevé. Assurer l'accès à une éducation de qualité signifie que les gouvernements doivent examiner le soutien financier général qu'ils octroient aux universités canadiennes.

[Français]

Finalement, monsieur le président, nous devons répondre à la question suivante: un accès pour qui? L'AUCC est convaincue que toute personne qualifiée qui désire étudier à l'université devrait pouvoir le faire. Cela signifie chercher des solutions aux obstacles qui peuvent amener les personnes qualifiées à abandonner l'idée de faire des études postsecondaires.

Actuellement, il existe peu de recherches sur les conséquences que les droits de scolarité et d'autres coûts, l'endettement étudiant et l'aversion pour les dettes ont eu sur les décisions individuelles d'effectuer des études supérieures. Nous comprenons certes que ces facteurs puissent décourager des candidats qualifiés ou influencer le choix du domaine d'étude et le cheminement scolaire.

Nous savons que malgré les mesures prises par certains gouvernements provinciaux, ces dernières années, les droits de scolarité sont beaucoup plus élevés dans chaque province qu'ils ne l'étaient il y a dix ans. Ces hausses, dans bien des cas demandées par les gouvernements provinciaux du moment, n'ont pas compensé les réductions des subsides gouvernementaux. Sans soutien de base adéquat des gouvernements, les universités n'ont eu d'autre choix que de majorer les droits de scolarité pour faire face aux demandes d'admission, préserver ou améliorer la qualité et honorer les nombreuses autres pressions et attentes sociales.

L'érosion de l'équité d'accès devrait cependant nous inquiéter tous. L'AUCC a toujours été et continue d'être un fervent défenseur de l'amélioration de l'aide étudiante et des mesures de réduction de la dette afin d'aider les étudiants à assumer l'éventail complet des coûts liés à la formation postsecondaire. Nos membres ont utilisé les revenus supplémentaires provenant des hausses des droits de scolarité pour tripler et plus leurs programmes de bourses d'études et d'aide.

L'AUCC, monsieur le président, continuera à collaborer avec ses partenaires d'autres organisations et du gouvernement pour cerner les problèmes de capacité et autres qui entravent l'accès équitable à l'éducation postsecondaire et y trouver une solution. Mais nous devons aussi veiller à ce que l'éducation offerte soit de la plus haute qualité possible.

Je vous laisse sur la réflexion que l'équité, la capacité et la qualité sont des aspects de l'accès qui revêtent tous une grande importance et qu'aucun ne peut être envisagé séparément des autres. J'attends votre débat avec intérêt.

Le président: Je te remercie beaucoup, Robert.

• 1130

[Traduction]

J'accorde maintenant la parole à M. Ian Boyko, président de la Fédération canadienne des étudiantes et étudiants. Vous avez la parole, Ian.

M. Ian Boyko: Je vous remercie beaucoup. J'aimerais commencer par remercier le comité de nous avoir invités à comparaître devant lui ce matin.

La Fédération canadienne des étudiantes et des étudiants se réjouit de l'occasion qui lui est donnée de discuter avec vous de la question de l'accès à l'éducation postsecondaire. J'aimerais aborder plusieurs points aujourd'hui. Mes propos porteront essentiellement sur la question de l'accès à l'éducation postsecondaire ainsi que sur les tendances préoccupantes qui se manifestent dans ce domaine.

Des recherches récentes révèlent que les orientations adoptées par les gouvernements fédéral et provinciaux durant les années 90 ont eu un effet dévastateur sur les étudiants provenant de familles à faible et à moyen revenu. Les années 90 ont été marquées par d'importantes réductions budgétaires qui ont eu des résultats prévisibles. Entre 1990 et 1998, le niveau d'endettement des étudiants a triplé et les frais de scolarité ont augmenté en moyenne à l'échelle nationale de 126 p. 100. Ces chiffres nous sont familiers. Il ressort cependant des données les plus récentes portant sur le sujet que la hausse des frais de scolarité, l'endettement des étudiants et l'échec total de la Fondation canadienne des bourses du millénaire ont eu pour effet combiné de miner l'accès à l'éducation postsecondaire des étudiants à faible et à moyen revenu.

Je me contenterai de vous donner trois exemples provenant de ces recherches. Premièrement, à l'université Western Ontario, un suivi mené sur quatre ans auprès des étudiants a révélé qu'avant la déréglementation des frais de scolarité, 17,3 p. 100 des étudiants faisant des études médicales provenaient de familles dont le revenu annuel était inférieur à 40 000 $. Quatre ans après la déréglementation, cette proportion avait diminué de 50 p. 100 pour se situer à 7,7 p. 100 seulement.

Deuxièmement, la Revue trimestrielle de l'éducation de Statistique Canada, 2000, volume 6, numéro 4, confirme que les données provenant de l'université Western Ontario s'appliquent à l'échelle du pays. Voici ce que dit Statistique Canada au sujet de données recueillies jusqu'en 1994:

    [...] un écart croissant [entre le taux de participation des Canadiens à faible revenu par rapport au taux de participation des familles à revenu moyen et élevé] se constate depuis 1989, c'est-à-dire depuis l'augmentation rapide des frais de scolarité.

Il convient de faire remarquer que cette étude ne porte que sur des données recueillies jusqu'en 1994; la plus importante hausse des taux de scolarité était encore à venir. On peut présumer que l'écart constaté a augmenté davantage.

Enfin, un rapport récent de Statistique Canada met en lumière le problème croissant de l'individualisation des frais liés aux études postsecondaires, en raison de programmes comme le régime enregistré d'épargne-études. Le rapport confirme que les Canadiens à faible revenu sont les moins bien placés pour économiser en vue des études postsecondaires de leurs enfants. Il y a 80 p. 100 des ménages ayant un revenu inférieur à 30 000 $ qui ont dit vouloir économiser en vue des études postsecondaires, mais seulement 18,7 p. 100 d'entre eux avaient un REEE. Par contre, 60 p. 100 des ménages ayant un revenu supérieur à 80 000 $ ont un tel régime.

Ces chiffres sont clairs. Le régime enregistré d'épargne- études n'aide en rien les étudiants qui ont le plus besoin d'aide pour poursuivre des études postsecondaires.

J'aimerais conclure en formulant une série de recommandations visant à réduire l'écart croissant dans l'accessibilité aux études postsecondaires au Canada. Premièrement, le gouvernement devrait supprimer le régime enregistré d'épargne-études et utiliser les économies ainsi réalisées pour mettre en oeuvre un programme national de bourses fondées sur les besoins.

Ma deuxième recommandation est que le gouvernement fédéral se dote d'une stratégie complète visant à permettre à tous les Canadiens d'avoir accès à l'éducation postsecondaire. Cette stratégie devrait comporter la nomination d'un ministre responsable de l'éducation postsecondaire; l'adoption d'une loi sur l'éducation postsecondaire; et l'élaboration d'une stratégie nationale à laquelle participeraient les gouvernements fédéral et provinciaux dans le but de réduire les frais de scolarité, de réduire l'endettement des étudiants et d'améliorer l'infrastructure défaillante de nos collèges et universités.

Enfin, comme nous l'avons fait au cours des diverses tables rondes auxquelles nous avons participé, nous pressons le gouvernement fédéral de supprimer les modifications préjudiciables et contestables apportées à la Loi sur la faillite et l'insolvabilité.

Je vous remercie encore une fois de l'invitation qui nous a été faite de comparaître devant vous aujourd'hui. Je répondrai volontiers à vos questions.

Le président: Je vous remercie beaucoup, Ian. Nous vous savons gré d'avoir respecté le temps qui vous était imparti. Ne vous sentez pas visé, Robert.

Notre témoin suivant est Liam Arbuckle, nouveau directeur national de l'Alliance canadienne des associations étudiantes.

M. Liam Arbuckle: Je vous remercie beaucoup. Je voudrais remercier le président ainsi que le comité de nous avoir permis de discuter avec vous du dossier de l'accès aux études postsecondaires au Canada.

L'ACAE divise l'accessibilité en trois volets prioritaires, soit l'AMP (abordabilité, mobilité et possibilités). J'aborderai chacun de ces trois volets en mettant en évidence certaines des recherches existantes, en attirant l'attention du comité sur certains enjeux alarmants connexes, offrant quelques solutions possibles et en identifiant la nécessité de recherches plus approfondies.

Je commence par l'abordabilité. L'importance de cet enjeu a pris beaucoup d'ampleur au cours de la dernière décennie. Selon Statistique Canada, entre 1990 et l'an 2000, les frais de scolarité ont augmenté en moyenne à l'échelle nationale de 125,9 p. 100. Cette hausse ne comprend pas les augmentations des autres coûts obligatoires des étudiants et étudiantes. Contrairement à ce que certains experts diront, ces augmentations ont des répercussions évidentes.

• 1135

Une récente étude menée par Ipsos-Reid effectuée pour le ministère de l'Apprentissage de l'Alberta révèle que 44 p. 100 des diplômés du secondaire qui ne fréquentent pas un établissement d'enseignement postsecondaire imputent leur décision aux frais de scolarité élevés et aux autres frais obligatoires. Par conséquent, nos dirigeants de demain vont venir d'un bassin toujours plus restreint de Canadiens et Canadiennes, non pas en raison d'un manque de talent, mais à cause des coûts plus élevés.

Par exemple, en 1998, les frais de scolarité à l'école de médecine de l'université Western Ontario, pour une année, s'élevaient à 4 844 $; en 2000, ils étaient de 10 000 $ par année. La conséquence de cette hausse est que le revenu familial brut moyen dans le cas d'un étudiant de première année en médecine à l'UWO a augmenté de façon importante. Il s'établit maintenant à 140 000 $, comparativement à 80 000 $ il y a à peine trois ans. Cependant, les parents à revenu élevé ne sont pas les seuls à vouloir que leurs enfants fassent des études collégiales ou universitaires.

Selon une étude de Statistique Canada, 86 p. 100 des parents veulent que leurs enfants fassent des études supérieures. Malheureusement, la même étude révèle que seulement 41 p. 100 des enfants au Canada peuvent compter sur des économies pour poursuivre leurs études. La médiane de ces économies est d'environ 3 000 $, ce qui ne suffit pas à payer les frais de scolarité moyens d'une première année universitaire.

Il est encore plus inquiétant de se rendre compte que les parents à faible revenu ont fait des économies pour moins d'un enfant sur cinq, comparativement à deux sur trois pour les parents à revenu plus élevé.

L'ACAE a plusieurs propositions pour aider à régler les problèmes d'abordabilité auxquels un grand nombre d'étudiants sont confrontés. Elles comprennent notamment une harmonisation continue du Programme canadien de prêts aux étudiants; le relèvement de la limite de transfert concernant le crédit d'impôt pour études; et une entente nationale sur l'enseignement postsecondaire.

Si je disposais de plus de temps, je vous expliquerais chacune de ces propositions, mais il serait faux de dire que leur mise en oeuvre réglerait une fois pour toutes le problème. En vérité, on n'en sait pas assez sur le problème de l'abordabilité. Nous ne savons pas exactement les niveaux d'endettement qui découragent les étudiants éventuels, ni les autres facteurs qui interviennent. C'est pour cette raison que l'ACAE recommande la réalisation d'une étude nationale complète de la question de l'abordabilité.

Le point suivant dont l'ACAE veut parler est celui de la mobilité. L'alinéa 6(2)b) de la Charte canadienne des droits et libertés stipule que tout citoyen canadien et toute personne ayant le statut de résident permanent au Canada ont le droit de gagner leur vie dans toute province. L'ACAE croit que la politique de droits différentiels mise en oeuvre au Québec contrevient à la Charte canadienne des droits et libertés. Cette politique fait en sorte que les étudiants qui ne sont pas du Québec déboursent presque le double des droits qu'acquittent les résidents du Québec.

L'argument selon lequel cette politique est raisonnable du fait que les droits de scolarité pour les non-résidents sont près de la moyenne nationale ne tient pas. En Colombie-Britannique, les droits que paient les étudiants sont de beaucoup inférieurs à ceux que doivent payer les étudiants qui ne résident pas au Québec. De plus, ce qui a incité le gouvernement du Québec à adopter cette politique ne peut pas être que purement financier étant donné que les étudiantes et étudiants qui viennent de plusieurs pays versent les mêmes droits que les résidents du Québec. Parmi ces pays, mentionnons notamment l'Allemagne, l'Iran, la Corée, le Mexique, Israël et la Bolivie.

L'ACAE s'inquiète du fait que la politique du Québec à l'égard de droits différentiels puisse s'étendre à d'autres provinces en raison des pressions d'ordre financier. L'ACAE est consciente des pressions que ressentent certaines provinces en raison d'un nombre élevé d'étudiantes et d'étudiants venant d'autres provinces. Par exemple, en Alberta, l'influx net d'étudiants est de 5 718; en Nouvelle-Écosse, il est de 4 769; et au Québec, de 2 429. Une entente nationale sur les études postsecondaires pourrait aider toutes les provinces à mettre sur pied un système plus intégré et plus juste pour ce qui est de la mobilité des étudiants.

Enfin, le dernier point que je voudrais aborder est celui des possibilités. Je suis convaincu que toutes les personnes ici présentes sont relativement au courant des possibilités personnelles que crée l'EPS. À preuve, les récentes données de Statistique Canada.

À l'heure actuelle, la valeur nette médiane d'une famille dont le principal soutien économique ne possède pas un diplôme d'études secondaires est de 62 500 $, tandis que pour celui qui est titulaire d'un baccalauréat, cette valeur nette s'élève à 117 500 $. Cette valeur nette médiane est encore plus élevée chez ceux et celles qui exercent des professions libérales telles que le droit, la médecine et l'optométrie, soit 323 000 $.

Cependant, les avantages découlant de l'éducation ne sont pas uniquement pour la personne. Une population très instruite profite à chaque citoyen de cette ville, culturellement, socialement et économiquement. Le gouvernement fédéral doit jouer un rôle plus actif pour encourager ce point de vue.

À l'heure actuelle, le Canada court le risque qu'il n'y ait pas suffisamment de gens qui profitent pleinement des débouchés que procure l'EPS. Si les tendances actuelles se maintiennent, le Conference Board du Canada craint que le pays soit à court d'un million de travailleurs spécialisés d'ici 2020.

Au cours de la dernière décennie, le nombre de sans-emploi chez les jeunes s'est maintenu à près du double du taux total de chômage. On devrait se servir de l'EPS, conjugué à des stratégies d'emploi pour les jeunes, pour réduire ce taux de chômage. Le gouvernement fédéral devrait également explorer des stratégies visant à encourager un plus grand nombre de personnes à poursuivre des études postsecondaires, comme solution à long terme aux problèmes du chômage.

• 1140

En conclusion, j'aimerais signaler une fois de plus la nécessité d'une entente nationale sur l'éducation. Bien qu'il y ait de nombreux domaines de recherche qu'il reste encore à explorer pour prendre des décisions en matière de politique concernant l'accessibilité à l'EPS au Canada, personne ne peut nier l'importance cruciale du rôle de l'enseignement postsecondaire dans l'édification de notre pays. Les membres de l'ACAE croient que les études collégiales ou universitaires doivent être abordables afin que chaque personne qualifiée au Canada puisse y avoir accès.

Nous croyons également qu'un étudiant ou une étudiante doit pouvoir garder son droit à la mobilité interprovinciale pour ce qui est de l'accessibilité à l'enseignement postsecondaire. Une fois de plus, une entente nationale sur l'éducation prendrait en compte les problèmes qu'ont les étudiantes et les étudiants à passer d'une province à l'autre. Elle tiendrait également compte des préoccupations d'ordre financier de certaines provinces dans le cas des étudiantes et étudiants venant d'ailleurs.

Enfin, l'ACAE croit que le gouvernement fédéral devrait jouer un rôle de chef de file pour encourager les jeunes du pays à faire des études postsecondaires en mettant en évidence les possibilités que l'EPS crée en ce moment et en aidant à en créer de nouvelles.

Encore une fois, merci de m'avoir écouté.

Le président: Je vous remercie beaucoup. Je vous remercie, en particulier, pour les tableaux qui figurent dans votre mémoire. Ils nous seront très utiles.

J'accorde maintenant la parole à M. Jim Turk de l'Association des professeures et professeurs d'université.

M. James Turk: Je vous remercie, Peter.

Une occasion tout à fait unique s'offre aux membres de ce comité. Depuis les années 50, le Canada s'est doté d'un système d'études postsecondaires qui ne ressemble à aucun autre au monde.

L'une des principales caractéristiques de ce système est qu'il met l'accent sur la qualité. Il n'existe pas de mauvaises universités canadiennes. S'il est vrai que les ressources des établissements d'enseignement varient selon qu'ils sont de gros établissements de recherche de deuxième cycle ou de petits établissements d'enseignement des arts, mais surtout en raison du fait qu'à compter des années 50, le gouvernement fédéral a investi des sommes considérables dans la mise sur pied d'un système d'université au Canada, nous pouvons affirmer sans nous tromper que tous les étudiants canadiens peuvent acquérir une formation de qualité sans égard à la province où ils vivent et sans égard à l'université qu'ils fréquentent.

En outre, de plus en plus d'importance est accordée depuis 30 ans à la question de l'accessibilité aux études postsecondaires.

Or, ces deux caractéristiques du système sont menacées en partie en raison des mesures prises par le gouvernement fédéral et en partie en raison des mesures prises par les gouvernements provinciaux.

Le premier facteur important facteur auquel on peut attribuer la situation est celui du sous-financement actuel des établissements postsecondaires. Le deuxième, qui est lié au premier, est celui de l'accroissement phénoménal des frais de scolarité. Le troisième a trait à l'élimination des bourses provinciales destinées aux étudiants. Plusieurs conséquences peuvent être attribuées à l'influence combinée de ces facteurs, mais je me contenterai d'insister sur l'une d'entre elles aujourd'hui.

La situation dont je veux vous entretenir a trait à la création de différentes catégories d'universités sur le modèle américain. En effet, aux États-Unis, il existe quelques merveilleuses universités, un certain nombre de bonnes universités dont la qualité est inférieure, et de nombreuses qui sont inadéquates. Cette situation n'existait pas jusqu'ici au Canada. Par le rôle qu'il a joué dans le domaine de l'enseignement postsecondaire, le gouvernement fédéral, a empêché que la situation qui prévaut aux États-Unis n'existe au Canada. Or, nous risquons de connaître la même situation au Canada sous peu parce que le gouvernement fédéral n'a pas accordé les fonds de base voulus aux universités.

J'aimerais maintenant vous parler de la question de l'accessibilité aux études postsecondaires. Les intervenants précédents ont fait allusion au fait que les familles canadiennes à revenu faible et moyen revenus ont de moins en moins accès aux études postsecondaires. Comme l'a fait remarquer Ian Boyko de la Fédération canadienne des étudiantes et des étudiants, ces données ne vont pas au-delà de 1994. Nous ne disposons pas de données plus récentes de Statistique Canada sur la question alors que les frais de scolarité ont le plus augmenté après 1994. On peut présumer que l'écart dans l'accessibilité constatée entre 1989 et 1994 s'est accru. Si vous abordez la question avec vos électeurs, je suis sûr qu'ils vous diront qu'ils craignent de ne pas pouvoir se permettre d'envoyer leurs enfants au collège ou à l'université.

À cela s'ajoute le fait que ces familles ne sont pas en mesure de faire des économies en vue des études postsecondaires. Comme les intervenants précédents l'ont fait remarquer, 85 p. 100 des Canadiens qui ont un revenu inférieur à 30 000 $ par année voudraient économiser en vue de pouvoir payer à leurs enfants des études, mais seulement 18 p. 100 d'entre eux peuvent le faire. Or, 95 p. 100 des personnes ayant un revenu supérieur à 80 000 $ veulent la même chose et plus du tiers sont en mesure de le faire.

La situation relative à l'accessibilité ne s'est pas véritablement améliorée malgré les objectifs louables que se fixent les programmes fédéraux comme le régime enregistré d'épargne-études et la Fondation des bourses du millénaire.

• 1145

Le gouvernement fédéral propose de favoriser la formation spécialisée par l'intermédiaire des régimes enregistrés d'épargne- études et des comptes d'apprentissage, ce qui est une façon moins que sensée de corriger la situation que nous déplorons. Les Canadiens démunis, les Canadiens sans emploi et les Canadiens qui occupent des emplois marginaux sont moins bien placés que les autres pour économiser en vue de financer leur propre formation. De la même façon, les familles canadiennes à faible revenu sont celles qui sont les moins en mesure d'investir de l'argent dans un régime enregistré d'épargne-études même si la contribution du gouvernement fédéral à ces régimes est de 20 p. 100.

Nous estimons que les programmes enregistrés d'épargne-études coûtent des centaines de millions de dollars au gouvernement fédéral tant en raison de sa contribution directe à ces régimes qu'en raison du fait qu'ils constituent une dépense fiscale. Comme je le dirai en conclusion, nous pensons que cet argent pourrait être utilisé à de meilleures fins.

L'Association canadienne des professeures et professeurs d'université a demandé à la maison Decima de mener un important sondage national afin d'établir l'opinion des Canadiens sur le rôle que joue le gouvernement fédéral dans le domaine des études postsecondaires. Je ferai parvenir au comité des exemplaires de ce sondage.

Les deux tiers des Canadiens ont dit être mécontents du rôle que le gouvernement fédéral a joué ces dernières années dans le domaine des études postsecondaires. Nous avons demandé aux personnes interrogées quel palier de gouvernement devrait avoir la responsabilité première pour ce qui est du financement des études postsecondaires et à notre surprise—comme 2 000 personnes ont participé à cet important sondage, il nous est possible de ventiler les données par région—une majorité de personnes dans chaque province ont affirmé que ce devrait être le gouvernement fédéral. Nous avons soumis un certain nombre d'options aux participants au sondage pour accroître l'accessibilité aux études postsecondaires comme l'octroi d'un plus grand nombre de bourses fondées sur le mérite et de bourses fondées sur les besoins, une augmentation du financement de base et l'amélioration des programmes de prêts. Le premier choix des participants au sondage a été d'augmenter le financement de base accordé aux universités pour que celles-ci n'aient pas à augmenter leurs frais de scolarité. Le deuxième choix des participants était d'accroître le nombre de bourses fondées sur les besoins. Or, il s'agit de deux options que le gouvernement fédéral n'a pas retenues.

Nous avons plusieurs recommandations à vous formuler. Premièrement, nous recommandons que le gouvernement fédéral augmente le financement de base accordé aux universités. Comme l'a dit mon collègue Robert Giroux de l'AUCC, trois facteurs doivent être pris en compte lorsqu'on étudie la question de l'accessibilité: l'accès, la capacité et la qualité. Ces trois facteurs vont de pair. Il ne sert à rien d'améliorer l'accès à un système de mauvaise qualité. Or, nous n'aurons pas un système de qualité si les établissements d'enseignement n'ont pas les capacités voulues. Il ne sert cependant à rien d'avoir un système de qualité s'il n'est pas accessible à tous les Canadiens.

Je ne mets pas en doute la volonté de ce gouvernement de prendre les mesures qui s'imposent pour créer ce genre de système. La difficulté, c'est de trouver les fonds voulus. Le TCSPS a constitué un obstacle à cet égard parce que le gouvernement fédéral fait face à un dilemme. Rien ne l'assure que s'il augmente le TCSPS, cet argent sera investi dans le domaine des études postsecondaires. En fait, les gouvernements provinciaux ont déjà utilisé ce transfert à d'autres fins. Cela n'incite donc pas le gouvernement fédéral à relever le TCSPS.

L'Association canadienne des professeures et des professeurs d'université a proposé au gouvernement—et nous vous transmettrons des exemplaires de cette proposition—une loi sur les études postsecondaires s'inspirant de la Loi canadienne sur la santé. Nous pensons que l'adoption d'une telle loi nous permettrait d'atteindre les objectifs que nous visons tous et de nous doter d'un système d'éducation de grande qualité.

Nous recommandons également de remplacer le programme actuel de REEE par un régime élargi de bourses fondées sur les besoins. À notre sens, le gouvernement utiliserait ainsi les fonds dont il dispose de façon plus équitable.

Enfin, nous souscrivons à la recommandation faite par la Fédération canadienne des étudiantes et des étudiants qui presse le gouvernement de cesser de permettre que les emprunteurs étudiants soient traités de façon discriminatoire. Je peux m'adresser à la banque et emprunter 50 000 $ et le perdre d'un seul coup au Casino de Hull et rien ne m'empêche ensuite de déclarer faillite. Si j'emprunte la même somme d'une banque ou du programme canadien des prêts aux étudiants, et je dépense cet argent pour faire des études à l'université, je ne peux pas déclarer faillite si je ne parviens pas à trouver un emploi me permettant de rembourser cette dette. Il ne s'agit pas d'une politique publique avisée.

Voilà donc les recommandations que nous soumettons au comité.

Merci, monsieur le président.

Le président: Merci, Jim, pour vos commentaires.

Je vais maintenant céder la parole à Bill Easton du groupe de travail de l'Association médicale canadienne sur les frais de scolarité. Je sais, Bill, que vous portez une attention particulière à la question des frais de scolarité. Nous vous remercions d'être venu ici aujourd'hui.

M. William Easton: Merci, monsieur le président, membres du comité. Je suis très heureux d'être ici pour représenter le Dr Peter Barrett, qui est le directeur de l'Association médicale canadienne. Comme on vient de dire, je préside le groupe de travail de l'Association médicale canadienne sur les frais de scolarité, et je suis médecin ontarien à temps plein.

• 1150

L'Association médicale canadienne se préoccupe beaucoup des frais de scolarité pour les programmes de médecine de premier cycle au Canada, frais qui sont déjà très élevés et qui continuent à augmenter très rapidement. L'AMC est d'avis que ces frais de scolarité élevés configurés à une d'aide financière insuffisante vont avoir des répercussions négatives sur les étudiants en médecine actuels et à venir et également sur le régime de soins de santé canadien et l'accès aux services médicaux.

Mon exposé porte sur trois questions clés qui, selon notre association, influent profondément sur l'accès aux études médicales. Premièrement, l'augmentation sans précédent des frais de scolarité. Depuis cinq ans, les frais de scolarité moyens de première année dans les 16 écoles de médecine au Canada ont doublé. Actuellement, les frais de scolarité de trois des cinq écoles de médecine en Ontario sont d'au moins à 10 000 $; à l'université Dalhousie en Nouvelle-Écosse, ils sont de 8 000 $ et de 7 000 $ au Manitoba.

Si on ajoute les frais de base tels que la nourriture, le logement, le transport et les instruments médicaux—que l'AMC estime à approximativement 13 000 $ pour la première année d'études en médecine—aux frais de scolarité, il aurait fallu à un étudiant de première année en médecine à l'Université de Toronto plus de 27 000 $ pour cette année. En comparant ce chiffre à l'aide financière maximale provenant du programme canadien des prêts canadien aux étudiants et le régime d'aide financière aux étudiantes et étudiants de l'Ontario qui s'élève à environ 15 800 $ par an, il est évident qu'on ne répond pas aux besoins financiers des étudiants.

J'aimerais maintenant parler de la question de l'épargne pour l'éducation. Selon une étude de Statistique Canada, la plupart des parents espèrent que leurs enfants vont aller soit à l'université soit au collège. Cependant, plus de 50 p. 100 de ces parents n'ont pas fait d'économies pour financer les études postsecondaires. Selon des estimations de DRHC, un programme de baccalauréat ès arts exige une économie mensuelle allant de 150 $ par mois pendant 18 ans à 350 $ par mois pendant 8 ans à presque 1 000 $ par mois pendant 3 ans. J'aimerais souligner que ces chiffres représentent l'épargne nécessaire par enfant.

Il est probable que la plupart des parents ne pourront pas économiser de telles sommes. Par conséquent, les étudiants doivent se tourner vers les gouvernements ou des emprunts bancaires à un taux d'intérêt élevé. Ces étudiants terminent leurs études avec une lourde dette. La perspective de s'endetter davantage pour poursuivre des études en médecine peut décourager beaucoup d'étudiants qualifiés.

Enfin, j'aimerais parler des conséquences des frais de scolarité élevés. Le fait qu'il y ait des obstacles d'ordre économique à la poursuite d'études médicales menace la diversité des médecins de demain. Le phénomène de l'endettement écrasant peut exacerber l'exode des cerveaux vers les États-Unis, où les médecins peuvent rembourser leur dette beaucoup plus rapidement.

Bref, il est clair que l'augmentation draconienne des frais de scolarité pour les études médicales va créer un obstacle majeur pour beaucoup de Canadiens. L'Association médicale canadienne pense que le gouvernement fédéral devrait jouer un rôle clé pour assurer un accès équitable aux programmes d'études médicales. Nous croyons aussi que le gouvernement fédéral devrait travailler avec ses vis- à-vis provinciaux et territoriaux pour mettre en oeuvre les recommandations suivantes.

Premièrement, pour atténuer les pressions qui font augmenter les frais de scolarité, le gouvernement fédéral devrait accroître les paiements de transfert aux provinces et aux territoires, en affectant des crédits pour l'éducation postsecondaire.

Deuxièmement, toute augmentation de frais de scolarité devrait être réglementée et raisonnable.

Troisièmement, les régimes d'aide financière pour les étudiants doivent être exempts de toute coercition; ils doivent être mis au point en parallèle avec toute augmentation des frais de scolarité ou à l'avance; ils doivent être directement proportionnels aux augmentations des frais de scolarité; et ils doivent être à la hauteur des besoins des étudiants.

Merci, monsieur le président.

Le président: Merci beaucoup. Encore une fois, merci à nos témoins. Nous vous savons gré de vos témoignages.

C'est au tour de Lucille Auffrey,

[Français]

directrice générale de l'Association des infirmières et infirmiers du Canada. Lucille.

Mme Lucille Auffrey: Merci, monsieur le président. Bonjour à vous, membres du comité.

Je voudrais d'abord vous remercier pour l'occasion qui nous est donnée de discuter avec vous des enjeux importants auxquels fait face la profession infirmière. Je représente aujourd'hui les intérêts de 110 000 membres et ceux de notre présidente, la docteure Ginette Lemire Rodger.

• 1155

Étant donné que vous avez une copie de notre présentation, j'aimerais peut-être aller tout de suite à la page 6 du document puisque pour nous, le sujet de l'heure est certainement les coûts de l'éducation postsecondaire et l'accès qu'on y a.

[Traduction]

Pour les infirmières et infirmiers du Canada, l'accès signifie les connaissances exactes, dans le délai voulu et dans le respect des impératifs financiers. Pour ce qui est de l'enseignement des connaissances, le sous-ministre de la Santé de la Nouvelle-Écosse fait un portrait assez désolant mais utile des difficultés qu'éprouvent les professionnels de la santé au niveau de l'éducation permanente postsecondaire. Il dit que le secteur de la santé est une industrie où des idées neuves apparaissent à toutes les demi-heures, mais où le programme d'études prend au moins deux années à changer, et où, j'ajouterais, des professions mieux rémunérées et moins exigeantes livrent une concurrence très forte au niveau du recrutement.

Peter Drucker a dit que les infirmières et les infirmiers sont les premiers travailleurs du savoir. Les sciences infirmières se pratiquent dans les hôpitaux, au niveau communautaire et au foyer. Les infirmières et infirmiers travaillent de façon autonome et en équipes. Ils pratiquent leur métier dans des régions rurales et très éloignées, aussi bien qu'en milieu urbain. Les infirmières et infirmiers soignent des personnes qui sont malades et conseillent les gens sur les façons de rester en santé, et ils sont aux prises avec des décisions de vie ou de mort. Cela dit, on voit aisément pourquoi les sciences infirmières nécessitent l'utilisation du savoir scientifique, de valeurs déontologiques et de compétences déontologiques et analytiques que l'on acquiert normalement dans des programmes universitaires.

Aujourd'hui, comparativement à l'époque où j'ai entrepris mes études postsecondaires, de nombreuses options professionnelles s'offrent à tous, particulièrement aux femmes. Malheureusement, je dois dire que la profession infirmière demeure encore aujourd'hui essentiellement féminine. Mes choix de carrière sont limités en outre par des considérations financières. Hier comme aujourd'hui, les réalités financières influent sur les choix de carrière. Les sciences infirmières et l'enseignement étaient les deux options qui étaient abordables à l'époque. Même là, il m'a fallu travailler cinq ans avant d'avoir les moyens d'entrer dans un programme universitaire de sciences infirmières. Ce n'est pas ce que les parents canadiens veulent pour leurs enfants aujourd'hui, et ce n'est pas ce que les étudiants d'aujourd'hui veulent.

Je crois que le potentiel salarial des infirmières et infirmiers demeure limité pendant leur carrière, par rapport à d'autres professions. Ce potentiel salarial limité est considéré comme un obstacle pour ceux qui décident de faire carrière en sciences infirmières, particulièrement étant donné qu'il faut tenir compte du fait que 42 p. 100 des infirmières et infirmiers qui reçoivent leur diplôme aujourd'hui ne trouvent encore que du travail à temps partiel. C'est inacceptable pour nous. En outre, le coût de l'éducation permanente n'est pas considéré au titre des déductions d'impôt pour les infirmières comme c'est le cas pour d'autres professions. Il faut agir si l'on veut éliminer les obstacles financiers pour ceux qui décident de faire carrière dans le milieu infirmier.

Comment allons-nous faciliter l'accès à l'éducation postsecondaire? Comment peut-on rapprocher l'éducation de la recherche pointue? Quel rôle l'éducation postsecondaire peut-elle jouer dans cet environnement spécialisé qui évolue rapidement? Comment l'éducation postsecondaire peut-elle aider les professionnels de la santé à acquérir les connaissances et les compétences liées aux avancées technologiques et, ce qui est tout aussi important, à la pratique?

Du point de vue de l'AIIC, les réponses à ces questions résident dans une stratégie nationale et dans des relations fédérales-provinciales améliorées à cet égard, si importantes pour les Canadiens. Nous croyons que le Canada a besoin de stratégies nationales qui soient responsables et dynamiques pour le recrutement, l'intégration et la rétention des professionnels de la santé.

Cette stratégie nationale doit être axée sur l'accès à l'éducation postsecondaire. Elle doit assurer l'égalité des chances entre toutes les provinces pour les gens qui envisagent de faire carrière dans le secteur de la santé. Elle doit assouplir les programmes postsecondaires; je parle d'une souplesse qui permettrait au contenu des cours de prendre en compte les nouvelles preuves scientifiques et les avancées technologiques; et il faut de la souplesse au plan de l'inscription des étudiants. Nous croyons qu'il faut s'inspirer de l'expérience des autres pays, où l'on permet aux gens d'obtenir un diplôme d'études postsecondaires tout en continuant d'assumer d'autres fonctions dans le secteur de la santé.

• 1200

Une stratégie pancanadienne doit toujours s'assurer que dans toutes les provinces, dans les régions urbaines aussi bien que rurales, les travailleurs du savoir—dont les professionnels de la santé—ont accès aux possibilités de l'éducation permanente. Pour que cela se fasse, le savoir—soit les preuves scientifiques, la recherche pointue et l'apprentissage—doit être accessible. Une stratégie pancanadienne doit surmonter les obstacles liés à la géographie, à la charge de travail et aux coûts. Elle doit s'inspirer de l'expérience des industries autres que celles de la santé, des industries où les employeurs travaillent de concert avec le milieu universitaire pour offrir un apprentissage en ligne sur le lieu de travail. Et une stratégie pancanadienne contribuerait à la formation de travailleurs de la santé très compétitifs et productifs, dans un secteur qui peut attirer et retenir les infirmières et infirmiers ainsi que les autres professionnels de la santé dans un contexte de concurrence mondiale.

Enfin, une stratégie pancanadienne doit être axée sur trois missions importantes pour progresser: améliorer l'accès en fournissant aux personnes de l'aide au niveau des frais de scolarité pour l'éducation de base et permanente; faciliter l'accès à la technologie et aux programmes d'apprentissage en ligne; et lier la recherche pointue au développement curriculaire et à la pratique.

Ce que moi-même et d'autres avons défini aujourd'hui est un programme ambitieux pour un gouvernement fédéral qui jouit d'une position unique pour prendre en charge l'élaboration et la mise en oeuvre d'une stratégie pancanadienne de recrutement, d'intégration et de rétention des professionnels de la santé. Je crois que le secteur canadien de la santé est bien placé dans certains domaines étant donné que le gouvernement fédéral a créé une infrastructure de recherche très dynamique avec les instituts canadiens de recherche en santé, la Fondation canadienne pour l'innovation, les centres d'excellence et le Fonds canadien de la recherche sur les services de santé, mais nous devons faire davantage.

Je répondrai volontiers à vos questions.

[Français]

Je vous remercie.

Le président: Je te remercie beaucoup.

[Traduction]

Vous comprenez que nous, parlementaires, sommes très heureux de vous recevoir avec l'AMC parce que cela nous permet d'entendre des vues très représentatives, particulièrement dans le domaine de l'éducation et de la recherche dans le secteur de la santé. Donc merci beaucoup.

Le prochain témoin

[Français]

est Arpi Hamalian, présidente de la Fédération québécoise des professeures et professeurs d'université.

Mme Arpi Hamalian: Monsieur le président, merci beaucoup. On remercie les membres du comité de cette invitation et on est conscients du rôle central que ce comité peut jouer dans l'amélioration de la situation de l'éducation postsecondaire au Canada.

Alors, nos remarques sont basées sur une vision de l'université comme service public. Le point d'ancrage et le socle de cette définition, c'est l'université au service de toutes et de tous, l'université du bien commun et du patrimoine collectif, l'université de la réussite et de la qualification. Ce n'est pas l'université-client; c'est l'université-citoyen. Cette définition, qu'il faut élaborer et proposer, c'est l'université comme service public.

Dans le texte, dont j'ai des copies, nous élaborons dix caractéristiques qui définissent les contours de l'université comme service public, mais je vais les passer pour le moment. Pour ceux qui ont besoin du texte, j'en ai des copies.

D'abord, il faut faire un rappel des engagements de 1976 et faire appel à l'abolition des frais de scolarité pour l'éducation postsecondaire. En 1976, le Canada a signé la Convention des Nations Unies sur les droits économiques, sociaux et culturels s'engageant ainsi à l'élimination des frais de scolarité pour l'enseignement postsecondaire.

L'engagement du Canada était de rendre l'enseignement supérieur également accessible à tous et à toutes par les moyens appropriés et en introduisant progressivement le libre accès à l'éducation postsecondaire par l'abolition des frais de scolarité.

Vingt-cinq ans après, les frais de scolarité sont en hausse et l'endettement étudiant atteint des sommets sans précédent.

Maintenant que le gouvernement fédéral et la majorité des provinces ont atteint le déficit zéro et qu'aux deux paliers de gouvernement il existe des surplus budgétaires impressionnants, il est temps d'abolir les frais de scolarité dans toutes les universités canadiennes.

• 1205

L'accessibilité passe par la garantie d'un financement de base. On a déjà souligné ce point à plusieurs occasions, et nous le répétons. L'université est un service public parce que l'éducation et la formation des jeunes, jusqu'à et y compris le niveau universitaire, sont des responsabilités publiques et parce que l'État doit veiller à la formation de personnes libres, responsables et critiques, actives et engagées dans la société.

À ce titre, l'État, aux deux paliers, est donc engagé face aux universités. L'État doit donc favoriser par tous les moyens la plus large accessibilité des jeunes à l'université. Toutes les études démontrent que le taux de persévérance des jeunes est d'autant plus élevé qu'ils se consacrent à leurs études à temps plein.

La garantie d'un financement de base adéquat est nécessaire pour faciliter aussi l'accès à l'éducation postsecondaire des autochtones et des personnes handicapées, groupes dont l'intégration et le succès doivent passer par des programmes d'encadrement systématiques et dont le suivi est assuré sur plusieurs années.

L'accessibilité passe par l'épanouissement de toutes les disciplines. Ce n'est pas juste par le biais économique, mais aussi par toutes sortes de moyens pervers qu'on peut faire obstacle à l'accessibilité. Dans la formation universitaire primaire, toutes les disciplines doivent pouvoir s'épanouir: les arts, les sciences humaines et sociales, les sciences de la santé, les sciences de l'éducation, les sciences pures et appliquées.

Dans une politique gouvernementale, l'État doit donc s'engager à ce qu'un financement public suffisant soit assuré pour toutes les disciplines universitaires. Si on oriente l'enseignement universitaire vers la formation d'une main-d'oeuvre spécialisée, prétendument prête à entrer sur le marché du travail dans les domaines où les besoins sont les plus marqués, on court le risque de limiter terriblement le contenu de l'enseignement universitaire, d'en dévaloriser le statut. À long terme, on pourrait même envisager la disparition de tout un pan de l'activité professorale universitaire, remplacée par un enseignement à distance conçu, programmé, géré sur mesure pour des clientèles étudiantes particulières, ciblées.

Le renouvellement et le recrutement du corps professoral sans ciblage particulier: une garantie à l'accessibilité. Mes collègues, en particulier l'AUCC, ont déjà mentionné ce point. Il faut absolument privilégier l'engagement des professeurs dans toutes les disciplines qui forment vraiment l'université à la base. Un financement de base aux universités est important pour assurer ce type d'accessibilité parce que s'il y a des disciplines où on n'a pas de professeurs, c'est aussi une façon de limiter l'accessibilité au savoir et aux connaissances.

La qualité passe par l'accessibilité. Sur le fond de compressions budgétaires, l'accessibilité est attaquée au nom de la qualité. Prononcé comme une invitation à la sélection et au contingentement des programmes universitaires, le plaidoyer de la qualité ne parvient pas cependant à occulter la réalité des choses. Les ratios étudiants-professeurs continuent de se détériorer, le nombre de professeurs réguliers diminue radicalement, les bibliothèques et les équipements scientifiques sont insuffisants ou se dégradent et la précarité d'emploi, devenue le moyen systémique privilégié d'adaptation aux contraintes financières, se répercute sur l'encadrement et la qualité générale de la formation des étudiantes et des étudiants.

La Fédération québécoise des professeures et professeurs d'université rejette toute proposition visant à différencier le droit de scolarité en fonction des secteurs disciplinaires aussi bien que celles qui préconisent de fixer ces droits en fonction des perspectives d'emploi ou de revenus. La fédération n'accorde pas davantage son appui à la thèse selon laquelle il y aurait lieu de différencier les droits de scolarité selon les cycles d'étude, et elle rejette avec encore plus de vigueur les suggestions de libéraliser les droits de scolarité, c'est-à-dire de laisser à chaque établissement le soin de fixer ces droits, solution qui contribuerait à hiérarchiser les universités en conférant une plus ou moins grande valeur économique aux diplômes qu'elles décernent.

• 1210

La mobilité nationale et internationale. Tout d'abord, l'abolition de frais de scolarité favorisera la mobilité des étudiantes et des étudiants canadiens au-delà des frontières provinciales en assurant l'égalité des chances et de l'accessibilité à toutes et à tous.

Deuxièmement, la déréglementation des droits de scolarité pour les étudiants étrangers. La fédération s'oppose à ce genre de déréglementation. Cette mesure vient assombrir le rôle et la mission qu'ont voulu se donner les provinces et le Canada au plan international à titre d'État faisant partie des pays plus favorisés.

Ce genre de disposition peut aussi entraîner un autre effet pervers, soit celui de créer un système universitaire à deux vitesses: les universités plus riches, par exemple celles qui disposent d'imposants fonds de dotation, pouvant plus facilement imposer ce genre de frais de scolarité additionnels, contrairement aux universités moins riches.

Troisièmement, les bourses aux étudiants canadiens pour des études à l'extérieur d'une province ou du Canada. La fédération se réjouit de ces initiatives, mais les enveloppes consacrées à ce volet demeurent trop modestes dans les provinces et au fédéral. De plus, il faut bien voir que les montants qui sont octroyés ne constituent qu'un complément insuffisant qui va pénaliser inévitablement les étudiants pauvres dont les familles ne pourront supporter la part importante des autres frais.

Finalement, les Canadiens réclament le financement public pour l'enseignement postsecondaire. Les sondages menés par Decima pour l'ACPPU, et par CROP pour la FQPPU affirment la conviction très répandue de la majorité de la population que l'enseignement postsecondaire doit être financé par l'État.

À l'heure actuelle, l'action la plus positive du gouvernement fédéral serait de redonner aux provinces la juste part des fonds qui leur reviennent afin qu'elles soient en mesure d'assumer de nouveau leurs responsabilités au chapitre de l'enseignement et de la recherche universitaire, deux missions indissociables, ainsi qu'au service à la communauté, la troisième mission de l'université.

Dans ce sens, nous avons appuyé la démarche de nos collègues de l'ACPPU pour une discussion publique sur la manière de faire le transfert sur le modèle des transferts de la santé.

La fédération réclame de l'État, et avec force, qu'il assume la responsabilité politique de ne pas faire de l'éducation postsecondaire une marchandise.

Nous pensons que l'État ne peut ignorer que la démocratisation de l'enseignement supérieur qu'il semble souhaiter, soit l'accès aux études pour ceux qui en ont la capacité et la volonté, passe par une prise en compte du coût des études et, donc, de la condition économique des étudiants, plus endettés aujourd'hui que jamais. Il est clair que là aussi, et peut-être surtout, l'investissement de l'État est vital. Il en va de notre avenir.

Vous avez une tâche et des responsabilités lourdes.

Merci beaucoup.

Le président: Merci beaucoup, Arpi.

[Traduction]

Le prochain témoin est Frank Smith, coordonnateur national de l'Association nationale des étudiants handicapés au niveau postsecondaire.

Frank.

M. Frank Smith: Merci.

Je profite de l'occasion pour remercier les membres du comité d'avoir invité notre organisation à venir discuter de cette question importante. L'Association nationale des étudiants handicapés au niveau postsecondaire—l'ANEHNP—a été fondée en 1986 pour représenter les étudiants handicapés au niveau postsecondaire du Canada. L'association a son siège social à Ottawa, un groupe provincial membre au Québec et un réseau de groupes d'étudiants handicapés sur les campus ainsi que des comités d'accessibilité partout au pays.

L'association est régie par un conseil d'administration composé d'étudiants handicapés et compte des représentants de toutes les provinces et territoires.

Je mentionne quelques-unes de nos affiliations, nous sommes groupe membre du Conseil des Canadiens avec déficiences et nous siégeons au Groupe consultatif national sur l'aide financière aux étudiants de DRHC et au Conseil sur l'accès à l'information pour les Canadiennes et les Canadiens incapables de lire les imprimés.

Étant donné que mon temps de parole est limité, je tâcherai d'être assez bref ce matin. Le sujet de votre séance—soit l'accès à l'éducation postsecondaire, au financement et à la mobilité—rejoint directement le travail qu'accomplit notre association. L'ANEHNP et ses membres font valoir la nécessité d'élargir l'accès à l'éducation collégiale et universitaire en consultation avec les gouvernements et dans nos rencontres locales et nationales.

Au cours des deux dernières années, l'ANEHNP a lancé une grande initiative visant à établir un répertoire national complet des programmes d'aide financière pour les études postsecondaires. Ce répertoire a été mis au point grâce à la contribution importante des étudiants et est accessible en ligne sur le site Web de notre association.

Nous croyons qu'il importe d'offrir des informations détaillées sur les programmes afin d'aider les personnes avec des déficiences à poursuivre leurs études postsecondaires, étant donné que ces programmes varient grandement d'une région à l'autre du pays.

• 1215

D'ailleurs, la publication du rapport À l'unisson 2000: une approche canadienne concernant les personnes handicapées par les ministres des services sociaux fédéral, provinciaux et territoriaux à la fin de mars revêt de l'importance pour nos discussions à cette séance-ci.

À l'unisson 2000 se fonde sur un processus de consultation auprès des organisations de personnes handicapées qui a eu lieu l'année dernière. Des membres de notre conseil d'administration ont pris part à ces consultations. Ce rapport illustre bien l'importance de la scolarité pour participer au marché du travail canadien, et la qualifie de droits civiques des Canadiens handicapés.

Le document indique également que les personnes handicapées sont de plus en plus nombreuses à faire des études postsecondaires. Parallèlement, le rapport mentionne des écarts dans l'accès aux programmes, au financement, aux services et au soutien pour les personnes handicapées partout au pays, et l'on explique comment cela peut susciter des obstacles et des inégalités.

Pour l'ANEHNP et ses membres qui sont étudiants et diplômés du niveau postsecondaire partout au Canada, il y a plusieurs problèmes importants qui sont au coeur du travail de notre organisation. À l'heure actuelle où un plus grand nombre de personnes handicapées reconnaissent les avantages de l'éducation pour leur avenir, l'accès à un financement suffisant pour faire des études collégiales et universitaires pose encore un problème pour nombre d'entre eux.

En 1999, l'ANEHNP a publié une étude intitulée Working Towards a Coordinated National Approach to Services, Accommodations, and Policies for Post-Secondary Students Disabilities. Près de 400 étudiants et 70 prestateurs de services sur les campus ont pris part à la recherche. Partant des constatations de l'étude et des problèmes d'accès identifiés par les étudiants handicapés dans le milieu postsecondaire partout au Canada, plusieurs recommandations ont été faites dans le chapitre qui conclut l'étude. Voici les principales recommandations.

La prestation de services aux personnes handicapées doit recueillir l'aval entier des établissements postsecondaires et des gouvernements et doit se traduire par des ressources financières et humaines suffisantes pour répondre aux besoins des étudiants. L'accessibilité des collèges et universités est une considération très importante lorsque les personnes handicapées choisissent un établissement postsecondaire, mais il est évident que le choix du programme de formation générale demeure la priorité numéro un.

Par conséquent, si l'on veut que les étudiants handicapés du Canada atteignent leurs objectifs universitaires, il faut mettre sur pied un réseau aussi large que possible de collèges et universités pleinement accessibles et prévoir un financement suffisant pour combler les besoins de ces étudiants. L'accessibilité à l'éducation postsecondaire ne sera possible que si l'on augmente les paiements de transfert fédéraux, si les gouvernements provinciaux affectent des ressources aux collèges et universités, et si les universités s'engagent individuellement à assurer et à améliorer l'accès physique aux services et aux lieux pour tous les étudiants handicapés.

Les étudiants handicapés doivent avoir accès à des services et des programmes que n'offre pas toujours leur province d'origine. Ils doivent avoir accès à l'éducation qui soit la meilleure et la plus indiquée pour eux, peu importe où ils se trouvent. Par conséquent, le soutien aux étudiants handicapés doit être entièrement transférable, et ces étudiants doivent conserver le droit de changer de province pour acquérir leur formation.

Le rapport À l'unisson propose des solutions à certains problèmes que pose la transférabilité des services et du financement. D'ailleurs, avec la mise en oeuvre de l'aide à l'employabilité des personnes handicapées—le programme AEPH—qui met l'accent sur l'employabilité, le soutien accordé aux études postsecondaires dans plusieurs provinces est inférieur à ce qu'il était en vertu de l'ancien programme PRPPH. En Ontario, par exemple, le programme PUSPH ne prévoit aucun soutien pour les études postsecondaires.

Dans le domaine de l'aide financière, le programme canadien de prêts aux étudiants et ses Subventions canadiennes pour études assure des subventions aux étudiants handicapés qui peuvent atteindre jusqu'à 5 000 $ par année de prêt, mais cette aide financière est réservée au soutien éducatif propre à certains handicaps, aux services et au matériel, et seulement les étudiants admissibles à un prêt canadien aux étudiants y ont droit. En fait, les étudiants handicapés doivent avoir beaucoup plus accès à des subventions qu'à des prêts s'ils veulent acquérir une éducation postsecondaire sur un pied d'égalité, étant donné les coûts supplémentaires qu'impose un handicap lorsqu'on est aux études, et étant donné le fait qu'il faut plus de temps pour compléter un programme d'études lorsqu'on a un handicap. De même, il est beaucoup plus difficile d'obtenir un emploi après qu'on a obtenu son diplôme, et pour cette raison, les personnes handicapées sont particulièrement désavantagées par la lourde dette qu'ont les étudiants dans notre système de prêt.

Donc quels sont les problèmes auxquels font face en ce moment certains groupes d'étudiants handicapés? Même si l'on fait des progrès, de nombreuses universités, surtout les grands campus où l'on trouve de vieux édifices, ont encore beaucoup de mal à assurer l'accès physique. Les personnes en difficulté d'apprentissage constituent aujourd'hui le plus grand groupe d'étudiants handicapés dans les collèges et universités, et cependant, ils ont encore souvent à assumer des dépenses énormes pour les évaluations diagnostiques qu'exigent la plupart des universités pour que ces étudiants puissent profiter des aménagements nécessaires.

• 1220

On a annoncé dans le budget fédéral de 2000 que l'on assumerait jusqu'à 1 200 $ du coût d'une évaluation diagnostique et que cela deviendrait une dépense déductible d'impôt relativement à l'éducation dans le cadre des subventions canadiennes pour études pour les étudiants ayant un handicap permanent, ce qui est un pas dans la bonne voie. Cependant, cette aide n'est offerte qu'aux étudiants admissibles au PCPE. Au Québec, qui a autrement un excellent programme de bourses pour les étudiants handicapés, le gouvernement n'admet toujours pas que les étudiants en difficulté d'apprentissage ont droit au soutien.

Les étudiants canadiens qui sont aveugles ou ont un handicap visuel ont du mal à avoir accès à des textes sur des supports alternatifs pour leurs études. Parallèlement, il faut plus de ressources pour soutenir des centres de technologie adaptative pleinement équipés sur nos campus. Il y a aussi de sérieux problèmes pour les étudiants malentendants dans le système postsecondaire. On manque d'interprètes gestuels qualifiés dans notre pays, et dans de nombreuses provinces, les fonds sont insuffisants pour assumer le coût des services d'interprète. Il n'existe aucun financement gouvernemental pour les interprètes gestuels et les sous-titreurs dans les écoles professionnelles privées. Il devient également de plus en plus difficile d'obtenir de l'aide financière pour étudier dans les grandes universités américaines, dont l'université Gallaudet.

Ce ne sont là que quelques-uns des problèmes que les membres de votre comité devraient étudier aujourd'hui et dans vos délibérations futures. L'Association nationale des étudiants handicapés au niveau postsecondaire sera heureuse de travailler avec vous pour remédier à ces problèmes afin de s'assurer que les personnes handicapées du Canada aient des chances égales de réussite dans le milieu postsecondaire et occupent un jour la place entière qui leur revient sur le marché de l'emploi.

Encore merci.

Le président: Et merci à vous aussi. Vous avez abordé un aspect très important de l'accès, et je suis très heureux que la présidente de notre sous-comité des personnes handicapées, Caroline Bennett, soit présente. Je sais que son comité a entendu certains arguments que vous avez formulés auparavant, nous vous sommes donc très reconnaissants d'être ici aujourd'hui.

Le dernier témoin, et sans aucun doute le plus important, est Claude Paul Boivin. Je vous dois des explications. Claude représente aujourd'hui la Coalition des associations professionnelles nationales au sujet des frais de scolarité, qui est, comme son nom l'indique, une coalition rassemblant toutes les professions qui se préoccupent des frais de scolarité élevés. Mais dans la vraie vie, il est le directeur administratif de l'Association canadienne des médecins vétérinaires.

Claude Paul Boivin.

M. Claude Paul Boivin: Merci beaucoup, monsieur le président.

La Coalition des associations professionnelles nationales au sujet des frais de scolarité, la CAPNFS, rassemble neuf associations nationales qui se préoccupent de l'effet néfaste des frais de scolarité élevés sur l'accès à l'éducation. Notre association se préoccupe également, monsieur le président, de la menace consécutive qui pèse sur le réservoir de professionnels chargés de combler les besoins du public canadien.

Dans mes observations aujourd'hui, je m'en tiendrai à trois aspects: premièrement, la combinaison des frais de scolarité élevés et de l'endettement élevé des étudiants qui en résulte, constitue un obstacle socio-économique réel à l'éducation universitaire et aux programmes professionnels; deuxièmement, l'endettement élevé des étudiants risque d'accroître l'exode des cerveaux, vers les États-Unis; et troisièmement, les frais de scolarité élevés, à notre avis, exercent des pressions indues sur les étudiants dans les programmes professionnels.

[Français]

Monsieur le président, NPAC est composée de la Fédération canadienne des étudiants et de huit associations nationales de professionnels qui représentent les domaines de l'architecture, de l'art dentaire, du droit, de la profession infirmière, de la médecine, de la pharmacie, de la physiothérapie et de la médecine vétérinaire. Le président de NPAC est parmi nous ce matin, c'est le docteur William Easton, qui a pris la parole un peu plus tôt ce matin.

[Traduction]

Monsieur le président, les obstacles socio-économiques à l'entrée dans les programmes professionnels du milieu postsecondaire sont à tout fait évidents. Les frais de scolarité élevés ainsi que la crainte d'accumuler une forte dette peuvent décourager les étudiants issus de milieux traditionnellement à faible revenu de poursuivre des études qui les conduiraient à une carrière professionnelle. Plus tôt, M. Easton a cité des exemples précis du coût prohibitif d'une formation médicale pour la plupart des familles canadiennes.

Pour ce qui est de notre deuxième argument concernant l'exode des cerveaux, nous devrions—et nous devons—reconnaître que les offres des recruteurs américains de rembourser les dettes élevées des étudiants auront de plus en plus pour effet d'attirer nos diplômés professionnels aux États-Unis et probablement ailleurs. Cela est particulièrement vrai pour les professionnels de la santé. Pour les régions qui ont déjà beaucoup de mal à avoir accès aux services professionnels, par exemple les régions rurales éloignées, l'endettement élevé des étudiants fait que l'on risque de trouver moins de professionnels disponibles, ou que ceux-ci s'intéressent moins à exercer leur profession dans ces régions.

• 1225

Les frais de scolarité élevés et les systèmes d'aide financière insuffisants auront aussi un effet très négatif sur les étudiants eux-mêmes dans leur vie privée. Les programmes d'aide financière gouvernementaux, par exemple les prêts et bourses, n'augmentent pas proportionnellement aux besoins des étudiants. En outre, de nombreux étudiants dans les programmes professionnels n'ont pas la possibilité d'avoir un revenu lorsqu'ils sont aux études, ou alors cette possibilité est très limitée. En conséquence, on va sûrement assister à une hausse spectaculaire du nombre d'étudiants qui doivent contracter des prêts bancaires portant intérêt pour assurer leur subsistance.

Certains étudiants ont déjà contracté des dettes pour obtenir un premier diplôme parce que, comme vous le savez, dans certains programmes professionnels, l'obtention d'un premier diplôme est une condition d'admission préalable. De même, on ne peut reporter après l'obtention du diplôme le remboursement des intérêts sur les prêts bancaires.

Monsieur le président, tous ces facteurs, sans compter le stress qu'il y a à joindre les deux bouts, nuiront sans aucun doute à la santé et au bien-être des personnes qui étudient dans les programmes professionnels, particulièrement s'ils ont à assurer la subsistance d'un conjoint ou de personnes à charge.

Enfin, il y a une chose que l'on n'a pas mentionnée aujourd'hui au sujet des frais de scolarité, et ce sont les conséquences que cela peut avoir sur l'économie canadienne. La part de revenu que les professionnels fraîchement diplômés consacreraient autrement à des dépenses coûteuses comme l'achat d'une maison, d'une voiture et des investissements financiers doit maintenant être consacrée pendant plusieurs années à rembourser une dette étudiante élevée.

En conclusion, monsieur le président, nous vous adressons trois recommandations: premièrement, que les gouvernements collaborent pour s'assurer que les frais de scolarité demeurent réglementés et raisonnables; deuxièmement, que le gouvernement fédéral augmente le financement qu'il accorde aux établissements postsecondaires afin d'atténuer certaines pressions qui ont pour effet d'augmenter les frais de scolarité; et enfin, que les systèmes d'aide financière aux étudiants soient: a) exempts de toute coercition, b) soient conçus au moment même où l'on augmente les frais de scolarité ou à l'avance, c) soient directement proportionnels à l'augmentation des frais de scolarité, et d) atteignent des niveaux qui répondent aux besoins des étudiants.

Merci, monsieur le président.

Le président: Merci beaucoup, Claude.

Je tiens à vous remercier tous d'avoir été patients, et encore une fois merci d'être venus. Comme vous le savez, c'est la seconde rencontre que nous tenons sur cette question. Il y en aura une autre. J'espère que vous voyez bien que nous, quel que soit notre parti, comprenons que c'est une question très importante.

Voici comment nous procédons à notre comité, nous avons des échanges qui durent à peu près cinq minutes. Nous tachons de donner la parole aux députés de la manière habituelle. Étant donné notre configuration inhabituelle, les députés de l'opposition sont à ma gauche, les députés ministériels à ma droite. J'ai sur ma liste pour le moment Carl Skelton, Raymonde Folco, Paul Crête, Alan Tonks, Yvon Godin, Anita Neville, et probablement Carol Skelton de nouveau, je pense que c'est comme ça, et Carolyn Bennett.

C'est donc au tour de Carol Skelton.

Mme Carol Skelton (Saskatoon—Rosetown—Biggar, Alliance canadienne): Tout d'abord, je tiens à vous remercier tous d'être venus nous rendre visite aujourd'hui et de nous avoir fait vos exposés.

Il y a trois choses que l'on a abordées brièvement. M. Arbuckle a mentionné les crédits d'impôt pour étudiants. M. Turk a mentionné les subventions fondées sur les besoins. Mme Hamalian a parlé d'une scolarité gratuite. J'aimerais que vous m'en disiez davantage sur ces crédits d'impôt, ces subventions fondées sur les besoins et comment nous organiserions cela, et de la scolarité gratuite pour les étudiants.

Pouvez-vous me donner un peu plus d'explications, et je commencerai par Liam?

M. Liam Arbuckle: Au sujet de cette idée visant à augmenter le crédit d'impôt, vous avez en ce moment un certain niveau maximum que vous pouvez transférer, disons à vos parents qui sont à l'heure actuelle ceux dont dépendent la plupart des gens pour acquitter les frais de scolarité. Essentiellement, si dans les premières années vous atteigniez ce maximum sans pouvoir en transférer davantage, en augmentant ce crédit, vous pouvez en profiter pendant les années suivantes lorsque vous absorbez des frais de scolarité d'un certain montant. Notre idée, même si elle n'est pas neuve, vise, nous l'espérons, à augmenter cet avantage fiscal dans les dernières années lorsque vos frais de scolarité sont les plus élevés.

Mme Carol Skelton: D'accord.

Le président: Monsieur Turk.

• 1230

M. James Turk: Nous croyons qu'il est important de passer de plus en plus à un système fondé sur les besoins et de réintroduire les subventions. En fait, la première personne qui a mentionné cela était Ian Boyko de la Fédération canadienne des étudiantes et des étudiants, alors je lui laisserai le soin d'expliquer la chose parce que c'est son organisation qui a fait l'essentiel des recherches sur cette question.

M. Ian Boyko: En ce qui concerne les subventions fondées sur les besoins, il existe de nombreux modèles différents. Nous serions heureux de vous communiquer des exemples précis de la mise en oeuvre d'une telle mesure et des coûts que cela occasionne. Mais je peux vous dire de manière générale pourquoi nous pensons que ce système est supérieur aux prêts au titre de l'aide aux étudiants, et en premier lieu, je donnerai quelques éléments d'information au comité.

Le Canada compte parmi une infime minorité de pays dans le monde qui n'ont pas de système national de subventions fondées sur les besoins. Je crois qu'il y en a que trois. C'est donc un système qui est une formule gagnante dans d'autres pays, et que le Canada devrait envisager sérieusement d'adopter. Mais on affecte aussi des crédits à certains programmes qui sont considérés comme de l'aide financière et des moyens d'améliorer l'accès aux études. J'ai mentionné les régimes enregistrés d'épargne-études et les subventions canadiennes pour l'épargne-étude. Comme je l'ai dit dans mon exposé, les fonds prévus pour ces deux programmes ne vont pas aux étudiants qui en ont le plus besoin. Ils vont aux familles qui ont déjà les moyens d'économiser pour les études des enfants. En remplaçant ces deux programmes par un système de subventions fondées sur les besoins, ces fonds répondraient mieux, comme l'indique le nom du programme, aux besoins des plus nécessiteux. Les coûts sont remarquablement semblables. Je crois que s'il fallait tenir compte de toutes les familles susceptibles de demander des subventions canadiennes pour l'épargne-études, la dépense se chiffrerait à près de 3 milliards de dollars. D'après nos calculs, c'est à peu près ce qu'il en coûterait pour un certain niveau de subventions fondées sur les besoins qui seraient accessibles à tous les étudiants nécessiteux.

J'espère avoir répondu à votre question.

Mme Carol Skelton: J'aimerais davantage d'informations à ce sujet, si vous pouviez m'en fournir, s'il vous plaît.

Le président: Ian, si vous avez d'autres informations le comité serait heureux de les recevoir. Allez-y, Carol.

Mme Carol Skelton: Oui, Arpi.

Mme Arpi Hamalian: Si l'on tient compte de toutes les dépenses engagées pour administrer tous ces plans différents, sans nécessairement faciliter l'accès aux étudiants nécessiteux et l'argent qui va dans les poches des grandes institutions financières, je pense que nous serins en mesure de permettre à tous les Canadiens qualifiés d'avoir accès à l'éducation supérieure. C'est dans cet esprit, d'abord, que nous réclamons l'abolition des frais de scolarité parce que toutes les études qui ont été faites démontrent que ce montant serait analogue au coût d'administration de tous les divers programmes que nous avons maintenant.

Deuxièmement, je crois que c'est le devoir d'un pays qui a atteint notre niveau de développement, d'investir directement dans l'avenir de ses jeunes.

Troisièmement, je crois, comme M. Boivin l'a mentionné, plus vite nos étudiants deviendront des citoyens actifs—c'est l'argument économique, qui n'est pas nécessairement le premier mais qui est très important dans la mesure où il peut influencer les gens que les arguments d'ordre déontologique laissent froids—le plus vite l'économie profitera de l'éducation que ces jeunes auront reçue dans nos universités.

Ce sont là seulement trois principes fondamentaux, mais nous pouvons en ajouter d'autres et vous communiquer des données corroborantes.

Le président: Carol, nous reviendrons à vous assez vite.

C'est au tour de Raymonde Folco, suivie de Paul Crête, Alan Tonks, Yvon Godin.

[Français]

Mme Raymonde Folco (Laval-Ouest, Lib.): Merci, monsieur le président.

Le président: De rien.

Mme Raymonde Folco: Ça me fait plaisir quand mon nom est bien prononcé.

Le président: Oui, c'est Raymonde.

Mme Raymonde Folco: Je voudrais parler de l'autre partie de la raison d'être de cette réunion de cet après-midi sur la mobilité des étudiants aux études postsecondaires. C'est monsieur Giroux qui disait dans son mémoire:

    De nos jours, offrir une éducation supérieure de qualité signifie offrir à un nombre accru d'étudiants la possibilité de faire des études ayant une dimension internationale...

• 1235

Je suis, évidemment, entièrement d'accord sur ce que vous dites dans ce mémoire, mais je proposerais une priorité: avant de faire en sorte que les étudiants aient un accès très libre à une éducation internationale, qu'ils aient un accès très libre à une éducation que je ne qualifierais pas de nationale, mais à une éducation à l'intérieur du Canada au moins, puisqu'on n'a pas vraiment de système d'éducation nationale ici, au Canada.

C'est un fait historique. Ce ne sont pas seulement les universités qui font partie de ce problème; il y en a d'autres. Par exemple, il y a les professions. ll y a les médecins et les infirmières aussi qui, je pense, ne peuvent pas aller travailler d'une province à l'autre. C'est le cas aussi des avocats et ainsi de suite.

Il y a eu quand même certaines tentatives de la part du gouvernement canadien d'essayer de mettre cela dans une optique nationale. Je pense que c'est M. Ian Boyko qui a parlé d'un projet de loi ou d'une mesure législative postsecondaire qui ressemblerait, par certains côtés, à la législation sur la santé, où il y aurait au moins un élément, selon moi, qui serait important, soit la possibilité de mobilité d'une université à l'autre. C'est vrai que quand il y a un manque de mobilité, il y a aussi une hiérarchisation qui se produit. Mme Hamalian en a parlé pour les universités.

Ma question est la suivante. Compte tenu du fait que nous avons déjà une entente-cadre sur l'union sociale et que, je le crois fermement, plusieurs personnes qui ont fait des présentations aujourd'hui croient vraiment au rôle que devrait jouer ou que joue déjà le gouvernement canadien, comment voyez-vous l'action du gouvernement fédéral, les stratégies ou le rôle que le gouvernement fédéral pourrait jouer pour, justement, amener une plus grande mobilité des étudiants à l'intérieur du Canada?

Le président: Robert Giroux.

M. Robert Giroux: Merci, monsieur le président.

Tout d'abord, j'aimerais souligner que votre préoccupation au sujet de la mobilité à l'intérieur du Canada même est très justifiée. Comme vous le savez, il y a environ—et c'est un chiffre qui est traditionnel, qui date depuis plusieurs années—9 p. 100 des étudiants canadiens qui vont étudier à l'extérieur de leur province. Dans les deux provinces centrales, l'Ontario et le Québec, ce pourcentage descend à peu près à 5 p. 100.

En ce qui a trait à la mobilité internationale, j'aimerais vous signaler par contre que moins de 1 p. 100 des étudiants canadiens font un stage, que ce soit un stage d'étude ou un stage études-travail, etc. On ne parle pas ici d'un cours de quatre ans; on parle de trois mois, six mois ou un an à l'extérieur du pays. C'est donc pour cela que nous avons souligné cet aspect. Nous sommes totalement d'accord avec vous. C'est très important d'augmenter cette mobilité-là.

Le deuxième point que vous soulevez, c'est: que devient le rôle du gouvernement fédéral? Nous, on le voit de deux points de vue.

Premièrement, nous croyons que le gouvernement fédéral doit exercer un leadership avec les gouvernements provinciaux pour qu'on puisse s'entendre sur de grands objectifs, une mission très importante dans l'éducation postsecondaire, et qu'on puisse s'entendre pour que le gouvernement puisse aider les provinces et que les provinces vont faire une priorité de l'éducation postsecondaire, ce qui est nécessaire.

Comme vous le savez, le problème des programmes comme celui du Transfert canadien en matière de santé et de programmes sociaux et autres, c'est que dans certains cas, l'argent est versé aux provinces, mais les provinces ne s'engagent pas à établir certaines priorités.

Nous avons certainement observé l'accord sur la santé de l'année dernière, et déjà, plusieurs gouvernement provinciaux ont mentionné que ce n'était pas suffisant, qu'il fallait mettre d'autre argent en matière de santé. Je dois vous dire qu'il faut quand même qu'il y ait une entente entre les deux niveaux de gouvernement afin de donner la priorité à l'éducation postsecondaire. Un projet de loi devient extrêmement difficile dans ce contexte-là, parce que je pense qu'on perdrait beaucoup plus d'énergie à jouer le jeu des juridictions fédérales-provinciales qu'à en arriver à une entente sur un projet de loi.

Merci, monsieur le président.

[Traduction]

Le président: Jim Turk. Jim, vous allez devoir être assez bref, comme vous le savez. C'est moi qui vais devoir subir l'ire des députés une fois que vous serez tous partis.

M. James Turk: Merci.

Madame Folco, vous avez soulevé plusieurs questions, et compte tenu de l'avertissement du président, je dirais simplement que nous avons fait au Canada l'expérience d'une solution dans un autre secteur, celui de la santé. La Loi canadienne sur la santé a permis d'assurer l'égalité d'accès et l'égalité de la qualité des services médicaux et de santé partout au pays.

• 1240

Notre organisation, dans les textes que je vais vous remettre après la séance, affirme que la réponse au genre de questions que vous soulevez réside dans l'adoption d'une loi canadienne sur l'éducation postsecondaire, qui serait calquée sur la Loi canadienne sur la santé. Nous avons élaboré un projet de loi modèle qui porte remède aux nombreux problèmes compliqués dont nous n'avons pas eu le temps de parler. Mais nous pensons qu'il existe dans la Loi canadienne sur la santé un exemple clair de la façon dont ces problèmes peuvent être réglés dans le domaine de l'éducation. Nous serons heureux de vous communiquer les détails de la manière dont cela pourrait se faire.

Mme Raymonde Folco: J'aimerais certainement avoir une copie de ce texte. Merci.

M. James Turk: Ce texte vous sera envoyé cet après-midi.

Le président: Pardonnez-moi de vous interrompre, mais cela m'intéresse beaucoup. J'ai vu ce texte, Raymonde, et nous vous serions reconnaissants, Jim, si les autres membres du comité pouvaient également le recevoir.

Nous allons maintenant passer à Paul Crête, Alan Tonks, Yvon Godin, Anita Neville, Carol Skelton et Carolyn Bennett.

[Français]

M. Paul Crête (Kamouraska—Rivière-du-Loup—Témiscouata—Les Basques, BQ): Merci beaucoup, monsieur le président. Merci à tous les témoins.

J'ai été obligé de me pincer deux ou trois fois pour être certain que j'étais au bon Parlement, parce que je ne vois vraiment pas pourquoi vous frappez à la porte du gouvernement fédéral de cette façon, alors qu'il s'agit d'une juridiction purement provinciale. Plutôt que d'avoir une attitude paternaliste, de dire que le fédéral devrait avoir une loi comme celle en matière de santé, pourquoi ne passez-vous pas par un plus grand accent sur les responsabilités démocratiques des provinces? Allez frapper à la porte des provinces pour leur demander si elles assument correctement leurs responsabilités et, en bout de ligne, la conclusion va sûrement être que le gouvernement fédéral aurait deux choix.

Ce matin, je pense que la personne qui rigolerait le plus de notre débat, c'est M. Paul Martin. Il a escamoté le débat sur les surplus pendant un an et demi et il est venu nous dire, la semaine passée, qu'il faisait des économies fantastiques pour nous, que c'était à notre avantage. Mais en ce qui concerne ces 15 milliards de dollars sur lesquels il a oublié de faire un débat que, il l'a admis, il n'a pas fait volontairement, si un débat avait eu lieu depuis un an et que la moitié des surplus avaient été remis dans les programmes et que l'autre moitié avait été consacrée au remboursement de la dette, comme c'était censé être le cas selon la position du premier ministre, est-ce que, finalement, votre problème au niveau du financement ne serait pas en partie résolu? Est-ce que ça ne permettrait pas aux provinces d'arrêter de faire des élucubrations pour pouvoir, à la fin, arriver en augmentant les frais de scolarité à cause du manque à gagner attribuable au gouvernement fédéral?

[Traduction]

Le président: D'accord. Arpi Hamalian.

[Français]

Mme Arpi Hamalian: Il est tout à fait clair que l'éducation est de compétence provinciale, et nous faisons les mêmes pressions au niveau des provinces. Cependant, le fédéral est à la recherche de toutes sortes de moyens pour pouvoir intervenir et faire preuve de leadership. C'est dans ce sens-là qu'il est important qu'on vienne vous parler aussi, parce qu'au lieu de faire preuve de leadership en mettant l'argent entre les mains du secteur privé, comme c'est le cas pour la Fondation canadienne pour l'innovation, qui est vraiment gérée par un groupe privé, on pourrait peut-être mettre autant d'énergie pour faire des ententes avec les provinces afin de transférer l'argent directement aux provinces, et on pourrait établir quelques balises, comme l'abolition des frais de scolarité. L'éducation, c'est un droit. Il faut absolument abolir les frais de scolarité. On a l'argent et les moyens pour le faire.

On est ici pour dire que le fédéral peut prendre un leadership qui va profiter au public. Ce sont des investissements publics qui doivent passer par ce qui existe déjà dans la Constitution au lieu d'aller dans les mains du privé. Pour les bourses, c'est comme ça aussi. On donne ça aux banques afin qu'elle les administre. Alors là, c'est vraiment pour vous inciter à vraiment faire passer le leadership par les lois qui existent déjà dans la Constitution ou bien soulever ce débat sur la place publique. C'est pourquoi la FQPPU appuie le projet de loi suggéré par l'ACPPU afin d'avoir une discussion sur la place publique sur la façon d'utiliser les surplus qu'on a à tous les paliers de gouvernement.

Merci.

[Traduction]

Le président: J'ai déjà trois intervenants sur ma liste. Vous allez devoir être assez bref. C'est au tour de Liam, suivi de Jim, et ensuite de Bill.

M. Liam Arbuckle: Je pense qu'il est juste de dire que le gouvernement fédéral a toujours joué un rôle traditionnel, chaque fois que le domaine intéressait tous les Canadiens. De toute évidence, l'éducation intéresse tous les Canadiens. Le cadre de l'Union sociale permet au gouvernement fédéral de montrer la voie dans ce domaine, et il doit en être ainsi.

Je pense que tous les Canadiens profitent d'une population éduquée. À l'inverse, notre économie souffre lorsque nos travailleurs qualifiés émigrent. De toute évidence, le gouvernement est responsable de l'économie à l'échelle nationale. L'ACAE croit qu'un accord pancanadien, calqué sur la Loi canadienne sur la santé, comme de nombreux témoins l'ont dit aujourd'hui, profiterait à tous les Canadiens, et pas seulement au niveau provincial.

• 1245

Le président: Très bien, les suivants sont Jim Turk et Bill Conrod.

M. James Turk: Monsieur Crête vous nous rappelez avec raison que l'enseignement postsecondaire est normalement de compétence provinciale. Aussi, nous partons du principe que le caractère distinct du Québec lui accorde un certain nombre de droits que les initiatives du gouvernement fédéral doivent respecter.

Jusqu'au début des années 50 la réalité des relations fédérales-provinciales voulait que le gouvernement fédéral ne joue pas un rôle important dans le financement de l'enseignement postsecondaire. Ce système était carrément inéquitable dans l'ensemble du pays. Dans les années 50 et au début des années 60, le gouvernement fédéral a commencé à jouer un rôle de plus en plus important qui a permis d'avoir un système assurant accès et qualité partout au pays.

Ce qui nous pose problème dans ce projet de loi est de trouver le moyen de respecter la compétence provinciale—le caractère unique du Québec—tout en fournissant un mécanisme qui permettra au gouvernement fédéral de jouer le rôle que nous jugeons essentiel, si nous voulons avoir le système d'enseignement postsecondaire que nous souhaitons.

Le président: Très bien.

Bill Conrod.

M. Bill Conrod: Je dois souligner la même chose. Je regarde la photo en face, il y a 134 ans, et je constate que la vie était beaucoup plus simple. Tous nos mémoires ont laissé entendre indiqué qu'il s'agit d'un problème qui existe aux deux paliers de gouvernement, ce qui est en partie le problème. À mon avis l'objectif est d'avoir une économie performante, en santé et concurrentielle, avec une main-d'oeuvre qualifiée à la fine pointe des connaissances et prête à affronter n'importe qui.

Dans ce contexte, je ne pense pas qu'on puisse s'en remettre au leadership. Il y a au moins une province qui ne suivra pas, je vous le garantis. Donc, je vous souhaite bonne chance.

Le président: Paul Crête, très rapidement.

[Français]

M. Paul Crête: Je ne parle pas de leadership dans une seule province. Je pense que chacune des provinces peut assumer son leadership, mais il y a d'autres solutions qui pourraient être retenues, comme, par exemple, le transfert de points d'impôt. Je pense que c'est une lubie de croire qu'on va donner un rôle paternaliste au gouvernement fédéral, et quand vous allez négocier, dans le secteur de l'éducation, pour une loi comme celle qu'il y a en matière de santé, il va y avoir le même chantage qui se fait au gouvernement actuellement. Ils ont l'argent et les provinces finissent par être obligées d'accepter un compromis insuffisant, comme ce fut fait il y a deux ans, et on se retrouve avec des milliards de dollars qu'elles n'ont pas, et elles continuent à quêter. C'est un système qui institutionnalise la quête auprès du gouvernement fédéral.

[Traduction]

Le président: Nous entendrons ensuite Alan Tonks, Yvon Godin, Anita Neville, et Carol Skelton.

M. Alan Tonks (York-Sud—Weston, Lib.): Merci beaucoup de vos commentaires. Je remarque qu'il y a une certaine convergence surtout parmi ceux qui enseignent et ceux à qui on enseigne, c'est-à-dire les étudiants et les professeurs.

Si je peux faire une analogie objective, l'analyse de la situation que vous nous avez faite révèle les inégalités du système actuel. De plus en plus, les universités comptent sur les étudiants pour participer à leurs frais de fonctionnement, et ce de plus en plus. Par conséquent, les étudiants doivent emprunter de l'argent, et les programmes actuels n'arrivent pas à répondre à leurs besoins. Étant donné la dette accumulée en début de carrière il est bien difficile pour certains de rembourser cette dette.

Donc cette analyse nous porte à conclure qu'il nous faut rédiger une loi en matière d'enseignement postsecondaire. Nous devons redéfinir la relation entre les provinces et le gouvernement fédéral.

À mon avis, si nous rédigeons la loi de nouveau, en conservant la structure actuelle, si on veut qui permettra d'appuyer la Fondation des bourses du millénaire, le programme enregistré d'épargne pour l'enseignement, et toutes les autres bourses, ne sera pas la solution.

Si par contre, nous passons à un régime de subventions fondé sur les besoins—un programme universel—il y a deux catégories d'individus auxquels il faudra adapter ce programme. Ceux qui ont quitté le foyer et n'ont personne sur qui compter et qui étudient dans des institutions postsecondaires c'est-à-dire qui font des études de doctorat, et ceux dont les familles continuent à offrir un appui financier.

• 1250

Vous avez indiqué que dans la plupart des cas, les deux catégories doivent être étudiées puisqu'il ne s'agit pas ici de gens très riches. Nous parlons de gens qui ont un revenu moyen et qui essaient de faire vivre leurs familles dans la conjoncture fiscale actuelle. Et cela devient de plus en plus difficile. Je crois que vous êtes tous d'accord avec moi.

Donc, si on pouvait libeller cette loi et bâtir la structure, sachant que notre régime fiscal est l'outil le plus précieux qui nous permet d'égaliser les chances, comment faut-il édifier cette structure? Vous nous avez donné une idée, mais si vous pouviez peut-être rédiger la loi et ensuite nous conseiller—et tout le monde pourra répondre—j'aimerais y retrouver les données que vous avez présentées dans vos mémoires et vos suggestions. Si nous allions dans ce sens-là, dans le cadre de l'union sociale, que mettriez-vous dans la loi? Quelles seraient vos trois ou quatre questions prioritaires?

Le président: Ian Boyko.

M. Ian Boyko: Vous avez très bien circonscrit le problème. Il est évident que la société canadienne se divise en différentes classes. Comment allons-nous faire pour les traiter toutes sur un pied d'égalité et pour faire en sorte que l'accès pour tous ne permet pas à certaines classes de la population de s'en tirer sans payer un sou? Jim Turk vous expliquera en détail la façon dont la loi pourrait le permettre.

C'est très simple, à mon avis. Ma réponse n'a rien de complexe. Vous m'avez sorti les mots de la bouche, lorsque vous avez dit que le régime fiscal est l'outil privilégié pour créer l'égalité d'accès à tous les étudiants. Si, comme certains députés le suggéraient, nous abolissions les frais de scolarité, ou s'il existait un système permettant de distribuer des bourses en fonction des besoins qui serait universel, il serait possible de recouvrer les coûts par le truchement de la fiscalité. Cela empêcherait que les réductions d'impôt permanentes grugent perpétuellement le budget de base servant à financer l'éducation. Le régime fiscal servirait donc à créer l'égalité des chances pour tous.

Si, par exemple, nous abolissions les frais de scolarité, qu'arriverait-il à l'étudiant venant d'une riche famille qui peut facilement assumer ces frais? Cette famille sera-t-elle dispensée de l'obligation d'assumer les frais de scolarité? Non. Mais au moyen du régime fiscal la famille qui ne serait pas obligée de participer aux frais de scolarité serait néanmoins ultérieurement frappée par des impôts plus lourds. Voilà la façon dont nous suggérons d'égaliser les chances pour toutes les familles canadiennes.

Le président: Jim Turk, suivi de Bill Conrad. Soyez brefs.

M. James Turk: Les membres du comité nous ont posé tout un défi en posant des questions très importantes qui exigent de longues réponses. Mais comme nous n'avons que quelques minutes à notre disposition, je poursuivrai avec plaisir la discussion à un autre moment.

Pour ce qui est des subventions versées en fonction des besoins, le gouvernement a de l'expérience dans la façon dont il répartit les ressources selon les besoins et sait comment traiter le jeune qui n'a personne d'autre sur qui compter, par opposition à celui qui vit en famille. La majorité des fonds sont distribués en fonction des besoins, que l'on parle des bourses du millénaire ou du Programme canadien des prêts aux étudiants. Vous voyez que l'expérience du gouvernement est diversifiée, et nous pouvons explorer diverses possibilités; il ne s'agit pas d'un nouveau problème à résoudre et les solutions sont variées.

Lorsque je vous entends dire que la fiscalité est le meilleur outil à notre disposition, je suis ambivalent. C'est vrai et ce ne l'est pas. Rappelons-nous ce que M. Giroux a conseillé au comité. Il y a trois facteurs en jeu ici: la capacité, la qualité et l'accès. Financer suffisamment à la base les universités est la pierre angulaire de toute solution, et cela ne se fera pas par des moyens fiscaux.

De la même façon, favoriser l'accès aux études supérieures aux étudiants ne se fait pas nécessairement par des mesures fiscales, puisque les plus pauvres parmi les étudiants ne paient pas d'impôt. Autrement dit, tout système qui se fonderait sur des allégements fiscaux profiterait aux familles ayant des revenus moyens.

• 1255

Par ailleurs, cette solution ne serait pas indépendante de mesures fiscales puisque le financement de l'éducation postsecondaire devrait découler principalement d'un régime d'impôt sur le revenu progressif, puisque plus les diplômés d'universités et de programmes professionnels feront plus d'argent et qu'ils paieront plus d'impôts seront élevés tout au long de leur vie. Des recherches effectuées en Australie concluent que le gouvernement australien tire 2,7 milliards de dollars en recettes fiscales supplémentaires du simple fait que sa population est plus instruite.

Le président: Pardon, Bill, mais je dois passer à notre collègue, Yvon Godin.

Yvon sera suivi d'Anita Neville, de Carol Skelton, de Carolyn Bennett, de Paul Crête, et de moi-même, si nous nous rendons jusque là.

[Français]

M. Yvon Godin (Acadie—Bathurst, NPD): Merci, monsieur le président.

J'aimerais vous souhaiter la bienvenue. Les frais de scolarité sont ce qu'on paie pour aller à l'université. Depuis que je suis arrivé à cette réunion, on n'a pas parlé... Je vais donner un exemple de la province d'où je viens.

Je viens du Nouveau-Brunswick. Il y a l'Université de Moncton et l'Université du Nouveau-Brunswick, à Fredericton. Ce ne sont pas tous les gens qui habitent Moncton. Les étudiants qui viennent d'autres régions de la province ont des coûts énormes quand ils vont à l'université, et il n'y a rien pour les aider. On parle de frais de scolarité, mais il s'agit de frais d'études postsecondaires complètes. Il faudrait regarder tous les coûts.

Je ne parle pas des personnes qui sont proches de l'université, mais des personnes qui viennent d'ailleurs, qui peuvent dépenser de 40 000 $ à 50 000 $ pour obtenir un diplôme universitaire. Dans certains pays, c'est gratuit. C'est un investissement dans nos enfants. Comme Canadiens, ne pensez-vous pas qu'on devrait prendre une décision en tant que gouvernement? Est-ce qu'on est prêts à investir dans nos enfants ou si on va les laisser s'endetter de 40 000 $ ou 50 000 $? S'ils ont un conjoint ou une conjointe, cela veut dire encore 40 000 $ ou 50 000 $, ce qui représente 100 000 $. S'ils s'achètent une maison, ils sont rendus à 180 000 $. S'ils s'achètent une voiture pour aller travailler, c'est 200 000 $. Et ils n'ont même pas encore commencé leur famille.

Est-ce qu'on ne devrait pas, comme Canadiens et Canadiennes, prendre le leadership et dire qu'on ne veut pas que nos enfants soient endettés comme ça et qu'on veut que nos gouvernements, avec nos taxes, paient l'éducation de nos enfants?

M. Robert Giroux: Monsieur Godin, je pense que les gouvernements doivent exercer un leadership, cela autant au niveau provincial qu'au niveau fédéral, pour s'assurer que les institutions... Vous dites qu'on ne doit pas parler strictement des grandes villes. On a beaucoup d'institutions en région, partout au pays, et ces institutions doivent aussi être financées adéquatement pour être en mesure d'offrir un choix alternatif aux étudiants afin qu'ils n'aient pas besoin de se rendre dans les grands centres, où les frais de scolarité ne sont pas leurs seuls coûts. On parle de coûts qui sont souvent deux ou trois fois plus élevés que les frais de scolarité parce qu'ils doivent se loger, se nourrir, etc.

Je reviens à ce que James Turk a dit. La solution n'est pas strictement l'aide spéciale aux étudiants ou des subventions directes aux étudiants; c'est aussi de s'assurer que les institutions soient financées adéquatement pour qu'elles puissent dispenser un enseignement de qualité.

[Traduction]

Le président: Quelqu'un veut-il répondre?

[Français]

Lucille Auffrey.

Mme Lucille Auffrey: Merci, monsieur Godin. Je pense que votre intervention est au point. Au niveau d'une discipline telle que la nôtre, où nous avons besoin de former un nombre important d'intervenants afin de contribuer de manière appropriée au système de santé, l'accès et la disponibilité des programmes de formation sont très importants.

Le coût est certainement un facteur, mais je pense que le gouvernement fédéral a un rôle très important à jouer pour encourager les universités et toutes les institutions d'enseignement postsecondaire à envisager les technologies appropriées pour diminuer les coûts et partager les connaissances d'une manière de plus en plus interactive. Le gouvernement fédéral a un rôle très important à jouer dans ce domaine. Ensemble, nous pourrons sûrement arriver à formuler une politique sociale qui ait beaucoup plus de bon sens.

Des pays tels que l'Irlande ont aboli les frais de scolarité et sont quand même des meneurs importants dans les nouveaux domaines. Pourquoi le Canada ne ferait-il pas de même? C'est ça, la question de l'heure.

• 1300

[Traduction]

Le président: Bill Conrod, suivi de Claude Boivin.

M. Bill Conrod: Je répondrai rapidement à la question de M. Godin: l'un des dangers pour des gens comme vous, c'est de vous méprendre sur l'équité. À mon avis, l'équité n'est pas un des objectifs à suivre, en l'occurrence. À mon avis, le véritable objectif, c'est que le Canada se retrouve avec des gens formés et compétents, à la fin de leurs études. Or, si pour ce faire, il faut traiter différemment l'étudiant de Stanbridge Est par rapport à celui de Rimouski ou de Pembroke, eh bien soit. En dernière analyse, l'important c'est que cet ancien étudiant soit aujourd'hui sur le marché du travail et qu'il renvoie de l'eau au moulin comme contribuable. Voilà ce à quoi servent les impôts. D'ailleurs, M. Tonks en illustrait l'importance. Vous devez bien savoir que si les Canadiens ne travaillent pas, ils ne paieront pas d'impôts. Il s'agit donc d'investir au bon endroit partout au Canada, et s'il faut le faire aux deux paliers, faisons-le d'un seul coup.

Merci.

Le président: Claude Paul Boivin.

[Français]

M. Claude Paul Boivin: Monsieur Godin, vous avez entièrement raison et notre coalition est d'accord avec vous. Il faut tenir compte non seulement des frais de scolarité, mais aussi des frais de subsistance, surtout dans les programmes professionnels à l'université.

[Traduction]

Le président: Comme il est treize heures, nous devrions lever la séance du comité; mais je vais la prolonger de quelques minutes en demandant à Anita Neville de partager son temps de parole avec Carolyn Bennett, si elle le veut bien.

Mme Anita Neville: Je me contenterai d'un bref commentaire, puisque j'avais six ou sept questions à vous poser, ce que je n'ai pas le temps de faire.

Monsieur Turk, vous avez parlé du défi que posait la question s'adressant à M. Tonk. J'aimerais répliquer que ce sont vos propos à tous qui posent pour nous un défi de fond. Vous qui représentez des milieux si différents avez tous repris le même thème ce qui, à mon avis, est assez rassurant mais qui est, par la même occasion, assez inquiétant par la tâche gigantesque qu'il implique.

J'avais toutes sortes de questions à poser. Monsieur Conrod, vous avez parlé de l'équité entre les différentes régions. J'allais vous interroger sur ce que vous entendiez par équité, en ce qui concerne la façon dont elle s'applique à différents groupes communautaires, par le biais de différentes mesures, ou selon qu'elle s'applique aux étudiants handicapés ou aux étudiants autochtones.

Je m'interrogeais au sujet de la formulation et de ce qui se passait actuellement en matière de mobilité. Je m'interrogeais au sujet de l'établissement de priorités nationales et de la façon dont vous envisagiez cela. Je me demandais aussi comment vous suggéreriez de donner plus de moyens aux organisations et s'il s'agissait de classes virtuelles, par exemple.

Voilà ce qui m'intéresse, même si j'ai bien d'autres questions que j'ai notées ici sur papier. Mais je vais céder la parole à Mme Bennett qui vous posera ses questions, et vos réponses tiendront peut-être compte de ce qui me préoccupe aussi.

Mme Carolyn Bennett (St. Paul, Lib.): J'avais songé à vous interroger au sujet des étudiants handicapés, mais l'exposé de Frank était si clair que c'est devenu inutile.

Je vais donc aborder la possibilité de formuler une solution asymétrique qui s'appliquerait à nos Autochtones qui sont terriblement sous-représentés au niveau postsecondaire. Ils ne sont même pas suffisamment nombreux pour être ici avec vous.

Les chefs de bande sont très inquiets du fait qu'ils sont obligés de choisir parmi tous les jeunes qui terminent leur secondaire lesquels parmi eux seront envoyés à l'université, tenant compte du fait que les étudiants autochtones urbains sont souvent laissés pour compte par les divers conseils de bande au moment d'accéder à l'université.

Il reste que le gouvernement fédéral a une responsabilité envers les Autochtones. Seriez-vous en faveur de créer un fond distinct pour les étudiants autochtones et en vertu duquel le gouvernement fédéral paierait directement les frais de scolarité? Cela pourrait-il servir à rééquilibrer la situation puisque l'absence des étudiants autochtones est particulièrement préoccupante, surtout dans certains groupes professionnels tels que les médecins et les infirmiers, ce qui pose problème?

Le président: Bill Easton, suivi de Robert Giroux et Bill Conrod.

M. William Easton: Carolyn, je pense que vous avez soulevé une question importante. Comme vous le savez, plusieurs universités ont déjà pris une initiative dans ce domaine, le Manitoba, l'Alberta et la Colombie-Britannique étant les premiers. Il existe donc des possibilités pour les étudiants autochtones de suivre une formation professionnelle sans être parrainés par un organisme de l'État.

Il y a des programmes de bourse d'études. En fait, l'Association médicale canadienne offre un programme de bourses d'études, tout comme la Native Physicians Association of Canada, mais à elles seules ces bourses ne suffisent pas à faire vivre un étudiant pendant toute la durée de ses études professionnelles.

• 1305

Alors pour vous répondre brièvement, j'estime qu'il est nécessaire d'avoir un financement spécial réservé aux étudiants méritants d'origine autochtone ayant manifesté le désir et démontré la capacité de poursuivre une carrière professionnelle. Je serais d'accord avec cette initiative.

M. Robert Giroux: Très brièvement, nous nous intéressons effectivement à envisager diverses mesures mais il reste quand même une question fondamentale.

Tout d'abord, comme vous le savez, il y a beaucoup moins d'élèves autochtones qui terminent leurs études secondaires que dans le reste de la population. Il s'agit là d'une question très fondamentale.

Ensuite, il y a la question du financement. Nos universités sont en train de mettre au point toutes sortes de mécanismes et de mesures destinées à régler ce problème mais le financement offert par le gouvernement fédéral à l'enseignement postsecondaire reste limité.

Nous représentons le Saskatchewan Indian Federated College, l'un des rares établissements créés pour les Autochtones. Il y a aussi quelques collèges communautaires, par exemple, en Colombie- Britannique, mais dans nos discussions avec l'Assemblée des premières nations, par exemple, il a surtout été question d'établissements qui offriraient des études postsecondaires de base pour les Autochtones.

Nous sommes tout à fait prêts à rencontrer votre comité pour examiner les apports éventuels des universités à cette solution.

Le président: Bill Conrod.

M. Bill Conrod: Je pense que la question soulève le problème d'un groupe de la population qui est sous-représenté et qui ne devrait plus rester dans cet état. Il nous faut tenir compte des personnes handicapées, des Autochtones, de la nécessité d'offrir des garderies aux femmes, et peut-être aussi de la situation des prisons. Nous avons besoin de main-d'oeuvre qualifiée, nous n'avons pas besoin de robots, nous avons besoin de gens. Il faut donc aller les chercher et leur donner la possibilité de faire des études jusqu'au niveau collégial ou universitaire afin d'acquérir les compétences nécessaires pour travailler.

Le président: Anita Neville, brièvement.

Mme Anita Neville: Quelqu'un veut-il répondre aux préoccupations que j'ai mentionnées?

Le président: James Turk.

M. James Turk: Je répondrais très volontiers à toutes.

Mme Anita Neville: Effectivement.

M. James Turk: J'aimerais revenir à une observation faite par Ian Boyko de la Fédération canadienne des étudiants.

L'une des difficultés au niveau fédéral c'est qu'il n'existe pas de ministère ni de ministre responsable de l'éducation. Je pense que cela donne à votre comité l'occasion rêvée d'assumer ce rôle de direction.

Étant donné toutes les questions que vous avez posées et auxquelles nous n'avons pas pu répondre et n'avons pas été en mesure de le faire, votre comité pourra relever le défi d'y donner suite, je l'espère. Je suis sûr que nous tous serions ravis de poursuivre un dialogue régulier avec vous, si vous décidiez de le faire.

Il n'y a pas vraiment de mécanismes prévus pour régler ces questions, compte tenu de la structure du gouvernement fédéral. Ce serait donc un véritable défi pour votre comité de s'attaquer à ces questions, et je suis sûr que vous pourriez compter sur la collaboration de tous ici présents.

Le président: Bill Conrod, très brièvement.

M. Bill Conrod: Je voudrais simplement faire écho à ce qu'a dit M. Turk.

Le président: D'accord.

Mesdames et messieurs, une autre réunion doit avoir lieu dans cette salle, alors nous devrons lever la séance. Je voudrais vous remercier tous d'être venus et je vous remercie d'avoir été patients.

J'espère que vous comprenez que notre comité a été très occupé par des questions législatives. Nous examinions un projet de loi sur l'assurance-emploi et, comme vous le savez, lorsqu'un projet de loi est renvoyé à un comité, il doit s'en occuper immédiatement. Le comité a donc travaillé d'arrache-pied et c'est le seul moment, avec la réunion précédente et celle qui aura lieu mardi, où nous avons pu trouver le temps d'examiner toutes ces questions d'accès à l'éducation.

Pour votre gouverne, jeudi notre réunion va porter sur la question générale des compétences au Canada, par rapport à l'éducation postsecondaire, les professions, etc.

Nous vous sommes reconnaissants d'être venus.

La séance est levée jusqu'à mardi matin à 11 heures dans cette même salle.

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