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HEAL Réunion de comité

Les Avis de convocation contiennent des renseignements sur le sujet, la date, l’heure et l’endroit de la réunion, ainsi qu’une liste des témoins qui doivent comparaître devant le comité. Les Témoignages sont le compte rendu transcrit, révisé et corrigé de tout ce qui a été dit pendant la séance. Les Procès-verbaux sont le compte rendu officiel des séances.

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37e LÉGISLATURE, 2e SESSION

Comité permanent de la santé


TÉMOIGNAGES

TABLE DES MATIÈRES

Le mercredi 30 avril 2003




¹ 1535
V         La présidente (Mme Bonnie Brown (Oakville, Lib.))
V         M. Réal Ménard (Hochelaga—Maisonneuve, BQ)
V         La présidente
V         M. Rob Merrifield (Yellowhead, Alliance canadienne)
V         La présidente
V         M. Rob Merrifield
V         La présidente
V         M. Rob Merrifield
V         La présidente
V         M. Rob Merrifield
V         Le greffier du comité
V         M. Rob Merrifield
V         La présidente
V         M. Rob Merrifield
V         La présidente
V         M. Wendall Nicholas (analyste de politiques, Secrétariat de la santé, Assemblée des Premières nations)

¹ 1540

¹ 1545
V         La présidente
V         Dre Mary Jane McCallum (professeur adjointe, Faculté de dentisterie, Université du Manitoba; Assemblée des Premières nations)

¹ 1550
V         La présidente
V         M. Larry Gordon (président, Comité de la santé, «Inuit Tapiriit Kanatami of Canada»)

¹ 1555

º 1600
V         La présidente
V         Mme Susan Ziebarth (directrice générale, Association canadienne des hygiénistes dentaires)

º 1605
V         La présidente
V         Dr Louis Dubé (président désigné, Association dentaire canadienne)

0000

º 1615
V         La présidente
V         Dr Peter Cooney (directeur général, Direction des services de santé non assurés, Direction générale de la santé des premières nations et des Inuits, ministère de la Santé)
V         M. Greg Thompson (Nouveau-Brunswick-Sud-Ouest, PC)
V         La présidente
V         Dr Peter Cooney

º 1620
V         La présidente
V         Mme Leslie MacLean (directrice générale intérimaire, Services de santé non assurés, Direction générale de la santé des Premières nations et des Inuits, ministère de la Santé)

º 1625
V         La présidente
V         M. Rob Merrifield
V         Dre Mary Jane McCallum
V         M. Rob Merrifield
V         Dre Mary Jane McCallum
V         M. Rob Merrifield
V         Dre Mary Jane McCallum
V         M. Rob Merrifield
V         Mme Leslie MacLean

º 1630
V         M. Rob Merrifield
V         Dre Mary Jane McCallum
V         M. Rob Merrifield
V         La présidente
V         Mme Leslie MacLean
V         La présidente
V         Mme Leslie MacLean
V         La présidente
V         Dr Darryl Smith (membre du conseil d'administration, Association dentaire canadienne)
V         M. Rob Merrifield
V         Mme Kimberly Whetung (directrice adjointe, Secrétariat à la santé, Assemblée des Premières nations)

º 1635
V         M. Rob Merrifield
V         Dr Louis Dubé
V         M. Rob Merrifield
V         Dr Darryl Smith
V         M. Rob Merrifield
V         Dr Darryl Smith
V         M. Rob Merrifield
V         Dr Darryl Smith
V         M. Rob Merrifield
V         Dr Peter Cooney
V         M. Rob Merrifield
V         Dr Peter Cooney

º 1640
V         La présidente
V         Mme Carolyn Bennett
V         La présidente
V         M. Réal Ménard

º 1645
V         Mme Leslie MacLean
V         M. Réal Ménard
V         Dre Mary Jane McCallum
V         M. Réal Ménard
V         Dre Mary Jane McCallum
V         M. Réal Ménard
V         Dr Peter Cooney

º 1650
V         M. Réal Ménard
V         Dr Peter Cooney
V         M. Réal Ménard
V         Dr Peter Cooney
V         La présidente
V         Dre Mary Jane McCallum
V         M. Réal Ménard
V         Dre Mary Jane McCallum
V         La présidente
V         Dr Peter Cooney

º 1655
V         La présidente
V         Mme Hedy Fry (Vancouver-Centre, Lib.)
V         Dr Peter Cooney

» 1700
V         Mme Hedy Fry
V         La présidente
V         Mme Hedy Fry
V         La présidente
V         Mme Hedy Fry
V         Dr Darryl Smith
V         Mme Hedy Fry
V         Dre Mary Jane McCallum
V         La présidente
V         Dr Darryl Smith

» 1705
V         La présidente
V         M. Svend Robinson (Burnaby—Douglas, NPD)
V         Dr Peter Cooney

» 1710
V         M. Svend Robinson
V         Dr Peter Cooney
V         M. Svend Robinson
V         Mme Leslie MacLean
V         M. Svend Robinson
V         Mme Leslie MacLean
V         M. Svend Robinson
V         Dr Peter Cooney
V         M. Svend Robinson
V         Dr Darryl Smith

» 1715
V         M. Svend Robinson
V         Mme Susan Ziebarth
V         M. Svend Robinson
V         Dr Peter Cooney
V         M. Svend Robinson
V         Dr Peter Cooney

» 1720
V         La présidente
V         M. Svend Robinson
V         La présidente
V         Dre Mary Jane McCallum
V         La présidente
V         M. Larry Gordon
V         La présidente
V         Mme Leslie MacLean
V         La présidente
V         M. Greg Thompson

» 1725
V         La présidente
V         M. Greg Thompson
V         M. Svend Robinson
V         M. Greg Thompson
V         La présidente
V         M. Greg Thompson

» 1730
V         La présidente
V         Dr Darryl Smith
V         M. Greg Thompson
V         Dr Darryl Smith
V         La présidente
V         Dr Louis Dubé

» 1735
V         La présidente
V         M. Greg Thompson
V         Dre Mary Jane McCallum
V         M. Greg Thompson
V         La présidente
V         M. Greg Thompson
V         Dr Peter Cooney

» 1740
V         M. Greg Thompson
V         M. Peter Cooney
V         La présidente
V         M. Greg Thompson
V         La présidente

» 1745
V         Dr Peter Cooney

» 1750
V         M. Svend Robinson
V         Dr Peter Cooney
V         La présidente
V         Dr Peter Cooney
V         La présidente
V         Dr Peter Cooney
V         La présidente
V         Mme Leslie MacLean
V         La présidente
V         Mme Leslie MacLean
V         La présidente
V         Mme Leslie MacLean
V         La présidente

» 1755
V         Mme Leslie MacLean
V         La présidente
V         Dr Darryl Smith
V         La présidente
V         M. Svend Robinson
V         Dr Peter Cooney
V         M. Svend Robinson
V         La présidente










CANADA

Comité permanent de la santé


NUMÉRO 032 
l
2e SESSION 
l
37e LÉGISLATURE 

TÉMOIGNAGES

Le mercredi 30 avril 2003

[Enregistrement électronique]

¹  +(1535)  

[Traduction]

+

    La présidente (Mme Bonnie Brown (Oakville, Lib.)): Bonjour, mesdames et messieurs. Il me fait grand plaisir d'ouvrir cette séance du Comité permanent de la santé. Nous nous pencherons aujourd'hui sur la santé dentaire des Premières nations et des Inuits.

    Malgré tout le respect que je porte à nos témoins, tous d'égale qualité, je tiens à les mettre en garde. Trop souvent, des représentants d'organismes prennent les premières minutes de leur allocution pour nous donner une description de leur organisme, de son mandat, le nombre de membres, le lieu des réunions, les services fournis. Je serai très franche avec vous. Ce type de renseignement ne nous intéresse pas vraiment. Nous voulons avoir votre point de vue sur l'état de santé dentaire de ces populations, depuis la racine jusqu'à la pointe des dents, si vous voulez. Épargnez-nous les longs préambules au sujet de votre organisme; allez directement au fait, je vous en prie.

    Avant de commencer, M. Ménard semble avoir quelque chose à nous dire. Monsieur Ménard, vous voulez faire un rappel au Règlement?

[Français]

+-

    M. Réal Ménard (Hochelaga—Maisonneuve, BQ): Je veux simplement présenter un avis de motion sans débat, conformément à ce que nous avions convenu au comité directeur sur l'allocation du temps. Je vais donc en lire l'énoncé pour qu'on puisse en discuter 48 heures après, soit à notre prochaine séance. La motion que je propose se lirait comme suit: Que le temps alloué à chaque membre du comité pour poser des questions aux témoins soit limité à cinq minutes et que le président laisse le soin de poser les deux premières questions aux députés de l'Alliance canadienne, suivies de cinq minutes pour le Bloc québécois, de cinq minutes pour le Parti libéral, de cinq minutes pour le Nouveau parti démocratique, de cinq minutes pour le Parti libéral, de cinq minutes pour le Parti progressiste-conservateur et que les questions subséquentes soient posées, en alternance, par les députés de l'opposition et du parti ministériel, à la discrétion du président.

    C'est un avis de motion; on en discutera à la prochaine séance.

[Traduction]

+-

    La présidente: Merci. Nous prenons note de votre avis de motion, dont nous discuterons à notre prochaine séance. J'espère que nous aurons le quorum lundi après-midi, pour prendre le vote sur cette motion et deux ou trois autres qui sont en suspens.

+-

    M. Rob Merrifield (Yellowhead, Alliance canadienne): Nous pourrions nous prononcer par la même occasion sur une autre motion présentée. Savez-vous de quelle motion je parle?

+-

    La présidente: Quelle autre motion? Désirez-vous présenter un avis de motion, monsieur Merriweather?

+-

    M. Rob Merrifield: Oui. Merrifield.

+-

    La présidente: Je suis désolée. Monsieur Merrifield.

+-

    M. Rob Merrifield: J'ai déjà entendu pire.

+-

    La présidente: Vous avez de la chance. J'aurais pu vous appeler M. Fairweather.

    Alors, monsieur Merrifield, vous avez soumis une motion qui est présentement en suspens?

+-

    M. Rob Merrifield: Oui, je crois. A-t-elle été traduite?

+-

    Le greffier du comité: La ministre doit comparaître le 12 mai.

+-

    M. Rob Merrifield: Le 12 mai. La motion vise à inviter la ministre pour la question des estimations.

+-

    La présidente: C'est déjà prévu.

+-

    M. Rob Merrifield: La ministre a déjà participé à nos travaux auparavant.

+-

    La présidente: Non. Elle est toujours venue nous présenter des estimations. C'est la procédure habituelle.

    Merci d'avoir patiemment attendu pendant cet intermède sur nos affaires internes. Nous allons entamer les témoignages avec un représentant de l'Assemblée des Premières nations. Monsieur Nicholas, n'est-ce pas?

+-

    M. Wendall Nicholas (analyste de politiques, Secrétariat de la santé, Assemblée des Premières nations): Bonjour, madame la présidente, chers collègues et distingués membres du Comité.

    Je voudrais tout d'abord vous transmettre les salutations de mes collègues de l'Assemblée des Premières nations. Je vais m'abstenir, comme vous nous l'avez conseillé, de décrire notre organisme, mais je tiens à souligner que nous sommes ravis de vous donner aujourd'hui, à vous et à vos collègues, notre vision de certaines conditions de vie des membres des Premières nations. Nous sommes venus pour parler de la santé dentaire chez les Autochtones. Bien entendu, nous parlerons au nom des peuples des Premières nations.

    Mon nom est Wendall Nicholas. Je suis analyste de politiques au sein du Secrétariat de la santé de l'Assemblée des Premières nations. À mes côtés, la Dre Mary Jane McCallum, du Manitoba, qui fera un exposé à la suite du mien.

    Madame la présidente, je devrai peut-être quitter avant la fin de la période de questions, mais ma collègue, Kim Whetung, qui représente aussi l'Assemblée des Premières nations, pourra répondre à vos questions, pour le compte rendu.

    Le Programme des services de santé non assurés joue un rôle prépondérant dans l'aide apportée aux peuples des Premières nations. C'est un programme, comme vous le confirmeront mes collègues ici présents du gouvernement, qui coûte très cher. Le volet des services non assurés de Santé Canada gruge presque la moitié de son budget de services. Le programme couvre plusieurs secteurs de services, dont les soins dentaires, un volet qui subit une pression immense compte tenu de l'ampleur des besoins à satisfaire dans les collectivités.

    Actuellement, les coûts du programme sont dépassés de 9 à 12 p. 100 chaque année, une augmentation à laquelle s'ajoutent une croissance de la population qui se situe entre 5 et 6 p. 100 et d'autres facteurs qui font en sorte que le programme peut difficilement combler les besoins.

    J'aimerais profiter de cette occasion pour dresser un bilan sommaire de la santé bucco-dentaire des Premières nations du Canada et de la façon dont le problème doit être abordé, à notre point de vue. Je tire les données qui suivent du rapport de Santé Canada intitulé Profil statistique de la santé des Premières nations au Canada.

    Par rapport à l'ensemble de la population canadienne, les peuples autochtones affichent un taux plus élevé de caries dentaires et de maladies bucco-dentaires. Les facteurs qui peuvent influer sur ces résultats sont le glissement vers un régime alimentaire à forte teneur en sucre, l'accès déficient à des assurances et à des sources d'eau potable fluorée, ainsi qu'à des services de prévention et de traitements dentaires. Les deux derniers facteurs sont particulièrement évidents dans les régions éloignées du pays.

    Le sexe, l'âge, le revenu et l'ethnicité sont aussi considérés comme des déterminants importants de l'état de santé dentaire. Toutefois, le seul indicateur ordinaire de la santé dentaire déclaré par la DGSPNI est le recours aux services dentaires par l'intermédiaire du Programme des services de santé non assurés. Ces données nous indiquent uniquement le nombre d'utilisateurs.

    D'autres enquêtes et études périodiques ont fourni des exposés sommaires sur l'état de santé dentaire des populations des Premières nations et des Inuits. Par exemple, l'Enquête sur la santé dentaire des enfants, menée en 1991 par la DGSM, a révélé que 91 p. 100 des enfants des Premières nations et des Inuits avaient des caries; les enfants de 5 à 6 ans avaient en moyenne 7,8 dents cariées, alors que les 12 et 13 ans en avaient en moyenne 4,4.

    L'enquête a également montré une corrélation favorable entre une meilleure santé dentaire et l'accès à l'eau fluorée. Près de 75 p. 100 avaient accès à des soins dentaires, tandis que 25 p. 100 avaient de toute évidence des besoins qui n'étaient pas satisfaits à cet égard.

    L'Enquête sur la santé dentaire des enfants des Premières nations et des Inuits de 1996-1997 a révélé des résultats similaires. Les enfants autochtones de 6 à 12 ans visés par l'enquête présentaient des taux de caries dentaires (définies comme des dents cariées, manquantes ou obturées ) de 2 à 5 fois supérieurs à ceux des enfants non autochtones du Yukon et des Territoires du Nord-Ouest, également visés par l'enquête.

    Dans une étude menée en Ontario, la santé dentaire des enfants autochtones a été comparée à celle de deux populations non autochtones comparables—les personnes nées au Canada et à l'étranger. L'étude a révélé que ces enfants canadiens sont de 3 à 4 fois plus susceptibles que les enfants autochtones (dans le cas présent, des Premières nations et des Inuits) d'être exempts de carie. Les taux de caries dentaires étaient de 2 à 5 fois plus élevés chez les enfants autochtones.

¹  +-(1540)  

    En 1997, une enquête régionale sur la santé des Premières nations et des Inuits a révélé qu'environ la moitié des répondants avaient reçu des soins dentaires au cours des 12 mois précédant l'enquête. Au nombre des services dentaires fournis à la population admissible se trouvaient les soins dispensés par des spécialistes en soins dentaires ainsi que des traitements et des soins préventifs donnés par un dentiste contractuel dans les collectivités des Premières nations et des Inuits, de même que les services de paiement à l'acte prévus dans le Programme des services de santé non assurés.

    En 1999 et 2000, 38 p. 100 des clients du Programme des SSNA ont eu recours aux services dentaires. Ils ont obtenu au moins un service. Fait intéressant à noter, 44 p. 100 des demandeurs de soins dentaires avaient moins de 20 ans, tandis que seulement 2 p. 100 avaient plus de 65 ans. En général, un pourcentage plus élevé de femmes que d'hommes ont recours aux services dentaires dans le cadre du Programme des SSNA.

    En 1999, les dépenses liées aux soins dentaires du Programme des SSNA ont totalisé 1,7 million de dollars. Une bonne partie de cette somme (32,6 millions de dollars) a été engagée pour des traitements de restauration, comme les couronnes et les obturations. Les traitements préventifs de détartrage et de polissage se sont chiffrés à 11,2 millions de dollars, alors que les demandes de remboursement pour les services de diagnostics, d'examens et de rayons X ont totalisé 11,1 millions de dollars.

    Le déclin de la santé dentaire des Premières nations du Canada est comparable à celui des pays en développement comme le Costa Rica (4,8), l'Ukraine (4,4), la Lettonie (4,2), et elle continuera d'empirer si on ne fait rien pour renverser cette tendance alarmante.

    Les populations des régions éloignées doivent déjà lutter contre d'innombrables obstacles pour avoir accès à des soins dentaires. Comme si ce n'était pas suffisant, les Premières nations ont maintenant de la difficulté à trouver un dentiste qui acceptera une assignation dans le cadre des SSNA, ou qui acceptera un client autochtone du Programme des SSNA. C'est un immense défi.

    Pour ajouter encore à ces difficultés d'accès, les Premières nations doivent maintenant composer avec le nouveau cadre de politique en matière de transport médical que lui a imposé unilatéralement la Direction générale de la santé des Premières nations et des Inuits de Santé Canada. Dans certaines régions, cette politique se traduira tout simplement par la rupture de l'accès aux soins dentaires.

    Pour conclure, je voudrais souligner à quel point le fardeau administratif limite l'accès aux soins dentaires des Premières nations. Les fournisseurs ont les pieds et les mains noués par une bureaucratie galopante—j'imagine que ma collègue, la Dre McCallum, nous en touchera un mot, de même que mes collègues de l'Association dentaire canadienne.

    Les clients des Premières nations qui ont besoin de soins sont punis parce qu'ils ne connaissent pas les politiques. Par exemple, quand ils ont besoin de soins dentaires, ils doivent passer par un processus de prédétermination avant de recevoir un traitement chez le dentiste. Cette étape ajoute des coûts, notamment parce qu'il faut payer le transport en double. La Direction générale de la santé des Premières nations et des Inuits de Santé Canada veut réduire le transport médical, et même l'éliminer dans certains cas, mais elle a mis en place un processus d'autorisation préalable. Le dentiste ne peut pas dispenser au client le traitement requis au premier rendez-vous parce qu'il doit au préalable passer au travers un laborieux processus de prédétermination. En un sens, madame la présidente, c'est le fournisseur qui vit de la frustration.

    Je sais que le temps file et que je dois conclure. J'aimerais cependant soulever d'autres points.

    Tout d'abord, je vous parlerai de ma perplexité devant l'approche de Santé Canada à l'égard de la motivation de la clientèle. La motivation des clients pose vraiment des difficultés. Nous aimerions que le problème soit abordé dans une optique de coopération, plutôt que de nous voir imposer une façon de faire qui place le fournisseur en situation compromettante.

    Nous nous indignons aussi contre le nouveau formulaire de consentement imposé à la clientèle des SSNA par Santé Canada. Si je comprends bien, il remplacera le formulaire de consentement existant, qui fait partie du processus de prédétermination. Or, ce processus de consentement entraîne toutes sortes de problèmes non résolus, et nous craignons que le consentement exigé ne soit trop large. Il créera de la confusion tant chez le client que chez le fournisseur, et beaucoup de frustration—encore plus de frustration.

¹  +-(1545)  

    Madame la présidente, je termine ici mes remarques préliminaires. Merci beaucoup.

+-

    La présidente: Merci, monsieur Nicholas.

    Dre McCallum.

+-

    Dre Mary Jane McCallum (professeur adjointe, Faculté de dentisterie, Université du Manitoba; Assemblée des Premières nations): Je me nomme docteur Mary Jane McCallum et je suis membre de la nation crie de Barren Lands, du Manitoba.

    L'initiative de consentement imposée aux Premières nations risque de causer bien des préjudices à leurs membres, aux professionnels de la santé ainsi qu'au gouvernement fédéral, à plusieurs niveaux, y compris aux régimes de prestation des services qui sont administrés par plusieurs paliers de gouvernements. À titre de membres des Premières nations et de professionnels de la santé, nous comprenons bien la nécessité d'obtenir un consentement. Cependant, la Direction générale de la santé des Premières nations et des Inuits, la DGSPNI, a abusé de la confiance des gens en instaurant des procédures de collecte, d'utilisation et de divulgation de renseignements médicaux personnels qui bafouent le droit à la vie privée des membres des Premières nations, ce qui ralentira encore l'intégration des technologies de l'information dans le régime de santé.

    Le défi actuel consiste à trouver un équilibre entre deux intérêts rivaux: le droit individuel et collectif à la vie privée, d'une part, et le besoin légitime d'élaborer et d'améliorer les politiques gouvernementales en matière de santé et de sécurité, d'autre part. Le formulaire de consentement pose de nombreuses difficultés, à maints niveaux, mais je me limiterai aujourd'hui aux préoccupations des professionnels de la santé, dans un contexte de prestation des services.

    Nombre de Premières nations, y compris leurs membres les plus vulnérables, les aînés et les personnes handicapées, ont signalé qu'ils ne signeraient pas ce document de consentement. La façon irrespectueuse et irréfléchie avec laquelle l'initiative de consentement a été menée a transformé le processus d'habilitation que devrait être le consentement éclairé en une expérience honteuse et effrayante aux yeux des Premières nations.

    La première difficulté concerne la sécurité, puisque les Premières nations n'auront pas accès aux soins médicaux dont elles ont besoin. Nous sommes particulièrement inquiets dans le cas où la vie des clients est en danger—c'est le cas notamment des services pharmaceutiques et de transport médical, quand une évacuation sanitaire est requise.

    À titre de professionnelle de la santé titulaire d'un permis d'exercer du Manitoba, je suis obligée, aux termes de la Loi sur les renseignements médicaux personnels, l'une des deux lois provinciales en matière de vie privée, d'informer mes patients de l'utilisation exacte qui sera faite des renseignements médicaux personnels qui sont recueillis, utilisés et divulgués dans différents contextes. Comme je n'aurai pas accès à ces renseignements—je les aurai demandés mais je ne les aurai pas encore obtenus—, je ne pourrai pas donner les soins de santé à ces patients, tout comme d'autres professionnels de la santé, après le 1er septembre 2003.

    À compter du 1er septembre, la DGSPNI s'est octroyée le pouvoir de retenir le paiement des services de santé prodigués aux patients qui n'auront pas signé le formulaire de consentement. Ce formulaire de consentement global servira à la fois pour le règlement des réclamations, pour recueillir des renseignements sur l'utilisation des services, de même que pour la collecte, l'utilisation et la divulgation de renseignements médicaux personnels dans des contextes variés et non spécifiques, et à bien d'autres fins administratives. Ou, on comprend et on protège mieux les renseignements médicaux personnels si on tient compte du contexte de collecte, qui peut avoir une incidence sur la nature des renseignements requis. C'est le principe de l'exigence minimale. La DGSPNI fait preuve d'une grande irresponsabilité et elle enfreint les principes de la déontologie en opposant ainsi les professionnels de la santé et le Programme des services de santé aux clients autochtones, pour servir des fins administratives qui n'ont rien à voir avec la santé.

    Selon mon code de déontologie, je suis tenue de fournir des soins de santé en temps opportun, y compris des services d'urgence, à mes patients. Si je refuse de prodiguer ces soins, je contreviens à ce code. Le gouvernement place les professionnels de la santé dans une véritable impasse : il nous demande en fait de contrevenir au code déontologique et aux responsabilités que me confèrent la législation provinciale en matière de renseignements médicaux personnels, la seule loi à laquelle je suis assujettie d'ici l'entrée en vigueur de la Loi sur les renseignements médicaux personnels, le 1er janvier 2004.

    L'intégrité des professionnels de la santé qui ont donné des soins de qualité et respectueux sera inutilement remise en cause. De plus, ces professionnels seront à tort perçus comme des agents de Santé Canada.

    Beaucoup de patients autochtones sont vulnérables en raison d'une infirmité ou d'une incapacité, d'un besoin urgent ou d'un manque de connaissance et de pouvoir, ou tout simplement parce qu'ils ont des besoins et qu'ils doivent se fier aux professionnels de la santé, ou dépendre d'eux, pour les satisfaire. Les Premières nations se retrouvent dans une situation de vulnérabilité exceptionnelle parce qu'elles n'ont pas le choix de compter sur Santé Canada pour la satisfaction de leurs besoins en matière de santé, par l'entremise du Programme des services de santé non assurés. Quel recours reste-t-il au patient qui n'a pas l'argent pour payer les soins d'avance? Les gens ne devraient pas subir de préjudice du seul fait de s'être prévalus de leur droit à la vie privée.

¹  +-(1550)  

    Ce processus risque de porter atteinte à la relation que j'entretiens avec les personnes à qui je fournis des soins. Les patients vont voir les soignants tout d'abord parce qu'ils ont besoin de soins, de sorte que les renseignements sur leur santé sont recueillis dans un contexte de vulnérabilité et de confiance, et ils doivent demeurer confidentiels. La divulgation de ces renseignements sans le consentement éclairé des patients peut en dissuader plusieurs de revenir demander des soins parce qu'ils auront perdu confiance, et c'est alors leur sécurité qui est en jeu.

    L'accès aux soins d'urgence peut entraîner une dépense accrue, mais les bienfaits sur la santé ne sont pas toujours au rendez-vous. Pour un professionnel de la santé, le fait d'être obligé de refuser des services thérapeutiques à un patient parce qu'il n'a pas signé un formulaire de consentement qui n'est pas conforme au principe du consentement éclairé, en toute connaissance de cause, qui risque d'exposer le patient à une pression psychologique accrue, relève de la plus pure injustice.

    Une plainte soumise à l'Association dentaire du Manitoba ou au bureau de l'ombudsman de la province pour refus de fournir des services peut aboutir à une enquête contre le professionnel de la santé, sans égard à sa responsabilité. Ce type de plainte risque de grossir les rangs des professionnels de la santé qui refusent de fournir des soins aux membres des Premières nations parce que le fardeau administratif est trop lourd ou pour des considérations déontologiques. Par conséquent, les clients ne pourront plus opter pour le fournisseur de soins de leur choix.

    Dans une autre ordre d'idées, le contenu et la portée de ce consentement global posent aussi la question de la validité et la légalité. En effet, le Règlement fédéral accorde beaucoup d'importance à la divulgation, au libre arbitre, à la compréhension et à la compétence—des éléments qu'on ne retrouve pas dans ce formulaire de consentement.

    Pour terminer, je souligne que toutes les parties intéressées devraient participer à la rédaction du nouveau formulaire de consentement, et que toutes doivent être entendues. Il faut distinguer le processus de règlement des réclamations et continuer de procéder par consentement à fin unique. Nous pourrons ainsi continuer de prodiguer les soins de santé requis. Il faut par ailleurs mettre fin à l'attitude abusive entourant la collecte de renseignements médicaux personnels, pour nous permettre de nouer une nouvelle relation fondée sur la confiance avec le gouvernement.

    Merci.

+-

    La présidente: Merci, Dre McCallum.

    Nous recevons maintenant, de l'organisation Inuit Tapiriit Kanatami of Canada, M. Larry Gordon, qui est aussi président de leur Comité de la santé. Monsieur Gordon.

+-

    M. Larry Gordon (président, Comité de la santé, «Inuit Tapiriit Kanatami of Canada»): Bonjour, madame la présidente et bonjour, messieurs et mesdames les membres du comité.

    Comme il a été mentionné, je me nomme Larry Gordon. Je suis le directeur exécutif du programme de développement communautaire de la Inuvialuit Regional Corporation du Grand Nord. Je témoignerai aujourd'hui en ma qualité de président du Comité de la santé de l'organisme Inuit Tapiriit Kanatami.

    Tout d'abord, je parlerai de l'ampleur du problème. L'état de la santé dentaire des Inuits est beaucoup plus mauvais que celui de la population canadienne non autochtone. Le problème ne se mesure pas seulement par le nombre de caries, mais aussi par un manque d'habitude de visiter le dentiste, par la douleur et par l'angoisse croissante associée à une mauvaise santé dentaire.

    Les enfants inuits affichent le taux le plus élevé de caries dentaires destructives précoces au Canada. Cette maladie compte pour beaucoup dans le coût des voyages pour raison médicale. Le traitement comprend une intervention chirurgicale sous anesthésie générale. Si elle n'est pas traitée, la maladie peut entraîner une infection, de la douleur, de même que des problèmes comportementaux et sociaux.

    La santé bucco-dentaire est essentielle à des fonctions aussi courantes que l'alimentation, la communication, la socialisation, mais aussi pour la construction de l'estime de soi. La carie dentaire chez les jeunes enfants est souvent le début de problèmes graves de caries tout au long de la vie.

    Je trouve particulièrement remarquable et lamentable que, bien que l'on connaisse le mauvais état de santé dentaire des Autochtones depuis 35 ans, je me retrouve encore ici aujourd'hui pour en témoigner, en 2003. Un changement s'impose. Il ne sera peut-être pas facile, mais il est nécessaire. Les preuves sont irréfutables.

    Il semble y avoir deux principales raisons à cette situation. La première est que le système ne peut pas satisfaire les besoins actuels et pressants; la deuxième est que les ressources allouées sont mal utilisées.

    Le régime actuel, qui fonctionne selon un processus de facturation au Programme des services de santé non assurables, pose des obstacles structurels qui influent sur la qualité des soins dentaires et sur l'accès à ces soins. Ces obstacles empêchent les professionnels de la santé de faire leur travail et, en bout de ligne, ils privent les Inuits de l'accès aux services dont ils ont besoin.

    Beaucoup des intervenants du régime connaissent mal les procédés et les politiques en vigueur. Ils ont aussi le sentiment qu'il reste beaucoup de questions sans réponse, notamment pour ce qui est des décisions en matière de financement. Le statut du Programme des SSNA—s'agit-il d'un régime de prestation public ou privé?—entraîne aussi de la confusion. Le leadership fait défaut dans ce dossier: qui est responsable de trouver des solutions et de les mettre en oeuvre?

    D'autres pays ont instauré des stratégies en matière de santé bucco-dentaire. C'est le cas notamment des États-Unis, de l'Angleterre, de la République d'Irlande, de l'Écosse. Ces stratégies sont essentielles parce qu'elles offrent des solutions pour remédier à la mauvaise santé dentaire des groupes les plus vulnérables de la population. Voilà qui nous mène directement à la question de l'efficacité des méthodes de répartition des ressources.

    L'objectif de la politique en matière de santé dentaire du Programme des SSNA est de favoriser l'atteinte et le maintien d'une bonne santé bucco-dentaire. Comment se sentir responsable quand une politique est aussi dénuée d'objectifs et de buts précis? Quel est le changement visé au juste, et quelle est la norme à atteindre en matière de santé bucco-dentaire? Si je ne peux pas énoncer les résultats attendus d'une politique, comment puis-je mesurer l'efficacité des mesures, en ne sachant pas quel était l'objectif au départ? Je me trouve sur une route sans avoir de destination en tête—tout ce que je fais, c'est de conduire, dans n'importe quelle direction, et je gaspille de l'essence.

    La recherche est formelle: la mauvaise santé des Inuits résulte d'un changement de régime alimentaire et de l'éducation des enfants; le facteur géographique a aussi une incidence. C'est donc clair à mes yeux qu'il ne suffit pas de recommander de se brosser les dents deux fois par jour. Nous parlons d'une maladie complexe dont le traitement requiert des stratégies multiples, adaptées à la population visée—et les populations sont très différentes. La multitude des éléments sociaux et culturels expliquent cette complexité.

    Encore une fois, j'exhorte le gouvernement fédéral à consulter les Inuits et à façonner avec eux la solution au problème; à concevoir et à mettre en oeuvre une stratégie d'exploration de nouveaux modes de prestation diversifiés et d'amélioration de l'accès aux services; à mettre au point des stratégies d'abolition des injustices dont les Inuits sont victimes au chapitre de la santé bucco-dentaire, ainsi qu'à combler les lacunes de la politique gouvernementale qui contribuent à la détérioration de la santé bucco-dentaire.

¹  +-(1555)  

    Nous demandons que soient établis des objectifs mesurables en matière de santé bucco-dentaire. Nous demandons aussi l'élaboration de stratégies pour atteindre ces objectifs, des mécanismes de surveillance des tendances en matière de santé pour que nous sachions si les ressources sont affectées de façon efficace et si le programme favorise la responsabilisation; et, enfin, des stratégies d'éducation et de sensibilisation du public, afin de le convaincre de l'importance que joue la santé dentaire dans le bien-être général individuel.

    Les Inuits sont très différents des autres groupes de la population. Il est primordial d'élaborer une stratégie qui leur convient, en partenariat avec les régimes de prestation publics et privés, les organismes non gouvernementaux et tous les échelons de gouvernement.

    L'un des éléments qui nous distinguent est notre régime alimentaire. Si l'une des causes à l'origine des problèmes est le changement de régime, la promotion d'un régime alimentaire traditionnel devrait favoriser une amélioration de la santé dentaire. Des programmes axés sur l'amélioration de l'accès à une nourriture traditionnelle pour les jeunes familles devraient contribuer au bien-être des Inuits.

    Une stratégie globale favoriserait le mariage d'initiatives et d'approches variées à l'intention des groupes cibles prioritaires—les enfants, les jeunes, les mères et les aînés.

    Pour résumer, nous demandons que soient mis en place des programmes de santé bucco-dentaire conçus spécialement à l'intention des Inuits, avec des partenaires inuits, et qui permettront de mesurer les résultats à long terme, dans l'objectif d'améliorer la santé bucco-dentaire de l'ensemble des Inuits et la santé générale de cette population.

    Merci.

º  +-(1600)  

+-

    La présidente: Merci beaucoup.

    Nous entendrons maintenant, de l'Association canadienne des hygiénistes dentaires, Mmes Susan Ziebarth et Judy Lux.

+-

    Mme Susan Ziebarth (directrice générale, Association canadienne des hygiénistes dentaires): Bonjour, et merci.

    Nous sommes très heureuses de témoigner devant le comité aujourd'hui. Je vous présenterai notre exposé, et Judy Lux se joindra à moi pour répondre à vos questions.

    Jose Kusugak, le président de l'organisme Inuit Tapiriit Kanatami, a souligné ainsi l'importance de fournir des services de santé dans les régions éloignées: «Je suis convaincu que... le succès de notre régime de santé en général sera évalué par la qualité des services disponibles dans les meilleurs centres urbains, mais aussi par la capacité du Canada à offrir des services d'égale qualité aux collectivités éloignées et nordiques.»

    Malheureusement, le Canada lutte depuis longtemps avec l'immense défi de garantir l'accès à des services de santé, y compris des services de soins dentaires, dans les régions vastes et peu peuplées. Plusieurs témoins l'ont déjà mentionné, sa fiche dans ce domaine est assez catastrophique.

    La santé bucco-dentaire des Premières nations et des Inuits est navrante. Le gouffre est immense entre l'état de santé de cette population et celui de la population non autochtone. Plus précisément, les taux de caries dentaires des Premières nations et des Inuits, tous âges confondus, sont de trois à cinq fois plus élevés que ceux de la population canadienne non autochtone. Il faut mentionner à cet égard le taux de fumeurs, puisqu'il existe un lien entre le tabagisme et les maladies parodontales: le tabagisme est deux fois plus élevé au sein des Premières nations et des Inuits que dans le restant de la population canadienne.

    Aujourd'hui, je voudrais surtout mettre l'accent sur les causes de l'échec du Programme des services de santé non assurés à procurer des services de santé bucco-dentaire adéquats aux peuples des Premières nations et inuits. L'insuffisance des fonds, la mauvaise coordination des services, les difficultés liées à l'administration des services sont autant de lacunes qui expliquent la mauvaise performance du Programme. S'ajoutent à ces lacunes le nombre restreint de professionnels qui oeuvrent auprès des collectivités rurales et nordiques, de sorte que les services sont parfois inexistants ou accessibles seulement au prix de longs déplacements.

    La plupart des clients admissibles aux SSNA reçoivent très peu de soins dentaires; seulement 38 p. 100 vont chez le dentiste une fois par année, comparativement à 75 p. 100 dans le restant de la population. Dans certaines collectivités, dont Moose Factory, les clients admissibles aux SSNA n'ont pas accès à des soins dentaires tout simplement parce qu'il n'y a pas de fournisseurs dans ces régions. Les villes nordiques ont de la difficulté à attirer de nouveaux dentistes, et ceux qui sont déjà sur place refusent de fournir des soins dans le cadre des SSNA en raison des exigences administratives et de la bureaucratie trop lourdes, ce dont nous avons eu un écho plus tôt cet après-midi. Par exemple, sur le territoire des Inuvialuits, il faut obtenir l'approbation d'Ottawa pour donner des soins qui coûtent plus de 600 $, ce qui peut être long parce qu'il faut expédier les rayons X par la poste à Ottawa.

    Les problèmes liés aux ressources humaines et d'ordre administratif ne sont pas les seuls fléaux qui pèsent sur le Programme. L'évaluation de son mandat et des coûts-avantages révèle d'autres faiblesses. Le mandat du Programme met l'accent sur les traitements de restauration et un peu sur la promotion de la santé bucco-dentaire, mais c'est nettement insuffisant pour favoriser la prévention à long terme et la santé dentaire. De plus, une analyse des coûts-avantages montre que les dépenses sont très peu profitables. Si le mandat englobait le maintien d'une bonne santé bucco-dentaire à long terme et un important volet de prévention, on pourrait réaliser des économies puisque les enfants souffrant de graves maladies dentaires souffriront des mêmes problèmes à l'âge adulte.

    Le seul aspect qui rachète un peu le Programme est le recours à des spécialistes en soins dentaires, qui fournissent des services de base dans les territoires et au sein des collectivités des Premières nations de toutes les provinces, à l'exception du Québec et de l'Ontario. Le recours à ces spécialistes rend le Programme plus efficace et plus efficient. Malheureusement, les hygiénistes dentaires ne figurent pas sur la liste des fournisseurs pouvant recevoir un numéro de facturation. Même dans les provinces où les hygiénistes dentaires peuvent exercer en autonome, leurs services ne sont pas utilisés. Le Programme n'autorise pas le recours à ces professionnels de la prévention qui pratiquent en autonome, même si leur intervention entraînerait des économies à long terme. L'exemple d'une hygiéniste dentaire qui exerce dans la réserve de Sandy Lake illustre parfaitement à quel point l'argent est mal utilisé. Elle reçoit fréquemment des enfants qui souffrent de cellulite, une infection des tissus mous causée par la carie dentaire. Ces enfants doivent prendre un vol d'une heure pour se rendre à l'hôpital le plus près, à Sioux Lookout. Ou, l'application d'une résine de scellement et d'une solution fluorée topique par l'hygiéniste dentaire pourrait prévenir cette intervention coûteuse—sans parler de la souffrance des enfants.

    Le Programme des SSNA est au coeur des relations avec le gouvernement des Premières nations et des Inuits, depuis un certain temps. Nous avons assez discuté. Il est temps de passer à l'action. Pour palier les lacunes mentionnées, l'ACHD demande au gouvernement fédéral d'investir plus d'argent dans la santé des collectivités, dans le Programme des SSNA et dans la lutte au tabagisme de la Direction générale de la santé des Premières nations et des Inuits, pour favoriser une approche interprofessionnelle de la santé et du bien-être, dont fait partie la santé bucco-dentaire. D'autres programmes de prévention et de promotion de la santé bucco-dentaire peuvent être conçus et mis en oeuvre par les hygiénistes dentaires, si on leur octroie un numéro de facturation. Ces programmes pourraient notamment comprendre des services mobiles d'hygiène dentaire dans les régions éloignées.

º  +-(1605)  

Une initiative nationale globale de prévention pourrait être axée sur les maladies bucco-dentaires chez les jeunes et les enfants des Premières nations et Inuits. Le Programme des SSNA pourrait subir un remaniement visant à réduire les exigences administratives. On pourrait offrir de bons programmes et des services de santé bucco-dentaire de base, qui comprendraient entre autres les interventions de restauration ainsi que la promotion d'un bon entretien, de la prévention et de la santé. Les hygiénistes dentaires pourraient orchestrer des campagnes anti-tabac, un moyen économique de prévenir le cancer et autres maladies associées au tabagisme.

    Ces questions stratégiques doivent être réglées en priorité pour améliorer l'accès des peuples des Premières nations et des Inuits à des services de santé bucco-dentaire, et pour réduire l'écart actuel entre l'état de santé bucco-dentaire de cette population par rapport à celle des non-Autochtones.

    Merci.

+-

    La présidente: Merci beaucoup.

    Nous passons maintenant la parole aux représentants de l'Association dentaire canadienne, les Drs Louis Dubé et Darryl Smith.

+-

    Dr Louis Dubé (président désigné, Association dentaire canadienne): Bonjour. Madame la présidente, je désire commencer par vous remercier, vous et les membres de votre comité, d'avoir aujourd'hui réuni ce groupe afin de nous pencher sur cette importante question. Je suis le Dr Louis Dubé et, à titre de président désigné de l'ADC, j'espère faire valoir auprès de vous les profondes inquiétudes partagées par les dentistes de partout dans ce pays au sujet de l'état de santé bucco-dentaire inacceptable dont souffrent les Autochtones canadiens.

    Un Programme des services de santé non assurés est géré par la Direction générale de la santé des Premières nations et des Inuits de Santé Canada. Les dentistes qui participent à ce programme reçoivent une trousse de renseignements aux prestataires, qui explique les nombreuses exigences administratives liées à la prestation des soins. Parce que ces exigences sont très nombreuses, et parce qu'elles diffèrent tellement de celles des régimes standards, de nombreux dentistes disposer d'un employé spécialement formé pour se charger spécifiquement de ces travaux d'écritures supplémentaires. De plus, le régime fonctionne essentiellement sur le principe de cession, ce qui signifie que le dentiste traite le patient et accepte d'être payé par Santé Canada après coup. Il s'agit là d'une distinction importante, parce qu'elle signifie que le dentiste court un risque financier si Santé Canada refuse de le payer. Autrement dit, les dentistes qui participent au Programme le font parce qu'ils sont engagés à offrir à ces patients des soins dont ils ont grand besoin.

    Malheureusement, les dentistes ne peuvent pas atteindre par eux-mêmes les objectifs du Programme. Le Programme des SSNA présente de sérieux problèmes qui l'empêchent de répondre aux besoins bucco-dentaires des Canadiens des Premières nations et inuits. Aussi est-il malheureux de voir que l'état de leur bouche reflète ces problèmes. Hier soir, alors que j'examinais le rapport annuel du Programme des services de santé non assurés, une statistique m'a particulièrement étonné: on a procédé à 66 000 extractions de plus cette année. En ma qualité de dentiste, je ne peux faire autrement que d'être attristé et troublé quand je vois de tels chiffres.

    Bon nombre d'enfants canadiens grandissent actuellement sans jamais avoir de caries. Ce n'est tristement pas le cas des enfants autochtones qui, à douze ans, ont en moyenne sept ou huit dents cariées ou absentes. Les caries non traitées chez les enfants peuvent devenir rampantes et entraîner des conséquences n'affectant pas simplement leurs dents, comme des douleurs, une incapacité à se concentrer en classe, un sommeil agité et de la difficulté à se nourrir. Les problèmes se poursuivent bien au-delà des années de jeunesse. Les maladies parodontales et des gencives sont fréquentes chez les patients adultes autochtones. Par elles-mêmes, les maladies parodontales peuvent être graves et finir par entraîner la perte des dents. Nous savons que les maladies des gencives et le diabète se développent simultanément, le progrès d'une maladie empirant l'autre. Et bien entendu, le diabète est un problème de santé répandu et grave dans les populations des Premières nations et inuites.

    En dépit du nombre croissant des soins nécessaires, au lieu d'étendre les services, le Programme des SSNA semble réduire sa couverture. Les dentistes découvrent que des services comme les traitements de canal, qui étaient auparavant couverts, sont maintenant rejetés. Dans le dernier budget fédéral, et plus tôt dans son discours du Trône, le présent gouvernement a indiqué la nécessité de rétrécir le fossé écart entre les résultats de santé des Autochtones et des non-Autochtones, et il a promis de consacrer des ressources à cette fin. Bien que cet objectif ait été également déterminé pour le Programme des SSNA, il ne s'agit pas d'une priorité concrète dans les opérations quotidiennes.

    Le deuxième problème a trait à l'accès aux soins. Le taux d'utilisation du Programme des SSNA est bas—selon ce que nous avons entendu aujourd'hui, 36 p. 100 environ. Ce taux peut être attribué en partie au fait que de nombreux Canadiens autochtones habitent des régions éloignées où ne réside aucun dentiste. Le Programme des SSNA couvre les frais de déplacement vers les prestataires de soins de santé. Paradoxalement, cependant, à cause du grand besoin de prédétermination, il se peut que les patients ne soient pas traités après avoir pris l'avion pour aller chez le dentiste, mais simplement évalués. Le patient retourne à la maison, pendant qu'un autre dentiste qui ne l'a pas examiné étudie son plan de traitement. Inutile de dire qu'il est très coûteux d'offrir des soins de cette façon et qu'il s'ensuit souvent que le traitement n'est pas donné puisque fréquemment les patients ne reviennent pas.

    Le dernier problème sur lequel je désire attirer votre attention aujourd'hui touche au respect de la vie privée et au consentement. Les dentistes ont commencé à s'inquiéter à ce sujet lorsque, dans le cadre du Programme de SSNA, certains ont fait l'objet de vérifications sur place, vérifications qui exigeaient le dévoilement de renseignements personnels sur les patients sans consentement approprié. Nous reconnaissons pleinement la nécessité de rendre compte de l'utilisation des fonds publics et nous sommes opposés à toute fraude quelle qu'elle soit, mais nous désirons un meilleur équilibre avec la nécessité de respecter la vie privée. Aussi sommes-nous reconnaissants du fait qu'en travaillant avec Santé Canada, nous avons pu résoudre dans une large mesure les problèmes de vérification. Cependant, touchant le consentement en général, nous avons appris que Santé Canada avait conçu une nouvelle initiative de consentement global, qui soulève énormément de préoccupations au sein de l'Assemblée des Premières nations. Les dentistes partagent une bonne partie de ces préoccupations. Si les patients sentent que leurs renseignements sont diffusés trop largement, il y a un risque réel qu'ils hésitent à les partager. Pour les dentistes, il est crucial, pour pouvoir offrir des traitements sûrs et efficaces aux patients, d'obtenir d'eux tous les renseignements possibles touchant leur état de santé.

  +-(1610)  

[Français]

    Qu'est-ce qu'on peut faire maintenant? J'ai défini à votre intention certaines préoccupations générales que les dentistes ont au sujet du programme des SSNA. Heureusement, nous pouvons recommander quelques solutions très viables, et bien que nous voyions certes d'un bon oeil un financement accru pour ces programmes, plusieurs améliorations peuvent être apportées sans une hausse considérable des budgets.

    Pour commencer, il convient d'alléger radicalement le fardeau administratif du programme. Cet allègement réduira le budget du programme des SSNA affecté à la paperasse, libérant ainsi plus d'argent pour les soins. Il stimulera le bon vouloir des dentistes participants, ce qui améliorera l'accès aux soins.

    Nous sommes d'avis que le programme des SSNA doit, dans son volet dentaire, imiter davantage le régime des soins dentaires standard protégeant les Canadiens non autochtones. Il suffirait d'y intégrer simplement un mécanisme, de manière à respecter les droits conférés par traité aux premières nations et aux Inuits.

    Au niveau des procédures administratives, on pourrait améliorer facilement la situation en éliminant les prédéterminations exigées pour les travaux des restaurations de base, surtout lorsque le patient ou le dentiste doit se déplacer. Comme il s'agit de soins qui s'imposent indiscutablement, il ne devrait pas y avoir d'autres barrières administratives, et à tout le moins, le taux de prédétermination devrait être haussé à 1 000 $, comme c'est le cas pour la majorité des programmes standards qu'on retrouve sur le marché. On devrait éliminer les prédéterminations exigées en double lorsque seulement des révisions mineures ont été effectuées. Enfin, il faudrait transférer le programme des SSNA sur le CDAnet, tel qu'entendu.

    Outre les problèmes causés par le fardeau administratif, il y a dans le programme des SSNA d'autres objectifs qui pourraient avoir une influence à la fois sur les résultats pour la santé et les problèmes d'accès. On trouve entre autres: élargir la partie du programme portant sur la promotion de la santé bucco-dentaire et amener les patients à se prendre en charge. Il faudrait aussi davantage d'efforts en vue de recruter des Canadiens autochtones pour occuper des professions dans le secteur de la santé telles que la médecine dentaire.

    Les enfants des premières nations ont besoin de modèles positifs. Maintenir la méthode de travail en équipe pour la prestation des soins bucco-dentaires est aussi nécessaire. Cette population présente beaucoup de problèmes de santé complexes, alors un diagnostic et un plan de traitement complet sont nécessaires.

    Enfin, au sujet du consentement, la dentisterie soutient qu'on doit demander au patient de consentir uniquement les renseignements personnels qui touchent directement leurs soins, et ce, dans le but de se faire indemniser. L'utilisation de ces renseignements pour les vérifications d'ordre administratif pour des études sur la consommation de médicaments ou pour d'autres fins doit se faire séparément et selon le besoin.

    Pour conclure, madame la présidente, je tiens à vous remercier encore une fois d'avoir organisé cette rencontre qui réunit des parties intéressées afin de parler de la santé bucco-dentaire des Canadiens des premières nations et des Inuits. Nous avons tous besoin de continuer à travailler ensemble à combler le fossé en matière de santé autochtone afin que tous les Canadiens puissent profiter d'une meilleure santé bucco-dentaire.

    Mon collègue Darryl Smith, qui traite beaucoup de patients des premières nations en Alberta, et moi-même serons prêts à répondre aux questions à la fin.

    Merci.

º  +-(1615)  

[Traduction]

+-

    La présidente: Merci, Dr Dubé.

    Nous entendrons maintenant les témoignages des représentants du ministère de la Santé, le Dr Peter Cooney et Mme Leslie MacLean.

    Dr Cooney, vous est-il possible de donner suite à certaines des affirmations que nous avons entendues jusqu'ici?

+-

    Dr Peter Cooney (directeur général, Direction des services de santé non assurés, Direction générale de la santé des premières nations et des Inuits, ministère de la Santé): Certainement.

    Madame la présidente et distingués membres du comité, nous sommes ravis d'avoir l'occasion de vous faire un compte rendu sur le programme dentaire de la Division générale de la santé des Premières nations et des Inuits de Santé Canada, ainsi que sur les mesures entreprises pour régler des problèmes éminemment complexes et difficiles, comme nous l'avons entendu aujourd'hui. Ces problèmes ne touchent pas seulement la santé bucco-dentaire, mais la santé générale des bénéficiaires du Programme des services de santé non assurés.

    Le Programme des services de santé non assurés est un programme de santé publique qui permet à plus de 720 000 clients des Premières nations et inuits d'avoir accès à des services de santé non assurés. Le financement des services dentaires est fonction des besoins des clients, et il tient compte de leur état de santé bucco-dentaire actuel, des antécédents personnels à cet égard, des résultats combinés de la recherche scientifique et des modes diversifiés de traitement disponibles. Le Programme couvre toute une gamme de services, y compris les services de diagnostic, les traitements de prévention, de restauration, endodontiques et orthodontiques.

    Les services sont offerts par de très nombreux fournisseurs. Comme vous l'avez entendu aujourd'hui, la grande partie des services est fournie par des dentistes qui exercent en privé, mais aussi par certains spécialistes en soins dentaires et par des dentistes contractuels—ces dentistes fournissent des services en pratique privée aux collectivités de Premières nations et inuites—, dont les clients retiennent les services par voie de contrat, ainsi que, bien entendu, par des hygiénistes dentaires en pratique privée.

    La prestation des soins dentaires est axée sur les besoins, ce qui permet de donner aux clients les services dont ils ont besoin. Les besoins sont évalués lors du processus de prédétermination, au cours duquel le fournisseur de services dentaires élabore un plan de traitement pour le bénéficiaire, qu'il soumet ensuite au programme aux fins d'approbation du financement.

    Compte tenu de la diversité des fournisseurs et des services qui sont couverts, il est très évident qu'il y a matière à amélioration à l'intérieur du programme. C'est pourquoi on a formé un groupe de travail conjoint SSNA-ADC, avec la participation de représentants de la clientèle. Son mandat est de trouver des solutions aux problèmes administratifs et de politique dont vous avez entendu parler aujourd'hui. Par ailleurs, des discussions sont en cours avec des représentants des Premières nations et des Inuits afin de recueillir leurs commentaires.

    Parmi les modifications apportées au Programme, citons l'augmentation du niveau de prédétermination à 800 $—il n'est plus de 600 $, contrairement à ce qui a été affirmé plus tôt. Ainsi, si les soins nécessaires coûtent moins de 800 $, le régime n'impose pas d'autorisation préalable—ce n'est plus 600 $. N'oublions pas que les patients reçoivent des soins qui coûtent en moyenne 420 $, de sorte qu'un plafond de 800 $ ne devrait pas poser de difficulté majeure.

    C'est un exemple des modifications apportées. Nous avons aussi instauré la post-approbation de services sélectionnés et nous avons élaboré des protocoles de vérification avec des organismes de réglementation des services dentaires—recommandés par l'Association dentaire canadienne—, pour tenir compte à la fois des besoins des dentistes qui exercent en privé et de ceux de Santé Canada. Ces modifications ont réduit le fardeau administratif, tout en augmentant l'uniformité de l'application du programme.

    Le programme de soins dentaires fonctionne-t-il efficacement? En 2002-2003, le Programme des SSNA a permis à quelque 365 000 clients des Premières nations et inuits de recevoir des soins dentaires chez des dentistes en pratique privée, ce qui a coûté un peu moins de 130 millions de dollars. Ces chiffres n'englobent pas les services fournis par les spécialistes en soins dentaires et les dentistes contractuels dans le cadre du Programme.

    Madame la présidente, pour répondre à la question que vous avez soulevée concernant de possibles compressions du Programme, je vous assure que ce n'est pas le cas. Le chiffre de 130 millions de dollars auquel j'ai fait allusion représente une augmentation de 5 p. 100 par rapport aux dépenses de l'an dernier. Par conséquent, les coûts de ce programme augmentent à un rythme allant de 3 à 5 p. 100 par année. Il est loin de subir des compressions. Dans l'ensemble, si on considère les coûts totaux, le financement du programme a augmenté de 9,5 p. 100 environ par rapport à l'exercice précédent. Nous n'avons donc certainement pas réduit les crédits affectés aux soins dentaires.

    Malgré ces subventions, les taux de caries parmi les populations des Premières nations et inuites restent toujours deux fois plus élevés que...

+-

    M. Greg Thompson (Nouveau-Brunswick-Sud-Ouest, PC): J'aimerais obtenir une précision.

    Madame la présidente, je sais qu'il y aura une période de questions, mais puisque le Dr Cooney aborde la question du budget total et des coûts globaux, j'aimerais savoir si les chiffres englobent aussi le coût du transport?

+-

    La présidente: Je ne sais pas.

    Peut-être peut-il répondre.

+-

    Dr Peter Cooney: Les 130 millions de dollars couvrent seulement les soins dentaires—il ne s'agit pas du coût total, et ce chiffre n'englobe pas les services pharmaceutiques et de transport. Je pourrai donner les chiffres exacts au comité si nécessaire.

    Au premier abord, on peut être découragé en constatant que les taux de caries dentaires sont deux à trois fois plus élevés dans les populations des Premières nations et inuites que dans le restant de la population. Cependant, les programmes de la DGSPNI ont en fait des retombées positives sur la santé bucco-dentaire. En effet, les taux de caries chez les enfants de 12 ans des Premières nations et inuits ont diminué de 50 p. 100 environ au cours des 20 dernières années. Leur indice DCMO est passé de 9 ou 10 à 4,4 environ. C'est encore très élevé, mais la réduction des taux de caries dentaires de presque la moitié au cours de la dernière décennie nous montre que nous sommes sur la bonne voie. Et nous souhaitons poursuivre sur la même lancée. De toute évidence, le but ultime est de permettre aux enfants et aux adultes des collectivités des Premières nations et inuites d'avoir une aussi bonne santé que les Canadiens non-autochtones.

    Pour que la santé bucco-dentaire des Premières nations et des Inuits continue de s'améliorer, la DGSPNI a proposé un régime de soins dentaires destiné aux enfants. Ce régime est fondé sur les besoins établis à partir des données du Programme des SSNA, dont sont tirées certaines statistiques citées plus tôt. Pour reprendre la statistique citée par mon collège Larry Gordon, 25 p. 100 des enfants âgés de moins de 4 ans ont reçu des soins en 1999 mais, sur ceux qui ont été traités, plus de 4 000 l'ont été sous anesthésie générale, pour une maladie facile à prévenir. La préoccupation formulée aujourd'hui est légitime. Par exemple, pourquoi tant de petits enfants doivent-ils être traités dans les hôpitaux OU subir tant de séances de traitement alors que ces maladies sont faciles à prévenir?

    C'est pour régler ce genre de problèmes que nous avons instauré le plan de santé bucco-dentaire pour les enfants, une approche globale axée sur la prévention et la diminution des besoins de traitements de restauration. Le plan fournit de l'information sur les soins particuliers que doivent prendre les femmes enceintes et les fournisseurs de soins de première ligne; il propose des soins préventifs pour les enfants de 0 à 5 ans, tels que le vernis fluoré; des soins préventifs, tels que les résines de scellement, pour les enfants de 6 ans; des soins de suivi préventif périodiques pour les enfants qui entrent à l'école et, enfin, des soins de maintien pour les enfants de 7 ans et plus.

    Comme mes collègues l'ont mentionné avant moi, il est impératif de changer notre fusil d'épaule, de mettre l'accent sur la prévention des maladies bucco-dentaires plutôt que sur les interventions thérapeutiques telles que les obturations. C'est exactement ce que nous nous proposons de faire avec le plan de santé bucco-dentaire pour les enfants.

    Madame la présidente, pour la deuxième partie de ce bref exposé, je passerai la parole à ma collègue, Mme Leslie MacLean. Elle vous fera part de certaines des difficultés actuelles inhérentes à la gestion du programme.

º  +-(1620)  

+-

    La présidente: Merci.

    Madame MacLean.

+-

    Mme Leslie MacLean (directrice générale intérimaire, Services de santé non assurés, Direction générale de la santé des Premières nations et des Inuits, ministère de la Santé): Merci, Peter.

    Notre capacité à fournir des programmes de santé—et particulièrement dans le domaine qui intéresse le Comité aujourd'hui, la santé bucco-dentaire—est directement liée à la qualité de la gestion des programmes et de notre travail d'examen. Seul un processus décisionnel fondé sur des faits nous permet de cibler les services qui sont nécessaires et de trouver les moyens d'améliorer nos programmes. Ou, pour être en mesure de prendre des décisions éclairées, nous avons besoin d'information, de renseignements personnels sur les clients. Ce qui m'amène à vous parler d'une autre initiative en cours dans le cadre du Programme des services de santé non assurés: l'initiative de consentement des clients.

    Vous savez peut-être que le Programme est maintenant tenu d'obtenir le consentement explicite des bénéficiaires pour recueillir, utiliser et divulguer des renseignements personnels qui les concernent. Le Programme doit faire diligence pour être conforme à la Charte des droits et libertés et à la Loi sur la protection des renseignements personnels. Je souligne au passage que tous les régimes d'assurance-maladie demandent le consentement de leurs bénéficiaires pour recueillir et utiliser ces renseignements de la façon la plus restreinte et la plus sécuritaire possible. Le consentement que nous demandons est en fait semblable à celui qui est demandé aux bénéficiaires de programmes similaires, tels que les anciens combattants.

    Dans le passé, nous avons toujours fonctionné avec le consentement implicite de nos clients. Cependant, pour donner suite au conseil du ministère de la Justice du Canada, nous avons entrepris voilà trois ans un projet visant à recueillir le consentement explicite de nos clients. Au printemps 2000, nous avons entamé une collaboration avec l'APN et l'ITK pour trouver le meilleur moyen d'obtenir ce consentement. Incidemment, des représentants des deux organismes sont ici aujourd'hui.

    Nous avons lancé notre campagne en septembre 2002, ce qui nous donnait une année entière pour informer les gens de notre obligation de recueillir leur consentement et suffisamment de temps pour mettre le processus en place. Tout en admettant la nécessité d'obtenir le consentement de ceux dont on utilise les renseignements personnels, les chefs des Premières nations et divers organismes continuent de manifester bruyamment—vous en avez eu un exemple aujourd'hui—leur opposition à l'initiative de consentement. Ils s'insurgent contre le processus, le contenu du formulaire et parce qu'ils ont peur pour leurs droits issus des traités.

    Nous avons rencontré des représentants des Premières nations et des Inuits à maints échelons, dont le comité consultatif mixte sur le consentement, formé en juin 2000 et dont la mission est de prodiguer des conseils sur la mise en oeuvre. Nous avons fixé au 1er septembre 2003 le délai pour recevoir le consentement.

    Nous avons retenu cette date parce qu'elle représente le meilleur compromis: elle nous donne le temps de consulter la plus grande partie possible des 700 000 clients et plus, dans un souci de collaboration, et elle nous permettra aussi de faire le rattrapage nécessaire par rapport à d'autres régimes. Cette procédure d'obtention du consentement est primordiale pour démontrer officiellement notre souci de respecter la vie privée des bénéficiaires, pour nous conformer à la loi et pour continuer à fournir les services. Nous continuons donc nos rencontres avec des représentants des collectivités des Premières nations et inuites, pour leur fournir de l'information, ainsi que pour répondre à leurs questions et à leurs préoccupations à l'égard du consentement ou d'autres besoins en matière de santé.

    L'apport des Premières nations et des Inuits, conjugué à la diffusion adéquate de l'information, sont les éléments clés de l'efficacité accrue de nos programmes de santé et, plus précisément étant donné le sujet à l'ordre du jour, des programmes de santé bucco-dentaire. C'est aussi l'avenue privilégiée pour nous adapter aux nouveaux besoins en matière de santé.

º  +-(1625)  

[Français]

    Merci beaucoup pour votre intérêt. Dr Cooney et moi serons ravis de répondre à vos questions.

[Traduction]

+-

    La présidente: Merci.

    Monsieur Merrifield.

+-

    M. Rob Merrifield: Je voudrais tout d'abord vous remercier de vous être déplacés. Cette question me préoccupe depuis un certain temps déjà et je suis content d'avoir l'occasion d'en apprendre un peu plus aujourd'hui.

    Si j'ai bien compris, la question comporte deux volets. Le premier est la prévention. Le deuxième est de reconnaître le problème et de trouver comment il peut être réglé. Pour ramener le tout en termes très simples, je résumerais vos paroles ainsi: vous admettez que quand vous tentez de trouver des solutions au problème, vous arrivez devant l'énorme obstacle d'une bureaucratie trop lourde, de toute la paperasse à remplir. Il me semble que le processus de consentement est problématique. J'essaie de comprendre pourquoi ce volet pose un problème.

    Je ne sais pas à qui adresser ma question. Je ne suis pas tant intéressé par la raison qui vous pousse à demander un consentement que par la raison pour laquelle on refuse de vous le donner. Où est le problème?

+-

    Dre Mary Jane McCallum: Pour ce qui est du formulaire de consentement, j'en ai entendu parler seulement en avril, il y a un an. Très peu de collectivités de Premières nations sont au courant. Le problème est que le formulaire de consentement est global. Il englobe les cinq secteurs de services: les services pharmaceutiques; les soins dentaires; l'optométrie; le transport médical et les fournitures médicales. Les cinq secteurs sont couverts par le formulaire de consentement. Le formulaire est recueilli par des membres des Premières nations—même pas par des fiduciaires désignés par le provincial ou le fédéral.

    À titre de prestataire d'un service, je suis tenue de donner de l'information aux patients sur l'utilisation des renseignements qu'ils me transmettent, sur la collecte, sur la raison de la collecte de renseignements personnels. Je dois m'assurer qu'ils comprennent bien comment l'information sera utilisée. Je ne peux pas le faire si quelqu'un d'autre a obtenu le consentement à ma place.

+-

    M. Rob Merrifield: Vous attribuez le problème à la réticence à donner ce consentement ou au fait que le processus est tellement maladroit qu'il ne peut les inciter à donner leur consentement? Le problème ne vient pas de leur volonté à donner leur consentement; il concerne les modalités d'obtention. Est-ce exact?

+-

    Dre Mary Jane McCallum: Oui, il est trop maladroit.

    Par ailleurs, si les clients ne signent pas le consentement, ils n'ont pas accès aux services. Les services obtenus leur sont remboursés. Mais pour être remboursés, les clients doivent signer le consentement. Le processus de consentement sert de levier. Il place les professionnels de la santé et les patients en situation d'opposition.

+-

    M. Rob Merrifield: On vient tout juste de demander ce consentement, qui doit avoir été transmis avant le 1er septembre prochain. C'est cela?

+-

    Dre Mary Jane McCallum: Tous les formulaires de consentement doivent être déposés avant le 1er septembre.

+-

    M. Rob Merrifield: C'est une mesure récente du Programme. Je comprends. Jusqu'à maintenant, comment fonctionnait-on?

+-

    Mme Leslie MacLean: Je dois préciser que nous parlons de deux types de consentement différents. Le premier a trait au consentement qu'un client donne au fournisseur pour obtenir des soins. Si j'ai besoin d'un traitement de canal aujourd'hui, le dentiste devrait normalement me demander si j'y consens ou non. C'est un premier type de consentement.

    Je faisais référence au consentement demandé par Santé Canada, à savoir l'autorisation explicite que nous donne le bénéficiaire de recueillir les renseignements dont nous avons besoin pour payer la facture. Auparavant, au contraire d'autres programmes comme le programme de santé de la fonction publique, les programmes à l'intention des anciens combattants et les régimes provinciaux d'assurance-maladie, nous n'avons jamais demandé aux bénéficiaires de signer un formulaire sauf, c'est une pure coïncidence puisque c'est le thème du jour, pour ce qui est du programme dentaire, pour lequel un formulaire de consentement existe depuis quelques années.

    Nous avons aussi mis en place un mécanisme de consentement préalable pour les services de santé mentale. Notre but est de faire signer un seul formulaire pour tous les secteurs de services, de la même façon que vous signeriez un formulaire en vue pour bénéficier des services couverts par votre régime d'assurance-maladie.

    Je ne sais pas si j'ai répondu à votre question.

º  +-(1630)  

+-

    M. Rob Merrifield: Il faut signer ce formulaire pour avoir accès aux services?

+-

    Dre Mary Jane McCallum: Non. Ils nous le remettent dans notre bureau. Je suis désolée, j'ai parlé avant mon tour.

+-

    M. Rob Merrifield: Ce n'est pas grave. Je veux aussi entendre la version des dentistes à ce sujet.

+-

    La présidente: Vous affirmez en fait que nous signons tous un formulaire pour bénéficier de notre régime d'assurance-maladie—nos assurances soins dentaires et toutes les autres?

+-

    Mme Leslie MacLean: Je vais vous donner un exemple. En tant que fonctionnaire, je suis membre d'un régime appelé le RAGFP. Si je veux bénéficier de soins ou de prestations pharmaceutiques, pour avoir accès au service, je paie à l'avance et je suis remboursée après. Nos bénéficiaires n'ont rien à débourser dans le processus actuel. Ils reçoivent le service directement, sauf s'il doit être préapprouvé.

+-

    La présidente: Signez-vous quand...

+-

    Mme Leslie MacLean: Oui.

+-

    La présidente: Quelqu'un d'autre peut-il me confirmer s'il signe un formulaire chaque fois qu'il se rend chez le dentiste?

    Une voix: Non.

    La présidente: Je ne signe jamais non plus. Il n'y a pas de procédure de signature.

    Veuillez m'excuser. Continuez.

+-

    Dr Darryl Smith (membre du conseil d'administration, Association dentaire canadienne): Merci. Pour ce qui est du consentement—les bénéficiaires de ce programme ont toujours signé un formulaire de consentement dans le cabinet du dentiste au moment du traitement, afin de recevoir les services. Le problème avec le consentement global est qu'il constitue en réalité un contrat entre les Premières nations ou les clients autochtones et Santé Canada.

    Voici le problème qu'il faut redouter: dans ce contrat, le client donne à Santé Canada le droit de recueillir de l'information—qui a pu être échangée sous le sceau de la confidentialité entre le fournisseur et le client. Du point de vue de l'ADC et du milieu de la dentisterie en général, il est toujours mieux d'obtenir le consentement pour recueillir des renseignements, quels qu'ils soient, au moment où les services sont fournis. S'il s'agit d'un contrat qui décrit le régime, Santé Canada doit en aviser les membres des Premières nations.

    De façon assez intéressante, ces formulaires de consentement global ont été envoyés aux cabinets de dentistes, qui doivent les administrer au nom de Santé Canada. De toute évidence, même s'il ne nous appartient pas de fournir ce type d'information, cela ajoute encore au fardeau bureaucratique du programme.

    J'espère que ma réponse vous éclaire un peu.

+-

    M. Rob Merrifield: J'ai une partie de la réponse, mais j'aimerais entendre ce que les deux autres ont à dire.

    Kimberly.

+-

    Mme Kimberly Whetung (directrice adjointe, Secrétariat à la santé, Assemblée des Premières nations): Mary Jane vous a donné le point de vue d'un fournisseur de service autochtone. Beaucoup de clients des Premières nations vont dans le même sens. Il ne veulent pas signer le formulaire de consentement global, pour diverses raisons. L'une d'elles vient de ce qu'il s'agit d'un consentement global, justement. Il couvre l'ensemble des antécédents médicaux et dentaires d'un client. Cette universalité pose des problèmes sur le plan de la propriété, du contrôle, de l'accès, de la détention de l'information. Qui verra l'information? Nous avons déjà fait une étude de suivi pour déterminer où allaient les renseignements sur les membres des Premières nations.

    Le Dr Cooney sait déjà que nous avons tenté de faire ce suivi. Nous avons découvert que certains de ces renseignements se rendent jusqu'aux États-Unis, avant de revenir. Ces renseignements sont divulgués partout. C'est énorme.

    La question de la vie privée est au coeur des préoccupations des clients des Premières nations. Ils ne se sont jamais insurgés contre le formulaire Dent-29, utilisé actuellement pour obtenir le consentement des clients chez les dentistes. Le consentement est demandé chaque fois que les services sont utilisés. Une fois le traitement effectué, le client signe le formulaire avec de quitter. Il n'y a jamais eu de problème.

    Mais ils contestent ce formulaire général, et je n'hésite pas à dire qu'un grande partie du problème vient de la façon dont le formulaire a été présenté aux Premières nations. À nos yeux, il a été présenté d'une façon menaçante. Si nous refusons de signer, nous n'obtiendrons pas les services—pas ceux de Santé Canada, où on affirme qu'on ne nous refusera pas les services, mais ceux des fournisseurs, parce qu'ils ne pourront pas être remboursés.

    Au sein de l'APN, nous avons fait beaucoup de travail technique, avec les associations dentaires et avec la DGSPNI, pour trouver une solution au problème du consentement du client.

    Les Premières nations sont particulièrement préoccupées par le volet du consentement appelé l'examen de l'utilisation des médicaments. C'est l'élément qui provoque le plus de réactions dans tout le processus de consentement. Nous voulons collaborer avec nos collègues de la DGSPNI pour mettre au point deux processus distincts : un processus de consentement en vue du remboursement, et un autre processus de consentement en vue de l'examen de l'utilisation des médicaments. Nous avons demandé de voir les formulaires que doivent signer les anciens combattants, les membres de la GRC et d'autres fonctionnaires fédéraux bénéficiaires d'avantages administrés par le gouvernement fédéral. Nous n'avons pas encore eu le privilège d'examiner ces formulaires de consentement du client. Nous avons remis le dossier entre les mains d'un groupe d'experts.

    Le commissaire à la protection de la vie privée a déclaré qu'un tel consentement global n'était pas vraiment acceptable.

º  +-(1635)  

+-

    M. Rob Merrifield: La question du consentement lié aux services médicaux fait actuellement l'objet de débats dans toutes les provinces canadiennes—on cherche une méthode pour que les dossiers médicaux suivent le patient. On aboutira certainement à une solution dans les trois ou cinq prochaines années. Je crois que tout le monde se penchera sur cette question.

    J'aimerais entendre le Dr Dubé à ce sujet.

+-

    Dr Louis Dubé: Mme Whetung vous a déjà donné une partie de ma réponse.

    Pour revenir au commentaire de la présidente sur la signature d'un formulaire lors d'une visite chez le dentiste, je vous informe que oui, vous le faites. Cependant, vous signez un consentement pour la visite en question, et il vaut seulement pour une fois. Nous parlons de quelque chose de différent. Dans le cas qui nous occupe, le client doit signer pour une période indéterminée. C'est très différent. Nous sommes tout à fait d'accord avec l'idée d'une formulaire de consentement à la pièce, similaire à celui qui est utilisé pour tous les autres programmes ou régimes, parce que le client ne donne pas alors le même type de consentement.

+-

    M. Rob Merrifield: Ce consentement vient-il s'ajouter à toute la paperasserie existante? Je crois que le Programme entraînait déjà toute une masse de papiers avant même que la question du consentement ne soit soulevée. Est-ce que je me trompe? Voyez-vous les choses ainsi?

+-

    Dr Darryl Smith: Le principal problème qui se posera le 1er septembre concerne l'accès aux soins. Si un client d'une Première nation ou inuit n'a pas signé le formulaire de consentement, il n'aura pas accès aux services couverts par le Programme. Par conséquent, si une personne se présente dans mon cabinet, je serai tenu, selon le code déontologique auquel je suis assujetti comme fournisseur, de lui prodiguer les soins d'urgence pour le soulager de sa souffrance. Le problème ici en est un d'accès, et il est déjà très aigu pour plusieurs autres raisons, dont l'absence de praticiens dans la région et les longues distances à parcourir. Déjà, toutes sortes d'obstacles empêchent cette clientèle d'obtenir les soins auxquels elle a droit au même titre que les autres citoyens canadiens.

+-

    M. Rob Merrifield: Vous disiez donc que, après le 1er septembre, ils se présentent? Avant de recevoir un traitement, ils devront signer le formulaire de consentement, non?

+-

    Dr Darryl Smith: Oui, ils devront avoir signé le formulaire de consentement. Ce sera encore...

+-

    M. Rob Merrifield: Quel est le problème avec le fait de signer à ce moment?

+-

    Dr Darryl Smith: Le problème associé à la signature de ce formulaire de consentement précis vient du fait qu'il s'agit d'un contrat entre Santé Canada et le client. Ou, je ne devrais pas, en ma qualité de dentiste, avoir à administrer ce contrat. Je fais déjà beaucoup de travail de consultation pour les Premières nations, pour lequel je ne suis pas payé. C'est une autre tâche qui s'ajoute à mon travail. Je devrai conseiller les gens. Je ne crois pas que je devrais signer ce contrat.

+-

    M. Rob Merrifield: Il me semble que les dentistes veulent éviter le cauchemar administratif de remplir les formulaires et de les faire signer.

    Que dit Santé Canada à ce propos? C'est un amalgame, non?

+-

    Dr Peter Cooney: Oui.

    Pour mettre les choses en perspective, nous recueillons des consentements dans le cadre du programme dentaire, par la voie du formulaire Dent-29, depuis 1998. Nous recueillons donc des consentements liés aux soins dentaires depuis bientôt cinq ans.

+-

    M. Rob Merrifield: C'est une autre forme de consentement, cependant.

+-

    Dr Peter Cooney: C'est vrai.

    Nous avons opté pour le consentement générique notamment en raison de l'envergure du Programme—pour répondre à une question posée auparavant. Pour vous donner une idée de l'envergure du Programme, nous avons traité l'an dernier quelque 10,5 millions de réclamations pour services pharmaceutiques à l'intérieur du programme pharmaceutique, et un peu moins de 2 millions de réclamations pour des soins dentaires. Les composantes pharmaceutique et dentaire représentent un peu plus de la moitié du Programme des services non assurés. Si on fait le calcul, il peut y avoir entre 10 et 20 millions de transactions par année dans le cadre du Programme.

    Pour rendre la vie plus facile et plus acceptable aux gens, nous avons conçu un formulaire générique avec les groupes de clients, c'est-à-dire un consentement global qui nous permettra de traiter leurs réclamations aux volets dentaires et autres du Programme, de sorte que les clients puissent se sentir à l'aise de transmettre des renseignements. S'ils ne veulent pas signer le formulaire générique, il existe une solution de rechange, bien entendu, qui consisterait à signer un formulaire chaque fois qu'ils reçoivent un service. Ce sera relativement simple pour le dentiste, mais le travail administratif sera plus lourd, et c'est ce que nous tentons de diminuer. Notamment, nous avons entrepris le traitement électronique des réclamations pour soins dentaires, qui est effectué en Alberta. Nous voulons déplacer les opérations de traitement vers l'Alberta, ce qui réduira le travail administratif des dentistes de la moitié environ. C'est une autre modification que nous avons apportée, qui s'ajoute à la hausse du taux de prédétermination de 600 $ à 800 $. Il y aura donc de moins en moins, et non de plus en plus, de travail administratif.

    Le passage au traitement électronique nous oblige à nous conformer à la Loi sur les documents électroniques. Un fournisseur ne peut nous transmettre de l'information sur un patient—ce qui est tout à fait normal. Nous ne pouvons prendre connaissance d'une information tant que le patient n'a pas donné son consentement. L'objet du consentement est de nous autoriser à prendre connaissance de l'information, à traiter la réclamation et à payer la facture. Nous demandons au patient de donner son consentement sur ce formulaire générique, ou général, si vous préférez. S'il décide de ne pas donner son consentement global, il pourra signer une demande ponctuelle de remboursement.

    Nous avons commencé à envoyer les formulaires et nous en avons reçu quelque 40 000 en retour. Il semble donc que beaucoup de personnes ne nous prêtent pas de mauvaises intentions. Mais nous respectons celles qui sont mal à l'aise avec le processus. Ces personnes peuvent signer une demande de remboursement unique, tout comme vous le faites pour soumettre une réclamation à votre régime d'assurances privé, ou comme le font les fonctionnaires. De toute évidence, si le patient opte pour cette méthode, il doit avoir de l'argent pour payer la facture. C'est ce qui nous inquiète et c'est pourquoi nous aimerions mieux que les clients signent le consentement générique, pour qu'ils n'aient pas à payer les factures en attendant le remboursement, comme c'est le cas de la plupart, sinon de la majorité, des régimes privés.

º  +-(1640)  

+-

    La présidente: Merci, monsieur Merrifield.

    Je suis désolée, mais je dois interrompre nos travaux durant une minute.

    Vous vous rappelez que notre réunion d'hier s'est terminée un peu abruptement. Nous voulions étudier une deuxième motion. Je ne pense pas qu'elle nécessite un débat parce que vous vous souviendrez que notre collègue, M. McKay, nous a parlé d'un projet de loi d'initiative parlementaire qui nous a été renvoyé. Selon lui, il nous faudrait plus de temps pour l'étudier. Aussi, Mme Bennet a proposé que, conformément à l'article 97.1 du Règlement, le Comité demande une prolongation de trente jours de séance pour l'étude du projet de loi C-260, Loi modifiant la Loi sur les produits dangereux (cigarettes à inflammabilité réduite).

+-

    Mme Carolyn Bennett: J'en fais la proposition.

+-

    La présidente: Merci.

    (La proposition est adoptée.)

    La présidente: Merci, mesdames et messieurs.

    Je m'excuse auprès des témoins pour cette interruption. Nous allons poursuivre.

    Monsieur Ménard.

[Français]

+-

    M. Réal Ménard: J'avoue avoir un peu de difficulté à comprendre tout ça et je veux m'assurer que je comprends bien. D'abord, le formulaire de consentement éclairé dont on parle, est-ce que c'est celui qui a été distribué aux députés? D'accord.

    Donc, prenons un cas concret pour bien comprendre. Si je suis un autochtone de l'Ontario, du Québec ou de n'importe quel endroit au Canada et que je me présente chez un dentiste pour un traitement de canal ou une obturation quelconque, pour que le professionnel qui va poser l'acte puisse être remboursé, il faut que le prestataire remplisse ce formulaire-là. À ce moment-là, le professionnel va être remboursé. Mais le problème, c'est que le formulaire n'est pas utilisé seulement pour l'acte en question, il est utilisé de manière plus générale. Est-ce bien ça?

    Il me semble que ce formulaire donne de l'information nominative; il ne me semble pas qu'il donne beaucoup d'autres types d'informations. Avez-vous des exemples précis à donner au comité pour montrer que des informations recueillies dans ce formulaire ne seraient pas pertinentes et pourraient causer un préjudice au bénéficiaire, au-delà de ce qu'il réclame pour les soins de santé? Est-ce qu'il y a un problème quant ce que demande le formulaire?

    Moi, quand je vais chez le dentiste, je signe ce formulaire de consentement éclairé. Si les frais sont payés avec des fonds publics, je comprends qu'on le demande. Mais j'essaie de comprendre quel est le problème. Peut-être qu'on demande aux autochtones des informations non justifiées qui peuvent ensuite être utilisées à des fins non pertinentes liées à la vie privée. J'essaie de comprendre.

º  +-(1645)  

+-

    Mme Leslie MacLean: Est-ce que je peux répondre, madame la présidente? Merci.

    Ce que vous avez ici, dans les trousses qui ont été distribuées, c'est le formulaire général. Le formulaire dont on vient de discuter est un formulaire spécifique aux fins dentaires.

    Mais vous avez raison, ici, c'est vraiment de l'information nominative: le nom, l'adresse, le numéro d'identification. Par contre, normalement, pour chaque transaction qu'un autochtone, une personne d'une première nation ou un Innu effectue, ce seront vraiment les faits transactionnels qui seront recueillis: donc quel est le service rendu, à quel est le coût? C'est vraiment de l'information qui se restreint à la transaction effectuée.

    Selon la Loi sur la protection des renseignements personnels, comme ministère, nous avons le droit de recueillir seulement l'information requise pour faire nos affaires, et nous devons la garder de manière très protégée.

+-

    M. Réal Ménard: Sauf dans le cas de Mme Stewart pour l'assurance-emploi. Mais ça, c'est un autre débat.

[Traduction]

+-

    Dre Mary Jane McCallum: Il n'y a que deux provinces au Canada qui se soient dotées d'une loi sur les renseignements médicaux personnels. Je vous ai transmis l'information, mais je ne sais pas si vous l'avez dans votre trousse de documentation. Donc, il est clairement dit que c'est actuellement la seule loi qui m'oblige à faire quelque chose. En vertu de cette loi, je dois faire la distinction entre les différents contextes entourant les renseignements médicaux personnels. Le traitement des demandes de paiement en est un. Aussi, lorsque je recueille ces renseignements et que je les transmets en vue de recevoir un paiement, ils ne visent que les prestations et la vérification de l'admissibilité du bénéficiaire. Notre seule responsabilité consiste à signer le formulaire après avoir décrit les services que nous avons dispensés, et c'est tout.

    En ce qui concerne les autres utilisations des renseignements médicaux personnels, je dois remettre à mes patients un dépliant leur expliquant quel usage sera fait de leurs renseignements médicaux personnels dans le cadre du programme. Aussi, avant de les transmettre à Santé Canada, je dois m'assurer que mes patients comprennent bien l'utilisation qui sera faite de leurs renseignements et qu'ils donnent leur consentement. Si j'enfreins...

[Français]

+-

    M. Réal Ménard: D'accord. Mais s'il y a un programme de plusieurs millions de dollars qui est administré avec des fonds publics...

    Il y a deux objections possibles: ou bien vous ne voulez pas servir d'intermédiaire pour le ministère des Affaires indiennes et du Nord canadien--on peut peut-être comprendre ça--, ou bien vous remettez en question le fait même que s'il y a des fonds publics, on recueille de l'information pour s'assurer que le paiement soit effectué à de bonnes fins.

    Ce que je ne réussis pas à comprendre à travers vos témoignages, c'est quel genre de cueillette d'information vous remettez en question. Est-ce qu'il y a de l'information récoltée qui est utilisée à mauvais escient? Pour l'assurance-emploi, par exemple, on fait des regroupements de bases de données. Ça, je pense que ça va contre la protection de la vie privée, mais là, c'est autre chose.

    Les gens qui font les réclamations et qui sont admissibles à ces services sont déjà connus du ministère des Affaires indiennes et du Nord canadien. Donc, quel est le problème en ce qui concerne la pertinence de recueillir l'information?

[Traduction]

+-

    Dre Mary Jane McCallum: C'est parce que toutes les questions sont regroupées sur le même formulaire de consentement.

    Aux États-Unis, la loi sur les renseignements personnels est entrée en vigueur le 1er avril. On y fait la distinction entre le traitement des demandes de paiement et les autres utilisations. Donc, les renseignements prennent un chemin séparé, et on peut les dissocier des soins de santé.

    On s'occupe des renseignements médicaux personnels séparément. Si je contreviens à cette obligation, je suis passible d'une amende pouvant atteindre 50 000 dollars par jour. Il se peut que je sois en infraction à compter du 1er septembre, aussi c'est la raison pour laquelle je dis que nous ne serons pas en mesure de...

[Français]

+-

    M. Réal Ménard: Là, je comprends ce que vous dites, et c'est important. Dans ce qui est demandé par le ministère, il n'y a pas seulement de l'information sur le traitement et l'état de santé du patient en lien avec une réalité très ponctuelle, mais cela peut couvrir un ensemble de situations autres que la question de la santé. Est-ce bien cela?

[Traduction]

+-

    Dr Peter Cooney: Madame la présidente, si vous me permettez, ce que dit le député est exact, et il s'agit bien de renseignements précis. Mais, on mentionne que ces renseignements sont très précisément et très soigneusement décrits et visés par la Loi sur les renseignements personnels et qu'à ce titre, ils sont protégés. Par ailleurs, nous avons procédé à une évaluation des facteurs relatifs à la vie privée qui a montré que cette étape est nécessaire afin que le patient sache qu'un tiers comme, en l'occurence, First Canadian Health Management, la Croix-Bleue, la Great-West, compagnie d'assurance-vie ou quelqu'un d'autre, examine le remboursement de cette demande de paiement pour ce patient en particulier.

    Nous demandons seulement que le patient soit parfaitement mis au courant. Nous nous efforçons de faire en sorte que le processus soit très transparent pour les patients. Nous voulons qu'ils sachent que nous n'avons nullement l'intention de faire autre chose avec ces renseignements que ce qui est mentionné et que nous sommes encadrés très étroitement par la Loi sur les renseignements personnels. Le personnel de Santé Canada qui est autorisé à consulter ces renseignements a été mandaté pour suivre une formation très particulière en ce qui concerne la Loi sur les renseignements personnels, parce que cette loi nous régit en tant que fonctionnaires de l'État.

º  +-(1650)  

[Français]

+-

    M. Réal Ménard: Prenons un exemple concret. Si je vais chez le dentiste pour me faire faire un traitement de canal, jamais cette information, qui est confidentielle et qui devrait rester entre le professionnel de la santé et le citoyen, ne va servir à des fins autres que le remboursement de la facture pour le professionnel qui a posé l'acte médical. Vous me donnez votre parole de professionnel, de fonctionnaire, qu'à votre avis, jamais des banques de données contenant ce type d'informations n'ont été utilisées à d'autres fins.

[Traduction]

+-

    Dr Peter Cooney: Je peux vous garantir que l'on établit très clairement dans quel but ces renseignements sont utilisés. N'oubliez pas qu'il ne s'agit pas seulement de rembourser des frais. Dans le cas, par exemple, d'une couronne couverte par une compagnie d'assurance privée, si le patient a besoin d'une couronne, sa radiographie est transmise à un dentiste de la Great-West qui l'examine et qui décide si oui ou non il est nécessaire de poser une couronne sur cette dent du Dr Cooney.

[Français]

+-

    M. Réal Ménard: Prenons un cas précis. L'Agence des douanes et du revenu du Canada ou l'assurance-emploi ne pourraient pas utiliser ce type d'information.

[Traduction]

+-

    Dr Peter Cooney: Absolument pas, monsieur. Nous sommes très encadrés par la Loi canadienne sur la protection des renseignements personnels. En fait, lorsque l'on nous demande de fournir des renseignements à des fins statistiques, nous sommes tenus d'éliminer tout ce qui permettrait d'identifier le bénéficiaire, à juste titre. Nous sommes tenus de le faire, afin que les patients ne puissent en aucun cas être identifiés, et s'il existe un lien, par exemple, entre le fait que des patients prennent des médicaments contre le SIDA, et s'il s'agit d'une très petite localité où les patients sont peu nombreux, alors on nous interdit de divulguer l'information, même sans identifier les patients, par crainte que l'on puisse les reconnaître.

    Nous serions heureux de communiquer aux membres du comité les résultats de l'évaluation des facteurs relatifs à la vie privée qui a été faite par l'ancien commissaire à la vie privée de la Colombie-Britannique. En effet, le commissaire a procédé à une évaluation très détaillée pour nous et nous a conseillé la marche à suivre; il nous a affirmé que c'était la bonne façon de faire, parce qu'ainsi nous faisons preuve de transparence à l'égard du patient. Le patient sait désormais que ces renseignements sont consultés par l'entreprise chargée du traitement des demandes de paiement, mais dans des circonstances très particulières. Nous pouvons transmettre cette évaluation au comité.

+-

    La présidente: Vouliez-vous ajouter quelque chose, Docteur McCallum?

+-

    Dre Mary Jane McCallum: Oui. J'ai travaillé pour Santé Canada durant quatre ans, dans l'administration, pour le Dr Cooney. Lorsque je travaillais dans ce système, les renseignements médicaux personnels qui étaient fournis servaient à établir un profil des services et des prestataires. L'établissement du profil des services n'était pas fondé sur des données probantes. On examinait les services, puis on les supprimait.

    Je vais vous donner l'exemple des prothèses. Au début, les prothèses étaient remplacées tous les cinq ans, mais comme on a eu l'impression qu'il y avait de l'abus de la part des fournisseurs, on a prolongé le délai jusqu'à huit ans. Donc, sans preuves probantes, on a utilisé ces données contre les Premières nations.

    Alors, je m'inquiète surtout parce que j'ai déjà travaillé dans le système, et que je sais de quoi les gens sont capables. C'est pourquoi je dis que nous sommes d'accord avec le processus lié au consentement, mais qu'il faut vraiment se pencher sur la question de la confiance, parce que la raison pour laquelle cela a été porté à notre attention est que Santé Canada a enfreint les règles en matière de protection des renseignements médicaux personnels, relativement à l'accès et à l'utilisation, et que le ministère de la Justice a informé ce Ministère qu'il devait...

+-

    M. Réal Ménard: N'oubliez rien. Je connais tout le monde.

+-

    Dre Mary Jane McCallum: Donc, nous nous intéressons à la confiance qui doit exister à la base; nous savons très bien qu'il est nécessaire d'utiliser un formulaire de consentement, mais nous voulons qu'il soit plus respectueux. Nous voulons qu'il renferme des renseignements significatifs, et c'est vital de commencer à travailler avec Santé Canada en vue de corriger certains points. Nous ne refusons pas de nous présenter à la table de discussion.

+-

    La présidente: Je dois laisser le Dr Cooney répondre à cela.

+-

    Dr Peter Cooney: Merci, madame la présidente.

    Seulement pour utiliser l'exemple mentionné par le Dre McCallum, qui est un bon exemple et qui est vrai, nous examinons les profils, mais n'oubliez pas que le profil d'un fournisseur est établi à partir de renseignements anonymes sur les patients. C'est ainsi que procèdent les gouvernements provinciaux.

    Nous nous sommes présentés devant votre comité permanent des finances qui nous a demandé si nous procédions à des vérifications. Nous avons fait beaucoup de travail avec l'ADC en ce qui concerne les vérifications. Cela fait partie de la gestion du programme. Mais tout cela est complètement régi et encadré par la loi sur la protection des renseignements personnels, aussi les renseignements que nous détenons sont utilisés conformément aux dispositions de cette loi. Mais, madame la présidente, vous ne seriez pas satisfaite si nous ne pouvions pas répondre à vos questions, c'est-à-dire si nous ne pouvions justifier les montants qui ont été dépensés et à quel titre.

    Pour élaborer sur cet exemple concernant les prothèses, nous avons éliminé le critère relatif à la fréquence en ce qui a trait aux prothèses. Nous recommandons qu'il y en ait un, mais nous sommes à étudier la question en ce moment, comme je vous l'ai mentionné dans ma déclaration préliminaire, en fonction des besoins. Donc, si une personne a besoin d'une nouvelle prothèse, elle ne sera pas obligée d'attendre sept ans; elle l'obtiendra en fonction de ces critères.

    Mais en ce qui concerne la gestion du programme de base, vous nous en avez confié la responsabilité, et les Premières nations ou les Inuit seraient les premiers à se plaindre si nous ne pouvions pas expliquer où est allé l'argent.

º  +-(1655)  

+-

    La présidente: Merci.

    Madame Fry.

+-

    Mme Hedy Fry (Vancouver-Centre, Lib.): Merci.

    Je suis d'accord avec le Dr Cooney que les évaluations provinciales sont effectuées à partir des dossiers des patients et que les assureurs privés procèdent de la même manière, en vue d'obtenir de l'information, et je comprends que vous ayez besoin de ces renseignements pour rendre des comptes.

    Je ne dis pas que vous êtes les seuls à faire cela, mais est-ce que ces renseignements servent uniquement--et cela me ramène à une déclaration du vérificateur général hier, en ce qui a trait aux renseignements--à des fins de responsabilisation financière, ou bien servent-ils à créer une base de données sur ce qui est, évidemment, une population à risque élevé, sur les interventions les plus courantes, et qui permettrait de la prévention et de trouver des moyens d'améliorer les soins dentaires en bout de ligne? J'aimerais croire que c'est à cela que vous destinez ces renseignements, c'est-à-dire à une évaluation des données.

    Dans tout ce que j'ai entendu aujourd'hui, ce qui me préoccupe le plus, c'est qu'il soit fréquent que tant d'enfants soient forcés de subir une anesthésie générale, et cela parce que leur santé dentaire est tellement déplorable que l'on ne peut y remédier que sous anesthésie. Je reconnais qu'il faut faire de la prévention, et vous affirmez qu'il s'en fait. Vous dites qu'il y a des mesures préventives à l'école et que les enfants reçoivent un éventail de soins dentaires préventifs. Mais si c'est le cas, pourquoi leur santé dentaire est-elle si mauvaise?

    Établissons-nous des liens avec la cigarette? Avec le diabète? Établissons-nous des liens entre une mauvaise santé dentaire et des maladies du coeur plus tard? Établissons-nous ce genre de liens alors que nous savons aujourd'hui qu'ils existent? Comment expliquer qu'après avoir mis en place ces merveilleux programmes dentaires, et toutes ces mesures de prévention, on obtienne de si piètres résultats?

    Procède-t-on à des analyses des résultats? Est-ce que l'on examine les erreurs afin d'en tirer des leçons?

+-

    Dr Peter Cooney: Ce que vous venez de dire au sujet des analyses est précisément l'exemple que je voulais vous donner.

    Le type d'analyse que nous effectuons est justement l'exemple que je vous ai donné. Lorsque l'on constate qu'énormément d'enfants doivent être traités sous anesthésie générale plutôt que de recevoir des soins préventifs, on en vient à la conclusion qu'il faut recentrer nos efforts et cibler le groupe d'âge de 0 à 5 ans. Essayons par exemple d'éliminer les caries du biberon, ce qui est pratiquement un problème de société, parce que de très jeunes enfants qui vivent dans des logements surpeuplés parmi les Premières nations sont mis au lit avec un biberon parce que les conditions de vie sont difficiles. Et aller au lit avec un biberon est un facteur qui favorise les caries.

    C'est le genre d'éducation que l'on fait auprès des jeunes mères. Nous collaborons avec l'Association dentaire canadienne, l'Association canadienne des hygiénistes dentaires ainsi qu'avec l'APN et les Inuit par l'entremise du Comité consultatif fédéral des soins dentaires. Ce comité est formé de représentants de toutes ces organisations et il a été mis sur pied afin de cibler des stratégies comme celles que vous venez de mentionner.

    Donc, la réponse est oui, exactement, c'est ce que nous faisons. Nous avons travaillé récemment avec les pharmaciens, par exemple, dans le domaine du diabète, parce que c'est une maladie très difficile à soigner, et comme mes collègues hygiénistes l'ont signalé, c'est un problème de santé qui a des ramifications sur la santé buccale et sur le ligament parodontal.

    Tous ces facteurs sont interreliés. Oui, les données sont utilisées sur une base nominale en vue de créer des stratégies efficaces en matière de santé, de travailler de concert avec les fournisseurs, ainsi qu'avec des groupes afin d'améliorer la santé buccale.

    La réponse à l'autre partie de votre question, une question très valable, qui me demandait pourquoi les résultats sont encore si décevants, n'est pas réjouissante. La situation s'est améliorée, et je vous ai donné des exemples qui portent sur les deux dernières décennies. Mais ce n'est pas une raison pour pavoiser. Les chiffres sont encore très élevés. Ils sont de deux à trois fois plus élevés que ceux de la population non autochtone, mais nous sommes persuadés que si nous arrivons à atteindre les groupes d'âge très jeunes avec ces stratégies de prévention, soit l'application de résines de scellement sur les molaires des enfants âgés de six ans et douze ans, de fluorure sur les dents des bébés, la fourniture d'instructions aux nouvelles mamans et aux femmes enceintes, alors nous sommes persuadés de pouvoir mettre quelque chose en branle.

    Je suppose que la bonne réponse est que tout cela va prendre du temps. La situation s'améliore, mais trop lentement, et nous espérons pouvoir nous servir de ce genre de statistiques pour accélérer le rythme.

»  +-(1700)  

+-

    Mme Hedy Fry: Puis-je poser encore une petite question?

+-

    La présidente: Oui, vous pouvez y aller.

    Je pense que M. Smith voulait répondre sur le point précédent.

+-

    Mme Hedy Fry: Je voulais seulement conclure.

+-

    La présidente: Dans ce cas, vous reviendrez à la charge.

+-

    Mme Hedy Fry: Très bien, dans ce cas.

+-

    Dr Darryl Smith: Je pense que nous confondons les choses, ici, et que le formulaire de consentement nous permettra justement... Santé Canada possède déjà le moyen d'obtenir les chiffres dont il a besoin en ce qui concerne les maladies et des renseignements semblables. La question qui nous occupe est la santé buccale de ce groupe de personnes.

    Le formulaire de consentement n'a rien à voir avec cela. Il s'agit seulement d'une autre formalité administrative. Où sera-t-il classé, est-ce que quelqu'un le sait? Franchement, l'enjeu véritable consiste à déterminer comment nous assurer que les renseignements statistiques dont nous disposons serviront aux besoins en matière de traitement et de prévention de ces personnes?

    Je tenais à le dire.

+-

    Mme Hedy Fry: J'aimerais poursuivre, dans ce cas, sur la conclusion à laquelle je suis arrivée. C'est-à-dire qu'après vingt ans... je veux dire, s'il s'agissait d'une collectivité non autochtone, après vingt ans de prévention et de toutes ces mesures merveilleuses que nous avons mises en place, si nous avions obtenu de si piètres résultats, tout le monde se serait mis à hurler et à protester.

    Je n'ai toujours pas trouvé d'explication à cette situation si déplorable et au fait qu'il nous a fallu attendre deux décennies avant d'admettre que les choses étaient dans un si triste état... Mettre un enfant au lit avec un biberon, c'est une habitude culturelle. Je sais que beaucoup de mères immigrantes le font, beaucoup de gens le font parce qu'ils croient que c'est ainsi que l'enfant se sent bien.

    Êtes-vous intervenus sur le plan culturel auprès des parents? J'aimerais que quelqu'un de la collectivité autochtone me dise s'il est convaincu que les travaux de prévention effectués auprès des parents et des enfants ont été faits d'une manière appropriée sur le plan culturel, d'une manière qui pourrait rejoindre à certains égards les pratiques ancestrales et les modifier d'une manière quelconque. Je n'ai toujours pas obtenu de réponse à savoir pourquoi il nous a fallu attendre deux décennies avant de constater que les choses s'étaient améliorées ou auraient changé de façon marginale.

+-

    Dre Mary Jane McCallum: Je travaille en médecine dentaire depuis 30 ans. J'ai été infirmière dentaire, hygiéniste dentaire et thérapeute dentaire et j'ai travaillé dans le nord du Manitoba. Je me suis lancée dans la médecine dentaire et je suis revenue, je pense, près de dix années plus tard. J'ai été absolument sidérée de voir à quel point l'état de santé dentaire s'était détérioré.

    Aujourd'hui, je donne des soins dentaires toutes les cinq semaines. Je me rends dans le Nord par avion. Lorsque j'arrive dans les collectivités, je passe toute la semaine à donner des soins d'urgence. Il n'y a pour ainsi dire pas de temps à consacrer à la prévention au Manitoba—et je participe à ce programme depuis les vingt dernières années. Nous sommes occupés. Il y a environ 20 dentistes qui se rendent dans les régions nordiques par avion, et nous donnons tous des soins d'urgence. Nous n'avons pas le temps de rencontrer les mères et de travailler avec elles.

    Un autre aspect du consentement est celui-ci. En tant que membres des Premières nations, nous n'avons jamais eu de consentement à donner de toute notre existence. Des gens nos ont dicté quelle langue nous devions utiliser, où nous devions vivre. Lorsqu'on a été traité de cette manière... Parfois, je me demande si je possède mon propre corps, parce que le gouvernement me dit, voici ce que vous devez faire.

    C'est la raison pour laquelle je me bats si fort pour cette histoire de consentement: parce qu'avec le consentement et en prenant des décisions éclairées, on commence à assumer la responsabilité de sa santé, et c'est précisément la responsabilité qui joue un rôle clé pour les Premières nations. Nous ne prenons pas de responsabilités parce que nous disons que cela nous a été imposé. Vous le savez, nous blâmons le gouvernement. Nous devons réellement commencer à regarder le processus du consentement et à le rendre significatif pour les Premières nations, afin qu'elles puissent commencer à prendre la responsabilité de divers aspects de leur existence.

+-

    La présidente: Docteur Smith.

+-

    Dr Darryl Smith: Merci pour les commentaires du Dre McCallum. Pour poursuivre sur cette question, on sait qu'il existe un programme d'hygiène dentaire dans la population canadienne en général depuis 30 ans. Nous disposons donc d'un bon modèle susceptible de faire en sorte que les Canadiens bénéficient d'une meilleure santé buccale qu'à l'époque où je suis né.

    L'un des principaux problèmes avec ce programme en particulier est le manque de continuité. Depuis le début des années 90, ce programme fait l'objet de compressions budgétaires et il ne répond plus aux besoins. Nous nous sommes efforcés de contrôler le budget, mais on sait très bien que dans le domaine des soins de santé, c'est impossible.

    L'autre aspect de cette question est que nous savons très bien que l'efficacité du message dépend de la fréquence avec laquelle on le transmet. Dans beaucoup de collectivités rurales—et j'ai exercé durant 25 ans à proximité d'une collectivité des Premières nations—en ce qui concerne les programmes de soins de santé qui y sont dispensés, il se peut qu'une année on y retrouve un thérapeute dentaire ou un dentiste ou moi-même. Par la suite, on peut très bien attendre cinq, six ou même sept ans avant qu'un fournisseur ne revienne pour transmettre son message de prévention. Je me rends compte que nous laissons de côté des générations entières, et lorsque nous oublions des générations entières, nous allons au-devant des problèmes.

    J'ai l'impression que les soins de santé qui s'adressent aux membres des Premières nations s'apparentent davantage à ce que l'on voyait dans les années 50 et 60. Il faut le reconnaître, et voir à ce que les ressources nécessaires pour répondre à certains de ces besoins soient mises à leur disposition. Il est certain que nous avons besoin de fournisseurs et qu'il faut trouver le moyen d'offrir ces services. Mais, pour le moment, le programme est tellement bureaucratisé que c'est impossible d'appliquer une résine de scellement sur une autre dent que celles qui ont été prévues—par exemple, la dent numéro 1-6, qui se trouve être une première molaire... Je ne pourrais pas appliquer une résine de scellement sur une dent antérieure à celle-là parce que ce n'est pas prévu dans le programme. C'est complètement ridicule.

    Voici un échantillon du genre de problèmes que nous avons.

»  +-(1705)  

+-

    La présidente: Merci, madame Fry.

    Monsieur Robinson.

+-

    M. Svend Robinson (Burnaby—Douglas, NPD): Merci beaucoup, madame la présidente. Je tiens à m'excuser. J'ai dû m'absenter durant la séance pour prendre un appel urgent. J'en suis désolé; par conséquent, si je pose une question sur un sujet pour lequel vous avez déjà donné des réponses, n'hésitez pas à me le dire et nous passerons à autre chose.

    J'aimerais remercier les témoins qui se sont présentés et dire une ou deux choses.

    Je suis très heureux que cette séance ait lieu. Durant des années, j'ai pensé que la santé dentaire devrait être traitée comme faisant partie intégrante de notre système de soins de santé et que cette division artificielle n'avait pas sa raison d'être. Je dois vous avouer, ayant eu personnellement affaire au système de soins dentaires et à des personnes extraordinaires—je veux parler des dentistes, des hygiénistes dentaires et de tous les autres; je me suis fracturé la mâchoire et j'ai dû porter un dispositif de contention durant une longue période—par conséquent, je sais de quoi je parle.

    Par ailleurs, pour ce qui est de la santé des Premières nations, j'ai travaillé avec le Frontier College dans le nord de l'Ontario, dans une collectivité appelée Balmertown, juste à côté de Red Lake. C'était affligeant de voir l'état de santé de la population, et particulièrement des enfants. Cela remonte au milieu des années 70. Lorsque j'entends les témoignages éloquents des membres de l'Assemblée des Premières nations—notamment celui de Wendall qui s'est exprimé un peu plus tôt, et ainsi de suite—je sais que la situation ne s'est pas vraiment améliorée au fil des années. Darryl Smith vient de le souligner lui aussi.

    En ce qui concerne la question du consentement, j'espère que les représentants de Santé Canada répondront à mon appel qui les engage à s'asseoir encore une fois avec les dirigeants des Premières nations afin de trouver le moyen de leur répondre respectueusement. Je vous demande instamment de vous y efforcer. Nous avons entamé un dialogue, ici, aujourd'hui; vous avez pris connaissance de certains sujets d'inquiétude. En toute sincérité, j'aurais tendance à mettre ces préoccupations sur le compte du mouvement en faveur de l'autonomie gouvernementale. Je pense qu'elles en font partie intégrante. Lorsque l'on respecte le droit à l'autonomie, et que l'on entend ces signaux d'alarme, et c'est bien de cela qu'il s'agit, alors il faut réagir.

    Je voudrais seulement faire appel à vous très directement—par l'entremise de la présidente, bien entendu—afin que vous considériez encore une fois la question, que vous vous asseyiez avec les dirigeants des organisations que nous avons entendues aujourd'hui afin de voir s'il n'y aurait pas moyen de remanier le formulaire ou peut-être de le subdiviser. Donc, d'explorer cette possibilité.

    Vous avez mentionné que l'ancien commissaire à la vie privée de la Colombie-Britannique, je pense—une personne que je connais bien et pour laquelle j'ai beaucoup de respect—s'est penché sur la question. J'ignore si le commissaire à la vie privée du gouvernement fédéral s'est déjà intéressé à la question. S'il ne l'a pas fait... Peut-être que je pourrais vous le demander directement: vous êtes-vous adressé au commissaire fédéral à la vie privée?

+-

    Dr Peter Cooney: Oui, nous l'avons fait. Nous avons rencontré ses collaborateurs à quelques reprises. Nous leur avons soumis toute la question, y compris l'évaluation des facteurs relatifs à la vie privée qui avait été réalisée par l'autre commissaire.

»  +-(1710)  

+-

    M. Svend Robinson: Et avez-vous obtenu une réponse particulière de sa part?

+-

    Dr Peter Cooney: Pour le moment, on semble vouloir prendre du recul sur toute cette affaire, parce que nous n'avons obtenu aucune réponse depuis février de cette année.

+-

    M. Svend Robinson: Je pense que le fait que vous n'ayez obtenu aucune réponse est un peu inquiétant. Je vous suggérerais de collaborer avec eux.

    Aussi, j'aimerais vous demander directement si vous êtes prêts à rencontrer les dirigeants des organisations afin d'examiner toute cette question encore une fois?

+-

    Mme Leslie MacLean: En fait, hier, j'ai eu une réunion avec des membres de l'Assemblée des Premières nations. Nous avons travaillé avec des représentants des Inuit Tapiriit Kanatami. Nous nous sommes montrés ouverts à la tenue d'autres tribunes et aux suggestions depuis que nous avons entrepris ces travaux au printemps 2000.

    Ce que vous avez vu avant nous, c'était en quelque sorte le modèle générique. Nous avons travaillé, à ce qu'il me semble, en collaboration; nous avons prêté l'oreille aux préoccupations; nous avons fait de notre mieux pour les atténuer par l'entremise de programmes d'extension au sein de la collectivité ou encore en collaborant avec les dirigeants. Nous sommes toujours ouverts au dialogue.

+-

    M. Svend Robinson: Et êtes-vous prêts à examiner encore une fois cette question, tout particulièrement à la lumière de certaines préoccupations ayant été exprimées aujourd'hui?

+-

    Mme Leslie MacLean: Oui, nous sommes prêts à poursuivre le dialogue et à nous pencher encore une fois sur la question.

+-

    M. Svend Robinson: Je pense que la prochaine question à aborder est celle des ressources humaines--c'est-à-dire s'assurer tout simplement d'avoir un effectif suffisant de dentistes, d'hygiénistes dentaires, et ainsi de suite, pour répondre aux besoins.

    Je me souviens avoir entendu exprimer de sérieuses inquiétudes concernant le fait qu'un ophtalmologiste se rendait dans le nord de la Colombie-Britannique pour y effectuer littéralement des centaines d'examens visuels, les uns après les autres. Hedy s'en souvient sûrement. Je crois comprendre que cela représente toujours un sérieux problème—je veux dire la simple disponibilité des ressources—et je dirais tout spécialement en ce qui a trait aux communautés des Premières nations, la disponibilité de dentistes et d'hygiénistes dentaires et ainsi de suite dans les Premières nations.

    Je me demande ce que fait Santé Canada en particulier pour consacrer davantage de ressources à la formation et pour donner aux membres des Premières nations la possibilité de suivre cette formation pour pouvoir ensuite revenir et servir les collectivités. Quelles sont les ressources consacrées à cet objectif?

+-

    Dr Peter Cooney: Nous travaillons avec les écoles de médecine dentaire canadiennes et nous sommes directement en contact avec la plupart d'entre elles sur une base régulière. Nous finançons l'École nationale de dentothérapie où l'on forme des thérapeutes dentaires à partir de Prince Albert, en Saskatchewan. Cette école dispense un cours d'une durée de deux ans destiné à former des thérapeutes dentaires chez les Premières nations et les Inuit afin que ces derniers puissent ensuite retourner dans leurs collectivités pour y exercer leur profession. C'est la formation directe que nous dispensons. Nous travaillons aussi indirectement avec les facultés. Le plus important pour nous consiste à rendre ce programme suffisamment attrayant pour que les fournisseurs de services, ceux qui sont sur place, veuillent y collaborer.

    Nous avons également conclu des contrats directement avec des fournisseurs. Vous avez mentionné le nord de l'Ontario. Nous y avons le programme de Sioux Lookout qui produit des dentistes pour toute cette région. Nous avons un programme semblable, auquel a participé le Dre McCallum, au Manitoba.

    Donc, nous abordons la question sous différents angles. Une bonne partie des services sont offerts, comme je l'ai mentionné, par l'entremise de pratiques privées, mais aussi de dentistes contractuels que nous transportons dans les collectivités par avion, ainsi que par l'entremise de thérapeutes dentaires que nous avons formés.

+-

    M. Svend Robinson: J'ai deux autres courtes questions, si vous le permettez. Et en ce qui concerne les dentistes? J'aimerais poser la question aux représentants de l'Association dentaire canadienne aussi. Je suppose que vous reconnaissez aussi, et tout particulièrement dans les collectivités rurales et éloignées et les collectivités qui renferment un fort pourcentage de membres des Premières nations, la pénurie grave de ressources compétentes pour répondre à ces besoins, et évidemment d'hygiénistes dentaires aussi. Avez-vous des suggestions susceptibles d'aider le comité à faire des recommandations au gouvernement fédéral concernant la manière de répondre aux besoins très criants qui existent dans ces collectivités?

+-

    Dr Darryl Smith: Certainement, étant donné la manière dont le programme est structuré, la bureaucratie qui y est associée est l'un des facteurs qui incitent les jeunes dentistes... parce que, essentiellement, dans la plupart des cas, ce sont habituellement de nouveaux diplômés qui finissent par combler les besoins. La frustration qui est rattachée à l'appartenance à ce programme sur une base permanente est un sujet qu'ils abordent volontiers et ils avouent être incapables de la tolérer. Il ne s'agit pas de l'environnement. Il ne s'agit pas non plus des personnes avec lesquelles ils collaborent. Et ce n'est pas non plus leur lieu de résidence qui fait problème. En réalité, beaucoup de nos membres aiment travailler dans ces collectivités. Mais, lorsque la bureaucratie et la paperasse entrent en jeu... Par exemple, dans mon bureau j'ai une employée qui passe sa journée au téléphone avec la First Canadian Health Management Corporation, qui est l'administrateur du programme, seulement pour obtenir les renseignements nécessaires pour procéder aux traitements du jour. Les choses ne se passent pas ainsi lorsque vous vous rendez à mon bureau. La relation est très différente.

    Si seulement nous pouvions nous débarrasser de ces irritants, ce serait plus facile pour une personne de dire qu'une petite collectivité--disons Chard ou Conklin ou autre part dans le nord de l'Alberta--est un endroit où elle aimerait établir son cabinet. Mais lorsque l'on peut facilement ouvrir un cabinet dans une grande ville et y exercer sa profession sans avoir à se préoccuper de toutes ces tracasseries administratives et de toutes ces contraintes, il est clair que c'est une incitation à déménager.

    Je serais très favorable à ce que l'on élimine la bureaucratie. Il est clair que nous devons mettre en place des mesures incitatives en ce qui concerne la façon dont le programme est conçu afin qu'il soit possible pour ces personnes d'y mener des carrières intéressantes. Ces démarches devraient commencer chez les Premières nations, mais elles devraient également toucher toutes les collectivités rurales du Canada.

»  +-(1715)  

+-

    M. Svend Robinson: Madame Ziebarth, aimeriez-vous ajouter quelque chose au nom des hygiénistes dentaires?

+-

    Mme Susan Ziebarth: L'un des enjeux en ce qui concerne l'accès aux soins en matière d'hygiène dentaire est que la principale préoccupation des hygiénistes dentaires est la prévention. Ce sont des spécialistes de la prévention. À l'heure actuelle, le programme ne reconnaît pas les hygiénistes dentaires à moins qu'un dentiste ne serve d'intermédiaire. Dre McCallum a mentionné que lorsqu'elle se rend là-bas, elle doit s'occuper d'interventions d'urgence. Le programme des SSNA exigerait qu'elle soit accompagnée d'une hygiéniste dentaire, et non qu'une hygiéniste dentaire puisse s'y rendre et y effectuer ce que font ces spécialistes de façon indépendante. Il y a des régions au Canada où les hygiénistes dentaires sont autorisées à le faire, mais le programme ne le reconnaît pas.

    Aussi, je voulais ajouter que le Dr Cooney a mentionné qu'il travaillait avec l'ACHD, et ce n'est pas tout à fait exact.

+-

    M. Svend Robinson: Pour ma dernière question, j'aimerais que le Dr Cooney réponde précisément à la suggestion qui a été faite comme quoi les hygiénistes dentaires devraient avoir la possibilité de travailler dans les collectivités et d'y faire le genre de travail qu'elles font habituellement, c'est-à-dire de la prévention, sans être nécessairement accompagnées par un dentiste. Il semble que cela soit possible dans certaines régions.

    Je trouve que c'est plein de bon sens. Peut-être y a-t-il des raisons que j'ignore qui empêchent cela de se faire, mais il me semble que ce serait une bonne idée. Pourquoi n'est-ce pas permis à l'heure actuelle? Qu'en est-il de la suggestion comme quoi il n'y a pas eu réellement de collaboration avec l'ACHD? C'est une question à laquelle il est important de répondre.

    Dre McCallum a aussi fait allusion à--et je ne sais pas si vous avez répondu--certaines préoccupations soulevées par Justice Canada. Je pense que je vous ai bien compris lorsque vous avez dit que Justice Canada avait manifesté quelque inquiétude concernant des questions de protection des renseignements personnels auparavant. Vous n'avez pas répondu à cela. Qu'avez-vous à dire à ce sujet?

+-

    Dr Peter Cooney: Il y a trois aspects à cette question.

    Premièrement, en ce qui a trait à notre collaboration avec l'ACHD, il se trouve que nous avons travaillé avec Carol Mathesson-Worbey par l'entremise du Comité consultatif fédéral des soins dentaires. C'est l'information que l'on nous a transmise. Peut-être que l'on ne vous a pas mis au courant, mais il est certain que nous avons travaillé avec Carol. C'était seulement pour éclaircir la question pour le compte-rendu.

    Monsieur Robinson, en ce qui concerne Justice Canada, on nous a affirmé à ce Ministère que nous étions tenus par la loi d'obtenir ce consentement. Nous ne faisons pas cela parce que nous n'avons rien trouvé de mieux à faire. Il s'agit d'une exigence imposée par la loi. C'est une exigence de la Loi sur la protection des renseignements personnels et les documents électroniques qui découle elle-même de la Loi sur les renseignements personnels. En fait, nos avocats sont ceux de Justice Canada.

    Donc, la réponse à cette question, monsieur, est qu'effectivement nous collaborons régulièrement et directement avec Justice Canada, et ce sont leurs avocats qui nous conseillent en cette matière.

+-

    M. Svend Robinson: On a suggéré qu'ils pourraient avoir exprimé certaines réserves au sujet des formulaires. Est-ce exact? Je pense que le Dre McCallum voulait répondre aussi.

+-

    Dr Peter Cooney: Les formulaires qui sont créés doivent être soumis à Justice Canada. Il y en a un certain nombre qui ont été créés pour les Premières nations qui en voulaient des versions personnalisées. Nous sommes d'accord avec cela. Mais il faut passer par Justice Canada. Par exemple, l'une des Premières nations de l'Alberta a choisi d'avoir son propre formulaire de consentement parce qu'elle avait des besoins particuliers. Elle a donc modifié le formulaire, ce que nous avons accepté, puis nous l'a soumis. La Première nation a travaillé avec Justice Canada parce qu'on entretenait certaines inquiétudes à ce sujet. Aujourd'hui, elle a son propre formulaire et elle travaille avec. Et je connais des Inuit qui font la même chose. Donc, il se peut qu'il y ait divers problèmes liés à ces formulaires, aussi ils sont soumis à Justice Canada afin que les avocats du Ministère y jettent un coup d'oeil pour les deux parties.

    En ce qui concerne le troisième point, la facturation, nous rémunérons les dentistes au moyen du programme des services de santé non assurés. Évidemment, dans certaines régions, les hygiénistes sont autorisées par la loi à travailler de façon autonome, sans la supervision directe d'un dentiste. C'est un point sur lequel il y a passablement de discussion entre l'ACHD et l'Association dentaire canadienne en ce moment.

    Il s'agit certainement d'une discussion dans laquelle Santé Canada préférerait ne pas s'immiscer. Mais étant donné que nous nous occupons d'un programme d'envergure nationale, et que nous fondons notre programme sur des politiques nationales, nous sommes très heureux de discuter, et de continuer à discuter avec l'ADC et d'autres parties par l'entremise du Comité consultatif fédéral des soins dentaires de la question de la facturation. Mais en ce moment, notre position est la suivante: étant donné que nous administrons un programme d'envergure nationale, que les hygiénistes sont autorisées par les autorités provinciales à facturer directement leurs services dans certaines, alors nous avons décidé de ne pas accepter la facturation des hygiénistes à l'échelle nationale pour le moment.

»  +-(1720)  

+-

    La présidente: Monsieur Robinson.

+-

    M. Svend Robinson: Dr McCallum a dit qu'elle voulait répondre à cela.

+-

    La présidente: Très rapidement, s'il-vous-plaît. D'autres personnes désirent poser des questions et notre temps est presque écoulé.

+-

    Dre Mary Jane McCallum: Je m'apprêtais à réagir aux recommandations que vous nous avez présentées. Je travaille avec l'université du Manitoba dans le cadre des programmes de santé dentaire pour les Autochtones. Nous nous apprêtions à approcher Santé Canada afin de voir si le Ministère était prêt à nous accorder une aide financière pour les étudiants de quatrième année afin qu'ils puissent s'engager pour deux ans et offrir des services dans les collectivités autochtones. La faculté de médecine le fait, et étant donné qu'il s'agit d'un service assuré, la province leur accorde une aide financière. Alors, nous voudrions essayer de mettre en place le même programme avec Santé Canada afin d'attirer davantage de dentistes autochtones.

+-

    La présidente: Je pense que M. Gordon voulait intervenir, il y a quelques minutes. Vous rappelez-vous de votre question, monsieur Gordon, un sujet qui vous tenait très à coeur?

+-

    M. Larry Gordon: J'écoutais tout ce qui se dit et il m'est venu deux ou trois sujets de préoccupation.

    L'un de ces sujets est que les frais de transport expliquent pourquoi le programme des SSNA est tellement coûteux dans notre région. Si vous voulez vous rendre quelque part, vous devez prendre l'avion. Et on sait que les coûts du transport aérien sont extrêmement élevés.

    Une autre de mes inquiétudes vise les subventions qui sont accordées pour le transport du tabac et de l'alcool, des cigarettes, etc. Nous avons demandé que l'on subventionne le transport des aliments frais et du lait, mais il semble que les gouvernements fassent plus d'argent en vendant des cigarettes, de l'alcool et je ne sais plus quoi d'autre.

    En ce qui concerne le consentement, dans notre région, dans le monde Inuit, nous comptons énormément de clients unilingues, et il leur est très difficile de comprendre ce à quoi ils consentent, parce qu'il n'y a pas toujours de traducteurs disponibles lorsque nous en avons besoin. En bien des occasions, surtout avec les aînés, on se rend compte qu'ils ne savent pas ce qu'ils sont en train de signer, mais ils vont le faire de toute façon pour obtenir les services.

+-

    La présidente: Madame MacLean, est-ce que ces formulaires existent dans diverses langues?

+-

    Mme Leslie MacLean: J'aimerais souligner que nous avons travaillé en collaboration avec ITK en vue de mettre la dernière main au formulaire et nous nous sommes engagés à le traduire en dialecte Inuktitut une fois qu'il serait terminé. Le formulaire existe déjà en anglais, en français, en cri, en oji-cri et en ojibway, et nous sommes tout disposés à examiner les demandes en vue de le traduire dans d'autres langues.

+-

    La présidente: Merci.

    Je pense que M. Thompson aimerait dire quelque chose.

+-

    M. Greg Thompson: En effet, et je pense que ma patience est à bout, madame la présidente. Nous allons terminer à 15 h 30 et je me suis montré plus que généreux en laissant les autres poursuivre, avec tout le respect que je vous dois. C'est le prix à payer pour être le cinquième parti à la Chambre des communes, on dirait.

    Mais, de toute manière, pour en finir, j'aimerais beaucoup parler aux deux spécialistes qui sont ici, Dr Dubé et Dr Smith. Je tiens à mentionner que quelques-uns de vos collègues se sont rendus à mon bureau aujourd'hui, et je les ai rencontrés. J'ai été fasciné par leur exposé, tout comme je l'ai été par le vôtre, et je veux vous poser certaines questions d'ordre pratique.

    Il est à espérer que les fonctionnaires du Ministère, madame la présidente, prendront bonne note de ce qui suit, parce que je suis convaincu que ceux qui exercent sur le terrain... Et je le répète, j'ai pris beaucoup d'intérêt à ce qu'a dit Larry Gordon.

    Je tiens à m'excuser, madame la présidente, parce que le praticien, le dentiste qui est passé me voir aujourd'hui en compagnie d'un membre de votre association--et peut-être que vous le connaissez, son nom m'échappe--il s'agit d'un dentiste autochtone qui pratique à Winnipeg. Oui, c'est cela, il s'agit de Phil Poon. Je suis heureux d'avoir pu mentionner son nom parce que je tiens à vous dire à quel point j'ai été impressionné par son exposé. En fait, lors de ces rencontres individuelles, on peut en venir rapidement au vif du sujet, et c'est ce qu'il a fait en l'espace de 30 minutes ou à peu près. Il m'a donné un cours rapide sur la situation de la collectivité autochtone en ce qui concerne les soins dentaires, ou l'hygiène buccale, si vous préférez.

    Encore une fois, Larry nous a parlé des collectivités nordiques parce que, comme vous le savez madame la présidente, bon nombre de nos collectivités autochtones vivent dans le Nord. Les besoins en matière de transport sont l'un des sujets sur lesquels nous nous sommes concentrés aujourd'hui, notamment les frais élevés qui sont encourus pour transporter des Autochtones à Winnipeg, par exemple, en vue d'y subir un traitement, et il est courant que ces traitements soient refusés simplement en raison des coûts afférents.

    Je m'objecte à ce qu'a dit Dr Cooney en ce qui concerne la valeur en dollars. La vérité, madame la présidente, comme nous l'avons déjà mentionné, c'est que j'ai probablement investi davantage dans mes dents que quiconque ici présent, y compris M. Robinson, même plus que la valeur de mon automobile. Mes dents valent en effet plus que ma voiture. Je ne dis pas cela pour montrer que les soins dentaires sont coûteux, mais c'est une réalité de la vie. Il s'agit d'une profession très spécialisée, et nous nous attendons à la perfection, n'est-ce pas? Nous n'avons aucune objection à payer pour ces soins non plus. Je ne pense pas que M. Robinson, ni moi, ni aucun d'entre nous ait jamais regretté d'avoir payé pour ces services.

    Mais la vérité c'est que, lorsque vous vous rendez chez un dentiste en tant qu'Autochtone, avec--et je peux vous paraître insensible--la bouche pleine de problèmes, si je peux m'exprimer ainsi, madame la présidente, cela coûte cher. Et même si le dentiste pourrait intervenir efficacement ce jour-là, il arrive souvent que ces patients doivent rentrer chez eux dans le nord du Manitoba sans que l'on ait réglé leur problème et avec leur douleur. La vérité, madame la présidente, c'est que la drogue la plus couramment utilisée chez les Autochtones est le Tylenol 3. Aussi, il arrive souvent qu'une ordonnance soit rédigée tout de suite pour ce pauvre homme ou cette pauvre femme qui doit rentrer à la maison avec pour tout secours ce médicament anti-douleur alors que l'on aurait pu régler le problème sur-le-champ.

    Donc, Dr Cooney, je ne suis pas d'accord du tout avec ce que vous avez dit au sujet du facteur de coût, parce que ce facteur du coût correspondrait à un niveau minimal de service, pour être honnête avec vous. Lorsque l'on se rend chez le dentiste, on pense souvent que cette personne fait de l'argent sur notre dos. Je me rends souvent chez mon propre dentiste, et je peux vous dire que l'on pense de cette manière tant que l'on n'a pas vu le personnel nécessaire pour faire marcher un cabinet. Le mien dispose entre autres de quatre assistantes. Il possède beaucoup de matériel, du matériel de pointe, et je le répète, c'est normal. Nous allons chez le dentiste, et nous savons qu'il doit assumer des frais généraux énormes et tous les autres coûts associés à l'exploitation d'une entreprise.

    Aussi, j'aimerais savoir comment on peut penser pouvoir se rendre aujourd'hui chez le dentiste et espérer que la visite ne coûtera pas plus cher que les chiffres donnés par Dr Cooney. À mon avis, c'est tout simplement impossible dans le monde dans lequel nous vivons.

    Je vais aussi vite que possible, madame la présidente

»  +-(1725)  

+-

    La présidente: Ça valait la peine d'attendre, monsieur Thompson.

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    M. Greg Thompson Merci beaucoup. Nous avons une excellente relation, et nous ne divergeons que sur certains points.

    L'autre remarque que je voulais faire, madame la présidente, concerne l'abus de médicaments...

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    M. Svend Robinson: Et nous n'en sommes qu'au préambule, soit dit en passant.

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    M. Greg Thompson: C'est l'avantage qu'il y a à s'exprimer en dernier, madame la présidente, le privilège du dernier.

    M. Robinson et moi-même nous nous sommes offerts ce luxe l'autre jour, lorsque nous avons amené, pour la première fois, la question du SRAS sur le tapis, devant la Chambre des communes. Nous en tirons beaucoup de fierté.

    Il n'est pas nécessaire d'être gros pour en imposer dans le monde de la politique, et on constate parfois que les derniers deviennent les premiers.

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    La présidente: Peut-être qu'ils ont jeté un coup d'oeil sur vos dents, à tous les deux, et qu'ils en ont été tellement impressionnés qu'ils vous ont laissé le champ libre.

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    M. Greg Thompson: Tout à fait. De toute manière, madame la présidente, lorsque le Dr Poon est venu me voir à mon bureau, il regardé certaines photos sur le mur et il a suggéré que je me fasse faire une greffe des cheveux plutôt qu'un implant dentaire.

    Mais pour en venir à ce qui nous occupe, concernant les enfants autochtones, l'estime de soi est très importante dans les collectivités autochtones. L'autre remarque que m'a faite le Dr Poon aujourd'hui était que--et nous en savons quelque chose, parce que la plupart d'entre nous ne se seraient pas présentés ici aujourd'hui s'il leur manquait une dent--l'estime de soi représente un énorme problème au sein de la collectivité autochtone, et ce problème tient dans une large mesure au fait qu'ils ont de mauvaises dents, que vous le croyiez ou non. Si vous réunissez tous ces autres facteurs, en vous fondant sur les témoignages que nous avons entendus, c'est véritablement un énorme problème. Il va au-delà du problème médical et devient un problème de société, madame la présidente.

    J'aimerais que les deux spécialistes qui sont ici aujourd'hui, ceux-là même qui agissent en première ligne chaque jour afin d'assurer la prestation de ce service au mieux de leurs capacités, nous fassent part de leurs commentaires. Peut-être qu'ils pourraient nous suggérer deux ou trois choses pratiques que le Ministère pourrait faire pour faciliter la vie de ces enfants autochtones--ainsi que des hommes et des femmes--qu'ils veulent aider.

»  +-(1730)  

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    La présidente: Docteur Smith.

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    Dr Darryl Smith: En fait, il y a ici une membre des Premières nations qui est dentiste, il s'agit du Dre McCallum.

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    M. Greg Thompson: Je suis désolé, cela m'a échappé. J'ai consulté vos antécédents, avec mon ami, M. Robinson--je suis arrivé un peu en retard--et je savais pertinemment que vous étiez autochtone, mais je croyais que vous enseigniez à l'université. Donc, vous exercez aussi votre profession. Je vous fais toutes mes excuses.

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    Dr Darryl Smith: Je ne pense pas que le Dr Poon soit un membre des Premières nations. Mais il a beaucoup de patients chez les Premières nations.

    Je tenais seulement à rectifier ces deux choses.

    Pour commencer, nous devons affronter la triste réalité que véhiculent les chiffres catastrophiques relatifs à la santé buccale chez les membres des Premières nations. Si vous voulez quelques recommandations rapidement, la première est qu'il faut se débarrasser de la bureaucratie dans ce programme. Nous devons traiter les maladies dentaires ordinaires avec les outils dont nous avons besoin.

    Il est absolument ridicule que les traitements de canal, les restaurations de base, le détartrage, l'application de traitements de fluorure, les radiographies--essentiellement des services dentaires de base--soient des interventions pour lesquelles il faut obtenir une prédétermination sur une base quotidienne, ou même qui peuvent être refusées. Il faut modifier le seuil en ce qui a trait à ces services de base, de sorte que lorsque les patients se présentent dans notre bureau, nous puissions leur offrir au moins le traitement nécessaire pour soigner la maladie et ensuite, nous attaquer à la question du long terme, ce qui pourrait donner de bons résultats d'ici 20 ou 30 ans.

    Il faut réaliser que nous devons envisager une période de 20 à 30 ans. C'est l'aspect prévention qui a été éliminé de ce programme.

    Vous savez, les chiffres que nous avons dans le document sur les SSNA sont très différents. Lorsque j'ai commencé à exercer en 1978, dans une collectivité à majorité autochtone, je ne rencontrais pas les problèmes catastrophiques que je vois aujourd'hui. Oui, je procédais à des restaurations sur les dents. En règle générale, il s'agissait de petites restaurations occlusales. Mais, nous avions la capacité à l'époque, dans le cadre du programme, d'offrir des soins de prévention. Nous ne le faisons plus aujourd'hui. Les choses les plus élémentaires--les nettoyages, les traitement au fluorure, les instructions sur la bonne manière de se brosser les dents--ne sont plus subventionnées sur une base régulière. Et à l'âge de 17 ans, les patients tombent dans une catégorie différente. Et nous ne traitons pas les adultes, alors c'est ainsi que les choses vont en se détériorant.

    Il y a cette nomenclature fondée sur les besoins. Mais qui dit fondé sur les besoins dit bureaucratie. Si je dois me lancer dans une procédure fondée sur les besoins, je dois d'abord me munir d'une prédétermination. Normalement, je dois écrire une lettre. Je dois transmettre des radiographies additionnelles, qui peuvent être modifiées ou non, seulement pour que cette procédure soit approuvée.

    Aussi, essentiellement--parce que je sais que votre temps est précieux--premièrement, éliminer la bureaucratie. Mettons ce régime sur pied en partant au moins d'un seuil qui nous permet d'offrir ces services de base. Les services de base ne devraient pas nécessiter de prédétermination. Ils correspondent essentiellement à des besoins ou à des droits pour ce groupe particulier.

    À long terme, même si c'est très bien de se doter de programmes dans lesquels les diplômés s'engagent pour deux ans, nous devons créer un environnement qui incitera les praticiens à rester dans ces collectivités. Nous n'arriverons jamais à absorber les frais de transport. Pour le moment, s'il n'y a pas de dentistes... et peu importe d'où ils viennent, nous devons établir des relations avec les collectivités où exercent les praticiens.

    Il faut trouver le moyen d’intégrer des mesures d’encouragement de ce genre. Et il faut commencer par la formation, c’est-à-dire attirer davantage de membres des Premières nations, qui sont sensibles sur le plan culturel à ce type de programmes, dans nos facultés de médecine dentaire. Il s’agit d’un problème de financement. Voilà le genre de questions auxquelles nous devons nous attaquer.

    J'espère que j'ai pu vous être utile.

+-

    La présidente: Docteur Dubé.

+-

    Dr Louis Dubé: Je n'ai pas beaucoup de patients Inuit ou des Premières nations, seulement quelques-uns. Mais même avec ces rares patients, j'ai l'impression qu'on ne me fait pas confiance à titre de professionnel. Je dois tout justifier, chaque geste que je veux poser.

    Si je diagnostique une carie, je pense que je possède les connaissances nécessaires pour traiter ce patient sans avoir à demander l'avis d'un autre dentiste qui approuvera ou non l'intervention après avoir examiné la radiographie.

    Il existe certains programmes--et je suis un peu mal à l'aise à l'idée de citer le programme en question--par exemple, le programme pour les enfants dans ma province au titre duquel certains services sont couverts. Certains ne le sont pas, mais au moins je dispose de suffisamment d'autonomie pour dire que ces enfants ont besoin d'une obturation, d'un nettoyage ou peu importe, et je le fais. Il y a des... non des obstacles, mais des contraintes ou des mesures de contrôle ayant été mises en place de sorte que si je ne fais pas ce qu'il faut, on pourra porter plainte auprès des autorités réglementaires ou des ordres professionnels. Il s'agit des organismes chargés de s'occuper de problèmes de ce genre.

    Mais au moins, le gouvernement, ou le programme, me fait confiance, et je peux faire le travail que je suis censé faire, qui est de traiter les patients--traiter les enfants et les adultes aussi. La bureaucratie est absente et les crédits accordés au programmes sont utilisés pour traiter les patients, et non pour s'occuper de la paperasse.

»  +-(1735)  

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    La présidente: Docteur Cooney.

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    M. Greg Thompson: Madame la présidente, j'aurais voulu entendre le Dre McCallum s'exprimer elle aussi sur cette question. Je voulais seulement bien me faire comprendre et m'excuser auprès du Dre McCallum pour l'avoir oubliée au cours du premier tour.

    Dre McCallum, chaque fois que je vois le mot «université», je suppose toujours le côté enseignement, et non celui de la pratique quotidienne. Je suis ravi que vous soyez une praticienne et très heureux que vous ayez la chance de répondre.

+-

    Dre Mary Jane McCallum: Je travaille à l'université du Manitoba où nous avons commencé à établir des partenariats avec certains programmes dentaires dans les collectivités des Premières nations. De concert avec ces collectivités, nous commençons à personnaliser les programmes dentaires. Nous avons deux groupes pour lesquels nous examinons les aspects liés à la promotion de la santé, et ces aspects prendront leur source au sein de la collectivité.

    Mon autre stratégie consiste à présenter des questions comme celle du formulaire de consentement et les aspects culturels aux étudiants en médecine dentaire, afin qu'ils soient en mesure d'offrir des soins plus respectueux. Ceci bénéficiera à tous, et non seulement aux Premières nations.

    Lorsque je me rends dans le Nord, je ne peux m'occuper que des cas d'urgence et de certaines dents, et je dois laisser le reste de la bouche telle quel, dans l'état où il est. Et pourtant, le nettoyage de la bouche représente un aspect durable. Une fois que l'on a traité les dents du patient et que l'on a discuté avec lui des aspects prévention, alors on a entrepris des mesures durables parce que les patients vont conserver ces dents.

    Lorsque je suis allée pour travailler dans le Nord, j'ai dû rediriger environ 60 patients parce que je ne pouvais pas les laisser dans l'état où ils étaient. Je les ai dirigés vers Winnipeg pour qu'ils puissent y recevoir un traitement sur-le-champ. J'ai travaillé avec l'un de ces dentistes. Les traitements pour ces 60 patients ont été effectués, de sorte que lorsque le prochain dentiste ira, nous pourrons nous attaquer à la prévention.

+-

    M. Greg Thompson: Merci, docteur.

    Madame la présidente, puis-je poser une courte question au Dr Cooney?

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    La présidente: Certainement.

+-

    M. Greg Thompson: Merci, madame la présidente.

    Les dentistes ici présents qui assurent la prestation des services, nous ont donné leur point de vue pratico-pratique, mais est-ce que quelque chose peut être fait rapidement afin de réduire la bureaucratie afin de permettre de réaliser une partie de ce programme? Je le répète, c'est bien de pouvoir venir ici pour discuter des solutions, mais c'est une autre paire de manches que de poser des gestes concrets.

    Comment fonctionne votre mécanisme de reddition de comptes, docteur Cooney? De qui relevez-vous? À qui vous adressez-vous? À quel moment est-ce que le Ministre intervient pour vous dire, «Écoutez, simplifions les choses, retroussons-nous les manches et voyons si nous pouvons faire fonctionner ce programme—même en tant que projet pilote, par exemple, ou à n'importe quel titre—seulement pour voir si nous pouvons alléger ce processus lourd et encombrant?»

    Auriez-vous des commentaires à ce sujet?

+-

    Dr Peter Cooney: Pour commencer par les remarques que vous avez faites, j'aimerais donner des éclaircissements concernant ce que vous avez dit au sujet de personnes qui se seraient rendues par avion du nord du Manitoba jusqu'à Winnipeg, pour revenir à leur point de départ sans avoir reçu aucun traitement. C'est tout à fait impossible. Nous nous occupons de tous les cas d'urgence, donc si un patient...

»  +-(1740)  

+-

    M. Greg Thompson: J'aimerais intervenir à ce moment-ci, madame la présidente, parce que nous ne voulons pas nous retrouver au coeur d'un débat. Je voudrais que le bureaucrate réponde à la question, s'il-vous-plaît.

    Contentez-vous de répondre à la question, s'il-vous-plaît, et ne cherchez pas à susciter la discussion concernant ce que ce médecin ou quelqu'un d'autre a déclaré. Vous avez présenté vos arguments; ils ont pu apporter les leurs. Tenez-vous en à la question, s'il-vous-plaît.

+-

    M. Peter Cooney: La réponse à la question a un rapport avec cela parce que des soins pouvant atteindre des déboursés de 800 dollars sont couverts sans prédétermination.

    Lors d'une réunion tenue récemment, le Ministre a conclu trois ententes avec l'Association dentaire canadienne en vue de régler les questions administratives.

    Premièrement, le niveau de prédétermination est passé de 600 dollars à 800 dollars en octobre dernier. Aussi, le dentiste de Winnipeg peut donner des soins jusqu'à concurrence de 800 dollars à ce patient, et il sera remboursé.

    Deuxièmement, le Ministre a accepté le transfert électronique d'information entre le bureau du dentiste et l'entreprise chargée du traitement des demandes de paiement, par conséquent, la paperasse est inutile. Nous nous sommes engagés à cela, et nous nous y employons. Cela fonctionne actuellement en Alberta. Nous avons l'intention de procéder à une mise en oeuvre en Alberta d'ici la fin du mois; donc, d'ici très peu de temps. Je peux vous assurer que cette mise en oeuvre sera suivie d'une implantation à l'échelle nationale. Nous prévoyons que cela permettra de réduire les formalités administratives de 50 p. 100, parce que tout se fera par voie électronique.

    Troisièmement, le Ministre a accepté l'idée des vérifications, un engagement que nous avons accepté, de même que l'ADC.

    Alors, je vous dirais qu'une fois que le dentiste a évalué le traitement à une valeur de 800 dollars, il ne faut pas oublier qu'il peut déclarer qu'il s'agit d'un cas grave et que des soins nécessitant un déboursé de 3 000 dollars sont requis. Un autre dentiste révisera cette proposition et dira si elle est juste et raisonnable, et nous donnerons l'autorisation de procéder à des soins pour une valeur de 3 000 dollars. C'est le genre de travail qu'accomplissait le Dre McCallum lorsqu'elle était au service de Santé Canada.

    Donc, il ne s'agit pas d'un programme de misère. Je voudrais vous convaincre qu'il s'agit d'un bon programme. Si un dentiste reçoit un patient qui souffre et s'il est nécessaire de procéder à des soins dont la valeur dépasse le seuil de 800 dollars pour le soulager, je n'ai jamais vu une telle situation en une seule visite.

    J'aimerais faire valoir un autre point, dans la foulée de ce qu'a dit le Dr Dubé qui est très pertinent, c'est que l'on a le sentiment que ce programme est un peu différent et qu'il pourrait comporter un élément de confiance. Il ne comporte pas un élément de confiance, mais nous devons rendre des comptes en ce qui concerne ce programme relativement aux fonds publics—et nous sommes responsables vis-à-vis les clients. Pour le moment, nous administrons le programme au nom des clients.

    Il ne s'agit pas d'un simple programme d'assurance ordinaire; il s'agit d'un programme financé à même les fonds publics. Il faut que nous puissions revenir devant vous et vous déclarer que les crédits que vous nous avez accordés par l'entremise du Parlement—soit les 688 millions de dollars que vous avez versés pour ce programme l'année dernière, dont 130 millions étaient affectés aux soins dentaires—ont été dépensés de manière raisonnable. Aussi, il est nécessaire de mettre en place des freins et contrepoids.

    Nous voulons faciliter autant que possible la vie des dentistes. Nous nous sommes déjà engagés à apporter certains changements administratifs qu'ont mentionnés les Dr Dubé et Dr Smith, et à faire en sorte que la vie soit aussi simple que possible pour le fournisseur. Comme ils le savent, nous avons mis sur pied un comité chargé d'apporter les changements administratifs, au moment où l'on se parle.

    Mais ce qui importe vraiment, monsieur, c'est que ce programme d'une valeur de près de 700 millions de dollars comporte un élément de responsabilisation à l'égard du public, ce qui n'était pas le cas des autres programmes antérieurs.

+-

    La présidente: Merci, monsieur Thompson.

+-

    M. Greg Thompson: Si je pouvais conclure ou résumer...

+-

    La présidente: Je ne pense pas qu'il soit nécessaire de résumer. L'un des désavantages que comporte le fait d'être membre du cinquième parti est que l'on est l'avant-dernière personne à s'exprimer; et l'un des avantages qu'il y a à être la présidente est que l'on est vraiment la dernière personne à parler. J'espère que vous ferez preuve de patience pendant que je pose quelques questions.

    Il me semble que l'un des problèmes tient à ce que ce programme dentaire fonctionne toujours selon ce que j'appelle l'ancien modèle, le modèle pathologique. Autrement dit, un patient a besoin d'un traitement de canal et l'on doit transmettre une preuve de la pathologie quelque part pour fins d'analyse, etc. Il me semble que l'on devrait jeter un regard neuf sur toute cette question, c'est-à-dire adopter le modèle du bien-être. Cela entraînerait immédiatement l'intervention des hygiénistes. Par exemple, mon dentiste ne regardera pas mes dents tant que l'hygiéniste n'y aura pas elle-même jeté un coup d'oeil et qu'elle n'y aura pas effectué un certain travail. Dans le sud de l'Ontario, un montant de 800 dollars ne couvrirait pas mes frais d'hygiéniste pour une année. Vous ne pourriez même pas voir le dentiste pour 800 dollars.

    Pour commencer, je vous applaudis d'avoir procédé à une augmentation de 200 dollars de la valeur des services qui peuvent être accordés, mais je vous affirme que ce montant est loin d'être suffisant. Je pense que je pourrais vous suggérer, lorsque le moment viendra de présenter les prévisions budgétaires, de demander plus d'argent pour votre programme, soit un montant de base de 1 000 ou 1 200 dollars, et, à mon avis, ce comité vous accordera son appui.

    Cependant, je pense que mes collègues voudraient pouvoir tabler sur le fait que les hygiénistes seront de la partie. Je ne crois pas que votre réponse comme quoi dans certaines régions les hygiénistes relèvent d'autres plans soit une excuse valable pour que le gouvernement fédéral exclue les hygiénistes, parce que ce devrait être l'inverse.

    Nous exerçons une certaine autorité dans des collectivités autochtones aux quatre coins du pays. Par conséquent, je pense qu’il nous appartient de donner l’exemple avec notre programme dans l’espoir que les provinces qui tirent de l’arrière nous rattrapent et s’ajustent. Si nous attendons que toutes les provinces emboîtent le pas, vous et moi risquons de ne pas vivre assez vieux pour voir cela. Il est pratiquement impossible d’imaginer d’obtenir l’unanimité dans toutes les provinces.

    Nous avons une belle occasion de faire preuve de leadership afin que les hygiénistes aient un rôle à jouer. Elles devraient voir ces patients avant que le dentiste ne les voie. Si elles doivent se rendre par avion à un endroit comme Sioux Lookout, par exemple, l'hygiéniste devrait arriver le jour précédent celui de l'arrivée du dentiste. Elle devrait pouvoir examiner tous ces patients durant au moins une journée, et le jour suivant, le dentiste verrait les mêmes, si jamais il y a des travaux à faire. Par ailleurs, l'hygiéniste pourrait rester une journée supplémentaire et peut-être en profiter pour faire de l'éducation auprès des mères ou dans les écoles, où elle pourrait s'adresser à des gens pendant que l'on s'occupe des traitements à donner à la bouche en question. À mon avis, il faut changer tout le système.

    Je pense que si vous vous présentiez avec des prévisions budgétaires à la hausse, je suis pas mal sûre que mes collègues seraient d'accord avec vous. À vrai dire, nous pourrions transmettre une lettre au Ministre afin de lui faire la suggestion.

    En ce qui concerne la deuxième question de la journée, je ne signe jamais rien lorsque je vais chez le dentiste. Je ne sais pas comment il se fait que c'est ainsi, alors que vous dites que tout le monde le fait. Si je recevais ce dépliant, je refuserais de le signer.

    Je vais vous dire ce qui est écrit: chaque fois que nous vous fournissons des médicaments, du transport, des services dentaires, des fournitures médicales, du matériel, des soins pour la vue, du counselling en situation de crise--toutes choses dont vous pourriez vous servir et tous ces renseignements... vous consentez à ce que quiconque à Santé Canada et n'importe lequel de ses agents, entrepreneurs, entreprise chargée de l'administration ou du traitement des demandes de paiement, au sein des organisations des Premières nations ou des Inuit, ou toute autre personne habilitée à offrir des prestations, des articles ou des services de soins de santé puisse administrer tous les renseignements vous concernant sur tous ces sujets. Et vous pouvez les communiquer à tous ces gens.

    Je ne veux pas que mon dentiste soit au courant du prix de mes lunettes. Je ne veux pas que mon ophtalmologiste sache que j'ai dû recevoir du counselling en situation de crise. Je ne veux pas que mon pharmacien sache combien de voyages en avion j'ai faits. Je ne veux pas que tous ces renseignements se retrouvent en un seul et même endroit. Et on a même suggéré qu'une partie de ces renseignements pourraient être transmis à l'étranger. Est-ce que cela signifie qu'une compagnie d'assurance américaine pourrait être mise à contribution?

»  +-(1745)  

    Donc, je sais que la Loi sur la protection des renseignements personnels intervient, mais vous demandez beaucoup. Pour commencer, cette loi est nouvelle pour la plupart d'entre nous. Il y en a d'autres dans les provinces, comme l'a fait remarquer le Dre McCallum. On demande de faire un acte de foi comme quoi tous ces renseignements demeureront confidentiels, et particulièrement à un groupe de clients qui n'a pas eu la meilleure expérience du monde avec le gouvernement. Je pense que c'est trop demander.

    De toute façon, je voudrais que vous répondiez à une question, et si vous n'avez pas la réponse aujourd'hui, ce n'est pas grave. Quel pourcentage du montant de 680 millions de dollars est consacré à l'administration des programmes? Peut-être que vous pourriez nous revenir là-dessus. Ou est-ce que vous avez déjà la réponse?

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    Dr Peter Cooney: Je vous dirais, madame la présidente, que ce chiffre tourne autour de 3 à 4 p. 100, parce que nous disposons de ces chiffres. L'administration de ce programme en termes de dollars n'est pas énorme. Nous pouvons vous fournir les données brutes. Nous avons déjà fourni ce chiffre au comité des comptes publics.

    Voudriez-vous que j'essaie de répondre à certaines de vos autres questions? Notamment, celle qui porte sur...

»  +-(1750)  

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    M. Svend Robinson: Pourriez-vous commenter brièvement sur les chiffres? Pourrions-nous aussi obtenir les chiffres sur le nombre de membres des Premières nations qui travaillent dans cette division? Ces renseignements nous seraient utiles.

+-

    Dr Peter Cooney: Oui, nous avons ces renseignements et nous pouvons vous les fournir.

    En ce qui a trait au montant de 800 dollars, il s'agit d'un montant maximum, pas d'un plafond. Un patient peut obtenir l'équivalent de 3 000 à 4 000 dollars de soins dentaires. C'est seulement une fois que ce montant de 800 dollars a été dépassé que le dentiste doit présenter une demande de prédétermination. Donc, cela ne signifie pas que chaque patient ne peut recevoir de soins pour plus de 800 dollars.

+-

    La présidente: Je sais, mais vous vous retrouvez dans la situation d'avoir à justifier le bien-fondé des traitements au-delà du montant de 800 dollars, vous devez présenter des radiographies, retourner à la maison des patients qui auraient besoin d'un traitement de canal avec une ordonnance pour du Tylenol 3--tous les scénarios qui ont été si bien décrits par mes collègues et leurs questions.

+-

    Dr Peter Cooney: La composante liée à la douleur est comprise dans le montant de 800 dollars; c'est la raison pour laquelle nous avons fait passer le montant des traitements de 600 à 800 dollars. Je peux vous fournir les chiffres parce que, je le répète--et c'est l'un des problèmes auxquels le Dr Smith a fait allusion--nous constatons actuellement qu'un petit nombre de patients ont des maladies dentaires graves. Autrement dit, il y a une concentration très forte de maladies graves dans les collectivités des Premières nations.

    Le deuxième point, toutefois, est qu'en ce qui concerne les changements administratifs, on peut dire que nous avons pris les moyens et que nous nous y attaquons. Nous avons conclu une entente avec l'ADC en vue d'examiner le programme et d'y apporter des modifications. Votre remarque comme quoi le programme est axé sur les pathologies est justifiée, et il ne devrait pas l'être. C'est la raison pour laquelle nous nous dirigeons vers un programme axé sur la prévention. Je suppose que cela ne sert à rien de placer une ambulance au pied de la falaise pour y recueillir les blessés; il est préférable d'installer une clôture au sommet.

+-

    La présidente: Oui, en effet. Et ce sont les hygiénistes qui jouent le rôle de cette clôture. Il faut que vous nous présentiez un plan décrivant comment vous comptez vous y prendre pour les intégrer afin qu'elles puissent faire tout leur travail de prévention, d'éducation et toutes ces choses qu'elles font si bien.

+-

    Dr Peter Cooney: Vous avez raison. Et il est vrai que les hygiénistes travaillent--et beaucoup d'ailleurs--pour le programme. La seule différence est qu'elles facturent leurs honoraires par l'entremise du dentiste pour lequel elles travaillent.

    Toutefois, je prends bonne note de ce que vous dites, c'est-à-dire que vous aimeriez que nous envisagions d'élargir notre champ d'action. Mais les hygiénistes qui travaillent dans les cabinets de dentistes accomplissent pas mal de travail pour le programme. Tout simplement, leur facturation passe par celle du dentiste et son numéro.

    Il faut aussi que nous vous donnions des précisions concernant la question du consentement. Vous avez soulevé un point intéressant. Nous ne communiquons pas les renseignements relatifs aux soins de la vue que vous avez reçus à un dentiste. Les fournisseurs visés sont les gens qui effectuent le travail, comme les dentistes, les opticiens, mais les renseignements ne sont pas transmis d'un fournisseur à l'autre. Tout cela est clairement expliqué dans l'évaluation des facteurs relatifs à la vie privée que nous allons vous transmettre.

    Peut-être que Leslie aimerait ajouter quelque chose.

+-

    La présidente: Je vous crois; mais le fait est que les Autochtones à qui l'on demande de signer ce consentement considèrent la chose comme s'ils donnaient la permission que l'on conserve une partie de leur histoire quelque part dans un service d'un gouvernement auquel ils ne font pas confiance. Ils ne croient pas que les choses ne vont pas se passer ainsi, et ils ne sont pas prêts de changer d'idée, peu importe les efforts que vous pourriez consacrer à les convaincre du contraire. La confiance se mérite. Et il me semble qu'un formulaire de consentement concernant les soins de la vue... Je sais que cela représente un supplément de paperasse pour vous, et que cela fait grimper les frais administratifs, mais on ne peut pas exiger de gens qui ont déjà une confiance limitée ou inexistante qu'ils développent soudainement la confiance démesurée qui est nécessaire pour signer ce consentement.

    Madame MacLean.

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    Mme Leslie MacLean: Je pense que l'une des choses qui est ressortie du dialogue que nous entretenons régulièrement en vue d'atténuer ce genre de préoccupations est justement la fourniture de ce genre d'éclaircissements. Par exemple, avec ITK, nous nous sommes efforcés, le mois dernier ou à peu près, de déterminer dans quelles circonstances les renseignements seraient communiqués. C'est le genre de choses que nous avons l'intention d'afficher sur notre site Web afin d'essayer de rendre les choses plus claires--je sais que tout le monde ne fréquente pas les sites Web, aussi il est...

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    La présidente: Sur votre site Web? Vous ne vivez pas sur la même planète que les habitants de la collectivité de Larry.

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    Mme Leslie MacLean: Cela fait aussi partie de nos efforts d'extension des services dans les collectivités à l'échelle locale, je suis d'accord avec vous que...

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    La présidente: Et combien de personnes font partie de ces services d'approche et se rendent dans les collectivités pour y vendre des idées, essayer de convaincre, et ainsi de suite?

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    Mme Leslie MacLean: On sait que le programme compte plus de 700 000 clients qui vivent notamment dans des régions rurales des quatre coins du pays...

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    La présidente: Je le reconnais; c'est d'ailleurs la raison pour laquelle je trouve ridicule votre affirmation--comme quoi vous avez des représentants dans les collectivités. Sont-ils présents dans les quelque 600 collectivités? Vous ne disposez pas d'un effectif de 600 personnes.

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    Mme Leslie MacLean: Non, il s'agit en fait du personnel de nos bureaux régionaux qui profite des visites régulières dans les collectivités ainsi que des réunions ordinaires avec les dirigeants des Premières nations et des Inuit pour aborder la question du consentement.

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    La présidente: Le docteur Smith aimerait faire un commentaire.

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    Dr Darryl Smith: Je voudrais seulement donner des précisions en ce qui concerne le montant de base de 800 dollars. Ce chiffre-là peut varier lui aussi. Je veux vous expliquer un peu comment fonctionnent les plans et les raisons pour lesquelles nous demandons qu'il ne soit pas nécessaire de procéder à une prédétermination pour les services de base.

    Si un enfant des Premières nations vient me voir et que je me rends compte qu'il a un énorme besoin de services dentaires, il est certain que je peux procéder à ces interventions. Cela ne fait aucun doute. Toutefois, lorsque ce même enfant revient au bout de six mois et que je dois procéder aux soins de prévention habituels--autrement dit, examiner de nouveau ses dents, vérifier s'il est motivé sur le plan de l'hygiène, et regarder si ses dents sont propres, les nettoyer... dans ce cas, je fais appel à une hygiéniste, même si j'exerce dans une collectivité rurale. J'ai la chance d'avoir une hygiéniste dans cette collectivité. Cependant, étant donné que j'ai une employée qui sait comment évoluer dans ce programme, nous allons de l'avant et nous procédons aux étapes de la prédétermination. Si le patient se présente pour son rendez-vous aux six mois, pour être remboursé, je dois avoir obtenu un numéro de prédétermination. La réalité est la suivante, sans ce numéro de prédétermination, je ne peux pas vraiment fournir de services ce jour-là, parce que j'ai déjà dépassé le montant de base de 800 dollars pour ce patient.

    J'ai la chance qu'un agent des soins dentaires approuve ces traitements après-coup, mais c'est ce type de frustration avec lequel il faut composer chaque jour. Et je ne parle pas seulement du dentiste. Je vise aussi le personnel de première ligne, les gens avec lesquels vous faites affaire--ainsi que les clients des Premières nations.

    On me laisse me débrouiller, moi et mon personnel, non seulement avec ce client particulier, mais aussi, bien des fois, avec la bande qui ne comprend pas de nombreux aspects du programme. Tout ce que vous pourriez faire pour améliorer les choses serait le bienvenu.

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    La présidente: Merci.

    M. Robinson a une petite, toute petite question--une question vraiment minuscule.

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    M. Svend Robinson: Je serai bref. Je comprends.

    Pour poursuivre dans la veine des commentaires du docteur, c'est déjà assez difficile d'attirer des médecins et d'autres professionnels de la santé dans les régions rurales, mais je peux facilement imaginer ce que cela représente d'avoir à affronter toute cette bureaucratie et cette paperasse. Ce serait suffisant pour que bien des gens refusent d'embarquer. Il faut vraiment trouver le moyen de faciliter les choses, il me semble, et il est à espérer que notre comité sera en mesure de faire des recommandations dans ce sens.

    Je voulais revenir à ce qu'il dit le docteur Cooney sur la question des hygiénistes dentaires et reprendre ce qu'a dit la présidente à ce sujet. Je vous ai entendu dire, et peut-être que j'ai mal compris, que vous attendez que les dentistes et les hygiénistes dentaires règlent cette question entre eux--et en ce qui concerne les dentistes, je sais qu'ils sont nerveux à ce sujet, et réticents à l'idée d'accorder davantage d'autonomie aux hygiénistes dentaires... Je pense qu'elles sont appelées à jouer un rôle très important elles aussi de façon indépendante.

    Je me demande si vous ne pourriez pas accepter d'examiner encore la possibilité de donner aux hygiénistes dentaires un rôle plus indépendant, et pas seulement vous retirer du débat en disant que tant et aussi longtemps que les deux groupes n'auront pas tranché la question--ce qui revient à accorder un veto aux dentistes--vous ne bougerez pas de votre position. Comme le disait Mme Brown, faisons preuve d'un peu de leadership et essayons de trouver des modèles plus créatifs en vue d'assurer la prestation de soins de prévention en particulier, et de mettre en place cette clôture au sommet de la falaise. Et à mon avis, un moyen d'y arriver consisterait à déléguer des pouvoirs aux hygiénistes. Pouvez-vous faire cela?

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    Dr Peter Cooney: Très certainement, et d'ailleurs, nous avons mis en place un comité chargé de le faire, un comité où siègent des hygiénistes.

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    M. Svend Robinson: Très bien. Merci.

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    La présidente: Au nom de mes collègues, nous n'avons pas pour habitude de nous étendre aussi longtemps, et habituellement la période de questions et réponses pour chaque membre du comité n'est pas aussi longue, mais je trouvais que leurs questions étaient excellentes et vos réponses très instructives. Donc, ce fut une séance très valable pour nous tous, et je l'espère, pour vous aussi. Je compte que nous puissions transmettre des recommandations positives au Ministre et que le processus du budget aura des résultats encourageants à cet égard.

    Merci de votre patience et de votre temps. Cette réunion a été très édifiante.

    La séance est levée.