HEAL Réunion de comité
Les Avis de convocation contiennent des renseignements sur le sujet, la date, l’heure et l’endroit de la réunion, ainsi qu’une liste des témoins qui doivent comparaître devant le comité. Les Témoignages sont le compte rendu transcrit, révisé et corrigé de tout ce qui a été dit pendant la séance. Les Procès-verbaux sont le compte rendu officiel des séances.
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37e LÉGISLATURE, 2e SESSION
Comité permanent de la santé
TÉMOIGNAGES
TABLE DES MATIÈRES
Le jeudi 9 octobre 2003
¿ | 0905 |
La présidente (Mme Bonnie Brown (Oakville, Lib.)) |
La présidente |
Mme Barb Byers (vice-présidente exécutive, Congrès du travail du Canada) |
¿ | 0910 |
La présidente |
¿ | 0915 |
Mme Barb Byers |
La présidente |
M. Larry Wagg (premier vice-président, Association des syndicalistes retraités du Canada) |
¿ | 0920 |
Mr. Larry Wagg |
M. Ronald Lang (représentant de l'Est de l'Ontario, Association des syndicalistes retraités du Canada) |
¿ | 0925 |
¿ | 0930 |
La présidente |
M. Stan Marshall (recherchiste principal, Syndicat canadien de la fonction publique) |
¿ | 0935 |
¿ | 0940 |
La présidente |
M. James Clancy (président national, Syndicat national des employés et employées généraux et du secteur public) |
¿ | 0945 |
¿ | 0950 |
La présidente |
M. Guy Caron (travailleur de campagne en soins de santé, Conseil des Canadiens) |
¿ | 0955 |
La présidente |
M. James Lunney (Nanaimo—Alberni, Alliance canadienne) |
À | 1000 |
M. James Clancy |
M. James Lunney |
À | 1005 |
M. Larry Wagg |
M. Larry Wagg |
M. James Lunney |
M. Ronald Lang |
M. James Lunney |
M. Ronald Lang |
À | 1010 |
La présidente |
M. Ronald Lang |
La présidente |
M. Ronald Lang |
La présidente |
M. Ronald Lang |
La présidente |
M. Réal Ménard (Hochelaga—Maisonneuve, BQ) |
À | 1015 |
Mme Barb Byers |
Mme Cindy Wiggins (recherchiste principale, Congrès du travail du Canada) |
M. Réal Ménard |
M. James Clancy |
M. Réal Ménard |
M. James Clancy |
M. Réal Ménard |
M. James Clancy |
M. Réal Ménard |
À | 1020 |
M. James Clancy |
La présidente |
M. Réal Ménard |
M. Stan Marshall |
M. Guy Caron |
M. Réal Ménard |
M. Guy Caron |
À | 1025 |
M. Réal Ménard |
M. Guy Caron |
M. Guy Caron |
M. Réal Ménard |
La présidente |
M. Stan Dromisky (Thunder Bay—Atikokan, Lib.) |
Mme Barb Byers |
À | 1030 |
M. Larry Wagg |
La présidente |
M. Jeannot Castonguay (Madawaska—Restigouche, Lib.) |
M. Ronald Lang |
M. Jeannot Castonguay |
M. Ronald Lang |
M. Jeannot Castonguay |
À | 1035 |
Mme Barb Byers |
M. Jeannot Castonguay |
Mme Barb Byers |
M. James Clancy |
La présidente |
M. Jeannot Castonguay |
M. James Clancy |
M. Guy Caron |
La présidente |
M. Dick Proctor (Palliser, NPD) |
À | 1040 |
M. James Clancy |
M. Dick Proctor |
M. Stan Marshall |
M. Dick Proctor |
Mme Barb Byers |
À | 1045 |
M. Dick Proctor |
M. Ronald Lang |
M. Dick Proctor |
La présidente |
M. Gilbert Barrette (Témiscamingue, Lib.) |
Mme Barb Byers |
À | 1050 |
M. James Clancy |
M. James Clancy |
La présidente |
M. James Lunney |
À | 1055 |
M. James Lunney |
Mme Barb Byers |
M. James Lunney |
Mme Barb Byers |
M. James Clancy |
La présidente |
CANADA
Comité permanent de la santé |
|
l |
|
l |
|
TÉMOIGNAGES
Le jeudi 9 octobre 2003
[Enregistrement électronique]
¿ (0905)
[Traduction]
La présidente (Mme Bonnie Brown (Oakville, Lib.)): Bonjour, mesdames et messieurs. J'ai le plaisir d'ouvrir la séance. Il s'agit d'une autre réunion portant sur l'étude des médicaments sur ordonnance.
Ce matin, nous avons la chance d'accueillir une série de témoins appartenant à divers syndicats ainsi que des syndicalistes retraités, et un représentant du Conseil des Canadiens.
Comme l'ordre du jour le propose, nous commencerons par le Syndicat national des employés et employées généraux et du secteur public. Ce matin nous accueillons le président national du syndicat, M. James Clancy.
Monsieur Clancy, si vous voulez bien commencer.
Une voix: M. Clancy n'est pas là.
La présidente: Par conséquent, nous allons passer au Congrès du travail du Canada : la vice-présidente exécutive en est Barb Byers et la recherchiste principale, Cindy Wiggins.
Madame Byers.
Mme Barb Byers (vice-présidente exécutive, Congrès du travail du Canada): Je vous remercie.
Bonjour. Je m'appelle Barbara Byers; je suis la vice-présidente exécutive du Congrès du travail du Canada. Au nom des deux millions et demi de membres que nous représentons d'un bout à l'autre du pays et de leurs familles, nous tenons à vous remercier de nous avoir offert la possibilité de vous présenter nos vues concernant les questions qui se rattachent aux médicaments sur ordonnance. Comme vous le savez, le CTC est une fédération d'environ 70 syndicats dont les membres travaillent dans pratiquement tous les secteurs de l'économie canadienne, dans toutes les professions, dans toutes les régions du Canada.
Les médicaments sur ordonnance sont au coeur de la politique publique canadienne depuis longtemps. Les Canadiens appuient fermement l'accès à des médicaments abordables, mais sont préoccupés par la hausse continue des coûts des médicaments.
Les médicaments sur ordonnance représentent une question importante pour les membres du syndicat. Les coûts des médicaments ont de graves incidences sur la viabilité du système de santé publique. À la table des négociations, les employeurs considèrent le coût des médicaments sur ordonnance comme un fardeau. Certains de nos membres ne bénéficient pas de régimes d'assurance-médicaments de la part de l'employeur, et pour certains la protection est minimale. Une réduction de cette protection pourrait se traduire par de graves difficultés financières.
Les médicaments sur ordonnance jouent effectivement un rôle important dans le traitement des maladies. Ils sauvent des vies; ils préviennent les maladies; ils diminuent la souffrance. Grâce aux progrès technologiques et aux progrès de la recherche génétique, ils joueront un rôle de plus en plus grand dans le traitement des maladies. Mais certains Canadiens trouvent un peu inquiétante l'idée du génie génétique, utilisé pour créer de nouveaux médicaments. Il est devenu plus que jamais indispensable que le Canada élabore un nouveau cadre stratégique national sur les médicaments pour assurer la qualité, l'efficacité, et l'innocuité de tous les médicaments sur ordonnance.
Les médicaments sur ordonnance, conjugués à de nouvelles procédures médicales et à des efforts de réduction des coûts, diminuent la durée des séjours à l'hôpital. Lorsque les patients quittent l'hôpital, ils assument le fardeau du coût de leurs médicaments. Les médicaments sont un service médical tout aussi essentiel qu'une opération. Ils doivent être intégrés au régime public d'assurance-maladie en tant que service médicalement nécessaire. Les Canadiens ont indiqué à la Commission Romanow que les valeurs fondamentales qui sous-tendent l'assurance-maladie sont l'équité, la justice et la solidarité. Sans régime national d'assurance-médicaments, l'accès aux médicaments sur ordonnance n'est ni équitable, ni juste.
Quatre-vingt-dix pour cent des Canadiens ont une forme quelconque d'assurance-médicaments, mais seulement 11 p. 100 bénéficient d'une protection intégrale; 69 p. 100 participent aux coûts; 10 p. 100 sont sous-assurés, ce qui signifie qu'ils paient de leur poche 35 p. 100 ou plus du coût; 10 p. 100 ne sont pas assurés, ce qui signifie qu'ils consacrent plus de 4,5 p. 100 de leur revenu familial brut à l'achat de médicaments sur ordonnance.
La situation socio-économique est un indicateur prévisionnel de ceux qui bénéficient de l'assurance-médicaments. Selon l'Institut canadien d'information sur la santé, seulement 58 p. 100 des Canadiens à très faible revenu indiquent avoir une assurance-médicaments, comparativement à 87 p. 100 de ceux ayant des revenus très élevés. Le Forum national sur la santé a constaté que 75 p. 100 des Canadiens qui touchent plus de 60 000 $ ont une assurance privée, mais seulement 42 p. 100 des Canadiens qui touchent entre 20 000 et 40 000 $ ont une assurance. À peine 7 p. 100 de ceux dont les revenus étaient inférieurs à 20 000 $ avaient une assurance.
Nous constatons donc que ceux qui doivent consacrer la plus forte proportion de leur revenu à l'achat de médicaments sur ordonnance se trouvent au bas de l'échelle salariale. Il est injuste que les travailleurs à faible revenu doivent porter le poids de l'accès inéquitable aux médicaments sur ordonnance.
Le CTC considère que les médicaments sur ordonnance sont un bien public et un service essentiel. Pour remédier à cette inégalité au niveau de l'accès aux médicaments, le gouvernement fédéral devrait montrer la voie en mettant sur pied un régime public national d'assurance-médicaments selon le modèle du «payeur unique» en assurant une protection intégrale. On reconnaîtrait ainsi que les médicaments sur ordonnance sont un service médical essentiel, ce qui permettrait de les intégrer au régime public d'assurance-maladie du Canada. Même si cela doit être fait de façon progressive, le CTC considère qu'il serait possible de commencer par offrir une assurance qui ne se limite pas au remboursement des médicaments dont le coût est exorbitant, afin que les personnes à faible revenu puissent en bénéficier.
En 2002, le total des dépenses consacrées aux médicaments s'est élevé à 18 milliards de dollars. En 1999, le Canada était l'un des 25 pays de l'OCDE affichant la plus faible proportion de dépenses consacrées aux médicaments, financées par le secteur public. La plupart des pays de l'OCDE offrent une assurance universelle pour les médicaments sur ordonnance, à l'exception du Canada et des États-Unis.
¿ (0910)
Les principaux facteurs générateurs de coût pour les médicaments comprennent les nouveaux médicaments, le remplacement d'anciens médicaments par de nouveaux, un taux d'utilisation accru, et un accès réduit aux médicaments génériques. Pas plus de 145 nouveaux médicaments lancés sur le marché au cours des cinq dernières années représentent 25 p. 100 du coût de l'ensemble des médicaments sur ordonnance. Trois nouveaux médicaments sur le point d'être lancés sur le marché coûteront 20 000 $ par patient par année. Cette tendance annonce d'effroyables augmentations de coût pour l'avenir.
Environ 17 millions de personnes ont une assurance-médicaments dans le cadre des régimes d'assurance-santé parrainés par l'employeur. Ces régimes sont importants pour les travailleurs parce qu'ils les protègent contre les coûts élevés des médicaments qui ne sont pas remboursés par l'assurance publique et contribuent nettement à améliorer leur niveau de vie. De nombreux employeurs considèrent que les régimes d'assurance-santé qu'ils offrent sont importants pour conserver leurs employés, assurer la satisfaction des employés au travail et améliorer la productivité, mais ils sont extrêmement préoccupés par l'augmentation des coûts, surtout des coûts des médicaments sur ordonnance.
ESI, une entreprise de gestion des prestations, indique que le coût assumé par les régimes privés pour fournir des médicaments sur ordonnance a fait un bond incroyable de 61 p. 100 entre 1998 et 2000. Le Bouclier Vert du Canada, un autre gestionnaire de prestations de santé, déclare que le coût des réclamations est cinq fois supérieur au taux de l'indice des prix à la consommation ces dernières années. ESI et le Bouclier Vert ont indiqué que le remplacement d'anciens médicaments par de nouveaux médicaments coûteux et l'utilisation réduite de médicaments génériques sont les principaux facteurs générateurs de coût pour les employeurs.
En 2001, Eckler Partners Limited a déclaré que les employeurs consacrent environ 4 à 6 p. 100 de leur masse salariale aux prestations, mais que ce pourcentage augmentera puisqu'on s'attend à ce que le coût du volet des soins de santé double au cours des cinq prochaines années. Par comparaison, dans l'industrie sidérurgique aux États-Unis, l'assurance-santé à elle seule représente 18 p. 100 des coûts de l'employeur. Nous devons nous rendre compte que ces coûts sont en fait un avantage concurrentiel que nous ne voulons pas perdre.
De plus en plus, les employeurs font valoir l'avantage que représente le régime public d'assurance-maladie pour les entreprises canadiennes. Les trois grands constructeurs de véhicules automobiles, Abitibi Consolidated et Bell Canada se sont joints aux syndicats représentant leurs travailleurs en se prononçant publiquement sur l'importance d'un régime public d'assurance-maladie pour les milieux d'affaires canadiens. Ils ont émis une mise en garde selon laquelle il serait imprudent de transférer la hausse des coûts des soins de santé aux employeurs et aux travailleurs.
Cela devrait permettre...
La présidente: Pardonnez-moi, madame Byers; vous avez nettement dépassé le temps qui vous est alloué. Pourriez-vous résumer brièvement, pour que nous puissions passer à un autre témoin?
¿ (0915)
Mme Barb Byers: Je passerai donc aux recommandations.
Nous recommandons que le gouvernement fédéral entame des discussions avec les représentants du secteur du travail, des milieux d'affaires et des professionnels de la santé, concernant un cadre pour l'établissement et le financement d'un programme national d'assurance-médicaments.
Nous recommandons la mise en oeuvre des deux recommandations formulées par la Commission Romanow : c'est-à-dire la création d'une agence nationale du médicament et l'établissement d'une liste nationale de médicaments remboursés.
Nous recommandons que le gouvernement fédéral élimine immédiatement l'injonction automatique de deux ans accordée aux fabricants de médicaments d'origine lorsqu'un brevet arrive à expiration, qui prolonge artificiellement la durée du brevet.
Nous recommandons que le gouvernement fédéral établisse un processus de consultation publique pour examiner les pratiques des compagnies pharmaceutiques.
Une fois de plus, nous pressons le comité de recommander le maintien de l'interdiction actuelle qui vise la publicité s'adressant directement au consommateur, dont font l'objet les médicaments sur ordonnance et nous l'encourageons à examiner les moyens par lesquels le gouvernement peut sensibiliser le public aux médicaments sur ordonnance.
Je vous remercie.
La présidente: Merci beaucoup, madame Byers.
Nous allons maintenant passer à l'Association des syndicalistes retraités du Canada, dont le premier vice-président est M. Larry Wagg, et le représentant de l'est de l'Ontario, M. Ronald Lang.
Vous avez la parole, monsieur Wagg.
M. Larry Wagg (premier vice-président, Association des syndicalistes retraités du Canada): Nous nous ferons un plaisir de passer en deuxième, puisque j'ai constaté que mon collègue James Clancy est arrivé juste après que nous ayons commencé. Nous pourrions attendre, si vous le voulez.
Une voix: Allez-y.
¿ (0920)
Mr. Larry Wagg: Très bien
Ce matin, je suis accompagné de Ron Lang, qui est notre représentant pour l'est de l'Ontario. Ron a fait sa maîtrise à l'Université de Waterloo et son doctorat sur les coûts des médicaments à l'échelle internationale, à la London School of Economics. Je vais présenter la première partie de l'exposé après quoi il prendra la relève.
L'Association des syndicalistes retraités du Canada est un organisme nationale bénévole transgénérationnel, dont la mission est de faire entendre les préoccupations des retraités d'un bout à l'autre du Canada. Cette association a été mise sur pied en octobre 1993 et comprend 110 organisations affiliées qui représentent 500 000 travailleurs retraités de syndicats affiliés au CTC, comme les secteurs de l'acier, du papier, de l'automobile, de l'usinage, le SCFP, le Syndicat national des employées et employés généraux et du secteur public, l'Alliance de la fonction publique, les infirmières et infirmiers et les enseignants.
Au cours des huit dernières années, l'Association des syndicalistes retraités du Canada a eu l'occasion de comparaître devant le Comité permanent de l'industrie, des sciences et de la technologie de la Chambre des communes, dans le cadre de son étude sur la Loi sur les brevets concernant les médicaments et des règlements s'y rapportant. Vous pourrez constater que nous avons signalé au gouvernement à ces occasions ce que nous considérons être l'emploi abusif de ces règlements.
Tout d'abord, nous appuyons fermement le régime d'assurance-maladie du Canada financé par l'État. Et nous savons que la hausse des coûts des médicaments accapare une trop grande part des fonds destinés aux soins de santé, et la situation s'aggrave. Deuxièmement, les retraités ont tendance à être de plus grands consommateurs de médicaments sur ordonnance que d'autres Canadiens. Cela fait mal à notre porte-monnaie, lorsque les gouvernements et nos régimes de retraite réagissent à la hausse des coûts en augmentant ce que nous devons payer ou en limitant les médicaments qui sont remboursés. C'est un phénomène que nous constatons dans l'ensemble du pays, plus récemment au Québec, où le 1er juillet les frais d'utilisation pour ceux bénéficiant du régime d'assurance-médicaments du gouvernement ont augmenté
Pour certains, ces augmentations des frais d'utilisation ne semblent peut-être pas importantes, mais pour une personne ayant un revenu fixe et un certain nombre d'ordonnances à remplir, cela peut être un réel problème. Nous considérons qu'il y a un certain nombre de mesures que le gouvernement pourrait prendre afin d'améliorer l'accès aux médicaments sur ordonnance et de mieux contrôler les coûts.
Nous estimons qu'un grand nombre de recommandations formulées dans le chapitre 9 du rapport final de la Commission sur l'avenir des soins de santé au Canada, le rapport Romanow, sont extrêmement sensées. J'encourage fortement le comité à examiner ces propositions. La Commission Romanow a fait beaucoup de travail sur la question, et nous devrions nous en inspirer.
J'aimerais mettre l'accent sur une mesure qui semble un peu plus pertinente maintenant et qui pourrait être prise assez rapidement. Le rapport Romanow recommande que nous examinions les lois sur les brevets concernant les médicaments afin de mettre fin à la perpétuation des brevets. Comme vous le savez déjà sans doute, les règlements sur l'avis de conformité des médicaments brevetés de la Loi sur les brevets prévoit une injonction automatique contre les fabricants de médicaments génériques qui essaient de lancer un produit sur le marché. Donc, essentiellement, Santé Canada ne peut pas donner son approbation finale à un médicament générique tant qu'un tribunal ne s'est pas prononcé sur l'ensemble des revendications concernant la contrefaçon de brevet.
Le problème, c'est que lorsqu'un médicament se vend extrêmement bien, les fabricants des médicaments d'origine présentent plus d'un brevet afin de pouvoir obtenir plus d'une injonction automatique et garder le fabricant de médicaments génériques devant les tribunaux. Ils modifient la force des médicaments, l'enrobage et d'autres aspects, et déposent des brevets pour ces procédés. Le fabricant de produits génériques doit tenir compte de tous ces aspects, même s'il veut remettre sur le marché l'ancienne version du médicament. Je ne suis pas un avocat spécialisé en brevet, mais je ne peux pas croire que c'est la façon dont notre industrie du médicament est censée fonctionner.
De plus, le gouvernement Mulroney s'est inspiré des lois américaines sur les brevets concernant les médicaments pour établir ces règlements sur l'injonction automatique. Les États-Unis connaissaient les mêmes problèmes. Les fabricants des médicaments d'origine utilisaient les injonctions automatiques pour écarter du marché les fabricants de médicaments génériques pendant une période plus longue que la normale. Et les régimes des employés financés par l'État remboursaient les médicaments d'origine alors qu'ils auraient dû avoir accès à des médicaments génériques meilleur marché.
La Federal Trade Commission a fait enquête et produit un rapport. Même George Bush a vu que quelque chose clochait et est intervenu. Voici ce qu'il a dit en octobre :
L'une des méthodes employées par certaines entreprises consiste, quand le brevet arrive à échéance, à déposer une nouvelle demande de brevet relative à une caractéristique mineure, comme la couleur de la bouteille de pilules ou une combinaison particulière d'ingrédients qui n'a rien à voir avec l'efficacité du médicament. Le fabricant de médicaments d'origine gagne ainsi du temps, en accumulant les délais découlant de suspensions automatiques visant à préserver le statu quo en attendant que les problèmes juridiques soient réglés. |
Entre-temps, le médicament générique moins coûteux n'a pas accès au marché. Dans certains cas, ces délais ont duré 37 mois, 53 mois ou 65 mois. Ce n'était pas ce que voulait le Congrès en adoptant cette loi. |
C'est en août que sont entrés en vigueur les changements apportés par Bush pour empêcher les fabricants de médicaments d'origine d'avoir recours à des injonctions automatiques à répétition pour étouffer la concurrence. Je ne le dirais pas pour tout autre sujet, mais si Bush l'a fait, pourquoi ne pourrions-nous pas le faire?
On ne nous a pas permis de présenter un exposé au Comité de l'industrie en juin, quand ont eu lieu ses audiences sur l'injonction automatique, mais nous étions là, comme bon nombre de retraités. La salle de comité était pleine.
Nous sommes maintenant ici, en octobre, et le Comité de l'industrie n'a rien fait. Nous ne savons pas ce qu'il attend. Il s'agit d'un règlement et non d'une loi. Le Cabinet peut changer les choses demain, s'il le veut. Si le Comité de l'industrie ne fait rien, votre comité doit agir. Dites au gouvernement de corriger la législation sur les brevets concernant les médicaments.
Il y a un autre sujet dont je veux parler brièvement. Les grands fabricants de médicaments exercent actuellement beaucoup de pressions sur le gouvernement afin de pouvoir publiciser leurs produits. Nous croyons que ce serait une grave erreur. Les gens vont voir des médicaments à la télévision et les médias en parleront aux médecins. Le problème, c'est que dans bien des cas, les médecins rédigeront l'ordonnance, que ce soit ou non le meilleur traitement.
Soyons francs, les Canadiens prennent beaucoup de médicaments. On semble croire qu'une pilule peut tout régler. Je me demande parfois combien de gens prennent des médicaments pour le cholestérol, pour le reste de leur vie, je présume, alors qu'il aurait été préférable de simplement les encourager à marcher davantage.
Les compagnies pharmaceutiques prétendent qu'il s'agit seulement de renseigner le public. C'est de la foutaise. Quand on fait de la publicité, c'est pour vendre. C'est aussi vrai pour les médicaments que pour les voitures, les jeans ou même, si vous permettez, pour les politiciens.
Ron.
M. Ronald Lang (représentant de l'Est de l'Ontario, Association des syndicalistes retraités du Canada): Madame la présidente, mon organisme m'a demandé de vous donner un bref aperçu de l'histoire des brevets et des luttes qu'ils ont suscitées au Canada. Cela pourrait être utile aux membres du comité.
Comme vous le savez peut-être, ces luttes durent maintenant depuis plus de 50 ans. Elles ont commencé aux États-Unis, dans le cadre des séances du sous-comité du sénateur Estes Kefauver, sur la lutte antitrust et les monopoles. Ces audiences ont commencé en 1957 et se sont terminées en 1967.
De ces enquêtes est né le projet de loi S-1552 sur les droits attachés au brevet, les permis obligatoires, les marques de commerce, les médicaments d'origine par rapport aux médicaments génériques et sur les pratiques promotionnelles de l'industrie pharmaceutique. Le comité a conclu que les brevets devaient passer de 17 à trois ans, avec le versement d'une redevance sur les ventes de moins de 5 p. 100 au concédant de licence.
Dans ses conclusions, vous le comprendrez aisément, le Comité Kefauver a condamné directement les politiques de marketing, d'établissement des prix, de fabrication et de distribution des fabricants de spécialités médicales aux États-Unis. Il va de soi que le lobby pharmaceutique exerçant de lourdes pressions, le projet de loi S-1552 a été défait.
Au Canada, toutefois, les séances du Comité Kefauver étaient suivies de près par le directeur des enquêtes et de la recherche du Bureau des enquêtes sur les coalitions du Canada. Il s'appelait Dave Henry. Dans le cadre de mon travail, j'ai eu le plaisir de le rencontrer et d'avoir quelques entretiens avec lui. Les conclusions ont été publiées dans un livre vert, à l'époque. Ce rapport a été présenté à l'honorable Donald Fleming, ministre de la Justice, qui a créé un comité d'enquête en vertu de l'article 42 de la Loi relative aux enquêtes sur les coalitions. Le livre vert a servi de point de départ à l'enquête qui a présenté son rapport au ministre le 24 janvier 1963.
Ce rapport de la Commission sur les pratiques restrictives du commerce portait sur la fabrication, la distribution et la vente de médicaments. Je dirais au comité que c'est encore le fondement, la bible de celui qui veut comprendre l'industrie pharmaceutique au Canada, puisque ses techniques, son marketing et ses modes de distribution ont très peu changé en cinquante ans. On nous serine toujours les mêmes arguments. Je les entends depuis je ne sais plus combien de temps, depuis trop longtemps.
Permettez-moi de citer quelques conclusions clés de la Commission. À cause de la prédominance des entreprises américaines, le commerce des médicaments au Canada fonctionne suivant le système américain des brevets. Et comme il n'y a pas de dispositions d'homologation obligatoire en vertu des lois américaines sur les brevets, on n'a peu recours à ces dispositions au Canada, puisque, alors, les filiales canadiennes auraient été en concurrence avec leur maison mère pour la mise au point, la fabrication et la commercialisation du produit.
Au Canada, plus de 95 p. 100 des brevets de médicament reviennent à des fabricants étrangers. Il ne se fait pas de recherche fondamentale au Canada. Les ingrédients actifs sont importés ici, par la maison mère, empaquetés et conditionnés par dose au Canada, dans les filiales de ces multinationales.
La Commission a recommandé l'abolition des brevets de médicament. Elle estimait que c'était la seule solution efficace pour réduire le prix des médicaments. Je ne propose pas une solution si radicale, je vous fais part, tout simplement de la recommandation de la Commission.
Il y avait bon nombre d'autres recommandations, mais l'une d'elles vaut la peine d'être notée :
Il semble y avoir une campagne concertée pour qualifier les produits de certaines entreprises qui importent les médicaments sous leur nom générique d'imitations bon marché de qualité inférieure. Les médecins et les hôpitaux ont par conséquent été réticents à prescrire et employer ces produits. |
¿ (0925)
Le 30 novembre1962, l'honorable J. Waldo Monteith, ministre de la Santé, et aussi mon député puisque je vivais alors à Stratford, annonçait qu'un comité parlementaire spécial serait mis sur pied pour faire une enquête approfondie sur l'industrie pharmaceutique au Canada.
En 1963, les libéraux ont formé le gouvernement et le comité a été recréé, sous la présidence du Dr Harry Harley. Le rapport final du Comité Harley ne répondait pas à tous les objectifs du gouvernement de l'époque, ce que faisait par contre le projet de loi C-190 qui a suivi et qui mettait en oeuvre non pas les recommandations du Comité Harley, mais celles de la Commission sur les pratiques restrictives du commerce.
Le projet de loi C-190 est mort au Feuilleton et a été déposé à nouveau, comme projet de loi C-102, et a reçu la sanction royale le 22 juin 1969.
Le projet de loi C-102 modifiait la Loi sur les brevets pour permettre l'homologation obligatoire après trois ans, et le versement d'une redevance au titulaire du brevet. Il en a été ainsi jusqu'en 1987, quand les brevets sur les médicaments sont devenus une protection de monopole de 17 ans. En 1993, on a porté cette protection à 20 ans.
De 1969 à 1987, le Canada était le pays où les médicaments étaient les moins chers du monde. Et cela, sans recours à la bureaucratie. Il n'y avait pas de conseil d'examen des prix des médicaments et aucun fonctionnaire supplémentaire n'avait été embauché. Seule la concurrence jouait.
S'il y a une chose que veulent éviter à tout prix les fabricants de spécialités médicales, c'est la concurrence. Pour eux, c'est comme la peste. Ils ne veulent pas de concurrence pour les médicaments et les prix des médicaments : ils veulent un monopole.
Il me semble que si on leur accorde ce monopole, il doit être assorti de responsabilités, pour les prix et les coûts. On ne peut avoir de droits sans responsabilités en contrepartie et je ne crois pas que ce gouvernement, jusqu'ici, les ait tenus responsables comme il l'aurait dû.
Je comprends l'ALENA et l'OMC. Tout ça est bien beau. Mais il doit bien y avoir quelque chose que le gouvernement peut faire pour freiner l'augmentation des prix des médicaments. Si vous ne le faites pas et que vous créez un régime national d'assurance-médicaments, c'est comme si vous donniez aux fabricants de spécialités médicales un accès direct aux deniers publics. Vous vous trompez lourdement si vous croyez qu'ils n'en profiteront pas pour vider la caisse, comme ils l'ont fait en Angleterre, dans les années 50 et 60. Vous aurez alors tout un problème.
Je suis désolé, madame la présidente, ce ne sont pas des mots que j'emploie très souvent, mais je m'enflamme parfois quand il est question de cela et je sais qu'il n'est pas facile de s'enflammer pour des médicaments.
En conclusion, madame la présidente, deux enquêtes indépendantes, une aux États-Unis et une au Canada ont conclu qu'en trois ans, les sociétés pharmaceutiques avaient amplement le temps de récupérer leurs coûts et de dégager des bénéfices pour les nouveaux médicaments. D'ailleurs, de 1969 à 1987, c'est exactement ce qui s'est passé au Canada, sans que ces entreprises nous quittent : elles sont restées. Elles ont menacé de partir, de fermer leurs usines et de ne pas nous donner accès aux nouveaux médicaments. Rien de cela ne s'est produit. Ces menaces n'étaient que de l'esbroufe.
Si trois ans suffisent, on peut certainement se demander pourquoi les brevets sont maintenant octroyés pour 20 ans, et pourquoi ils ont même été prolongés dans le cadre des lois de perpétuation des brevets. On peut certainement se poser ces questions, madame la présidente.
Merci beaucoup.
¿ (0930)
La présidente: Merci, monsieur Lang.
Le prochain témoin est M. Stan Marshall, recherchiste principal du Syndicat canadien de la fonction publique.
Monsieur Marshall, vous avez la parole.
M. Stan Marshall (recherchiste principal, Syndicat canadien de la fonction publique): Bonjour.
Je m'appelle Stan Marshall et je suis agent de recherche principal au SCFP. Je remercie le Comité permanent de la santé de l'occasion qui m'est donnée de discuter de ces questions importantes relatives aux médicaments sur ordonnance.
Le SCFP représente environ 525 000 travailleurs du secteur public au Canada. Un Canadien sur 60 est syndiqué du SCFP et un pourcentage plus élevé encore de ménages canadiens compte au moins un membre du SCFP dans leur famille.
Ce matin, j'aimerais établir le lien entre l'augmentation du coût des médicaments sur ordonnance et la nouvelle réalité des travailleurs dans leurs lieux de travail lorsqu'ils tentent de s'assurer, tant pour eux-mêmes que pour leur famille.
Il est de notoriété publique que le coût des médicaments a augmenté de façon astronomique au cours des 10 dernières années. Comme d'autres l'ont déjà illustré, je vais m'en abstenir. Ce que l'on sait et comprend moins, ce sont les effets de ces augmentations sur les travailleurs ordinaires, syndiqués ou non.
L'augmentation du prix des médicaments complique énormément la négociation de ces avantages sociaux par les travailleurs. Les employeurs font pression sur eux pour réduire les coûts de la rémunération globale. Et bien que les employeurs paient incontestablement plus cher les médicaments, ils transfèrent aussi une portion grandissante de ce coût aux travailleuses et travailleurs.
Ce délestage a des conséquences importantes. En effet, plus vous vous éloignez du principe de la couverture au premier dollar pour les médicaments, plus vous imposez des choix forcés et souvent inacceptables : se procurer ou non des médicament d'ordonnance.
De nombreuses études montrent que, trop souvent, des personnes et des familles ne peuvent supporter tout le fardeau du délestage des coûts. Je vais n'en citer qu'une. Il s'agit d'une étude américaine de la Kaiser Foundation sur les personnes âgées. Les auteurs ont constaté que le quart des personnes âgées, quelle que soit leur assurance-médicaments, ont décidé de ne pas faire remplir leur ordonnance ou d'omettre des doses pour faire durer leur ordonnance plus longtemps. La fraction passe au tiers si elles ne bénéficient d'aucune assurance-médicaments.
Ces choix sont imposés par des facteurs économiques. Dans ce cas, la population était composée de personnes âgées, mais la situation ne serait sans doute pas différente s'il s'était agi de familles monoparentales ou de familles dont les régimes d'assurance-médicaments exigent un partage des coûts significatif. L'étude Kaiser a montré que ceux qui avaient une meilleure assurance-médicaments étaient moins susceptibles d'avoir, en matière d'achat de médicaments, des comportements nuisibles pour leur santé. Ne pas faire remplir une ordonnance ou manquer une dose peut, on le sait, aggraver les maladies cardiaques, le diabète et l'hypertension.
Au bout du compte, les économies réalisées par ce délestage se transforment de plus en plus en dépenses pour les pouvoirs publics qui doivent soigner des maladies mal traitées.
À l'échelle de la société, tous les pouvoirs publics cherchent à réduire les dépenses de santé mais ils ne s'en sont pas encore pris directement au problème du coût des médicaments. Ils cherchent à réduire l'ensemble des coûts par la privatisation et la sous-traitance du travail du secteur public mieux rémunéré en traitement et en avantages sociaux. Le renchérissement des médicaments a donc un effet néfaste indirect sur la santé et le bien-être des travailleurs qui doivent trouver des emplois marginalisés, à contrat et mal payés qui offrent moins de régimes d'assurance-médicaments, et parfois aucun, contrairement à ce qui se passe dans le secteur public.
Les travailleurs savent depuis toujours que les régimes d'assurance-maladie complémentaires—y compris l'assurance-médicaments et l'assurance dentaire—sont une partie essentielle des avantages sociaux et ont cherché à toutes les tables de négociation du monde à les obtenir. L'assurance-médicaments se présente aujourd'hui sous une multitude de formes. Je vais en énumérer quelques-unes. Elles ne sont pas toutes idéales. De fait, elles vont de la meilleure à la pire. Voici ce qui existe actuellement.
Les meilleurs régimes sont offerts à 100 p. 100 par l'employeur et payés selon des formulaires qui sont déterminés conjointement par le processus de négociation. Il y a toutefois quantité d'autres régimes de qualité inférieure, moins avantageux pour le travailleur. Certains régimes exigent de l'employé une participation aux coûts ou des franchises ou le partage des coûts des primes. Certains sont flexibles et obligent l'employé à choisir les protections qu'il souhaite.
La tendance actuelle est de proposer des comptes de soins de santé : on offre à l'employé une somme à utiliser pour les soins de santé; lorsque le compte est vide, les coûts supplémentaires sont à sa charge. Avec cette méthode, l'employeur se dégage entièrement de toute responsabilité en matière de protection valable. Il s'agit strictement d'une mesure d'économie. En l'absence d'un régime offert par l'employeur, l'employé doit souscrire une assurance privée et payer lui-même les primes.
¿ (0935)
Le pire cas est celui où l'employeur n'offre aucun régime et où l'employé ne peut pas souscrire d'assurance privée et se trouve donc sans la moindre protection. Fait intéressant, certains analystes dans le domaine des assurances croient qu'il pourrait n'y avoir, à l'avenir, aucune protection ou, en tout cas, aucune offerte par l'employeur.
À cause du renchérissement des médicaments, les travailleurs ont de plus en plus de mal à négocier ce type d'avantages sociaux. À mesure que le coût des médicaments augmente et que les employeurs cherchent à diminuer leur part de ce coût, nous pouvons nous attendre à des conflits de travail plus nombreux, car les travailleuses et les travailleurs devront négocier des protections tangibles importantes pour eux-mêmes et leur famille.
Nous devons chercher des solutions dans plusieurs directions. Certaines des recommandations de la Commission Romanow évoquées par la camarade Byers du Congrès du travail du Canada sont pertinentes. Un petit pas dans la bonne direction serait des transferts pour la couverture des médicaments à coûts prohibitifs, mais mieux encore seraient une agence nationale du médicament et une liste nationale de médicaments.
Toutefois, ces mesures ne suffiront pas si nous n'avons pas la volonté politique de faire d'autres changements en premier lieu. D'abord et avant tout, il faut modifier la Loi sur les brevets pour permettre aux médicaments génériques d'être mis plus rapidement sur le marché. L'actuelle protection de 20 ans a fait grimper l'ensemble des dépenses en santé et menace la santé et le bien-être des Canadiennes et des Canadiens. Les fabricants de médicaments d'origine et leurs actionnaires ont un retour disproportionné pour l'avantage qu'ils procurent. En effet, on pourrait soutenir que l'actuelle protection des brevets constitue une perte nette pour la population canadienne.
Il est temps de remettre en vigueur l'homologation obligatoire afin de faciliter des changements qui permettront de réduire le prix des médicaments. L'homologation obligatoire donne aux médicaments génériques un accès plus rapide au marché pourvu qu'une licence soit achetée de façon à indemniser le titulaire du brevet. Le Dr Aidan Hollis fait le lien entre des soins de santé financés par les deniers publics et l'homologation obligatoire dans le Journal de l'Association médicale canadienne (octobre 2002). Le Dr Hollis souligne que l'homologation obligatoire transfère le pouvoir en matière de prix du titulaire de brevet au gouvernement, mais permet néanmoins au titulaire de brevet de conserver son droit de faire un profit.
Par une demande d'injonction, la protection de brevet de 20 ans peut être prolongée d'au moins deux ans et souvent davantage, selon la durée du litige. Il faut mettre fin à cette pratique douteuse qui n'a d'autre but que de protéger la marge bénéficiaire et les parts de marché. Il faut aussi mettre fin à la reconduction perpétuelle des brevets. Les demandes de brevets pour de légères variations du médicament sans—souvent—avantages appréciables pour le malade, visent tout simplement à protéger le marché contre les équivalents génériques avec pour résultat une augmentation des coûts pour la population canadienne. Ces échappatoires légales doivent disparaître.
En 1995, la Colombie-Britannique a entrepris une importante expérience pour maîtriser le coût des médicaments. Le gouvernement a mis en oeuvre le Programme de référence des médicaments pour réduire les coûts tout en maintenant la couverture au premier dollar pour cinq classes de médicaments. Cette mesure fonctionne parce que seul le coût du médicament le moins cher est couvert dans les cas où plus d'un médicament s'est avéré efficace pour le trouble traité. D'ici à la fin de 2003, le PRM aura permis au gouvernement de la Colombie-Britannique d'économiser plus de 352 millions de dollars, et plusieurs évaluations indépendantes du programme indiquent qu'il n'y a eu aucun effet indésirable pour la santé.
Alors pourquoi ne pas adopter ce programme à l'échelle du pays? Tout simplement parce que les fabricants de médicaments d'origine s'y opposent férocement. En effet, leurs profits chutent avec l'utilisation de médicaments génériques moins chers.
Mis à part le lobbying entrepris par les fabricants de médicaments d'origine, l'exemple du PRM en Colombie-Britannique demeure un modèle de politique gouvernementale en matière de gestion des listes de médicaments et doit être envisagé dans toute réforme sérieuse ou mise en oeuvre d'un programme d'assurance-médicaments.
En terminant, j'aimerais dire que nous sommes heureux que le gouvernement songe à modifie la Loi sur les brevets afin de permettre la fabrication au pays de médicaments rétroviraux génériques pour lutter contre le VIH-sida en Afrique subsaharienne et dans d'autres régions du monde en développement. Nous sommes convaincus que cette loi devrait aussi permettre aux Canadiennes et aux Canadiens atteints du VIH-sida d'avoir accès à des équivalents génériques.
Toutefois, nous constatons que le gouvernement n'a pas fixé de délais précis pour la mise en oeuvre de ces changements et qu'il n'en a pas encore examiné les détails. Nous incitons le gouvernement à apporter ces modifications rapidement afin que les 38 millions de personnes et plus dans le monde qui sont contaminées par le VIH-sida puissent commencer à recevoir des traitements moins chers. Cette mesure est nécessaire aussi pour permettre aux économies dévastées par le grand nombre de décès dans leur population de récupérer.
La Loi sur les brevets ne devrait pas être un bouclier derrière lequel se cachent les fabricants de médicaments d'origine pour faire des profits excessifs aux dépens de l'humanité. Les membres du Comité permanent de la santé devraient exiger d'une seule voix que cesse cette horrible hécatombe causée par le VIH-sida.
Nous surveillerons l'évolution de vos travaux ainsi que les mesures que prendra le gouvernement dans tous ces dossiers, celui du VIH-sida, de la Loi sur les brevets et d'autres questions.
¿ (0940)
Je vous remercie de m'avoir écouté. Le SCFP vous fera parvenir un mémoire plus détaillé dans les semaines à venir.
La présidente: Merci, monsieur Marshall.
Nous entendrons maintenant le président du Syndicat national des employés et employées généraux et du secteur public.
Monsieur Clancy.
M. James Clancy (président national, Syndicat national des employés et employées généraux et du secteur public): Merci, madame la présidente et mesdames et messieurs les membres du comité de me donner l'occasion de comparaître devant vous au nom de nos adhérents, quelque 337 000 syndiqués au pays, femmes, hommes et membres de leur famille.
J'ai remis au comité des exemplaires de notre mémoire. Aujourd'hui, je veux employer le peu de temps dont je dispose pour souligner trois points abordés dans le mémoire. Le premier est les médicaments sur ordonnance dans le cadre de la convention collective; le second est le remède que nous préconisons; le troisième est celui que vient d'évoquer mon collègue Stan Marshall, à savoir la nécessité pour les Canadiens de réagir avec intelligence et compassion à la crise du VIH-sida caractérisée et l'épidémie en Afrique et ses liens avec les travaux du comité.
Comme ma collègue Barb Byers a examiné à fond le premier point, les médicaments sur ordonnance et la convention collective, je n'en dirai pas plus—il en est question dans notre mémoire—sauf à dire ceci : quiconque pense que les syndicats et leurs membres sont prêts à renoncer à leurs régimes d'assurance-médicaments ou à reprendre la négociation à zéro pour les protéger va avoir toute une surprise.
Ça va barder dans les mois et les semaines à venir si le comité et d'autres ne se mettent pas à lutter contre le renchérissement des médicaments sur ordonnance. Il y aura des conflits de travail d'un bout à l'autre du pays si l'on ne s'attaque pas au problème. Les syndiqués n'assisteront pas les bras croisés au sacrifice de leurs salaires sur l'autel du renchérissement des médicaments quand ils voient les grosses entreprises pharmaceutiques empocher des milliards de dollars de bénéfices. Il n'en est pas question, madame la présidente, mesdames et messieurs les membres du comité.
L'autre chose dont je veux parler dans le peu de temps qui m'est donné—cela aussi est développé dans le mémoire—c'est la réforme de la législation sur les brevets. Si l'on veut lutter contre le renchérissement des médicaments, il y a essentiellement deux façons de s'y prendre. La première est de réduire la protection accordée par le brevet, ce dont Ron Lang a parlé avec beaucoup de clarté et d'éloquence. L'autre est la reconduction perpétuelle des brevets.
Je veux en discuter. Larry Wagg en a parlé, mais très brièvement. Cette pratique, c'est un véritable attrape-nigaud, n'est-ce pas, madame la présidente? Comment appelleriez-vous ça. Une escroquerie? Un tour de passe-passe? Protéger le brevet pendant vingt ans puis le renouveler continuellement, c'est une comédie. De plus en plus de Canadiens de tous les milieux en voient les ficelles. C'est une arnaque.
Larry Wagg a parlé du président des États-Unis. Finalement, les États-Unis, sous Bush, agissent et mettent fin à cette reconduction perpétuelle. Le Canada est, je pense, l'un des derniers pays au monde à poursuivre cette pratique. C'est une comédie. C'est hypocrite. C'est absurde et il faut y mettre fin.
Beaucoup de gens doivent prendre le médicament contre les brûlures d'estomac Losec d'AstraZeneca. Beaucoup de Canadiens le prennent. Les ventes annuelles de ce médicament contre les brûlures d'estomac appelé Losec sont de 430 millions de dollars. On peut en trouver des versions génériques aux États-Unis mais pas ici. Il s'en vend annuellement pour 430 millions de dollars et d'après le registre des brevets, AstraZeneca a inscrit dix nouveaux brevets pour le Losec depuis 1999. Larry Wagg a parlé du fait qu'on avait changé la couleur du comprimé et ainsi de suite. Il y a eu dix nouveaux brevets depuis 1999 et les ventes continuent. Le drame, ici, madame la présidente, c'est que la plus grande partie est imputée au Trésor public, n'est-ce pas? À cause des régimes publics, c'est le Trésor public qui en fait les frais.
Le petit pas que vous pourriez faire, ce serait de changer, d'abolir ce règlement. Le comité pourrait recommander au gouvernement de supprimer ce règlement comme cela s'est fait dans beaucoup d'autres pays. De cette manière, les gens pourraient avoir accès beaucoup plus facilement aux médicaments, mais, en plus, vous feriez faire des économies au Trésor public. Il faut le faire.
¿ (0945)
Le dernier point que je veux soulever—il en est question en détail dans notre mémoire—est la question du sida, une pandémie en Afrique. En tant que Canadiens, en tant qu'internationalistes, nous devons vraiment faire quelque chose au sujet de cette situation. Nous devons agir. Encore une fois, votre comité pourrait recommander que le gouvernement respecte l'engagement qu'il a pris au cours des dernières semaines afin de s'assurer que les médicaments génériques à un prix abordable, offerts par une société à but lucratif, un fabricant de médicaments génériques qui a son siège social au Canada—la société a fait l'offre; le gouvernement a dit publiquement qu'il allait faire un suivi et s'assurer...mais cela ne s'est pas fait encore.
J'encourage chacun des membres du comité à prendre position sur la question. Il ne faudrait pas laisser passer cette chance. C'est vraiment une toute petite mesure que nous pourrions prendre en amendant le règlement afin de s'assurer—dans ce cas-ci je crois qu'il s'agit d'Apotex—que cette compagnie est en mesure de fabriquer ce médicament et de le livrer aux hommes et aux femmes et aux enfants en Afrique, pour s'assurer que l'on fasse quelque chose contre cette calamité mondiale. Ce n'est pas grand-chose. Le comité pourrait faire la recommandation. Je vous encourage à la faire.
Nous avons d'autres changements à proposer. Ils sont d'ordre pratique. Ils sont logiques. Ils sont réalisables, madame la présidente. Ils sont dans notre mémoire et je vous encourage à le lire.
Merci beaucoup pour votre temps ce matin.
¿ (0950)
La présidente: Merci, monsieur Clancy.
Notre dernier témoin ce matin représente le Conseil des Canadiens. Il s'agit de M. Guy Caron, travailleur de campagne en soins de santé pour le Conseil.
Monsieur Caron.
[Français]
M. Guy Caron (travailleur de campagne en soins de santé, Conseil des Canadiens): Je vous remercie beaucoup, madame la présidente et membres du comité.
Je suis très heureux d'être ici pour vous exposer le point de vue du Conseil des Canadiens, qui est l'organisme de citoyens le plus important au Canada, regroupant 100 000 membres répartis en 70 chapitres. Je suis le nouveau chargé de campagnes en matière de santé du conseil. Je suis en poste depuis environ deux semaines.
La situation des soins de santé a radicalement changé au Canada au cours des 30 dernières années, même si la prestation des soins de santé y est encore perçue principalement comme l'affaire des médecins et des hôpitaux.
On est forcé de constater que les médicaments eux-mêmes, qu'ils soient d'ordonnance ou non, représentent une part de plus en plus importante des dépenses en soins de santé au pays. Plusieurs facteurs ont contribué à cette croissance, et certains d'entre eux sont même positifs et désirables. Comme M. Romanow l'a écrit dans son rapport final, les médicaments d'ordonnance ont permis, par exemple, d'éliminer la nécessité de certaines chirurgies délicates et ont contribué à réduire la période de convalescence, permettant souvent aux gens de récupérer à la maison plutôt qu'à l'hôpital. Toutefois, le coût des médicaments a augmenté de manière significative au Canada au cours des 20 dernières années, tout comme le prix de ces médicaments.
Un membre du Conseil des Canadiens, qui réside dans les Maritimes, nous a récemment mentionné que sa famille avait dépensé plus de 5 000 $ par année en médicaments d'ordonnance au cours des récentes années. Ces problèmes sont semblables à ceux qui ont affligé les Canadiens au milieu du XXe siècle, lorsque plusieurs personnes ne pouvaient se permettre une visite à l'hôpital, surtout si cette visite devait se prolonger. Il est donc important que la question de l'accès aux médicaments soit analysée en profondeur, et nous apprécions beaucoup que le comité permanent souhaite aller de l'avant et tienne des audiences à ce sujet.
On a souvent dit que la création du Conseil d'examen du prix des médicaments brevetés, après l'adoption du projet de loi C-22, a contribué au contrôle du prix des médicaments d'ordonnance au Canada, et c'est vrai dans une certaine mesure. Le rapport de 2001 du conseil démontrait que le prix des médicaments n'avait augmenté que de 0,8 p. 100 annuellement entre 1988 et 2000.
D'autre part--il s'agit d'une statistique que Mme Byers a mentionnée--, selon Green Shield Canada, le prix moyen des nouveaux médicaments d'ordonnance brevetés a augmenté en moyenne de 20,9 p. 100 par année entre 1993 et 1997, alors que celui des médicaments brevetés existants a augmenté de 6,6 p. 100 pendant la même période.
Le rapport final de la Commission sur l'avenir des soins de santé au Canada signalait qu'une famille moyenne de trois individus dépensait plus de 1 200 $ par année pour des médicaments d'ordonnance. Il y a donc quelque chose qui cloche dans le rapport du conseil; l'image véhiculée par ce rapport est suspecte. Il faut savoir que le conseil lui-même, pour en arriver à un taux annuel d'augmentation de 0,8 p. 100, prend en considération tous les médicaments brevetés, qu'ils soient d'ordonnance ou non. Même si la création, par exemple, de gélules d'un antihistaminique qui existe déjà sous forme de cachets peut certainement s'avérer utile, il ne s'agit pas d'une innovation majeure. Et pourtant, ce changement est reflété dans la statistique du conseil.
Une autre raison qui explique cette divergence est que plusieurs médecins prescrivent des médicaments plus récents et plus coûteux plutôt que des médicaments de marque ou génériques plus anciens qui ne sont pas moins efficaces. Sans nécessairement jeter la pierre aux médecins, il faut comprendre qu'ils subissent d'énormes pressions de l'industrie pharmaceutique, qui dépense des sommes faramineuses pour promouvoir ses nouveaux produits, ce à quoi je vais revenir plus tard.
Si nous étudions l'industrie pharmaceutique elle-même, il sera plus facile pour le comité de comprendre pourquoi les coûts des médicaments pour les citoyens et pour le secteur public sont à ce niveau et quels sont les divers éléments de ces coûts. Aujourd'hui, les Canadiens qui ont la chance d'être assurés ont accès à un mélange d'assurance publique et d'assurance privée. Même si l'augmentation draconienne des coûts des médicaments d'ordonnance a affecté ces régimes, elle a surtout frappé les citoyens qui ne sont pas assurés. L'estimation que l'on entend le plus fréquemment est que 10 p. 100 des Canadiens ne sont pas assurés. Leurs dépenses privées, qu'on appelle les dépenses out of pocket, ont augmenté en valeur réelle d'environ 50,2 p. 100 entre 1996 et 2001.
L'assurance, pour ceux qui ne peuvent se permettre le coût élevé des médicaments d'ordonnance, varie selon la province, mais il est sûr que beaucoup de Canadiens ne peuvent se permettre de se payer les médicaments dont ils ont besoin. Plusieurs plans d'assurance-médicaments provinciaux ont récemment dû décréter des augmentations de franchises. Pour les personnes âgées, la franchise est passée de 215 $ à 350 $ par année en Nouvelle-Écosse et de 175 $ à 325 $ par année au Québec. En décembre 2001, la Colombie-Britannique a annoncé qu'elle augmenterait les frais d'usager et de franchise pour son régime. Selon Santé Canada, en Ontario seulement, près de deux millions de personnes ne sont pas assurées par quelque régime que ce soit et 700 000 personnes de plus sont inadéquatement couvertes.
Les diverses crises que traversent ces programmes sont attribuables en grande partie à l'augmentation du prix des médicaments d'ordonnance, qui a, d'autre part, été grandement bénéfique pour l'industrie pharmaceutique de marque. Entre 1991 et 2000, le taux de rendement après imposition sur le capital investi de cette industrie s'est situé entre 40 p. 100 et 45 p. 100, ce qui est beaucoup plus élevé que ce que l'on trouve dans tout autre secteur. Par exemple, le taux de rendement du secteur bancaire pendant la même période a été d'environ 16 p. 100 par année.
La Chaire d'études socio-économiques de l'UQAM, dans une étude qui date d'avril 2002, a établi que si ce taux de rendement avait été similaire au taux de rendement du secteur bancaire, par exemple d'environ 15 p. 100 ou 16 p. 100, et que l'impact avait été entièrement reflété dans le prix des médicaments d'ordonnance, des médicaments brevetés, ce prix serait en moyenne d'environ 16,8 p. 100 à 17 p. 100 inférieur à ce qu'il est présentement.
Pourquoi une telle augmentation des coûts et des profits? L'adoption successive des projets de loi C-22, C-91 et S-17 doit être mentionnée, et elle l'a été par mes collègues. Ces projets de loi ont renforcé les droits de propriété intellectuelle au Canada de telle manière que ces derniers encouragent moins l'innovation qu'ils ne protègent l'exclusivité du marché.
Le projet de loi C-91, par exemple--comme ces quelques éléments ont déjà été mentionnés, je vais passer brièvement là-dessus--, a non seulement complètement éliminé la licence obligatoire, compulsory licensing, mais a également ouvert la porte à certains effets pervers comme le brevetage perpétuel, ou evergreening, qui permet à des compagnies d'effectuer des changements marginaux dans les médicaments afin de se donner les outils pour poursuivre un fabricant de médicaments génériques.
Un autre effet pervers est l'avis de conformité qui permet, à toutes fins pratiques, de prolonger un brevet de deux ans en alléguant simplement qu'une entreprise de médicaments génériques a enfreint son brevet.
Troisièmement, la multiplication des brevets sur les processus de fabrication eux-mêmes permet à un fabricant de marque d'empêcher l'entrée de fabricants génériques en forçant l'entreprise générique à patienter jusqu'à l'échéance de tous les brevets de procédés, ce qui n'existait pas avant le projet de loi C-91.
Nous aimerions prendre quelques instants pour vous dire à quel point les accords commerciaux internationaux, comme les ADPIC et la ZLEA, nous préoccupent en ce qui a trait à la protection de la propriété intellectuelle. Le texte préliminaire de la ZLEA prévoit, entre autres, que les détenteurs d'un brevet puissent bénéficier d'une prolongation de leur monopole d'exploitation si le processus d'approbation du brevet prenait plus de quatre ans. Actuellement, le processus peut prendre entre huit et dix ans au Canada.
La clause d'avis de conformité y est également incluse, de même qu'un affaiblissement des mécanismes de licences obligatoires, qui sont pourtant toujours prévus par les ADPIC. Avec la ZLEA, la licence obligatoire ne pourrait être permise que dans des cas d'urgence restant à définir.
Nous n'avons malheureusement que bien peu de temps pour parler des solutions possibles aux problèmes que nous avons abordés ce matin. Je peux vous dire que le Conseil des Canadiens appuie la grande majorité des recommandations qui ont déjà été faites. Le Conseil des Canadiens est aussi un ardent défenseur d'un programme national d'assurance-médicaments, qui devrait, bien évidemment, se faire graduellement et requerrait l'assentiment des provinces. M. Romanow a bien indiqué qu'une telle mesure coûterait 3 milliards de dollars, mais permettrait des économies annuelles de 650 millions de dollars, et qu'elle permettrait à chaque Canadien et à chaque Canadienne d'être couvert. Cela éliminerait tous les problèmes qu'engendre le fait que 10 p. 100 des Canadiens ne sont pas couverts.
Nous recommandons également que le système des licences obligatoires soit restauré au Canada afin de créer une pression à la baisse sur le prix des médicaments d'ordonnance. Le gouvernement fédéral, dans le cadre des négociations commerciales internationales, devrait s'efforcer d'assouplir les clauses sur la propriété intellectuelle plutôt que de renforcer ces droits qui, selon nous, ont créé un déséquilibre en faveur de l'exploitation commerciale au détriment du bien commun.
Il serait ainsi possible, par la suite, pour le gouvernement fédéral de légiférer afin d'éliminer les effets pervers de l'adoption des projets de loi C-22 et C-91.
Merci beaucoup.
¿ (0955)
[Traduction]
La présidente: Merci beaucoup, monsieur Caron.
Nous allons passer maintenant à la deuxième partie de notre séance; nous allons commencer la période de questions. M. Lunney sera le premier intervenant.
M. James Lunney (Nanaimo—Alberni, Alliance canadienne): Merci, madame la présidente.
Tout d'abord, puisque je suis le premier à intervenir ce matin, je voudrais remercier tous nos témoins qui ont fait de nombreuses observations intéressantes.
L'étude qu'entreprend le Comité de la santé porte sur un certain nombre de questions que je vais vous énumérer rapidement. Nous avons le mandat d'examiner les coûts qui augmentent; les prix et leur contrôle; les mécanismes d'approbation des nouveaux médicaments et de leur introduction; la surveillance des effets nocifs; les pratiques d'ordonnance; la commercialisation et le lobbying auprès des prescripteurs; la publicité s'adressant directement au consommateur; l'accès, naturellement; la mauvaise utilisation, l'abus et l'accoutumance au sein de la population en général; et les comparaisons internationales. Je pense que vous avez en fait abordé bon nombre de ces questions dans vos exposés ce matin.
Je voudrais tout d'abord poser une question à M. Clancy. Dans votre exposé, monsieur Clancy, au chapitre intitulé Et des pleurs par milliers, vous dites : «Il ne faut pas que notre désir de s'enrichir prime sur la nécessité d'être humain».
Avant de poser ma question, le greffier pourrait peut-être prendre note—et d'autres seraient peut-être intéressés—qu'un excellent article a été publié il y a une semaine dans le cahier «Review» du samedi du National Post. L'article vedette s'intitulait The Drug Pipeline. Je ne sais pas combien parmi vous l'ont lu, mais je pense que le greffier devrait peut-être le distribuer.
Cet article aborde bon nombre de ces questions également, notamment les plans de commercialisation des sociétés, le fait que le nombre d'employés qui travaillent dans le marketing augmente et que le nombre d'employés qui font de la recherche diminue, et les attitudes des dirigeants des sociétés pharmaceutiques qui parlent des maladies comme de possibilités de commercialisation.
Ma première observation s'adresse en fait à M. Clancy. Je tiens à vous féliciter de porter votre intérêt au-delà de vos propres employés syndiqués aujourd'hui pour parler du problème en Afrique. Naturellement, une partie de votre mandat consiste à examiner également les questions internationales. Mais je voudrais tout simplement vous en féliciter.
Vous avez dit, je crois, qu'Apotex envisage la possibilité de fournir un produit de remplacement générique. Lorsque les médicaments antirétroviraux pour le sida sont arrivés sur le marché, le coût par année pour un patient était initialement de 30 000 dollars. À l'heure actuelle, il en coûte environ 10 000 dollars par an pour traiter un patient atteint du sida au Canada. Mais nous comprenons qu'Apotex peut sans doute le faire pour 500 dollars par an avec un médicament générique, ce qui représente à peine plus d'un dollar par jour.
Je me demande si vous étiez au courant de l'étude sur le sida... Il y a eu une grosse conférence en Afrique où il y avait au moins deux groupes de chercheurs qui ont parlé d'un produit qui s'appelle Metrafaids—un produit à base d'herbes médicinales dont ils peuvent se servir pour le traitement à un coût encore moins élevé et qui donne encore de meilleurs résultats. Ils sont cependant frustrés car ils ne peuvent obtenir de fonds pour recueillir les statistiques de recherche qui pourraient convaincre leurs collègues dans le monde entier de l'importance de ces médicaments de rechange. Quelqu'un d'autre a mentionné que ce que les fabricants de spécialités médicales détestent plus que tout, c'est la concurrence.
Je me demandais si vous étiez au courant de cela et si vous aviez des observations à faire à ce sujet.
À (1000)
M. James Clancy: Je dois vous avouer que je n'étais pas au courant. Le seul commentaire que je peux faire—et cela ne relève pas du mandat de votre comité, mais a plutôt trait aux mesures que le gouvernement du Canada a prises au sujet du VIH en Afrique et de la création du fonds des Nations Unies—c'est que nous n'atteignons pas encore nos objectifs. Je sais que cela ne relève pas de votre comité, mais après avoir entendu récemment les discours de Stephen Lewis et d'autres, je suis déçu, comme bien d'autres dans le monde des syndicats, de ce que malgré la création du fonds des Nations Unies, nos engagements ne sont toujours pas proportionnels à notre PIB, par exemple.
M. James Lunney: Passons maintenant à autre chose. Je suis heureux que M. Wagg et M. Lang soient venus ici pour représenter les syndicalistes retraités. Vous avez fait plusieurs recommandations.
Vous avez recommandé de corriger les lois sur les brevets pharmaceutiques, d'autres nous ont parlé de la perpétuation des brevets et de la façon dont on continue ainsi à exiger des prix exagérément élevés. Vous nous avez également parlé de façon très directe. Parfois, les aînés sont les mieux en mesure de parler sans ambages. Je ne sais pas pourquoi. On dit pourtant que les jeunes n'ont pas d'inhibitions, mais c'est peut-être vrai aussi des personnes plus âgées.
Vous n'avez pas ménagé les coups quand vous avez parlé des sociétés pharmaceutiques et des pressions qu'elles exercent pour vendre directement aux consommateurs. Cela correspond à l'article qui vient d'être mentionné, où l'on parle du nombre réel des employés et des investissements que font les sociétés pharmaceutiques dans le marketing—même au Canada, où la mise en marché n'est pas supposée se faire directement auprès des consommateurs, on voit néanmoins des annonces avec des numéros sans frais pour obtenir davantage de renseignements, des annonces dans lesquelles on ne parle pas expressément du produit mais plutôt de la maladie. Il semble que la plupart des sociétés pharmaceutiques considèrent leurs brevets à l'égard d'un médicament comme un brevet à l'égard d'une maladie.
J'aimerais savoir ce que vous pensez du marketing. La mise en marché directement auprès du consommateur semble vous inquiéter. Pourriez-vous nous en dire davantage à ce sujet?
À (1005)
M. Larry Wagg: Merci. Nous avons eu l'occasion de voir les résultats de ce marketing, bien sûr, surtout ici à Ottawa, puisque notre câblodistributeur diffuse maintenant des émissions de Détroit plutôt que de Rochester. Il semble qu'on fasse davantage de publicité pour toutes sortes de médicaments. On peut se demander pourquoi les sociétés pharmaceutiques veulent vendre leurs produits de cette façon puisqu'elles donnent ensuite une dizaine de raisons pour lesquelles les gens pourraient ne pas prendre leurs médicaments.
Nous estimons qu'il serait stupide de ne pas reconnaître que la publicité crée la demande. Nous sommes persuadés que la demande s'exprime auprès des sources habituelles—c'est-à-dire les médecins, les consultations en clinique, etc. Les médias n'ont pas besoin d'accroître cette demande.
Un exemple me vient à l'esprit. Si vous regardez les parties de base-ball à la télévision, vous remarquerez qu'il y a une annonce de Viagra derrière le receveur durant au moins trois manches, dans toutes les parties diffusées en Amérique du Nord.
Une voix: «Good morning, good morning».
M. Larry Wagg: Cette publicité crée également une illusion, car dans bien des cas, le Viagra et d'autres médicaments n'ont pas les résultats annoncés par le postier qui danse en distribuant le courrier. Non seulement cela crée un marché superflu, mais cela suscite également une fausse impression—c'est le terme plus juste—quant à l'aide que peut procurer le médicament. À notre avis, c'est un jeu de dupes.
M. James Lunney: C'est M. Lang, je crois, qui s'est dit inquiet d'un programme national d'assurance- médicaments. Vous avez dit que ce programme pourrait être siphonné...vous pourriez peut-être nous en dire davantage. Vous avez dit quelque chose du genre.
M. Ronald Lang: J'ai parlé de vider la caisse.
M. James Lunney: Oui, vider la caisse. Dans un récent accord sur la santé, si je ne m'abuse, nous avons mis un milliard de dollars pour la couverture des médicaments à prix prohibitif. J'ai au moins entendu parler d'un article sur un nouveau traitement pour la fatigue chronique et la fibromyalgie. Il y a une femme qui prenait 100 000 $ de médicaments, si je ne m'abuse, pour traiter quelque chose qui est aussi peu précis et aussi mal compris et mal défini du point de vue pathogénie que la fatigue chronique et la fibromyalgie. C'est beaucoup d'argent. Si nous ouvrons les vannes sans restriction, je crains que le Trésor public et le contribuable aient matière à s'inquiéter. Je vous remercie d'avoir fait ces remarques; je pense qu'il est sage d'être au courant.
S'il y a d'autres solutions... voici encore ce que quelqu'un d'autre a dit : s'il y a une chose que les producteurs de médicaments sur ordonnance détestent—je crois que c'est le terme utilisé—c'est la concurrence. Par exemple, en Alberta aujourd'hui, il y a le problème de Empower Plus. C'est un produit à base de vitamines et de minéraux qui aide beaucoup les gens souffrant de maladies mentales—de la maladie bipolaire. Il en a été question dans au moins quatre revues d'évaluation par les pairs et l'Alberta a versé plus de 500 000 $ pour faire des recherches là-dessus parce qu'il y a des coûts énormes associés à cette maladie. Dès que Santé Canada en a entendu parler, on a arrêté l'étude à l'Université de Calgary. Cela du fait d'un article antique de la Loi sur les aliments et drogues qui stipule que l'on ne peut indiquer ni annoncer qu'une vitamine, un élément minéral ou une herbe peut influer sur une maladie énumérée à l'annexe. Il y a d'ailleurs un projet de loi d'initiative parlementaire à ce sujet.
Afin que les choses soient claires, s'il existe des solutions économiques non brevetables, estimez-vous qu'au nom de vos membres le gouvernement canadien devrait investir dans des recherches sur ces solutions? Quelqu'un veut-il répondre?
M. Ronald Lang: Je ne verrais pas d'inconvénient à ce que le gouvernement mette de l'argent dans ce genre de recherche parce que les entreprises pharmaceutiques elles-mêmes ne s'intéressent évidemment pas à ce genre de chose. Peut-être que si cela ne les intéresse pas, c'est parce qu'elles n'y voient pas de possibilité de bénéfices suffisants. Je ne verrais donc pas d'inconvénient à ce que des investissements publics financent ce genre de recherche parce qu'on ne sait jamais ce que l'on peut trouver. C'est peut-être quelque chose que le secteur pharmaceutique aurait aimé trouver lui-même.
J'aimerais revenir à une chose que vous avez dite quand j'ai parlé de piller le Trésor public. On a constaté en Grande-Bretagne... et, là-bas, le Comité Sainsbury déclare : «Quand c'est le médecin qui prescrit et la population qui consomme, personne ne s'inquiète du coût», ce qui renvoie directement la balle au gouvernement.
Maintenant, si on veut avoir un programme national d'assurance-médicaments, et j'espère que cela viendra, il faudra avoir une loi sur les brevets qui va protéger le Trésor public et s'assurer que l'on en a pour son argent.
Ici, on est prévenu, parce que la Grande-Bretagne a essayé cela et les compagnies ont vidé le Trésor public dans les années 50 et 60 jusqu'à ce que le Comité Sainsbury et des comités du gouvernement finissent par arrêter cela. En fait, c'est Enoch Powell que les entreprises ICI Industries en Grande-Bretagne... Enoch Powell, ma foi, on peut difficilement faire plus conservateur de droite qu'Enoch Powell... il a contourné le système de brevets et leur propre entreprise ICI, International Chemical Industries Ltd. et importé en Grande-Bretagne des médicaments qui venaient d'Italie et n'étaient pas protégés par des brevets.
Merci.
À (1010)
La présidente: Monsieur Lang, il semble que nous n'ayons reçu aucun texte de votre part. Aviez-vous...
M. Ronald Lang: Oui, on l'a photocopié. Vous n'en aviez pas. J'avais des notes écrites à la main, c'est tout. Je n'ai pas vraiment lu quoi que ce soit.
La présidente: Très bien. Donc, le seul texte était celui de M. Wagg?
M. Ronald Lang: C'est en effet le seul texte écrit officiel, madame la présidente.
La présidente: J'aimerais vraiment que vous puissiez rédiger une brève histoire des brevets et produits pharmaceutiques que vous pourriez nous envoyer. Ce serait très utile parce qu'il y a pas mal de députés qui ne sont pas ici aujourd'hui et je suis désolée qu'ils aient manqué votre témoignage.
M. Ronald Lang: Madame la présidente, j'étais un étudiant adulte avec quatre enfants lorsque je suis allé à l'université et mon cinquième enfant est né en Angleterre quand j'étudiais à la LSE. J'étudie le secteur des médicaments depuis ma maîtrise en 1968, les comparaisons entre le coût des médicaments britanniques et canadiens et la question des brevets aussi. Je pourrais en effet vous envoyer quelque chose à ce sujet.
La présidente: Merci.
Le prochain est M. Ménard.
[Français]
M. Réal Ménard (Hochelaga—Maisonneuve, BQ): J'apprécie beaucoup les présentations qui ont été faites par les divers intervenants. Je suis d'accord sur 90 p. 100 de ce qui a été dit, mais on a fait deux affirmations excessives et je me dois d'y réagir.
Il est un peu grossier de dire qu'aucune compagnie pharmaceutique n'a fait de recherches qui aient mené à la création d'un médicament innovateur au Canada. Il ne faut quand même pas prendre les parlementaires pour des imbéciles. Des nuances doivent être apportées. Je suis bien d'accord sur l'idée que l'on revoie la Loi sur les brevets et que l'on resserre tout cela. Par contre, si on affirme qu'aucun médicament n'a été produit et qu'aucune recherche n'a été faite au Canada, on est très mal informé. À la limite, il est démagogique d'affirmer une chose comme celle-là, et ce n'est pas respectueux envers l'industrie du Québec.
J'aimerais poser trois questions
Je voudrais d'abord que vous nous indiquiez clairement, madame Byers, quels sont les trois médicaments qui vont coûter 20 000 $ et plus.
D'autre part, j'ai beaucoup apprécié la présentation de M. Clancy. Je vais relire votre mémoire à tête reposée. Qu'est-ce que vous pensez? Il est impossible pour le Canada de ne pas offrir de propriété intellectuelle. On ne peut pas faire comme si l'OMC n'existait pas et comme s'il n'y avait pas de coûts reliés à la recherche. Il ne faut donc pas entretenir l'illusion qu'on va abolir la Loi sur les brevets et qu'il n'y aura aucune loi. Je ne pense pas non plus qu'on va revenir au régime des licences obligatoires; cela ne m'apparaît pas réaliste. J'ai été très surpris d'apprendre de la part des fonctionnaires que, quand on effectue une analyse en vue d'émettre un avis de conformité et que les monographies cliniques ont été déposées par les manufacturiers, on ne tient pas compte de l'aspect innovateur d'un médicament. On n'en tient tellement pas compte qu'on compare le nouveau médicament à des placebos.
Le comité ne devrait-il pas essayer de régler le problème à la base et demander à Santé Canada de ne pas donner d'avis de conformité pour des médicaments qui n'améliorent pas le sort des patients? Notre devoir de parlementaires n'est-il pas d'intervenir à la base, plutôt que de nous attaquer à la Loi sur les brevets? On peut évidemment s'assurer que la période soit de 20 ans et pas une journée de plus. Je suis un député du Québec et je serais prêt à défendre une loi sur les brevets, mais pas une durée de 23, 24, ou 26 ans. Il faudrait se limiter à 20 ans et si, après cette période, vous n'avez pas recouvré votre investissement, ce sera bien dommage. Seriez-vous d'accord sur l'idée de demander à Santé Canada de resserrer les liens et de faire en sorte qu'il y ait un critère véritable pour les examinateurs? Vous savez que, parfois, des examinateurs de l'extérieur sont engagés à contrat par Santé Canada pour revoir les monographies cliniques. Seriez-vous d'accord sur l'idée de leur demander qu'il y ait un critère d'appréciation du caractère innovateur d'une drogue que l'on étudie?
J'aimerais donc entendre M. Clancy, Mme Byers, M. Caron et tous ceux qui veulent s'exprimer sur cette question. J'aimerais d'abord connaître le nom des trois médicaments qui vont coûter 20 000 $ et plus.
À (1015)
[Traduction]
Mme Barb Byers: Je veux préciser que ces trois médicaments coûteront 20 000 $ par patient par année.
Cindy Wiggins va vous donner des détails.
Mme Cindy Wiggins (recherchiste principale, Congrès du travail du Canada): Je n'ai pas les noms exacts avec moi mais l'un est un médicament contre le cancer, l'autre, un nouveau médicament contre l'arthrite et je crois que le troisième est un médicament pour la respiration. Je vous enverrai les noms pharmaceutiques donnés à ces médicaments dès mon retour au bureau.
[Français]
M. Réal Ménard: D'accord.
[Traduction]
M. James Clancy: Je crois que nous pourrions faire six choses. Je vais commencer par la protection des brevets sur les médicaments. Je sais que nous participons à l'OMC et qu'il s'agit d'un problème international, mais je suis bien certain que le gouvernement pourrait suggérer aux autres pays de collaborer pour ramener à un niveau plus raisonnable la législation concernant les brevets.
Cela entraîne des obligations internationales, etc. La deuxième étape serait très modeste et nous pourrions la franchir immédiatement, à savoir arrêter la pratique de la perpétuation des brevets. Le gouvernement pourrait faire cela immédiatement, dès aujourd'hui ou la semaine prochaine.
[Français]
M. Réal Ménard: Vous pourriez donc tous vivre avec l'existence d'une loi sur les brevets et avec le fait qu'on offre une protection s'il en coûte 780 millions de dollars, par exemple, pour commercialiser une nouvelle drogue. Vous pourriez vivre avec le fait qu'il y a un loi sur les brevets, mais vous ne voulez pas qu'il y ait reconduction, ce sur quoi je pourrais être d'accord même si je suis québécois. Je crois qu'il est complètement faux de dire qu'on n'accorde aucune propriété et qu'aucune recherche n'a été faite, comme le disait M. Lang, et je crois que c'est à la limite ridicule.
[Traduction]
M. James Clancy: Nous prenons note des commentaires de Ron Lang au sujet des brevets sur les médicaments. La première chose à faire est d'abroger le règlement qui autorise la pratique des reconductions. Ensuite, il faudrait intégrer les médicaments sur ordonnance à la Loi canadienne sur la santé—au programme national d'assurance-médicaments, si vous voulez. Romanow a fait une suggestion modeste à cet égard, qui pourrait représenter une première étape, si on veut. Ce serait donc la troisième chose à faire.
La quatrième serait une agence nationale sur les médicaments qui pourrait se pencher sur certaines des questions que vous soulevez et notamment sur l'idée d'une liste nationale. Cela permettrait d'attaquer exactement le problème que vous avez mentionné, n'est-ce pas?
[Français]
M. Réal Ménard: Mais cela n'est pas possible. S'il y a une agence nationale sur le coût des médicaments ou sur les médicaments brevetés, pourquoi le gouvernement fédéral établirait-il une agence nationale alors que ce sont les provinces qui décident des médicaments dont le coût peut être remboursé? On va se retrouver dans la situation qu'on a connue lors de l'étude du projet de loi sur la procréation assistée. Les ministres de la Santé vont découvrir, en lisant le projet de loi, que c'est une ingérence du fédéral.
[Traduction]
M. James Clancy: Je crois qu'il faut s'attaquer à la question des grosses entreprises pharmaceutiques—des entreprises multinationales—qui sortent de nouveaux médicaments qui ne sont pas forcément plus efficaces que les médicaments existants. C'est un fait aujourd'hui. C'est non seulement le consommateur qui paye mais également le Trésor public.
Cette notion que les multinationales qui fabriquent des médicaments peuvent sortir de nouveaux médicaments dont on n'a pas prouvé la supériorité par rapport aux médicaments existants et...
[Français]
M. Réal Ménard: Cela, on le sait, et il faut que Santé Canada fasse mieux son travail et donne un meilleur avis de conformité. Mais je ne comprends pas le lien que vous établissez entre cela et une agence nationale sur les médicaments. C'est Santé Canada qui homologue les médicaments. Qu'est-ce qu'une agence nationale ferait de plus?
À (1020)
[Traduction]
M. James Clancy: Si vous m'assurez que Santé Canada a un service qui fait cela, qui peut effectivement réglementer cela, c'est très bien, qu'il le fasse. Toutefois, cela n'existe pas à l'heure actuelle. Cela ne se fait pas.
La présidente: Peut-être que M. Marshall voudrait ajouter quelque chose aussi.
M. Réal Ménard: Et M. Caron. Il parle français.
M. Stan Marshall: J'aurais une petite réflexion à ce sujet. Je vous comprends lorsque vous dites que Santé Canada pourrait être chargé de cette responsabilité. Malheureusement, cette responsabilité ne relève pas uniquement de Santé Canada. Il y a le ministère des Affaires étrangères et du Commerce international qui est chargé des accords commerciaux et le ministère de l'Industrie chargé du développement de l'industrie au Canada. Ces deux ministères sont sensibles aux pressions exercées par les compagnies pharmaceutiques pour s'assurer que les médicaments sont homologués plus rapidement—ce que j'ai d'ailleurs constaté de première main, qu'ils sont homologués plus rapidement—et d'incroyables pressions sont exercées aussi sur Santé Canada. Ces ministères ne sont pas indépendants, tandis qu'une agence nationale pour les médicaments serait indépendante et en mesure de déterminer l'efficacité des médicaments proposés.
[Français]
M. Guy Caron: Merci. J'aimerais revenir à la question d'une agence nationale sur les médicaments et à celle d'une liste nationale également. Il est évident que cela ne se fera pas du jour au lendemain. Cela va requérir des négociations avec les provinces, car ce n'est pas quelque chose qui peut être imposé unilatéralement. Il faut comprendre que les provinces ont toujours la possibilité de refuser, mais elles ont un choix à faire: protéger leur propre liste de médicaments ou saisir l'occasion de travailler avec 12 autres provinces et territoires pour accroître leur pouvoir d'achat. Il est évident qu'un seul groupe d'achat pour tout le pays aurait un meilleur pouvoir d'achat que 13 entités différentes. Je parle de la liste nationale de médicaments, qui est également proposée dans le rapport de M. Romanow. Nous ne disons pas nécessairement que cela va se faire de manière unilatérale. Au contraire, cela va requérir des négociations avec les provinces, mais il faut comprendre que les provinces, dont le Québec, pourraient retirer quelque chose d'une liste nationale de médicaments. Je ne parle pas nécessairement d'une agence nationale sur les médicaments.
Je voudrais aussi revenir sur la question de la licence obligatoire. Vous mentionnez, monsieur Ménard, qu'il serait irréaliste d'envisager le retour à la licence obligatoire. En fait, quand on regarde ce que l'OMC prescrit, on constate qu'il est possible de revenir à la licence obligatoire. C'est l'ALENA qui l'interdit. Les ADPIC permettent les licences obligatoires à certaines conditions, et le Canada pourrait promouvoir ces conditions.
M. Réal Ménard: Une licence de 20 ans. On a perdu en arbitrage obligatoire. C'est pour cela qu'on a eu le projet de loi S-17. Il ne peut pas y avoir un brevet au Canada....
M. Guy Caron: Il s'agissait du brevetage. La licence obligatoire elle-même porte sur le fait que des compagnies génériques, pendant la durée du brevet, peuvent produire leurs génériques en échange de royautés payées à la compagnie de marque, qui était la situation qui était suggérée après l'adoption du projet de loi C-22. Il s'agirait d'évaluer les poids relatifs de la clause de l'ALENA qui interdit la licence obligatoire et de la clause de l'OMC qui la permet à certaines conditions.
On parle également des différents abus qui sont faits du processus des brevets. On a parlé amplement du evergreening. Je n'ai jamais réussi à trouver la traduction exacte du mot evergreening.
À (1025)
M. Réal Ménard: Perpétuation des brevets.
M. Guy Caron: Perpétuation des brevets... Non, en fait, c'est un autre cas.
Une voix: Le brevetage perpétuel.
M. Guy Caron: Le brevetage perpétuel, merci. On a aussi parlé de l'avis de conformité.
Il y a un troisième point, sur lequel on ne s'est pas vraiment penché ici, et c'est dommage: c'est la multiplication des brevets, qui permet à une compagnie de breveter différents procédés et différentes composantes d'un médicament pour empêcher la production d'un produit générique après 20 ans. Au fil de la vie du médicament de marque, ces brevets sont demandés. Les compagnies font des demandes de brevets, ce qui fait en sorte que la durée réelle du brevet dépasse largement 20 ans, puisque la compagnie générique doit attendre après la fin du brevet. Si on parle de licence obligatoire pour un médicament, on peut quasiment parler de licence obligatoire pour les brevets de procédés, ce qui permettrait que les médicaments génériques soient produits après la fin du brevet.
La question essentielle pour le Canada ou pour le gouvernement est donc de savoir s'il est prêt à utiliser les clauses de l'OMC relatives à l'utilisation de la licence obligatoire, à voir à quel point l'entente de l'OMC peut être applicable contre l'entente de l'ALENA et, éventuellement, à fournir au Canada un système de licences obligatoires qui pourrait bénéficier à tous et créer une pression à la baisse sur les prix des médicaments de marque.
M. Réal Ménard: Merci.
[Traduction]
La présidente: Merci, monsieur Ménard.
Monsieur Dromisky, c'est à vous.
M. Stan Dromisky (Thunder Bay—Atikokan, Lib.): Je vous remercie, madame la présidente.
Je tiens à vous remercier pour votre excellente présentation de ce matin. J'ai beaucoup de chance; je suis heureux d'avoir été ici aujourd'hui pour recevoir toute l'information que vous présentez. Je fais aussi partie du comité spécial du premier ministre, de groupes d'étude chargés de se pencher sur les problèmes que les aînés doivent surmonter tous les jours, et les médicaments sur ordonnance figurent parmi les plus importants.
J'ai une série de questions à poser. Nous constatons que la plupart des gens savent très peu de choses à propos des médicaments qu'ils prennent. Les médecins n'ont pas le temps de les conseiller et de leur parler des médicaments. Certaines pharmacies fournissent un feuillet qui indiquent les résultats que devrait donner le médicament et certains de ses effets indésirables possibles, et peut-être même d'autres options de rechange que l'on pourrait envisager à l'avenir.
Je me demande si les syndicats ont établi ou prévu des stratégies pour aider leurs membres à mieux se familiariser avec les médicaments les plus couramment utilisés par leurs membres. Je me demande simplement si cette vaste organisation qui est la vôtre a pris certaines initiatives pour les aider à être mieux informés.
La deuxième question—vous n'avez pas à y répondre tout de suite—est la suivante. Je sais que les syndicats ont fait des représentations auprès du Bureau de la concurrence du Canada, au début du printemps, je crois—oh, était-ce juillet? Alors vous n'aurez probablement pas encore reçu de réponse de sa part, et vous n'en recevrez probablement pas de sitôt.
Monsieur Lang, en ce qui concerne le fait qu'aucune recherche ne soit faite, j'ai visité une usine Merck Frosst à Montréal. J'ai été reçu de façon royale par les cadres supérieurs de l'entreprise qui m'ont fait visiter leurs installations et m'ont présenté à certains chercheurs qui y travaillent. C'est tout ce que j'avais à vous dire à ce sujet.
Ensuite, vous avez parlé du message selon lequel les grandes compagnies pharmaceutiques distribuent des «médicaments génériques bon marché et de qualité inférieure». Existe-t-il des preuves selon lesquelles ils sont de qualité inférieure? S'ils ne sont pas de qualité inférieure, pourquoi alors les hôpitaux et les médecins prescrivent-ils les médicaments plus coûteux produits par les compagnies pharmaceutiques?
Mme Barb Byers: Je vais commencer.
Tout d'abord, que je sache, il n'y a pas de syndicat qui fasse oeuvre éducative auprès de ses membres précisément en ce qui concerne les médicaments.
Vous me posez la question : pourquoi les médecins prescrivent-ils ces médicaments, et je vous répondrai que c'est parce que les gens les réclament et parce qu'ils ne sont pas au courant. Pour cette raison précisément il faudrait retourner à une liste nationale de médicaments remboursés et à un régime national d'assurance-médicaments.
Dans ma province, pendant le gouvernement Blakeney, nous avions un régime d'assurance-médicaments qui fonctionnait très bien. Honnêtement, je peux affirmer que les gens faisaient davantage attention aux médicaments qu'on leur prescrivait car lors d'une visite chez le médecin qui prescrivait un médicament, ils demandaient immédiatement si ce produit était couvert par l'assurance-médicaments. Si le médecin répondait qu'il s'agissait d'un médicament breveté, la question était alors de savoir quel était le produit générique de remplacement. C'est parce que le patient pouvait soit verser 25 $ ou 35 $ au pharmacien ou, faire exécuter l'ordonnance, ce qui représentait, je pense, 3,65 $—c'était il y a un certain temps—en frais d'ordonnance. Les patients y regardaient de plus près car ils savaient qu'ils devaient payer la différence de leur poche.
La province avait mis cartes sur table, très clairement : «Voilà les produits que nous couvrons, et nous ne couvrons pas ceux-là. Voilà ceux qui font partie de notre liste de médicaments remboursés et ceux que couvre notre régime d'assurance-médicaments.» Ainsi, je pense que nous nous sentions plus enclins financièrement à poser ces questions.
Si l'on regarde les recommandations de la Commission Romanow en vue d'un régime d'assurance-médicaments national, avec une liste de médicaments remboursés, on constate qu'il y a forcément dissémination d'information auprès des patients.
Maintenant, je ne sais pas si dans des syndicats en particulier...
Une voix: Ce n'est pas le cas car les gens sont trop occupés.
À (1030)
M. Larry Wagg: Le congrès des retraités ayant appartenu à un syndicat est également une coalition de quatre ou cinq groupes. Il a été question de ceux qui ont témoigné devant la commission. Il y avait la Corporation canadienne des retraités intéressés, le Syndicat national des employées et employés généraux et du secteur public, la Fédération canadienne des syndicats d'infirmiers et d'infirmières, l'Alliance des personnes âgées pour la protection des programmes sociaux du Canada et la Fédération nationale des retraités et citoyens âgés. En fait, toutes ces organisations ont reçu des subventions. Certaines, y compris nous à un moment donné, disposaient de subventions de Santé Canada pour offrir ce genre de programme aux personnes âgées dans un cadre particulier.
Si c'est ce que sous-entend votre question, à mon avis, il est trop tard. Si les gens ne posent pas ces questions avant la retraite, ils ne les poseront pas non plus après. Il faudrait mettre en place des mesures beaucoup plus tôt, quand les gens sont encore actifs, pour les sensibiliser car Barb a donné un bon exemple de ce qui pousse les patients à poser des questions sur la différence entre ces médicaments.
Vous avez également demandé si ces chercheurs avaient lancé une invitation à jouer au golf avec eux. Une grande part de la recherche s'effectue quand on s'adresse aux médecins et on leur fournit des renseignements. Le dernier exemple en date est celui de Biovail qui versait des milliers de dollars pour cet exercice et affirmait qu'il s'agissait de recherche. On exerce donc également des pressions auprès des médecins pour la vente et on sait que les médecins sont trop occupés pour contrer cela. Je pense que cela crée plus... les représentants des fabricants de médicaments sur ordonnance ne s'adonneraient pas à cette pratique si elle ne portait pas ses fruits.
La présidente: Monsieur Castonguay, suivi de M. Proctor, et...
[Français]
M. Jeannot Castonguay (Madawaska—Restigouche, Lib.): Merci, madame la présidente. Merci beaucoup à nos invités. C'était très intéressant et enrichissant.
Nous avons rencontré beaucoup de témoins au cours des dernières semaines. Certains d'entre eux nous ont parlé des problèmes qu'entraîne la multimédication, spécialement chez les personnes âgées qui, dans certains cas, prennent 10 ou 12 différents médicaments. Un très grand nombre d'hospitalisations sont attribuables aux effets secondaires combinés de tous ces médicaments. Or, il est certain que cela génère des coûts, que ce soit à l'égard des médicaments ou pour l'ensemble du système de santé.
Ma réflexion m'amène à vous demander votre avis sur les mesures que le gouvernement canadien devrait adopter pour sensibiliser la population à ce sujet. Si j'ai bien saisi, on ne parle pas ici uniquement des gens âgés. Croyez-vous qu'on devrait poser des gestes concrets, peut-être même à partir de l'école primaire, pour faire comprendre aux gens que les médicaments ne sont pas des bonbons, qu'ils comportent des avantages mais aussi des risques associés? La multimédication va de pair avec le maintien d'un certain équilibre.
D'une façon ou d'une autre, j'aimerais entendre vos commentaires et savoir si, à votre avis, des mesures touchant le coût des médicaments pourraient nous aider à améliorer notre situation.
[Traduction]
M. Ronald Lang: Vous parlez des médicaments sur ordonnance, n'est-ce pas?
M. Jeannot Castonguay: Oui.
M. Ronald Lang: Au Canada, nous avons toujours compté sur les médecins pour prescrire les médicaments, pour dire au patient ce dont il a besoin.
Si vous voulez aborder la question d'une prescription abusive, si vous voulez savoir combien d'entre nous n'ont jamais reçu d'ordonnance, et combien ont encore des demi-bouteilles non utilisées quand nous allons mieux... Je pense qu'il vaudrait mieux vous adresser à l'Association médicale canadienne et aux médecins, pour faire passer le message, car la prescription abusive coûte terriblement cher, pas seulement aux régimes d'assurance publics mais également aux régimes privés, et elle coûte cher aussi au patient.
Je pense qu'à cet égard, il faut travailler en collaboration avec l'association médicale.
M. Jeannot Castonguay: Je suis moi-même médecin et j'ai exercé pendant 26 ans. Je comprends donc bien cet aspect. Et je sais d'expérience qu'il arrive que le patient n'informe pas son médecin du fait qu'il consulte plusieurs médecins de crainte que son médecin refuse de le revoir.
Je me demande donc s'il n'y a pas oeuvre éducative à faire quelque part pour que tous travaillent dans le même sens?
À (1035)
Mme Barb Byers: Je vais aborder cette question sous divers angles.
Encore une fois, c'est là qu'une agence nationale du médicament serait utile car elle exercerait une surveillance des médecins et du public.
Toutefois, à propos de la prescription abusive de médicaments dont vous avez parlé, la façon dont nous avons abordé d'autres questions semblables en matière de santé, par exemple, la façon dont les gouvernements, fédéral et provinciaux, ont abordé la question du tabagisme, et la façon dont la société... Songez à quoi aurait ressemblé cette salle il y a 20 ans, voire 10 ans. Elle aurait pu être remplie de fumée.
M. Jeannot Castonguay: C'est cela, il y a 20 ans.
Mme Barb Byers: Vous posez la bonne question en ce qui concerne la sensibilisation des gens à la consommation abusive de médicaments et à l'interaction des médicaments, car c'est une réelle inquiétude.
Je le répète, c'est un rôle qu'un éventuel organisme national pourrait jouer auprès du public.
M. James Clancy: Pour garder une juste perspective, disons que c'est une réelle inquiétude mais ce n'est pas la «principale» inquiétude.
La question fondamentale n'est pas tellement la prescription abusive de médicaments mais l'inverse, car à l'avenir, les gens n'auront plus accès aux médicaments à cause de la flambée des coûts. Ainsi, il ne s'agit pas de prescription abusive, ce qui est, certes, une inquiétude, mais le plus fondamental en l'occurence, c'est l'inverse, si l'on peut dire, car les gens n'ont pas accès aux médicaments à cause de l'augmentation des coûts.
La présidente: Ce n'est pas le problème inverse de la prescription abusive, c'est le manque de médicaments sur ordonnance.
M. Caron veut ajouter quelque chose.
M. Jeannot Castonguay: Essentiellement, c'est le fait de ne pas avoir accès aux médicaments.
M. James Clancy: En effet, c'est une réduction de l'accès.
[Français]
M. Guy Caron: En abordant cela sous l'angle de la prévention, je pourrais relier votre question à la publicité directe destinée aux consommateurs. Présentement, les compagnies pharmaceutiques sont à la limite de l'acceptable face à la Loi sur les aliments et drogues. On a parlé de Viagra, mais on pourrait mentionner Ziban ainsi que d'autres produits dont la publicité est conçue de manière à se conformer non pas à l'esprit, mais à la lettre de la loi.
Je sais qu'une étude britannique--en fait, je ne me souviens pas si elle était britannique ou américaine, mais je pourrais retrouver cette information--a démontré que les patients exposés à la publicité sur un médicament étaient neuf fois plus susceptibles que les autres d'exiger que leur médecin leur prescrive ce médicament.
Le médecin, pour sa part, subit à la fois les pressions de la compagnie pharmaceutique, qui l'incite à prescrire le médicament, et celles du patient, qui veut se le faire prescrire même s'il n'en a pas besoin. La durée de la consultation augmente parce que le médecin doit prendre le temps d'expliquer pourquoi ce médicament est contre-indiqué ou n'est pas le meilleur remède dans les circonstances.
Votre question est en fin de compte liée à la multimédication. En outre, si l'on permet que la publicité directe destinée aux consommateurs soit de plus en plus envahissante--et je sais que le gouvernement subit des pressions de la part des compagnies pharmaceutiques pour qu'on adopte un système à l'américaine en matière de publicité--, on risque de se voir confrontés à des problèmes encore plus sérieux que la multimédication.
[Traduction]
La présidente: Merci beaucoup, monsieur Castonguay.
Monsieur Proctor.
M. Dick Proctor (Palliser, NPD): Merci beaucoup, madame la présidente.
Je ne suis pas membre officiel du comité car je remplace Svend Robinson aujourd'hui. Je suis ravi d'être ici.
Je suppose qu'aucun des témoins ici présents n'exclurait un régime national d'assurance-médicaments de son scénario idéal, mais chacun, à sa façon, présente l'argument qu'il ne faut pas imposer un fardeau au Trésor public, c'est-à-dire que les deniers publics l'emportent. C'est un point important qu'aucun Canadien ne devrait perdre de vue.
Je m'adresse d'abord à M. Clancy. Je sais que vous représentez des employés du gouvernement provincial et d'autres, mais lors des négociations avec un gouvernement provincial qui vous talonne en disant que le coût élevé des médicaments le force à agir différemment, conseillez-vous ou recommandez-vous à l'employeur de se lier avec d'autres gouvernements provinciaux pour faire des achats en quantité afin de faire baisser les prix? Le cas échéant, que vous répond-on?
À (1040)
M. James Clancy: Vous avez tout à fait raison et c'est exactement ce que nous faisons, suivant le parti au pouvoir à vrai dire. Certains gouvernements nous écoutent et sont manifestement intéressés par cette notion qu'ils essaient d'analyser. D'autres gouvernements nous envoient promener.
Il est tout à fait vrai que nous faisons oeuvre éducative à ce propos auprès de nos membres. Nos membres commencent à comprendre la situation beaucoup mieux qu'il y a cinq, six ou sept ans. C'est une question d'actualité brûlante et les gens veulent se renseigner. La réaction de nos membres est très enthousiaste.
La réaction de nos vis-à-vis ne l'est pas autant mais il y a des progrès.
M. Dick Proctor: Monsieur Marshall, au cours des témoignages nous avons constaté que les gens dans certaines tranches de revenu semblaient éprouver plus de difficulté que d'autres à obtenir un bon régime de soins de santé ou d'assurance-médicaments.
Dans le cas du SCFP, qui représente une plus vaste gamme de professions, quels sont les groupes qui sont le plus menacés ou qui éprouvent le plus de difficulté à obtenir un régime ou à le garder?
M. Stan Marshall: Il est difficile de généraliser. Le SCFP, vous le savez, ne procède pas tellement par négociations centralisées ou provinciales.
Quand l'employeur est un petit employeur, c'est plus difficile. Il y a des secteurs en particulier où c'est plus difficile. Ceux qui travaillent dans le domaine des services sociaux, dans les garderies ou les foyers collectifs par exemple, éprouvent beaucoup de difficulté à négocier un régime avec leur employeur. Dans certains cas, il s'agit de très petites unités de négociation. Elles peuvent se limiter à sept ou huit employés dans certains cas, parfois moins. C'est très difficile. Il n'existe pas vraiment de bonnes stratégies permettant d'obtenir pour eux des régimes d'assurance-médicaments.
Dans le cas d'un employeur plus important, comme une municipalité ou un hôpital, il est plus probable que les gens disposent d'un régime mais ceux qui travaillent à temps partiel risquent davantage de ne pas y avoir accès. Assurément, les employés de petits employeurs, les employés à temps partiel et occasionnels éprouvent beaucoup plus de difficulté. Bien entendu, dans le secteur public, les femmes sont en nombre dominant dans ces emplois et il y a les chefs de famille monoparentale et d'autres minorités visibles qui n'y ont pas vraiment accès. À cet égard, c'est une question d'équité.
M. Dick Proctor: Merci.
Ma question s'adresse à Barb Byers. Vous avez parlé d'une liste provinciale de médicaments remboursés en vigueur sous le gouvernement Blakeney. C'est peut-être à cause de Romanow mais au moins il est question actuellement d'une liste nationale et je pense qu'on y travaille dès à présent.
Qu'en pensez-vous? Est-ce viable? S'agit-il seulement d'un essai? Es-ce que ça va fonctionner? Quelle est votre position face à l'idée d'une liste nationale de médicaments remboursés et comment envisagez-vous la chose?
Mme Barb Byers: Évidemment, nous pensons qu'une telle liste est une chose tout à fait viable. Nous sommes prêts à l'accueillir. Nous comprenons qu'étant donné leur nature, les gouvernements voudront la mettre en oeuvre progressivement, mais il faut se rappeler qu'entre temps, les gens meurent.
Je suis d'accord avec M. Clancy. Le problème n'est pas tellement la prescription abusive de médicaments mais le fait que les gens n'aient pas accès aux médicaments. La vie des gens est donc en danger, et certaines personnes font des choix quotidiennement que nous ici présents n'avons peut-être pas à faire.
On l'a dit : il faut un régime national d'assurance-médicaments mais nous ne pouvons pas tout simplement injecter encore plus d'argent dans des médicaments très coûteux alors qu'il y a d'autres solutions. C'est crucial et cette position n'est pas différente, soit dit en passant, de nos positions concernant d'autres questions de soins de santé. Nous ne réclamons pas tout simplement un régime de soins de santé financé à même les deniers publics. Nous réclamons que ce soit un régime public, car tout ce qui fait grossir les bénéfices est de l'argent qui ne sert pas à prodiguer des soins de santé à quelqu'un.
Nous pensons que c'est tout à fait viable.
À (1045)
M. Dick Proctor: Bien.
Monsieur Lang, je ne sais pas si j'ai très bien compris les réponses que vous avez données à M. Ménard. Vous avez dit qu'essentiellement on ne faisait pas au Canada de recherche sur des médicaments dont les ingrédients actifs étaient importés. Je pense que c'est exactement ce que vous avez dit. Toutefois, décriviez-vous la situation passée ou actuelle? Est-ce encore vrai?
M. Ronald Lang: Je parlais des deux—de la situation passée et de la situation présente.
Comme je crois l'avoir mentionné dans mon exposé, plus de 95 p. 100 des brevets appartiennent à des entreprises étrangères. Les brevets sont déposés par des entreprises étrangères, ce qui signifie que la recherche fondamentale... Essentiellement, dans l'industrie pharmaceutique, la recherche est centralisée au siège social de la compagnie mère du pays d'origine. C'est là où se fait la recherche fondamentale sur de nouveaux médicaments.
La recherche qu'elles font dans notre pays est surtout la recherche nécessaire pour que leurs médicaments soient approuvés par la direction générale de la protection de la santé, afin qu'elles puissent commercialiser le médicament dans notre pays. C'est là où se fait le gros de la recherche dans notre pays.
M. Dick Proctor: Je vous remercie.
La présidente: Je vous remercie, monsieur Proctor.
Monsieur Barrette.
[Français]
M. Gilbert Barrette (Témiscamingue, Lib.): Bonjour. C'est ma troisième ou quatrième rencontre; je suis un nouvel élu du mois de juin. J'apprécie beaucoup l'information que j'ai reçue ce matin; j'avais aussi, au préalable, fait des lectures sur le sujet.
Comme on dirait en anglais, a great challenge is in front of us. Néanmoins, certaines choses m'agacent passablement. M. Clancy en a parlé lui aussi ainsi que vous-même, à d'autres occasions, si je ne fais pas erreur. Je veux parler de l'opposition entre l'efficacité et le coût, entre le développement de nouveaux médicaments et leurs avantages pour les consommateurs ainsi qu'entre la prise de médicaments et la prévention.
Comme mon collègue Stan, je fais partie du comité qui étudie la situation des personnes âgées. Or, un jour que je me trouvais à la pharmacie, un individu d'un certain âge m'a dit qu'il avait le choix entre demander sa prescription au complet ou mettre de la nourriture dans son réfrigérateur. Entendre ce genre de chose me fait frissonner, d'autant plus que c'était sûrement la stricte vérité. Nous sommes conscients qu'à partir d'un certain âge, le médicament permet bien souvent à la personne de demeurer plus longtemps à la maison, d'éviter l'urgence, le transport à l'hôpital et les coûts énormes que tout cela peut occasionner.
Par contre, il fut un temps où au Québec, une certaine classe de citoyens, en raison du niveau de ses revenus, avait droit à des médicaments gratuits ou presque. Or, il y avait des abus; j'en ai été témoin à plusieurs occasions. On consommait beaucoup de médicaments et, dans certains cas, on s'en procurait pour les voisins puisque c'était gratuit.
Lorsque le gouvernement a annoncé qu'il y aurait des frais de deux dollars par prescription, il y a eu tout un tollé. Le nouveau régime d'assurance-médicaments a par la suite été mis en oeuvre. La cotisation au régime, qui était au début de 175 $, atteint maintenant presque 400 $, cela en grande partie à cause de la hausse des coûts des nouveaux médicaments mis sur le marché. Ce qui est irritant, c'est que ces médicaments--et on nous l'a confirmé--ne sont pas toujours efficaces.
J'ai compris, peut-être à tort, qu'un régime devait s'appliquer à partir du premier dollar que coûte une prescription. Mon inquiétude, encore une fois, a trait aux abus auxquels cela pourrait mener. Il y a déjà une surabondance de prescriptions. Ne risque-t-on pas d'entraîner la surconsommation de médicaments en abolissant toute contribution financière du consommateur? Comme Mme Byers l'a mentionné plus tôt, la participation du consommateur implique une éducation qui est peut-être forcée, mais il reste qu'il y a éducation. Les gens demandent des renseignements plus pointus sur les médicaments qu'ils consomment et sur l'usage de ces derniers.
[Traduction]
Mme Barb Byers: Si vous me permettez de commenter brièvement sur la couverture intégrale... Vous avez commencé en parlant des personnes qui n'ont pas les moyens de se payer les médicaments dont ils ont besoin, et d'autres personnes en ont parlé. Même avec l'exemple que vous avez donné de personnes qui ont obtenu des ordonnances pour des amis ou des parents, la question que je poserais serait la suivante : combien de ces personnes n'avaient pas accès au régime et avaient désespérément besoin du médicament mais n'avaient pas les moyens de le payer? C'est donc la question qui se pose.
La raison pour laquelle nous avons proposé une couverture intégrale c'est qu'autrement, comment peut-on aider les personnes qui en ont le plus désespérément besoin au moment où elles en ont besoin? Il y a peut-être d'autres aspects fiscaux que vous voudriez examiner, au fur et à mesure que certaines personnes passent à une tranche d'imposition supérieure, entre autres comment recouvrer une partie de ces coûts, ce qui est toujours une possibilité à envisager. Autrement, si vous n'assurez pas une couverture intégrale dès le départ, les mêmes personnes qui n'y ont absolument pas accès diront : «Eh bien, c'est un régime très intéressant, mais je n'ai pas les moyens d'y adhérer, et je n'ai pas les moyens d'attendre un remboursement, parce que mon revenu est trop faible.» C'est donc une mesure qu'il faut prendre.
L'autre aspect, c'est que les gens craignent les abus. J'ai travaillé pendant 17 ans comme travailleuse sociale, donc j'ai toujours entendu parler des abus dont font objet les programmes d'aide sociale et ainsi de suite. Ce que nous savons à propos de chaque programme social qui existe, c'est que le niveau d'abus dont font l'objet ces programmes est extrêmement faible comparativement aux besoins absolus qui existent. James y a fait allusion tantôt. Quels sont les résultats des choix que font les gens?
Simplement sur la question des choix, l'autre aspect dont nous avons parlé ce matin, c'est qu'il y a des gens qui sont dans une situation désespérée, mais il y a aussi des gens qui sont appelés à faire des choix chaque jour. Lorsqu'on a retiré certains médicaments de la liste des médicaments remboursés dans la province où j'habitais, des femmes ne touchant qu'un revenu marginal ont dit : «Je n'ai plus les moyens de prendre la pilule contraceptive—parce que c'est le choix qui me reste. Je pourrais la payer si elle était remboursée, mais je n'ai pas les moyens de payer le coût intégral de la pilule.» Il y a eu ensuite d'autres questions dont la communauté a dû s'occuper. Nous parlons parfois du coût prohibitif...mais il ne faut pas non plus oublier qu'il y a des gens qui sont obligés de faire des choix tous les jours.
À (1050)
M. James Clancy: Brièvement, madame la présidente, nous rejetons alors la couverture complète...
Si c'est la consommation qui nous préoccupe, la meilleure façon d'aborder cette question est de suivre la suggestion que certains ont déjà formulée au sujet de la publicité s'adressant directement aux consommateurs. Encore une fois, le comité pourrait poser un geste modéré et recommander à Santé Canada et au gouvernement fédéral de faire respecter les restrictions actuelles sur la publicité s'adressant aux consommateurs; ils font preuve de laxisme et nous en constatons les résultats à la télévision. Ils ne s'assurent pas que la réglementation actuelle est appliquée. Ce serait là une première mesure pour réduire la consommation.
Revenons à votre premier argument. Dans notre mémoire, nous avons dit qu'environ 450 nouveaux médicaments brevetés avaient été conçus entre 1996 et 2000. Quatre cent cinquante nouveaux médicaments. Ce n'est pas nous qui avons préparé ces données. Elles proviennent du Conseil d'examen du prix des médicaments brevetés, du Dr Elgie et de son groupe. On a donc créé 450 nouveaux médicaments de 1996 à 2000. Pourtant le Dr Elgie et son comité affirment que seulement 25 d'entre eux présentent un avantage thérapeutique important.
Je crois que la réponse au problème est évidente. Pour en revenir à la toute première partie de votre question, quelque chose cloche lorsqu'on assiste à un déluge de 450 nouveaux médicaments et 25...
Une voix: Ça m'énerve.
M. James Clancy: Ça m'irrite aussi. Et nous le payons cher, non seulement à titre de particuliers mais également en tant que contribuables. C'est un tour de passe-passe.
La présidente: Merci, monsieur Barrette.
M. Lunney a dit qu'il aimerait poser une question très brève.
M. James Lunney: Ma question porte aussi sur la publicité. Dans leur mémoire, certaines personnes ont parlé des médicaments qui servent à réduire le taux de cholestérol. Bien entendu, nous avons tous vu ces abominables publicités mélodramatiques à la télévision. Vous avez probablement vu celle qui montre un père en train de jouer au frisbee avec son enfant, qui bondit pour le saisir et qui subit une infarctus, et on le voit à la morgue, une étiquette fixée au gros orteil, puis des gens qui le pleurent à ses funérailles, tout cela accompagné du message suivant : «Avez-vous fait vérifier votre taux de cholestérol sanguin?» C'est une publicité très très mélodramatique et de la pire espèce.
Je tiens à le dire publiquement, les membres du comité seront sans doute heureux d'apprendre qu'il existe un produit vitaminé, l'acide folique, qui constitue le meilleur moyen de défense contre les infarctus et les accidents vasculaires cérébraux. Santé Canada le sait. Si vous en doutez, je le précise pour le compte rendu, je suis prêt à distribuer cette information qui porte les logos de Santé Canada et de la Fondation canadienne des maladies du coeur, publiée dans le Journal canadien de cardiologie. Je suis persuadé que l'ensemble des Canadiens lisent régulièrement cette publication.
Des voix: Oh, oh!
À (1055)
M. James Lunney: C'est un produit non brevetable, qui ne coûte pas cher et dont nous connaissons maintenant les mécanismes de biochimie.
J'aimerais vous demander, vous qui représentez les syndicats, si vous croyez que ces renseignements devraient être mis à la disposition de vos membres? Que croyez-vous que le gouvernement fédéral devrait faire pour diffuser l'information au sujet de solutions moins coûteuses? Croyez-vous que le gouvernement devrait y consacrer des sommes d'argent? Ou seriez-vous en faveur de fonds de recherche qui serviraient à trouver des solutions de remplacement peu coûteuses et très rentables aux médicaments brevetables dans l'intérêt du public? Voilà ce que je vous demande.
Mme Barb Byers: Tous les syndicats représentés ici seront en mesure de répondre au nom de leurs propres membres.
Vous soulevez un aspect important de la question. Rappelez-vous, cependant, que vous ne pouvez d'une part suggérer des solutions de rechange peu coûteuses et, d'autre part, offrir une protection conférée par un brevet qui offre aux gens des médicaments à prix plus élevé ou encore accepter de la publicité qui les pousse à en acheter. Si le gouvernement souhaite affirmer qu'il existe des solutions peu coûteuses, il devrait également s'assurer que les gens bénéficient d'une bonne couverture.
M. James Lunney: Des coûts peu élevés n'entraînent pas nécessairement des profits peu élevés. Dans bien des cas, on parle de profits plus élevés et de coûts moins élevés.
Mme Barb Byers: Oui, oui, je comprends.
Soit dit en passant, avez-vous tous pris en note le terme «acide folique»?
Des voix: Oh, oh!
Une voix: Ce qui prouve ce que vous venez d'affirmer, à savoir que nous devons renseigner le public.
M. James Clancy: C'est en partie un problème dont nous avons hérité. Si nous remontons à la période de 1988 à 1998, alors que le gouvernement fédéral a été majoritairement conservateur puis majoritairement libéral, nous avons assisté à une succession de compressions des fonds accordés aux groupes de défense des consommateurs et à toute une gamme d'autres groupes.
Vous nous demandez donc si nous croyons que le gouvernement a un rôle à jouer dans la diffusion des renseignements que fournissent les groupes de défense? Assurément, mais non pas, comme le dit Mme Barb Byers, sans apporter des modifications fondamentales dans les domaines dont nous discutons ce matin.
La présidente: Merci, monsieur Lunney.
Je vais vous poser une question afin de m'assurer que j'ai bien compris ce que vous nous dites. On a parlé dans les questions de différentes façons de freiner l'augmentation du coût des médicaments, mais vous affirmez que beaucoup de ces solutions n'apportent que des retouches mineures et qu'essentiellement nous devrions nous pencher sur la Loi sur les brevets afin que cesse la perpétuation des brevets, afin d'arrêter... afin d'appliquer les lois actuelles qui, comme nous l'avons appris la semaine dernière, ne sont pas mises en application dans le domaine de la publicité, et afin d'insister sur le fait qu'elles doivent être appliquées et aussi resserrées.
Cet état de fait n'illustre-t-il pas les longues tentacules qu'étendent les grandes sociétés pharmaceutiques? Je ne les qualifierai pas de sociétés pharmaceutiques éthiques. Je ne sais pas qui a fait cette affirmation et je ne sais pas non plus s'il blaguait. Je ne parle pas de sociétés pharmaceutique éthiques, qu'elles soient des sociétés génériques ou de grandes sociétés pharmaceutiques. Je ne qualifie pas de grandes sociétés pharmaceutiques les sociétés pharmaceutiques qui font de la recherche, comme elles l'annoncent elles-mêmes, parce que comme vous l'avez souligné, elles n'effectuent pas de recherche au Canada; elles effectuent toutes leurs recherches dans leur pays d'attache. Nous sommes une nation de cobayes sur lesquels ils mettent à l'essai leurs nouveaux produits; c'est ce qui constitue 99 p. 100 de la recherche qu'ils prétendent faire. Ils font l'essai de nouveaux produits sur les Canadiens et cela entraîne parfois des effets néfastes.
J'aimerais exiger que 50 p. 100 de ce qu'ils prétendent être de la recherche soit fait en laboratoire avec des ingrédients actifs et que 50 p. 100 soit consacré à la recherche clinique. J'aimerais d'abord connaître les résultats de leur recherche clinique dans leur propre pays. Si l'on parle d'une entreprise helvétique, combien de Suisses ont dû ingérer ces produits avant de ne forcer les Canadiens à le faire? Si la plupart du profit est versé en Suisse, il me semble que ce soit eux qui devraient en assumer le coût physique éventuel.
Je m'excuse de tempêter à ce sujet.
Vous avez souligné avec justesse que le problème relevait du partage des pouvoirs dans ce domaine. Je siégeais au Comité de l'industrie, vers 1996, lorsque nous avons examiné ce dossier et que nous nous sommes heurtés à un barrage complet. Nous avons réellement tenté de préparer un rapport qui vous aurait plu, mais on nous a bloqués et comme vous le savez, rien ne s'est produit. La même situation s'est sans doute répétée le printemps dernier au Comité de l'industrie. C'eut été trop pénible pour moi de suivre le dossier et de revivre cette expérience.
Il est cependant possible de protester et de déclencher ainsi des changements; vos mémoires constituent des munitions et je vous en remercie.
Merci, chers collègues.
Chers collègues, je tiens à vous informer que le premier mercredi après notre retour, soit le 22 octobre, nous devrons tenir une réunion en après-midi, ainsi que le 5 novembre. Donc nous devrons nous réunir les mercredis au cours des prochaines semaines.
Nous n'avons pas encore étudié le budget supplémentaire des dépenses et cela pose problème. Si vous êtes d'accord je vais convoquer une réunion de plus, parce que vous êtes au courant de toute l'attention accordée aux budgets supplémentaires dernièrement. Nous devons les étudier.
La séance est levée.