:
Merci, monsieur le président, et merci aux membres du comité de nous donner l'occasion de vous faire part de nos réflexions sur le train à grande vitesse.
Je vais faire quelques observations préliminaires et ensuite, je serai heureux de participer à la discussion que vous voudrez certainement avoir avec tous les participants.
Je suis accompagné ici aujourd'hui par deux collègues spécialistes: Paul Larouche qui est responsable de notre groupe sur la stratégie et qui a travaillé personnellement à l'étude sur la liaison à laquelle nous avons participé en 1995, ainsi que Dan Braund, qui est responsable de notre groupe sur les systèmes, dont le bureau est situé à Kingston, et qui a la responsabilité pour le monde entier de la planification et de la mise en oeuvre des systèmes dans le système ferroviaire.
[Français]
Mon introduction couvrira quatre sujets principaux. Tout d'abord, je voudrais commencer par un bref aperçu de Bombardier Transport. Une discussion suivra au sujet de ce qu'est au juste un train à grande vitesse. Il y a des définitions diverses, selon le contexte. En troisième lieu, je voudrais parler de l'expérience de Bombardier dans le domaine des trains à grande vitesse dans le monde. Pour terminer, je dirai quelques mots au sujet du potentiel des trains à grande vitesse au Canada.
[Traduction]
J'espère que cela ne prendra pas trop de temps. Je vais essayer d'être aussi concis et pointu que possible.
Je suis certain que vous connaissez Bombardier. La plupart des Canadiens nous connaissent parce que nous sommes le troisième constructeur d'avions civils dans le monde. Ce qui est moins bien connu, c'est que Bombardier Transport est, en fait, le principal fabricant de solutions pour le transport ferroviaire de passagers dans le monde, avec des activités dans près de 23 p. 100 des marchés mondiaux dans ce domaine. Nous avons plus de 100 000 voitures en service aujourd'hui dans le monde. Alors, nous sommes actifs dans ce domaine depuis un certain temps et nous avons eu un succès considérable dans un environnement très compétitif, dont vous allez entendre parler plus tard, j'en suis sûr.
Nous avons 50 sites de production et d'ingénierie dans le monde et 21 centres de service dans 24 pays. Comme je l'ai dit, nous sommes présents partout dans le monde.
Au Canada, nous avons deux centres d'excellence qui sont à l'avant-garde dans le monde — un qui est situé à La Pocatière, au Québec, et l'autre, à Thunder Bay, en Ontario — ainsi que notre centre d'ingénierie de notre groupe des systèmes à Kingston, en Ontario. Le siège social de Bombardier Transport pour l'Amérique du Nord, qui dirige nos activités au Canada, aux États-Unis et au Mexique — nous sommes présents à titre de fabricant dans les trois pays — est situé à Saint-Bruno, au Québec. Nous avons des voitures, à bord desquelles vous avez sans doute tous voyagé à un moment donné ou à un autre, en service à Vancouver, dans la région du Grand Toronto, à Toronto même, à Ottawa et à Montréal. Un grand nombre de voitures utilisées par VIA Rail ont été construites par Bombardier au Canada.
Alors, voilà qui nous sommes, de manière générique.
Je suis certain que vous avez beaucoup réfléchi à ce qu'est un train à grande vitesse. C'est un sujet qui se prête à un grand nombre de définitions. Il englobe une multitude de possibilités de trains interurbains, variant des systèmes qui fonctionnent à environ 150 milles à l'heure, comme le système Acela qui relie actuellement Washington, New York et Boston jusqu'à la technologie expérimentale Maglev qui roule — je vais maintenant passer au système métrique, parce que les chiffres sont plus impressionnants — à 400 km à l'heure. Il s'agit d'une technologie expérimentale et elle se situe actuellement dans l'étendue limite. Mais il y a aussi toute la gamme entre les deux.
Si je peux dire, la question qui se pose aux décideurs, ce n'est pas tellement de savoir si vous allez avoir un train à haute vitesse. C'est la question beaucoup plus complexe et difficile de savoir quelle haute vitesse est appropriée dans un contexte particulier et, effectivement, si la haute vitesse est appropriée dans des contextes particuliers. Les choix sont relatifs et politiques et se résument à déterminer si les besoins d'un corridor particulier justifient un certain niveau d'investissement dans un certain type de service ferroviaire.
La technologie existe aujourd'hui pour satisfaire à presque que n'importe quelle exigence de haute vitesse. En effet, n'importe laquelle des trois entreprises représentées à cette table aujourd'hui pourrait vous offrir tous ces choix. Les décisions à propos des choix sont de nature économique, sociale, environnementale et politique, et les calculs sont souvent relatifs, et non absolus. Par exemple, plutôt que de comparer les vitesses maximales absolues de ces modes, comparez le temps qu'il faut pour se rendre d'un centre-ville à un autre par différents modes de transport et dans quelle mesure la réduction de ces temps attirerait la clientèle. Après tout, les avions volent à environ 600 km à l'heure et plus. Alors, la comparaison est très difficile à faire lorsqu'il s'agit simplement de regarder les vitesses maximales de n'importe quel mode de transport.
J'ai un dernier mot de nature générale sur le choix du transport. De toute évidence, les choix sont relatifs et les coûts peuvent être décourageants, mais c'est un fait que tous les systèmes ne coûtent pas la même chose. Différentes options comportent des coûts différents. Souvent, la différence n'a rien à voir avec le véhicule choisi. Les coûts principaux liés aux divers choix ont surtout à voir avec l'infrastructure, le choix des emprises, la nécessité ou non de construire une nouvelle assiette des rails, et le coût de l'électrification, si c'est nécessaire. Je pense que c'est une considération importante dans la décision de quiconque sur ces questions. Cette décision est dictée, à son tour, par une évaluation de l'équilibre approprié entre les coûts, la vitesse, l'utilité et l'intérêt public.
Ce qui est enthousiasmant, et certainement ce que nous avons tous constaté, j'en suis sûr, c'est le changement que le train à grande vitesse apporte dans les collectivités et chez les personnes. Un bon exemple est l'intense intégration des pays et des villes de l'Union européenne apportée par le train à grande vitesse. Par exemple, il est courant de voir des Londoniens travailler à Paris, des Parisiens travailler à Bruxelles et des gens faire la navette entre deux villes, non seulement pour le travail quotidien, mais pour les loisirs. C'est une idée qui aurait été impensable avant l'avènement du train à grande vitesse.
L'idée que des gens de Kingston ou d'Ottawa pourraient travailler à Toronto et à Montréal, et vice versa, que des habitants de Red Deer pourraient faire la navette quotidiennement entre leur ville et Calgary ou Edmonton, et qu'il serait courant de voir des gens voyager fréquemment dans les corridors Québec-Windsor et Edmonton-Calgary pour le travail, les loisirs ou les contacts sociaux sont des avantages sociaux extrêmement importants qu'il n'est pas facile de quantifier.
Une autre question qui, je crois, est importante lorsqu'on envisage un train à grande vitesse, et je suis certain que c'en est une avec laquelle vous jonglez, c'est qu'il s'agit d'un système coûteux, peu importe ce que vous faites. L'investissement peut être plus ou moins intense. Il n'y a pas de calculs de coût absolu dans cet exercice. Ce qui ne fait pas de doute, c'est que l'investissement doit être fait par le secteur public, exactement comme c'est le cas de tout autre investissement d'infrastructure majeure dont les retombées ne sont pas nécessairement commerciales, mais sont réparties partout dans la société et dans l'économie.
Le secteur privé apporte beaucoup au succès de tels investissements. En effet, c'est un partenaire indispensable. Mais au final, comme c'est le cas des routes, des ponts, des aéroports et des corridors aériens, le nerf de la guerre de l'économie moderne est une responsabilité publique. Puisque c'est le cas, les décideurs devront faire des calculs soigneux sur les avantages d'un tel investissement, parce que les questions en cause portent sur une vision du pays qui va au-delà de l'immédiat.
Alors, les investissements doivent être mis dans un contexte à long terme, plus large. Ils font également intervenir des questions de capitaux propres, et en particulier, il faut déterminer si les fonds publics consacrés à ce mode de transport causent un préjudice à un autre, et si tel est le cas, si ce préjudice est justifié par une préférence politique motivée — par exemple, si un mode de transport apporte des avantages supérieurs à court et à long termes par rapport à un autre dans un contexte particulier.
Il s'agit véritablement d'une décision qui relève des personnes à qui l'on a confié une responsabilité politique, et non pas de l'industrie ou des défenseurs de quelque point de vue que ce soit. Je sais que dans mon cas, j'ai de la difficulté à me prononcer sur cette question, étant donné que nous avons à la fois des trains et des avions; en fait, nous fabriquons le meilleur avion régional du monde. Alors, c'est difficile lorsque vous demandez à l'un d'entre nous quels sont les choix, mais il est agréable de pouvoir offrir toutes les solutions.
Comme je l'ai dit, les trois entreprises représentées ici sont des chefs de file dans ce domaine, mais peut-être que je peux dire quelques mots sur les réalisations de Bombardier. Nous avons participé à presque tous les projets de train à grande vitesse des 20 dernières années, souvent en collaboration avec d'autres fabricants, y compris ceux que mes collègues ici représentent.
Mais nous avons notre propre gamme de technologies installées hautement réussies qui varie en vitesse de 200 à 300 km à l'heure. Nous avons également notre Zefiro de prochaine génération, une famille de trains qui représente le dernier cri en matière de technologie. C'est un système qui offre des vitesses allant jusqu'à 360 km à l'heure. Nous avons des trains en service, y compris en Chine, où vous avez un système roulant à 250 km à l'heure avec des voitures-lits le plus rapide au monde.
Il y a deux choses qui sont particulières à notre sujet et à notre approche au train à grande vitesse qui méritent d'être soulignées pour référence future. Une de ces choses, c'est que ce qui compte le plus pour nous, c'est la souplesse d'application aux différents besoins des clients; par exemple, être en mesure d'offrir différents modes de propulsion dotés d'interopérabilité, selon la demande — diesel, électrique —, selon le cas.
Mais une chose qui est encore plus importante pour nous, et sur laquelle nous insistons et qui est particulièrement importante dans le contexte canadien, c'est la synergie entre nos technologies aéronautiques et ferroviaires. La technologie aéronautique de Bombardier nous a aidés à mettre au point des matériaux plus légers, des techniques de soudage améliorées, des caractéristiques aérodynamiques plus stables, des conceptions et des intérieurs plus ergonomiques ainsi que des commandes plus raffinées pour nos systèmes à haute vitesse. Il s'agit d'un atout important unique sur lequel nous allons nous concentrer de manière intensive. Et comme je l'ai dit, dans le contexte canadien — étant donné que Bombardier Aéronautique fait à ce point partie du paysage technologique canadien —, cela constituera un atout important.
Laissez-moi conclure par une brève observation, de notre perspective, sur la possibilité d'un train à grande vitesse au Canada. Il n'est pas exagéré de dire que ce pays a été forgé par le rail. Et même si nous sommes allés bien au-delà de cela pour ce qui est de ce qui nous unit maintenant, le rail continue de jouer un rôle important dans notre vie nationale, bien qu'un rôle décroissant. Et peut-être que le moment est venu pour que cet équilibre change.
Le service ferroviaire voyageurs offre effectivement un choix vital pour le transport entre nos collectivités et cela comprend nos grandes villes, particulièrement celles qui contrôlent des corridors économiques importants. Il est insensible aux caprices de notre climat difficile, il est sûr face à la menace et il peut répondre à des besoins spéciaux. Et il relie également le coeur des villes.
Ce n'est pas parce que ce n'est pas évident, mais la politique publique, pour dire la vérité, n'a pas favorisé le service ferroviaire voyageurs dans la mesure où elle aurait pu le faire au cours des dernières décennies. Les investissements dans l'infrastructure publique ont été beaucoup plus importants dans d'autres secteurs, comparativement à l'investissement dans le chemin de fer. Ce n'est pas un phénomène qui est unique à notre pays. Les États-Unis, qui s'embarquent maintenant dans une nouvelle phase de réflexion politique dans ce domaine, a fait la même chose. Ce n'est pas une critique. Il y a de nombreuses décisions difficiles à prendre.
Mais cela ne rapporte rien que nous soyons en danger de perdre du terrain. Il n'y a pas que les pays d'Europe qui investissent dans le train à grande vitesse. J'ai parlé de la Chine dans ce contexte. Un chiffre que j'ai encore du mal à croire, c'est que d'après nos calculs, la Chine dépense 80 milliards de dollars en trains à haute vitesse cette année. Vous ne m'avez pas mal compris. C'est ce que nous avons calculé que la Chine dépensait.
Mais plus près de nous, évidemment, les États-Unis jettent également un nouveau regard sur le train à grande vitesse et l'administration Obama investit dans les toutes premières étapes 8 milliards de dollars pour l'étude des corridors de transport par train à grande vitesse, 10 corridors. Ces 8 milliards de dollars permettront probablement de faire les études de faisabilité concernant ces 10 corridors, mais cela indique bien avec quel sérieux ils envisagent ce défi.
Je devrais noter que parmi ces corridors, il y en a trois qui relient des villes canadiennes aux États-Unis. Il y a le corridor dans l'est qui, au niveau de la conceptualisation, relie le sud de Montréal; il y a le corridor dans l'ouest qui lierait Vancouver à Seattle et il y a le corridor de Chicago à Détroit-Windsor qui relierait le centre de l'Ontario au nord et au sud. Alors, même si c'était la seule raison, il sera important pour notre pays de déterminer s'il y a lieu de lier nos grandes villes de manière semblable, sur un axe différent.
Je vous remercier de votre indulgence.
:
Bonjour, mesdames et messieurs les membres du comité.
[Français]
Il me fait plaisir de comparaître devant le comité aujourd'hui concernant les trains à grande vitesse au Canada.
J'oeuvre dans le domaine ferroviaire depuis les années 1980. J'ai travaillé à la société Canadien National, à Transports Canada, au Bureau de la sécurité des transports du Canada et, finalement, chez Siemens. Je m'intéresse depuis longtemps au milieu ferroviaire, plus particulièrement aux trains à haute vitesse au Canada.
[Traduction]
J'ai eu l'occasion de contribuer à diverses études, de participer à des symposiums sur les trains à grande vitesse, d'offrir des conseils sur la technologie, sur les façons d'exploiter, etc., à des groupes importants de parties intéressées pendant plusieurs années. Tout cela m'a permis de rester au fait des derniers développements dans ce domaine fascinant de l'élaboration des réseaux à haute vitesse.
Plusieurs entreprises peuvent parler des véhicules à haute vitesse et de la technologie que chacune peut appliquer. Mon commentaire général, c'est que plusieurs entreprises peuvent construire des trains à grande vitesse d'excellente qualité, offrant une variété de caractéristiques esthétiques et autres, mais je ne pense pas que c'est de cela que le comité veut entendre parler aujourd'hui. Je ne veux pas essayer de comparer nos véhicules à ceux des autres entreprises. Ils sont tous très bons et roulent à très grande vitesse.
Ce que j'aimerais dire à partir de l'expérience, c'est que beaucoup trop de gens se concentrent sur la technologie des véhicules au début de la discussion sur la haute vitesse lorsqu'ils évaluent la faisabilité d'un tel système, plutôt que d'évaluer d'abord les éléments fondamentaux.
[Français]
En effet, une vision ou une stratégie doit d'abord être déterminée avant d'évaluer les technologies, afin de s'assurer que celles-ci sont appropriées pour le projet. Une technologie trop raffinée ou pas assez sophistiquée peut nuire à l'atteinte des résultats et au niveau de service. Si la technologie est trop sophistiquée pour le système qu'on désire avoir, on va dépenser beaucoup trop. Si on choisit la mauvaise technologie et qu'on veut avoir un système donnant un meilleur rendement, on aura beaucoup de difficultés tout au long du projet.
La vision doit déterminer si le but est de servir le plus grand nombre de centres urbains ou de transporter le plus grand nombre de personnes possible à très grande vitesse. Ces deux buts ne sont pas nécessairement compatibles.
[Traduction]
Une fois que la vision est arrêtée, l'évaluation des divers aspects du projet peut avoir lieu. Par exemple, une décision favorisant une vitesse moyenne permet d'envisager l'utilisation des emprises ou des corridors existants, contrairement à un système véritablement à grande vitesse qui nécessiterait fort probablement des emprises réservées exemptes de passages à niveau, par exemple.
Comme aux États-Unis, il y a certaines règles assez strictes que toutes les compagnies de chemin de fer doivent respecter au Canada en vertu du régime réglementaire de Transports Canada, qui assure la sécurité ferroviaire au Canada. Jusqu'ici, la vitesse maximale applicable aux passages à niveau est de 100 milles à l'heure. VIA Rail roule à cette vitesse à l'heure actuelle. Il y a eu beaucoup de discussions sur cette question, mais aucune solution n'a été trouvée au cours des quelque 20 dernières années.
Le fait de faire côtoyer des trains à grande vitesse qui roulent à 250 km à l'heure, disons, avec des trains de marchandises relativement lents — au Canada, à l'heure actuelle, la vitesse de ces derniers est d'environ 100 km à l'heure — est très compliqué. Comme vous pouvez l'imaginer, la différence de vitesse est très simple. La différence de vitesse est tellement grande que vous devez avoir beaucoup de capacité dans votre réseau ferroviaire pour pouvoir avoir un train à haute vitesse qui s'approche d'un train de marchandises lent tout en leur permettant à tous les deux de fonctionner sans retard.
À l'heure actuelle, la subdivision la plus rapide au Canada est la subdivision Kingston entre Toronto et Montréal. Il y a de petits segments de cette voie ferrée qui permettent à un train de voyager à 100 milles à l'heure ou 160 km à l'heure. C'est la vitesse la plus grande au pays et c'est la meilleure voie ferrée au pays. Elle ne serait tout simplement pas suffisante pour exploiter un véritable système à grande vitesse avec un mélange de trains de marchandises, ce qui correspond à environ 70 trains de marchandises par jour à l'heure actuelle. Il n'y a tout simplement pas suffisamment de capacité pour exploiter un train à grande vitesse sur ce réseau.
Il y a également plusieurs considérations à analyser, que l'on envisage un train à grande vitesse ou un train à vitesse moyenne. Par exemple, la plupart des trains à grande vitesse ne peuvent pas nécessairement rouler à la vitesse maximale sur les voies ferrées construites en fonction des normes qui existent au Canada aujourd'hui. La meilleure classe de voies ferrées au Canada, qui comprend la méthode de construction des voies ferrées ainsi que la fréquence d'entretien, etc., ainsi que le jeu que vous pouvez permettre à la voie ferrée, ne serait pas suffisamment performante pour permettre à un train à grande vitesse de rouler à pleine vitesse. Il nous faudrait définir de nouvelles normes pour la construction et l'entretien des voies ferrées.
De la même manière, le système de contrôle des trains pour suivre le mouvement des trains devra être adapté à des trains qui circulent plus rapidement. Nous devrions également souligner que le système de trains à grande vitesse véritable devra être un système électrique, et l'électrification de n'importe quel réseau est une entreprise assez importante. Nous devons prendre cela en considération.
La méthode de construction et d'entretien du réseau de voies ferrées, les systèmes de signalisation et la technologie des trains seront grandement affectés par le climat canadien. Que ce soit dans le corridor Calgary-Edmonton ou dans le corridor Québec-Montréal-Toronto-Windsor, nous avons l'honneur ou le privilège d'avoir un des climats les plus froids au monde pour l'exploitation d'un chemin de fer. En fait, au Canada, nous exploitons le système de trains légers dans le climat le plus froid dans le monde. Nous sommes la référence en matière de froid pour le reste du monde.
Les assiettes des rails sur lesquelles reposent les rails, ainsi que l'acier des rails eux-mêmes, sont considérablement affectés par l'écart de 70° Celsius entre la température estivale et la température hivernale au Canada. Très peu de trains à grande vitesse ont été conçus pour fonctionner dans un climat froid. L'adaptation de ces trains ne devrait pas être sous-estimée. Personne ne veut être pris à bord d'un train en panne en pleine nature au cours d'une froide nuit d'hiver. Cela m'est déjà arrivé, étant donné que je viens du Nord, et ce n'est pas une expérience agréable.
Alors, il y a plusieurs décisions difficiles à prendre pour réaliser une vision qui équivaudrait à un bond en avant aussi grand que celui qui a été réalisé au moment de la construction initiale du premier chemin de fer transcontinental au Canada, qui a effectivement permis la création de notre grand pays. Cette décision, semblable à celle qui a été prise de construire le Canadien Pacifique à la fin des années 1800, dépassera probablement le mandat de n'importe quel politicien. Il est absolument nécessaire de faire preuve d'audace et d'être tourné vers l'avenir en ce qui concerne les objectifs à long terme.
Les répercussions économiques liées à la conception, à la construction, à l'exploitation et à l'entretien d'un réseau de trains à grande vitesse au Canada seront extraordinaires pour le pays. Il y a des avantages secondaires très importants liés au changement de paradigme en ce qui concerne le lieu où les gens peuvent habiter et faire la navette, y compris le fait d'attirer des touristes et de faciliter les déplacements de ces derniers, de développer un important savoir-faire technologique nouveau et d'améliorer les avantages environnementaux du voyage sur de grandes distances. Nous avons entendu parler du président Obama chez nos voisins du sud qui a annoncé une telle vision et a engagé des sommes d'argent importantes pour le projet de train à grande vitesse en Californie.
Je crois que le Canada, un pionnier dans toutes les questions liées à l'ingénierie en matière de chemin de fer, peut et devrait aller de l'avant avec son programme de trains à grande vitesse et passer de la phase d'étude à la phase de prise de décision.
[Français]
Merci de votre attention.
[Traduction]
Je répondrai aux questions plus tard.
Est-ce que tout le monde a reçu le document rempli de petites images? Je suis davantage un visuel. Désolé, je n'ai pas un gros document à vous remettre, mais j'estime que vous allez vous souvenir de la plupart des détails, si vous avez des repères visuels.
Premièrement, Alstom, comme certains d'entre vous le savez et d'autres non, possède la plus grande flotte de trains à grande vitesse au monde. Nous détenons le record de vitesse sur rail à près de 575 km à l'heure, ou près de 360 milles à l'heure.
Vous connaissez mieux certaines autres entreprises. Bombardier, que les gens voient généralement comme étant principalement une entreprise canadienne, possède une division du transport ferroviaire qui est allemande; elle est située à Berlin. Siemens aussi est basée en Allemagne, à Nuremberg. Et nous sommes basés à Paris.
L'industrie du transport est centrée sur l'Europe parce que près de 70 p. 100 du marché mondial se trouve en Europe. Alors, la technologie est mue par une perspective européenne et la façon dont l'Europe fonctionne.
Pour ce qui est de notre présence au Canada, la plupart de nos employés, près d'un millier, je pense, se trouvent dans la région de Montréal. Nous avons deux groupes: propulsion et transport. Par transport, nous entendons le transport ferroviaire. Et au sein du transport ferroviaire, nous avons un groupe de systèmes d'information qui, essentiellement, soutient l'industrie ferroviaire. Pour nous, il s'agit d'une activité d'exportation mondiale. Montréal est le siège social mondial de cette activité et nous faisons de l'information sur les passagers et des systèmes de sécurité. Nous avons environ 2 500 employés dans le nord-ouest de l'État de New York dont l'intérêt premier est le marché de la ville de New York, parce que cette ville achète beaucoup de voitures de métro et que nous en fournissons beaucoup.
Alors, je pense que cela vous donne une idée générale de notre entreprise au Canada et en Amérique du Nord.
Si vous regardez la diapositive où il est écrit: « Pourquoi la grande vitesse ferroviaire? », je pense que cette dernière montre vraiment les raisons qui expliquent pourquoi les gens ont choisi le train à grande vitesse. Si vous regardez les deux cartes que j'ai ici, vous avez une carte verte qui est une simple représentation géographique de la France et ensuite, une carte rouge, qui montre comment la géographie a été transformée par les trains à grande vitesse. Vous pourriez dire: « Eh bien, nous pouvons faire cela avec des avions ». Mais en réalité, les avions sont trop coûteux et, à dire vrai, ils ne peuvent fournir les liaisons à distance moyenne que peut offrir le rail. Si vous voulez vous rendre à une distance de 400 à 500 km, il est de loin préférable de déplacer les gens par train. Les vitesses du point de départ au point d'arrivée, de porte à porte, sont plus grandes.
Ensuite, si vous regardez les autres avantages, que l'on retrouve sur la diapositive suivante, c'est une question de sécurité. Si vous déplacez les gens durant l'hiver, voulez-vous que les gens se déplacent essentiellement sur des routes dangereuses, sur lesquelles on dénombre un grand nombre de décès chaque année? J'ignore quelles sont les données statistiques pour le Canada; peut-être que vous les connaissez mieux que moi. Mais lorsque vous regardez les TGV en France, personne n'est décédé sur l'un de ces trains. Alors, dans une perspective pure de sécurité, il s'agit de la façon la plus sûre de transporter les gens.
En termes d'enveloppe, ou de superficie de terrain nécessaire, par exemple, pour construire une deuxième autoroute 401 pour répondre à la demande future dans le corridor Montréal-Toronto, si vous construisiez plutôt un système ferroviaire, vous utiliseriez la moitié de l'emprise au sol et les émissions de gaz à effet de serre ainsi que l'utilisation du carbone du train à grande vitesse ne seraient qu'une fraction de celles qui sont liées à l'utilisation de l'autoroute.
Comme l'a souligné Mario, la seule façon vraiment logique d'aller de l'avant avec ce type de projet, c'est de recourir à l'électricité. La raison, c'est que les coûts de fonctionnement même d'un train à carburant diesel par rapport à un train électrique sont environ quatre à cinq fois plus élevés. À l'heure actuelle, cela ne semble pas être une si grosse affaire, mais si Jeff Rubin a raison et que le prix du baril de pétrole remonte à 120 ou à 140 $ et qu'il continue d'augmenter par la suite... Cela n'arrivera pas du jour au lendemain, étant donné que nous sommes dans une récession, ce qui nous a donné un peu de répit, mais je pense que d'ici une décennie, nous pourrions, en termes réels, nous retrouver encore dans cette fourchette de prix. Si c'est le cas, alors, la demande pour le transport sera réduite à cause du fait qu'il sera trop coûteux de transporter les gens.
Je pense que ce sont là certaines des principales raisons qui expliquent pourquoi les Européens... Si vous regardez à la page suivante, vous pouvez voir l'évolution de l'Europe jusqu'en 2010. Tout le réseau a changé et a été développé à partir de 2001. Essentiellement, l'Europe a commencé par quelques petites liaisons entre des grandes villes. Ensuite, elle a continué à les étendre. D'ici à 2010, qui est à nos portes, il y aura des liaisons importantes entre presque tous les pays européens.
Même la Russie compte des liaisons entre Moscou et Helsinki en passant par Saint-Pétersbourg. Siemens possède une partie de ce trajet, de Moscou à Saint-Pétersbourg, et nous avons de Saint-Pétersbourg à Helsinki. Cela dépend uniquement des commandes qui ont été passées par le gouvernement.
Si vous regardez l'avenir, ce réseau est en train de s'étendre et de s'étendre encore. Vous devez vous demander pourquoi c'est si intéressant là-bas, même en Russie, alors que nous n'avons rien fait ici? Je pense qu'il y a certaines raisons historiques qui expliquent cela.
Lorsque nous avons essentiellement privatisé le CN, plutôt que de faire ce que les Européens font — à savoir ils gardent toute l'infrastructure ferroviaire à titre de propriété du gouvernement et ensuite, ils accordent des licences d'exploitation —, nous avons fait le contraire. Nous avons donné toute la propriété. Ensuite, nous avons donné une licence d'exploitation pour le service voyageurs, ce qui signifie que le service voyageurs est entièrement dépendant du CN et du CP pour ce qui est de l'accès et, par conséquent, occupe le deuxième rang des priorités.
En Europe, le premier rang des priorités est accordé aux passagers. Le deuxième, au transport des marchandises. En conséquence, vous voyez un scénario de fonctionnement très différent. Vous voyez une technologie de signalisation et de contrôle du trafic ferroviaire bien supérieure dans l'ensemble du système. Vous avez également des voies ferrées de bien meilleure qualité, parce que c'est la propriété du gouvernement. C'est exactement comme le système d'autoroutes. Les Européens ne font pas de différence entre les deux.
Ce sont certaines des raisons fondamentales qui expliquent pourquoi ils ont une organisation différente de la nôtre. Je ne veux pas juger notre façon de faire par rapport à la leur, mais ce sont les raisons qui sont à l'origine des ensembles de décisions différents.
Si nous voulons avoir des liaisons à grande vitesse, nous pouvons exploiter un trafic mixte comportant le transport de marchandises, mais cela signifierait également avoir des vitesses plus faibles ou contrôler la qualité des voies ferrées. Vous devrez également construire des sauts-de-mouton et ce sont ces derniers qui font augmenter véritablement les coûts.
Certaines personnes se demandent comment il en coûterait pour électrifier la ligne entière. Eh bien, c'est vraiment rien. Pour les véhicules, l'électrification, c'est des peccadilles. Le coût important, c'est le terrain et les sauts-de-mouton. C'est vraiment une question de construire des ponts de sorte que les routes puissent passer par-dessus les voies ferrées et que les gens ne puissent pas errer dans les emprises. Ces trains roulent trop vite et vous ne les voyez pas venir. Vous ne les entendez pas venir. Ils sont sur vous, un point c'est tout. Si vous roulez à 300 km à l'heure, vous n'avez pas le temps d'arrêter.
Alors, si vous décidez d'utiliser les mêmes corridors que le CN entre Montréal et Ottawa, vous devrez réserver une partie de cette emprise uniquement pour les trains à grande vitesse. Autrement, vous allez sans cesse vous heurter aux trains de marchandises ou ralentir.
Combien de temps faut-il pour construire le système? À partir du moment où vous prenez véritablement la décision de faire quelque chose, il y a habituellement une période d'un an à un an et demi d'activités de conception. Après cela, la construction prendrait entre cinq et six ans selon un échéancier raisonnable. Avant cela, vous devez déterminer comment vous allez attribuer le contrat. Vous devez acquérir l'emprise. Alors, il s'agit vraiment d'un programme qui s'échelonne sur une période de plus ou moins 10 années.
Si vous regardez vers l'avant et que vous dites que vous avez un plan d'intervention en place au cas où le prix du pétrole doublait, ou triplait, alors, vous devez faire beaucoup de ces choses fondamentales dans l'intervalle. Même si vous voulez construire une autoroute, vous devez vous assurer que vous avez cet espace. C'est une bonne chose de définir le corridor, d'en faire l'acquisition et de le verrouiller, et ensuite, d'obtenir tous les plans nécessaires. Tout cela ne coûte pas très cher.
Si le prix du pétrole n'augmente jamais et que les gens cessent de conduire des voitures, alors, tout ira bien. Si les gens continuent de conduire des voitures et que notre population continue de croître, alors, les autoroutes seront congestionnées et le taux de mortalité augmentera. Il semble que le prix du pétrole augmentera lui aussi.
C'est donc faire preuve de bon sens que de montrer un peu de prévoyance, fait que j'ai résumé en vous parlant un peu de l'expérience d'Alstom. Nous avons en fait mené le programme Acela de pair avec Bombardier. C'est un projet conjoint qui a très bien fonctionné; les chiffres pour le corridor nord-est ne cessent de grimper. Chaque année, les investissements augmentent, et je pense que le projet a servi de précurseur à la stratégie en matière de transport du président Obama, dans le cadre de laquelle il a défini différents quadrants pour les États-Unis. George en a parlé brièvement. Je pense que les Américains le perçoivent comme une vision de l'avenir. Et je pense que nous devrions partager cette vision, pas pour l'ensemble du Canada, mais pour certains corridors définis qui semblent compter le nombre de passagers nécessaire pour appuyer un tel projet. Selon moi, ce serait une mesure positive.
J'ai ajouté un peu de renseignements au verso au sujet du corridor Helsinki—Saint-Pétersbourg pour vous aider à comprendre de quoi il serait question si nous avions des trains à grande vitesse. Leur situation ressemble à la nôtre. En fait, je pense que les villes de Saint-Pétersbourg et d'Helsinki sont plus petites que celles de Toronto et de Montréal; s'ils peuvent justifier la réalisation d'un tel projet là-bas, je pense que nous pouvons le faire au Canada aussi.
C'est tout.
:
J'aurais peut-être quelque chose à ajouter à ce sujet.
Disons que l'on a établi la vision à long terme, qui consiste à créer un réseau de transport ferroviaire intégré à grande vitesse qui empruntera les principaux corridors et sera prolongé si la demande peut être justifiée. Il faut également tenir compte de l'infrastructure de transport stratégique, comme on le fait pour le transport maritime, routier et aérien. Il faut donc que ces aspects soient mis sur un pied d'égalité avec ces importantes composantes à l'échelon fédéral.
On ne peut se dire qu'il ne s'agit que de trains et ne pas se soucier de ces aspects. C'est comme une petite société ferroviaire, VIA. Il faut vraiment conférer au projet la même importance qu'à notre programme de routes nationales et lui accorder la même intensité et le même niveau de financement annuel. Les dépenses pour les routes ne se comparent absolument pas à ce que l'on dépense pour le transport ferroviaire.
Il faut également tenir compte du fait que pour les grandes infrastructures, on recourt actuellement à des PPP dans le cadre des programmes d'immobilisations. Il n'y a pas de raison pour ne pas faire de même dans ce domaine également, car cette méthode convient parfaitement. Les risques sont considérables pour le propriétaire du projet s'il gère dans les moindres détails chaque aspect de l'entreprise, alors que si ce risque est assumé dans le cadre d'un grand contrat et transféré à d'autres intervenants... Il suffit de voir tout ce qu'OPG dépense sur ce foutu tunnel. La société a entrepris un programme de construction, mais n'a pas transféré le risque géotechnique au secteur privé. Je ne dis pas que nous voulons tous assumer ce risque, car il ne relève pas vraiment de nous. Il incombe à l'entrepreneur, aux ingénieurs civils.
Selon moi, c'est ainsi qu'il faut voir les choses — comment le projet cadre avec l'ensemble de la structure de transport fédérale —, et partir de ces prémisses. Cette façon de faire tient également compte des autres éléments qui interviennent dans ce dossier: l'environnement et la sécurité, qui revêtent vraiment une importance considérable, et les émissions de gaz à effet de serre. À ce que je sache, le ministère de l'Environnement n'a prévu aucun fonds à cet égard dans le domaine ferroviaire; pas un sous.
Offre-t-on des incitatifs, ne serait-ce qu'au CN ou à VIA Rail, pour passer du diésel à l'électricité? Je n'ai rien vu de tel, pas même une proposition à examiner sérieusement. Pourtant, ils continueront à se heurter aux mêmes problèmes.
En ce qui concerne les normes que nous utilisons ici, nous observons les Américains et faisons tout un plat de la Federal Rail Administration. C'est un fait que la FRA est très intéressante et satisfait aux besoins des Américains, mais le reste du monde applique les normes européennes. Ces dernières garantissent un degré supérieur de sécurité, car elles reposent sur une approche différente. Plutôt que d'affirmer que tout dépend des limites physiques des véhicules en cas de collision, on pense à réduire les risques et à établir la structure pour éviter les collisions. Cette approche est davantage axée sur la gestion des risques. Il faut envisager cette gestion du point de vue de la sécurité ferroviaire.