Passer au contenu

TRAN Réunion de comité

Les Avis de convocation contiennent des renseignements sur le sujet, la date, l’heure et l’endroit de la réunion, ainsi qu’une liste des témoins qui doivent comparaître devant le comité. Les Témoignages sont le compte rendu transcrit, révisé et corrigé de tout ce qui a été dit pendant la séance. Les Procès-verbaux sont le compte rendu officiel des séances.

Pour faire une recherche avancée, utilisez l’outil Rechercher dans les publications.

Si vous avez des questions ou commentaires concernant l'accessibilité à cette publication, veuillez communiquer avec nous à accessible@parl.gc.ca.

Publication du jour précédent Publication du jour prochain
Passer à la navigation dans le document Passer au contenu du document







CANADA

Comité permanent des transports, de l'infrastructure et des collectivités


NUMÉRO 039 
l
2e SESSION 
l
40e LÉGISLATURE 

TÉMOIGNAGES

Le lundi 30 novembre 2009

[Enregistrement électronique]

(1530)

[Traduction]

    Merci et bonjour à tous. Bienvenue au Comité permanent des transports, de l’infrastructure et des collectivités. Il s'agit de la réunion numéro 39.
    Aux fins de la reconnaissance de nos membres, la séance sera filmée. L'ordre du jour est conforme au paragraphe 108(2) du Règlement, étude de l'application de la réglementation sur la sécurité aérienne et de la mise en oeuvre des systèmes de gestion de la sécurité dans l'industrie de l'aviation.
    Nous accueillons aujourd'hui deux fonctionnaires du ministère des Transports: M. Marc Grégoire, sous-ministre adjoint, groupe de sécurité et sûreté, et M. Martin Eley, directeur général, aviation civile.
    Bienvenue, messieurs. Vous n'en êtes pas à votre première comparution, alors je présume que vous connaissez notre façon de faire. Vous ferez vos exposés, et ensuite, nous ferons un tour de table pour vous poser des questions.
    Monsieur Grégoire, la parole est à vous.
    Avant de commencer mon exposé officiel, j'aimerais offrir nos plus sincères condoléances aux personnes touchées par l'écrasement d'hier en Colombie-Britannique.
    J'aimerais aussi vous présenter de manière plus complète M. Martin Eley, qui en est à sa première comparution devant le comité. Je suis certain que ce ne sera pas sa dernière non plus. Il est notre nouveau directeur général de l'aviation civile depuis le 4 mai 2009. M. Eley a occupé des postes à des niveaux graduellement plus élevés dans l'organisation de l'aviation civile depuis 1982. Avant d'être nommé directeur général, il a été directeur de la Direction de la certification nationale des aéronefs et, à ce titre, il a été membre de l'équipe de gestion de l'aviation civile pendant les huit dernières années. M. Eley est ingénieur de profession et associé de l'Institut aéronautique et spatial du Canada.

[Français]

    Aujourd'hui, mes propos porteront sur le programme actuel de sécurité de l'aviation civile, sur notre rôle en tant qu'organisme de réglementation et sur celui de l'industrie. Je vous parlerai des composantes du programme qui ont fait l'objet d'examen par des tierces parties, comme la vérificatrice générale et les autres administrations de l'aviation civile internationale.
    J'espère que ces renseignements vous aideront à mieux orienter votre étude. Bien que nous possédions une solide réputation en matière de sécurité aérienne, il est toujours possible d'accroître le niveau de sécurité aérienne déjà très élevé au Canada. En tant que deuxième réseau de transport aérien national en importance au monde, le Canada est considéré comme un chef de file mondial en la matière dans le milieu de l'aviation internationale. Il s'agit d'un point important parce que, pour ainsi dire, toutes les normes techniques et opérationnelles ainsi que les normes de délivrance des licences à l'échelle mondiale sont harmonisées avec les normes et pratiques recommandées de l'Organisation de l'aviation civile internationale.
    Cet environnement a été créé afin d'assurer, dans la mesure du possible, un mouvement homogène des activités liées à l'aviation à l'échelle internationale.

[Traduction]

    Laissez-moi vous expliquer le rôle de l'OACI. C'est une organisation qui établit des normes; ce n'a jamais été un organisme de prescription ou d'application. Les normes et les documents de référence élaborés par l'OACI offrent aux membres particuliers la latitude de mettre en place des mesures qui reflètent leur réalité opérationnelle. Les États membres, dont le Canada, suivent ces normes et ces documents de référence et les adaptent pour améliorer l'aviation civile à l'échelle nationale. Les exigences internationales définissent ce que nous faisons au Canada lorsque nous orientons les politiques stratégiques et élaborons des règlements et des normes au besoin. Transports Canada privilégie une approche de consultation dans le cadre de laquelle tout le monde a l'occasion de formuler des commentaires sur les modifications réglementaires au fur et à mesure qu'elles sont élaborées. Les commentaires du public à l'égard des projets de règlement qui font partie du processus de publication préalable dans la Partie I de la Gazette du Canada constituent aussi un aspect important de nos consultations.
    Une fois que le règlement a fait l'objet de consultations, le Règlement de l'aviation canadien et les normes qui s'y rapportent offrent le cadre juridique à partir duquel le Programme de sécurité aérienne fonctionne.
    C'est Transports Canada qui offre le programme voué à la sécurité de l'aviation civile du Canada. Au moyen de techniques de gestion du risque, nous élaborons des règlements, des normes, des lignes directrices et des programmes de formation pour promouvoir un système d'aviation sécuritaire et harmonisé pour les Canadiens, les voyageurs aériens au Canada et l'industrie canadienne de l'aviation dans l'ensemble.
    La surveillance de la sécurité aérienne est fondée sur le risque et appuie la conformité de l'industrie de l'aviation à notre réglementation. Transports Canada offre des services à cette industrie en fonction du cadre réglementaire de l'aviation canadienne dans des secteurs comme la délivrance des licences personnelles, les évaluations médicales nécessaires à la certification du personnel aérien breveté, la délivrance de certificats d'exploitation à des organismes et la certification de produits aéronautiques.
(1535)

[Français]

    Même si le produit final est la délivrance d'un certificat, d'une licence ou d'un autre document à un intervenant du milieu de l'aviation, l'objectif sous-jacent est de permettre à Transports Canada d'être suffisamment sûr que ces personnes ou organismes peuvent fonctionner en toute sécurité et respectent les exigences réglementaires applicables, ou que les produits aéronautiques sont en mesure d'être utilisés de façon sécuritaire et conformément aux exigences applicables.
    Transports Canada effectue la surveillance continue des intervenants du milieu de l'aviation pour contrôler la conformité au cadre de la réglementation, et cela, principalement par le moyen d'évaluations et d'inspections, de vérifications lorsque plus d'information est nécessaire et, au besoin, de mesures d'application de la loi.

[Traduction]

    À Transports Canada, nous prenons notre rôle de surveillant très au sérieux. Soyez assurés que si un exploitant aérien ne respecte pas les règles, il n'est pas autorisé à poursuivre son travail. Pour cela, nous tenons les intervenants de l'industrie de l'aviation responsable. Ils doivent fonctionner de façon sécuritaire, se conformer à la réglementation ou faire face à des mesures d'application. Lorsque qu'ils contreviennent au règlement, ils sont sujets à une approche ferme, mais juste à l'égard de l'application.
    La réglementation exige des entreprises qu'elles utilisent une approche systémique à l'égard de la gestion de la sécurité de leurs organisations. C'est dont dire qu'elles doivent mettre en place des systèmes de gestion de la sécurité. Le principe directeur des SGS est que les entreprises doivent mettre en oeuvre des procédures qui leur permettent de fonctionner de manière sécuritaire et de cerner les problèmes potentiels afin de les corriger et de prévenir les accidents ou les incidents.
    La première phase de la mise en oeuvre de cette réglementation pour le secteur de l'aviation commerciale de l'industrie, qui transporte 95 p. 100 du public voyageur, a eu lieu en 2005; les grands aéroports et les fournisseurs de systèmes de navigation aérienne ont suivi en 2007.

[Français]

    Récemment, nous avons apporté des ajustements au calendrier de mise en application de cette réglementation, afin d'accorder plus de temps aux petits exploitants pour se préparer à la mise en œuvre. Cela signifie plus précisément que la réglementation a été reportée jusqu'en janvier 2011 au plus tôt. Cette période nous permettra également d'apporter des améliorations aux outils dont se servent nos inspecteurs pour effectuer la surveillance et, également, d'offrir plus de formation à nos inspecteurs.

[Traduction]

    Il y a lieu de noter que l'OACI élabore actuellement une norme et des pratiques recommandées pour un programme de sécurité des membres. Le Canada a déjà mis en place les principaux éléments — la réglementation, les normes, les lignes directrices et la formation — pour promouvoir un système aéronautique sécuritaire et harmonisé. Nous nous attendons à ce que lorsque ce système entrera en vigueur, le Canada sera bien placé pour respecter cette norme de l'OACI.
    En plus de la reconnaissance internationale de notre leadership quant à notre approche systémique à l'égard de la sécurité, un certain nombre de conclusions indépendantes ont indiqué que nous sommes sur la bonne voie. Dans son rapport de vérification de mai 2008 au sujet de la transition de Transports Canada vers des systèmes de gestion de la sécurité — plus précisément, notre stratégie de mise en oeuvre — la vérificatrice générale a souligné le rôle de chef de file de Transports Canada dans la mise en oeuvre du SGS et la reconnaissance internationale qu'il a reçue. Plus récemment, l'Agence Européenne de la Sécurité Aérienne a déterminé que notre système équivaut au leur. Ils nous l'ont décrit dans le contexte d'un exercice de mise en confiance.
    Le National Transportation Safety Board des États-Unis a récemment recommandé, dans deux rapports d'enquête sur des accidents, l'adoption du SGS. Il a également recommandé que la Federal Aviation Administration mandate l'utilisation du SGS pour les exploitants commerciaux. Dans des rapports récents, le Bureau de la sécurité des transports du Canada a également reconnu les avantages d'une approche systémique à l'égard de la sécurité.
(1540)

[Français]

    L'histoire de l'aviation est en constante évolution. Afin d'assurer la réussite du changement, il est important de pouvoir compter sur le soutien de tous les niveaux de l'organisation. Le retard dans le calendrier de mise en œuvre que nous imposons permettra de consacrer plus de temps à la mise au point des outils de surveillance destinés à notre personnel et, en se basant sur l'expérience acquise durant les évaluations des grands exploitants, il permettra aussi d'améliorer la formation.
    Permettez-moi de conclure en soulignant que nous avons prêté une oreille attentive aux préoccupations soulevées, que nous continuerons d'être à l'écoute et que nous apportons les ajustements nécessaires pour que le programme aille de l'avant. Le ministère se réjouit de cette discussion publique sur la sécurité aérienne. La confiance du public constitue un facteur clé de notre engagement envers la sécurité aérienne.

[Traduction]

    Merci du temps que vous m'avez accordé. Nous nous ferons un plaisir de répondre à vos questions.
    Merci, monsieur Grégoire.
    Monsieur Volpe.
    Merci, monsieur le président.

[Français]

    Merci, monsieur Grégoire et monsieur Eley.
    Bienvenue de nouveau à ce comité, monsieur Grégoire. Nous avons déjà eu le plaisir d'échanger des mots, des questions, des réponses et des points de vue au sujet des SGS.

[Traduction]

    Nonobstant tout ce que vous venez de dire, il semblerait que Transports Canada ait publié aujourd'hui un communiqué pour annoncer qu'il suspendait sa décision de mettre en oeuvre le système de gestion de la sécurité aérienne. Dans un courriel daté du 13 novembre — donc d'il y a deux semaines — il était question de préoccupations communes à l'égard du SGS parmi le personnel d'inspection de Transports Canada.
    Est-ce vrai ou faux?
    Non, ce courriel a été rédigé par Martin Eley à l'issue d'une discussion avec d'autres collègues et moi-même. Nous avons décidé de reporter la mise en oeuvre pour les petits exploitants commerciaux, les exploitants visés par le Règlement de l'aviation canadien — ou le RAC —703 et 704. Il s'agit d'exploitants qui pilotent des aéronefs de moins de 20 places. Le RAC 703 est pour les aéronefs de 9 places ou moins, et le RAC 704 est pour les aéronefs de 10 à 19 places.
    Nous avons suspendu la mise en oeuvre pour un certain nombre de raisons, mais principalement à l'issue de discussions avec un certain nombre de nos inspecteurs et des syndicats qui les représentent — je suppose qu'ils comparaîtront immédiatement après nous — qui soutiennent que nous avons quelques points à régler avant de poursuivre.
    Mais par-dessus tout...
    Vous avez accepté ces points.
    Nous les avons acceptés et avons retardé la mise en oeuvre.
    Excusez-moi, monsieur Grégoire, mais vous vous rappellerez que lorsque vous avez comparu devant notre comité par le passé, notre principale préoccupation, ou du moins celle de bon nombre d'entre nous, ainsi que de certains des intervenants, était que vous n'auriez pas suffisamment d'inspecteurs pour assurer l'intégrité mécanique de l'équipement et effectuer les vérifications.
    Si je me rappelle bien, vous et vos collègues avez toujours insister pour dire qu'il y aurait un nombre suffisant d'inspecteurs et qu'en fait, ce nombre ne diminuerait pas. Par contre, il semblerait qu'il vous reste toujours entre 115 et 130  postes à pourvoir à l'inspection, et deuxièmement, vous avez déplacé beaucoup de vos inspecteurs du côté de la vérification de l'évaluation. Êtes-vous surpris d'avoir eu autant de préoccupations?
    Nous avons un certain nombre de postes à pourvoir. Ce nombre a diminué récemment. Nous sommes en train d'embaucher une soixantaine d'inspecteurs, alors nous pensons que d'ici la fin de l'été prochain, nous aurons pourvu tous ces postes.
    Il y a maintenant moins de 100 postes à pourvoir. À ce stade-ci, nous en avons 98. Nous croyons toujours avoir suffisamment d'inspecteurs en poste pour s'acquitter de la charge de travail, mais nous réévaluerons la situation à un moment donné.
    Dans vos exposés précédents devant notre comité, vous avez reconnu que le SGS ne pourrait être valable que si vous mainteniez — c'est-à-dire le gouvernement, le ministère — le financement pour un certain nombre d'inspecteurs, qu'on jugeait déjà limite au moment de votre comparution. Maintenant vous avez, de votre propre aveu, 98 inspecteurs de moins qu'à cette époque.
    Vous savez que la préoccupation que tous les intervenants avaient au sujet des questions de sécurité était que vous ne seriez pas capables d'assurer l'intégrité de la fonctionnalité mécanique de l'industrie si vous ne consacriez pas votre temps et vos ressources aux inspections aléatoires et périodiques, tant pour les petits exploitants que les grands transporteurs.
    Ne croyez-vous pas que cette note de service interne que M. Eley a diffusée indique vraiment que vous avez pris conscience que vous avez un problème, et que les Canadiens pourraient avoir raison de remettre en question la sécurité des aéronefs dans lesquels ils voyagent?
(1545)
    Non, je me suis pas prêt à tirer pareille conclusion. En fait, il serait probablement préférable que je dise le contraire. Je crois que les membres du public peuvent être entièrement rassurés de la sécurité des aéronefs dans lesquels ils voyagent surtout à l'heure actuelle — c'est-à-dire que 95 p. 100 des voyageurs se déplacent à bord d'avions appartenant à des sociétés réglementées par le SGS. Depuis 2005, Air Canada et tous les exploitants d'aéronefs de 20 places ou plus, sont visés par le SGS.
    J'ai fait les calculs dans ma tête, monsieur Grégoire. Si 95 p. 100 des voyageurs peuvent se sentir plus ou moins rassurés, si l'on tient compte des quelque 60 millions de déplacements dans tout le pays, cela veut dire qu'environ trois millions de Canadiens se retrouvent dans le proverbial pétrin, pour ainsi dire, parce qu'ils se trouvent à acheter un billet de loterie chaque fois qu'ils prennent l'avion. Vous nous dites que c'est acceptable?
    Non, non. Le Canada a l'un des meilleurs dossiers de sécurité au monde. Nous nous comparons favorablement à toute autre nation civilisée. Notre taux d'accident est, en fait, moins élevé que partout ailleurs sur la planète, et nous voulons toujours mettre en oeuvre le SGS pour sauver d'autres vies, réduire le taux d'accidents et accroître la sécurité aérienne.
    La seule façon d'accroître la sécurité aérienne est de réduire à zéro le nombre de ces accidents, du moins ceux qui sont prévisibles. Les problèmes de mécanique et de personnel associés à la sécurité aérienne sont du moins ceux sur lesquels notre comité s'est penché, et vous étiez ici; nous avons parlé de ces sujets très sérieusement. Je crois, bien franchement, quand vous dites que votre dossier est bon et que 95 p. 100 des gens sont visés par votre bon dossier... Nous ne savons pas trop ce que cela veut dire. Cela fait toujours trois millions de voyageurs, ou trois millions de déplacements — vous pouvez parler d'un million et demi de voyageurs, si l'on présume qu'ils veulent retourner d'où ils sont venus — qui ne sont visés par aucune de ces mesures. Cela me semble être un ministère et, si j'ose le dire, un ministre qui n'est pas tout à fait attentif aux questions de sécurité auxquelles font face les voyageurs canadiens, à tout le moins quant à l'industrie aéronautique.
    Je ne suis pas sûr de bien comprendre votre question. Demandez-vous la raison de notre report?
    Ma question est la suivante. Le juge Moshansky a comparu devant notre comité et dit que vous pouvez donner suite au processus de vérification, mais si vous ne disposez pas des inspecteurs nécessaires, vous ne faites que mettre la sécurité du public en péril.
    Nous avons les inspecteurs nécessaires; nous avons 878 inspecteurs en poste. Il y a 98 postes à pourvoir à ce stade-ci, et je viens de vous dire que nous dotons ces postes et que nous aurons tous les employés voulus d'ici la fin de l'été. Alors nous ne prévoyons pas réduire le nombre d'inspecteurs de quelque façon que ce soit.

[Français]

    Monsieur Laframboise.
    Merci beaucoup, monsieur le président.
    Merci, monsieur Grégoire et monsieur Eley.
    Monsieur Grégoire, on a eu la chance de discuter amplement, en comité, du Système de gestion de la sécurité.
    Votre réglementation m'inquiète. Si vous vous souvenez bien, l'OACI avait fait une première vérification de votre Système de gestion de la sécurité en 2006. À l'époque, leur grande crainte était « les problèmes de responsabilité et d'obligation de rendre des comptes ». Après vérification en 2006, cette crainte commençait donc déjà à être exprimée. On a eu la chance de s'en parler.
    Il y a quelques jours, vous avez annoncé le report de la mise en application du système — et je suis probablement tout à fait favorable à cette annonce. Toutefois, il y a un problème, et il ne date pas d'aujourd'hui. C'est le problème de l'application de la réglementation et de la responsabilité et l'obligation de rendre des comptes. En êtes-vous conscient?
(1550)
    Oui, mais nous continuerons toujours de faire l'application de la loi. Nous continuerons toujours de vérifier que les compagnies se conforment aux règlements.
    Au cours de la dernière année, nous avons fait des vérifications, qu'on appelle en anglais des SMS assessments, auprès des grands transporteurs du Canada. L'exercice sera terminé d'ici la fin de mars. Nous comptons utiliser les leçons tirées de cet exercice pour améliorer les instructions que nous donnons à nos inspecteurs qui font cela et améliorer la formation que nous donnerons.
    Certains employés peuvent avoir cru, à tort, que nous avions décidé d'abandonner l'application de certaines parties de la loi. De plus, actuellement, nous rencontrons les employés de partout au pays pour les assurer que nous gardons tous les outils que nous avions avant et que nous continuerons de les utiliser dans le futur.
    Toutefois, monsieur Grégoire, quand on avait fait comparaître les représentants de l'OACI, ils nous avaient donné raison. Il fallait un système d'inspection parallèle maintenu par Transports Canada. À ce sujet, je suis convaincu que vous êtes d'accord avec moi. C'était la recommandation, et le gouvernement s'y était engagé aussi.
    Tout à fait, et c'est ce que nous faisons.
    Tout à l'heure, les représentants de l'Union canadienne des employés des transports viendront nous dire qu'au moment où l'on se parle, il y a 115 postes vacants au sein de la division de l'inspection et de la sécurité aérienne. Ils nous diront également que les inspecteurs n'inspectent plus les aéronefs.
    Lors des discussions des représentants de l'OACI, j'avais cru comprendre qu'il fallait maintenir un système d'inspection parallèle, y compris celui de l'inspection des aéronefs. Vous aurez donc à me convaincre, si tout à l'heure, vos employés viennent nous dire qu'ils n'inspectent plus les aéronefs. Vous me dites que vous les inspectez encore?
    Les aéronef sont inspectés par les compagnies aériennes depuis très longtemps, depuis 15 ou 20 ans.
    Cependant, il y avait un système d'inspection qui permettait de faire, de temps à autre...
    ... des vérifications réglementaires et des inspections. Aujourd'hui, on a des évaluations du Système de gestion de la sécurité aérienne et des inspections de validation. Nous sommes actuellement en train de faire des évaluations du Système de gestion de la sécurité, auprès des gros porteurs.
    Nous allons actuellement plus en profondeur que nous ne l'avons jamais fait avec une compagnie. Nous interviewons plusieurs dizaines de personnes dans chacun des cas. Lorsque nous faisons les rapports de ces évaluations, nous identifions les secteurs à risque chez les compagnies, ce qui nous permet de retourner à brève échéance, selon les cas — parfois très rapidement, parfois plus tard en 2010 —, chez les compagnies pour faire des inspections de validation. Durant ces inspections, on examine en profondeur un système, une partie de l'exploitation d'une compagnie, de la même manière qu'on le faisait traditionnellement. Plutôt que de le faire de manière aléatoire, comme auparavant, on le fait sur une base de risque et on met vraiment nos énergies là où cela paie le plus sur le plan de la sécurité aérienne.
    Comme je vous le dis, la conclusion à laquelle en est venue l'Organisation de l'aviation civile internationale est qu'il fallait maintenir ces inspections aléatoires.
    De plus, les employés vont nous dire tout à l'heure que tout ce que font maintenant les inspecteurs, c'est de vérifier et de cocher les mentions figurant dans les rapports de sociétés aériennes. C'est vrai, mais ils ajoutent aussi que ce que fait le Canada, les autres pays n'ont pas choisi de le faire.
    Cela m'inquiète d'autant plus que vous me dites que votre système est le meilleur au monde. Jean Chrétien parlait du «  plus meilleur pays du monde », mais il reste quand même qu'on joue avec la sécurité des gens.
    S'ajoute à cela le fait que vous avez retardé l'application dans un autre domaine. Il y a un problème quelque part présentement.
    Je ne vois pas de problème. Tout d'abord, il est important de savoir que, pour nous tous à Transports Canada, surtout du côté du Groupe de sécurité et sûreté à l'Aviation civile, la première préoccupation est la sécurité. On veut tous y contribuer, on est des professionnels. M. Eley est ingénieur, je suis pilote de formation et ingénieur, et on a un objectif, c'est de trouver des façons d'améliorer la sécurité aérienne.
(1555)
    Sauf que, présentement, vous ne faites que lire des textes produits par des compagnies aériennes; vous n'inspectez plus rien.
    Non, on inspecte; on n'a pas réduit les inspections. Que pensez-vous? Qu'on va garder 878 inspecteurs au bureau à jouer aux cartes? On va continuer à inspecter, à être là. Nos inspecteurs sont des gens très professionnels, très sérieux.
    Actuellement, on apprend beaucoup de l'exercice qu'on est en train de faire. On est le premier pays sur la planète à le mettre en œuvre. On a réglementé ces compagnies en 2005 et on est le premier pays aujourd'hui à avoir atteint cette étape de l'application de la loi.
    Pendant ce temps, il vous manque quand même encore 115 inspecteurs.
    Aujourd'hui, il en manque 98.
    En tout cas, on verra plus tard, parce qu'il y a toujours un problème de chiffres. Vous le savez, la dernière fois, on ne s'entendait pas.
    Il y avait ce matin, dans les médias francophones, une déclaration de l'Association des pilotes fédéraux qui soulignait le ralentissement de l'application des SGS au sein des grandes compagnies aériennes. Vous semblez dire le contraire.
    On ne ralentit pas du tout l'application chez les gros porteurs; on ralentit la mise en œuvre du règlement qui touchera les petits porteurs, les petits opérateurs commerciaux. Quant aux gros porteurs, aux entreprises comme Air Canada, Sky Service, Air Transat, etc., ils sont déjà soumis à la réglementation. On ne va pas ralentir l'application, ils sont régis par le règlement depuis 2005.

[Traduction]

    Je dois vous interrompre. Désolé, votre temps est écoulé.
    Monsieur Bevington.
    Merci, monsieur le président. Et merci aux témoins de comparaître aujourd'hui.
    J'ai entendu maintes préoccupations au sujet de la sécurité dans l'industrie aéronautique. Je reconnais que le Canada a toujours eu une excellente réputation au plan de la sécurité, et je suis certain que tous les membres du comité veulent qu'il la conserve. Je suis sûr qu'il en va de même pour le ministère. Mais on constate que cette question soulève des préoccupations. L'on se préoccupe vraiment de la mise en oeuvre de systèmes de gestion de la sécurité qui se rapporte aux transporteurs visés par la sous-partie 705: l'on s'inquiète que les inspecteurs n'inspectent pas les aéronefs; que les inspections et les vérifications aléatoires soient faites avec préavis aux sociétés aériennes; qu'on offre très peu de protection aux personnes qui pourraient remarquer et dénoncer des problèmes dans l'industrie; et l'on se préoccupe certainement beaucoup que les jets d'affaires confient la responsabilité aux associations commerciales. Voilà certaines des questions qui ont mené à cette discussion.
    Dans votre courriel du 13 novembre, dans lequel vous reconnaissez les préoccupations au sujet de la façon dont le SGS est mis en oeuvre et le délai pour les taxis aériens et les services aériens de navette — ceux qui sont visés par la sous-partie 704 — pourquoi n'avez-vous pas recommandé des mesures pour examiner le SGS avec les grands transporteurs, ceux pour qui le système est déjà en place et pour qui vous pouvez vraiment analyser, par l'intermédiaire d'examens, les résultats que vous obtenez avec le système que vous avez maintenant?
    On procède maintenant à l'évaluation. Bien entendu, nous voulons toujours améliorer le système; il n'est pas stagnant. Au fur et à mesure que nous avançons, les inspecteurs qui participent aux évaluations des principaux transporteurs nous donnent une rétroaction précieuse. En utilisant cette rétroaction et aussi en parlant aux syndicats et en écoutant nos inspecteurs, nous rehausserons la formation du personnel.
    Mais pour être certains que nous sommes bien clairs, une partie — et on ne l'a toujours pas déterminée, et cela dépend des transporteurs et du risque — de nos activités de surveillance consistera toujours en des inspections de validation jusqu'au niveau opérationnel.
    Je ne crois pas que les inspections devraient être trop aléatoires, par contre. Je pense que nous devrions utiliser les outils que nous avons acquis grâce à la gestion du risque du SGS pour mieux cibler nos activités.
    Pour en revenir à la question des inspecteurs, je crois comprendre que le nombre d'inspecteurs est demeuré à peu près le même au cours des 20 dernières années. C'est exact?
(1600)
    Le nombre de postes a, en fait, augmenté considérablement au cours des 20 dernières années. Je crois que nous en avons même parlé au comité il y a quelques années; j'ai peut-être des données qui remontent à cette période. Mais pour un certain nombre de raisons, il a augmenté considérablement. Depuis les dernières années, le nombre s'est maintenu autour de 871 et maintenant de 878 postes, dont 98 sont aujourd'hui vacants.
    Quel a été le taux d'augmentation des opérations au cours des 20 dernières années, avec les exploitants visés par la sous-partie 704 et les exploitants visés par la sous-partie 705? Dans quelle mesure le trafic aérien a-t-il augmenté au pays?
    Je ne le sais pas par coeur, mais nous pourrions trouver la réponse pour vous.
    Est-il de l'ordre de 50 p. 100?
    Je ne peux pas répondre à cette question maintenant.
    C'est une question très importante, car si le nombre de vos exploitants aériens a augmenté dans une très large mesure...
    C'est parce que vous présumez ou croyez qu'un trafic plus élevé équivaut à un plus grand nombre d'inspecteurs. En fait, comme je l'ai dit dans une comparution précédente, nous avons demandé à des spécialistes du risque si le système serait plus sécuritaire si nous augmentions le nombre d'inspecteurs suffisamment pour en avoir un par avion à chaque aéroport, un par bateau à chaque port...
    Personne ne suggère cela. Nous ne faisons que suggérer qu'il existe probablement un lien entre les inspecteurs... Nous avions un système très sécuritaire avec les inspecteurs et nous avions une excellente réputation à l'échelle internationale avec le système que nous avions avant. Cela se poursuivra-t-il quand vous aurez une base opérationnelle plus vaste et le même nombre d'inspecteurs? Cela ne veut pas dire que vous placez un inspecteur dans chaque avion; je crois que personne ne suggère que vous le fassiez.
    Pour ce qui est des engagements de l'OACI à l'égard de la sécurité, répondez-vous aux exigences ou aux recommandations de cet organisation, avec la mise en oeuvre du SGS et le manque d'application et de surveillance réglementaires?
    Nous croyons que oui. Mais nous considérons qu'il est possible d'améliorer le système, et c'est ce que nous faisons actuellement. Nous pensons toutefois satisfaire aux exigences.
    Mais après avoir fonctionné d'une certaine manière depuis des années, ne pensez-vous pas qu'il faudrait examiner la mise en oeuvre du SGS chez les grands transporteurs afin de clarifier cet aspect, et ce, pour vous assurer que le système fonctionne de manière à satisfaire aux exigences des voyageurs?
    Nous ne considérons pas qu'un examen soit nécessaire à l'heure actuelle; c'est un processus continu. Nous effectuons actuellement l'évaluation. D'ici la fin mars, nous aurons terminé d'évaluer toutes les compagnies qui transportent moins de 705 passagers. Grâce aux observations de nos gestionnaires et nos inspecteurs, nous pourrons donner de meilleures instructions à nos inspecteurs, puis déterminer le cycle des trois prochaines années pour ces transporteurs.
    Parlons maintenant des dénonciateurs. À ce jour, combien d'employés de ligne aérienne ont communiqué avec vous pour vous divulguer de l'information dans le cadre du SGS? Pouvez-vous me donner une idée du nombre de dénonciateurs et de la réaction du ministère à leur égard?
    Non, je ne peux vous répondre à brûle-pourpoint, mais nous disposons de divers systèmes pour recueillir l'information ou les commentaires de l'industrie. Les parties externes peuvent utiliser un de nos systèmes internes appelé SSQAC. Mais plus important encore, nous interrogeons probablement des centaines de personnes chez les transporteurs que nous examinons actuellement. Ces entrevues, menées par deux inspecteurs, sont très détaillées et durent parfois des heures. Si vous êtes un gestionnaire ou un employé qui souhaite passer une entrevue, vous pouvez parler longtemps.
    Ces entrevues visent à évaluer la culture de l'entreprise en matière de sécurité. Nous recueillons évidemment de l'information et parfois, lorsqu'un problème se présente, nous demandons à ce que des mesures soient prises. Mais il s'agit parfois d'information très favorable.
    Eh bien, les gestionnaires du système ne sont probablement pas ceux que nous voulez...
    Merci.
    Je laisse maintenant la parole à M. Jean.
(1605)
    Je vous remercie, monsieur le président.
    Bienvenue, et merci de comparaître aujourd'hui.
    Il me semble que l'histoire a prouvé que le Canada dispose du système de réglementation du transport aérien le plus sécuritaire du monde, comme le confirment d'ailleurs vos propos. Ais-je raison, monsieur Grégoire?
    Oui, vous avez raison.
    Au fil des ans, nos règlements ont principalement porté sur la prévention des accidents — une sorte d'approche plus proactive qu'axée sur les résultats, n'est-ce pas?
    En effet. La proactivité constitue en fait l'un des plus grands avantages du SGS. Au lieu d'attendre qu'un incident ou un accident se produise, le SGS oblige les entreprises à analyser tout ce qui se passe, à recevoir les rapports de tous ses employés et à gérer de manière plus proactive tous les problèmes de sécurité, ce qui permet de prévenir les incidents ou les accidents.
    En fait, l'Organisation de l'aviation civile internationale, ou OACI, recommande que le SGS soit mis en oeuvre partout dans le monde. Est-ce exact?
    Oui, et nous sommes probablement le pays le plus avancé à cet égard.
    Nous avons entendu bien des témoignages sur le SGS en l'espace de quelques semaines — ou de quelques mois, en fait. Le SGS assure un niveau supplémentaire de sécurité qui s'ajoute aux mesures que le Canada applique depuis plusieurs années pour être le pays le plus sécuritaire du monde, n'est-ce pas?
    Oui, monsieur. Tous les règlements et dispositions qui s'appliquaient avant sont toujours en vigueur. Le SGS est un niveau supplémentaire de réglementation.
    Il n'est donc pas question de déréglementation ou d'autoréglementation; le système renforce plutôt la surveillance qui était déjà en place avant sa mise en oeuvre?
    C'est exact, monsieur.
    J'ai ici une lettre de vous, datée du 14 mars 2007, dans laquelle vous indiquez que le nombre d'inspecteurs était de 866 en 2001-2002, de 871 l'année suivante, de 881 l'autre année, de 876 en 2004-2005, de 873 en 2005-2006 et de 873 en 2007. Il y a donc 87 inspecteurs de plus, et nous tentons de combler plus de postes que jamais auparavant dans les anales du secteur canadien de l'aviation. Est-ce vrai?
    Oui, mais nous n'essayons pas de combler plus de 878 postes; c'est notre objectif final.
    Bien.
    Les 5 p. 100 de personnes qui voyagent au Canada qui ne sont pas couvertes par le SGS, dont a parlé M. Volpe, ne devraient pas craindre pour leur sécurité, n'est-ce pas, monsieur? Elles sont toujours couvertes par le système en place depuis des années. Est-ce le cas?
    Oui, monsieur. Rien n'a changé pour elles.
    J'aimerais vous lire un paragraphe de quelque chose que nous n'avons pas encore recueilli comme témoignage, mais que nous avons reçu sous forme écrite. C'est un envoi de Christine Collins, présidente nationale de l'Union canadienne des employés des transports. Je cite:
Un des motifs de cette importante pénurie d'effectifs d'inspection consiste en l'utilisation par Transports Canada de son Système de gestion de la sécurité aérienne afin de réduire les budgets affectés aux activités de sécurité. De fait, au cours des dernières années et selon les prévisions budgétaires des exercices à venir, Transports Canada obtient la plus grande partie des 5 p. 100 de réductions budgétaires résultat de l'examen de ses programmes en sabrant dans les budgets affectés à la Sécurité aérienne.
    Est-ce vrai?
    Absolument pas. Et je le saurais, il me semble.
    Il vous semble que vous le sauriez?
    Oui.
    Vous êtes responsable de ce système, n'est-ce pas?
    Oui, monsieur.
    Donc si c'était vrai, vous le sauriez.
    Oui.
    Et est-ce vrai?
    Non.
    Nous avons réalisé quelques économies dans les agences de l'aviation civile. Nous avons éliminé quelques postes de direction, mais là s'arrêtent les coupures. Pour autant que je sache — et je l'espère —, nous ne prévoyons pas de réduction dans l'avenir.
    J'aimerais toutefois être certain que l'union ne s'oppose pas au SGS. En fait, ce texte laisse entendre que ses membres font confiance au système et s'inquiètent simplement de la manière dont il est mis en oeuvre. Ils croient toutefois au SGS.
    C'est également ce qu'ils m'ont affirmé en personne.
    Merci.
    Est-il exact que le SGS a initialement été proposé par les libéraux dans le projet de loi C-62?
    Eh bien, en ce qui concerne l'aviation, il en a été question dans les débats sur la Loi sur l'aéronautique. Mais nous en parlons depuis bien des années à Transports Canada, depuis le milieu des années 1990, en fait. Nous avons commencé à consulter le secteur de l'aviation en 2000, et je crois que nous avons mis en oeuvre le premier règlement sur la sécurité ferroviaire en mars 2001.
(1610)
    Bien.
    Et les inspecteurs sont bien moins nombreux dans les secteurs du transport ferroviaire et maritime. En fait, il y en a une centaine dans le domaine ferroviaire et environ 300 dans le secteur maritime. Ais-je raison de dire qu'il y a beaucoup plus d'inspecteurs pour assurer la sécurité dans le secteur canadien de l'aviation?
    Oui. Le groupe qui s'occupe de l'aviation civile compte environ 1 400 employés, dont 878 sont des inspecteurs et quelques centaines, des ingénieurs en homologation et d'autres domaines. Ces 1 400 employé font que l'aviation civile constitue de loin le plus gros groupe à Transports Canada.
    Je ne sais pas si vous vous rappelez le témoignage du juge Moshansky devant le comité. Étiez-vous présent lors de sa comparution, monsieur Grégoire?
    Non, mais je suis venu avant et après son témoignage, si je me souviens bien.
    D’accord. Avez-vous eu l’occasion de prendre connaissance de la réponse du juge Moshansky lorsqu’on lui a demandé si le Système de gestion de la sécurité, le SGS, était en place au moment de l’écrasement qu’il a examiné à Dryden?
    Où l’écrasement a-t-il eu lieu? Était-ce à Dryden?
    Oui.
    Si le système avait été en place, l’écrasement ne se serait jamais produit en raison des exigences du SGS en ce qui a trait au dégivrage ainsi qu’à l’examen. Vous rappelez-vous avoir lu cela?
    Je crois que c’est ce qu’il a dit, oui.
    Merci, monsieur.
    Je n’ai plus de questions. S’il me reste du temps, j’aimerais le donner à Mme Hoeppner.
    Votre temps est écoulé.
    Je vais maintenant vous accorder une minute chacun pour terminer. Je vous demande donc d’être brefs.
    D’accord.
    Monsieur Grégoire, je présume que nous n'allons pas avoir le temps de tenir une conversation, mais j'aimerais peut-être vous donner l'occasion de répondre à la question suivante, car le Système de gestion de la sécurité était censé être une couche supplémentaire. Prenez note du mot « supplémentaire ». Il était censé être accompagné d’un programme de dénonciation qui aurait donné plus d'authenticité aux mesures proactives auxquelles vous associez la dénonciation par les entreprises.
    Il devait également y avoir un nombre stable d'inspecteurs, si ce n'est un nombre croissant. Vous nous dites qu'il y a maintenant 98 inspecteurs de moins. Cela correspond probablement à une réduction budgétaire de plus de 10 millions de dollars. L’organisme de réglementation, Transports Canada, devait exercer une autre activité, soit celle de mettre en place un règlement pour qu'il y ait des mesures correctives en cas de non-respect des vérifications. N'oubliez pas que votre ministère allait se pencher sur une trace écrite afin d'établir une philosophie d'autoréglementation. Manifestement, malgré les efforts de chacun, l'industrie aéronautique n’a pas encore adhéré à une telle philosophie.
    En l'absence de ces quatre mesures, continuez-vous de croire que le SGS est efficace?
    Absolument, monsieur, et plus que jamais. J’ai lu certains documents qui ont été produits à la suite des évaluations menées auprès des grands transporteurs. Avec l’ancien système, nous n’aurions aucunement été capables de pousser aussi loin l’évaluation de la philosophie d’une entreprise. Certes, au cours de la dernière année, nous n’avons pas beaucoup eu recours aux outils que nous aurions prétendument abolis, selon vous, mais c’est parce que nous évaluions tous les transporteurs en même temps. Au cours des prochaines années, nous allons les utiliser comme auparavant.
    Pour ce qui est des postes à pourvoir et des 98 inspecteurs, nous entendons souvent dire que c’est en raison de compressions budgétaires, mais ce n’est pas le cas. En ce moment, nous sommes en train de doter ces postes en personnel.

[Français]

    Monsieur Laframboise, vous avez la parole.
    Il y a quand même des problèmes. Comme je l'ai dit plus tôt, La Presse de ce matin a publié un article. Je vous en lis un extrait:
Le capitaine Daniel Slunder, président national de l'association, a affirmé par voie de communiqué que « Transports Canada doit être loué pour avoir reconnu que son programme de SGS dans l'aviation a de sérieux problèmes ».

« Ce report est tout à fait approprié. Néanmoins, les problèmes que prend en compte cette décision minent la sécurité des grands transporteurs aériens. En conséquence, nous ne faisons plus confiance aux grands transporteurs pour se conformer aux réglementations en matière de sécurité. »
    Le représentant des pilotes fédéraux travaille tous les jours avec ces compagnies. Que pensez-vous de cette déclaration?
    J'ai de la difficulté à comprendre comment on peut lier la décision de retarder la mise en œuvre du SGS chez les petits transporteurs au statut des gros transporteurs.
    Je ne vois pas de lien direct. On a rencontré M. Slunder à deux ou trois reprises. On a dit vouloir travailler avec eux pour améliorer le Système de gestion de la sécurité, et surtout la surveillance opérée par Transports Canada. Je ne vois pas ceci comme une déclaration à savoir que le système est défectueux, mais plutôt comme une manifestation de l'esprit de collaboration pour améliorer le système.
(1615)
    Vous n'avez pas émis de...

[Traduction]

    Monsieur Bevington.
    J’aimerais seulement revenir à la dénonciation. Vous avez parlé de grandes entrevues menées auprès du personnel de différents transporteurs aériens. Ne s’agit-il pas plutôt des cadres et des employés qui participent aux programmes du SGS au sein de ces entreprises?
    Non, les employés de tous les secteurs de la société sont touchés. Par exemple, dans le cas d’un transporteur aérien, les pilotes, les agents de bord et les mécaniciens y participent. Bien sûr, nous menons également des entrevues avec la direction de l’entreprise, en commençant par le PDG et les vice-présidents.
    Outre les entrevues que vous menez, en effectuez-vous de manière aléatoire auprès des employés d’une société ou encore de manière normative, par poste?
    C’est une excellente question.
    Martin devrait pouvoir vous répondre.
    Elles sont effectuées par échantillonnage, selon l’aspect à examiner. S’il faut en mener un tel nombre à un certain niveau, le choix des gens est fait au hasard, la plupart du temps. On ne choisit pas des gens en particulier pour éviter que l’information soit biaisée.
    Je vous remercie.
    Madame Hoeppner.
    Merci, monsieur le président.
    En fin de compte, les Canadiens veulent se savoir en sécurité lorsqu’ils prennent l’avion. C’est ce qu’ils recherchent. Comme nous l’avons déjà reconnu, le bilan canadien de sécurité aérienne est très fort, et nous voulons poursuivre dans cette voie à l’avenir.
    D’après moi, si quelqu’un sait très bien à quel point un aéronef et les procédures sont sécuritaires, ce sont les pilotes. D’après un communiqué de presse de la Airline Pilots Association International publié en février 2007, les pilotes appuient le projet de loi afin de renforcer la culture de la sécurité chez les transporteurs canadiens. Nous avons reçu le commandant Brian Boucher, directeur principal de la Sécurité des vols de l’Association des pilotes d’Air Canada. Il a dit ce qui suit:
Nous comprenons que le projet de loi a été conçu afin de rendre plus sûr le système d'aviation au Canada et nous estimons que le SGS constitue un progrès important à cette fin.
    Très brièvement, pouvez-vous expliquer aux Canadiens pourquoi cette mesure va leur assurer une plus grande sécurité et en quoi une campagne de peur nuit à la promotion de la sécurité aérienne?
    Ce que nous n’avons pas mentionné, c’est que l’assurance de la qualité est une pratique commune à de nombreuses entreprises. Nous voulons compter davantage sur l’efficacité du processus d'assurance de la qualité des sociétés pour que tous leurs systèmes deviennent efficaces, mais plus particulièrement à l'égard de la sécurité. Lorsque les entreprises effectuent leur travail de la bonne manière, il y a fort à parier qu’elles vont s’y conformer quotidiennement. Nous allons tout de même devoir vérifier, ce que nous allons continuer de faire. Essentiellement, il s'agit de leur donner confiance en leurs systèmes.
    Mais le système est sécuritaire. Nous prenons l’avion régulièrement, et je peux vous garantir que nous sommes beaucoup plus en sécurité dans un avion que dans une automobile.
    Sur ce, je tiens à vous remercier pour vos témoignages.
    Nous allons prendre une courte pause de deux minutes, après quoi nous allons entendre notre seconde série d’invités.
    Merci beaucoup.

(1620)
    Je vous souhaite la bienvenue à la seconde partie de cette séance.
    Nous avons maintenant l’honneur d’accueillir M. Daniel Slunder, président national de l’Association des pilotes fédéraux du Canada. Représentant l’Union canadienne des employés des transports, nous recevons Christine Collins, présidente nationale, et Kerry Williams. Enfin, je souhaite la bienvenue à Carlos DaCosta, coordonnateur des lignes aériennes, qui représente l’Association internationale des machinistes et des travailleurs de l’aérospatiale au Canada.
    Vous connaissez la routine. Nous allons donc commencer par des exposés de 10 minutes, puis nous passerons à la période de questions.
    Allez-y.
(1625)
    Bonjour à tous. Merci de m’avoir invité à venir vous parler.
    Je m’appelle Daniel Slunder et je suis le président national de l’Association des pilotes fédéraux du Canada.
    L’association représente les pilotes brevetés qui sont des inspecteurs de la sécurité de l’aviation civile à Transports Canada, au Bureau de la sécurité des transports du Canada et à Nav Canada.
    Vous trouverez sous vos yeux un cahier de diapositives. Vous devez également avoir un cahier avec des onglets. Je vais en parler.
    Les avez-vous? Ils n’ont probablement pas été distribués.
    Allez-y. Nous allons les faire distribuer. Étant donné que notre temps est quelque peu limité, je dois vous demander de respecter le temps imparti.
    D'accord.
    J'ai le regret de vous informer que les inspecteurs d’aviation de Transports Canada consacrent plus de temps à noircir du papier qu’à inspecter les avions. Avec l’arrivée du SGS de l'aviation, Transports Canada a systématiquement démantelé les principaux éléments de son programme de surveillance en contrevenant aux exigences de l'OACI afin d'évaluer et d'inspecter les procédures et les pratiques d'un exploitant au moins une fois par année, en plus d’inspections périodiques aléatoires. Transports Canada a annulé les mesures d’application en 2006. Aucune mesure coercitive n'a été prise contre un grand transporteur aérien commercial en deux ans, même si Transports Canada est conscient d’infractions graves aux règlements de sécurité. Vous les trouverez à l'onglet 3.
    Le Programme national de vérification a été annulé en mars 2006, et Transports Canada a arrêté de mener des vérifications compétence pilote en 2007. Par conséquent, il y a désormais au Canada des pilotes non qualifiés et des pilotes dont la licence est expirée qui conduisent des aéronefs. Vous en trouverez un exemple dans la correspondance de l'onglet 6, et il y en a d’autres. En outre, Transports Canada a délégué l’octroi de licences et la surveillance de segments entiers de l'industrie aéronautique à des groupes de pression comme l’Association canadienne de l’aviation d’affaires, au mépris de nos obligations internationales de sécurité aérienne.
    Plus récemment, les inspections de fonctionnement sur une base obligatoire ont été annulées en janvier dernier. Au lieu de mener des inspections complètes sur une base régulière, les inspecteurs de Transports Canada effectuent tout simplement des examens sur dossier des systèmes de gestion de la sécurité des sociétés et des suivis par une validation sur place symbolique de la paperasse. Avec le SGS, nous ne sommes tout simplement plus attentifs.
    Étant donné que je dispose de peu de temps, je vais vous parler de trois exemples de transporteurs aériens qui ont enfreint le règlement de sécurité par manque d’attention. Ces exemples révèlent des problèmes systématiques du SGS. En temps normal, lorsque les inspecteurs d’aviation de Transports Canada dépendent de l'évaluation des systèmes de gestion, plutôt que de l’évaluation des opérations de l'aviation comme telles, ils ne sont pas témoins de ces incidents. Tous ces exemples expliquent des incidents qui peuvent mettre des vies en danger.
    Le premier exemple concerne une demande de permis de vol. Je vous renvoie à l'onglet 8 du cahier de documents. Il s'agit d'une demande pour modifier un avion de passagers. Dans ce cas-ci, l’avion avait une capacité de carburant suffisante pour voyager sur des distances dépassant de loin sa portée maximale habituelle. La demande visait l’autorisation d’installer temporairement une radio haute fréquence. Les exploitants ont fait une demande à Transports Canada en affirmant que l'installation satisfaisait à toutes les exigences et aux règlements. En vertu du SGS, le travail d'un inspecteur est d'examiner cette demande et de la signer si les documents sont en ordre, rien d'autre. Comme vous pouvez le voir sur la diapositive suivante, l'installation est loin des promesses écrites. L'installation électrique est maintenue avec du ruban-cache. Cette installation manifestement dangereuse passe à travers les mailles du filet de Transports Canada parce qu’en vertu du SGS, nous avons les yeux fermés. La diapositive 5 montre que l'alimentation en énergie avait été mal câblée au tableau de bord, et c'est un risque potentiel d'un court-circuit électrique. La diapositive 6 donne un exemple de l'utilisation de pièces illégales.
    En vertu du SGS, les inspecteurs de Transports Canada ne mènent plus aucune vérification compétence pilote. Ce sont les entreprises qui vérifient leurs propres pilotes. Pour les inspecteurs, cela a fermé une importante fenêtre sur les opérations aériennes, en particulier depuis que Transports Canada a changé sa politique pour remplacer les vérifications et les inspections par des examens sur dossier. Cette photo a été prise par un inspecteur qui est tombé sur cet avion. Grâce à une combinaison de circonstances extraordinaires, cet inspecteur a effectué un vol de contrôle pilote. Lorsqu’il a vu l'état de l'avion, il a refusé de monter à bord. Comme vous pouvez le voir, les boulons utilisés pour fixer l'aile au fuselage ne sont manifestement pas destinés à cette fin et pourraient céder en raison du stress qu'ils ne sont pas censés supporter. L'inspecteur a également découvert des pièces que l’on peut facilement acheter chez Canadian Tire mal installées dans le système électrique de cet avion. Il n’est pas sécuritaire de faire voler cet avion, mais il a pourtant transporté des passagers dans cet état parce qu’il était impossible de détecter son état de délabrement par une évaluation du SGS de cette entreprise.
    La surveillance de Transports Canada ne devrait-elle pas suffire à interdire les avions dans cet état de voler?
    L'exemple que je m’apprête à décrire donne froid dans le dos tant il ressemble à l’écrasement de l'avion à réaction d'Air Ontario qui a tué 24 personnes il y a 20 ans à Dryden, en Ontario. Il s’agit là d’un événement majeur dans l’histoire de l’aviation canadienne qui a mené à une enquête complète et à la réforme du Règlement de l'aviation canadien, le RAC. Le 9 octobre 2009, le vol 271 d’Air Canada a été dérouté vers Grand Forks, au Dakota du Nord, en raison de la fermeture de l'aéroport de Winnipeg. L’avion transportait des passagers et l’équipage. Cela a mené à une série de décisions qui ont mis en danger la vie des passagers et de l’équipage et qui auraient pu facilement entraîner une tragédie. La première infraction au règlement s'est produite lorsque l'avion a été réapprovisionné en combustible tandis que les moteurs étaient en marche et que les passagers étaient encore à bord. Pourquoi le commandant de bord a-t-il autorisé une telle procédure dangereuse qui contrevient au RAC? Il s’est avéré que l'avion a été autorisé à partir sans avoir le matériel nécessaire pour redémarrer les moteurs afin qu’ils soient en ordre de marche. Ce sont les mêmes circonstances qui ont forcé le commandant de bord de l’infortuné appareil d'Air Ontario à décoller de l'aéroport de Dryden sans l’avoir dégivré. Qui plus est, bien qu’un passager, qui était également un commandant de bord, ait informé le pilote d'Air Canada que les ailes de l'avion étaient couvertes de glace, le pilote a quand même décidé de décoller. Il a effectivement agi comme un pilote d'essai, et l’équipage et les passagers étaient à bord.
(1630)
    Si ce qui aurait facilement pu constituer une véritable catastrophe a été porté à notre attention, c'est uniquement parce que le rapport rédigé par un des passagers, celui qui est aussi pilote, m'a été envoyé personnellement. Il se demandait si les exploitants canadiens avaient le droit d'agir ainsi et sur quelles mesures réglementaires ils s'appuyaient pour assurer la protection des voyageurs. Il se demandait également si lui et les autres passagers n'avaient pas été exposés inutilement à ces risques illégaux.
    Pour toute réponse, Transports Canada a décidé de laisser le tout entre les mains du SGS d'Air Canada, même si les correctifs apportés par cette société deux ans plus tôt lorsqu'un appareil avait connu des problèmes de déglaçage n'avaient rien donné. À cause du SGS de Transports Canada, la sécurité aérienne a été reléguée au second plan. Ces exemples montrent que l'industrie prend des décisions et adopte des pratiques qui mettent en danger la vie du public dès qu'on a le dos tourné. Ne serait-il pas temps que quelqu'un intervienne et prenne la sécurité du public à coeur? Doit-on vraiment attendre un autre accident grave avant de lancer une nouvelle enquête d'envergure? Ne devrait-on pas plutôt prendre les devants et faire dès maintenant l'état des lieux?
    Je sais que certains membres de votre comité se rendent régulièrement à Winnipeg, alors j'imagine que la question doit prendre une tournure toute personnelle pour eux. Après tout, c'est un trajet qu'ils connaissent bien, eux aussi. Je tiens en tout cas à vous assurer que j'ai personnellement porté ces exemples à l'attention de la haute direction de Transports Canada. Nous nous réjouissons d'apprendre que la mise en oeuvre du SGS pour les exploitants des classes 703 et 704 est interrompue, mais vous conviendrez avec moi que cette décision confirme que la sécurité de tous les transporteurs assujettis au SGS constitue un problème, sans compter que le problème ainsi mis au jour mine du coup la sécurité des grandes sociétés aériennes, c'est-à-dire celles qui transportent la majorité des voyageurs. Nous ne pouvons plus être certains que ces sociétés respectent la réglementation. Pour régler la situation, nous recommandons une série de mesures fondamentales qui se trouvent déjà dans le document que je vous ai remis, mais que je pourrais certainement vous expliquer plus en détail si vous le souhaitez.
    Je vous remercie.
    Merci bien.
    Madame Collins, on vous écoute.
    L'Union canadienne des employés des transports, ou UCET, est le syndicat qui représente, à l'échelle nationale, la plupart des employés du gouvernement fédéral travaillant dans le secteur des transports. L'UCET représente les fonctionnaires fédéraux du secteur des transports travaillant à Transports Canada, à la Garde côtière canadienne, au Bureau de la sécurité des transports, à l'Office des transports, dans les aéroports, à NAV Canada et dans divers autres organismes.
    Au sein de Transports Canada, l'UCET représente la majorité des travailleurs syndiqués — soit exactement 3 116 employés sur un total de 4 698. Nous représentons en outre près de 1 000 inspecteurs des directions de l'aviation, du transport ferroviaire, du transport maritime et de la sécurité routière. À la Sécurité aérienne, l'UCET représente la moitié du contingent d'inspecteurs. Nos membres sont notamment des inspecteurs techniques et des ingénieurs en mécanique des aéronefs chargés de l'inspection, de l'entretien et de l'ingénierie.
    Nos membres appartiennent au groupe professionnel des inspecteurs techniques, ou TI, un vaste groupe professionnel regroupant des employés fédéraux travaillant au sein de divers ministères et organismes fédéraux. Cette vaste classification est inappropriée et tout à fait dépassée en ce qui a trait à son application à l'égard de la plupart des fonctions d'inspection du secteur des transports. Cette classification désuète et sans pertinence résulte en des situations dans lesquelles nos membres exercent une surveillance à l'égard du travail accompli par des personnes qui sont payées beaucoup plus cher que ne le sont nos inspecteurs techniques.
    Aujourd'hui, on relève environ 115 postes vacants au sein de la Division de l'inspection de la Sécurité aérienne de Transports Canada, chiffre qui nous a été fourni par la haute direction elle-même lors d'une rencontre sur l'aviation civile tenue il y a une dizaine de jours. Un des motifs de cette importante pénurie d'effectifs d'inspection consiste en l'utilisation, par Transports Canada, de son Système de gestion de la sécurité aérienne, aussi appelé SGS, afin de réduire les budgets affectés aux activités de sécurité. De fait, au cours des dernières années et selon les prévisions budgétaires des exercices à venir, Transports Canada obtient la plus grande partie des 5 p. 100 de réductions budgétaires résultant de l'examen de ses programmes en sabrant dans les budgets affectés à la Sécurité aérienne. Nous vous enverrons d'ailleurs la partie III du budget des dépenses de Transports Canada dans les prochains jours. Une autre raison de cette pénurie réside dans le fait que la plupart des inspecteurs sont recrutés au sein du secteur des transports aériens, alors que les salaires offerts par le gouvernement sont jusqu'à 25 p. 100 inférieurs à ceux du secteur privé.
    De plus, nous vous incitons à étudier l'incidence du modèle du SGS implanté à Transports Canada dans le contexte de la crise de la listériose. En effet, l'Agence canadienne d'inspection des aliments avait mis en place un modèle similaire d'autorégulation de l'industrie dans l'industrie des viandes juste avant que ne se produise la crise de la listériose. Il convient également de souligner que le Système de gestion de la sécurité aérienne est unique en son genre dans le monde entier. La mise en oeuvre de ce système au Canada est beaucoup plus avancée que dans n'importe quel autre pays, alors que certains des processus et des systèmes mis en place au Canada ne le sont pas dans les autres administrations gouvernementales responsables de la sécurité aérienne, et leur mise en oeuvre n'est pas non plus recommandée par l'Organisation de l'aviation civile internationale, ou OACI.
    L'UCET et ses membres ne s'opposent pas comme tel au SGS. Toutefois, nous estimons que certains aspects du SGS implantés par Transports Canada en ce qui a trait à la sécurité aérienne sont néfastes et doivent être corrigés. L'UCET ne propose pas qu'une telle réforme se fasse en vase clos. Au contraire, nous travaillons avec Transports Canada, aux échelons les plus élevés de l'administration, afin de faire valoir notre perspective à cet égard et de communiquer de manière transparente et publique avec Transports Canada au sujet de ces questions qui sont d'un intérêt manifeste pour tous les voyageurs au Canada.
    Nous avons publié un document de travail, intitulé « Mise en oeuvre du Système de gestion de la sécurité de l'aviation de Transports Canada: Ce qui ne va pas et pourquoi un changement est nécessaire ». Ce document a été largement diffusé au sein de Transports Canada et à de nombreux autres intervenants, notamment des députés fédéraux.
    Les recommandations de l'UCET militent en faveur de changements qui proviennent des personnes travaillant au sein même de la Division de l'inspection. Ce sont les personnes chargées de l'inspection sur le terrain pour le compte de Transports Canada qui sont à l'origine de notre campagne militant pour des changements dans la mise en oeuvre du SGS.
    Voici un facteur particulièrement important que les parlementaires doivent toujours avoir à l'esprit, et que l'on entend chez les inspecteurs de toutes les régions: les inspecteurs n'inspectent plus les aéronefs. Tout ce que font maintenant les inspecteurs, c'est de vérifier et de cocher les mentions figurant dans les rapports des sociétés aériennes. Bon nombre d'entre eux n'ont même plus à quitter les bureaux de Transports Canada. Ils passent leur temps à vérifier les rapports présentés par les sociétés aériennes sur la gestion de la sécurité. Comprenez-moi bien: la vérification est certes une fonction importante du SGS, et ce contrôle doit effectivement être effectué. Par contre, les seuls rapports présentés par les sociétés aériennes ne sont sans doute pas suffisants pour assurer la protection des voyageurs. Ils ne comportent sans doute pas un degré suffisant de contrôle, et ne contiennent pas non plus les éléments factuels pertinents résultant des mesures correctives prises à l'interne à la suite d'un événement.
    Ce qui nous amène à la première de nos principales recommandations, selon laquelle les inspecteurs doivent reprendre la pratique antérieure qui consistait en des vérifications et des inspections directes et parfois aléatoires des appareils, sans préavis aux sociétés aériennes. Évidemment, l'intensité et la prévalence de ces inspections aléatoires devraient être en lien avec le risque, notamment à savoir si le transporteur est ou non titulaire d'une accréditation décernée par le SGS. Car en dernière analyse, ce sont les inspecteurs qui devraient exercer l'autorité et le pouvoir discrétionnaire de décider de procéder à une inspection aléatoire, sans préavis à l'entreprise visée. C'est la seule façon de s'assurer que le ministre des Transports s'acquitte effectivement des obligations qui lui sont imposées par la loi.
(1635)
    Ensuite, il faut mettre en place un mécanisme protégeant les dénonciateurs. Vous entendrez aujourd'hui des témoignages au sujet de certaines problématiques graves relevées en ce qui a trait aux rapports présentés par les employés des sociétés aériennes, notamment en l'absence de protections contre des représailles de la part de leurs supérieurs hiérarchiques ou encore de l'absence de mesures de contrôle et de définition de contrôles de la part de Transports Canada. On observe des problèmes similaires au sein de la Division de l'inspection. Lorsqu'un inspecteur a des réserves ou des préoccupations en matière de sécurité qu'il ne peut régler en raison de contraintes systémiques ou administratives, il doit alors rédiger un signalement précisant ses préoccupations à cet égard et l'afficher dans le Système de signalement des questions de l'Aviation civile, ou SSQAC, auquel les témoins qui m'ont précédée ont d'ailleurs fait référence.
    Il m'a été donné de consulter plusieurs de ces signalements et les réponses données par Transports Canada. En somme, aucune suite n'est donnée à ces signalements. Il s'agit essentiellement d'un exercice stérile du genre: « Tu dis ceci, je réponds cela », sans plus. C'est comme l'employé qui signalerait à son patron que ce dernier fait mal son travail. Je vous laisse imaginer la réponse du patron. Eh bien c'est la même que celle que donne l'administration de Transports Canada.
    Même les États-Unis n'ont pas adopté le SGS; d'ailleurs, le 23 septembre 2009, l'administration Obama a annoncé que la FAA, l'administration fédérale responsable de l'aviation, travaillait assurément pour le compte de la population et non des sociétés aériennes. L'administration américaine a constitué un organisme indépendant, établi au sein d'un organisme central distinct, chargé du contrôle des mécanismes de protection des dénonciateurs des manquements à la sécurité aérienne. Ce bureau sera notamment chargé du contrôle de la ligne spéciale de l'administrateur de la FAA, de la ligne spéciale de la sécurité aérienne, de la ligne spéciale des questions du public, de la ligne spéciale de protection des dénonciateurs et du Safety Reporting System, un mécanisme similaire à celui du SSQAC canadien. L'UCET estime que le temps est venu pour le Canada de suivre l'exemple des États-Unis et de constituer ici un organisme indépendant similaire, le Bureau de protection des dénonciateurs de la sécurité aérienne, lequel pourrait relever d'une instance indépendante comme le Bureau de la sécurité des transports ou le Conseil du Trésor.
    L'UCET est d'avis que le Canada ne devrait pas déléguer la sécurité aérienne à des associations commerciales. Il y a là un conflit d'intérêts évident. Le Canada est le seul pays du monde à déléguer la sécurité aérienne à des associations commerciales. Transports Canada appelle ces délégations de pouvoirs des « partenariats en matière de sécurité », mais cette appellation est plutôt équivoque. En fait, le Canada se trouve à déléguer le contrôle et l'inspection des appareils aux mêmes associations commerciales dont l'existence est tributaire des sociétés aériennes qui en font l'objet. Les associations commerciales perçoivent des cotisations auprès des entreprises exploitant des activités de transport aérien. Les dirigeants de ces sociétés aériennes siègent au conseil d'administration des associations commerciales et en gèrent ainsi les activités. Il est évident qu'il existe un conflit d'intérêts lorsqu'une association, gérée et administrée par des sociétés aériennes, est en même temps responsable de la sécurité aérienne des passagers qui voyagent à bord de leurs appareils.
    Il est important ici de bien distinguer les associations professionnelles des associations commerciales. Les associations professionnelles, lesquelles chapeautent les pilotes, les ingénieurs, etc., ont un intérêt légitime et doivent s'assurer de l'application des accréditations et des normes aux membres des professions qu'elles chapeautent. Il n'existe aucun conflit d'intérêts lorsque les ordres professionnels sont habilités à veiller à ce que leurs membres possèdent le plus haut niveau de compétence professionnelle pour exercer leur profession. Or, Transports Canada a délégué le contrôle du SGS à l'Association canadienne de l'aviation d'affaires, ou ACAA. Cette association représente les entreprises privées exploitant des avions d'affaires. Une demande de la Helicopter Association of Canada est présentement à l'étude. Ce n'est qu'une question de temps avant qu'une demande soit présentée par l'association représentant les plus importantes sociétés aériennes du Canada, qu'une telle demande soit étudiée et éventuellement acceptée.
    Le mois passé, le Bureau de la sécurité des transports a publié un rapport portant sur un accident qui s'est produit à Fox Harbour, en Nouvelle-Écosse. L'accident impliquait un exploitant accrédité auprès de l'ACAA. Le rapport du bureau s'est longuement penché sur la question du programme de l'ACAA et de la nature du contrôle exercé par Transports Canada; il contenait notamment les observations suivantes: les administrateurs de l'ACAA, préoccupés par les poursuites, ont établi un mécanisme en vertu duquel des consultants indépendants étaient exclusivement chargés de la mise en oeuvre du système de contrôle du SGS; les exploitants membres de l'ACAA étaient libres de choisir leurs propres consultants et faisaient effectivement appel aux mêmes consultants d'une fois à l'autre, menant à une forte possibilité de « comportement captif » par rapport à la réglementation; des membres de l'UCET ont signalé que les exploitants membres de l'ACAA faisaient parfois appel au même consultant que celui chargé d'exercer le contrôle pour le compte de l'ACAA relativement à l'élaboration des protocoles du SGS visant les exploitants membres de l'ACAA; Transports Canada a fait une vérification du programme de l'ACAA, et le rapport de vérification recommandait que des modifications importantes soient apportées au programme de l'ACAA, mais aucune suite n'a été donnée à ces recommandations.
    Nous sommes d'avis qu'un système conférant aux inspecteurs le pouvoir de procéder effectivement à des inspections permettrait de corriger les problèmes systémiques, notamment l'absence de suivi des recommandations formulées dans le cadre de la vérification du programme de l'ACAA. En outre, nous estimons que les associations commerciales sont en conflit d'intérêts lorsqu'elles sont à la fois responsables de la sécurité aérienne envers la population tout en étant redevable envers les dirigeants des entreprises aériennes pour leur existence même.
(1640)
    En résumé, l'UCET ne s'oppose pas comme tel au SGS, mais s'oppose à certains aspects de sa mise en oeuvre par Transports Canada. Nous recommandons la mise en place d'une politique de vérifications et d'inspections effectuées directement et sans préavis par les inspecteurs de Transports Canada. Nous recommandons l'établissement d'un bureau indépendant chargé de protéger les dénonciateurs. Nous nous opposons à la délégation des pouvoirs du SGS aux associations commerciales, car il s'agit de toute évidence d'une situation de conflit d'intérêts. Nous accueillons favorablement la motion du comité et toute occasion qui nous serait donnée d'exprimer — tant en public qu'en privé — notre opinion au sujet de cet enjeu d'envergure nationale.
    Il nous fera plaisir de participer aux discussions à cet égard.
    Merci.
    Je vous remercie.
    Monsieur DaCosta.
    Bonjour. Je m'appelle Carlos DaCosta, et je suis coordonnateur des lignes aériennes pour l'AIMTA au Canada. Notre organisme représente tout près de 17 000 travailleurs dans tous les domaines de l'aviation, dont 8 000 mécaniciens assurant l'entretien des appareils d'Air Canada, d'Air Transat, de Bearskin et d'Air Labrador. Le tiers des techniciens brevetés du Canada sont représentés par notre association, et comme ils font partie des 8 000 dont je vous parlais, je crois que le compte est bon.
    Dans une ancienne vie, j'ai été mécanicien à Air Canada pendant 20 ans. J'ai ensuite embrassé la carrière syndicale. Mon métier de mécanicien m'a notamment amené à réparer et à entretenir de nombreux gros-porteurs.
    À titre de coordonnateur des lignes aériennes, j'ai eu l'occasion, comme plusieurs de mes collègues de l'association, de rédiger des articles sur le SGS à partir des recherches menées aux États-Unis et au Canada et des séances qu'organisait Transports Canada un peu partout au pays pour informer le public des détails relatifs au SGS. En se fondant sur ces recherches, l'association en est venue à la conclusion que ce système est déficient; c'est pourquoi elle a récemment commencé à recueillir des données, car elle veut s'assurer que les lacunes découvertes peuvent être étayées.
    Le principal problème du SGS tient au fait qu'il semble y avoir un conflit d'intérêts lors qu'une entreprise doit voir autant à l'aspect budgétaire de ses activités qu'à l'aspect sécuritaire. Je vous rappelle que c'est davantage une impression qu'un fait établi et que, tant que nous n'aurons pas les données pour le prouver, tout reste à l'état de théorie. Quoi qu'il en soit, les données que nous avons montrent néanmoins que les incidents redoutés commencent à se produire, ce qui est alarmant.
    Nous nous inquiétons particulièrement du peu de surveillance exercée par Transports Canada pendant l'ensemble du processus relatif au SGS, et plus particulièrement sur le terrain, c'est-à-dire directement dans les avions que l'on est en train de réparer.
    Transports Canada prétend de son côté que le SGS n'est qu'une couche supplémentaire qui s'ajoute aux divers règlements. Le ministère reprend en fait presque mot pour mot les propos de l'OACI. Ce n'est cependant pas notre avis, car nous estimons qu'il s'agit plutôt d'un soi-disant processus qui ne mène à rien de constructif. C'est un soi-disant processus qui ne tient pas compte de ce qui se passe dans la réalité, dans les avions eux-mêmes.
    J'ai été intrigué d'entendre la dame avant moi dire que les inspecteurs n'inspectent plus rien d'autre que les formulaires qu'on leur présente, mais c'est vrai que c'est justement ça que les mécaniciens commencent à nous rapporter. C'est ce qu'ils constatent. Ils ne voient plus personne faire des vérifications aléatoires. De toute évidence, en ne se rendant pas au fond des choses, c'est impossible pour Transports Canada de comprendre ce qui se passe vraiment sur le plancher.
    Comme je le disais plus tôt, nous avons déjà quelques incidents à signaler. Malheureusement, pour le moment, ils n'impliquent tous qu'une seule et même ligne aérienne, l'une des plus grandes du pays, soit dit en passant, mais, ces prochains mois, au fur et à mesure que notre processus prendra forme, nous pourrons aussi voir ce qui se passe dans les autres lignes aériennes et recueillir des données à ce sujet.
    Vous le constaterez par vous-même, les problèmes que je suis sur le point de révéler viennent confirmer nos craintes. Je n'ai pas l'intention de nommer de noms ni de donner des exemples concrets, simplement de vous donner un avant-goût de ce qui se passe dans la vraie vie et des raisons pour lesquelles les incidents passent sous l'écran radar du SGS de Transports Canada.
    Nous avons notamment constaté, chez la compagnie aérienne dont je vous parle, que les employés dont le nom était mentionné dans le cadre du processus relatif au SGS faisaient l'objet de mesures disciplinaires. Nul besoin de vous dire qu'il s'agit d'une violation flagrante du processus instauré par Transports Canada. Si le processus relatif au SGS est en voie de devenir un processus disciplinaire, comment croyez-vous que les gens réagiront à l'avenir quand ils feront une erreur? Croyez-vous qu'ils auront envie d'en informer les autres pour ne pas que l'erreur en question se reproduise?
    À Vancouver, un de nos mécaniciens brevetés d'expérience a été l'objet de mesures disciplinaires. Il avait d'abord consulté le manuel pour savoir comment installer une pièce donnée. Or, la pièce en question n'était pas approuvée par Transports Canada. Il a donc posé des questions. En fin de compte, on a fini par lui dire que tout était sous contrôle et qu'il devait se contenter de suivre les procédures. C'est ce qu'il a fait.
    Lorsqu'il a été relevé par les mécaniciens du quart de travail suivant, ceux-ci ont repris le boulot là où notre mécanicien était rendu. Ils ont eux aussi suivi les procédures du manuel. Ils n'ont pas reconnu la pièce à installer, parce qu'elle n'était pas étiquetée et qu'elle était peinte de la même couleur que les pièces qu'ils utilisent normalement. Bref, à cause d'une erreur qui s'était glissée dans le manuel publié par Airbus — erreur qui a d'ailleurs été confirmée par la société Airbus —, ils ne l'ont pas retirée de l'appareil, puisqu'ils n'avaient aucun moyen de savoir qu'elle était déjà installée. Lors de l'enquête faisant partie du processus relatif au SGS, on a déterminé que la faute en était aux employés qui n'avaient pas retiré la pièce, et ils ont fait l'objet de mesures disciplinaires.
(1645)
    Quelles mesures incitatives ont été mises en place pour que les SGS fonctionnent? Quel exemple donne-t-on qui pousserait d'autres mécaniciens à dire: « Vous savez, j'ai commis une erreur de bonne foi; j'aimerais le mentionner et j'aimerais que vous me disiez quelle était mon erreur, parce que je pense que quelque chose ne fonctionne pas. »? Il n'y en a pas. Et il s'agit là d'un seul incident.
    Un autre incident s'est produit à Winnipeg, où un mécanicien tentait de réparer un siège du poste de pilotage. Une erreur a été commise quelque part dans le processus, et le siège a été envoyé ailleurs. On a donc demandé à l'employé de prendre un autre siège et de remplir une étiquette incorrectement afin que ce siège puisse être utilisé dans l'avion en question. C'est le gestionnaire de l'employé qui lui a donné cet ordre. Il lui a aussi dit que s'il n'obéissait pas, il en subirait les conséquences. Il a refusé d'obéir; il en a donc subi les conséquences. J'ai appris ce matin qu'on mène actuellement une enquête sur la situation; nous verrons quel en sera le résultat. Cependant, voilà comment fonctionne une ligne aérienne, qui est censée participer aux SGS.
    Deux incidents se sont produits à Toronto. Dans le premier cas, on a demandé à des travailleurs de réparer un aéronef au cours du quart de nuit, pendant qu'il faisait noir, avec les mauvais outils, le mauvais matériel et de l'éclairage insuffisant, et à l'aide d'échafaudages pour pouvoir atteindre l'aéronef. Les travailleurs ont demandé que l'aéronef soit conduit jusqu'au hangar pour qu'ils puissent bien le réparer — j'ai déjà fait cela au cours de mon ancienne carrière. Parfois, ils peuvent le faire, d'autres fois non. Si les réparations à apporter sont assez importantes, elles sont remises à plus tard et le vol est retardé, ou on remplace l'aéronef.
    On a dit aux employés qu'il était impossible de le faire et qu'ils devaient faire leur travail, sinon... Puisqu'ils ont été placés dans cette situation hostile, ils ont refusé d'accomplir le travail, en vertu du Code du travail. Des représentants de Travail Canada se sont présentés et ils ont jugé, selon leurs capacités, leurs connaissances et leur formation, que la situation n'était pas dangereuse. La compagnie a ensuite menacé les employés en disant: « Vous faites mieux de ne pas agir ainsi à nouveau. Apprenez la leçon et dites aux autres que vous ne pouvez pas refuser d'accomplir votre travail. Lorsqu'on vous dit de faire quelque chose à un certain endroit, faites-le, et faites ce qu'il faut pour que l'aéronef parte à l'heure prévue, pour le bien de la ligne aérienne. »
    Dans le cadre d'une autre situation, qui s'est déroulée à Montréal, dans un atelier spécialisé dans la remise en état de pièces d'aéronefs, un employé a remarqué que le personnel avait tendance à prendre des raccourcis et à ne pas suivre les manuels d'entretien. Je dois souligner qu'on ne peut pas vraiment réparer un aéronef comme on répare une automobile. On ne peut pas simplement se fier à ses instincts; on doit essentiellement suivre le manuel, puis on doit appliquer ses connaissances et son expérience à l'exécution des réparations.
    Étant donné les raccourcis qu'on prenait, pour de bonnes ou de mauvaises raisons, l'employé croyait que quelque chose n'allait pas. Il a donc déposé un rapport en application du SGS, mais le rapport a enterré l'incident. Il s'est adressé à Transports Canada, sans succès. Les représentants ne voulaient pas lui parler, à moins que ce soit fait en personne.
    Au bout du compte, nous nous retrouvons dans une situation où... J'ai parlé aux employés. Ils se demandent pourquoi ils avoueraient qu'il y a eu un incident, qu'ils ont trouvé une erreur ou que quelqu'un a commis une erreur, probablement sans s'en apercevoir. Quel est l'avantage pour eux de faire cela alors qu'ils savent que leur ami sera puni? À leur tour, ces gens se cacheront et ils tenteront de régler les problèmes eux-mêmes. En tant que mécanicien, je sais et je peux vous dire qu'ils n'omettront rien sur le plan de l'entretien. Or, si nous les livrons à eux-mêmes, qu'arrivera-t-il à l'ensemble de l'industrie de l'aviation?
    Je vous parle d'une ligne aérienne de bonne réputation. Prenez l'exemple de ce qui s'est produit dans le cas de Southwest Airlines; la réputation de cette compagnie — comme celle, d'ailleurs, d'American Airlines et de Continental Airlines — n'est ni pire ni meilleure que celles de toutes les lignes aériennes du Canada. Pourtant, le système en place aux États-Unis est rigoureux; il permet, entre autres, de faire des vérifications ponctuelles. Les mesures de protection des dénonciateurs ont eu pour résultat que des employés se sont prononcés, et certaines lignes aériennes ont reçu des amendes et l'interdiction de voler.
    Qu'est-ce qui vous porte à croire que cela ne se produira pas au Canada? Nous sommes tous des êtres humains. Nous nous intéressons tous tout particulièrement au secteur dans lequel nous travaillons. En tant que gestionnaire, je donne peut-être la priorité au budget et à l'exploitation plutôt qu'à la sécurité. En tant que travailleur, je me demande peut-être comment rentrer chez moi à l'heure prévue, comment faire le travail de façon sécuritaire, comment me protéger et m'assurer que l'aéronef décolle et atterrit en toute sécurité, car c'est peut-être mon cousin ou mon frère qui est à bord.
    Au bout du compte, c'est certain que le système est imparfait. Nous commençons à voir des exemples de ce fait. Je vais certainement transmettre toutes les données que je reçois au cours des prochains mois à Transports Canada et à tous ceux qui s'intéressent à la question.
(1650)
    Merci.
    Monsieur Volpe.
    Merci beaucoup, monsieur le président.
    Merci aux témoins d'être ici et de partager avec nous leurs points de vue et leurs expériences.
    Je considère l'ensemble de vos propos comme une condamnation générale et une réfutation absolue de ce que les représentants de Transports Canada ont dit il n'y a pas une heure. Je ne suis pas certain que mon interprétation soit exacte. Est-ce bien le message que vous tentiez de me communiquer?
    Personnellement, je cherchais simplement à vous donner des exemples de cas dans lesquels les SGS ne nous sont pas utiles et à vous montrer pourquoi nous ne croyons pas aux SGS qui nous sont présentés comme un remplacement du genre d'inspections et de vérifications que nous faisions par le passé.
    Selon moi, c'est certainement le moins qu'on puisse dire qu'une partie des commentaires qu'ont faits les représentants de Transports Canada étaient inexacts.
    Je tente de saisir votre question, mais, selon moi, ils ne sont pas assez présents pour comprendre ce qui se passe; ainsi, leur participation les porte à croire que tout fonctionne bien. Avant qu'ils comprennent les dessous du processus...
    J'essaie de comprendre ce qui fonctionne selon eux.
    J'ai lu vos déclarations, madame Collins et capitaine Slunder, et j'ai écouté ce que vous avez dit, monsieur DaCosta. Selon moi, vous semblez tous avoir — pour citer Transports Canada — « les mêmes inquiétudes », qui sont les suivantes: premièrement, les gens ne reconnaissent pas qu'il y a un conflit d'intérêts entre ceux qui s'occupent du modèle d'entreprise et ceux qui prennent les décisions liées à la sécurité du public. Ces deux tâches devraient être accomplies par les mêmes personnes. Je ne peux m'imaginer qu'une compagnie qui offre un service à une altitude de 20 000 ou de 30 000 pieds ne s'inquiète pas de la sécurité. Si une erreur a été commise, il y a seulement une direction qu'on puisse prendre. Deuxièmement, vous vous inquiétez du fait qu'on ne procède plus aux vérifications aléatoires auxquelles vous vous attendiez auparavant. Troisièmement, vous croyez que les inspections devraient être faites par le même organisme qui établit la réglementation — sinon, à quoi bon créer un règlement? —; vous vous inquiétez donc du fait que le règlement soit appliqué par la partie qui le rend nécessaire.
    Quelle partie de tout cela vous porte à croire que Transports Canada pense réussir?
(1655)
    Si vous me demandiez si je trouve le processus des SGS efficace, je vous répondrais oui et non. Si on en retire l'aspect humain, c'est probablement un processus efficace. Toutefois, tous les êtres humains qui y participent prendront des raccourcis. Nous avons tous des intérêts particuliers.
    Si je suis un gestionnaire qui subit des pressions et qui tente d'être efficace et de bien paraître, je vais prendre ce que je considère comme un raccourci raisonnable afin que l'avion décolle à l'heure prévue, sans comprendre ce que cela veut dire pour le mécanicien qui essaie de faire son travail et pour la personne qui l'appuie. Au bout du compte, oui, il y a un conflit d'intérêts, et c'est pour cette raison que je pense que le concept des SGS est imparfait. Il faut établir des mesures strictes et un bon système de protection des dénonciateurs; par ailleurs, ce système ne doit pas être géré par Transports Canada, par la ligne aérienne ou par l'ACAA, mais plutôt par une entreprise indépendante. Il doit être neutre et il doit m'inspirer confiance; ainsi, lorsque je signale un incident, je sais qu'il sera examiné avec sérieux et que je serai protégé.
    Je considère vos propos comme une critique sévère du système et de l'organisme de réglementation, Transports Canada. Vous me dites très clairement que vous ne croyez pas que cela puisse fonctionner parce que les renseignements recueillis ne peuvent pas être exacts. C'est ce que je tire de ce que vous dites.
    Il y a trop d'intérêts contradictoires, et trop d'êtres humains participent au processus. Celui-ci est donc voué à l'échec.
    J'ai déjà vu certains exemples, comme ceux que je vous ai présentés, et je suis sûr qu'il y en a d'autres. Je les ai recueillis seulement au cours des deux ou trois dernières semaines, et il en reste. Il faut simplement que les gens soient assez à l'aise pour communiquer avec moi et pour me parler.
    Ce qu'ils me disent, c'est que le système échoue, tout comme aux États-Unis. Je sais que les Américains n'ont pas de SGS, mais ils ont un système rigoureux dans le cadre duquel ils font des vérifications aléatoires, et la compagnie Southwest Airlines a tout de même était prise en flagrant délit. Quelle leçon tirez-vous de ce fait — qu'ils amélioreront la situation en adoptant des SGS? Il cachait délibérément à la FAA qu'ils ne faisaient pas ces inspections; comment les SGS amélioreraient-ils la situation? La compagnie montre déjà qu'elle n'est pas professionnelle, et qu'elle n'agit pas dans l'intérêt des passagers et de la sécurité — qu'est-ce que les SGS changeraient à cela? Les SGS permettent simplement aux compagnies de continuer à faire les mêmes choses sans que personne ne puisse découvrir ce qui se passe.
    La différence entre les Américains et nous, c'est que leur système de protection des dénonciateurs est bien meilleur que le nôtre. Ils ont mené beaucoup de recherches dans ce domaine; nous, non. Je crois que la question repose encore sur une tablette, quelque part dans le parlement. Le projet de loi C-7 n'a pas encore été présenté.
    C'est exact, on a laissé tomber le projet de loi en raison d'une motion de renvoi adoptée avant les dernières élections, et le gouvernement n'a jamais cru bon de le présenter à nouveau.
    Je tiens simplement à ajouter que le SGS de Transports Canada même n'est pas encore tout à fait à point; un exemple de ce fait est lié à la formation. Au cours de son témoignage, M. Grégoire a parlé de la préparation en vue de former les inspecteurs sur les SGS. Pourtant, si le système est en place depuis si longtemps...
    Il y a de graves défauts. Faites les calculs. D'où viennent les ressources relatives au nombre total de postes d'inspecteurs, aux postes vacants, à l'attention particulière prêtée aux systèmes de gestion de la sécurité, et à l'ensemble du processus de cases à cocher et de points à vérifier? Ces ressources viennent du secteur de l'inspection. Ils ne peuvent pas s'occuper à la fois des SGS, des inspections et de la surveillance.
    Sur le plan des postes vacants, à une époque où l'on se déplace de plus en plus par avion, ils ne se sont toujours pas rattrapés et ils ont toujours 10 ans de retard.
    Il y a de graves problèmes. Malgré ce que M. Grégoire a dit, il est matériellement impossible de se concentrer à la fois sur les SGS et sur la vérification des SGS, tout en faisant des inspections et de la surveillance.
    Je veux aussi aborder le sujet du SSQAC, dont M. Grégoire a parlé. Je vais vous donner un exemple. Un inspecteur a posé une question au sujet du SSQAC, et il n'a pas reçu de réponse. Il a posé la question à nouveau la semaine suivante, en disant qu'il avait besoin d'une réponse. Je vous parle du système qu'on doit maintenant employer pour soulever des questions et des préoccupations. Il s'agit du système. Une semaine plus tard, il a reçu un ordre de travail qui lui demandait de répondre à la question qu'il avait posée lui-même.
(1700)
    Merci.
    Monsieur Laframboise.

[Français]

    Merci, monsieur le président.
    Je vous remercie, messieurs, mesdames, de comparaître devant le comité aujourd'hui.
    Je vais faire une déclaration. Nous allons mettre de côté la partisanerie politique. En effet, choisir le Système de gestion de la sécurité recommandé par l'OACI était probablement une idée intéressante. Je peux comprendre les libéraux, le ministre et les conservateurs de l'époque parce que l'OACI présentait cela comme une mesure supplémentaire. Tant qu'on en restait là, que la dénonciation volontaire pouvait être utilisée en tant que mesure et qu'on maintenait un service d'inspection ainsi que le recommandait l'OACI, tout allait bien. Le problème n'est pas du côté politique mais de celui de Transports Canada. Cet aspect des choses me cause vraiment problème.
     Monsieur  DaCosta, ce que vous nous dites est très important. Certains de vos employés ont fait des dénonciations volontaires et sont passibles de mesures disciplinaires. Je vais vous demander le nom de la compagnie aérienne en question. Pourquoi? Parce qu'on va lui rendre service. Aucun accident n'a eu lieu à ce jour, mais à compter d'aujourd'hui, elle va devoir faire attention parce que l'objectif était justement qu'il y ait de la dénonciation volontaire. C'est pourquoi je vais vous demander le nom de la compagnie aérienne qui a commis ces infractions.

[Traduction]

    Je pense que vous n'avez pas bien compris pourquoi j'ai donné ces exemples. Je prends encore l'avion. Y a-t-il un danger qu'un avion de ligne s'écrase, comme celui dont j'ai parlé? Non. Les incidents mentionnés n'étaient pas assez importants pour que quelque chose se produise pendant le vol.
    Ces exemples montrent le symptôme d'un problème, et ce symptôme prend de l'expansion. Il commence à se propager tel un virus. D'autres employés voient ce qui se passe et se disent: « Un instant, si cet homme a reçu une lettre disciplinaire, pourquoi est-ce que je suivrais ce processus? Pourquoi est-ce que je ne m'occuperais pas moi-même de la situation? »
    Les mécaniciens sont des professionnels. S'ils peuvent obtenir les mêmes résultats sans que la personne subisse de mesures disciplinaires, si l'appareil peut être extrêmement sécuritaire et bien réparé, ils procéderont de cette façon. Voilà ce que j'essayais de dire. Or, là n'était jamais le but des SGS; les SGS devaient avoir pour résultat de créer des familles heureuses. Malheureusement, la compagnie crée plutôt un environnement dans lequel on obtient le résultat contraire.

[Français]

    Je ne vais pas vous poser la question de nouveau. Je vais respecter votre réserve.
    Madame Collins, vous avez dit que les inspecteurs devraient reprendre la pratique consistant à soumettre les appareils à des vérifications ou des inspections directes, parfois de façon aléatoire, sans préavis aux compagnies aériennes. Une de nos craintes était que Transports Canada laisse tomber ces inspections aléatoires.
    Si je comprends bien, c'est déjà fait. Est-ce le cas?

[Traduction]

    Cela ne se passe pas actuellement; cela s'est déjà passé. Oui, c'est bien ce que je dis.

[Français]

    Monsieur Williams, voulez-vous ajouter quelque chose?

[Traduction]

    Le ministère répète continuellement que les SGS sont une couche supplémentaire; or, cela est faux. Lorsqu'on écoute bien ce qu'ils disent, on comprend qu'il s'agit d'un remplacement total du système d'inspection. Ils prétendent que le Canada peut être fier de sa fiche de sécurité grâce aux SGS. Or, il faut se demander pourquoi le Canada remplacerait un système qui est considéré comme un des meilleurs dans le monde par un système qui n'a pas encore été testé.

[Français]

     Monsieur Slunder, vous avez prouvé dans vos documents que vous aviez moins d'inspecteurs. Le nombre d'inspecteurs fédéraux est très bas présentement.
     Pourriez-vous m'expliquer comment votre travail a changé, en quoi consistait votre travail avant le SGS et maintenant, après le SGS?
    J'aimerais que mes collègues comprennent bien les changements qui sont intervenus dans votre travail.
(1705)
    Auparavant, nos inspecteurs se déplaçaient et se présentaient au site. Ils procédaient alors à des vérifications relativement aux pilotes. On faisait l'inspection de l'enseignement aux pilotes. On vérifiait que le temps en devoir n'excédait pas la norme. On vérifiait la certification des compagnies. Lorsqu'on notait certaines choses sur le site, on discutait avec les pilotes. On s'apercevait qu'il se passait des choses et, lorsqu'on les trouvait, on appliquait la loi, directement sur place.
    Présentement, on ne fait plus ce genre de travail. On est plutôt occupé au bureau à vérifier si les documents sont en ordre.
    Par exemple, au Québec, un inspecteur m'a déjà dit qu'on lui avait demandé de vérifier un spectacle aérien, mais après une plainte d'un citoyen, on est allé voir et on a trouvé que c'était la pagaille. Il y avait des hélicoptères qui faisaient des randonnées avec des passagers qui n'étaient pas des opérateurs.
    C'est ce qui arrive lorsqu'on ne va pas vérifier. Les gens savent qu'on n'arrive plus de façon inattendue, alors, ils font ce qu'ils veulent.
    Vous avez déclaré à La Presse que cela touchait aussi les nouvelles directives émises par Transports Canada et les grandes compagnies aériennes. Pourriez-vous nous éclairer à cet égard?
    Je ne suis pas certain d'avoir compris votre question.
    On a pu lire, ce matin, un communiqué de presse dans La Presse, dans lequel vous avez souligné que Transports Canada reconnaissait qu'il y avait un problème qui touchait les plus petites compagnies, ainsi que les grandes compagnies aériennes.
    Comme M. Grégoire vous le disait, ils nous ont écoutés. On s'est assis avec M. Eley pendant deux heures et on lui a présenté 14 pages d'information concernant le SGS et les problèmes de sa mise en œuvre. On voyait les difficultés qui se présentaient. Cependant, les grands pourvoyeurs ont les mêmes difficultés que les petits opérateurs.
    On ne vas pas visiter les grands opérateurs, car on dit qu'on ne s'en occupe plus parce qu'ils se conforment aux normes du SGS. Cela ne veut pas dire que les problèmes identifiés s'appliquent seulement aux petits; cela s'applique à tout le monde.
    Il a donc mal compris ce que vous vouliez... Cela touche toutes les compagnies aériennes.
    Une voix: Oui.

[Traduction]

    Monsieur Bevington.
    Merci, monsieur le président. Je remercie tous les témoins d'être des nôtres. J'apprécie vos témoignages.
    Il y a une différence entre le contexte d'hier et d'aujourd'hui. Transports Canada a pris une décision pour aller dans une certaine direction. Les compagnies aériennes l'ont appuyée. Pouvez-vous me dire ce que vous en pensez? Qu'est-ce qui a motivé ces décisions? Était-ce parce que Transports Canada voulait réduire les coûts? Était-ce parce que les compagnies aériennes voulaient diminuer les coûts ou obtenir d'autres types d'avantages en assumant le rôle de SGS et en réduisant le nombre d'inspections?
    Je dirais que la raison principale serait la responsabilité. C'est une question de responsabilité. Il y a également les coûts, mais la responsabilité demeure la raison la plus importante pour avoir pris cette direction.
    Voulez parlez de Transports Canada?
    Oui.
    Pourquoi les compagnies aériennes veulent prendre cette direction?
    Dans les incidents que j'ai soulevés, de toute évidence, le mode opérationnel a pris le dessus. À la lumière de ce qui s'est passé, on ne peut que supposer que le gestionnaire s'intéressait davantage à faire décoller l'avion à temps et à essayer de réduire les maux de tête associés à un retard: les frais d'hôtel pour les passagers, les frais de repas et tout le reste, sans oublier la paperasserie supplémentaire. C'était plus facile pour lui d'accélérer l'inspection mécanique que d'essayer d'expliquer à ses supérieurs que l'avion ne serait pas là à temps. C'est la seule chose logique.
    Nous avons vu que la plupart des grands transporteurs aériens perdent de l'argent tous les ans. L'industrie est dans le pétrin. Ça ne marche pas du tout. Nous nous retrouvons devant une situation où tout le monde a le couteau sous le gorge pour faire des compressions. D'un autre côté, Transports Canada est en train de réduire les coûts liés aux inspecteurs et aux inspections aléatoires et de garder le même nombre d'inspecteurs pour la quantité de vols. La situation s'est-elle aggravée au point d'échapper à tout contrôle?
(1710)
    J'ignore si la situation échappe à tout contrôle, mais je constate qu'elle commence à prendre de l'ampleur. Les mécaniciens me disent qu'elle empire de jour en jour, de semaine en semaine. Il n'y a plus le même climat qui régnait autrefois. C'est une nouvelle façon de travailler, et tout est réduit à strictement une question d'argent. On accorde moins d'importance à la sécurité, à un point tel que quelque chose pourrait se produire dans l'avenir. Je sais que les mécaniciens feront tout pour empêcher que cela se produise, mais si je commets une petite erreur qui passe inaperçue d'une étape à l'autre, alors cette petite erreur pourrait éventuellement mener à un gros accident. C'est justement ce que nous ne voulons pas.
    L'Association canadienne de l'aviation d'affaires était le premier groupe à avoir tenu le SGS pleinement responsable. Même dans le rapport d'enquête du Bureau de la sécurité des transports, on a exprimé des réserves quant à la justification de la délégation et de l'impartition. La principale préoccupation mentionnée dans le rapport du Conseil de la sécurité des transports était la responsabilité.
    Si vous me permettez, j'aimerais m'attarder sur la question des pilotes. Quand vous parlez des mécaniciens, au moins, vous êtes sur le sol et vous avez quelqu'un qui fait des choses selon la procédure. Les pilotes, quant à eux, sont des gens qui conduisent des avions à la fine pointe technologique. S'ils ne sont pas à la hauteur, la situation peut très rapidement échapper à tout contrôle. N'est-ce pas le cas? C'est là où de nombreux problèmes se posent; d'ailleurs, partout en Amérique du Nord, nous observons ces jours-ci des problèmes avec les pilotes.
    À cet égard, voici ce qui me préoccupe: une fois que des décisions administratives et financières commencent à être prises dans l'habitacle, on va finir par avoir des décisions qui ne sont pas adéquates et qui ne sont pas fondées sur la sécurité. Si on commence à faire de la pression sur la personne en lui disant que le fait d'être coincé à un endroit va entraîner des frais supplémentaires de 20 000 $ pour l'hébergement des passagers, alors cela devient un peu difficile, surtout si la personne sait que le budget de la compagnie est très serré.
    Vous avez voulu savoir tout à l'heure pourquoi le SGS plairait à l'industrie. En 2001, l'ancien directeur de l'aviation commerciale et d'affaires a dit à l'industrie que si elle adoptait le SGS, Transports Canada la laisserait tranquille. Les inspecteurs ne viendraient pas aussi souvent sur les lieux. C'est le discours qu'on a présenté alors à l'industrie, et c'était assez détaillé.
    Vous savez, durant mes entretiens avec les mécaniciens et les ingénieurs quand je voyage dans le Nord, ils disent avoir des rapports amicaux avec les inspecteurs de Transports Canada. Ces derniers viennent sur place pour s'assurer que les mécaniciens font bien leur travail sur la piste et dans le hangar. N'est-il pas vrai? N'y a-t-il pas une relation entre les travailleurs qui sont là pour s'occuper de l'entretien des avions, les pilotes qui conduisent les avions et les gens que vous représentez?
    Il y a beaucoup à dire dans le cas d'un travailleur sur le sol quand il parle à son patron et lui dit que les inspecteurs de Transports Canada pourraient se présenter n'importe quand et qu'il risque de se faire prendre. Mais si nous ne sommes plus là pour surveiller, alors cette personne n'a plus aucune bouée de sauvetage. Elle n'a pas de position de repli.
    C'est ce qui se passe actuellement. Les inspecteurs ne sont plus là, et quand un incident survient et que vous vous présentez pour le dénoncer, on vous dit de faire un rapport par l'entremise du processus de SGS. Et le dossier disparaît là, parce qu'il fait l'objet d'une enquête menée par un gestionnaire du contrôle de la qualité — un gestionnaire.
    Merci.
    Nous voici rendus à notre dernière série de questions. À titre d'information, je vais vous demander de libérer la salle à la fin. Nous avons une réunion à huis clos, et le temps presse un peu.
    Nous passons à M. Watson.
    Merci, monsieur le président.
    Et merci à nos témoins de comparaître.
    J'aimerais vous signaler, monsieur le président, que s'il me reste du temps, je le partagerai avec M. Jean.
    Je ne sais pas si certains d'entre vous sont des cinéphiles, mais je dois dire que cette situation me fait penser un peu au film Le jour de la marmotte, mettant en vedette Bill Murray. Le personnage principal se réveille chaque matin et revit la même série d'événements. C'est, il me semble, un peu le cas aujourd'hui. Je siège au comité depuis plusieurs années. Nous avons eu un débat sur le projet de loi C-6 visant à apporter des améliorations à la Loi sur l'aéronautique pour, entre autres, mettre en oeuvre des systèmes de gestion de la sécurité et instaurer des mesures en matière de protection des dénonciateurs. Je me rappelle avoir passé carrément des heures à l'étape de l'amendement en comité, avec l'appui du Parti libéral et du Bloc, pour essayer de trouver un libellé qui assurerait le bon fonctionnement du système. On l'a ensuite présenté à la Chambre, mais une motion de renvoi proposée par les néo-démocrates, bien entendu, a contrecarré le fruit d'un travail d'un an. En fait, je crois que le projet de loi C-6 est le résultat de cinq ans de consultations si l'on tient compte de ses premières moutures. Ce n'est donc pas comme si ce débat se soit tout à coup présenté aujourd'hui.
    Premièrement, permettez-moi de dire, aux fins du compte rendu, que nous aurions pu disposer de certaines protections et d'autres mesures si le projet de loi C-6 avait été adopté. Je pense donc que nous avons un sérieux problème ici à cause de la motion de renvoi qui a été présentée.
    Deuxièmement, j'aimerais pousser cette idée plus loin. Veuillez me pardonner si je suis un peu sceptique, mais je me souviens du témoignage des représentants de chaque syndicat qui ont comparu devant le comité; ils se sont tous opposés au principe des SGS, les systèmes de gestion de la sécurité. Chacun des syndicats a signalé le même message et ce, à maintes reprises.
    Il est intéressant de voir qu'aujourd'hui, quand les caméras tournent... veuillez m'excuser, mais j'ai l'impression que certains d'entre vous se sont convertis à la religion du SGS. D'après ce que j'entends dire, vous acceptez tous le SGS, et si je regarde les exigences que vous proposez, vous êtes essentiellement disposés à accepter le SGS s'il tient compte exactement des mêmes critères que vous demandez dans le cadre du projet de loi C-6. Je suis donc un peu sceptique à ce sujet.
    Monsieur DaCosta, j'ai une question à vous poser. Vous avez dit avoir récemment commencé à recueillir des données pour vérifier la validité de votre hypothèse sur la façon dont les systèmes SGS fonctionnent. Si je ne me trompe pas, vous avez précisé avoir entrepris ce travail depuis deux ou trois semaines. Bien entendu, vous n'avez pas terminé le processus, mais vous n'avez pas le moindre scrupule à créer un sentiment de panique potentiel chez les voyageurs. Vous avez déjà tiré à une conclusion — semble-t-il — et vous la présentez au comité après seulement deux semaines de collecte de données. Est-ce responsable?
(1715)
    Je crois avoir répondu clairement lorsque M. Laframboise m'a posé une question. Rien dans ces incidents ne causerait un écrasement. Mais le problème se trouve dans le système.
    Si j'avais à choisir entre le SGS et l'ancien système, je choisirais l'ancien n'importe quand. J'ai travaillé comme mécanicien. J'aimais le fait que les inspecteurs étaient présents et qu'ils s'assuraient que les compagnies suivaient les règles. Cela n'est pas mis en application par le SGS. Ce dernier permet aux compagnies de se cacher derrière le processus, et Transport Canada ne le saura jamais, parce qu'ils font des vérifications ponctuelles de temps à autre. C'est le jeu du hasard, vous pouvez vous faire prendre, comme vous pouvez vous en tirer.
    Eh bien, monsieur DaCosta, je crois qu'il est malhonnête de laisser entendre que vous avancez une hypothèse, mais vous êtes devant le comité, les caméras et les médias et vous faites des déclarations très officielles et sans équivoque sur le système de sécurité aérienne dans ce pays qui pourraient amener les gens à y penser à deux fois avant de prendre l'avion. C'est avant tout irresponsable.
    Ce que nous avons entendu ici, c'est que nous avons un système sécuritaire au Canada. Si je me souviens bien du débat sur le projet de loi C-6, la source d'inquiétude principale de trois des partis, au moins — l'inquiétude qui subsiste — concernait le nombre d'inspecteurs et si ce nombre d'inspecteurs serait aussi élevé que dans le passé. Il est clair aujourd'hui, d'après ce que dit M. Grégoire, que nous tentons toujours de revenir aux niveaux d'autrefois, mais il y a un engagement à revenir au chiffre de 878 inspecteurs.
    Vous m'excuserez, mais vous tentez de nous faire croire que le système est en train de s'écrouler, qu'il n'est pas sécuritaire de monter dans un avion ici, et vous le faites en vous basant sur des données recueillies pendant deux semaines.
    Si vous refaisiez jouer les bandes sonores, vous ne m'entendriez pas dire qu'il n'est pas sécuritaire de monter à bord d'un avion. Je vais répéter ma réponse encore une fois. Les incidents n'étaient pas assez graves pour causer un incident en plein ciel. Mais ils sont les symptômes d'un processus qui ne fonctionne pas. Et vous pourriez avoir une situation — si vous comprenez ce que sont les facteurs humains — où une erreur est faite et où une autre personne prend la relève et fait une autre erreur. Cela se perpétue jusqu'à ce qu'un incident majeur se produise. Et il pourrait s'agir d'un défaut de l'unité en place, ou, oui, il pourrait s'agir de quelque chose qui n'a pas fonctionné une fois l'appareil en vol. Si un générateur tombe en panne en plein vol, il y a deux ou trois autres générateurs de secours. Encore une fois, pour revenir à ma prémisse, ce n'est pas suffisant pour causer un incident, mais le problème se situe dans le processus du SGS.
    Les règles sont encore en place. Avec le SGS, les compagnies ont plus de responsabilités et elles doivent faire de plus en plus de tâches elles-mêmes. C'est là le problème inhérent au SGS. Je ne peux pas avoir confiance aux compagnies aériennes parce qu'elles ont un conflit d'intérêts. À maintes reprises, les faits ont montré que d'autres enjeux passent avant celui de la sécurité. Cela a été le cas avec Southwest Airlines, American Airlines, de même que les compagnies Delta et Continental.
     Donc, vous êtes en train de nous dire que vous allez cesser d'utiliser les services des compagnies aériennes commerciales.
    Non, j'utilise les services de toutes ces compagnies aériennes. Mais j'espère que le système qu'elles ont fonctionnera.
    Ce que j'essaie de faire, c'est de sensibiliser le comité. Je vais vous dire quelque chose, je ne veux pas faire partie de votre comité, car vous avez une décision difficile à prendre.
(1720)
    Monsieur DaCosta, d'un côté, vous affirmez que nous n'avez pas confiance aux compagnies aériennes, et de l'autre, vous affirmez que vous allez continuer à utiliser leurs services. Cela ne tient pas debout, monsieur DaCosta. Si la situation est aussi mauvaise que vous le dites, vous devriez nous affirmer que vous prévoyez ne plus utiliser les services des transporteurs commerciaux.
    Ce que j'essaie de montrer aux gens qui nous écoutent — car ils écoutent présentement le débat, monsieur DaCosta — c'est qu'ils doivent savoir qu'il est toujours sécuritaire de prendre l'avion. Vous tentez d'établir des règles générales à partir de données choisies que vous avez établies en deux semaines, plutôt que d'avoir un regard général sur le système réel et de travailler à partir du système. Je pense que c'est une façon dangereuse d'étudier le système, monsieur DaCosta.
    Je ne sais pas si j'ai encore du temps, mais —
    En tant qu'ancien mécanicien, je comprends le système. Évidemment, vous ne le voyez pas de la même façon que moi.
    Sur ces mots, je vais...
    M. Volpe invoque le Règlement.
    J'aime toujours que nous terminions nos séances sur une note positive. Je pense que ce que nous voulons tous, c'est montrer du respect envers nos témoins, qui sont venus ici pour nous faire part de leur expérience. J'espère que tous les autres membres du comité ont respecté ce principe qui a guidé tous nos témoins. C'est certainement de cette manière que j'ai interprété l'opinion de M. DaCosta. Je n'ai rien vu d'alarmiste là-dedans et je crois que toute personne serait irresponsable de laisser entendre le contraire.
    Ce n'est pas un rappel au Règlement. Votre avez exposé votre point de vue.
    Merci à nos invités. Nous vous sommes reconnaissants de nous avoir accordé du temps et de nous avoir fait part de vos idées. Merci beaucoup.
    Je demande à chacun d'entre vous de quitter la salle le plus rapidement possible.
    Je demande aux membres du comité de rester pour une brève séance à huis clos.
    [La séance se poursuit à huis clos.]
Explorateur de la publication
Explorateur de la publication
ParlVU