:
Merci beaucoup, monsieur le président.
Je m'appelle Richard Gilbert et je suis consultant indépendant. Je travaille principalement à la croisée des enjeux concernant le transport et l'énergie. J'ai actuellement et j'ai eu des clients en Europe, en Asie et en Amérique du Nord. Mon principal client depuis une vingtaine d'années est l'Organisation de coopération et de développement économiques, l'OCDE, à Paris. J'ai été chargé plus récemment, tâche que je viens de terminer la semaine dernière à peine, de la rédaction de la feuille de route de la technologie des véhicules électriques pour le Canada, pour le compte de Ressources naturelles Canada et d'un comité de direction de l'industrie.
On m'a demandé de vous parler aujourd'hui, je pense — j'ai reçu un appel de votre vice-président — parce qu'avec Anthony Perl, de l'Université Simon Fraser, j'ai écrit un livre qui a été publié à la fin de 2007 ou au début de l'année dernière, intitulé Transport Revolutions: Moving People and Freight without Oil. Une version révisée de cet ouvrage doit être publiée au Canada par New Society Publishers à Gabriola Island, en Colombie-Britannique, plus tard cette année.
Cet ouvrage jette un regard sur un avenir où le pétrole sera devenu rare ou coûteux, ou les deux. Il est centré sur les États-Unis et la Chine, le pays industrialisé le plus difficile et le pays du tiers-monde le plus difficile. Ce que nous faisons, dans cet ouvrage, c'est proposer une vaste expansion des services ferroviaires des deux pays, notamment avec un train à grande vitesse, et nous démontrons que c'est réalisable. Peut-être à cause de notre livre, peut-être pas, bien des éléments que nous avons proposés sont déjà mis en oeuvre.
Je n'ai pas beaucoup travaillé sur les enjeux ferroviaires au Canada, mais je les connais bien, et je connais assez bien le Canada. En dépit de mon accent, j'ai vécu à Toronto pendant 41 ans. J'ai travaillé dans les 10 provinces et travaille encore dans certaines. Dans les années 1980, j'étais président de la Fédération canadienne des municipalités, un poste qui donne à son heureux titulaire une perspective probablement aussi fondamentale du Canada qu'à tout autre citoyen du pays.
Je fais partie du nombre croissant d'économistes distingués qui pensent que la cause immédiate de l'actuelle récession économique mondiale n'est pas le fiasco des prêts hypothécaires à risque aux États-Unis ou les entourloupettes qui ont suivi sur Wall Street. La cause immédiate de nos déboires économiques a été la chute de l'industrie automobile en Amérique du Nord et ailleurs, laquelle a été précipitée par la montée en flèche du prix du pétrole l'année dernière. Tout a vraiment commencé en 2006-2007, mais a culminé l'année dernière. Cette montée fulgurante du prix du pétrole a été la conséquence de deux choses: l'une a été les contraintes d'approvisionnement et l'autre, la hausse de la demande, surtout dans les pays industrialisés.
Cette montée en flèche du prix du pétrole a provoqué la chute de l'industrie automobile et, par la suite, l'atténuation des pressions de la demande sur le pétrole et les produits pétroliers. Les prix ont dégringolé en conséquence, mais ils ont recommencé à grimper. Ils se sont remis à grimper parce que les contraintes d'approvisionnement, en fait, se sont accentuées, parce que l'investissement dans l'industrie pétrolière a ralenti et presque arrêté. La demande est toujours assez faible, mais c'est la raison pour laquelle les prix ont recommencé à grimper.
Comme le disait la revue The Economist en mai, il est difficile de trouver qui que ce soit, actuellement, dans l'industrie pétrolière, qui ne pense pas que les prix sont partis pour grimper encore plus haut que l'année dernière, quand le baril de pétrole a atteint le coût record d'un peu plus de 145 $. Ils parlent d'un bond vertigineux vers ce prix. Quand cela arrivera — et vraiment, la question qui se pose, c'est quand plutôt que si — les vestiges de l'industrie automobile s'effondreront à nouveau, et nous aurons une autre récession, comme c'est toujours arrivé quand le coût du pétrole atteignait un niveau record. De fait, depuis la Deuxième Guerre mondiale, presque chaque récession a suivi une montée en flèche du cours du pétrole, et chaque record du prix du pétrole a été suivi d'une récession. Ces facteurs sont assez étroitement liés.
Je soutiens que l'investissement dans le train électrique à grande vitesse est l'une des choses que nous pouvons faire pour nous sortir de cette spirale descendante, une descente dans ce qui pourrait être l'oubli économique et social.
L'électrification permet bien des choses: l'accélération rapide, le freinage par récupération, la récupération d'une partie de l'énergie cinétique. Le recours à l'énergie renouvelable, comme le système de train léger de Calgary, qui est entièrement alimenté par l'énergie éolienne, assurerait l'interopérabilité avec les résultats des plans d'expansion massive du réseau de trains à grande vitesse des États-Unis. Je dis « grande vitesse » plutôt que « très grande vitesse » parce que même avec des réseaux ferroviaires électrifiés efficaces, la très grande vitesse a un prix. Toutes choses étant égales par ailleurs, si on a un train qui file à 320 kilomètres à l'heure, soit la vitesse de croisière typique des trains à très grande vitesse de la plus grande partie de l'Europe, il consomme deux fois plus d'énergie électrique qu'un train qui roule à 225 kilomètres à l'heure, qui est la vitesse typique dans le nord de l'Europe, en Scandinavie, et dans d'autres pays.
Tandis que nous entrons dans une aire de contrainte énergétique, cette énorme différence de consommation aura son importance. Ce n'est pas parce qu'on va moins vite qu'on a une réduction équivalente de la durée du trajet. Par exemple, si on a un itinéraire Toronto-Montréal avec trois escales en chemin, il faudra deux heures et demie pour faire le voyage à 225 kilomètres heure à la vitesse de croisière, comparativement à deux heures à 320 kilomètres à l'heure. Le trajet de Toronto à Ottawa se ferait en deux heures et une heure et demie. Calgary-Edmonton prendrait une heure et demie et un peu plus d'une heure. Alors la différence de temps est beaucoup moins grande que la différence de vitesse.
La grande vitesse plutôt que la très grande vitesse, ce sont des coûts d'investissement inférieurs, pas de beaucoup, mais dans une certaine mesure; c'est certainement moins de bruit pour les gens qui se trouvent en bordure des voies ferrées; et de moins grandes répercussions sur l'environnement.
Ce qui compte pour les voyageurs plus que la très grande vitesse, c'est la fréquence, la fiabilité, la qualité du voyage et d'autres aspects du service. Il leur importe plus de savoir qu'il y a un train toutes les 30 ou 60 minutes la plus grande partie de la journée sur chacun de ces trois corridors, et bien des trains qui font bien d'autres itinéraires.
L'idée, c'est qu'on peut décider au pied levé de partir. On peut réserver un siège si on veut être sûr d'en avoir un. On peut facilement manger, dormir et travailler sur le train. On est un élément qui unifie le pays, et on contribue à briser le cycle de récession lié au pétrole dont j'ai parlé plus tôt. On aide à assurer le fonctionnement du Canada quand on brise le cycle et que les prix de l'essence, du diesel et du combustible pour avion se stabilisent à deux ou trois fois leurs niveaux actuels.
Qu'en est-il des coûts du service ferroviaire à grande vitesse? D'après l'étude qu'a faite le Van Horne Institute en 2004 de la ligne Calgary-Edmonton, la ligne électrifiée à grande vitesse entre Calgary et Edmonton coûterait environ 11,6 millions de dollars par kilomètre de voie ferrée dans les deux sens, en comptant le coût des trains. Cela revient probablement à environ 13,5 millions de dollars par kilomètre en dollars d'aujourd'hui.
Si on regarde ce qui se passe dans le reste du monde, on constate que c'est une estimation vraiment très faible. L'International Union of Railways a étudié de nombreux projets actuels et potentiels et a établi une fourchette, en dollars canadiens, de 17 à 53 millions de dollars par kilomètre. Le meilleur équivalent nord-américain est ce qui est proposé en Californie, une voie de 1 300 kilomètres entre Sacramento et San Diego, qui coûtera environ 40 millions de dollars par kilomètre. Nous pensons que c'est le meilleur guide que l'on puisse avoir. De fait, dans notre livre, Anthony Perl et moi nous fondons sur le prix par kilomètre de 40 millions de dollars US.
Alors ces trois itinéraires dont j'ai parlé — Toronto-Ottawa, Toronto-Montréal et Calgary-Edmonton — coûteraient 50 milliards de dollars à ce prix-là. Sous un autre angle, si on emprunte à 5 p. 100 sur 30 ans, ce serait 3,3 milliards de dollars par année.
Si on s'intéresse à l'aspect financier du train à grande vitesse ou à très grande vitesse, on constate que les frais d'investissement comptent généralement pour les trois quarts ou plus du coût total. Alors on rassemble tous les coûts d'exploitation et les coûts d'investissement sur une période de 30 ans avec le coût de l'emprunt, et on constate que les coûts d'immobilisation comptent généralement pour plus de trois quarts du total. C'est une part énorme. L'étude de Calgary-Edmonton fait exception, mais je pense qu'ils ont sous-estimé les coûts d'investissement.
Alors d'après les chiffres que je viens de vous donner, vous pouvez assez facilement comprendre qu'il faut 10 000 $ par kilomètre par jour pour couvrir vos frais. Je peux faire le calcul. Voyez mon exposé; c'est là.
Qu'est-ce que cela signifie? D'après votre ligne directrice pour les voyages, cela revient à 50 ¢ par kilomètre. C'est une assez bonne référence pour étudier cette question. C'est donc que pour rentrer dans vos frais, il vous faudrait 20 000 passagers payants qui parcourent chaque kilomètre de voie ferrée que vous construisez. Ce peut être un nouveau concept, que celui de rentrer dans ses frais. Néanmoins, il est tout à fait possible de rentrer dans vos frais avec le train à grande vitesse, si vous y pensez bien. Si vous ne tenez pas à rentrer dans vos frais, ou si vous ne voulez pas avoir trop de passagers, vous pouvez évidemment subventionner les coûts d'investissement ou d'exploitation, ou même les deux.
Mettons en contexte 20 000 passagers par kilomètre. VIA Rail transporte actuellement, sur tout son réseau, 13 000 passagers par jour. C'est bien moins que ce qu'on envisage. Comme je l'ai dit, il vous faudrait 20 000 passagers par jour qui franchissent chaque kilomètre pour couvrir les frais de ce réseau. Mais la possibilité d'expansion du réseau de VIA ou de tout autre réseau est généralement énorme.
Le seul de ces trois corridors pour lequel nous ayons de chiffres assez fiables, ou je devrais dire des chiffres accessibles au public assez fiables, au plan de l'achalandage, c'est le trajet Calgary-Edmonton. On peut voir qu'en moyenne, environ 25 000 personnes font le trajet entre Calgary et Edmonton — ou plus précisément, Calgary et Red Deer ou Edmonton — et dans le sens inverse chaque jour. Je dis bien 25 000. Ce qu'il faut, c'est convaincre 20 000 de ces personnes de prendre le train. Actuellement, sur ces 25 000 personnes, environ 93 p. 100 prennent la voiture. Il y en a qui prennent l'autobus et d'autres l'avion. Les chiffres seront un peu différents pour le trajet Toronto-Ottawa et Toronto-Montréal, mais pas de beaucoup.
Quel serait le seuil de rentabilité pour l'essence? J'ai fait des calculs. J'ai justement présenté des chiffres sur ce sujet-là lors d'une conférence tenue à Red Deer en 2006. J'ai fait des calculs et conclu que l'essence devrait atteindre le prix de 1,60 $ le litre — et il faudrait qu'il y ait un train — pour que la plupart des gens veuillent remprunter le train à grande vitesse, la plupart des gens qui faisaient le trajet Calgary-Edmonton, Calgary-Red Deer, Red Deer-Edmonton et vice versa.
Donc, 1,60 $ pour l'essence? À Calgary, et de fait, ailleurs au Canada, le prix de l'essence a atteint 1,30 $ l'été dernier. Si vous lisez le nouveau livre de Jeffrey Rubin, Why Your World Is About to Get a Whole Lot Smaller, vous y verrez que selon lui, on peut s'attendre à payer 2 $ le litre d'essence « dans un proche avenir ». Je pense qu'il vise environ 2012. C'est à ce prix-là qu'on aura suffisamment de passagers sur la ligne Calgary-Edmonton pour couvrir non seulement ses frais d'exploitation, mais aussi les coûts d'investissement, sur 30 ans. Si ces chiffres sont justes — et ils le sont probablement, mais selon certains c'est plus, et selon d'autres, moins — en ce qui concerne les trajets Toronto-Ottawa et Toronto-Montréal, ce serait à peu près le seuil de rentabilité pour le service sur ces corridors particuliers.
L'attaché de recherche de votre comité m'a demandé d'ajouter quelques mots sur liens entre le train à grande vitesse ou à très grande vitesse et la circulation locale à la fin des itinéraires, ou aux gares. J'ai deux réflexions plutôt contradictoires à faire sur la question.
La première, c'est que le train à grande vitesse ou à très grande vitesse n'est guère différent de tout autre service ferroviaire. Il vaut mieux avoir les gares dans les centres urbains, comme c'est le cas à Montréal et à Toronto, et de fait partout ailleurs dans le monde où il y a un bon service ferroviaire, plutôt qu'en marge des centres urbains, comme à Ottawa et Vancouver. La gare devient simplement un carrefour du transport en commun. Je siège, à Toronto, au comité consultatif de la gare Union, qui cherche en fait à consolider le rôle de la gare comme une plaque tournante du transport en commun. La population ne sait pas vraiment que, déjà, bien plus de passagers passent par la gare Union chaque jour qu'à l'aéroport Pearson.
L'autre réflexion, c'est que quoi qu'il en soit, même si les aéroports sont en marge des villes, le raccordement ferroviaire à grande vitesse avec les grands aéroports devrait être encouragé, comme il en existe dans bien d'autres pays, et il y a deux raisons à cela. Le transport aérien, plus que tout autre mode de transport, se ressentira de la hausse du prix du pétrole dont j'ai parlé tout à l'heure. C'est le secteur le plus sensible au prix du carburant, et nous avons pu constater l'année dernière que les compagnies aériennes souffraient du coût élevé du carburant. Ces coûts ont dépassé les coûts de main-d'oeuvre en 2007. Nous pouvons voir cette année que ces compagnies souffrent du ralentissement économique, mais aussi de la remontée du prix du pétrole.
Dans notre livre, Anthony Perl et moi-même avons traité en profondeur de la question, et nous avons conclu — n'oubliez pas que nous nous concentrions sur les États-Unis et la Chine — qu'aux États-Unis, le nombre d'aéroports offrant des vols réguliers allait diminuer d'environ 330, actuellement, à moins de 50 d'ici une vingtaine d'années, pour les raisons que je viens de citer.
Un service de raccordement ferroviaire à grande vitesse ou à très grande vitesse avec les aéroports sera très important. Il sera important tout d'abord de rassembler les passagers dans un nombre de plus en plus restreint d'aéroports, donc l'aéroport Pearson ou l'aéroport Trudeau devra fermer et les vols internationaux ne partiront que de l'un ou l'autre, et alors il faudra un service de raccordement à grande vitesse entre les deux villes pour faciliter les choses. Mais alors, tandis que les aéroports changeront de vocation, vous constaterez, comme nous le disons dans notre livre, qu'ils deviendront des plaques tournantes du transport pour la population, et, fait très important, pour le transport de marchandises. Je pourrai en parler plus longuement au moment des questions, monsieur le président, si vous le souhaitez.
Je vous remercie.
Tout d'abord, je tiens à vous remercier d'avoir laissé M. Gilbert parler en premier. Il a soulevé énormément d'éléments et il m'a vraiment fait comprendre combien il me reste à apprendre sur le transport ferroviaire et le train à grande vitesse.
Mon expérience est dans l'industrie des ressources, de l'exploitation minière, géologique et pétrolière, et je m'intéresse depuis toujours au transport ferroviaire. Comme M. Gilbert, j'ai lu le rapport sur le train à grande vitesse et son incidence, et la suggestion selon laquelle il contribuerait au transport dans le corridor entre Calgary et Edmonton.
Je m'intéresse à ce qu'il a dit au sujet du prix du pétrole. Il a été question, plus tôt aujourd'hui, du fait que l'emploi efficace du pétrole et de l'électricité a d'énormes répercussions sur le coût de ces deux ressources. J'ai tendance à être d'accord, dans une certaine mesure, sur le fait que c'est vraiment le coût du carburant qui catalyse tous les changements qui nous préoccupent, tant dans l'économie qu'en matière de transport. Du même coup, le débat et la discussion — non pas la dispute, mais la discussion — tourne vraiment sur ce qui pourrait être la cause de l'actuelle récession.
Je dois m'en remettre à M. Gilbert ici; il a certainement bien plus d'expérience que moi et a fait une étude beaucoup plus approfondie du sujet. Je suis impatient de lire ses livres et ses notes sur les facteurs sur lesquels il fonde son analyse de la conjoncture économique actuelle.
Pour ma part, mes préoccupations et intérêts sont centrés sur la ressource et l'incidence sur l'environnement. Je sais, d'après des notes antérieures, qu'il y a eu des exposés de grands fabricants sur ce qui fonctionne en Europe et ce qui peut s'appliquer ici, au Canada.
Comme M. Gilbert, j'ai sillonné le pays. Je suis né à Toronto. La seule région du Canada où je n'ai pas travaillé, c'est dans les provinces Maritimes. J'ai couvert tout l'Arctique, et aussi tout l'Ouest du Canada, dans les secteurs minier et pétrolier. Il y a à peine un an et demi, j'ai travaillé sur un projet à Sudbury qui était principalement centré sur le secteur minier. Quand l'ensemble du marché des produits s'est écroulé, je me suis retrouvé à Calgary.
Pour l'instant, je suis encore en pleine courbe d'apprentissage. Je ne voudrais pas faire perdre son temps au comité pendant que j'explique ce qui a éveillé mon intérêt, mais celui-ci est très centré sur l'interface de n'importe laquelle des méthodes dont nous avons parlé avec l'infrastructure déjà établie.
Pas plus tard que ce matin, il y a eu une autre victime en banlieue de Calgary, quand un train local a percuté une voiture qui tentait de traverser la voie ferrée. Notre train léger, dont nous avons parlé plus tôt, est uniquement mu par l'énergie éolienne; on pourrait débattre d'où vient le vent. D'ailleurs, le réseau est actuellement en pleine refonte, parce que l'interface avec l'infrastructure cause d'énormes problèmes. À l'échelle locale, nous sommes en train de concevoir un niveau +15 sophistiqué, mais on vise surtout à intégrer ce même train léger très efficace à un réseau souterrain.
Alors ce qui me préoccupe plus, du point de vue de l'ingénierie, quand on envisage un système comme celui dont nous parlons, qui aura des répercussions partout au Canada, c'est qu'il devienne surtout quelque chose qui est conçu et pensé à une fin précise plutôt qu'une adaptation après le fait. Le groupe avec lequel je travaille a une grande expérience des trains rapides et des chemins de fer pour trains rapides, et il se préoccupe aussi de ce que l'on puisse prendre des systèmes d'ailleurs qu'on adapte au Canada plutôt que de concevoir un système qui permettrait vraiment à tout le monde au pays de l'utiliser. La situation idéale que nous étudions à l'échelle locale est encore centrée sur le volume de circulation entre Calgary et Edmonton. Je suis d'accord qu'il existe une excellente situation pour cela, mais nous ne sommes pas encore tout à fait convaincus qu'un réseau souterrain fait partie de ce qu'il faudrait.
Actuellement, nous cherchons à nous assurer que c'est bien sur tout le concept de ce qui constitue le mode de transport plus efficace des personnes que l'on travaille. Bien des préoccupations sont exprimées au sujet de l'efficacité énergétique. Des gens qui ont bien plus d'expérience que moi pensent que notre mode de transfert de l'électricité fait un énorme gaspillage de l'énergie, et aussi que l'exploitation pétrolière fait une consommation faramineuse d'énergie. Rien que la manière dont nous consommons le pétrole reflète un manque d'efficience phénoménal. C'est le genre de choses dont je voudrais d'abord parler dans mes observations: pour l'aspect environnemental, nous réfléchirions en profondeur, et non pas seulement de façon superficielle, à l'interface de n'importe quel nouveau réseau avec l'infrastructure actuelle.
Je suis tout à fait d'accord que la liaison avec les centres urbains est l'élément le plus important de n'importe quel nouveau système. Quand on pense aux régions les plus peuplées de l'Est du Canada, on ne semble pas tant avoir à se préoccuper de la superficie nécessaire. Je crois qu'il a été question, dans des notes antérieures, d'un troisième corridor — il y aurait un corridor libre, un corridor à grande vitesse et un corridor de circulation. On crée, en fait, un troisième corridor pour avoir le service ferroviaire à grande vitesse. Dans l'Ouest canadien, l'emploi qui est fait des terres revêt une grande importance et, faute de description, elles deviennent très protégées. Alors la superficie que prendrait n'importe quel nouveau réseau est un élément des préoccupations générales. Son incorporation visuelle dans le paysage est l'autre aspect de l'enjeu.
Pour ce qui est de mes commentaires, ce que je voudrais surtout, c'est que ces éléments soient au compte rendu. M. Gilbert a parlé de toutes sortes de choses avec lesquelles notre groupe est d'accord dans une certaine mesure, et sur d'autres aspects, nous aurions probablement un avis différent. Mais pour l'instant, je pense que cela suffit.
J'apprécie beaucoup votre invitation. Je vous remercie de m'avoir offert cette occasion de discuter avec vous et de me joindre au groupe.
:
Merci, monsieur le président. J'apprécie beaucoup, moi aussi, l'occasion qui m'est donnée de comparaître aujourd'hui.
Je ne suis pas expert en matière ferroviaire, mais j'aimerais vous parler brièvement d'un voyage que j'ai fait les 28 et 29 mai avec le maire Gregor Robertson à Seattle et Portland pour assister à la Cascadia Rail Week, un projet conjoint de plusieurs collectivités qui longent le corridor ferroviaire d'Amtrak de Eugene, en Oregon, jusqu'à Vancouver, en Colombie-Britannique. Ces collectivités voient dans l'investissement de 8 milliards de dollars, que fait le président Obama dans le train à haute vitesse pour stimuler l'économie, une occasion sans précédent de réaliser leur vieux rêve de transport des passagers par chemin de fer à grande vitesse ou très grande vitesse sur toute la distance qui sépare Eugene de Vancouver.
Les gouvernements nationaux ont déjà investi de 800 à 900 millions de dollars sur le corridor depuis une quinzaine d'années. Ils ont été récompensés par d'importantes hausses du nombre d'usagers, surtout entre Seattle et Portland. Lors du voyage auquel nous avons participé, les dirigeants municipaux et politiques du niveau du Congrès et de législatures d'États ont pris ce train pour aller se rencontrer et parler des possibilités.
Plusieurs choses importantes sont survenues lors de nos réunions. L'une a été que des fonctionnaires fédéraux américains sont venus expliquer au ministère des Transports de l'État de Washington la manière de structurer leur demande de financement pour un maximum de 800 millions de dollars de cet investissement pour stimuler l'économie. La demande devait être déposée pour le 17 juin. Le maire Robertson a signé un protocole d'entente avec le maire de Portland, Sam Adams, pour promouvoir le transport ferroviaire des passagers dans ce corridor, dans une optique d'établissement des assises d'un véritable réseau ferroviaire à haute vitesse. Ce protocole fait maintenant le tour des dirigeants des municipalités qui longent le corridor, pour en obtenir l'appui.
Enfin, je pense que les réunions de votre comité, et vos audiences sur la question du transport ferroviaire à grande vitesse ont vraiment mis en valeur les possibilités qui s'offrent en la matière, mais jusqu'à maintenant, à moins que je ne me trompe, on n'a pas beaucoup mis l'accent sur le potentiel de la côte Ouest. Le projet Cascadia a de véritables chances de succès, et les avantages économiques et environnementaux potentiels pour le Canada sont évidents. Je parle ici d'avantages qui se concrétiseraient bien avant la création d'un véritable réseau ferroviaire à grande vitesse.
Cependant, le Canada a jusqu'à maintenant refusé d'intervenir de la manière la plus fondamentale. Amtrak envisage d'ajouter un deuxième train chaque jour entre Seattle et Vancouver. Ottawa a insisté pour qu'Amtrak assume le coût des formalités des douanes et d'immigration pour faire passer la frontière à ce train, alors pour une histoire de quelque 1 500 $ par jour, nous faisons peser un énorme point d'interrogation sur l'intérêt que présenterait pour le Canada l'augmentation du tourisme et des échanges commerciaux avec le Nord-Ouest du Pacifique qu'engendrerait l'expansion du transport ferroviaire de passagers.
Jusqu'à maintenant, le ministre de la Sécurité publique, Peter Van Loan, a légèrement fléchi, mais seulement dans la mesure d'une dispense des frais pendant les jeux Olympiques de 2010. Le coût, pour Amtrak, sera d'environ un demi-million de dollars par année, et le ministère des Transports de l'État de Washington estime que les avantages pour l'économie canadienne d'un service augmenté pourraient être de l'ordre de 17 millions de dollars par année. Une autre estimation est même supérieure à cela.
Je serai très bref. J'ai plusieurs recommandations très simples à faire. Je pense qu'elles sont peu coûteuses et constituent des mesures efficaces par rapport aux coûts qui permettraient au Canada d'intervenir dans la très étroite fenêtre qui reste avant qu'ils fassent leur demande et expriment notre résolution d'ouvrir la porte à l'augmentation du transport ferroviaire de passagers, au train à grande vitesse, et même à la circulation ferroviaire à très grande vitesse jusqu'à Vancouver.
La première recommandation, c'est que le comité convienne d'exhorter le ministre Van Loan à revenir sur sa décision et à renoncer aux frais douaniers pour Amtrak. Comme le disait un article récent dans le The Vancouver Sun, ces trains auraient pu déjà rouler depuis neuf mois. Tout autre report serait bête et l'insistance à recouvrer les coûts directs témoigne simplement d'une vision à courte vue. C'est assez gênant pour les Canadiens qui rendent visite aux Américains de se faire dire que les frais sont un obstacle à leurs efforts pour faire des investissements de leur côté de la ligne, lesquels investissements auraient des avantages directs pour le Canada.
Deuxièmement, au-delà de cette amélioration, j'espère que nous pouvons nous entendre pour encourager le gouvernement fédéral à collaborer avec les autorités américaines en vue de simplifier les formalités de douanes et d'immigration des deux côtés de la frontière. La situation américaine n'est pas parfaite, et cette simplification aurait pour effet de réduire la durée du trajet entre Seattle et Vancouver.
Troisièmement, j'espère que votre comité appuiera le concept de train à grande vitesse pour le corridor Cascadia, dont il a été discuté et qui est planifié depuis près de 20 ans, et qu'il poussera Ottawa à appuyer une stratégie coordonnée englobant tous les intervenants de la Colombie-Britannique, y compris, particulièrement et surtout, nos transporteurs de marchandises, pour que nous puissions appuyer l'expansion du service ferroviaire de passagers sans qu'il y ait de répercussion négative sur le transport des marchandises.
Enfin, je pense que nous devrions essayer de nous entendre pour recommander à Ottawa d'agir dès que possible, en collaboration avec la Colombie-Britannique, les compagnies ferroviaires concernées et les municipalités, pour faire face aux besoins de longue date d'un nouvel investissement dans l'infrastructure ferroviaire de la Colombie-Britannique dans le corridor nord-sud. Un nouvel investissement est particulièrement important pour la traversée du pont pivotant du fleuve Fraser, qui a 105 ans, qui réduit la vitesse des trains à quelque chose comme 10 ou 15 milles à l'heure, pour traverser le fleuve Fraser. C'est un important goulot d'étranglement, mais qui est maintenant nécessaire au transport des marchandises.
Je ne suis pas un expert en matière ferroviaire. Je serais toutefois ravi de répondre à vos questions à propos des autres mesures rentables proposées par les Américains pour faciliter la circulation et, à notre avis, ouvrir la voie à des investissements beaucoup plus importants.
Je vous remercie de m'avoir invité à comparaître aujourd'hui.