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Monsieur Chong, mesdames et messieurs les membres du comité, bonjour.
C'est un plaisir d'être ici. Beaucoup de temps s'est écoulé depuis notre dernière comparution au comité. Nous sommes heureux de vous aider dans votre étude de la situation économique des communautés de langue officielle en situation minoritaire.
Pour les nouveaux membres du comité, le QCGN est un organisme à but non lucratif qui est un centre d'expertise fondée sur des données probantes, dont l'action collective est axée sur des enjeux stratégiques ayant une incidence sur le développement et la vitalité des communautés minoritaires d'expression anglaise au Canada, que l'on qualifie collectivement de communauté anglophone du Québec.
Les 41 membres du QCGN sont des groupes communautaires sans but lucratif qui, pour la plupart, desservent directement les membres de notre communauté dans l'ensemble de la province. Certains de nos membres offrent des services généraux à l'échelle régionale, tandis que d'autres oeuvrent dans des secteurs précis comme les arts et la culture, la santé, etc.
Avec plus d'un million de personnes dont la première langue officielle parlée est l'anglais, la communauté anglophone du Québec est la plus importante communauté minoritaire de langue officielle au Canada. Même si 84 % des membres de notre communauté habitent dans la région métropolitaine de recensement de Montréal, plus de 210 000 membres de la communauté habitent d'autres régions du Québec.
Comparativement à d'autres groupes de Canadiens d'expression anglaise, notre communauté a un taux de bilinguisme élevé: 66 % ont indiqué connaître le français et l'anglais lors du recensement de 2011. Ce pourcentage dépasse 80 % chez les jeunes anglophones, ce qui témoigne des efforts de la communauté pour s'assurer que nos enfants peuvent vivre et travailler en français au Québec.
Ces chiffres démontrent aussi que plus de 360 000 membres de notre communauté ne connaissent pas le français et 20 000 jeunes de langue maternelle anglaise de 18 à 24 ans sont incapables de travailler en français au Québec. Vingt mille personnes, c'est tout de même assez élevé.
Cela a d'importantes répercussions sur les plans de l'économie et de l'employabilité. Nous exhortons le comité à inviter des organismes communautaires du domaine de l'employabilité et de l'entrepreneuriat comme Youth Employment Services pour obtenir des renseignements détaillés sur les problèmes auxquels sont confrontés les jeunes anglophones du Québec.
YES pourra aussi vous renseigner sur les problèmes auxquels sont confrontés les jeunes anglophones de l'extérieur du Québec et de l'étranger qui viennent au Québec pour leurs études et qui souhaitent ardemment s'y établir et fonder une famille, mais qui doivent aller ailleurs pour des raisons liées à l'emploi.
La Corporation d'employabilité et de développement économique communautaire, la CEDEC, est un autre organisme important de la communauté qui a l'expérience nécessaire pour vous aider dans votre étude.
La prospérité économique est l'une des six priorités cernées par la communauté anglophone du Québec dans son plan de développement communautaire de 2012-2017, que nous avons déjà présenté au comité. Le développement économique et l'employabilité font partie intégrante du plan et constituent certainement des éléments essentiels à la vitalité de n'importe quelle communauté.
Le gouvernement du Canada a consacré d'importantes ressources pour appuyer le développement économique de notre communauté, comme ce fut le cas récemment dans la feuille de route pour 2013-2018. Le Fonds d'habilitation d'Emploi et Développement social Canada, l'initiative sur l'alphabétisation et les compétences essentielles dans les CLOSM, l'initiative de partenariats sociaux dans les CLOSM et le programme de Développement économique Canada pour les régions du Québec, au montant de 10,2 millions de dollars, sont des exemples d'investissements importants qui aident directement les membres de notre communauté.
Les investissements du gouvernement du Canada pour le développement économique de communauté sont mis à profit pour améliorer la vitalité de notre communauté. Toutefois, nous estimons qu'il est possible de les utiliser de façon plus efficace, et nous aborderons cette question un peu plus tard.
Nous aimerions souligner les réussites d'organismes communautaires régionaux comme le Conseil des anglophones madelinots — le CAMI — et la Coasters' Association, sur la Basse-Côte-Nord. La création d'un réseau coopératif de partenaires visant le développement économique des collectivités a permis à ces groupes d'établir un mécanisme de coordination efficace. Nous encourageons le comité à les inviter à témoigner dans le cadre de cette étude. Ils pourront vous faire part de pratiques exemplaires et de récits captivants.
Le comité pourrait songer à inviter l'Alliance québécoise d'apprentissage essentiel qui collabore notamment avec des partenaires des secteurs publics et privés pour aider de jeunes Autochtones du Nord du Québec à obtenir leur licence de pilote professionnel. C'est une initiative tout à fait excitante qui témoigne du rôle concret que peuvent jouer les groupes communautaires dans les initiatives de développement économique et d'employabilité.
En janvier, le QCGN a participé à une excellente discussion entre EDSC et des chefs de file de notre communauté. Beaucoup de sujets liés à l'étude actuelle du comité ont été abordés et nous aimerions en souligner quelques aspects.
Premièrement, le QCGN suit toujours de très près l'évolution du Fonds d'habilitation, surtout à la suite des recommandations découlant des conclusions de l'évaluation sommative du fonds au sujet de la pertinence et du rendement du programme et sur les opérations des comités nationaux qui gèrent les ressources. Les pratiques exemplaires utilisées sur le terrain démontrent que les efforts en matière de développement économique et d'employabilité sont plus efficaces lorsqu'ils sont coordonnés aux efforts généraux d'une collectivité et menés de concert avec elle. Même si de tels liens existent, ils ne sont nullement universels. De plus, nous reconnaissons qu'il faut améliorer le lien entre le Fonds d'habitation, le partenaire chargé de mise en oeuvre et les priorités et les stratégies habilitantes de la communauté. Par exemple, on a entrepris la consultation publique pour le Plan canadien de développement économique des CLOSM, ou PCDÉ. Je m'excuse, on dirait de la soupe à l'alphabet. Le PCDÉ est une importante initiative stratégique qui touche un aspect essentiel de la vitalité de notre communauté et il pourrait avoir des effets considérables dans plusieurs secteurs. Nous devons veiller à ce que le lien entre le PCDÉ et notre plan de développement communautaire soit pris en compte durant la planification et la mise en oeuvre de cette consultation.
Deuxièmement, le QCGN s'est fait le champion du financement social auprès du comité lors de son étude d'évaluation de la feuille de route précédente. Nous sommes très heureux de l'initiative de partenariats sociaux prévue dans la feuille de route actuelle. Nous avons hâte de collaborer, avec EDSC, à la mise en oeuvre du programme dans notre communauté. Le financement social est une idée à la fois complexe et prometteuse qui pourrait redéfinir la relation entre le secteur public et le secteur communautaire. Lorsque nous aurons acquis une expertise par rapport à cette idée, le comité pourrait envisager une étude sur le financement social au sein des CLOSM.
Troisièmement, le développement du marché du travail est d'actualité. Nous appuyons sans réserve la prestation de la Subvention canadienne pour l'emploi par Service Canada, puisqu'il s'agit de la seule façon de garantir que ces services seront accessibles en anglais aux membres de notre communauté au Québec.
En terminant, soulignons que les économies prospères sont liées entre elles. On ne peut étudier la situation économique de nos communautés sans comprendre les économies du Québec et du Canada. Lorsque le Québec prospère, nous prospérons, et l'inverse est également vrai. Notre communauté fait partie intégrante des économies du Canada et du Québec et nous cherchons toujours des données qui nous aident à démontrer notre contribution à cet égard.
Merci. C'est avec plaisir que nous répondrons à vos questions.
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Merci, monsieur le président.
Je souhaite la bienvenue à Mme Martin-Laforge, que je connais depuis plusieurs années, et à M. Thompson.
[Traduction]
Lorsque le comité a décidé d'entreprendre cette étude, j'étais très heureux. Le gouvernement pourra dire que nous n'avons pas refusé. Je pense que tout est lié. Au pays, nous avons des communautés minoritaires. Nous parlons de culture et de toutes sortes de choses. Nous disons qu'il faut aller à l'école et préserver sa langue, mais en fin de compte, tout le monde veut un emploi. Je pense que cette étude est importante. Je tiens à vous remercier de comparaître au comité pour nous permettre de discuter de divers enjeux.
Par exemple, qu'en est-il actuellement dans votre communauté? Par rapport à Montréal, on pourrait dire qu'il y a une grande différence entre les anglophones de Montréal et ceux de Rivière-au-Renard, ou Fox River. Je me souviens que lorsque j'allais à Rivière-au-Renard, au Québec, les gens parlaient de Fox River et l'on pouvait voir la présence anglophone là-bas. Toutefois, je pense que l'on pourrait comparer cet endroit et une minorité francophone en Alberta, par exemple, ou une minorité francophone en Colombie-Britannique ou en Nouvelle-Écosse.
À votre avis, que devrait faire le gouvernement dans ces régions pour aider les jeunes à y rester et à trouver un emploi? Que devrait-il faire pour favoriser le développement économique pour que les jeunes puissent être à l'aise, avoir un emploi et rester dans leur région? Votre groupe est-il près des gens sur le terrain? Trouvez-vous que le gouvernement fait ce qu'il faut pour ces gens?
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Permettez-moi d'abord de dire que Stephen Thompson, notre directeur de la politique stratégique, interviendra de temps à autre en donnant des statistiques en réponse aux questions.
Chez les jeunes et chez les Québécois anglophones en général, le taux de chômage est élevé. Cela ne concerne pas seulement les régions; il est aussi élevé à Montréal. On dit souvent que Montréal est en bonne posture, mais pour les jeunes, lorsqu'il est question des jeunes, il y a un grave problème de chômage et de sous-emploi. Nous pourrons parler de statistiques dans un instant.
Les régions du Québec s'intéressent vivement aux questions liées à la rétention de la main-d'oeuvre. On ne peut attacher nos jeunes à une table au sous-sol, vous savez. Au Québec, comme dans les autres CLOSM, les parents s'attendent à ce que leurs enfants aillent à l'école ailleurs, doivent poursuivre leurs études ailleurs et peut-être y trouver un emploi. Ce dont les gens des régions ont besoin, c'est d'avoir la possibilité d'y trouver un emploi. Il faut des emplois dans les régions. Il faut de bons emplois, des emplois prometteurs.
Je pense que vous aurez des exemples de ce qui se fait en région si vous rencontrez les gens de la Côte-Nord. Dans cette région, près du Labrador, il y a un petit groupe qui s'affaire à créer des emplois. C'est lié aux baies; ce sont des activités de création d'emploi novatrices. Il en va de même pour le CAMI.
En région, les gens ont un point de vue différent sur la rétention des jeunes et de la population en général. Ils savent qu'ils doivent travailler avec la communauté majoritaire pour créer des emplois dans la région, pas seulement pour les anglophones, mais pour l'ensemble de la région. Ils travaillent ensemble. Dans les régions, il y a de très bonnes pratiques qui démontrent de quelle façon une municipalité peut travailler à la création d'emplois de concert avec la communauté majoritaire et la communauté minoritaire. Les gens doivent parler français et... Les gens trouvent une solution. En Beauce, les gens doivent aussi parler anglais.
Au Québec, ce que nous faisons dans les régions par rapport à l'emploi, à l'employabilité et à l'entrepreneuriat est unique. À mon avis, l'un des principaux aspects sur lesquels les régions sont axées, c'est la création d'emplois par l'entrepreneuriat.
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Je crois que Stephen a des statistiques. En général, les gens de notre réseau scolaire et de notre système d'orientation professionnelle doivent s'assurer que les jeunes anglophones ont le sentiment d'avoir un avenir au Québec et qu'ils feront partie du Québec. Bien entendu, l'emploi est un aspect. Toutefois, il faut aussi se sentir accueilli, avoir le sentiment que l'on peut s'y établir, y gagner sa vie et être reconnu comme un membre important de la communauté. Cela commence tôt, comme on le voit dans une petite collectivité comme Thetford Mines, où la communauté anglophone est une partie importante de la communauté majoritaire, où l'on trouve une bonne interaction entre la population majoritaire et la communauté minoritaire. Il y a une excellente école qui offre de bons services. Il y a une équipe de basketball; c'est une école où les enfants peuvent s'épanouir.
Évidemment, il n'y a pas d'université à Thetford Mines. Il faut s'en rapprocher, et les programmes doivent être offerts. Les jeunes doivent croire qu'en revenant... J'utilise encore Thetford Mines, puisqu'on y trouve un petit groupe qui s'appelle la Corporation de développement de la communauté d'expression anglaise de Mégantic, et ces gens sont préoccupés par la rétention des jeunes. Ensuite, ils diront qu'ils ne pourront pas les retenir, mais nous ferons en sorte qu'ils seront si attachés à la communauté et au milieu qu'ils partiront en voulant revenir. Les partenariats avec les municipalités visant la création d'emplois dans ces régions sont importants.
Monsieur Gourde, les collectivités agissent à l'unisson pour s'assurer que leurs jeunes — pas seulement les anglophones, mais aussi les jeunes francophones — reviennent dans les régions.
[Français]
Les régions se vident. Il faut trouver, pour les anglophones et les francophones, des moyens d'éviter qu'elles ne se vident.
[Traduction]
Stephen, vouliez-vous donner des statistiques?
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Je pense que nous n'avons tout simplement pas assez de temps pour répondre à cette question; c'est très complexe.
Regardons dans quels secteurs travaillent les anglophones. Au Québec, les anglophones sont surreprésentés dans les postes de gestion; le milieu des affaires, des finances et de l'administration; le secteur des sciences naturelles et appliquées et les métiers connexes; les arts et la culture et, enfin, dans le secteur des ventes et des services. Ce sont des emplois en milieu urbain, les emplois qui se situent principalement à Montréal. Voilà où se trouvent les perspectives économiques.
Dans quels secteurs de la main-d'oeuvre les anglophones sont-ils sous-représentés? Métiers, transport et machinerie; ressources naturelles, agriculture et production connexe; fabrication et services d'utilité publique. Donc, les anglophones n'ont pas la formation nécessaire pour obtenir un emploi dans les entreprises de taille moyenne du secteur de la fabrication que l'on est susceptible de trouver en région. La formation des anglophones correspond aux emplois en milieu urbain. Pourquoi? C'est en partie lié à la tradition. De plus, en raison du mécanisme de financement que l'on voit dans toutes les provinces — dans toutes les administrations —, le réseau scolaire anglophone, le réseau scolaire minoritaire, ne reçoit pas les mêmes ressources que le réseau scolaire de la majorité pour ce genre de formation professionnelle. Ce n'est pas équitable.
Le troisième élément — qui est prouvé —, c'est la discrimination systémique contre les anglophones au sein du mouvement syndical au Québec. C'est un fait. Par conséquent, là où il y a des syndicats, il y a moins d'anglophones. Il y a plus d'anglophones pour les emplois en milieu urbain. Comment peut-on retenir les anglophones dans les régions? Il faut leur donner la formation qui correspond aux emplois et aux perspectives économiques que l'on trouve en région. Je ne considère pas vraiment cela comme un problème fédéral, mais plutôt comme un problème provincial.
Madame Martin-Laforge, vous avez bien fait de parler de la région de Thetford, qui est située à 45 minutes de ma circonscription. Je connais beaucoup de gens de ma région vivant dans une famille anglophone qui ont eu la chance de faire leur primaire et leur secondaire dans la région de Thetford. Cela a été un réel avantage pour eux.
Aujourd'hui, il y a des professeurs d'anglais dans les écoles francophones qui sont issus de ces milieux. Il y a aussi des représentants de machinerie agricole qui desservent de grands territoires. Étant donné qu'ils étaient relativement bons ou très bons en anglais, ils pouvaient facilement suivre leur formation postsecondaire dans d'autres provinces, voire dans des États américains, et transmettre ensuite cette formation aux francophones du Québec.
Il ne faut pas se le cacher: le marché international est très anglophone. Dans notre région, nous avons besoin de jeunes maîtrisant très bien l'anglais afin qu'ils puissent nous transmettre leurs connaissances acquises dans d'autres parties du monde.
Monsieur Thompson, j'ai apprécié le fait que vous ayez souligné cet aspect. Notre comité prend bonne note de la façon dont cette formation doit être orientée afin de garder nos jeunes en région. Ces jeunes sont notre richesse et notre avenir.
Je suis très sensible au fait que nos jeunes apprennent les deux langues officielles. Je suis père de cinq enfants qui sont tous en train de faire des études postsecondaires. Il est très intéressant de voir nos jeunes faire leurs choix de vie. Il est très important de les garder dans notre région. Ils doivent avoir les meilleurs outils possible qui leur procureront une meilleure qualité de vie et amélioreront la vie communautaire de nos régions.
Je vous remercie de votre témoignage.
Je laisse maintenant à Mme St-Denis la chance de s'exprimer.
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Il y en a. Pour reprendre avec prudence ce que j'ai dit, les anglophones du Québec ont un revenu médian moins élevé. La question du revenu médian et du revenu moyen fait toujours l'objet de controverse, mais le revenu médian, c'est le terme accepté, est moins élevé chez les anglophones. Le taux de pauvreté est plus élevé dans la communauté anglophone. C'est tout à fait vrai. Le risque qu'un anglophone se retrouve sans emploi est 5 % plus élevé.
Cela dit, il y a peut-être lieu d'espérer. Les anglophones sont 2 % plus susceptibles de travailler à leur compte. C'est probablement la même chose pour les autres minorités en général, car elles ont tendance à être très entreprenantes. Les membres de ces minorités n'ont pas accès aux débouchés économiques de la majorité, et ils génèrent donc eux-mêmes des revenus en se servant de leurs relations au sein de leur communauté et ailleurs. Il y a donc sans aucun doute de bonnes raisons de soutenir l'entreprenariat dans ces communautés.
Dans notre mémoire, nous parlons de deux organisations remarquables: YES, les Youth Employment Services établis à Montréal, et CEDEC, la Community Economic Development and Employability Corporation. Nous recommandons à votre comité d'inviter leurs représentants à témoigner.
Si vous désirez obtenir de plus amples renseignements, madame St-Denis, nous avons des études sur la pauvreté dans la communauté anglophone que nous pourrions remettre à l'analyste.
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La subvention canadienne pour l'emploi est un excellent exemple de mesure que vous avez prise pour encourager les jeunes Canadiens du Québec, car elle leur permet d'obtenir les services en anglais dont ils ont besoin et de recevoir une formation technique. Nous avons parlé du genre de postes que les anglophones occupent. Ils ont tendance à ne pas être représentés dans les corps de métier. Si vous leur donnez des débouchés, ils pourront trouver un emploi dans leur région, dans leur province, plutôt que d'aller ailleurs.
Qu'on ne s'y trompe pas, la migration est une activité économique. D'autres facteurs peuvent influencer la décision d'une personne, mais les gens se déplacent à la recherche de débouchés. D'excellentes études ont été faites sur la question, et nous pouvons certainement en faire part aux analystes. Ce qui est intéressant avec la migration, c'est que celui qui part a tendance à s'en sortir mieux que ceux qu'il a laissés derrière, mais également mieux que ses nouveaux compatriotes. Les migrants économiques au Canada sont donc...
Par contre, ceux qui retournent chez eux en payent le prix, peu importe de quel endroit il s'agit. En général, un Ontarien qui se rend en Alberta et qui revient ensuite chez lui est statistiquement plus susceptible d'avoir moins de succès que ceux qui sont restés. Autrement dit, partir comporte un incitatif financier, et c'est l'inverse quand il s'agit de revenir. Pour soutenir l'économie et l'emploi, il est donc très important dès le départ d'empêcher les gens de partir.
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Vous avez demandé ce que peut faire le gouvernement fédéral. Il y a les programmes, mais également l'idée au Québec — et nous en avons parlé dans notre déclaration liminaire — d'un plan de développement économique des communautés de langue officielle en situation minoritaire. En 2008, le QCGN, avec d'importants intervenants, a préparé un rapport sur le développement économique du Québec. Je pourrais en remettre une copie à votre comité. À l'époque, nous avons envisagé une approche coordonnée pour favoriser le développement économique de la province.
Nous l'avions appelée le « Quebec Economic Development Council ». C'était une étude, et nous vous en remettrons une copie. Je pense qu'une des choses importantes que nous essayons maintenant de faire est de préparer, avec le RDÉE et la CEDEC, un plan pour les communautés de langue officielle en situation minoritaire. Au Québec, nous avons désespérément besoin d'un plan de développement économique pour ces communautés afin de réunir les intervenants et ainsi mieux conseiller le gouvernement fédéral et la province dans leurs choix de programmes. Nous devons travailler ensemble.
Et savez-vous quoi? Un de nos groupes, la Voice of English-speaking Québec, dans la ville de Québec, sera ici demain pour faire part au Sénat des concepts de leur programme pour les nouveaux arrivants et du lien avec les immigrants et les migrants. Une foule de personnes se rendent à Québec pour décrocher un emploi dans ce genre d'industrie. Les anglophones du reste du Canada ou d'ailleurs qui s'y rendent veulent trouver dans la ville une communauté qui peut les aider à s'installer avec leurs familles.
Il est donc question d'emplois, mais aussi du soutien qu'une communauté peut offrir pour favoriser le développement économique d'une région. C'est une sorte de conséquence de ce qui est important et de la façon dont nous pouvons aider les collectivités à prospérer et à créer des emplois à l'aide de ces programmes pour les nouveaux arrivants. Ces choses sont toutes liées entre elles.
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Merci beaucoup de comparaître devant notre comité. C'est toujours avec plaisir que nous discutons avec vous.
Je m'intéresse à la situation économique des communautés linguistiques minoritaires du Canada, notamment sur le marché du travail. Savez-vous si nous avons fait des études sur la question? Je ne parle pas seulement des communautés anglophones, mais aussi des minorités francophones.
C'est la première étape. Vous devez trouver les causes du problème de ces communautés. J'ai vu des millions de programmes, des millions de beaux dollars versés à gauche, à droite et au centre, mais à quoi sommes-nous confrontés dans ce cas-ci? Par exemple, en quoi la situation des minorités linguistiques est-elle différente de celle de la majorité?
Quelle est la situation, et que pouvons-nous faire pour attirer les entreprises et, par exemple, rendre ces minorités aussi prospères que la majorité? En supposant qu'elles le sont moins; je n'en sais rien. On ne peut pas trouver de solution quand on ne sait pas quelles sont les causes du problème.
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Vous posez une excellente question, et nous nous la posons aussi. Actuellement, ceux qui sont probablement les plus susceptibles de connaître la réponse sont les gens du YES et de la CEDEC, soit deux organismes que nous avons déjà mentionnés.
Cela étant dit, nous venons tout juste de terminer en janvier des consultations très utiles en collaboration avec Emploi et développement social Canada, ou EDSC. Nous avons actuellement l'impression que les gens d’EDSC se posent exactement les mêmes questions que vous. Pourquoi faisons-nous tout cela? Sur quels aspects devons-nous nous attarder? Quels sont les éléments qui fonctionnent et ceux qui ne fonctionnent pas? Comment améliorer ce que nous faisons?
Cependant, ces personnes se posent les questions à l’échelle nationale. Du point de vue des gens chargés des politiques, le problème est que les données sont rarement disponibles en fonction de la langue. Les responsables sont parfaitement en mesure d’extraire les données qui correspondent à une région précise, mais ce n’est pas possible de le faire en fonction de la langue. Nous demandons sans cesse à des partenaires comme EDSC... La SCHL et une autre source de connaissances et de recherches.
Au sein du gouvernement, il y a bon nombre de petits et de grands organismes qui disposent de renseignements, mais il faut pouvoir extraire l'information en fonction de la langue. Alors, nous pourrons commencer à répondre aux questions, parce que nous nous posons les mêmes questions que vous.
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On peut certainement constater une croissance de l’emploi ou une réduction du sous-emploi ou de la pauvreté, par exemple, mais il est très difficile d'en attribuer le mérite à des programmes.
D'après nous, si nous avons une approche coordonnée et que la communauté anglophone du Québec décide ensemble de lancer une initiative concernant les jeunes ou l'entrepreneuriat, par exemple, nous pouvons alors élaborer nos propres indicateurs de réussite.
Les gouvernements et les citoyens aimeraient être en mesure de dire que nous avons fait une initiative qui a donné tels résultats. C'est très difficile. Au sein de la communauté, nous ne disposons évidemment pas de ressources suffisantes pour établir un lien direct entre ce que nous avons fait et ce qui s'est passé. Par contre, du moins parmi nos 41 groupes, nous commençons à entendre dire que des gens ont fait telle ou telle chose et que les jeunes restent.
Voici un exemple. Le CASA dans la région de Gaspé s'inquiète énormément du nombre de jeunes qui ne s'identifient pas à la Gaspésie. L'organisme pense que les gens qui ne s'identifient pas à la Gaspésie risquent de partir et de se trouver un emploi ailleurs. Ces personnes ne se poseront même pas la question; elles ne se chercheront pas d'emploi. Elles ne s'y établiront pas pour commencer leur carrière et fonder une famille. L'organisme se penche donc sur les questions identitaires. Les responsables cherchent à rendre plus heureux les jeunes Gaspésiens et à faire en sorte que ces derniers s'identifient plus et contribuent davantage à leur région.
On pourrait dire que cela n'a aucun rapport avec le développement économique, mais c'est le cas, parce que l'organisme constate que plus de jeunes gaspésiens souhaitent demeurer au Québec, trouver un emploi à Gaspé et tirer profit des occasions au Québec.
Il y a quelques années, les responsables de l'organisme ont demandé aux gens du YES d'élaborer un programme, et c’est celui qui est actuellement utilisé en Gaspésie.
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De façon générale, nous voudrions que les ministères aient peut-être accès à des fonds destinés expressément aux communautés de langue officielle en situation minoritaire. Quand nous participons à des concours dans la vaste gamme des programmes réguliers, il faut que les bureaucrates comprennent qu'il existe une communauté anglophone, qui est entourée de mythes. Ainsi, quand le personnel d'un ministère ne connaît pas en profondeur la communauté — je dirais la communauté francophone également, mais certainement la nôtre, qui fait l'objet de bien des mythes à l'heure actuelle —, quand nous présentons un projet,
[Français]
ça ne passe pas la rampe
[Traduction]
parce qu'il n'est pas ciblé.
Je pense que le gouvernement fédéral doit envisager d'affecter un financement qui cible davantage les communautés de langue officielle en situation minoritaire; par exemple, le Programme Nouveaux Horizons d'EDSC n'a pas de financement s'adressant aux communautés de langue officielle en situation minoritaire. Nous obtenons du financement, mais il n'y a pas de cible. EDSC a toutefois un secrétariat des langues officielles ou un champion quelconque.
Quand les ministères nous comprennent davantage, soit ils obtiennent l'approbation d'un financement ciblant les communautés de langue officielle en situation minoritaire, soit leur personnel est conscient qu'il faut prendre des mesures particulières à l'égard des communautés.
Comme ce sont des programmes nationaux, il est difficile de présenter un programme et de le faire accepter.
:
Je ne pense pas qu'il y a énormément de gens qui viennent à Ottawa pour demander moins d'argent. Les gens considèrent que le gouvernement est un banquier. Or, le financement social repose sur le principe selon lequel le gouvernement est un partenaire qui aide la société civile à obtenir un rendement social de ses investissements. Le financement social est la spécialité d'EDSC. C'est assurément un concept bien développé en Grande-Bretagne, en Australie et, dans une certaine mesure, aux États-Unis. Il se développe au Canada, mais il n'y est encore qu'au stade primaire. Ses cadres législatifs et réglementaires sont loin d'être en place pour permettre sa mise en oeuvre.
Cela dit, la feuille de route comprend 4,1 millions de dollars sur cinq ans pour les communautés de langue officielle en situation minoritaire afin de travailler avec EDSC dans le cadre d'initiatives de financement social afin de voir ce qui peut être fait. C'est un terme vaste qui veut dire bien des choses. De façon générale, quand on fait des investissements, on cherche à obtenir un rendement monétaire, alors que dans le cas du financement social, on finance un projet pour obtenir un rendement social de son investissement.
Par exemple, l'agrandissement des locaux du groupe communautaire de la MCDC, à Thetford Mines, pourrait constituer un projet de financement social. Si le groupe achetait son immeuble et en devenait propriétaire afin d'agrandir ses locaux et de les louer à d'autres groupes communautaires, il en ferait un actif. Il pourrait en tirer un profit qu'il pourrait réinvestir dans la communauté. Ce serait une opération à but lucratif de la part d'une organisation sans but lucratif. Voilà une idée de financement social.
Le fait de payer pour du rendement... la question posée concernait la manière dont on évalue la réussite. Disons qu'on veut réduire de 1 % le chômage chez les jeunes dans une région donnée et que si on y parvient, le partenaire public accordera une certaine somme. Le secteur communautaire s'investirait dans l'entreprise, et s'il réussit à réduire le chômage des jeunes d'un certain pourcentage, il sera payé. C'est une autre idée de financement social.
Le concept nous enthousiasme beaucoup. Il a donné d'excellents résultats dans d'autres provinces. EDSC est l'expert en la matière.
:
Merci, monsieur le président.
Monsieur Thompson, vous avez dit que le Québec était le seul endroit où la communauté anglophone n'avait pas de relation avec la province. Je suis obligé de revenir là-dessus, car je suis en désaccord avec vous. Il faut regarder la situation des francophones dans le reste du Canada. Dans plusieurs endroits au pays, la relation n'est pas là non plus.
Prenons l'Alberta, par exemple.
[Traduction]
Quand une entreprise publie par l'entremise du gouvernement fédéral une offre d'emploi où figurent quatre langues, mais pas le français, et qu'elle va jusqu'à dire qu'il n'y a pas de problème même si les candidats ne parlent pas français, parce que les employés travaillent en groupe... Dans ma région, certains habitants se présentent là-bas pour travailler et se font répondre que Clément est un nom trop français pour travailler là. Je peux vous dire qu'il y a un gros problème dans ce pays, et pas seulement au Québec. Je voulais simplement rectifier les faits.
:
D'accord, et je ne veux pas semer la bisbille à ce sujet, mais je veux que tout soit clair. On dirait qu'on laisse entendre que le Québec ne fait pas... J'observe la situation à l'échelle du pays, et je vous dis que c'est honteux. C'est incroyable. C'est discriminatoire. C'est tout simplement incroyable, et j'espère le prouver un jour, même s'il faut que je demande au commissaire aux langues officielles de lancer une étude à ce sujet. C'est comme si on disait aux francophones de l'Alberta qu'ils ne peuvent pas travailler s'ils parlent français. Si la langue employée ici est l'anglais, les gens d'autres pays qui se font embaucher peuvent parler leur langue au travail, alors que les francophones ne peuvent le faire. Un jour, nous le prouverons.
La question que je veux soulever ici concerne la formation professionnelle, dont M. Williamson a parlé. Il était heureux, mais comment pourrions-nous l'être quand toutes les provinces, et pas seulement le Québec, affirment que le nouveau plan n'est pas bon parce que le programme de formation vise en fait à verser de l'argent aux grandes entreprises, qui obtiennent les fonds pour former leurs employés. Mais qu'en est-il de ceux qui vivent dans les communautés dont nous parlons? Qu'advient-il de celui qui, dans son sous-sol, voudrait trouver un emploi et de ceux qui, dans les communautés, voudraient créer des emplois et obtenir le soutien du gouvernement pour former les gens dans la communauté, où les petites entreprises ne disposent pas des 5 000 $ nécessaires pour embaucher les 20 personnes qu'elles veulent engager?
Voilà ce qui ne va pas dans ce programme. On enlève l'argent de la communauté, parce que ce n'est pas une responsabilité du gouvernement fédéral. Il ne lui incombe pas d'offrir la formation, mais quelqu'un doit s'en charger.
:
Si nous voulons devenir très techniques à ce sujet, sachez que les motions de régie interne stipulent qu'il y a un ordre d'intervention, lequel, comme vous le savez, figure sur cette liste. Le président a toutefois le pouvoir discrétionnaire d'accorder la parole à quelqu'un sans égard à l'ordre des partis des membres sur la liste.
Au cours des deux ou trois dernières minutes, j'ai pensé me montrer généreux en accordant la parole aux membres qui pourraient vouloir poser une question ou demander un éclaircissement aux témoins. Voilà pourquoi j'ai donné la parole à Mme St-Denis et à M. Nicholls. Mais si les gens commencent à abuser de ma générosité et...
Une voix: Je ne pense pas que ce soit le cas, monsieur.
Le président:... à poser des questions pointilleuses au sujet de l'ordre, alors nous nous en tiendrons strictement à la liste et je commencerai à interrompre les intervenants exactement quand leur temps est écoulé, que ce soit après sept minutes au premier tour ou cinq minutes au cours du tour suivant. Je commencerai à interrompre les témoins exactement sept minutes après le début de leur exposé.
Je me prévaudrai du pouvoir discrétionnaire qui m'est conféré à titre de président pour tenter de faire fonctionner le comité, et j'espère que nous pouvons tous travailler ensemble afin d'y parvenir. Je demanderais aux membres des deux côtés de faire attention de ne pas commencer à mesurer la durée des intervenants à la seconde près.
Je vous prierais donc d'utiliser votre temps de façon responsable. J'accorderai la parole à M. Nicholls pour qu'il pose une brève question.
Monsieur Godin.