:
Monsieur le président, membres du comité, je suis Michel Robillard, vice-président du Réseau pour le développement de l'alphabétisme et des compétences, le RESDAC. Je suis accompagné de M. Normand Lévesque, directeur général de l'organisation.
Je vous remercie de cette invitation à comparaître devant le Comité permanent des langues officielles afin de vous faire part de notre point de vue dans le cadre de votre étude sur la situation économique des communautés de langue officielle en situation minoritaire.
Depuis plus de 20 ans, le RESDAC mobilise les partenaires stratégiques autour d'un projet de société qui vise à améliorer le niveau d'alphabétisme et de compétences des adultes francophones du Canada, qui peuvent ainsi participer pleinement à la vie civique, économique, sociale et culturelle de leur communauté, et contribuer à leur épanouissement et à leur développement.
Comme le disait Angel Gurria, secrétaire général de l'OCDE, les compétences sont devenues la monnaie mondiale du XXIe siècle. Les compétences transforment la vie et tirent les économies vers le haut, affirme l'OCDE. Pour ce faire, il est donc impératif que l'ensemble de la population d'un pays, de même que sa main-d'oeuvre, possède des compétences pour la vie.
L'OCDE souligne que nos modes de vie et de travail ont radicalement changé, tout comme le bagage de compétences requises pour participer pleinement à nos sociétés et à nos économies toujours plus axées sur le savoir.
Au Canada, qu'en est-il du développement des compétences des adultes francophones afin de soutenir l'emploi et la croissance de nos communautés partout au pays?
Il y a 10 ans, la situation du Canada sur le plan des compétences essentielles était clairement problématique. La publication, en octobre 2013, des résultats du Programme pour l'évaluation internationale des compétences des adultes, ou PEICA, indiquait tout aussi clairement que le problème n'était pas réglé. Serions-nous sur la mauvaise voie?
Le rendement du Canada est peu réjouissant et sa situation est problématique. Le Canada se situe dans la moyenne de l'OCDE en matière de littératie. Par contre, il compte une plus grande proportion de personnes aux niveaux les plus élevés, mais également une plus grande proportion de personnes aux niveaux les plus faibles. Le Canada se classe sous la moyenne de l'OCDE en matière de numératie. La proportion de Canadiens aux niveaux les plus faibles dans ce domaine est plus élevée. Le Canada se classe au-dessus de la moyenne de l'OCDE en ce qui a trait à la résolution de problèmes dans un environnement technologique. Cependant, 17 % des Canadiens n'ont pas été évalués parce que 11 % d'entre eux n'avaient pas les compétences pour être évalués à l'ordinateur et que 6 % ont préféré ne pas utiliser l'ordinateur.
Comparativement à la moyenne de l'OCDE, le Canada compte une plus grande proportion d'adultes qui se situent aux niveaux de compétences les plus faibles dans les trois domaines visés.
Fait important et inquiétant à connaître, les populations minoritaires de langue officielle ont tendance à afficher un rendement plus faible que celui des populations de langue officielle de la majorité, à l'exception des anglophones du Québec, mais les différences varient d'une province à l'autre.
Si les compétences sont devenues la monnaie mondiale du XXIe siècle, notre banque est en faillite et notre marge de crédit est sérieusement menacée par les agences de cotation, n'est-ce pas?
Des réponses innovantes et énergiques sont maintenant nécessaires. L'acquisition des compétences du XXIe siècle pour le XXIe siècle constituera un défi complexe qui nous obligera à agir avec tous les partenaires. Il y a urgence en la demeure. De nouvelles exigences apparaissent dans le domaine de la formation, de l'emploi et du développement économique. Plus que jamais, il nous faut concevoir des politiques audacieuses et novatrices.
Si les enjeux des communautés de langue officielle en situation minoritaire en matière de développement des compétences s'apparentent à ceux de la majorité des adultes canadiens, elles sont confrontées à d'autres types d'obstacles. Les résultats de l'enquête de 2003 et ceux du PEICA de 2013 le démontrent clairement. Les compétences liées à l'alphabétisme sont une assise à l'apprentissage de toutes les autres compétences. Elles sont également à la base des services de formation offerts aux adultes qui leur permettent d'apprendre, de travailler et de contribuer au développement économique des communautés. La réalité canadienne ne peut se satisfaire d'une approche appliquée de manière uniforme en matière de politiques et de programmes destinés à améliorer le niveau d'alphabétisme et de développement des compétences des adultes francophones.
Les avancées en matière d'innovation, de recherche, de développement d'expertise, de mobilisation et d'implication des communautés sont présentement fragilisées par l'absence d'une vision claire et de financement adéquat pour les organisations et institutions qui se consacrent au développement des compétences. Il nous faut agir rapidement de concert avec tous les partenaires.
La présence de réseaux comme le RESDAC qui sont actifs sur tout le territoire canadien, de même que des acteurs clés que sont les gouvernements provinciaux et territoriaux, les agences économiques et les centres de formation, est un gage de réussite. Le gouvernement fédéral doit le reconnaître et appuyer concrètement ces pratiques exemplaires.
Nous avons besoin de soutien à long terme par l'entremise d'investissements considérables. La mise en oeuvre de la Feuille de route pour les langues officielles du Canada 2013-2018 tarde toujours dans le secteur du développement des compétences et du partenariat social. L'engagement du gouvernement fédéral, qui remonte à mars 2013, ne s'est toujours pas concrétisé à ce jour. Nous n'avons aucune nouvelle concernant la mise en oeuvre de cet axe, et aucun acteur du domaine des compétences n'a eu accès à ce financement. L'absence de financement fragilise les acquis des dernières années et prive les acteurs économiques et gouvernementaux de partenaires communautaires de qualité.
Il faut accroître les politiques et les mesures qui permettent à l'ensemble de la population de continuer à développer ses compétences. Il faut permettre aux individus moins compétents, peu susceptibles de suivre spontanément une formation et ayant tendance à moins bénéficier d'une formation offerte par leur employeur et les structures de services, de sortir du cercle vicieux créé par la faiblesse des compétences et des revenus.
Il faut transformer la mine de données sur les compétences, sur leur incidence sur le Canada, sur sa population et sur son développement en occasions réelles d'implanter des politiques, des programmes et des cadres de financement qui répondent aux besoins des CLOSM en matière d'emploi, de développement économique et de développement des compétences.
En dernier lieu, il faut améliorer notre compréhension du marché du travail et de l'économie des CLOSM ainsi que des enjeux, des défis et des bonnes pratiques en matière de développement des compétences par un soutien actif à la recherche et aux projets innovateurs.
Monsieur le président et membres du comité, je vous remercie de votre intérêt.
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Monsieur le président, mesdames et messieurs, je vous remercie de nous avoir invités à comparaître devant vous au sujet de la situation économique des communautés de langue officielle en situation minoritaire.
En tant que consommateurs, employés et employeurs dans ces communautés, c'est un grand plaisir pour nous de partager notre perspective avec vous.
[Traduction]
Je suis accompagné virtuellement par Christie Dennison, vice-présidente du conseil d'administration de CYF, qui se trouve au Nouveau-Brunswick. Elle comprend la réalité des jeunes Canadiens anglais et elle travaille pour un organisme de développement économique depuis quelques années. Nous ferons probablement appel à elle un peu plus au cours de la période de questions et de réponses.
[Français]
Avant de commencer, j'aimerais vous mettre à jour au sujet des derniers développements qu'il y a eu à CYF au cours de l'année.
Nous n'avons pas encore reçu la confirmation de notre subvention cette année, mais on nous a suggéré de faire une demande au titre de la subvention de programmation. Nous entendons profiter de ce statut pour faire avancer l'organisation auprès de nos parties prenantes.
Quatre axes de notre orientation stratégique ont changé depuis la dernière fois.
Premièrement, nous voulons augmenter notre capacité administrative.
Deuxièmement, nous voulons augmenter le nombre de nos membres. N'importe quel individu ou organisme qui s'engage à faire avancer la mission et la vision de l'organisation peut en devenir membre. Cela inclut les employés et les employeurs.
Troisièmement, nous voulons faire le pont entre nos membres et les communautés francophones. Il faut poursuivre le travail que nous avons fait auprès des communautés du Manitoba l'an passé et peaufiner notre mandat provincial.
Quatrièmement, nous voulons continuer à développer la Discover Zone, qui, comme vous le savez, est notre outil pour faire le lien entre les anglophones et l'économie francophone.
[Traduction]
J'aimerais attirer votre attention sur deux points. L'un d'eux est notre vision. Au cours de la dernière année, nous avons été en mesure de mieux comprendre l'environnement dans lequel nous travaillons et nous avons fini par comprendre qu'il existe un énorme écart entre les investissements du gouvernement en matière de langues officielles et l'économie.
[Français]
Nous voulons combler cet écart, et c'est ce qui nous a amenés à changer notre vision cette année. Notre vision est celle d'un Canada où la majorité de la population parle les deux langues officielles et considère ce trait comme étant un avantage concurrentiel qui fera du Canada un leader dans l'économie mondiale.
[Traduction]
Remarquez le lien avec l'économie. J'en parlerai plus en détail plus loin.
Le deuxième point que je veux porter à votre attention concerne la Discover Zone. Au cours de la dernière année, nous avons également pu mieux comprendre cette réalité. Malheureusement, la réalité, c'est que le coût de lancement de cette initiative est très supérieur à ce que nous pourrons recevoir en subventions. Nous avons donc suspendu la Discover Zone pour le moment pendant que nous examinons des solutions pour voir comment nous allons trouver les capitaux de démarrage nécessaires.
Sachez en outre que depuis le début, Canadian Youth for French applique un modèle d'affaire qui lui permettrait de pouvoir devenir un jour financièrement indépendant du gouvernement. Notre objectif consiste et consistera toujours à pouvoir fonctionner sans fonds publics.
[Français]
Maintenant, nous voulons vous aider à formuler vos recommandations quant à la façon dont le gouvernement du Canada peut soutenir les communautés de langue officielle en situation minoritaire de manière à bâtir des économies durables et croissantes.
[Traduction]
Avant d'en arriver aux recommandations, j'aimerais vous rafraîchir la mémoire au sujet de ma première comparution devant vous, en mars 2012. À l'époque, j'ai tenté de vous faire sortir un peu des sentiers battus en vous proposant d'effectuer les investissements faits dans le cadre de la feuille de route de manière à créer un espace bilingue où les différences culturelles seraient appréciées et où l'intégrité et l'histoire des deux langues seraient respectées afin de concrétiser l'idéal canadien. Un jour, de mon vivant, Canadian Youth for French réalisera sa vision d'une majorité officiellement bilingue, mais nous ne pourrons pas y parvenir jusqu'à ce que nous commencions à nous préparer consciemment à cette réalité.
[Français]
C'est pour cette raison que nous vous recommandons en premier lieu de vous assurer d'inclure dans votre étude la participation des communautés de langue officielle en situation majoritaire.
À mon avis, vous devriez étudier la situation économique du Canada afin que vos recommandations sur la façon dont le gouvernement du Canada peut soutenir ses communautés permettent de bâtir une économie canadienne durable et croissante autour des langues officielles. Veuillez noter que cela inclut l'anglais et le français, ainsi que les communautés minoritaires et majoritaires.
[Traduction]
Cela n'enlève rien aux communautés en situation minoritaire dans notre économie. Il faut que l'économie soit forte pour le bien de la démographie et de nos membres.
[Français]
Il existe au Québec des entreprises qui ont besoin de quelques employés provenant du Canada anglais pour pouvoir prendre de l'expansion à l'extérieur de la province, tout comme il existe dans le reste du pays des entreprises qui souhaitent tirer profit d'une main-d'oeuvre plus bilingue afin de prendre de l'expansion dans les marchés non anglophones.
[Traduction]
C'est peut-être ce que vous tentez d'accomplir dans la présente étude. C'est pourquoi je vous propose de faire en sorte que les communautés de langue officielle en situation minoritaire participent à l'entreprise. Mais au final, vous reviendrez toujours — et tout ce que nous faisons revient — à ce que sera l'objectif de l'étude. Or, cette dernière divise l'économie canadienne en deux partie, une anglophone et une francophone, alors qu'on devrait considérer cette économie comme un tout solide.
[Français]
Donc, c'est en travaillant ensemble que nous allons profiter pleinement de l'avantage concurrentiel que nous donnent nos deux langues officielles afin de bâtir une économie canadienne durable et croissante.
[Traduction]
Nous vous recommanderions également d'examiner longuement les programmes de financement actuellement offerts par le ministère du Patrimoine canadien afin de voir si la terminologie qui y est utilisée correspond à la réalité d'aujourd'hui.
Selon le rapport sur les langues officielles de 1994-1995, les investissements s'effectuaient dans deux domaines à part l'éducation: l'appui aux organisations communautaires de langue officielle et la promotion du dialogue. En 2011-2012, on a investi dans le développement des communautés de langue officielle et le renforcement des langues officielles, qui inclut notamment la promotion de la dualité linguistique.
Bref, la terminologie relative à nos investissements dans les langues officielles n'a pas vraiment changé au cours des 20 dernières années, ce qui laisse entendre que l'environnement n'a pas beaucoup changé non plus. Mais je ferais valoir que nous avons accompli des progrès considérables depuis le dernier référendum au Québec et que les investissements que nous avons effectués depuis ont eu l'effet escompté.
Je n'ai pu trouver de statistiques pour aujourd'hui, mais je vous fournirai un exemple de 2006, qui vous donnera une bonne idée de ce dont je parle. La commissaire aux langues officielles a indiqué que le pourcentage de Canadiens favorables au bilinguisme était passé de 56 à 72 % de 2003 à 2006, une augmentation de 16 % de l'appréciation des langues officielles sur trois ans. En outre, en 2006, plus de 80 % des Canadiens âgés de 18 à 34 ans étaient favorables au bilinguisme au Canada. C'était en 2006, et avec les investissements effectués au cours des huit dernières années, ce chiffre ne peut qu'avoir continué d'augmenter un peu plus.
Sur le plan de la promotion de la dualité linguistique, dans laquelle nous investissons aux termes des programmes, voulons-nous faire passer le nombre des ceux qui appuient les langues officielles à 100 %? C'est le but vers lequel je tends. C'est la réalité que j'entrevois. Pourtant, une recherche non scientifique que nous avons faite montre que si 5 à 10 % des diplômés du niveau secondaire ont suivi un programme d'immersion, seulement 5 % d'entre eux continuent d'utiliser régulièrement leur deuxième langue officielle après cinq ans.
Donc, nous investissons 112 millions de dollars par année dans l'apprentissage d'une langue seconde, mais à peine 2,5 % des diplômés du niveau secondaire profitent vraiment de leur bilinguisme. Pourquoi investissons-nous dans l'apprentissage d'une langue seconde, alors? Est-ce pour promouvoir la dualité linguistique ou pour former davantage d'employés bilingues qui stimuleront l'économie canadienne? Le verbiage devrait refléter ce raisonnement.
Pour revenir en arrière, j'ai deux recommandations. Il faut d'abord assurer la participation des communautés en situation majoritaire. Il faut ensuite mener une étude des programmes de financement offerts par le ministère du Patrimoine canadien pour veiller à ce que la terminologie corresponde à la réalité d'aujourd'hui et donne aux milliers de jeunes Canadiens anglais du pays l'occasion d'apporter leur appui et leur contribution à l'établissement d'économies francophones en situation minoritaire viables.
[Français]
Merci.
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Merci, monsieur le président et honorables membres du comité.
Je ne représente aucun groupe. On m'a demandé de parler au comité pour lui donner un point de vue économique général, je suppose. Je suis président du département d'économie de McGill. Je suppose, particulièrement après avoir entendu les autres témoins, que je commencerai par un survol général de certains des points que nous devrions garder à l'esprit quand on examine le genre de programmes auxquels votre comité pense, j'imagine, afin de peut-être éviter que l'arbre ne cache la forêt.
Je présume que vous vous intéressez en général à la position économique de toutes les minorités au Canada, à celle des minorités linguistiques en particulier, et plus généralement à ce qui encouragera la croissance et le développement économiques au pays. La croissance économie dépend évidemment de l'investissement, c'est-à-dire celui dans le capital humain, comme l'ont indiqué les deux témoins précédents, je crois, et dans le capital physique.
La question est de savoir quel rôle le gouvernement du Canada peut jouer pour que les investissements adéquats s'effectuent dans les communautés linguistiques en situation minoritaire et, en général, chez ceux qui peuvent contribuer à la croissance économique. Selon moi, le rôle de loin le plus important que le gouvernement peut jouer — et dont il s'est traditionnellement fort bien acquitté — consiste simplement à protéger les droits des minorités et les conditions favorables à l'investissement, à la création de nouvelles entreprises et, en général, à l'établissement de capital physique, des conditions qui encouragent les gens à investir et à faire croître les communautés, qu'il s'agisse de communautés linguistiques en situation minoritaire ou non. Voilà où je dis qu'il ne faut pas que l'arbre cache la forêt.
Comme je le dis, si on examine la manière dont les choses se passent généralement dans le monde, le gouvernement du Canada fait excellente figure à cet égard. Nous ne voulons évidemment pas faire preuve de suffisance à ce sujet, mais je considère que nous devrions garder à l'esprit que la chose que fait le gouvernement du Canada qui est de loin la plus importante à cet égard est de simplement créer et maintenir ces conditions générales tout en assurant le maintien d'un climat dans lequel les gens savent qu'ils peuvent compter sur ces conditions.
Il y a eu quelques défaillances, bien sûr. Il est arrivé que des communautés minoritaires aient l'impression qu'elles ne disposaient pas de la certitude à l'égard de l'avenir ou de la stabilité nécessaire pour faire des investissements.
Le Québec a notamment connu des périodes d'incertitude substantielle, qui ont certainement nui à l'investissement. Dans cette province, l'incertitude qui a régné par le passé — et qui est moins présente maintenant, j'espère — a freiné l'investissement, non seulement dans la communauté anglophone et les autres groupes linguistiques minoritaires, mais également parmi les francophones.
Le gouvernement, sans afficher un parcours sans faille — nous vivons dans un monde difficile —, a fort bien fait afin d'offrir ces conditions, et je pense que nous devons avant tout nous concentrer sur ces réussites et tenter de les maintenir.
Si nous regardons plus loin et examinons les obstacles qui pourraient entraver les investissements dans l'éducation et dans le capital physique, ainsi que ce que le gouvernement pourrait envisager de faire précisément — s'il y a lieu — dans le cadre des programmes pour corriger la situation, je pense qu'ici encore, nous devons faire un survol de la situation et se demander quels sont les problèmes que nous ne pouvons résoudre au moyen de mécanismes normaux pour ceux qui font des investissements. Quels sont les obstacles qu'on rencontre parfois, sur le plan de l'accès au capital par exemple, que le gouvernement peut aider les gens à surmonter?
Dans certaines circonstances, l'accès aux marchés financiers est certainement problématique. Par exemple, on entend souvent dire que les femmes vivant dans les pays en développement ont un accès très limité aux marchés financiers et que les programmes qui offrent du capital sont d'une aide substantielle à cet égard.
Je vois peu d'indices montrant que le Canada soit dans cette position. Dans l'ensemble, les minorités ne font pas l'objet de la discrimination ouverte qui existe à d'autres endroits; ce n'est certainement pas le cas dans les institutions ou sur le plan des langues officielles. Il est, selon moi, peu probable que les minorités anglophones ou francophones du pays aient de la difficulté à accéder aux marchés de capitaux traditionnels par l'entremise des banques ou d'autres formes de financement des entreprises.
Je pense que si nous envisageons des programmes pour résoudre les problèmes relatifs au mode général d'accès et aux exigences en matière d'investissement, nous devons étudier soigneusement ce qui cloche et doit être corrigé, et voir si les programmes actuels font encore leur travail. Nous devons le faire dans le contexte d'une élaboration de politiques avisées pour régler les problèmes.
Je pense que toute tentative pour améliorer la position économique des minorités devrait reposer sur le principe général voulant qu'on favorise l'accès à ces formes d'investissement dans l'éducation, le capital humain et le capital physique qui permettent aux gens d'améliorer leur situation économique. Nous devons évaluer attentivement nos programmes, qu'ils existent depuis longtemps ou non, pour nous demander s'ils nous aident à atteindre cet objectif et s'ils permettent d'éliminer des obstacles réels.
C'est tout ce que je dirai pour l'instant. Merci.
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Je vous remercie de la question.
J'ai deux remarques à faire concernant la feuille de route.
Tout d'abord, ce qui est intéressant, c'est que la feuille de route comporte un volet touchant le développement des compétences pour l'emploi. Or, comme vous le soulignez, depuis un an, nous n'avons plus la moindre nouvelle à ce sujet. Ça a pour effet de fragiliser des organismes qui avaient acquis des expertises en matière de compétences et d'emploi. Il faut dire que le développement des compétences pour l'emploi et le marché du travail est une expertise difficile à mettre en oeuvre tant pour les communautés minoritaires que pour les communautés majoritaires, bien qu'il soit question ici des communautés minoritaires.
Ces fonds prévus dans la feuille de route n'ont toujours pas été décaissés, mais ce qui est pire encore, c'est qu'à cet égard, on ne nous a annoncé aucun mécanisme. Après un an, nous pensons donc qu'il y a une difficulté. On ne parle que de la feuille de route, mais on pourrait aussi parler d'un autre programme de développement des compétences pour lequel nous avons déposé une demande de financement il y a au moins un an. Nous ne sommes pas les seuls à être dans cette situation: une trentaine d'organismes, dans l'ensemble du pays, le sont également. Ces retards fragilisent les organismes en milieu minoritaire ainsi que les expertises. En outre, l'offre de programmes est ralentie.
Par ailleurs, le développement des compétences, autant pour les communautés minoritaires que pour les communautés majoritaires, se fait en concordance avec les provinces. Le fait de ralentir les organismes a pour effet de ralentir les relations et la mise en oeuvre des programmes adaptés et orientés en fonction des programmes des provinces. Le développement des compétences ne se fait pas n'importe comment; du moins, si ça se fait, c'est dangereux. Ça fragilise nos organismes.
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La question du développement économique dans les communautés minoritaires est assez complexe. Il est important de savoir que développement économique signifie également développement social et communautaire. De plus, quand il y a du développement économique dans les communautés linguistiques, cela développe leur force d'attraction: les gens sont attirés par le travail dans des communautés plus fortes.
Le RESDAC oeuvre dans le domaine de l'alphabétisation et de la formation de base. On sait que plusieurs millions de Canadiens ont un niveau d'alphabétisation et de formation de base assez faible et qu'il est difficile pour eux de trouver un emploi, entre autres.
Le RESDAC tente de faire certaines choses. Les provinces et les territoires travaillent avec nous. Nous constituons donc un rassemblement de partenaires territoriaux et provinciaux. Nous travaillons à la conception de modèles innovateurs qui créent des relations au sein des communautés de langue officielle en situation minoritaire. Nous faisons de la recherche et nous informons.
Chose intéressante, nous travaillons actuellement avec des coalitions provinciales dans quatre provinces, où nous mettons sur pied ce qu'on appelle le modèle intégré. Cela permet de former des gens peu alphabétisés sur le plan non seulement des compétences techniques, mais aussi des compétences essentielles, par exemple apprendre à lire, apprendre à compter ou apprendre à travailler avec des ordinateurs.
Normalement, ces programmes s'étalent sur une période d'à peu près 14 semaines, puis nous pouvons rapidement aider ces gens à trouver un emploi. Non seulement nous les aidons à trouver un emploi, mais nous renforçons aussi nos petites communautés linguistiques.
Souvent, pour avoir accès à de la formation et à de l'éducation, il faut aller dans les grands centres. Or, dans les petites communautés où nous intervenons, nous sommes en mesure d'aider ces gens à trouver de l'emploi.
Nous avons constaté une autre chose intéressante. Quand nous formons des gens des petites communautés situées dans des régions ressources et que nous les aidons ensuite à trouver un emploi au sein des entreprises qui ont de la difficulté à recruter des employés, c'est bon à la fois pour l'entreprise, pour la communauté et pour l'employé, et ce dernier retrouve sa fierté.
Le rôle du RESDAC est de travailler avec des coalitions provinciales et territoriales, et d'amener ces gens à trouver de l'emploi, en plus de fournir une main-d'oeuvre qualifiée aux entreprises en place.
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Je vais répondre à votre question en deux parties.
Bien sûr, je ne suis pas un expert en communautés francophones hors Québec, mais je peux vous faire part de ma perception en général. Mes enfants, qui sont rendus des ados, sont parfaitement bilingues. En général, j'ai l'impression que les attitudes au Canada vis-à-vis des communautés francophones ont très clairement changé. Il me semble que ce soit beaucoup moins une difficulté que par le passé. Même s'il reste des résidus de ce genre de chose, il me semble que ce soit maintenant dans une moindre proportion.
M. Morrow a parlé, par exemple, des compétences linguistiques des minorités. Selon mon observation, les jeunes anglophones au Québec sont aujourd'hui très compétents, très bien capables d'agir en français, de travailler en français et d'étudier en français, et la plupart l'ont déjà fait. J'ai également l'impression, si j'en juge par l'expérience de quelques amis franco-manitobains, qu'il est simplement normal que les gens s'intègrent dans les communautés.
Selon mon point de vue général, les difficultés, barrières ou préjugés de ce genre sont beaucoup moins présents dans notre pays que par le passé. Je n'affirme pas qu'il n'y en a plus du tout. Toutefois, en matière d'accès à l'éducation ou d'accès au financement ou aux marchés de capitaux, il me semble que les contraintes sont aujourd'hui beaucoup moindres.
Après avoir entendu les remarques de M. Robillard, de M. Morrow et de M. Lévesque, j'aimerais ajouter un commentaire. Nous avons parlé ce matin des détails, du financement et des budgets de certains programmes qui pourraient permettre d'aplanir certaines difficultés qui touchent les communautés de langue officielle en situation minoritaire quelque part au Canada. Le gouvernement du Canada et le secteur professionnel comptent de nos jours beaucoup de personnes qui ont une solide expertise en évaluation de programmes. Je crois qu'il serait bon de faire faire régulièrement des évaluations indépendantes par des gens qui n'ont aucun intérêt dans ces programmes. Ils pourraient ainsi vérifier si les fonds attribués à tel ou tel programme sont utilisés de la façon la plus efficace possible, si nos programmes répondent encore aux objectifs recherchés et s'ils pourraient être améliorés.
C'est un peu relié à ce que vous venez de dire. Il y a sans doute des cas où certaines choses qui représentaient des contraintes ou qui constituaient de réels problèmes par le passé se sont améliorées avec le temps. Si tel est le cas, il est peut-être moins important de maintenir les programmes visant à éliminer ces difficultés.
Je crois qu'il serait bon de mettre en place un processus continu d'évaluation indépendante des programmes en cours.
:
Je vous remercie, monsieur le président.
Je remercie tous les témoins de prendre part à notre rencontre d'aujourd'hui.
Pour commencer, j'aimerais revenir sur les commentaires de M. Galbraith.
[Traduction]
Monsieur Galbraith, quand le chef du département d'économie de l'Université McGill nous affirme que nous sommes sur la bonne voie sur le plan de la croissance économique et de l'élaboration d'un bon cadre en la matière... et je suppose que lorsque vous dites que le Canada fait excellente figure, c'est par rapport aux pays du G7 en particulier.
Je veux vraiment discuter d'une ou deux choses que vous avez dites. En particulier, je pense que vous savez comment faire un bon exposé, car vous nous avez tous donné envie d'en savoir un peu plus. Vous avez clos votre propos en disant que l'évaluation des programmes qui existent depuis longtemps pourrait bien nous donner l'occasion de nous assurer
[Français]
que nous maximisons nos investissements.
[Traduction]
J'aimerais vraiment que vous nous en disiez plus à ce sujet, parce que nos comités s'efforcent très souvent d'affecter les rares ressources de la manière la plus responsable possible pour les contribuables du Canada. Nous voulons évidemment obtenir les meilleurs résultats possibles de ces investissements. Certains croient qu'il suffit de faire fond sur les investissements précédents. Si vous vouliez bien nous en dire plus sur l'évaluation des programmes qui existent depuis longtemps, ce serait formidable.
:
Oui, volontiers. Merci.
Tout d'abord, permettez-moi de dire que je ne représente pas McGill, évidemment. On m'a demandé de venir et de participer à la séance, ce que je suis bien sûr enchanté de faire.
Permettez-moi aussi de dire que l'évaluation des programmes est un domaine de recherche très substantiel actuellement en économie et qu'on a réalisé des progrès considérables sur le plan des méthodes afin d'effectuer des évaluations bien plus crédibles. En un certain sens, on devrait se poser la question hypothétique suivante en évaluant les programmes: comment vont les choses et comment iraient-elles sans ce programme?
Or, il est bien connu que les questions hypothétiques sont très difficiles à évaluer, mais bien des gens, particulièrement au cours des 15 à 20 dernières années, ont cherché à concevoir des méthodes pour fournir des réponses bien plus crédibles à de telles questions. Je pense que la fonction publique fédérale dispose d'une certaine expertise à cet égard, et de nombreuses personnes de la sphère universitaire se spécialisent dans ce domaine. Cette méthode est également fort employée en économie de la santé, par exemple, où les gens s'intéressent aux effets des programmes et à la manière dont on peut affecter judicieusement les rares fonds dont on dispose pour effectuer des dépenses dans les hôpitaux ou ailleurs.
Le temps où on pouvait simplement deviner si un programme est bon ou pas est selon moi révolu, et il faudrait que des gens de l'extérieur aux groupes intéressés réalisent régulièrement des évaluations en bonne et due forme. Je considère que la fonction publique fédérale dispose déjà de l'expertise nécessaire pour le faire, que ce soit grâce aux gens qui pourraient se charger de ces démarches ou de ceux qui connaissent les parties pertinentes au sein du milieu universitaire, par exemple.
Je crois cependant qu'il faudrait que cette façon de faire devienne maintenant la norme et que le gouvernement évalue régulièrement tous les programmes de ce genre. Je pourrais aisément vous mettre en rapport avec d'excellentes personnes qui pourraient le faire, mais, je le répète, on trouve l'expertise nécessaire dans la fonction publique. Nous ne devrions pas, à l'heure actuelle, nous contenter de simplement deviner si l'argent est bien dépensé ou non.
:
J'aimerais répondre en disant que le RESDAC compte, comme nous l'avons indiqué il y a quelques instants, quelque 30 partenaires de toutes les régions du Canada qui travaillent avec notre équipe.
En ce qui concerne votre question sur l'évaluation de programme, sachez que l'été dernier, quand nous nous sommes adressés au gouvernement concernant notre projet, nous avons effectué une sorte d'évaluation de programme. Nous nous sommes réunis pour nous demander comment nous pouvions nous améliorer.
Nous avons ainsi mis sur pied un nouveau partenariat pancanadien. Le RESDAC s'est assis avec tous ses partenaires, comme le CLQ, un groupe communautaire anglophone du Québec qui collabore avec nous au sujet de l'alphabétisation communautaire, ainsi qu'avec le CDÉACF,
[Français]
le Centre de documentation sur l'éducation des adultes et la condition féminine.
[Traduction]
Nous avons rencontré des coalitions de l'Ontario, de la Saskatchewan et des quatre coins du pays, et nous avons dit que nous devions nous pencher sur l'innovation et voir comment nous pourrions avoir de meilleures relations avec les différents partenaires, notamment les industries, les divers partenaires communautaires, les entités et organismes des gouvernements fédéral et provinciaux et des administrations municipales, etc. Que devrions-nous faire sur le plan de la recherche? Comment pouvons-nous nous assurer que nous cadrons parfaitement avec ce que le gouvernement veut faire pour perfectionner les compétences, par exemple celles qui appuieront la création d'emplois et permettront aux Canadiens de retourner sur le marché du travail? En outre, comment pouvons-nous informer les Canadiens au sujet de ce que nous faisons?
C'est exactement ce que nous avons fait. Quand nous disons que nous collaborons avec des partenaires de qualité, nous ne voulons pas dire qu'il y en a qui ne sont pas de qualité. Nous parlons de qualité dans notre domaine d'expertise, c'est-à-dire l'alphabétisation et les compétences de base. Certaines organisations ont acquis un excellent savoir-faire, en perfectionnement des compétences, par exemple, et en formant des gens dans l'environnement de travail afin de leur permettre d'avoir un niveau d'alphabétisation et de compétences de base digne du XXIe siècle au chapitre des nouvelles technologies ou du développement de l'emploi. Voilà ce que j'entends par là.
Ici encore, quand nous parlons de « partenariat de qualité », cela signifie que nous travaillons avec de véritables experts et que nous nous assurons que ce que nous faisons est fait correctement et que nous utilisons efficacement notre financement pour que les fonds soient bien dépensés et servent à encourager d'autres investissements.
Comme je l'ai indiqué, c'est exactement ce que nous tentons de faire avec le modèle intégré. Nous avons réalisé beaucoup de recherche à ce sujet. Nous travaillons maintenant avec des entreprises, des firmes et d'autres partenaires, et cela a un effet réel sur elles également.
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Merci, monsieur le président.
Monsieur Galbraith, merci de comparaître. Votre réputation d'économiste n'est plus à faire, et vous marchez sur les traces d'un autre grand Galbraith.
Je veux aborder la question de la situation de la minorité anglophone au Québec. Des témoins nous ont indiqué que les anglophones sont sous-représentés dans certains secteurs de l'économie de cette province. Nous avons également entendu dire que de nombreux anglophones se tournent vers le travail autonome.
À un certain point, on a besoin des connaissances locales, ce qui pourrait être incompatible avec un modèle économique centralisé au pays. Vous connaissez peut-être l'argument de Hayek sur l'importance des connaissances relatives au contexte propre à un moment et à un lieu précis pour connaître l'endroit et posséder un savoir particulier. Le Québec est vraiment une région distincte au Canada, tout comme l'Ouest d'ailleurs.
[Français]
J'ai vécu dans l'Ouest. Je peux témoigner du fait qu'un francophone unilingue ne peut pas obtenir d'emploi s'il n'a pas les compétences en anglais.
[Traduction]
Les anglophones du Québec ont eux aussi des besoins particuliers.
Vous avez souligné l'importance des investissements. Je vous demanderais donc si les investissements effectués dans les organisations pour aider les anglophones à acquérir des connaissances propres au lieu sont des investissements valables, selon vous.
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Tout d'abord, je partage entièrement votre avis sur l'importance des connaissances locales et, de façon plus générale, de savoir de quoi on parle. Ici encore, je ne veux pas m'ériger en représentant ou en expert de la communauté anglophone du Québec. Je suis simplement un anglophone qui vit ici.
Cela dit, les anglophones du Québec disposent d'un certain nombre d'avantages qui font qu'il est moins grave pour eux d'être soumis aux contraintes que nous connaissons. Par exemple, la sous-représentation des anglophones au sein de la fonction publique du Québec est un fait bien connu. Est-ce un grave problème? Peut-être pas.
Le fait est que la minorité anglophone du Canada est libre d'aller s'installer ailleurs au pays, et ceux qui se considéraient soumis à de trop lourdes contraintes l'ont dans bien des cas déjà fait. D'après ce que j'ai pu observer, la jeune génération n'est pas restreinte par un manque de compétences linguistiques. Il est possible, je crois, d'exagérer les difficultés auxquelles la communauté se heurte. Il ne me semble pas qu'on ait besoin d'une panoplie de programmes spéciaux pour atténuer certaines de ces difficultés.
Si quelqu'un affirmait que la communauté anglophone est désavantagée dans une sphère particulière, il me semblerait logique d'envisager des programmes pour résoudre le problème. Mais ce n'est pas l'accès aux marchés financiers ou à l'éducation. Je pense qu'on peut exagérer les difficultés que les anglophones éprouvent ici.
Les difficultés que je vois sont d'une nature plus globale et sont, bien entendu, bien moins graves qu'elles ne l'étaient il y a quelques mois à peine. Comme je l'ai indiqué au début, il doit exister une certaine stabilité et une certitude quelconque pour effectuer des investissements, et ce, pas seulement pour la communauté anglophone, mais pour tous les Québécois, francophones et anglophones. Comme la situation s'est stabilisée, je pense que la situation économique de toutes les communautés du Québec s'améliorera en augmentant les investissements.
J'ignore si cela répond ou non à votre question.
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Dans la réalité des économies actuelles, c'est difficile. Quelqu'un qui n'a pas une formation de base ou des compétences de base aura de la difficulté à trouver un emploi et à le garder. Le développement des compétences a des conséquences non seulement sur le plan économique, mais également dans d'autres secteurs, par exemple en matière de développement personnel ou de santé.
À cet effet, je trouve que le Canada est un exemple intéressant. C'est le pays qui a le plus investi dans la dernière enquête. L'échantillon est quand même de 27 000 personnes. C'est le plus gros échantillon. Si on compare les tableaux de littératie de l'enquête de 2003 à ceux de l'enquête de 2013, on constate qu'il y a une chute globale de six points au Canada, peu importe les communautés. En numératie, il y a une chute de sept points.
Il faut comprendre que le développement des compétences n'est pas statique. L'économie de 2003 n'était pas celle de 2013. Les besoins en compétences ne sont pas les mêmes. Je vais vous donner un exemple. Dans cette enquête-ci, on évaluait les compétences relativement à l'environnement technologique, ce qu'on n'avait pas fait en 2003. Essayez aujourd'hui de ne pas avoir un minimum de compétences technologiques; vous allez avoir des problèmes.
Ce que vous soulevez est un fait. Les gens qui entrent sur le marché du travail en ayant peu de compétences vont se retrouver dans des emplois de base. Ils vivront de l'instabilité financière et de l'instabilité d'emploi. Ils auront de la difficulté à garder leur emploi. Également, compte tenu des changements technologiques au sein des entreprises, il devient difficile pour ces gens de progresser sur le plan économique.
Ce qui est pire, et les enquêtes nous le démontrent, c'est que les gens peu compétents, peu alphabétisés, sont ceux qui se forment le moins. Des gens comme vous et moi vont participer à beaucoup de formations. En revanche, les statistiques démontrent que tout au plus 2 % des gens qui auraient des besoins participent à de la formation.
Ce que vous soulevez est fondamental. De quelle façon peut-on y répondre? On pourrait créer des politiques de formation à l'emploi, des politiques qui seraient plus précises et plus concrètes pour cette clientèle.
En effet, vous soulevez un défi majeur. Justement, les changements économiques nous amènent à ce qu'on appelle les compétences du XXIe siècle. Si on ne réussit pas à les acquérir, cela va nous poser de sérieuses difficultés économiques.
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Un premier phénomène nous préoccupe. Nous évaluons qu'environ 80 % des gens qui se disent francophones ont répondu en anglais; ce taux était de 66 % en 2003. C'est un premier enjeu.
Comme deuxième enjeu, il faut souligner qu'historiquement, la relation entre l'éducation et la lecture chez les francophones était différente. De façon générale, pour développer des compétences, il faut les mettre en pratique. Pour l'instant, les résultats et l'analyse de ceux-ci ne nous permettent pas de préciser ce qui se passe exactement.
Le fait que beaucoup de francophones répondent en anglais nous fait nous poser beaucoup de questions sur l'accès aux services et sur le développement des compétences. Nous sommes conscients que, de façon générale, beaucoup de francophones à l'extérieur du Québec et dans certaines régions du Nouveau-Brunswick travaillent en anglais. C'est la réalité.
Toutefois, le maintien de la langue et des cultures doit se faire de toute façon dans chacune des provinces. Six rapports thématiques vont être publiés par le gouvernement fédéral, dont l'un va porter sur le PEICA et les communautés de langue officielle en situation minoritaire. Certaines provinces, dont l'Ontario et probablement le Nouveau-Brunswick, vont pousser l'analyse plus loin pour mieux comprendre leur propre réalité et déterminer de quelle façon on va réagir face à ces réalités.
Le développement des compétences n'est pas seulement une réalité francophone au Canada; c'est un enjeu majeur soulevé par la majorité des intervenants en développement économique.
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D'une part, ce n'est pas égal partout dans notre pays, car il s'agit d'ententes fédérales-provinciales gérées par les provinces. Nous ne pouvons donc pas faire de constat uniforme.
D'autre part, ces programmes sont destinés au développement des compétences et à l'emploi. Il s'agit d'une dimension complètement différente, et l'approche peut varier d'une province à l'autre.
Enfin, en ce qui concerne la dimension de l'acquisition des compétences de base, dans la majorité des provinces, il s'agit de programmes de financement différents.
Pour ce qui est des communautés de langue officielle en situation minoritaire, comme ces ententes viennent tout juste d'être conclues, nous verrons plus tard ce qu'il en sera. Cependant, on sait que les ententes précédentes ont eu des conséquences majeures et, malheureusement, pas toujours positives. On peut penser à la Colombie-Britannique, où cela a posé des problèmes importants. Cela a notamment eu pour effet de fragiliser beaucoup d'organisations. Il faudra voir ce que donneront les nouvelles ententes.
Chose intéressante, dans certains cas, bien que ce ne soit pas dans tous les cas, cela a créé un rapprochement entre le gouvernement provincial et les communautés de langue officielle en situation minoritaire relativement au développement des compétences. Je crois que les communautés ont compris, qu'elles ont appris de ça, qu'elles maîtrisent mieux ce transfert des compétences. Ainsi, elles se rapprochent plus des gouvernements provinciaux, car l'argent est maintenant dans les provinces. Reste à voir de quelle façon le rendre disponible.
Néanmoins, nous considérons que le gouvernement fédéral ne peut pas se délester de sa responsabilité en matière de langues officielles et de droits des minorités. Dans ce domaine, des enjeux importants demeurent. Malheureusement, les réponses ne sont ni noires ni blanches. C'est beaucoup plus complexe que cela. Nous verrons ce qu'il en sera de ces nouvelles ententes.
Nous considérons que plus l'argent est près du terrain, habituellement, plus...
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Merci beaucoup, monsieur le président.
Merci à tous les témoins de s'être déplacés aujourd'hui.
J'aimerais adresser deux ou trois questions à M. Galbraith, notamment pour souligner certains points que d'autres témoins ont fait valoir.
La première concerne l'alphabétisation. Bien qu'il s'agisse d'un problème auquel les communautés sont aux prises — c'est notamment le cas dans ma province natale, le Nouveau-Brunswick —, j'aimerais citer le Réseau pour le développement de l’alphabétisme et des compétences, qui a fait remarquer ce qui suit: « Ce n'est pas un phénomène purement caractéristique du milieu minoritaire ou qui ne touche que les francophones. » Non seulement ce phénomène se produit au Nouveau-Brunswick, mais aussi dans l'ensemble du pays. En fait, j'aimerais faire remarquer que le taux d'alphabétisation au Québec est le même que celui de l'ensemble du Canada.
Selon M. Morrow, dans le cadre de cette étude, nous devons avoir une seule vision, parce que c'est un Canada fort qui aide les communautés minoritaires d'un bout à l'autre du pays. En fait, plusieurs témoins précédents ont dit avoir remarqué que, dans certaines régions du pays où l'économie est forte, la participation, la création de richesses et le taux d'emploi des communautés linguistiques en situation minoritaire sont comparables, voire identiques à ceux des communautés linguistiques en situation majoritaire. Toutefois, il y a aussi des inconvénients. Dans certaines régions du pays, où la croissance économique est faible, les communautés linguistiques en situation minoritaire sont aux prises avec les mêmes problèmes que les autres.
Monsieur Galbraith, dans certaines de vos réponses, vous avez mentionné des problèmes mondiaux. Pourriez-vous nous parler un peu de certains des facteurs qui assurent la croissance; nous visons à élaborer des stratégies susceptibles d'aider certaines des régions à faible croissance à rattraper les régions qui sont fortes sur le plan économique? Est-ce qu'il s'agit d'institutions? Est-ce que ce sont des questions...? Est-ce que c'est la mise en valeur des ressources? J'aimerais savoir ce que vous pensez de certaines de ces stratégies ou de ces facteurs. Nous voulons éviter d'étudier la question en vase clos et plutôt envisager des stratégies dont l'ensemble du pays pourra bénéficier. De cette manière, quand un groupe ira bien, tous les groupes situés dans les environs immédiats iront bien aussi.
Merci.
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En réponse à cette question, j'aimerais souligner ce que M. Dionne Labelle a dit en parlant des compétences de base minimales en matière d'alphabétisme et de numératie. À mon avis, il est également important de tenir compte de ces compétences à la lumière de la question que vous venez de poser. Je le répète, je suis entièrement d'accord avec M. Robillard et M. Lévesque pour dire que l'alphabétisation et la numératie sont importantes.
[Français]
Il va sans dire que
[Traduction]
que nous aimerions que les taux dans ces domaines frisent le 100 % grâce à quelque mécanisme que ce soit au provincial ou au fédéral.
Quoi qu'il en soit, comme M. Labelle l'a indiqué, nous parlons des compétences de base minimales. Quand il est question de l'économie du savoir — soit une autre expression qui est sur toutes les lèvres de nos jours —, le genre d'entreprises que nous espérons encourager et voir prospérer dans un pays comme le nôtre, où la main-d'oeuvre n'est pas hautement scolarisée, ne sont pas généralement créées par des gens possédant seulement des compétences de base minimales.
Le genre d'investissement en matière d'éducation qui, selon nous, permettra de vraiment répondre aux besoins de l'économie du savoir devra viser à former des personnes très hautement scolarisées et très compétentes. Par conséquent, il s'agit là d'un autre genre de programme. Encore une fois, cela ne diminue en rien l'importance de l'alphabétisation et de la numératie, comme MM. Robillard et Lévesque l'ont soulignée, mais cela correspond simplement à un autre volet des divers talents auxquels nous pensons.
Le gouvernement canadien a créé un certain nombre de programmes, notamment la Fondation canadienne pour l'innovation, pour répondre à ces besoins. Il existe plusieurs façons de créer un niveau élevé du savoir et de compétences. Voilà l'autre ensemble de talents dont nous avons besoin, autres que les compétences de base minimales. Je ne peux pas vraiment penser à une bonne façon de dire cela en anglais. Ces personnes hautement qualifiées joueront un rôle très important dans notre économie du savoir. Par conséquent, à mon avis, nous devrions nous assurer de nous pencher aussi sur les besoins à cet égard.
Comme je le disais plus tôt, la croissance économique dépend des investissements — nous le savons tous — et il existe diverses formes d'investissement. L'éducation en est une. L'immobilisation de capitaux en est une autre. Dans la mesure où nous parlons d'éducation — comme beaucoup de personnes le font de façon implicite aujourd'hui —, à mon avis, nous devons parler au moins en partie des besoins en matière de personnes hautement scolarisées, et viser non seulement à offrir des programmes de formation, mais aussi à attirer des personnes de ce genre au Canada pour étudier, s'installer et créer des entreprises.