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Merci, monsieur le président.
Mesdames et messieurs, je m'appelle Norman Chalmers et je suis président de Pacific Airworthiness Consulting.
J'ai 47 ans d'expérience dans le domaine de la sécurité aérienne et de la navigabilité, y compris 25 ans à Transports Canada, Aviation civile, où j'ai assumé différents postes, y compris celui de directeur régional par intérim. En plus de faire de la consultation, je rédige une rubrique bimensuelle pour le magazine Air Maintenance Update qui est très lue au Canada et aux États-Unis.
Aujourd'hui, je vais limiter mes observations au système de gestion de la sécurité (SGS) mis en oeuvre par Transports Canada, Aviation civile.
Pour ce qui est de ma position au sujet des SGS, tout d'abord les SGS sont un projet pilote à grande échelle dans le domaine de l'ingénierie sociale ayant pour objectif l'étude des résultats relatifs à la sécurité de l'industrie aéronautique canadienne, et pour les victimes, les voyageurs. Les effets à long terme de ces changements sont imprévisibles parce qu'il n'existe pas de précédent à Transports Canada ni de modèle qui a fait ses preuves.
Deuxièmement, les SGS sont une bonne idée, tout comme la gestion de la qualité totale. Si la direction et les travailleurs les adoptent correctement, ils peuvent aider les entreprises à améliorer leur sécurité dans bien des domaines.
Troisièmement, les SGS ne sont pas un programme de réglementation. Il s'agit essentiellement d'une philosophie inventée par des professeurs d'université réductionnistes qui ont étudié et disséqué des catastrophes qui se sont produites dans l'industrie pétrochimique. Ces experts incluent Reason et Hopkins.
Quatrièmement, les SGS ne peuvent remplacer efficacement un régime réglementaire de surveillance.
Cinquièmement, les SGS sont une tactique de Transports Canada pour économiser sur les coûts des employés, y compris sur leur nombre et leurs qualifications.
Sixièmement, les SGS sont une tactique de Transports Canada pour échapper à des poursuites en justice pour avoir autorisé des opérations aériennes dangereuses.
Septièmement, on s'est servi de la peur pour vendre les SGS aux Canadiens, dont vous faites partie, notamment en se servant des projections concernant les pertes de coque qui sont largement diffusées dans le monde.
Huitièmement, les législateurs canadiens ont fait preuve de négligence. Ils n'ont pas tenu compte des avertissements donnés par les meilleurs spécialistes du Canada, y compris M. Moshansky, dans le rapport de 2007 de ce comité.
Neuvièmement, le Canada possède l'un des systèmes de transport les plus sûrs du monde, et ce, en raison non seulement de la culture de la sécurité des entreprises et des travailleurs de l'industrie, mais également de l'efficacité de ces exigences réglementaires.
Dixièmement, Transports Canada commence à démanteler ses exigences.
Onzièmement la mise en oeuvre des systèmes de gestion de la sécurité par Transports Canada nuira à long terme la sécurité aérienne au Canada.
Douzièmement, il sera bientôt trop tard pour empêcher cela. Le Canada sera dans une situation très difficile lorsqu'il devra reconstruire l'infrastructure de sécurité qu'on est en train de détruire.
Treizièmement, les opinions du public en ce qui concerne la « sûreté » et la « sécurité » aériennes ne coïncident pas avec la définition qu'en donne Transports Canada et avec les gestes posés par le ministère.
Ce sont mes opinions personnelles.
S'agissant de la mise en oeuvre des SGS et des IVP, les SGS n'assurent pas de « protection supplémentaire » contrairement à ce que l'on a fait croire en 2008 au comité de la Chambre des communes. Ils n'ont pas été prévus comme une mesure de protection supplémentaire. Alors que ces mêmes personnes affirmaient à votre comité que les SGS assurent une protection supplémentaire, ils nous disaient à nous, les inspecteurs, de cesser les vérifications. Les dirigeants de Transports Canada ne disaient pas la vérité.
Les évaluations des SGS et les inspections de validation de programme ont presque totalement remplacé les vérifications et les inspections. Je n'ai pas entendu parler d'une vérification réglementaire au cours des cinq dernières années. La Loi sur l'aéronautique ne vise pas tous les aspects de la mise en oeuvre des SGS et intègre un vague niveau de sécurité.
Le SGS 107, ou plutôt l'article 107 du Règlement de l'aviation canadien RAC 107, est vague et nébuleux, et compte à peine 300 mots. D'après ce règlement, les exigences sont entre les mains des fonctionnaires de tous les niveaux, des mandarins aux inspecteurs, et sont sujettes à leur humeur. En outre, le règlement encourage l'intimidation.
La cinquième révision de l'Instruction visant le personnel numéro SUR-001 de Transports Canada est le principal document portant sur les mesures d'exécution des SGS. En environ 33 000 mots, il définit et met en oeuvre l'intention de la loi. Il s'agit d'un document de troisième ou de quatrième niveau. Pour comprendre les SGS, vous devez connaître l'IP numéro SUR-001. Or, la majorité des intervenants du secteur de l'aviation ne la connaissent pas.
D'autres domaines de l'infrastructure de Transports Canada ne reçoivent pas d'appui. Aucun organisme crédible n'appuie les orientations actuelles de Transports Canada. Les inspections de validation de programme ont totalement remplacé les vérifications pour les organisations des SGS non visées par le RAC 705. Les SGS ont été mis en oeuvre sans que l'on examine les risques connexes ni que l'on planifie les ressources humaines. Les SGS ont été conçus et mis en place par des gens qui n'ont aucune expérience de l'aviation civile. Il n'y a pas eu de consultation publique en bonne et due forme. On a contourné le processus de consultation publique du Conseil consultatif sur la réglementation aérienne canadienne, le CCRAC, malgré les assurances données par Transports Canada au sujet de la participation de ce dernier. Les inspecteurs reçoivent une bien piètre formation.
Les SGS sont mis en oeuvre, mais ont peu d'effets auprès des sociétés visées par le RAC 705. La mise en oeuvre des SGS est au point mort.
L'infrastructure réglementaire est en décrépitude. Le fait que les décideurs et le personnel d'Ottawa de Transports Canada se concentrent sur les SGS fait péricliter les autres domaines de la réglementation aérienne. La mise en oeuvre et l'administration des SGS absorbent presque tout le temps et les efforts de tout le personnel de Transports Canada.
La liste de surveillance aérienne du Bureau de la sécurité des transports du Canada renferme 85 recommandations ouvertes sur la sécurité. Pour certaines d'entre elles, la réponse de Transports Canada est jugée non satisfaisante. Certains règlements et certaines normes sont mauvais sur le plan technique depuis des années.
Les résultats de l'attitude générale et des interventions de Transports Canada, Aviation civile, se voient facilement dans les réactions des experts en sécurité publique. Vous en trouverez d'autres preuves dans les Résultats organisationnels du sondage auprès des fonctionnaires fédéraux. Examinez le nombre de jours de travail perdus parce que des employés de Transports Canada sont absents pour des raisons médicales, en mettant l'accent sur le congé dû au stress, ce qui va dans le sens des exemples que je connais.
Les effets à long terme sur la sécurité aérienne de la nouvelle approche de Transports Canada, y compris le recours aux SGS, se feront seulement sentir à long terme, quand le bilan du Canada en matière de sécurité aérienne changera par rapport au reste du monde développé sur le plan technologique, dont la sécurité aérienne s'améliore constamment. Si le gouvernement s'intéresse vraiment à la sécurité aérienne au Canada et aux effets de la mise en oeuvre des SGS, veuillez mener deux sondages d'opinion auprès des propres inspecteurs de Transports Canada et de l'industrie aéronautique canadienne.
J'ai terminé, et je crois avoir réussi à respecter le délai de 10 minutes.
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L'Association des pilotes fédéraux du Canada n'est pas contre les SGS. Nous sommes très préoccupés par rapport au SGS de Transports Canada, qui est devenu le seul niveau de sécurité au Canada.
En introduction, je puis vous dire que j'ai été pilote pendant 40 ans. Le gros de mon expérience est dans les Forces canadiennes, où j'ai servi pendant 23 ans et donné de la formation sur les avions à réaction et les rondes de surveillance le long du littoral océanique du Canada. Pendant le reste de ma carrière, j'ai travaillé à Transports Canada à la formation des inspecteurs pilotes, à gérer le programme de Pilote vérificateur agréé et j'ai aussi occupé d'autres fonctions.
Tout comme j'ai servi le public canadien, dans les forces armées, je considère que le travail que j'effectue est également dans l'intérêt du public.
Nos membres sont composés de 382 pilotes brevetés qui travaillent comme inspecteurs à Transports Canada et au Bureau de la sécurité des transports du Canada. Nous représentons également 32 pilotes brevetés qui travaillent à NavCanada.
Je peux vous dire que le nombre d'inspecteurs pilotes brevetés est à son plus bas niveau. Aujourd'hui, nous avons 50 inspecteurs de moins que lors de ma dernière comparution devant votre comité en novembre 2009, lorsque Transports Canada avait promis d'embaucher davantage d'inspecteurs.
Un des premiers témoins à comparaître devant votre comité était le vérificateur général, M. Michael Ferguson. Son témoignage avait semé d'importants doutes sur les faits qui vous avaient été présentés par les fonctionnaires de Transports Canada en matière de sécurité ferroviaire. Entre autres choses, M. Ferguson avait dit au comité que Transports Canada n'avait terminé que 26 % des vérifications des SGS auprès des compagnies ferroviaires qui, selon le ministère, étaient nécessaires pour assurer la conformité aux règlements de sécurité. Cette déclaration et d'autres observations contredisaient clairement celles des représentants de Transports Canada qui avaient témoigné devant vous seulement quelques jours avant M. Ferguson.
Je pense que la déclaration de M. Watson, à la suite du témoignage du vérificateur général, était des plus appropriés, et je cite:
... J'ai l'impression que si nous devions lire entre les lignes, non seulement les Canadiens s'attendent-ils à mieux de la part de Transports Canada, mais je suppose qu'il en va de même pour vous, et je sais que le gouvernement s'attendait également à mieux.
Certains d'entre vous sont au courant de l'examen du vérificateur général du programme de sécurité aérienne de Transports Canada. Son bureau a mené une vérification en mai 2008 et une deuxième en avril 2012. Lorsqu'on met côte à côte les résultats des vérifications pour le transport ferroviaire et l'aviation, les parallèles sont frappants. Selon le vérificateur général, les manquements de Transports Canada dans la sécurité aérienne et ferroviaire sont dans les domaines suivants: le nombre d'inspecteurs et d'ingénieurs nécessaires pour assurer la sécurité est inconnu; il y a considérablement moins d'inspections faites que planifiées; le niveau admissible minimal de surveillance pour assurer la sécurité n'est pas établi et il n'y a pas de justification documentée pour modifier le niveau admissible minimal de surveillance.
Les représentants peuvent vous assurer que tous ces problèmes ont été réglés, mais les prévisions optimistes de Transports Canada sont fondées sur des tours de passe-passe. Les inspections, qui étaient requises annuellement, peuvent maintenant se faire aussi rarement qu'une fois tous les cinq ans. C'est une façon d'étirer les ressources en matière d'inspection, mais cela contribue-t-il d'une façon ou d'une autre à la sécurité du public?
Il est important d'insister sur le fait que les SGS pour l'aviation n'ont pas été conçus comme mesure unique visant à lutter contre les défaillances en mesure de sécurité, et ils ne l'ont jamais été. C'est tout à fait logique. La redondance est un principe important en sécurité, lorsqu'une mesure ne fonctionne pas, une autre est en place pour s'assurer que le pire ne se produit pas. Néanmoins, aujourd'hui, les SGS dans le transport aérien constituent essentiellement les seuls programmes de sécurité, puisque Transports Canada a pratiquement laissé tomber la supervision opérationnelle directe des lignes aériennes.
Le Canada a été parmi les premiers pays à adopter les SGS dans le transport aérien. En 2005, il a été le premier à les imposer aux grands transporteurs. Il n'y avait aucune voie à suivre, et cela relevait d'une expérience. Une approche tout à fait nouvelle et Transports Canada n'avait pas prévu que la mise en oeuvre des SGS allait accaparer toutes ses ressources d'inspection et plus encore. Il fallait donner du lest quelque part et c'est la supervision opérationnelle directe qui a écopé, puisqu'elle a pratiquement disparu. On ne fait rarement, voire jamais, des inspections sans préavis, des inspections des aires de trafic, des vols de vérification des compétences des pilotes et d'autres activités qui autrefois nous donnaient un aperçu de l'état de sécurité d'une ligne aérienne.
À ce jour, d'autres craintes en matière de sécurité sont ignorées sous le poids des lourdeurs entourant les SGS. Par exemple, Transports Canada annule toute évaluation exhaustive des SGS pour les aéroports et les aérodromes en faveur d'inspections de validation de programme, dont la portée est moins large.
Lorsque Transports Canada vous parle des milliers de vérifications et d'inspections qu'il réalise annuellement, vous devriez garder à l'esprit trois points importants. Premièrement, ces nombres sont gonflés. Le vérificateur général a dénoncé les déclarations de Transports Canada en matière d'inspection ferroviaire. Transports Canada ne peut tout simplement pas mener jusqu'à 30 000 inspections avec seulement 250 pilotes inspecteurs de première ligne.
Deuxièmement, les vérifications et les inspections dont parle le ministère ne portent que sur l'examen de documents et des entrevues téléphoniques. C'est un exercice superficiel qui permet à des problèmes sérieux de passer inaperçus.
Et finalement, Transports Canada s'attend à un accroissement du nombre d'accidents, et le ministère a rajusté ses cibles de rendement prévues pour en tenir compte. Cette augmentation, si elle s'avérait, correspondrait à 40 à 50 accidents de plus en 2014 qu'en 2011. Vous trouverez cette information à l'onglet 3.
Il y a quelques mois à peine, nous avons demandé à des inspecteurs de la sécurité de l'aviation civile ce qu'ils pensent des SGS. Neuf des 10 inspecteurs interrogés signalent que le SGS de Transports Canada les empêche, en fait, de corriger les problèmes de sécurité en tant opportun. C'est une augmentation de 80 % par rapport aux inspecteurs qui exprimaient avoir des craintes dans tous les débuts de la mise en place des SGS.
Veuillez examiner de près cette information. Les personnes consultées sont des professionnels et comme l'a noté un témoin du Conseil national des lignes aériennes du Canada plus tôt cette semaine, ils se soucient profondément de leur travail et de la sécurité du public. En réalité, la quasi-totalité des inspecteurs de l'aviation estime que les SGS contribuent davantage à cacher les problèmes qu'à les résoudre. Nous vous avons transmis le rapport d'enquête complet.
J'aimerais attirer votre attention sur deux exemples précis des conséquences découlant de cette réalité.
Quelques mois à peine avant l'écrasement d'un avion de la First Air à Nunavut, une évaluation menée par Transports Canada n'avait trouvé aucun problème dans le système de gestion de la sécurité de la ligne aérienne; en fait, il était sans faille. Néanmoins, l'enquête dans l'écrasement du 20 août 2011 menée par le Bureau de la sécurité des transports du Canada a permis de découvrir de nombreuses lacunes de la part de la ligne aérienne, qui ont contribué à l'accident, y compris le fait que le système de gestion de la sécurité de First Air ne fonctionnait pas convenablement. Douze personnes sont mortes dans cet impact sans perte de contrôle, et le bilan aurait pu être beaucoup plus élevé si l'accident s'était produit avec un avion rempli de passagers lors d'un atterrissage dans un aéroport important.
Aujourd'hui, les transporteurs commerciaux au Canada peuvent passer jusqu'à cinq ans avant que leur SGS ne fasse l'objet d'un seul examen ou qu'il ne soit visé par une inspection de validation de programme. C'est beaucoup trop long, et cela va bien au-delà des exigences internationales en matière d'inspections annuelles.
Le propre service d'opérations aériennes de Transports Canada éprouve des difficultés, en dépit de son SGS, selon des documents que nous avons obtenus grâce à une demande d'accès à l'information. Même lorsque les SGS sont mis en oeuvre et en dépit des meilleures intentions, Transports Canada continue à ne pas répondre aux exigences minimales en matière de sécurité. Transports Canada a eu deux accidents — dont la dernier a été mortel — depuis la mise en oeuvre des SGS.
Des témoins d'Air Canada, WestJet, Air Transat et du Conseil national des lignes aériennes du Canada ont déclaré plus tôt cette semaine que les partenariats de SGS entre l'industrie et l'organisme de réglementation protègent l'intérêt du public. Les membres du public voyageur devraient être préoccupés lorsqu'au moins la moitié du partenariat ne peut pas assurer le bon fonctionnement des SGS et subit des écrasements d'avion à un taux d'un tous les trois ans.
Lorsque nous comptons presque exclusivement sur les vérifications superficielles des SGS et les programmes de validation des inspections, des problèmes de sécurité passent inaperçus avec les conséquences tragiques que l'on connaît. Le programme de sécurité aérienne de Transports Canada doit absolument être changé.
Pour votre considération, nous vous recommandons ce qui suit.
La responsabilité et la propriété des SGS doivent revenir totalement au transporteur aérien.
Il faut concentrer les experts en SGS au sein d'une direction nouvelle à Transports Canada, qui puisse mener des visites d'aide auprès des compagnies aériennes. Cette direction aurait pour mandat d'aider les compagnies à gérer leur SGS et à en promouvoir les avantages. Ces visites ne seraient pas menaçantes puisqu'il s'agirait d'évaluations de validation pour aider l'industrie à mettre en oeuvre des SGS.
Pour la majorité des inspecteurs, il faut simplifier la méthode de vérification en supprimant toutes les activités liées à la vérification des SGS afin d'effectuer davantage de visites auprès des compagnies et d'inspections aléatoires sans préavis, y compris des visites de surveillance, des vérifications sur l'aire de trafic et des vérifications des dossiers. Pour améliorer la collecte d'informations, il faudrait consigner les résultats de toutes les visites. En fonction des renseignements recueillis sur l'année, il faudrait aller de nouveau à la compagnie pour mener des inspections annuelles. À l'aide de techniques modernes d'échantillonnage, il faudrait scruter les données pour détecter uniquement les non-conformités en matière de règlement dans le plus grand nombre de composantes de l'entreprise, en fonction des délais et des budgets.
Il faudrait appliquer des mesures coercitives lors de non-conformité lorsque les résultats montrent que le SGS n'a pas été suivi ou, dans le cas d'une entreprise qui n'est pas assujettie au SGS, lorsqu'on n'a pas pris toutes les mesures nécessaires pour remédier à la situation. Cela incitera les compagnies à améliorer leur SGS ou à en adopter un afin de recenser toute erreur future. Cette approche a le mérite d'utiliser un renforcement positif lorsque le système a fonctionné ou un renforcement négatif lorsque le système...
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Je voudrais vous remercier de me donner la possibilité de présenter les points de vue de nos membres sur la réforme de la surveillance des transports. L'Union canadienne des employés des transports est le syndicat national de la plupart des employés à Transports Canada, au Bureau de la sécurité des transports du Canada, à l'Office des transports du Canada, à la Garde côtière canadienne ainsi qu'à de nombreux aéroports du pays. Sur les 1 350 inspecteurs qui travaillent à Transports Canada, les seuls que nous ne représentons pas sont les inspecteurs pilotes, qui font partie de l'aviation civile.
Pour commencer, je tiens à dire que nos relations avec la direction de Transports Canada sont positives, axées sur la consultation et productives. Après tout, nos membres et la direction de Transports Canada ont le même objectif, soit celui de garantir le niveau le plus élevé de sécurité du public. Nous espérons que le comité, la ministre et le personnel de Transports Canada savent que le document qui vous a été remis a été rédigé de la façon la plus sincère en tenant compte de la sécurité des transports.
Je comprends que la séance d'aujourd'hui porte sur l'aviation civile et c'est donc sur ce mode de transport que portera la plupart de mes commentaires. Toutefois, du fait que nous représentons des inspecteurs dans tous les modes de transport, il est nécessaire de mettre l'aviation dans le contexte de la réalité multimodale de la surveillance de la sécurité. Le comité a pour instruction de cibler les mesures post-réglementaires nécessaires au lendemain de la tragédie de Lac-Mégantic. Voilà donc pourquoi la cible principale est le transport des marchandises dangereuses et le rôle du système de gestion de la sécurité ou le SGS dans la surveillance de la sécurité de Transports Canada.
Cet examen repose sur les questions qu'a posées la ministre. Avec l'indulgence du comité, je voudrais apporter quelques brèves réponses à ces questions du fait que les détails se trouvent dans notre mémoire. À l'heure actuelle, le corps d'inspecteurs du transport des marchandises dangereuses est séparé des autres modes de transport. Nous pensons que la surveillance du transport des matières dangereuses devrait être réintégrée dans les divisions de la surveillance modale des transports en mettant l'accent sur les inspections directes et non annoncées. La responsabilité devrait revenir à une direction au sein de chaque mode à Transports Canada. Ces changements entraîneront une plus grande responsabilité, moins de reproches et aussi une affectation plus efficace des ressources limitées.
Chaque direction générale gère la mise en application et la surveillance du SGS de façon très différente. L'accent mis sur la réglementation relativement au SGS propre à l'aviation est à ce point prononcé que de nombreux inspecteurs ne sont plus que des vérificateurs de programme. Ce phénomène se voit d'ailleurs déjà dans d'autres modes de transport, et surtout les chemins de fer. Il convient de noter que le concept de SGS repose sur le principe que les entreprises se conforment à la réglementation avant de l'adopter. Cela n'est tout simplement pas le cas pour un fort pourcentage d'entreprises de l'aviation civile. Le SGS doit représenter un niveau supplémentaire de sécurité, et ne jamais remplacer les inspections directes et non annoncées par des inspecteurs qualifiés et spécialisés possédant le pouvoir d'imposer le respect des règlements et des sanctions.
À propos du SGS, les États-Unis adoptent une démarche entièrement différente de celle du Canada, en ce sens qu'ils s'appuient beaucoup moins sur le SGS pour la surveillance réglementaire dans tous les modes de transport. Ils valorisent par ailleurs les dénonciateurs en leur offrant des incitatifs financiers considérables. Selon nous, il devrait y avoir un bureau indépendant de la protection des dénonciateurs auprès duquel les travailleurs des transports, aussi bien au sein du gouvernement qu'à l'extérieur, pourraient signaler des situations sans crainte de représailles. Le système de surveillance des États-Unis comporte un grand nombre de caractéristiques positives auxquelles le Canada devrait s'intéresser.
L'aviation civile est une division de la surveillance en crise. Le recours au plan intégré de SGS crée une situation où le rôle des inspecteurs consiste à vérifier les documents des entreprises. Lorsqu'ils quittent leurs bureaux pour procéder à une vérification du SGS, aussi appelée « évaluation » par le ministère, les exploitants aériens doivent être prévenus de leur arrivée, dans certains cas, la période minimale de préavis est de 10 semaines, ce qui donne à l'exploitant suffisamment de temps pour corriger toute anomalie qui aurait pu exister à la date de vérification du SGS.
Les vérifications du SGS ont remplacé les inspections directes et non annoncées plutôt que de représenter un niveau supplémentaire de sécurité. Les inspecteurs sont d'avis qu'il s'agit d'une grave erreur. Le fait de confier aux compagnies aériennes la responsabilité principale de la surveillance de la sécurité revient un peu à laisser le loup garder la bergerie.
Depuis longtemps, l'UCET préconise que le Système de gestion de la sécurité constitue une strate supplémentaire et que la vérification ou l'évaluation du SGS soit faite totalement séparément de la fonction directe d'inspection.
Les inspecteurs du transport aérien civil sont des spécialistes hautement qualifiés, dont plusieurs ont des compétences en entretien des appareils, en génie ou d'autres qualifications importantes. De nos jours, Transports Canada recrute à tort des généralistes pour occuper ces postes d'inspection en mettant l'accent sur les relations interpersonnelles ou l'esprit d'équipe, plutôt que sur les connaissances, l'expertise et les compétences dans le secteur.
Transports Canada m'a dit qu'on jumelait les descriptions d'emploi, et qu'on supprimait désormais la nécessité de posséder des compétences techniques, les candidatures étant versées dans un bassin commun. Cela illustre le fait que Transports Canada utilise le SGS à mauvais escient en le substituant aux inspections directes.
Le transport aérien des marchandises dangereuses est un autre sujet inquiétant. Récemment, 18 postes d'inspection du TMD ont été transférés de l'aviation civile à la direction du TMD. La surveillance du transport de ces marchandises devrait demeurer la responsabilité de chaque mode de transport et les inspections directes devraient être harmonisées avec les inspections directes de chaque transporteur.
À la lecture de notre mémoire, vous constaterez que nous signalons des principes supplémentaires importants non seulement pour l'aviation civile mais pour tous les modes de transport.
La délégation ministérielle quant à la surveillance ne devrait pas être autorisée sauf pour des fonctions précises comme les nouveaux appareils et les mises à niveau. S'il y a délégation, il faut établir des règles sur les conflits d'intérêts et les faire respecter.
Le ratio entre inspecteurs et effectifs est beaucoup trop bas. Il n'y a aucune raison que les inspecteurs ne représentent que 58 % de l'effectif total au sein de la Direction de la sécurité de Transports Canada et seulement 23 % au sein de l'effectif total de Transports Canada.
On attend trop longtemps avant de donner suite aux recommandations du Bureau de la sécurité des transports du Canada. On devrait imposer des délais précis pour la mise en oeuvre des recommandations du bureau et les inspecteurs devraient jouer un rôle central au sein des groupes de travail pour le suivi que fait le bureau.
Pour tous les modes de transport, les incidents devraient être divulgués dans une base de données distincte.
En conclusion, bien des remarques faites aujourd'hui s'appliquent non seulement à l'aviation civile mais à tous les modes de transport. Les inspections directes devraient toujours être la principale façon d'exercer une surveillance. Le TMD devrait s'appliquer à chaque mode de transport et relever d'un haut fonctionnaire responsable au sein du ministère. Des vérifications du SGS et des inspections réglementaires devraient se faire de façon distincte pour chaque mode. Il faut un bureau indépendant pour assurer la protection des dénonciateurs.
Je dois signaler que je n'expose pas ici mes propres opinions. Je présente le point de vue de nos experts à Transports Canada, les inspecteurs qui font le travail quotidiennement. La principale responsabilité de Transports Canada est la sécurité et non pas la promotion de l'industrie.
Merci.
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Merci beaucoup, monsieur le président.
Merci, mesdames et messieurs, d'être venus témoigner ce matin.
Étant donné les témoignages que nous avons entendus, je ne sais pas par où commencer. C'est franchement incroyable. Ce que nous disent les inspecteurs de première ligne est renversant. Ce sont des gens qui ont 30, 40 ou 50 ans d'expérience... 100 ans d'expérience conjuguée en première ligne — notamment d'anciens pilotes — et ce qu'ils nous disent va en l'encontre des déclarations de tous les fonctionnaires de Transports Canada et des représentants des compagnies aériennes.
Monsieur le président, je ne sais pas par où commencer mais... Je vais d'abord m'adresser à M. Slunder.
Monsieur Slunder, vous avez parlé il y a un instant du sondage, ou de l'enquête, auprès de vos propres membres, les inspecteurs. À plusieurs reprises, ici au comité, les membres du parti ministériel ont essayé de rejeter du revers de la main ces conclusions en raison de leur attitude à l'égard des organisations syndicales, ce qui est malheureux étant donné le danger que cela comporte pour les Canadiens. Je ne comprends pas pourquoi le gouvernement s'enferre dans cette idéologie antisyndicale, car c'est très dangereux pour les Canadiens étant donné que les travailleurs de première ligne qui font le travail quotidiennement, qui le font consciencieusement, constatent des situations pour lesquelles, dans tous ses mémoires, il présente des recommandations positives pour leur redressement.
En comité plénier, on a demandé à la ministre si elle avait pris connaissance de votre enquête. Elle a répondu que non. Elle ne l'avait pas vue ni lue. Elle était accompagnée du sous-ministre et des sous-ministres adjoints. Ces derniers ne l'avaient pas lue non plus apparemment, mais elle a maintenu ce que vous avez décrié ici, à savoir qu'il n'y a que 250 inspecteurs pilotes pour 30 000 inspections.
Pouvez-vous nous aider à comprendre ce qui pousse un ministre de la Couronne à citer des chiffres qui ne sont manifestement pas les bons?