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Merci beaucoup, monsieur le président. Tiff et moi vous remercions de nous avoir invités à vous présenter les faits saillants des plus récentes prévisions économiques de la Banque du Canada.
La Banque s'est engagée à communiquer ouvertement et efficacement afin que les Canadiens sachent comment elle s'y prend pour réaliser son mandat, qui consiste à favoriser la prospérité économique et financière du pays. L'un des meilleurs moyens d’y parvenir consiste à témoigner devant votre comité et à répondre à vos questions.
Dans un premier temps, j’exposerai brièvement les perspectives d'évolution de l'inflation établies par la banque, puis celles concernant la croissance de l'économie mondiale et de l'économie canadienne. J'aborderai ensuite certains travaux de recherche menés récemment par la banque, et je terminerai par les tendances observées à l'heure actuelle.
L'inflation demeure faible au Canada. Nous prévoyons que l'inflation mesurée par l'indice de référence restera nettement en deçà de notre cible de 2 % cette année et qu'elle retournera à la cible d'ici deux ans. L'inflation mesurée par l'IPC global devrait toutefois se rapprocher de la cible au cours des prochains trimestres en raison de facteurs temporaires. Permettez-moi de prendre un moment pour vous expliquer ce que j’entends par là.
Nous nous attendons à ce que les capacités excédentaires au sein de l'économie et la concurrence accrue dans le commerce de détail maintiennent l'inflation mesurée par l'indice de référence sous la cible jusqu'aux premiers mois de 2016. En même temps, les prix à la consommation de l'énergie plus élevés et le niveau plus faible du dollar canadien contribueront à faire remonter l'inflation mesurée par l'IPC global.
L'inflation mesurée par l'IPC global demeurera relativement près de la cible tout au long de la période de projection, alors même que la pression à la hausse exercée par les prix de l'énergie s'estompera, car les effets de la concurrence dans le commerce de détail vont s'amenuiser graduellement, et les capacités inutilisées, se résorber. Lorsque cela se produira, l'inflation mesurée par l'indice de référence remontera graduellement à 2 % et rattrapera l'inflation mesurée par l'IPC global.
[Français]
Passons maintenant aux perspectives économiques.
La croissance mondiale devrait se raffermir au cours des trois prochaines années, à mesure que les vents contraires qui ont bridé l'activité vont se dissiper.
Dans l'ensemble, le taux de croissance de l'économie mondiale devrait augmenter pour s'établir à 3,3 % en 2014 et à 3,7 % en 2015 et en 2016. Au Canada, la croissance du PIB réel devrait avoisiner 2,5 % en moyenne en 2014 et en 2015, avant de ralentir pour se situer autour de 2 % par la suite.
Ces chiffres concordent, pour l'essentiel, avec les prévisions de la Banque du Canada publiées en janvier, mais ils ne rendent pas compte de l'aspect qualitatif des perspectives qui ont changé de façon notable, surtout en ce qui concerne les pays émergents et l'Europe.
La croissance en Europe est modeste, mais l'inflation reste trop faible et la reprise, qui donne des signes encourageants, pourrait être compromise par la situation concernant la Russie et l'Ukraine.
La Chine et d'autres économies émergentes affichent une croissance solide, quoique les vulnérabilités financières soient plus inquiétantes, en particulier l'intensification de la volatilité sur les marchés en raison de l'incertitude politique.
Cependant, la reprise économique aux États-Unis se déroule comme prévu, et ce, malgré les chiffres peu élevés affichés dernièrement, qui sont en grande partie attribuables à la météo inhabituelle. De fait, la demande privée pourrait se révéler plus forte que prévu.
[Traduction]
Par ailleurs, les difficultés auxquelles l'économie canadienne est confrontée ne vous sont pas inconnues. Les défis sur le plan de la compétitivité pèsent encore sur la capacité des exportateurs canadiens de profiter du renforcement de la croissance à l'étranger.
Compte tenu de l'importance du secteur des exportations dans une économie ouverte comme la nôtre, et du décalage grandissant entre les exportations canadiennes et la demande étrangère, la banque a approfondi son analyse du secteur des exportations, et notamment des exportations hors énergie.
Quand on subdivise le secteur des exportations hors énergie en un grand nombre de sous-secteurs, des tendances et des faits intéressants se dégagent. Premièrement, on découvre que certains sous-secteurs, comme les machines et le matériel, les matériaux de construction, les services commerciaux ainsi que les aéronefs et pièces d'aéronefs, évoluent en phase avec les facteurs fondamentaux, ou, même que, dans certains cas, ils ont un meilleur rendement que les sous-secteurs américains correspondants. Cela donne à penser qu'à mesure que la reprise aux États-Unis gagnera en vigueur et se généralisera, beaucoup de nos exportations en bénéficieront. Le niveau plus faible du dollar canadien contribuera aussi au redressement de ces sous-secteurs.
D'autres sous-secteurs, dont les constructeurs de camions et de véhicules automobiles, les fournisseurs d'aliments et de boissons et les fabricants de produits chimiques, profiteront eux aussi d'un dollar canadien plus faible, mais dans une moindre mesure, étant donné qu'ils doivent faire face à de plus grands défis sur le plan de la compétitivité. Leur reprise sera ainsi plus lente.
Le portrait global de la situation laisse entrevoir une convergence graduelle entre le taux de croissance des exportations canadiennes et celui de l'économie américaine. Mais cette étude plus détaillée indique que le décalage entre les exportations et la demande étrangère est appelé à persister. Et ne vous y trompez pas. Ce décalage est réel et important.
La bonne nouvelle, c'est que nous savons maintenant plus précisément ce qu'il touche, à savoir la moitié environ de nos exportations hors énergie. La mauvaise nouvelle, c'est que la tenue de ces sous-secteurs est pire qu'on ne le pensait précédemment. Cette compréhension plus approfondie de ce secteur est précieuse, mais elle n'atténue pas nos inquiétudes concernant les défis qui nous attendent.
Nous croyons encore que la hausse de la demande mondiale de biens et services canadiens, conjuguée au niveau élevé postulé pour les prix du pétrole, stimulera les investissements des entreprises canadiennes et contribuera à réorienter l'économie sur une trajectoire de croissance plus soutenable.
[Français]
Nous continuons à nous attendre à un atterrissage en douceur dans le marché du logement et à une stabilisation du ratio de la dette pour ce qui est du revenu des ménages canadiens. Néanmoins, les déséquilibres restent élevés dans le secteur du logement et ils poseraient un risque important si la situation économique se détériorait.
Nous observons, de manière anecdotique du moins, que de plus en plus de gens sont conscients de ce risque. Les consommateurs se comportent de façon responsable. Par exemple, les acheteurs optent pour des maisons moins chères que ce que leur crédit leur permettrait, et ce, afin d'éviter de se retrouver surendettés si les taux d'intérêt montaient.
Les banques se montrent également plus prudentes dans l'octroi de prêts. Elles veillent à ce que les emprunteurs soient en mesure d'assurer le service de leurs dettes si les taux augmentent. Ainsi, même si le risque pourrait être notable, nous sommes convaincus qu'il n'est pas démesuré.
[Traduction]
En somme, la banque est encore d'avis que les moteurs déterminants de la croissance et de l'inflation se raffermissent graduellement au Canada. Toutefois, ce point de vue est fortement tributaire du redressement projeté des exportations et des investissements. Selon un consensus de plus en plus large, quand l'inflation aura regagné la cible, les taux d'intérêt demeureront plus bas que ce à quoi nous étions habitués dans le passé, en raison de l'évolution démographique et parce que, après s'être maintenus à des niveaux exceptionnellement bas pendant une période aussi longue, les taux d'intérêt n'auront pas à varier autant pour exercer le même effet sur l'économie.
L'inflation sous-jacente devant rester sous la cible pendant quelque temps, les risques à la baisse entourant l'inflation demeurent importants, de même que les risques associés aux déséquilibres dans le secteur des ménages. La banque estime que la résultante de ces risques reste dans la zone pour laquelle la politique monétaire actuelle est appropriée et, comme vous le savez, elle a décidé le 16 avril de maintenir le taux cible du financement à un jour à 1 %. Le moment et l'orientation du prochain changement du taux directeur varieront en fonction de l'influence des nouvelles informations sur la résultante des risques.
Avant que Tiff et moi répondions à vos questions, j'aimerais prendre un moment pour dire quelques mots sur l'homme assis à mes côtés.
La relation de Tiff avec la banque remonte à loin, à l'époque où, nouvelle recrue, il venait d'obtenir sa maîtrise. Je l’ai embauché à cette époque. Les contributions qu'il a apportées tout au long de sa carrière ont été considérables. À la banque, son intelligence et ses compétences en gestion nous manqueront. Mais nous regretterons aussi l'excellent ami qu'il était pour de nombreux collègues, moi y compris. Nous savons néanmoins que Tiff continuera à contribuer au bien-être financier du Canada en tant que doyen de l'École de gestion Rotman, où il s'attachera à assurer la formation de la prochaine génération d'économistes et de chefs d'entreprises qui garantiront au Canada un avenir prospère.
Tiff s'est acquitté de ses fonctions de premier sous-gouverneur avec un tel brio que pour le remplacer, nous avons dû scinder son poste en deux et trouver deux personnes pour lui succéder. J'ai le plaisir d'annoncer que nous serons en de bonnes mains.
Je me réjouis à la perspective de vous présenter Carolyn Wilkins, la prochaine première sous-gouverneure, qui supervisera la planification stratégique et les opérations de la banque, et partagera la responsabilité de la conduite de la politique monétaire.
Je serai également heureux de collaborer avec notre nouveau chef de l'exploitation, Filipe Dinis, qui sera chargé de la gestion de l'ensemble des fonctions administratives de la banque.
Cela étant dit, Tiff et moi serons heureux de répondre à vos questions.
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Oui, bien sûr. J'aimerais attirer l'attention du député sur un document d'information que nous avons affiché sur notre site Web la semaine dernière. Il compte quatre ou cinq pages qui résument ces concepts. Par conséquent, je vais maintenant m'efforcer de mettre en relief les points saillants de ce document.
La méthodologie employée n'est pas très complexe. Le fait est que, dans les modèles macroéconomiques que nous utilisons pour modéliser l'ensemble de l'économie, les exportations sont regroupées sous une seule catégorie ou deux catégories selon qu'il s'agit de ressources ou non. La catégorie qui comprend les exportations non liées aux ressources englobe encore de nombreuses marchandises.
En fait, au cours des 18 à 24 derniers mois, nous avons observé un décalage croissant entre les moteurs déterminants de nos exportations non liées aux ressources et le volume de ces exportations. À l'heure actuelle, nous avons exporté de 35 à 40 milliards de dollars de marchandises de moins que nos modèles l'avaient prévu à ce moment-là.
En décomposant cette catégorie en ses 31 sous-secteurs, nous avons été en mesure de déterminer qu'en fait, environ la moitié d'entre eux avaient évolué grandement en phase avec leurs moteurs déterminants. Cela signifie que le terme d'erreur qui nous préoccupe se limite à un groupe plus restreint, bien qu'il comprenne tout de même près de la moitié de nos exportations.
Parmi les exemples que vous avez mentionnés, on retrouve les exportations d'automobiles et de camions légers. En fait, ces exportations ont suivi raisonnablement bien la croissance et la demande enregistrées aux États-Unis, ce qui n'a rien de très étonnant compte tenu de l'intégration du marché automobile nord-américain. Toutefois, dans le passé, ce marché n'était pas sensible aux fluctuations des taux de change, et nous savons, en outre, qu'au cours des deux ou trois dernières années, la majeure partie des nouveaux investissements dans ce secteur n'ont pas été effectués au Canada. Nous en concluons que, bien que ce secteur se débrouille assez bien en ce moment, il ne contribuera pas à réduire considérablement ce décalage que nous avons vu naître.
Les secteurs qui, selon nous, ouvriront la voie sont, pour la plupart, liés à l'activité d'investissement des États-Unis, qui a été relativement discrète compte tenu du stade où nous en sommes dans le cycle. La reprise aux États-Unis est principalement stimulée par la demande des consommateurs et une remontée dans le secteur du logement. Les entreprises n'ont pas vraiment commencé à suivre ce mouvement en investissant.
Nous croyons — en fait, nous avons fait état de notre conviction à cet égard, il y a environ six mois — qu'à mesure que la reprise aux États-Unis s'élargit et englobe le reste de ses secteurs, y compris celui des investissements et des dépenses gouvernementales — chose peu surprenante, les budgets des États et des administrations locales sont très serrés depuis un certain temps —, ces restrictions s'atténuent et, par conséquent, les moteurs commencent à fonctionner pratiquement à plein régime. À mesure que cela se produit, nous observerons au Canada une reprise plus vigoureuse des exportations dans de nombreux secteurs qui accusaient du retard.
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Oui. Du point de vue des entreprises, il y a un grand nombre de facteurs qui entrent en jeu pour déterminer la capacité concurrentielle, mais les économistes se limitent habituellement à prendre en compte les coûts relatifs de production, et toute fluctuation des taux de change peut exercer une influence. Ces taux déterminent notamment le prix auquel vous pourrez vendre votre produit, par exemple, à un acheteur américain.
Comme nous en avons traité dans notre allocution de la semaine dernière, l'augmentation des termes de l'échange au cours des cinq ou six dernières années a beaucoup profité au Canada. Ce sont surtout les prix des ressources naturelles, et du pétrole plus particulièrement, qui sont élevés. Lorsque des acheteurs étrangers doivent dépenser davantage pour se procurer nos produits d'exportation, c'est autant d'argent de plus qui entre au Canada.
Ce phénomène est généralement associé à une devise plus forte. C'est un peu comme lorsque vous promenez votre chien avec une laisse extensible. Le maître représente les termes de l'échange, et le chien personnifie le taux de change. Ce dernier multiplie les zigzags, mais le maître et son chien finissent par quitter le parc ensemble. Les empreintes laissées sont comparables à un graphique d'analyse économique. Vous avez un peu l'image. Ce sont deux éléments qui ont tendance à se suivre à long terme.
Le fait que nos termes d'échange actuels sont environ 25 fois supérieurs à leur moyenne des années 1990 change beaucoup de choses. Cela se traduit par une augmentation de revenus d'environ 7 % pour le Canada dans son ensemble. Ce n'est pas rien. L'appréciation du dollar canadien est l'une des conséquences de cette augmentation, et l'un des moyens d'en répartir les effets.
Un manufacturier canadien peut être touché à deux niveaux par ce phénomène. D'une part, l'important ralentissement économique aux États-Unis peut lui faire perdre de 40 % à 50 % de ses commandes d'exportation. D'autre part, le dollar canadien a pris de la valeur au cours de cette récession parce que le prix du pétrole n'a pas cessé d'augmenter. Ces deux facteurs rendent la conjoncture très délicate pour le secteur manufacturier. Avec la reprise économique aux États-Unis, la moitié du problème sera réglée. À plus long terme, il restera à nos entreprises à se donner les moyens de surmonter des situations semblables grâce à une croissance plus soutenue de leur productivité ou à d'autres mesures permettant de réduire les coûts.
C'est la raison pour laquelle nous affirmons que la moitié de notre secteur des exportations souffre actuellement d'une détérioration de sa capacité concurrentielle, et qu'il lui faudra assurément un certain temps pour replacer les choses, sans doute en trouvant de nouveaux clients au sein de marchés en pleine croissance, comme en Asie.
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Merci beaucoup, monsieur le président.
Je m'excuse auprès des témoins. Nous tentons de nous avancer dans les travaux du comité avant de passer à vos témoignages. Je tenterai d'être aussi bref que possible.
Nous avons analysé ce rapport sur l'approche recommandée pour l'étude du dernier projet de loi omnibus conservateur. Les députés ministériels ne seront pas surpris d'apprendre qu'en vertu de cette motion conservatrice, le défi du comité sera de confier à d'autres comités l'étude nominale de divers éléments de ce projet de loi, étant donné la complexité de celui-ci. Toutefois, aucun de ces comités ne pourra proposer d’amendements au projet de loi en fonction des témoignages qu'ils entendront. Comme vous le savez, monsieur le président, cette responsabilité nous revient, et nous n'avons pas le pouvoir de permettre à d'autres comités de proposer des amendements à ce projet de loi.
En vertu de ce processus, les autres comités renverront leurs sections à ce comité et, si l'on en juge par ce qui s'est passé auparavant, le comité mettra rapidement aux voix les amendements proposés à ce projet de loi complexe, alors que presque aucun membre de ce comité n'aura rencontré ni même entendu les témoins. Il s'agit d'une mauvaise façon d'établir des politiques et d'une mauvaise façon pour le gouvernement de se comporter. Cette pratique a causé des problèmes par le passé. On serait porté à croire que l'expérience est le meilleur des enseignants. Ce n'est pas le premier projet de loi omnibus que propose le gouvernement. Il adopte cette approche de demi-mesure en raison de la complexité et des nombreux éléments non financiers qui figurent dans cette mesure législative.
Je me souviens de l'époque où, alors qu'ils étaient dans l'opposition, les conservateurs se répandaient en injures contre cette tactique. Depuis, ils l'ont gonflée aux stéroïdes; celle-ci est maintenant pratique courante, mais elle ne devrait pas l'être. Ce n'est pas la façon habituelle de procéder.
Cette mesure législative contient un traité fiscal énorme, la soi-disant FATCA, qui risque de placer jusqu'à un million de Canadiens dans une situation précaire, ainsi que des mesures relatives aux travailleurs étrangers temporaires et à la réduction des frais hospitaliers, notamment.
Ces mesures méritent toute notre attention. C'est pour cette raison que les citoyens nous ont élus.
Cela dit, monsieur le président, nous soutenons que si un compromis ne peut être trouvé sur la façon de formuler cette mesure législative, le lien entre le travail des comités et des députés sera rompu. Les comités ont d'abord été créés pour étudier les projets de loi, entendre les témoignages et modifier les lois par l'entremise d'amendements que les membres jugent viables. L'histoire nous apprend également que dans le cadre des études sur ces projets de loi omnibus — et je ne me souviens pas qu'un seul amendement proposé par l'opposition ait été adopté par le gouvernement malgré les centaines et les centaines de pages de projets de loi omnibus —, le gouvernement a rejeté pratiquement tous les amendements proposés en fonction des témoignages d'experts. Tout cela, jumelé au fait qu'avec ce projet de loi omnibus, le gouvernement tente de corriger les erreurs du dernier projet de loi omnibus, qui lui comportait des mesures visant à corriger les erreurs du projet de loi omnibus précédent, montre que ce modèle à ses défauts.
J'implore le gouvernement de revoir son approche. Elle ne fonctionne pas pour lui, ni pour l'opposition et certainement pas pour les citoyens que nous sommes censés servir.
Pour le bien des témoins, monsieur le président, je ne m'étendrai pas davantage sur le sujet. J'ignore si mes collègues voudront intervenir, mais cette motion, telle que présentée par les députés ministériels, fait peu de choses outre contrarier un processus parlementaire essentiel à l'étude d'un projet de loi de quelque 300 pages qui aura un impact sur de nombreux aspects du droit canadien.
Je soupçonne que le prochain projet de loi omnibus devra corriger les erreurs qui se trouvent dans celui-ci. C'est toute une façon de diriger un pays. Ça ne fonctionne pas. J'aimerais que les conservateurs reviennent à leur ancienne position alors qu'ils étaient dans l'opposition et qu'ils détestaient ce genre de tactique.
C'est tout ce que j'avais à dire, monsieur le président.
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Merci, monsieur le président.
Inutile de vous excuser. La procédure relative aux travaux du comité m'est très familière. C'est encore de la musique à mes oreilles et, d'ailleurs, c'est une très bonne introduction.
Merci encore de nous avoir invités.
Je suis accompagné aujourd'hui de Mostafa Askari, directeur parlementaire du budget; de Peter Weltman, directeur parlementaire adjoint du budget par intérêt; et des auteurs de ce merveilleux rapport, Scott, Randall et Helen.
Je suis heureux d'être ici pour vous présenter les perspectives économiques et financières du Bureau du directeur parlementaire du budget publiées hier. Depuis notre dernier témoignage devant le comité, notre équipe a publié 15 rapports et nous continuons d'être très attentifs aux besoins du Parlement qui relèvent de notre mandat.
En ce qui a trait aux perspectives économiques, l'activité économique mondiale s'est raffermie au deuxième semestre de 2013 et l'embellie devrait se poursuivre en 2014 et en 2015 à la faveur d'un léger assouplissement de la rigueur budgétaire combiné à une politique monétaire encore très accommodante dans les économies avancées. Cela dit, cette situation peut se dégrader, du fait que les risques liés à une faible inflation attirent l'attention dernièrement.
Aux États-Unis, l'économie a affiché une croissance nettement plus vigoureuse au second semestre de 2013 que ce que l'on prévoyait en octobre 2013. Malgré cet essor supérieur aux attentes, le DPB a maintenu à 2,7 % sa prévision du taux de croissance de l'économie américaine pour 2014, en grande partie en raison des difficultés causées par le mauvais temps au premier trimestre de l'année. Pour le reste de la période de projection, la croissance attendue varie peu par rapport à ce que prévoyait le MPEF 2013.
Les projections du DPB concernant l'évolution des prix des produits de base, fondées sur l'indice des prix de produits de base de la Banque du Canada, sont légèrement supérieures à celle de la MPEF d'octobre 2013. Toutefois, les projections du DPB relatives à l'évolution de cet indice demeurent supérieures au cours de l'horizon à ce que les prix des contrats à terme laisseraient envisager, mais sont inférieures aux projections inchangées qu'a présentées la Banque du Canada dans son Rapport sur la politique monétaire d'avril 2014. C'est pour cela que le DPB a, par rapport à sa MPEF d'octobre 2013, révisé à la hausse ses perspectives concernant l'économie canadienne.
Actuellement, il prévoit que le PIB réel progressera de 2,1 % cette année, de 2,7 % l'an prochain, et de 2,5 % en 2016.
En 2017 et 2018, alors que l'activité économique atteindra son niveau potentiel, le PIB réel devrait être de moins de 2 %. Le DPB tient compte dans ses perspectives des mesures de stimulation et des mesures d'économies présentées à partir du Budget 2012. Il projette qu'en 2016, le niveau du PIB réel sera inférieur de 0,5 % à ce qu'il aurait été si ces mesures n'avaient pas été prises.
Cela se traduira par la création de 46 000 emplois de moins cette même année. Pour que ce soit bien clair, je ne parle pas d'une perte concrète de 46 000 emplois, mais, si ces mesures n'avaient pas été prises, il y aurait eu 46 000 emplois de créés.
La projection du DPB pour le PIB nominal, soit la mesure la plus large de l'assiette fiscale du gouvernement, est plus basse de 17 milliards de dollars annuellement, en moyenne, que la projection fondée sur les prévisions du secteur privé. Le DPB estime que la résultante des risques associés à la division du secteur privé pour le PIB nominal est orientée à la baisse, ce qui reflète probablement une incidence plus forte de compressions des dépenses gouvernementales, ainsi que des divergences d'opinions sur les prix des produits de base et leur impact sur la croissance du PIB réel et l'inflation du PIB.
En se fondant sur sa projection du PIB nominal, le DPB estime toutefois que le risque de dégradation des prévisions du secteur privé pour le PIB nominal concorde en gros avec l'ajustement annuel en fonction du risque du gouvernement de 20 milliards de dollars.
Je vais continuer en français.
[Français]
Je vais aborder la question des perspectives financières.
Le DPB projette des excédents budgétaires qui sont supérieurs aux perspectives indiquées dans sa Mise à jour d'octobre 2013 à la suite d'une embellie des perspectives économiques et des mesures annoncées dans la Mise à jour des projections économiques et budgétaires de 2014 et dans le Budget de 2014, en particulier la poursuite des compressions prévues des dépenses de programmes directes.
Le DPB estime que le déficit se chiffrera à 11,6 milliards de dollars, soit 0,6 % du PIB, en 2013-2014, que le solde budgétaire redeviendra excédentaire en 2015-2016 à 7,8 milliards de dollars et que cet excédent se maintiendra à hauteur de 8,6 milliards de dollars, soit en moyenne 0,4 % du PIB, pendant le reste de l'horizon de projection.
Le DPB juge que les chances d'équilibre budgétaire, voire d'excédent, sont d'environ 50 % en 2014-2015, de 70 % en 2015-2016, de 60 % en 2017-2018 et de 65 % en 2018-2019.
Les excédents que projette le DPB à moyen terme sont essentiellement attribuables au fait que l'économie tourne à un rythme supérieur à son niveau tendanciel, et non au fait que les revenus sont structurellement supérieurs aux dépenses projetées. Il n'y a donc guère de marge de manoeuvre pour appliquer de nouvelles politiques d'allègement fiscal ou de majoration des dépenses sans risquer de recréer des déficits structurels. Cela étant, le DPB a cerné plusieurs risques pour ses perspectives financières.
Premièrement, sa projection de l'indice des prix de base suppose qu'au bout de deux ans, les prix réels des produits de base resteront foncièrement inchangés. Par contre, la projection utilisant les prix des contrats à terme énergétiques et non énergétiques porte à croire que l'indice de prix de base baissera au cours de la période de projection. Si tel était le cas, le niveau du PIB nominal serait inférieur de 26 milliards de dollars à la projection du DPB pour 2018.
Deuxièmement, le pouvoir discrétionnaire dont jouit le gouverneur en conseil en matière de fixation du taux de cotisation à l'assurance-emploi introduit une incertitude considérable dans les projections des revenus. Si le gouvernement décide d'établir les taux de manière à équilibrer les revenus et les charges prévues, les revenus projetés et l'excédent budgétaire pourraient décliner de 2,2 milliards de dollars en 2015-2016 et de 2,8 milliards de dollars en 2016-2017.
Troisièmement, le DPB accepte telles quelles les projections de Finances Canada en matière de dépenses de programme directes, car le gouvernement a refusé de fournir les données nécessaires pour établir si les compressions en cours sont soutenables et pour permettre au DPB de procéder à ses propres projections des dépenses de programmes directes.
Une austérité aussi prolongée sur le plan des dépenses de programmes ne s'est encore jamais produite depuis la création des Comptes publics modernes. En règle générale, les coupes effectuées une année donnée sont suivies l'année suivante d'un relèvement moyen d'environ 6,4 %. Comme ce sera en 2014-2015 que se feront les réductions des dépenses de programme les plus sévères d'une année par rapport à l'autre, ces charges pourraient faire l'objet de pressions importantes. Si le rebond qui suit habituellement une période de réduction des dépenses de programme directes devait se produire en 2014-2015 ou en 2015-2016, il éliminerait l'excédent attendu en 2015-2016.
Mes collègues et moi serons heureux de répondre à vos questions sur nos perspectives économiques et financières ou sur toute autre question pertinente.
Merci, monsieur le président.
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Je souhaite la bienvenue aux témoins.
C'est une discussion intéressante. Comme vous le savez, le DPB joue un rôle complexe et difficile, qui se complique davantage, je suppose, avec les diverses demandes des députés et des partis politiques. Qu'il s'agisse de motifs politiques ou de quoi que ce soit d'autre, les demandes reposent sur un fondement économique.
Je pense qu'il faut mentionner que la responsabilité de l'ARC est prévue à la Loi de l'impôt sur le revenu et la Loi sur la taxe d'accise. Les fonctionnaires de l'ARC sont criminellement responsables de tout manquement à la confidentialité. Il ne faut donc pas prendre le tout à la légère. Cette particularité n'a assurément rien de simple lorsqu'il est question de renseignements personnels.
L'autre aspect, c'est la question citoyenne sur l'écart fiscal à laquelle la plupart des pays du G20 ne répondent pas, puisqu'ils n'arrivent pas à obtenir de renseignements pertinents à ce sujet, surtout en raison de la confidentialité et des difficultés de traitement des données. Je ne vous demande pas d'y répondre, mais je m'intéresse simplement à la difficulté de votre rôle, si vous avez un budget limité pour tenter de répondre aux questions. Vous avez une équipe qualifiée, mais limitée, et votre rôle n'a rien de simple.
J'aimerais revenir sur une remarque de M. Askari au sujet des exportations depuis 2000: vous dites que les exportations n'auraient pas contribué à l'économie canadienne depuis 2000. J'aimerais approfondir un peu la question. Je doute que ce soit exactement ce que vous vouliez dire, car sans les exportations... En fait, notre économie est axée sur les exportations, et plus particulièrement de marchandises. Si nous supprimions ces exportations de l'économie canadienne, je pense qu'il y aurait tout un manque à gagner. De façon approximative, 60 ou 65 % de notre économie en dépend, et le commerce avec les États-Unis représente 72 ou 73 % de ce chiffre. J'ai donc du mal à imaginer que les exportations n'aient pas contribué à l'économie depuis 2000.
Je vais vous donner la chance d'en parler un peu.