Conformément à l'ordre de renvoi du lundi 1er février 2021, nous poursuivons notre étude du projet de loi , Loi portant mise en oeuvre de l'Accord de continuité commerciale entre le Canada et le Royaume-Uni de Grande-Bretagne et d'Irlande du Nord.
La réunion d'aujourd'hui est télévisée et se tient selon le format hybride, conformément à l'ordre adopté à la Chambre le 25 janvier 2021. Je profite de l'occasion pour rappeler à tous les participants qu'il est interdit de faire des saisies d'écran ou de prendre des photos de votre écran pendant la réunion. Pour assurer le bon déroulement de la séance, je dois énoncer quelques règles à suivre, que vous connaissez sûrement déjà.
Veuillez attendre que je vous nomme avant de prendre la parole. Si vous participez à la réunion par vidéoconférence, veuillez cliquer sur l'icône du micro pour l'activer. Lorsque vous ne parlez pas, le micro doit être en sourdine. À titre de rappel, tous les commentaires des députés et des témoins doivent être adressés à la présidence.
Vous m'excuserez pour vendredi dernier. Nous n'avons pas réussi à commencer la réunion alors que les témoins étaient avec nous, mais nous sommes très heureux qu'ils se joignent à nous aujourd'hui.
Nous recevons Mme Ng, ministre de la Petite Entreprise, de la Promotion des exportations et du Commerce international.
Nous recevons aussi les représentants du ministère des Affaires étrangères, du Commerce et du Développement: Doug Forsyth, directeur général, Accès aux marchés et négociateur en chef, Accord de continuité commerciale Canada-Royaume-Uni — que les membres du Comité connaissent bien —; Allison Trenholm, négociatrice en chef adjointe, Accord de continuité commerciale Canada-Royaume-Uni; et Torsten Ström, avocat général, Direction générale du droit commercial international.
Enfin, nous recevons Aaron Fowler, négociateur en chef pour l'agriculture et directeur général, Direction des accords commerciaux et des négociations, du ministère de l'Agriculture et de l'Agroalimentaire.
Bienvenue à tous. Nous vous remercions d'avoir réorganisé votre horaire depuis vendredi dernier pour être avec nous aujourd'hui. Nous vous en sommes très reconnaissants.
Nous allons maintenant entendre la déclaration préliminaire de Mme Ng. Allez-y, madame la ministre.
:
Merci beaucoup, madame la présidente.
[Traduction]
Mesdames et messieurs les membres du Comité, je vous remercie de me donner l'occasion de témoigner une fois de plus devant le Comité permanent du commerce international de la Chambre des communes au sujet du projet de loi , Loi portant mise en œuvre de l'Accord de continuité commerciale entre le Canada et le Royaume-Uni.
Le commerce international est au cœur de la réussite économique et de la prospérité du Canada, et il ne fait aucun doute qu'il jouera un rôle essentiel dans une reprise inclusive et durable après la COVID-19. C'est pourquoi il est important pour le Canada non seulement d'établir de nouvelles relations commerciales, mais aussi de renforcer les liens existants.
Le Royaume-Uni représente notre plus grand marché en Europe. En 2019, il s'agissait de la troisième plus importante destination des marchandises canadiennes exportées à l'échelle mondiale. C'est aussi une source clé pour les partenariats en matière d'innovation, de science et de technologie. Les échanges commerciaux entre le Canada et le Royaume-Uni ont totalisé 29 milliards de dollars en 2019, faisant du Royaume-Uni notre cinquième plus important partenaire international. Le Royaume-Uni est aussi le deuxième plus important partenaire commercial du Canada en matière de services, derrière les États-Unis. La valeur des exportations a atteint près de 7,1 milliards de dollars l'année dernière. Le Royaume-Uni est la quatrième source d'investissements étrangers directs au Canada, dont la valeur était évaluée à 62,3 milliards de dollars en 2019.
Il est évident que l'Accord de continuité commerciale entre le Royaume-Uni et le Canada est essentiel pour les emplois au Canada, puisqu'il préserve un catalyseur essentiel d'un solide partenariat économique: l'AECG. L'accord que vous avez devant vous permet de veiller à ce que le Canada et le Royaume-Uni entretiennent et renforcent nos relations commerciales en préservant les principaux avantages associés à l'AECG. Comme il se fonde sur l'AECG, que les Canadiens connaissent bien, cet accord assurera une continuité, une prévisibilité et une stabilité pour les entreprises, les exportateurs, les travailleurs et les consommateurs du Canada, ce qui est plus important que jamais, alors que nous sommes aux prises avec la COVID-19.
Lorsqu'il sera pleinement mis en œuvre, l'accord permettra l'élimination des droits de douane prévue à l'AECG pour 99 % des produits canadiens exportés vers le Royaume-Uni. Il protègera pleinement les producteurs canadiens de tous les produits soumis à la gestion de l'offre et maintiendra notre accès prioritaire au marché pour les fournisseurs de services canadiens, ce qui comprend l'accès aux marchés publics du gouvernement du Royaume-Uni, dont la valeur est évaluée à environ 118 milliards de dollars par année. Il préservera les normes élevées des dispositions de l'AECG sur le travail, la protection de l'environnement et le règlement des différends.
De plus, bien que l'accord reproduise en grande partie l'AECG, il ne prévoit aucun nouvel accès au marché pour les produits laitiers ou tout autre produit sous gestion de l'offre, ce qui nous permet de respecter l'engagement du gouvernement, du et de la de ne pas accorder de nouveaux accès au marché pour les secteurs soumis à la gestion de l'offre dans les accords commerciaux signés par le gouvernement.
Nous entretenons des liens particuliers avec le Royaume-Uni et avons bâti une solide relation en matière de commerce et d'investissement. Le Canada et le Royaume-Uni ont une relation historique étroite et les deux parties sont prêtes à travailler ensemble pour maintenir cette relation dans l'après-Brexit, pour assurer la stabilité et la continuité des activités de nos entreprises.
Lorsque, guidé par la volonté de ses citoyens, le Royaume-Uni a tenu un référendum et a décidé de quitter l'Union européenne, sa décision a non seulement eu une incidence sur les relations commerciales et économiques du Royaume-Uni avec ses plus grands partenaires, mais elle signifiait aussi qu'il ne pouvait plus faire partie de l'AECG avec le Canada. Bien sûr, cette décision aurait pu avoir une incidence sur les entreprises canadiennes, surtout si le Royaume-Uni avait choisi de réévaluer ses priorités commerciales.
[Français]
Voilà pourquoi cet accord de continuité commerciale est si important.
[Traduction]
Les entreprises et les travailleurs canadiens de nombreux secteurs — des agriculteurs aux pêcheurs en passant par les innovateurs — dépendent de nos relations commerciales interdépendantes. Ils nous ont dit que ce qu'ils veulent le plus en ce moment, c'est de la stabilité. C'est exactement ce que leur donne cet accord.
L'accord de continuité commerciale permet au Canada et au Royaume-Uni de maintenir et de renforcer leur importante relation en préservant les avantages de l'AECG dans leurs rapports bilatéraux et en protégeant pleinement leurs chaînes d'approvisionnement, qui sont étroitement intégrées.
Madame la présidente, cet accord de continuité est bon pour les travailleurs et les entreprises. Il est bon pour le Canada et le Royaume-Uni. Sans l'accord de continuité commerciale, les entreprises canadiennes auraient été confrontées à l'incertitude qu'entraîneraient de nouvelles barrières et à des coûts plus élevés, en particulier dans les secteurs de l'agriculture, du poisson et des fruits de mer. Grâce à cet accord, nous pourrons bâtir un avenir meilleur pour les deux pays.
Dans l'accord de continuité commerciale, les deux pays s'engagent à entreprendre d'autres négociations dans l'année qui suivra son entrée en vigueur. Mon homologue du Royaume-Uni, la secrétaire Truss, et moi nous sommes engagées publiquement à mener ces négociations.
Bien sûr, nous solliciterons l'avis des Canadiens sur leur intérêt à l'égard de nouveaux pourparlers bilatéraux avec le Royaume-Uni. J'attends avec impatience de connaître l'opinion des Canadiens d'un bout à l'autre du pays dans le cadre de consultations publiques. Je me réjouis à l'idée de travailler à l'élaboration d'un accord de qualité qui sera moderne et global et qui comprendra d'ambitieux chapitres sur l'environnement, l'autonomisation économique des femmes, le travail et le commerce numérique.
Je tiens à dire à ceux qui ont souligné des domaines où des améliorations sont nécessaires que nous les écoutons. Je suis impatiente de me pencher sur ces enjeux. Nous reviendrons à la Chambre quand nous serons prêts à déposer les objectifs de négociation pour ce nouvel effort ambitieux.
Dans l'état actuel des choses, alors que le Canada et le Royaume-Uni travaillent à la ratification de cet accord, les deux pays ont conclu un protocole d'entente pour que les échanges commerciaux puissent se poursuivre jusqu'à ce qu'ils aient, tous deux, mené à terme le processus d'approbation intérieur.
[Français]
L'ACC assurera la stabilité et demeurera en vigueur jusqu'à la mise en place d'un nouvel accord, que nous souhaitons conclure dans un délai de trois ans.
[Traduction]
Pour résumer, madame la présidente, l'accord de continuité commerciale ne ressemble à aucun autre accord commercial que le Canada a négocié. Les entreprises et les industries canadiennes, ainsi que les provinces et les territoires, nous ont fait part de l'importance de maintenir une relation commerciale privilégiée avec le Royaume-Uni. L'adoption réussie du projet de loi permettra de réduire au minimum les perturbations que pourraient subir les entreprises canadiennes en cette période critique.
Tout au long du processus de ratification, et une fois que cet accord entrera en vigueur, le Canada continuera d'appuyer les entreprises canadiennes qui font des affaires avec le Royaume-Uni et l'Union européenne, ou qui y exercent des activités, grâce à ce que j'appelle une approche de type « Équipe Canada » en matière de commerce.
Cette démarche est cruciale pour la relance économique et la prospérité future du Canada. Alors que nous cherchons à remonter la pente et à rebâtir en mieux, il sera d'autant plus important de continuer à offrir aux entreprises canadiennes autant d'options et de débouchés que possible.
L'accord dont nous sommes saisis préservera les liens commerciaux étroits entre nos deux pays et permettra au Canada de continuer à jouir d'un accès privilégié à l'un de ses plus importants partenaires. Quant aux entreprises d'ici, elles n'auront plus à craindre de nouvelles turbulences ou difficultés. Pour tout dire, les entreprises canadiennes n'ont tout simplement pas les moyens de se passer de cet accord.
C'est pourquoi je demande instamment à tous les députés de prendre en considération les avantages de l'accord de continuité commerciale, notamment le maintien de conditions préférentielles dans nos échanges avec un partenaire clé, et d'exprimer ainsi leur appui aux entreprises et exportateurs canadiens.
[Français]
Madame la présidente, permettez-moi de conclure en disant que l'Accord de continuité commerciale avec le Royaume-Uni est bon pour les Canadiens, bon pour le peuple du Royaume-Uni et bon pour les relations solides et mutuellement bénéfiques que nos deux pays ont bâties au cours des 150 dernières années.
:
Je vous remercie de votre invitation et de donner l'occasion à l'Association internationale des machinistes et des travailleurs et travailleuses de l'aérospatiale de vous faire part de son point de vue sur cet important sujet.
Notre association est le plus grand syndicat du secteur aérospatial et de l'industrie du transport aérien. Nous représentons plus de 55 000 membres qui se trouvent partout au Canada, dont 22 000 travaillent dans le secteur de l'aviation, de l'aérospatiale et du transport aérien. Nous avons également des membres qui travaillent dans divers secteurs et industries, allant des services de contrôle dans les aéroports du Canada au travail du bois, en passant par la fabrication de pièces automobiles, le secteur hôtelier, les soins de santé, les additifs de peinture sur mesure, la fabrication de pompes industrielles et la fabrication de plastiques. Nous sommes aussi diversifiés que nos membres et nous saisissons toutes les occasions de défendre les intérêts de nos membres et des travailleurs de tout le Canada sur les questions qui les concernent.
Le départ du Royaume-Uni de l'Union européenne a des ramifications profondes, et l'obtention d'un accord de transition permet de maintenir le commerce et la stabilité dans les relations commerciales entre le Canada et le Royaume-Uni. C'est indéniable. Notre association soutient sans équivoque les efforts visant à diversifier et à élargir les débouchés commerciaux, car des industries en santé fournissent aux Canadiens des emplois sur lesquels ils peuvent compter. Toutefois, avec les possibilités viennent les défis et aujourd'hui, au nom de notre association, j'aimerais souligner où nous voyons à la fois des possibilités et des problèmes dans l'accord proposé.
Nous recommandons fortement que l'AECG ne soit pas maintenu dans sa forme originale et que le gouvernement fédéral s'attaque aux problèmes avant d'adopter le projet de loi . Dans l'intervalle, nous voyons une occasion pour le gouvernement fédéral d'améliorer l'AECG par l'entremise du projet de loi C-18 et d'assurer le meilleur accord commercial possible pour le Canada et les Canadiens.
La contribution de l'industrie aérospatiale canadienne ne doit pas être oubliée. L'industrie aérospatiale a prouvé de manière indéniable qu'elle est le moteur de l'innovation et de la technologie dans tous les secteurs. Depuis des décennies, l'expertise, les connaissances et les compétences du Canada sont reconnues dans le monde entier. En fait, le gouvernement canadien dépend davantage de cette industrie pour ses recettes que les concurrents du Canada. L'aérospatiale est une industrie qui contribue grandement à l'économie canadienne, soit à hauteur de quelque 28 milliards de dollars annuellement, de même qu'au PIB. Il s'agit en outre d'une industrie à forte intensité d'exportations. En effet, 93 % des entreprises de fabrication aérospatiale sont exportatrices, ce qui est 44 % supérieur à la moyenne du secteur manufacturier. Les entreprises de fabrication aérospatiale ont également un commerce plus diversifié que la moyenne du secteur manufacturier, ce qui souligne l'importance du commerce pour cette industrie, qui doit se faire à des conditions favorables.
L'industrie est également une source d'emplois bien rémunérés, stables et syndiqués qui soutiennent les Canadiens de la classe moyenne. Sur le marché du travail canadien, l'industrie aérospatiale emploie, et de loin, plus de travailleurs que l'industrie automobile: 208 000 contre 123 000 travailleurs, ou 60 % de plus que l'industrie automobile. Pourtant, à ce jour, l'industrie a bénéficié de peu de soutien direct dans son ensemble. Nous avons plaidé en faveur d'un soutien pour cette industrie avant la pandémie et nous soutenons tous les efforts visant à développer l'industrie aérospatiale canadienne, afin de nous rendre plus concurrentiels. Il est certain que les débouchés commerciaux ouvrent des portes à la croissance et à la visibilité.
Il y a des occasions à saisir sur le marché de l'aérospatiale au Royaume-Uni. Selon une étude réalisée par le délégué commercial, il existe un créneau pour l'aérospatiale canadienne sur le marché britannique. Bien que nous ne constituions qu'une petite partie du portefeuille commercial du Royaume-Uni, soit environ 1,6 %, nous croyons que l'industrie aérospatiale canadienne devrait profiter des possibilités offertes par l'accord de transition.
Le délégué commercial a recensé des occasions pour les entreprises aérospatiales canadiennes, qui seraient facilitées par le maintien des termes de l'accord dans le cadre de l'AECG. Les perturbations des marchés mondiaux dues à la pandémie entraînent inévitablement des fusions et des acquisitions, l'industrie de l'aérospatiale et de la défense ayant été désignée comme la plus exposée. Le délégué commercial conseille aux entreprises canadiennes disposant de liquidités d'examiner les cibles d'acquisition potentielles et d'investir au Royaume-Uni.
D'autres possibilités intéressantes sont les solutions logicielles sur lesquelles repose la numérisation de la gestion de la chaîne d'approvisionnement, ainsi que la technologie sur laquelle repose la transformation de l'industrie en raison de la crise du coronavirus, comme les cybersolutions, les solutions de surveillance et les capacités de type CBRN qui soutiennent la désinfection.
Nous devons positionner l'industrie aérospatiale pour réussir sur le marché britannique en élaborant une politique industrielle. À l'échelle mondiale, les économies ont été ébranlées par la pandémie, paralysant plusieurs industries. Les dépenses publiques ont augmenté afin de soutenir les travailleurs et les entreprises en cette période difficile. Il est clair que la reprise prendra des années, et nous recommandons l'élaboration d'une politique industrielle exhaustive visant à soutenir et à stimuler les secteurs durement touchés, tels que l'aérospatiale, l'aviation, le tourisme et les industries connexes. Pour remettre l'économie sur les rails, il faudra non seulement des fonds, mais aussi un plan complet et bien pensé, sous la forme d'une politique industrielle, pour assurer une reprise forte et complète.
Nous avons besoin de développer une politique aérospatiale nationale. Une politique aérospatiale pancanadienne aborderait plusieurs problèmes auxquels l'industrie aérospatiale canadienne est confrontée. La plus grande grappe aérospatiale du Canada est centralisée au Québec, mais pratiquement toutes les provinces ont une grappe aérospatiale. L'industrie est souvent coincée entre les gouvernements provinciaux et fédéral, ce qui a rendu difficile la mise en place d'un cadre de financement cohérent et la promotion de grappes régionales. L'approche adoptée par le gouvernement consiste à financer des entreprises aérospatiales individuelles et à transférer des fonds de manière aléatoire aux provinces disposant de grappes aérospatiales.
Il ne s'agit ni d'une utilisation efficace de l'argent ni d'un moyen efficace de garantir que le Canada reste concurrentiel au niveau mondial, malgré le fait qu'il soit inégalé en matière de production de simulateurs de vol, de moteurs d'avions civils et dans l'entretien, la réparation et la révision.
En ce qui concerne le soutien aux grappes régionales, presque chaque province possède une grappe, mais il n'y a pas de coordination entre elles. Un niveau sain de concurrence au sein d'une industrie est bénéfique. Cependant, dans une industrie d'importance nationale, il doit y avoir un certain niveau de coordination et de cohésion à l'échelle nationale. En d'autres termes, le renforcement de l'industrie nationale soutient sa compétitivité au niveau mondial.
En ce qui concerne le soutien au processus d'approvisionnement, nous recommandons que le projet de loi énonce des dispositions relatives aux exigences en matière de contenu canadien dans les marchés publics. En outre, les mesures qui permettent au gouvernement canadien de soutenir et de garantir les avantages économiques doivent faire partie intégrante du nouvel accord. Notre association recommande également qu'une forme de cadre d'assurance soit incluse, dans le but de protéger les secteurs économiques en difficulté comme l'aérospatiale dans le climat actuel, sans risquer de pénalités pour rupture de contrat.
Concernant les lacunes de l'AECG et l'érosion des droits des travailleurs, les syndicats ont tiré la sonnette d'alarme avant l'adoption de l'AECG, soulignant les lacunes de l'accord en matière de protection de ces droits. Par exemple, le chapitre 23 de l'AECG est exclu du règlement général des différends, ce qui signifie que les conflits de travail ne pouvaient pas être résolus par un mécanisme officiel impliquant des sanctions. Alors que les investisseurs peuvent s'appuyer sur un système judiciaire contraignant sur les investissements, les conflits de travail sont résolus dans le cadre d'un processus non contraignant de coopération et de recommandation, dont les entreprises peuvent faire fi sans pénalités.
En outre, les dispositions relatives au travail ne prévoient aucune disposition contraignante ou exécutoire pour la mise en œuvre des normes internationales fondamentales du travail. Les normes internationales du travail empêchent l'érosion des normes et un nivellement par le bas, ce qui est probable, étant donné que l'AECG permet aux parties de déplacer les investissements vers les zones où les normes du travail sont les plus faibles et en contestant les nouvelles réglementations qui auraient des répercussions négatives sur les investissements.
L'AECG permet également à certaines catégories de travailleurs de se déplacer d'un pays à l'autre et de contourner le processus d'immigration canadien. L'AECG limite la capacité du gouvernement à imposer des limites aux travailleurs migrants dans les régions où le taux de chômage est élevé, même si des travailleurs locaux sont disponibles. Cette disposition compromet clairement les efforts déployés par le gouvernement pour former et embaucher des travailleurs locaux.
Enfin et surtout, les dispositions relatives à l'admission temporaire ne permettent pas d'accéder à la résidence permanente ou à l'immigration, comme c'est le cas dans d'autres accords commerciaux européens. En outre, on s'attend à ce que cette disposition ait des répercussions plus importantes pour le Canada que pour le Royaume-Uni.
L'AECG a également imposé au gouvernement canadien la condition de traiter les fournisseurs étrangers au moins aussi bien que les fournisseurs nationaux, ce qui, dans certains cas, désavantagerait les entreprises nationales. Dans le cadre de l'accord initial, la capacité de notre gouvernement à réglementer l'entrée et l'activité des entreprises étrangères était limitée, même dans les cas où ces réglementations ne faisaient pas de discrimination entre les fournisseurs de services étrangers et les fournisseurs de services nationaux. Cela place les entreprises nationales émergentes dans une position précaire, comme la majorité des PME du marché aérospatial canadien.
En ce qui concerne les marchés publics, l'AECG a autorisé que les règles de passation de marchés s'appliquent aux gouvernements municipaux et provinciaux canadiens, en plus du gouvernement fédéral. Il est interdit aux organismes locaux de favoriser les fournisseurs locaux et même d'appliquer des exigences de contenu local aux marchés publics, car cela porterait atteinte aux dispositions de non-discrimination.
Ce qui est plus inquiétant, c'est que les dispositions de l'AECG donnent aux entreprises européennes un accès inconditionnel aux marchés publics canadiens. De plus, les entités contractantes ne peuvent pas obliger les fournisseurs étrangers à contribuer positivement au développement économique local.
Dans le cadre du nouvel accord de transition, nous recommandons que le projet de loi énonce des dispositions relatives aux exigences en matière de contenu canadien dans les marchés publics, une mesure qui permet au gouvernement canadien de soutenir et de garantir que les avantages économiques font partie intégrante du nouvel accord.
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Je vous remercie, madame la présidente, et mesdames et messieurs les membres du Comité, de votre invitation à prendre la parole dans le cadre de l'étude du projet de loi par le Comité. C'est un plaisir d'être de retour. Il est certain que beaucoup de choses ont changé depuis ma dernière intervention, à l'automne. Nous avons un accord signé, mais il n'a pas encore été mis en œuvre. J'espère que nous pourrons en parler un peu aujourd'hui.
Les membres du Comité ne seront pas surpris de m'entendre dire que la Chambre de commerce du Canada soutient fermement l'adoption rapide du projet de loi . Le Royaume-Uni est un partenaire commercial important pour le Canada pour toutes les raisons que nous connaissons tous, notamment parce qu'il est à la fois notre troisième marché d'exportation de marchandises et notre deuxième destination pour les investissements directs étrangers. Malgré ces classements, cela reste encore une petite proportion globale de nos flux commerciaux, derrière les États-Unis. Je pense que cela signifie en fait qu'il y a de l'espace et du potentiel pour que cette relation se développe.
Depuis décembre 2020, les entreprises canadiennes ont réussi à éviter le précipice et à se voir imposer à nouveau des droits de douane, soit pour les exportations vers le Royaume-Uni, soit pour les entreprises qui s'approvisionnent au Royaume-Uni. Toutefois, cela ne signifie pas que les arrangements actuels sont parfaits. Nous avons un protocole d'entente mettant en œuvre des décrets de remise pour appliquer des parties d'un accord transitoire qui est basé sur un AECG appliqué provisoirement. Comme vous pouvez l'imaginer, ce n'est pas facile à comprendre pour beaucoup d'entreprises.
Par conséquent, si l'exécution des décrets de remise a été un soulagement bienvenu pour nos membres, nous ne devrions pas en rester là. Le projet de loi permet de simplifier l'architecture qui régit le commerce entre le Canada et le Royaume-Uni et de limiter les questions opérationnelles que les entreprises peuvent rencontrer pendant la période actuelle.
Je vais souligner certains des avantages que nous voyons dans l'Accord de continuité commerciale dont j'ai eu l'occasion de parler plus en détail lors de ma dernière comparution devant le Comité. Le premier est l'élimination des droits de douane sur des produits tels que le homard, le plastique, les véhicules et le bœuf.
Le deuxième grand avantage que nous voyons concerne la coopération réglementaire. Comme je l'ai mentionné lors de ma dernière comparution, l'AECG fournit un cadre essentiel pour favoriser le dialogue concernant les barrières non tarifaires sur les produits agricoles et industriels qui maintiennent nos produits hors du marché et les privent des taux tarifaires préférentiels de l'AECG qui ont été accordés lors des négociations.
Le troisième avantage que nous voudrions souligner concerne les services. Le chapitre de l'AECG sur l'admission temporaire comportait des dispositions sur les personnes mutées à l'intérieur d'une entreprise. Cela a permis aux entreprises canadiennes de faire venir des spécialistes du Royaume-Uni pour servir leurs activités au Canada. Les dispositions relatives aux fournisseurs de services contractuels signifient que des compétences spécialisées peuvent être amenées pour combler les lacunes de la chaîne d'approvisionnement dans des créneaux que les entreprises ne sont pas en mesure de combler en interne. Les dispositions de l'AECG sur ces catégories d'entrée réduisent le fardeau des entreprises pour faire venir ces spécialistes. Leur absence dans le contexte britannique aura des répercussions négatives sur les entreprises canadiennes. Ce n'est pas un domaine qui fait actuellement partie du protocole d'entente, comme il en a été question dans la première moitié de la séance du Comité.
Comme le note l'évaluation économique du gouvernement, l'Accord de continuité commerciale préservera un commerce bilatéral estimé à deux milliards de dollars. En cette période de grande incertitude économique, nous devons tout mettre en œuvre pour que les entreprises canadiennes trouvent des moyens de faire croître notre économie. Les accords commerciaux sont un moyen pour les gouvernements de soutenir la croissance à un coût minimal pour le trésor public.
Comme je l'ai fait remarquer lors de ma dernière intervention devant le Comité, si l'AECG est important, alors la transition vers un accord bilatéral avec notre plus grand partenaire commercial en Europe est également importante. À l'approche du 31 mars, nous espérons que l'Accord de continuité commerciale pourra être mis en œuvre plutôt que de voir les deux gouvernements avoir besoin de reconduire le protocole d'entente actuel.
Le projet de loi vise fondamentalement à préserver l'accès au marché que nous avons déjà. Ce n'est pas le moment de faire des vagues sur ce point. D'un point de vue prospectif, aller de l'avant avec le projet de loi C-18 nous permettra de consacrer nos efforts aux questions qui nous permettront d'élargir et d'améliorer réellement notre accès au marché. Cela comprend des questions telles que le commerce numérique, la coopération en matière de réglementation, la facilitation des échanges, la mobilité de la main-d'œuvre et d'autres encore.
Je vous remercie de votre attention. Je serai heureux de répondre à vos questions.
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Madame la présidente, membres du Comité, merci de m'avoir invité à témoigner devant vous.
Je représente Hensall Co-Operative, l'une des plus grandes coopératives agricoles au pays. Forte de plus de 6 000 membres sociétaires, elle compte plus de 30 succursales en Ontario et au Manitoba.
Nos activités sont très diversifiées et comprennent entre autres la nutrition animale, les services relatifs aux cultures, l'énergie, la logistique des services d'expédition de fret, ainsi que la mise en marché des céréales et celle des ingrédients.
Les produits alimentaires, soit les haricots secs et le soya à identité préservée et sans OGM, constituent la majeure partie de nos activités, c'est-à-dire les exportations.
Nous avons connu une croissance phénoménale. Pour vous donner une idée, Hensall, qui avait des recettes de 300 millions de dollars et employait 250 personnes en 2010, affiche aujourd'hui des recettes de plus 800 millions et compte 650 employés, le secteur des exportations ayant connu la plus grande croissance.
Nous avons signé des contrats de marchandises et à valeur ajoutée avec plus de 2 500 producteurs, ce qui représente de 300 000 à 350 000 acres de soya de grande qualité destiné à la consommation humaine, de haricots pour consommation humaine et de soya à identité préservée, une production annuelle entièrement destinée au Royaume-Uni et à l'Asie.
Actuellement, nos installations expédient quotidiennement 80 conteneurs de qualité alimentaire vers plus de 40 pays. Nous avons investi plus de 100 millions de dollars en biens durables dans les collectivités rurales ontariennes. Il s'agit d'investissements initiaux pour l'amélioration de nos installations et de nos services, mais aussi pour étendre notre présence sur le territoire.
Il va sans dire que la qualité est au cœur de notre réussite. Toutes nos installations de production alimentaire sont certifiées, entre autres par le programme Safe Quality Food ou SQF. En outre, toutes nos exportations, y compris en Asie et au Royaume-Uni, nous permettent de collaborer avec Hensall Global Logistics, notre filiale de services d'expédition de fret. En plus d'être l'une des plus grandes entreprises du genre au Canada, elle figure parmi les 10 plus importantes en Amérique du Nord.
Pour vous situer, les haricots et le soya pour consommation humaine constituent un segment névralgique entre le soya à identité préservée et les haricots secs. Des 800 millions en recettes brutes de la coopérative, ils représentent de 300 à 350 millions. C'est un moteur indéniable de notre croissance qui nous a donné l'élan nécessaire pour démarrer nos activités de logistique internationale. Avec le recul, on constate qu'il y a les haricots pour consommation humaine et le soya à identité préservée. Les haricots pour consommation humaine constituent notre plus importante exportation au Royaume-Uni, tandis que le soya à identité préservée est destiné à l'Asie.
Quand nous en faisons la promotion auprès des producteurs canadiens, nous avons pleine autonomie, en tant que coopérative entièrement canadienne, et nous essayons d'illustrer la valeur ajoutée de ces contrats pour qu'ils s'engagent à produire ces haricots secs et ce soya à identité préservée, ce qui rapporte de 22 à 25 millions supplémentaires aux agriculteurs de ces secteurs. Toute cette structure repose sur des activités d'exportation.
Pour ce qui est de nos clients internationaux, nous transigeons depuis longtemps dans plus de 44 pays. Nous pouvons donc nous appuyer sur ces relations pour offrir des contrats à valeur ajoutée aux producteurs canadiens.
Bien des noms connus figurent sur notre liste des clients, dont Heinz Beans, Princes Foods et Kikkoman, une marque de sauce soya. Heinz et Princes sont tous les deux des clients britanniques et correspondent à la majeure partie de nos activités relatives aux haricots secs. Quand je parle de haricots secs, je fais référence aux haricots blancs, utilisés dans les haricots en sauce, ainsi qu'aux haricots rouges, à différents types de haricots noirs et à tout autre haricot de ce segment du secteur alimentaire.
Nous sommes en outre le seul grand fournisseur de Princes Foods au Royaume-Uni. Nous comptons également parmi nos clients les soupes Campbell's. Beaucoup d'entre vous le savent peut-être, mais si vous prenez le chili chez Tim Hortons ou chez Wendy's, vous mangez nos produits. Donc, vous pouvez voir toute la diversité de notre activité alimentaire.
Les possibilités de croissance actuelles et futures résident dans les protéines végétales et les substituts de viande à base de végétaux, une industrie de 4,6 milliards de dollars qui devrait, selon les projections, valoir 85 milliards de dollars en 2030, soit de 18 à 20 fois plus. Vous pouvez donc voir l'importance de l'AECG et du projet de loi pour nous et les producteurs canadiens.
Au Canada, notre climat et nos régions agricoles, où nous avons accès à des terres arables irriguées, nous offrent une occasion unique de capitaliser sur ces conditions favorables à la production d'un large éventail de cultures, dont le soya à identité préservée, les cultures sans OGM, les légumineuses et les haricots secs.
La réputation internationale des produits agricoles canadiens n'est plus à faire, surtout en Asie et en Europe. Nous sommes donc idéalement placés pour créer des conditions favorables pour nos producteurs.
Notre réussite dépend du libre-échange. L'imposition de contingents limiterait nos possibilités de croissance. Les droits de douane et taxes peuvent anéantir les marchés en raison de la sensibilité au prix des produits alimentaires et des détaillants.
Nous devons livrer nos produits à temps à la clientèle, ce qui rend crucial l'accès à une infrastructure de transport fiable, ce qui englobe les installations portuaires, ferroviaires et routières.
Nos exportations à destination du Royaume-Uni et de l'Asie transitent principalement par les ports de Montréal et Vancouver. Nos installations de transformation des haricots dans le Sud-Ouest de l'Ontario et du Manitoba, elles, comptent toutes les deux sur le transport ferroviaire et routier, donc c'est important.
Les interruptions de travail, les barrages et le fort niveau d'activité dans les ports et sur les voies ferrées peuvent avoir des conséquences catastrophiques sur la perception de notre clientèle internationale. Chaque fois que nous ratons un chargement ou que notre produit n'est pas de la plus grande qualité, nos activités sont en péril.
L'accès à des employés locaux et à du logement abordable [Difficultés techniques]. Nous souhaitons qu'il y ait un accès équitable à de meilleurs services à large bande et que davantage de projets novateurs axés sur la transformation agroalimentaire soient soutenus. Plus nous ajoutons de la valeur, [Difficultés techniques] aux autres d'y accéder.
Nous livrerons de 50 000 à 65 000 tonnes métriques de haricots chaque année au Royaume-Uni, ce qui représente de 150 à 200 millions de dollars environ, donc quelque part entre 50 000 et 80 000 acres de cultures sous contrat et à valeur ajoutée pour nos producteurs ontariens et manitobains.
Aujourd'hui, nous exportons vers Liverpool, Felixstowe et Southampton. La congestion de certaines installations portuaires dans la foulée du Brexit pose actuellement problème, une conséquence qui, si elle était inattendue, n'en demeure pas moins réelle. Pour l'instant, le Royaume-Uni n'impose pas de tarifs douaniers sur nos produits.
En ce qui a trait au projet de loi , nous avons actuellement d'importants échanges commerciaux avec le Royaume-Uni. Si aucun accord prenant le relais de l'AECG n'est mis en œuvre, notre entreprise risque des pertes substantielles, tout comme les exportateurs de l'Ontario et les agriculteurs que nous représentons. Nous appartenons à 6 000 membres sociétaires. Au fil du temps, nous avons toutefois su tirer profit d'un marché des produits agricoles en plein essor et devenir un véritable chef de file, ce qui nous servira à long terme. Partout sur le globe, les producteurs canadiens sont réputés pour leur qualité et leur intendance. Nous avons des terres arables, de l'eau en abondance et les conditions météorologiques nécessaires pour asseoir notre position au sein du marché des produits agricoles, et plus particulièrement des haricots secs, des produits à identité préservée et des légumineuses.
D'autres pays ont le même accès à des terres cultivables irriguées, donc nous avons besoin d'une politique commerciale vigoureuse qui fait la promotion du libre-échange et limite les droits de douane et taxes d'accise. Il nous faut également une infrastructure de transport très fiable. Ainsi, nous pourrons tirer profit de notre leadership dans le secteur tout en misant sur la réputation des producteurs.
Bref, nous avons besoin d'échanges commerciaux avec le Royaume-Uni sans droits de douane ni contingent pour nous emparer d'une partie de la croissance prévue dans le secteur des légumineuses au cours des 10 à 15 années à venir. Il en résultera des collectivités rurales plus fortes et une contribution plus importante à la croissance économique du pays, deux avantages pour les agriculteurs canadiens.
Merci.
Je vous remercie pour votre invitation à témoigner au nom du Réseau pour le commerce juste.
Le Réseau est une coalition d'organisations environnementales, étudiantes, autochtones, culturelles, agricoles, syndicales, de la société civile et de justice sociale. Il a été créé en 2010 pour demander un nouveau régime de commerce international fondé sur la justice sociale, les droits de la personne et la protection de l'environnement.
Parmi ses membres, le Réseau compte le Congrès du travail du Canada, Unifor, le Syndicat canadien de la fonction publique, le Syndicat des Métallos, le Réseau action climat Canada, le Conseil des Canadiens, le Syndicat national des employées et employés généraux du secteur public, Travailleurs en Communications d'Amérique du Nord, le Syndicat national des cultivateurs et beaucoup d'autres groupes qui représentent les intérêts des Canadiens de tous les horizons.
J'ai participé aux négociations de l'AECG et je crains que la coopération en matière de réglementation qui figure dans l'AECG soit appliquée à l'accord avec le Royaume-Uni. La coopération en matière de réglementation était au cœur des nouvelles négociations de l'ALENA et de l'AECG, rendant immuable l'approche nationale actuelle en matière de réglementation. En outre, nous devrions être particulièrement vigilants afin de garder la liberté nécessaire pour réagir adéquatement à de futures crises sanitaires ou climatiques ainsi qu'à leurs répercussions économiques.
Actuellement, notre approche permet aux grandes multinationales d'accéder au système réglementaire canadien de plusieurs façons, ce qui n'est pas à l'avantage des travailleurs, des entreprises ou des consommateurs canadiens.
Outre une transparence accrue, la capacité de recourir au principe de précaution, déjà utilisé par les pays membres de l'Union européenne, est l'un des changements clés que nous souhaitons.
Compte tenu de la privatisation passée et continue des services publics dans les provinces canadiennes, nous sommes particulièrement préoccupés par celle-ci dans le contexte d'un nouvel accord avec le Royaume-Uni qui rendrait ces changements immuables grâce à ce qu'on appelle une clause d'indexation à la hausse ou de statu quo. Nous estimons que les services publics doivent être expressément exclus de certains volets d'un accord avec le Royaume-Uni, afin de ne limiter en aucune façon la capacité des gouvernements à concevoir de nouveaux services publics, voire à récupérer des services antérieurement privatisés.
La nouvelle norme que nous avons établie avec l'ACEUM vient déclarer inutile et, à vrai dire, néfaste, le règlement des différends entre investisseurs et États ou RDIE, ainsi que tout autre règlement judiciaire de cette nature. Nous nous attendons à ce que, dans un futur accord entre le Canada et le Royaume-Uni, il ne soit pas nécessaire de recourir au mécanisme de règlement des différends mis au point dans le cadre de l'AECG.
En général, nous estimons que les échanges commerciaux et les investissements doivent être vus, non pas comme une fin en soi, mais plutôt comme une façon d'améliorer le mieux-être matériel et social. Les propositions pour un programme commercial progressiste devraient être évaluées d'après quatre principes. D'abord, d'après les droits de la personne au sens le plus large, ce qui comprend les droits économiques, sociaux, culturels et environnementaux. Ceux-ci devraient primer sur les droits des entreprises et des investisseurs. Les sociétés transnationales doivent être assujetties à des obligations juridiquement contraignantes afin d'assurer la reconnaissance de ces droits.
Ensuite, un gouvernement démocratiquement élu doit avoir la souplesse nécessaire pour œuvrer au développement économique local et national, à la création de bons emplois, ainsi qu'à la protection, à la promotion et au rétablissement des services publics. Il doit pouvoir en faire sa priorité.
Les citoyens, les collectivités et l'environnement en général ont le droit de bénéficier de la protection que leur procure la réglementation dans l'intérêt public. Une approche favorable au climat devrait être adoptée dans toute transaction commerciale ainsi que pour tout investissement, car nous ne pouvons plus nous permettre de surtaxer la planète.
Enfin, nous estimons important d'établir de quelle façon notre politique commerciale se concilie avec nos autres engagements internationaux, par exemple les objectifs de développement durable ou ODD et la Déclaration des Nations unies sur les droits des peuples autochtones.
Si nous prenons au sérieux nos engagements par rapport aux ODD, nous devrions, avant de conclure un accord, effectuer une évaluation de ses impacts sociaux et économiques sur la capacité des États signataires à atteindre les ODD. Et, dans notre mise en œuvre de la Déclaration des Nations unies sur les droits des peuples autochtones, nous devons comprendre ce que signifie l'inclusion des Premières Nations, des Inuits et des Métis dans les négociations sur le commerce international.
Nous espérons que les négociations de ce nouvel accord commercial seront plus transparentes, ce qui veut entre autres dire une disponibilité accrue des données qui figurent dans le rapport économique qui été produit. Nous espérons aussi obtenir une analyse indépendante de l'incidence de l'accord sur notre économie, de même que sur nos cadres législatifs et réglementaires.
Merci.
Madame MacEwen, je voudrais revenir sur un point que vous avez mentionné dans votre déclaration préliminaire, lorsque vous avez parlé non seulement de la politique commerciale, mais aussi de la politique sociale.
Au sein du Comité, nous avons souvent entendu dire à quel point certaines entreprises et certains producteurs canadiens sont frustrés par quelques-unes des restrictions imposées pour accéder au marché européen, même en vertu de l’AECG. Nous voyons cela dans un contexte où le gouvernement canadien a souvent été prêt à faire le genre de sacrifices qu’il demande à ses partenaires commerciaux et que ces derniers ne semblent pas prêts à faire.
Le Canada a accordé des concessions importantes relatives à son système de gestion de l’offre, par exemple, même si cela met à rude épreuve les producteurs assujettis à la gestion de l’offre. Il leur a fallu se faire une raison et trouver un moyen de gérer la situation parce que le gouvernement ne les a pas soutenus. Nous attendions de nos partenaires commerciaux qu’ils nous rendent la pareille, mais ça n’a pas été le cas. Au Canada, les gouvernements libéraux et conservateurs ont été mystifiés par cette situation, et un certain nombre de nos entreprises l’ont été également.
En fait, alors que la conversation que nous avons ici — et j’ai certainement été témoin de cela au sein du Comité du commerce international — porte en réalité sur les politiques économiques et sur la conviction qu’en fin de compte, les politiques commerciales sont prévues pour les personnes qui ont quelque chose à échanger, bon nombre de nos partenaires commerciaux reconnaissent que les politiques commerciales sont aussi des politiques sociales, et que les décisions en matière de politiques commerciales n’ont pas seulement des conséquences économiques; elles ont des conséquences sociales.
Je me demande si vous pourriez parler un peu de cette question au profit du Comité et des Canadiens qui nous écoutent peut-être. Je pense que, dans le cadre de la discussion sur le commerce que nous avons ici au Canada, cela demeure un problème récurrent, dans la mesure où il n’y a pas beaucoup de partis politiques qui comprennent les dimensions sociales de la politique commerciale — et certainement pas les deux partis qui ont gouverné ce pays. Peut-être pourriez-vous nous faire part de quelques réflexions à ce sujet, pendant les deux prochaines minutes environ.
Ensuite, pendant le temps qu’il me reste, j’aimerais poser une question à M. Chartrand.
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Je vais essayer de faire aussi vite que possible.
Le fait que nous n’avons pas de politique aérospatiale à l’échelle nationale au Canada et que nos actions ne sont pas structurées — et que nous réagissons de façon ponctuelle lorsqu’une urgence survient et que nous accordons des fonds à une certaine entreprise parce qu’elle fait face à un problème ou quelque chose de ce genre — nuit incroyablement à notre industrie. Le fait que 12 mois se sont écoulés depuis le début de la pandémie et que nous n’avons pas encore vu le gouvernement soutenir directement l’industrie du transport aérien et de l’aérospatiale est l’un des facteurs, parmi tant d’autres, qui nous rend la tâche difficile en tant que partenaire commercial d’autres pays qui bénéficient d’une aide et dont l’industrie est soutenue. Ces pays ont des plans structurés. Ils ont déjà commencé à aider leur industrie, laquelle se prépare déjà à se rétablir après la pandémie, alors que nous ne l’avons pas encore fait.
Vous ne pouvez pas ne pas apporter d’aide à cette industrie, ne pas avoir mis un plan en place, ne pas avoir quelque chose de structuré, puis vous attendre, lorsque la pandémie prendra fin, à être en mesure de livrer concurrence à ces autres pays qui auront signé un accord commercial comme celui-là. Voilà le premier problème.
Le deuxième problème, c’est qu’en n’offrant pas de soutien à l’industrie, nous n’avons aucun moyen d’investir dans des entreprises comme le font d’autres pays, tels que les pays européens, où les gouvernements investissent par l’intermédiaire de l’armée. Au Canada, il n’y a pas de programme structuré qui permet cela. Nous n’exerçons pas autant d’activités militaires que ces pays, alors il est moins intéressant pour les grands passeurs de commandes, c’est-à-dire les équipementiers, de venir s’établir ici. Ils craignent de ne pas bénéficier du soutien gouvernemental nécessaire, comme ce serait le cas dans les autres pays, ce qui a une incidence sur la chaîne d’approvisionnement en entier — sur toutes les PME, etc.
Je ne pouvais pas faire plus vite, madame Sgro.