HUMA Réunion de comité
Les Avis de convocation contiennent des renseignements sur le sujet, la date, l’heure et l’endroit de la réunion, ainsi qu’une liste des témoins qui doivent comparaître devant le comité. Les Témoignages sont le compte rendu transcrit, révisé et corrigé de tout ce qui a été dit pendant la séance. Les Procès-verbaux sont le compte rendu officiel des séances.
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STANDING COMMITTEE ON HUMAN RESOURCES DEVELOPMENT AND THE STATUS OF PERSONS WITH DISABILITIES
COMITÉ PERMANENT DU DÉVELOPPEMENT DES RESSOURCES HUMAINES ET DE LA CONDITION DES PERSONNES HANDICAPÉES
TÉMOIGNAGES
[Enregistrement électronique]
Le jeudi 17 mai 2001
Le président (M. Peter Adams (Peterborough, Lib.)): La séance est ouverte.
Conformément au paragraphe 108(2) du Règlement, nous étudions la question de l'éducation postsecondaire (financement et mobilité). Cette étude découle de l'intérêt du comité pour l'éducation et la formation. Elle fait suite aussi à l'examen par le comité du programme canadien de prêt aux étudiants qui a une incidence sur l'accès à l'éducation.
Avant que je ne présente nos témoins, j'aimerais m'excuser auprès d'eux de notre retard. Comme je l'ai expliqué à la plupart d'entre vous, le comité étudie depuis neuf heures une ébauche de rapport. La réunion a été fort intéressante. Voilà donc pourquoi nous sommes arrivés un peu en retard.
Nous vous sommes reconnaissants d'avoir accepté de participer à la première de nos réunions sur le sujet. Nos témoins d'aujourd'hui sont Mme Denise Doherty Delorme, recherchiste associée au Centre canadien de politiques alternatives; M. Paul Cappon, directeur général, Conseil des ministres de l'Éducation (Canada); M. Thomas Townsend, directeur général, Secrétariat à l'apprentissage et à l'alphabétisation, ministère du Développement des ressources humaines; M. Tom Brzustowski, président, Conseil de recherches en sciences naturelles et en génie du Canada, CRSNGC, M. Scott Murray, directeur général, Statistiques sociales et institutions, Statistiques Canada; et M. Ross Finnie, chercheur universitaire et professeur adjoint, École des études politiques, université Queen's.
Nous vous souhaitons à tous la bienvenue. Nous vous remercions d'être venus. Je sais que certains d'entre vous ont été informés tout dernièrement seulement de cette réunion et d'autres viennent d'assez loin.
Si vous n'y voyez pas d'inconvénients, nous allons donc commencer. Je ne sais pas trop dans quel ordre nous devrions procéder.
Ai-je oublié quelqu'un? Oui. C'est terrible. M. Paul Davenport, président et vice-chancelier de l'université Western Ontario. Paul, je m'excuse beaucoup. J'ai oublié de regarder ceux qui se trouvaient à l'endos de la page. Je vous souhaite la bienvenue.
Si vous n'y voyez pas d'objections, nous pourrions procéder rapidement de la droite vers la gauche. Je demanderai peut-être à un moment donné à Paul Cappon d'intervenir.
Mme Denise Doherty Delorme, voudriez-vous commencer?
Mme Denise Doherty Delorme (recherchiste associée, Centre canadien de politiques alternatives): Voulez-vous que je fasse une brève observation ou que je commence tout de suite ma déclaration?
Le président: Étant donné les circonstances et vu que vous êtes nombreux, je vous demande de faire une brève déclaration. Vous pourrez ajouter certaines observations lors de la discussion. Je pense qu'on vous a dit à tous que vous aviez cinq minutes.
Mme Denise Doherty Delorme: Oui.
Le président: C'est ce que je veux dire.
[Français]
Mme Denise Doherty Delorme: Bonjour. Je m'appelle Denise Doherty Delorme et je suis du Centre canadien de politiques alternatives.
[Traduction]
Je m'appelle Denise Doherty Delorme et j'appartiens au Centre canadien de politiques alternatives.
Les décisions qui sont prises au sujet du financement de l'éducation postsecondaire revêtent une grande importance dans la mesure où elles déterminent qui aura accès aux études postsecondaires et qui n'y aura pas accès. Faire des études coûte très cher et un système d'éducation de qualité coûte encore davantage. Il y longtemps...
tous les Canadiens de toutes les provinces ont décidé qu'ils voulaient avoir assez d'argent pour un système d'éducation de haute qualité.
[Traduction]
Les étudiants et leur famille sont de moins en moins prêts à s'endetter et à vivre dans la pauvreté pour faire des études.
Je commencerai d'abord par vous définir de façon complète ce qu'on entend par l'accessibilité aux études postsecondaires et je signalerai ensuite les données et l'information qui manquent aux décisionnaires pour établir des politiques éclairées dans le domaine de l'enseignement postsecondaire. Cette information nous est nécessaire pour nous permettre d'évaluer les véritables besoins en matière de financement ainsi que les problèmes qui se posent en ce qui touche l'accessibilité aux études postsecondaires.
L'accessibilité ne se mesure pas seulement au niveau de l'admission à un collège ou à une université. Elle se mesure en fonction de plusieurs points. À mon avis, il en existe cinq. Le premier point précède la demande d'admission...
[Français]
avant même de penser à aller à l'école.
[Traduction]
Comment les jeunes se préparent-ils à poursuivre des études postsecondaires dans un collège ou une université ou qu'est-ce qui les décourage de le faire? Le deuxième point est le point d'entrée. Quelle proportion de la population fréquente un collège ou une université? Le troisième point est la conservation des effectifs et l'achèvement des études. Quelle proportion des étudiants terminent leurs études? Le quatrième point est l'utilisation du diplôme. Quelle proportion des étudiants utilise vraiment les connaissances acquises dans le cours de leurs études? Le dernier point est le taux de rendement. Le fait de faire des études postsecondaires rapporte-t-il suffisamment aux intéressés? Ce taux de rendement suffit-il à compenser les dépenses engagées pour poursuivre des études?
Il est encourageant de constater que tant Statistiques Canada que la Direction de la Recherche Appliquée de DRHC consacre plus de ressources à l'étude de ces questions. J'ai déjà insisté sur la nécessité de le faire dans le passé.
Malgré les nouvelles recherches qui sont faites dans le domaine, les données dont nous disposons continuent d'être lacunaires. Parlons de certaines de ces lacunes. À titre d'exemple, nous ne savons pas qui présente une demande d'admission au collège ou à l'université et qui n'en présente pas; ni dans quelle mesure la population qui présente une demande a changé au cours des dernières années ou même des dernières décennies;
[Français]
combien de personnes terminent leur programme d'études et, si elles ne le font pas, pourquoi elles l'abandonnent.
[Traduction]
Nous ne savons pas non plus si la crainte de l'endettement influe sur les jeunes de sixième ou de septième année qui doivent déjà décider dans quelle filière scolaire se diriger. Ces jeunes vont-ils terminer leurs études en douzième année ou voudront-ils se diriger vers le collège ou l'université? Comment les étudiants se tirent-ils d'affaires pendant leurs études? Vivent-ils dans la pauvreté? Comment les étudiants de deuxième cycle, en particulier ceux qui se spécialisent dans les lettres et les sciences humaines, financent-ils leurs études?
Il n'est maintenant plus possible de ne pas tenir compte de certaines conséquences graves de la situation actuelle au niveau macro-économique. Ainsi, la décision d'interdire à un étudiant ayant contracté un prêt étudiant de déclarer faillite avant un délai de dix ans après avoir terminé ses études témoigne de si peu de clairvoyance qu'elle en est presque détestable. Le gouvernement fédéral n'a fait que refiler son déficit aux jeunes. Notre pays ne s'acquitte pas de ses responsabilités envers ceux qui depuis dix ans subissent les conséquences du sous-financement de l'éducation postsecondaire. Vu le coût élevé des études et le manque de perspectives de carrière, il est impossible à de nombreux étudiants de rembourser leur prêt, en particulier lorsque le taux d'intérêt exigé est supérieur de 2,5 p. 100 ou de 5 p. 100 au taux préférentiel.
Les données révèlent clairement—je suis sûr que certains de mes collègues reviendront là-dessus plus tard—qu'il vaut la peine pour la majorité des étudiants de poursuivre des études postsecondaires, mais ce n'est pas toujours le cas. Pour certains hommes et femmes dans toutes les disciplines, le coût des études postsecondaires sera supérieur à ce que leur aura rapporté leurs études. Du point de vue financier, ces personnes auraient mieux fait de ne pas fréquenter le collège ou l'université.
Certaines recherches montrent que le fait de poursuivre des études rapporte davantage financièrement aux femmes qu'aux hommes. Cette situation n'est pas attribuable au fait que les femmes gagnent davantage que les hommes une fois leurs études terminées, mais parce qu'elles avaient moins à perdre financièrement au départ. Elles n'ont pas perdu autant d'argent en faisant des études et en ne travaillant pas tout de suite. Nous en déduisons donc que si nous pouvons abaisser le coût des études postsecondaires, ces études rapporteront davantage aux intéressés.
Qu'est-ce que je demande du gouvernement fédéral? Si le surplus fédéral a été accumulé sur le dos des étudiants, le moment est venu de les indemniser. Ce n'est que justice. D'un autre côté, le gouvernement annoncera aujourd'hui que le surplus budgétaire atteindra environ 15 milliards $, soit 3 milliards $ de plus que prévu. Si le gouvernement fédéral peut faire cette annonce aujourd'hui, c'est parce qu'il a affecté au repaiement de la dette nationale de l'argent qu'il aurait dû investir dans le domaine de l'éducation postsecondaire. Très peu d'autres groupes au Canada ont autant été mis à contribution. En outre, le gouvernement a ainsi délibérément compromis l'avenir des étudiants et celui de l'ensemble du pays. Tous n'ont pas contribué de façon égale à l'effort de réduction de la dette. Le moment est venu pour le gouvernement de corriger cette injustice et de raviver la capacité novatrice du pays, ce dont il a été beaucoup question dans divers budgets.
• 1140
Je demande respectueusement que le surplus budgétaire soit
réaffecté aux fins auxquelles cet argent aurait dû servir dès le
départ. Cet argent doit servir immédiatement à éliminer les frais
de scolarité au pays, à aider financièrement ceux qui ont le plus
besoin de cette aide et à aider les étudiants et leur famille qui,
en ce moment même, vivent dans la pauvreté en raison des dettes
contractées pour poursuivre des études.
Je vous remercie.
Le président: Je vous remercie beaucoup, Denise.
Avant de donner la parole à Paul, j'aimerais signaler le fait que les représentants de la Fondation canadienne des bourses du millénaire n'ont pas pu comparaître devant le comité aujourd'hui. Ils nous ont cependant soumis un mémoire qui vous a été distribué.
Contrairement à ce que j'ai dit plus tôt, je vais maintenant donner la parole à Paul Davenport et à Tom Brzustowski. J'accorderai ensuite la parole à Paul Cappon. Je reviendrai à vous par la suite, messieurs. Thomas Townsend, qui représente le DRHC, le ministère sur lequel portent les travaux du comité, comparaîtra en dernier.
Monsieur Paul Davenport.
[Français]
M. Paul Davenport (président et vice-chancelier, University of Western Ontario): Merci, monsieur le président. C'est un grand plaisir d'être parmi vous, membres du comité, pour parler du financement de l'enseignement universitaire au Canada.
Je vais d'abord parler du défi que représente l'accessibilité au Canada et ensuite des deux façons de relever ce défi, soit le système de prêts et bourses de notre pays et le financement universitaire en général.
[Traduction]
Je m'appelle Paul Davenport et je suis président de l'Université de Western Ontario.
Au sujet du défi que pose l'accessibilité elle-même, j'aimerais d'abord signaler qu'au cours de cette décennie, le nombre d'étudiants fréquentant les établissements postsecondaires atteindra un niveau inégalé depuis les années 60. La croissance de la population étudiante universitaire dans les années 60 était attribuable à la génération des baby-boomers. C'est l'écho de ce phénomène qui se manifeste maintenant. Le nombre d'étudiants tant au Canada qu'aux États-Unis qui voudront poursuivre des études universitaires va augmenter de façon phénoménale au cours des prochaines années.
Je sais qu'on fait souvent très peu de cas du défi de l'accessibilité. Il y a certains commentateurs pour dire que le pays compte déjà trop d'étudiants universitaires et que les deniers publics doivent être utilisés à d'autres fins que celles d'encourager les étudiants à poursuivre des études postsecondaires.
Permettez-moi de vous citer l'un de ces commentateurs, Mme Diane Francis, qui écrivait ceci dans le Financial Post en 1998:
-
Le public commence à se rendre compte qu'un diplôme technique
décerné par un collège ou une école de professionnels est de
beaucoup préférable à la plupart des diplômes universitaires.
C'est faux. Les données recueillies au cours des 30 dernières années dans les pays développés montrent le contraire. Je ne pense pas avoir à vous dire que les diplômés universitaires connaissent un taux de chômage moins élevé et ont des revenus moyens plus élevés que la moyenne. L'écart dans le revenu augmente avec l'âge si l'on compare les diplômés universitaires à tous les autres diplômés, y compris les diplômés des collèges qui ont fait des études techniques. Cet écart vaut aussi pour les diplômés en sciences ainsi qu'en lettres et sciences humaines.
Quel est le bilan? En Ontario, environ deux fois moins de diplômés universitaires que de diplômés collégiaux ne parviennent pas à rembourser leur prêt étudiant. Le taux de non-remboursement chez les diplômés universitaires est le tiers ou le quart de ce qu'il est chez les diplômés des écoles professionnelles privées dont parlait Mme Francis. Le taux de non-remboursement en Ontario chez les diplômés universitaires diminue en fait. Il était l'an dernier de moins de 8 p. 100. Permettez-moi de situer ces chiffres dans leur contexte. La plupart des diplômés universitaires gagne un très bon revenu et la très grande majorité d'entre eux rembourse leur prêt.
Quel est le problème qui se pose en matière d'accessibilité? Il se pose dans deux domaines. Pour l'illustrer, permettez-moi de vous donner des données qui se rapportent à l'Université Western. Les étudiants de notre université se comparent à divers titres à l'ensemble des étudiants de l'Ontario pour ce qui est notamment de leur endettement et de leur revenu familial. Il s'agit de données fiables. À Western, environ 30 p. 100 des diplômés universitaires terminent leurs études de premier cycle sans avoir contracté de dettes, environ 55 p. 100 d'entre eux ont des dettes inférieures à 35 000 $, une somme tout à fait acceptable compte tenu des revenus qu'ils vont gagner, et 15 p. 100 d'entre eux ont des dettes de plus de 35 000 $. Il s'agit des dettes globales liées aux études. Ces données proviennent de sondages menés auprès des étudiants.
Que nous faut-il faire au sujet du programme de prêt aux étudiants? Nous devons d'abord aider les étudiants dont les dettes sont les plus élevées. Il s'agit d'une petite minorité. La première chose à faire et la plus importante est d'élargir le programme actuel d'allégement de l'intérêt et d'en faire un véritable programme de prêt fondé sur le revenu. Il s'agit de suivre les étudiants après leurs études et d'aider la petite minorité d'étudiants qui connaissent des difficultés parce qu'ils ont un emploi mal rémunéré pour éviter qu'ils soient contraints de faire faillite même si c'est 10 ans après avoir terminé leurs études. Ce programme devrait comporter une réduction de la dette. Tant les programmes de prêt aux étudiants de l'Ontario et du Canada contiennent déjà une composante d'allégement de l'intérêt. Combinons ces deux programmes et mettons sur pied un véritable programme fondé sur le revenu.
• 1145
J'ai deux autres suggestions à formuler. Réduisons la
paperasserie. En Ontario, les étudiants doivent continuellement
remplir des formulaires que ce soit pour le programme canadien de
prêt aux étudiants ou le programme ontarien. Ils ne s'y retrouvent
vraiment pas. Les deux programmes ne comportent pas les mêmes
critères en ce qui touche le revenu parental, l'allégement de
l'intérêt et la part du revenu d'été que l'étudiant doit consacrer
au financement de ses études. Il peut s'agir de points mineurs,
mais tout cela suscite beaucoup d'anxiété chez les étudiants et
beaucoup de tracasseries et de chevauchement inutile. Réglons ce
problème.
Enfin, monsieur le président, un appel spécial en faveur des étudiants de deuxième cycle. Comme je l'ai fait remarquer, il y aura une augmentation énorme du nombre d'étudiants souhaitant faire des études postsecondaires. Or, à notre université, le tiers du corps professoral prendra sa retraite au cours des 10 prochaines années. Nous n'investissons pas suffisamment à l'heure actuelle dans les études de deuxième cycle. Je vous propose de doubler les budgets du CRSNG et des conseils subventionnaires relevant du CRSH et qu'on double également la partie de ces budgets réservée à l'aide aux étudiants. Je sais que les deux conseils accueilleraient favorablement cette demande. Une augmentation aussi marquée de ces budgets s'impose pour aider véritablement les étudiants de deuxième cycle et pour recruter dans les programmes d'étude de deuxième cycle les types d'étudiants qui nous permettront de relever le défi de l'accessibilité.
Le troisième point sur lequel je veux insister—et je serai très brève, monsieur le président—c'est que l'augmentation de l'aide financière accordée aux étudiants ne constitue qu'un élément de la solution. Nous devons également augmenter les fonds d'exploitation de nos universités. En Ontario, par exemple, le rapport étudiant-professeur a augmenté de 25 p. 100 au cours de la dernière décennie. Ce rapport est de 20 p. 100 supérieur dans les universités publiques canadiennes à ce qu'il est dans les universités publiques américaines. J'ai distribué aux membres du comité des graphiques dans les deux langues officielles qui illustrent la situation. En Ontario, le ratio étudiant-professeur est de 35 p. 100 supérieur à ce qu'il est dans les universités publiques aux États-Unis. Pour aider les étudiants, nous devons permettre aux universités de recruter davantage de professeurs. Les universités ont besoin, à cette fin, de fonds d'exploitation accrus.
On me rétorquera à juste titre qu'il s'agit d'un domaine de compétence provinciale. Je ferai valoir en terminant que l'occasion est donnée au gouvernement fédéral de vraiment relever les budgets d'exploitation des universités. Il s'agit pour le gouvernement fédéral de contribuer au financement de ce que nous appelons le coût indirect de la recherche. Cette question s'écarte un peu du mandat du comité, mais le financement indirect du coût de la recherche revêt une grande importance pour l'éducation et la formation de la nouvelle génération.
[Français]
Merci beaucoup, monsieur le président, de cette invitation.
Le président: Je vous remercie beaucoup.
[Traduction]
J'accorde maintenant la parole à M. Tom Brzustowski du CRSNG.
[Français]
M. Thomas A. Brzustowski (président, Conseil de recherches en sciences naturelles et en génie du Canada): Merci, monsieur le président.
Je suis très heureux d'assister à cette réunion. J'ai quelques informations qui, j'en suis absolument convaincu, seront d'un grand intérêt pour les membres du comité.
[Traduction]
Monsieur le président, j'aimerais simplement faire part au comité de certaines données qui s'intègrent parfaitement à celles que vous a fournies M. Davenport au sujet des diplômés en sciences naturelles et en génie. Permettez-moi d'abord de vous résumer notre rapport de rendement.
[Français]
Plus de 60 p. 100 des fonds alloués par le CRSNG à la recherche et à la formation ont servi à rémunérer des techniciens, des étudiants des trois cycles et des boursiers postdoctoraux. Donc, les étudiants à la maîtrise et au doctorat ont reçu 26 p. 100 des fonds, les techniciens, 21 p. 100, les étudiants du premier cycle, 5 p. 100 et les boursiers postdoctoraux, 9 p. 100.
[Traduction]
Monsieur le président, permettez-moi de citer certains chiffres qui revêtent une grande importance étant donné que le gouvernement s'est engagé à faire en sorte que le Canada passe de la quinzième place à la cinquième place pour ce qui est des activités de recherche et développement. Les étudiants sont ceux sur lesquels le Canada devra compter pour atteindre cet objectif.
• 1150
Nous parlons de deux genres d'aide aux étudiants. Nous
accordons une aide financière aux étudiants de premier cycle dans
leurs dernières années d'étude pour faire un stage de recherche
dans un laboratoire. Il s'agit d'une façon très efficace
d'encourager des étudiants à faire carrière dans le domaine
scientifique et dans le domaine de l'ingénierie. En 1999-2000, nous
avons accordé des bourses de recherche de 4 000 $ à
5 600 étudiants. Il s'agit de bourses pour un trimestre.
Au niveau des études de deuxième cycle, nous avons accordé une aide financière à 7 800 étudiants faisant des études menant à une maîtrise et à un doctorat, ce qui représente moins de 40 p. 100 du nombre total d'étudiants inscrits à ce niveau et nous leur donnons...
Le président: S'agit-il du nombre total d'étudiants faisant des études dans les disciplines qui sont visées par les activités du CSRNG?
M. Thomas Brzustowski: Dans les disciplines des sciences naturelles et de l'ingénierie.
Le président: Très bien. Je vous remercie.
M. Thomas Brzustowski: Si vous le souhaitez, je vous donnerai...
Le président: Non, nous...
M. Thomas Brzustowski: Ces statistiques vous sembleront sans doute intéressantes parce que...
Le président: Très bien.
M. Thomas Brzustowski: Le nombre d'étudiants inscrits dans ces disciplines augmente au Canada alors qu'il diminue dans certains autres pays.
Nous offrons deux types d'aide aux étudiants. Nous distribuons d'abord des bourses à l'issue d'un concours. Les bourses de maîtrise s'élèvent à 17 300 $ par année et les bourses de doctorat à 19 100 $ par année. Un étudiant peut obtenir cette bourse pendant quatre années au total. Nous accordons aussi des subventions de recherche aux professeurs dont le montant maximal est d'environ 16 500 $.
Nous accordons également des bourses d'études de troisième cycle. Ces bourses sont d'une valeur de 35 000 $ par année et nous en accordons 1 300. Ces bourses sont accessibles à un peu moins de 40 000 étudiants qui sont inscrits dans des programmes de sciences naturelles et d'ingénierie ainsi que dans des disciplines comme la géographie physique, la santé animale, la cinésiologie et certaines branches de la psychologie.
Ces chiffres ne sont pas très éloquents en eux-mêmes. Lorsqu'on discute de la situation avec des étudiants, ils nous disent toujours que si nous obtenons davantage de fonds, nous devrions accorder des bourses à plus d'étudiants et non pas relever le montant des bourses que nous accordons. Les superviseurs de recherche de ces étudiants demandent plutôt qu'on relève les bourses des étudiants qui font actuellement des recherches parce que bon nombre d'entre eux ne terminent pas leurs études pour des raisons financières: deux points de vue facilement conciliables.
Nous faisons régulièrement des sondages auprès des étudiants de premier cycle, de deuxième cycle et de troisième cycle auxquels nous avons accordé des bourses. La prochaine livraison de ce sondage sera disponible dans quelques semaines et nous serons heureux d'en transmettre les conclusions aux membres du comité.
Par le passé, ces sondages ont révélé que 83 p. 100 des étudiants de premier cycle ayant obtenu une bourse estiment que le fait d'avoir fait un stage de recherche dans un laboratoire pendant un trimestre d'études a soit augmenté ou maintenu leur intérêt pour la recherche et le développement. La vaste majorité des étudiants qui obtiennent une aide financière du CRSNG finissent leurs études et la plupart d'entre eux disent que cette aide a joué un rôle important à cet égard.
Les données recueillies révèlent également que la moitié des étudiants de troisième cycle ayant obtenu une bourse et qui poursuivent des études à l'extérieur du Canada comptent rentrer au pays. Je suis sûr que ce genre de renseignement est très utile au comité.
Dernier point sur lequel j'aimerais attirer votre attention: dans un certain nombre de pays du G-8—comme je ne sais pas quelle est la situation en Russie—je devrais plutôt parler du G-7—on a constaté une diminution dans le nombre d'étudiants inscrits dans des programmes d'études en sciences et en génie. Le même phénomène n'a pas été constaté au Canada. Entre 1989-1990 et la fin de cette décennie, le nombre total d'étudiants inscrits dans des programmes de premier cycle en sciences naturelles et en génie est passé de 91 000 à 113 000; le nombre d'étudiants inscrits en maîtrise au cours de la même période est passé de 10 000 à 12 300 et le nombre d'étudiants inscrits à des études de doctorat pendant la même période est passé de 7 300 à 8 400.
• 1155
Si le nombre d'étudiants inscrits dans des disciplines
scientifiques a augmenté au Canada alors que ce n'est pas le cas
dans d'autres pays, ces inscriptions continuent d'être moins
élevées que dans d'autres pays tant en nombre absolu qu'en
proportion de la population en général.
Une exception réjouissante: celle de la ville de Montréal. Montréal vient en cinquième place sur le continent pour ce qui est du nombre d'étudiants postsecondaires qui poursuivent des études dans le domaine scientifique tant pour ce qui est des nombres absolus que de la proportion par rapport à la population en général. Montréal devance à cet égard, New York, Boston et San Francisco. Il s'agit d'une exception au pays.
Nous devons encourager plus d'étudiants à poursuivre des études dans le domaine scientifique et nous devons faire en sorte que plus d'entre eux demeurent au pays si nous voulons atteindre ce très important objectif que le premier ministre a fixé.
Je vous remercie beaucoup.
Le président: Tom, merci beaucoup. Ces chiffres sont très utiles et nous vous serions reconnaissants de nous envoyer un exemplaire de ce document.
M. Thomas Brzustowski: Je vous transmettrai un exemplaire du sondage. Nous résumerons les chiffres que j'ai cités et qui sont tirés de plusieurs sources à l'intention du comité.
Le président: Très bien.
J'accorde maintenant la parole à M. Paul Cappon, du Conseil des ministres de l'Éducation (Canada).
[Français]
M. Paul Cappon (directeur général, Conseil des ministres de l'Éducation (Canada)): Merci, monsieur le président. Je voudrais également vous remercier de m'avoir invité à cette réunion du comité permanent et je tiens à vous féliciter, ainsi que les membres du comité, de l'attention que vous accordez aux thèmes fondamentaux de l'accessibilité et de la mobilité au niveau postsecondaire.
Il se trouve que ces deux thèmes, mobilité et accessibilité, sont également d'une importance capitale pour le Conseil des ministres de l'Éducation du Canada. Monsieur le président, je souhaiterais profiter des quelques minutes qui me sont imparties pour dire un mot au sujet du caractère prioritaire que les ministres de l'Éducation attachent à l'accessibilité et pour faire état des activités principales que le CMEC a entreprises sur ces questions.
Entre parenthèses, je voudrais vous dire qu'il est juste de dire que le CMEC est un organisme qui a considérablement évolué au cours des quatre ou cinq dernières années. Le CMEC est réputé être un organisme dont les activités s'articulent avant tout autour des secteurs primaire et secondaire, mais je suis maintenant en mesure de vous déclarer sans hésitation que des questions relatives au secteur de l'enseignement postsecondaire figurent au sommet de notre liste de priorités.
Ceci, bien entendu, n'est pas un hasard. Les gouvernements, l'industrie et la société en général sont tous conscients du rôle crucial que le secteur de l'enseignement postsecondaire doit jouer si nous voulons assurer la continuité et l'amélioration de notre société civile, et nous mesurer de manière favorable à d'autres pays avancés, dont l'essor des économies dépend de plus en plus du savoir et de l'innovation.
Nous connaissons tous également les défis que représentent pour nos établissements—et M. Davenport vient de le mentionner—la satisfaction des besoins actuels et l'élaboration de solutions aux besoins imminents.
[Traduction]
Le Conseil des ministres de l'Éducation a publié en 1999 un rapport intitulé Rapport sur les attentes du public relatives à l'enseignement postsecondaire au Canada. Je crois que le contenu de ce rapport se rapporte directement à la discussion d'aujourd'hui.
Il s'agit essentiellement d'un résumé des attentes qu'on peut raisonnablement avoir à l'égard du secteur de l'enseignement postsecondaire, de ses participants et du gouvernement. Ces attentes ont été avalisées par les premiers ministres lors de la conférence annuelle des premiers ministres.
Dans le rapport, les ministres formulent six énoncés d'ensemble des attentes relatives à: la qualité; l'accessibilité; la mobilité et la transférabilité; la pertinence et l'adaptabilité; la recherche et l'avancement des connaissances et la transparence.
Aux fins du débat d'aujourd'hui, permettez-moi de vous faire part des énoncés afférents à l'accessibilité, ainsi qu'à la mobilité et la transférabilité.
En ce qui concerne l'accessibilité, permettez-moi de vous lire l'énoncé suivant parce que je pense qu'il résume bien la situation. Il s'agit encore une fois d'un idéal que nous devons viser:
-
L'enseignement postsecondaire est accessible tout au long de la vie
et offre des occasions d'apprentissage de qualité aux personnes
admises dans les programmes d'études postsecondaires. Le secteur
postsecondaire offre la possibilité d'acquérir les aptitudes
requises à l'admission aux personnes qui ne satisfont pas les
conditions habituelles et qui ont besoin de plus de préparation.
Les étudiantes et étudiants étrangers sont accueillis par les
établissements, car leur intégration dans le milieu d'apprentissage
profite tant aux apprenantes et apprenants qu'à l'ensemble de la
collectivité.
• 1200
En ce qui a trait à la mobilité et à la transférabilité, les
ministres ont formulé une attente stipulant que:
-
Les étudiantes et étudiants peuvent obtenir des crédits pour des
expériences d'apprentissage ou des expériences de travail
lorsqu'ils changent de programmes et d'établissements
d'enseignement. Les gouvernements font en sorte qu'aucun obstacle
à la mobilité interprovinciale n'empêche l'accès à l'enseignement
postsecondaire.
Je répète qu'il s'agit d'idéaux auxquels nous devons tendre et non d'énoncés qui reflètent la situation actuelle.
Nos travaux sur le projet ayant trait à l'accessibilité sont loin d'être achevés en dépit des avancées considérables que nous avons réalisées au cours des dernières années, et en particulier au cours de l'an passé. Permettez-moi de vous signaler quelques points saillants:
Nous avons d'abord commandé un rapport sur les obstacles financiers à l'enseignement postsecondaire qui nous est parvenu au mois de mars de cette année. Bien que ce rapport n'ait pas encore été publié, je souhaite tout de même vous indiquer quelques tendances clés que l'auteur a identifiées. Les témoins qui m'ont précédé vous ont déjà parlé de certains de ces obstacles et d'autres après moi vous donneront sans doute d'autres exemples de ces obstacles.
(1) Au cours des dernières années, l'accroissement des inscriptions associé aux compressions budgétaires a entraîné une diminution du soutien gouvernemental pour les études à temps plein.
(2) Les taux des droits d'inscription ont augmenté en conséquence, mais les revenus des ménages en termes réels sont restés les mêmes.
(3) Au sein de nombreuses instances, les programmes de soutien aux études ont abandonné les subventions au profit de prêts. Ce mouvement d'abandon associé à l'accroissement des limites d'aide a contribué à l'augmentation des niveaux de l'endettement étudiant.
(4) L'utilisation de prêts privés pour financer les études postsecondaires est une pratique qui devient de plus en plus évidente.
(5) Il apparaît clairement que les étudiantes et étudiants doivent payer davantage, emprunter davantage et qu'ils reçoivent moins d'aide sous forme de subventions que par le passé.
Je suis sûr qu'aucune de ces conclusions vous surprend.
Au cours de l'année à venir, nous aborderons également la question de l'accès des groupes sous-représentés, tels que les étudiantes et étudiants provenant de familles à faible revenu, les étudiantes et étudiants de régions rurales et isolées, les étudiantes et étudiants autochtones ainsi que celles et ceux ayant un handicap. Cette tâche aura pour objectif de passer en revue les initiatives canadiennes et étrangères dont le but est d'aborder la question de l'accès des groupes sous-représentés et d'identifier les meilleures pratiques dans ce domaine en vue de les soumettre à la considération des instances.
Le troisième élément de nos travaux sur l'accessibilité a trait à l'apprentissage en ligne. Le CMEC, en collaboration avec Industrie Canada, a créé le Comité consultatif sur l'apprentissage en ligne dont le rapport intitulé L'évolution de l'apprentissage en ligne dans les collèges et les universités: Un défi pancanadien a été publié en format relié et affiché sur le site Web du CMEC. À mon sens, ce rapport est important. Il contient de nombreuses recommandations pertinentes qui, si elles sont mises en oeuvre, permettront de renforcer la qualité des possibilités éducatives en ligne et d'améliorer l'accès. Ce rapport est actuellement étudié attentivement par le CMEC et Industrie Canada et je m'attends à ce que des progrès considérables soient réalisés au cours des prochains mois.
Enfin, dans la même veine que des observations qui ont été faites précédemment, la question relative à la capacité des établissements et au renouvellement de leur personnel revêt une importance primordiale dans l'esprit des ministres et a constitué le thème principal des échanges au cours de la récente réunion du CMEC à Toronto. Nous avons reçu un rapport suggérant que des investissements importants seraient nécessaires au maintien du système d'enseignement postsecondaire aux niveaux actuels, afin de maintenir les taux de participation actuels, le renouvellement du corps professoral et de régler la question de la maintenance différée et des coûts afférents à l'infrastructure.
Je crois effectivement—et je suis d'accord avec les intervenants précédents en ce qui concerne les capacités et des ressources du système—qu'il s'agit d'une question très sérieuse pour notre pays, à laquelle j'espère que le travail de ce comité permettra de donner suite en partie.
[Français]
Merci beaucoup, monsieur le président.
Le président: Je te remercie beaucoup, Paul.
[Traduction]
Ross Finnie, vous avez la parole.
[Français]
M. Ross Finnie (chercheur universitaire et professeur adjoint, School of Policy Studies, Université Queen's): Je vais prononcer mon discours en anglais, mais il me fera plaisir de répondre à vos questions en français.
[Traduction]
Si je suis ici, c'est qu'au cours des 10 dernières années environ, j'ai fait de la recherche sur les diplômés de niveau postsecondaire, sur les divers aspects de leur expérience. Je me suis penché en particulier sur les emprunts des étudiants et les incidences pour le financement de l'éducation postsecondaire au Canada. Je trouve cette recherche fascinante, et je crois qu'elle est extrêmement importante. Il y a peu d'enjeux qui revêtent autant d'importance tant au niveau de la justice sociale que du rendement économique dans notre pays que cette merveilleuse possibilité qui se présente à vous aujourd'hui.
Tout d'abord, j'aimerais faire une ou deux observations—et je laisserai Scott approfondir cette question—à propos de ce que nous savons et de ce que nous ne savons pas en matière d'accessibilité. Nous ne savons que ce que nous savons, et nous n'en savons pas beaucoup, malheureusement. Cela est dû à des raisons techniques. Essentiellement, il faut faire des types particuliers d'enquête en posant des questions particulières, et dans l'ensemble nous n'avons pas établi ce genre de méthode.
Au cours des prochaines années, en raison des initiatives mises sur pied par Statistique Canada, en collaboration avec DRHC, notre compréhension de cette dynamique va nettement s'améliorer. En effet, nous comprendrons comment l'accès au système d'enseignement postsecondaire est lié aux antécédents familiaux et nous comprendrons aussi le rôle du système financier de l'étudiant à cet égard. Entre-temps, nous ferons ce qu'il faut faire.
• 1205
J'ai réussi à consulter diverses bases de données—et je ne
m'étendrai pas sur les détails techniques—pour analyser les
niveaux d'emprunt et le fardeau de la dette des diplômés des études
postsecondaires au cours des 20 dernières années à peu près. Ces
chiffres sont en fait assez étonnants. Les faits rapportés par la
presse sont en majeure partie extrêmement exagérés. Les niveaux
d'emprunt et les problèmes d'emprunt ont été dans l'ensemble
extrêmement exagérés.
Simplement pour vous donner certains des principaux résultats—et ils sont tirés d'un document que j'ai préparé qui sera publié en tant que commentaire de l'Institut C.D. Howe ainsi que dans diverses revues spécialisées—du plus récent groupe de diplômés, ceux qui ont terminé leurs études postsecondaires en 1995, entre le quart et la moitié d'entre eux ont terminé leurs études sans aucun prêt étudiant, soit moins de la moitié de tous les diplômés. Ces chiffres correspondent à ceux indiqués par Paul plus tôt. Sur ceux qui empruntent, les niveaux moyens d'emprunt s'échelonnaient entre 9 000 et 14 000 $. Il s'agit des niveaux moyens d'endettement.
Il y a certaines histoires d'horreur—les extrêmes. J'en parle dans mes documents, mais ce sont des cas rares. Le nombre d'étudiants extrêmement endettés est assez petit. Lorsque l'on fait la moyenne de tous les diplômés, y compris ceux qui n'empruntent pas, le montant moyen des emprunts chez tous les diplômés se situe entre 3 000 et 6 000 $. Il s'agit de la dette accumulée au moment de la remise des diplômes. J'inclus les diplômés des premier, deuxième et troisième cycles, de même que les diplômés de collège.
Nous n'avons pas de bonnes données sur le non-remboursement de prêts, mais la question portait sur la fréquence des problèmes et des difficultés liés aux prêts étudiants. Nous avons demandé aux intéressés s'ils avaient des difficultés avec leur prêt. Si on établit la moyenne pour tous les diplômés, le pourcentage varie entre 10 et 15 p. 100.
Donc, la principale conclusion, c'est que les taux d'emprunt ont augmenté, que l'endettement a augmenté mais qu'il n'est toujours pas très important. Les étudiants ont réussi à rembourser leur prêt, dans l'ensemble, comme Paul l'a indiqué. Quarante à cinquante pour cent des prêts sont remboursés dans les deux ans qui suivent la remise des diplômes. Il existe un petit nombre de gens qui ont connu des problèmes d'endettement.
Maintenant, la situation a changé ces dernières années. Cela ne fait aucun doute. Mais elle n'a probablement pas tant changé que ça. Je pourrais vous fournir une explication, mais je ne le ferai pas. Donc les niveaux d'endettement sont plus élevés qu'auparavant mais dans l'ensemble le niveau d'endettement n'est pas aussi élevé que ça. Les problèmes sont plutôt rares. Voilà donc la situation concernant l'endettement des étudiants.
Donc, que devrions-nous faire? Rétablissons un système équitable sur le plan social qui facilitera l'accessibilité tout en servant parallèlement les objectifs de l'efficacité économique. Ce que je propose, c'est de rétablir le système de prêts. Le niveau d'endettement de la plupart des étudiants n'est pas très élevé. Ils peuvent assumer des niveaux plus élevés et ils le devraient pour de raisons d'équité de même que d'efficacité sociale. Cela signifie que la plupart des gens qui font appel au système proviennent de familles à revenu élevé ou auront des revenus plus élevés, comme l'a fait valoir Paul. Parallèlement, un système de prêts peut assurer une aide financière beaucoup plus élevée en fonction d'un montant donné d'investissement du gouvernement, parce quÂessentiellement l'argent est recyclé. Au lieu de le remettre aux étudiants après quoi cet argent disparaît, vous le prêtez et ils le remboursent. Donc, un montant donné de dépenses gouvernementales peut aller beaucoup plus loin.
C'est pourquoi pour des raisons d'efficacité et également d'équité salariale, nous devrions nous orienter davantage vers des prêts plutôt que des subventions. À quoi devrait ressembler le système proprement dit? Pour faire écho à certaines des autres observations qui ont été faites, il devrait exister un système d'emprunt modifié de la façon suivante. Tout d'abord, il faudrait élargir l'admissibilité aux prêts—c'est-à-dire accorder plus de prêts à plus de gens. Pourquoi? Ils ont besoin d'argent pour accéder aux études supérieures, ce qui accroît leur accessibilité. Deuxièmement, il faudrait établir des limites en matière d'admissibilité et d'emprunt. Ensuite, l'aspect le plus important—comme je l'ai déjà dit—c'est qu'il existe une petite minorité qui connaît des difficultés et ces personnes ont besoin d'une aide accrue.
On a donc un système de prêts qui fournit de l'argent à ceux qui en ont besoin. Parallèlement, ce système permet d'aider les étudiants s'ils connaissent des problèmes. C'est donc un bon départ. Mais vous avez un système qui va nettement plus loin et qui fournit vraiment l'aide nécessaire à ceux qui en ont besoin. Plus vous avez un système—ici encore c'est formidable—vous prêtez de l'argent aux personnes qui en ont besoin. Celles qui le peuvent remboursent ces prêts. Celles qui connaissent des difficultés reçoivent de l'aide. Tous les emprunteurs y gagnent, parce qu'ils comprennent que s'ils connaissent des difficultés, on va s'occuper d'eux.
• 1210
Par conséquent, un système de prêts plus généreux permet
d'atténuer les problèmes d'aversion pour l'endettement qui
surgissent et qui représentent un obstacle à l'accès, ce qui à mon
avis est le cas, en prévoyant une aide nettement plus importante au
cours de la période qui suit les études pour ceux qui en ont
besoin.
Qu'est-ce que cela donne au bout du compte? Pour ce qui est du système intégral, vous avez, au sommet, une aide généreuse qui continue d'être fournie à l'ensemble des étudiants parce que le gouvernement subventionne les études postsecondaires dans une grande mesure, comme il le doit. Indépendamment des antécédents socio-économiques, chacun bénéficie des dépenses du gouvernement.
Deuxièmement, un tel système de prêts fournit des fonds qui n'existeraient pas en l'absence du système de prêts gouvernemental. En effet, on prévoit des fonds supplémentaires pour ceux qui en ont besoin.
Troisièmement, ceux qui ont les moyens de rembourser ces prêts le font. Je procède selon un ordre d'importance décroissante de l'aide gouvernementale—la façon dont cette aide fonctionne dans l'ensemble du champ d'activité socio-économique. Ceux qui peuvent rembourser leur prêt parce qu'ils obtiennent des emplois leur assurant une rémunération raisonnable et qui ne connaissent pas de problème de chômage, le remboursent plus ou moins intégralement. Ensuite, ceux qui connaissent des difficultés reçoivent de l'aide. Puis au bas de l'échelle—et il sera probablement toujours nécessaire d'avoir un système de subventions qui permette d'aider ceux qui se trouvent tout au bas du système socio-économique—se trouvent ceux qui proviennent de familles à faible revenu et pour qui l'aversion pour l'endettement est et sera toujours un problème même s'il existe un bon système de prêts. Donc un système restreint de subventions en fera toujours partie.
Ce sont à mon avis les mesures que le gouvernement devrait prendre: prévoir plus d'argent là où c'est nécessaire pour garantir un accès juste et équitable.
Enfin, j'ai utilisé ces données pour aborder les autres problèmes liés à l'insuffisance d'argent dans le système d'études postsecondaires. Celui-ci connaît une pénurie de fonds depuis les 15 dernières années. Comment allons-nous le renflouer?
Je propose un contrat social selon lequel chaque pallier de gouvernement verse un montant de 1 000 $ et l'étudiant, un montant équivalent: c'est-à-dire 3 000 $—le gouvernement fédéral, les provinces et les étudiants. Cela devrait satisfaire tout le monde puisque la qualité de l'enseignement sera nettement meilleure et qu'ils ne paient qu'un tiers du coût. C'est un enjeu pour chaque partie.
On donne aux étudiants les moyens de le faire en élargissant le système de prêts, comme je l'ai indiqué. Mais il faudra également prévoir des mécanismes pour que cela ne crée pas un endettement excessif. Cela devrait satisfaire à la fois les provinces et le gouvernement fédéral car chacun d'entre eux ne versera que 1 000 $, et les 2 000 $ restants proviendront des autres parties.
Ce sont des propositions qui sortent des sentiers battus et qui m'ont été inspirées par mes réflexions sur l'accessibilité au système et les moyens d'y parvenir. Cela pourrait peut-être faire l'objet de discussions plus approfondies.
J'ai fait d'autres travaux sur la mobilité inter-provinciale et ces documents sont disponibles. Je m'arrêterai ici.
Le président: Il est fort possible que nous revenions là-dessus au moment des questions.
M. Scott Murray de Statistique Canada.
[Français]
M. Scott Murray (directeur général, Statistiques sociales et des institutions, Statistique Canada): Merci, monsieur le président.
[Traduction]
Je veux vous présenter les choses sous un angle légèrement différent car je ferai certaines observations qui pourraient être qualifiées de schizophrènes.
La première chose à laquelle vous vous attendriez, c'est d'entendre des arguments en faveur de meilleures données provenant du système pour faciliter la compréhension de ces questions, étant donné qu'elles sont fondamentales si nous voulons assurer l'équité sociale au niveau des résultats économiques et asseoir notre prospérité économique future. Il vaut donc la peine d'investir un peu d'argent pour comprendre les processus de façon cartésienne.
Vous avez entendu Ross et les autres témoins dire que nous sommes sur le point de disposer de données nettement meilleures, mais nous n'en sommes pas encore là. Un grand nombre d'initiatives sont financées de façon aléatoire et pourraient donc disparaître n'importe quand.
Je vais utiliser des données qui comparent la population handicapée et non handicapée à titre d'exemple de la façon d'envisager l'accès et la persistance dans le système en tant que processus du cycle de vie et pour illustrer l'existence de graves problèmes d'équité d'accès que nous comprenons mal.
Je vais commencer par un tableau général illustrant les taux de participation des Canadiens de 18 à 21 ans, selon leur statut socio-économique. On y compare le statut socio-économique et la participation de 1986 à 1994. Soit dit en passant, il s'agit des données les meilleurs et les plus récentes dont nous disposons. Ce tableau indique que la participation a augmenté dans l'ensemble des trois groupes socio-économiques—c'est-à-dire les groupes du statut socio-économique inférieur, moyen et supérieur—mais que les plus petits gains ont été réalisés par les membres du groupe socio-économique inférieur. Cela signifie qu'il existe une inégalité dans le système—une inégalité qui peut être attribuée à des différences au niveau de l'intérêt pour les études postsecondaires, au niveau des aptitudes sous-jacentes à faire des études postsecondaires et au niveau des obstacles à la participation—y compris des obstacles financiers.
• 1215
Le deuxième tableau—que l'on a astucieusement nommé graphique
1—indique les taux de graduation au cycle secondaire pour les
invalides et les non-invalides. L'invalidité est définie ici en
fonction des limites de l'activité. Ce graphique indique une grande
différence entre les taux de graduation des deux populations. Cela
signifie qu'une forte proportion de personnes sont exclues du
système d'études postsecondaires parce qu'elles ne satisfont pas
aux conditions établies.
Le prochain graphique nous amène à l'étape suivante. En ce qui concerne les personnes qui ont terminé leurs études secondaires, les taux de participation des invalides et des non-invalides sont pratiquement identiques. Il ne semble donc pas y avoir d'obstacle important pour ce qui est de commencer au moins des études postsecondaires.
Le graphique 3, toutefois, présente d'importantes différences entre les personnes invalides et non invalides pour ce qui est des taux de graduation, pour ceux qui ont commencé des études postsecondaires. La différence est de 6 ou 7 p. 100, ce qui est considérable. Cela semble indiquer l'existence d'importants obstacles qui les empêchent de terminer leurs études.
Le dernier tableau examine la même question dans une perspective légèrement différente: le pourcentage des personnes qui font des études post-secondaires. Dans ce cas, les invalides affichent des taux de participation supérieure à la population non invalide—ce qui semble indiquer que l'absence des motivations personnelles n'est pas un facteur. Ces personnes sont prêtes à participer, mais il existe des obstacles qui les empêchent de terminer leurs études.
Cette illustration traite d'une population très vulnérable. Nous pouvons refaire l'analyse en fonction du statut socio-économique et du statut d'immigrant, et constater à peu près les mêmes tendances.
Je terminerai par une requête propre à Statistiques Canada en faveur de meilleures données. Nous sommes sur le point de les obtenir, et nous tenons à nous assurer que l'on maintienne et que l'on améliore ces banques de données. Une fois que nous aurons ces données, nous serons mieux en mesure de comprendre les questions sérieuses concernant l'équité au sein du système.
Le président: Merci beaucoup, Scott.
M. Thomas Townsend de DRHC.
M. Thomas Townsend (Directeur général, Direction générale de l'apprentissage et de l'alphabétisation, Développement des ressources humaines Canada): Je vous remercie, monsieur le président et membres du comité permanent, de m'offrir l'occasion de venir discuter ce matin des questions d'accessibilité et de mobilité.
La ministre Stewart, que le comité a entendue la semaine dernière, nous a rappelé qu'au cours de la prochaine décennie, seulement un emploi sur 17 exigera moins qu'un diplôme d'études secondaires. Pour être concurrentiel à l'échelon international, le Canada aura besoin qu'une forte majorité de sa population ait terminé des études post-secondaires.
Il existe également un aspect qui est tout aussi important, à savoir que l'éducation post-secondaire s'est révélée être le facteur primordial de la mobilité sociale dans notre pays. Cela est absolument fondamental dans une société diversifiée et pluraliste.
Nous savons qu'environ 54 p. 100 de la population canadienne a fait des études post-secondaires—qu'il s'agisse de formation universitaire, collégiale, professionnelle ou technique.
[Français]
Toutefois, certains indices laissent croire que le taux de participation augmente d'une façon inégale, comme l'a mentionné Scott Murray plus tôt, surtout pour les groupes socioéconomiques et autres groupes importants. Le taux de participation paraît inférieur pour les personnes venant de régions rurales, pour les personnes handicapées et pour les peuples autochtones.
[Traduction]
Il existe des obstacles à l'accessibilité, et j'aborderai principalement les obstacles financiers. Mais j'aimerais simplement mentionner un certain nombre d'autres obstacles non financiers. J'en ai déterminé cinq. Le premier, et le plus important, est sans doute le moins compris. Il s'agit de la valeur qu'accorde à l'acquisition des connaissances l'unité familiale et l'apprenant. Deuxièmement, l'acquisition des aptitudes d'apprentissage de base nécessaires à la réussite des études postsecondaires. Troisièmement, toute la gamme d'obstacles culturels qui peuvent masquer et entraver les voies d'apprentissage menant au succès scolaire. Quatrièmement, il y a les obstacles financiers, et cinquièmement, la série d'obstacles non financiers, tels que le manque de temps, les obligations familiales et les pressions du monde du travail.
• 1220
L'ordre dans lequel j'énumère ces obstacles a son importance,
car dans bien des cas, les obstacles financiers ne sont pas les
plus importants.
Permettez-moi de vous dire quelques mots sur les valeurs. Le principal prédicteur de l'accès aux études postsecondaires est le niveau d'instruction atteint par les parents: d'abord par la mère, ensuite par le père. Les enfants élevés dans un milieu qui les stimulent résistent mieux aux revers subis au cours de leur cycle d'apprentissage. Lorsque ces jeunes décrochent en cours d'études, ils ont tendance à les reprendre plus tard.
[Français]
Un des principaux défis à relever est d'accroître la participation aux études postsecondaires et de réduire le nombre beaucoup trop élevé de jeunes qui émergent de notre système d'études secondaires sans savoir suffisamment lire, écrire, compter et sans avoir les capacités cognitives nécessaires pour être admis à un programme d'études postsecondaires et le réussir.
Trop d'adultes ont vu des compétences autrefois bonnes s'atrophier parce que trop peu utilisées.
[Traduction]
En ce qui concerne les obstacles structurels, le système postsecondaire canadien est fragmenté et n'a pas de méthode bien établie de reconnaissance des apprentissages. Il faut apporter des améliorations afin que soient reconnues dans l'ensemble des établissements d'enseignement canadien et dans les lieux de travail, les compétences et les connaissances acquises à l'extérieur du Canada.
[Français]
Comme l'a déjà constaté le comité, l'escalade des coûts associés aux études postsecondaires est devenue, au cours des dernières décennies, une préoccupation de plus en plus présente pour tous les gouvernements qui assument le coût des études postsecondaires. Les élèves paient environ 30 à 35 p. 100 des coûts directs des études universitaires, à titre d'exemple.
[Traduction]
En ce qui concerne les obstacles financiers, les jeunes à faible revenu ou issus de familles à faible revenu ont incontestablement accès à une aide financière grâce à des programmes comme le programme canadien de prêts aux étudiants. Cependant, en raison de la hausse du coût des études au cours des 10 dernières années, sans augmentation correspondante du revenu familial disponible, les familles à revenu moyen ont de plus en plus de difficulté à économiser pour payer les études postsecondaires de leurs enfants. Il existe des incitatifs fiscaux pour ce groupe, mais il n'a jamais eu droit à une aide financière directe.
Le gouvernement du Canada a beaucoup fait pour venir en aide aux apprenants. Nos taux élevés de participation reflètent l'accessibilité généralisée d'une aide telle que celle offerte par le programme canadien de prêts aux étudiants—les prêts et les subventions sont disponibles dans la plupart des provinces. Nous savons qu'environ 44 p. 100 des étudiants de niveau universitaire ou collégial bénéficient d'un prêt ou d'une subvention.
Le gouvernement a également instauré ces dernières années plusieurs nouvelles mesures qui se traduisent par plus de 400 millions de dollars par an en aide financière non remboursable.
Cela dit, nous devons continuer à travailler dans certains secteurs. Il y a par exemple les ajustements normaux qu'il faut apporter à tout programme de l'envergure de celle du programme canadien de prêt aux étudiants. Paul Davenport a déjà parlé de la confusion et de la paperasserie que les étudiants doivent affronter dans de nombreuses provinces.
Nous avons lancé un processus d'harmonisation et d'intégration des prêts fédéraux et des prêts provinciaux aux étudiants. Nous sommes à la veille d'arriver, avec la Saskatchewan, à un accord qui déboucherait essentiellement sur un guichet unique, un formulaire de demande unique, un processus de règlements unique, bref une formule qui serait la même pour tous les étudiants. Par ailleurs, nous sommes également en pourparlers très intenses avec l'Ontario dans le but d'arriver à une formule du même genre.
• 1225
Un autre élément qui est souvent cité par les groupes
estudiantins est la question de l'endettement qui a déjà été
abordée par plusieurs des membres du panel. Cette question n'est
pas monolithique mais doit être examinée par rapport au revenu que
les étudiants peuvent gagner après leurs études et en tenant compte
aussi de la capacité qu'ils ont de rembourser leur dette sans
devoir pour autant renoncer à d'autres dépenses pourtant
importantes dans leur quotidien.
À ce sujet, je voudrais simplement demander au comité d'admettre que lorsque nous parlons d'études postsecondaires, nous pensons souvent aux études universitaires. Mais en réalité, les étudiants qui fréquentent les collèges, les écoles de métiers et les écoles professionnelles bénéficient également souvent de prêts de ce genre. Par contre, l'investissement qu'on effectue en poursuivant ce genre d'études ne rapporte pas les mêmes dividendes que des études universitaires parce que tous les étudiants n'ont pas les mêmes possibilités de s'acquitter de leur dette. Il faut donc faire l'adéquation entre le revenu gagné après les études et la dette contractée pour les poursuivre.
Les études à temps partiel et les possibilités d'aide financière offertes à ce genre d'études sont également des éléments extrêmement importants d'une amélioration de l'accès aux études supérieures. Il faut également, sur un autre plan, songer au grand principe d'une aide financière qui permettrait au Canada de favoriser l'acquisition continue du savoir. D'ailleurs, les provinces, les territoires et le gouvernement fédéral ont constitué un groupe de travail sur cette question.
[Français]
Très brièvement, j'aimerais faire quelques commentaires généraux supplémentaires au sujet de la seconde question abordée par le comité, celle de la mobilité.
Le gouvernement du Canada appuie sans réserve le principe de mobilité. C'est pour cette raison que les programmes canadiens de prêts aux étudiants sont entièrement transférables dans tout le pays, et à l'échelle internationale. Les divers gouvernements se sont engagés, aux termes de l'entente-cadre sur l'union sociale, à empêcher la création de tout nouvel obstacle à la mobilité.
[Traduction]
Mais tout en disant cela, nous savons fort bien qu'il y a des obstacles à la mobilité entre les provinces. Il y a par exemple des différences entre les frais de scolarité, la non-équivalence des crédits et la non-transférabilité de l'aide financière aux étudiants dans certaines provinces.
Nous croyons que la meilleure façon d'abattre ces obstacles consiste à continuer à travailler avec nos partenaires des provinces et des territoires afin d'élaborer et de mettre en «uvre des programmes harmonisés et intégrés. Nous avons déjà enregistré certains succès à ce titre, mais il faudra continuer à fouiller la question.
Pour ce qui est de la mobilité internationale, nous envoyons un nombre insignifiant de nos étudiants étudier à l'étranger—beaucoup moins que les autres pays de l'OCDE. Et parmi ceux qui vont faire leurs études à l'étranger, la plus grande partie d'entre eux iront aux États-Unis.
Merci beaucoup, monsieur le président, d'avoir bien voulu m'écouter. Je suis prêt à répondre à vos questions.
Le président: Je vous remercie Thomas.
Nous allons maintenant passer aux questions. En règle générale, le comité procède de la façon suivante: nous alternons entre les deux côtés de la table et chaque échange dure environ cinq minutes. Chers collègues, nous allons donc nous en tenir à cette règle et nous allons ainsi faire deux ou trois tours de table.
Commençons donc par Carol Skelton qui sera suivie par Raymonde Folco, Paul Crête, Diane St-Jacques et Pat Martin, après quoi la présidence établira un nouvel ordre d'intervention.
Mme Carol Skelton (Saskatoon—Rosetown—Biggar, Alliance canadienne): Monsieur Townsend, pourriez-vous nous donner une idée de la moyenne des prêts consentis aux étudiants canadiens par le ministère.
M. Thomas Townsend: J'ai ce chiffre ici, mais il va me falloir quelques instants pour le retrouver.
Mme Carol Skelton: Très bien.
Monsieur Finnie, vous avez dit qu'au Canada, l'étudiant recevait en moyenne un prêt allant de 3 000 à 6 000 $, n'est-ce pas?
M. Ross Finnie: C'est une moyenne établie à la fois pour ceux qui empruntent et ceux qui n'empruntent pas. Pour ceux terminent leurs études grâce à des prêts, les moyennes se situent entre 9 000 et 14 000 $.
Mme Carol Skelton: Pouvez-vous nous dire combien de temps il leur faut pour rembourser ces prêts?
M. Ross Finnie: Oui et non. D'après les données sur lesquelles j'ai travaillé, nous ne pouvons que calculer les montants qui ont été remboursés deux ans après la remise du diplôme. Par contre, les chiffres sont étonnamment élevés, puisqu'il s'agit de 40 à 50 p. 100. Ces prêts sont normalement amortis sur 10 ans, de sorte que la majorité des étudiants les remboursent beaucoup plus rapidement que le barème de remboursement ne le laisserait penser.
Mme Carol Skelton: Pouvez-vous me dire combien de prêts doivent être radiés pour défaut de paiement?
M. Ross Finnie: Nous n'avons pas de données récentes à ce sujet mais, dans un ouvrage que j'ai écrit avec mon collègue Saul Schwartz, nous avions estimé qu'à l'époque, vers le milieu des années 90, de 20 à 25 p. 100 des étudiants ayant contracté un prêt étaient en défaut, mais après intervention d'une agence de recouvrement, ces prêts en défaut ne représentaient plus que 7 p. 100 environ du total.
• 1230
Par contre, la situation a changé depuis, et ce sur quoi il
faut mettre l'accent... Je n'ai pas de données catégoriques à ce
sujet et je ne sais pas d'ailleurs si ces données existent, mais il
semblerait que ce ne sont pas les étudiants moyens qui fréquentent
un collège ou une université qui posent le plus gros du problème,
ce sont ceux qui abandonnent leurs études et qui ne peuvent donc
pas en tirer le fruit, et en second lieu les étudiants des petits
collèges privés dont les frais de scolarité sont très élevés et
dont le programme d'études s'étale sur huit mois. Depuis un ou deux
ans, il semblerait que ce soit dans ces deux secteurs là que la
majorité des problèmes se rencontrent.
Mme Carol Skelton: Mais le profil démographique des étudiants qui fréquentent ces écoles professionnelles privées n'est pas le même. Vous ne trouvez pas? Ce n'est pas la même catégorie d'étudiants...
M. Ross Finnie: En effet.
Mme Carol Skelton: On y retrouve par exemple de mères célibataires. Le profil démographique de ces étudiants est donc différent.
M. Ross Finnie: Vous avez raison. Je n'ai pas pu mettre la main sur une bonne analyse de cette catégorie en particulier. Je pourrais faire des hypothèses mais je préférerais m'abstenir.
Mme Carol Skelton: Monsieur Davenport?
M. Paul Davenport: Je pense que les données de Ross valent pour une année antérieure. Quelle est l'année pour laquelle vous avez des données sur l'endettement moyen?
M. Ross Finnie: Les données les plus récentes sont celles de 1995. Les niveaux d'endettement devraient donc avoir augmenté... Non, laissez-moi plutôt mettre les choses en contexte, si vous me permettez de donner suite à cela. Les frais de scolarité ont augmenté. Cela apparaît clairement dans mon texte ainsi que dans le document. Les étudiants ont donc dû bénéficier de marges d'emprunt plus élevées. Lorsqu'on rajuste les choses en fonction de cela, on obtiendrait un endettement moyen de l'ordre de 19 000 $. Il y a d'autres chiffres que j'ai pu consulter et qui semblent le corroborer. En revanche, il y a également l'argent des bourses du millénaire qui ferait plutôt baisser le total. C'est donc difficile à dire. Personne n'a la réponse, mais je dirais personnellement qu'à l'heure actuelle, si vous me demandiez une hypothèse, je vous dirais que le niveau d'endettement moyen serait légèrement inférieur à 20 000 $.
Mme Carol Skelton: Monsieur Davenport, vous disiez quelque chose?
M. Paul Davenport: Chaque année, nous faisons un sondage parmi les étudiants au moment où ils décrochent leur diplôme. Nous leur posons plusieurs questions, et notamment nous leur demandons à combien s'élève leur dette. L'inconvénient de mes chiffres, c'est qu'ils ne représentent que le résultat d'un sondage partiel car le taux de réponse est d'environ 35 p. 100. En outre, il s'agit d'un jugement individuel, ce n'est pas un chiffre officiel émanant du RAFEO par exemple. C'est ce que l'étudiant pense devoir. Mais ces chiffres ont augmenté considérablement depuis 1995. Pour tous les étudiants de premier cycle, la dette moyenne s'élèverait actuellement à 16 000 $ environ, et dans le cas des étudiants qui empruntent, ce chiffre serait d'environ 24 000 $.
Il s'agit néanmoins d'un taux d'endettement tolérable. Ces prêts sont remboursés et, comme je le signalais un peu plus tôt, en 1996, taux d'impayés était d'environ 12 p. 100. À l'heure actuelle, il est inférieur à 9 p. 100 et dans mon établissement, il est inférieur à 8 p. 100. Par conséquent, comme Ross vous l'a dit, le problème des prêts impayés n'est pas énorme.
Par contre, nous ne faisons pas grand chose pour aider la minorité d'étudiants qui ont besoin d'assistance après avoir obtenu leur diplôme. Le problème, en l'occurrence, est qu'il est possible que pendant ses études secondaires, l'élève ait connaissance de quelqu'un qui a été obligé de manquer à ses engagements ou de se déclarer en cessation de paiement et dise, mon Dieu, je ne veux pas devoir en arriver-là.
Gommons donc le problème. Adoptons plutôt un système qui soit véritablement indexé au revenu et disons aux étudiants écoutez, nous allons vous demander de payer vos frais de scolarité et d'emprunter, mais la société va partager le risque avec vous. Nous allons vous aider. Si vous éprouvez des difficultés après vos études, nous serons derrière vous.
Mme Carol Skelton: Monsieur Townsend?
M. Thomas Townsend: C'est cela le risque qu'on court lorsqu'on représente le gouvernement. Je dois vous donner le vrai chiffre.
Le président: Rapidement, Thomas, si vous voulez bien.
M. Thomas Townsend: Pour vous donner un ordre de grandeur, voici le prêt étudiant moyen annuel dans le cadre du programme fédéral. Cela ne comprend donc pas les prêts provenant d'autres sources. Je vais vous donner l'écart sur 10 ans. Cela a commencé en 1989-1990 par 2 787 $, soit un tout petit peu moins de 3 000 $, pour passer à 4 654 $, dont 4 500 $ environ, en 1998-1999. La plupart des étudiants qui suivent un programme de quatre ans empruntent pendant trois ans. La dette moyenne pour un cycle d'études universitaires est de l'ordre de 13 000 $ en prêts canadiens d'études. En tout, la dette représente environ 17 000 $. Il y a évidemment des variations considérables d'une province à l'autre étant donné que certaines provinces ont des systèmes de subvention d'une générosité extraordinaire. Je pense que le Québec a un plafond pour les prêts qui fait en sorte que le niveau d'endettement est plus faible.
Mme Carol Skelton: Je vous remercie.
Le président: Raymonde Folco.
[Français]
Mme Raymonde Folco (Laval-Ouest, Lib.): Merci, monsieur le président.
Ma question porte sur un tout autre sujet. Je pense que la question s'impose, d'autant plus que ce comité se penche aussi sur la situation des personnes handicapées, d'une part. D'autre part, j'ai reçu un groupe d'autochtones, tout récemment, qui s'inquiétait de la place des autochtones dans les établissements d'enseignement postsecondaire.
• 1235
Ma question s'adresse non seulement aux personnes
représentant le ministère, mais aussi aux chercheurs
représentant les universités. Dans quelle mesure
les personnes handicapées, d'une part, et
les autochtones, d'autre part, ont-ils accès à
l'enseignement postsecondaire? C'est une grande
question, mais je pense qu'elle s'impose.
[Traduction]
Le président: Paul Davenport, puis Ross.
[Français]
M. Paul Davenport: Je pense qu'en Ontario, il y a des facteurs d'ordre physique qui affectent les gens qui ont un handicap, et des facteurs financiers pour tous les groupes sujets à exclusion ou à être sous-représentés dans les universités.
Si on considère les facteurs d'ordre physique, je peux vous assurer que nous investissons, à l'Université Western Ontario et ailleurs, des sommes considérables chaque année pour s'assurer qu'on puisse circuler partout en chaise roulante, que les étudiants qui ont des problèmes d'écoute ou d'élocution obtiennent de l'aide, etc.
Passons à la question du financement. Depuis six ans, nous devons, en Ontario, affecter 30 p. 100 de chaque augmentation de frais de scolarité à un fonds de prêts et bourses pour les étudiants qui ont de très grands besoins. À l'heure actuelle, l'université dispose d'environ 10 millions de dollars pour aider des gens et des familles défavorisés.
Nous avons donc, en plus des prêts et bourses, 10 millions de dollars pour aider les gens qui ont de très grands problèmes. Je pense que, pour les autochtones, toutefois, le plus grand obstacle n'est pas vraiment d'ordre financier. Nous devons faire un plus grand effort, à l'Université Western Ontario, pour rencontrer ces jeunes gens au lycée, parler avec leur famille des possibilités qu'offre l'université, et dire que nous sommes ouverts et que nous souhaitons qu'ils étudient à notre université. Je crois qu'il ne s'agit pas surtout d'une question financière, mais de contact humain, si je peux m'exprimer ainsi.
[Traduction]
Le président: Ross.
[Français]
M. Ross Finnie: Malheureusement, je n'ai pas d'information. Je ne connais aucune analyse de ces aspects, mais d'ici un ou deux ans, nous améliorerons notre connaissance de la situation de ces groupes.
[Traduction]
Le président: Raymonde, me permettriez-vous une toute petite intervention?
C'est une question à laquelle il est difficile de répondre, mais Thomas a dit que nous devrions songer aux collèges. Il me semble à moi, que dans le cas des Autochtones, par exemple, les collèges représentent un élément extrêmement important. Dans ma circonscription, je me doute qu'il y a des étudiants autochtones dans les collèges, mais je sais que du point de vue fédéral, les choses ne sont pas aussi bien organisées que dans les universités. Qu'en pensez-vous?
Thomas Townsend.
M. Thomas Townsend: Vous avez raison et j'ai certains chiffres à ce sujet. Ce sont d'ailleurs des bonnes nouvelles. Je vais commencer par parler des Autochtones et passer ensuite aux personnes handicapées. La bonne nouvelle, c'est qu'on a enregistré une augmentation considérable du nombre de diplômés d'études secondaires. En 1996, il y avait un peu plus de 20 p. 100 alors qu'à l'heure actuelle, nous nous situons entre 30 et 40 p. 100.
[Français]
Parlons des autochtones. Entre 1986 et 1996, il y a eu une augmentation importante du nombre de diplômés autochtones du système postsecondaire. Par contre, le nombre de diplômés autochtones du niveau universitaire n'a pas augmenté beaucoup. Mais, comme le président l'a indiqué, le nombre de personnes qui ont complété soit un diplôme, soit un certificat au niveau collégial a augmenté d'un peu plus de 10 p. 100, pour atteindre presque 20 p. 100.
• 1240
Il y a donc des progrès, mais quand on fait
la comparaison entre les autochtones et d'autres groupes en
général, on voit qu'il reste beaucoup à faire. Et pour y arriver,
il faut abolir beaucoup de barrières non
financières. Il faut démontrer la valeur de ce niveau
d'éducation et revoir la préparation aux études
postsecondaires. Il faut aussi prévoir une forme de soutien
pour l'autochtone qui doit partir de chez lui
pour aller à l'université. Ces facteurs sont
très importants.
Quant aux personnes handicapées, Scott a cité des statistiques. Il a parlé des limitations de mobilité. Il ne devrait y avoir aucune différence à ce niveau entre ce groupe et la population générale, mais il y a quand même une différence. On a fait beaucoup au cours des années dernières au niveau de l'aide financière, mais on devrait faire beaucoup plus pour abolir les barrières non financières.
[Traduction]
Le président: Il faut vous dépêcher, Raymonde, parce que vous avez déjà eu près de sept minutes.
Nous avons invité des représentants du ministère des Affaires indiennes et du Nord canadien mais ils n'ont pas pu venir aujourd'hui. Je pense que nous pourrions aussi bien leur demander de nous remettre quelque chose par écrit à ce sujet s'ils peuvent le faire très rapidement.
Dans un même ordre d'idée, Thomas, nous vous saurions très reconnaissants si vous pouviez nous faire parvenir votre tableau, et si les autres ont des renseignements à ce sujet, nous aimerions également les recevoir.
S'agit-il d'un commentaire ou d'une question?
Mme Raymonde Folco: C'était un commentaire.
[Français]
Je retiens de ce qui a été dit des autochtones qu'ils en sont, de façon générale bien entendu, au point où une génération est maintenant prête à étudier—elle le fait déjà d'ailleurs—à ce qui s'appelle le cégep au Québec, c'est-à-dire une préuniversité. Cette génération ne semble pas encore prête à étudier à l'université. Un effort est-il fait pour les y amener? Est-ce que je me trompe?
Le président: Monsieur Paul Crête.
M. Paul Crête (Kamouraska—Rivière-du-Loup—Témiscouata—Les Basques, BQ): Merci, monsieur le président.
Je veux saluer les gens qui sont venus témoigner, en particulier M. Davenport, dont l'université possède une école de langues à Trois-Pistoles depuis bientôt 70 ans. Je souhaite qu'elle soit maintenue pendant encore plusieurs années.
Ma question porte sur toute la problématique de l'équilibre entre le financement que reçoit l'université et la part de ses revenus qui provient des frais payés par les étudiants. J'ai eu de la difficulté à comprendre la vision des choses de M. Finnie, plus tôt. J'ai eu l'impression qu'il portait des lunettes roses. J'ai mieux compris quand il a parlé des statistiques de 1995.
C'est à partir de cette date que les gouvernements ont commencé à modifier les choses de façon importante.
J'aimerais savoir des intervenants, particulièrement de M. Davenport et peut-être aussi de Mme Delorme, où devrait se situer l'équilibre entre le financement direct des universités par les gouvernements et l'apport des étudiants, parce que cela a un impact majeur, selon moi, sur l'admissibilité. Le représentant du ministère a déclaré que Mme Stewart avait indiqué que dans le futur, un emploi sur dix-sept seulement n'exigerait pas de diplôme d'études secondaires, et qu'une forte majorité de la population devra avoir complété des études postsecondaires. Quelle serait la recette adéquate pour permettre d'atteindre de tels objectifs? Il y a a beaucoup d'indices que dans plusieurs milieux, les milieux ruraux, les milieux autochtones et parmi les handicapés, les résultats sont nettement en-dessous de ce qu'on souhaite.
J'aimerais connaître votre opinion à ce sujet.
Mme Denise Doherty Delorme: On sait bien que l'éducation postsecondaire est absolument nécessaire. Le système, en ce moment, dépense beaucoup d'argent en crédits d'impôt ou en bourses pour faire des investissements familiaux, mais on ne sait jamais si on pourra compter sur cet argent après les études, parce que tout l'argent est attribué après que les études sont terminées, et cela change à chaque année.
Les crédits de taxes pour étudier ont augmenté, mais les frais augmentent chaque année, et on ne sait pas s'ils vont continuer à augmenter. Cela se passe toujours par la suite. On sait que beaucoup de gens ont tellement peur d'avoir des dettes qu'ils n'envisagent même pas la possibilité de fréquenter un collège ou une université.
• 1745
Les crédits d'impôt et les autres programmes
coûtent présentement presque 4
milliards de dollars au gouvernement fédéral.
Les étudiantes et les
étudiants dépensent à peu près le même montant pour
les frais de scolarité. Le gouvernement fédéral
pourrait, sans dépenser un seul autre dollar,
éliminer tous les frais de scolarité tout de suite,
sans l'aide des provinces. Cela serait juste et
constituerait une vraie mesure sociale. Abolir les
frais de scolarité serait
profitable non seulement pour les
étudiants, mais aussi pour l'innovation, la
créativité et le futur du Canada.
Quelques étudiants très riches peuvent payer et entrer à l'université. Cela se passe déjà. En plus, on paye leurs crédits d'impôt. L'Ontario et la Nouvelle-Écosse sont les deux provinces où les frais ont été les plus augmentés. Si on considère le crédit d'impôt pour les frais de scolarité, il y a plus d'argent du fédéral qui est donné à ces deux provinces, plus d'argent qui est donné aux personnes qui ont plus d'argent, parce que ce n'est pas tout le monde qui peut utiliser un crédit d'impôt. Il faut avoir un revenu suffisant. Les pauvres n'utilisent pas ce crédit. On paye donc pour les provinces qui ont beaucoup d'argent et on paye pour les personnes qui ont beaucoup d'argent. Il faudrait vraiment éliminer les frais de scolarité. Cela réglerait tout ce problème, et on n'aurait pas besoin de recourir au système de prêts et bourses dans l'avenir.
M. Paul Davenport: Je pense justement, monsieur, qu'il faut atteindre un équilibre entre les frais de scolarité et le financement public. C'est un choix de société.
Il y a 12 ans, en Ontario, environ 10 p. 100 de nos frais d'opérations étaient couverts par les frais de scolarité. Aujourd'hui, ce pourcentage a augmenté à un tiers ou 35 p. 100. Il a beaucoup augmenté. Je trouve qu'un tiers ou 35 p. 100, c'est raisonnable. Cette augmentation, qui dure depuis 12 ans, doit donc arrêter mais la situation actuelle est très vivable. Je souhaite que les prochaines augmentations de revenus des universités ne viennent pas des frais de scolarité, mais des fonds publics.
Regardons l'Europe, examinons les pays qui nous ressemblent, qui ont le même niveau de développement, mais dont les frais de scolarité sont peu élevés. Dans la plupart de ces pays, il y a moins d'étudiants à l'université que chez nous. Prenons l'exemple de la France, que je connais bien. Elle a un bon système universitaire. Examinons sa jeune population, c'est-à-dire les gens âgés de 25 à 34 ans. Quatorze pour cent de cette population, en France, a un diplôme universitaire. Au Canada, il y en a 23 p. 100, et nous imposons des frais de scolarité. Un bon financement des étudiants permet d'augmenter la capacité des universités à accueillir des étudiants.
Il faut donc, messieurs, trouver cet équilibre. Je pense que l'équilibre actuel en Ontario est justifiable, mais cela implique que les futurs revenus importants doivent provenir des fonds publics. On ne peut pas toujours se tourner vers les étudiants.
M. Paul Crête: J'aimerais savoir s'il existe un tableau comparant l'impact du régime québécois de prêts et bourses et celui du régime canadien. Chaque fois que nous recevons des associations étudiantes, elles affirment que le régime du Québec entraîne un endettement plus bas que le système canadien. Avez-vous des commentaires à ce sujet?
[Traduction]
Le président: Soyez succinct, Thomas.
[Français]
M. Thomas Townsend: Le système, au Québec, est très généreux pour ceux qui reçoivent des prêts et bourses. Mais c'est un système où beaucoup moins d'étudiants ont accès aux prêts et bourses que dans les autres provinces. Cela va dans le sens de ce que Paul a vient de dire. On a parfois un accès très grand, mais on charge. C'est mieux de moins charger, mais on a alors un système plus restreint. Il y a plusieurs aspects du système québécois qui sont très bons.
Le président: Thomas, si vous avez des références, des rapports ou des chiffres à ce sujet, nous aimerions beaucoup les recevoir.
Ross, très rapidement.
[Français]
M. Ross Finnie: J'ai des chiffres sur l'endettement des étudiants par province que je pourrais envoyer au comité plus tard.
[Traduction]
Le président: Nous vous en serions très reconnaissants, Ross.
C'est autour de Diane St-Jacques qui sera suivie par Pat Martin.
[Français]
Mme Diane St-Jacques (Shefford, Lib.): Merci, monsieur le président.
Ma question porte sur les problèmes de mobilité. J'aimerais savoir, dans un premier temps, quels sont les plus graves problèmes auxquels font face les étudiants. J'aimerais aussi savoir ce qui est fait présentement et quelles sont les recommandations. Je sais, monsieur Finnie, que vous avez dit que vous aviez fait un rapport de recommandations. Donc, j'aimerais que vous m'expliquiez quelles sont les recommandations que vous avez mises dans votre rapport.
M. Ross Finnie: C'est une autre chose, mais il y a pas mal de mobilité parmi les étudiants. Par exemple, pour aller à l'école, selon les dernières données, ça se situait entre 6 et 6,5 p. 100 en gros pour le Canada. Pour ceux qui sont dans une autre province, cinq ans après qu'ils ont reçu leur diplôme, c'est autour de 15 p. 100, 14 p. 100, 13 p. 100.
Où est-ce qu'ils vont? C'est une question importante. En général, ils vont dans une province près de la leur, mais il y a aussi deux provinces cibles: la Nouvelle-Écosse et l'Ontario. Cela entre dans la question des frais de scolarité et des subventions pour l'éducation postsecondaire. Par exemple, il y a un bon pourcentage de jeunes de l'Ontario qui vont en Nouvelle-Écosse pour leurs études, ce qui coûte cher à la Nouvelle-Écosse. Peut-être devrait-il y avoir un système de remboursement ou quelque chose de semblable pour encourager cela. Présentement, pour les provinces, il y a des coûts associés à la venue d'étudiants des autres provinces. Il ne devrait peut-être pas y avoir de tels coûts. Le gouvernement devrait appuyer cela afin d'encourager, justement, la mobilité des étudiants.
Mme Diane St-Jacques: Au Québec, je sais qu'il y a des frais supplémentaires pour un étudiant qui vient d'une autre province. Est-ce qu'il y a d'autres provinces qui appliquent cette formule ou si c'est seulement au Québec qu'on le fait?
M. Ross Finnie: Je ne le sais pas. Je pense que c'est peut-être le cas en Colombie-Britannique.
M. Thomas Townsend: Il y a plusieurs restrictions. Au Québec, surtout pour les étudiants qui font des études de deuxième et troisième cycles, c'est très généreux. C'est moins généreux pour le premier cycle. En Colombie-Britannique, c'est très, très restreint. En Alberta, c'est assez restreint. En Saskatchewan, ça l'est un peu moins, mais ça varie beaucoup. C'est surtout qu'il y a, par exemple au Québec, des programmes pour lesquels l'admission est retreinte; donc, ils ne subventionnent pas des étudiants qui vont à l'extérieur du Québec pour ce genre de programme. De plus, si le programme existe au Québec, le gouvernement est beaucoup moins intéressé à donner des prêts et bourses aux personnes qui font des études à l'extérieur du Québec.
Il serait important que le comité prenne en considération le fait qu'une certaine mobilité des citoyens au niveau postsecondaire est bonne pour la compréhension de notre pays. Plusieurs d'entre nous ici présents ont fait leurs études à l'extérieur de leur province de résidence. Cela donne une expérience du Canada qui est très importante plus tard. Il y a de moins en moins de situations où on voit des étudiants faire leurs études à l'extérieur de leur province de résidence. Je ne pense pas que ce soit très bon pour le pays en général.
Mme Diane St-Jacques: Il n'y a pas suffisamment d'aide. Il n'y a pas suffisamment de programmes ou d'ouverture.
M. Thomas Townsend: L'aide financière est très importante.
[Traduction]
Le président: Me permettriez-vous une toute petite question?
• 1255
Nous lisons ici dans nos notes qu'il y a une immigration
estudiantine nette en Nouvelle-Écosse et au Québec. Ce phénomène
serait-il dû au fait que la Nouvelle-Écosse encourage les étudiants
à venir chez elle grâce à son système universitaire particulier et
que le Québec n'encourage pas ses étudiants à aller étudier
ailleurs?
M. Thomas Townsend: Notre système d'enseignement postsecondaire est une petite industrie en Nouvelle-Écosse...
Le président: Je le sais fort bien.
M. Thomas Townsend: ...Et la Nouvelle-Écosse a d'ailleurs des frais de scolarité qui sont parmi les plus élevés au Canada. En revanche, la province est peut-être prête à accepter des étudiants dont les notes sont moins élevées. Par conséquent, un étudiant qui ne parvient pas à se faire admettre chez Paul pourra être accepté dans certains établissements de la Nouvelle-Écosse.
Dans le cas du Québec, on trouve dans cette province des établissements de très haut calibre. Il y a par exemple McGill parmi les universités de langue anglaise, mais aussi Laval et l'Université de Montréal. Par contre, on constate qu'il y a beaucoup d'anglophones qui vont étudier au Québec. Les chiffres sont beaucoup plus élevés, mais c'est parce que, étant donné le coût de la vie à Montréal, McGill est l'un des établissements universitaires canadiens où il est le plus avantageux de faire ses études.
Le président: Bien.
Diane, c'est à votre tour.
[Français]
Mme Diane St-Jacques: Ma question touche un autre domaine. Elle s'adresse à M. Townsend.
Vous avez parlé d'apprentissage continu ou permanent. Est-ce que j'ai bien compris? Si oui, qu'est-ce que vous entendez pas cela exactement?
M. Thomas Townsend: Normalement, on avait une conception selon laquelle les étudiants, après avoir fini leur secondaire, commençaient tout de suite leurs études postsecondaires. On voit de plus en plus que ce sera la situation, mais quand on arrivera à un certain stade dans une carrière, on aura besoin de faire encore des études. Notre système n'est pas très bien développé pour reconnaître ce genre de personnes qui ont des actifs, comme une maison, des voitures, qui ont des dépenses autres que celles reliées aux études, et qui ont des obligations comme des enfants. Notre système de prêts et bourses au Canada ne reconnaît pas très bien ce genre d'étudiants. Donc, on doit penser beaucoup plus à ça.
[Traduction]
Le président: Paul Davenport.
[Français]
M. Paul Davenport: Sur la question de la mobilité, madame, permettez-moi de dire un tout petit mot sur la mobilité internationale dont a parlé M. Townsend tout à l'heure.
C'est vraiment dommage qu'il y ait si peu d'étudiants universitaires qui peuvent travailler ou étudier en dehors de notre pays, surtout en dehors de l'Amérique du Nord, soit en Europe et en Asie. Vous avez demandé s'il y avait des politiques suggérées. Oui. L'AUCC, l'Association des universités et collèges du Canada, a suggéré qu'il y ait un fonds, assez petit pour commencer, soit de 20 millions de dollars par année. Ce serait financé par le gouvernement fédéral, et il y aurait 2 000 $ pour chaque étudiant qui étudie pour une période de six mois en dehors de l'Amérique du Nord. Là, vous allez encourager les gens à aller en Europe, en Asie, etc. Ce sera une très bonne chose, non seulement pour nos systèmes universitaires, mais aussi pour nos étudiants. Si je peux vous parler dans l'autre langue officielle du Canada, c'est parce que, quand j'étais étudiant, j'ai eu la possibilité d'étudier six mois en France. Et ça a tout à fait changé ma vie dans beaucoup de domaines. Alors, cette question de mobilité internationale, il ne faut pas la perdre de vue.
[Traduction]
Le président: Pat Martin.
M. Pat Martin: Merci, monsieur le président.
Merci également à vous tous pour cette matinée fort intéressante jusqu'à présent.
Il me semble qu'à un moment donné, pendant les 100 dernières années, les gens ont commencé à se rendre compte qu'il fallait 12 années de scolarité pour réussir dans le monde et pour arriver à réussir raisonnablement dans le milieu du travail, ce qui a fait que nous avons adopté des lois sur l'instruction publique et que dans ces lois, nous avons décrété que ces études seraient gratuites. Mais maintenant, tout ce que je lis et tout ce que me disent les experts que je rencontre ne donne à penser qu'il faut au moins 16, voir 17 ans d'études pour espérer réussir de manière raisonnable sur le marché. Quel est donc l'obstacle et pourquoi n'y a-t-il pas de véritable levée de bouclier national en faveur de la gratuité des études, au moins jusqu'à la fin du premier cycle universitaire, un peu comme c'est le cas pour l'instruction publique? Y aurait-il de bons arguments contre la gratuité des études universitaires étant donné que nous avons un excédent budgétaire et que nous pourrions fort bien nous le permettre.
J'aurais également une question sur la mobilité, de sorte que si vous pouviez répondre rapidement à ma première question, je pourrais également vous entendre me dire s'il y a de bonnes raisons pour ne pas avoir aussi la gratuité des études supérieures.
Le président: Paul Davenport.
M. Paul Davenport: Il y a deux types d'arguments. Le premier est une question d'équité, ce ne serait tout simplement pas juste.
M. Pat Martin: Il n'est pas juste non plus...
M. Paul Davenport: Ce ne serait pas juste. Environ un tiers seulement des Canadiens ont un diplôme universitaire, et cela même dans les provinces où le taux de participation est le plus élevé et les diplômés universitaires ont un revenu moyen beaucoup plus élevé que ceux qui n'ont pas de diplôme d'études supérieures.
Je me souviens que, pendant ma première année à l'Université Western Ontario, j'avais rencontré Bob Rae—c'était d'ailleurs le mois même de mon arrivée dans cette université—et M. Rae, qui était alors le premier ministre de la province, m'avait accordé une bonne heure d'entretien dans son cabinet. Son intellect était impressionnant. Je lui avais dit: «Vous savez, monsieur le premier ministre, le problème que pose votre plafonnement des frais de scolarité, c'est que vous percevez des impôts auprès du chauffeur de taxi qui m'a conduit jusqu'ici afin de subventionner de façon abusive à mon avis mes enfants qui vont à l'université». Je pense que sur un plan intellectuel, il avait accepté mon argument. Le système n'est donc pas juste. Les gens qui profitent de ce système très coûteux qui va leur donner de gros dividendes plus tard devraient payer leur juste part. J'ai dit qu'à mon avis, le tiers environ...
M. Pat Martin: Mais peut-être que ce chauffeur de taxi aurait-il été à l'université si les études d'aide supérieure avaient été gratuites.
M. Paul Davenport: Cela, c'est le second élément. Les pays dans lesquels les études supérieures sont gratuites investissent moins dans les universités. Ils n'ont pas les moyens de créer tous les établissements que nous avons ici au Canada. À ce moment-là, l'obstacle, c'est qu'il faut des notes extrêmement élevées pour être admis et pour pouvoir continuer ces études, comme c'est le cas en France. Par contre, dans les pays où les frais de scolarité sont les plus élevés—le Canada et les États-Unis—le taux de participation est également le plus fort.
Voilà donc les deux arguments. Nous avons besoin d'argent pour créer des établissements, et les gens qui profitent des études supérieures devraient être appelés à contribuer financièrement.
Le président: Denise.
Mme Denise Doherty Delorme: Effectivement, ceux-là mêmes qui profitent d'études postsecondaires devraient payer leur part. Les travaux de recherche menés par Bob Allen à l'Université de la Colombie-Britannique ont montré que peu importe le diplôme—nous parlons ici du niveau universitaire—les diplômés paient considérablement plus d'impôt par la suite—à tel point qu'ils finissent ainsi par rembourser ce que leurs études ont coûté à l'État, et même plus encore par la suite. Nous avons donc déjà un système de remboursement des frais d'études postsecondaires, c'est ce qui s'appelle l'impôt sur le revenu, et si nous sursoyons à une partie de ces réductions d'impôt déjà annoncée, le système demeurera équitable.
D'autres pays affichent un faible taux de participation de la population aux études postsecondaires parce qu'ils offrent une plus large gamme d'établissements où on peut aller faire des études supérieures. Ils ont des programmes d'apprentissage. Ils ont de meilleurs programmes de formation en cours d'emploi, alors que le palmarès du Canada à cet égard est parfaitement affligeant. Au Canada à l'heure actuelle, les deux seules véritables avenues possibles après l'école secondaire sont les collèges et les universités. Nous avons donc un taux de participation élevé. Mais si nous instaurons d'autres programmes, les jeunes gens auxquels ces nouveaux programmes conviendraient mieux s'y inscriraient. Nous ne prétendons pas que tout le monde devrait aller au collège ou à l'université. Il y a d'autres études possibles. Mais à l'heure actuelle, il y a des jeunes gens qui ont tout à fait les capacités nécessaires pour aller au collège ou à l'université mais qui ne peuvent pas y aller.
Il y a ceux qui ont tellement de mal à nouer les deux bouts que cela leur nuit et nuit à leurs enfants. Nous parlons encore une fois ici d'une petite minorité de gens, mais nous ne faisons rien pour les aider. C'est cela qui fait qu'il y a de jeunes gens qui, déjà en sixième ou en septième année, ne songent même pas à la possibilité de poursuivre leurs études parce qu'ils savent fort bien à quel point ils devront s'endetter pour le faire. Ils savent que les frais de scolarité n'arrêtent pas d'augmenter en Ontario et en Nouvelle-Écosse. Le Québec a fait du bon travail, la Colombie-Britannique également, en freinant l'augmentation des frais de scolarité, mais rien n'est jamais garanti. Il faudrait éliminer les frais de scolarité pour la première année.
Le président: Ross.
M. Ross Finnie: Nous croyons également que tout le monde devrait boire du lait, mais le lait, nous ne le donnons pas gratuitement. Il y a dans la société bien des choses qui ne sont pas gratuites...
M. Pat Martin: Je ne vous suis pas.
M. Ross Finnie: D'accord, logiquement, il y a tout un tas de choses dont, selon nous, les gens devraient pouvoir profiter, mais nous n'en baissons pas pour autant le prix pour tout le monde de manière à ce qu'un petit groupe puisse y avoir accès—dans ce cas-ci, qu'ils puissent s'acheter du lait—ou puissent poursuivre des études supérieures. Nous n'offrons pas cela gratuitement à tout le monde. Nous préférons plutôt imposer un coût. Actuellement, ce coût n'est que d'un tiers environ, comme Paul l'a dit avant moi. Nous réduisons donc le prix de revient des deux tiers. On fixe un prix, mais ensuite on aide les gens qui en ont besoin.
Si les gouvernements finançaient suffisamment le système postsecondaire pour garantir à la fois la qualité et l'accès, nous pourrions peut-être alors penser à un régime subventionné à 100 p. 100, sans frais de scolarité. Cela pourrait se justifier. Mais dans notre situation actuelle, il n'y a pas suffisamment d'argent qui va à ceux qui en ont véritablement besoin pour pouvoir accéder au système, et il n'y a pas suffisamment d'argent qui va aux universités pour garantir à la fois la qualité et l'accès. À mon avis donc, avant de commencer à envisager la gratuité des études supérieures, nous devrions plutôt songer à investir dans le système pour en améliorer l'accès à ceux qui en ont véritablement besoin, ce qui comprendrait des mesures d'allégement de l'endettement. C'est un thème qui revient communément aujourd'hui me semble-t-il. Ce serait de l'argent dépensé à bon escient et qui contribuerait beaucoup plus à ouvrir le système.
Le président: Votre question sur la mobilité devra être très brève, vous en avez bien une, n'est-ce pas?
M. Pat Martin: En effet.
Le président: Très rapidement.
M. Pat Martin: D'accord, le plus rapidement possible.
Y a-t-il quelque chose qui se dessine et qui se fasse pour intégrer les collèges et les universités de sorte qu'un étudiant puisse faire sa première et sa deuxième années dans un collège communautaire dans sa ville natale et obtenir ensuite une équivalence à l'université lorsqu'il est un peu plus âgé? Pensez-vous à ce genre de chose? Est-ce une bonne idée?
Le président: Paul.
M. Paul Davenport: Je vous dirais, monsieur Martin, qu'il existe actuellement deux modèles au Canada. Le premier est celui de l'Alberta dont les collèges engagent des diplômés de doctorat. Vous pouvez aller fréquenter un établissement de Red Deer ou de Grande Prairie et votre professeur sera un diplômé de doctorat qui vous préparera fort bien à poursuivre des études à l'université. Dans les arts libéraux et les sciences, dans toutes les disciplines, il est très facile de passer du collège à l'université en Alberta.
Ma province, l'Ontario, a adopté une formule différente. Nous avons créé 17 universités; nous en avons donc beaucoup. Pour pouvoir passer d'un collège à une université, il faut en règle générale qu'il y ait entente entre les deux. Dans ma propre université, il y a le collège Fanshawe, un excellent établissement qui se trouve à London. Il y a une entente qui permet aux étudiants de commencer leurs études en sciences infirmières à Fanshawe et de les terminer à Western Ontario. Il y a également des ententes dans les disciplines de l'électronique et de la physique qui permettent l'obtention de diplômes mixtes. Il y a des ententes également dans les arts visuels. Le collège Fanshawe offre des programmes extraordinaires en créativité appliquée. Nous offrons l'histoire de l'art, ce qui permet donc aux étudiants d'obtenir un diplôme mixte.
Voilà donc les deux modèles, et tous deux peuvent donner des résultats.
Le président: Thomas, rapidement.
M. Thomas Townsend: Il y a d'excellents exemples d'études mixtes collégiales et universitaires, mais en général, la situation n'est pas brillante. Elle est bonne en Alberta, comme l'a mentionné Paul, et elle est bonne également en Colombie-Britannique.
M. Pat Martin: Effectivement, j'ai entendu parler du cas de la Colombie-Britannique.
M. Thomas Townsend: Quant aux autres provinces, il n'y a pas grand chose de positif à dire. Le Québec a un excellent système, celui des CÉGEPS qui ont leur prolongement à l'université, mais le reste du pays n'est pas reluisant.
Le président: J'aurais à mon tour quelques questions à poser.
Je voudrais signaler à Denise que nous espérons avoir également des tables rondes comme celle-ci dans le domaine de l'apprentissage, étant donné que nous avons travaillé récemment sur le domaine de l'AE. Nous sortons d'ailleurs d'une réunion à ce sujet.
Les statistiques me turlupinent un peu. J'ai été heureux d'apprendre que les choses s'amélioraient. Scott, j'imagine qu'avec le recensement, vous savez... Non? Il secoue la tête.
Mais même si les choses s'améliorent, il nous faudra longtemps avant de pouvoir vraiment utiliser ce genre d'information. Le domaine qui nous interpelle est très important, comme par exemple, la question de savoir qui sont ceux et celles qui ne fréquentent pas les collèges et les universités.
Étant donné la façon dont la Confédération est faite et étant donné aussi que toutes les provinces sont tellement différentes, serait-il possible de trouver des échantillons ou quelque chose qui soit utilisable, des données indirectes par exemple, pour avoir de l'information assez rapidement, mettons d'ici un an?
M. Scott Murray: Un an? Nous sommes tout près.
Laissez-moi vous donner un peu plus de contexte. Les obstacles tiennent en fait aux préférences, et les préférences transcendent les générations. Environ 15 p. 100 de la variation des taux de participation sont attribuables aux antécédents familiaux en matière d'instruction, au niveau de scolarité des parents. Il y a d'autres obstacles, notamment financiers et géographiques. Ensuite, il y a les obstacles dont Thomas nous a parlé, les capacités par exemple, le niveau d'instruction primaire nécessaire, c'est-à-dire savoir lire et écrire, et toutes les autres capacités cognitives nécessaires pour faire des études supérieures. Dans un an environ, nous aurons pu extraire tous ces éléments de toute une série de sources longitudinales offrant des échantillonnages suffisamment significatifs et des mesures suffisamment fiables.
Le président: En attendant, les frais de scolarité sont faibles en Colombie-Britannique. On trouve également dans cette province des facilités de transfert entre le collège et l'université, si vous me permettez de présenter les choses de cette façon. Nous avons donc déjà un échantillon. Pouvons-nous commencer par là et dire que, pour ce qui est de la mobilité, c'est cela que nous constatons dans cette province, ou en parlant des frais de scolarité, c'est cela qu'on constate là-bas? Est-ce qu'on peut faire cela tout de suite?
M. Scott Murray: Non.
Le président: D'accord.
M. Scott Murray: Au moment où nous nous parlons, la mécanique proprement dite est en train d'être mise en place. Nous nous sommes entendus avec les établissements pour suivre tous les étudiants pendant les cycles d'études supérieures et ensuite pendant leur carrière professionnelle. Il y a un recensement de tous les diplômés postsecondaires. Nous allons ainsi pouvoir étudier des choses comme l'accès, la persistance, le niveau d'endettement et le taux de non-remboursement. Il s'agit, à l'échelle de l'État, d'une entreprise ambitieuse qui fera intervenir tous les établissements d'enseignement postsecondaire du pays, y compris—du moins nous l'espérons—ceux du secteur privé.
Mais il n'y a pas de réponse simple. L'élément le plus fragile, et c'est celui qui m'inquiète, c'est qu'il faut arriver à conserver les ressources financières nécessaires pour que les progrès réalisés depuis deux ans pour mettre les choses en place ne s'évaporent pas tout d'un coup.
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Un rôle que le gouvernement fédéral pourrait jouer et que les
provinces ne semblent pas désireuses d'accepter est celui-là même,
le développement des données.
M. Ross Finnie: Le problème s'explique très facilement. Le problème technique est de faire le lien entre ceux qui fréquentent ou ne fréquentent pas un établissement postsecondaire et leurs antécédents familiaux. C'est là l'essentiel. Il faut pouvoir sonder un nombre suffisant de personnes pour être en mesure de faire des prévisions raisonnables.
La base de données habituelle est là. On vous demande ce que vous faites maintenant, ou peut-être votre niveau de scolarité, mais on ne vous remonte pas ensuite à vos antécédents socio-économiques à l'adolescence pendant les années de formation. On a besoin d'une base de données spéciale pour déterminer ce genre de chose. Ensuite, si vous voulez en savoir davantage au sujet du rôle du financement à ce niveau-là, de l'argent, etc., il faut prévoir des questions supplémentaires.
Voilà pourquoi les bases de données générales, y compris le recensement—et je secouais effectivement la tête—ne peuvent pas fournir ce genre de ventilation. Tout au plus, la base de données peut vous indiquer qui est inscrit au système, et quelle est leur situation actuelle. Mais cela ne nous permet pas d'évaluer d'autres éléments.
Le président: Paul.
M. Paul Davenport: Je veux simplement souligner l'importance de ce que Scott et Ross viennent de dire.
Un des problèmes de taille auxquels je dois faire face à titre de président d'université est le fait que les frais de scolarité ont augmenté au cours de la dernière décennie et sont passés de 2 000 à 4 000 $ pour l'étudiant moyen. La composition de la population étudiante change en ce sens qu'il y a moins de participation de la part des jeunes issus de familles moins nanties. Nous savons qu'il y a un plus grand nombre d'étudiants inscrits à l'université de façon générale. Nous pouvons voir les chiffres macro-économiques. Cependant, nous n'avons pas accès aux chiffres qui nous indiquent le revenu familial. Nous essayons de le faire par voie d'études indirectes, les codes postaux, de ce genre de choses, mais le fait que les étudiants empruntent en Ontario sans fournir de déclarations d'impôt ou de renseignements sur leur famille.
Nous n'avons tout simplement pas cette information. Donc dans la mesure où Statistique Canada peut cerner ce lien entre la participation aux études universitaires et le revenu familial—pas seulement le revenu de l'étudiant, mais le revenu familial—il y a énormément de personnes au Canada qui s'intéressent à cela.
Le président: Thomas.
M. Thomas Townsend: Je viens de parler avec Scott. Nous avons fait beaucoup de travail pour ce qui est de la conception de systèmes qui exigeraient ce genre de réponses. En fait, la conception est bien avancée. Si le comité veut entendre parler de ce volet ennuyeux de notre travail, c'est-à-dire créer l'information nécessaire pour vous aider à formuler des politiques, nous serions ravis de vous en entretenir.
Le président: Je ne crois pas que nous ayons besoin d'une longue présentation, mais comme je l'ai dit tout à l'heure, si vous avez des documents ou d'autres renseignements qui pourraient nous être utiles à ce sujet... C'est que, nous avons une bonne idée de la chose au sens large, mais s'il y a un texte assez bref que vous pourriez nous donner, nous l'ajoutions volontiers à notre rapport. Il me semble que c'est une question très importante.
J'allais vous demander—mais je ne le ferai pas—sur ce que vous pensez de ces comptes d'acquisition continue du savoir, qui ont été mentionnés dans le discours du Trône mais dont on a pas encore les détails. C'est quelque chose qui est là. J'allais aussi vous interroger au sujet des coûts indirects de la recherche par opposition à un contrôle fédéral sur les transferts d'argent auprès des provinces qui ne sont pas ensuite versés à l'éducation, mais je ne peux pas le faire.
Je tiens à vous remercier d'avoir pris le temps de venir parler avec nous. Comme je l'ai dit tout à l'heure, nous avons deux autres réunions à ce sujet et ensuite, nous allons présenter un rapport. Nous allons certainement vous remercier dans ce rapport. Si je peux me répéter, tout renseignement que vous pourriez nous fournir dans les quelques jours qui suivent nous serait fort utile.
La date de la prochaine réunion vous sera communiquée plus tard. La séance est levée.