JUST Réunion de comité
Les Avis de convocation contiennent des renseignements sur le sujet, la date, l’heure et l’endroit de la réunion, ainsi qu’une liste des témoins qui doivent comparaître devant le comité. Les Témoignages sont le compte rendu transcrit, révisé et corrigé de tout ce qui a été dit pendant la séance. Les Procès-verbaux sont le compte rendu officiel des séances.
Pour faire une recherche avancée, utilisez l’outil Rechercher dans les publications.
Si vous avez des questions ou commentaires concernant l'accessibilité à cette publication, veuillez communiquer avec nous à accessible@parl.gc.ca.
37e LÉGISLATURE, 1re SESSION
Comité permanent de la justice et des droits de la personne
Témoignages du comité
TABLE DES MATIÈRES
Le mercredi 27 février 2002
¹ | 1530 |
Le président (M. Andy Scott (Fredericton, Lib.)) |
M. Donald Piragoff (avocat général, Section de la politique sur le droit pénal, ministère de la Justice) |
¹ | 1535 |
¹ | 1540 |
Le président |
¹ | 1545 |
Mme Shirley Paton (chef, Division des infections nosocomiales, Bureau des maladies infectieuses, ministère de la Santé) |
¹ | 1550 |
Le président |
Dr Chris Archibald (chef, Division de l'épidémiologie et de la surveillance du VIH/SIDA, ministère de la Santé) |
¹ | 1555 |
Le président |
M. Strahl |
º | 1600 |
M. Donald Piragoff |
M. Strahl |
M. Donald Piragoff |
M. Strahl |
º | 1605 |
Mme Shirley Paton |
M. Strahl |
Mme Shirley Paton |
M. Strahl |
Mme Shirley Paton |
M. Strahl |
Le président |
Mme Shirley Paton |
M. Strahl |
Le président |
M. Cadman |
Mme Shirley Paton |
M. Cadman |
º | 1610 |
Mme Shirley Paton |
M. Cadman |
Mme Shirley Paton |
M. Cadman |
Le président |
M. Sorenson |
Le président |
M. Michel Bellehumeur (Berthier--Montcalm, BQ) |
Mme Shirley Paton |
M. Michel Bellehumeur |
Le président |
Dr Chris Archibald |
º | 1620 |
Le président |
Mme Shirley Paton |
M. Bellehumeur |
Le président |
M. Macklin |
Mme Shirley Paton |
M. Macklin |
Mme Shirley Paton |
M. Macklin |
Mme Shirley Paton |
M. Macklin |
Mme Shirley Paton |
M. Macklin |
Dr Chris Archibald |
M. Macklin |
Mme Shirley Paton |
M. Macklin |
M. Donald Piragoff |
M. Macklin |
M. Donald Piragoff |
M. Macklin |
Le président |
M. McKay |
M. Donald Piragoff |
M. McKay |
M. Donald Piragoff |
M. McKay |
Le président |
CANADA
Comité permanent de la justice et des droits de la personne |
|
l |
|
l |
|
Témoignages du comité
Le mercredi 27 février 2002
[Enregistrement électronique]
¹ (1530)
[Traduction]
Le président (M. Andy Scott (Fredericton, Lib.)): La 66e séance du Comité permanent de la justice et des droits de la personne est ouverte.
Nous poursuivons notre examen du projet de loi C-217, Loi permettant le prélèvement d'échantillons de sang au profit des personnes chargées de l'application et de l'exécution de la loi et des bons Samaritains et modifiant le Code criminel.
Aujourd'hui, nous entendrons nos derniers témoins au sujet de ce projet de loi, en l'occurrence Mme Shirley Paton et le Dr Chris Archibald du ministère de la Santé, ainsi que Mme Lisette Lafontaine et M. Donald Piragoff du ministère de la Justice.
Comme vous connaissez tous la façon de procéder — certains d'entre vous sont peut-être des habitués de cette salle — nous allons d'abord entendre un exposé de dix minutes, après quoi les membres du comité pourront poser leurs questions.
Je vais d'abord céder la parole aux représentants du ministère de la Justice.
M. Donald Piragoff (avocat général, Section de la politique sur le droit pénal, ministère de la Justice): Merci, monsieur le président. Je vous remercie d'avoir invité des représentants du ministère de la Justice à comparaître au sujet du projet de loi C-217.
Comme les membres du comité le savent très bien, nous ne pouvons lui donner une opinion juridique sur le projet de loi C-217. Étant moi-même conseiller juridique pour le gouvernement, je ne peux jouer aussi ce rôle auprès du Parlement. Cependant, nous pouvons porter à l'attention du comité certains aspects juridiques que vous pourriez juger bon d'examiner dans le cadre de votre rapport.
[Français]
J'ai l'intention de limiter mes remarques aux questions juridiques que le projet de loi suscite. Je n'ai pas l'intention de commenter les politiques sous-jacentes au projet de loi.
Pourtant, on ne peut être en désaccord sur l'intention du projet de loi, qui me semble être de fournir aux professionnels de la santé et aux professionnels de secours un outil leur permettant de mieux évaluer les risques qu'ils encourent lorsqu'ils viennent en contact avec la substance corporelle d'une autre personne.
Je me limiterai donc à la question de savoir si les moyens pris pour atteindre l'objectif sont valides sur le plan juridique.
[Traduction]
Le projet de loi soulève deux questions juridiques fondamentales. Premièrement, est-il de la compétence du Parlement du Canada d'adopter ce projet de loi? Ensuite, le projet de loi est-il conforme à la Charte canadienne des droits et libertés?
Le Parlement est ainsi habilité si le projet de loi recoupe l'une des sphères de compétences qui lui sont conférées par la Constitution du Canada, ou s'il est assujetti à la disposition concernant la paix, l'ordre et le bon gouvernement. Afin de décider si un projet de loi tombe sous l'une ou l'autre de ces sphères de compétences, les tribunaux examinent le but et la portée de la mesure législative à l'étude. Autrement dit, quel est l'objectif du projet de loi C-217 — est-ce que cette mesure législative crée une prohibition en vertu du droit pénal, ou crée-t-elle un droit civil que doit respecter un individu et une obligation pour un autre?
Toute mesure législative régissant les droits civils entre les individus serait assujettie aux droits civils et à la propriété, domaine qui relève du pouvoir des assemblées législatives provinciales et non du Parlement fédéral.
J'aimerais vous décrire les conditions qui régissent l'application du droit pénal.
Il y a deux ans, la Cour suprême du Canada, dans l'affaire concernant la Loi sur les armes à feu, a élargi la portée de ce qui constitue une prohibition criminelle. En l'espèce, la Cour suprême a déclaré qu'il existe trois conditions préalables pour déterminer qu'une mesure législative relève du droit pénal: premièrement, la mesure législative doit avoir un objectif pénal valable; deuxièmement, elle doit être assortie d'une prohibition qui appuie cet objectif et troisièmement, elle doit également être accompagnée d'une sanction pour faire appliquer la prohibition.
Les tribunaux ont toujours statué que la paix, la sécurité, la santé, la moralité et l'ordre publics sont des objectifs valables en droit pénal. Or, l'objectif du projet de loi C-217 est-il de protéger la santé du public? Dans la décision RJR Macdonald en 1995, la Cour suprême du Canada a jugé que la santé publique constituait un objectif pénal valable qui justifiait l'interdiction de faire de la publicité sur les produits du tabac.
Cependant, même si le projet de loi a un objectif valable en droit pénal, il doit contenir une prohibition qui vient appuyer cet objectif. S'en référant à la Loi sur les armes à feu, la Cour suprême a précisé que pour être acceptable en droit criminel en vertu de la Constitution, l'interdiction ne doit pas se limiter à assurer le respect d'une mesure législative.
Le projet de loi C-217 prévoit une sanction pour quiconque refuse de se soumettre à un mandat, mais cette disposition semble être imposée dans le but de faire respecter une ordonnance pour outrage au tribunal, et non à la suite de la perpétration d'une infraction.
En vertu du projet de loi, il est interdit d'utiliser l'échantillon de sang à une fin autre que celle pour laquelle il a été obtenu, mais cette infraction est accessoire à l'objectif principal, qui est d'obtenir un échantillon de sang. Par conséquent, y a-t-il dans le projet de loi une interdiction autre que de simplement respecter les dispositions législatives du projet de loi?
Une interdiction qui ne vise qu'à faire respecter les dispositions de la loi est une interdiction réglementaire et non une interdiction qui relève du droit pénal. La Loi sur les armes à feu a été reconnue comme valide parce que la Couronne en est venue à la conclusion que malgré les caractéristiques réglementaires de cette loi, son objectif ultime était d'interdire l'utilisation des armes à feu afin de protéger la sécurité du public.
De même, le projet de loi C-217 devrait inclure une interdiction claire liée à une infraction pour que l'on puisse en conclure qu'il s'agit d'une loi qui relève du droit pénal.
¹ (1535)
L'objectif principal du projet de loi C-217 n'impose aucune interdiction liée à une infraction; les infractions que prévoit le projet de loi C-217 sont plutôt des infractions accessoires ou de caractère réglementaire, dont l'objectif est de faciliter le respect de la vie privée lié à des événements subséquents à l'obtention d'un échantillon de sang.
Il n'est pas essentiel que la loi relève du Code criminel ou qu'elle soit une loi distincte pour la classer dans les mesures législatives relevant du droit pénal en vertu de la Constitution. Pour cette raison, il n'y a pas nécessairement de motif constitutionnel qui justifie d'inclure dans le Code criminel les dispositions qui s'appliquent au personnel chargé de l'exécution de la loi.
Il n'est pas nécessaire qu'une loi pénale soit inscrite dans le Code criminel pour être constitutionnelle à ce titre, et une loi qui n'est pas de nature pénale ne le devient pas du seul fait qu'elle est incluse dans le Code criminel.
En décembre dernier, l'Assemblée législative de l'Ontario a adopté une loi dont l'objectif était semblable à celui du projet de loi C-217. De toute évidence, le législateur ontarien est d'avis que la loi qu'il a adoptée n'est pas de nature pénale et que par conséquent, elle relève de la compétence des assemblées législatives provinciales.
La deuxième question que le comité voudra peut-être examiner est de voir si le projet de loi est conforme aux exigences de la Charte canadienne des droits et libertés. Il y a dans la Charte deux dispositions qui s'appliquent expressément aux mesures prévues dans le projet de loi C-217: premièrement, le droit à la sécurité d'une personne garanti par l'article 7 de la Charte et, deuxièmement, le droit à la protection contre les fouilles, les perquisitions ou les saisies abusives garanti par l'article 8 de la Charte.
Le projet de loi prévoit qu'une personne qui n'est pas soupçonnée d'avoir commis une infraction criminelle ou qui n'a pas été reconnue coupable d'une telle infraction, doit fournir un échantillon de sang soumis au contrôle du VIH ou de l'hépatite B ou C.
Dans plusieurs décisions, la Cour suprême du Canada a déclaré que le prélèvement d'un échantillon de sang constitue une mesure très intrusive qui ne peut être justifiée que dans des cas extrêmement urgents. Le projet de loi C-217 serait-il en violation de ces droits garantis? Le prélèvement de sang serait-il considéré comme une fouille déraisonnable? Je crois savoir que le Commissaire à la protection de la vie privée a témoigné la semaine dernière et a fait part des opinions de son bureau concernant les violations possibles de la vie privée que comporte le projet de loi.
Les droits garantis par la Charte ne sont pas des droits absolus et une loi qui y porte atteinte peut être considérée comme valide si l'on estime qu'elle a une portée raisonnable, que l'on peut démontrer qu'elle est justifiable dans une société libre et démocratique. Pour ce faire, il faut se demander si l'objectif de la mesure législative est urgent et réel. L'objectif visé est-il de fournir de l'information permettant de sauver la vie d'une personne, ou permet-il d'avoir un outil pour mieux évaluer un risque pour la santé?
Si l'on en vient à la conclusion que l'objectif est urgent et réel, la question suivante est de savoir si les restrictions imposées aux droits individuels par la loi sont proportionnelles à l'avantage que tire la société de la mesure législative. Existe-t-il un lien rationnel entre l'objectif qui en découle et les moyens prévus dans la loi? Existe-t-il des moyens moins contraignants et qui donneraient les mêmes résultats? La réponse à ces questions dépendra de l'exactitude du test, de l'information qui peut être tirée de ces tests, de même que de la pertinence des résultats en regard du contexte médical et préventif global en vigueur.
Mes collègues de Santé Canada aborderont ces questions factuelles et suppléeront concrètement aux questions que j'ai soulevées. J'ajoute qu'on doit se poser les mêmes questions à l'égard de la Charte canadienne des droits et libertés, peu importe que la loi constitue une mesure législative fédérale ou provinciale. Ce sont des questions juridiques que le comité voudra peut-être examiner.
¹ (1540)
Je conclurai en disant que nous comprenons et appuyons les motifs rationnels qui sous-tendent le projet de loi et nous croyons qu'il s'agit d'une mesure législative louable. Cependant, il soulève vraiment plusieurs questions juridiques qui méritent un examen sérieux. Je crois que l'Association du Barreau canadien, notamment, a émis des doutes sur le fond et la forme du projet de loi. Personnellement, j'ai restreint nos commentaires aux seules questions constitutionnelles fondamentales que pose le projet de loi.
Monsieur le président, si vous avez des questions, Mme Lafontaine et moi nous ferons un plaisir d'y répondre. Merci.
Le président: Merci beaucoup.
Je cède maintenant la parole aux représentants du ministère de la Santé.
¹ (1545)
Mme Shirley Paton (chef, Division des infections nosocomiales, Bureau des maladies infectieuses, ministère de la Santé): Notre exposé comporte deux volets. M. Archibald et moi-même travaillons au Centre de prévention et de contrôle des maladies infectieuses de Santé Canada. Je suis chef de la section qui s'occupe des infections nosocomiales et professionnelles. Nosocominal signifie «infection contractée dans un établissement hospitalier». Je vais vous parler pendant quelques minutes des programmes de prévention des infections pathogènes à diffusion hématogène en milieu de travail. Je céderai ensuite la parole au Dr Archibald qui parlera de l'utilité de faire subir un test à la personne-source et vous dira en quoi les mesures s'imbriquent les unes dans les autres. Le Dr Archibald est chef de la Division de l'épidémiologie VIH-sida et de la surveillance à notre centre.
Le rôle que joue Santé Canada pour prévenir la transmission des infections véhiculées par le sang en milieu de travail comporte deux volets. Premièrement, nous recueillons et évaluons des données scientifiques pertinentes concernant la prévention des pathogènes véhiculés par le sang. Deuxièmement, nous élaborons et transmettons des directives nationales pour prévenir les expositions et les infections aux pathogènes véhiculés par le sang en milieu de travail.
Depuis 1994, j'ai le privilège de travailler à Santé Canada qui a tenu plusieurs conférences consensuelles avec des intervenants en cas d'urgence et d'autres travailleurs en soins de santé, des professeurs d'université et des fonctionnaires provinciaux qui s'occupent de la santé, afin de concevoir des mécanismes permettant aux intervenants d'avoir accès à des programmes qualifiés de prévention aux expositions, et de s'assurer que les intervenants en cas d'urgence sont inclus dans le réseau d'information auquel adhèrent tous les travailleurs de la santé.
Depuis 1995, on a mis en place et mis à jour des programmes de prévention dans les organisations de première ligne de tout le Canada. Certaines de ces organisations sont de caractère provincial, alors que d'autres relèvent des municipalités et des collectivités. Je crois que l'on vous a remis des copies de l'une des directives qui porte sur la question de la prévention des pathogènes véhiculés par le sang.
En raison de la nature de leur travail, les intervenants en cas d'urgence sont exposés à des personnes qui ont des infections virtuellement mortelles. Éviter que ces intervenants soient exposés à de telles infections est de toute évidence essentiel. Même si très peu de contacts constituent une menace, toute exposition au sang d'une personne qui est infectée de l'hépatite B ou C ou du VIH peut provoquer une infection virtuellement mortelle, et la seule façon de prévenir cette infection est d'empêcher que les intervenants en cas d'urgence soient en contact direct avec ces infections dès l'abord. Les tests subis postérieurement, comme ceux que propose le projet de loi C-217, ou les tests effectués à d'autres fins n'empêcheront pas l'infection de se produire.
La réponse à quelques questions fera comprendre le risque auquel sont exposés quotidiennement les intervenants en cas d'urgence. Quel est le risque qu'un membre de la population canadienne ait le VIH, l'hépatite B ou l'hépatite C? Dans la population générale, moins de deux personnes sur 100 sont atteintes d'hépatite B ou C, et moins de deux personnes sur 1 000 ont contracté le VIH. Quoique faible, le risque est là, mais le problème, c'est qu'une partie des patients des intervenants en cas d'urgence, comme les utilisateurs de drogues injectables, présente un taux de VIH entre 3% et 21% et un taux d'hépatite C de 70%, soit 70 personnes sur 100 qui ont l'hépatite C. Les intervenants en cas d'urgence doivent donc considérer toute personne avec laquelle ils entrent en contact comme étant potentiellement infectée.
Il peut y avoir bien des façons d'être exposé : une piqûre d'aiguille, une coupure, une égratignure, une morsure ou un éclaboussement. Heureusement, la plupart des expositions ne se traduisent pas par une infection. Le risque d'infection après l'exposition varie selon le pathogène, avec l'hépatite C, par exemple, qui est beaucoup plus infectieuse que le VIH; cela dépend également du type d'exposition, une plaie punctiforme très profonde constitue un risque beaucoup plus grand qu'une éclaboussure de sang, mais dans ce cas, le risque est proportionnel à la quantité de sang; et cela dépend également de la concentration du virus qui se retrouve dans le sang du patient, c'est-à-dire plus le patient source est infecté, plus le risque est grand.
Les données récentes provenant de 12 hôpitaux qui participent au réseau canadien de surveillance des blessures avec aiguille indiquent qu'en moyenne, 120 travailleurs de la santé sont exposés à du sang et à des liquides corporels tous les mois. Nous n'avons pas de réseau national de surveillance qui s'intéresse aux expositions auxquelles sont soumis les intervenants en cas d'urgence. Il nous en faudrait un.
Même si nous n'avons pas de données nationales, nous savons pertinemment, par exemple, qu'entre 1998 et 2001, la Commission des accidents du travail de la Colombie-Britannique a enregistré un total de 55 expositions de pompiers, de policiers et d'ambulanciers à du sang ou à des liquides corporels. À ce que je sache, la semaine dernière, aucune de ces personnes n'avait contracté d'infection à un pathogène véhiculé par le sang.
On peut prévenir la plupart des expositions. Il existe des stratégies de prévention de base qui sont efficaces, qu'il s'agisse d'un milieu de travail dans une salle d'opération stérile ou du milieu hasardeux sur les lieux d'une catastrophe.
¹ (1550)
Les directives de Santé Canada donnent quatre grands principes pour prévenir les expositions professionnelles aux infections véhiculées par le sang. Le premier est la prévention grâce au contrôle technique. Nous devons consacrer l'énergie et le travail nécessaires pour concevoir et utiliser des mécanismes efficaces et simples qui permettent de réduire les expositions en milieu de travail. Par exemple, nous devons concevoir des gants et des masques qui ne se rompent pas ni ne se déchirent dans des situations d'urgence.
Deuxièmement, il faut assurer la prévention grâce à des contrôles administratifs. Des politiques administratives sont essentielles pour réduire l'exposition des intervenants en cas d'urgence aux infections. Les organisations de mesures d'urgence doivent mettre en oeuvre des mesures de contrôle des infections destinées à prévenir les expositions à de telles infections. Elles doivent également adopter des méthodes et des mesures pour détecter les cas d'exposition.
Ensuite, il faut assurer la prévention grâce à des pratiques de travail éprouvées. Des changements apportés aux pratiques de travail peuvent réduire à la fois l'exposition et l'infection aux pathogènes véhiculés par le sang. Des équipes de gestionnaires et de travailleurs ont consacré beaucoup de temps au cours des six ou sept dernières années à examiner tous les aspects d'un milieu de travail pour tenter de modifier les conditions de travail afin de protéger les travailleurs. Nous croyons que les résultats sont positifs, mais comme nous n'avons toujours pas les moyens d'assurer le suivi, nous ne pouvons vous donner les chiffres exacts.
Enfin, évidemment, il y a l'équipement de protection individuelle. Il faut absolument offrir cet équipement et en encourager fortement l'utilisation. Je sais que des intervenants en cas d'urgence vous ont dit qu'il peut être gênant de travailler avec cet équipement, ou qu'on n'a pas le temps de le mettre. Le commentaire est fréquent. Interrogez les chirurgiens, qui ont dû réapprendre des techniques très spécialisées pour devoir porter des gants et des masques améliorés. Cependant les travailleurs doivent porter cet équipement pour être en sécurité. Sinon, ou si l'équipement n'est pas disponible, ils risquent leur vie inutilement. Ce ne sont pas les tests effectués après qui pallieront le risque d'absence d'équipement de protection.
Mais il arrive parfois que les protocoles de prévention des expositions fassent défaut. On n'a pas l'équipement de protection, les gants se déchirent ou les masques se rompent. En pareils cas, les protocoles de gestion des risques pour la prévention secondaire sont obligatoires. Santé Canada a également mis au point et distribué ces protocoles aux intervenants en cas d'urgence.
Que faire lorsque le programme de prévention fait défaut et qu'un intervenant est exposé de façon importante à du sang? D'abord, dans ces situations, il est crucial que le travailleur ait été vacciné contre l'hépatite B. Le travailleur immunisé contre l'hépatite B ne risque rien s'il est exposé de façon importante à quelqu'un qui est infecté de l'hépatite B. Actuellement, cependant, il n'existe aucun vaccin efficace contre l'hépatite C ou le VIH.
L'autre élément de la prévention secondaire qui entre en jeu après une exposition importante, ce sont les médicaments donnés après l'exposition pour prévenir l'infection. Il n'existe pas de tels médicaments pour l'hépatite C. Il y en a cependant pour l'hépatite B, avec l'immunoglobuline et la première dose du vaccin et, pour le VIH, avec une combinaison de médicaments antiviraux. Cependant, ces médicaments réagissent mieux s'ils sont pris le plus tôt possible après l'exposition, de préférence dans les heures qui suivent. Par conséquent, on doit évidemment prendre la médication post-exposition avant de pouvoir obtenir de l'information sur l'état infectieux de la personne source. Le projet de loi à l'étude ici aujourd'hui ne changera pas la situation.
Maintenant, M. Archibald va continuer la discussion sur toute la question de l'utilité des tests.
Le président: Monsieur Archibald.
Dr Chris Archibald (chef, Division de l'épidémiologie et de la surveillance du VIH/SIDA, ministère de la Santé): Merci.
J'aimerais poursuivre en examinant plus à fond l'importance de savoir si la personne source est infectée ou non lorsqu'il y a eu exposition.
Bien qu'il soit manifestement dans l'intérêt de la personne exposée de savoir si la personne source est infectée par le VIH, l'hépatite B ou l'hépatite C, ce qu'il convient de souligner, c'est que cette information n'est qu'un volet du processus d'évaluation du risque. Comme il a été précisé antérieurement, le processus d'évaluation du risque et les décisions subséquentes concernant la gestion du risque dépendent également d'autres renseignements comme les caractéristiques de l'exposition et la présence de facteurs de risque, chez la personne source, des pathogènes véhiculés par le sang.
Par exemple, voyons comment cette information serait utilisée dans le cas du VIH. En théorie, un test rapide de VIH peut fournir de l'information sur l'état de la personne source presque immédiatement après l'exposition. Cependant, la seule décision urgente à prendre à ce moment-là est de voir si l'on doit commencer à donner à l'intervenant les médicaments post-exposition, ou les médicaments PPE, pour le VIH. Dans la pratique, cette décision devrait être prise avant que le résultat du test rapide ne soit connu, puisque les données indiquent que le meilleur moment pour commencer à administrer ces médicaments, c'est dans les quelques heures qui suivent l'exposition. En effet, les tests rapides peuvent donner de faux résultats positifs, et il faut attendre plusieurs jours pour confirmer les résultats positifs du test rapide après avoir procédé à des tests habituels. Donc, le test rapide de la personne source offre peu d'avantages puisque la décision d'entreprendre le traitement PPE doit être prise immédiatement en se fondant sur d'autres renseignements.
Si la personne exposée commence à prendre ces médicaments, l'obtention de renseignements sur les résultats du test standard de VIH administré à la personne source aurait une double répercussion sur la gestion du risque. Premièrement, si les résultats du test sont négatifs, cette information soulage beaucoup la personne exposée. Il y aurait quand même possibilité de transmission du VIH puisque la personne source pourrait être dans sa période de séroconversion, c'est-à-dire la période entre le moment de l'infection et le moment où les tests d'anticorps du VIH s'avèrent positifs — mais au moins, la probabilité serait bien moindre que si les résultats du test étaient positifs.
Le deuxième effet sur la gestion du risque serait le suivant : si les résultats du test sont négatifs, on pourrait interrompre le traitement PPE. Cette décision serait tributaire d'autres facteurs, comme la présence de facteurs de risque du VIH chez la personne source, puisqu'elle pourrait être en période de séroconversion.
Les effets à court terme du programme PPE sont communs et se retrouvent chez presque 75% des patients; cependant, ils ne sont pas graves en général. Les plus courants sont les nausées, la fatigue, les maux de tête, les vomissements et la diarrhée. Par contre, si les résultats du test sont positifs, la personne exposée pourrait être plus motivée à respecter la période recommandée de 28 jours de médicaments, malgré les effets secondaires.
À noter cependant que même si l'efficacité du traitement PPE pour le VIH n'est pas prouvée, certains résultats démontrent que le traitement est efficace, et l'administration de ce traitement est devenue pratique courante pour les expositions de modérées à élevées au risque du VIH.
Lorsque nous avons examiné le projet de loi C-217, nous avons posé les questions suivantes. Quels sont les avantages du projet de loi en matière de santé, et est-ce que ce projet de loi est préjudiciable à la santé d'une façon ou d'une autre?
Les avantages du projet de loi en matière de santé sont très limités. Le projet de loi C-217 ne réduit pas l'incidence de l'exposition à des pathogènes véhiculés par le sang, pas plus qu'il ne réduit substantiellement le risque d'infection véhiculée par le sang et contractée en milieu de travail. Plus spécifiquement, le projet de loi C-217 n'a aucun effet sur le traitement préventif de l'hépatite B ou C puisque la gestion du risque pour ces deux pathogènes ne dépend pas de l'état infectieux de la personne source.
Pour ce qui est du VIH, le projet de loi C-217 aurait un effet sur la gestion postérieure à une exposition à un risque important, mais seulement pour les quelques cas qui satisfont aux trois critères suivants.
Premièrement, la personne source doit être connue. Dans plus de 20% des expositions importantes, tant à l'hôpital qu'à l'extérieur, la personne source n'est jamais identifiée. Ces chiffres sont probablement plus élevés dans les cas impliquant des intervenants en cas d'urgence où il y a souvent beaucoup de victimes qui saignent.
Deuxièmement, la personne source doit avoir refusé le test volontaire et un prélèvement de sang ne peut être effectué que par le biais d'un test obligatoire. Une telle situation serait très rare puisque l'expérience montre que si la personne source refuse le test au départ, pratiquement toutes les personnes acceptent plus tard d'être testées si on les approche avec respect, si on les informe de leurs droits, de la raison pour laquelle le test est important et de la façon dont la protection de leur vie privée est assurée.
Dans un hôpital de la Colombie-Britannique où il y a plus de 1 700 expositions importantes dans l'hôpital et dans les salles d'urgence, tout le monde a accepté d'être testé, sauf deux personnes. Dans une situation semblable en Ontario, aucune des 2 600 personnes n'a refusé de se soumettre à un test. En outre, l'application du test obligatoire pourrait avoir le contre-effet de réduire la coopération volontaire pour donner des échantillons de sang.
¹ (1555)
Troisième et dernier point — la personne source ne présente aucun facteur de risque du VIH, puisque s'il y avait des facteurs de risque, le traitement PPE pourrait bien être recommandé peu importe le résultat du test de VIH à cause de l'appréhension pendant le délai de séroconversion. En fait, si une personne source refuse de se soumettre volontairement à un test, peut-on assumer qu'elle donnera de l'information exacte au sujet des facteurs de risque du VIH? Faudrait-il alors assumer la présence de facteurs de risque en pareils cas tout simplement pour des raisons de sécurité?
En résumé, le projet de loi C-217 risque d'être préjudiciable aux programmes de santé, parce que les activités de prévention réduisent à la fois l'incidence d'expositions importantes et la transmission. Dans un milieu où les ressources sont restreintes, le projet de loi pourrait avoir des répercussions négatives sur les programmes provinciaux en provoquant un transfert de ressources et l'abandon de la prévention au profit du test obligatoire.
Il ne fait aucun doute que Santé Canada reconnaît l'importance de l'action des travailleurs de première ligne ainsi que l'objectif du projet de loi. Nous aimerions apporter notre aide pour fournir à ces travailleurs de première ligne les outils qui leur permettront peut-être de mieux se protéger contre les infections pathogènes véhiculées par le sang. Cependant, le projet de loi C-217 ne permet pas d'atteindre ces objectifs.
Le président: Merci beaucoup.
Je crois que les représentants de l'Alliance et du Bloc québécois ont cédé leur droit de parole à M. Strahl qui doit partir tôt. Monsieur Strahl.
M. Chuck Strahl (Fraser Valley, PC/RD): Merci, monsieur le président.
Merci à vous tous d'être venus ici aujourd'hui nous donner votre témoignage. J'aurais peut-être préféré ignorer, et même désapprouver certaines opinions, mais je vous remercie quand même. Tout cela est de l'information utile pour nous.
J'aimerais d'abord poser quelques questions aux représentants du ministère de la Justice. L'Association internationale des pompiers a souligné hier que le projet de loi est une de ces mesures dont tout le monde reconnaît les bonnes intentions. Vous l'avez dit vous-mêmes: vous endossez l'esprit de la mesure législative, c'est une chose difficile, et ainsi de suite. Mais la question se pose: est-ce que cela relève vraiment du droit pénal? On l'a soumise aux provinces qui prétendent que ce n'est pas de leur ressort, donc on la soumet au gouvernement fédéral et on joue au chat et à la souris comme ça. À votre connaissance, est-ce que l'on a soumis la question à une instance fédérale-provinciale? Y a-t-il déjà eu des discussions à ce sujet pour essayer de régler le problème de compétences en soi?
º (1600)
M. Donald Piragoff: De toute évidence, l'Assemblée législative de l'Ontario estime que cette question relève de sa compétence parce qu'elle a déjà agi. Je pense qu'elle suppose que cela relève de sa compétence. À ce que je sache, la question n'a pas été discutée dans le milieu de la justice pénale, c'est-à-dire entre le ministère de la Justice et les procureurs généraux des provinces. Je ne sais pas si les ministres de la Santé ou les fonctionnaires de la Santé ont discuté de la compétence.
M. Chuck Strahl: Le projet de loi 105 n'a pas encore été contesté. Qui sait s'il réussira à passer outre aux contestations en vertu de la Charte qui vont probablement être présentées? Mais l'une des faiblesses du projet de loi, que l'on décèle lorsqu'on parle du résumé du droit pénal qui a été clarifié en vertu de la Loi sur les armes à feu, c'est qu'il doit y avoir une interdiction et une sanction. L'une des faiblesses du projet de loi 105 de l'Ontario est que l'on peut demander un prélèvement de sang — vous pouvez même l'exiger — et si quelqu'un refuse, on ne peut rien y faire. Il n'y a aucune sanction de prévue. Vous pouvez sauter, faire tous les trains, mais essentiellement, on ne peut forcer personne à donner cet échantillon.
Je pense que l'on va constater qu'il s'agit là d'une faiblesse. Même si l'on considère l'enjeu comme une question de santé, si, dans les rares cas sérieux, quelqu'un peut dire «je ne veux pas», on en est alors réduit à ce qu'on a déjà vu, c'est-à-dire des gens qui offrent des hamburgers pour obtenir un échantillon de sang d'une personne désespérée.
La loi provinciale ne renferme aucune sanction. Pourtant, certains se sont dits inquiets, d'après la proposition que j'ai, qu'il n'y ait pas d'interdiction criminelle dans le projet de loi et que ce n'est donc pas réellement une loi pénale. On se retrouve encore avec le même argument, à savoir que tout le monde reconnaît le problème mais personne... Comme je l'ai dit depuis que j'ai présenté ce projet de loi en 1999, tout le monde est sympathique mais personne ne m'aide à faire adopter le projet de loi. Tout le monde se défile, et à ce moment-là, c'est très difficile de faire avancer les choses. Je ne sais même pas si on a fait des progrès.
Qu'en pensez-vous?
M. Donald Piragoff: Un bref commentaire: en ce qui concerne la compétence des provinces, une province peut imposer des sanctions dans le cadre d'un régime réglementaire pour faire respecter la loi. Donc, si l'Ontario, de par sa compétence à légiférer dans le domaine de la santé, voulait imposer des sanctions pour faire respecter un régime réglementaire, elle pourrait le faire. Si la loi de l'Ontario ne comporte pas de sanctions, je ne sais pas, pour des raisons politiques, pourquoi elle s'abstient.
M. Chuck Strahl: Peut-être y aura-t-il des sanctions. Ce n'est pas dans le projet de loi, mais ce sera peut-être dans le règlement. Cela n'est pas clair ni précisé.
En ce qui concerne les soins de santé, ai-je bien entendu quand vous avez dit qu'il y avait 120 expositions par mois? Est-ce que les personnes sont exposées aux infections à l'hôpital?
º (1605)
Mme Shirley Paton: Oui, c'est à l'hôpital, mais ça inclut aussi les salles d'urgence.
M. Chuck Strahl: Très bien.
Nous avons entendu le témoignage uniquement de deux services de police, d'Ottawa et Edmonton. C'était de 40 ou 50 expositions par année pour leurs forces policières. Les auxiliaires médicaux soutiennent avoir une autre douzaine ou des centaines de cas dans les campagnes. Tout le monde semble avoir sa part. Lorsqu'on additionne tout cela, cela fait quand même un très grand nombre d'expositions. Dans bien des cas, bien sûr, peu importe que vous mettiez deux ou trois paires de gants. Tout le monde semble respecter les protocoles universels de prévention, mais il y a des fois où ça ne fonctionne pas. N'est-ce pas?
Vous pouvez être en face d'une personne violente, de quelqu'un qui a une crise, quelqu'un qui a un accident de voiture inhabituel, qui sait. Ce qu'il faut savoir, c'est que plus la personne source est malade, plus elle est contagieuse. Autrement dit, si quelqu'un a un certain nombre d'anticorps, peu importe comment on l'évalue, à ce moment-là le test permettrait de juger si l'on doit poursuivre le traitement ou non. Même si l'on commençait le jour où l'intervenant est sérieusement atteint, c'est l'échantillon que l'on peut obtenir de la personne source qui déterminerait s'il faut continuer le traitement ou non.
Mme Shirley Paton: Si en fait la personne source est suffisamment malade et que cela augmente le risque, cette personne va savoir qu'elle est malade. L'information que l'on a, si on doit la transmettre, elle existe déjà. Je ne pense pas que ce soit le genre de personnes que vise ce projet de loi directement.
Je suis tout à fait d'accord avec vous que le nombre d'expositions, tant à l'intérieur qu'à l'extérieur de l'hôpital, est élevé. Je ne pense pas que nous ayons une bonne idée des chiffres. Nous le saurions probablement si quelqu'un contractait le VIH. Il se fait assez de suivi dans les hôpitaux. En ce qui concerne l'hépatite B et C, où c'est plus litigieux, on ne sait pas ce qui se passe actuellement. Il nous faut un programme de suivi pour les intervenants en cas d'urgence.
M. Chuck Strahl: L'une des choses dont on nous a fait part au sujet du projet de loi, c'est le manque de données statistiques. Ce n'est pas parce qu'on n'a pas essayé, croyez-moi. Je m'occupe de cette question depuis trois ans.
Mme Shirley Paton: Je suis d'accord. J'essaie depuis huit ans d'obtenir des données statistiques.
M. Chuck Strahl: Oui, c'est bizarre. Les défenseurs des libertés civiles diront que s'il y a un problème, vous aurez des preuves ou des statistiques. Pourtant, nous n'avons pas de statistiques. Pourquoi? Est-ce impossible d'obtenir des statistiques?
Comme vous le dites, vous essayez d'en obtenir. Il y a des cas isolés, mais c'est extrêmement difficile d'amener les responsables à donner des statistiques nationales qui pourraient ou ne pourraient pas être importantes. Donnons à tout le monde le bénéfice du doute. C'est difficile de faire admettre votre point de vue quand tout le monde veut des statistiques et que vous ne pouvez pas les obtenir. Et si vous n'avez pas de statistiques, vous n'avez pas de dossier. C'est un autre cercle vicieux.
Le président: Monsieur Strahl, c'est votre dernière question.
Mme Shirley Paton: Nous travaillons certainement dans ce sens. Nous essayons depuis plusieurs années de mettre en place un programme de surveillance des blessures avec des aiguilles dans l'hôpital même. C'est la première année que nous avons des données. Ces données proviennent de 12 hôpitaux. Ce n'est pas beaucoup. Le programme n'en est qu'à ses débuts.
Pour commencer à obtenir les statistiques dont tout le monde a besoin, pour régler les problèmes, je constate que nous en sommes simplement rendus là où certains programmes pourraient être mis en place avec le bon soutien et ce genre de choses. En ce qui me concerne, et avec les efforts que je déploie pour trouver des chiffres, comme vous, je dirais qu'il y a des lacunes.
M. Chuck Strahl: Merci.
Le président: Merci beaucoup.
Monsieur Cadman, vous avez sept minutes.
M. Chuck Cadman (Surrey-Nord, Alliance canadienne): Je n'ai pas besoin de sept minutes, ma question sera très rapide.
J'ai déjà soulevé la question. On entend toute la preuve sur les protocoles de prévention en milieu de travail. L'une des sections du projet de loi vise les bons Samaritains, la personne qui arrive sur les lieux d'un accident, habituellement bien avant le personnel paramédical ou les interventants d'urgence. Que faire avec ces gens-là?
Tout le monde n'a pas une paire de gants en latex ou des appareils de bouche à bouche indirects dans le coffre à gants. Ces gens-là veulent faire quelque chose. Mais à mesure que le problème se complique, ils hésiteront à intervenir. Cela se vérifie dans les cas où, dans certaines provinces, vous pouvez être tenu criminellement responsable si vous n'apportez pas votre aide. Et si vous apportez effectivement votre aide, rien ne vous protège vous-même.
Mme Shirley Paton: Je crois que le projet de loi que nous étudions comporte deux choses. Premièrement, il n'est d'aucun secours pour le bon Samaritain. Si un bon Samaritain arrive sur les lieux d'un accident, et que la personne blessée est affectée de l'hépatite C, le risque d'exposition, dans certaines régions du pays, est élevé. Le projet de loi C-217 n'est d'aucune utilité.
Dans les études ou les petits échantillons que nous avons examinés concernant les bons Samaritains, nous avons constaté que le risque que quelqu'un refuse d'être testé, si les gens sont pressentis avec respect, est pratiquement nul. Dans le cas de quelqu'un qui a été aidé par un bon Samaritain, le peu d'expérience que nous avons (elle n'est pas étendue et les données ne sont pas aussi solides que nous aimerions), cette expérience indique que l'information que nous cherchons à obtenir, et que ce projet de loi nous permettra d'obtenir, peut être obtenue de façon volontaire et non par l'entremise d'une loi.
M. Chuck Cadman: Une chose, cependant. Je viens de la banlieue de Vancouver. Je suis sûr que l'un des secteurs dont vous parlez, c'est l'est du centre-ville. Si j'étais en voiture dans la rue East Hatings en me dirigeant vers l'est du centre-ville, je ne suis pas certain de ce que je ferais si je me trouvais face à un des résidents du secteur — une de ces «personnes sources» dont il est question — qui viendrait juste d'être happé par un autobus. Est-ce que je vais tout simplement filer mon chemin?
º (1610)
Mme Shirley Paton: Mais je ne suis pas certaine que le projet de loi C-217 pourrait vous être d'un quelconque secours. Et je suis d'accord avec vous...
M. Chuck Cadman: Non, mais quoi faire? Est-ce que l'on informe le public?
Mme Shirley Paton: L'incidence de l'infection est certainement un problème, et quant à savoir comment y réagir et qu'est-ce qui nous arrive à nous bons Samaritains, nous ne le savons pas.
M. Chuck Cadman: Très bien.
Le président: Monsieur Sorenson, il reste quatre ou cinq minutes, si vous voulez bien les utiliser.
M. Kevin Sorenson (Crowfoot, Alliance canadienne): Non.
Le président: Monsieur Bellehumeur.
[Français]
M. Michel Bellehumeur (Berthier--Montcalm, BQ): Au fur et à mesure que j'entendais le témoin, je me rendais compte qu'il fallait non pas en conclure, mais... Le problème ne se pose pas nécessairement en rapport avec le nombre de bons Samaritains parmi les employés ou qui que ce soit d'autre, car le taux de personnes qui acceptent de donner du sang pour des tests semble quasiment atteindre 100 p. 100, à peu de choses près, selon les données que vous avez citées aujourd'hui concernant les travailleurs. Le problème se pose surtout par rapport aux policiers, et aux pompiers jusqu'à un certain point, mais surtout par rapport aux policiers.
Admettons que vous soyez consultés--je m'adresse plutôt au secteur médical--parce qu'un policier, dans le cadre de ses fonctions, a fouillé un individu et, bien qu'il ait pris toutes les précautions nécessaires, s'est piqué avec une seringue qui se trouvait dans la poche d'un individu qui se drogue de façon notoire, etc. Même si cet individu, propriétaire de la seringue, autorise qu'on prenne un échantillon de son sang à des fins d'analyse, conseilleriez-vous au policier de prendre les médicaments?
[Traduction]
Mme Shirley Paton: Absolument, et ce...
[Français]
M. Michel Bellehumeur: C'est ce que j'ai déduit de votre intervention.
Je comprends que, dans un premier temps, il est important de prendre rapidement certains médicaments dans le cas de certains types de contamination. Il y a l'aspect rapidité. Même si les résultats peuvent s'avérer négatifs, on devrait quand même les prendre à cause de la possibilité d'avoir été infecté. Ai-je bien compris?
[Traduction]
Le président: Docteur Archibald.
Dr Chris Archibald: Essentiellement, oui. Dans ce cas, je pense qu'il faut admettre qu'il n'y a pas de réponse définitive dans un sens ou dans l'autre. Comme c'est souvent le cas en médecine, tout est question de probabilités, et il faut examiner la question au cas par cas. Si vous regardez tous les protocoles, que ce soit nos propres directives ou celles des provinces ou des divers hôpitaux de tout le pays, essentiellement, ce qu'on dit, c'est qu'il faut procéder au cas par cas, consulter un spécialiste et parler au patient.
Cependant, le facteur qu'il faut prendre en considération — et il s'agirait ici d'un des rares cas ou d'un des cas où la prévention n'a pas fonctionné, où il y a eu exposition et les facteurs de risque sont élevés parce que l'intervenant s'est piqué avec une aiguille et que la personne source semble être une personne à risque élevé. En fait, il faut considérer les trois éléments d'information suivants pour vous aider à évaluer quoi faire. Premièrement, le genre d'exposition. Il faut savoir si c'était vraiment une piqûre et, si oui, il y a eu manifestement exposition. Ensuite, il faut connaître le facteur de risque de la personne source, la probabilité qu'elle puisse être infectée, si elle consomme des drogues, ce qui constitue une information.
Comme je l'ai dit, il est utile d'obtenir le résultat du test de la personne, mais ce n'est pas définitif. C'est seulement un élément d'information qu'il faut mettre avec les autres. Et si le test s'avère négatif, mais que la personne présente des facteurs de risque élevés et qu'elle pourrait être aussi dans sa période de séroconversion, la situation est alors difficile. Je ne pense pas que l'on ait de réponse définitive d'une façon ou d'une autre. Cela dépend beaucoup du patient, de la personne elle-même qui est exposée, du médecin et de son expérience. Il y a la possibilité, et l'intervenant doit en être informé, qu'un test négatif en pareil cas ne garantisse pas que la personne n'a pas le VIH et que, par conséquent, on pourrait songer à donner les médicaments de toute façon.
º (1620)
Le président: Madame Paton.
Mme Shirley Paton: J'aimerais ajouter un autre élément d'information à ce que M. Archibald a dit.
Dans ce cas, l'autre question qu'il faut se poser est de savoir si cette personne, l'utilisateur de drogues intraveineuses, a partagé son aiguille avec quelqu'un. Le sang dans cette aiguille n'est peut-être pas le seul sang de la personne qui est en face de vous et que vous devez tester, mais ça peut être aussi le sang de six autres personnes qui se sont partagé l'aiguille. C'est là certainement une préoccupation. Vous avez donc décrit un cas à risque très élevé.
[Français]
M. Michel Bellehumeur: Merci.
[Traduction]
Le président: Merci, monsieur Bellehumeur.
Monsieur Macklin, vous avez sept minutes.
M. Paul Harold Macklin (Northumberland, Lib.): Lorsqu'on lit ce projet de loi d'un certain point de vue, on se pose des questions sur le genre de maladies définies dans le document. Pourriez-vous revenir en arrière et préciser pour moi les divers types d'hépatite B, C...? Ai-je raison de penser que le projet de loi ne touche absolument pas à l'hépatite B. Est-ce que j'ai bien compris? Et l'hépatite C...? Ou si j'ai tout mêlé?
Mme Shirley Paton: Très bien. Pour l'hépatite B, nous avons un programme de vaccination qui fonctionne très très bien. Si nos intervenants en cas d'urgence sont immunisés, alors nous n'avons pas besoin...
M. Paul Harold Macklin: Mais si je ne suis pas vacciné, qu'est-ce qui arrive?
Mme Shirley Paton: Si vous n'est pas vacciné, dès que vous vous présentez, nous commençons la vaccination. Et il y a un autre genre de médicament qui vous protège.
M. Paul Harold Macklin :Très bien.
Mme Shirley Paton :Donc nous n'avons pas besoin de connaître la source. Si vous avez une blessure importante, nous allons vous traiter. Et le traitement est efficace.
M. Paul Harold Macklin: Ce programme de vaccination comporte-t-il des effets secondaires négatifs?
Mme Shirley Paton: Les seuls effets dont pourraient se préoccuper les personnes avec un programme de vaccination normal.
M. Paul Harold Macklin: Mais que dire de l'hépatite C?
Mme Shirley Paton: Pour l'hépatite C, il n'y a rien que l'on puisse faire. On ne peut pas l'empêcher. On ne peut pas l'empêcher avant — il n'y a pas de vaccin — ni après avec les médicaments.
M. Paul Harold Macklin: Et je suppose que la réponse est la même pour le VIH?
Dr Chris Archibald: Pour le VIH, il n'y pas de vaccin. On ne peut donc pas être immunisé contre...
M. Paul Harold Macklin :Très bien.
Dr Chris Archibald : — Mais il y a certains médicaments que l'on peut administrer après coup, et il y a tout lieu de croire qu'ils peuvent diminuer la probabilité d'être infecté si en fait vous avez été exposé de façon importante au VIH. C'est là qu'intervient la question du traitement PPE et la décision de savoir si on doit commencer à traiter immédiatement la personne exposée.
M. Paul Harold Macklin: Si l'on examine le projet de loi de façon constructive — et j'ai l'impression qu'on devra peut-être apporter certains amendements si l'on adopte le projet de loi — voyez-vous la nécessité d'en élargir la portée pour englober d'autres maladies particulières que la personne source pourrait avoir?
Mme Shirley Paton: Les pathogènes véhiculés par le sang... Je crois que le projet de loi cible bien les principaux pathogènes véhiculés par le sang. Il y en a peut-être d'autres qui viendront à notre connaissance, mais actuellement, ce sont là certainement les infections qui nous préoccupent le plus.
Il y a plusieurs autres infections auxquelles les intervenants en cas d'urgence sont exposés, que ce soit des organismes résistant aux antibiotiques, ou la tuberculose. Là encore, il faut beaucoup de temps et d'énergie pour obtenir de l'information à ce sujet, et nombre d'infections ne sont pas repérées avant la période d'essai. Si nous avions quelque raison que ce soit de croire que la personne source est porteuse d'une infection quelconque, les intervenants seraient traités.
Donc, je pense que le projet de loi, de cette façon, règle la question parce que le projet de loi C-217, d'après ce que j'en comprends, ne décrète pas si oui ou non on entreprendra le traitement chez une personne, mais si on peut interrompre la médication un peu plus tôt parce que le médicament préventif a des effets secondaires désagréables.
M. Paul Harold Macklin: Très bien.
Y a-t-il un moyen de consulter en pareil cas les dossiers de l'hôpital — et je vais aborder le côté légal — parce que lorsque la personne va à l'hôpital, on suppose qu'on va lui faire des prélèvements de sang? Si cette personne, la personne blessée, disons, est inconsciente, qu'elle ne peut pas prendre de décision, y a-t-il un moyen quelconque, légal, permettant de consulter les dossiers de l'hôpital pour connaître ses maladies et qui pourraient être divulguées pour cette fin actuellement? Autrement dit, est-ce que les dossiers pourraient être consultés pour obtenir l'information nécessaire, sans recourir à un test de sang? En fait, si le test de sang se fait dans le cours normal de l'admission à la salle d'urgence, est-ce que cela pourrait nous aider aujourd'hui?
M. Donald Piragoff: Il faudrait s'en remettre à la loi provinciale — plus particulièrement aux lois qui régissent la protection des dossiers médicaux, et ça relève des provinces. Chaque province devrait donc aborder la question. Dans la mesure où les dossiers peuvent être consultés pour une fin, c'est-à-dire traiter une maladie ou une blessure, la décision d'analyser les prélèvements pour d'autres fins relève des lois provinciales.
M. Paul Harold Macklin: Et vous ne connaissez rien qui existe actuellement.
M. Donald Piragoff: Non, mais ça ne veut pas dire qu'il n'existe rien.
M. Paul Harold Macklin: Merci.
Le président: Merci beaucoup.
Dernière question, je crois, monsieur McKay.
M. John McKay (Scarborough-Est, Lib.): Nous semblons être dans ce paradoxe étrange où le projet de loi 105 est un projet de loi sans recours alors que le projet de loi C-217 est un recours sans projet de loi, position insatisfaisante s'il en est.
Étant donné que la compétence est sous observation et qu'il y a des enjeux qui relèvent de la responsabilité des provinces, avez-vous songé à quel remède une assemblée législative provinciale pourrait recourir si quelqu'un refuse de fournir iun échantillon?
M. Donald Piragoff: Si la province fait bien appliquer sa loi dans un domaine constitutionnel comme la santé, elle peut imposer des sanctions pour faire observer une loi. C'est la raison pour laquelle la province, par exemple, impose des sanctions en vertu du Code de la route. La province a le droit de créer un régime législatif qui réglemente le trafic automobile sur les autoroutes et elle peut imposer des sanctions pour faire respecter cette loi. Même chose dans le domaine de la santé. Elle pourrait imposer des sanctions pour faire respecter le régime réglementaire. Pourquoi l'Ontario ne le fait-elle pas avec le projet de loi 105, je n'en sais rien. C'est peut-être une question de politique.
M. John McKay: C'est une lacune énorme du projet de loi, cependant. Si la compétence appartient à la province et relève bien du régime de la santé, c'est une lacune assez importante dans n'importe quel type de projet de loi.
M. Donald Piragoff: Je ne peux pas faire de commentaires sur la loi de l'Ontario, mais de nombreuses mesures législatives ne sont pas assorties de sanctions parce que la conformité n'est pas un enjeu majeur. Bon nombre de mesures législatives créent des droits au lieu d'imposer des sanctions. Là encore, c'est une question qui relève de l'Ontario et de ses avocats ainsi que de ses décideurs. Je ne peux pas faire de commentaires sur les motifs qui sous-tendent le projet de loi 105.
M. John McKay: Merci.
Le président: Merci beaucoup, monsieur McKay.
Je tiens à remercier nos témoins cet après-midi des ministères de la Justice et de la Santé. Je suis certain que nous nous rencontrerons tous à nouveau prochainement.
Nous allons maintenant siéger à huis clos.
[Note de la rédaction: La séance se poursuit à huis clos.]