HEAL Réunion de comité
Les Avis de convocation contiennent des renseignements sur le sujet, la date, l’heure et l’endroit de la réunion, ainsi qu’une liste des témoins qui doivent comparaître devant le comité. Les Témoignages sont le compte rendu transcrit, révisé et corrigé de tout ce qui a été dit pendant la séance. Les Procès-verbaux sont le compte rendu officiel des séances.
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37e LÉGISLATURE, 2e SESSION
Comité permanent de la santé
TÉMOIGNAGES
TABLE DES MATIÈRES
Le mercredi 29 octobre 2003
¿ | 0910 |
La présidente (Mme Bonnie Brown (Oakville, Lib.)) |
M. Paul Drohan (directeur général, Genzyme Canada Inc.) |
¿ | 0915 |
La présidente |
M. Thomas Holloway (président, Pharmex Direct Inc.) |
¿ | 0920 |
La présidente |
M. Rob Hamilton (président, Biogen Canada) |
¿ | 0925 |
¿ | 0930 |
¿ | 0935 |
La présidente |
M. Rob Hamilton |
La présidente |
M. Réal Ménard (Hochelaga—Maisonneuve, BQ) |
M. Paul Drohan |
M. Rob Hamilton |
¿ | 0940 |
M. Réal Ménard |
M. Paul Drohan |
M. Réal Ménard |
M. Paul Drohan |
M. Réal Ménard |
La présidente |
M. Rob Hamilton |
¿ | 0945 |
La présidente |
Mme Carolyn Bennett (St. Paul's, Lib.) |
M. Rob Hamilton |
Mme Carolyn Bennett |
M. Thomas Holloway |
Mme Carolyn Bennett |
¿ | 0950 |
M. Rob Hamilton |
M. Thomas Holloway |
La présidente |
Mme Carolyn Bennett |
La présidente |
Mme Carolyn Bennett |
La présidente |
Mme Carolyn Bennett |
La présidente |
M. Gilbert Barrette (Témiscamingue, Lib.) |
¿ | 0955 |
M. Thomas Holloway |
M. Gilbert Barrette |
M. Rob Hamilton |
M. Paul Drohan |
La présidente |
M. Brian Masse (Windsor-Ouest, NPD) |
M. Rob Hamilton |
À | 1000 |
M. Paul Drohan |
M. Brian Masse |
M. Rob Hamilton |
M. Brian Masse |
La présidente |
M. Jeannot Castonguay (Madawaska—Restigouche, Lib.) |
À | 1005 |
M. Rob Hamilton |
M. Jeannot Castonguay |
M. Rob Hamilton |
M. Jeannot Castonguay |
La présidente |
Mme Carolyn Bennett |
M. Paul Drohan |
À | 1010 |
La présidente |
M. Rob Hamilton |
La présidente |
M. Paul Drohan |
La présidente |
M. Rob Hamilton |
La présidente |
M. Rob Hamilton |
M. Paul Drohan |
La présidente |
À | 1035 |
La présidente |
Mme Lillian Morgenthau (présidente et fondatrice, L'association canadienne des plus de 50 ans) |
À | 1040 |
La présidente |
Mme Lillian Morgenthau |
La présidente |
Mme Lillian Morgenthau |
La présidente |
M. Len Harrison (employé exécutif à la retraite , Syndicat des Travailleurs et travailleuses canadiens de l'automobile) |
À | 1045 |
À | 1050 |
La présidente |
Mme Anne Rochon Ford (coordinatrice, Action pour la protection de la santé des femmes) |
À | 1055 |
Á | 1100 |
La présidente |
Mme Anne Rochon Ford |
La présidente |
Mme Anne Rochon Ford |
La présidente |
Mme Gerda Kaegi (présidente, Corporation des retraités canadiens intéressés) |
Á | 1105 |
La présidente |
M. Réal Ménard |
Á | 1110 |
M. Len Harrison |
M. Réal Ménard |
Á | 1115 |
Mme Anne Rochon Ford |
M. Réal Ménard |
M. Len Harrison |
Mr. Réal Ménard |
Mme Lillian Morgenthau |
Á | 1120 |
La présidente |
Mme Lillian Morgenthau |
La présidente |
M. Jeannot Castonguay |
Á | 1125 |
Mme Anne Rochon Ford |
M. Jeannot Castonguay |
Mme Anne Rochon Ford |
M. Jeannot Castonguay |
M. Len Harrison |
La présidente |
Mme Gerda Kaegi |
Á | 1130 |
La présidente |
Mme Lillian Morgenthau |
La présidente |
M. Dean Lindsay (coordonnateur national , Retraités, Syndicat des Travailleurs et travailleuses canadiens de l'automobile) |
La présidente |
M. Jeannot Castonguay |
Mme Lillian Morgenthau |
M. Jeannot Castonguay |
Mme Lillian Morgenthau |
Á | 1135 |
La présidente |
Mme Carolyn Bennett |
Mme Gerda Kaegi |
Mme Carolyn Bennett |
Á | 1140 |
Mme Gerda Kaegi |
Mme Carolyn Bennett |
Mme Gerda Kaegi |
Mme Carolyn Bennett |
M. Dean Lindsay |
Mme Carolyn Bennett |
M. Dean Lindsay |
Mme Carolyn Bennett |
Mme Lillian Morgenthau |
Mme Carolyn Bennett |
Mme Lillian Morgenthau |
Mme Carolyn Bennett |
Mme Gerda Kaegi |
Mme Carolyn Bennett |
Mme Anne Rochon Ford |
La présidente |
Á | 1145 |
M. Brian Masse |
Mme Gerda Kaegi |
M. Brian Masse |
Mme Anne Rochon Ford |
M. Brian Masse |
Mme Anne Rochon Ford |
Á | 1150 |
M. Brian Masse |
La présidente |
M. Brian Masse |
M. Len Harrison |
M. Len Harrison |
M. Dean Lindsay |
La présidente |
M. Gilbert Barrette |
Á | 1155 |
M. Len Harrison |
M. Len Harrison |
M. Gilbert Barrette |
Mme Gerda Kaegi |
Mme Anne Rochon Ford |
 | 1200 |
La présidente |
M. Len Harrison |
Mme Anne Rochon Ford |
La présidente |
Mme Anne Rochon Ford |
La présidente |
Mme Anne Rochon Ford |
La présidente |
Mme Anne Rochon Ford |
La présidente |
Mme Anne Rochon Ford |
La présidente |
Mme Anne Rochon Ford |
La présidente |
Mme Anne Rochon Ford |
 | 1205 |
La présidente |
Mme Anne Rochon Ford |
La présidente |
Mme Anne Rochon Ford |
La présidente |
M. Brian Masse |
La présidente |
CANADA
Comité permanent de la santé |
|
l |
|
l |
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TÉMOIGNAGES
Le mercredi 29 octobre 2003
[Enregistrement électronique]
¿ (0910)
[Traduction]
La présidente (Mme Bonnie Brown (Oakville, Lib.)): Bonjour, mesdames et messieurs. Je vous souhaite la bienvenue à nos audiences de Toronto concernant notre étude des médicaments sur ordonnance.
Nous commençons un peu en retard parce que nous avons dû attendre le secrétaire parlementaire, qui devait prendre un vol ce matin. Étant donné qu’il y a un peu de brouillard et qu’il devait atterrir à l’aéroport Island, je pense qu’il est préférable que nous n’attendions pas davantage, parce que son vol a dû être retardé.
Nous allons passer immédiatement à l’audition des témoins. Nos premiers témoins sont Paul Drohan, le directeur général de Genzyme Canada Inc., et Peter Brenders, son responsable des affaires de la santé.
Messieurs, si l’un de vous veut commencer, vous avez la parole.
M. Paul Drohan (directeur général, Genzyme Canada Inc.): Merci.
Nous vous remercions de nous avoir invités aujourd’hui à venir participer à votre étude des médicaments sur ordonnance.
Je m’appelle Paul Drohan. Je suis le directeur général de Genzyme Canada. J’ai à ma gauche M. Brenders, son responsable des affaires de la santé.
Genzyme Canada est la filiale de Genzyme Corporation. Notre siège est à Mississauga, en Ontario. Nous sommes une société de biotechnologie ayant pour mission de mettre au point des produits novateurs répondant à des besoins médicaux non satisfaits. Nous cherchons à repousser la frontière des connaissances. Il s’agit ici de maladies graves contre lesquelles il n’existe aucun traitement véritablement sûr et efficace. Je suis heureux de vous annoncer que nous avons obtenu des réussites dans notre entreprise, mais que nous avons dû pour cela, et que nous devons encore, surmonter bien des difficultés.
J’aimerais évoquer un certain nombre de domaines d’étude qui intéressent notre société de biotechnologie. Genzyme cherche à mettre en place des traitements contre des maladies rares, mais nous sommes gênés dans notre action par les mécanismes d’homologation des nouveaux médicaments et de contrôle des prix, ce qui nous empêche de faire tout le nécessaire pour permettre aux consommateurs et aux professionnels de la santé d’avoir accès aux soins disponibles.
Je vais vous faire un rapide historique pour que vous puissiez bien comprendre nos difficultés.
Nos débuts remontent à l’action d’un certain nombre de chercheurs du MIT qui, il y a 20 ans, ont entrepris de mettre au point des traitements d’affections rares du métabolisme en faisant appel à des thérapies complexes portant sur les enzymes. Nous parlons ici de maladies rares parce qu’elles touchent environ une personne sur 20 000 ou su 200 000.
Il a fallu travailler pendant près de deux décennies et investir plus de 1 milliard de dollars pour concevoir et mettre sur le marché des traitements efficaces de la maladie de Gaucher, de la maladie de Fabry et de la MPS I, c’est-à-dire de la mucopolysaccharidose I, ou de la maladie Hurler/Hurler-Scheie.
Comme je vous l’ai indiqué, ces maladies sont rares et les traitements complexes. Nous avons mis en place la première génération d’enzymes il y a 10 ans. Il s’agissait de perfuser chaque semaine une enzyme modifiée tirée du placenta humain. Pour pouvoir produire suffisamment d’enzymes pour le traitement, nous avions besoin de 22 000 placentas par an et par malade.
Le problème rencontré dans l’immédiat est double. En premier lieu, étant donné qu’il s’agit d’un produit tiré des tissus, il y a des risques inhérents. L’enquête Krever s’en est aperçue et a demandé que l’on mette sur le marché des enzymes d’ADN recombinant. L’autre problème, comme vous pouvez l’imaginer, c’est que l’on se heurte à des difficultés liées au contrôle de la qualité lorsqu’on s’efforce de purifier un produit tiré des placentas humains, surtout compte tenu des quantités que je viens d’indiquer. Nous avions besoin de trouver une autre solution.
Après des années de R et D, nous avons envisagé de produire à grande échelle de l’ADN humain ordinaire, un produit biotechnologique tiré des techniques génétiques. Cela signifie que nous ne fabriquons pas des pilules ou des produits chimiques mais que dans la pratique nous cultivons des protéines dans des organismes vivants.
Le procédé de culture des enzymes est lent, risqué et complexe. La difficulté était d’arriver à produire des quantités commerciales. Il fallait pour cela bâtir une usine de 300 millions de dollars équipées de bioréacteurs permettant de fabriquer le produit. Chaque lot est produit dans un environnement contrôlé avec soin pour s’assurer que d’exactitude des résultats. Il faut généralement six mois entre la mise en culture de chaque lot et la fin de l’opération pour produire les enzymes. Cela fait, nous traitons les malades.
J’ai le plaisir de pouvoir vous dire que dans le cas de la maladie de Gaucher, 65 malades canadiens ont vu leur vie s’améliorer nettement en raison de l’existence de notre traitement.
Je tiens à rappeler que le travail de R et D ainsi que les investissements dans des installations de production effectués par Genzyme ont permis de mener à bien notre mission, qui est de traiter les maladies rares, et de sauver 65 personnes souffrant de la maladie génétique de Gaucher, dont environ 3 000 personnes sont atteintes dans le monde entier. Nous sommes fiers de pouvoir vous dire que l’excellence de notre action a été reconnue récemment par le ministère espagnol de la Santé, qui a décerné à la filiale de Genzyme en Espagne l’ordre du mérite espagnol en matière de santé.
Les malades qui comptent sur notre travail de R et D attendent ces thérapies, mais ils se heurtent à des obstacles. Vous avez entendu parler le personnel de Santé Canada. Santé Canada n’atteint pas certains de ses objectifs de rendement, et je veux vous en donner un certain nombre d’exemples précis.
¿ (0915)
Lorsqu’on a présenté le dossier de notre produit Cerezyme pour procéder à des essais selon une procédure accélérée, il a fallu attendre de 1993 à 1997 pour que ce produit soit finalement autorisé. En ce qui concerne Fabrazyme, notre produit permettant de faire bénéficier les personnes souffrant de la maladie de Fabry d’une thérapie en hôpital à base d’enzymes, il y a maintenant 800 jours que le dossier a été déposé.
Nous estimons que Santé Canada fait un excellent travail, mais certaines de ses procédures font double emploi. Nous disons qu’elles font « double emploi » parce que le dossier que nous avons soumis est pratiquement identique, sur le plan des essais et des données cliniques, à celui que nous avons présenté à la FDA et à l’AEEM. Les modalités peuvent toutefois varier.
Nous aimerions qu’il y ait une homologation uniforme d’un point de vue réglementaire, de façon à ce que l’on tienne compte des exigences de sécurité et d’efficacité des autres pays. Nous pensons que l’on pourrait ainsi gagner du temps en supprimant un certain nombre de démarches que s’impose Santé Canada.
Nous aimerions aussi que le Canada renforce sa législation sur les maladies rares. Les États-Unis, l’Europe, l’Australie et Singapour ont tous des lois sur les médicaments traitant des maladies rares qui prévoient des déductions fiscales, des subventions et d’autres mesures incitatives en matière commerciale. Tous ces produits relèvent de la biotechnologie et le Canada peut jouer un rôle de pointe dans le monde à condition qu’un appui nous soit accordé.
Pour conclure, je veux citer le rapport du comité du processus d’examen des médicaments du Conseil consultatif des sciences de Santé Canada, présidé par la Dre Roberta Bondar. Ce rapport mentionne qu’un appui accordé aux médicaments s’appliquant aux maladies rares : « confirmerait dans l’esprit du public l’engagement de Santé Canada envers la protection de la santé de tous les Canadiens, y compris ceux dont les besoins sont si rares qu’ils échappent à l’attention normale du marché ».
Genzyme a pour mission d’élaborer des solutions visant à répondre aux besoins médicaux non satisfaits. Nous cherchons à contribuer au traitement des maladies rares, et nous demandons à votre comité d’appuyer cette cause.
Je vous remercie.
La présidente: Merci, monsieur Drohan.
Le témoin suivant représente Pharmex Direct Incorporated. Il s’agit de Thomas Holloway, qui en est le président. Monsieur Holloway, vous avez la parole.
M. Thomas Holloway (président, Pharmex Direct Inc.): Bonjour.
Je suis heureux de me présenter devant votre comité ce matin pour représenter Pharmex Direct, une société canadienne indépendante et privée qui s’efforce de trouver des solutions novatrices, d’aider les employeurs à limiter l’augmentation des coûts de leurs régimes de santé et, en particulier, de leurs régimes d’assurance-médicaments. À ce titre, nous sommes donc particulièrement bien placés pour constater les effets de l’augmentation de coût des médicaments sur les employeurs en général et sur les petites et moyennes entreprises en particulier.
On a beaucoup épilogué au sujet de l’augmentation des demandes de remboursement des médicaments, et je n’ai pas l’intention d’en discuter les raisons ici ce matin. On a beaucoup épilogué au sujet des répercussions sur notre régime de soins santé. La majorité des commentaires qui ont été faits concernant les effets sur notre régime de soins de santé nous viennent de la fonction publique. On a toutefois très peu parlé, ou on s’est fait rarement l’expression, des préoccupations des dispensateurs de soins de santé dans le secteur privé.
Je vais m’en tenir ce matin aux petites et moyennes entreprises. Au Canada, environ 20 millions de personnes bénéficient d’un régime d’assurance-santé privé fourni par leur employeur. Les employeurs versent plus de 12 milliards de dollars par an de primes pour fournir ces prestations à leurs employés. Comme on peut s’y attendre, plus on a affaire à une grosse entreprise, plus elle est en mesure d’absorber l’augmentation des coûts. Même si cette augmentation peut être élevée en pourcentage comme en chiffres absolus, une grosse entreprise a une assise financière suffisante pour payer la facture. Ce sont les petites et moyennes entreprises qui se retrouvent dans une impasse.
Selon Statistique Canada, environ cinq millions de Canadiens travaillent dans des entreprises ayant moins de 100 employés. Il y en a en outre 1,6 million qui travaillent dans des entreprises ayant entre 100 et 500 employés. Au total, nous avons donc quelque 6,5 millions de Canadiens qui travaillent dans des entreprises ayant moins de 500 employés. Les secteurs d’activité de ces entreprises sont très variables. Ainsi, sur ces 6,5 millions de personnes qui travaillent pour des petites entreprises, il y en a près de un million dans le commerce au détail. Le commerce au détail n’est pas le meilleur endroit pour gagner de gros salaires; ses employés touchent bien souvent le salaire minimum ou un peu plus que le salaire minimum.
Nombre de ces entreprises qui emploient moins de 500 employés ont vu leurs primes d’assurance doubler ces trois dernières années, et il ne semble pas que l’on doive en rester là. Même si les employés d’une entreprise sont très raisonnables dans leurs demandes de remboursement, étant donné que tout est regroupé au titre de cette assurance, les comptes de cette entreprise étant groupés avec ceux de nombreuses autres, il lui faudra quand même faire face à des augmentations de 15 à 20 p. 100 par an. En outre, la difficulté a encore été exacerbée par le fait que depuis de nombreuses années les gouvernements provinciaux se déchargent de leurs coûts sur le secteur privé.
L’employeur ne peut pas faire grand-chose pour remédier à ces augmentations de coûts, et les quelques recours qu’il a à sa disposition ne sont pas particulièrement agréables. Voici ce que peut faire le responsable d’une petite entreprise. Il peut se retirer purement et simplement du régime en disant : « Nous n’offrons pas de régime d’assurance-médicaments. » Voilà qui sera évidemment désastreux, notamment pour les travailleurs faiblement rémunérés ou les familles monoparentales qui n’ont pas d’autre régime. L’entreprise éprouvera évidemment des difficultés, étant donné que les régimes d’assurance-médicaments sont un des moyens pour les entreprises d’attirer et de garder leurs employés.
L’entreprise peut aussi se dire : « Bon, nous allons faire contre mauvaise fortune bon coeur et payer les primes. » Il se peut toutefois qu’en payant ces primes accrues, elle remette en cause la santé financière de l’entreprise à l’avenir.
Elle peut aussi restructurer de différentes manières son régime de santé. Elle peut augmenter la part que doivent payer les employés. Dans nombre de régimes, l’employé ne paye rien, ou paye 10 p. 100—sa part pourrait être portée à 20 ou à 30 p. 100. C’est bon pour l’entreprise, mais on n'a fait que répercuter le coût sur les employés. Là encore, il peut s’agir d’employés faiblement rémunérés.
On peut aussi restructurer le régime de santé en disant : « Bon, nous n’allons couvrir que telle ou telle maladie; il y a certaines maladies qui ne seront pas remboursées ». Cela va à l’encontre des raisons pour lesquelles un employeur institue au départ un régime d’assurance.
Une autre solution consiste à prévoir un plafond annuel et à dire : « Bon, nous n’honorerons que les demandes de remboursement de médicaments jusqu’à des montants de 3 000 $, 5 000 $ ou 10 000 $. » À ce moment-là, le coût de l’assurance-médicaments des employés passe de manière générale du secteur privé au secteur public par l’intermédiaire de régimes tels que le régime Trillium intervenant dans les cas exceptionnels ici même en Ontario. Là encore, toutefois, ces régimes prévoient souvent des franchises que doivent payer les employés et ils ne couvrent pas toujours l’ensemble des médicaments.
¿ (0920)
Il est absolument indéniable que l’augmentation des soins de santé, notamment du coût des médicaments, menace nombre de petites entreprises. La question est de savoir ce qui peut et ce qui doit être fait pour protéger les petites et moyennes entreprises.
On peut penser à deux choses, la première étant le projet de régime universel de la commission Romanow pour couvrir les maladies à caractère exceptionnel. Il s’agirait ici d’élargir la couverture à l’intérieur de ce régime pour que les employés des entreprises ayant actuellement un régime privé puissent en bénéficier. La deuxième serait de réviser éventuellement le traitement fiscal accordé aux primes des régimes de santé, afin de mieux refléter la valeur et le coût d’un bon régime de santé, à caractère universel, dispensé aux entreprises de cette taille.
À titre de conclusion, les petites et moyennes entreprise sont un des principaux moteurs de la croissance au sein de notre économie, et l’augmentation du coût des médicaments les met en danger.
Je vous remercie.
La présidente: Merci, monsieur Holloway.
Les témoins suivants représentent une entreprise du nom de Biogen Canada. Nous accueillons ici son président, M. Rob Hamilton, et son directeur, remboursement et affaires gouvernementales, Robert Kulik.
Monsieur Hamilton.
M. Rob Hamilton (président, Biogen Canada): Merci, madame la présidente.
Je vous remercie de nous donner l’occasion de comparaître devant vous aujourd’hui et de participer à votre étude sur les médicaments sur ordonnance.
Biogen est la plus ancienne société de biotechnologie indépendante de la planète et un chef de file dans la recherche, le développement et la fabrication de produits biologiques. Un pionnier dans la recherche de pointe en immunologie, neurobiologie et oncologie, la société Biogen, grâce à son réseau mondial de commercialisation, fournit des thérapies innovatrices pour améliorer la vie des malades du monde entier. Notre siège social au Canada est situé à Mississauga, en Ontario.
Biogen appuie fermement la R et D effectuée au Canada en raison du très grand calibre des chercheurs et universitaires canadiens. En fait, Biogen a participé à l’un des plus importants programmes de recherche clinique en dermatologie de l’histoire canadienne, et nous sommes très fiers de cette réalisation.
Biogen Canada félicite le Comité permanent de la santé pour les efforts qu’il déploie afin d’étudier les problèmes cruciaux qui ont un grand impact sur la santé de tous les Canadiens. Il est primordial pour Biogen Canada et pour les malades et le personnel soignant qu’il dessert de veiller à ce que les malades aient rapidement accès à des produits pharmaceutiques importants et vitaux.
Je traiterai aujourd’hui de plusieurs défis cruciaux que doit relever l’industrie biopharmaceutique si elle souhaite investir et faire des affaires au Canada. Je présenterai ainsi certains de ses problèmes cruciaux et l’impact qu’ils ont sur la santé des Canadiens. Je tenterai également de formuler certaines recommandations pour améliorer l’accès à ces importants nouveaux produits biopharmaceutiques au Canada.
L’industrie biopharmaceutique repose avant tout sur les recherches intensives et de pointe qu’elle doit réaliser pour mettre en marché de nouveaux produits innovateurs. Nous avons entendu dire aujourd’hui que ce processus peut s’étendre sur une période de 15 ans et coûter jusqu’à 1 milliard de dollars pour pouvoir donner toute sa mesure. Il est essentiel que l’industrie biopharmaceutique canadienne et des sociétés comme Biogen commercialisent rapidement ces nouveaux médicaments issus de la biotechnologie, et ce, pour deux raisons principales.
Premièrement, et c’est le plus important, il est vital que nos produits soient rapidement mis en marché parce que la santé des Canadiens en dépend. Les produits biopharmaceutiques nouveaux et innovateurs contribuent à améliorer la vie des Canadiens. Ainsi, les recherches que Biogen a réalisées sur la sclérose en plaques ont profité à des milliers de Canadiens qui souffrent de cette terrible maladie de dégénérescence. Notre produit, Avonex, permet d’éviter les rechutes et il a même été démontré qu’il pouvait retarder l’apparition de la sclérose en plaques. Il s’agit là d’un résultat tangible montrant comment la santé des malades est améliorée grâce aux investissements que nous avons consentis en R et D et à notre capacité de mettre en marché ce produit.
Deuxièmement, comme je l’ai mentionné déjà, il faut investir beaucoup en R et D pour parvenir à commercialiser un nouveau produit biopharmaceutique. Pour une compagnie comme Biogen Canada, il est essentiel d’avoir accès au marché pour pouvoir investir davantage dans les essais cliniques et le développement des produits au Canada. La succursale canadienne de Biogen doit en effet concurrencer les autres succursales de cette société dans d’autres régions du monde pour l’obtention des investissements. Il est donc primordial de pouvoir obtenir plus rapidement que dans d’autres pays l’approbation réglementaire et le remboursement de nos produits si l’on souhaite attirer les investissements requis pour les chercheurs et les établissements cliniques canadiens. Malheureusement, la performance du Canada dans ce domaine est un peu moins reluisante que celle d’autres pays développés. En effet, il faut beaucoup plus de temps ici au Canada pour approuver un produit que dans d’autres pays comme les États-Unis, l’Union européenne ou l’Australie.
Laissez-moi vous donner un exemple. En 2002, il a fallu en moyenne 31 mois à la direction des produits biologiques et génétiques, la DPBG, pour faire passer un nouveau produit de l’étape de la présentation à celle de l’approbation. Aux États-Unis, la Food and Drug Administration a eu besoin en 2002 d’une période moyenne totale de 15,2 mois pour faire passer un nouveau produit de l’étape de la présentation à celle de l’approbation. Les délais d’approbation sont deux fois plus longs au Canada qu’aux États-Unis principalement en raison de l’augmentation importante au cours des dernières années de la période de temps pendant laquelle un produit doit attendre avant d’être examiné.
Nous avons récemment reçu de Santé Canada un nouvel avis de conformité nous permettant de commercialiser une nouvelle indication pour un produit que nous commercialisons depuis plusieurs années. Nous avions déposé une présentation auprès de la DPBG en août 2000 afin de faire inclure cette nouvelle indication dans la monographie de notre produit. L’examen de notre dossier n’a été entrepris qu’en mars 2002 et nous n’avons reçu notre avis de conformité qu’en août 2003. Trois ans pour approuver une nouvelle indication—pas un nouveau médicament, seulement une nouvelle indication.
¿ (0925)
Le Canada a été le dernier pays du G-7 à obtenir cette approbation. À cause de ce retard, nos patients ne peuvent profiter de la R et D dont nos produits ont fait l’objet et doivent attendre avant de suivre les nouveaux traitements novateurs dont bénéficient les patients des autres pays depuis quelque temps.
Ce problème s’explique principalement par le fait que Santé Canada ne dispose pas des ressources voulues, tant sur le plan financier qu’humain, pour procéder à ces études rapidement. On a adopté une politique de recouvrement des coûts auprès des fabricants au cours des dernières années ici au Canada, mais on n’a pas établi de lien entre cette source de financement et la performance de Santé Canada.
Le processus actuel manque aussi énormément de transparence. Il est extrêmement difficile de déterminer à quelle étape du processus en est rendue une présentation, quand un évaluateur entreprendra l’étude d’une présentation ou encore pourquoi il existe des différences entre les délais requis pour l’étude des aspects chimiques, des aspects liés à la fabrication et des aspects liés aux essais cliniques.
La question de la transparence à Santé Canada a d’ailleurs constitué l’une des principales préoccupations exprimées lors d’une séance de travail tenue en juin et rassemblant de nombreux intervenants afin d’examiner le processus réglementaire appliqué au Canada. Durant cette rencontre, même Santé Canada a déclaré qu’il était crucial que le ministère règle les questions de transparence et d’ouverture afin d’éliminer les frustrations et d’améliorer la confiance.
Tous ces facteurs contribuent à allonger les délais de commercialisation qui empêchent les Canadiens de bénéficier aussi rapidement qu’ailleurs des nouvelles découvertes importantes dans le domaine de la santé. Ces délais ont également une incidence sur les investissements que nous pouvons réaliser au Canada.
Plusieurs options s’offrent à Santé Canada et au gouvernement fédéral pour améliorer sa performance en matière de réglementation et la transparence de ce processus, et ainsi garantir aux Canadiens un accès rapide aux nouveaux produits biopharmaceutiques. Santé Canada a besoin de ressources et d’experts supplémentaires pour raccourcir les délais d’approbation. D’autres pays ont déjà procédé à de telles réformes de leur réglementation.
Nous croyons que Santé Canada devrait présenter des propositions législatives visant à établir des liens entre les coûts qui sont recouvrés auprès des entreprises et les délais d’approbation des produits, comme cela se fait aux États-Unis et en Australie. De plus, Santé Canada devrait rendre compte régulièrement et officiellement au Parlement des délais d’approbation des produits.
En 1992, le Congrès des États-Unis a adopté la Prescription Drug User Fee Act, la PDUFA. Cette loi accorde à la FDA des ressources supplémentaires pour procéder à l’examen des présentations de médicaments. Elle établit aussi des objectifs de performance pour le processus d’examen et d’approbation d’un médicament de la FDA. Des dates cibles sont fixées pour terminer les études et répondre aux requêtes des fabricants dans les délais prescrits.
Tout cela est rendu possible grâce aux fonds supplémentaires recueillis au moyen de frais imposés aux fabricants lors de la présentation d’un médicament. Contrairement au système actuellement en vigueur au Canada, où les frais sont versés au moment de la présentation sans qu’il n’y ait de lien précis entre le montant de ces frais et la performance du ministère, la loi américaine établit des délais et des objectifs de performance.
On encourage également des rencontres régulières entre les fabricants et la FDA. Non seulement ce mécanisme permet-il d’accroître la transparence de l’ensemble du processus, mai il est aussi utile pour garantir le caractère complet des présentations. Les questions et préoccupations sont transmises avant le dépôt de la demande, ce qui réduit encore plus le délai requis.
Nous sommes également d’avis que dans les cas où les objectifs de performance ne sont pas atteints, un pourcentage des droits versés par le fabricant devrait également lui être remboursé. C’est ce qui se produit actuellement en Australie ou la Therapeutic Goods Administration rembourse 25 p. 100 des droits exigés pour la présentation si les objectifs de performance ne sont pas atteints.
Les organismes de réglementation canadiens devraient également s’inspirer des études réglementaires menées par leurs équivalents à l’étranger. Ce partage des études réglementaires aiderait à réduire les délais d’approbation. L’harmonisation de ces études à l’échelle internationale a d’ailleurs permis à des entreprises de soumettre simultanément un produit aux organismes de réglementation de pays différents. En élargissant les ententes de reconnaissance mutuelle de manière à inclure plus de régions et de produits, Santé Canada pourra utiliser les études réglementaires menées à l’étranger afin de remplacer les études canadiennes et non seulement les compléter.
Si Santé Canada décide d’accepter les études, données, examens et divers éléments des présentations effectuées dans d'autres pays, il pourra économiser à la fois temps et argent. Le partage de l’information entre les organismes de réglementation réduira la duplication des efforts et permettra de tirer avantage des études déjà menées sur le même médicament dans d’autres pays et donc de réduire le retard déjà accumulé à Santé Canada dans l’étude des présentations.
¿ (0930)
Biogen Canada recommande également que Santé Canada crée des groupes d’experts médicaux indépendants afin de le conseiller sur des présentations de médicaments visant spécifiquement une maladie ou une condition. Ces groupes d’experts formuleraient des recommandations concernant l’approbation des produits soumis.
Dans le dernier Discours du Trône, le gouvernement fédéral a annoncé qu’il accélérerait le processus de réglementation des médicaments afin de s’assurer que les Canadiens ont plus rapidement accès aux médicaments sûrs dont ils ont besoin et afin de créer un meilleur climat pour la recherche au pays. Au moment où on étudie les options pour mettre en oeuvre cette réglementation dite « INTELLIGENTE », nous encourageons le gouvernement fédéral à examiner nos recommandations et à leur donner suite.
J’aimerais maintenant aborder rapidement deux autres questions qui ont un impact sur la santé des Canadiens.
L’éducation sur la maladie est cruciale pour garantir une amélioration réelle de la santé. Toutefois, il y a en ce moment beaucoup de confusion quant au rôle que pourraient jouer les fabricants de médicaments dans ce domaine. Actuellement, diverses stratégies sont suivies pour s’assurer que les malades ont rapidement accès à de l’information pertinente sur la maladie et sur les nouvelles thérapies. Même après avoir consulté Internet et avoir parlé à son médecin, il se peut qu’un malade ait toujours de la difficulté à obtenir de l’information sur les nouvelles thérapies et technologies qui peuvent améliorer sa qualité de vie et empêcher la maladie de se manifester ou de progresser.
Maintenant, je comprends bon nombre des inquiétudes suscitées par l’expérience américaine dans ce domaine. Toutefois, je crois vraiment que les entreprises pharmaceutiques et de biotechnologie peuvent jouer un rôle utile dans l’éducation des malades concernant leur maladie. Ces entreprises ont en effet accès à de grandes quantités de données et de renseignements qui pourraient se révéler utiles aux malades afin de les aider, eux et leurs médecins, à prendre des décisions éclairées sur les divers traitements possibles.
Divers outils peuvent être mis à la disposition des malades afin de mieux les informer sur les nouvelles technologies et les nouveaux traitements. Ceci pourrait contribuer à améliorer les conversations entre les malades et le personnel soignant, à mieux préparer les malades et les médecins aux décisions qu’ils ont à prendre et à finalement améliorer davantage la santé des malades. La diffusion par les entreprises de messages éducatifs sans mention de marque pourrait avoir des retombées positives importantes sur le plan de la santé si les malades obtiennent les soins voulus plus hâtivement de façon à éviter la maladie ou d’éventuelles complications.
Au Canada, de nombreuses entreprises font déjà beaucoup de promotion et de publicité dans les médias. Ce phénomène dure depuis plusieurs années et a créé une certaine confusion chez les consommateurs, les malades et au sein de l’industrie. Ce qui est essentiel ici, c’est de clarifier davantage le rôle que devrait jouer l’industrie pharmaceutique et biotechnologique dans l’éducation sur la maladie. Il subsiste toujours des questions quant à la façon dont nous pouvons communiquer directement avec les malades, quant à l’organisme de réglementation compétent et quant aux meilleurs moyens pour l’industrie de participer à l’éducation des malades.
¿ (0935)
La présidente: Excusez-moi, monsieur Hamilton, mais vous avez largement dépassé le temps qui vous était imparti. Je regrette de devoir vous arrêter ici; sinon, nous n’aurions pas suffisamment de temps pour poser les questions.
M. Rob Hamilton: Très bien, je vous remercie.
La présidente: Il reste une page et demie à votre mémoire et je suis sûre que les députés pourront en faire eux-mêmes la lecture.
Je vous remercie.
Nous allons maintenant passer aux questions en commençant par M. Ménard. M. Ménard va intervenir en français.
[Français]
M. Réal Ménard (Hochelaga—Maisonneuve, BQ): Merci, madame la présidente.
En écoutant Paul et Rob faire leurs présentations, je me suis dit que j'allais déposer une motion, lorsque nous retournerons à Ottawa, pour que ce comité tienne une table ronde de représentants de Santé Canada et de représentants de l'industrie sur la question de l'homologation. Ça n'a aucun sens que ce problème tarde autant à être résolu. J'ai été élu en 1993 et, en 1995, il y a eu un sous-comité du Comité de la santé sur la question de l'homologation. À ce moment-là, Santé Canada avait pris l'engagement d'avoir un processus fast track de 180 jours. C'était en 1995, il y aura bientôt 10 ans, et vous nous dites qu'il y a des délais de 300 jours qui ne sont pas respectés.
Essayons de regarder d'un peu plus près comment on peut faire des recommandations très précises. Il y a beaucoup de choses dans ce que M. Hamilton nous a fourni. D'abord, si je comprends bien, les industries qui sont devant nous se définissent comme des industries innovatrices. Vous n'êtes pas des industries du médicament générique, mais des industries innovatrices.
Deuxièmement, on nous a dit que les entreprises payaient environ 40 millions de dollars pour l'homologation des médicaments. Ces chiffres viennent de Rx&D, qui regroupe les compagnies de recherche pharmaceutique. Dans un premier temps, parlons du processus d'homologation conjoint. Seriez-vous favorables à ce que, lorsque des monographies cliniques sont déposées aux États-Unis, il puisse y avoir de l'échange d'information, afin qu'on ne recommence pas tout le processus, et qu'on ait avec la FDA un processus formel d'homologation conjoint basé sur l'échange de données probantes? Je pense que c'est la première recommandation que vous souhaiteriez voir adopter par notre comité. Est-ce que je vous comprends bien, Paul ou Rob?
[Traduction]
M. Paul Drohan: Je pense que c’est une excellente recommandation. Comme vous l’avez dit, ce sont là des produits novateurs. Il convient de se pencher sur cette question, et ça n’a pas été fait depuis 1995.
Lorsqu’on voit ce que font la FDA ou d’autres organismes de réglementation, je pense que le problème ne tient pas tant aux monographies de produit qu’à l’examen des essais cliniques, d’une part, et de la composition chimique des procédés de fabrication, d’autre part. Ce sont là deux domaines où l’on pourrait penser que les comités de révision spécialisés qui sont en place, particulièrement à la FDA, pourraient servir de source d’information permettant à Santé Canada d’accélérer la procédure.
Je vous remercie de la motion que vous vous apprêtez à déposer lors de votre retour. Nous ne manquerons pas de participer à une telle réunion avec Santé Canada.
M. Rob Hamilton: Effectivement, je suis d’accord avec cela. Je pense que notre industrie est novatrice. Notre avenir s’annonce merveilleux, le nôtre et celui du Canada. Nous sommes aussi, je pense, des pionniers pour nombre de sociétés pharmaceutiques qui souhaitent s’établir ici au Canada.
Je pense que dans les années à venir, la charge de travail de Santé Canada va encore augmenter à mesure qu’un certain nombre de ces produits conçus au Canada vont être soumis à ce ministère. Il me paraît absolument indispensable que Santé Canada trouve le moyen d’accélérer sa procédure d’homologation, étant donné qu’un plus grand nombre de produits vont lui être soumis au cours des années à venir.
Je suis favorable au principe de cette motion, qui envisage des examens conjoints ou des examens en partenariat avec d’autres organismes de réglementation, pas nécessairement la FDA, mais aussi l’AEEM ou l’Australie. Je pense que l’on pourrait ainsi véritablement réduire les chevauchements, et par conséquent les délais et les coûts.
¿ (0940)
[Français]
M. Réal Ménard: D'accord. Voici ma deuxième question. Parmi les premiers témoins que ce comité a entendus, il y avait des fonctionnaires de Santé Canada. Je ne me souviens pas de la moyenne qu'ils ont mentionnée. La recherchiste s'en souvient peut-être, mais il me semble qu'il était question de 200 jours et moins pour homologuer un produit au Canada. On a ces données dans nos statistiques, de toute manière. Qu'est-ce qui vous apparaît poser problème? Est-ce qu'il n'y a pas assez d'examinateurs? On nous a présenté une diapositive, avec une trentaine de cartables très épais qui étaient alignés sur les tablettes. Le processus pour obtenir un avis de conformité est-il trop réglementaire, trop bureaucratique? Des informations qu'on vous demande vous apparaissent-elles non pertinentes, ou si, carrément, il faut engager plus d'examinateurs? Faut-il que le gouvernement y consacre plus de ressources? Bien sûr, il faut des avis de conformité, mais où sont les lacunes de ce processus, selon vous?
[Traduction]
M. Paul Drohan: J’estime que la question des ressources se pose. Lorsqu’on tourne nos regards vers le sud, on s’aperçoit que la FDA a 10 fois les ressources dont dispose Santé Canada. Lors de l’établissement des barèmes de tarification pour l’examen des dossiers présentés dans ce pays, la question des ressources intervient. Je pense que les représentants de Santé Canada l’ont relevé dans l’exposé qu’ils ont fait devant votre comité.
Au niveau de l’administration interne, la question se pose aussi de savoir combien de personnes sont disponibles et quelles sont les compétences permettant de revoir en fait cette information. La DPBG, la Direction des produits biologiques et génétiques, est une institution dont le personnel a une formation scientifique. Malheureusement, avec la quantité de données qui circulent dans la communauté scientifique, il est difficile d’être un spécialiste dans tous les domaines.
Je pense que l’on ferait un pas dans la bonne direction si l’on avait la possibilité de recourir à des comités externes, pour résoudre les problèmes d’information et de compétence qui se posent, dans le cadre d’une stratégie d’information thérapeutique ou de recours à des groupes consultatifs spécialisés externes.
Il faut à mon avis bien se rendre compte que la question des ressources se pose à Santé Canada, à la DPBG et à la DPT.
[Français]
M. Réal Ménard: Je voudrais mieux comprendre. Ce sera ma dernière question. Santé Canada engage des examinateurs, qui sont des employés à temps plein, des ETP, comme dit le Conseil du Trésor. Ces gens doivent se spécialiser dans différents secteurs. Vous dites qu'il est difficile de demander à ces fonctionnaires d'être spécialistes du plasma sanguin, d'être spécialistes de la pénicilline ou d'être spécialistes de toutes sortes de produits que peut avoir à évaluer Santé Canada. Vous souhaiteriez que des contractuels viennent leur prêter main forte lors du processus d'homologation. Est-ce bien le sens de votre remarque?
[Traduction]
M. Paul Drohan: Je pense que l’une des solutions serait de pouvoir compter sur des spécialistes, soit engagés sous contrat, soit experts dans leur domaine, sur le modèle de ce que fait la FDA avec son comité consultatif spécialisé.
Les médecins qui font de la recherche dans ce domaine passent leur vie à élaborer des produits et à étudier la maladie. Je pense qu’il est injuste de demander à des employés de Santé Canada d’avoir une telle compétence, alors qu’ils n’ont que quelques mois pour étudier un dossier. Effectivement, j’incite les responsables à faire appel à un groupe de spécialistes externes que l’on pourrait engager sous contrat.
[Français]
M. Réal Ménard: Vous savez qu'on demande parfois aux députés d'avoir des connaissances dans plein de secteurs, même s'ils ne sont pas des spécialistes. Mais c'est une autre question, évidemment.
La présidente: Merci, monsieur Ménard.
[Traduction]
M. Rob Hamilton: J’aimerais simplement dire moi aussi que les spécialistes venus de l’extérieur ont peut-être une meilleure idée de la façon dont la thérapie va être employée dans la pratique et faire des recommandations au sujet de l’importance de cette thérapie pour Santé Canada. Cela m’apparaît un facteur important que ne saisissent pas toujours les non-spécialistes.
¿ (0945)
La présidente: Merci, monsieur Ménard.
Madame Bennett.
Mme Carolyn Bennett (St. Paul's, Lib.): Merci.
Bien évidemment, nous sommes habitués à ce que les États-Unis aient 10 fois plus de ressources quel que soit le domaine, mais vous me dites ici en fait que la FDA dispose de 10 fois plus de ressources pour étudier le même nombre de médicaments. Tous ces médicaments sont présentés à Santé Canada de même qu’à la FDA, qui dispose de 10 fois plus d’argent pour les évaluer. Certaines personnes sont préoccupées. Certains groupements de citoyens estiment qu’il y a des homologations... qui ne sont pas toujours transparentes et rigoureuses.
Je crois savoir que les 57 médicaments qui ont été homologués l’année dernière... Nous finissons par tous les homologuer, n’est-ce pas? Nous ne découvrons pas en fait de contre-indications que n’ont pas vues la FDA ou d’autres instances internationales. Nous suivons toute cette procédure et, au bout du compte, tous les médicaments sont acceptés.
Je me suis intéressée à une procédure mise au point par un ancien résident de ma circonscription, Alex Patakos, avec la FDA, les groupements de citoyens, les malades et les spécialistes examinant par ailleurs ce qui se passe au niveau international et participant à une opération devant permettre de déterminer si l’expérience internationale suffisait à justifier une homologation ultra rapide et une autorisation débouchant directement sur une surveillance postérieure à la mise en marché, ou s’il fallait en quelque sorte passer par les voies normales. Le problème de la transparence se posait et l’on avait prévu des feux rouges, des feux verts et des feux oranges. Est-ce que c’est quelque chose qui vous paraît logique?
Je sais qu’il y a une harmonisation qui va se faire de toute façon, parce que tous les pays... L’Union européenne a déjà un formulaire commun. Romanow a proposé la création d’une agence des médicaments. Seriez-vous en faveur de l’institution d’une agence des médicaments ayant par ailleurs la possibilité de placer des feux rouges, des feux verts ou des feux oranges tout au long de la procédure, en faisant participer les citoyens et en insistant par ailleurs sur une surveillance postérieure à la mise en marché?
M. Rob Hamilton: Je pense que Biogen Canada sera serait certainement d’accord.
L’intérêt du comité consultatif spécialisé mis sur pied aux États-Unis vient aussi en partie du fait que le public peut assister à ces réunions et voir les prétendus experts, les spécialistes du domaine thérapeutique, faire des recommandations. Les membres du public peuvent aussi présenter des exposés lors de ces réunions de la FDA, ce qui accentue effectivement l’ouverture et la transparence de la procédure. Je ne pense pas qu’il en soit ainsi dans la procédure mise en place actuellement au Canada.
Mme Carolyn Bennett: J’aimerais savoir, monsieur Holloway, quel serait selon vous le régime fiscal approprié au cas où nous ferions une recommandation portant sur le traitement fiscal devant être conféré aux petites et moyennes entreprises afin de leur permettre d'offrir de meilleurs régimes d’assurance-médicaments à leurs employés.
M. Thomas Holloway: Il y a ici deux facteurs. Le premier est négatif. Au début des années 90, lorsque M. Martin, qui était alors ministre des Finances, s’est efforcé d’équilibrer les budgets, on a évoqué entre autres la possibilité de ne pas accorder aux employeurs la déduction fiscale des primes d’assurance-santé et de les rendre imposables pour les employés. Nous n’en sommes heureusement pas venus là et j’espère par conséquent que c’est bien fini et qu’on n’en parlera jamais plus.
Sur un autre plan, j’aimerais que l’on établisse une certaine corrélation entre les montants d’argent que doivent verser les employeurs pour fournir un régime complet de prestations de santé et les répercussions que cela entraîne sur les profits. Par conséquent, lorsqu’une entreprise fait beaucoup de bénéfices, elle est évidemment mieux placée pour fournir ce régime de prestations. Si ce régime remet en cause sa rentabilité et, par extension, la stabilité financière à long terme de l’entreprise, il faudrait alors qu’interviennent progressivement des dégrèvements fiscaux supérieurs à ceux qui existent à l’heure actuelle.
Mme Carolyn Bennett: Monsieur Hamilton, nous pourrions peut-être revenir sur la partie de votre mémoire que vous n’avez pas eu le temps de nous lire.
Pourriez-vous nous redonner votre point de vue au sujet des pharmacies qui vendent par Internet?
¿ (0950)
M. Rob Hamilton: Avec plaisir.
Il est évident que l’on a assisté à un accroissement rapide des ventes de médicaments sur ordonnance à des malades américains grâce à Internet. Je pense que les médias ont beaucoup parlé de cette question récemment, mais il faut voir par ailleurs que ce dossier soulève également des questions importantes concernant à la fois la santé des Canadiens, la possibilité pour ces derniers de se procurer ces médicaments et par la même occasion, à mon avis, les prix des médicaments pratiqués au Canada.
Les pharmacies réalisant des ventes par Internet peuvent contourner de nombreux mécanismes de protection des malades comme, par exemple, la consultation en tête-à-tête avec le pharmacien, le médecin ou un autre dispensateur de soins. On s’inquiète de plus en plus que cette pratique contribue également à une pénurie de professionnels de la santé au Canada, en particulier au Manitoba. Aucun contrôle et aucune réglementation ne sont appliqués. De toute évidence, il en résulte une menace pour les lois d’un autre pays, une violation des droits régissant la propriété intellectuelle, et il se pourrait bien en outre qu’il y ait là une infraction aux règles du commerce.
Il nous apparaît que le gouvernement fédéral devrait prendre position sur la question des pharmacies vendant par Internet, du commerce transfrontalier et de ce qu’on appelle le marché gris des produits pharmaceutiques. Jusqu’à présent, rien n’a été fait et ce que nous demandons aujourd’hui, par conséquent, à votre comité permanent, c’est que le gouvernement fédéral prenne position sur cette question liée au commerce bilatéral.
M. Thomas Holloway: Rapprochons simplement cette question de celle qui se rapporte aux petites entreprises; les pharmacies sont des petites entreprises. Dans bien des cas, il s’agit de pharmacies indépendantes. La moitié du coût des médicaments dispensés par les pharmacies est payé par la province concernée. Les provinces se font tirer l’oreille lorsqu’il s’agit d’augmenter les montants versés aux pharmacies compte tenu de l’augmentation des prix pratiquée par les sociétés pharmaceutiques.
Les sociétés pharmaceutiques, ce qui est bien naturel, augmentent leurs prix au Canada pour les rapprocher de ceux des États-Unis. La différence est actuellement à la charge des pharmacies parce que les régimes provinciaux ne prennent pas la relève. Il en résulte là encore un resserrement de la marge de profit des pharmacies indépendantes, ce qui risque, à long terme, de limiter le nombre de pharmacies au service de la population canadienne.
La présidente: Merci, madame Bennett.
Mme Carolyn Bennett: Ça ne concerne peut-être pas nos témoins, mais allons-nous entendre la semaine prochaine, lorsque nous seront de retour à Ottawa, des intervenants nous parler des pharmacies qui font des ventes par Internet? Nous n’imaginions pas, je pense, que ça allait devenir si...
La présidente: Nous avons entendu un certain nombre de témoins à Winnipeg; nous aurons donc par conséquent les témoignages. Vous pourriez peut-être vous procurer les transcriptions et prendre connaissance des différents points de vue.
Je peux vous dire que si nous avons des difficultés en la matière, c’est entre autres parce que, même dans la province du Manitoba, qui est la plus touchée à l’heure actuelle, les différents ministères provinciaux et les divers secteurs de l’économie qui sont concernés n’ont pas le même point de vue. Le Manitoba s’efforce donc d’adopter une position commune en essayant d’amener tous les intéressés à trouver une solution, et il semble que ce ne soit pas facile.
Nous avons entendu le ministre. Vous pourriez consulter la transcription de son témoignage, madame Bennett.
Mme Carolyn Bennett: Je suis bien au courant de la cacophonie qui règne au Manitoba. Il me semble que le Manitoba est tellement à l’écart de ce qui se passe dans le reste du Canada. J’aimerais que d’autres provinces fassent leurs commentaires au sujet de la situation qui règne au Manitoba.
La présidente: Demain après-midi, nous allons entendre un intervenant à ce sujet.
Mme Carolyn Bennett: Très bien, parce que j’espère que dès la semaine prochaine nous pourrons avoir une idée sur la question.
La présidente: Effectivement. C’est ce que nous espérons nous aussi.
Monsieur Barrette.
[Français]
M. Gilbert Barrette (Témiscamingue, Lib.): Bonjour et merci.
Une de mes questions portait justement sur la vente par Internet. Je lisais ce matin dans le Globe and Mail, je pense, un article sur la vente par Internet et l'insécurité. Si vous aviez une recommandation à faire pour le contrôle et la sécurité, quelle serait-elle? Acheter par Internet, c'est comme acheter n'importe quoi dans un dépanneur. Est-ce que les ordres professionnels ont à protéger la population? Si vous aviez une recommandation à nous faire là-dessus, que nous diriez-vous?
¿ (0955)
[Traduction]
M. Thomas Holloway: C’est une question très difficile. Je peux vous répondre en somme qu’il faut inciter la FDA à faire appliquer les lois qui sont actuellement en vigueur aux États-Unis. La FDA sait pertinemment ce qui se passe à la frontière. Elle voit bien ce qui se trafique à la frontière, au vu et au su de tous, et elle a décidé de fermer les yeux. Si elle décidait d’agir et de faire appliquer les lois en vigueur à l’heure actuelle, elle ferait cesser assez rapidement cet état de chose.
Le gros problème, c’est que la majorité des médicaments qui sont régulièrement dispensés dans notre pays sont en fait produits aux États-Unis. Nous les faisons venir, nous les reconditionnons et nous les revendons. Une fois qu’ils ont repassé la frontière, ils sont réimportés aux États-Unis, ce qui est expressément interdit par la loi fédérale de ce pays. C’est pourquoi la FDA ferme les yeux. C’est donc l’un des éléments clés.
Elle sait que si l’on envoie 10 000 colis par jour à partir de Minnedosa, au Manitoba, ce n’est pas simplement pour expédier du sirop d’érable.
[Français]
M. Gilbert Barrette: Ma prochaine question concerne le plan universel. S'il est un sujet commun dans tout ce qu'on a entendu, c'est bien celui-là. Dans les Maritimes, lundi, on est revenus sur le plan commun et le plan universel. Quel serait le rôle du gouvernement fédéral là-dedans en matière de respect de l'autonomie ou de respect du rôle des provinces par rapport à la responsabilité sur le plan financier?
[Traduction]
M. Rob Hamilton: C’est là à mon avis une autre question difficile qui fait intervenir la Loi canadienne sur la santé et les compétences respectives du gouvernement fédéral et des provinces, qui sont responsables de la santé sur leurs territoires.
Il est indéniable que si le régime était universel, tous les Canadiens y auraient accès et on éviterait certaines des inégalités qui apparaissent selon les différentes régions du pays et la situation socio-économique de la population, mais je pense aussi que le régime actuel, qui comporte plusieurs niveaux, peut donner de bons résultats, le gouvernement fédéral homologuant les médicaments en fonction de leur efficacité et de leur absence de toxicité, les provinces et les assureurs privés assumant et remboursant de leur côté le coût des médicaments. C’est là un bon système, bien équilibré, qui pour n’être pas parfait semble garantir à la très grande majorité des Canadiens l’accès aux médicaments de base.
Je ne sais pas. Il me semble qu’il serait risqué de s’écarter du système actuel et que la phase de transition serait difficile.
M. Paul Drohan: Si vous me permettez d’aller dans le sens de ce que vient de dire M. Hamilton, le régime actuel peut fonctionner. Il nous suffit de mieux savoir l’administrer et de laisser les provinces assumer leurs compétences. Gardons ce que l’on a est essayons de l’améliorer plutôt que de chercher à créer de toute pièce quelque chose qui n’améliorera pas nécessairement le régime actuel.
La présidente: Merci, monsieur Barrette.
Monsieur Masse.
M. Brian Masse (Windsor-Ouest, NPD): Merci, madame la présidente. On a déjà répondu à la plupart des questions que je voulais poser, mais il m’en reste une dont je tiens à vous faire part.
Je relève que l’on a fait état dans un exposé de la nécessité de commercialiser en temps utile les médicaments, et l’on a beaucoup discuté des moyens d’y parvenir.
Au sein du Comité de l’industrie, nous avons étudié la question de l’avis de conformité et des liens entre les produits génériques et la commercialisation des nouveaux médicaments dans la mesure où cela a des répercussions sur la R et D.
Le Canada est à la traîne par rapport à de nombreux pays en matière de R et D. Quelles sont les conséquences de cette situation lorsqu’il s’agit de prendre des décisions en matière de R et D au Canada et de commercialiser les médicaments en temps utile? Pouvez-vous établir une comparaison selon des deux cas de figure pour que je puisse me faire une idée des conséquences sur la R et D dans notre pays d’une commercialisation plus rapide de nos médicaments?
M. Rob Hamilton: J’ai indiqué dans mon exposé que nous devions concurrencer les autres filiales de Biogen dans le monde pour obtenir des activités de R et D au Canada.
Je pense qu’il y a trois facteurs qui jouent. Il y a d’abord la qualité de la recherche menée au Canada; en fait, elle n’a pas son pareil dans le monde. Nous avons des spécialistes, des médecins et des chercheurs universitaires formidables. La qualité de la recherche n’est donc pas en cause. Tout revient à une question de coûts et de délais.
Le coût de la recherche au Canada ne s’écarte pas considérablement de celle qui est menée dans d’autres pays. Ce sont en fait les délais exigés par l’homologation à la suite de cette recherche qui font vraiment problème. Les décideurs des sociétés multinationales examinent la situation au Canada, et si nous ne pouvons pas faire homologuer nos produits en temps utile, cela nous amène souvent à confier la recherche à d’autres filiales, dans d’autres pays. C’est un véritable frein.
À (1000)
M. Paul Drohan: Je considère que le Canada jouit d’une position enviable lorsqu’on le compare aux autres pays du monde, et notamment aux États-Unis. Nos activités de recherche et notre pratique de la médecine sont régionalisées dans notre pays. Nous pouvons ainsi disposer de grands réservoirs de malades en mesure de participer à des essais cliniques et d’instaurer une véritable collaboration entre les différents médecins de notre réseau de la santé—ce qui met la population canadienne et les malades dans une bonne situation et leur permet de bénéficier des recherches dont ils font l’objet.
La qualité de la recherche joue effectivement un rôle. Une fois le médicament homologué, il y a la question des délais de remboursement, des délais de commercialisation. Comme l’a dit très clairement M. Hamilton, nous devons concurrencer d’autres filiales dans le monde.
Je pense que l’Agence des douanes et du revenu du Canada a fait un excellent travail en mettant en place les crédits d’impôt à la recherche scientifique et au développement expérimental. C’est une chose que nous devrions mieux faire savoir parce qu’à mon avis on se retrouve dans une situation favorable, tant en raison du taux de change que de la possibilité de faire appel à des crédits d’impôt, ce qui permet aux entreprises de faire de la recherche en payant moins cher au Canada. Toutefois, la qualité de la recherche est semblable à celle des États-Unis et des autres pays occidentaux. Finalement, lorsque les entreprises prennent leurs décisions, ce n’est pas simplement en fonction des délais d’homologation, mais aussi des possibilités de remboursement dont disposent les malades et, par conséquent, l’organisation.
M. Brian Masse: J’aimerais poursuivre dans cette veine, madame la présidente, en posant rapidement une question.
J’habite à la frontière de Windsor et Détroit, et nous recevons donc une prétendue formation en matière d’utilisation des médicaments. Il s’agit là d’une stratégie de commercialisation très bien pensée. Si jamais nous rapprochions nos législations, quelles sont les libertés que vous aimeriez qu’on vous laisse en ce qui a trait à vos programmes de commercialisation ou de sensibilisation du public?
Ce sujet me met quelque peu mal à l’aise parce que j’ai parlé à de nombreux médecins et pharmaciens qui me disent que de plus en plus les gens font de l'automédication. Non seulement cela crée une relation de plus en plus difficile entre les médecins et leurs malades, mais cela remet aussi en cause la confiance que l’on a dans les médecins, parce que les patients ne peuvent pas obtenir les médicaments qu’ils se sont prescrits eux-mêmes.
Où pensez-vous que cela va nous mener? Si nous pouvions tout simplement commercialiser plus vite nos médicaments que partout ailleurs, quelles seraient les conséquences selon vous sur le plan de la liberté de sensibiliser notre population à l’utilisation des médicaments?
M. Rob Hamilton: Il me paraît important que vous considériez le type de médicaments que notre société et que Genzyme fabriquent, ainsi que la population à laquelle ils s’adressent. Les maladies que visent à traiter nos médicaments sont des maladies rares, qui concernent très peu de personnes. C’est ainsi qu’il n’y a au Canada qu’environ 13 000 malades qui sont traités chaque année pour la sclérose en plaques.
Lorsqu’on parle de la sensibilisation de la population en s’adressant directement au client, il ne s’agit pas ici de faire de la promotion à grande échelle. Il s’agit plutôt de dispenser une formation au malade à la suite de la prescription et de l’aider à optimiser l’utilisation du médicament.
Je pense qu’il s’agit là d’un compromis raisonnable comparativement à la politique de promotion faite directement auprès du client qui a cours aux États-Unis. Nous cherchons davantage au Canada à dispenser plus précisément une formation au malade en ce qui a trait à sa maladie.
M. Brian Masse: Merci, madame la présidente.
La présidente: Merci, monsieur Masse.
Monsieur Castonguay.
[Français]
M. Jeannot Castonguay (Madawaska—Restigouche, Lib.): Merci, madame la présidente.
Ma question s'adresse à M. Hamilton. Dans votre texte, vous dites:
L'éducation sur la maladie est cruciale pour garantir une amélioration réelle de la santé [...] Actuellement, diverses stratégies sont suivies pour s'assurer que les malades ont rapidement accès à de l'information pertinente sur la maladie et sur les nouvelles thérapies. Même après avoir consulté l'Internet et avoir parlé à son médecin, il se peut qu'un malade ait toujours de la difficulté à obtenir de l'information sur les nouvelles thérapies et technologies qui peuvent améliorer sa qualité de vie et empêcher la maladie de se manifester ou de progresser. |
Plus loin, vous ajoutez:
La diffusion par les entreprises de messages éducatifs sans mention de marque pourrait avoir des retombées positives importantes sur le plan de la santé si les malades obtiennent les soins voulus plus hâtivement... |
Pouvez-vous m'expliquer comment cela va permettre un accès plus rapide aux soins, s'il n'y a pas plus de médecins ou de travailleurs dans le domaine de la santé pour livrer les soins? C'est ce que j'essaie de comprendre.
À (1005)
[Traduction]
M. Rob Hamilton: Ce que j’essayai de faire comprendre dans mon exposé, c’est que si l’on parvenait à faire en sorte que les médicaments soient homologués et remboursés plus vite, la population canadienne pourrait y avoir accès plus rapidement.
[Français]
M. Jeannot Castonguay:
Dans votre texte, vous dites: « Au Canada, de nombreuses entreprises font déjà beaucoup de promotion et de publicité ». On prétend que si on faisait plus de publicité--je ne sais pas si on doit appeler cela de la publicité ou de l'éducation--, cela pourrait faciliter l'accès plus rapide aux soins de santé. C'est ce que je ne comprends pas. De plus, vous dites:
Au Canada, de nombreuses entreprises font déjà beaucoup de promotion et de publicité dans les médias. Ce phénomène dure depuis plusieurs années et a créé une certaine confusion chez les consommateurs, les malades et au sein de l'industrie. |
Comment est-ce qu'on pourrait diminuer la confusion en faisant plus de publicité?
Finalement, quel devrait être le rôle de l'industrie? Vous ajoutez: « Ce qui est essentiel ici, c'est de clarifier davantage le rôle que devrait jouer l'industrie pharmaceutique ». Je cherche des réponses à toutes ces déclarations. Comment cela pourra-t-il améliorer l'accès aux soins alors que cela crée déjà beaucoup de confusion?
[Traduction]
M. Rob Hamilton: Nous demandons que les choses soient claires dans ce domaine. Ces dernières années, on a pratiquement fermé les yeux pour ce qui est des efforts quasi promotionnels de relation publique. Le vide ainsi créé a été source d’une grande confusion concernant les personnes chargées d’autoriser de tels messages, etc. Nous voulons plus de clarté, et je considère qu’en tant que société pharmaceutique ou biopharmaceutique, nous avons un rôle à jouer en la matière. Nous disposons de nombreuses données. Nous connaissons probablement nos produits mieux que quiconque et nous voulons agir au sein d’un partenariat pour communiquer de façon raisonnable et équilibrée les avantages et les inconvénients de nos médicaments.
[Français]
M. Jeannot Castonguay: Ma collègue avait une petite question, probablement dans la même veine.
[Traduction]
La présidente: Merci, monsieur Castonguay.
Nous allons laisser la possibilité à Mme Bennett la possibilité de vous poser rapidement une question.
Mme Carolyn Bennett: Je pense que chaque fois que l’on s’est penché au Canada sur le problème de la responsabilité et de la gouvernance en matière de santé, l’unanimité a semblé se faire pour exiger que l’on établisse une séparation entre les responsables de la réglementation et ceux qui sont chargés d’administrer le système. Pensez-vous qu’il est possible d’instituer une agence chargée de réglementer la question des médicaments tout en entreprenant par ailleurs de travailler sur un formulaire ou sur des mécanismes du même genre alors que les médicaments qui sont homologués coûtent de l’argent aux provinces?
N’y a-t-il pas un conflit d’intérêts à la base lorsque les personnes qui vont finalement signer les chèques se retrouvent à la même table que celles qui instaurent la réglementation? Bien entendu, ce n’est absolument pas un problème pour mon collègue du Québec.
Des voix : Oh, oh!
M. Paul Drohan: Je pense qu’il y a un risque de conflit d’intérêts lorsque le responsable de la réglementation se charge non seulement d’homologuer le produit devant être utilisé, mais aussi de payer ce produit. Notre système peut fonctionner. La première étape, à mon avis, serait d’améliorer le système si nous le pouvons en faisant en sorte que le gouvernement fédéral homologue les produits et reconnaisse ensuite la compétence des provinces qui se chargent de payer ou de rembourser les produits.
Le problème qui peut se poser, si l’on se dote d’une agence, si l’on remet en chantier la Loi canadienne sur la santé et si l’on revoit les responsabilités dans ces domaines, c’est au bout du compte celui des possibilités d’accès aux soins. En dernière analyse, nous cherchons à améliorer les possibilités d’accès et la vie de la population canadienne. Pour cela, je pense que nous devons chercher le moyen le plus pratique d’obtenir ces résultats.
À (1010)
La présidente: Merci, madame Bennett.
J’avais une ou deux questions à poser. J’ai été frappée par votre observation selon laquelle les personnes spécialisées dans le domaine qui travaillent dans les laboratoires y consacrent souvent leur vie et sont donc devenues de véritables spécialistes. Je me demande si vous estimez s’il y a suffisamment de spécialistes dans le domaine des enzymes, de l’ADN recombinant et sur les différentes questions que traitent ces groupes d’experts. Est-ce qu’il ne sont pas tous employés par des sociétés comme la vôtre?
Supposons, par exemple, que je sois ministre de la Santé et que je vous dise que j’ai besoin d’instituer un groupe d’experts pour me conseiller sur ces demandes dans l’espoir d’accélérer la procédure. On peut penser évidemment que le personnel de Santé Canada est constitué de généralistes, et il serait bon d’instituer un groupe d’experts dans chaque domaine spécialisé. Pourriez-vous me donner une liste de noms, par exemple, de gens en qui vous avez confiance, qui vous paraissent impartiaux et qualifiés et avec lesquels vous n’auriez pas de conflit d’intérêts? Autrement dit, certains d’entre eux pourraient éventuellement travailler chez vos concurrents, je n’en sais rien. Comment pourrait-on procéder?
M. Rob Hamilton: À mon avis, il ne faudrait pas tant demander à des spécialistes de la recherche fondamentale de siéger dans ces jurys d’évaluation des médicaments, mais de faire vraiment appel aux médecins susceptibles d’utiliser ces produits. Si c’est un produit contre le psoriasis, on peut faire appel à un jury de dermatologues spécialisés dans le domaine, qui savent quelle en est la portée, etc., et on peut leur demander de faire des recommandations à Santé Canada concernant l’homologation éventuelle du médicament.
De la même manière, pour la sclérose en plaques, on peut faire appel à un groupe de neurologues ayant un esprit d’indépendance, qui n’ont pas de liens financiers avec les sociétés en cause, pour qu’ils puissent prendre des décisions impartiales.
La présidente: Êtes-vous d’accord avec ça, monsieur Drohan?
M. Paul Drohan: Dans notre secteur il faut faire appel aux médecins, et ce ne sont pas les employés de notre organisation. Je pense qu’au Canada nous sous-estimons parfois nos compétences. Dans notre domaine, il y a de nombreux spécialistes au Canada qui pourraient facilement être appelés à prendre part à des jurys de ce type.
Je pense que l’autre point important, si nous voulons veiller à la transparence et par conséquent supprimer les conflits d’intérêts, c’est qu’il faut non seulement faire participer les médecins qui font de la recherche, qui soignent les malades, mais aussi faire appel à toutes les parties prenantes : les bailleurs de fonds, les malades qui participent aux négociations, les médecins qui font de la recherche clinique et les médecins qui ne font peut-être pas de recherche, mais qui vont prendre soin de ces malades. En réunissant un tel groupe, on fait non seulement preuve de transparence, on s’assure aussi que tout les parties prenantes vont être entendues dans le cadre du mécanisme de révision.
La présidente: J’hésiterais aussi à faire intervenir les médecins qui participent aux essais cliniques. Ne sont-ils pas en quelque sorte payés de leur effort par la société qui demande l’homologation?
M. Rob Hamilton: Je pense que dans d’autres pays qui ont mis sur pied des groupes consultatifs permanents composés d’experts, ces médecins doivent cesser les essais cliniques pour qu’il n’y ait pas de conflit d’intérêts.
La présidente: Je comprends. Il y a donc deux groupes, celui constitué des personnes qui se chargent des essais cliniques et l’autre, qui est chargé de superviser le mécanisme d’homologation.
M. Rob Hamilton: En effet. Ce sont des comités permanents, si vous préférez, qui siègent pendant un certain nombre d’années afin de s’assurer qu’ils disposent des compétences nécessaires pour superviser la procédure ainsi que les produits soumis à l’homologation.
M. Paul Drohan: Madame la présidente, je pense qu’une autre possibilité, qui s’insère dans la stratégie d’accès aux thérapies, consiste à faire appel à la supervision internationale. Des Canadiens pourraient donc être membres d’un comité d’examen international, auquel pourraient aussi s’adjoindre d’autres membres de la communauté internationale, lorsqu’on a affaire à une maladie pour laquelle on n’a pas les compétences nécessaires.
La présidente: Je vous remercie. C’est toujours l'idéal lorsqu’on peut recourir à des jurys internationaux quel que soit le domaine, que l’on parle d’homologation ou encore de guerre et de paix. Parfois, ils ne sont pas toujours faciles à administrer.
Au nom du comité, je tiens à vous remercier de ces exposés pleins d’enseignement. Les mémoires seront traduits pour être distribués à tous les membres du comité. Nous aurons donc par écrit tout ce que vous nous avez dit. J’ai particulièrement aimé ce matin que vous nous fassiez des recommandations précises sur la façon de régler certaines des difficultés auxquelles nous sommes confrontés.
Nous vous en sommes très reconnaissants. Nous cherchons à améliorer la transparence dans tous les domaines. Je pense que ça ne peut que vous faire plaisir. Il est possible que nous remettions à Noël un petit rapport intérimaire à la Chambre. C’est ce que nous espérons. Sinon, ce sera peut-être pour le nouvel an.
Je vous remercie donc à nouveau de votre participation ce matin.
Nous allons faire une pause de 20 minutes.
À (1035)
La présidente: J'ouvre à nouveau la séance et je remercie tous ceux qui sont venus à Toronto participer aux audiences du Comité permanent de la santé s'appliquant à l'étude des médicaments sur ordonnance.
Je vous rappelle que vous disposez de cinq minutes.
Nous allons donner immédiatement la parole à la représentante de l'Association canadienne des plus de 50 ans, Lillian Morgenthau, qui en est la présidente et fondatrice. Madame Morgenthau.
Mme Lillian Morgenthau (présidente et fondatrice, L'association canadienne des plus de 50 ans): Bonjour tout le monde. Je m'appelle Lillian Morgenthau, et je suis présidente de CARP. J'aimerais vous remercier de l'occasion qui m'est donnée de soumettre aux membres du présent comité les points de vue de CARP sur cette très importante question.
CARP, l'Association canadienne des plus de 50 ans, est une association nationale sans but lucratif qui compte plus de 400 000 membres à la grandeur du pays. Notre association, qui existe depuis 1980, se voue à la promotion et à la protection des droits et de la qualité de vie des Canadiens d'âge mûr. Notre mandat est de faire des recommandations pratiques sur des sujets qui concernent les personnes âgées au Canada. Nous ne recevons aucun financement de la part du gouvernement de façon à préserver notre indépendance.
Nous attirons aussi nos membres par l'intermédiaire de notre revue, que des millions de lecteurs canadiens se passent de main en main. Nous espérons que l'exposé que nous allons faire aujourd'hui sera apprécié par un million de membres.
Je suis très heureuse de rencontrer ce comité sur la santé, un important sujet de préoccupation pour nos membres, et j'espère que les délibérations qui auront cours dans le cadre de ces réunions que vous tiendrez dans tout le pays se solderont par l'établissement d'un système de soins de santé plus agréable, plus accessible et plus compatissant, plus précisément en ce qui a trait aux médicaments d'ordonnance.
CARP soutient que les Canadiens devraient avoir accès aux médicaments généralement considérés comme thérapeutiques. C'est le minimum qu'il convient de fournir à nos malades.
Pour contrer la hausse des prix, le Canada a créé le Conseil d'examen des prix des médicaments brevetés, le CEPMB, dont le rôle est d'examiner le coût des médicaments avec un certain recul, afin que les médicaments soient offerts, il faut l'espérer, à un prix raisonnable.
Nous accusons toutefois un retard considérable quant au nombre moyen de jours nécessaires pour soumettre un avis de conformité—un retard de près d'un an en fait. Nous semblons croire que plus nous tardons à autoriser un médicament, plus c'est avantageux. Nous devrions accélérer l'autorisation des médicaments, car c'est une bonne chose. Ces délais ne font que rendre les médicaments plus coûteux. Les prix montent en flèche à mesure que les jours et les années passent, et rien n'est fait. Chaque jour perdu fait perdre de l'argent aux malades.
Entre-temps, les patients attendent dans la souffrance et la frustration des médicaments qui sont accessibles dans d'autres pays et dans d'autres provinces. Il est évident que si un médicament est approuvé et mis sur le marché dans d'autres pays, il faudrait en tenir compte. Ces pays autoriseraient-ils des médicaments qui ne sont pas nécessaires? Paieraient-ils pour ce genre de médicaments? Pourquoi ne pas profiter des recherches qui ont déjà été réalisées?
Nous devons prendre du recul, mesdames et messieurs. Les médicaments nous permettraient de réaliser des économies : moins de séjours dans les hôpitaux, moins de rendez-vous chez les médecins, et ce n'est là qu'un des nombreux avantages. Dans une perspective plus large, pensons aux patients qui souffrent et que des médicaments appropriés pourraient soulager. Nous ne pouvons refuser d'apporter un soulagement aux Canadiens qui souffrent.
Autrefois, l'espérance de vie se situait à 65 ans. Aujourd'hui, les statistiques indiquent qu'un homme de 65 ans peut espérer vivre jusqu'à 80 ans et qu'une femme de 65 ans a des chances de vivre jusqu'à 85 ans. Voyez où nous en sommes. Les femmes vont atteindre l'âge de 85 ans. En outre, nous constatons qu'il y a aujourd'hui plus de 100 000 centenaires en Amérique du Nord.
À (1040)
Cela ne se fait pas sans difficulté. Nous devons réduire le temps consacré à l'étude des médicaments et les rendre plus rapidement accessibles.
Mon temps est écoulé.
La présidente: Merci, madame Morgenthau. Vous avez une grande expérience des exposés.
Mme Lillian Morgenthau: Excusez-moi?
La présidente: Je vous disais que vous aviez une si grande expérience des exposés que vous savez exactement quand vous atteignez le cap des cinq minutes.
Mme Lillian Morgenthau: C'est automatique.
La présidente: Je vous remercie.
Nous allons maintenant passer aux représentants du Syndicat des travailleurs et travailleuses canadiens de l'automobile. Nous allons entendre aujourd'hui Dean Lindsay, le coordonnateur national pour les retraités, et Len Harrison, employé à la retraite, membre du comité directeur.
Messieurs, vous avez la parole.
M. Len Harrison (employé exécutif à la retraite , Syndicat des Travailleurs et travailleuses canadiens de l'automobile): Je vous remercie.
Je fais partie du comité directeur national des travailleurs à la retraite des TAC et je suis président des travailleurs à la retraite des TAC, organisation qui représente plus de 60 000 travailleurs à la retraite dans notre pays ainsi que leurs conjoints.
Nous sommes heureux d'être ici et de pouvoir vous parler d'un problème qui n'a jamais cessé de se poser depuis le jour où nous sommes venus rencontrer Brian Mulroney pour essayer d'arrêter l'adoption du projet de loi C-91. À l'époque, les libéraux sont venus nous voir à notre arrivée—deux autobus pleins de ressortissants de la péninsule et d'Oshawa—pour nous dire qu'ils allaient arrêter l'adoption du projet de loi dont nous ne voulions pas, que nous n'avions pas à nous inquiéter, qu'ils nous débarrasseraient de ce texte et même de l'avis de conformité, que l'on n'accepterait pas les renouvellements à perpétuité. Comme vous le savez, il n'en a rien été. Les libéraux se sont fait élire et rien ne s'est passé. Nous en sommes revenus au même point. Nous sommes d'ailleurs allés à ce moment-là dans les locaux du Globe and Mail, et ce journal de gauche a publié un éditorial préconisant que l'on se débarrasse de l'avis de conformité, que c'était une catastrophe pour les fabricants de médicaments.
Nous avons fait ensuite des quantités de démarches. Nous avons affrété à maintes reprises des autobus bondés pour venir à Ottawa. La dernière fois, c'était en juin. Nous avons fait venir quatre autobus pleins. On ne nous a pas laissé comparaître devant le Comité de l'industrie—dont Brian est membre, à ce qu'il me semble—mais nous avons rempli la pièce à chacune de ses audiences et les membres de ce comité ont siégé tous les jours en notre présence. Rien n'a encore été fait, et nous sommes donc venus aujourd'hui vous faire part de nos souhaits.
Nous aimerions, tout d'abord, que les politiciens tiennent leurs promesses. Cela remonte au livre rouge. Je crois que c'est au cours de la campagne 1996 ou 1997 que les libéraux ont promis dans leur livre rouge d'instituer un programme d'assurance-médicaments. Je ne sais plus quel est le groupe qui s'était réuni, un conseil de la santé mis sur pied par Jean Chrétien, qui a fait deux grandes recommandations. L'une demandait l'institution d'un programme d'assurance-médicaments et l'autre d'un programme de soins de santé, et nous les attendons encore tous les deux. Chaque fois que je suis venu à Ottawa et que je me suis présenté devant les comités, j'ai déclaré que je ne m'arrêterais qu'à partir du moment où nous aurions obtenu quelque chose sur ce point.
Il ne devrait jamais y avoir de renouvellement à perpétuité et d'avis de conformité. J'ai dit à tous ceux que j'ai rencontré que l'on peut réunir aujourd'hui le conseil des ministres à Ottawa et nous débarrasser de l'avis de conformité. On a introduit ce principe; on peut toujours le retirer. Il ne fait qu'augmenter le coût des médicaments. Enfin, lorsqu'on nous dit que les coûts vont baisser tout simplement parce qu'un comité se réunit à Ottawa pour éviter les augmentations... Entre 1985 et l'an 2000, les dépenses de médicaments ont augmenté de 296 p. 100. Les frais de médicaments sont ceux qui augmentent le plus vite dans notre facture de santé.
Quant à vivre plus vieux—pour ma part, je ne prends pas de médicaments. Je me soigne avec des plantes médicinales et des vitamines—les médicaments tuent et mettent les personnes âgées à l'hôpital. Voilà leur résultat. Dans certains cas, il faut les utiliser à bon escient et ne pas s'en contenter pour se débarrasser des personnes âgées et de celles qui ont besoin d'aide.
Nous recommandons tout d'abord la création de notre conseil de la santé. Romanow a présenté toutes ces magnifiques recommandations que tout le monde a appréciées et qui sont désormais quelque part dans les tiroirs. On a pu lire l'autre jour un article du Toronto Star sur le sujet. Tout est calme sur ce front aujourd'hui. Personne ne dit mot. C'est le secret le mieux gardé chez nous, ce fameux rapport Romanow. Il voulait un programme d'assurance-médicaments. Il voulait que le Comité de l'industrie se réunisse au sujet du renouvellement à perpétuité et de l'avis de conformité. Il voulait vraiment nous en débarrasser. Il nous a dit que c'était une mauvaise chose et que nous pouvions faire baisser le prix de nos médicaments. Ce serait une aide pour nous tous.
Nous voulons qu'il en soit ainsi. Nous voulons obtenir ce conseil de la santé. Le gouvernement peut le faire maintenant, s'il le veut, il peut mettre en place ce conseil de la santé et dire aux provinces qu'il va être institué, que l'on va faire preuve de transparence et que l'on va savoir comment on dépense l'argent dans la population, qui tient à être mise au courant. Nous aurions alors affaire à des gens qui s'intéressent davantage au gouvernement et à l'éthique du gouvernement, ce dont nous avons bien besoin.
J'en viens à un deuxième point. Je dois vous dire que j'ai pris connaissance hier de l'exposé que vous a présenté la Coalition canadienne de la santé, qui m'a paru excellent. J'aurais aimé que nous ayons rédigé ce mémoire, moi ou l'un de nos attachés de recherche. J'ai aimé entre autres le fait qu'elle demande la tenue d'une enquête publique sur l'industrie pharmaceutique pour savoir ce qu'elle fait, comment elle se conduit, quel est l'argent qu'elle donne au gouvernement et quelle est exactement la publicité qu'elle fait auprès des médecins pour que ces derniers prescrivent des médicaments plus onéreux. C'est tout le problème à l'heure actuelle. Vous le savez bien, et je n'ai probablement rien à vous apprendre concernant la commercialisation de ces produits auprès des médecins.
Nous avons lancé un programme d'information au sujet des médicaments et nous avons recueilli de nombreux exemples. C'est Dean qui administre notre programme à l'heure actuelle. Nous avons des travailleurs retraités qui font du démarchage auprès d'autres retraités pour leur parler des médicaments et leur dire que le pharmacien est leur meilleur ami. C'est leur meilleur ami chimiste, en effet, parce qu'ils introduisent des produits chimiques dans leur corps, dont ils ne connaissent pas nombre des effets à long terme. Nous insistons là-dessus. Nous insistons sur la nécessité pour chacun de parler à son médecin et de vivre une vie saine.
À (1045)
Je mange très peu de graisse, je marche tous les jours, je fais de la méditation et je ne me suis jamais senti aussi bien de toute ma vie. Je vous le dis, je vais vivre 100 ans. J'ai dit à mes enfants que j'allais vivre jusqu'à 120 ans lorsque j'en avais 60, et mon fils m'a répondu : « Ah non, pas ça, papa ».
Je veux aussi vous parler des médicaments qui tuent et qui mettent les gens à l'hôpital. Entre 18 et 28 p. 100 des admissions à l'hôpital sont liées à la prise de médicaments : surmédication, mauvaise médication, trop de médicaments. Je vous affirme que s'il s'agissait d'une autre couche de la population, et non pas simplement des personnes âgées, ce serait une honte et un abus. Nous commettons donc un abus au Canada envers les personnes âgées en les gavant de médicaments. Nous les gavons de médicaments à l'hôpital et dans les établissements de soins à long terme, et il faut que cela cesse. Les études existent à ce sujet.
Lorsque je siégeais au sein du conseil du Collège des pharmaciens de l'Ontario, jusqu'à ce que les conservateurs se fassent élire—j'ai été le premier à partir—nous en parlions. Allez en parler aux pharmaciens, et ils auront bien des choses à vous dire. Ils opèrent sur le terrain et ils en savent davantage sur les médicaments que les médecins. Ils devraient être aux côtés des médecins, pour pouvoir les conseiller. Nous avons tout ce qu'il faut pour agir, pour que vous puissiez agir.
Je vais vous dire une dernière chose pour finir : lorsque je me présente quelque part, je suis toujours optimiste, mais je suis toujours pragmatique sur certaines choses. Je crois que c'était en 1987 ou en 1988 que je suis venu rencontrer Brian Mulroney, rien ne s'est produit, et nous n'avons toujours pas obtenu de résultat par la suite. Je continue à revenir. Je vous l'avoue franchement, je n'en attends en fait pas davantage de votre comité—rien ne va se produire. C'est l'histoire de ma vie. Nous pouvons vous remettre tous les documents. Toute l'information dont vous avez besoin est là.
Le ministre responsable des personnes âgées en Ontario m'a rencontré autour d'une table alors que j'étais président de United Senior Citizens of Ontario, et que j'avais ce beau projet qui consistait à intégrer toutes les disciplines, à mettre les pharmaciens en première ligne, à sensibiliser la population et à faire de la publicité, projet qui venait d'être bloqué par les responsables. Il m'a dit : « Je n'ai pas encore mis tous mes canards à l'eau » et je lui ai répondu, il s'agissait de Cam Jackson : « Non, Cam, quelqu'un vient de les tuer, tes canards ».
On ne va pas faire le travail pour nous. On va laisser les personnes âgées en plan. On va continuer à nous bourrer de médicaments. On va continuer à nous mettre à l'hôpital. On va continuer à nous tuer, un point c'est tout.
Vous pouvez obtenir toute l'information nécessaire, vous pouvez la lire, nous pouvons vous la présenter, mais vous êtes les seuls à pouvoir faire quelque chose, à prendre l'initiative et à aider les personnes âgées, qui ont besoin d'aide dans notre pays. Vous pouvez nous aider. Vous pouvez nous aider à vivre une vie meilleure. Pour moi, on vit lorsqu'on a une bonne qualité de vie. C'est vous qui en êtes chargés. Si vous le faites, vous nous rendrez à tous un grand service.
Je vous remercie.
À (1050)
La présidente: Merci, monsieur Harrison.
Nous allons maintenant entendre la représentante d'Action pour la protection de la santé des femmes, Anne Rochon Ford, qui en est la coordinatrice.
Madame Ford.
Mme Anne Rochon Ford (coordinatrice, Action pour la protection de la santé des femmes): Merci.
Je vais vous lire mon exposé. Je pense que c'est la seule façon pour moi de m'en sortir en cinq minutes.
Je tiens à vous remercier, tout d'abord, de nous avoir donné la possibilité de nous présenter ici aujourd'hui.
Les médicaments qui sont prescrits et leurs effets sur la santé des femmes font l'objet de l'attention particulière de notre organisation, Action pour la protection de la santé des femmes. Étant donné que ce sont les femmes qui en majorité ont dû subir de graves préjudices dus aux pires catastrophes causées par les médicaments et les prothèses au XXe siècle, tels que le DES, le diéthylstilbestrol, les implants mammaires et le dispositif intra-utérin appelé bouclier de Dalkon, et que ce sont elles qui, plus récemment, à l'échelle mondiale, ont servi en grand nombre de cobaye, sans le savoir, pour les besoins de la recherche menée sur les traitements hormonaux de substitution, nous sommes particulièrement intéressés à ce que l'on puisse disposer de bonnes garanties pour éviter que se reproduisent à l'avenir les mêmes erreurs et les mêmes tragédies.
Action pour la protection de la santé des femmes a été créée en 1998 dans le cadre d'une initiative prise par DES Action Canada, l'un des partenaires à l'époque des centres d'excellence du programme de santé des femmes de Santé Canada. Nous continuons à être financés par le bureau de la santé des femmes à Santé Canada et notre administration est patronnée par le Réseau canadien pour la santé des femmes, qui s'est adressé à vous, je crois, à Winnipeg.
Nous avons cherché à l'origine à réagir collectivement à la subdivision selon les sexes opérée dans le cadre du remaniement en cours des services chargés à Santé Canada de l'homologation et de la surveillance des médicaments prescrits et des prothèses, ce qui étaient auparavant la direction des produits thérapeutiques au sein de la Direction générale de la protection de la santé, aujourd'hui, la direction des produits de la santé mis sur le marché au sein de la Direction générale des aliments et des produits de la santé. J'insiste sur cette distinction parce que j'y reviendrai plus tard.
Notre groupe réunit au sein d'une organisation assez souple tout un ensemble d'universitaires, de professionnelles de la santé et d'avocates de la santé des femmes préoccupées par les effets, sur la santé des femmes, de la réglementation sur la protection de la santé. Nous produisons des études et des documents de discussion sur tout un éventail de questions liées à la santé des femmes et aux produits pharmaceutiques, tant à l'intention du grand public qu'aux décideurs. Nous nous réunissons à l'occasion avec les représentants élus et certains fonctionnaires de Santé Canada pour leur présenter une analyse des questions en jeu qui tienne compte des différences selon les sexes.
Les arguments et les recommandations que je tiens à présenter à votre comité relèvent de quatre grandes catégories : premièrement, la médicalisation croissante de la vie des femmes; deuxièmement, la priorité donnée à la croissance économique et industrielle par rapport aux questions de santé publique dans le domaine de la réglementation des médicaments; troisièmement, la nécessité d'évaluer les médicaments et les prothèses en tenant compte de tout l'éventail des possibilités en matière de santé; enfin, quatrièmement, la nécessité de bien informer le consommateur en matière de santé, sans recourir exclusivement à la publicité.
Pour ce qui est tout d'abord de la médicalisation de la vie des femmes, il faut dire pour être plus précis que ce n'est pas simplement la médicalisation de la vie des femmes qui nous préoccupe, mais le fait qu'elles soient véritablement droguées.
Une véritable invasion de la publicité, qui cherche à présenter pratiquement toute situation ou toute fonction naturelle dans la vie des femmes comme un prétexte pour apporter une solution pharmaceutique, a amené toute une population de jeunes filles et de femmes à se demander si elles font bien lorsqu'elles ne prennent pas une pilule dans chaque cas qui se présente. Je vous renvoie à des publications comme celle-ci, qui est produite conjointement par Rogers Communications et par la Société des obstétriciens et gynécologues du Canada. Elle est pleine des publicités que je viens de vous indiquer et elle est largement distribuée dans tous les cabinets de médecins du Canada.
Grâce à l'insistance et au renforcement que l'on trouve dans les médias d'entreprise, nous en sommes venus à croire que la solution des effets contre-indiqués d'un médicament ne peut être que la prise d'un autre médicament. C'est ce que l'une de nos membres a qualifié de « maladie de substitution » : les médicaments prescrits contre les maladies cardiaques apparaissant plus logiques que le régime et l'exercice; notre trac, notre peur des foules ou notre manque de communication avec notre conjoint pouvant plus facilement être réglé, à l'aide d'un cachet qu'en recourant à un groupe de soutien, en parlant à un conseiller ou en rencontrant des amis. Récemment, la nouvelle selon laquelle un nouveau médicament a été trouvé aux États-Unis pour supprimer notre cycle menstruel a été présentée dans les médias comme étant éventuellement une bonne chose. Parallèlement, on nous offre aussi aujourd'hui une autre pilule pour remédier aux terribles sautes d'humeur qui accompagnent le cycle menstruel.
Les femmes ne sont pas les seules victimes de ces messages, mais nous en sommes souvent la première cible. Cela s'explique par le fait que non seulement nous sommes les principaux consommateurs de médicaments d'ordonnance, mais aussi parce que c'est nous qui prenons les premières décisions en matière de soins de santé, non seulement au sein de la famille mais parfois, comme dans le cas de certaines communautés autochtones, au nom d'une plus grande collectivité.
Par le passé, nous avons souvent été sous-représentées dans les études sur les médicaments et, par conséquent, nous sommes souvent victimes des contre-indications dues à un mauvais dosage des médicaments. Nous nous félicitons toutefois de voir que grâce au travail de critique effectué par la Dre Donna Stewart et ses collègues du Réseau de santé universitaire ici même à Toronto, ainsi que par d'autres chercheurs dans le domaine de la santé, on a commencé à régler au Canada la question de la représentation des femmes dans les essais cliniques. Nous en sommes très heureuses.
À (1055)
J'aborderai en second lieu la question du rapport entre la santé publique et la croissance industrielle. Notre groupe de travail s'est constitué à l'origine pour faire part individuellement et collectivement à Santé Canada de nos préoccupations au sujet de la réglementation actuelle des médicaments au Canada. À l'heure actuelle, différents membres de notre groupe préparent des mémoires devant être présentés au bureau compétent de Santé Canada, le bureau du renouvellement législatif, qui va entreprendre de tenir des audiences à l'échelle du Canada au cours des mois à venir.
Lors des audiences de 1998, nous avons évoqué le fait que l'on donnait de plus en plus le contrôle à l'industrie pharmaceutique, Santé Canada s'en remettant aux droits versés par les utilisateurs de l'industrie pour rembourser le plus gros de ses frais de fonctionnement liés à l'évaluation et à l'homologation des médicaments.
Nous avions relevé que les laboratoires de recherche internes sur les médicaments, qui étaient chargés d'étudier la qualité des médicaments, leur toxicité, leur bioéquivalence ainsi que leurs applications cliniques, perdraient progressivement de leur importance et finissaient par fermer. Nous nous étions véritablement inquiété à l'époque, et nous vous faisons part à nouveau de cette inquiétude lors de la présente série d'audiences, du fait que les intérêts et les besoins de l'industrie pharmaceutique semblent passer avant l'objectif général de la santé publique—ce qui est en fait la véritable raison d'être de la Loi sur les aliments et drogues.
Étant donné le risque énorme que l'on court ainsi, nous ne sommes toujours pas convaincues qu'il faille revoir la loi et que les changements vraiment nécessaires, qui iraient dans le sens des grands principes régissant la santé publique, ne puissent être apportés en faisant intervenir d'autres mécanismes, tels qu'une modification de la réglementation et des directives.
Nous sommes nombreuses à ne pas comprendre pourquoi les termes « protection de la santé » ont été retirés discrètement de l'appellation de la Direction générale chargée de la réglementation des médicaments au sein de Santé Canada. Il y a certainement des raisons qui justifient ce changement d'appellation, mais cette disparition a une importance symbolique. Les citoyens du Canada ont besoin d'être rassurés et de savoir que le ministère se charge de protéger leur santé et non pas de vendre des produits.
J'aimerais évoquer la question de l'évaluation des médicaments en tenant compte de toute la gamme de possibilités. Il faut que les médicaments et les prothèses soient évalués dans un cadre bien plus large qu'il ne l'est actuellement. Je veux dire par là qu'il faut tenir compte du cadre plus global des soins et mettre sur un même pied toutes les possibilités qu'offrent la prévention et l'intervention, y compris l'absence d'intervention, sans se contenter de solutions purement pharmaceutiques.
Pour bien évaluer la rentabilité et la sécurité des médicaments, il convient de les rapprocher d'autres régimes d'intervention, tels que l'exercice, les régimes, un sommeil suffisant, les thérapies faisant appel au massage et d'autres solutions chimiques moins dangereuses. Il sera toujours bien plus facile de prendre un cachet que de modifier ses habitudes de vie, plus facile, plus onéreux et éventuellement bien plus préjudiciables à la santé à long terme. Nous estimons qu'il incombe au législateur de notre pays de modifier cette façon de voir.
Je vais vous parler enfin de l'information sur la santé, qui ne se ramène pas à la publicité. Je suis sûre que vous avez entendu bien d'autres intervenants vous parler de la publicité faite directement auprès du consommateur, l'une des principales sections de la Loi sur les aliments et drogues qui est actuellement examinée dans le cadre de la procédure de renouvellement législatif.
Action pour la protection de la santé des femmes se penche sur la question depuis ses débuts. Nous considérons que cette publicité directe n'est que l'une des grandes manifestations des nombreux problèmes qui se posent à l'heure actuelle au niveau de l'influence croissante de l'industrie, de la réglementation des médicaments et de la surveillance, mais c'est un problème qui a des effets particuliers sur la santé des femmes. Comme nous l'avons indiqué précédemment, les femmes sont les premières cibles de la publicité directe auprès des consommateurs, non seulement pour ce qui est des médicaments utilisés exclusivement par les femmes, mais aussi pour certains médicaments qu'utilisent les deux sexes.
Les publicitaires sont suffisamment intelligents pour savoir qu'il est important de faire passer leurs messages en s'adressant aux femmes. Le problème se pose particulièrement lorsque les femmes auxquelles on s'adresse sont jeunes et vulnérables, ce que montrent bien le nombre croissant de publications mises sur le marché par les fabricants de dispositifs de contraception, qui inondent les cliniques et les cabinets médicaux.
Nos collègues qui oeuvrent dans les cliniques de contrôle des naissances nous disent qu'il leur est très difficile de ne pas mettre ces publications bien en vue étant donné qu'il y a très peu d'autres sources de renseignements permettant aux jeunes filles et aux jeunes femmes de s'informer des possibilités de choix qui leur sont offertes en matière de contraception et sur d'autres questions liées à la santé.
Cela m'amène à traiter du problème fondamental que pose la publicité qui est faite directement auprès du consommateur. L'information que donne la publicité n'est pas de l'information, c'est de la réclame. Elle a même tendance à éviter de dire à la lectrice ce qu'elle a besoin de savoir, et il n'est évidemment pas question de parler des différents choix qui s'offrent à elle. Les jeunes filles et les femmes ont terriblement besoin de s'informer des différentes possibilités de choix qui s'offrent à elles en ce qui a trait à leur santé.
Comme l'a déclaré en Australie notre collègue, le Dr Peter Mansfield : « Il est aussi difficile aujourd'hui d'obtenir une bonne information, sans parti pris, sur la santé, que de trouver une aiguille dans une meule de foin ». Avec la publicité directe, cette meule de foin devient encore plus grosse.
Nous avons besoin d'information sur les médicaments qui n'émane pas exclusivement de l'industrie, qui a justement tout à gagner de la promotion de ses produits.
Santé Canada a financé en l'an 2000 une étude pilote d'un guide des médicaments au Canada au cours de laquelle on s'est penché sur les renseignements utiles au consommateur tirés des meilleures études d'échantillonnage des questions liées à la santé qui soient disponibles. J'en ai fait figurer quelques exemples en annexe de mon mémoire.
Á (1100)
La présidente: Je dois vous arrêter ici, madame Rochon. Vous avez largement dépassé le temps qui vous était imparti.
Mme Anne Rochon Ford: Très bien. Je vais conclure en faisant état des quatre recommandations que nous faisons en définitive, si vous me le permettez.
La présidente: Allez-y.
Mme Anne Rochon Ford: Premièrement, toute évaluation des questions liées à la prescription des médicaments au Canada doit tenir compte en premier lieu des répercussions particulières que cela entraîne sur la santé des femmes. Deuxièmement, la protection de la santé publique doit passer avant la croissance et le développement industriel. Troisièmement, il faut que les médicaments soient replacés dans le cadre global du système de santé et confrontés aux autres options plutôt que de les considérer comme de simples produits qu'il faut vendre. Quatrièmement, enfin, il convient de faire appliquer et de renforcer les mesures d'interdiction existantes dans la Loi sur les aliments et drogues en ce qui concerne la publicité faite directement auprès des consommateurs.
Je vous remercie.
La présidente: Merci.
Les témoins suivants représentent la Corporation des retraités canadiens intéressés. Nous allons entendre ce matin sa présidente, Mme Gerda Kaegi, et sa présidente sortante, Mme Barbara Black.
Madame Kaegi.
Mme Gerda Kaegi (présidente, Corporation des retraités canadiens intéressés): Merci.
Je tiens tout d'abord à remercier votre comité de tenir ces audiences. Je pense qu'il est important que vous le fassiez.
Len a exprimé avec passion ce que je ressens. Vous êtes en mesure de faire la différence et je vous adjure de le faire.
Nous avons évoqué l'époque Mulroney. J'ai fait des exposés devant le Comité sénatorial de l'industrie; nous sommes intervenus devant la Chambre des communes, auprès de chacun des ministres de la Santé et des ministres de l'Industrie. Notre association est d'ailleurs allée encore plus loin en tant que consommateur, nous avons déposé une plainte devant le Bureau de la concurrence en compagnie de cinq autres organisations nationales qui, comme vous pouvez le voir, avaient de fermes convictions en la matière.
Quant à mon exposé, je vais sauter quelques passages, mais je vous ai fait parvenir un mémoire plus long que vous aurez la possibilité et le temps de lire, je l'espère.
Nous avons évoqué trois questions dans notre mémoire. La première est celle du coût et du prix des médicaments. Nous avons abordé dans ce cadre la capacité, pour les familles à revenu faible ou moyen, de payer les médicaments prescrits nécessaires, et nous avons cité un certain nombre d'études. Nous avons recensé par ailleurs des études qui nous indiquent que les personnes âgées sont, plus que toute autre couche de la population au Canada, les principaux utilisateurs des médicaments prescrits, et que ces personnes âgées dépensent davantage au titre des médicaments que tout autre groupe d'âge, même si elles sont couvertes par des régimes d'assurance-médicaments.
Les personnes qui ont de faible revenu tout en ayant besoin des médicaments qui leur sont prescrits doivent choisir entre les nécessités essentielles de la vie et les médicaments prescrits. Nous savons, grâce à l'Institut canadien d'information sur la santé, que les dépenses annuelles en médicaments prescrits ont considérablement augmenté.
Nous avons aussi attiré votre attention sur le fait que lorsque les médicaments sont prescrits en dehors de l'hôpital, le coût doit en être assumé par la personne concernée.
Nous avons aussi relevé que les gouvernements provinciaux tentent de contenir la hausse des dépenses de santé en reportant l'inscription ou en excluant des formulaires provinciaux les nouveaux médicaments d'ordonnance. Les médicaments qui ne figurent pas sur les formulaires ne sont pas couverts par les régimes d'assurance.
Enfin, nous signalons que dorénavant, toutes les provinces exigent des patients bénéficiant du régime d'assurance-médicaments qu'ils paient une quote-part, et que cette quote-part a tendance à augmenter chaque année.
Dans ce cadre, nous avons fait trois recommandations.
En premier lieu, le Canada doit se doter d'un programme national d'assurance-médicaments qui serait prévu dans la Loi canadienne sur la santé, ou des mêmes principes dans le cadre d'une nouvelle loi sur l'assurance-médicaments.
En second lieu, il faut créer, à la suite d'une entente fédérale-provinciale-territoriale, une agence nationale des produits pharmaceutiques qui sera chargée :
a) d'acheter des médicaments pour réduire les coûts—des études ont été faites pour montrer que cette négociation a donné des résultats partiels au Canada, mais a bien marché aux États-Unis grâce à l'organisation des soins intégrés;
b) de convenir d'un processus efficace et rapide de mise à l'essai et d'approbation des médicaments—et nous espérons que la présente initiative verra le jour;
c) de faire en sorte que les médicaments ayant subi avec succès le processus d'approbation soient offerts de manière équitable à toute la population, peu importe la province ou le territoire—il y a une grosse discrimination d'une province à l'autre, ce qui cause des injustices;
d) de veiller à ce que, une fois approuvés, les équivalents génériques soient recommandés à la place des produits brevetés.
Notre troisième recommandation, à ce titre, revient à dire que jusqu'à ce qu'un nouveau programme d'assurance-médicaments national soit mis sur pied, nous croyons que tous les médicaments servant à traiter des maladies extrêmement graves doivent être couverts pour tous les Canadiens en vertu d'un accord fédéral-provincial-territorial. C'est un peu ce qu'ont recommandé MM. Romanow et Kirby.
Le deuxième domaine que nous avons abordé est celui du traitement de faveur accordé à l'industrie pharmaceutique en vertu du Règlement sur les médicaments brevetés instaurant des avis de conformité en application de la Loi sur les brevets. Nous comprenons qu'il faille protéger les droits de propriété intellectuelle; cela dit, ces droits ne doivent pas brimer ceux du grand public. Nous relevons que l'on a affaire ici à des sociétés qui ont bénéficié d'une aide publique grâce aux crédits de recherche universitaire, aux incitations fiscales et à des subventions et des prêts versés directement par le gouvernement.
Seul le Canada et les États-Unis confèrent une protection supplémentaire en accordant automatiquement une injonction pour bloquer l'introduction de médicaments génériques sur le marché. En août, le président Bush a changé la situation aux États-Unis, et il n'y a donc vraiment plus que le Canada qui accorde cette protection spéciale.
Á (1105)
Nous sommes préoccupés par le coût inutile que doivent payer les particuliers et le réseau de la santé du fait de la pratique tout à fait légale mais moralement contestable qui consiste à prolonger ou à reconduire indûment le monopole exercé sur le marché. Nous avons remarqué que nombre de nouveaux médicaments mis sur le marché chaque année ne sont que des variantes mineures des médicaments existants—et il existe de nombreuses études pour le prouver—mais dont le prix est plus élevé. Les activités de recherche et de développement auxquelles le Canada s'attendaient en instaurant ce régime spécial ne se sont pas matérialisées, comme l'a prouvé le Conseil d'examen des prix des médicaments brevetés.
Enfin, nous avons attiré votre attention sur le fait que le déficit commercial du Canada pour les produits pharmaceutiques a terriblement augmenté et que l'on s'attend à ce qu'il augmente encore. Dans ce cadre, nous avons fait quatre recommandations.
La première recommandation revient à imposer une limite absolue de 20 ans pour les brevets des nouveaux médicaments, et non des médicaments légèrement modifiés. C'est là la difficulté; bien trop de brevets sont accordés pour de légères modifications.
La deuxième recommandation consiste à faire en sorte que la limite de 20 ans commence dès le dépôt d'une demande à Santé Canada, qu'aucun brevet supplémentaire ne soit accordé à moins qu'il s'applique à une modification substantielle du produit, et qu'on ne puisse déposer plus d'un brevet.
La troisième recommandation revient à abroger les dispositions spéciales visant l'industrie pharmaceutique et à traiter cette dernière comme tout autre détenteur de brevet, de façon à ce que les produits génériques correspondants, meilleur marché, puissent être disponibles une fois que le brevet du médicament d'origine est arrivé à expiration.
Enfin, sur un dernier point, qui s'impose si l'on adopte ma troisième recommandation, il convient de limiter à deux le nombre de brevets par médicament. Dans mon mémoire, j'ai parlé du Losec. Il s'agit d'un médicament que j'ai déjà utilisé de même que deux de mes enfants. Je suis allé voir sur le site Internet de Santé Canada. J'ai mentionné que le brevet était arrivé à expiration en 1999, mais que tous les autres brevets sont valides jusqu'en 2018, si je me souviens bien.
Nous avons évoqué enfin la question de la publicité sur les médicaments d'ordonnance. Mes commentaires vont dans le même sens que ceux de mes collègues. Les fabricants de produits pharmaceutiques de marque et les médias exercent des pressions auprès du gouvernement pour qu'il autorise la publicité directe à l'intention du grand public. Ce genre de publicité incite les médecins à prescrire davantage de médicaments correspondant à de nouveaux syndromes ou à des maladies supposées—et je cite l'exemple de cet homme qui saute de joie—ou encore à prescrire de nouveaux médicaments, plus chers, pour des maladies existantes.
La publicité directe stimulera la vente de médicaments qui ne sont que très peu, voire pas du tout, bénéfiques pour la santé et le bien-être du public et détournera des fonds qui pourraient servir à développer des médicaments vraiment utiles.
Enfin, nous soutenons que la publicité encourage les gens à se fier aux médicaments pour régler leurs problèmes. Nous en arrivons alors à notre dernière recommandation : continuez d'interdire la publicité directe pour les médicaments d'ordonnance et renforcez les règles en vigueur actuellement.
Merci, madame la présidente.
La présidente: Merci de vous être exprimée avec une telle concision et d'avoir su nous exposer rapidement vos recommandations.
Nous allons maintenant passer aux questions en commençant par M. Ménard.
M. Réal Ménard: Merci, madame la présidente.
Je vais m'exprimer en français. C'est ma langue maternelle et j'adore le Québec—et Toronto. Gilbert Barrette est dans le même cas; lui aussi parle français.
Á (1110)
[Français]
J'ai deux questions. Je me donne pour mission de convaincre mon caucus que l'injonction automatique est quelque chose qui n'a pas de bons sens, que c'est un mécanisme qui permet de prolonger les brevets au-delà de ce que le législateur avait prévu. Je suis d'accord sur cela.
Quand M. Lindsay dit qu'il ne faut plus qu'il y ait d'avis de conformité, j'ai un peu de difficulté à suivre ce raisonnement-là. S'il n'y a plus d'avis de conformité, cela veut dire que des médicaments seront vendus au Canada sans que Santé Canada en ait vérifié l'innocuité ou le caractère sécuritaire.
C'est ce que cela veut dire, parce qu'un avis de conformité n'a pas nécessairement à voir seulement avec la prolongation des brevets. Cela a à voir avec la question qu'il faut se poser, à savoir si on croit que c'est la responsabilité de Santé Canada que de s'assurer que les médicaments d'ordonnance ou en vente libre ne sont pas dommageables pour les gens qui les consomment. La contrepartie du processus d'homologation est le droit de Santé Canada de rappeler des médicaments.
Donc, je pense qu'il faut être prudent quand on dit qu'il faut abolir les avis de conformité. Si on abolit les avis de conformité, cela veut dire qu'on enlève à Santé Canada sa responsabilité, qui est d'assurer la sécurité des médicaments. Là-dessus, je ne suis pas prêt à vous suivre. Je suis tout à fait d'accord qu'on s'assure que les brevets ne durent pas 24, 25 ou 26 ans alors qu'on a décidé qu'ils devaient durer 20 ans. Je suis tout à fait d'accord qu'on fasse entrer des médicaments génériques sur le marché le plus rapidement possible, une fois qu'on aura respecté la période de 20 ans.
Monsieur Lindsay, êtes-vous d'accord avec moi pour dire que si on abolit toute espèce d'avis de conformité, on enlève une responsabilité importante à Santé Canada et il peut y avoir un danger pour les consommateurs?
J'aurai une deuxième question pour Mme Ford.
[Traduction]
M. Len Harrison: C'est ainsi que je comprends l'avis de conformité.
Le projet de loi C-91 qui a été adopté confère aux fabricants de médicaments la possibilité de déposer un brevet d'une durée de 20 ans. Pendant 20 ans, il vend son médicament au public et pendant 20 ans la population voit ce qui se passe au sujet de ce médicament. Parfois, le médicament fait l'objet d'un rappel ou d'une autre mesure. Toutefois, lorsque cette période de 20 ans est écoulée, le fabricant du médicament générique doit s'adresser à Santé Canada et lui préciser qu'il veut déposer un avis de conformité pour pouvoir fabriquer ce médicament générique. Ce médicament est sur le marché depuis 20 ans.
On va nous dire : « Eh bien, Superpharmacie illimitée, l'entreprise qui possède le brevet, nous affirme que vous continuez à enfreindre le brevet. » Lorsqu'on nie la chose on nous rétorque : « Quoi qu'il en soit, adressez-vous au tribunal pour régler la chose. » Voilà donc comment ça se passe.
Si ça se passait ainsi, si nous nous débarrassions de l'avis de conformité et si je pouvais aller dire à Santé Canada que je veux fabriquer le médicament, il me faudrait alors produire un médicament ayant la même composition chimique que celui qui figure dans le brevet d'origine, sinon je ne pourrais pas le vendre au Canada. Il ne s'agit donc pas d'une question de Santé, mais de pouvoir diffuser le médicament.
Il est facile pour des sociétés qui ont de l'argent de nous dire : « Nous allons vous traduire en justice », parce que ce sont elles qui fixent le prix de ce médicament et qui gagnent des milliards de dollars, ce qui leur permet de nous écarter du marché pendant encore deux ans ou deux ans et demi. Cela vaut la peine de payer ces avocats. Voilà à quoi se ramène cette question d'avis de conformité.
[Français]
M. Réal Ménard: Je comprends ce que vous voulez dire, et vous avez raison, mais on appelle cela un avis de conformité pour le deuxième détenteur.
Vous parlez de ceux qui veulent s'approprier le médicament une fois que le brevet a existé pendant 20 ans. Vous dites qu'il ne faut pas le prolonger, et je suis d'accord, mais vous ne voulez pas que Santé Canada n'ait pas de responsabilité quant à l'innocuité. Donc, on se comprend et je suis d'accord sur ce que vous avez dit.
Permettez-moi d'enchaîner avec une question à Mme Ford.
Je crois que les députés reçoivent votre bulletin. Il me semble l'avoir déjà reçu à mon bureau. Les témoins nous ont dit qu'ils souhaitaient que Santé Canada soit plus efficace dans son processus d'homologation, car il ne l'est pas tellement. Certains témoins pensent qu'il devrait y avoir une homologation conjointe, que si une monographie clinique est déposée à Washington, en Australie ou dans la Communauté européenne, il devrait y avoir un échange de données afin qu'on n'ait pas besoin de procéder à de nouvelles études cliniques.
Dans un des articles que j'ai lus, vous disiez être inquiets de l'harmonisation internationale de la réglementation sur les nouveaux médicaments. Cela veut-il dire que votre organisation est réfractaire à l'idée que le Canada n'ait pas son propre système d'homologation?
Á (1115)
Mme Anne Rochon Ford: Nous ne sommes pas vraiment contre cette idée, mais je crois que cela devrait être mieux étudié. Nous avons aussi produit un dépliant plus approfondi que l'article qui a été publié dans le bulletin.
Nos réticences quant à l'harmonisation internationale ont plus à voir avec les standards qu'on considère possibles pour tout le monde. C'est surtout là-dessus qu'on s'interroge, ainsi que sur le manque de vision quant aux effets des médicaments sur les femmes. Non, je ne crois pas qu'on ait parlé dans le bulletin de ne pas avoir ici, au Canada, un système pour approuver les médicaments.
M. Réal Ménard: Monsieur Lindsay, je ne sais pas si votre organisation à une position là-dessus. Les compagnies pharmaceutiques mettent en circulation beaucoup d'échantillons, qu'elles donnent à des médecins, à des professionnels de la santé.
Seriez-vous favorable à la création d'un registre à déclaration obligatoire? En d'autres termes, toutes les compagnies pharmaceutiques qui font circuler des échantillons qui ne sont pas vendus seraient tenues de les déclarer.s Nous pensons qu'il y a un lien entre les échantillons que l'on donne à des médecins et la faculté qu'on a de les prescrire.
Votre organisation s'est-elle penchée sur la question des échantillons mis en circulation par les représentants des compagnies pharmaceutiques?
[Traduction]
M. Len Harrison: À titre de précision, je suis Len Harrison. Voici Dean Lindsay.
Nous en avons discuté. Nous sommes contre tout démarchage. Vous savez que l'industrie pharmaceutique consacre des sommes considérables à l'envoi de démarcheurs auprès des médecins. Lorsqu'on envoie des démarcheurs, on obtient davantage de visites... Cela veut dire que le médecin va rédiger davantage d'ordonnances que ses homologues. Voilà donc pourquoi on envoie des démarcheurs. Par la même occasion, ils remettent des échantillons aux médecins. Nous sommes contre cette pratique.
C'est pourquoi nous voulons que l'on se penche sur les pratiques de l'industrie. Elle consacre davantage d'argent au démarchage, aux visites auprès des médecins et à la publicité qu'à la recherche. Il suffit de lire le mémoire de la Coalition canadienne de la santé, qui nous dit que les sociétés pharmaceutiques de notre pays ont un piètre dossier en ce qui a trait à la recherche menée sur les nouveaux médicaments. On parle ici des nouveaux médicaments.
Mais effectivement, nous sommes opposés à cette pratique. C'est en raison de ce qui se produit lorsqu'apparaissent de nouveaux médicaments—il faut aussi que vous le compreniez, parce que lorsqu'on présente ces médicaments... Il suffit de feuilleter la revue Prévention pour voir qu'à chaque page on reparle du même médicament et de ses avantages... Nous sommes les cobayes. On ne sait rien.
Voyez tout ce qui se passe aux États-Unis lorsqu'un nouveau médicament arrive sur le marché... ces médicaments sont distribués gratuitement pour que les gens s'habituent. Ce n'est pas une bonne chose, et nous y sommes opposés.
Mr. Réal Ménard: Madame Morgenthau, j'entends dire que vous avez bien des qualités et que vous faites un excellent travail à Toronto. J'aimerais avoir des renseignements au sujet de votre organisation.
Mme Lillian Morgenthau: Très bien. Je vous les ferai parvenir si vous me laissez votre carte.
Tout d'abord, madame la présidente, je me suis effectivement arrêtée à la page 5 parce que j'estimais que c'était la meilleure chose à faire. Il y a toutefois des pages de mon mémoire que je ne vous ai pas lues parce que vous pouvez toujours lire le texte, et parmi celles-ci il y avait un certain nombre de recommandations.
Si vous me le permettez, je vous signale qu'il vous faut faire figurer dans votre liste les effets secondaires indésirables des médicaments et leurs interactions avec d'autres médicaments, chose dont on n'a pas encore discuté. À ce sujet, nous avons fait une recommandation et exposé une solution qui nous paraît simple.
Nous estimons qu'il faut poursuivre la surveillance effectuée par les pharmaciens et les médecins. S'il y a des effets secondaires ou si les gens font de mauvaises réactions aux médicaments, c'est bien souvent parce que le malade prend un médicament sans suivre la bonne prescription ou arrête de le prendre sans en informer son médecin ou son pharmacien. Il faut donc à mon avis que le médecin surveille le malade. Le malade, lorsqu'il va voir un médecin, doit prendre tous ses médicaments pour qu'il n'y ait pas de mauvaises réactions.
Il convient de mettre en place un système informatique tenant compte des impératifs et de la protection de la vie privée afin que l'on puisse savoir combien de médecins consulte le malade, parce qu'il peut très bien arriver qu'il voit dix médecins, qui chacun font une ordonnance et qu'il y ait des interactions. Nous devons donc mettre en place un système permettant de nous assurer que le pharmacien suit son malade—en l'appelant au bout d'une semaine ou deux—ou que la secrétaire médicale du médecin téléphone au bout d'une semaine ou deux pour savoir ce que fait le malade et s'il n'éprouve pas des difficultés.
J'écoutais aussi ce qui se disait au sujet de la protection de 20 ans conférée par les brevets sur les médicaments. Bon, je reconnais que les sociétés pharmaceutiques font parfois des choses qui ne sont pas toujours nettes... Il n'en reste pas moins qu'elles obtiennent des brevets d'une durée de 20 ans. Cela ne signifie pas qu'elles ont 20 ans pour vendre le médicament protégé par le brevet, parce qu'à partir du moment où elles ont surmonté tous les obstacles et procédé à tous leurs essais, il ne leur reste plus 20 ans. Il leur reste moins que cela.
Je ne me fais pas l'avocate d'un médicament, mais j'aimerais que l'on fasse davantage de recherche. Je veux que l'on procède à des essais. Je souhaite effectivement que l'on puisse bénéficier des médicaments qui existent sur le marché.
On a vu un cas en C.-B. où l'on a tellement bloqué la procédure qu'il n'y avait plus aucune raison de mettre le médicament sur le marché car il allait tout de suite être concurrencé par les produits génériques.
L'apparition des médicaments génériques est ce qui pouvait arriver de mieux aux sociétés pharmaceutiques, parce qu'ils ont introduit la concurrence. Toutefois, ces sociétés ne sont pas des enfants de choeur, elles n'ont plus. Elles sont là, elles aussi, pour faire des profits. Nous pourrions peut-être aussi nous demander combien elles devraient en fait facturer leurs médicaments génériques.
Au sujet des publicités, soyons réalistes. Les publicités traversent la frontière. S'il doit y avoir des publicités, nous voulons qu'elles soient canadiennes pour que les résidents canadiens ne soient pas soumis à une publicité venue de l'autre côté de la frontière pour un médicament qu'ils ne peuvent pas se procurer et que... Notre population doit savoir ce que l'on peut obtenir au Canada. Nous devons véritablement nous demander ce que les Canadiens peuvent se procurer et le prix qu'ils peuvent payer.
Les personnes âgées n'ont pas les moyens de payer nos médicaments. Nombre de médicaments destinés aux personnes âgées ne figurent pas sur le formulaire. Je suis d'accord avec Gerda sur ce point. Il devrait y avoir un moyen de fournir aux personnes âgées les médicaments dont elles ont besoin lorsqu'elles ont le diabète, et je ne parle pas de l'insuline. Je parle de tout le reste.
Á (1120)
On ne parle pas beaucoup ici de la nécessité que les prix soient abordables. Personne au sein de ce groupe ne traite du coût des médicaments. Le coût des médicaments est un poste important du budget des personnes âgées, parce qu'elles ont des revenus fixes.
La présidente: Je dois vous arrêter ici, madame Morgenthau, parce que le temps de M. Ménard est écoulé.
Mme Lillian Morgenthau: J'ai pris tout son temps. Excusez-moi.
La présidente: Nous allons maintenant donner la parole à M. Castonguay.
[Français]
M. Jeannot Castonguay: Merci, madame la présidente. Merci à nos invités. Ma question, je crois, va s'adresser à Mme Rochon Ford.
Vous avez parlé de l'importance de l'éducation à l'égard des différents médicaments qui sont offerts sur le marché. Certaines compagnies pharmaceutiques nous parlent elles aussi d'éducation, mais dans leur cas, il est difficile de faire la distinction entre éducation et promotion. Croyez-vous que les compagnies pharmaceutiques ont un rôle à jouer pour ce qui est de l'éducation du public? Sinon, de qui cela devrait-il relever?
Je crois que nous nous entendons tous pour dire qu'il y a beaucoup d'éducation à faire, et pas uniquement auprès des personnes âgées. À cet égard, je vais vous parler du groupe des femmes. À mon avis, tous les Canadiens et Canadiennes doivent comprendre, comme le mentionnait M. Harrison, qu'il s'agit de produits chimiques qui ont un rôle à jouer, mais qu'il faut quand même savoir s'en servir. C'est un outil à deux tranchants: il peut être bon ou mauvais, selon la façon dont on s'en sert. J'aimerais entendre vos commentaires à ce sujet. Quelqu'un aimerait peut-être ajouter quelque chose.
Á (1125)
Mme Anne Rochon Ford: Je suis convaincue que les compagnies pharmaceutiques ont un rôle très important à jouer. En revanche, elles ne doivent pas être les seules à le faire. Les renseignements dont elles disposent et le fait qu'elles ont accès à la recherche et à des renseignements sur des produits qu'elles produisent elles-mêmes sont des facteurs très importants. Cependant, la contribution des chercheurs, des consommateurs et des groupes à but non lucratif, qui sont très engagés à l'égard de ces questions et qui possèdent des renseignements, différents peut-être, permettra d'établir une vue d'ensemble.
Le problème avec les renseignements qu'on reçoit dans les annonces est qu'ils ne représentent qu'une partie, souvent toute petite, de ce qu'il nous faut. Cela ne nous donne pas toute la gamme des possibilités existantes, incluant celle de ne pas intervenir avec des médicaments dans certains cas. Bref, je crois que les compagnies pharmaceutiques ont un rôle à jouer en ce qui a trait à certains médicaments ou états, mais pas de façon exclusive.
Dans le cadre d'un projet subventionné par Santé Canada, on a produit de bons exemples de renseignements tirés de plusieurs sources, entre autres des compagnies pharmaceutiques. J'en ai ajouté quelques exemplaires à ma présentation. Le problème est que le projet, si j'ai bien compris, est tombé à l'eau. C'est néanmoins un très bon exemple qu'on devrait encourager. Enfin, je dirai que je crois que les compagnies pharmaceutiques ont un rôle à jouer, mais qu'il faut aussi inclure ceux qui ont des choses très importantes à dire.
M. Jeannot Castonguay: À votre avis, qui devrait piloter un tel dossier? Je sais que des intervenants provenant de différents milieux devraient pouvoir faire valoir leurs intérêts. Or, il devrait tout de même y avoir un chef de file. Croyez-vous que la mise sur pied d'un tel groupe devrait être confiée à Santé Canada?
Mme Anne Rochon Ford: Oui. Je crois que le leadership devrait être assumé par notre gouvernement et que les autres intervenants devraient collaborer.
M. Jeannot Castonguay: Merci. Monsieur Harrison.
[Traduction]
M. Len Harrison: Il y a de nombreuses années, nous sommes allés voir Green Shield et un ou deux autres responsables afin d'obtenir des crédits devant nous permettre d'administrer un programme d'information sur les médicaments.
Depuis lors, nous avons été en mesure de négocier. Nous avons écrit à nos négociateurs, pas la dernière fois, mais la fois d'avant, pour leur demander que deux cents de l'heure soient prélevés sur chaque heure de travail de nos membres en activité afin d'être versés dans une caisse des travailleurs à la retraite. Nous avons obtenu un sou la première année, et encore un sou la deuxième et la troisième année. Dean est désormais le coordonnateur de cette caisse, qui se charge de notre programme d'information sur les médicaments.
Nous allons vous laisser un certain nombre de nos brochures. Ce ne sont que les grandes lignes de notre programme d'entraide entre les travailleurs à la retraite. Nous avons des pharmaciens qui interviennent. Nous organisons aussi des programmes d'exercice en salle à l'intention de nos travailleurs à la retraite, qui peuvent se présenter à différentes heures de la journée.
Nous avons donc en fait besoin que d'autres personnes prennent des engagements. Nous ne nous sommes pas contentés d'aller voir le gouvernement pour lui dire : « Donnez-nous davantage d'argent. Nous voulons faire telle ou telle chose. » Nous nous sommes dit : « Voilà ce que nous allons faire. C'est très important pour nous. » Nous nous sommes alors adressés à l'entreprise pour lui dire : « Ça va vous faire économiser de l'argent. Aidez-nous. »
Je pense qu'il faudrait pouvoir élargir la base et non seulement s'adresser à des groupes choisis susceptibles de nous donner de l'argent... mais aussi allez voir Santé Canada, ou tous les bailleurs de fonds susceptibles de s'intéresser à la question, pour aller encore plus loin afin que les travailleurs comprennent bien le problème. Tous les travailleurs de Chrysler ont probablement un ou deux parents qui vieillissent et qui éprouvent ce genre de difficultés. Nous pourrions leur signaler les dangers et faire en sorte qu'ils comprennent que tout ce qu'ingère le corps a son importance et qu'il convient de ne pas faire n'importe quoi.
Je pense que les sociétés pharmaceutiques devraient s'impliquer. Santé Canada, à mon avis, devrait s'impliquer, de même que General Motors, toutes les organisations syndicales du pays, toutes les autres organisations sociales et, bien sûr, toutes les organisations de personnes âgées.
Voilà quelle est l'étendue du problème quant à la consommation de médicaments par les personnes âgées.
La présidente: Mme Kaegi aimerait faire un commentaire.
Mme Gerda Kaegi: Je suis mère de quatre enfants et j'ai pu constater personnellement ce qui s'est produit lorsqu'un pédiatre de Winnipeg a prescrit un nouveau médicament à l'un de mes fils. Ce médicament lui a gâté les dents. Personne ne nous avait rien dit. Je sais que le médecin n'était pas au courant. On l'a su plus tard.
Aujourd'hui, lorsqu'on va dans une pharmacie, le pharmacien imprime la posologie et toutes les contre-indications. J'imagine que tous le font. Vous devez faire intervenir le corps des pharmaciens. Sur le plan de la formation, les médecins n'ont pas le temps de se renseigner sur tout cela, et c'est là toute la difficulté lorsqu'on fait de la publicité auprès des médecins, ce que vous avez eu raison d'indiquer avec d'autres intervenants. Ils reçoivent des échantillons, mais le problème c'est qu'ils ne savent pas vraiment quelles sont toutes les implications. Ils n'ont pas des connaissances suffisamment vastes. Le pharmacien est au courant, lui, et je considère que cela en fait une source d'information incontournable.
Si nous avions pu profiter de ces connaissances il y a une quarantaine d'années, les dents de mon fils n'auraient pas été endommagées.
C'est donc un problème essentiel. Il ne touche pas seulement les personnes âgées, il concerne les enfants.
J'ai siégé au sein du conseil consultatif s'occupant des foyers pour les personnes âgées de la région métropolitaine de Toronto. Nous accueillions 2 300 personnes âgées dans nos foyers et nous avions des services annexes. Un directeur des services médicaux, le Dr Murray Herst, desservait l'ensemble des foyers. Il est venu me dire un jour : « Je vais revoir l'ensemble des médicaments pris par chacune des personnes qui se trouve dans nos foyers. » Il a renvoyé des personnes chez elles. Elles étaient empoisonnées par les médicaments qu'elles prenaient.
Il s'agit donc d'informer les personnes concernées, et bien souvent, ce sont à mon avis les pharmacies qui doivent s'en charger. Bien évidemment, les gens peuvent toujours s'adresser à d'autres pharmacies et, si l'on pouvait instituer ce registre centralisé, on pourrait au moins protéger de nombreux consommateurs.
Excusez-moi de cette intervention.
Á (1130)
La présidente: Je vous en prie.
Madame Morgenthau.
Mme Lillian Morgenthau: Madame la présidente, on revient à ce que j'ai dit tout à l'heure : il faut exercer une surveillance. Avec de la surveillance, on évite les maladies.
La présidente: Monsieur Lindsay.
M. Dean Lindsay (coordonnateur national , Retraités, Syndicat des Travailleurs et travailleuses canadiens de l'automobile): J'attire l'attention de votre comité sur notre mémoire. À la page 3, nous parlons de la nécessité d'appuyer la création d'une agence nationale des médicaments chargée d'évaluer et d'homologuer tous les nouveaux médicaments d'ordonnance et de procéder en permanence à l'évaluation des médicaments existants.
Par ailleurs, à la suite d'une observation qui a été faite, je vous renvoie à nouveau à notre mémoire, à la page 7, où notre organisation se joint à l'Association médicale canadienne et à l'Association des pharmaciens du Canada pour s'opposer à toutes les formes de publicité faite directement auprès du consommateur. Je tiens à ce que ce soit bien clair. C'est la politique de notre organisation. Nous sommes opposés à cette façon de faire.
La présidente: Vous serez contents d'apprendre que pendant toutes ces semaines d'audience, nous n'avons pas encore entendu un témoin nous recommander la publicité faite directement auprès des consommateurs. Vous faites donc partie sans conteste de la majorité. Il semble d'ailleurs qu'il y ait unanimité sur ce point.
La parole est maintenant à Mme Bennett.
M. Jeannot Castonguay: Dans cette même veine, vous avez parlé de « surveillance ». Pour ma part, et j'aimerais connaître votre réaction, je me demande si vous ne pensez pas qu'il est plus important d'éduquer les gens? Il est plus important de leur apprendre à pêcher que de leur fournir le poisson.
Je n'ai pas l'impression que ça se situe uniquement au niveau des personnes âgées. Cette éducation, à mon avis, doit commencer très tôt, en faisant comprendre aux gens que ces médicaments ne sont pas des bonbons. Ils peuvent faire du bien, mais aussi du mal. J'aimerais savoir ce que vous en pensez. Si l'on est mis au courant de cette réalité tout jeune, on pourra peut-être mieux comprendre, une fois qu'on a mon âge, à quel point il est dangereux...
Mme Lillian Morgenthau: Êtes-vous déjà membre de CARP?
M. Jeannot Castonguay: Non, mais je vais prendre ma carte, parce que j'ai atteint l'âge requis.
Mme Lillian Morgenthau: Soyons réalistes. Vous avez raison. Tout ce que vous dites est absolument vrai, mais ce n'est pas pratique, parce qu'il y a bien trop de facteurs en jeu. Il y a de la publicité qui est faite; elle traverse la frontière; on ne peut pas l'arrêter. Comment va-t-on faire pour l'arrêter? On ne va pas pouvoir l'arrêter en bloquant simplement la publicité chez nous. Ce n'est pas que je la préconise; CARP n'y est pas favorable. Ce que nous demandons, c'est de pouvoir faire notre propre publicité pour contrer celle-là. On ne peut pas bloquer la publicité qui traverse la frontière et les gens sont demandeurs; par conséquent, pourquoi ne pas faire notre propre publicité avec nos propres règles? Fixons nos limites et nos règles; ne nous laissons pas guider par un autre pays.
Ce que vous venez de dire est vrai. Tout est exact, mais ce n'est pas réaliste. L'éducation commence au début.
J'estime qu'un médicament doit se justifier en soi. Il ne faut pas qu'il soit justifié par la publicité et que des quantités d'échantillons soient distribués aux médecins. Il est important de sensibiliser les médecins et les pharmaciens à la question.
Je ne sais pas ce qu'il en est pour les autres pharmaciens, mais notre pharmacien ne délivre aucun médicament tant qu'il n'a pas parlé au médecin et qu'il ne sait pas quels sont les autres médicaments qui sont prescrits et quelles sont les réactions qui vont avoir lieu. C'est pourquoi j'ai dit qu'il fallait un véritable réseau informatique pour savoir à combien de médecins le patient s'était adressé pour avoir une ordonnance. C'est à ce moment-là qu'il y a des réactions en chaîne. Ouvrez l'armoire de toilette d'une personne âgée, vous verrez qu'elle est pleine à craquer de médicaments.
Parlez aux responsables chargés de l'assainissement de nos eaux. Nos eaux sont polluées par les médicaments qui sont jetés dans les toilettes—des médicaments consommés à moitié. Nous devons faire l'éducation de notre population à ce sujet. Ce que l'on trouve surtout dans nos eaux, ce sont des pilules anticonceptionnelles. C'est peut-être la raison pour laquelle il y a tant de stérilité en milieu urbain.
Nous ne faisons pas l'éducation de notre population—vous avez tout à fait raison—mais il faut que l'information soit diffusée. Nous en faisons un peu ici, mais nous avons tous des revues que nous distribuons. Nous devrions indiquer aux gens dans nos revues ce qu'ils doivent et ne doivent pas faire. Il leur faut éviter de jeter des boîtes de médicaments à moitié consommées dans les toilettes. Vous avez donc raison.
Á (1135)
La présidente: Merci, docteur Castonguay.
Madame Bennett.
Mme Carolyn Bennett: J'aimerais revenir avec les témoins sur la question de l'agence des médicaments recommandée par la commission Romanow.
J'ai relevé dans le mémoire de la corporation des retraités canadiens intéressés que l'on faisait remarquer que cette agence allait à la fois acheter des médicaments et... Je m'inquiète quelque peu en fait que l'on puisse à la fois être le responsable de la réglementation et celui qui est chargé des transactions. J'ai entendu Mme Rochon Ford s'exprimer très clairement sur toute cette question de protection de la santé. J'aimerais savoir par conséquent, au cas où l'on aurait une agence—éventuellement une agence de protection de la santé—chargée de la réglementation, quel serait le mandat de cette agence. Que ferait-elle? Que ne ferait-elle pas? Pourrait-elle finalement négocier un formulaire commun, d'une façon qui pourrait être acceptable pour les provinces, comme nous l'espérons et comme il me semble que la commission Romanow l'a proposé, pour ensuite traiter des questions concernant les sexes, les enfants, les personnes âgées et tout ce qui a trait à la recherche?
Il faudrait peut-être que je m'arrête là. Quel serait le mode de fonctionnement à votre avis? Je pense aussi qu'on retrouve la même chose dans le mémoire des TCA. Il y a ensuite la question qu'il me semble avoir entendu poser, est-ce que Santé Canada doit en revenir à la promotion de la santé et à la prévention des maladies—ce qui est l'essentiel de sa mission—et laisser l'agence faire son travail de responsable de la réglementation?
Mme Gerda Kaegi: Si vous me permettez de répondre en premier, oui, je suis d'accord avec vous sur le dernier point : il est primordial à mon avis que Santé Canada en revienne à sa mission de promotion de la santé et de prévention des maladies.
En ce qui a trait à l'agence qui est proposée, nous partons du principe qu'effectivement, nous avons besoin d'une procédure d'homologation, d'essais et d'évaluation des médicaments. C'est fondamental. En outre, comme on a pu le voir dans l'étude du Conseil d'examen du prix des médicaments brevetés, de même que dans d'autres études, il y a très peu de nouveaux médicaments qui sont mis sur le marché. Même si l'on a enregistré plus de 1 100 nouveaux numéros de médicaments prescrits ces quatre dernières années, il y en a que quelque 68 qui sont vraiment nouveaux.
Nous devons procéder aux essais et à l'évaluation. Toutefois, j'envisage la question, et c'est ce que fait la corporation des retraités canadiens, sous l'angle des coûts. Oui, nous partons du principe que l'on va faire des essais; il faut les faire. Oui, il nous faut aussi négocier, ce que le Canada n'a pas fait selon les études qui sont publiées. Lorsqu'on achète en gros, on peut négocier les prix à la baisse.
Les prix payés par les OSSI aux États-Unis sont inférieurs de quelque 50 p. 100 à ce que paie la population des États-Unis lorsqu'elle n'est pas affiliée à une OSSI. Les recherches nous ont révélé que les provinces ne négociaient pas vraiment les prix à la baisse. Plus on a un gros marché, plus on peut faire baisser les prix. C'est l'intérêt que je vois à l'agence.
Mme Carolyn Bennett: Je pense que nous pouvons le faire collectivement. Je m'inquiète simplement de voir que ce soit là le travail de l'agence...
Á (1140)
Mme Gerda Kaegi: Non, non.
Mme Carolyn Bennett: ... parce que vous nous dites dans votre mémoire qu'il nous faut instituer une agence nationale des produits pharmaceutiques qui se chargerait d'acheter les médicaments.
Mme Gerda Kaegi: Oui, mais c'est Santé Canada qui se chargerait des essais—et des essais en bonne et due forme—l'agence étant le résultat au départ de la collaboration entre les provinces, les territoires et le gouvernement fédéral. C'est ce que nous préconisons. Nous partons du principe que l'évaluation serait faite en bonne et due forme et renforcée à Santé Canada.
Mme Carolyn Bennett: Les TCA devraient rédiger un mémoire concernant l'agence.
M. Dean Lindsay: Oui, c'est exactement ce que nous souhaiterions, que l'agence se charge de cette forme d'éducation. Grâce à l'agence, nous pourrions faire la formation que nous dispensons à l'heure actuelle par l'intermédiaire de notre programme de formation sur les médicaments, qui s'adresse uniquement aux personnes âgées. Nous le faisons aussi à l'intention de nos membres en activité. C'est une nécessité.
Mme Carolyn Bennett: Est-ce que vous vous en servez aussi pour faire de la surveillance de la publicité effectuée directement auprès des consommateurs? Il me semble que notre comité a entendu dire que ce qui se faisait dans le domaine était parfois contestable et que Santé Canada n'a pas le temps et l'énergie... Le contrôle se fait à partir des plaintes qui sont déposées—d'ailleurs il est bien possible que l'on ne donne même pas suite aux plaintes—on ne procède pas à des contrôles réguliers. Est-ce que vous seriez disposé à confier aussi cette tâche à l'agence?
M. Dean Lindsay: On pourrait évidemment faire de la formation dans ce domaine, et aussi de la surveillance—nous sommes opposés à toute forme de publicité directe auprès du consommateur—et faire appel pour cela à l'agence.
Mme Carolyn Bennett: Est-ce quelqu'un a quelque chose à ajouter?
Mme Lillian Morgenthau: Nombre de ces agences devraient faire appel aux représentants de certaines parties prenantes, parce qu'il y a aujourd'hui des gens qui ont une excellente formation en la matière. Notre population est très sensibilisée à la question. Il faudrait toujours faire intervenir les parties prenantes.
Mme Carolyn Bennett: Je suis d'accord avec vous. Vous prêchez une convertie.
Mme Lillian Morgenthau: Carolyn, il est impossible d'organiser un comité sans faire intervenir les parties prenantes. Ce ne doit pas être nous, nécessairement. On peut procéder par roulement.
Je suis heureuse que vous soyez d'accord avec moi.
Mme Carolyn Bennett: Anne m'a tout appris sur la question. C'est un sujet sur lequel il est important d'insister.
Mme Gerda Kaegi: J'estime que la commission Romanow a fait d'excellentes recommandations, notamment pour ce qui est de l'établissement d'un formulaire national ou commun concernant les médicaments. Je pense que ce qu'il nous faut—et la commission Romanow a évoqué en partie la question, mais il nous faut aller encore plus loin—c'est prendre du recul et examiner les autres modèles qui donnent de bons résultats ailleurs. Je n'ai pas ici l'exposé détaillé du modèle norvégien sur toute cette question du fonctionnement éventuel d'une agence des médicaments, mais je pourrais vous le faire parvenir si vous ne l'avez pas.
Mme Carolyn Bennett: Ce qui nous inquiète, j'imagine, que ce soit dans le cas d'une agence d'inspection des aliments ou de toute autre institution de ce type, c'est qu'en quelque sorte on s'efforce de protéger le public tout en cherchant à vendre nos produits. Il semble qu'il y ait là une certaine confusion. J'ai l'impression que vous nous dites que vous voulez que le volet correspondant à la protection soit net et bien réglé et que les autres tâches soient confiées à une autre institution.
Mme Anne Rochon Ford: Oui, et il y a des dérives. Je pense que le problème est là. Je considère que le volet de la protection, lorsqu'on a adopté la Loi sur les aliments et drogues et institué les différents services, fonctionnait bien en fait et que l'on faisait passer avant tout la prévention des maladies, la promotion de la santé et les impératifs de la santé publique. Je pense que ça se dégrade de nos jours, et c'est là notre grande préoccupation. Donc, si nous réussissons à faire passer notre message auprès de votre comité, j'espère que l'on assistera à une véritable relance de cette protection du public.
Je tenais aussi à mentionner—et je crois que Romanow en a effectivement parlé, mais il faudrait là encore examiner de plus près la question—qu'il convient que le Canada se penche plus sérieusement sur tout ce qui entoure le programme des médicaments essentiels de l'OMC. Il y a tellement de médicaments qui font double emploi sur le marché que cela ajoute à la confusion du public. Je pense qu'il nous faut en revenir à ce qui est essentiel et à ce dont nous avons véritablement besoin, et il est utile de ce point de vue d'étudier le modèle mis sur point par l'Organisation mondiale de la santé.
La présidente: Merci, madame Bennett.
La parole est maintenant à M. Masse.
Á (1145)
M. Brian Masse: Merci, madame la présidente.
Je vais commencer par poser une question à Mme Kaegi. Vous avez vraiment fait un excellent exposé. Vous y résumez un certain nombre de batailles qui ont dû être menées au sein du Comité de l'industrie depuis plus d'un an et demi.
Je ne peux que vous dire toute ma frustration et ma colère, et je ne sais même pas comment exprimer toute ma déception, en voyant que nous n'avons pas réussi jusqu'à présent à progresser sur la question des renouvellements à perpétuité. Hier encore, nous nous réunissions sur la question, et nous allons à nouveau le faire demain.
Il est intéressant de relever dans votre exposé que George Bush fait preuve d'un esprit progressiste comparativement à ce qui se fait dans notre pays, et c'est pourtant une réalité, parce que l'on a pris résolument des mesures aux États-Unis alors que nous restons le dernier pays à n'avoir rien fait. J'aimerais cependant que vous fassiez part à notre comité, parce que je juge important que l'on entende ce témoignage, de ce qu'il est advenu de votre plainte en tant que consommateur devant le Bureau de la concurrence. En effet, il s'agissait là d'un recours presque désespéré qui s'imposait en raison de l'absence de volonté politique qu'il faut bien constater pour l'instant. Pouvez-vous donc nous donner quelques précisions à ce sujet?
Mme Gerda Kaegi: Je vous remercie infiniment d'avoir posé cette question.
Oui, ce fut extrêmement intéressant. Il y avait six organisations en cause : la nôtre, le Syndicat national des employés et employées généraux du secteur public, l'Association des syndicalistes retraités du Canada, la Fédération canadienne des syndicats de personnel infirmier, la Coalition canadienne de la santé et l'Association des consommateurs du Canada. Voilà quelles étaient les six associations. Nous étions au désespoir. Il y avait des années que nous rongions notre frein, et nous avons entrepris cette démarche.
Le Bureau de la concurrence nous a répondu dans un premier temps qu'il n'était pas compétent pour nous entendre. Puis, j'imagine que certains événements qui ont eu lieu au printemps et qui ont amené éventuellement les débats qui se sont déroulés au Comité de l'industrie et à la Chambre des communes concernant le refus d'accepter d'autres interventions, par exemple... À un moment donné, le Bureau de la concurrence a changé d'avis et nous a dit qu'il était prêt à accepter notre réclamation.
Par la suite, nous avons été surpris d'être invités, avec très peu de préavis, à comparaître devant le bureau, ce que nous n'avons pas manqué de faire. Il se trouvait que j'étais de passage à Ottawa, et je suis donc restée. On nous a dit qu'on allait nous accorder une heure. Nous avons disposé de deux heures environ. Nous avons eu au moins l'impression que quelqu'un était disposé à se pencher sur les pratiques liées aux monopoles.
Les responsables politiques n'étaient pas disposés à agir. Ils avaient examiné la question, mais n'étaient pas intervenus. Nous espérons donc que si vous ne pouvez rien faire, le Bureau de la concurrence pourra éventuellement faire quelque chose. Nous sommes loin d'être convaincus, mais nous avons beaucoup d'espoir. Au moins, cela ouvre une autre possibilité. Nous aimerions cependant que vous agissiez.
M. Brian Masse: Nous sommes un certain nombre à continuer à oeuvrer en la matière et à y croire. Hier encore, nous examinions une situation qui fait que pour qu'un produit générique puisse remplacer un médicament déjà sur le marché depuis 20 ans, il faut pouvoir surmonter tous les obstacles que posent les différents brevets qui ont déjà été déposés, et c'est l'une des difficultés en la matière. Il ne s'agit pas de produire en se conformant à un seul brevet, il faut en fait se conformer à plusieurs d'entre eux.
Je vais maintenant passer à autre chose et m'adresser à Mme Rochon Ford. Vous avez parlé, je crois, des jeunes et de leur vulnérabilité face à la publicité, pas seulement celle qui passe à la télévision. On parle toujours de la télévision, et j'habite près de la frontière, de sorte que je reçois toutes ces publicités dans lesquelles, à la fin... Ces publicités nous montrent une quantité de gens qui sont satisfaits et très contents, ils reçoivent toute cette information au sujet des médicaments et ils disposent ensuite de deux minutes environ pour se pencher sur tous les effets secondaires pernicieux.
Vous pourriez peut-être nous dire quelques mots de la vulnérabilité de certains jeunes face à la publicité dans les revues et sur d'autres supports, tels que l'Internet, que nous ne devons pas oublier de surveiller, j'imagine.
Mme Anne Rochon Ford: C'est évidemment un gros problème parce qu'il est transfrontalier, mais aussi en raison de la multiplicité des médias, comme vous venez de l'indiquer.
Il y a aussi les affiches dans les toilettes des universités et des écoles secondaires ainsi que toute l'information qui est donnée dans les cliniques de contrôle des naissances.
Le problème, c'est que les gens qui font passer des messages utiles et bien informés manquent de crédits et doivent se faire entendre dans cette cacophonie causée par un surcroît d'information. C'est très difficile, notamment pour les jeunes, qui font leur apprentissage sur toute cette question et qui ne savent pas faire la distinction.
Une bonne chose que l'on voit apparaître dans certaines écoles secondaires, c'est que l'on enseigne la nécessité de faire preuve d'un esprit critique face à la publicité et aux réclames. Ce n'est pas encore assez répandu et j'aimerais qu'on le fasse davantage, mais j'estime que c'est un très bon début et qu'il serait bon que votre comité fasse une recommandation en ce sens.
M. Brian Masse: Est-ce qu'il serait bon d'être en contact avec les centres de santé communautaires? Dans ma circonscription, il y a des centres de ce type qui permettent d'agir directement et d'intervenir en personne plutôt que de s'en remettre, par exemple, à la distribution de brochure ou à la diffusion d'un message général.
Mme Anne Rochon Ford: Oui, j'estime que les centres de santé communautaires sont un lieu privilégié, mais il me paraît important de faire d'abord porter nos efforts dans les endroits que fréquente le plus les jeunes—leurs écoles, les cliniques de contrôle des naissances, les cafés Internet. Ce sont les lieux qu'ils fréquentent.
Je n'ai pas recueilli d'exemples précis, mais dans les pubs des campus universitaires, Berlex, le fabricant de Diane-35, un médicament qui traite les cas d'acné graves, affiche désormais des publicités, et c'est ce que l'on peut voir aujourd'hui. Ce médicament sert aussi de produit de contrôle des naissances; il n'est pas homologué à ce titre, mais il fait office de contrôle des naissances. Les jeunes filles en entendent parler autour d'elles, elles voient cette publicité, qui confirme leur impression, et elles obtiennent une mauvaise information sur la sécurité qu'offre ce médicament. Ce n'est pas un médicament qui offre des garanties de sécurité pour le contrôle des naissances; sa toxicité pour le foie est considérable, et il n'a pas été homologué à ce titre chez nous comme à l'étranger.
Il y a donc des renseignements erronés qui sont donnés, et surtout dans les endroits que fréquentent le plus les jeunes. Il faut donc à mon avis contrecarrer cette information en affichant des renseignements précis et exacts dans les mêmes endroits.
Á (1150)
M. Brian Masse: Oui, et lorsqu'on prend aussi d'autres médicaments, j'imagine que c'est tout un cocktail, alors que ces jeunes sont en plein développement.
J'ai gardé ma dernière question, madame la présidente, pour les TCA.
La présidente: Très rapidement, parce qu'il ne vous reste pratiquement plus de temps.
M. Brian Masse: Quelle est la complexité de l'opération que vous avez menée à bien avec Green Shield? Si le gouvernement prenait l'initiative, serait-il possible que d'autres groupes et d'autres organisations emploient ce genre de stratégie? J'apprécie ce travail de sensibilisation sur le terrain. Nous y sommes habitués dans la région d'où je viens et où nous sommes obligés d'en revenir à ce genre de choses. Est-ce une pratique qui peut se transmettre à d'autres groupes et à d'autres organisations?
M. Len Harrison: Dans la pratique, j'ai contacté par téléphone Green Shield, j'ai demandé une certaine quantité d'argent et nous en avons discuté. Je connaissais certains responsables à Green Shield qui m'ont dit « L'idée nous paraît excellente », et nous avons donc mis sur pied un programme.
Je suis ensuite allé voir une autre entreprise et je lui ai demandé 25 000 $ pour administrer le programme pendant un an. Le responsable à l'autre bout du fil a immédiatement accepté. Après avoir posé le téléphone, j'ai dit « Zut. » Mon collègue, Johnny Dobbin, qui a en fait mis sur pied le programme, m'a demandé ce qui se passait. Je lui ai répondu « De toute évidence, je n'ai pas demandé assez d'argent. »
Des voix : Oh, oh!
M. Len Harrison: Nous avons donc élaboré le programme. Nous n'avons pas cherché à réinventer la roue, nous sommes allés recueillir toute l'information disponible et nous avons dispensé des cours personnalisés.
Nous ferons parvenir à votre comité le programme exact du cours et la façon dont il est administré. C'est Dean qui s'en charge et qui a révisé ce cours depuis son arrivée. Toutefois, la première fois que nous l'avons donné, nous nous sommes adressés à un groupe de personnes très choisies, et tout s'est parfaitement passé partout où nous sommes allés. Nos responsables ont reçu une formation pour le dispenser.
Ce ne sont pas des gens qui vont vous dire ce qui ne va pas au sujet de votre santé. Si vous avez quelque chose qui ne va pas, ils vont vous conseiller d'aller voir votre pharmacien. C'est leur rôle. Le pharmacien communique avec les malades et ces derniers lui parlent de leur santé. Les gens disent qu'ils sont gênés et qu'ils ne savent pas comment parler aux médecins; parfois ils ont un blocage dans le cabinet du médecin. On raconte cette histoire d'une femme qui accompagnait une amie chez le médecin et qui lui a dit : « N'oublie pas de lui poser des questions. » Une fois sortie du cabinet, cette amie, qui n'avait pas posé de questions a déclaré : « Bon, s'il avait voulu savoir quelque chose, il me l'aurait demandé. » Nous apprenons donc aux gens à mieux se comporter dans cette situation. Nous leur donnons aussi un guide d'information sur les médicaments, qui dresse la liste de tous les médicaments.
Pour terminer rapidement, lorsqu'on me dit aujourd'hui que Shoppers Drug Mart passe en revue la liste de tous les médicaments prescrits à leurs clients, je réponds que ce n'est pas là la solution, parce que cette liste ne comprend pas tous les produits que l'on ingère. À l'heure actuelle, certains des produits les plus dangereux ne sont pas prescrits par ordonnance.
M. Dean Lindsay: Laissez-moi ajouter que l'une des réussites de ce programme, c'est la formation que l'on donne aux personnes âgées. Nous avons par conséquent des retraités et des personnes âgées qui viennent entretenir d'autres personnes âgées des questions liées à l'abus de médicaments, aux mauvaises utilisations, etc.
Toutefois, pour répondre directement à votre question, nous avons aussi des professionnels de la santé qui interviennent dans le cadre du programme. Des médecins et des pharmaciens interviennent, et les gens peuvent donc leur poser des questions précises à la fin de la séance. Toutefois, pendant toute la séance, ce sont des personnes âgées qui s'adressent à d'autres personnes âgées sur toutes les questions liées à la base aux médicaments, à leur usage et aux abus.
La présidente: Merci, monsieur Masse.
Monsieur Barrette.
[Français]
M. Gilbert Barrette: Merci, madame la présidente. Bonjour.
Je suis en partie d'accord avec Mme Morgenthau quand elle dit que les médicaments ont donné lieu à une meilleure qualité de vie, qu'ils permettent des séjours moins longs dans les centres hospitaliers ou qu'ils permettent même, dans certains cas, d'éviter l'hospitalisation.
Par contre, je sais que dans les centres d'accueil, pour toutes sortes de raisons, on fait grand usage des médicaments. Je sais aussi que nombre de nouveaux médicaments mis sur le marché n'apportent malheureusement aucune amélioration. Cela me préoccupe et m'agace beaucoup.
M. Harrison nous a parlé des médicaments, et je m'attendais, à la fin, à ce qu'il nous recommande de les bannir. Selon ses propos, les médicaments mènent à l'hospitalisation et à la mort. J'ai probablement mal compris, mais c'est pourtant ce que j'ai entendu. J'aimerais qu'il nous donne plus de détails sur cette question.
Á (1155)
[Traduction]
M. Len Harrison: Je n'ai jamais laissé entendre que les médicaments n'avaient aucune utilité; ce que je vous dis, c'est que si j'ai besoin de prendre des médicaments, je vais aller voir mon médecin et lui en parler.
D'ailleurs, il y a des années, je suis allé voir mon médecin parce que j'avais la grippe. Je crains la grippe, parce que mon père est mort de la grosse grippe asiatique alors qu'il avait 50 ans lors de grosse épidémie qui a sévi en 1957. En auscultant mes bronches, ma doctoresse m'a dit : « Non, Len, tout va bien ». Elle a ajouté : « Je vais vous donner cette ordonnance. Rentrez chez vous, reposez-vous, buvez beaucoup de liquide et dans sept ou huit jours vous irez mieux. » Je lui ai demandé : « Quelle ordonnance? » Elle m'a répondu : « Des antibiotiques. » Je lui ai dit alors : « Je ne veux pas d'antibiotiques. Les antibiotiques ne font rien contre la grippe », et je lui ai rendu l'ordonnance. « Et maintenant qu'est-ce que je fais? » lui ai-je demandé. Elle m'a répondu : « Eh bien, rentrez chez vous, prenez de l'Aspirine et du Tylénol, buvez beaucoup de liquide et dans sept ou huit jours vous allez vous sentir mieux. »
Des voix : Oh, oh!
M. Len Harrison: C'est le problème avec les médicaments. Quand on a 28 p. 100 de sa population qui est admise à l'hôpital, il faut faire quelque chose.
Ma femme prend des médicaments contre la tension sanguine, et les médecins contrôlent très bien sa tension. Elle fait un régime, de l'exercice et elle prend bien ses médicaments; c'est ce qu'il faut faire.
Non, les médicaments peuvent donner d'excellents résultats mais la difficulté, si nous ne sommes pas raisonnables, c'est qu'ils peuvent causer aussi bien des malheurs.
[Français]
M. Gilbert Barrette: Que pensez-vous du marché d'Internet? Croyez-vous qu'il soit sûr pour les consommateurs, particulièrement pour les personnes d'un certain âge? Est-ce qu'il peut entraîner une consommation accrue et incontrôlée de médicaments?
[Traduction]
Mme Gerda Kaegi: Oui. Cela nous ramène à ce que nous avons dit tout à l'heure. Le problème—et Lillian Morgenthau l'a évoqué tout à l'heure—c'est que si certaines personnes s'adressent à différentes sources, elles courent des risques, et cela nous renvoie à la nécessité d'éduquer les gens. Si l'on prend des risques, et c'est ce que nous faisons bien souvent dans notre vie quotidienne, il arrive qu'on en subisse ensuite les conséquences. Bien des gens, toutefois, ne comprennent pas à mon avis les risques qu'ils courent lorsqu'ils prennent des médicaments—et des médicaments qui ne sont pas prescrits par ordonnance, parce que nous savons que les produits de la médecine naturelle peuvent eux aussi très dangereux.
C'est donc une question d'éducation, et je suis favorable à une intervention dans les écoles secondaires, auprès des parents de ces enfants, en faisant comprendre à chacun qu'il faut réfléchir avant d'ingérer quoi que ce soit—pensez avant d'agir. On a pu voir des manchettes dans les journaux ce matin au sujet des acides gras saturés—je pense que c'est de cela dont il s'agissait—nos enfants grignotant des produits alimentaires qui leur font terriblement du mal, et nous le payons à l'heure actuelle. À mon avis, mieux nous éduquons les jeunes et leurs parents—à tous les âges—plus nous serons en sécurité. Ces pharmacies qui vendent par Internet n'auront pas alors les succès qu'elles ont à l'heure actuelle.
Laissez-moi cependant vous préciser une chose. À mon université, où je suis professeur émérite, je suis inondée de courrier; hier soir je n'ai même pas pu consulter mon courriel. J'avais reçu 106 messages publicitaires dont la plupart ne sont même plus de nature sexuelle, même s'il en reste quelques-uns; il s'agissait de publicité sur les médicaments. On m'informait que je pouvais recevoir des médicaments dans les 24 heures. C'est une mauvaise chose et c'est dangereux; il nous faut d'une façon ou d'une autre faire comprendre au public qu'il ne doit pas y toucher et faire cesser les activités de ces entreprises. Malheureusement, il y a trop de gens crédules qui marchent dans cette combine. C'est cependant une chose qui me met systématiquement en colère.
Excusez-moi. Je ne sais pas si ça peut vous aider.
Mme Anne Rochon Ford: Puis-je ajouter une chose sur ce point?
Tout cet apprentissage de la pensée critique commence très tôt, et il y a d'excellents modèles. Il y a 30 ans, je me rappelle qu'à l'école secondaire nous disséquions les publicités à la télévision, et ça m'a vraiment fait prendre conscience du problème. Il existe d'excellents modèles. Malheureusement, il suffit souvent d'une mère qui déclare que son mari travaille dans l'industrie pharmaceutique, par exemple, qu'elle est opposée à ce genre de procédé et qu'elle n'aime pas ce que l'on fait. Il y a donc certains conflits en la matière. Je considère toutefois que c'est là un moyen vraiment essentiel de s'adresser aux jeunes, de les guider, de se pencher sur les publicités et sur l'Internet avec eux et de leur apprendre à disséquer l'information.
 (1200)
La présidente: Merci, monsieur Barrette.
Puisque je ne vois plus de mains qui se lèvent, je vous remercie au nom du comité de votre contribution. J'espère que M. Harrison ne pourra pas dire dans quelques années qu'il a encore fait son possible mais que rien ne s'est produit.
Il y a toujours des intérêts contradictoires dans ce domaine, comme M. Masse est en train de l'apprendre. Il estime que les délibérations du Comité de l'industrie sont frustrantes cette année. J'ai siégé au sein de ce comité en 1994 lorsque nous avons revu complètement la question de l'avis de conformité et des injonctions automatiques, et c'était très décourageant.
Le travail est toutefois plus facile dans le cadre du Comité de la santé, parce que notre rôle ici est de protéger la santé, de prévenir les maladies, les contre-indications, etc. Notre mandat est donc très clair alors que dans le cadre des interventions du Comité de l'industrie, dont le mandat est d'appuyer et de promouvoir l'industrie, tout est plus difficile.
Je pense que vous serez satisfaits de nos recommandations, mais quant à savoir si le ministre de l'Industrie va faire ce que nous préconisons, c'est une toute autre affaire.
M. Len Harrison: Je tiens à vous dire, puisque vous avez rencontré certains représentants des employés à la retraite de notre section locale 707 au cours de l'un de nos déplacements à Ottawa que lors de leur retour ces derniers n'ont pas tari d'éloges sur votre compte. C'est ce que m'a dit Kevin.
Mme Anne Rochon Ford: Puis-je vous demander simplement quel est le lien entre ce que vous faites ici et l'ensemble du mécanisme de renouvellement législatif qui est mis en oeuvre? Comment vont se situer vos recommandations dans ce cadre? Est-ce que les échéanciers...
La présidente: Qu'entendez-vous par renouvellement législatif?
Mme Anne Rochon Ford: Eh bien, la procédure mise en route par le bureau de renouvellement législatif, les audiences qui se tiennent dans tout le pays en ce qui concerne les propositions de changements qui doivent être apportés à la Loi sur les aliments et drogues et à la nouvelle Loi canadienne de la protection de la santé.
La présidente: Qu'est-ce que le bureau de renouvellement législatif? J'en n'ai aucune idée. Nous sommes en relation avec la ministre de la Santé. Nous la conseillons. Elle n'exerce aucun contrôle sur la réglementation des avis de conformité et sur les injonctions automatiques.
Mme Anne Rochon Ford: À Santé Canada, un bureau de renouvellement législatif a été mis sur pied pour modifier précisément les nombreux textes législatifs qui relèvent de la Loi sur les aliments et drogues. On propose l'adoption d'une nouvelle loi sur la protection de la santé.
La présidente: La ministre nous demande à l'occasion de procéder à des études sur des sujets donnés. Elle ne nous a pas invité à prendre part à celle-ci.
Il s'agit là d'un exercice purement administratif et cela me gêne en fait quelque peu d'apprendre qu'on parle de renouvellement « législatif », étant donné qu'il ne s'agit pas ici de législateurs. On aurait dû parler de renouvellement « administratif », parce que ce sont des administrateurs qui s'en chargent. J'en parlerai à la ministre. Il est ridicule d'appeler renouvellement législatif une opération qui est menée exclusivement par des administrateurs à la demande de leur ministre. C'est pourquoi il est évidemment bien normal que vous nous posiez la question étant donné que nous sommes les législateurs. Toutefois, autant que je puisse le savoir, il n'y a rien là qui ait à voir avec la législation.
Mme Anne Rochon Ford: Ils proposent la législation que vous allez ensuite devoir examiner. C'est la façon dont on procède.
La présidente: On nous prépare une législation sur que sujet?
Mme Anne Rochon Ford: Au sujet de la Loi sur les aliments et drogues.
La présidente: Ah, la Loi sur les aliments et drogues. Je ne parlerai pas dans ce cas de renouvellement législatif. Il s'agit de réviser la Loi sur les aliments et drogues, de préparer des modifications ou une nouvelle loi.
Mme Anne Rochon Ford: Quand allez-vous faire part de vos conclusions à l'issue de ces audiences?
La présidente: Bon, nous savions, lorsque nous avons commencé, que nous allions procéder à un examen très général. Lorsque nous nous sommes penchés sur les techniques de reproduction, il nous a fallu deux ans, et il ne m'étonnerait pas que là aussi ça dure deux ans. Cela ne veut pas dire, toutefois, que nous n'allons pas publier un rapport. Nous espérons pouvoir présenter un rapport intérimaire avant que la Chambre ne cesse ses travaux, si nous pouvons nous entendre autour de cette table. Je ne peux pas vous promettre un rapport avant que la Chambre ajourne ses travaux pour Noël, mais c'est ce que nous avons prévu.
Toutefois, pour que nous puissions produire un rapport, il nous faudra bien entendu obtenir l'accord de la majorité des membres du comité.
Mme Anne Rochon Ford: Il serait extrêmement utile que vous puissiez prendre en compte dans ce rapport de tout ce que vous entendez dire dans le pays. Il y a une série d'audiences publiques organisées dans tout...
 (1205)
La présidente: Dans quel cadre?
Mme Anne Rochon Ford: Dans le cadre de cette procédure administrative qui se déroule en même temps. En effet, il y a de nombreux témoins qui comparaissent lors de ces mêmes audiences sur ces mêmes questions.
Donc, du point de vue des consommateurs et des citoyens du Canada, il est bien difficile de ne pas être frustrés en voyant qu'on leur demande à maintes reprises de venir dire les mêmes choses sur les questions qui entourent les médicaments d'ordonnance.
Il serait extrêmement utile qu'il y ait une coordination entre les deux opérations. C'est Len Kuchar qui est à la tête du bureau de renouvellement législatif à Santé Canada.
La présidente: C'est le principal administrateur chargé de cette opération? Ah, j'ai bien hâte de lui téléphoner. Je suis tout à fait scandalisée qu'on tienne des audiences sur le même sujet.
Ça porte sur les médicaments d'ordonnance? Et les audiences se tiennent là aussi dans tout le pays?
Mme Anne Rochon Ford: Oui.
La question est plus vaste... il y a d'autres lois, la Loi sur la quarantaine et d'autres législations qui relèvent de cette compétence, mais l'on discute principalement de la question des médicaments d'ordonnance. On a présenté un document sur la santé et la sécurité, qui fait état des recommandations au sujet des changements devant être apportés à la loi. On y traite de questions telles que la publicité faite directement auprès des consommateurs. Tout ce dont nous avons parlé aujourd'hui y figure.
La présidente: Nous n'avons aucun vent de cet exercice, en dépit du fait que les fonctionnaires de Santé Canada ont été parmi les premiers à être entendus comme témoins lorsque nous avons entrepris cette étude. Inutile, donc, de vous dire qu'en raison de ce que vous venez de me révéler, il va y avoir quelques remous à Ottawa la semaine prochaine.
M. Brian Masse: Combien de gouvernements fantômes avez-vous?
La présidente: Nous n'en avons point.
Si jamais votre parti prend un jour le pouvoir, vous verrez qu'il est bien difficile de contrôler l'administration.
Merci d'avoir pris le temps de venir ce matin.
La séance est levée.