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Je vois que tous les membres du Comité sont présents et que les témoins sont prêts. Je déclare donc la séance ouverte.
Bienvenue à la huitième séance du Comité permanent du commerce international de la Chambre des communes. La séance d'aujourd'hui se déroulera selon une formule hybride, conformément à l'ordre de la Chambre, adopté le 23 septembre. Les délibérations sont accessibles sur le site Web de la Chambre des communes.
Voici quelques règles à suivre pour le bon déroulement de la réunion. Les députés et les témoins peuvent s'exprimer dans la langue officielle de leur choix, car des services d'interprétation sont offerts. Au bas de votre écran, vous avez le choix entre le parquet, l'anglais ou le français. Les membres du Comité qui assistent à la réunion en personne devront procéder comme ils font normalement lorsque l'ensemble de leurs collègues sont présents dans la salle. N'oubliez pas de suivre les directives du Bureau de régie interne concernant le port du masque et les protocoles de santé.
Avant de prendre la parole, veuillez attendre que je vous nomme. Si vous assistez à la réunion par vidéoconférence, veuillez cliquer sur l'icône du microphone pour activer votre micro. Pour ceux qui sont dans la salle, leur microphone sera contrôlé, comme d'habitude, par l'agent chargé de la procédure et de la vérification. Lorsque vous ne parlez pas, vous devez mettre votre microphone en sourdine.
Conformément au paragraphe 108(2) du Règlement, le Comité reprend son étude sur les échanges commerciaux entre le Canada et le Royaume-Uni pour un éventuel accord commercial de transition.
J'aimerais souhaiter la bienvenue à tous nos témoins d'aujourd'hui. Nous accueillons deux représentants de la Canadian Cattlemen's Association: Doug Sawyer, président du comité du commerce extérieur, et Fawn Jackson, directrice des relations gouvernementales et internationales. Nous recevons également Matthew Poirier, directeur de la politique de commerce international, de l'organisme Manufacturiers et exportateurs du Canada. Nous entendrons également Paul Lansbergen, président du Conseil canadien des pêches. Enfin, nous recevons Daniel Gobeil, président des Producteurs de lait du Québec, ainsi que son collègue, François Dumontier, directeur des communications, des affaires publiques et de la vie syndicale.
Merci beaucoup.
Monsieur Sawyer, voulez-vous commencer, je vous prie?
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Merci, madame la présidente.
Bonjour, tout le monde, ou bonsoir pour certains d'entre vous.
Je m'appelle Doug Sawyer et je suis éleveur de bétail ici, à Pine Lake, en Alberta. Je suis également membre du conseil d'administration de la Canadian Cattlemen's Association, la voix nationale de 60 000 éleveurs de bovins d'un bout à l'autre du pays.
Je suis accompagné aujourd'hui de Fawn Jackson, directrice des affaires gouvernementales et internationales de la Canadian Cattlemen's Association, ou CCA.
Nous vous remercions de nous donner l'occasion de vous parler de l'accord commercial provisoire avec le Royaume-Uni, qui a été récemment annoncé.
Avant d'entrer dans les détails, j'aimerais souligner notre message clé, à savoir que nous encourageons fortement un retour rapide à la table des négociations pour établir un accord de libre-échange permanent et ambitieux avec le Royaume-Uni.
L'industrie du bœuf est l'un des plus grands secteurs agricoles du Canada; à preuve, elle soutient 228 000 emplois et contribue au PIB canadien à hauteur de 17,9 milliards de dollars. Le bœuf canadien et le matériel génétique connexe sont vendus sur 58 marchés dans le monde entier, et nous exportons environ 50 % de notre production.
Tous les Canadiens ont été durement touchés par la COVID, mais l'agriculture se démarque des autres secteurs, car elle constitue un élément vital et résilient de notre économie. Selon Exportation et développement Canada, les exportations agricoles du Canada augmentent trois fois plus vite que la moyenne canadienne globale, ce qui confirme que les produits agricoles sont une source nette de liquidités pour les Canadiens et l'économie canadienne, ainsi qu'un domaine de croissance permanente. Voilà, en effet, un contexte important pour nos discussions d'aujourd'hui sur les échanges commerciaux, tant du point de vue de la relance que de celui des avantages économiques à long terme pour le Canada.
En ce qui concerne un accord de continuité entre le Canada et le Royaume-Uni, j'aimerais faire les observations suivantes. En 2019, le Canada a exporté pour environ 19 millions de dollars de bœuf vers le Royaume-Uni, alors que le Royaume-Uni en a exporté pour 16 millions de dollars vers le Canada. Jusqu'à maintenant, cette année, nous sommes bien partis pour accroître de plus de 20 % nos exportations de bœuf vers le Royaume-Uni, alors que le Royaume-Uni est en voie d'accroître de 160 % ses exportations de bœuf vers le Canada. Cela signifie que, cette année, le Royaume-Uni sera deux fois plus avantagé que le Canada sur le plan de la valeur des échanges commerciaux.
Malgré la croissance des exportations canadiennes vers l'Union européenne et le Royaume-Uni, la CCA demeure préoccupée par les obstacles qui empêchent le Canada d'atteindre son plein potentiel dans le cadre de l'Accord économique et commercial global, ou AECG. Je me dois de parler de l'AECG, car bien que nous n'ayons pas vu les détails de l'accord de continuité entre le Canada et le Royaume-Uni, nous savons que les négociations avaient pour seul mandat de reproduire l'AECG autant que possible. Certes, la CCA salue les efforts du gouvernement du Canada pour maintenir un accès ininterrompu au marché britannique, mais elle est tout de même préoccupée de voir que les obstacles liés à l'Union européenne sont reproduits dans l'accord avec le Royaume-Uni.
Par conséquent, nous accordons une grande importance au fait que l'annonce du gouvernement comprenait l'engagement de reprendre les pourparlers d'ici un an. Nous avons hâte d'examiner le texte complet de l'accord de continuité dès qu'il sera disponible et de discuter avec le gouvernement des lacunes à combler dans un futur accord de libre-échange à long terme.
Pour commencer, nous constatons qu'aux termes de l'AECG, l'Union européenne bénéficie d'un accès illimité en franchise de droits aux marchés canadiens du bœuf, tandis que les exportations canadiennes sont, elles, soumises à des contingents tarifaires. À notre sens, cette iniquité persiste dans l'accord de continuité entre le Canada et le Royaume-Uni en raison du mandat de reconduction.
Bien que le gouvernement n’ait pas encore indiqué la quantité de boeuf canadien qui va pouvoir accéder au marché du Royaume-Uni aux termes de l’Accord de continuité commerciale Canada-Royaume-Uni, nous comprenons que son objectif était d’arriver à une quantité suffisante pour permettre à ceux qui sont intéressés par la production du boeuf et par sa commercialisation au Royaume-Uni de continuer au cours des deux prochaines années, mais avec peu de possibilités de croissance — et certainement pas assez pour égaler la croissance des exportations britanniques attendues au Canada.
Nous aimerions souligner à nouveau que cette année, la valeur des exportations de boeuf britannique vers le Canada devrait être le double de celle des exportations de boeuf canadien vers le Royaume-Uni. Nos exportations vers le Royaume-Uni et l’Union européenne augmentent, certes, mais le bœuf britannique se porte à merveille au Canada, et il n'est pas irréaliste de penser que ces exportations vers le Canada pourraient être de quatre ou cinq fois supérieures aux nôtres au cours des deux prochaines années.
Dans un futur accord, il serait impératif de voir à ce que les secteurs de la viande bovine du Canada et du Royaume-Uni puissent profiter de façon égale de cette relation et développer cette relation. Il serait tout aussi important de faire en sorte que les facteurs qui limitent actuellement la croissance de nos exportations de boeuf soient supprimés.
Nous préconisons également la notion d'« approbation complète des systèmes » tant dans l’accord de transition que dans l’accord à long terme. Le Canada dispose de systèmes de sécurité alimentaire et d’inspection des viandes de calibre international, et ces systèmes sont reconnus par la plupart des pays vers lesquels nous exportons par l'intermédiaire de cette approbation complète des systèmes. L’approbation complète des systèmes repose sur le fait que les deux parties ont confiance dans les protocoles et la conformité de leur vis-à-vis. Bien que nous comprenions que l’obtention d’une telle confiance mutuelle avec les 28 États membres de l'Union européenne soit un défi de taille, c'est probablement avec le Royaume-Uni que nous sommes les plus proches, ce qui nous porte à croire que l'approbation complète des systèmes est tout à fait réalisable dans un contexte bilatéral.
Enfin, nous voudrions que le Royaume-Uni s’aligne sur les lignes directrices internationales et supprime les exigences imposées par l’Union européenne aux termes desquelles le bétail doit être élevé sans recourir aux technologies modernes qui nous permettent d'utiliser efficacement nos ressources, comme les implants hormonaux et les additifs alimentaires.
Nous considérons tous ces objectifs comme une étape naturelle vers une future adhésion du Royaume-Uni à l'Accord de partenariat transpacifique global et progressiste, adhésion pour laquelle il a manifesté de l'intérêt.
Je voudrais également formuler une observation sur le commerce et l’environnement, qui s’applique peut-être plus largement qu'au seul contexte Canada-Royaume-Uni. L’environnement est une priorité essentielle pour nous tous, en particulier pour ceux d’entre nous qui vivent et travaillent dans cet environnement. Nombreux sont ceux qui prévoient que le commerce et l’environnement seront étroitement liés à l’avenir.
Ce que j’aimerais dire à ce sujet, c’est que le Canada est déjà le chef de file mondial en matière d’agriculture durable. Dans le secteur du boeuf, nous prenons très au sérieux nos responsabilités au chapitre de la gestion et de la protection des prairies canadiennes et nous avons fixé de nombreux objectifs environnementaux relativement à la conservation des prairies, à la réduction des GES et à bien d’autres domaines encore. Nous devons veiller à ce que toute discussion future qui se tiendra à ce sujet dans le cadre d'accords commerciaux soit axée sur le commerce en tant que vecteur de résultats plutôt qu'en tant qu'instrument normatif.
La Canadian Cattlemen's Association reconnaît l’importance d’éviter l'interruption du commerce et la nécessité d’un accord de transition, mais nous plaidons aussi fortement pour un retour rapide à la table des négociations pour mettre au point un accord ambitieux qui s'attaquera à tous les facteurs qui, actuellement, limitent le commerce.
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Je vous remercie, madame la présidente. Bonjour à tous.
Je vous remercie de m’avoir invité à participer à la discussion d’aujourd’hui. Je suis heureux d’être ici au nom des 90 000 fabricants et exportateurs du Canada et des 2 500 membres directs de notre association pour discuter de l’accord commercial de transition avec le Royaume-Uni, et des conséquences de cet accord pour le Canada, pour le secteur manufacturier et des exportations, et pour l’avenir de notre indispensable industrie.
Notre association regroupe des entreprises de toutes les tailles, de toutes les régions du pays et de tous les secteurs industriels. Nous couvrons la majorité de la production manufacturière et des exportations à valeur ajoutée du Canada.
Ma présentation portera entre autres sur les problèmes auxquels les fabricants et les exportateurs doivent faire face à l’heure actuelle. Je parlerai également des solutions qui pourraient être envisagées et au sujet desquelles j’espère pouvoir discuter avec vous lors de la période des questions.
Comme le Comité le sait, avec plus de 20 milliards de dollars d’exportations, le Royaume-Uni est le troisième marché d’exportation en importance du Canada après les États-Unis et la Chine. Le Royaume-Uni a été l’un des tout premiers partenaires commerciaux du Canada et a toujours été notre porte d’entrée sur le marché européen. Selon l’enquête que Manufacturiers et exportateurs du Canada a menée sur les enjeux de gestion — une vaste enquête bisannuelle auprès des fabricants canadiens —, les exportateurs considèrent l’Union européenne, et le Royaume-Uni en particulier, comme étant l’un des trois marchés qui présentent le plus grand potentiel pour les cinq prochaines années. Il est essentiel que nous protégions notre accès au marché britannique.
Nous avons donc été soulagés d’entendre parler la semaine dernière de l’Accord de continuité commerciale Canada-Royaume-Uni, qui, semble-t-il, s’inspire en grande partie de l’AECG, l’Accord économique et commercial global entre le Canada et l’Union européenne. Le fait d’obtenir un accord commercial permanent entre le Canada et le Royaume-Uni est manifestement très important et constitue une fin en soi. Il était primordial d’avoir cet accord de transition en place pour le 1er janvier 2020 afin d’éviter toute perturbation.
Il est évident que l’absence de cet accord transitoire pourrait avoir des conséquences néfastes, surtout si l’on considère que l’année actuelle est celle où nous serions le moins en mesure de nous en passer, économiquement parlant. Manufacturiers et exportateurs du Canada se tient donc prêt à aider ce comité et le gouvernement à éviter ce scénario. Nous demandons instamment au gouvernement et à tous les parlementaires de travailler ensemble pour faire passer cet accord au Parlement le plus rapidement possible afin de respecter la date limite du 1er janvier.
Au-delà de ces considérations techniques entourant l’accord, il y a un problème encore plus important que je dois soulever, et c’est la baisse de nos performances en ce qui concerne l’exportation de produits à valeur ajoutée. C’est un déclin qui s’accélère malgré le fait que nous signons de plus en plus d’accords de libre-échange.
Laissez-moi vous expliquer ce que je veux dire. Les deux tiers des exportations canadiennes à valeur ajoutée — le type d’exportations qui rapporte le plus au Canada — sont des produits manufacturés. En d’autres termes, les fabricants canadiens prennent des ingrédients bruts, les transforment en quelque chose de plus grande valeur et vendent ensuite ces biens à l’étranger. Or, ce type d’échanges commerciaux à forte valeur ajoutée est en déclin depuis des années. En fait, les exportations de produits manufacturés vers le Royaume-Uni sont en baisse constante depuis cinq ans, une tendance que la signature de l’AECG n’a pas su freiner. Au chapitre des produits manufacturés, notre balance commerciale avec le Royaume-Uni est dans le rouge depuis dix ans. L’année dernière, ce déficit s’est creusé considérablement et est devenu quatre fois plus grand qu’il ne l’était en 2010.
Je sais que dans certains milieux, il est considéré comme une maladresse de se préoccuper de la balance commerciale. Certes, les consommateurs sont peut-être gagnants, mais nous ne pouvons pas ignorer le potentiel économique perdu qui découle du déclin des exportations à valeur ajoutée. Ce serait comme si je me réjouissais de voir le prix des choses baisser un peu alors que mon salaire net diminue d’année en année. Ce n’est tout simplement pas viable.
Pourquoi cela se produit-il, et comment pouvons-nous y remédier? Pour dire les choses simplement, les fabricants exportateurs du Canada sont trop petits et ils sont allés au bout de leurs capacités. De manière générale, on pourrait dire que, comparativement à la plupart de nos concurrents mondiaux, les entreprises canadiennes comptent une plus grande proportion de PME. D’un point de vue structurel fondamental, cela signifie que nous devons amener nos entreprises à investir dans leurs activités, et que nous devons les aider à croître et à se développer. Les grandes entreprises sont tout simplement mieux placées que les autres pour tirer profit du commerce mondial.
Les résultats de l’enquête 2020 de Manufacturiers et exportateurs Canada le confirment. Lorsque nous avons demandé à nos répondants de nous dire ce qui les empêchait d’exporter vers de nouveaux marchés, ils nous ont répondu que les risques étaient trop élevés parce qu’ils ne disposaient pas d’un avantage concurrentiel par rapport aux entreprises étrangères. Ils estiment simplement qu’ils ne peuvent pas être concurrentiels et ils ne se donnent pas la peine de le devenir.
Il est important que nous convenions que ce problème structurel des entreprises nationales est à l’origine de notre sous-performance à l’exportation. Nous ne voyons pas l’utilité d’attirer de nouveaux clients mondiaux par le biais des accords de libre-échange si nous ne pouvons pas produire des biens que nous pourrons leur vendre à des prix concurrentiels.
Vous vous dites peut-être: n’est-ce pas précisément la raison d’être d’Exportation et développement Canada, de la Banque de développement du Canada, de la Corporation commerciale canadienne et du service des délégués commerciaux? Ne sont-ils pas censés travailler à réduire les risques à l’exportation et aider les PME à s’attaquer à ces marchés?
La réponse est oui et nous pourrions dire qu’ils sont tous très doués pour cela. Le problème est le fossé qui existe entre ces grands programmes et le fait que les exportateurs ignorent leur existence. Lorsque nous avons interrogé les fabricants, nous avons constaté que ceux qui utilisent ces organismes et ces programmes les adorent, mais que la majorité des personnes interrogées n’étaient pas en mesure de dire ce qu’étaient certains de ces organismes, et encore moins les programmes qu’ils proposent. C’est un gros problème. Nous sommes confrontés à un double défi: nos entreprises exportatrices sont petites, elles souffrent d’un manque d’investissements et elles ne sont pas concurrentielles; par ailleurs, il existe un écart important entre l’aide gouvernementale qui est offerte et les entreprises qui utilisent réellement cette aide.
Voici quelques solutions concrètes dont j’aimerais discuter lors de la période des questions.
Premièrement, nous proposons de lancer une stratégie manufacturière pour le Canada axée sur la modernisation et la croissance du secteur. Cette stratégie doit aider les entreprises à investir dans la technologie qui leur permettra de se développer et de devenir de véritables acteurs sur la scène mondiale. Or, il se trouve que nous avons un plan pour une telle stratégie. Nous en avons discuté avec nombre d’entre vous au printemps. Je serai heureux de laisser un exemplaire de ce rapport au greffier.
Deuxièmement, nous croyons qu’il faut lancer un exercice de promotion de l’image de marque du Canada au pays et sur les marchés internationaux pour célébrer nos produits manufacturés. Cela permettra de mieux faire connaître les capacités et la technologie canadiennes ainsi que les produits que nous vendons et nos exportations. Comme mes amis des secteurs alimentaire et agricole peuvent en témoigner, la feuille d’érable est une marque de portée mondiale qui jouit d’une excellente réputation, mais dont nous ne profitons pas assez.
Troisièmement, il faut mettre les organismes gouvernementaux en relation avec les exportateurs en tirant parti des vastes réseaux d’associations commerciales. Cela peut se faire en investissant dans la capacité des associations commerciales canadiennes à faire le lien entre les deux parties et à agir comme un service de conciergerie pour les exportateurs. Le gouvernement avait l’habitude de mener ce genre d’initiatives avec beaucoup d’aplomb. Nous pensons qu’il devrait le faire à nouveau.
Quatrièmement, il faudrait élargir nos efforts au sujet du mentorat à l’intention des PME exportatrices. L’organisation et la gestion de réseaux privés de mentorat par les pairs sont un autre moyen d’utiliser les associations commerciales canadiennes pour maximiser l’apprentissage d’entreprise à entreprise.
Ces mesures sont celles que nous devrions être prêts à déployer dès le départ si nous voulons que le Canada joue un plus grand rôle dans le commerce mondial. Elles contribueront aussi grandement à aider les fabricants actuels à maximiser leur potentiel d’exportation pour les années à venir. Or, bien que notre organisation soit convaincue que ces solutions sont des choses sur lesquelles nous devons travailler maintenant, la priorité, bien sûr, est de préserver notre accès actuel au marché mondial.
Permettez-moi de réitérer que Manufacturirers et exportateurs Canada reste disposé à vous aider à mettre en place un accord de transition entre le Canada et le Royaume-Uni avant la fin de cette année et, à terme, un accord commercial permanent entre nos deux nations.
Je vous remercie encore de m’avoir invité aujourd’hui. Je me fais une joie à l’idée de discuter de tout cela avec vous.
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Je vous remercie, madame la présidente.
Je remercie le Comité de m’avoir invité à témoigner aujourd’hui.
La dernière fois que j’ai comparu devant ce comité, c’était durant la législature précédente. Curieusement, si je me souviens bien, je l’ai fait à distance également, en raison d’un voyage d’affaires.
Avant d’aborder mes observations proprement dites sur cet accord commercial, j’aimerais prendre quelques minutes pour donner un peu de contexte au sujet du Conseil canadien des pêches, du secteur de pêches et de notre situation sur le plan commercial.
Le Conseil canadien des pêches est le porte-parole national de la pêche commerciale d'espèces sauvages au Canada. Les entreprises membres sont des transformateurs qui comptent pour la transformation de la majorité de la production de poissons et de fruits de mer du Canada. Nos membres sont des PME, ainsi que des entreprises autochtones qui, collectivement, pêchent dans les trois océans du Canada.
L’industrie canadienne des produits de la mer crée 80 000 emplois directs, principalement dans les collectivités côtières et rurales. En substance, le secteur est le cœur économique de ces collectivités. Les exportations du secteur s'élèvent à 7,5 milliards de dollars et elles se font vers environ 130 pays. Les principaux marchés d’exportation sont les États-Unis, avec 61 % de nos exportations, la Chine, avec 17 %, le Japon, avec 4 %, Hong Kong, avec 3 % et le Royaume-Uni, avec 2 %. Prise dans son ensemble, l’Union européenne se classe troisième puisqu'elle accapare 7 % de nos exportations.
La demande mondiale croissante en matière de protéines, notamment de poissons et de fruits de mer, laisse entrevoir des possibilités de croissance pour le secteur. L’Organisation des Nations unies pour l’alimentation et l’agriculture prévoit que la demande mondiale de produits de la mer connaîtra une croissance de 7 à 10 % par année. Vous vous demandez peut-être d’où viendra cette croissance. Soixante et onze p. cent de la Terre est couverte par les océans, mais seulement trois p. cent de notre alimentation directe provient des océans. Les recherches du Groupe d’experts de haut niveau pour une économie océanique durable indiquent que les océans pourraient fournir plus de six fois plus de nourriture qu’aujourd’hui. Cela représenterait plus des deux tiers des protéines animales nécessaires pour nourrir la population future. Étant donné que les aliments d’origine océanique sont si durables, l’augmentation de leur part dans le régime alimentaire mondial contribuerait de manière significative à atténuer les changements climatiques.
La dernière statistique dont je souhaite vous faire part concernant l’économie océanique est que le World Resources Institute estime que chaque dollar investi dans les protéines océaniques rapporte 10 dollars en bénéfices sanitaires, environnementaux et économiques. C’est un excellent rendement du capital investi.
Certains d’entre vous savent peut-être que le gouvernement est en train d'élaborer une stratégie d’économie bleue. Le Conseil canadien des pêches et l’Alliance de l'industrie canadienne de l'aquaculture, notre équivalent pour la production aquicole, ont élaboré une vision et un plan d’action communs pour cette stratégie. Notre vision sur 20 ans est d’être l’un des trois meilleurs producteurs de poissons et de fruits de mer durables au monde — pas un des plus grands, mais bien un des meilleurs.
Avec cette vision, nous avons trois objectifs ambitieux: doubler la valeur des produits de la mer canadiens, doubler les retombées économiques et doubler la consommation intérieure de poissons et de fruits de mer. Ces objectifs sont certainement ambitieux, mais faute de viser haut, on ne s'élève jamais beaucoup. Tous les députés du Parlement ont reçu une copie de notre proposition cet automne. Je serais heureux d’en discuter plus en détail avec vous individuellement, à votre convenance.
La dernière prémisse à notre conversation d'aujourd'hui — et la plus importante — est notre feuille de route en matière de durabilité. Le Canada est un leader mondial dans la gestion durable des pêches, et son régime réglementaire est robuste. En outre, l’adoption par le Canada d’une certification indépendante par une tierce partie est de beaucoup supérieure à la moyenne mondiale, qui n’est que de 16 %. En conséquence, le ministère des Pêches et des Océans signale que 96 % de nos stocks de poissons sont exploités à des niveaux durables. Nous devrions être fiers de la gestion collective que nous faisons de nos ressources halieutiques.
Tout cela constitue un contexte important pour mes observations d’aujourd’hui. Je voudrais maintenant passer aux aspects particuliers de nos relations commerciales avec le Royaume-Uni.
L’industrie apprécie ses relations commerciales avec le Royaume-Uni, notre cinquième importateur. En 2019, nos exportations vers le Royaume-Uni se sont élevées à 131 millions de dollars, soit 1,7 % — arrondissons à 2 % — des exportations annuelles de notre secteur. Les principaux groupes de produits exportés vers le Royaume-Uni sont le saumon, 35 %, les crevettes, 26 %, le homard 25 % et les coquilles Saint-Jacques 5 %. L'importance du marché pour les entreprises individuelles varie beaucoup: certaines n'exportent à peu près rien au Royaume-Uni, alors que d'autres ont le statut de grand fournisseur du marché britannique.
Le plus récent barème tarifaire mondial proposé par le Royaume-Uni au début de l’été laissait entendre que les exportations canadiennes de poissons et de fruits de mer seraient soumises à des droits de douane plus élevés. En utilisant les données d’exportation de 2019 et dans l'éventualité où un nouvel accord ne serait pas mis en place avec le Royaume-Uni d’ici la fin de l’année, notre évaluation de l’incidence que cela pourrait avoir sur notre secteur est que les taux hors AECG ajouteraient environ 11 millions de dollars au prix des produits des quatre principaux groupes que je viens de mentionner. Cela représenterait un taux de droit moyen de près de 10 %, soit un pourcentage suffisamment élevé pour constituer un désavantage prohibitif sur le marché. Il est toutefois important de noter que certaines des exportations de saumon contiennent du saumon de l’Alaska et qu'elles ne peuvent par conséquent bénéficier d’un traitement tarifaire préférentiel au titre de l’AECG ou de l’accord de transition avec le Royaume-Uni.
Le nouvel accord commercial de transition assurera le maintien d’un accès libre de droits de douane à la Grande-Bretagne pour les produits de la mer canadiens. Il nous confèrera également un avantage sur d’autres pays qui n’ont pas d’accord commercial bilatéral. En réaction à l’annonce de samedi, nous avons publié un communiqué de presse qui salue l’accord de transition.
Le Conseil canadien des pêches exhorte tous les parlementaires à ratifier rapidement cet accord afin qu’il entre en vigueur d’ici le 1er janvier 2021. Les Canadiens qui travaillent au sein de la chaîne d’approvisionnement du secteur des pêches vous en seront reconnaissants.
Sur ce, je serai heureux de répondre à toutes vos questions.
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Bonjour, tout le monde.
Je suis heureux d'être avec vous aujourd'hui au nom des Producteurs de lait du Québec. Je vous remercie de nous donner l'occasion de présenter notre point de vue au sujet de la négociation d'un accord commercial entre le Canada et le Royaume-Uni.
Je suis accompagné de M. François Dumontier, directeur, Communications, affaires publiques et vie syndicale, au sein des Producteurs de lait du Québec.
L'organisme Les Producteurs de lait du Québec est affilié à l'Union des producteurs agricoles. Au Québec, 4 877 fermes laitières livrent près 3,33 milliards de litres de lait, dont la vente à la ferme totalise des recettes de plus de 2,7 milliards de dollars.
Au Québec, la production laitière génère 83 000 emplois directs et indirects, qui contribuent à des retombées fiscales de 1,3 milliard de dollars. Cela représente près de 50 % des fermes laitières au Canada. Le Québec seulement génère plus de 58 000 emplois directs et indirects. Il se positionne devant plusieurs secteurs, dont l'aéronautique, les ressources minières et l'énergie électrique.
À l'échelle nationale, les Producteurs de lait du Québec produisent 37 % de la production laitière au Canada. Nous sommes un leader en matière de transformation laitière au Canada: près de 77 % des yogourts produits au pays sont transformés au Québec, tout comme c'est le cas pour 52 % de tous les fromages. Nous produisons près de 65 % des fromages fins, et nous offrons environ 400 variétés. Nous nous distinguons aussi par une production biologique qui représente près de 42 % de la production laitière au Québec. Notons que le fromage fin que nous produisons est considéré comme un produit de niche.
Depuis 2002, des entreprises artisanales se sont établies dans plusieurs régions, et leur développement s'est accéléré. Leur nombre a augmenté, passant de 34 à 53.
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D'accord. Je vous remercie, monsieur le président.
Comme je le disais, la contribution du secteur laitier du Québec au produit intérieur brut, ou PIB, est de 6,2 milliards de dollars. Le secteur laitier participe de façon importante à l'emploi et au tissu socioéconomique des régions et des collectivités du Québec. Le secteur laitier est une source importante d'emplois dans toutes les gammes de profession. Il y a notamment les vétérinaires, les agronomes, les fournisseurs d'intrants, les concessionnaires de machinerie agricole et les mécaniciens. Il y a d'autres secteurs comme celui des transports. Par conséquent, les concessions qui sont faites dans le secteur laitier touchent beaucoup de secteurs. Grâce à tous ces investissements faits sur les fermes, ce sont plus de 500 millions de dollars qui retournent annuellement dans l'économie du Québec.
Les producteurs laitiers canadiens ont été durement touchés par les concessions accordées lors des trois derniers accords. Toute concession supplémentaire mettrait en péril l'avenir des fermes familiales, des producteurs laitiers du Québec et du Canada, des collectivités rurales et des centaines de milliers de personnes qui dépendent de ce secteur pour gagner leur vie.
Comme vous le savez, on parle de concessions de marchés de l'ordre de 8,4 % accordées dans le cadre des trois derniers accords, soit l'Accord économique et commercial global, ou AECG, l'Accord Canada—États-Unis—Mexique, ou ACEUM, et le Partenariat transpacifique global et progressiste, ou PTPGP. À cela, il faut ajouter les concessions faites dans les différents accords liés à l'Organisation mondiale du commerce, ou OMC. En 2024, ce sera 18 % de la production laitière canadienne qui sera fournie par d'autres pays.
Il ne fait pas de doute que, pour nous, c'est une perte de marché importante. Il y a peu de secteurs ou d'entrepreneurs qui peuvent prospérer dans un milieu d'affaires quand une part croissante de leur marché est donnée à d'autres pays. Ces pertes découlant des concessions de marchés représentent 450 millions de dollars chaque année, dont 165 millions de dollars pour le Québec.
Vous vous rappellerez que, pour l'AECG, dont on parle aujourd'hui, c'est une concession de 17 700 tonnes de fromages, soit 16 000 tonnes de fromages fins et 1 700 tonnes de fromages industriels. Pour nous, c'est un secteur qui est grandement touché, car il s'agit seulement de deux contingents tarifaires. Comme il a été mentionné plus tôt, le Québec produit 65 % des fromages fins. Nous sommes donc véritablement touchés par cet accord.
Les producteurs laitiers appuient la signature d'un accord de libre-échange avec le Royaume-Uni, à la condition que le Canada n'accorde pas d'accès supplémentaire à son secteur laitier, car les producteurs laitiers ont payé le prix de l'adhésion du Canada aux trois derniers accords.
Nous nous réjouissons donc de l'accord transitoire annoncé samedi dernier. Le gouvernement n'a accordé aucun accès supplémentaire au Royaume-Uni, conformément à l'engagement qui avait été pris par le et la ministre de l'Agriculture et de l'Agroalimentaire, Mme Bibeau.
Je remercie donc le gouvernement d'avoir respecté son engagement. Cela démontre clairement qu'il est possible de conclure des accords commerciaux sans que la gestion de l'offre soit sacrifiée. Cependant, nous sommes très conscients qu'il ne s'agit que d'un accord transitoire qui conduit à une renégociation en vue d'un accord à plus long terme. Notre position est claire. Les dispositions qui nous concernent dans l'accord transitoire doivent être intégralement reproduites dans un éventuel accord à long terme.
Aucun accès supplémentaire au marché laitier canadien ne doit être accordé ni pour le fromage ni pour aucun autre produit laitier. Dans l'accord transitoire, le Royaume-Uni a pris des contingents tarifaires déjà inclus, c'est-à-dire réservés à l'Union européenne dans le cadre des négociations avec l'OMC.
Rappelons-nous que, dans l'AEGC, l'accès à l'importation équivaut à 1,4 % de notre production laitière intérieure. C'est le Royaume-Uni qui a décidé de quitter l'Union européenne et, s'il veut avoir accès au secteur laitier canadien, il doit négocier avec l'Union européenne, non avec le Canada.
Les chefs de tous les partis ayant un siège à la Chambre des communes ont unanimement confirmé leur opposition à toute nouvelle concession qui serait faite dans le secteur laitier dans le cadre des négociations commerciales. Le premier ministre s'est lui-même engagé à ce que, dans le cas d'un accord avec le Royaume-Uni, il n'y ait pas plus de concessions que nous n'en avons déjà accordé dans l'AECG.
Chaque fois que le gouvernement canadien concède l'accès aux marchés, un plus grand nombre de produits laitiers canadiens est remplacé par des produits étrangers sur les tablettes de nos magasins. Nous devons mettre fin à cette érosion si nous voulons que l'industrie laitière canadienne conserve sa vigueur et son dynamisme.
Ces temps-ci, on entend beaucoup de remises en question de la mondialisation, tout particulièrement dans le contexte de la pandémie. Les consommateurs prennent de plus en plus conscience de l'importance de sauvegarder la production locale afin de protéger leur sécurité alimentaire, mais aussi l'environnement. Faire des brèches dans la gestion de l'offre, c'est aller dans le sens contraire de la protection de la sécurité alimentaire.
Les concessions assorties de promesses d'indemnisation ne sont pas un modèle pour les négociations commerciales. Le gouvernement s'est engagé à ne plus faire de concessions sur les produits laitiers dans les futurs accords commerciaux. Cela doit être la norme à l'avenir.
Je profite d'ailleurs de l'occasion pour rappeler que nous sommes toujours en attente quant aux compensations. Depuis plus d'un an, le premier ministre Trudeau, la vice-première ministre, Mme Freeland, et la ministre de l'Agriculture et de l'Agroalimentaire, Mme Bibeau, répètent que les producteurs seront indemnisés pour les pertes résultant de ces concessions.
Un premier versement a été effectué en 2019. Toutefois, aucune précision n'a été donnée depuis sur la réalisation des engagements relatifs à ces trois accords. J'en profite pour saluer une motion qui a été adoptée hier par tous les partis politiques afin que les compensations des trois derniers accords soient annoncées le plus rapidement possible pour mettre fin à l'incertitude en campagne. Il est clair pour nous qu'il ne faudrait pas avoir à recommencer chaque année à quémander des promesses qui ont déjà été annoncées.
Le gouvernement procédera à une mise à jour financière la semaine prochaine. Nos producteurs comprendraient très mal qu'à cette occasion, le gouvernement ne fasse pas d'annonce sur les compensations.
Comme je vous l'ai dit brièvement, la gestion de l'offre est un modèle fondé sur la demande canadienne, et les producteurs adaptent leurs productions. Il y a eu des concessions, de l'adaptation et des compensations, mais, je le répète, ce n'est pas un modèle durable pour la production laitière canadienne. Il est clair pour nous qu'il faut être vigilant quant à la négociation des accords futurs.
Je vous remercie de votre attention. Je serai heureux de répondre à vos questions.
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Madame la présidente, si cette question s'adresse d'abord à moi, je vous en remercie.
Malheureusement, je n'ai pas lu votre rapport de juin 2019 sur les PME, donc je vais devoir y jeter un coup d'œil. Toutefois, comme je l'ai dit dans ma déclaration préliminaire, si cet accord n'est pas en vigueur à compter du 1er janvier, nous nous exposons à des droits plus élevés qui pourraient avoir un effet prohibitif sur le marché. Pour certaines entreprises, cela pourrait représenter une grande partie de leurs exportations. Pour d'autres, ce pourrait en définitive être catastrophique, puisque cela s'ajouterait à toutes les répercussions de la pandémie de COVID-19 et à la perte des marchés de la restauration.
À savoir ce que le gouvernement pourrait faire de plus, du point de vue de nos membres, j'essaie dans le cadre des services que nous leur offrons de les sensibiliser à la présence d'un maximum d'organismes gouvernementaux qui sont là pour appuyer les exportateurs, que ce soit EDC ou la BDC, voire nombre des autres acronymes que M. Poirier a utilisés dans sa déclaration préliminaire.
En fait, l'une des choses qui ont changé pendant la pandémie, et nous en remercions le gouvernement, c'est que Financement agricole Canada englobe désormais les navires-usines de produits congelés en mer. Il s'agit de gros navires qui, en plus de servir à la pêche, assurent la transformation. Cette capacité de financement supplémentaire est très importante et le sera dans les années à venir avec le renouvellement de la flotte.
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Si je peux me permettre, j'aimerais insister sur l'importance des chaînes d'approvisionnement. Pour le secteur manufacturier, surtout dans le contexte nord-américain, mais désormais de plus en plus en Europe, les chaînes d'approvisionnement sont intégrées, les composantes d'un produit fini traversant maintes fois les frontières.
Toute perturbation de ce cycle provoquerait la même menace existentielle qu'a vécue notre secteur pendant les négociations de l'ALENA quand le fruit de celles-ci semblait douteux. Ce n'est pas bon pour les affaires. Ce n'est pas seulement une question de commerce, mais bien du mouvement de la marchandise entre les pays. Il est important que cet accès demeure ininterrompu.
Du côté du soutien aux PME, comme je l'ai dit, nous avons d'excellents programmes que M. Lansbergen a brièvement mentionnés, offerts par divers organismes dont c'est la raison d'être. Il y a toutefois un problème quand personne au sein de la collectivité ne les connaît. Pensez-y d'un point de vue commercial. Si vous avez une PME, vous ne passez pas votre temps à vous dire: « Eh bien, je me demande ce que le gouvernement a à m'offrir. » Vous vous dites plutôt: « Je vais consulter mon comptable, je vais consulter mon avocat et je vais consulter mon personnel pour essayer de trouver des idées. » On ne pense pas d'emblée à ce que le gouvernement offre.
Et c'est là que nous devons, essentiellement, faire le pont entre ces deux solitudes. Comme je l'ai dit, les associations commerciales sont idéalement placées pour faire ce type de travail et prêter main-forte.
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Il va de soi que le modèle de production laitière a été basé sur la nécessité de répondre aux besoins des Canadiens. Comme vous le savez, on a investi quand même plusieurs millions de dollars dans les dernières années, que ce soit au Québec ou au Canada, pour répondre aux attentes sociétales.
Les consommateurs ont des exigences, que ce soit en matière d'environnement ou de bien-être animal. Sur le plan environnemental, le pays est un leader mondial en production laitière pour ce qui est de l'empreinte carbone. À notre avis, nous avons certainement répondu à la demande.
Toutefois, lorsqu'il s'agit de réduire l'accès à un produit sur le marché pour laisser la place à des produits provenant d'autres pays, des pays qui ne tiennent pas compte de la réciprocité des normes, il ne fait pas de doute pour nous que le modèle a atteint sa limite. Il suffit de mentionner que le Canada importera 18 % de sa production laitière.
On entend beaucoup de partis politiques dire qu'il faut protéger le système de gestion de l'offre, mais protéger, ce n'est pas assez. Il faut en faire plus, il faut la promouvoir. Nous constatons qu'il y a eu beaucoup d'effritement au fil des ans, et il faut y mettre fin.
Je souhaite commencer par le processus de ratification et ce à quoi il pourrait ressembler.
Tous nos témoins ont dit haut et fort souhaiter une ratification rapide. Plus tôt cette semaine, on a rappelé aux membres du Comité que, même si les négociations sont terminées, l'accord en tant que tel n'a pas encore été signé et il reste quelques détails à régler. On nous a dit que ce processus pourrait prendre de deux à quatre semaines.
Ensuite, évidemment, une loi habilitante doit être déposée et, selon les résultats du peaufinage juridique, il peut y avoir quelques modifications apportées à l'ébauche existante, bien que, à ce que l'on sache, aucune ébauche n'est prête.
La Chambre devrait normalement s'ajourner le 11 décembre, et le gouvernement ne semble pas envisager la prolongation de la présente session parlementaire. Qu'estimez-vous que le gouvernement devrait faire pour se préparer au fait que cet accord de transition n'entrera pas en vigueur d'ici le 31 décembre?
Quel type de soutien vos membres espèrent-ils obtenir dans ce cas? Quelles sont certaines des choses qui pourraient être faites pour limiter les dommages subis par les exportateurs canadiens dans l'éventualité où on ne voit pas le libellé de l'accord et sa loi habilitante n'est pas adoptée avant la fin de l'année?
Peut-être que M. Poirier pourrait répondre en premier.
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Évidemment, bien des choses doivent se produire sur le plan procédural d'ici le 1
er janvier.
Si malheureusement ce n'est pas possible, il y a certains modèles, certains outils, que nous avons en quelque sorte trouvés dans nos relations avec les États-Unis au cours des dernières années pour ce qui est du drawback et de la remise des droits. Il y a des mécanismes qui peuvent dédommager les importateurs et les exportateurs touchés, et qui, tout à coup, doivent payer des droits alors que ce n'est pas le cas aujourd'hui.
Le problème de ces mécanismes, c'est que, même si les entreprises récupèrent leur argent, ils constituent sans contredit un fardeau administratif. D'abord, pour vous prévaloir de ces mécanismes, vous devez savoir qu'ils existent, que c'est une possibilité pour vous. Ensuite, il faut de nombreux mois pour être remboursé. Actuellement, le problème, et c'est un problème en général, c'est que la majorité des entreprises, surtout les manufacturiers, ont très peu de capitaux ou de liquidités en raison de la pandémie. Le manque de liquidités est un gros problème.
Même s'il y a des mécanismes à notre disposition et que, malgré ce que nous espérons, rien n'est en place d'ici le 1er janvier, cela demeure problématique vu l'état de l'économie en ce moment et la pandémie de COVID-19.
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Comme j'ai été le premier à m'exprimer, je vais prendre la parole, et Mme Jackson pourra intervenir et me corriger si j'oublie de mentionner certaines choses.
Sans l'accord transitoire, je pense que nous serions dans le pétrin, car notre produit commence son cycle de vie très tôt et, si nous voulons répondre à leurs exigences, nous devons suivre cet animal tout au long du système, depuis mes installations, en tant qu'éleveur-naisseur et fournisseur de document d'information, jusqu'au parc d'engraissement. L'animal doit être manipulé correctement et être acheminé vers une usine de fabrication ayant des contacts et des liens avec l'Union européenne et, en particulier dans le cas présent, avec le Royaume-Uni, afin d'y livrer le produit.
Ce n'est pas un robinet qu'on peut ouvrir ou fermer. On ne peut pas fonctionner à l'aveuglette ni s'arrêter pendant un mois pour recommencer par la suite. Il est, à mon avis, primordial pour nous de mettre en place cet accord intérimaire, en particulier maintenant ou d'ici le 1er janvier. Sans lui, nous serions dans l'incertitude. Comme vous le savez, si votre franchise de restaurant repose sur un produit particulier, vous ne le remplacez pas pendant un mois en utilisant un autre produit, pour recommencer à le vendre par la suite.
À mon avis, l'accord est vital pour nous.
Je pense avoir entendu chacun de nos témoins dire aujourd'hui que, malgré leur joie de savoir qu'il existe une sorte d'accord transitoire, ils aimeraient tous voir le Canada revenir à la table des négociations et travailler à résoudre la question à plus long terme.
Nous avons entendu dire qu'il n'y a pas de clause de caducité dans cet accord. Que ce soit dans un an, dans trois ans ou dans cinq ans, rien n'oblige le Canada et le Royaume-Uni à conclure un autre accord à quelque moment que ce soit. Cet accord pourrait donc être permanent.
Je me demande si nous pourrions obtenir l'opinion de nos témoins sur ce qui, du point de vue des moyens de pression, serait nécessaire pour ramener le Royaume-Uni à la table des négociations, s'ils décident plus tard qu'ils aimeraient que les termes de cet accord soient permanents.
Nous avons commencé par entendre M. Poirier, alors peut-être que quelqu'un d'autre, comme M. Sawyer, aimerait être cette fois-ci le premier à répondre à la question.
Voilà mon problème. J'en ai rêvé quand j'étais agriculteur. J'ai entendu des gouvernements promettre que la situation serait résolue, mais ces promesses ne se sont jamais concrétisées. Je suis déjà passé par là. Je ne fais pas confiance aux paroles; j'ai besoin d'écrits. J'ai besoin que des dispositions soient inscrites dans des documents. Je tente de savoir comment faire.
Je n'hésiterais pas à travailler jusqu'au jour de l'An pour y parvenir. Le Parlement doit faire ce qu'il a à faire. Je suis toutefois très réticent à tout bonnement approuver un accord et à le laisser être avalisé par le Parlement, pour vous voir de retour dans trois ans afin de me dire que c'est le pire accord que nous ayons jamais conclu. J'ignore s'il est bon ou mauvais. Je ne le sais pas.
Comment le Comité devrait-il s'y prendre? Nous ne savons pas quoi faire. Si nous pouvions trouver des solutions qui nous permettraient de bénéficier d'une marge de manœuvre, nous pourrions fourbir nos armes pour pouvoir renégocier l'accord s'il ne nous convient pas; il s'agira alors d'un véritable accord transitoire. Je pourrais peut-être composer avec la situation encore un peu, mais je ne vois ou n'entends rien en ce sens.
Voilà pourquoi je reviens à la charge. Quels sont les mécanismes déclencheurs? Quels sont les éléments qui nous rassureraient, qui vous rassureraient, vous qui devrez vivre avec les résultats de l'accord?
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Je vous remercie, madame la présidente.
Avant de poser mes questions, je répondrai à mon collègue conservateur qui vient de laisser entendre que le gouvernement a manqué le bateau. C'est tout le contraire, madame la présidente. En fait, si nous avions conclu un accord à la hâte avec le Royaume-Uni, les industries que représentent les témoins devant nous auraient payé le prix des concessions que nous aurions pu faire, mais nous avons refusé d'accorder. Nous avons plutôt conclu un bon accord. En fait, nous sommes l'un des premiers pays du monde à conclure avec succès un tel accord avec le Royaume-Uni.
[Français]
Permettez-moi de passer à des questions.
Monsieur Gobeil, à mon tour, je vous remercie de votre présentation et de vos remarques. Il y a quelques heures à peine, j'ai eu le privilège de répondre à des questions pendant la période des questions à la Chambre. J'ai expliqué à mes collègues que nous avions défendu bec et ongles le système de gestion de l'offre, et qu'il n'y aura pas une seule once de fromage de plus qui rentrera au Canada suivant cet accord transitoire conclu avec le Royaume-Uni.
Je suis de tout cœur avec vous et avec votre industrie. Je vous entends quand vous dites qu'il faut non seulement protéger et défendre le système de gestion de l'offre, mais aussi le promouvoir. Pouvez-vous nous expliquer comment nous pouvons travailler ensemble pour promouvoir nos producteurs laitiers, pour travailler main dans la main avec vous afin de repérer d'autres marchés, ou, encore une fois, pour promouvoir l'industrie, ici même au Canada?
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Je vous remercie, madame Bendayan. Ce sont de très bons commentaires.
J'ai parlé de la promotion du système de gestion de l'offre. Comme vous le savez et comme le gouvernement fédéral le sait, cela se fait par l'innovation et la recherche; il faut en tirer profit pour trouver de nouveaux débouchés, car nos consommateurs sont à l'affût de nouveaux produits.
Vous le savez, il y a beaucoup de marchés en ce qui a trait à la matière grasse, mais il y a aussi beaucoup de surplus structurels pour ce qui est des solides non gras du lait. Les différents accords — je pense, entre autres, au dernier accord conclu avec les Américains — nous ont mis à dos le pays, comme vous l'avez dit.
Il faut aider les producteurs et les transformateurs à trouver de nouveaux débouchés et des marchés à valeur ajoutée. Cela peut être dans les productions animales, par exemple, la nourriture pour chiens et chats. Je pense aussi au marché de formules pour bébés. Il faut trouver des marchés à valeur ajoutée canadiens.
Je pense que nous avons un produit de grande qualité, et nous avons des valeurs très fortes au chapitre de l'environnement. Nous sommes capables de nous démarquer à la grandeur de la planète avec nos produits, même sur la scène canadienne. Je ne parle pas d'un produit au prix mondial, mais d'un produit à valeur ajoutée.
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C’est une excellente question.
Je pense que, premièrement, lorsque nous revenons sur les divers accords commerciaux et que nous cherchons à savoir si le Canada en a tiré pleinement parti ou non, nous devons également le faire dans le contexte des débouchés commerciaux à l’étranger.
Dans le cadre de l’AECG, le poisson et les fruits de mer bénéficiaient très largement de réductions tarifaires et de la rapidité avec laquelle certains obstacles étaient éliminés, mais nos exportations n’ont pas augmenté la première année. Il nous a fallu deux ans pour en tirer profit selon les statistiques commerciales. Cela n’a pas été sans effort; c’est juste que d’autres marchés étaient encore plus lucratifs, et je pense donc que tout dépendra des possibilités de rendre les exportations vers le Royaume-Uni plus rentables que celles qui sont destinées à d’autres pays.
Je pense que la signature de cet accord par le Canada va nous mettre dans une position avantageuse, car peu de pays auront un accord bilatéral avec le Royaume-Uni dans l’immédiat. Cela va nous donner un avantage précoce, l’avantage du premier arrivé, pour ainsi dire, ce qui sera très utile.
Lorsque le Canada signe divers accords commerciaux — notamment l'AECG et le PTP —, nous renonçons à beaucoup de choses. Je suis sûr que notre témoin du secteur laitier n'est que trop conscient de ce que nous sacrifions. En particulier lorsqu'il existe des clauses de règlement des différends entre investisseurs et États, nous renonçons également à la souveraineté canadienne, c'est-à-dire à la possibilité de prendre des décisions dans l'intérêt public sans être poursuivis par les multinationales et les tribunaux commerciaux internationaux.
Nous le faisons — sous prétexte que nous allons obtenir un meilleur accès au marché et que cela va aider les producteurs canadiens — même dans le seul contexte de ce groupe de témoins, et il y a d'autres données qui le confirment. Nous avons entendu parler de déficits commerciaux croissants. Nous avons entendu parler d'autres obstacles à l'accès aux marchés dans le domaine du bétail, par exemple.
À quel moment pouvons-nous dire que l'approche commerciale du Canada ne fonctionne peut-être pas? Nous signons beaucoup d'accords. Beaucoup de gens nous disent que.... Certains nous ont dit qu'il y avait des exemples de réussite, mais nous avons aussi entendu dire qu'en échange de ce que nous abandonnons, nous ne réalisons pas vraiment le potentiel dont on nous dit que ces accords sont porteurs.
Je voudrais tout d'abord m'adresser au président de la Canadian Cattlemen's Association, M. Sawyer, parce que je veux juste entendre… À quel moment ou à quel seuil pouvons-nous dire qu'en fait, cette façon d'aborder notre programme commercial ne fonctionne pas? Y a-t-il quelque chose qui permettrait de dire que cette approche ne fonctionne pas, ou sommes-nous simplement en train de nous engager de manière fondamentale sans que les preuves aient vraiment d'importance?
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Merci, madame la présidente.
Je pose ma question à M. Poirier.
Au cours de mon existence, madame la présidente, j'ai été le propriétaire et le gestionnaire de ma propre entreprise de fabrication et, il y a six ans, avant de me lancer en politique, je faisais partie d'une petite entreprise de fabrication très haut de gamme pour la Défense. J'ai donc un parti pris pour la fabrication. Je suis d'accord avec le témoin: nous avons assisté à une tendance à la baisse des exportations à valeur ajoutée, que j'ai soulignée et signalée en incitant à la prudence pendant tellement d'années.
L'un de nos problèmes, madame la présidente, particulièrement depuis quatre ans, c'est les capacités limitées des stratèges, des capacités qu'utilisent beaucoup de gros fabricants étrangers basés au Canada qui exportent leurs produits seulement sur le marché nord-américain. Par exemple, les producteurs d'acier, qui n'ont pas augmenté leur capacité de production depuis 20 ans, exercent un monopole parce que leur marché est exclusivement l'Amérique du Nord et qu'ils n'exportent nulle part ailleurs dans le monde. Pour cette raison, souvent les petits fabricants, les fabricants en croissance et les industries nouvelles ne font pas beaucoup parler d'eux. C'était le secteur industriel dans lequel j'exerçais. Les fabricants établis depuis longtemps, comme ceux du secteur automobile, discutent actuellement d'investir dans les véhicules électriques, ce qui est une bonne décision, parce que c'est la nouvelle frontière de la fabrication. Mais nous n'entendons pas parler des producteurs du nouveau pétrole et du nouveau gaz ni des fabricants de batteries.
Monsieur Poirier, vous avez bien dit que les petites entreprises ne sont pas au courant des divers programmes de l'État. Pour combler cette lacune, nous avons fait appel à l'application Canada Business. J'espère que votre association et d'autres en feront la promotion chez leurs membres.
À ce que je sache, la plus grande partie des exportations de produits manufacturés vers le Royaume-Uni est essentiellement destinée à d'autres régions d'Europe. Si j'ai raison, quel sera l'effet si le Royaume-Uni et l'Union européenne ne parviennent pas à s'entendre, alors que le Brexit entrera en vigueur à la fin de l'année?