CIMM Réunion de comité
Les Avis de convocation contiennent des renseignements sur le sujet, la date, l’heure et l’endroit de la réunion, ainsi qu’une liste des témoins qui doivent comparaître devant le comité. Les Témoignages sont le compte rendu transcrit, révisé et corrigé de tout ce qui a été dit pendant la séance. Les Procès-verbaux sont le compte rendu officiel des séances.
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Comité permanent de la citoyenneté et de l'immigration
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TÉMOIGNAGES
Le mercredi 2 avril 2014
[Enregistrement électronique]
[Traduction]
Je déclare ouverte la séance no 19 du Comité permanent de la citoyenneté et de l'immigration. En ce mercredi 2 avril 2014, notre étude a pour thème le renforcement de la protection des femmes dans notre système d'immigration.
Cette séance est télévisée.
Nous recevons trois groupes de témoins. Nous avons Salma Siddiqui et Tahir Gora qui représentent la Coalition of Progressive Canadian Muslim Organizations. Nous avons Kamal Dhillon, auteur de Black and Blue Sari, et Denise Spitzer, qui est titulaire de la chaire de recherche du Canada sur le genre, la migration et la santé, à l'Université d'Ottawa.
J'imagine que vous êtes enseignante.
Très bien.
Je suis désolé d'avoir à vous le dire, mais les cloches vont bientôt sonner. Par conséquent, nous allons essayer d'aller aussi vite que possible pour entendre au moins certaines d'entre vous.
Madame Spitzer, vous allez passer la première. Vous avez jusqu'à huit minutes.
Je vous remercie pour votre invitation.
Je désire aborder trois questions qui témoignent, à mes yeux, du manque d'analyse sexospécifique que l'on constate dans les politiques de parrainage en immigration.
Tout d'abord, je vous demande d'examiner le langage utilisé pour décrire la problématique. Dans la plupart des discours, les femmes sont décrites comme vulnérables et comme des victimes qui ont besoin de protection. Toutefois, les gens ne sont pas par nature vulnérables; de façon générale, ils le deviennent en raison de conditions matérielles, politiques et socioculturelles. Ainsi, nous devons faire en sorte que les femmes — ou n'importe quel groupe susceptible d'être marginalisé d'ailleurs — ne soient pas forcées d'endurer les retombées négatives des politiques et des pratiques. Si nous nous concentrons sur les façons de faire ressortir, tout au long du processus d'immigration, la capacité décisionnelle des femmes et leur droit à l'autonomie, nous serons mieux en mesure de tirer parti de ce qu'elles peuvent apporter à la société canadienne.
Deuxièmement, j'aimerais que nous examinions la façon dont la structure de parrainage des conjoints finit par créer ou par renforcer la dépendance et l'inégalité dans les relations, ce qui va à l'encontre des engagements canadiens en matière d'égalité des sexes, puisque la politique accorde à une personne, généralement l'homme dans les couples hétérosexuels, le pouvoir sur sa partenaire. Parmi les couples immigrants, ce sont le plus souvent les hommes qui sont désignés comme les demandeurs principaux, même si les deux partenaires ont des situations professionnelles semblables. Les femmes sont ainsi reléguées au simple statut de conjointes parrainées. Étant donné que la formation et l'expérience professionnelles du demandeur principal étayent la candidature à l'immigration, il arrive souvent que tout investissement, que ce soit en termes financiers ou en temps nécessaire pour obtenir des titres ou compétences canadiens, est consacré à la carrière de l'homme. Pour l'essentiel, le programme vient renforcer un modèle désuet où une seule personne — encore une fois, généralement l'homme — fait vivre sa famille et sa conjointe à charge.
Dans de telles circonstances, les femmes se retrouvent la plupart du temps dans un cycle infernal de mobilité descendante caractérisé par la déqualification et une perte de statut social. Une fois de plus, notre société est perdante lorsqu'elle n'arrive pas à exploiter pleinement leur potentiel. Je reconnais que même si certains écarts entre les hommes et les femmes existaient déjà, le cadre de parrainage des conjoints vient y contribuer et renforcer ces inégalités.
Troisièmement, j'aimerais que nous examinions le cas des femmes en tant que garantes de leurs proches pour voir comment la réglementation peut faire en sorte de les rendre vulnérables. Par exemple, nous savons que les femmes nées à l'étranger, particulièrement dans des pays non européens, sont celles qui connaissent le déclin le plus vertigineux dans leur statut professionnel et économique par rapport à d'autres groupes de nouveaux arrivants. Le niveau de revenu requis pour parrainer des proches a augmenté, ce qui exclut de manière disproportionnée les femmes et les empêche de faire venir leurs proches.
Je vais partager avec vous certains des résultats de la recherche que j'ai effectuée auprès de femmes immigrantes qui sont arrivées au Canada en vertu du programme des aides familiales résidentes, le PAFR, pour illustrer ce point. Après avoir honoré leurs obligations en vertu du programme, les anciennes travailleuses du PAFR se trouvent généralement des emplois faiblement rémunérés quelle que soit leur formation ou éducation préalable. Par exemple, dans une de nos études, plus de 40 % des anciennes aides familiales résidentes gagnaient entre 10 000 et 19 000 $ par an, et ce à une époque où les Canadiens gagnaient environ 41 000 $ ou plus.
Que signifie cet appauvrissement relatif pour les femmes immigrantes comme une femme célibataire désireuse de faire venir ses parents au Canada? Est-elle en mesure de répondre à l'exigence du revenu minimum pour les parrainer? Qu'est-ce que cela signifie si elle n'en est pas capable?
Le soutien social, y compris le soutien affectif, matériel et instrumental informel que fournissent la famille et les amis, est un déterminant de la santé bien connu. Par conséquent, la présence de la famille ou d'un réseau social renforcé est cruciale pour le bien-être des nouveaux arrivants au Canada et ce sentiment de bien-être est crucial pour le processus d'intégration. La perte de soutien social et de réseaux sociaux est encore plus évidente lorsque les femmes ne sont pas en mesure de retrouver leurs enfants adultes. Par exemple, d'anciennes aides familiales résidentes qui ont des enfants sont souvent les plus désireuses de les retrouver, car dans la plupart des cas, elles en ont été séparées pendant de nombreuses années avant de venir au Canada.
L'âge auquel un enfant est considéré comme étant adulte indépendant et ainsi inadmissible au parrainage est crucial ici et un grand nombre de personnes se retrouvent dans une course contre la montre pour gagner suffisamment d'argent et faire venir leurs enfants au Canada ou pour continuer de financer l'éducation postsecondaire de leurs enfants pour maintenir leur admissibilité au parrainage. Pourtant, comme nous le savons, le traitement des demandes peut prendre des années et les ressources financières peuvent être serrées, car les femmes essaient de faire rester leurs jeunes enfants à l'école tout en faisant face à une myriade d'autres dépenses. Dans un certain nombre de cas, une femme qui a été séparée de ses enfants pendant plus de 10 ans a été forcée de dire à sa fille aînée ou à son fils aîné qu'il ne pouvait pas se joindre à la famille, après avoir impatiemment attendu leur arrivée pendant des années.
Le stress qui s'ensuit pour les femmes qui font face à ces décisions a des effets à long terme sur leur santé et des conséquences éventuelles pour l'intégration des immigrantes. Effectivement, comment une personne peut-elle se considérer comme membre d'une société lorsque cette même société l'a forcée à choisir entre ses enfants? Je me souviens avoir interrogé une femme qui avait reçu l'asile politique au Canada après le coup d'État au Chili, en 1973.
Vingt-cinq ans plus tard, elle était toujours secouée par le fait qu'elle et son mari avaient laissé leur fille de 19 ans derrière eux, en Argentine, jusqu'à ce qu'ils soient capables de réussir à la faire venir. Ils étaient certes redevables du refuge qui leur avait été accordé, mais sa relation avec sa fille ne s'en est jamais remise. Lorsque j'ai parlé à sa fille qui était alors dans la quarantaine, elle pleurait encore de douleur à cause de la séparation qu'elle avait vécue comme un abandon.
L'idée voulant que les enfants de plus de 18 ans doivent s'émanciper de leur famille est un concept occidental basé sur des notions d'individualisme. Toutefois, dans bien des cultures, les membres d'une famille sont interdépendants et les enfants adultes jouent un rôle vital pour subvenir aux besoins de la famille, aussi bien au niveau matériel qu'à d'autres niveaux. La présence des membres d'une famille peut apporter le genre d'amour et de soutien qui à long terme est positif pour la santé, le bien-être et la stabilité durable d'un immigrant ou d'une immigrante, de sa famille et de la communauté au sens large...
Madame Spitzer, je suis désolé. J'ai de mauvaises nouvelles. Lorsque la lumière clignote, cela signifie que les cloches sont en train de sonner et qu'il nous faut aller voter.
Étant donné que le vote n'aura lieu que dans une demi-heure, j'imagine puisqu'il s'agit de cloches de 30 minutes, et ensuite je ne sais pas ce qui va se produire, ai-je le consentement unanime du comité pour siéger 10 minutes de plus?
Des voix: D'accord.
Le président: Continuez, madame Spitzer.
Et pourtant la réglementation actuelle a un effet disproportionné sur les femmes de minorités raciales nées à l'étranger. Ainsi, nous avons besoin d'examiner les coûts si l'on se débarrasse de cette source de soutien importante pour le bien-être des nouveaux Canadiens, pour leur perspective et pour leur attitude envers la société canadienne.
En conclusion, nous devons soigneusement appliquer une optique sexospécifique pour voir comment la politique en matière de parrainage pourrait avoir une incidence différentielle sur les hommes et les femmes, aussi bien dans le rôle de garant que celui de parrainé et pour voir si cela risquerait involontairement d'exacerber l'inégalité entre les sexes et empêcher un groupe de nouveaux arrivants d'exploiter leur plein potentiel dans le domaine public et privé.
En outre, nous devons nous pencher sur l'incidence sexospécifique des exigences du parrainage ainsi que les concepts eurocentriques d'enfance et d'âge adulte, ainsi que celui de la famille pour voir qui est le plus négativement affecté et pour voir qui est rendu le plus vulnérable par nos politiques. Lorsque les immigrants peuvent puiser dans leurs réseaux sociaux et leurs réseaux de soutien, nous encourageons une plus grande cohésion sociale ainsi qu'un Canada plus pacifique et plus prospère.
Merci encore une fois de m'avoir permis de m'exprimer aujourd'hui.
Je suis désolé. J'essaye de voir ce que nous allons faire cet après-midi.
Madame Dhillon, merci beaucoup, vous êtes la suivante.
Allez-y, jusqu'à la fin du temps dont nous disposons. Merci.
Merci pour votre généreuse invitation à participer à cette importante discussion sur le renforcement de la protection des femmes dans notre système d'immigration. C'est un honneur pour moi d'être invitée. À partir de ma propre expérience, je me suis mise à défendre celles qui, comme moi, ont fait l'objet de violence familiale.
Cette expérience m'a permis d'écrire le livre intitulé Black and Blue Sari qui relate mon mariage à un homme qui, tout au long de nos 12 années de mariage, m'a agressée, torturée et menacée violemment et régulièrement. Dans le livre, je décris les événements éprouvants qui se sont déroulés dès le jour où j'ai épousé un homme apparemment chaleureux et charmant jusqu'au jour où notre mariage a pris fin. J'ai été brutalement violée par lui le soir de notre lune de miel. À partir de cette nuit-là, j'ai fait l'objet de mauvais traitements émotionnels, physiques, sexuels et financiers plusieurs fois par semaine, et il a même essayé de me tuer à plusieurs reprises.
En raison de ces sévices corporels et de sa rage, je vis constamment avec la douleur et j'ai une mâchoire artificielle qui a nécessité 10 interventions chirurgicales. Je porte des séquelles à vie en dépit du fait que mon époux soit décédé d'une mort violente il y a quelques années. Je suis toujours hantée par le souvenir de ces horribles sévices. Je suis une mère monoparentale de quatre enfants adultes en plus d'être la fière grand-mère d'un petit garçon et d'une jolie petite fille.
L'une des raisons pour lesquelles je partage publiquement mon récit, c'est pour mettre un terme à cette épidémie bien cachée derrière des portes closes. Certains m'ont demandé ce qu'une femme seule pouvait faire en dénonçant cette situation, étant donné la prévalence de cette violence conjugale et ces mauvais traitements? Je leur réponds souvent en racontant l'histoire suivante du garçon et de l'étoile de mer.
Un homme qui marchait sur une plage déserte remarque qu'un garçon se penchait souvent, qu'il ramassait quelque chose et qu'il le rejetait à la mer. Ce garçon ramassait des étoiles de mer qui avait été projetées sur la plage et, une à la fois, il les remettait à l'eau. L'homme dit au garçon: « Tu ne pourras certainement pas changer les choses. » Le garçon s'est penché pour ramasser une autre étoile de mer et, en souriant, il la lança dans la mer en répondant: « J'ai considérablement changé les choses pour celle-là! »
Donc, un peu comme ce petit garçon dans le récit, je vais faire mon possible pour faire changer les choses pour les victimes de violence conjugale, même si c'est pour une seule à la fois. Si nous travaillons de concert, nous pouvons apporter des changements positifs, comme le fait aujourd'hui votre comité, et je vous en félicite.
Comme vous pouvez l'imaginer, il est très difficile de mesurer la véritable portée de la violence conjugale à l'égard des femmes, puisque la plupart des incidents de violence familiale et d'agression sexuelle ne sont pas rapportés. J'aimerais vous éclairer un peu sur cette importante question.
La violence à l'égard des femmes touche directement non seulement les victimes, leurs enfants, leur famille et leurs amis, mais également leur employeur et leurs collègues de travail. Cela peut se traduire par des conséquences très graves que ce soit sur le plan financier, social, ou bien de la santé physique et psychologique. La violence conjugale se déroule dans un cadre permanent et un cycle sans fin, elle commence par des sévices affectifs et verbaux et, dans bien des cas, tout comme dans le mien, elle va jusqu'aux blessures et même le meurtre.
Pour les femmes, peu importe leur culture, qui sont prises au piège en raison d'une faible estime de soi, d'un manque de compétences ou de connaissances qui leur permettraient d'être autosuffisantes ou bien qui craignent les représailles, il est souvent bien difficile d'échapper à un partenaire violent. La plupart des collectivités ethniques sont très unies et on y exerce beaucoup de pression sur l'épouse pour qu'elle reste avec son époux peu importe les circonstances. Malheureusement, bon nombre d'immigrantes peuvent aussi faire l'objet de sévices de la part d'autres membres de leur famille lorsque la famille élargie vit ensemble.
La peur d'être déportée joue aussi un rôle dans le fait que des femmes parrainées restent dans des relations violentes. Par manque d'information sur les nouvelles dispositions touchant la violence conjugale, les femmes parrainées n'ont aucune idée de leurs droits. Leur époux violent profite souvent de cette ignorance en usant de menaces et de mauvaises informations pour les contrôler et les empêcher de le quitter.
Dans de nombreuses cultures d'Asie du Sud, les immigrantes sont élevées dans la croyance qu'elles n'ont aucun droit. On va jusqu'à leur faire croire qu'elles pourraient même perdre la garde de leurs enfants. Dans bien des cultures, le mariage est considéré comme étant permanent, même si cela change peu à peu. On s'attend à ce que l'on demeure silencieuse et que l'on reste mariée peu importe les circonstances.
La violence conjugale peut créer chez les femmes un sentiment de honte et d'embarras, qui fait que les relations abusives restent cachées. Il n'est pas facile d'admettre qu'on est maltraité. Un autre signe de la violence conjugale est l'isolement, qui empêche de sortir de chez soi et d'obtenir de l'aide.
Je recommanderais notamment au comité de mieux informer de façon suivie ces immigrantes de leurs droits légaux et financiers, et de la problématique des mauvais traitements avant qu'elles n'entrent au Canada et pendant leur processus d'admission. Il faut garantir que ces femmes ne seront pas déportées ou menacées de déportation si elles appellent la police ou les autorités pour dénoncer leurs agresseurs, parce que la plupart d'entre elles vivent sous la menace que leur agresseur révoquera leur parrainage.
Il faudrait aussi leur fournir les documents leur expliquant où les victimes peuvent obtenir de l'aide dans leur propre langue et leur fournir des numéros de téléphone. Dans la mesure du possible, tout dossier de violence devrait faire l'objet de vérification, surtout lorsqu'il y a eu un parrainage antérieur et l'on devrait transmettre l'information aux femmes visées au moment de leur entrevue initiale.
Il faudrait fournir de l'information pertinente pour garantir que les femmes ne seront pas déportées en raison de la rupture de leur mariage. À ma connaissance, l'on propose d'adopter une loi pour une période de deux ans qui sème la peur parmi un bon nombre de ces femmes parrainées puisqu'elles craignent d'être renvoyées dans leur pays.
Ma dernière recommandation vise la tenue d'une évaluation de suivi obligatoire soit par un agent d'immigration ou une agence pour garantir que ces femmes obtiennent les soins nécessaires promis par leur parrain. L'évaluation devrait aussi vérifier leurs progrès au Canada; je proposerais que l'évaluation ait lieu tous les six mois ou tous les ans.
En conclusion, je tiens à signaler que ces mauvais traitements sont une violation des droits de la personne, des droits des femmes et finalement des droits de tous les Canadiens. J'espère que mon récit vous touchera suffisamment et vous mettra suffisamment en colère pour que vous vous joigniez à moi afin de prendre des mesures concrètes contre la violence conjugale. Je me suis engagée à mettre un terme à toute forme de violence contre les femmes et les enfants. Je souhaite ardemment que les hommes et les femmes s'unissent pour lutter contre ce type de violence.
Si nous ne prenons pas les mesures nécessaires pour lutter contre cette violence je crains qu'elle ne fasse qu'augmenter. J'estime qu'un grand nombre de femmes victimes de violence ont perdu tout espoir et qu'elles n'ont aucun avenir. Je pense que nous devrons prendre des mesures initiales pour garantir la mise en place de plans permettant de changer le paradigme actuel.
Je vous remercie tous et toutes de m'avoir invitée à prendre part à cette discussion et j'espère que vous tiendrez compte de mes recommandations afin que nous puissions assurer un avenir plus brillant et plus sécuritaire pour les femmes, et ultimement, pour les générations futures, nos enfants. Tout comme le petit enfant dans le récit que j'ai raconté plus tôt, ensemble, nous pouvons avoir une influence positive. Je vous félicite encore une fois de prendre l'initiative de lutter contre ce comportement inacceptable, mais de plus en plus courant. Je vous souhaite la meilleure des chances dans vos efforts.
Merci.
Merci, madame Dhillon.
Nous avons un problème. Je vais demander l'aide du comité. Nous recevons un autre groupe de témoins à 16 h 30. Nous aurions dû également partir il y a quelque temps pour aller voter. Nous devrons être à la Chambre dans environ 10 ou 15 minutes. Je propose au comité de laisser partir Mme Spitzer et Mme Dhillon et de demander à Mme Siddiqui et à M. Gora de se joindre au deuxième groupe de témoins. Nous n'avons tout simplement pas suffisamment de temps.
Monsieur Menegakis.
Oui, j'allais justement proposer quelque chose de la sorte, monsieur le président. Il serait peut-être possible de demander à nos témoins de rester et nous pourrions annuler le deuxième groupe de témoins. À notre retour, nous pourrions poser des questions à ce premier groupe de témoins et avoir la chance d'obtenir leur rétroaction. C'est à vous de décider.
Je préfère de loin votre solution, qui nous permettra d'entendre tous les témoins qui sont venus à Ottawa pour nous parler aujourd'hui.
Je propose un petit changement, si elles le désirent, Mme Dhillon et Mme Spitzer pourraient rester, car lorsque nous poserons des questions, elles pourront...
Je suis vraiment désolé de la situation. L'une des joies d'être le président, c'est d'être le porteur des mauvaises nouvelles.
Je vais suspendre la séance. Madame Spitzer et madame Dhillon, vous pouvez rester, mais nous manquerons de temps. Madame Siddiqui et monsieur Gora, nous essaierons de vous ajouter au deuxième groupe de témoins.
Nous allons reprendre la séance. Mesdames et messieurs qui avez pris le temps de venir à notre aide, je suis désolé, mais vous constatez la vie folle que nous menons ici. Nous avons dû aller voter.
Vous pourrez faire votre exposé, mais nous n'aurons malheureusement pas de temps pour les questions. La séance devra se terminer vers 17 h 30. Nous allons essayer de donner 8 minutes à chacun des trois groupes.
Nous allons commencer par Mme Sekhar, directrice exécutive du centre Asian Women's Centre. Merci d'être ici.
Merci de m'avoir invitée. J'apprécie que vous ayez le temps de m'écouter. J'essaierai de parler aussi rapidement que possible.
Monsieur le président, et mesdames et messieurs les députés, je vous remercie de m'avoir invitée à comparaître aujourd'hui devant le comité dans le cadre de votre étude sur le renforcement de la protection des femmes dans notre système d'immigration. Mon exposé portera sur trois aspects. Premièrement, les défis auxquels font face les femmes menacées par un répondant violent et les façons d'empêcher qu'elles en soient les victimes, et les conséquences de possibles sanctions pour le répondant. Deuxièmement, les compétences et le soutien nécessaires des épouses parrainées, surtout celles qui sont victimes de violence et isolées, pour qu'elles réussissent de façon autonome et fassent leur vie au Canada; et troisièmement, les défis uniques des survivantes de mariage forcé qui sont parrainées et les façons de mieux les appuyer.
Premièrement, selon l'expérience de notre centre au cours des dix dernières années, il y a de nombreuses femmes victimes de violence qui ont été parrainées par un époux au Canada, et je parle strictement de l'expérience des femmes. Je sais que des hommes vivent cela également, mais je parle des femmes, parrainées par un époux au Canada, qui vivent ce genre d'expérience beaucoup plus fréquemment. Nombre d'entre elles ont de la difficulté à avoir accès aux services qui les protégeront de ces mauvais traitements. Dans ces difficultés, il y a la connaissance limitée de l'une ou des deux langues officielles, c'est-à-dire l'anglais et le français, un manque de connaissance des lois canadiennes et une absence de confiance ou un sentiment de peur envers les policiers et les autres organismes d'application de la loi.
Les défis des épouses parrainées, surtout celles qui sont victimes de mauvais traitements, sont complexes et nous remarquons qu'ils deviennent encore plus complexes maintenant à cause de l'imposition d'une période de résidence conditionnelle de deux ans. Une grande partie de ces difficultés découle du fait d'être isolée dans un nouveau pays, avec peu ou pas d'appui communautaire local. Il y a aussi une inégalité de statut fondé sur la durée de séjour au pays, et l'époux qui est au Canada depuis plus longtemps a une meilleure connaissance du contexte et plus d'appuis dans la communauté locale. Cet avantage est propice à la manipulation et aux menaces, ce qui cause de la peur, de l'ostracisme et de la honte.
Notre centre a constaté que les femmes victimes de mauvais traitements dans certaines situations de parrainage ont peur de perdre leurs enfants et leur statut d'immigrante, puisque leur répondant — qui, avec sa famille, est celui qui les maltraitent — les menace d'expulsion et de leur enlever leurs enfants.
En octobre 2012, le gouvernement fédéral a mis en oeuvre des changements législatifs aux politiques d'immigration et a établi une période de résidence permanente conditionnelle de deux ans pour les époux parrainés, dont la relation date de deux ans ou moins et qui n’ont pas d’enfant en commun. Ces changements ont été apportés pour empêcher que des personnes parrainées ne se servent du mariage pour immigrer. Bien que cette nouvelle obligation soit assortie d'une exception en faveur des victimes de mauvais traitements et de négligence de la part de leur parrain et des membres de sa famille, notre expérience nous indique que les victimes ayant survécu aux mauvais traitements, dans la plupart des cas, sont incapables de se prévaloir de cette exception pour les raisons suivantes.
Elles n'ont pas accès aux renseignements dans leur propre langue; elles ne connaissent pas les systèmes de soutien disponibles; elles ont peur des systèmes, du gouvernement et d'autres organisations; elles ont peur du répondant et peur de perdre leur statut parce que le dépôt d'une plainte peut mener à des représailles de la part du répondant, y compris des menaces d'expulsion par CIC à cause de fausses déclarations — et ce que je dis est fondé sur les dossiers dont nous nous sommes occupés — elles ont peur de perdre leurs enfants qui pourraient naître dans cette période de deux ans; et elles n'ont pas d'appui ou d'indépendance financiers pour obtenir un appui juridique ou autre.
Dans le cas d'expulsion, elles ont peur de la réaction de la famille et de la stigmatisation communautaire dans leur pays d'origine. La possibilité de se remarier pourrait être faible ou inexistante, selon les traditions de la communauté à laquelle elles appartiennent; il y a une forte possibilité que si l'auteur des mauvais traitements est expulsé, la famille de la femme fasse l'objet de menaces, de mauvais traitements et de violence.
Malheureusement, même lorsque la violence conjugale est déclarée, les femmes hésitent à agir. En fait, une épouse parrainée a besoin que son mari se porte garant pour ouvrir un compte de banque, pour obtenir une carte de crédit, ou pour d'autres raisons.
Nous constatons que les répondants utilisent la nouvelle loi pour contrôler et maltraiter leurs victimes en les menaçant de la perte de leur statut et d'expulsion si elles se plaignent. Nous voyons que les femmes piégées dans de telles relations ne peuvent obtenir de l'appui que de l'auteur des mauvais traitements ou de sa famille. De tels répondants limitent normalement les rapports des immigrantes nouvellement mariées avec leur famille et leurs amis et les isolent totalement de leur réseau d'appuis.
Il y a un déséquilibre dans le rapport de forces entre la personne parrainée et le répondant. Ce phénomène s'est intensifié depuis l'imposition de la résidence permanente conditionnelle. Dans bien des cas, les femmes souffrent en silence. Elles en parlent, mais ne le signalent pas aux autorités. C'est ce que nous avons constaté. Il est peu probable qu'elles prennent des mesures concrètes. Notre centre s'inquiète du manque de sécurité et du danger qu'encourent ces femmes.
Comment aider ces femmes parrainées par mariage à atteindre une certaine autonomie financière, à s'affranchir de l'emprise du conjoint et à vivre ainsi en sécurité, à l'abri de la violence. Quelles habiletés peut-on leur enseigner. Quels appuis leur donner? Au Centre, nous voyons bien des épouses parrainées qui sont insultées, maltraitées psychologiquement et physiquement et privées d'argent. Vous savez qu'elles nous demandent même des billets d'autobus? Nous essayons de les aider, sans quoi elles ne pourraient pas venir au centre. La situation est grave.
En Asie du Sud, la mariée reçoit en dot des bijoux et d'importantes sommes d'argent. Cette pratique a cours dans certaines communautés. Si des parents tiennent absolument à marier leur fille, ils sont disposés à donner des bijoux, de l'argent, ou ils promettent de l'argent contre le mariage de leur fille. Dès lors, l'argent et les bijoux sont entre les mains de l'agresseur et de sa famille. C'est très courant. Malheureusement, les épouses parrainées dépendent financièrement de leur agresseur. Elles sont vulnérables et peuvent être victimes de mauvais traitement.
Quand c'est l'époux qui tient les cordons de la bourse, il est difficile pour la femme de jouir d'une sécurité financière. Nous avons observé que les épouses parrainées depuis peu ont beaucoup plus de difficulté à trouver un emploi ou à suivre une formation. Parfois, c'est à cause du manque de ressources ou de centres qui peuvent les aider. Au cours des...
Je vais vous présenter mes recommandations rapidement.
On recommande que les victimes et survivants puissent invoquer plus facilement l'exception relative aux mauvais traitements lorsque la relation se dissout et que le parrainage est conditionnel, surtout lorsque ces victimes sont visées par des enquêtes déclenchées sur la base de faux motifs par l'agresseur ou le répondant en guise de représailles, etc.
À l'heure actuelle, le fardeau de la preuve repose sur les victimes et survivants. On s'attend à ce qu'elles fournissent des preuves de cohabitation et de mauvais traitements, ce qui est pratiquement impossible, vu le manque de signalement et la difficulté à obtenir des services. Dans bien des cas, c'est le répondant qui possède les documents attestant de la cohabitation.
Nous recommandons également que les ressources affectées au programme d'établissement des époux parrainés ne soient pas limitées à la formation linguistique, mais comprennent aussi un service de conseils général avec un volet indépendance financière. La violence contre les épouses récemment arrivées est une question qui relève du programme d'établissement.
Créer un fonds spécial pour les époux parrainés privés de recours à l'aide juridique ou aux services de santé mentale. Ce fonds pourrait également les aider à acquérir de nouvelles habiletés...
... mais il faut que je vous demande d'arrêter. Je suis désolé.
Vous vous êtes donné beaucoup de peine. L'analyste a une copie de votre document, mais nous ne pouvons le distribuer. Il doit être dans les deux langues. Le greffier s'occupera de le faire traduire, et il sera distribué par la suite à tous les membres du comité.
Nous enchaînons maintenant avec Mme Alia Hogben, directrice exécutive du Conseil canadien des femmes musulmanes.
Bonjour, madame. Vous avez huit minutes.
Bien, je vais vous proposer quelque chose. Je serais d'accord...
Je me suis déplacée de Kingston, et je préférerais ne pas faire mon exposé maintenant. Ces interruptions sont certes difficiles pour vous tous, mais aussi pour nous, car nous avons investi beaucoup d'efforts dans la préparation de cet exposé.
Si cela vous convient, pourrais-je revenir à un autre moment?
On informe tous les témoins qu'ils ont jusqu'à huit minutes pour faire leur exposé. On le leur dit à l'avance. On vous a également avisé.
Ce sera difficile, madame Hogben. Nous avons déjà prévu tous nos témoins pour la semaine prochaine. À notre retour du congé de Pâques, nous mettrons de côté cette étude pendant un certain temps afin d'étudier un projet de loi. Il pourrait s'écouler beaucoup de temps avant qu'un espace se libère et que nous puissions vous réinviter et je ne peux pas vous le garantir.
Comme vous le comprenez, nous nous intéressons moins au renforcement du programme d'immigration qu'à exprimer le souci que suscite chez nous la vulnérabilité de la femme parrainée. Nous cherchons des moyens de la protéger et proposons des gestes positifs pour l'aider à s'installer dans sa nouvelle vie au Canada.
Permettez-moi de vous parler un peu de notre organisation. Elle a été fondée en 1982. Elle s'appelle le Conseil canadien des femmes musulmanes et nous travaillons dur pour mettre en oeuvre les objectifs d'équité, d'égalité et d'autonomie des femmes et des filles. Nous le faisons grâce à des projets spécifiques, des interventions, de l'éducation publique et des prises de position.
Par exemple, nous avons récemment lutté contre l'imposition de toute loi familiale religieuse dans l'arbitrage privé juridiquement contraignant. Selon nos recherches, aucune loi familiale religieuse ne comportait comme valeur fondamentale l'égalité des femmes. Nous sommes des femmes croyantes, et nous voulions que les mêmes principes du droit familial s'appliquent à nous toutes. Nous terminons également un projet sur la question de la violence domestique, des mariages forcés, de la mutilation génitale des femmes ou de l'excision, ainsi que des filicides. Nous savons que ces questions ne touchent pas uniquement les femmes musulmanes, mais il s'agit d'un domaine qui nous intéresse.
Le CCFM ne fournit pas directement de services, mais les femmes qui font face à des difficultés font souvent appel à nous. Nous remettons en question les renseignements et les enseignements erronés qui ont des incidences négatives sur les femmes et les filles. Nous ne comprenons pas pourquoi le travail du comité consiste à alléger les conséquences d'un changement de réglementation plutôt que s'attaquer à la cause du problème, soit la réglementation elle-même. Je ne suis pas spécialiste et je ne veux insulter personne, mais n'est-ce pas l'introduction de la résidence permanente conditionnelle qui augmente la vulnérabilité des femmes? Citoyenneté et Immigration indique clairement que l'objectif du changement ne touche pas le bien-être ou la vulnérabilité des femmes, mais plutôt les mariages de convenance. Selon nous, nous ne pouvons pas présumer que le gouvernement ait fondé cette décision sur des statistiques solides. Nous n'avons trouvé aucune statistique. Bon nombre d'autres organisations n'en ont pas trouvé non plus.
Lorsque les changements ont été formulés, a-t-on soupesé les dommages possibles pour les femmes par rapport à l'élimination de la fraude découlant des mariages de convenance? Ceux d'entre nous qui avons travaillé dans le domaine de la violence faite aux femmes savons que pour bon nombre d'entre elles, qu'elles soient éduquées ou non, indépendantes ou non, confiantes ou non, il est extrêmement difficile de signaler des mauvais traitements et de la violence. Imaginez combien il peut être encore plus difficile pour une nouvelle arrivante vivant dans une situation précaire de résidence permanente conditionnelle de se manifester.
Les effets de ce programme sur ces femmes suscitent nombre de questions troublantes. Ce sont de nouvelles immigrantes, séparées de leur réseau élargi de soutien familial, tentant de s'adapter à un environnement qui ne leur est pas familier, faisant face à des obstacles comme une difficulté linguistique, ayant peut-être des ressources financières limitées, et c'est à elle de faire la preuve de leur abus lorsqu'elle demande une exemption. Le parrainage a créé une relation d'incertitude et de pouvoir inégal par rapport à leur mari.
D'autres facteurs concernent les femmes musulmanes. Les pratiques de leur société patriarcale traditionnelle, la valeur élevée accordée à la famille et les stigmates découlant d'un échec du mariage aggravent leurs problèmes. Le CCFM reconnaît que bon nombre des pays à majorité musulmane d'où viennent les immigrants au Canada ne disposent pas de lois strictes pour protéger les femmes et les filles contre la violence. Étant donné que les lois et les pratiques se fondent sur des traditions patriarcales répandues, les femmes hésiteront peut-être à signaler des cas d'abus et de violence lorsqu'elles immigrent au Canada. On accorde beaucoup d'importance à leur famille et tout le monde sait que l'échec d'un mariage doit être évité à tout prix.
Nous nous demandons également comment, exactement, un agent de CIC évaluera une relation conjugale. Pendant une période de deux ans, il faut des garanties que le couple vit en relation conjugale, ce qui signifie, selon les critères prévus, qu'il y a un lien émotif et physique suffisant, une relation exclusive, et ainsi de suite. Ces exigences ne sont-elles pas exagérément indiscrètes, puisqu'elles mettent l'accent sur l'intimité des couples? Nous sommes fiers des valeurs et des lois du Canada, qui aident généralement les femmes et les filles victimes de mauvais traitements, mais nous avons l'impression que nos valeurs et nos lois ne s'appliqueront pas à ces femmes vulnérables. Ma question est la suivante: Pourquoi le Canada permet-il cela?
Nous estimons que ce changement est raciste, puisqu'il cible certains groupes de femmes. Par exemple, le guide de la citoyenneté stipule que le Canada n'approuve pas les pratiques barbares comme les mariages forcés ou les mutilations génitales féminines. Nous pourrions demander d'ajouter la polygamie à cette liste, étant donné qu'elle est illégale au Canada mais pratiquée par certains mormons. Il faudrait l'ajouter. Nous ne pensons pas pouvoir vous donner de nouveaux renseignements surprenants, mais nous tenons à souligner que si autant de personnes vous ont exprimé leurs préoccupations au sujet du programme, alors il doit s'agir de quelque chose d'important.
Le CCFM et d'autres organisations ont beaucoup travaillé sur ces divers enjeux et je sais que nous serons tous prêts à vous aider en formulant des recommandations. Nos recommandations consistent à préciser l'objectif de cet exercice, qui est préoccupant pour les femmes vulnérables et qui ne visent pas à éliminer les mariages frauduleux, et à en faire plus au début du processus.
Il doit y avoir davantage d'efforts concertés visant à informer les immigrants au moment où ils présentent une demande dans leur pays d'origine. Ceci permettrait aux femmes de comprendre la situation avant d'arriver au Canada. De plus, il faut augmenter les services d'établissement car ceux-ci sont essentiels. Ces services devraient comprendre de la formation linguistique, du développement des compétences, ils devraient être accessibles facilement d'un point de vue géographique, sans de longues périodes d'attente et ils devraient être offerts dans une langue qui est familière à la femme.
Il est probable que certaines femmes endureront deux ans de mauvais traitements plutôt que d'entreprendre des démarches officielles auprès d'un agent de l'immigration. Dans le cadre des services offerts, une aide financière devrait être prévue pour couvrir les frais associés aux témoignages, si la femme doit témoigner. Selon mes recherches, les autres pays qui ont des programmes semblables ont fait part de difficultés dans la mise en oeuvre de la résidence permanente conditionnelle.
Nous recommandons que le programme canadien, si possible, soit mis en oeuvre pendant une période de temps déterminée, que les résultats soient consignés et qu'on évalue l'efficacité du programme par la suite. Ceci permettrait de cerner les lacunes et les problèmes du programme.
On s'inquiète particulièrement de ce qu'il adviendra des enfants dans de tels mariages, qu'il s'agisse d'un enfant intégré dans la famille et issu d'un mariage précédent ou d'un enfant né pendant les deux ans. J'espère que votre comité se penchera sur la protection des enfants.
Merci.
Merci, madame Hogben.
Madame Siddiqui et monsieur Gora, merci de votre patience et d'avoir attendu depuis 15 h 30.
Nous sommes heureux que vous soyez parmi nous, vous avez la parole.
Merci, monsieur le président, et merci au comité de nous avoir invités.
Je suis ravie d'être accompagnée d'un homme pour montrer que nous croyons à l'égalité.
Des voix: Oh, oh!
Mme Salma Siddiqui: Il est ici entouré de femmes.
Je m'appelle Salma Siddiqui et je comparais devant vous aujourd'hui en tant que présidente de la Coalition of Progressive Canadian Muslim Organizations et je suis accompagnée de mon collègue Tahir Gora, secrétaire général.
Laissez-moi commencer par féliciter le gouvernement du Canada de faire de la protection des femmes et du renforcement de leurs droits une priorité. Dans mon exposé, je communiquerai mon point de vue et celui de nos membres à propos d'un éventail de questions liées à la présente initiative du gouvernement. Dans l'ensemble, nous croyons qu'il s'agit d'un pas dans la bonne direction, mais nous croyons que certaines questions devraient être étudiées plus en profondeur et qu'il y a des occasions d'amélioration ou de réformes.
Je suis Canadienne d'origine pakistanaise et je suis arrivée ici alors que j'étais enfant en 1967. Depuis que je vis ici, j'ai remarqué des tendances différentes en immigration. Il y a un débat concernant les flux et reflux dans le domaine de l'immigration et certaines questions ont préséance à un moment ou à un autre. Toutefois, je suis désolée d'affirmer que je remarque une constante. Cette constante, c'est la fraude commise et, j'en suis certaine, par des milliers d'immigrants chaque année sous la forme de mariages de convenance. J'ai vu des familles déchirées à cause de ces mariages et toutes les parties ont une part de culpabilité.
Je vais commencer par vous raconter une histoire personnelle illustrant comment la fraude en matière d'immigration a eu des conséquences sur ma propre famille.
Au milieu des années 1970, ma soeur a parrainé puis marié un homme du Pakistan. Peu de temps après le mariage les choses ont changé. Même s'ils avaient eu un fils ensemble au cours de la première année de mariage, l'homme a quitté sa famille. Et ce n'est pas tout. Au cours des 13 années qui ont suivi, ma soeur a été mêlée à des différends concernant la garde de l'enfant. Il a utilisé l'amour de ma soeur pour son enfant, mon neveu, pour l'amener au bord de la faillite, sans parler des bouleversements émotifs qu'elle ressent encore aujourd'hui.
À l'époque, nous ne le savions pas, mais avec le recul il est clair que cette personne a profité de ma soeur pour venir au Canada. Je suis désolée de dire que le système n'a pas beaucoup changé depuis les 35 dernières années.
Maintenant, je vais parler de la question à l'étude.
Je ne remets pas en question le fait qu'il y a des femmes, et certainement des hommes aussi, qui viennent au pays et qui subissent des mauvais traitements de la part de leurs parrains. Ils doivent trouver une porte de sortie et ne connaissent probablement pas aussi bien les ressources offertes que vous et moi tenons pour acquis en tant que Canadiens installés depuis longtemps. Je comprends que ce sont des victimes et qu'elles ont besoin de protection. Toutefois, je constate également que le type d'exemptions contenues dans la disposition proposée sur les deux années de cohabitation pourraient continuer d'être utilisées pour commettre de la fraude en matière d'immigration au moyen des mariages de convenance.
Je suis ici aujourd'hui pour vous sensibiliser à ce type de fraude.
On ne peut pas rédiger des politiques publiques les yeux fermés. On doit faire un examen exhaustif de toutes les questions pertinentes afin de s'assurer d'arriver au meilleur résultat possible. Je vais vous raconter quelques histoires qui, je l'espère, élargiront vos horizons. Nombre de ces mariages — au moins 7 % selon le groupe Canadians Against Immigration Fraud — concernent des personnes de l'Asie du Sud-Est. Étant moi-même d'origine pakistanaise, je suis bien au fait de ce genre de problèmes.
Au cours d'un récent voyage au Pakistan, j'ai rencontré un consultant en immigration et je me suis présentée comme une femme musulmane célibataire ayant peu de moyens financiers. J'ai demandé des conseils afin de connaître les meilleures options dans mon cas. En fonction du profil que j'ai présenté, je n'entrais pas dans la catégorie des investisseurs. J'ai reçu des conseils troublants. On m'a dit que j'aurais davantage de chances au Canada et en Australie. La méthode proposée? Un mariage « en papier » pour citer le consultant.
Voici le message qu'on transmet. Il faut savoir que ces cas sont réels et qu'il faut être vigilant lors de la sélection des demandeurs. Je comprends qu'il y a peut-être un problème de ressources, mais je pense aussi que la mauvaise gestion de l'immigration est irresponsable. Je pense qu'il est important de souligner qu'il peut y avoir des considérations importantes de sécurité associées à cette pratique.
Vous vous demandez peut-être pourquoi je suis allée voir un consultant. Je suis allée parce que je voulais me faire ma propre idée. Je me suis inspirée d'un cas que je connais particulièrement, celui d'un jeune homme atteint de problèmes mentaux dupé et entraîné dans un mariage de convenance. Il a entrepris de bonne fois le processus de parrainage pour sa conjointe. À son arrivée, elle l'a quitté. Je ne crois pas qu'il soit exagéré de dire que c'est ce qu'il voulait depuis le début et qu'elle a probablement reçu des conseils sur la façon de procéder.
Il existe de nombreux autres cas. Je suis certaine que vous entendrez — et que vous avez déjà entendu — de nombreux exemples semblables.
J'aimerais vous parler d'un autre problème qui me tient à coeur en tant que femme musulmane. J'en ai pris connaissance lors de mes contacts avec différents pans de la communauté partout au pays. Le problème est lié à un certain nombre de bureaux de services d'établissement des immigrants qui ont le mandat d'aider les victimes. De nombreux travailleurs de première ligne dans ces bureaux proviennent de la région du Sahel, du Golfe et de l'Asie du Sud-Est. Ils adhèrent à une interprétation plus conservatrice de l'islam. Ils encouragent la charia et la polygamie et je suis d'accord avec ce que vous avez dit au sujet des mormons. Ils agissent comme facilitateurs à cet égard.
Nous avons pris connaissance de cas où des femmes ont demandé le statut de réfugié pour motifs de violence conjugale, mais quelques années après avoir été acceptées, elles ont cédé aux pressions de la famille et de la société et elles ont présenté une demande pour parrainer l'agresseur qu'elles ont fui. Ce n'est peut-être pas un exemple de fraude, mais c'est certainement lié à l'objectif de ce projet de loi visant à prévenir la violence faite aux femmes.
En terminant, j'aimerais vous remercier pour le temps de parole que vous m'avez accordé et je vous demande de réfléchir aux problèmes dans leur ensemble lorsque vous rédigerez cette politique. Trop de Canadiens ont souffert à cause de ces problèmes tant sur le plan émotif que financier. Ces cas menacent la crédibilité de notre système d'immigration et peuvent aussi constituer une menace à notre sécurité collective. Merci de cette occasion de témoigner et nous espérons avoir pu contribuer à la discussion.
Vous avez tous contribué et je vous en remercie. Je suis désolé, nous terminons habituellement à 17 h 30 et les députés ont d'autres engagements et doivent partir. Nous n'aurons pas le temps de vous poser des questions, mais je vous remercie, au nom du comité d'être venus témoigner. Merci beaucoup.
Avant de conclure, j'aimerais dire aux députés qu'on m'a informé que le ministre Alexander est disponible le 28 mai à 15 h 30 afin de faire l'examen du Budget principal des dépenses.
Monsieur Menegakis.
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