CIMM Réunion de comité
Les Avis de convocation contiennent des renseignements sur le sujet, la date, l’heure et l’endroit de la réunion, ainsi qu’une liste des témoins qui doivent comparaître devant le comité. Les Témoignages sont le compte rendu transcrit, révisé et corrigé de tout ce qui a été dit pendant la séance. Les Procès-verbaux sont le compte rendu officiel des séances.
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Comité permanent de la citoyenneté et de l'immigration
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TÉMOIGNAGES
Le lundi 12 mai 2014
[Enregistrement électronique]
[Français]
Mesdames et messieurs, je vous souhaite la bienvenue à cette 26e séance du Comité permanent de la citoyenneté et de l'immigration.
Aujourd'hui, nous poursuivons notre étude sur l'objet du projet de loi C-24.
[Traduction]
Merci aux témoins de leur présence pour la première heure de séance du comité.
Nous accueillons, de la Metro Toronto Chinese and Southeast Asian Legal Clinic, Mme Avvy Yao-Yao Go, directrice de clinique. Bienvenue à vous. M. Paul Attia comparaît à titre de porte-parole d'Immigrants for Canada. Bienvenue. D'autres témoins comparaissent à titre personnel et partageront leur temps de parole: M. Bernie M. Farber, membre fondateur du Jewish Refugee Action Network, également appelé JRAN, et M. Mitchell J. Goldberg, avocat. Je vous souhaite la bienvenue.
Nous entendrons d'abord les déclarations d'ouverture.
Madame Yao-Yao Go, vous avez un maximum de huit minutes. À vous la parole.
Je suis directrice de clinique de la Metro Toronto Chinese and Southeast Asian Legal Clinic, un organisme communautaire sans but lucratif qui fournit des services juridiques gratuits aux membres des communautés chinoises et de l'Asie du Sud-Est établies à Toronto. Merci au comité de me permettre d'exprimer notre point de vue sur le projet de loi.
La citoyenneté nous définit comme peuple et comme nation. Pour les Canadiens d'origine chinoise et bien d'autres qui ne pouvaient prétendre par le passé à la citoyenneté canadienne, la citoyenneté est autant une question de respect mutuel que de sentiment d'appartenance. Si nous voulons éviter de commettre les mêmes erreurs d'injustice et d'exclusion que par le passé, nous devons examiner toute modification de la Loi sur la citoyenneté sous l'angle du respect et de l'égalité.
Sous le régime du projet de loi C-24, le processus d'obtention de la citoyenneté canadienne devient de plus en plus restrictif, et le pouvoir du gouvernement du Canada de la révoquer de plus en plus vaste. De plus, le projet de loi C-24 exclura de façon démesurée de la citoyenneté certains groupes, surtout des femmes, ainsi que les immigrants de certains groupes racialisés. Pendant le temps qu'il me reste, je vais expliquer pourquoi.
D'abord, le projet de loi propose de faire passer la durée de résidence de trois ans au cours d'une période de quatre ans, à quatre ans en une période de six ans. De ce fait même, il sera plus long d'obtenir la citoyenneté. Ce qui est plus troublant encore, c'est que le temps passé à attendre le statut de résident permanent ne sera plus reconnu. Ce changement nuira aux réfugiés et aux aides familiaux résidants, qui sont très largement des femmes de couleur et qui se font exploiter pendant des années avant d'obtenir la résidence permanente. Pourraient aussi être touchées les femmes qui arrivent au Canada comme conjointes parrainées et sont assujetties à la résidence permanente conditionnelle pendant deux ans.
Deuxièmement, non seulement la disposition sur l'intention de résider est-elle injuste, parce qu'elle ne s'applique qu'aux citoyens naturalisés et non à ceux qui sont nés au Canada, mais elle permet aussi de révoquer la citoyenneté d'un Canadien qui, pour des raisons légitimes, doit quitter le Canada, par exemple pour travailler ou à cause d'obligations familiales. Il se peut que cette disposition viole aussi l'article 6 de la Charte des droits et libertés, qui garantit la liberté de circulation de tous les citoyens canadiens, naturalisés ou de naissance, et l'article 15 de la Charte qui garantit les droits à l'égalité.
Troisièmement, le projet de loi élargit considérablement le groupe des personnes tenues de satisfaire aux exigences en matière de langue et de connaissances pour devenir des citoyens, sans l'aide d'un interprète. Les exigences viseront les personnes de 14 à 64 ans et non plus de 18 à 54 ans. Cela aura un grave impact sur de nombreux réfugiés et néo-Canadiens qui font partie de la catégorie du regroupement familial, dont les femmes parrainées par un conjoint et les parents et grands-parents parrainés.
Comme je le signale dans mon mémoire, l'âge moyen des parents et grands-parents, au moment de leur arrivée, n'est que de 60 ans. La règle s'appliquera donc à une grande majorité d'entre eux. Cette mesure nuira aussi de façon démesurée aux immigrants venus de pays où l'anglais n'est pas la première langue et à la majorité des immigrants racialisés.
Quatrièmement, signalons le nouveau pouvoir permettant au ministre de révoquer la citoyenneté canadienne pour les personnes ayant une double citoyenneté parce qu'elles ont été reconnues coupables à l'étranger de trahison ou de terrorisme, par exemple. Deux grands problèmes. Premièrement, on crée une citoyenneté à deux niveaux en distinguant les personnes ayant une double citoyenneté de celles qui ne l'ont pas. Deuxièmement, cette disposition s'applique même si la condamnation est prononcée dans des pays qui ont un bilan contestable en matière de droits de la personne et qui ne respectent pas le principe de la primauté du droit. En vertu de cette nouvelle règle, Nelson Mandela aurait perdu son statut de citoyen canadien honoraire parce qu'il a été reconnu coupable de trahison par le gouvernement d'Afrique du Sud à l'époque de l'apartheid. Comme un autre de vos témoins l'a dit, environ 150 000 Canadiens ont la double citoyenneté de naissance. Ils seront visés par cette modification.
Enfin, le projet de loi propose de remplacer le droit automatique d'interjeter appel auprès de la Cour fédérale par une demande de contrôle judiciaire avec la permission de la cour. Non seulement limite-t-on la capacité des demandeurs de contester des décisions négatives, mais, plus important encore, on restreint le contrôle judiciaire de l'exercice du pouvoir ministériel.
À cause du projet de loi, qui apporte aussi d'autres modifications, notamment la hausse des frais et des exigences linguistiques plus rigoureuses, moins d'immigrants pourront devenir citoyens canadiens.
Outre le fait qu'un plus grand nombre d'immigrants seront privés de droits électoraux, il nous faut aussi nous interroger sur les conséquences des modifications pour le Canada. La vaste majorité des Canadiens sont attachés à des valeurs fondamentales comme une société inclusive et à des principes comme l'égalité, la primauté du droit et la démocratie. Nous nous efforçons tous de les respecter, notamment en veillant à ce que toute personne au Canada ait un accès égal au droit le plus important de tous, celui de devenir citoyen. Refuser ce droit aux immigrants, c'est leur faire comprendre qu'ils ne sont pas les bienvenus au Canada.
Il est dans l'intérêt du Canada d'encourager les immigrants à devenir citoyens. Sinon, les immigrants ne verront pas le Canada comme leur pays d'attache et y penseront à deux fois avant de s'y établir. Le Canada et les immigrants en sortiront tous deux perdants.
Au lieu de favoriser une société plus inclusive et égalitaire en rendant la citoyenneté plus accessible à tous les immigrants, le projet de loi C-24 nous ramène à l'époque de l'exclusion et de la discrimination en refusant à beaucoup d'immigrants le droit de faire du Canada leur pays. Nous demandons donc respectueusement au comité d'adopter les recommandations formulées dans notre mémoire, de renforcer la vraie valeur de la citoyenneté canadienne tout en servant les intérêts du Canada.
Merci.
Merci et bonjour à tous.
Nous remercions le comité de nous offrir cette possibilité de lui présenter notre point de vue au comité sur un sujet fort important. Immigrants for Canada y voit un honneur et un privilège.
Je suis honoré de représenter à titre de porte-parole Immigrants for Canada. Les opinions que j'exprimerai aujourd'hui sont celles des membres de l'organisation. C'est pourquoi je limiterai mes propos aux questions qui se rattachent au champ d'activité d'Immigrants for Canada.
Nous sommes une organisation nationale issue de la base constituée, vous pouvez l'imaginer, d'immigrants au Canada, immigrants directs ou enfants d'immigrants. Nous comptons des milliers de membres un peu partout au Canada. Nous venons d'horizons aussi divers qu'on peut l'imaginer: une pléthore de pays d'origine, toutes les confessions et tous les milieux socioéconomiques. Nous avons donc une grande diversité, c'est le moins qu'on puisse dire, mais nous sommes solidement unis autour d'un élément central et essentiel, nos valeurs. Ce sont nos valeurs et notre engagement à l'égard du Canada qui nous unissent.
Inévitablement, il y aura parmi nous tous aujourd'hui des divergences de vues, mais tous nos membres, toutes les personnes ici présentes et les auditeurs peuvent être certains et très fiers d'une chose. Le simple fait que nous tenons cette discussion, ce débat sur une tribune publique est à l'honneur de notre pays, le Canada, et c'est la meilleure preuve que ceux qui ont immigré ici ont fait le bon choix. Pour nous, le débat ouvert et public n'est pas une chose qui va de soi.
Pour devenir un partisan ou un membre d'Immigrants for Canada, chacun doit adopter la charte des principes de l'organisation, et c'est en m'appuyant sur ces principes et ces valeurs que je formulerai aujourd'hui mes observations.
Immigrants for Canada tient que la citoyenneté canadienne est un privilège. C'est pourquoi nous croyons qu'elle devrait être à la disposition de tous, mais accordée à ceux qui l'ont méritée. Il faut la chérir. Nous, membres de l'organisation, sommes venus au Canada et en avons fait notre pays. Nous attachons une grande valeur à notre citoyenneté canadienne. Nous appuyons les nouvelles exigences en matière de résidence, qui font passer de trois ans sur quatre à quatre ans sur six, et nous nous demandons si le critère de 183 jours pour une de ces années ou pour les quatre est suffisant.
Immigrants for Canada estime que tous les citoyens canadiens doivent connaître l'anglais ou le français. La langue est un facteur d'unité. Elle nous permet de communiquer avec nos concitoyens et de nous engager dans notre milieu, dans notre nouveau pays. Qu'on appelle le 911, qu'on aille à la banque ou qu'on cherche du travail, la capacité de parler anglais ou français ne peut qu'être utile. Celui qui en profite le plus, c'est le nouveau citoyen même, et nous appuyons sans réserve l'élargissement de la plage des âges. Bien sûr, il y a des réserves à apporter, et je serai heureux d'en parler. Certaines ont été abordées au cours de séances antérieures et il y a évidemment des questions à poser.
Quant à la révocation, en principe, et comme notre organisation considère la citoyenneté comme un privilège, nous appuyons fermement l'idée de la révocation pour cause de terrorisme ou d'obtention de la citoyenneté par la fraude. Toutefois, et il est important de le signaler, la mise en garde que je ferai à cet égard, c'est que le processus doit être conforme aux valeurs fondamentales de la société canadienne qui vit en démocratie.
Comme vous êtes nombreux à le savoir et comme bien des personnes ici présentes le savent d'expérience, nous sommes venus de nombreux pays, et la définition qu'on y a de la démocratie ne correspond pas forcément toujours à la nôtre. Deux loups et un mouton qui votent sur le choix du menu, ce n'est pas la démocratie selon les normes canadiennes. On pense parfois que, parce que bien des gens veulent une chose, cela est bien. C'est faux. La réalité, c'est que nous avons une démocratie constitutionnelle, et certains principes sont en place. Voilà une question qui se rattache directement à notre champ d'intérêt. Nous appuyons l'idée de la révocation, mais il nous semble qu'il devrait y avoir une forme de contrôle des décisions à cet égard pour protéger tous les intéressés. Immigrants for Canada croit que c'est là une valeur chère à la société canadienne: le contrôle judiciaire des décisions importantes.
Pour ce qui est des condamnations au pénal pour des crimes commis à l'étranger, nous estimons qu'il faut également réfléchir à ces dispositions. On a donné tout à l'heure l'exemple de Nelson Mandela, et il est bien choisi. Il peut y avoir évidemment des actes ou des principes qui sont acceptés en droit canadien et qui sont considérés comme criminels dans un autre pays. Il faut examiner cette question.
Je profiterai des dernières minutes, si on me le permet, pour conclure par une illustration qui situe bien notre position et la rend plutôt claire.
Comme vous le savez tous, cette année-ci a été spéciale pour nous tous: le Canada a eu d'excellents résultats aux Jeux olympiques d'hiver. Notamment ses équipes féminine et masculine de hockey. J'ai apporté ce matin mon chandail d'Équipe Canada. Je n'ai pas joué, mais je m'en suis fait faire un à mon nom. En fait, c'est un cadeau. J'ai choisi exprès un exemple riche en humour canadien. Je précise qu'on ne doit jamais me demander de chausser des patins. Je n'ai appris à jouer au hockey et même à patiner qu'au début de la trentaine. Enfant, j'étais trop pris par le travail au restaurant familial.
Chez Immigrants for Canada, nous considérons la citoyenneté comme la participation à une équipe. Tous ont la possibilité, la chance d'essayer de faire partie de l'équipe, mais il faut répondre à certaines exigences. Il faut se présenter aux exercices: c'est la résidence permanente. Il faut pouvoir communiquer avec les coéquipiers: ce sont les exigences linguistiques. On ne peut pas mentir pour se faire accepter dans l'équipe, espionner ses coéquipiers ou essayer de les tuer: c'est la révocation pour les motifs énumérés dans le projet de loi.
Merci.
[Français]
[Le témoin s'exprime dans sa langue.]
[Traduction]
Telle est la diversité de notre grand pays.
Bonjour à tous les membres du comité. Merci d'avoir accepté que je comparaisse pour parler du projet de loi C-24. Je m'appelle Bernie Farber et mon ami et collègue Mitchell Goldberg m'accompagne. Nous abordons cet exposé avec des expériences variées. Je suis un militant des droits de la personne et maintenant journaliste semi-retraité, tandis que Mitch est un spécialiste en droit de l'immigration, mais nous nous adressons à vous à titre de membres du Jewish Refugee Action Network, le JRAN.
À ceux qui ne le connaîtraient pas, je dirai que le JRAN est une organisation nationale qui réunit des membres d'horizons divers qui sont très inquiets des modifications apportées en 2012 au système canadien de détermination du statut de réfugié et à la couverture des réfugiés par le système de soins de santé. Il s'agit d'une initiative juive qui accepte un soutien multiconfessionnel et multiculturel, et nous accueillons volontiers la participation de Canadiens de tout le pays.
Il va sans dire que la communauté juive a des liens profonds avec l'expérience du réfugié et de l'immigrant. Depuis l'Exode et l'expérience de l'esclavage en Égypte jusqu'au honteux refus du Canada d'accueillir 900 réfugiés juifs qui ont réussi à s'enfuir de l'Allemagne en 1939 à bord du St. Louis et dont les deux tiers ont été tués dans des camps de concentration nazis. Mais notre expérience et celle d'autres groupes nous enseignent que beaucoup de réfugiés deviennent, lorsqu'ils sont traités avec justice et compassion, des citoyens qui apportent leur contribution. Mes deux parents étaient des réfugiés. Tous deux ont fui l'antisémitisme qui sévissait dans les pays d'Europe de l'Est. Ils sont venus comme apatrides, en somme, sans un sou en poche, et ils ont réussi à se bâtir une vie pour eux, leurs enfants et leurs petits-enfants.
Il faut que les réfugiés puissent aspirer à la citoyenneté comme à une raison d'espérer. Beaucoup ont surmonté un traumatisme inimaginable. Ce n'est donc que justice que le gouvernement fédéral leur ménage une voie raisonnable vers la citoyenneté.
Voilà qui m'amène au motif de notre comparution. Le JRAN craint fort que le projet de loi C-24 ne fasse pas de la citoyenneté la fin réjouissante du long et difficile parcours des réfugiés, mais plutôt une destination impossible à atteindre à cause des obstacles et des diversions. Voici quelques exemples.
Les obstacles financiers: il y a des frais nouveaux et accrus à absorber pour devenir citoyen. Le gouvernement triple les frais associés à la demande, ce qui s'ajoute aux nouveaux coûts imposés aux demandeurs il y a un an, lorsque le gouvernement a privatisé les tests linguistiques. Il en coûtera maintenant quatre fois plus qu'en 2006 pour demander la citoyenneté. Le chemin vers la société ne devrait pas être une route à péage. Exploiter les plus vulnérables d'entre nous au moyen de frais aux usagers n'est rien d'autre qu'une ponction d'argent à la fois disgracieuse et contre-productive.
Les obstacles linguistiques: le projet de loi C-24 élargit le champ d'application du difficile processus des examens linguistiques pour englober les demandeurs de 14 à 64 ans au lieu de 18 à 55 ans, comme c'est le cas actuellement. Les enfants et les grands-parents seront donc touchés, désormais. C'est là un autre obstacle qui rendra encore plus difficile l'obtention de la citoyenneté, semble-t-il, d'autant plus que le gouvernement fédéral précédent a imposé des compressions dans les programmes de formation linguistique destinés aux nouveaux arrivants.
La barrière bureaucratique: aux termes du projet de loi, ceux qui demanderont la citoyenneté canadienne devront avoir été des citoyens permanents pendant quatre ans au lieu de trois avant de pouvoir devenir citoyens. De plus, les réfugiés acceptés au Canada n'auront plus droit à un crédit pour la période passée au Canada comme réfugiés reconnus avant d'obtenir la résidence permanente. Ce sont là, chers amis, des délais qui nous semblent arbitraires, inutiles et injustes.
J'invite maintenant mon collègue, Mitchell Goldberg, à décrire d'autres motifs plus précis de préoccupation.
Merci, Bernie.
De prime abord, sur papier, la disposition sur l'intention de résider ne semble pas si terrible. Qu'y a-t-il de mal à forcer les gens à signer une déclaration disant qu'ils vont vivre au Canada? Mais si on songe à son impact sur les néo-Canadiens, on peut dire que ce sera un vortex polaire. Comme avocat, je devrai dire à mes clients que, s'ils quittent le Canada parce que leur enfant est accepté dans une université, qu'ils décrochent un emploi à l'étranger ou vont s'occuper d'un parent malade, ils risquent d'être privés de leur citoyenneté parce que quelque fonctionnaire se livrera à des spéculations sur leur intention véritable de devenir des citoyens.
À notre avis, c'est inacceptable.
Ma fille a fait des demandes d'admission dans des universités américaines. Elle a travaillé au Maine. Pourquoi les nouveaux arrivants n'auraient-ils pas les mêmes droits? À notre avis, toute cette idée de bannissement, de privation de la citoyenneté pour des gens qui...
D'une part, on dit que ce sont des criminels. Pourquoi sympathiser avec eux? Tout à fait d'accord. Voilà pourquoi nous avons un système de justice pénale, et nous croyons que la loi doit peser de tout son poids sur les auteurs d'actes criminels. S'ils méritent d'aller en prison, tant pis. Mais les expulser, les dépouiller de leur citoyenneté, les bannir, voilà qui n'est pas digne des Canadiens. Un ancien premier ministre, M. Diefenbaker, l'a reconnu dans un contexte où des milliers de Japonais ont été privés de leur citoyenneté.
En outre, nous sommes d'accord pour que la citoyenneté soit retirée si elle a été obtenue par la fraude. Si quelqu'un ment pour se faire accepter comme citoyens, il mérite de perdre la citoyenneté. Mais dans les autres cas, la privation de la citoyenneté est totalement injuste et inconstitutionnelle.
Comme Avvy Go l'a dit, la disposition sur l'intention de résider contrevient à l'article 6 de la Charte canadienne sur la liberté de circulation. Tous les Canadiens, quelle que soit leur origine, méritent une citoyenneté vraiment renforcée.
Merci beaucoup.
Merci beaucoup à vous tous.
Nous allons passer aux questions. Nous entendrons d'abord M. Menegakis. Monsieur, vous avez un maximum de sept minutes.
Merci beaucoup, madame la présidente, et merci aux témoins de leur présence et de leurs exposés.
D'abord, une mise au point. J'ai entendu les termes « ponction d'argent » pendant le témoignage parce que les frais sont portés à 300 $. À titre d'information, monsieur Farber, l'examen d'une demande de citoyenneté nous coûte 550 $. La hausse nous rapprochera du montant qu'il faudrait payer. Comparons-nous à des pays semblables au nôtre. Aux États-Unis, les frais sont de 669,48 $CAN. Au Royaume-Uni, de 1 615,94 $CAN. En Nouvelle-Zélande, de 433,64 $CAN. Cela place la hausse en perspective. On demande à ceux qui veulent obtenir la citoyenneté d'assumer une plus grande partie des coûts occasionnés par leur demande.
Monsieur Attia, un article paru récemment dans une publication coréenne dit qu'il est important d'appliquer le projet de loi C-24 le plus tôt possible. Il explique que plus tôt le projet de loi sera adopté, plus tôt les délais d'attente seront ramenés à moins d'un an. Nous savons que le Canada accueille un nombre record d'immigrants et de nouveaux citoyens. La moyenne est supérieure à un quart de million de nouveaux immigrants par année. Depuis 2006, nous avons accueilli plus de 1,4 million de néo-Canadiens. Ce sont des chiffres sans précédent.
Le gouvernement conservateur a le niveau soutenu d'immigration le plus élevé de l'histoire du Canada. Dans le nouveau modèle de prise de décisions, l'étude des dossiers de citoyenneté se fera en une seule étape au lieu de trois.
Selon vous, quel sera, sur les immigrants et les nouveaux arrivants qui veulent devenir citoyens canadiens, l'effet de la rationalisation du processus, qui sera ramené à un an?
Merci de votre question. Il est bien évident que personne ne peut être contre la rationalisation. Le processus sera plus attrayant pour les immigrants, notamment ceux qui répondent aux exigences en matière de résidence. Ils ont manifesté un grand intérêt et un engagement à l'égard du pays, et ils veulent franchir l'étape suivante: devenir citoyens canadiens.
Ma seule mise en garde, c'est que le processus doit être juste et complet, comme je l'ai dit. Tant que ces vérifications seront au point, le processus, qui est juste et efficace, deviendra aussi efficient.
Merci.
Comme vous le savez, 37 années ont passé depuis le dernier examen de la Loi sur la citoyenneté, et les frais n'ont pas bougé depuis 20 ans. Les modifications apportées par le projet de loi C-24 visent à accélérer l'obtention de la citoyenneté, mais aussi à concilier cette accélération avec l'intégrité de la citoyenneté.
Il n'est pas facile de venir au Canada et on n'obtient pas la citoyenneté automatiquement. Lorsqu'ils sont venus, mes parents, comme sans doute les membres de votre famille, ont dû attendre cinq ans. L'obtention de la citoyenneté canadienne a été l'un des temps forts de leur existence. Dans le projet de loi, nous proposons une modification de la Loi sur la citoyenneté qui portera cette exigence à quatre ans de résidence sur une période de six ans. Nous voulons intégrer plus de nouveaux arrivants à la société canadienne pour qu'ils aient une meilleure chance de réussir une fois qu'ils sont ici.
Nous devons équilibrer les deux points de vue. Selon vous, lequel des deux faut-il privilégier?
Merci encore de cette question. Effectivement, en 1947, je crois comprendre qu'il fallait cinq ans. La loi a été modifiée en 1977. Je ne vais pas expliquer que j'étais né ou non au moment de la modification, mais je ne l'étais pas. Il y a donc un bon moment. La période a été ramenée à trois ans, et on propose maintenant quatre ans de résidence sur une période de six ans, ces quatre ans devant compter au moins 183 jours de résidence.
Mon organisation et moi sommes en faveur de délais plus longs. Il faut que la personne fasse l'expérience de la vie au Canada et s'établisse avant de s'engager à devenir citoyen. Devenir citoyen, c'est dire qu'on est désormais un Canadien.
Je comprends qu'il y ait controverse au sujet de l'intention de résider, et il en sera question aujourd'hui. Je suis heureux que mon collègue ait fait ressortir ce point, et je suis d'avis qu'il faut apporter des précisions. Il en a été question au cours d'une séance antérieure. Vous avez eu du mal à élucider la question, et ce qu'on peut faire, pour peu qu'on puisse faire quelque chose, ne me semble toujours pas clair.
Abstraction faite de la question de l'intention de résider, les exigences relatives à la résidence qui sont proposées me semblent très prudentes. Le premier facteur, c'est qu'il faut connaître la vie au Canada, mais la deuxième chose, pour en revenir à la comparaison avec l'équipe, c'est que le demandeur doit dire qu'il veut faire partie de l'équipe. Devenir citoyen, c'est un geste positif. On signe pour signifier qu'on veut être citoyen canadien. Ce n'est pas comme la demande de statut de réfugié. Il s'agit de demander à être canadien et s'engager envers le Canada. C'est une étape importante que celle de montrer qu'on a résidé au Canada un certain temps, et j'estime que l'équilibre proposé est acceptable.
Des critiques du projet de loi C-24 ont parlé de la double citoyenneté et de la révocation. Monsieur Attia, est-il raisonnable que les Canadiens s'attendent à ce que ceux qui obtiennent la citoyenneté canadienne ne se rendent pas coupables d'actes de terrorisme ou de trahison contre nos soldats et notre pays?
Non, je ne crois pas que ce soit déraisonnable et j'ignore s'il se trouve quelqu'un pour penser que ce l'est. Pour en revenir à la comparaison avec l'équipe, si on fait partie de l'équipe, on ne doit pas normalement tuer ses concitoyens. Il ne faut pas mentir pour se faire accepter dans l'équipe. Il ne faut pas espionner les exercices pour vendre des secrets à l'équipe adverse. Je ne vais pas dire si ce seront les Sénateurs contre les Leafs ou non. Cela dépend des personnes présentes dans la salle.
En toute justice pour mes autres collègues, je dirai que le problème et la controverse concernant la double citoyenneté concernent la Charte. Quelqu'un qui a demandé la citoyenneté et n'a pas une double citoyenneté ne peut la faire révoquer à cause de la convention de 1961 à l'ONU. Celui qui a une double citoyenneté peut subir une révocation sans devenir apatride. C'est une question que notre organisation ne saurait commenter. Nous ne sommes pas versés dans les questions constitutionnelles. Nous ne sommes pas des experts de la Charte non plus. Je laisse à d'autres le soin de se prononcer sur la constitutionnalité de cette mesure.
Merci, madame la présidente, et merci à tous les témoins.
Je ferai porter mes premières questions sur les exigences en matière de résidence pour passer ensuite à l'intention de résider, si j'ai le temps.
La période passée au Canada avant de devenir résident permanent a-t-elle quelque valeur pour apprendre ce que cela signifie, être Canadien, bâtir, payer des impôts au Canada? L'ensemble de l'expérience vécue au Canada a-t-elle une certaine valeur?
Je ne pose que des questions très brèves. Si vous voulez bien répondre, je poserai une question complémentaire.
La question s'adresse à M. Goldberg, à M. Farber, à Mme Go, à quiconque veut répondre.
La question est évidente et importante. Pour moi, il ne fait pas de doute que chaque journée passée au Canada par un réfugié et un éventuel immigrant est une journée qu'ils honorent, qui leur permet de mieux comprendre qu'avant. Voyez ces gens, comme mes propres parents, qui sont venus d'États communistes autocratiques. Leur première journée ici a été un jour de libération, de liberté. Les journées qui suivent sont encore plus marquantes.
J'ajoute un détail. Il y a actuellement une famille à Toronto, une famille rom, les Pusuma, qui s'est réfugiée dans une église. Ces gens-là adorent le Canada. Ils ont dû trouver refuge dans cette église parce qu'on a mal piloté leur dossier juridique. S'ils rentrent en Hongrie, ils risquent la violence, voire la mort. La famille compte une fille de quatre ans qui adore le Canada. Elle ne connaît rien d'autre. Chaque jour est important pour un immigrant et un réfugié, peu importe où ils sont.
Voici ma question complémentaire, et il ne me restera probablement pas beaucoup de temps. Pour cette fillette qui n'a jamais rien connu d'autre que le Canada...
... le projet de loi tel qu'il est conçu maintenant dit que cette fillette ne connaît pas le Canada, qu'après tout ce temps passé au Canada, ne sait pas ce que c'est, être canadienne. Cela me semble illogique, et je vais vous demander une autre opinion d'expert.
Au regard des exigences en matière de résidence, nous disons, dans le cas des étudiants étrangers qui sont chez nous d'habitude pendant trois, quatre ou cinq ans, qui paient des impôts s'ils ont un emploi sur le campus, qui acquièrent de l'expérience et étudient au Canada, qu'ils n'ont au fond aucune valeur. Ils peuvent être des immigrants de la catégorie de l'expérience canadienne. Ils veulent rester ici et devenir des citoyens.
Deuxièmement, il y a le cas des aides familiaux, le plus souvent des femmes et même des femmes de couleur, qui viennent chez nous. Ce sont d'habitude des gens qui veulent devenir canadiens et faire venir ensuite leur famille, les réunir au Canada pour qu'elles deviennent des familles canadiennes.
Troisièmement, monsieur Farber ou monsieur Goldberg, vous avez parlé des réfugiés qui cherchent un asile chez nous.
Et il y a une autre question que vous avez soulevée, je crois, madame Go, dans votre mémoire: les femmes, le plus souvent, qui sont ici comme conjointes parrainées pendant leur résidence permanente conditionnelle, eh bien le projet de loi ne dit pas si ces deux années de résidence conditionnelle comptent aux fins de leur demande de citoyenneté.
Je m'arrête là et demande ce que le projet de loi ferait pour ces quatre catégories de personnes qui passent du temps au Canada. Quelles sont vos recommandations? Si cela vous plaît, tant mieux. Sinon, quelle modification recommandez-vous?
Je recommande que le régime actuel demeure: celui qui est reconnu comme réfugié, à qui la Commission de l'immigration et du statut de réfugié accorde le statut de réfugié, son temps d'attente de la résidence permanente devrait compter dans la période exigée pour obtenir la citoyenneté. Cette période peut être de une, deux ou trois années. Actuellement, la moitié de cette période est retenue dans le calcul aux fins de la citoyenneté. C'est très raisonnable. Je préférerais que toute la période compte, mais la moitié est mieux que rien.
Même chose pour les autres catégories. Si des gens sont ici conformément à la loi, comme les aides familiaux, les personnes qui ont un permis de travail, les étudiants, ils acquièrent une expérience au Canada. Cette période devrait être prise en compte.
Le système actuel ne tient pas compte de la totalité du temps. Il y a une limite d'un an. Nous ne laissons pas les gens vivre ici 10 ans avant de devenir résidents permanents, par exemple, pour qu'ils deviennent ensuite citoyens automatiquement. Le système actuel est très raisonnable. Il me semble contradictoire de dire que nous voulons renforcer l'exigence en matière de résidence. Comme M. Attia l'a dit, on veut que les gens prouvent qu'ils ont des liens avec le Canada, mais, en même temps, nous refusons à ceux qui ont ces liens le droit de compter le temps passé ici comme résidents. Nombre d'entre eux appartiennent à la catégorie de l'expérience canadienne. Nous les attirons au Canada en leur donnant l'espoir qu'ils seront un jour citoyens et que la période passée ici avant d'obtenir la résidence permanente sera reconnue. Voici que nous retirons ce droit. Cela risque d'avoir un impact sur ceux qui viendront au Canada, qui voudront venir étudier ou qui font partie de la catégorie de l'expérience canadienne. Tous ces gens-là seront touchés.
Merci.
Monsieur Attia, pensez-vous que le temps passé au Canada avant la résidence permanente doive compter aux fins de la citoyenneté et que ces personnes présentent une certaine valeur?
Merci de cette question.
Une partie de cette période, en principe... Les observations de mes collègues conviennent parfaitement.
Votre temps de parole est terminé. Je ferai vite.
Il faut examiner un peu la question. J'ignore la bonne réponse. Ce pourrait être une partie, avec plafonnement, ou juste une partie, comme un jour sur trois ou quelque chose de semblable.
Mais je suis d'accord avec M. Goldberg: une fois qu'on a obtenu un certain statut... Oui, on peut prendre un engagement envers le Canada sans être citoyen, sans être un résident permanent, mais je crois qu'il doit y avoir un plafonnement, à un moment donné, et il faut tenir compte du juste équilibre qu'on essaie de trouver.
Oui. Il faut le revoir un peu, ne fût-ce que pour tenir compte des gens qui sont ici avec les meilleures intentions qui soient, pour travailler ou étudier, mais toute la période ne devrait pas... On ne devrait pas pouvoir esquiver tout le critère de résidence, comme Mme Go me semble l'avoir dit à l'instant.
Merci, madame la présidente.
Merci à tous les témoins. Merci beaucoup de vos témoignages.
Je suis d'accord sur une bonne part de ce que M. Attia a dit et sur 100 % de ce que les autres ont dit. Mme Go a fait un excellent résumé des motifs de l'opposition des libéraux, même à la deuxième lecture, ce qui veut dire qu'ils ne sont même pas d'accord sur le principe. Selon nous, le Canada devrait accueillir davantage de citoyens, éliminer des obstacles et recevoir les nouveaux arrivants avec le sourire. Le système proposé ici fait le contraire. Il multiplie les obstacles et les nouveaux arrivants sont accueillis avec une grimace plutôt qu'avec le sourire. En un mot, c'est notre position.
Je crois, après avoir écouté le ministre, que parmi tout ce qui ne nous plaît pas, le point sur lequel il est le plus susceptible de reculer, pour peu qu'il recule, est le crédit partiel pour les étudiants, les membres de la famille, les aides familiaux, etc. Je félicite le NPD d'avoir sondé le groupe de témoins précédent, qui était très diversifié, et celui-ci, qui l'est aussi raisonnablement, et d'avoir obtenu une réaction unanime dans les deux cas. J'ai fait un sondage semblable au sujet des tests de langue pour les conjoints qui arrivent chez nous. C'était digne d'Orwell. Il a reculé sur ce point. Il y a peut-être de l'espoir.
Si c'est d'accord, je voudrais adresser ma question à M. Attia, puisque les trois autres témoins diront la même chose.
Monsieur Attia, le gouvernement dit qu'il incombe à la personne de prouver qu'elle a une double nationalité, sans quoi sa citoyenneté sera révoquée. Cela me semble inacceptable. Le gouvernement devrait avoir la charge de la preuve, puisqu'il a les ressources voulues. La personne risque d'avoir beaucoup de mal à établir une preuve, puisqu'elle doit traiter avec un énorme appareil administratif à l'étranger.
Ne disons rien de la révocation, qui peut être acceptable ou non. Nous ne sommes pas forcément d'accord là-dessus. Abstraction faite de cela, sur le plan du processus, ne serait-il pas préférable que le gouvernement, et non la personne, ait la charge de la preuve?
Merci de votre question.
Bien franchement, je ne suis pas en mesure d'exprimer un point de vue sur cette question. Comme je l'ai dit au départ, mes observations d'aujourd'hui, au nom d'Immigrants for Canada, se limitent aux questions que j'ai abordées. L'organisation que je représente n'a pas pris position sur le processus concernant cette question précise ou...
Très bien. Là encore, je suis d'accord avec vous, si j'ai bien compris votre opinion: nous devons réduire la probabilité ou plutôt le nombre de cas de citoyenneté de convenance, si nous pouvons trouver un moyen juste de le faire. C'est peut-être là l'intention sous-jacente, mais il me semble que créer deux catégories de citoyenneté, quitte à déroger à la Charte, peut-être, n'est pas un moyen d'arriver à ces fins.
Avez-vous des réserves au sujet de l'intention de résider, soit à cause de la Charte, soit parce qu'on crée deux catégories de citoyenneté, soit encore parce que le ministre n'a pas été très clair sur le sens de cette disposition? C'est là un autre problème.
Merci encore de votre question.
Vous soulevez trois questions. Les deux premières, d'ordre constitutionnel, ne sont pas de ma compétence. Quant à la troisième, j'y ai fait allusion dans ma déclaration d'ouverture. J'ai pu suivre l'audience qui s'est tenue le 28 avril, dans cette salle-ci, je crois. Je dirai bien honnêtement que j'ai eu la même impression que vous, malheureusement: ce n'était pas clair.
En principe, nous appuyons l'idée qu'on doit avoir l'intention de résider au Canada. C'est une idée qui est apparue en 1947, qui n'y était plus en 1977 et qui revient maintenant, en 2014. C'est une idée que, me semble-t-il, vous approuvez, comme bien des gens. Les problèmes résident dans les détails. Que veut dire cette idée et comment l'applique-t-on?
Des gens peuvent fort bien dire qu'ils ont l'intention de résider au Canada, mais, comme M. Goldberg l'a fait remarquer, les choses peuvent changer pour des raisons d'affaires ou des motifs d'ordre familial. Il faut peut-être se demander combien de temps la disposition reste en place. Que se passe-t-il si on veut prendre sa retraite et passer du temps dans le Sud 40 ans après avoir obtenu la citoyenneté? Je ne pense vraiment pas que c'était l'intention du ministre. Selon moi, la disposition veut dire qu'une fois qu'une personne a réussi à se faire accepter dans l'équipe, nous voulons qu'elle y reste un certain temps, comme c'est le cas lorsqu'un joueur de hockey signe un contrat minimum. La solution, de prime abord, serait peut-être de préciser ce qu'on veut, après quoi on s'occuperait de la logistique de l'application de la disposition.
On semblait dire que cela ne fonctionnait plus parce qu'on pouvait changer d'idée après être devenu citoyen.
C'est l'impression que j'ai eue également, mais cela ne me semble pas tout à fait clair.
Je le répète, l'idée, en principe, ne nous déplaît pas.
Merci, madame la présidente.
Merci aux témoins de comparaître aujourd'hui.
Avant de poser des questions, dans l'intérêt de tous, je tiens à faire une mise au point au sujet de la période écoulée avant la résidence permanente pour que tous sachent que seulement 15 % des demandeurs se prévalent de cette période.
Monsieur Attia, j'ai des questions à vous poser.
Je suis un immigrant. Je vais vous parler de mon expérience. Je peux vous dire quelle est la clé de la réussite, pour les immigrants, pour les néo-Canadiens. D'après ma propre expérience et ce que me disent... Je représente une circonscription multiculturelle qui compte près de 26 groupes ethniques. Jour après jour, on me dit que la capacité de communiquer en anglais ou en français, les langues officielles, est la clé du succès et d'une intégration réussie à la société.
Dans le projet de loi C-24, nous demandons que les enfants qui ont l'âge de fréquenter l'école secondaire, c'est-à-dire à partir de 14 ans, et les personnes en âge de travailler, soit jusqu'à 65 ans réussissent un test de connaissances élémentaires de l'anglais ou du français.
Voici ma question. Croyez-vous et êtes-vous d'accord avec moi pour dire que les compétences linguistiques jouent un rôle essentiel dans l'intégration réussie des nouveaux arrivants à notre société?
Merci de votre question.
Oui, je suis tout à fait d'accord.
La charte des principes d'Immigrants for Canada dit que la langue est un facteur d'unité. Même sur le plan des valeurs et de la culture, le simple fait de pouvoir s'adresser à ses voisins et converser avec eux établit automatiquement un lien naturel.
Songeons aux voyages que nous avons tous pu faire à l'étranger. Si je suis assis à l'aéroport de Tokyo, dans un pays qui n'est pas le mien, mais rencontre des gens avec qui j'ai une langue commune, peu importe leur origine ethnique, je ressens immédiatement un lien avec eux parce que je peux communiquer. Sous cet angle-là, c'est important.
Quant à la question que vous avez soulevée, je suis tout à fait d'accord avec vous, d'un point de vue pragmatique; c'est un gage de succès. Quand on veut se faire engager, quand on commande un repas, quand on va à la banque, et même sur le plan de la sécurité, quand on fait le 911 et signale un incident, il est important de connaître la langue. C'est un facteur qui nous unit.
Vous avez parlé de Tokyo. Je dirais que, au Canada, on serait sûrement isolé si on ne pouvait pas communiquer avec son voisin.
Parlons de mon sujet préféré dans le projet de loi, la révocation de la citoyenneté pour ceux qui ont une double nationalité et sont reconnus coupables de... Il s'agit des personnes reconnues coupables d'actes de terrorisme ou de trahison.
Le projet de loi permet aussi au gouvernement de refuser la citoyenneté à quelqu'un qui a commis des actes semblables à l'étranger et a été reconnu coupable. Une précision. Il est très clair, dans l'intention du législateur et le libellé du projet de loi, qu'il s'agit d'actes de trahison ou de terrorisme selon les normes canadiennes. Les administrations doivent avoir le même système judiciaire.
Je dois vous demander si, à votre avis et selon votre organisation, la révocation de la citoyenneté pour des terroristes reconnus coupables aide à protéger la valeur de la citoyenneté canadienne.
Certainement, en principe.
J'ai dit au début que nous considérons la citoyenneté canadienne comme un privilège.
Pour en revenir à la comparaison du chandail de hockey, tout le monde a le droit d'essayer de faire partie de l'équipe. On fait ce qu'on peut, on est admis dans l'équipe et on obtient son chandail. S'il est constaté plus tard qu'on a fait quelque chose d'inadmissible contre ses coéquipiers, on devrait perdre son chandail et sa place au sein de l'équipe.
Nous adhérons à ce principe. Ma seule inquiétude, comme je l'ai dit, au sujet des condamnations à l'étranger, c'est qu'il faut décider dans quelle mesure elles sont conformes à la jurisprudence canadienne. Pour le moment, me semble-t-il, et selon le libellé actuel, la question n'est pas tout à fait claire. J'invite le comité à examiner cette partie du projet de loi pour qu'on dise clairement qui devra se prononcer à cet égard et comment.
Sur un point semblable, monsieur Goldberg, j'ai lu votre déclaration du 6 mai, et je la cite:
La citoyenneté est l'assise de l'identité canadienne... Surtout pour les néo-Canadiens, devenir citoyen veut dire qu'ils sont admis dans la famille canadienne. Le Canada est leur pays. Eux et leur famille sont des Canadiens à part entière. Désormais, un point d'interrogation suivra leur titre de citoyen. Un fonctionnaire, non pas un juge, mais un simple fonctionnaire, pourra désormais décider, d'après des critères très vagues, qu'ils n'appartiennent pas vraiment à la famille. Ils pourront être expulsés pour une intention qu'on leur prête. Voilà qui affaiblit la citoyenneté canadienne au lieu de la renforcer.
Voici ma question. Si une personne qui a la citoyenneté canadienne a commis un acte de terrorisme et, de surcroît, été condamné pour cet acte commis contre ses concitoyens; s'il a souscrit à une idéologie radicale, intentionnellement et en toute connaissance de cause, qui prône la destruction de l'État canadien et de la démocratie même; s'il a tué des civils innocents pour tenter de déstabiliser l'État, peut-on dire que ce sont des critères vagues pour la priver de la citoyenneté?
Comme M. Attia l'a dit, les problèmes résident dans les détails.
Tous ceux qui sont ici présents condamnent le terrorisme de tout leur coeur. Fondamentalement, nous croyons tous dans la démocratie et la primauté du droit, dans la protection des innocents. La question est la suivante: quelle est la meilleure façon de s'y prendre et d'agir de façon à renforcer la citoyenneté canadienne?
Pour employer l'analogie du hockey, populaire aujourd'hui et populaire au Canada, si quelqu'un commet un acte odieux contre un autre joueur, pas seulement de la rudesse, mais des coups à la tête, et le blesse...
Désolée, monsieur, mais je vous invite à abréger votre réponse pour que nous ayons le temps de l'entendre.
La réponse brève, c'est que le joueur écope d'une pénalité, de la pénalité la plus lourde imaginable, et peut-être d'une suspension. Mais le bannit-on en l'envoyant dans un autre pays, comme la Chine, la Russie, la Sibérie, par exemple? Voilà l'enjeu.
Merci à tous les témoins d'être parmi nous.
Comme je n'ai que cinq minutes, je vais essayer d'être très bref.
Monsieur Attia, vous avez dit que la langue était un facteur d'unité. Devrions-nous injecter plus de fonds dans les programmes de langue à l'intention des nouveaux citoyens?
C'est une question qui ne se rattache pas au projet de loi, et, en toute honnête, je dirai que notre organisation ne possède aucune connaissance particulière sur l'état actuel des choses, ni sur les programmes antérieurs. J'ai glané quelques renseignements dans ce qui s'est dit aujourd'hui.
En prévision de notre comparution, l'organisation a pris comme position que la langue était un facteur unificateur, et elle est favorable à la gamme élargie des âges. Quant à savoir si des programmes existent ou non ou qui les finance, cela ne relève pas de notre témoignage d'aujourd'hui.
Très bien. J'aurais pensé que, puisque vous affirmez avec énergie que la langue est un facteur d'unité, vous souhaiteriez qu'on investisse dans des programmes pour aider les immigrants à mieux s'intégrer à la culture canadienne. J'aurais pensé que les conservateurs investiraient des fonds dans ces programmes au lieu d'en réduire le financement.
Madame Go, vous avez parlé des politiques d'exclusion, au début du XIXe siècle, qu'il s'agisse de la taxe d'entrée, pour laquelle le gouvernement a présenté des excuses ces dernières années, de l'internement des Japonais ou encore du refoulement de 376 passagers à bord du Komagata Maru, pour lequel le gouvernement n'a présenté encore aucune excuse.
Vous avez fait allusion au fait que, peut-être certaines de ces politiques que nous avons dénoncées et que nous avons considérées comme un chapitre sombre de l'histoire du Canada, étaient en train de revenir. Pouvez-vous vous expliquer un peu plus?
Bien sûr. Il s'agit surtout de la Loi sur la citoyenneté. Jusqu'en 1947, les Chinois ne pouvaient pas devenir citoyens canadiens. Il y a bien des façons de refuser la citoyenneté à certains pour des critères raciaux. C'était particulièrement le cas à l'époque.
J'ai parlé tout à l'heure des différentes façons dont le projet de loi entraînerait l'exclusion de certains groupes. Les aides familiaux sont un d'eux. Les habitants de certains pays où l'anglais n'est pas la première langue en sont un autre.
Toutes ces dispositions réunies font en sorte que certains groupes, à cause de leur sexe ou de leur race, seront touchés de façon démesurée par le projet de loi. Je ne prétends aucunement que le gouvernement entend faire de la discrimination, mais nous devons considérer les conséquences de l'adoption du projet de loi, qui fera en sorte que certains groupes seront plus probablement exclus que d'autres.
Monsieur Goldberg, vous avez dit que votre fille pouvait aller aux États-Unis et étudier là-bas. Par contre, un citoyen naturalisé prendrait un risque en se rendant dans un autre pays, que ce soit pour travailler ou pour étudier. Vous avez parlé de fonctionnaires qui se livreraient à des spéculations sur leurs intentions.
Du point de vue de la Charte, y a-t-il des conséquences au fait d'avoir deux niveaux de citoyenneté?
À propos de la disposition sur l'intention de résider, j'ai lu les mémoires de l'Association du Barreau canadien et de l'Association canadienne des avocats et avocates en droit des réfugiés. Il est très clair pour l'ensemble du milieu juridique que ce serait une violation du droit de libre circulation garanti à l'article 6 et peut-être aussi des droits à l'égalité prévus à l'article 15. Il existe également des préoccupations d'ordre constitutionnel au sujet du bannissement en général.
Chose curieuse, la Cour suprême des États-Unis a dit qu'exiler des citoyens était un châtiment cruel et inusité.
Merci beaucoup.
Monsieur Farber, cinq cas déjà ont été annulés par la Cour suprême du Canada sous le gouvernement actuel. C'est sans précédent.
Vous avez dit que certains de ces changements sont inutiles et arbitraires. Pourquoi le gouvernement les propose-t-il?
Si j'avais eu la réponse à cette question, j'aurais écrit un livre et je le vendrais. Je ne sais pas trop pourquoi les gouvernements font ce qu'ils font, et si je peux répondre à la question du député au sujet des coûts, je dirai qu'il juge le Canada en fonction d'autres pays, comme l'Australie et la Nouvelle-Zélande. Je préférerais que nous le jugions en fonction de ce que sont les Canadiens.
Nous augmentons les coûts chez nous et nous compliquons la tâche des réfugiés et immigrants qui veulent obtenir la citoyenneté. Peu m'importe ce que fait l'Australie, pour être honnête avec vous. Je me soucie de ce que nous faisons chez nous. Nous avons une histoire et nous sommes reconnus comme des gens compatissants et engageants.
Merci, madame la présidente.
Vous avez raison. Je regarde dans la salle, et je vois cinq députés originaires d'autres pays, et au moins deux d'entre eux sont des immigrants de la première génération, nés ici de parents immigrants, comme moi et comme M. Menegakis.
Merci, monsieur Attia, de vos observations du début sur la transparence de ce débat public et de ce processus, car c'est le rôle du comité: examiner le projet de loi dans tous les sens pour trouver des points à améliorer. Nous avons toujours voulu le faire, et c'est pourquoi les projets de loi sont renvoyés aux comités.
J'ai entendu haut et clair votre point de vue sur la langue. J'ai grandi dans une communauté polonaise de Toronto. Certains ont vécu pendant 30 ans au moins dans ce genre de communauté sans dire un mot d'anglais ou à peine. Ils se débrouillaient parce qu'on parlait leur langue à l'église, à la banque, dans les commerces locaux, etc.
Quoi qu'il en soit, la question est très importante. Cela m'a marqué. Je me suis aperçu de cela en grandissant, car l'ignorance de la langue compliquait beaucoup la vie des gens. Ils avaient des moyens très limités de s'intégrer à la société canadienne et de se réaliser. Parfois, cela limitait ce que les enfants pouvaient réaliser parce que les parents n'arrivaient pas à les instruire ou à subvenir à leurs besoins.
Soit dit en passant, mes parents sont venus au Canada à la fin des années 1940. Ils avaient un contrat de deux ans. Quand les gens arrivaient ici, ils avaient d'abord un emploi. Ils ne pouvaient pas aller là où ils le voulaient. Ils devaient travailler très fort. C'est un point très important.
Monsieur Attia, vous avez écrit une lettre au National Post pour donner votre appui au ministre d'alors, Jason Kenney, qui entendait sévir contre la fraude en matière d'immigration. Comme nous le savons, le projet de loi C-24 vise à combattre la fraude en matière de citoyenneté.
Les immigrants et leurs familles travaillent très fort. Nous le savons. Comme M. Menegakis l'a dit, nous acceptons plus d'immigrants que quiconque par le passé. Ils sont animés par des valeurs comme l'honnêteté et l'intégrité, et ils veulent s'en sortir. Ils comprennent tout ce que cela coûte.
Pour ce qui est des exigences en matière de résidence, croyez-vous que c'est trop que de demander une certaine durée de résidence au Canada, dans ce cas-ci quatre ans sur une période de six ans? Je précise au préalable que nous prenons souvent exemple, pour le Canada, sur les modèles européens. Or, ils exigent souvent une durée de résidence beaucoup plus longue que nous
Qu'en pensez-vous?
Merci de vos observations et de votre question.
Comme je l'ai dit au départ, notre organisation ne croit pas que ce soit trop demander que d'exiger quatre ans sur six. Au contraire, nous nous félicitons de cette augmentation. Ce sont des immigrants qui prennent cette position, des gens d'origines ethniques et de pays très variés qui appuient fermement ce point de vue. C'est précisément pour les raisons que vous et d'autres avez déjà énoncées: nous sommes venus au Canada, nous avons déployé de grands efforts pour devenir des Canadiens, nous y avons consacré du temps et nous avons travaillé très fort. Nous adorons ce pays et nous nous considérons comme des Canadiens.
Lorsque j'étais enfant, mon père m'a appris quelque chose que je n'oublierai jamais. Il est né et il a grandi au Moyen-Orient, et il est arrivé par bateau avec 200 $ en poche. Depuis 45 ans, il n'a jamais arrêté de travailler. Il continue de le faire aujourd'hui encore. Voilà la mentalité, l'attitude commune à bien d'autres personnes ici présentes. Il venait de l'Égypte, et il a toujours dit qu'il n'avait pas quitté l'Égypte pour venir en Égypte, mais au Canada. Cela a toujours été pour moi une source d'inspiration et de motivation.
Sur le plan de la logistique, il faut reconnaître cela. C'est une exigence à satisfaire pour obtenir la citoyenneté. Il ne suffit pas d'arriver aux frontières et de demander le statut de réfugié pour obtenir la résidence permanente. C'est de la citoyenneté qu'il s'agit. On peut travailler ici, on peut étudier ici, mais si on veut obtenir ce chandail d'Équipe Canada, ce genre d'engagement doit se manifester. Vous en profitez, et nous aussi.
Merci.
Madame la présidente, je profite de mes 30 dernières secondes pour proposer que nous siégions à huis clos. La motion ne peut faire l'objet d'aucun débat.
[Français]
Cette motion ne peut faire l'objet d'un débat. Nous allons donc passer au vote.
(La motion est adoptée.)
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