CIMM Réunion de comité
Les Avis de convocation contiennent des renseignements sur le sujet, la date, l’heure et l’endroit de la réunion, ainsi qu’une liste des témoins qui doivent comparaître devant le comité. Les Témoignages sont le compte rendu transcrit, révisé et corrigé de tout ce qui a été dit pendant la séance. Les Procès-verbaux sont le compte rendu officiel des séances.
Pour faire une recherche avancée, utilisez l’outil Rechercher dans les publications.
Si vous avez des questions ou commentaires concernant l'accessibilité à cette publication, veuillez communiquer avec nous à accessible@parl.gc.ca.
Comité permanent de la citoyenneté et de l'immigration
|
l |
|
l |
|
TÉMOIGNAGES
Le mardi 10 mars 2015
[Enregistrement électronique]
[Traduction]
Je déclare la séance ouverte.
Nous sommes le mardi 10 mars 2015, et nous en sommes à la 40e séance du Comité permanent de la citoyenneté et de l'immigration. Nous étudions la promotion de la prospérité économique à travers les services d'intégration.
Nous accueillons trois témoins ce matin.
Je tiens à vous souhaiter tous la bienvenue au nom du comité.
Nous recevons Kim Allen, qui est chef de la direction d'Ingénieurs Canada. Bonjour, monsieur.
Nous recevons également Kelly Pollack, qui est directrice générale de l'organisme Immigrant Employment Council of British Columbia.
Nous accueillons aussi Kristyn Frank, qui comparaît à titre personnel.
Soyez les bienvenus. Vous disposez chacun de huit minutes pour faire un exposé. Au terme de ces huit minutes, les membres du comité vous poseront des questions.
Monsieur Allen, la parole est à vous.
Je vous remercie beaucoup de me donner l'occasion de comparaître devant vous.
Comme on l'a dit, je suis ici en tant que chef de la direction d'Ingénieurs Canada, qui est l'organisation nationale des organismes de réglementation du génie provinciaux et territoriaux. Je suis également ici à titre de membre du comité d'experts sur les obstacles à l'emploi des nouveaux Canadiens.
Les immigrants qualifiés contribuent à la réussite du Canada. Faire en sorte que les nouveaux Canadiens réalisent leur plein potentiel constitue un défi de taille sur le plan des politiques sociales. Pour relever ce défi dans notre pays multiculturel, démocratique et axé sur le marché, il faut la participation de multiples intervenants afin d'obtenir les meilleurs résultats pour tous.
Nous avons tous entendu parler d'un professionnel originaire d'un autre pays qui, au Canada, parvient seulement à trouver des emplois qui ne lui permettent pas de réaliser son plein potentiel. Dans le domaine du génie, la situation est particulièrement grave. Dans la plupart des régions du pays, nous sommes aux prises avec une pénurie d'ingénieurs qui possèdent entre 5 et 10 ans d'expérience ou des compétences spécialisées. D'ici 2020, nous prévoyons qu'environ 70 000 nouveaux diplômés en génie arriveront sur le marché du travail et que nous accueillerons à peu près 50 000 nouveaux arrivants qualifiés. Il s'agit d'un nombre considérable d'ingénieurs. Nous ne pouvons pas permettre que leurs compétences et leurs connaissances soient sous-utilisées.
Le génie est un domaine très vaste qui offre toute une gamme de possibilités de carrière. Les compétences des ingénieurs sont très en demande dans de nombreux secteurs de l'économie. Même si de nombreux diplômés en génie travaillent en tant qu'ingénieurs, il y en a davantage qui deviennent des entrepreneurs et des dirigeants d'entreprises dans des domaines comme les technologies de l'information, le marketing, les services bancaires ou les services-conseils. En effet, à la mi-carrière, les deux tiers des diplômés en génie utilisent davantage leurs compétences dans des domaines traditionnels et émergents qui exigent une reddition de comptes.
Les responsables de la profession, les employeurs, les universités et les gouvernements doivent réfléchir dès maintenant à des solutions à ce problème.
Depuis plus d'une décennie, Ingénieurs Canada et les organismes de réglementation du génie travaillent avec les gouvernements, les immigrants, les universités et d'autres parties prenantes pour régler le problème chronique de la sous-utilisation des compétences et des connaissances des nouveaux arrivants. La majeure partie de ce que nous ont dit les diplômés en génie, l'industrie et les organismes de réglementation correspond à ce que mes collègues du comité d'experts sur les obstacles à l'emploi des nouveaux Canadiens ont appris lors des rencontres avec plus de 160 intervenants l'automne dernier.
La bonne nouvelle est que de nombreux organismes offrent divers programmes et toutes sortes d'informations qui peuvent aider notamment les ingénieurs à trouver un emploi à leur mesure. La mauvaise nouvelle est que les immigrants ont encore beaucoup de difficulté à s'y retrouver, particulièrement ceux qui souhaitent travailler au sein d'une profession réglementée.
Les professions réglementées, comme le génie, ont amélioré l'information qu'elles diffusent sur la procédure à suivre pour obtenir un permis d'exercice. Le système Entrée express du gouvernement fédéral et les exigences relatives à l'évaluation des diplômes pour certains immigrants de la composante économique permettront aux immigrants de comprendre comment leurs compétences et leurs connaissances peuvent être employées au sein de l'économie canadienne.
La feuille de route pour l'ingénierie au Canada d'Ingénieurs Canada fournit de l'information sur la procédure d'obtention des permis et permet aux immigrants potentiels de juger si leurs diplômes d'études les rendent admissibles à présenter une demande de permis. Elle contient également de l'information sur la préparation d'un curriculum vitae et sur le marché du travail dans le domaine du génie.
Nous espérons être en mesure d'établir de façon satisfaisante un lien entre cette mine de renseignements et le processus d'évaluation des diplômes d'études dans le cadre du système Entrée express. Il est bien que les professions réglementées fournissent des renseignements sur les procédures d'immigration, mais il faut aussi améliorer continuellement la qualité de l'information fournie aux immigrants à leur arrivée au pays et durant l'étape de la prise de décision avant leur arrivée.
Les immigrants doivent avoir facilement accès à des renseignements clairs et concis à propos de la réglementation et de la reconnaissance des titres de compétence étrangers afin de pouvoir préparer leur réussite au Canada. En plus d'être informés au sujet des procédures d'obtention des permis, les immigrants doivent obtenir de l'information sur l'économie du pays. Les données sur le marché du travail dont nous disposons indiquent que la demande d'ingénieurs est plus grande dans certaines régions du pays que dans d'autres. Les emplois qui peuvent permettre aux nouveaux arrivants d'améliorer leur situation économique ne se trouvent peut-être pas dans les collectivités où ils voudraient s'établir. Pour aider les nouveaux arrivants à prendre des décisions réalistes, il faut leur donner accès à des renseignements actuels et détaillés sur le marché du travail. Les nouveaux arrivants ne devraient pas avoir à essayer de déterminer où se trouvent les meilleures possibilités d'emploi dans leur domaine.
D'ici 2020, jusqu'à 16 000 nouveaux emplois en génie seront créés au Canada. Les employeurs, les organismes de réglementation, les universités et les gouvernements ont la responsabilité de fournir aux nouveaux arrivants l'information qui leur permet de déterminer les endroits les plus probables où ces emplois seront créés et quelles compétences seront les plus en demande.
Comme je l'ai dit au début, le comité d'experts s'est rendu dans différentes régions du pays et a reçu de nombreux mémoires.
La bonne nouvelle est qu'il y a un groupe d'intervenants composé de représentants d'organismes de services aux immigrants — qui prendront la parole un peu plus tard — d'organismes de réglementation, d'universités, du gouvernement fédéral, de gouvernements provinciaux, d'administrations municipales ainsi que d'autres groupes communautaires prêts à aider les nouveaux arrivants à réussir. Plus nous pouvons travailler ensemble pour fournir les meilleurs renseignements possibles aux nouveaux Canadiens à toutes les étapes de leur cheminement, plus les immigrants et la profession d'ingénieur au Canada seront gagnants.
Je vous remercie de me donner l'occasion de m'adresser à vous aujourd'hui. Je serai ravi de répondre à vos questions.
Bonjour, mesdames et messieurs. C'est un privilège d'être ici aujourd'hui.
Étant donné que mon collègue M. Allen a été bref, je vais essayer de faire de même.
Cela fait plus longtemps que j'ose habituellement l'admettre en public, c'est-à-dire près de 20 ans, que j'aide les immigrants à intégrer le marché du travail. J'ai participé à la mise sur pied du Immigrant Employment Council of British Columbia, et, auparavant, j'ai été directrice des programmes d'emploi et de langues de MOSAIC, qui est l'une des plus importantes agences spécialisées dans l'établissement des immigrants en Colombie-Britannique.
Notre province prévoit avoir besoin de 265 000 travailleurs étrangers pour répondre à ses besoins en main-d'oeuvre d'ici 2020, et pourtant, les immigrants continuent d'être touchés par le chômage et le sous-emploi, comme M. Allen l'a mentionné. Il s'agit d'un gaspillage total des talents des gens que nous accueillons au Canada.
Nous avons créé notre organisme en vue de nous attaquer à ce problème. Notre mission consiste à intégrer les immigrants au marché du travail afin qu'ils apportent une contribution à leur collectivité et à l'économie de la province, ce qui est profitable pour tout le monde. Nous travaillons directement avec les employeurs.
Puisque notre pays est en train de modifier son système d'immigration afin qu'il soit davantage fondé sur la demande, nous devons en même temps modifier nos services d'établissement afin que davantage d'employeurs participent au système. Le système Entrée express et le Guichet-emplois du gouvernement fédéral sont des outils essentiels, mais pour que les employeurs puissent utiliser ces outils, ils doivent obtenir les renseignements, la formation et le soutien nécessaires. Au bout du compte, ils doivent être disposés à embaucher davantage d'immigrants pour des emplois intéressants.
Durant le court temps de parole qui m'est imparti, je vais parler de notre organisme et du travail que nous accomplissons. Je vais aussi expliquer brièvement comment nous changeons les choses. En dernier lieu, je vais parler de l'avenir.
Vous savez qu'on dit qu'une voiture taxi est le meilleur endroit pour avoir une crise cardiaque. Je voulais parler un peu de cela, mais M. Allen m'a coupé l'herbe sous le pied à ce sujet.
Même si une partie du problème concerne la reconnaissance des titres de compétences, il n'y a pas que cela. Selon moi, une grande partie du problème — et encore une fois, je m'appuie pour dire cela sur mes nombreuses années d'expérience dans le domaine — est attribuable au fait que les employeurs canadiens n'embauchent pas autant d'immigrants qu'ils le pourraient. Cette situation ne change pas.
C'est pour cette raison que nous avons mis sur pied notre organisme. Tout a commencé en 1997, lorsque quelques-uns d'entre nous qui oeuvrent dans le domaine ont constaté que de nombreux immigrants, de nombreux professionnels, ne parvenaient pas à obtenir de bons emplois et que, souvent, lorsqu'ils décrochaient un emploi, il s'agissait d'un poste qui n'était pas du tout à leur mesure. En examinant la situation de plus près, il est apparu évident qu'il y avait un énorme manque à combler. Il existait de nombreux organismes qui travaillaient directement avec les immigrants, mais il n'y en avait aucun qui s'occupait exclusivement d'aider les employeurs à rejoindre les immigrants qualifiés et à accroître la proportion d'immigrants au sein de leur main-d'oeuvre.
Allons directement à octobre 2008. Lors d'un sommet sur l'embauche d'immigrants organisé en partenariat avec la Vancouver Foundation et la ville de Vancouver, notre organisme a vu le jour.
Notre tout premier appel à l'action était clair: il fallait faire participer les employeurs.
Nous savions également trois choses dès le début. Nous savions que nous devions oeuvrer à l'échelle de la province. En Colombie-Britannique, comme c'est le cas ailleurs au Canada, les immigrants ont tendance à s'installer dans les grandes régions urbaines et à y rester, alors les pénuries de main-d'oeuvre se trouvent donc habituellement à l'extérieur de ces régions. Il est intéressant de mentionner que les travaux que nous avons menés nous ont permis de constater que les petites collectivités cherchent davantage à élaborer des stratégies pour attirer et retenir les immigrants que la grande région de Vancouver.
Nous savions également que nous devions travailler avec les employeurs, les industries et les associations de gens d'affaires en vue d'élaborer des initiatives axées sur les employeurs, et non pas seulement sur les immigrants, et qui devaient être fondées sur des pratiques exemplaires. Nous savions aussi que nous devions continuer de nous adresser aux décideurs pour leur demander pourquoi ce problème persistait, pourquoi les immigrants étaient encore touchés par le chômage et le sous-emploi et pour leur dire que les stratégies et les programmes qui s'appuient sur des données probantes font partie de la solution.
Notre objectif est triple: faire en sorte que les employeurs en Colombie-Britannique comprennent les changements et les possibilités qui découlent du passage à un système d'immigration davantage fondé sur la demande; travailler avec les petites collectivités, comme je l'ai mentionné, pour qu'elles soient prêtes à répondre aux besoins de leurs entreprises en termes d'employés qualifiés; et continuer de travailler avec nos partenaires, qui sont au coeur de notre travail. Nous travaillons notamment avec la chambre de commerce et l'association de gestion des ressources humaines de la Colombie-Britannique en vue d'élaborer de nouvelles initiatives stratégiques.
Que faisons-nous précisément? La majeure partie de notre travail consiste à comprendre comment les employeurs envisagent l'embauche d'immigrants. Nous devons comprendre leurs besoins afin d'être en mesure de les mettre en contact avec des immigrants qualifiés.
En 2012, nous nous sommes rendus compte, comme nous l'avions constaté lorsque nous avons mis sur pied notre organisme, que nous devions mieux comprendre ce qui se passe dans la province. En partenariat avec des chambres de commerce et des organismes de développement économique, nous avons entrepris ce que nous appelons la consultation des employeurs de Colombie-Britannique. Au total, 15 groupes de discussion ont été établis dans 7collectivités et 8 secteurs, auxquels ont participé plus de 150 employeurs. Qu'avons-nous appris?
Les employeurs, notamment ceux qui sont dans des régions plus petites, nous ont parlé des obstacles auxquels ils sont confrontés pour l’embauche d’immigrants. Nous étions déjà au courant de bon nombre de ces obstacles, mais d’autres étaient nouveaux. Cela nous a permis d’avoir un meilleur portrait d’ensemble de l’emploi en Colombie-Britannique et de mieux comprendre les pratiques en matière de ressources humaines et les cultures en milieu de travail qui agissent sur l’emploi des immigrants. Nous avons noué le dialogue avec l’industrie et les associations commerciales. Ce sont, pour nous, des partenaires clés, des champions de l’emploi d’immigrants. Nous avons découvert que certains employeurs utilisent des pratiques prometteuses et nous communiquons ces pratiques à d'autres employeurs ailleurs dans la province.
Ce que nous ont répété la plupart des propriétaires de petites et moyennes entreprises, auxquels appartiennent plus de 95 % des entreprises de la Colombie-Britannique, c’est que les petites entreprises ne savent plus où donner de la tête lorsque vient le temps d’embaucher des immigrants. Cette information nous a été indispensable pour aller de l'avant.
Au fil des ans, nous en sommes également venus à mieux comprendre les besoins des employeurs de la Colombie-Britannique en réunissant des intervenants du milieu. Entre 2012 et 2014, IEC-BC et ses organisations partenaires dans le nord de la province ont organisé trois forums communautaires sur l’emploi des immigrants qui ciblaient stratégiquement des collectivités confrontées à une pénurie de compétences. Ces collectivités avaient indiqué vouloir attirer plus de gens. Il y avait aussi des régions où d'importantes initiatives de développement économique avaient été proposées ou étaient en cours, y compris les plans du gouvernement provincial pour le développement d’une industrie du GNL et le projet d’énergie propre sur le site C de B.C. Hydro.
Ces forums ont mené à de nombreux résultats, notamment concernant la Chambre de Commerce de Prince George qui, en collaboration avec Initiatives Prince George, l’organe de développement économique de la ville, a mis en oeuvre une campagne nommée Welcome PG visant à attirer des immigrants dans leur région. Cette campagne a été menée conjointement avec une foire virtuelle de l’emploi ciblant les immigrants sans emploi dans la vallée du bas Fraser et à laquelle participaient les membres de la Chambre. Ces deux organisations commerciales demeurent des champions de l’emploi des immigrants et continuent de solliciter la participation de leurs membres et de les influencer.
Voilà le genre de solutions locales et issues du milieu qu’IEC-BC s’efforce d’encourager.
Outre la consultation des intervenants et les forums, nous avons élargi nos réseaux et établi des partenariats pour mener nos activités. Comment? Nous mettons les immigrants en communication avec des employeurs dans des petites collectivités; nous établissons des partenariats avec des sociétés et associations de l’industrie et les aidons à accroître leur capacité à travailler avec leurs membres; nous établissons des partenariats avec des organismes d’établissement et des liens avec le milieu des affaires; nous élargissons le bassin de talents des immigrants pour les employeurs en les mettant en communication avec des réseaux d’immigrants professionnels; et grâce à nos programmes, nous élargissons nos réseaux professionnels de nouveaux arrivants.
Certainement.
Dans le monde parfait que je m’imagine, les conseils sur l’emploi des immigrants ne seraient pas nécessaires et le Canada continuerait d’attirer des gens compétents de partout dans le monde. Ces nouveaux arrivants insuffleraient leur énergie dans nos provinces et nous feraient profiter de leur esprit novateur. Les employeurs cesseraient d’insister sur une expérience professionnelle acquise au Canada et de rejeter des candidats en raison de leurs études internationales. Ils n’hésiteraient plus à embaucher ces gens talentueux. C’est le monde parfait que je m’imagine, mais nous ne sommes pas rendus là encore.
Selon IEC-BC, il est essentiel d’élaborer un plan stratégique de gestion des talents des immigrants propre à la Colombie-Britannique afin de satisfaire aux besoins de la province en matière de travailleurs qualifiés. Ce plan devrait s’harmoniser aux stratégies provinciales en matière de capital humain. Nous désirons soutenir les gouvernements fédéral et provincial et autres intervenants clés dans l’élaboration et la mise en oeuvre d’un tel plan.
Je tiens à remercier le comité de m’avoir invitée à participer à cette étude.
Depuis maintenant environ 10 ans, je mène des recherches sur l’intégration des immigrants, notamment sur leur intégration économique. Aujourd’hui, j’aimerais exposer dans les détails certains des résultats d’une recherche que j’ai menée à l’Université de Waterloo. J’ai souligné les principaux résultats de cette étude dans un mémoire que j’ai remis au comité. Je vais donc vous donner plus de détails et parler des cinq principaux enjeux ressortis de cette recherche.
Premièrement, le niveau de scolarité des immigrants. Dans l'ensemble, mes recherches montrent que les immigrants qui détenaient une maîtrise ou un grade de niveau supérieur avaient une meilleure chance d’obtenir un emploi dans la profession recherchée que ceux qui avaient un baccalauréat. Cela est peut-être lié aux pratiques d’embauche des employeurs. Il en a déjà été question aujourd’hui. Aux yeux des employeurs potentiels, un grade de niveau supérieur témoigne des capacités du candidat. Les immigrants ayant un niveau de scolarité supérieur à un baccalauréat peuvent être plus utiles, car leurs qualifications indiquent qu’ils sont plus spécialisés, ce qui pourrait se traduire par une plus grande capacité à satisfaire aux exigences techniques ou sociales d’une profession. Pour ces raisons, même si le baccalauréat satisfait au niveau de compétence demandé pour une profession, la priorité pourrait être accordée aux immigrants qui détiennent un grade de niveau supérieur. Selon les recherches, les baccalauréats obtenus à l’étranger sont moins reconnus que les grades de niveau supérieur. Par ailleurs, les immigrants qui détiennent un grade de niveau supérieur font face à moins de concurrence sur le marché du travail, comparativement à ceux qui ont un baccalauréat. Ces derniers font face à une plus grande concurrence en raison du nombre croissant de diplômés universitaires ayant obtenu leur baccalauréat au Canada et de la préférence des employeurs pour les diplômes obtenus ici. Cela pourrait contribuer aux difficultés qu’éprouvent les immigrants qui détiennent un baccalauréat à se trouver un emploi.
Deuxièmement, mes conclusions concordent avec celles d'autres études, soit que les immigrants qui ont une meilleure maîtrise de l’anglais ou du français ont plus de facilité à se trouver un emploi au Canada. Ceux qui ont une meilleure maîtrise d'une des deux langues officielles ont une meilleure chance d’obtenir un emploi dans la profession recherchée, et ce, plus rapidement. Même si la formation en langues officielles est un des principaux services offerts par les services d’établissement des immigrants, les recherches montrent qu’un meilleur accès à des programmes de formation linguistique est nécessaire, notamment dans les petites collectivités et pour certains groupes d’immigrants. Par exemple, un plus grand pourcentage d’immigrantes que d’immigrants disent que la langue constitue le plus important obstacle à l’emploi. Les immigrantes ont souvent de la difficulté à avoir accès aux services linguistiques. Selon les recherches, plusieurs facteurs nuisent aux immigrantes, notamment leur statut de personne à charge, leurs responsabilités familiales ou le manque d’accès à un moyen de transport vers les endroits où sont offerts ces programmes. Toutefois, d’importantes améliorations ont été apportées au cours des dernières années offrant plus de souplesse en matière de formation linguistique, notamment pour les immigrantes qui ne font pas partie de la catégorie des travailleurs spécialisés.
Troisièmement, et il en a déjà été question, les immigrants qui vivent dans une grande région métropolitaine de recensement, les RMR, soit Toronto, Montréal et Vancouver, ont plus de difficultés à trouver un emploi que ceux qui vivent dans les petites collectivités. C’est également ce qu’ont révélé des recherches sur les salaires menées dans différentes collectivités. Même si les immigrants s'installent dans une grande RMR parce que les emplois offerts sont plus nombreux, ils peuvent se retrouver désavantagés en raison de la grande concurrence à laquelle ils font face de la part des personnes nées au Canada qui font leur entrée sur le marché du travail. Il est possible également pour les immigrants de s’intégrer plus rapidement dans des régions moins urbaines. Selon certaines recherches, les immigrants qui vivent dans les petites collectivités ont plus d’occasions de tisser des liens sociaux au sein de cette collectivité et sont davantage encouragés à accroître leur maîtrise de l’anglais ou du français. La réaction des employeurs envers les immigrants peut également varier dans ces régions. Les petites collectivités expriment souvent leur inquiétude quant à leur survie économique. Puisqu’habituellement les immigrants sont vus comme des travailleurs hautement qualifiés, ils peuvent être considérés comme une ressource utile à l’économie des petites collectivités. Il est également plus probable que les immigrants qui s'installent hors des grandes RMR aient déjà un emploi qui les attend. Mes recherches n’ont rien révélé de concluant à cet égard. Bien entendu, les explications de ces résultats sont plus complexes et d’autres recherches sont nécessaires. Mais, comme l’ont souligné les deux autres témoins, il s’agit d’un enjeu important.
Le quatrième enjeu concerne le rôle que jouent l’expérience professionnelle acquise à l’étranger et l’intégration des immigrants au marché du travail. Selon plusieurs études, l’expérience professionnelle acquise à l’étranger n’est pas reconnue dans le marché du travail canadien. De nombreux chercheurs ont évalué cet aspect en étudiant le nombre d’années d’expérience possibles qu’auraient pu acquérir les immigrants dans leur pays d’origine plutôt que le type d’emploi qu’ils auraient pu pratiquer. Selon mes recherches, les immigrants dont les emplois précédents étaient dans la même profession que celle recherchée au Canada ont eu plus de facilité à se trouver un emploi ici. Ça ne veut pas dire nécessairement que les employeurs reconnaissent officiellement l’expérience des immigrants acquise à l’étranger, mais cela indique que cette expérience leur procure un certain avantage sur le marché du travail canadien. C’est peut-être en raison des connaissances acquises dans ces professions, connaissances qu’ils peuvent utiliser pour développer des stratégies pour se trouver un emploi dans le domaine recherché. Il est possible également que les immigrants ayant de l’expérience dans une profession connaissent mieux le genre de sociétés ou d’industries qui seraient plus susceptibles de les embaucher. Les connaissances acquises dans le cadre d’expériences professionnelles peuvent également être utiles pour la reconnaissance des titres de compétences étrangers ou les aider dans leurs efforts de recyclage.
Finalement, les immigrants qui cherchent un emploi de niveau supérieur à ceux déjà occupés ont plus de difficulté à se trouver un emploi que ceux qui cherchent un emploi de niveau inférieur. Cela semble indiquer que ceux qui cherchent un emploi de niveau supérieur se heurtent davantage à des pratiques d’exclusion que ceux qui cherchent un emploi de niveau inférieur. Cela peut être lié, en partie, au processus de reconnaissance des titres de compétences ou à l’attestation d’études nécessaires pour toute profession de niveau supérieur. Puisque, habituellement, ces professions exigent des compétences, de la formation ou une accréditation particulières, les immigrants doivent se soumettre à des évaluations et des formations supplémentaires. Il est donc probable que la recherche d’emploi dans ces professions prenne plus de temps. Le processus sera plus long pour eux que pour ceux qui cherchent un emploi de niveau inférieur.
En terminant, j’espère que les résultats que je viens de vous présenter vous aideront dans le cadre de votre étude. Je serai heureuse de répondre à vos questions.
Merci.
Merci, madame Frank.
Nous allons maintenant amorcer la première série de questions.
Monsieur Menegakis, vous avez la parole.
Merci aux témoins d’avoir accepté notre invitation. Nous vous remercions d’avoir pris le temps de venir discuter avec nous et partager vos expériences.
Depuis son élection en 2006, ce gouvernement a triplé le financement pour l’établissement. Selon nous, cet aspect est très important pour aider les nouveaux arrivants à s’intégrer à la société et à contribuer à l’économie canadiennes, et, bien entendu, à obtenir de meilleurs résultats. Il est très important de poursuivre sur cette lancée. C’est la raison pour laquelle le comité et le gouvernement mènent cette étude.
Madame Pollack, je vais d’abord m’adresser à vous.
Je suis très heureux, et quelque peu surpris, d’apprendre que vous oeuvrez dans le domaine depuis 20 ans. Il est clair que les choses ont changé au cours de cette période. Au cours des neuf ou dix dernières années, nous avons connu le taux d’immigration le plus élevé de notre histoire. Comment le marché du travail a-t-il évolué pour les immigrants au cours des 20 dernières années?
Je vais devoir puiser dans mes souvenirs. Là où j’ai constaté une différence dans ma province… il y a quelques éléments.
D’abord, malheureusement, l’immigration est en baisse en Colombie-Britannique et cela nuit à la province. C’est peut-être lié à des changements dans le marché du travail. Malheureusement, aucune étude n’a encore été menée pour trouver les raisons de cette baisse.
Au début, je travaillais au niveau de l’emploi et des langues. J’aidais les immigrants à accroître leurs compétences linguistiques et à trouver un emploi. Au fil des ans, j’ai remarqué une plus grande ouverture de la part du milieu des affaires et une meilleure compréhension des raisons pour lesquelles nous les encourageons à embaucher des immigrants. Cependant, peu d’employeurs ont modifié leurs pratiques d’embauche pour ouvrir la porte aux immigrants. Souvent, c’est parce qu’ils ignorent ce qu’ils ne savent pas. Ils ne se rendent pas compte qu’ils rejettent activement des candidats ou que l’utilisation exclusive d’outils comme Workopolis, par exemple, n’est peut-être pas la meilleure façon de rejoindre les travailleurs compétents des collectivités d’immigrants.
Même si, au cours des 20 dernières années, le milieu des affaires s’est ajusté et a fait preuve d’une plus grande ouverture, je me serais attendu à plus. Je dis souvent que, malheureusement, les employeurs ne changent pas leur façon de faire tant qu’ils n’ont pas le dos au mur ou qu’ils n’ont pas un besoin critique en matière d’emploi.
Merci.
Nous connaissons très bien le bon travail qu'accomplit l’Immigrant Employment Council of B.C, que vous représentez aujourd’hui.
Évidemment, Vancouver est un grand centre urbain. Ce que l’on constate à Vancouver, on le constate aussi dans d’autres centres urbains au pays. Dans votre exposé, vous avez parlé d’organisations partenaires. J’aimerais simplement confirmer que vous travaillez avec d’autres organisations. Si c’est le cas, pourriez-vous nous parler de certaines d’entre elles?
Certainement. D’ailleurs, c’est une de nos orientations stratégiques. Toutes nos activités se font par l’entremise d’organisations partenaires, notamment des agences d’établissement, dont la plupart sont situées dans les basses terres continentales, mais il y en a quelques-unes dans des régions plus petites. Nous travaillons avec elles afin d’établir une communication entre les organisations, les employeurs, les sociétés et l’industrie.
La Chambre de commerce de la Colombie-Britannique, l'Association des ressources humaines de la Colombie-Britannique et les petites chambres à l’échelle de la province sont nos principaux partenaires. Nous passons par elles pour communiquer avec leurs membres. Nous sommes une petite organisation. J’ai toujours su que la seule façon pour nous de faire notre travail à grande échelle était par l’entremise de partenariats.
Nous avons les mêmes objectifs; nous aussi aimons travailler avec des partenaires. Le gouvernement ne pourrait jamais, à lui seul, offrir ces services. C’est la raison pour laquelle nous travaillons avec des fournisseurs de service d’établissement à l’échelle du pays et que nous les aidons autant. Notre objectif est le même, soit aider les nouveaux arrivants à contribuer à l’économie canadienne, à s’intégrer à leurs collectivités et à atteindre leurs propres objectifs et ceux de leur famille.
J’aimerais savoir si vous faites un suivi auprès des immigrants qui utilisent vos services.
C'est toujours une question plus difficile pour nous, car nous n'offrons pas de services aux immigrants, mais aux employeurs. Nous effectuons un suivi par l'intermédiaire de nos organismes partenaires de la Colombie-Britannique, comme S.U.C.C.E.S.S., MOSAIC, et ISS. Ces organismes font un suivi dans le cadre de la prestation de programmes, en partenariat avec nous. Il s'agit d'un programme de mentorat, d'un programme d'établissement de partenariats que nous avons créés. C'est ainsi qu'on fait un suivi des données.
Je peux vous indiquer le nombre de nos partenaires d'affaires, le nombre d'employeurs avec lesquels nous travaillons et le nombre d'employeurs que nous avons incités à modifier leurs pratiques d'embauche et à embaucher des immigrants.
Selon votre expérience, quel a été le résultat des services avec lesquels vous travaillez, avec lesquels vous êtes partenaires, pour la prestation de services aux immigrants?
Il est extrêmement élevé. Je vais vous donner un exemple, et je tiens encore une fois à préciser que cette réussite ne tient pas seulement de moi, car lorsqu'on travaille en partenariat, tout le monde joue un rôle.
Je vais vous donner l'exemple du programme de mentorat, qui existe depuis maintenant trois ans. Le programme de mentorat est offert dans l'ensemble du pays par l'intermédiaire de conseils sur l'emploi des immigrants et d'organismes d'aide à l'établissement. Je crois savoir que vous rencontrerez Mme Margaret Eaton, du TRIEC, plus tard aujourd'hui. Son organisme, situé à Toronto, a lancé ce programme. Le taux de réussite des immigrants qui participent au programme de mentorat et travaillent directement avec un professionnel de la Colombie-Britannique et qui trouvent un emploi dans leur domaine dépasse les 85 %. C'est la clé. L'important, c'est qu'ils trouvent un emploi satisfaisant dans leur domaine ou directement lié à leur domaine. Le taux de réussite est très élevé.
[Français]
Je remercie sincèrement les témoins d'être avec nous et d'avoir accepté notre invitation.
Ma question s'adresse à vous trois, mais je vais commencer par Mme Frank.
Madame Frank, vous avez parlé précisément des défis auxquels les femmes font face quand elles arrivent au Canada et qu'elles veulent s'intégrer au marché du travail. J'aimerais vous donner l'occasion de parler plus en profondeur des défis, mais aussi des solutions et des choses qui peuvent être mises en place.
Que peut-on faire de plus pour essayer d'améliorer le niveau de réussite de l'intégration des femmes au marché du travail?
[Traduction]
Comme je n'ai pas vraiment examiné les politiques, je ne suis pas placée pour donner des conseils précis à cet égard, mais je peux vous donner, selon la littérature et la recherche, un aperçu des enjeux dont les immigrants ont discuté.
Souvent, nous constatons que les femmes immigrantes possèdent une éducation et des compétences avant leur arrivée au Canada, mais qu'elles ne parviennent pas à avoir accès aux mêmes types de services que les autres en raison de leur statut de membre de la famille ou de personne à charge. Certaines opinions des femmes immigrantes sur l'accès à ces services sont très différentes des points de vue exprimés par les hommes.
À titre d'exemple, elles ont le sentiment que les services ne sont pas offerts à des moments où elles pourraient suivre des cours, notamment. Certaines femmes préféreraient que des programmes soient offerts pendant la fin de semaine. D'autres femmes ont laissé entendre qu'elles préféreraient que les cours de langues soient offerts dans les écoles fréquentées par leurs enfants, pendant les heures de classe, de façon à ne pas avoir à se préoccuper de faire garder leurs enfants. La question du transport vers les lieux où sont offerts les programmes — tant par rapport à l'accessibilité qu'au coût — est un sujet qui revient assez fréquemment.
Dans ce contexte, il faut savoir que la situation des femmes immigrantes quant à l'accès à ces programmes diffère beaucoup d'une personne à l'autre. En général, le problème découle en partie de l'hétérogénéité marquée de la population immigrée, car beaucoup de problèmes doivent être réglés de façon distincte pour les divers groupes. Évidemment, il est difficile de mettre en place un programme-cadre qui offre des services d'aide uniformes accessibles à tous. Toutefois, je pense qu'une plus grande souplesse quant à l'accessibilité et à la variété des programmes offerts pourrait être utile.
En ce qui concerne les programmes linguistiques en particulier, il est souvent question de programmes plus ciblés axés sur l'apprentissage de la terminologie technique propre à des métiers précis ou même sur des compétences moins techniques pour aider les immigrants à communiquer avec les membres d'une équipe, s'ils sont appelés à travailler en groupe, par exemple. Les immigrants montrent de l'intérêt pour l'apprentissage de nombreux mécanismes de communication, particulièrement en ce qui concerne la langue, mais cela peut aussi être simplement lié à l'interaction pendant une entrevue et au message qu'ils doivent transmettre à l'employeur.
[Français]
Vous avez brièvement parlé de services de garde.
Le fait d'avoir accès à de meilleurs services de garde à un faible coût pourrait-il favoriser l'intégration des femmes immigrantes au marché du travail?
[Traduction]
C'est souvent l'un des principaux aspects évoqués par les femmes immigrantes lorsqu'elles parlent des difficultés liées à l'accès aux programmes et services. Donc, selon les points de vue exprimés par les femmes immigrantes elles-mêmes, j'imagine que ce serait utile.
Évidemment, leur priorité est de prendre soin de leurs enfants à la maison, et cela a fréquemment préséance sur tout le reste. Les décisions liées à la famille nuisent parfois aux femmes immigrantes, car elles se concentrent davantage sur le maintien du foyer et la création d'une certaine stabilité. Par conséquent, elles ne sont pas nécessairement capables d'avoir accès aux services en raison de leurs autres responsabilités.
Donc, la réponse est oui.
[Français]
Madame Pollack, avez-vous quelque chose à ajouter sur l'intégration des femmes au milieu du travail?
[Traduction]
Oui; je vous remercie.
Pour compléter les propos de Kristyn, je dirais que lorsque je dirigeais le centre linguistique de MOSAIC, où j'ai travaillé pendant 10 ans, j'ai été chanceuse, car nous avions une garderie agréée. Je peux vous dire que pendant ces 10 ans, il y a toujours eu une liste d'attente. Il n'y avait jamais assez de places pour les femmes immigrantes qui voulaient s'inscrire à des programmes linguistiques et laisser leurs enfants à notre garderie.
Même si nous avons essayé d'accroître... Pour être honnête, c'était à la fois une question d'espace et de financement, mais nous savions qu'il était possible de doubler ou de tripler notre offre de services de garde pour les femmes immigrantes inscrites à des cours de langue.
[Français]
C'est très intéressant.
Lors de la dernière rencontre portant sur cette même étude, les représentants de Citoyenneté et Immigration Canada ont reconnu qu'il s'agissait d'un obstacle et ont dit qu'il existait des services de garde. Or vous affirmez que, même s'il y en a, ils ne sont pas suffisants. Selon vous, ce type de service devrait définitivement être accru.
Est-ce exact?
[Traduction]
Bienvenue à nos invités.
Ma première question s'adresse à M. Allen.
En ce qui concerne la disparité entre les compétences des ingénieurs étrangers et les exigences d'emploi au Canada, je pense que même si les pouvoirs du gouvernement fédéral en matière de titres de compétences professionnels sont limités, il me semble qu'il faudrait à tout le moins que les gens qui viennent ici soient informés avant leur arrivée de ce qui les attend ou des exigences en matière de titres de compétences.
Je me souviens d'avoir assisté à une séance d'information offerte par l'association des ingénieurs et d'avoir été impressionné par la quantité de renseignements que vous fournissez aux ingénieurs étrangers sur votre site Web avant qu'ils immigrent au Canada.
J'aimerais savoir si, selon vous, nous pouvons en faire plus à cet égard. Croyez-vous que le gouvernement fédéral pourrait jouer un rôle accru, que ce soit pour mieux informer les gens ou pour les aider à acquérir ces titres de compétences avant leur arrivée au pays?
Je pense qu'il y a manifestement beaucoup plus de choses à faire, et je pense que cela nécessite une collaboration avec ces gens.
Parmi les initiatives que nous étudions, il y a celle qui consiste à être désigné comme fournisseur de services d'évaluation des diplômes d'études au titre du système Entrée express. Avec une telle mesure, tout immigrant au Canada qui serait tenu de faire évaluer son diplôme en génie serait obligé de soumettre son dossier à un examen, qui serait réalisé en fonction des informations exhaustives que nous avons.
Un des problèmes auxquels nous sommes confrontés, c'est que parmi les immigrants au Canada qui prétendent avoir un diplôme en génie, moins d'un immigrant sur cinq présente une demande auprès des autorités de réglementation en génie.
Lors de nos discussions avec ces gens, même lorsque nos représentants s'informaient pour savoir combien de ces gens hautement qualifiés avaient un plan par rapport à ce qu'ils feraient à leur arrivée au Canada, nous avons été stupéfaits de constater qu'ils sont très peu nombreux. Le pourcentage est extrêmement faible. Ce que nous voulons faire, avant même qu'ils ne dépensent un cent pour leur venue au Canada, c'est leur faire remplir un questionnaire et leur fournir beaucoup de renseignements sur les exigences et l'exercice de la profession d'ingénieur au Canada, et leur indiquer ce qu'ils doivent faire s'ils veulent exercer cette profession au pays.
En somme, il est essentiel qu'ils comprennent ces exigences. Je crois que s'ils connaissent les compétences requises, les ingénieurs de partout dans le monde pourront élaborer un plan sur la manière d'y satisfaire.
Actuellement, plusieurs organismes de réglementation offrent des services d'évaluation à l'étranger, et il est très difficile d'inciter les gens à présenter une demande. Très peu de candidats présentent une demande à partir de l'étranger auprès de ces organismes. Certains de ces organismes offrent aux gens de commencer à passer des examens pendant qu'ils sont à l'étranger. À mon avis, il s'agit essentiellement de réaliser certains éléments du plan pendant que les gens sont encore dans leur pays, comme les évaluations préliminaires et les examens de présélection. Cela permet de réduire le temps d'attente pour l'obtention de l'agrément après leur arrivée au Canada.
Une des principales idées fausses qui circulent dans le milieu du génie à l'échelle mondiale, c'est que tous pensent qu'il faut être ingénieur agréé pour travailler au Canada. Or, ils peuvent faire partie d'une équipe d'ingénieurs même s'ils n'ont pas l'agrément. Nous voulons leur faire savoir qu'ils sont sur la bonne voie et leur indiquer comment commencer à monter leur dossier. Ainsi, ils pourront intégrer le marché et connaître la nature des emplois pour lesquels ils présentent leur candidature. Nous pensons que tous ces renseignements aident les gens à se préparer. Ensuite, après leur arrivée au pays, d'autres organismes pourront les aider à trouver un emploi.
Merci.
Si j'ai bien compris, Mme Pollack et Mme Frank ont tenu des propos similaires, en ce sens qu'il est parfois plus facile pour les immigrants de trouver un emploi à l'extérieur des grandes villes que dans des endroits comme Vancouver, la région du Grand Toronto, etc. Je suppose que cela pose problème, car les communautés des nouveaux immigrants sont souvent concentrées dans les grandes villes, tandis que les emplois sont plus nombreux à l'extérieur, pour une raison ou une autre. Je me demande comment nous pouvons surmonter cette difficulté.
Permettez-moi de poser une question d'ordre plus général. Que doit améliorer le gouvernement fédéral pour aider les immigrants à s'établir? Vous pourriez dire qu'il faut plus d'argent, mais outre le financement, quelles initiatives seraient utiles, selon vous? Cela pourrait être de se concentrer sur de petites collectivités, par exemple.
Étant donné l'intérêt que manifestent les petites collectivités pour l'accueil d'immigrants instruits, je dirais qu'il serait utile d'informer les immigrants avant leur arrivée au Canada, pour qu'ils sachent que les occasions pourraient être plus nombreuses dans des collectivités où ils n'avaient pas pensé s'établir.
Permettez-moi de vous interrompre un instant. Je pense que c'est l'un des avantages qu'offrent les programmes de candidats des provinces. Je sais pertinemment qu'au Manitoba, les petites collectivités sont souvent ciblées et qu'on parvient à inciter une masse critique d'immigrants à s'y établir. Je ne dis pas qu'il faut nécessairement plus de candidats des provinces, mais le gouvernement fédéral pourrait reprendre ce qui se fait dans les provinces et se concentrer sur les petites collectivités.
Merci. Je suis désolé, monsieur McCallum, mais nous avons dépassé de beaucoup le temps imparti. À moins que Mme Pollack ait une réponse très brève.
Je suis d'accord sur ce point. Très brièvement, je me concentrerais sur les services avant l'arrivée, sur la restructuration de l'aide à l'établissement, de façon à offrir plus de services avant l'arrivée et moins de services après.
Quant au point que vous avez soulevé, monsieur McCallum, je me concentrerais sur l'accroissement de la capacité des petites collectivités pour les aider à faire un suivi. Cela pourrait se faire dans le cadre des programmes de candidats des provinces, comme l'exemple du Manitoba, mais on pourrait aussi inciter les collectivités à élaborer leurs propres plans. Je pense que beaucoup de choses de ce genre sont en cours.
Merci.
Monsieur Allen, certains professionnels de la santé m'ont indiqué que certains immigrants ne satisfont pas aux exigences pour devenir médecin praticien ou un professionnel de la santé. Cela s'applique-t-il également à la profession d'ingénieur? Si oui, dans quelle proportion?
La réponse courte, c'est que cela s'applique en effet à la profession d'ingénieur. Pour ce qui est du pourcentage, nous ne le savons pas, encore une fois, car nous ne rencontrons pas toutes les personnes qui disent avoir un diplôme en génie. Plus de 80 % des 20 % qui présentent une demande d'agrément satisfont aux exigences.
Nous sommes portés à penser que le processus d'immigration dont nous parlons devrait comporter une troisième étape, que nous appelons le processus prédécisionnel. Avant de prendre la décision de s'établir au Canada, les candidats à l'immigration devraient savoir s'ils sont admissibles à la présentation d'une demande d'agrément ou savoir si leur formation est à ce point inadéquate qu'ils devraient peut-être songer à une autre carrière s'ils souhaitent s'établir au Canada.
De plus, s'ils prennent le titre d'ingénieur dans leur propre pays, il faut savoir que cette définition est largement utilisée à l'échelle mondiale, mais qu'elle pourrait être très différente de la définition du titre d'ingénieur au Canada. Ils pourraient toutefois intégrer une équipe d'ingénierie à titre de techniciens ou de technologues, par exemple.
Pour que ce soit clair, dans les domaines de la profession juridique, de la profession médicale, ce sont les ordres professionnels qui décident si quelqu'un peut exercer la profession.
M. Kim Allen: Oui.
Le président: L'association des ingénieurs détermine-t-elle...
Absolument. La profession est réglementée à l'échelle provinciale, comme pour les avocats et les médecins. Chaque province a sa propre réglementation. Notre organisme est un organisme national qui collabore avec les provinces. Nous travaillons avec les associations afin d'uniformiser les normes.
Elles déterminent si l'agrément est nécessaire. Comme je l'ai indiqué dans mon exposé, il est possible d'exercer la profession d'ingénieur ou de faire partie d'une équipe d'ingénieurs sans avoir obtenu l'agrément. Les gens doivent savoir quel pourrait être leur rôle. L'agrément est exigé seulement lorsqu'il faut rendre compte publiquement des travaux, et son obtention relève des associations provinciales.
Voilà pourquoi nous considérons qu'il est important que les gens sachent où ils veulent s'établir. Ils devront présenter leur demande auprès de l'association provinciale de la province où il est plus probable qu'ils travaillent. S'il s'agit d'une petite collectivité de la Colombie-Britannique, ils devraient présenter une demande auprès de l'association de la Colombie-Britannique plutôt qu'à une autre association, car les processus peuvent être légèrement différents. Elles ont toutes les mêmes normes, mais les processus sont légèrement différents. Les gens devraient obtenir l'agrément dans la province où ils ont l'intention de s'établir.
Sans vouloir insister, monsieur Allen, je vous demanderais néanmoins d'en dire un peu plus sur votre travail dans le projet d'évaluation des diplômes étrangers. Peut-être pourriez-vous nous donner des détails sur son évolution?
Permettez-moi de citer mon cas personnel. C'est au Canada que j'ai obtenu mon diplôme universitaire du premier cycle. J'ai acquis de l'expérience à l'étranger. J'ai fait une maîtrise en génie à l'Université du Sud de la Californie. À mon retour au Canada, on a classé mon diplôme en génie comme diplôme étranger, et, comme mon nom n'était pas typiquement anglais, on m'a demandé de passer une épreuve d'anglais. À l'époque, cela m'a un peu déçu, mais je sais que la profession d'ingénieur, comme vous l'avez dit, est réglementée par les provinces. Ceci explique cela. On m'a dit que, pour exercer au Canada, je devais reprendre mes études au Canada, et je n'y tenais pas tellement.
Permettez-moi de vous parler de mon autre profession. J'ai fait de la comptabilité publique. Je suis heureux de constater que, aujourd'hui, qu'on soit comptable général licencié, comptable agréé ou comptable en management accrédité, on est comptable professionnel agréé. À compter d'aujourd'hui, pouvons-nous structurer la profession d'ingénieur ou pouvons-nous mettre en place au Canada des conditions qui améliorent considérablement la capacité des ingénieurs immigrants ou des ingénieurs qui, comme moi, ont étudié à l'étranger, même dans un pays anglophone, de trouver un emploi rémunéré au Canada?
Peut-être pourriez-vous nous dire, d'après votre expérience, comment l'évaluation des diplômes étrangers permettra d'atteindre ce but.
J'ai parlé de notre guide pour les ingénieurs qui veulent s'établir au Canada. La situation s'est certainement beaucoup améliorée depuis votre temps. Sur ce site en ligne, vous pouvez cliquer sur l'outil d'évaluation des études. Si vous possédez un diplôme, vous aurez une assez bonne idée de la rapidité avec laquelle on le reconnaîtra. Nous sommes membres d'un certain nombre d'associations internationales, grâce aux ententes de reconnaissance mutuelle que nous avons conclues avec un certain nombre de pays.
Nous sommes aussi l'un des membres fondateurs de l'accord de Washington, signé par maintenant 17 pays qui reconnaissent mutuellement le système d'agrément de chacun des autres signataires. Un diplômé canadien aurait droit au même traitement en Australie ou en Nouvelle-Zélande. L'Inde vient tout juste de signer l'accord, l'année dernière, pour la reconnaissance de son système d'agrément.
Nous baignons maintenant dans un bassin mondial. Nous savons que les ingénieurs sont très mobiles et qu'ils sont appelés à travailler dans le monde entier. Alors comment faisons-nous pour mieux reconnaître ces diplômes étrangers? Nous avons un excellent accès à toute l'information.
La base de données d'Ingénieurs Canada est renseignée sur des milliers de programmes de génie de partout dans le monde. Nous essayons de réunir ces renseignements corrélatifs, qui peuvent être utiles à l'évaluation faite par les organismes provinciaux. Ils peuvent trouver l'information sur les divers programmes de génie et les comparer à un programme canadien.
L'évaluation des diplômes étrangers a une longue histoire... La profession de médecin et de pharmacien est déjà désignée au sens de l'évaluation des diplômes d'études. Les utilisateurs des deux codes de la Classification nationale des professions pour les médecins ou du code pour les pharmaciens sont dirigés vers ces deux professions. Dans la CNP, 14 codes correspondent aux ingénieurs. Pour l'ingénieur dirigé vers nous, nous devons opérer un filtrage, pour nous voir si sa demande est admissible, par comparaison de ses études aux études au Canada.
Nous pensons qu'il est très important de fournir ces renseignements corrélatifs. Si les études d'un candidat ne sont pas à la hauteur ou si son programme d'études comporte de graves lacunes, il pourra prendre des cours supplémentaires ou se présenter à des examens supplémentaires. Tout cela lui fera comprendre comment il peut entrer dans la profession tout en augmentant ces... Il s'agit donc d'aider les candidats à être entièrement autorisés à travailler au Canada.
Je suis heureux d'apprendre cette très importante amélioration, qui permet à quelqu'un qui a étudié aux États-Unis de ne plus avoir à se soumettre de nouveau à l'épreuve d'anglais.
Permettez-moi d'adresser ma prochaine question à Mme Frank.
Étant donné mes antécédents personnels, comment feriez-vous pour mieux diriger l'immigrant vers tel emploi, vers quelqu'un qui a étudié aux États-Unis, qui a une maîtrise en génie, mais qui ne parvient pas à trouver d'emploi en génie au Canada?
Des immigrants se sont dits désireux de suivre des programmes de jumelage au travail, dans une tâche particulière. Bien sûr, il faut un effort coordonné, entre les organisations professionnelles pour amener les mentors et d'autres professionnels qui...
Je ne suis pas une évaluatrice de la politique. Ma situation, en quelque sorte, ne me permet pas de parler précisément de recommandations stratégiques. Je suis désolée.
Permettez-moi alors de vous demander ceci: vous avez dit que pour les personnes qui possèdent des diplômes de cycle supérieur comme une maîtrise ou un doctorat, il est plus facile de leur trouver un emploi. Mais, visiblement, dans beaucoup d'emplois, les immigrants ont l'impression d'être sous-employés, lorsqu'ils arrivent ici détenteurs d'un diplôme d'études supérieures, compte tenu des postes qu'on leur offre. Je dirais que c'était certainement mon impression, à mon retour au Canada, au début des années 1980.
Effectivement, ma recherche a porté de façon très générale sur les niveaux de compétence, la correspondance entre l'emploi occupé et celui qui était visé d'après ces niveaux de compétence. C'est essentiellement un diplôme universitaire d'après la définition de la Classification nationale des professions.
Dans votre recherche, avez-vous trouvé une explication au fait que l'expérience acquise à l'étranger, particulièrement, n'est pas aussi estimée ici qu'à l'étranger?
Je peux seulement dire que, en Australie, on a tenté de reconnaître les diplômes étrangers avant l'arrivée au pays. Un programme y est en place et il a permis l'évaluation des diplômes des immigrants avant leur arrivée au pays. Ils ont pu avoir une carrière mieux réussie. Leur taux de réussite a été supérieur après la mise en place du programme. Je sais que des programmes analogues existent dans d'autres pays.
Merci, monsieur Leung.
Nous avons commencé en retard. C'est pourquoi, monsieur Sandhu, je vous accorde cinq minutes.
Excellent. Merci beaucoup.
Je souhaite la bienvenue aux témoins et je les remercie d'être ici.
Pour faire suite à la question sur les garderies, vous en avez parlé pour des programmes d'apprentissage linguistique et tout le reste, destinés aux femmes. Madame Pollack, vous savez probablement mieux si, à cet égard, les femmes à la recherche d'un emploi après avoir reçu la formation ont des obstacles à surmonter. Est-ce que des programmes de garderies les aideraient à trouver de l'emploi?
Je pense que, malheureusement, le problème se pose vraiment partout au pays. L'absence de garderies ou l'incapacité d'en trouver est un obstacle. Parfois, il s'ajoute une dimension culturelle. Il existe peut-être des cultures où il est mal vu qu'une mère confie ses enfants à une garderie publique, où, peut-être, on les confie plus volontiers à la famille. Si la famille ou un réseau étendu ne se trouvent pas dans la nouvelle communauté, cela devient un obstacle très difficile.
En plus, il y a aussi le problème du transport. Il est parfois difficile de se déplacer pour aller aux classes de langue ou à la garderie — en espérant qu'elles sont proches l'une de l'autre —, particulièrement pour beaucoup de femmes réfugiées qui fréquentent notre centre d'apprentissage linguistique.
Oh! C'est toute une question. Ma réponse ne sera ni longue ni compliquée. Nous savons que, dans les pratiques d'embauche, pas dans toutes les entreprises ni, bien sûr, chez tous les employeurs, des préjugés qui peuvent être généraux font partie du processus.
Dans ma recherche, j'ai effectivement examiné la situation de minorités visibles et, effectivement, même après avoir pris en considération les études et toutes sortes d'autres caractéristiques, elles semblent désavantagées sur le marché du travail. Comme Kelly l'a fait remarquer, d'autres facteurs, nombreux, complexes et inextricables, peuvent jouer: la région d'origine, la qualité, perçue ou non, de l'instruction dans la région d'origine. Effectivement, j'en ai observé des manifestations.
Madame Pollack, vous avez dit que le meilleur endroit pour subir une crise cardiaque est dans un taxi et, effectivement, je connais un certain nombre de médecins qui sont chauffeurs de taxi en Colombie-Britannique, particulièrement dans la région de Vancouver. Comment le gouvernement fédéral peut-il aider à remédier à cette situation?
Encore une fois, c'est une question complexe, mais j'essaierai d'y répondre.
Monsieur Allen a parlé de réglementation et de reconnaissance des qualifications professionnelles acquises à l'étranger. Ici, c'est un processus extraordinairement complexe. Il existe, dans tout le pays, des centaines d'organismes de réglementation sous régime provincial, qui évaluent différemment ces qualifications. Pour les nouveaux arrivants, c'est une grande difficulté. Beaucoup d'organismes de réglementation sont progressistes et, pas seulement parce qu'ils ont délégué ici un de leurs représentants, mais je dirais que les ingénieurs ont été parmi les plus progressistes au pays; je ne pourrais pas en dire autant de la profession médicale, d'après mon expérience, et j'ai consacré beaucoup de travail à l'examen de leur processus de reconnaissance.
Peut-être que le gouvernement fédéral devrait prendre l'initiative de réunir les provinces pour élaborer une norme nationale?
Votre temps est écoulé. Merci.
Je tiens à remercier les trois témoins pour leurs exposés. Leur témoignage sera très utile à notre rapport. Merci d'avoir été ici.
Je suspends la séance quelques moments.
Reprenons.
Je souhaite la bienvenue à M. Robert Henderson, qui est président et directeur général de BioTalent Canada, et à Mme Margaret Eaton, qui est directrice générale du Toronto Immigrant Employment Council.
Bonjour.
Monsieur Henderson, nous vous entendrons le premier. Vous disposez de huit minutes pour livrer votre exposé. Après quoi, Mme Eaton fera de même, puis les membres du comité entameront la période de questions.
Excellent. Merci.
Au nom de BioTalent Canada et de son réseau de membres et de partenaires, je remercie les membres du comité de leur invitation et de l'occasion qu'ils m'offrent de livrer mon exposé devant eux.
BioTalent Canada est une association nationale à but non lucratif, qui ambitionne d'assurer à la bioéconomie canadienne l'accès aux meilleurs talents disponibles. Par notre recherche sur le marché du travail, nous collaborons avec des programmes fédéraux et notre réseau de partenaires de l'industrie pour reconnaître les pénuries de talent qui, si elles perduraient, risqueraient de paralyser l'important moteur de l'économie nationale qu'est l'industrie canadienne des biotechnologies.
Comme vous le savez, nous définissons la bioéconomie comme l'invention, le développement, la production et l'utilisation de produits et de processus principalement tirés de ressources biologiques. À ce titre, la bioéconomie touche la santé, l'énergie, l'agriculture ainsi que l'industrie chimique et celle des matériaux. Ayant connu une évolution rapide grâce à l'innovation scientifique, le secteur canadien des biotechnologies peut se subdiviser en quatre grands sous-secteurs: les produits biomédicaux, qui comprennent les appareils médicaux et les produits biopharmaceutiques; l'agri-biotechnologie; la bioénergie; et le sous-secteur bio-industriel. D'après cette définition, la bioéconomie représente en gros 7 % du PIB actuel du Canada.
En ce qui concerne le nombre d'employés, 80 % des sociétés canadiennes de biotechnologie font partie des PME, qui comptent moins de 50 employés, et c'est là que la plupart des emplois se créent. Il est sûr que les biotechnologies englobent les grandes sociétés pharmaceutiques très connues, mais les PME, les établissements de recherche sous contrat en pleine croissance et les partenariats avec les universités en forment d'importantes parties.
Dans notre rapport le plus récent de recherche sur le marché du travail, la majorité des dirigeants que nous avons sondés ont déclaré que les deux principaux obstacles à leur réussite étaient l'accès aux capitaux, qui est visiblement le problème numéro un, et l'accès au talent.
Je ne saurais trop insister sur le fait que, pour les partenaires des associations industrielles nationales et provinciales qui sont affiliées à BioTalent Canada, le principal obstacle, pour les sociétés de biotechnologie, qui les empêche de devenir des employeurs de choix pour les immigrants, est l'accès aux capitaux. Toute amélioration de la politique canadienne qui permettrait de soulager ce problème est universellement et énergiquement recommandée. Les taux d'épuisement des investissements sont extrêmement élevés pour des sociétés de biotechnologie, ce qui oblige les dirigeants à consacrer le gros de leur temps à la quête d'investissements pour maintenir leurs opérations, plutôt qu'à celle de talents pour faire croître leurs entreprises.
L'industrie de la bioéconomie est l'une de celles dont les acteurs sont le plus instruits, ce qui signifie que la plupart des nouveaux embauchés ne sont plus tout à fait des jeunots. En outre, la commercialisation d'un produit nouveau des biotechnologies peut prendre 10 ans. Ce fait, à lui seul, rebute beaucoup les investisseurs.
Alors que les produits de l'industrie sont très réglementés, il faut savoir que la majorité des professions de la bioéconomie ne le sont pas, à l'exception de celles des pharmaciens et de certaines professions médicales. La bioéconomie pourrait donc être un terreau fertile pour les immigrants ayant une formation scientifique et se destinant à une carrière ou voulant la réorienter.
La difficulté est de leur proposer des plans de carrière assez tôt, au bon moment, pour leur donner les clés pour y entrer et les présenter comme des candidats prometteurs aux PME. Il faut présenter à ceux qui sont obligés d'attendre ou qui n'obtiennent pas le droit d'exercer une profession réglementée des solutions de rechange à l'intérieur d'une période d'un an, au maximum, pour que leurs compétences scientifiques restent actuelles et monnayables.
Notre recherche montre que les employeurs des biotechnologies qui embauchent de nouveaux arrivants voient augmenter leur innovation, leur productivité et même l'accès à de nouveaux marchés et à de nouveaux investisseurs. Ces avantages concurrentiels peuvent constituer des arguments convaincants pour inciter les sociétés de biotechnologie à courtiser activement les nouveaux arrivants, dans un marché de l'emploi stratégique.
Ayant été nommé membre de la commission d'Emploi et Développement social Canada sur les difficultés d'emploi des nouveaux Canadiens par le ministre Jason Kenney, l'automne dernier, j'ai eu le privilège d'écouter les organismes de réglementation, les organismes d'aide aux immigrants et les nouveaux arrivants de partout au Canada nous parler des principaux obstacles qu'ils doivent affronter. BioTalent Canada en a repris beaucoup à son compte. Il s'agit notamment du fait que rien n'incite les organismes canadiens de réglementation, y compris dans leur mission, à présenter aux candidats qui ont échoué des plans de carrière de rechange. BioTalent Canada a élaboré un programme modèle de transfert de compétences qui pourrait faire entrer des professionnels de la santé dans la bioéconomie, mais les organismes de réglementation que nous avons approchés ne dirigeront pas ces candidats vers nos ressources.
Les organismes d'aide aux immigrants, particulièrement dans les grands centres urbains, ne coordonnent pas leurs efforts pour trouver des postes aux nouveaux arrivants, ce qui signifie que l'accès aux réseaux et aux ressources ne se fait pas connaître efficacement.
Les renseignements précis et actuels sur le marché du travail ne sont pas centralisés et ne sont même pas facilement accessibles aux nouveaux arrivants ni aux futurs nouveaux arrivants.
Enfin, dans les petits centres urbains, où on trouve beaucoup de grappes viables de biotechnologies, on peine à retenir les candidats. Le travail permettant d'acclimater les nouveaux arrivants, qui, normalement, relèverait des communautés culturelles dans les grands centres urbains, retombe sur les épaules des petits employeurs qui sont mal équipés pour le faire.
Dans les biotechnologies, le taux de chômage des jeunes est également très élevé. Notre partenaire, Life Sciences Ontario, dans l'étude qu'il a publiée ce mois-ci, le chiffre à 18,9 % en Ontario seulement. Ces chômeurs sont des concurrents directs des nouveaux arrivants. Si on ajoute à cela le risque perçu que prend une petite compagnie en embauchant un employé, quel qu'il soit, ce risque paraît encore plus grand quand il s'agit d'un nouvel arrivant et que l'employeur devra surmonter des barrières linguistiques ou culturelles.
Voilà la situation dans laquelle se trouve la bioéconomie canadienne: une industrie fière, forte d'un parcours solide en matière d'innovation, mais qui est désavantagée par son propre cycle économique. Les dépenses d'investissement qui sont nécessaires l'emportent sur tout le reste. On a clairement relevé des lacunes dans les compétences pour lesquelles les nouveaux arrivants sont reconnus comme un marché avantageux; toutefois des limites politiques et systémiques les empêchent d'obtenir des emplois productifs et bien rémunérés.
Merci beaucoup.
Merci beaucoup. Je suis vraiment ravie de comparaître devant vous aujourd'hui.
Je suis la directrice générale du Toronto Region Immigrant Employment Council, ou TRIEC.
Comme Kelly l'a dit plus tôt, des conseils sur l'emploi des immigrants comme le nôtre ont été établis au pays pour trouver des solutions au problème, par exemple, des médecins formés à l'étranger qui deviennent chauffeurs de taxi. Je sais qu'on vous a déjà dit qu'un taxi est le meilleur endroit pour faire une crise cardiaque. L'automne dernier, un film portant sur le sujet était présenté au cinéma: Dr. Cabbie. C'est l'histoire d'un Indien qui vient s'établir au Canada et qui ne peut pas faire reconnaître son diplôme. Il finit par exercer sa pratique médicale dans son taxi. Je vous mets au défi de demander à n'importe quel chauffeur de taxi de la ville ce qu'il faisait dans la vie avant de venir au Canada.
Nous savons que dans la région du Grand Toronto, le taux de chômage est deux fois plus élevé chez les nouveaux immigrants que chez les gens qui sont nés au Canada et dont le niveau d'études est similaire. Il reste beaucoup de travail à faire. Créé en 2003, le TRIEC est le premier conseil sur l'emploi des immigrants à avoir été établi. Sa mission est de trouver des solutions devant le peu de progrès pour que les immigrants décrochent des emplois correspondant à leur expérience de travail et à leur formation. Le TRIEC est financé en partie par l'enveloppe de financement des services d'établissement de CIC.
Comme le TRIEC, d'autres conseils sur l'emploi des immigrants se sont développés au pays. Ils ont tiré parti de notre expérience et ont appliqué nos connaissances dans leur région respective et ont trouvé leurs propres solutions novatrices.
Je veux vous parler de ce qui fait du TRIEC un organisme unique dans la région du Grand Toronto et du facteur commun qui fait des autres conseils sur l'emploi des immigrants des organismes uniques dans leur région. C'est vraiment une question de liens. Au départ, le TRIEC a rassemblé tous les intervenants touchés par le problème pour trouver des solutions. Nous formons un petit organisme, mais nous avons étendu notre portée grâce à nos partenariats. C'est la solidité de nos liens qui fait que les choses fonctionnent.
Habituellement, les conseils sur l'emploi des immigrants sont différents d'autres organismes qui travaillent dans le secteur de l'emploi des immigrants en ce sens qu'ils ne fournissent pas des services directement aux immigrants. Nous n'offrons pas de service d'évaluation des diplômes, de formation liée à une profession donnée ou de services de recrutement. C'est là notre atout, car il n'est pas possible de changer les choses de façon durable si l'on n'axe ses efforts que sur le volet qui concerne l'offre, c'est-à-dire que si l'on ne fait que donner aux immigrants des outils pour qu'ils s'adaptent au marché. Nous sommes convaincus que le marché doit s'adapter à l'immigrant également.
La dure réalité, c'est que les gens qui immigrent au Canada ne seront jamais pleinement intégrés à la société malgré tous leurs efforts si les employeurs nés au Canada ne changent pas leur conception des choses. Un immigrant se sentira comme un citoyen productif seulement s'il se trouve un emploi dans lequel ses compétences et son expérience sont pleinement valorisées. C'est essentiel pour l'intégration des nouveaux arrivants dans leur nouveau pays. C'est là que le TRIEC entre en jeu.
Grâce aux liens solides que nous avons avec un certain nombre d'entreprises, d'employeurs et d'organismes partout dans la région, nous avons le levier qu'il nous faut pour entamer un dialogue et changer les conceptions et les pratiques. Notre démarche est également unique. Nous savons que critiquer et sermonner les gens ne constituent pas le meilleur moyen de changer les choses. Nous faisons valoir les arguments en faveur d'un milieu de travail inclusif pour les immigrants. Nous savons que les immigrants apportent un énorme potentiel à notre région, et nous travaillons auprès des employeurs pour qu'ils le constatent également. Recruter dans un bassin de gens de talents venant de l'étranger favorise l'innovation et donne accès à un marché mondial.
Une fois que l'employeur est convaincu que l'inclusion des immigrants est nécessaire, nous pouvons adapter des solutions pratiques qui ont fait leurs preuves afin d'aider l'employeur à rendre son milieu de travail plus inclusif. Par exemple, nous avons créé TRIEC campus, une ressource d'apprentissage en ligne qui comprend des outils faciles à utiliser dont les gestionnaires et les membres d'une équipe peuvent se servir pour améliorer leurs propres compétences culturelles. La RBC a ajouté ces outils à son réseau intranet, et c'est devenu un volet de la formation que reçoit son personnel. Ils sont offerts à tous les employés de la RBC partout au pays.
Un autre moyen de changer les choses, c'est le partenariat de mentorat. Vous avez entendu parler quelque peu du pouvoir du mentorat. Le programme vise à faire en sorte que des immigrants qualifiés puissent profiter de services de mentorat et être jumelés à des professionnels établis dans leur domaine. Le mentorat favorise le changement, et ce, pas seulement pour celui qui en bénéficie. Nous constatons que 76 % des mentorés obtiennent un emploi dans leur domaine dans les six mois suivant la fin du programme, mais aussi que des changements s'opèrent chez le mentor. Il s'agit d'un lien social direct avec une personne qui pratique la même profession, mais dont le bagage culturel est différent. Cela change les conceptions d'une façon que les campagnes ou les sermons ne pourront jamais le faire. Les résultats sont éloquents, et 95 % de nos mentors sont davantage portés à passer un immigrant qualifié en entrevue ou à en embaucher un à la suite de sa participation au programme.
Au cours des cinq prochaines années, nous prévoyons développer considérablement notre programme de mentorat. Nous avons été choisis par LEAP: The Centre for social impact pour essayer d'augmenter le nombre de jumelages dans la région du Grand Toronto, qui passerait de 1 300 à 6 000. Nous collaborons avec un ensemble de partenaires du secteur, dont le Boston Consulting Group, Ernst and Young, The Offord Group, Cossette et McCarthy Tetrault. Il s'agit d'une occasion en or pour les immigrants qualifiés.
Nous collaborerons également avec nos collègues des autres conseils sur l'emploi des immigrants pour que le programme soit offert partout au pays. Cette stratégie de changement à l'échelle nationale fonctionnera seulement si nous collaborons tous vraiment et si nous conjuguons nos efforts. Au TRIEC, nous n'avons pas peur de nous tourner vers des possibilités de croissance inexplorées. Nous sommes toujours à la recherche de moyens novateurs de changer les choses.
Nous ne créons pas de liens qu'avec des employeurs — bien que ce soit essentiel à notre réussite —, mais aussi avec nos collectivités. Encore une fois, le partenariat de mentorat fait intervenir 15 organismes de prestation de services qui fournissent le lien aux mentorés et nous aident à gérer le programme. Nous ne pourrions pas le faire sans l'aide des organismes d'établissement.
De plus, nous créons des liens entre les collectivités. Nous travaillons avec 55 associations dirigées par des immigrants. Nous mettons en contact les immigrants qualifiés et les employeurs, de même que les immigrants qualifiés entre eux et les employeurs entre eux, pour qu'ils puissent développer leurs capacités et se faire entendre.
Comme je l'ai dit, nous ne sommes pas un fournisseur de services. Nous facilitons vraiment l'établissement de liens qui mènent à un changement réel et durable.
En terminant, je veux dire qu'il est indéniable qu'un grand nombre de divers groupes au Canada ont besoin d'aide pour obtenir un emploi intéressant, mais l'embauche d'immigrants est un volet particulier et requiert la collaboration de différents secteurs et des solutions adaptées aux besoins. Le TRIEC et nos collègues des autres conseils sur l'emploi des immigrants au pays offrent ces solutions aux employeurs qui permettent à des immigrants qualifiés de réussir leur vie professionnelle.
Nous remercions le gouvernement du Canada d'appuyer notre travail par l'intermédiaire de Citoyenneté et Immigration Canada.
Madame Eaton, monsieur Henderson, je vous remercie.
Mes collègues vous poseront maintenant des questions.
Monsieur Menegakis, allez-y, s'il vous plaît.
Je vous remercie tous les deux d'être venus comparaître et de nous avoir présenté un exposé.
Je représente un comté de la région du Grand Toronto très multiculturel, le comté de Richmond Hill, qui est probablement l'un de ceux où l'on retrouve la plus grande diversité au pays, puisqu'il s'agit d'un grand centre urbain, si l'on veut. Je suis pleinement conscient du bon travail que le TRIEC accomplit pour les immigrants. J'en suis témoin presque quotidiennement.
Je sais que le TRIEC est composé d'un grand nombre d'organismes qui collaborent pour les nouveaux arrivants. Pouvez-vous nous nommer certains de vos organismes partenaires et nous dire dans quelle mesure ces partenariats sont importants dans l'intégration des immigrants?
Oui. Richmond Hill est l'un des endroits les plus diversifiés sur le plan culturel, et notre réseau couvre la région de York. Nous sommes ravis de servir cette région.
Le partenariat de mentorat comprend 20 employeurs partenaires. Il y a la RBC, la Banque Scotia et la Banque de Montréal. Sun Life, Manuvie, KPMG et Deloitte viennent de s'ajouter à la liste. Bon nombre des grands organismes ont décidé de fournir des milliers de mentors à notre programme. Comme je l'ai dit, du côté de la collectivité, nous avons 15 organismes de prestation de services. Il y a par exemple COSTI, ACCES Employment et JVS qui nous appuient.
De plus, par l'intermédiaire de notre conseil, nous représentons le gouvernement. L'un de nos commanditaires et partenaires est la bibliothèque publique de Toronto. Nous travaillons avec les organismes de réglementation, avec le Bureau du commissaire à l'équité.
Nous essayons vraiment de présenter un tableau d'ensemble de l'immigration, car nous trouvons que réunir tout le monde est le moyen le plus efficace de changer les choses.
Dans le cadre de votre travail, quels sont les facteurs essentiels à l'intégration réussie d'immigrants?
Une question très intéressante a été posée tout à l'heure au sujet du racisme. Je pense que l'une des plus grandes difficultés, c'est de comprendre ce que nous appelons les préjugés cachés, ou les préjugés inconscients, soit cette idée selon laquelle nous avons tous des préjugés. Dans une étude récente très intéressante, une professeure de Harvard a trouvé une façon d'évaluer les préjugés. Il s'avère que tout le monde a des préjugés dans une certaine mesure. Parfois, on privilégie les jeunes par rapport aux personnes plus âgées, ou les hommes par rapport aux femmes.
Je crois que pour vraiment aller au-delà de ce préjugé inconscient, il faut discuter et travailler avec un immigrant qualifié. Nous entendons constamment des employeurs dire à quel point ils n'avaient pas réalisé qu'il y avait autant de gens compétents. Je crois que bien des gens ont l'impression que les immigrants qualifiés sont les gens qui gèrent le dépanneur du coin, par exemple, ou le chauffeur de taxi, sans savoir que ces immigrants ont peut-être plus de diplômes qu'eux.
Il est important que ces idées répandues changent. Plus nous favoriserons le rapprochement entre les immigrants qualifiés et les employeurs, plus les choses changeront de façon durable.
Monsieur Henderson, pouvez-vous nous en dire plus sur ce que fait BioTalent pour aider les immigrants à réussir dans l'industrie canadienne des biotechnologies?
D'accord. Comme je l'ai déjà dit, bon nombre des professions du secteur des biotechnologies ne sont pas réglementées, ce qui fait que souvent, la reconnaissance des titres de compétences ne fonctionne pas dans notre industrie pour ce qui est d'évaluer les talents. L'un des volets dans lequel nous réussissons très bien, c'est le processus qui consiste à dresser le profil des compétences, qui nous a permis, pour 38 professions courantes dans le secteur des biotechnologies, d'établir un profil des compétences requises pour qu'ils réussissent.
Nous avons un programme de reconnaissances des biocompétences, qui est un programme de transfert des compétences. Par exemple, les médecins, les vétérinaires, les infirmières ou les pharmaciens qui ne réussissent pas à obtenir leur permis pour pratiquer au Canada, ou qui doivent attendre énormément de temps avant de l'obtenir, possèdent parfois de 80 à 100 % des compétences nécessaires dans le cadre de ces programmes. Nous avons un outil en ligne qui leur permet d'établir un profil de ces compétences, et ils réalisent soudainement qu'ils sont qualifiés dans plusieurs professions différentes de la bioéconomie, ou ils constatent qu'ils ont besoin de très peu de formation ou de perfectionnement professionnel pour satisfaire aux critères.
Ces compétences peuvent également être vérifiées. Nous avons un comité composé de professionnels dans les différentes professions pour lesquelles nous avons établi un profil des compétences. Il vérifie les curriculum vitae. Le comité peut confirmer que selon ce que l'individu a déclaré, il est « BioFin prêt » — c'est notre marque — à exercer la profession. C'est une plateforme unique. Nous pensons qu'elle a servi de modèle pour d'autres professions, comme des techniciens médicaux ou des techniciens en radiologie. Cela fonctionne très bien pour les industries qui ne sont pas fortement réglementées où, comme je l'ai mentionné, la reconnaissance des titres de compétences ne fonctionne pas.
Avez-vous une idée du nombre d'immigrants auprès desquels BioTalent travaille dans une année donnée?
Le nombre d'immigrants? Je peux dire que plus de 20 000 personnes sont inscrites à notre banque d'emplois en ligne, et que dans la vaste majorité des cas, ce sont des immigrants. Cela devrait vous donner une idée du nombre de gens qui travaillent avec nous, ou du moins, qui s'intéressent à nous. Certains d'entre eux sont au Canada et d'autres, bien entendu, à l'étranger. Nous sommes une source d'information sur les emplois offerts et sur ce que recherche l'industrie canadienne de la bioéconomie sur le plan des talents.
Quels obstacles auxquels sont confrontés les immigrants dans le système BioTalent sont les plus difficiles à surmonter pour eux, selon vous?
Comme je l'ai dit, concernant les obstacles, c'est que les petites et moyennes entreprises ne peuvent pas consacrer le gros de leur temps à la quête de talents, mais lorsqu'elles le font, par exemple — selon les renseignements sur le marché du travail que nous avons —, en moyenne 40 % des recruteurs utilisent les médias sociaux pour trouver des talents la plupart du temps, mais quant à la bioéconomie, on parle de 4 %. Ils n'utilisent pas les mécanismes que les immigrants et toutes les personnes à la recherche d'un emploi utilisent pour chercher un emploi. Souvent, ils parlent à leurs contacts dans le réseau pour essayer de rejoindre le professionnel qui convient. Il y a un réseau de petites et moyennes entreprises dans lequel le terme « ressources humaines » est un non-sens. Ils trouvent que c'est davantage un problème qu'une occasion, et ils n'élargissent pas leur recherche pour y inclure l'énorme potentiel des nouveaux arrivants qui existe.
Madame Eaton, monsieur Henderson, merci beaucoup. Je suis ravie de vous entendre parler de votre expertise; c'est utile à notre discussion et à notre étude.
Un certain nombre d'observations qui ont été faites m'intéressent, et je vais vous les présenter et vous demander de répondre ou d'intervenir de la façon qui vous conviendra.
Concernant les observations que vous avez tous les deux faites au sujet du formidable réservoir de talents, il y a un certain nombre d'années, au milieu des années 1990, je soutenais un groupe, le Council of Canadian Immigrants de London, en Ontario. Ce groupe de gens a fait connaître de formidables talents, mais ils ne pouvaient pas trouver du travail et faisaient des choses qui étaient en deçà de leur niveau de compétences. À l'époque, nous avons essayé de parler au gouvernement des liens que nous pouvions créer. Ces gens très talentueux connaissaient des gens d'affaires, des entrepreneurs et des professionnels dans leur pays d'origine et il était possible pour nous d'établir des liens, peu importe qu'il s'agisse de commerce ou de partage d'information, de compétences ou de recherche, mais on ne manifestait aucun intérêt à cet égard.
La situation s'est-elle améliorée en 2015? Est-on passé par-dessus cette indifférence? Peut-on espérer que ce type de professionnels et ce type de liens puissent améliorer nos relations à l'échelle internationale?
Absolument. L'un de nos partenaires, la Banque Scotia, se considère comme étant la plus internationale des banques canadiennes. Elle est présente dans 55 pays. Elle tient à participer à notre partenariat de mentorat parce qu'elle souhaite donner à ses employés la possibilité de travailler avec des gens d'autres cultures. La Banque Scotia estime que c'est essentiel à sa réussite.
Dans le cadre de sa formation, un nouveau dirigeant bénéficiera du programme de mentorat pour apprendre à travailler avec une personne issue d’une autre culture. Que ce soit un collègue ou un client, il est évident que ces personnes seront appelées à côtoyer des gens d'autres pays. Du côté de l'employeur, de l'entreprise, je crois qu'on est pleinement conscient que l'immigrant contribue énormément au succès de l'entreprise à l'échelle mondiale. Effectivement, je crois que les choses se sont améliorées.
Je partage son avis.
L'an dernier, nous avons réalisé une étude sur les professionnels formés à l'étranger. La plupart des entreprises ayant embauché des professionnels formés à l'étranger ont constaté une amélioration de l'innovation et un meilleur accès aux marchés, etc. D'un point de vue industriel, la mondialisation favorise le développement. Tout le monde comprend que nous ne pouvons plus désormais nous contenter de notre marché intérieur pour faire des affaires et recruter des talents.
Pouvons-nous faire quelque chose à ce chapitre? Y a-il des mécanismes en place pour nous permettre d'améliorer la situation? Bien sûr. Mais avant tout, je pense que nous n'avons d'autre choix que de le reconnaître. Parfois, les gens le font malgré eux, mais ils le reconnaissent.
Merci.
Le leadership se manifeste-t-il davantage au niveau de l'entreprise, de l'employeur, que des autres niveaux? Je pose la question car j'ai fait partie d'un gouvernement qui a mis en place un programme d'équité en matière d'emploi parce qu'on reconnaissait qu'une entreprise qui reflète la communauté est une entreprise plus solide. Malheureusement, on a abandonné le programme en 1995. Il a été complètement démantelé. Je crois d'ailleurs qu'on en subit les conséquences aujourd'hui.
On a parlé du racisme, et on sait qu'il y a eu des vagues d'immigration au fil des années. Mon grand-père était un immigrant Italien. Il a dû changer de nom et prétendre qu'il n'était pas d'origine italienne pour obtenir un emploi. C'était la réalité. C'est ce que nous avons constaté dans les vagues d'immigration.
Le racisme persiste-t-il encore dans notre société? Étant donné les craintes des Canadiens en matière de sécurité, j'ai l'impression qu'il reste des traces de racisme à l'endroit des Canadiens venant du Moyen-Orient ou de l'Afrique du Nord. Voyez-vous cela?
Absolument.
Si nous comparons les immigrants des 10 à 20 dernières années avec ceux d'il y a 50 ou 100 ans, nous savons que les immigrants venant d'Europe et d'Australie se sont intégrés beaucoup plus facilement que ceux en provenance des pays comme l'Inde, la Chine et les Philippines. La différence est assez frappante. La situation est beaucoup plus difficile pour un immigrant qui n'a pas la peau blanche et dont la langue maternelle n'est pas l'anglais.
Je lisais justement votre Métro ce matin, dans lequel il était question d'organiser des rencontres avec des familles musulmanes. J'ai trouvé cette initiative très intéressante parce qu'elle permet aux gens de réaliser que les musulmans sont des gens comme vous et moi. Je pense que nous avons encore beaucoup de chemin à faire au sein de la société canadienne pour devenir aussi multiculturels que nous prétendons l'être. Ces gens souffrent encore de discrimination.
En ce qui a trait aux programmes qui mettent à profit les talents incroyables des nouveaux Canadiens, des nouveaux arrivants ou des immigrants, avez-vous constaté des lacunes? Je m'interroge sur les types de services dont une famille pourrait avoir besoin, c'est-à-dire les services de garde et un accès à des moyens de transport. Que pouvons-nous faire pour les aider et, au bout du compte, servir nos intérêts?
C'est intéressant que vous disiez cela.
Lorsque notre groupe a parcouru le Canada, nous avons constaté que dans les centres urbains moins populeux, bon nombre de ces services incombaient à l'employeur pour compenser l'absence de la communauté culturelle. Parfois, on n'avait pas les ressources nécessaires pour le faire.
Pour ce qui est des grandes entreprises... je me souviens d'avoir eu une discussion très intéressante avec les gens d'Irving Oil, à Halifax. Ils ont pris cette initiative. Pour eux, la diversité culturelle était un objectif d'entreprise. Ils estimaient que toutes les entreprises, qu'elles soient urbaines ou rurales, devaient se rendre à l'évidence. À mesure que le bassin de main-d'oeuvre se diversifie et que les immigrants deviennent de plus en plus essentiels, les employeurs devront adapter leur culture d'entreprise et veiller à se préoccuper non seulement du sort de l'employé, mais aussi de sa famille.
Quelques-uns des groupes que je représente dans le secteur de la biotechnologie à l'Île-du-Prince-Édouard, où on retrouve une importante concentration d'entreprises de biotechnologie, ont été confrontés à ce type de problème. Étant donné les compétences requises dans le domaine, il se peut que seulement deux personnes en Europe puissent être recrutées. Lorsqu'elles arrivent ici, le problème, ce n'est pas qu'elles ne peuvent pas travailler; c'est plutôt que leur conjoint ne se trouve pas d'emploi ou que leurs enfants ne se sentent pas acceptés au sein de la communauté.
C'est pourquoi le placement échoue à maintes reprises dans ces communautés. Votre point est tout à fait pertinent.
Je souhaite la bienvenue à nos témoins.
Ma première question s'adresse à Mme Eaton et porte sur le stéréotype des chauffeurs de taxi titulaires d’un doctorat en médecine.
Je me demande ce que le gouvernement peut faire à ce chapitre parce que, dans l'ensemble, les décisions au sujet des titres de compétences relèvent des gouvernements provinciaux. Il me semble que le gouvernement fédéral devrait s'assurer, à tout le moins, que les gens savent à quoi s'attendre avant d'arriver au Canada et, si possible, qu'ils fassent reconnaître leurs titres avant d'arriver au pays.
Étant donné les limites de ses pouvoirs, qu'est-ce que le gouvernement fédéral peut faire, concrètement?
C'est une excellente question.
Près de 2 000 médecins diplômés à l'étranger sont venus en Ontario pour y exercer leur profession. Souvent, ils parviennent à obtenir leur permis d'exercice, mais ils n'ont pas accès au programme de résidence. Il n'y a que 200 postes de résidence en Ontario et, pourtant, nous savons que cette province a besoin de plus de médecins. Aucun financement n'est prévu à cette fin.
Comme l'une de nos collègues, Christine Nielsen, l'a dit, tout comme les couturières sont payées à la pièce, les médecins sont rémunérés à l’acte. La rémunération à l’acte fait en sorte que les médecins protègent leur territoire professionnel et ne veulent pas être plus nombreux à se partager le travail.
Certains éléments au sein de notre structure des soins de santé font en sorte que moins de gens peuvent travailler dans le domaine et devenir médecins. C'est l'un des problèmes.
Chose certaine, comme vous l'avez dit, il est absolument essentiel que les gens connaissent bien la situation avant d'arriver ici. L'une des grandes réussites de l'excellent programme administré par mes collègues, le PCII, est de pouvoir diriger les gens vers la bonne ville. Les gens croient souvent à tort qu'ils pourront exercer la médecine à Toronto. Dans le cadre de ce programme, on essaie d'expliquer aux gens qu'il pourrait être plus facile pour eux de décrocher un poste à l'Île-du-Prince-Édouard. C'est une question très importante.
C'est en gros ce que nous ont dit les derniers témoins, c'est-à-dire qu'il est souvent plus facile pour les immigrants de se trouver un emploi en dehors des grands centres. C'est particulièrement le cas des médecins.
Monsieur Henderson, j'ai moi-même été témoin de ce que vous dites; une main-d'oeuvre multiculturelle représente un atout important pour une entreprise. Cela a été particulièrement le cas d'une entreprise qui faisait concurrence à d'autres filiales américaines pour obtenir un mandat mondial. Elle a su mettre à profit les connaissances de ses employés originaires de pays comme la Corée afin de concevoir les bons produits pour ce marché.
Ma question est très large et s'adresse à l'un ou l'autre des témoins.
De façon générale, que peut faire le gouvernement fédéral pour améliorer les pratiques d'établissement des immigrants? Ne me dites pas seulement qu'il doit verser plus d'argent; je le sais déjà, mais à part cela...
Nous avons vu de très bons modèles. À Halifax, le modèle du groupe multilatéral, où les organismes de réglementation et les organismes d'aide aux immigrants se réunissent et établissent des liens avec les employeurs...
Il y a un énorme fossé à combler. On observe deux failles dans la chaîne qui permet aux immigrants de se sentir accueillis, de comprendre les différences culturelles et de bien s'intégrer. Premièrement, il y a les organismes de réglementation — et je reviens à votre première question — dont la responsabilité se limite à octroyer des permis ou non à ces personnes, et c'est à cela que se résume leur mandat. C'est un gros problème, parce que les gens sont là, mais on ne transmet pas leur dossier. Il n'y a pas de liens. C'est la première faille. La deuxième se situe souvent entre les organismes d'aide aux immigrants et les employeurs.
Tout ce que le gouvernement fédéral peut faire, que ce soit pour encourager, par le biais de ses mécanismes de financement à l'intention des organismes d'aide aux immigrants... Je ne dis pas qu'il faut accorder plus de fonds, mais plutôt qu'il faut modifier les conditions de financement pour mettre fin à la mentalité du cloisonnement que l'on observe dans les grands centres urbains. Il y a des petits centres qui réussissent très bien, alors ce n'est pas une question d'argent. Il s'agit d'amener les bonnes personnes à la table de discussion, des personnes qui ont un intérêt direct, et non pas des personnes qui affirment que cela ne fait pas partie de leur mandat ou qu'elles sont payées seulement lorsqu'elles placent l'immigrant.
Je ne sais pas si vous aviez autre chose à ajouter, Margaret, mais selon nous, cela pourrait grandement améliorer les choses.
Rob et moi faisions partie de ce groupe, tout comme Kim Allen. Nous nous sommes notamment penchés sur la reconnaissance des titres de compétences étrangers. Le fait que chaque province est responsable de l'attribution des permis d'exercice a également été soulevé par d'anciens membres du groupe. Certains permis sont devenus nationaux. On avait mis en place un cadre à l'échelle nationale pour inciter les organismes de réglementation à adopter une perspective plus vaste.
Si, avant son arrivée, l'immigrant sait qu'il doit satisfaire à une seule norme et qu'il peut facilement obtenir cette information, contrairement à la profession comptable, par exemple, pour laquelle il y avait 42 différents organismes de réglementation au pays, avant qu'on ne procède à la fusion des titres.... C'est épouvantable pour un nouvel arrivant de devoir composer avec toutes sortes d'exigences différentes d'une province à l'autre. Le cadre pancanadien visait à remédier à la situation, mais il n'a pas été mis en oeuvre.
Si le gouvernement fédéral pouvait exercer une certaine influence sur les provinces, de façon à encourager les organismes de réglementation à effectuer un changement, cela aiderait énormément.
Merci, monsieur le président, et merci également à tous nos témoins.
Tout d'abord, sachez que j'ai raconté l'histoire du chauffeur de taxi sur la Colline il y a quelques années dans l'un de mes discours et au sein des comités auxquels je siégeais, et je suis heureux que le message ait été reçu.
L'une des raisons pour lesquelles... Soit dit en passant, je suis un immigrant. J'ai dû moi-même faire reconnaître mes titres de compétences étrangers, alors je sais à quel point cette situation était désastreuse et l'est encore aujourd'hui. Je travaille sur ce dossier depuis presque 10 ans. Je suis satisfait d'une chose. Le gouvernement fédéral, qui comprenait que cette question relevait de la compétence provinciale, a pris des mesures. En 2008, notre gouvernement a consacré 50 millions de dollars à la mise en oeuvre de ce cadre pancanadien, incitant ainsi toutes les provinces à proposer un programme qui s'applique à l'échelle du Canada, et nous avons obtenu de bons résultats. Il n'y a aucun doute là-dessus.
Je suis également très optimiste à l'idée que le programme Entrée express évalue les titres de compétences étrangers avant qu'un immigrant ne présente une demande. À mon avis, cette mesure aide les immigrants potentiels à venir au Canada et à réussir.
Je vois cette discussion sous un angle différent. Nous nous demandons tous quel devrait être le rôle du gouvernement, le rôle de l'employeur. D'après mon expérience, outre l'intégration économique, l'intégration sociale est un facteur important pour les nouveaux arrivants. L'immigrant lui-même a un grand rôle à jouer pour assurer son succès dans notre société.
Seriez-vous d'accord avec moi?
Je suis tout à fait d'accord avec vous. Je pense que l'un des problèmes qui se pose et l'une des choses dont je me réjouis à propos du nouveau système Entrée express, c'est le fait que les nouveaux arrivants doivent se renseigner davantage sur le marché du travail de leur choix de destination. Nous espérons que cela ira encore plus loin.
Dans le cadre de nos discussions, il a été question du plan B: qu'arrive-t-il lorsqu'une personne arrive ici en pensant être médecin ou infirmière et que cela n'aboutit pas? Que va-t-elle faire? Il faut tenir ces discussions et effectuer ces recherches au préalable. Selon moi, le fait que le système Entrée express accorde des points additionnels lorsque le nouvel arrivant peut recueillir cette information est une très bonne chose.
Les immigrants vivent un choc sur les plans professionnel et culturel. Nous avons constaté qu'il y a une énorme différence entre les centres urbains et les petites localités en ce qui concerne l'adaptation à la culture, comme vous l'avez dit plus tôt. Étant donné qu'on y retrouve une communauté culturelle très visible et active, bon nombre de ces familles choisissent de s'établir dans les grands centres urbains. La situation est problématique parce que ce sont parfois les petits centres urbains qui ont la plus forte croissance et qui ont besoin de ces talents.
Oui. Je conviens qu'il est important de créer une collectivité accueillante. Robert a parlé tout à l'heure du fait qu'il faut se préoccuper du sort de toute la famille et non pas seulement de la personne concernée.
L'une des villes que nous avons visitées, et dont je tairai le nom, nous a dit qu'elle réussissait très bien à attirer des travailleurs compétents, mais qu'elle n'arrivait pas à les retenir. Il s'agit donc de savoir quels autres outils on peut leur fournir en tant que membres de la communauté. Les gens arrivent ici, obtiennent leur résidence permanente, puis repartent après trois ans. Ils retournent dans la grande ville pour y travailler.
Il est important de retenir ces gens et ces talents dans les régions qui en ont besoin; il faut agir rapidement. La grande tradition à Toronto, une tradition vieille de 100 ans, qui consiste à accueillir les immigrants et à créer des organismes robustes d'établissement pour les appuyer, commence à peine à naître dans d'autres centres qui ont réellement besoin de ces mesures de soutien.
Permettez-moi de vous poser une question. Nous avons entendu de nombreux témoins aujourd'hui, dont vous, nous dire qu'il y avait plus de possibilités dans les petites villes, mais lorsque de nouveaux Canadiens y arrivent, ils aiment rester entre eux. Je l'observe constamment. L'une des raisons pour lesquelles toute la famille n'est pas intégrée à la société économiquement ou socialement, c'est parce qu'elle vit isolée de la société.
Comment encouragez-vous ces gens à sortir de leur isolement et à s'intégrer aux petites collectivités, où il peut y avoir plus de possibilités, où elles ont le plus de chances de réussir et de s'intégrer aux activités sociales, par le bénévolat ou d'autres formes d'action citoyenne?
Je pense que nos recherches montrent qu'il faut arrêter de voir l'embauche de nouveaux arrivants comme une activité de charité. C'est une activité qui procure un avantage concurrentiel. Le problème de beaucoup d'employeurs, c'est qu'ils réussissent à recruter du personnel dans la communauté monochrome blanche, protestante et anglo-saxonne depuis si longtemps qu'ils en oublient qu'ils doivent adapter leur culture de gestion des ressources humaines pour être concurrentiels.
Pour arrêter l'isolement, il faut comprendre leurs besoins et comment les accueillir. Non seulement l'employeur doit-il leur présenter la culture d'entreprise, mais il doit leur présenter la culture religieuse, récréative et tout et tout. On ne le fait pas parce que ce serait gentil et assez important pour le Canada. On le fait pour stimuler l'innovation, pour ouvrir de nouveaux marchés et pour se distinguer de ses concurrents et en tirer un avantage. Il y a une tonne de statistiques qui commencent à le prouver.
Nous n'avons pas la bonne approche. La culture de gestion des RH doit évoluer parce que les entreprises veulent réussir à attirer les immigrants. Il faut simplement leur donner plus de raisons pour les convaincre des avantages à le faire.
[Français]
Je vous remercie d'être parmi nous aujourd'hui.
Nous avons brièvement parlé du système Entrée Express. Bien sûr, cela semble intéressant, même si nous ne connaissons pas encore tous les détails, notamment les défis que comporte ce nouveau système.
Nous savons par ailleurs que ce ne sont pas les travailleurs qualifiés mais bien les réfugiés et les personnes parrainées, en grande partie des femmes, qui font face au plus grand nombre d'obstacles en matière d'intégration au marché du travail. Ces personnes ne sont pas recrutées au Canada pour leur expérience, mais pour d'autres raisons.
Aimeriez-vous formuler des commentaires sur les besoins de ces personnes qui arrivent au Canada et qui ont particulièrement de la difficulté à intégrer le marché du travail, ainsi que sur les mesures spécifiques qui pourraient être prises afin de les aider?
[Traduction]
Notre travail ne porte pas particulièrement sur les réfugiés, mais nous savons que beaucoup de réfugiés sont en fait des immigrants qualifiés. Ce n'est pas parce qu'une personne arrive avec ce genre de statut qu'elle n'est pas un travailleur qualifié, donc il est clair que nous voyons des réfugiés dans le cadre de notre travail.
Ils sont confrontés à beaucoup plus d'obstacles, toutefois, surtout s'ils ont vécu des traumatismes. Pour ces personnes, il peut être encore plus difficile d'intégrer toute la famille à la société canadienne et de se trouver un travail, donc nous nous fions vraiment aux organismes d'aide à l'établissement qui s'occupent principalement des réfugiés pour les aider à se préparer à l'emploi. Cette préparation peut être un peu différente pour ces personnes, parce qu'elle inclut d'apprendre à surmonter le traumatisme, les peurs et tout le bouleversement qui survient quand une personne choisit le Canada. Ces gens arrivent ici à la hâte. La route peut avoir été longue, mais du jour au lendemain, la personne se retrouve dans une culture et une société très différentes. Comme je l'ai déjà dit, nous nous fions aux organismes d'aide à l'établissement pour aider les réfugiés à adhérer à nos programmes pour se rendre jusqu'à l'embauche, mais le chemin pour y arriver est généralement plus long et plus tortueux.
Je n'ai pas grand-chose à ajouter sur les réfugiés, je fais écho aux observations de Mme Eaton.
Au sujet des femmes, l'autre groupe que vous avez mentionné, nos statistiques montrent qu'en biotechnologie, 60 % des diplômés au Canada sont actuellement des femmes. L'emploi des femmes dans les sociétés de biotechnologie a chuté de 11 % au cours des cinq dernières années.
C'est très intéressant. Cela ne se fonde pas sur des données empiriques, mais nous observons que comme nous étudions très longtemps, bon nombre des diplômés qui arrivent sur le marché sont dans la fin vingtaine. C'est la période de la vie où les gens fondent des familles, c'est également une période où les cheminements de carrière connaissent des bonds en biotechnologie, ce qui signifie que beaucoup de femmes se sentent désavantagées dans le secteur de la biotechnologie et de la bioéconomie. Bien souvent, c'est parce qu'elles n'ont pas de mentors, elles n'ont pas de modèles féminins de qui s'inspirer à des postes de direction. Bien souvent, c'est aussi parce que la biotechnologie, particulièrement au Canada, est organisée en grappes. Certaines sont loin des grands centres urbains; certaines sont très actives dans les régions moins densément peuplées. Il y a un manque de réseautage entre les femmes.
Nous faisons toutes sortes de choses pour tenter de remédier à la situation, pour la même raison que nous essayons d'exposer aux sociétés de biotechnologie toutes les bonnes raisons d'accueillir des immigrants, non pas parce que c'est gentil, mais parce que c'est avantageux sur le plan de la compétitivité. Le fait que nous ne soyons pas perçus en ce moment comme des employeurs de choix par les femmes, à ce qu'il semble, désavantage l'industrie par rapport à la concurrence, et le Canada en ressort perdant. Tout ce que nous pouvons faire pour compenser et pour que les jeunes femmes qui obtiennent leur diplôme et souhaitent intégrer le marché du travail pour mener une vie complète puissent le faire grâce à une carrière en biotechnologie... Nous essayons de le faire en les mettant en contact avec le plus grand nombre de femmes possible qui le font.
[Français]
Le gouvernement fédéral pourrait-il mettre en oeuvre certaines mesures qui vous aideraient à faciliter l'intégration des femmes ou des réfugiés, par exemple?
[Traduction]
La bonne nouvelle pour nous, c'est qu'il y en a. Nous avons actuellement un projet avec Condition féminine Canada, par lequel nous sommes en train de mettre en place des programmes de mentorat et de réseautage pour les femmes dans trois grandes grappes biotechnologiques.
La bonne nouvelle aussi, c'est que le message ne tombe pas dans l'oreille de sourds. C'est l'un de nos programmes les plus populaires. La bonne nouvelle, c'est que l'industrie de la biotechnologie est en train de se rendre compte de l'avantage concurrentiel que les femmes procurent, tout comme elle change sa perception de l'embauche d'immigrants; elle se rend compte que pour la croissance de la bioéconomie, les femmes doivent être perçues comme un bassin de recrutement très important.
Merci.
J'ai une brève question à vous poser sur les obligations de l'employeur. Est-il correct de demander aux gouvernements provinciaux et au gouvernement fédéral d'en faire plus? Autrement dit, bon nombre des personnes qui veulent venir s'établir au Canada magasinent les pays au moyen de ce qu'on appelle l'Internet, pour savoir quelles sont les exigences pour devenir ingénieur, médecin ou tout autre type de professionnel. Ces personnes n'ont-elles pas elles-mêmes l'obligation de faire des recherches pour comprendre quelle est la culture dans telle ou telle région du pays? La culture n'est pas la même dans toutes les villes, comme elle n'est pas la même en ville qu'en campagne. Il y a différentes professions, différentes qualifications. Sommes-nous en train de demander aux gouvernements d'assumer une responsabilité qui incomberait peut-être aux nouveaux immigrants eux-mêmes?
C'est une question très intéressante.
Quand on décide de changer de vie et d'aller s'établir dans un autre pays, on a absolument le devoir de faire des recherches pour savoir vers quoi on s'en va.
Je pense qu'une partie du problème vient du fait que l'information est très éparpillée. Il y en a un peu ici, un peu là. Quand on vient d'un autre pays, on ne comprend pas que le Canada se divise en 13 provinces et territoires, qui posent chacun leurs exigences propres. Il peut être très décourageant pour un immigrant d'essayer de comprendre comment le système fonctionne.
Je dois dire aussi que notre réputation est telle que les gens tiennent pour acquis que le Canada est un pays ouvert, qu'il suffit de s'y rendre pour que tout se place quand on travaille fort. D'une certaine façon, cette réputation joue contre nous, parce que les gens tiennent pour acquis que le Canada est accueillant pour les immigrants. Ils se disent: « Bien sûr, il va y avoir du travail pour moi. J'ai lu dans le journal qu'ils ont besoin de médecins. Je vais aller au Canada. »
Je dois dire aussi qu'il y a d'autres pays qui nous rattrapent à cet égard et qui deviennent de plus en plus concurrentiels. Nous recevons constamment des missions de l'Allemagne. J'arrive tout juste de Finlande, où je suis allée parler de la façon d'attirer plus d'immigrants. L'Australie est imbattable pour attirer les nouveaux immigrants. La concurrence est de plus en plus forte pour attirer les talents dans le monde.
Il y a des choses que nous pouvons faire pour faciliter un peu la tâche aux gens qui veulent comprendre ce qui se passe vraiment ici, pour leur présenter de l'information très claire sur le marché du travail. Il manque de bonnes données sur le marché du travail pour les immigrants. Nous devons faire tout ce que nous pouvons pour présenter l'information de façon simple et claire, afin qu'ils puissent choisir de dire: « Vous savez quoi? Il serait peut-être préférable que je n'aille pas au Canada. Je serais peut-être mieux de me tourner vers l'Australie ou le Royaume-Uni. Ce serait peut-être mieux pour tout le monde. »
Monsieur Aspin, j'ai pris un peu de votre temps, mais vous avez quelques minutes pour poser des questions.
Merci, monsieur le président. J'ai une petite question à poser rapidement.
Je vous remercie tous les deux de participer à notre étude.
J'aimerais en savoir un peu plus sur les programmes de mentorat. Les jugez-vous importants pour les immigrants? Pourrais-je avoir une réponse des deux témoins à ce propos?
Oui, certainement, nos associations partenaires des provinces, dans le secteur des sciences de la vie, estiment les programmes de mentorat extrêmement importants en général, pas nécessairement pour les nouveaux arrivants en particulier, mais en général, dans l'industrie de la biotechnologie. Beaucoup de gens comprennent la science de la biotechnologie; beaucoup de gens ne comprennent pas nécessairement l'industrie canadienne de la biotechnologie, c'est donc pertinent pour notre industrie en particulier.
Pour ce qui est de l'immigration, je pense encore une fois que le mentorat est encore plus important dans les plus petits centres urbains que dans les grands, puisqu'il faut veiller à ce que les familles et les personnes se sentent bien en dehors de leur emploi. C'est vraiment ce que nous constatons.
Dans l'industrie de la biotechnologie, cela s'inscrit dans un cadre beaucoup plus large, mais on accorde beaucoup plus d'importance au concept du mentorat et aux programmes de mentorat dans toutes les grappes technologiques.
Il n'y a que 80 % des emplois environ qui sont affichés, donc nous nous fions tous beaucoup à nos réseaux personnels pour trouver un nouvel emploi ou obtenir une promotion. Les immigrants peuvent arriver avec toutes les qualifications, les compétences et l'expérience de travail requises, mais s'ils n'ont pas de porte d'entrée par une personne dans leur secteur, bien souvent, ils ne pourront pas en bénéficier. L'un des plus grands atouts du mentorat, c'est qu'il permet à la personne de se construire un réseau professionnel, et c'est ce qui permet de trouver un emploi.
Explorateur de la publication
Explorateur de la publication