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FAAE Réunion de comité

Les Avis de convocation contiennent des renseignements sur le sujet, la date, l’heure et l’endroit de la réunion, ainsi qu’une liste des témoins qui doivent comparaître devant le comité. Les Témoignages sont le compte rendu transcrit, révisé et corrigé de tout ce qui a été dit pendant la séance. Les Procès-verbaux sont le compte rendu officiel des séances.

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Emblème de la Chambre des communes

Comité permanent des affaires étrangères et du développement international


NUMÉRO 023 
l
2e SESSION 
l
41e LÉGISLATURE 

TÉMOIGNAGES

Le lundi 28 avril 2014

[Enregistrement électronique]

(1530)

[Traduction]

    Conformément au paragraphe 108(2) du Règlement, nous entamons notre étude des pratiques des entreprises qui fabriquent des produits dans des pays en développement pour les consommateurs canadiens ou qui les vendent au Canada.
    Je tiens à remercier les représentants du ministère des Affaires étrangères de témoigner aujourd'hui. Je souhaite la bienvenue à Duane McMullen, directeur général, Opérations du Service des délégués commerciaux et Stratégie commerciale, qui prendra la parole en premier. Nous entendrons ensuite M. Peter MacArthur, directeur général, Direction générale de l'Asie du Sud et du Sud-Est et de l'Océanie, à qui je souhaite aussi la bienvenue. Ils sont accompagnés de Jeff Nankivell, directeur général, Développement Asie-Pacifique, qui ne fera pas d'exposé, mais qui pourra répondre aux questions que nous pourrions poser à nos témoins.
    Pourquoi ne pas commencer? Bienvenue, monsieur McMullen, et merci encore de comparaître. Nous allons vous laisser la parole. Vous disposez de 10 minutes pour faire un exposé, après quoi M. MacArthur prendra la parole. Nous passerons le reste de l'heure à faire le tour de la salle pour vous poser des questions.
    Mes observations d'aujourd'hui seront axées sur le soutien en matière de pratiques commerciales responsables qu'apporte le gouvernement du Canada aux entreprises canadiennes qui mènent des activités et s'approvisionnent à l'étranger.
    Les pratiques commerciales responsables font partie intégrante des valeurs canadiennes. Les entreprises canadiennes qui agissent de façon responsable augmentent leurs chances de succès et contribuent à la prospérité et au développement des pays où elles sont en activité. Le gouvernement du Canada s'attend à ce que les entreprises actives sur la scène internationale respectent les lois et les normes internationales applicables, agissent de manière transparente et en consultation avec les gouvernements et les communautés locaux, et mènent leurs activités de manière responsable sur les plans social et environnemental, notamment en s'approvisionnant de manière responsable. Il les encourage d'ailleurs à agir de la sorte.
    Un grand nombre de pays où des entreprises sont en activité n'ont pas la capacité de veiller à ce que les entreprises agissent de manière responsable sur leur territoire. Conformément aux valeurs canadiennes, nous contribuons à combler ces lacunes en mettant en oeuvre diverses initiatives pour aider les entreprises canadiennes à relever les défis auxquels elles sont confrontées pour agir de manière responsable à l'étranger. L'adhésion du Canada aux principes directeurs de l'OCDE à l'intention des entreprises multinationales en 1976 constitue une première démarche importante en ce sens.
    Le gouvernement du Canada maintient le dialogue avec les ministères concernant diverses questions transversales touchant l'approvisionnement responsable, notamment les grandes disparités entre les normes en matière de réglementation et d'application dans d'autres marchés.
    Les efforts déployés concernant les difficultés que présentent les pratiques commerciales responsables dans le secteur du prêt-à-porter sont coordonnés par un groupe de travail interministériel, dont font partie le ministère des Affaires étrangères, du Commerce et du Développement; Industrie Canada; Emploi et Développement social Canada; le Conseil national de recherches du Canada; et Travaux publics et Services gouvernementaux Canada.
    Nous collaborons également avec l'industrie, la société civile et des partenaires multilatéraux pour voir comment nous pourrions encourager les bonnes pratiques. Récemment, mon ministère et Emploi et Développement social Canada ont organisé des séances d'information distinctes portant précisément sur les pratiques responsables au sein de la chaîne d'approvisionnement du secteur du prêt-à-porter. Certains de nos partenaires témoignent d'ailleurs aujourd'hui.
    Nous accueillons favorablement les initiatives de l'industrie et nous encourageons les entreprises à envisager d'adhérer à celles qui favorisent l'amélioration des conditions de travail, comme l'Accord sur les incendies et la sécurité des bâtiments au Bangladesh ou l’Alliance pour la sécurité des travailleurs au Bangladesh.
    Les missions du Canada à l'étranger jouent un rôle essentiel dans le cadre des efforts que nous déployons pour aider les entreprises canadiennes à agir de manière responsable. Grâce à un éventail d'initiatives, elles peuvent avoir une incidence tangible. Mon collègue, Peter MacArthur, vous exposera les rôles que nos missions jouent en donnant comme exemple notre haut-commissariat du Bangladesh, qui a notamment publié un livre pour expliquer aux entreprises comment agir de manière responsable au Bangladesh.
    Même si l'attention s'est concentrée sur le secteur du prêt-à-porter du Bangladesh dernièrement, l'approvisionnement responsable s'applique à de nombreuses chaînes d'approvisionnement du monde et dans divers secteurs manufacturiers. Nous restons donc déterminés à aider les entreprises canadiennes à adopter des pratiques commerciales responsables, peu importe le pays ou le secteur où elles sont actives.
    Le gouvernement du Canada continuera d'encourager l'adoption de pratiques commerciales responsables dans tous les secteurs, et à offrir des outils et des conseils pour aider les entreprises canadiennes à agir de manière responsable et à réussir sur la scène internationale.
    Je vous remercie de me donner l'occasion de comparaître aujourd'hui. Je répondrai à vos questions avec plaisir.
(1535)
    Merci, monsieur.
    Monsieur MacArthur.

[Français]

    Monsieur le président et honorables députés, mon collègue Duane McMullen vous a parlé de la manière dont le gouvernement du Canada fait la promotion de la responsabilité sociale des entreprises dans le monde. J'aimerais maintenant vous décrire comment le gouvernement a répondu à l'effondrement, le 24 avril 2013, de l'édifice Rana Plaza, qui abritait plusieurs usines de vêtements prêt-à porter près de Dhaka, au Bangladesh.
     Avant l'effondrement, notre ambassade à Dhaka surveillait le secteur du prêt-à-porter et oeuvrait à promouvoir la responsabilité sociale des entreprises. En janvier 2013, elle organisait un séminaire intitulé Corporate Social Responsibility as a Safe Factory, qui soulignait l'importance de pratiquer la RSE dans les usines en insistant sur la santé et la sécurité au travail ainsi que sur la sécurité-incendie. Comme M. McMullen l'a mentionné, environ 8 000 copies d'un livre bilingue, en anglais et en bangla, ont été produites et distribuées aux contacts clés au Bangladesh en appui à cette initiative reposant sur des valeurs canadiennes.
    À la suite de l'effondrement, Loblaw, propriétaire de la marque Joe Fresh, qui faisait fabriquer des vêtements dans l'édifice Rana Plaza, a communiqué avec notre ministère. Nous avons fourni des conseils et un soutien logistique à quatre cadres supérieurs de la compagnie qui ont visité Dhaka au début de mai 2013. Heather Cruden, notre Haut-Commissaire du Canada au Bangladesh, a organisé des rencontres entre les cadres de Loblaw et les intervenants clés, dont des ministres du gouvernement du Bangladesh et des syndicats. Un cadre de Loblaw est retourné au Bangladesh en février dernier et a rencontré de nouveau des gens de notre ambassade. Loblaw et notre ministère demeurent en contact étroit. Cette relation témoigne des avantages de la réponse donnée par le gouvernement à l'industrie canadienne dans le but de collaborer pour améliorer les conditions de travail dans le secteur du prêt-à-porter au Bangladesh.

[Traduction]

    Le gouvernement du Canada a également été très actif au cours du dialogue sur les politiques et la défense des intérêts. La haute-commissaire Cruden est membre d'un groupe d'ambassadeurs résidents à Dhaka qui viennent de pays qui partagent les vues du Canada, groupe qui rencontre chaque mois des représentants de haut niveau du gouvernement du Bangladesh, y compris les sous-ministres des Affaires étrangères, du Commerce et du Travail.
    Ces rencontres permettent de suivre l'évolution des progrès réalisés par le gouvernement du Bangladesh en ce qui concerne les engagements qu'il a pris d'améliorer les conditions dans le secteur du prêt-à-porter et constituent une occasion d'exercer des pressions en faveur de réformes positives. Le haut-commissariat du Canada a également participé à des consultations auprès d'intervenants concernant la loi sur le salaire minimum dans le secteur du prêt-à-porter et à une évaluation des besoins des victimes du Rana Plaza.
    Sachez également que le haut-commissariat a organisé récemment, le 1er mars 2014, un séminaire sur la responsabilité sociale et les normes internationales visant la mise en oeuvre de la norme ISO 26000 au Bangladesh.
    Par l'entremise du haut-commissariat à Dhaka, le gouvernement du Canada a également déposé des déclarations durant deux séances distinctes d'un comité permanent du gouvernement du Bangladesh qui examinait la sécurité des milieux de travail et a proposé des modifications au droit du travail du gouvernement du Bangladesh.
    Le Canada est également intervenu auprès de la Commission de l'application des normes de l'Organisation internationale du Travail à Genève en juin 2013 pour indiquer qu'il craignait que les mises à jour proposées par le Bangladesh à son code du travail ne soient pas conformes aux obligations internationales prévues dans la Convention no 87 de l'OIT sur la liberté syndicale et la protection du droit syndical.
    Lors de la plus récente réunion du conseil d'administration de l'OIT, qui a eu lieu à Genève en mars dernier, le Canada a joint sa voix aux Pays-Bas et au Royaume-Uni dans le cadre d'une déclaration sur les syndicats au Bangladesh.
    L'automne dernier, mon collègue Jeff Nanvikell et moi nous sommes rendus au Bangladesh pour des consultations bilatérales avec le gouvernement du Bangladesh; nous avons alors discuté en détails du secteur du prêt-à-porter avec des cadres supérieurs, notamment le sous-ministre des Affaires étrangères et le ministre du Commerce. Nous avons souligné la nécessité de poursuivre les réformes afin de renforcer le message déjà transmis par notre haute-commissionnaire à Dhaka, mais aussi par moi à titre de directeur général ici, à Ottawa, au haut-commissaire et au haut-commissariat du Bangladesh à Ottawa.
    Ce voyage, au cours duquel nous avons aussi visité une usine locale, s'inscrit dans la nouvelle approche intégrée du ministère fusionné, laquelle englobe la politique étrangère, le commerce et le développement.
    Comme M. McMullen y a fait allusion, Emploi et Développement social Canada a organisé une table ronde tripartite le 9 avril 2014 sur les questions internationales relatives au travail, à laquelle ont participé des représentants du gouvernement ainsi que des organisations syndicales et patronales.
    Jeff Nankivell et moi, ainsi que des représentants du programme « Better Work » de l'OIT, du Conseil canadien du commerce de détail et des Travailleurs et travailleuses unis de l'alimentation et du commerce ont participé à titre d'experts à la discussion sur le secteur du prêt-à-porter du Bangladesh.
(1540)
    En avril, la haute commissaire Cruden a été nommée au conseil consultatif du conseil d'administration de l’Alliance pour la sécurité des travailleurs du Bangladesh, dans le secteur privé. À titre de haute-commissaire, elle joue un rôle actif à la fois au sein de l'alliance et dans le cadre de l'Accord sur les incendies et la sécurité des bâtiments au Bangladesh. Sa nomination nous permettra d'améliorer la coordination entre l'alliance et l'accord afin de les rendre tous les deux plus redevables et efficaces.
    En outre, le Canada fournira 8 millions de dollars sur quatre ans en aide publique au développement à une initiative conjointe dirigée par l'OIT et axée sur l'amélioration des conditions de travail dans l'industrie du prêt-à-porter du Bangladesh, de concert avec nos partenaires, le Royaume-Uni et les Pays-Bas. Ce projet vise à renforcer la gouvernance du gouvernement du Bangladesh, la réglementation et l'inspection du secteur du vêtement; à mettre en oeuvre des lois et des politiques sur le travail, dont celles liées à la santé et à la sécurité au travail au sein de l'usine; et à faciliter la coordination entre les intervenants, notamment entre le gouvernement du Bangladesh, l'accord et l'alliance.
    Comme mon exposé tire a sa fin, j'aimerais faire remarquer que le Canada a également financé deux petits projets ayant un lien avec l'effondrement: un rapport de recherche en collaboration avec le Center for Policy Dialogue sur les droits des travailleurs et l'observance, et la réintégration socio-économique de neuf personnes gravement blessées dans cette terrible catastrophe en collaboration avec le Centre for the Rehabilitation of the Paralyzed.

[Français]

    L'amélioration des conditions de travail au Bangladesh est un important effort collectif entre les gouvernements, les marques et les acheteurs, les travailleurs et les propriétaires d'usine. Le Canada va continuer de jouer un rôle actif dans ce dossier.
    Je vous remercie de m'avoir donné l'occasion de m'adresser à vous aujourd'hui.

[Traduction]

    Merci beaucoup, monsieur MacArthur.
    Nous allons commencer par M. Dewar pour sept minutes.
    Merci, monsieur le président. Je remercie les membres du groupe de témoins de leur intervention. Ils ont fait une mise à jour sur ce dossier dont nous avons été saisis il y a un an, monsieur le président. C'était, bien sûr, l'anniversaire de l'effondrement du Rana Plaza la semaine dernière.
    Quand nous avons commencé à étudier ce dossier l'an dernier, j'ai tenté de mettre cette affaire dans un contexte humain. Après avoir lu les déclarations des témoins et certains articles de presse, j'ai été vraiment frappé par l'histoire de Tahmina, une fille de 11 ans qui a, je crois, expliqué la situation pour les nombreuses personnes qui tentent de comprendre. Évidemment, elle expliquait qu'elle ne voulait pas aller travailler parce qu'elle craignait pour sa sécurité; c'est une enfant de 11 ans. Ceux d'entre nous qui sont parents essaient d'imaginer ce que ce serait d'avoir un enfant de cet âge qui doive aller travailler, dans un endroit qu'ils jugent non sécuritaire, qui plus est.
    Je pense donc que si on met cette affaire dans le bon contexte, c'est la réalité à laquelle nous sommes confrontés. Pour dire les choses crûment, ces gens vont travailler pour nous fabriquer des vêtements bon marché. Je ne dis pas que je suis pour ou contre ces pratiques, mais qu'il semble simplement que ce soit un fait.
    Je considère donc que nous avons une responsabilité collective, monsieur le président. Il faut que le gouvernent fasse ce qu'il faut et intervienne, comme l'indiquent nos amis du ministère. Mais nous devons également dire qu'il faut se fixer des objectifs. Et en quoi consistent-ils? En ce jour on ne peut plus propice, puisque nous commémorons aujourd'hui la mémoire de ceux qui sont morts ou qui ont été blessés dans le cadre de leur travail au Canada, mon objectif serait qu'une jeune fille de 11 ans comme Tahmina n'ait pas à choisir entre aller travailler et mourir.
    Je dirais donc aux représentants du ministère que je me réjouis que nous soyons décidés à agir. J'apprends certaines des mesures qui ont été prises. Mais quand on en vient à ces deux démarches, il y a une initiative, l’Alliance pour la sécurité des travailleurs au Bangladesh, et l'accord. En ce qui concerne ce dernier, je félicite Joe Fresh et Loblaws d'y avoir adhéré. Mais je remarque aussi que l’Alliance pour la sécurité des travailleurs au Bangladesh est un processus volontaire. J'aimerais que nos invités m'expliquent ce qui suit. Notre haute-commissaire participe au processus là-bas, mais ne craignons-nous pas de participer à un processus non coercitif alors que le problème est urgent? À mon avis, il ne s'agit pas d'examiner la situation, mais bien de tenter de voir comment on peut la régler. Le gouvernement appuie ces deux processus, mais je voudrais savoir comment nous pensons pouvoir changer les choses avec un processus de nature volontaire. Est-ce que nous et la haute-commissionnaire demandons quelque chose qui exige une conformité absolue, comme l'Accord sur les incendies et la sécurité des bâtiments?
(1545)
    Monsieur le président, je répondrai à cette excellente question en disant que nous considérons que les secteurs privés canadien et international ont le droit de choisir le moyen d'action. Le Conseil canadien du commerce de détail a effectué une très bonne analyse des différences entre les deux organisations dont nous parlons.
    Je voulais faire remarquer qu'en ce qui concerne l'alliance, par exemple, la situation évolue rapidement, puisque nous avons appris au cours des derniers jours que l'alliance a modifié l'entente de ses membres afin d'y ajouter l'énoncé suivant, qui a un lien avec l'exemple de la jeune fille de 11 ans dont vous avez parlé. Voici en quoi tient ce court énoncé:
En outre, les membres de l'alliance exigeront que les usines avec lesquelles ils travaillent respectent le droit qu'ont les travailleurs et travailleuses de refuser de travailler s'ils ou elles ont un motif raisonnable de croire que les conditions de sécurité présentent un péril imminent et grave pour leur vie...
    C'est là une amélioration par rapport à l'ancienne entente des membres. Certaines grandes entreprises internationales ont choisi d'adhérer à l'une ou l'autre de ces deux organisations. Comme le problème est important et fort complexe, nous pensons qu'il est utile de disposer de deux moyens pour s'y attaquer.
    C'est un milieu extrêmement corrompu. Une bonne partie des problèmes que nous observons au Bangladesh résultent de cette corruption tentaculaire. Certaines personnes impliquées sont responsables des inspections. De nombreux députés du Bangladesh possèdent des usines, par exemple, ce qui entraîne des conflits d'intérêts à l'échelon politique, comme vous le savez peut-être.
    Nous considérons que le secteur privé doit être libre d'agir à sa guise. Je pense qu'une de nos entreprises, Loblaws, a décidé de signer l'accord, et ses représentants pourront vous donneront des explications plus détaillées à ce sujet.
    Nous félicitons l'entreprise d'avoir agi ainsi.
    Je pense que si vous parlez aux représentants de Loblaws, ils vous diront que le secteur privé a le droit de choisir sa voie. Ils ont fait leur choix et assument ainsi un rôle de chef de file, d'une certaine manière.
    Je leur en suis reconnaissant.
    L'énoncé dont vous nous avez fait part est assez équitable. Je ferais cependant remarquer que dans le contexte ou dans la réalité, il peut être bien franchement délicat pour une jeune fille de 11 ans de décider de refuser de travailler. Je sais que vous ne faites que nous informer des derniers développements. Je ne fais pas de suppositions à partir de ce que vous nous dites; je ne fais qu'exposer la difficulté réelle qui se pose à cet égard.
    À ce sujet, vous avez évoqué certaines des ressources dont nous disposons sur place. Pourriez-vous me dire environ combien de personnes en poste dans nos missions à l'étranger s'occupent de la question de la responsabilité sociale des entreprises et de la conformité?
    Il peut être difficile de répondre à une question approximative comme celle-là.
    Je dirais que nous avons quelque 80 missions, pour que vous compreniez mes calculs et voir ensuite où je me suis trompé.
    M. Paul Dewar: Nous pouvons assurer le suivi plus tard.
    M. Duane McMullen: En effet; c'est une bonne idée, en fait.
    Il y a quelque 80 missions qui se trouvent dans ce que je pourrais qualifier de pays difficiles, où les gouvernements eux-mêmes n'ont pas la capacité de fournir l'infrastructure réglementaire que nous souhaiterions qu'ils aient. Dans ces missions, il y aurait, dépendamment du pays, au moins une personne qui s'occuperait de ces questions.
(1550)
    Puis-je demander quelques renseignements complémentaires?
    Pouvez-vous nous dire combien de gens font la promotion du commerce en même temps? Je vous pose la question pour que vous nous répondiez plus tard.
    Oui, nous assurerons le suivi à ce sujet.
    Merci, monsieur Dewar.
    Nous accordons maintenant la parole à M. Brown.
    Vous disposez de sept minutes.
    Merci beaucoup, monsieur le président.
    Merci à vous, messieurs, d'être des nôtres aujourd'hui.
    J'ai séjourné au Bangladesh il y a quatre ans, ce qui me permet de bien visualiser quelques-unes des situations dont nous discutons aujourd'hui. Nous avons alors visité l'une des manufactures de vêtements, et je peux vous dire que l'état de l'édifice m'a laissée plutôt stupéfaite.
    J'ai travaillé comme dessinatrice dans une firme de génie pendant un certain nombre d'années, et je connais bien les codes du bâtiment assez rigoureux que nous avons adoptés au Canada pour assurer la sécurité de nos travailleurs. Même si les quelques recherches que j'ai pu effectuer m'ont appris que le Bangladesh peut aussi compter sur un excellent code du bâtiment, lequel a été révisé pas plus tard qu'en 2007 par des ingénieurs de l'Université de Tokyo, des gens qui doivent bien savoir de quoi ils parlent, le problème découle de la façon dont ce code est mis en application.
    D'après ce que je puis comprendre — et peut-être pourrez-vous le confirmer à la lumière de ce que vous savez — il n'y aurait pas de gravier au Bangladesh même. Tout le gravier serait importé. Je présume donc que la solidité du béton fabriqué pour ces édifices peut être douteuse. Étant donné qu'il y a exemption d'impôt tant que le dernier étage n'est pas terminé, on peut voir en passant devant ces édifices toutes ces barres d'armature qui en ornent le sommet. Toutes les fois qu'il pleut, ces barres sont mises à rude épreuve. Nul besoin d'un diplôme en génie pour savoir que ces barres rouillées et ce béton fragilisé augurent de problèmes encore plus graves.
    Voici donc ce que j'aimerais savoir. À la suite de cette terrible tragédie qui s'est produite il y a un an, collaborons-nous avec les ministères du gouvernement du Bangladesh qui sont responsables de ces constructions afin de, premièrement, les aider à améliorer les nouvelles constructions et, deuxièmement, voir ce qu'il convient de faire avec les constructions déjà existantes qui ne sont pas sécuritaires?
    Si nous négligeons de procéder à cet exercice ou d'y contribuer, ne sommes-nous pas simplement en train d'attendre la prochaine tragédie?
    Monsieur le président, je peux répondre à cette question dans le contexte du projet mentionné par mon collègue, M. MacArthur. Le gouvernement du Canada contribue à hauteur de 8 millions de dollars à un projet tripartite réalisé avec le Royaume-Uni et les Pays-Bas. Cette initiative d'un coût total de 24 millions de dollars est gérée par l'Organisation internationale du travail qui collabore comme à son habitude avec les gouvernements, les employeurs et les syndicats.
    L'une des composantes principales de ce programme mise sur des mesures à court et à long terme pour régler les problèmes associés à la mise en application des codes et des normes du bâtiment. Des difficultés additionnelles se posent du fait que le Bangladesh est également situé dans une région sismique. Il y a une autre réalité qui est problématique, et le cas du Rana Plaza en est un excellent exemple. Certains édifices construits pour abriter un centre commercial en viennent à accueillir de l'équipement industriel et des milliers de travailleurs. Tous les bâtiments sont peut-être régis par des codes adéquats, mais on en fait une utilisation contraire à ce qui était prévu. Voilà donc toutes les difficultés avec lesquelles on doit composer.
    Dans le contexte du projet dont je vous parlais, des outils de mesure et des objectifs très précis ont été établis avec l'OIT, le gouvernement du Bangladesh et les autres partenaires. Notre rôle de partenaire dans ce projet nous amènera donc au cours des prochaines années à recenser le nombre d'ordonnances de restauration de bâtiment et d'inspections d'usine.
    Comme je le disais, il y a des mesures à court et à long terme. Il faudra d'abord et avant tout déployer un vaste effort auprès des usines elles-mêmes. Dans ce contexte, on misera en grande partie sur la formation d'inspecteurs, dans une perspective à court et à long terme encore une fois. Il faut se rendre sur place pour effectuer des inspections initiales et établir une base de données documentant les milliers de manufactures.
    Cette base est en voie de création, mais il reste encore à y entrer les données sur les résultats des inspections dans les différentes usines de manière à ce qu'elles soient accessibles en ligne. La sécurité et l'intégrité structurale des immeubles seront des éléments importants de cette base, tout comme, notamment, les mesures de sécurité en cas d'incendie et l'équipement de lutte contre les incendies.
(1555)
    Dans les faits...
    Désolée, vous alliez...
    Je voulais ajouter que le gouvernement, par l'entremise de l'Université d'ingénierie et de technologie du Bangladesh qui travaille pour le compte de l'alliance et de l'accord, a déjà entrepris des inspections portant sur l'intégrité structurale et les systèmes de sécurité contre l'incendie et les problèmes électriques dans des centaines d'usines. Pas moins de 3 497 usines sont répertoriées dans la base de données dont M. Nankivell parlait. Cela vous donne une petite idée du travail de surveillance qu'il y a à faire.
    C'est d'autant plus encourageant que vous nous avez dit — et j'espère bien vous citer — qu'une personne a le droit de refuser de travailler si elle considère qu'il y a un péril imminent et grave pour sa vie. Un travailleur qui entre à l'usine présume, comme nous le ferions tous, que l'intégrité structurale de l'édifice est assurée et que les inspections nécessaires ont été menées par des gens qualifiés. Si une société ne dispose pas des compétences requises à cette fin, tout est compromis. Ce sont donc des nouvelles fort encourageantes.
    Les Bangladais ont-ils bien accueilli ces mesures? On ne leur impose rien. De toute évidence, c'est un effort de collaboration. Pourriez-vous nous dire également comment se déroule la formation?
    Je pense que le gouvernement du Bangladesh voit tout cela d'un très bon oeil. Il reste quand même que la situation est très complexe. Comme l'indiquait M. MacArthur, il est possible que certains parlementaires soient également propriétaires d'usines. De toute évidente, il existe des problèmes systémiques bien enracinés qui ne seront pas réglés du jour au lendemain, mais le gouvernement est déterminé à faire le nécessaire et, comme c'est le cas dans bien d'autres endroits du monde, les intervenants de longue date et de bonne réputation au sein de l'industrie comprennent bien que leurs marchés sont menacés.
    Ils ont notamment fait cette prise de conscience à la suite des conversations que nous avons eues avec eux lorsque nous avons rencontré nos homologues du Bangladesh l'automne dernier. Notre message s'articulait en deux volets. D'une part, nous étions prêts à nous retrousser les manches pour les aider et contribuer financièrement au développement de leurs capacités techniques en misant sur les pratiques exemplaires à l'échelle internationale avec le concours du gouvernement, des employeurs et des travailleurs. D'autre part, nous voulions également leur faire savoir que les consommateurs canadiens s'intéressent de près à leur problématique. Les Bangladais savent que ces mesures ont eu une incidence sur leur régime tarifaire dans leurs relations avec certains pays. Ils apportent donc une attention toute particulière à ces questions.
    Je suis optimiste du fait que nous pouvons compter sur plusieurs partenaires sérieux qui sont déterminés à régler ces problèmes. Mon optimisme demeure toutefois prudent, car les principaux résultats visés sont encore à venir. Une année s'est écoulée depuis l'effondrement tragique du Rana Plaza. Voilà environ six mois que nous avons entrepris ce projet avec l'OIT et nos partenaires au Bangladesh. Comme il y a de nombreux problèmes à long terme à régler, il faudra encore attendre pour les bonnes nouvelles. Nous pouvons toutefois compter sur le concours de partenaires sérieux au sein de l'industrie, du gouvernement et du milieu ouvrier.
    Merci.
    Merci beaucoup, c'est tout le temps que vous aviez. Nous passons maintenant à M. Garneau.
    Vous avez sept minutes.
    Merci, monsieur le président.
    Je vous prie d'abord de m'excuser d'avoir raté vos exposés. Je vais débuter avec une question d'ordre général.
    Si une entreprise canadienne veut confier la fabrication de vêtements à un sous-traitant au Bangladesh, comment doit-elle interagir avec les instances gouvernementales? Les dirigeants peuvent-ils simplement se rendre au Bangladesh et conclure un accord là-bas, ou doivent-ils vérifier ensuite avec vous si tout est dans l'ordre? Y a-t-il des conditions à remplir?
(1600)
    Aucune interaction avec le gouvernement n'est requise si, par exemple, une entreprise canadienne veut s'approvisionner en prêt-à-porter au Bangladesh. Nous aimons toutefois à penser que les conseils que nous offrons dans nos missions à l'étranger sont si utiles — et si peu coûteux, car il n'y a rien à payer — que les entreprises canadiennes seraient vraiment bien avisées de s'en prévaloir, que ce soit pour des questions de développement, de politique ou de commerce.
    Nous menons régulièrement des sondages auprès des entreprises canadiennes qui nous disent que nos conseils leur ont été extrêmement utiles en leur révélant certaines choses qu'ils ne connaissaient pas au sujet du marché et en les empêchant de commettre des erreurs fort coûteuses, ou des erreurs qui auraient pu grandement ternir leur réputation du seul fait que certains enjeux leur échappaient. Je vais utiliser l'exemple du Bangladesh. De nombreuses entreprises canadiennes ont dû tirer un enseignement d'un événement relativement récent. C'est une bonne chose de vérifier les pratiques de travail de votre fournisseur, mais il faut également chercher à savoir si ce fournisseur n'utilise pas un édifice qui risque de s'effondrer. La sécurité-incendie est un autre exemple.
    Il y a certaines choses qui ne vous traverseront même pas l'esprit si vous voulez faire des affaires en Allemagne, mais qui risquent d'être problématiques et doivent être prises en compte dans un marché comme le Bangladesh. C'est donc l'un des rôles que nous jouons auprès des sociétés canadiennes qui choisissent de faire appel à nos missions à l'étranger; nous les mettons au fait de ces enjeux qui risquent de leur échapper.
    J'ai l'impression que ce sont de précieux conseils dont on ne devrait pas se passer. Est-ce que les entreprises ont le réflexe d'aller vers vous, ou est-ce plutôt le fruit du hasard?
    Il est difficile pour nous de savoir exactement quelle proportion d'entreprises canadiennes se prévalent de nos services. Je dirais qu'environ 40 % vont passer systématiquement par nos missions à l'étranger. Les autres ne le font généralement pas.
    J'ai appris avec stupeur qu'il y a peut-être jusqu'à cinq millions de femmes qui travaillent dans l'industrie du textile au Bangladesh — un chiffre vraiment ahurissant. Cela éclipse à n'en pas douter ce qui peut se passer dans n'importe quel autre pays, à l'exception peut-être de la Chine.
    Quelqu'un au Bangladesh m'a dit que certaines entreprises de vente au détail font affaire avec des manufacturiers bangladais qui se conforment aux normes de sécurité et peuvent vendre leurs chemises 7 ou 8 $, alors que vous pouvez obtenir la même chemise pour environ 3,50 $ auprès d'un manufacturier qui ne respecte par les normes. Ainsi, ces chemises qui peuvent se vendre au détail jusqu'à 35 $ au Canada sont fabriquées pour un peu moins de 3,50 $ par ces manufacturiers dont la marge bénéficiaire est si faible qu'ils ne considèrent pas pouvoir se permettre de se conformer aux règles en matière de sécurité.
    La même personne m'a indiqué que bon nombre d'entreprises canadiennes font affaire avec ces manufacturiers non conformes étant donné que la concurrence est très féroce et qu'elles estiment avantageux d'acquérir ces chemises à 3,50 $, plutôt que de payer plus cher auprès d'un manufacturier qui respecte les normes comme le font certains de leurs concurrents. Qu'en pensez-vous? Est-ce que des choses semblables peuvent se produire? Ma source m'apparaît plutôt fiable.
    Je ne suis pas directement au courant de situations semblables, mais je ne serais pas surpris que ce soit le cas et c'est d'ailleurs la raison pour laquelle mon collègue, Peter MacArthur, et moi-même avons indiqué que nous encourageons vivement les entreprises canadiennes à adhérer à l'une des deux instances de normalisation, l'alliance ou l'accord, créées par des multinationales pour faire obstacle à des agissements semblables. Nous collaborons avec ces deux instances afin de renforcer les mesures en place pour protéger les droits des travailleurs et assurer leur sécurité.
(1605)
    D'après ce que j'ai pu entendre, certains estiment que les deux tiers des usines du Bangladesh ne sont pas considérées dans le cadre de ces deux initiatives. Est-ce que cela traduit bien la réalité?
    Je suis un peu étonné d'entendre pareille chose, monsieur le président. Nous pourrons effectuer certaines vérifications pour répondre ultérieurement au comité.
    Je dois toutefois souligner que la catastrophe du Rana Plaza a porté à l'attention du monde entier — en incluant les entreprises s'approvisionnant dans des pays comme le Bangladesh — des pratiques corrompues qui mènent, au sein même de la chaîne de valeurs, à un phénomène que l'on pourrait qualifier de sous-traitance par une entreprise de bonne réputation. Vous croyez faire affaire à une entreprise digne de confiance, mais celle-ci sous-traite le contrat à une entreprise de moins bonne réputation et, dans un contexte de corruption et d'inspecteurs en nombre insuffisant... Il faut toutefois se réjouir, bien que les progrès demeurent trop lents, de l'embauche de 200 inspecteurs additionnels qui viennent épauler les 175 déjà en poste de telle sorte que ces sous-traitants non conformes puissent être repérés et mis hors d'état de nuire.
    Certaines de ces usines ont dû fermer leur porte à la suite de la tragédie du Rana Plaza. Il est important de noter que ces fermetures d'usines ont eu un impact sur l'emploi, ce qui fait que les travailleurs doivent vivre une période de transition. C'est l'un des éléments qui contribuent à compliquer les choses.
    Je vous remercie.
     Qu'en est-il des autres pays? Il va de soi que la situation au Bangladesh occupe l'avant-scène. Y a-t-il d'autres exemples de cas comparables où les travailleurs touchent de très faibles salaires et doivent s'exécuter dans des conditions qui ne seraient pas considérées sécuritaires dans une perspective de responsabilité sociale? Y a-t-il d'autres pays qui suscitent particulièrement votre intérêt, mis à part la situation très médiatisée du Bangladesh? Vous en avez peut-être discuté.
    Le temps de M. Garneau est écoulé, mais je vous laisse répondre, monsieur McMullen.
    Oui. Je ne vais pas citer de pays en particulier, mais il vous suffit de regarder une carte du monde pour vous en faire une bonne idée.
    De nombreux pays auraient des difficultés semblables à celles vécues par le gouvernement du Bangladesh dans ses efforts pour établir et mettre en application les normes auxquelles nous nous attendons en tant que Canadiens, tant pour leurs travailleurs que pour leurs usines. C'est la raison pour laquelle nos missions dans les pays en question s'efforcent de conseiller les entreprises canadiennes quant au genre de problèmes auxquels elles pourraient être confrontées sur ces marchés, aux risques qu'elles encourent pour leur réputation, aux pratiques non souhaitables dans lesquelles elles pourraient se retrouver impliquées à leur insu, et aux moyens à prendre pour éviter de telles pratiques.
    Mon collègue, Peter MacArthur, vous donnait l'exemple d'une entreprise canadienne qui embauche un sous-traitant de bonne réputation, ou qu'elle croit de bonne réputation, pour le voir ensuite faire appel à quelqu'un d'autre qui effectue le travail en faisant fi des normes. Vous l'ignorez peut-être, mais nous expliquons aux entreprises qui souhaitent faire affaire dans tous ces marchés difficiles qu'elles s'exposent à des pratiques semblables. Nous leur fournissons des conseils pratiques quant aux moyens à prendre pour éviter de se retrouver en pareille situation.
    Merci.
    Merci, monsieur Garneau.
    Nous allons débuter le second tour où chacun aura droit à cinq minutes. Nous commençons avec M. Anderson.
    J'aimerais d'abord poursuivre dans le sens d'une question posée par M. Garneau.
    Est-ce que les initiatives sont ciblées en fonction de la taille des usines? Est-ce que l'on traite différemment une usine où 4 000 personnes travaillent sur deux ou trois étages et une autre comptant 50 ou 100 travailleurs sur un même étage? Est-ce que les codes du bâtiment s'appliquent dans tous les cas ou seulement dans les usines de plus grande taille travaillant pour les marchés internationaux?
    Je crois que l'OIT cherche dans son travail à viser toutes les usines. Les lois s'appliquent à tout le monde. Il est bien certain que ce ne sont pas toutes les usines du Bangladesh qui ont adhéré à l'alliance et à l'accord. Comme on peut s'y attendre, ce sont surtout les plus grandes usines qui fabriquent des vêtements de marque. Il y a bien des vêtements qui sont acheminés un peu partout dans le monde sans qu'une marque n'y soit apposée ou tout au moins pas avant qu'on le fasse dans une boutique locale après que le vêtement soit passé en tout anonymat entre les mains de plusieurs intermédiaires. On met l'accent en priorité sur les plus grandes usines où l'on peut aider un maximum de travailleurs. C'est bien évidemment par là qu'il faut commencer.
(1610)
    Pour ce qui est de l'accord et de l'alliance, s'agit-il d'initiatives qui ont des effets positifs ou est-ce qu'il y a des conséquences négatives à ne pas y adhérer? S'inscrivent-elles dans un mouvement suffisamment fort et marqué pour qu'il y ait des répercussions néfastes pour les entreprises et les manufacturiers qui décident de ne pas y participer?
    Vous avez parlé de ces gens qui rendent visite à l'ambassade et aux consulats pour recevoir nos bons conseils quant aux mesures à prendre pour faire affaire avec des entreprises canadiennes ou accéder en toute confiance à notre marché. Je me pose simplement la question. Est-ce que cela fonctionne d'un côté comme de l'autre ou est-ce unilatéral?
    Il s'agit de deux initiatives auxquelles chacun est libre de participer ou non. Une fois que vous y adhérez, vous devez remplir certaines obligations qui sont différentes dans chaque cas.
    S'il y a une conséquence négative, ce serait le fait de ne pas avoir accès à titre de fournisseur à ce réseau planétaire d'acheteurs de bonne réputation capables d'absorber de grands volumes de production. Dans ce sens-là, c'est un peu la même chose qu'avec les autres normes à adhésion volontaire, comme ISO. L'obligation de respecter la loi va toujours demeurer. En participant à des initiatives de la sorte, un propriétaire d'usine peut avoir accès aux acheteurs qui représentent une part considérable du marché et qui seront prêts à payer un prix plus élevé pour ces produits.
    Si vous me le permettez, j'aimerais répondre à la question de tout à l'heure concernant la situation dans d'autres pays du monde. Le Canada appuie le programme Travailler mieux de l'Organisation internationale du travail, une initiative planétaire qui permet de se pencher sur ces questions et de financer notamment des travaux de recherche permettant de montrer aux propriétaires d'usine de différents pays — et cela fait partie des mesures que nous soutenons au Bangladesh — que s'ils améliorent les conditions et l'environnement de travail tout en versant de meilleurs salaires à leurs employés, leur entreprise deviendra plus rentable.
    On collabore maintenant avec la Société financière internationale, un organisme de la Banque mondiale, afin de concevoir des produits financiers pouvant assurer des fonds de roulement aux usines de différents pays du monde. Si l'on pense à la situation au Bangladesh, il faut dire que le programme débute à peine, mais que l'on espère pouvoir élaborer des instruments de prêt qui permettront aux usines qui acceptent d'appliquer des normes plus rigoureuses d'avoir accès à des capitaux.
    C'est d'ailleurs souvent le manque d'accès aux capitaux qui fait obstacle aux efforts déployés en ce sens. En raison des modalités de leurs ententes avec leurs fournisseurs et leurs acheteurs, ces entreprises sont toujours à court de capitaux. C'est donc une façon d'inciter ces propriétaires d'usine à adhérer à des arrangements semblables.
    Je crois que je vais bientôt manquer de temps.
    Il vous reste environ 30 secondes.
    D'accord.
    Les personnes qui en souffrent le plus sont probablement celles qui se blessent gravement, ce qui les place en situation très difficile. Pourriez-vous nous parler un peu plus des projets que nous finançons? Quelqu'un a mentionné la création d'un centre pour les gens paralysés; je ne me rappelle pas bien du nom de l'institution.
    Pourriez-vous nous parler un peu de notre engagement en ce sens?
    Oui. Nous pourrons vous faire parvenir des chiffres exacts séparément, mais il y a relativement peu d'argent qui a été investi dans ces deux initiatives pour les personnes blessées. Le secteur privé est plus actif dans ce domaine. Vous pourrez interroger les autres témoins à ce sujet.
    Pour ce qui est du fonds en fiducie, les dons reçus jusqu'à maintenant représentent 15 millions sur les 40 millions visés. L'objectif est de 40 millions, et nous n'en sommes qu'à 15 millions. Loblaw a déjà investi dans ce fonds, et il y a également des fonds pour indemniser à court terme les travailleurs touchés par l'effondrement de l'édifice Rana Plaza; ils étaient en production pour Joe Fresh.
    Nous allons revenir à M. Dewar pour cinq minutes.
    Merci, monsieur le président.
    Messieurs, je crois que vous faites des évaluations et que vous essayez de suivre ce qui se passe à l'aide de la base de données qui est en train de se construire. Cherchez-vous activement des données pour essayer de comprendre qui fait quoi? Comment colligez-vous les renseignements nécessaires pour alimenter la base de données?
    Vous avez mentionné cette base de données, mais j'aimerais comprendre comment elle fonctionne.
    C'est une base de données locale sur presque 4 000 usines, si je ne me trompe pas. Ce qui manque encore, et nous insistons continuellement pour que cela change par l'intermédiaire de notre haute-commissaire et de notre haut-commissariat, c'est qu'ils ne notent pas dans cette base de données quelles usines ont été inspectées. C'est l'une des informations que nous réclamons, mais que nous n'avons pas encore.
(1615)
    Je vois. Je serais porté à croire que l'objectif est d'abord d'essayer d'inciter les entreprises canadiennes à établir un quelconque lien avec vous, idéalement. Vous l'avez offert, mais il y aurait peut-être des options politiques à envisager. Il s'agirait ensuite de les informer de qui fait quoi, de qui respecte les normes, pour ainsi dire. Bref, il faut commencer par inviter les sociétés canadiennes à s'enregistrer, si l'on veut, après quoi il faudra leur indiquer qui sont les bons acteurs et les appuyer, parce que je pense que ce qui s'en vient...
    Comme vous l'avez dit, c'est très compliqué. J'en suis conscient. Nous allons entendre des représentants de l'industrie dans quelques instants; ils ont des responsabilités, mais je pense qu'il est assez clair que vous vouliez trois choses: premièrement, les sociétés canadiennes doivent s'inscrire et adhérer au programme; deuxièmement, il faut les informer, et troisièmement, on veut améliorer les normes. Cela me semble être un bon plan de match. Êtes-vous d'accord?
    Oui, je suis d'accord. Je pense que l'industrie elle-même le fait déjà, mais nous surveillons ce qui se passe. Comme je l'ai mentionné, notre haute-commissaire fait partie des conseillères qui gardent un oeil sur l'accord. Nous restons très présents. C'est une priorité du haut-commissariat de Dhaka, et ce l'était avant même que ce désastre ne survienne.
    Je remarque toutefois que c'est aussi un problème de ressources, qui ne dépend pas vraiment de vous, d'après ce que je comprends. On vous accorde des ressources, que vous utilisez de votre mieux, mais d'après ce que je comprends du défi que vous avez à relever, comme je viens de l'expliquer... Je pense que tout le monde a clairement un rôle à jouer ici.
    Oui. Cette base de données a été lancée et est administrée par un organisme gouvernemental du Bangladesh, le ministère des Inspections des usines et des établissements. Son personnel est en train d'inscrire dans la base de données — que vous allez pouvoir voir — quelles usines ont été inspectées par le gouvernement et lesquelles l'ont été sous le régime de l'alliance ou de l'accord. Tout acheteur de vêtements pourra donc trouver l'information en ligne. Elle se trouve sur un site Web accessible à tout le monde. Bref, les représentants syndicaux comme les travailleurs eux-mêmes, tout le monde pourra connaître le statut d'inspection des usines...
    Faites-vous confiance à ces données? C'est nouveau, mais...
    Cela reste à voir. Évidemment, c'est l'une des choses à surveiller, et elle va faire partie de ce projet de 24 millions de dollars de l'OIT. Nous allons le vérifier, comme nous le ferions pour tout projet d'aide au développement aussi aidant. Les gestionnaires du projet de l'OIT vont faire un suivi périodique indépendant de qui reçoit l'appui de nos projets, ils pourront faire des vérifications au hasard et déterminer si les données sont fiables.
    J'aurais une recommandation à vous faire, simplement parce que j'ai travaillé indirectement sur la question. Il y a pas mal d'entreprises canadiennes et quelques entreprises américaines aussi qui alimentent les chaînes d'approvisionnement en toute conformité... Je ne sais pas trop si elles participent activement à ces efforts, mais il y a beaucoup d'effervescence dans ce domaine d'innovation important, comme vous le savez sûrement. Je crois qu'il serait sage de les mettre dans le coup elles aussi. Certaines ont leurs bureaux ici même, à Ottawa, ou ailleurs au pays, et interviennent dans la chaîne d'approvisionnement dans le contexte de projets comme celui de Dodd-Frank, aux États-Unis. C'est vraiment quelque chose. Elles ont trouvé le moyen de travailler avec les entreprises pour mettre en place des plans d'action destinés à ce que tous les fournisseurs de la chaîne d'approvisionnement respectent les règles. Je vous lance simplement l'idée, et je suis sûr qu'on pourra vous aider (moi ou quiconque est au courant) à vous associer à ces acteurs canadiens et autres qui font un travail phénoménal.
    Monsieur Schellenberger.
    Merci, monsieur le président.
    Je remercie infiniment nos témoins d'aujourd'hui.
    M. Garneau s'est dit surpris qu'il y a autant de femmes qui travaillent dans ce secteur. Il y a de quoi s'étonner de leur nombre, mais le pourcentage des travailleurs qu'elles représentent ne devrait surprendre personne, puisqu'il s'agit de couture. Je suis certain que lorsque l'industrie du textile était encore forte à Montréal, il y avait beaucoup de femmes qui travaillaient comme couturières.
    Je sais que dans l'industrie du meuble, particulièrement lorsqu'ils sont recouverts de tissu, les femmes font le plus souvent la couture et les hommes, le travail plus exigeant, comme le rembourrage et la menuiserie.
    L'éducation est le grand problème dans certains de ces pays. Bien souvent, les femmes ne reçoivent pas la même éducation que les hommes. Dans l'industrie du vêtement, c'est la même chose. Il faut être très habile pour coudre ou couper du tissu. Les femmes excellent à ces tâches.
    Les acheteurs courent souvent les défilés de mode ou les marchés. Ils visitent peut-être un peu plus les manufactures maintenant, mais bien souvent, ils vont probablement acheter le produit parce qu'ils aiment la collection et qu'ils peuvent l'obtenir à un certain prix. Cela arrive.
    Encore une fois, il y a moins d'investissements dans l'industrie du vêtement. C'est pourquoi elle se concentre au Bangladesh, à Haïti, en République dominicaine, au Honduras et au Vietnam. Il en coûte moins cher pour acheter des machines à coudre, des surjeteuses, des tables de coupe, des ciseaux, etc. Ce sont probablement les locaux qui coûtent le plus cher.
    Je sais qu'il y a quelques années, une entreprise canadienne, Gildan, a acheté une manufacture au Bangladesh. Je pense que c'était un atelier, mais les propriétaires se sont rendu compte qu'il n'y avait pas de sorties d'incendie ni d'ascenseurs. C'était un édifice de cinq étages. De plus, lorsqu'ils ont inspecté l'édifice, ils ont conclu qu'il n'était pas construit assez solidement. Je crois donc qu'ils ont investi environ un million de dollars — ce qui représente beaucoup d'argent au Bangladesh — pour rénover l'édifice, pour y installer un ascenseur pour des raisons de sécurité. Les gens montaient et descendaient tous les escaliers les bras chargés de pièces de tissu.
    Dans ce cas précis, est-ce que Gildan serait allé vous voir? Ou est-ce que quelqu'un serait allé voir les propriétaires pour leur dire de faire ceci ou cela? D'après ce que je comprends, ils en ont pris eux-mêmes l'initiative. Est-ce que je me trompe?
(1620)
    Je ne connais pas les détails exacts de cette histoire. Nous avons rencontré des représentants de Gildan lorsque nous sommes allés au Bangladesh.
    Habituellement, une entreprise canadienne qui s'établit dans un pays fait partie du réseau canadien: il y a un haut gestionnaire canadien qui administre Gildan au Bangladesh. Ces gestionnaires sont habituellement en contact avec la haute-commissaire ou l'ambassade.
    Je voudrais dire simplement que l'usine modèle que nous avons visitée se trouvait au centre-ville de Dhaka. Cette industrie a connu une croissance très rapide. C'est une partie du problème, en fait; c'en est une raison. Ces édifices ne sont pas adaptés, on ne devrait pas les utiliser.
    Nous avons découvert qu'il y a un plan visant à déplacer un grand nombre de travailleurs vers un parc industriel situé à l'extérieur de Dhaka, où les conditions sont beaucoup plus sécuritaires, et je pense que c'est là où les entreprises les plus éclairées vont s'établir.
    Je suis à peu près certain que Gildan, et corrigez-moi si je me trompe, s'est établi un peu en retrait, dans un édifice adapté, plutôt que dans un vieux centre commercial, comme c'était le cas de l'édifice Rana Plaza.
    Je dois dire aussi que je n'ai pas seulement été étonné par le grand nombre de femmes qui travaillent au Bangladesh, qui sont autonomes et qui contribuent au développement pays, mais aussi par le grand nombre de jeunes hommes qui travaillent dans l'atelier. Je m'attendais à n'y trouver que des femmes. C'est très important pour l'emploi et le développement économique du pays, donc j'ai trouvé que c'était positif.
    J'aimerais ajouter une chose au sujet de l'éducation et de notre programme d'aide au développement au Bangladesh. C'est un grand pilier de notre programme d'aide au développement à long terme au Bangladesh.
    Nous investissons actuellement 64 millions de dollars sur cinq ans dans un très grand programme national d'éducation primaire, qui représente plus de 7 milliards sur cinq ans et auquel contribuent des donateurs comme le Canada, le Royaume-Uni, l'Australie et l'Union européenne. Comme je l'ai dit, notre contribution est de 64 millions de dollars, et elle vise à combler les lacunes qui restent en éducation primaire au Bangladesh, bien que ce pays, dont la population compte 150 millions de personnes et qui est confronté à toutes sortes de défis, soit un leader pour ce qui est de la scolarisation des filles. Les filles qui entrent dans ces ateliers ont une éducation de base qu'elles n'auraient pas eue il y a 20 ans, sans tous ces progrès. Il reste cependant encore beaucoup à faire.
    Avez-vous quelque chose à dire pour conclure, Gary?
    Une seule chose, et je reviens encore une fois à cette jeune fille de 11  ans qui travaillait dans l'atelier dont vous nous avez parlé.
    À neuf ans, j'étais camelot, en plus de tondre quelques pelouses. Je peux donc comprendre que des jeunes veuillent faire un peu d'argent. Tant que l'endroit est sécuritaire — je ne sais pas quelles sont les statistiques là-bas ni quel est l'âge limite pour pouvoir travailler dans un atelier, je sais seulement qu'il est de 16 ans ici —, il y a des jeunes qui peuvent faire des menus travaux pour un fournisseur, comme du ménage, pour faire un peu d'argent et probablement aider leur famille.
(1625)
    Merci.
    Messieurs, je vous remercie infiniment d'avoir pris le temps de venir témoigner aujourd'hui.
    Nous allons interrompre nos délibérations quelques instants, le temps d'organiser notre prochaine séance.
    Merci beaucoup.
(1625)

(1630)
    Je vous souhaite la bienvenue à cette deuxième heure.
    Nous accueillons trois témoins. Voici d'abord Tom Smith, directeur général de Fairtrade Canada, dont les bureaux se trouvent ici, à Ottawa. Bienvenue, Tom. Nous sommes heureux de vous recevoir aujourd'hui.
    Nous accueillons également Bob Chant, vice-président principal des Affaires corporatives et des communications pour les Compagnies Loblaw Limitée. Nous sommes contents de vous revoir, monsieur.
    Nous accueillons enfin, par vidéoconférence, Diane Brisebois, présidente et directrice générale du Conseil canadien du commerce de détail. Bienvenue, Diane, nous sommes heureux de vous revoir vous aussi.
    Pourquoi ne commencerions-nous pas tout de suite par vous, Tom? Nous allons entendre Tom, puis Bob Chant, et enfin, Mme Brisebois pour terminer. Vous avez jusqu'à 10 minutes. Si vous pouvez vous limiter à moins, c'est encore mieux, mais vous avez jusqu'à 10 minutes, après quoi les membres vous poseront des questions pendant le reste de l'heure.
    Monsieur Smith, je vous cède la parole.
    Bonjour, monsieur le président, et mesdames et messieurs les membres du comité. Je vous remercie de me permettre de témoigner aujourd'hui.
    Je m'appelle Tom Smith. Je suis directeur général de Fairtrade Canada, et je travaille dans le mouvement du commerce équitable et des organisations coopératives au Canada et dans le monde depuis plus de 20 ans.
    Fairtrade Canada est le membre canadien de Fairtrade International. Fairtrade est la certification équitable la plus reconnue au monde. Selon notre vision du commerce équitable, les principes de justice et de développement durable doivent être établis de façon concertée à l'échelle mondiale, afin que les agriculteurs et les travailleurs du monde entier passent d'une position de vulnérabilité à une position de sécurité et d'autosuffisance économique.
    À l'heure actuelle, le mouvement mondial du commerce équitable se compose de 26 organisations nationales, principalement dans les pays acheteurs du Nord, et de plus de 1 200 associations de producteurs dans le monde, principalement dans les pays en développement du Sud. En fait, les associations de producteurs possèdent 50 % du système mondial du commerce équitable, grâce à un changement apporté à notre modèle de gouvernance en 2013, pour que les travailleurs et les agriculteurs soient représentés à chaque étape.
    Nous venons à peine de passer le premier anniversaire de l'effondrement du Rana Plaza, au Bangladesh, le pire accident industriel dont on puisse se rappeler. Plus de 1 000 personnes sont mortes parce que les lois et les codes d'entreprise étaient ouvertement bafoués. Cependant, trop souvent, ces incidents disparaissent de l'écran radar peu après avoir fait les manchettes. Entretemps, des millions d'hommes, de femmes et d'enfants continuent de s'échiner jour après jour, à travailler dans des conditions difficiles et dangereuses, pour un salaire à peine suffisant pour se mettre quelque chose dans le ventre et des vêtements sur le dos.
    Les tenants de la doctrine de libre marché semblent convaincus que le commerce est essentiel à la croissance économique et qu'il aura pour effet d'entraînement de réduire la pauvreté à long terme. Fairtrade croit au premier principe, mais pas au second. Le commerce à lui seul ne suffit pas. Il doit s'accompagner de mesures de protection de l'égalité, des droits de la personne et de l'environnement.
    Il est très difficile de trouver le juste équilibre entre le développement commercial et le respect de tous, et il y a toujours place à l'amélioration et aux adaptations. Fairtrade milite pour la cause depuis 25 ans, et notre expérience nous a appris de précieuses leçons. En cours de route, nous en avons appris énormément sur la façon de répondre aux besoins souvent contraires du secteur privé et des producteurs et travailleurs désavantagés. Nous continuons d'en apprendre tous les jours.
    La croissance résout certains problèmes, mais en génère inévitablement d'autres. Fairtrade voit des agriculteurs prendre des raccourcis pour obtenir la certification biologique, adopter de mauvaises méthodes de travail pour respecter les échéances ou raser des forêts pour accroître leur production. Nous sommes également confrontés à de graves violations des droits de la personne. Les réseaux de producteurs de Fairtrade ne sont pas à l'abri des difficultés auxquelles est confronté le monde en développement et même le monde développé. La dynamique du pouvoir peut se manifester partout, dans des conseils coopératifs comme dans la vie quotidienne d'agriculteurs et de travailleurs.
    Aujourd'hui, j'aimerais vous faire part de trois ingrédients clés, que j'encouragerais le gouvernement du Canada à intégrer à sa recette non seulement pour que l'histoire du Rana Plaza ne se répète pas, mais aussi pour mettre fin à l'extrême pauvreté et à la misère perpétuelles que vivent des millions de petits producteurs et travailleurs sur la planète.
    Je vais commencer par le premier, qui est à la source même du commerce équitable, c'est-à-dire l'adoption de meilleures pratiques relativement aux normes et à la certification. Les normes du commerce équitable sont établies conformément aux exigences du code de bonnes pratiques de l'organisation ISEAL pour l'établissement de normes sociales et environnementales, ce qui signifie qu'elle sont établies sur la base de consultations avec les grands intervenants du système de commerce équitable. Ce n'est donc pas un exercice de nature ponctuelle. Les réalités sur le terrain, de même que les nouveaux défis qui se présentent et la transformation de l'environnement externe nous obligent à revoir et à améliorer constamment nos normes.
    Fairtrade International s'occupe d'établir des normes et d'aider les producteurs à les respecter, mais c'est un autre organisme de certification accrédité ISO-65 pour le commerce équitable, FLOCERT, qui inspecte périodiquement les lieux de travail et atteste que les producteurs et les commerçants respectent les normes. Les vérificateurs de FLOCERT sont des experts de leur domaine. Ils connaissent bien les réalités locales et propres au secteur qu'ils observent sur le terrain. Ils savent quelles sont les normes du commerce équitable les plus susceptibles de ne pas être respectées. De même, ils reçoivent de la formation continue sur le repérage des risques et les mesures nécessaires pour les atténuer.
    Le deuxième ingrédient clé de chaînes d'approvisionnement équitables c'est le principe du juste prix. L'idée centrale, c'est qu'on obtient ce pour quoi on paie. Quand les produits sont trop médiocres, on en paie le prix quelque part. La valeur est encore répartie trop inéquitablement. La concentration du marché dans le commerce alimentaire de détail empire. La concurrence est tellement féroce qu'il y a un véritable risque de nivellement par le bas dans la production des denrées de base. Fairtrade souhaite arrêter ce nivellement par le bas, qui fait en sorte que des fournisseurs de différents pays rivalisent entre eux en durcissant les conditions de travail pour recevoir des contrats du Nord. Je prends en exemple les plantations de fleurs du Kenya déplacées vers l'Éthiopie, où les salaires sont plus bas et où les nouveaux investisseurs peuvent bénéficier d'incitatifs fiscaux. Il y a aussi toutes les marques de vêtement qui cessent de s'approvisionner en Chine et se tournent vers le Bangladesh depuis que les salaires ont commencé à monter en Chine en raison des grèves ouvrières.
(1635)
    La moitié des gens qui ont faim dans le monde est composée d'agriculteurs. En plus d'être un scandale, cela représente un grand risque opérationnel sur le plan de la sécurité de l'approvisionnement. La viabilité est impossible si les producteurs ne peuvent retenir une part appropriée de la valeur pour financer des pratiques commerciales viables. Les agriculteurs subissent le plus gros des pressions que cela représente. Les petits propriétaires abandonnent, et les emplois deviennent occasionnels, dans les plantations, ce qui fait disparaître les salaires viables. Nous voyons aussi les effets sous la forme de contrats médiocres ou injustes, de salaires minimums vitaux qui n'augmentent pas et de travailleurs de plantations ou d'usines sous l'emprise d'une chaîne d'approvisionnement qui les piège dans le cycle de la pauvreté, ou encore sous la forme de droits des travailleurs qui sont encore moins pris en compte. La liberté d'association en déclin en serait un exemple.
    Le prix minimum que garantit Fairtrade est une protection essentielle pour les producteurs; ce n'est cependant pas suffisant. Dans l'ensemble, nous devons payer davantage pour nos biens, si nous voulons que nos chaînes d'approvisionnement mettent fin à la pauvreté et favorisent les droits de la personne, plutôt que de piéger les gens dans la pauvreté et d'empêcher l'avancement des droits. Il faut de l'argent pour payer des salaires minimums plus élevés, et pour offrir des usines plus sûres, et pour garantir une agriculture écologiquement viable, et pour payer le coût réel d'une production durable.
    Fairtrade est un pionnier en ce qui concerne le salaire vital dans les secteurs ruraux, ayant commandé l'élaboration d'une méthodologie visant l'estimation d'un salaire vital. Jusqu'à maintenant, nous avons établi des estimations solides du salaire vital en Afrique du Sud, en République dominicaine, au Malawi et au Kenya. Nous avons formé des partenariats avec l'industrie et la société civile, afin d'aider les travailleurs à progresser vers un salaire vital, mais nous avons aussi besoin de l'appui des gouvernements.
    En Europe, les gouvernements néerlandais et allemand ont organisé la conférence sur le salaire vital qui a eu lieu à Berlin, en novembre 2013, en vue d'émettre une déclaration commune avec l'industrie, les syndicats et les ONG. Nous encourageons le gouvernement du Canada à suivre cet exemple.
    Le troisième ingrédient est la responsabilisation des agriculteurs et des travailleurs, et la gouvernance ascendante. Le défi auquel les agriculteurs et les travailleurs des pays en développement font face dépasse la portée de tout système de certification. Fairtrade International acquiert de l'expertise dans divers domaines pouvant avoir des effets sur les agriculteurs et les travailleurs, peu importe les produits, et crée des stratégies mondiales dont le but est d'aider les plus vulnérables.
    Par exemple, au cours des cinq dernières années, nous avons constaté que nos normes qui se fondent sur les lois internationales pertinentes ne doivent pas se limiter à exiger des groupes de producteurs et de leurs membres qu'ils soient simplement capables de réciter les exigences du commerce équitable visant le travail des enfants. Nous voyons plutôt pour les organisations de producteurs la possibilité de jouer de plus en plus un rôle prépondérant qui en ferait des agents de changement dans la lutte contre les pratiques sociales inacceptables.
    Pour aider les producteurs à s'acquitter de ce rôle, Fairtrade a adopté une démarche axée sur les enfants d'abord. Fairtrade a réalisé des groupes de discussion axés sur les droits avec quelque 500 enfants et jeunes d'organisations de commerce équitable et avec leurs collectivités. Les enfants travailleurs peuvent nous en apprendre au sujet de leur vie, de l'effet de leur travail sur eux-mêmes et leurs pairs, et des solutions de rechange qu'ils voient. Parmi les participants, seuls cinq enfants et jeunes de ces collectivités voyaient une possibilité de gagner leur vie en agriculture — un coup de semonce à ceux qui achètent et consomment ce que les parents de ces enfants produisent.
    En conclusion, nous encourageons le gouvernement du Canada à faire la promotion du commerce équitable en exigeant des efforts crédibles de la part des entreprises canadiennes qui s'approvisionnent dans des pays en développement et en attendant des entreprises qu'elles respectent les droits de la personne, ce qui englobe le salaire vital. Le message sera clair. C'est enchâssé dans les Principes directeurs relatifs aux entreprises et aux droits de l'homme des Nations Unies, le cadre international prépondérant selon lequel les gouvernements et les entreprises doivent prévenir et, au besoin, corriger les effets négatifs sur les droits de l'homme.
    La transparence est essentielle. Sans transparence, c'est l'entreprise qui s'évalue elle-même, concernant les droits et les salaires. Il faut que la transparence soit systématique. C'est là que des normes crédibles et une certification jouent un rôle clé. Le gouvernement du Canada pourrait aussi faire comme l'Union européenne et donner l'exemple en révisant les normes d'approvisionnement du gouvernement fédéral pour imposer le choix de produits certifiés de commerce équitable et inclure d'autres facteurs liés à l'approvisionnement durable. D'autres institutions canadiennes le font avec nos programmes visant les villes, villages et campus équitables.
    Enfin, et surtout, nous devons consacrer des fonds à renforcer les collectivités, les agriculteurs et les travailleurs eux-mêmes. Quand les gens ont la force et la capacité de parler en leur propre nom et de négocier, les conditions de travail s'améliorent et les salaires augmentent. En fin de compte, si les travailleurs n'ont pas la place et la permission de défendre leurs propres droits, la réglementation ne peut tout faire.
    Je vous remercie de votre attention. Je serai ravi de répondre à vos questions.
(1640)
    Merci beaucoup, monsieur Smith.
    Nous allons maintenant écouter M. Chant, de Loblaw.
    Bonjour. Mon nom est Bob Chant. Je suis le vice-président principal des affaires corporatives et des communications aux Compagnies Loblaw limitée.
    Monsieur le président, je vous remercie encore une fois de me donner l'occasion de parler au comité de cette question importante. Je n'ai pas à vous rappeler que, la semaine dernière, c'était l'anniversaire de la tragédie du Rana Plaza. Au nom de notre organisation tout entière, de tous nos collègues, je tiens à exprimer encore une fois nos sincères condoléances aux victimes et aux familles qui ont subi les effets de la tragédie. Sans oublier l'événement déclencheur, nous sommes fiers d'avoir fait en sorte que Loblaw contribue à la réponse à l'incident du Rana Plaza et aux mesures qui en découlent.
    Nous continuons de croire que le milieu manufacturier et l'économie générale du Bangladesh profitent de notre présence, de notre attention et de notre engagement à long terme. Depuis un an, Loblaw travaille avec nombre de particuliers, d'industries, de services gouvernementaux et d'ONG, ainsi qu'avec l'Organisation internationale du Travail à répondre à la tragédie humaine du Rana Plaza et à améliorer les normes qui, dorénavant, définiront les mesures de sécurité et assureront la sécurité des travailleurs.
    Quand j'ai pris la parole devant le comité en mai dernier, je vous ai fait part du plan d'action de Loblaw. Aujourd'hui, je suis fier de vous faire part des importants progrès que nous avons réalisés.
    Dans la dernière année, Loblaw est devenue l'un des principaux responsables de la réaction financière à cette tragédie avec un engagement de 5 millions de dollars destinés à l'aide locale et à l'indemnisation. Cela englobe 3,7 millions en dédommagement aux victimes, versés à la fiducie gérée par l'OIT pour l'indemnisation à long terme des travailleurs blessés et des familles des travailleurs décédés.
    De plus, 1 million est versé à l'organisme Aide à l'enfance du Bangladesh et au Centre de réadaptation des personnes paralysées pour les travailleurs du textile de Savar. Un montant additionnel de 285 000 $ a été versé pour une indemnisation à court terme qui devait faire le pont entre le moment de l'événement et le versement de l'indemnisation à long terme qui vient de commencer, dans les deux dernières semaines.
    Comme je l'ai dit, Loblaw s'est publiquement engagée à maintenir la production au Bangladesh tout en contribuant à y améliorer les conditions dans les lieux de travail. L'entreprise a déployé tous les efforts possibles pour jouer un rôle prépondérant sur ce plan en s'engageant publiquement et en faisant des déclarations publiques sur un problème que bien d'autres marques ont décidé d'ignorer.
    Loblaw est aussi l'une des premières entreprises signataires et la seule entreprise canadienne à avoir adhéré à l'Accord sur les incendies et la sécurité des bâtiments au Bangladesh. Il s'agit d'une convention indépendante exécutoire dont le but est de faire de toutes les usines de vêtement du Bangladesh des lieux de travail sûrs. L'accord prévoit des inspections de sécurité indépendantes des usines et la production de rapports publics sur les résultats de ces inspections. Quand des problèmes de sécurité sont relevés, les détaillants s'engagent à veiller à ce que les réparations soient réalisées, mais aussi à ce qu'il y ait suffisamment de fonds pour faire les réparations et pour continuer de verser un salaire aux travailleurs des usines en question pendant les travaux.
    Nous avons relevé nos normes et resserré nos inspections de toutes les usines où nous nous approvisionnons. Au cours de l'été 2013, l'entreprise a vérifié toutes les usines du Bangladesh qui produisent nos biens, et l'information sur toutes ces usines a été transmise conformément à l'accord. Ces normes — vous vous en souviendrez — ne prévoyaient pas d'inspections de l'intégrité des bâtiments ou de leur structure, avant le Rana Plaza, mais c'est maintenant le cas.
    En outre, nous mettons sur pied dans la région une équipe d'employés chargés de veiller à la rigueur des vérifications des usines et surveiller les conditions de travail et les relations à l'échelle locale. Cette équipe est dirigée par Frank Merkley, un expert de longue date de la chaîne d'approvisionnement chez Loblaw, au Canada, qui est rendu là-bas. Le but de l'équipe est de veiller à ce que la production des biens qui nous sont destinés pour la vente se fasse dans un environnement conforme aux valeurs canadiennes.
    Il pourrait sembler plus facile de ne plus faire produire des biens au Bangladesh, mais Loblaw croit que l'industrie du vêtement peut représenter une force positive. Toutes les fois où nous sommes allés au Bangladesh au cours de la dernière année, la principale chose qu'on nous a dite haut et fort, c'était « De grâce, ne partez pas » ou « Merci de ne pas avoir cessé de vous approvisionner chez nous ».
(1645)
    Aider les victimes et leurs familles à trouver et à garder des emplois est un aspect crucial du processus de rétablissement, car les emplois dans le secteur du vêtement contribuent à sortir les gens de la pauvreté. Nous sommes fiers de nous être engagés à maintenir notre production de vêtements dans ce pays. Nous croyons que des usines convenablement construites peuvent en réalité contribuer au développement économique et à la stabilité dans des pays comme le Bangladesh.
    Il y a eu des changements importants au cours de la dernière année, mais nous estimons que la réponse collective de l'industrie à l'incident du Rana Plaza a mis trop de temps à venir et qu'il reste diverses mesures nécessaires à prendre. De plus, compte tenu du modèle d'indemnisation collectif qui a été établi pour le gouvernement, l'industrie et les marques, Loblaw est l'une des organisations à avoir contribué le plus aux efforts, proportionnellement. Cependant, nous croyons qu'il y a du progrès, surtout sur le plan des vérifications des usines et en particulier concernant la diffusion d'information qui se fait au sein de l'industrie. Et nous sommes ravis de la coordination sans précédent — malgré le petit nombre de détaillants qui y participent avec nous — dans le but d'établir les coûts financiers et humains très réels de l'effondrement du Rana Plaza.
    Loblaw est résolue à provoquer des changements à long terme qui profiteront aux Bangladais. Au fil des mois et des années à venir, nous allons poursuivre à cette fin notre travail avec nos collègues de l'industrie.
    Merci beaucoup.
    Merci beaucoup.
    Nous allons maintenant écouter, par vidéoconférence, notre témoin du Conseil canadien du commerce de détail.
    Merci, Diane.

[Français]

    Je m'appelle Diane Brisebois. Je suis la présidente et chef de la direction du Conseil canadien du commerce de détail.

[Traduction]

    Monsieur le président, mesdames et messieurs les membres du comité, je vous remercie de me donner l'occasion de m'adresser à vous encore une fois, comme nous l'avons fait en mai de l'an dernier.
    Vous êtes nombreux à savoir que le CCCD est une association industrielle sans but lucratif qui représente plus de 45 000 détaillants de partout au Canada. Nos membres sont des commerçants indépendants, des chaînes régionales et nationales, des marchands de masse, des magasins à grande surface et des commerçants en ligne. Toutes les catégories de vente au détail sont représentées, dont les fournitures de tout genre, les produits d'épicerie et les médicaments.
    Comme vous le savez, jeudi dernier, c'était l'anniversaire de la tragédie du Rana Plaza. Au cours de la dernière année, le CCCD a participé activement aux efforts déployés pour résoudre les problèmes de sécurité des travailleurs et d'intégrité des édifices au Bangladesh, lesquels sont prioritaires pour le secteur de la vente au détail.
    Comme je l'ai mentionné l'année passée, nos membres croient que pour que les efforts déployés parviennent à corriger la situation au Bangladesh, il n'y a pas que les détaillants et les grandes marques qui doivent offrir leur soutien, assumer une part de la responsabilité et prendre des mesures, mais aussi les propriétaires d'usines, le gouvernement du Bangladesh, les travailleurs d'usine, les ONG, les syndicats et les autres intervenants. Nous sommes résolus à travailler de concert avec tous ces autres groupes à trouver des solutions à long terme.
(1650)

[Français]

    Plusieurs membres du CCCD ont mis en branle leurs propres projets pour contribuer à l'amélioration des conditions de travail au Bangladesh à la suite de l'effondrement tragique de l'immeuble industriel Rana Plaza. Des initiatives concertées, telles que l'alliance et l'accord, ont aussi été mises sur pied afin d'offrir à l'industrie de formidables occasions de relever des défis complexes de sécurité et de renforcer l'efficacité des mesures destinées à améliorer la sécurité des travailleurs au Bangladesh.
    Le CCCD travaille avec tous ses membres pour relever les normes et favoriser un changement concret, soit par l'intermédiaire des initiatives indépendantes de nos membres, soit de concert avec l'alliance et l'accord.

[Traduction]

    À l'instar du ministère des Affaires étrangères, du Commerce et du Développement, nous appuyons l'Accord sur les incendies et la sécurité des bâtiments au Bangladesh et l'Alliance pour la sécurité des travailleurs au Bangladesh.
    Nous appuyons les deux initiatives et nos membres y participent. En tant qu'association commerciale représentant l'industrie tout entière, il ne nous appartient pas de dire à nos membres les initiatives auxquelles ils doivent adhérer. Cette décision incombe à chaque entreprise, compte tenu de ses besoins commerciaux et des autres facteurs qui entrent en jeu dans leur cas.
    De plus, nous croyons que le problème relatif aux incendies et à la sécurité des bâtiments au Bangladesh est complexe et qu'il n'y a pas de solution unique. Il y a tout un éventail de facteurs politiques, économiques, juridiques et culturels à envisager. Puisqu'il en est ainsi, nous craignons qu'adhérer à une initiative unique puisse restreindre les solutions possibles.
    Nous coordonnons autant que possible les efforts au Canada concernant l'accord et l'alliance. Nous avons transmis de la rétroaction pour les deux efforts, de sorte que le travail se fasse en collaboration et que les efforts soient conformes aux besoins du commerce de détail canadien, tant pour les petites que pour les grandes entreprises.
    Nous avons aussi accueilli les dirigeants chargés de l'accord et de l'alliance pour qu'ils puissent discuter directement avec les détaillants canadiens. Nous avons autant que possible entretenu des rapports avec les intervenants directs des deux initiatives, avec d'autres ONG, avec le gouvernement du Canada et, au Bangladesh, avec des commerçants étrangers et l'Organisation internationale du Travail, entre autres.
    Nous avons aussi participé activement à diverses activités conjointes de promotion des intérêts avec nos pairs du Canada et des États-Unis, y compris la Fédération canadienne du vêtement, l'American Apparel and Footwear Association, la United States Fashion Industry Association, la National Retail Federation et la Retail Industry Leaders Association. Entre autres, nous avons adressé des lettres au gouvernement bangladais au sujet de la réduction des tarifs sur l'équipement de sécurité des bâtiments et de sécurité-incendie, du conflit de travail au Cambodge et de l'utilisation du coton d'Ouzbékistan, pays où le travail forcé et le travail des enfants représentent un grave problème.
    Nous avons aussi fait profiter nos membres et autres intervenants de nos outils, de nos ressources et de nos renseignements, notamment nos pairs du ministère des Affaires étrangères, du Commerce et du Développement, des ONG et, comme je l'ai mentionné, de nombreux autres groupes de commerce.
    Nous applaudissons le travail que le gouvernement du Canada a entrepris au Bangladesh, y compris ses efforts actifs sur le terrain, de concert avec d'autres gouvernements, son appui à divers organismes de bienfaisance venant en aide aux travailleurs blessés, ses contributions aux programmes de l'OIT et, récemment, le rôle que la haute-commissaire Heather Cruden a joué au conseil consultatif de l'alliance pour faciliter l'harmonisation des activités entre l'accord et l'alliance.
    Nous sommes impatients de poursuivre notre collaboration avec vous et de faire tout ce que nous pouvons pour vous aider à résoudre ce problème très urgent et complexe.
    Merci beaucoup.
    Merci beaucoup.
    Nous allons entamer notre premier tour de sept minutes. Je vais voir si nous pouvons respecter le temps et, ainsi, faire deux tours complets. Ce serait formidable.
    Monsieur Dewar, c'est à vous.
    Merci.
    Je remercie nos invités et ceux qui étaient là avec nous l'année passée. Merci d'être revenus nous faire une mise à jour. Monsieur Smith, je vous remercie de votre exposé détaillé.
    Monsieur Chant, je vais commencer par vous. Je me souviens de notre conversation de l'année passée. J'avais mentionné une jeune fille, Tahmina, qui incarnait le problème pour bon nombre d'entre nous. Elle était obligée d'aller travailler alors qu'elle ne voulait pas le faire, ne se sentant pas en sécurité, et cela nous permet de mettre un visage sur le problème.
    Depuis ce temps — et vous nous avez fait part de certaines des mesures prises —, vous avez signé l'accord et je vous en félicite. Je l'ai dit publiquement en plusieurs occasions, et j'ai rédigé un éditorial pour le souligner. Pourquoi d'autres n'ont-ils pas fait la même chose?
(1655)
    Je suis très content que Diane Brisebois et Heather Mak, du Conseil canadien du commerce de détail soit là, car je dois applaudir le travail que le conseil a accompli. Diane a souligné cela, et Heather le montre très activement tous les jours, car elle travaille à ce dossier pour veiller à ce que tout le monde soit inclus — à ce que tout le monde ait l'occasion de participer. Il semble en tout cas que ce soit la question à laquelle elle travaille en priorité, ces jours-ci.
    Je ne peux honnêtement pas vous dire pourquoi d'autres ont choisi de se joindre à une organisation ou à une autre. Je peux tout simplement dire, comme je l'ai fait plusieurs fois publiquement, que la raison pour laquelle nous avons décidé de participer et de signer l'accord est double: premièrement, c'est un document exécutoire et nous étions prêts à accepter cette responsabilité et ce qui vient avec, et deuxièmement, nous estimions que l'accord était axé sur le travailleur. L'accord exige des entreprises participantes — des signataires — qu'elles veillent à garder les travailleurs pendant les travaux d'amélioration. D'après moi, personne ne croit que les problèmes vont se régler rapidement; il faudra pas mal de temps. Chaque plan d'amélioration individuel visant chaque usine particulière qui en a besoin va comporter le déplacement de travailleurs. Dans certains cas, il faudra fermer l'usine complètement. Veiller à ce que les travailleurs touchés continuent d'être payés était, pour nous, un élément très important de la démarche.
    Nous sommes donc très contents que tant d'entreprises aillent de l'avant. Dans mon exposé, j'ai exprimé notre frustration devant la lenteur des progrès, mais il ne faut pas oublier que c'est une entreprise aux proportions incroyables et que le dossier des indemnisations a été très frustrant...
    L'accord a-t-il reçu l'appui des cadres supérieurs de l'entreprise? M. Weston a-t-il joué un rôle prépondérant?
    Oui, absolument.
    Je le demande parce que je crois qu'il faut du leadership pour faire bouger les choses et être explicite quant aux motifs de nos décisions. Je sais qu'il l'a fait, alors je tenais simplement à le dire officiellement.
    Pour ce qui est du rôle que vous jouez et de la frustration que vous vivez, c'est la même chose pour nous. Nous avons fait comparaître des représentants du gouvernement. L'an dernier, nous avons parlé de mettre en place un processus où le gouvernement serait sur le terrain pour appuyer les entreprises et non seulement s'assurer qu'elles sont au courant de leurs responsabilités, mais aussi les aider à signer des contrats avec des acteurs réputés.
    Croyez-vous toujours que le gouvernement a un rôle à jouer à cet égard? Comme nous en avons parlé l'année dernière, ce rôle consistait simplement à adhérer aux principes fondamentaux de RSE afin d'aider les entreprises.
    Je ne suis pas sûr que le gouvernement du Canada ait un rôle à jouer dans l'application...
    Non, je m'explique. Je parle plutôt d'aider les entreprises canadiennes à agir de façon responsable. C'est un partenariat.
    Bien entendu, le gouvernement peut intervenir. Je pense que c'est exactement ce que fait le haut-commissariat au Bangladesh, à Dhaka. Il pourrait être considéré comme un modèle de responsabilité sociale dans les pays en développement. M. Mortoza — je ne me souviens pas de son dernier nom, le collègue de la haute-commissaire Cruden — et la haute-commissaire elle-même ont accompli un travail remarquable en faisant la promotion des valeurs canadiennes dans ce pays. Le rôle qu'a joué la haute-commissaire Cruden dans le groupe des cinq plus trois et le rôle qu'elle joue en ce moment comme conseillère au sein de l'alliance sont des indications positives de ce qui se produit.
(1700)
    Monsieur Smith, vous connaissez bien la chaîne d'approvisionnement, qui croît et évolue constamment en raison de la nature des activités. Vous avez parlé de l'importance de la transparence de la chaîne d'approvisionnement, et les pays du G-8 se sont récemment penchés sur cette question de transparence.
    Dans quelle mesure l'initiative en matière de transparence et la transparence de la chaîne d'approvisionnement sont-elles liées à une politique de RSE responsable?
    Il y a un lien direct. Je pense, par exemple, aux chaînes de distribution au détail au Canada — et pas seulement à Loblaws — qui exigent de plus en plus de voir la chaîne de responsabilité à l'égard des produits qui proviennent du Sud, et qui vérifient notamment si une organisation de producteurs ou un producteur de café au Pérou produit du café certifié équitable et respecte les normes établies par le système international de commerce équitable. Cela touche probablement les quatre paliers de la chaîne d'approvisionnement: le producteur, le distributeur, le commerçant, le grossiste au Canada, et enfin, le détaillant.
    Au bout du compte, le consommateur est au coeur de cette question et doit pouvoir compter sur une certification fiable. Le consommateur doit pouvoir voir sur le produit que le détaillant respecte ses engagements. Je crois que cela a un lien direct, et le lien est cette chaîne de responsabilité, à partir de la source de production jusqu'au détaillant au Canada.
    Merci beaucoup.
    Voilà un bon exemple de respect du temps alloué. C'est très bien.
    Merci. J'ai essayé.
    Monsieur Carmichael, vous êtes le prochain intervenant, suivi de Mme Brown.
    Vous disposez de sept minutes.
    Merci, monsieur le président.
    Je remercie également nos témoins de s'être déplacés cet après-midi.
    Tout comme mon collègue, je tiens à féliciter le détaillant Les Compagnies Loblaw pour les valeurs qu'il a véhiculées. Cela démontre sans aucun doute un solide leadership et un engagement profond à de nombreux niveaux, ce qui est particulièrement important dans un environnement de crise comme nous l'avons vu.
    Monsieur Chant, j'aimerais que vous nous parliez de l'indemnisation globale. Vous avez parlé d'une somme de 5 millions de dollars et indiqué que Loblaws était le principal contributeur de ce fonds. J'aimerais savoir, d'une part, quelle est l'ampleur de ce fonds et, d'autre part, s'il a été distribué aux gens à qui il était destiné.
    Le fonds a été établi par un groupe de travail, un comité de coordination composé de représentants de syndicats, d'ONG, de marques — dont Loblaw fait partie —, du gouvernement du Bangladesh et de l'association des producteurs qui représente les propriétaires d'usines. Notre objectif était de 40 millions de dollars américains. On s'attendait à ce que toutes les organisations que j'ai énumérées, ou du moins, la combinaison du gouvernement, des producteurs et des grandes marques, contribuent à ce fonds.
    Je ne sais pas quel est le montant actuel. Aux dernières nouvelles, nous avions amassé 15 millions sur les 40 millions de dollars visés. Notre contribution jusqu'à présent s'élève à un peu moins de 4 millions de dollars. Nous avons également fourni une aide additionnelle à court terme au début de février, ce qui amène notre contribution totale à un peu plus de 4 millions de dollars, en plus du million de dollars que nous avons remis aux deux organisations dont Peter MacArthur a parlé plus tôt, c'est-à-dire Save the Children in Bangladesh et le Centre for the Rehabilitation of the Paralysed.
    Nous venons tout juste de commencer à attribuer les fonds. Nous les versons au fur et à mesure que nous traitons les demandes. Nous payons un certain pourcentage des demandes, et nous effectuerons les paiements ultérieurs en fonction de l'argent qui sera investi dans le fonds en fiducie.
    L'Organisation internationale du travail agit comme fiduciaire du fonds et, au nom de Loblaw, je tiens à remercier Dan Rees et l'OMC pour le leadership dont ils ont fait preuve à cet égard. Bien que la couleur de mes cheveux puisse vous indiquer que je suis dans le domaine depuis longtemps, je n'ai jamais pris part à une telle initiative auparavant. Honnêtement, c'est quelque chose d'assez inhabituel, et même de très difficile. Chaque fois que je parle en public, j'encourage les grandes marques et les autres que j'ai mentionnés plus tôt à assumer leurs responsabilités. Nous atteindrions rapidement notre objectif de 40 millions de dollars si tout le monde apportait sa contribution.
(1705)
    Cela dit, combien d'entreprises canadiennes sont concernées? Vous avez dit que vous êtes la seule à participer. Combien y en a-t-il?
    Vous ne devez toutefois pas mêler l'accord et les initiatives d'indemnisation. Ce sont deux choses distinctes.
    Vous êtes la seule entreprise canadienne à faire partie de l'accord?
    Nous sommes la seule entreprise canadienne à avoir signé l'accord. Beaucoup d'entreprises canadiennes déploient des efforts afin d'assurer la sécurité en milieu de travail, dont bon nombre par l'intermédiaire de l'alliance.
    Pour ce qui est de l'indemnisation, pour être honnête, je ne veux pas vraiment parler des autres, mais à mon avis, on pourrait en faire davantage.
    D'accord.
    J'aimerais parler de la question de la gestion de l'offre, mais tout d'abord, vous avez indiqué que les activités reprennent. Je suppose que vous avez mis en place de nouvelles installations et que vous êtes prêts à entreprendre l'exploitation. J'aimerais que vous nous disiez ce qui a changé depuis un an.
    Bien sûr, avec plaisir.
    Tout d'abord, sachez que nous ne possédons aucune usine au Bangladesh. Comme je l'ai dit il y a 11 mois, nous établissons des contrats avec des vendeurs, qui sont propriétaires d'usine ou qui ont des contrats avec des propriétaires d'usine sur le terrain.
    On a réalisé d'importants progrès au chapitre de l'inspection des établissements, que ce soit pour les conditions de travail, les conditions environnementales ou ce que certains appellent les vérifications de RSE, qui englobent maintenant l'inspection des bâtiments et de l'intégrité physique ou structurelle des bâtiments. Je dirais que c'est ce qu'ont fait la plupart des grandes marques. Nous avons effectué toutes nos vérifications avant la fin de juillet dernier et nous avons signé un accord. Le processus est maintenant en cours; les usines sont inspectées à raison d'une dizaine par semaine.
    Le processus est assez lent, étant donné qu'il y a un très grand nombre d'usines qui doivent être inspectées. Toutefois, d'après ce que je comprends, en vertu de l'accord — et de l'alliance, si je ne me trompe pas, et Dan pourrait vous en parler mieux que moi —, on évalue d'abord les emplacements qui présentent le plus de risques...
    Nous avons également renforcé notre politique de tolérance zéro pour ce qui est de la sous-traitance, ou du moins de la sous-traitance non autorisée. La sous-traitance est acceptable seulement si nous en sommes informés et si nous avons inspecté les lieux au préalable; autrement, c'est inacceptable.
    Vos vérifications comportent donc deux volets: tout d'abord les conditions de travail, que vous vérifiez constamment, puis l'état des bâtiments. Est-ce exact?
    Oui, nous combinons les deux. Comme je l'ai déjà dit, auparavant, personne n'inspectait l'intégrité structurelle des bâtiments, et on le fait maintenant. Je tiens à préciser que dans le cadre de l'alliance et de l'accord, on s'est entendu sur un ensemble de normes communes, ce qui est un très bon signe, à mon avis. Les propriétaires d'usine n'ont donc pas à adhérer à deux ensembles de normes. Il n'y en a qu'un seul, et ce sont des normes très élevées.
    Merci. C'est tout le temps dont vous disposez.
    Beau travail, John.
    Des voix: Ah, ah!
    Le président: Vous pourriez peut-être vous rattraper plus tard.
    Monsieur Garneau, vous disposez de sept minutes.
    Merci beaucoup pour vos témoignages.
    L'un des témoins à qui j'ai parlé avant vous était un représentant du gouvernement, et il m'a dit que rien n'obligeait les détaillants à s'adresser au gouvernement pour faire affaire avec un fabricant dans l'industrie du vêtement au Bangladesh. Ils n'ont qu'à entrer en contact avec le fabricant, signer une entente, puis les vêtements sont produits. Par conséquent, 60 % des détaillants ne communiquent pas nécessairement avec le gouvernement.
    Ma première question s'adresse à M. Chant. Je ne pointe pas Loblaws du doigt, parce que je sais que vous avez accompli beaucoup de choses depuis l'effondrement de l'édifice Rana Plaza. Je pose la question parce que c'est peut-être ainsi que fonctionnent beaucoup d'autres entreprises encore aujourd'hui. Lorsque vous êtes allé au Bangladesh pour la première fois, avez-vous choisi un fabricant après avoir évalué sa capacité de faire le travail et les coûts connexes? Est-ce que ce sont les critères sur lesquels vous vous êtes fondés pour décider de signer ou non un contrat?
(1710)
    Oui.
    Chose certaine, nous ferions preuve de diligence raisonnable en ce qui a trait à l'intégrité et aux antécédents de l'agent ou du vendeur avec lequel nous concluons un contrat, que ce soit un propriétaire d'usine ou non. Ensuite, avant de signer un bon de commande, nous nous assurerions qu'une inspection des lieux où seront fabriqués les produits a été effectuée.
    Avant l'effondrement de l'édifice Rana Plaza, nous n'inspections pas l'intégrité des bâtiments. Ce n'est pas une pratique courante, et je serais d'ailleurs assez étonné d'entendre un autre détaillant dire qu'il a l'habitude de consulter le haut-commissariat dans chaque pays où il fait fabriquer ses produits. Pour être honnête, je n'en vois pas la nécessité.
    À mon avis, les clients des magasins Loblaw et de nos bannières, que ce soit Joe Fresh ou toute autre bannière, estiment que c'est à nous d'être intègres et d'agir de façon éthique, et je ne crois pas que ce soit au gouvernement du Canada de nous dire comment faire fabriquer nos produits ailleurs dans le monde. En toute honnêteté, je ne crois pas que ce soit une solution pratique. Je ne suis pas sûr que c'est ce que vous proposez.
    Non.
    Très bien. Selon vous, jusqu'à présent, vous êtes la seule entreprise canadienne à avoir signé l'accord au Bangladesh.
    Par conséquent, je vais adresser ma prochaine question à Mme Brisebois.
    Vous représentez les détaillants, et j'aimerais savoir, d'après votre expérience — et j'ignore combien d'entreprises canadiennes autres que Loblaw ou Joe Fresh font fabriquer leurs vêtements au Bangladesh —, quels sont vos rapports avec eux en ce qui a trait aux questions liées à la responsabilité sociale des entreprises. À moins que ce ne soit pas un domaine que vous abordiez dans le cadre des services que vous fournissez aux détaillants canadiens?
    Merci, monsieur Garneau.
    En fait, nous avons beaucoup d'échanges avec eux en ce qui concerne les pratiques de RSE; et comme M. Chant l'a indiqué, depuis la tragédie du Rana Plaza, nous communiquons davantage avec tous nos commerçants, surtout ceux qui importent des vêtements du Bangladesh.
    Par conséquent, nous travaillons en étroite collaboration avec tous nos détaillants afin de les encourager à adhérer à l'accord ou à l'alliance et à revoir leurs pratiques à l'égard de la gestion de la chaîne d'approvisionnement, dont bon nombre ont été mentionnées par M. Chant. Une association comme le Conseil canadien du commerce de détail joue en effet un rôle important. La seule chose que nous ne faisons pas, dans notre cas, c'est de préciser aux commerçants les organisations avec lesquelles ils devraient s'associer ou les initiatives qu'ils devraient appuyer, en supposant que nous les considérons positives, tout comme l'accord et l'alliance.
    J'espère avoir répondu à votre question.
    Merci. J'ai une autre question.
    Les représentants du ministère nous ont dit qu'environ 60 % des détaillants qui envisageaient de faire des affaires au Bangladesh ne s'adressaient pas à vous pour obtenir des conseils. J'imagine que lorsque des entreprises communiquent avec vous, vous leur donnez toute l'information nécessaire. Toutefois, est-il possible que des détaillants fassent des affaires au Bangladesh sans que vous ne le sachiez? Avez-vous un moyen de savoir quelles entreprises se rendent là-bas afin de vous assurer de pouvoir discuter avec elles?
(1715)
    Il n'existe pas vraiment de moyen ou de liste, monsieur Garneau, qui nous dit que ces 30 entreprises font fabriquer leurs produits au Bangladesh. En fait, c'est quelque chose qui est assez difficile à savoir, à moins que le pays soit identifié sur l'étiquette du produit et que nous nous promenions d'un magasin à l'autre.
    Il y a des groupes d'entreprises qui sont très modernes et qui font fabriquer leurs produits à l'étranger, que ce soit en Chine, au Bangladesh ou au Cambodge. Il est facile de les repérer. Cependant, il y en a certaines qui ont parfois recours à des intermédiaires et qui ne sont pas aussi perfectionnées et peuvent avoir besoin d'aide.
    Comme l'a mentionné plus tôt un des membres du comité, il est important que les cadres supérieurs de l'entreprise — comme M. Weston — s'assurent qu'on pose les questions aux acheteurs. D'où proviennent les produits? Agissons-nous correctement? Avons-nous un code de RSE en place? Est-il appliqué dans la pratique?
    Par conséquent, je pense que les associations comme le Conseil canadien de commerce de détail, de concert avec le gouvernement, peuvent concevoir des outils et les mettre entre les mains de nombreuses entreprises afin qu'elles soient mieux informées.
    J'espère que cela répond à votre question, monsieur Garneau.
    Merci beaucoup.
    Nous allons maintenant amorcer la deuxième série de questions. Chaque intervenant disposera de cinq minutes. Monsieur Goldring, vous avez la parole.
    Merci beaucoup.
    Merci d'avoir accepté notre invitation.
    Dans une autre vie, j'ai participé aux visites préventives contre l'incendie pour ma société. J'ai visité des milliers d'édifices, dont de nombreux grands magasins d'alimentation, des magasins à grande surface et autre, pour y inspecter les extincteurs automatiques et les extincteurs manuels, notamment.
    Avant 1985, il était impossible d'avoir autant de contrats. Il fallait légiférer, car c'était à une époque où ces systèmes n'étaient pas inspectés régulièrement. On se rendait compte que le système ne fonctionnait pas lorsque quelqu'un tirait sur l'avertisseur manuel d'incendie et que rien ne se produisait, alors qu'on en aurait probablement eu besoin.
    Nous savons que ce genre de situation ne se produit pas seulement au Bangladesh, puisqu'un centre commercial s'est effondré en Ontario il y a deux ans, si je ne m'abuse, en raison de problèmes structurels. Là, non plus, un bon examen structurel n'avait pas été effectué. Il est malheureux que ce genre d'incident doive se produire avant qu'on améliore les procédures à suivre en cas d'incendie.
    J'imagine que cette entente a été conclue dans le cadre de l'accord. Vous permet-elle d'obtenir un rapport satisfaisant, par dispositif ou par endroits, sur une vérification détaillée d'un édifice? Cette information vous est-elle transmise ou avez-vous accès à ces dossiers au moment de négocier un contrat de fabrication? Faites-vous vérifier ces informations pour vous assurer qu'elles sont exactes?
    Ces informations nous sont et nous seront transmises, mais pour le moment, elles sont très limitées, car seulement quelques manufactures ont été inspectées. Si vous allez sur le site Web de l'accord, vous y trouverez quelques rapports d'inspection problématique déjà effectuée. On peut constater quels sont les problèmes avec certaines manufactures. Ce sont des renseignements que nous sommes très heureux d'avoir.
    En mai dernier, si je ne m'abuse, ceux qui étaient ici se souviendront que j'ai donné mon opinion sur le défi ou une partie du défi que la situation présente. J'ai souligné que le gouvernement du Bangladesh était incapable de faire le nécessaire pour offrir des lieux de travail acceptables. C'est une autre raison pour laquelle nous avons choisi de signer l'accord, car selon nous, l'ensemble de l'industrie doit contribuer dans ce dossier. Pour Loblaw, l'accord est un moyen de contribuer.
    J'espère que, dans plusieurs années, bon nombre des manufactures avec lesquelles nous traitons, sinon toutes, auront été inspectées, auront mis en oeuvre des plans d'amélioration et auront installé des extincteurs automatiques, que les travailleurs conserveront leur poste et qu'on parlera d'un meilleur endroit où travailler. Aussi, ce modèle peut être utilisé dans d'autres marchés en développement afin de s'assurer que les travailleurs sont en sécurité sur leur lieu de travail.
(1720)
    Lorsque j'envoyais du matériel à un distributeur ou même à mon propre centre de distribution dans l'ouest du pays, je visitais ses installations. Ce n'était pas seulement pour m’assurer qu'il avait la capacité de fournir un service adéquat et un bon produit, mais aussi pour inspecter les lieux. Je ne veux pas nécessairement dire qu'il faut inspecter personnellement la sécurité des lieux, mais c'est relatif. Lorsqu'on entre dans une manufacture, on a une idée de la dynamique qui y existe.
    Lorsque j'ai visité la manufacture de Gildan, en Haïti, j'ai eu l'impression qu'il s'agissait d'une exploitation professionnelle, quoique c'est habituellement le cas avec cette société.
    Si vous envoyez des gens faire ces inspections, avez-vous également des évaluateurs des risques et des inspecteurs de sécurité pour vos projets ici, dans vos propres édifices?
    Oui.
    Nous n'avions personne dans la région en avril dernier, mais maintenant, oui. Nous avons commencé à mettre cette équipe sur pied. Nous avons un petit groupe qui fera ces inspections dans la région. Disons que c'est un effort collectif. Nous avons nos propres inspecteurs sur le terrain et nous continuerons de faire nos propres vérifications et inspections. Nous allons retenir les services d'une tierce partie, mais les travaux se feront en collaboration avec nos propres inspecteurs sur le terrain et avec leur participation.
    De plus, nous aurons les résultats des travaux réalisés dans le cadre de l'accord et de l'alliance, ainsi que ceux réalisés par l'université du Bangladesh, en collaboration avec le gouvernement du Bangladesh et avec le soutien du ministère des Affaires étrangères du Canada et de trois ou quatre autres pays.
    Sincèrement, un des problèmes, c'est que de nombreuses inspections et vérifications se dérouleront simultanément, mais je crois que c'est un beau problème à avoir.
    J'espère, et Diane et moi en avons parlé à maintes reprises, que cela mènera à la création d'un modèle plausible et pratique pour faire des inspections précises et efficaces qui permettent de minimiser la lassitude de ces pays par rapport aux vérifications. C'est un élément important dont il faut également tenir compte.
    Merci beaucoup.
    Merci, Peter.
    Notre prochain intervenant sera M. Dewar.
    Vous avez la parole.
    Monsieur Chant, j'aimerais revenir sur un point.
    Il en a été question l'an dernier. Vous avez parlé du problème de la capacité et des inspecteurs, et il en a été question cet après-midi. Il est clair que le gouvernement a un rôle à jouer à cet égard, et un des volets de notre politique en matière de développement serait utile à ce chapitre.
    Combien d'inspecteurs faudrait-il, selon vous? Vous avez vos propres inspecteurs. Selon votre expérience, et en vertu de l'accord, où en sommes-nous?
    Nous sommes dans une bien meilleure position qu'il y a 10 ou 11 mois. Selon les chiffres qu'on m'a fournis, il faudrait entre 200 et 800 inspecteurs. Donc, le nombre idéal se situe probablement dans cette fourchette. Il y a tant d'autres variables — je crois que c’est Peter qui a parlé du terrain de 500 acres qui a été retenu à l'extérieur de Dhaka…
    C'est exact.
    … que si plusieurs manufactures déménagent dans de nouvelles installations sur ce terrain et qu'elles ont toutes été inspectées, par exemple, alors le nombre d'inspecteurs nécessaires pour faire le reste du travail sera moins élevé. Honnêtement, il est futile pour moi de faire des prévisions.
    Bien entendu, le gouvernement aurait un rôle à jouer dans ce dossier.
    Cela ne fait aucun doute.
    Ce serait une bonne chose.
    Effectivement.
    Je me suis entretenu avec des gens au bureau du ministre et des fonctionnaires du ministère, et il semble réceptif à l'idée.
    Le ministre.
    Oui.
    Y êtes-vous retourné récemment?
(1725)
    J'y suis allé il y a deux mois.
    La raison pour laquelle je vous pose la question, c'est que vous vous rendez sur place. L'an dernier, lors de votre témoignage, vous avez été très sincère au sujet de votre réaction aux événements, et je crois que c'est important. Il faut vraiment le voir pour le croire. Le moment est toujours bien choisi pour faire quelque chose de bien.
    Je vous encourage à poursuivre vos efforts, à visiter les manufactures et à rester informé. Quand on regarde ailleurs, des choses nous échappent. Je tenais simplement à vous dire cela.
    Merci.
    Monsieur Smith, une des questions stratégiques que vous avez soulevées concerne l'approvisionnement, notamment celui du gouvernement, comme étant une façon d'encourager le comportement souhaité.
    Quelle est votre expérience à ce chapitre? Pourquoi est-ce une chose à laquelle le gouvernement devrait s'attarder?
    Je crois que la façon dont les gouvernements et les organisations de la société civile abordent le commerce équitable constitue un changement de culture important. Nous avons des exemples récents et remarquables en ce sens. Nous avons deux programmes importants d'accréditation au pays: le programme des villes équitables et le programme des campus équitables. Pour la plupart, ces programmes sont axés sur la participation et menés par de jeunes champions.
    Prenons l'exemple de l'Université McGill qui a récemment reçu son accréditation « campus équitable ». Les services complémentaires — l'administration de l'université — ont pris les devants dans ce dossier et modifié leurs pratiques d'approvisionnement de façon à ce que les produits comme le café, le thé, le sucre et le cacao soient achetés auprès de fournisseurs équitables. Il s'agit d'un changement important.
    Un autre exemple concerne l'Université Simon Fraser, en Colombie britannique. Les étudiants ont laissé savoir aux services complémentaires — l'administration — qu'ils voulaient un Starbucks sur le campus. Starbucks offre des produits équitables. Ils sont allés voir la société. Depuis, la première succursale de Starbucks sur le campus de l'Université Simon Fraser a ouvert ses portes et n'offre que des produits équitables. Il s'agit d'un excellent exemple. Le projet a tellement bien réussi, qu'on s'apprête à ouvrir une deuxième succursale.
    À l'échelle locale, vous savez peut-être que l'Université d'Ottawa a annoncé il y a deux semaines qu'elle a pris des mesures afin d'être certifié campus équitable. Actuellement, l'université discute avec Fairtrade Canada au sujet de fournisseurs équitables pouvant offrir de bonnes solutions pour la chaîne d'approvisionnement.
    J'aimerais également insister sur un point: il n'est pas question ici d'obliger quelqu'un à changer de fournisseur ou de punir les fournisseurs. L'Université McGill a simplement demandé à ses fournisseurs de trouver des produits équitables. Elle ne veut pas changer de fournisseur. Elle veut simplement modifier leurs pratiques d'achat. Il est très important de le souligner.
    Donc, il y a eu des changements importants. Selon moi, il est important pour le Canada que le gouvernement fédéral dispose d'un pouvoir d'achat important, tout comme les sociétés qui relèvent de lui, et quand on y pense… Je vais vous donner un exemple. Sur votre table, vous offrez du café équitable, mais aussi du sucre Lantic. Or, le sucre Lantic est devenu la principale initiative canadienne en matière de produits du sucre. Vous allez vendre, acheter ou partager du sucre équitable…
    Je ne consomme plus de sucre.
    … et cela a un impact immédiat. Donc, pour répondre à votre question, monsieur Dewar, je crois que le gouvernement du Canada peut prendre les devants dans ce dossier et encourager et obliger les services d'approvisionnement de partout au pays à utiliser des produits équitables, car il existe plus de 70 catégories de produits équitables. Actuellement, 27 000 produits équitables différents sont offerts au Canada.
    Et vous pouvez également les trouver dans le magasin de M. Chant.
    Pardon?
    Vous pouvez les trouver dans le magasin de M. Chant.
    Oui, mais il n'y en a pas encore assez, quoiqu'il y a eu des changements importants à ce chapitre.
    Messieurs, le temps est écoulé.
    D'accord, mais j'aimerais féliciter Loblaws. Nous avons un projet pilote avec Loblaws concernant des fleurs équitables provenant de l'Équateur. C'est de ce genre d’initiatives dont je parle.
    Merci.
    Merci, monsieur Dewar.
    Mme Brown, vous avez la parole. Vous serez notre dernière intervenante.
    Merci, monsieur le président. Ma question s'adresse à Mme Brisebois et à M. Chant.
    Nous avons parlé des achats. En réalité, il faut changer la culture nord-américaine. À une certaine époque, Toronto jouissait d'une industrie du vêtement très prospère. D'ailleurs, jusqu'à il y a 30 ans, on retrouvait encore des manufactures sur l'avenue Spadina, au centre-ville. J'en ai visité quelques-unes. Il y a 10 ans, j'ai visité une manufacture très douteuse à Brampton où il aurait peut-être fallu envoyer des inspecteurs.
    Si on vérifiait les étiquettes des vêtements que nous portons aujourd'hui dans cette pièce, on remarquerait qu'ils ne sont pas fabriqués au Canada ou que bien peu d'entre eux le sont. Ils ont probablement été fabriqués au Vietnam, au Cambodge au Bangladesh. Ça revient à une question de prix.
    Ma question, madame Brisebois, est la suivante. Vous dites que vous représentez 45 000 détaillants à l'échelle du pays. Ces détaillants doivent vendre des centaines et des centaines de chandails à 10 $ pour couvrir les coûts de location des locaux dans certains centres commerciaux. Donc, quel est le prix pivot? À quel moment doit-on augmenter le prix de vente?
    On le sait, on est tous fiers de dire qu'on a acheté quelque chose en solde. La ligne est donc très mince pour les sociétés dont les produits sont fabriqués au Bangladesh. Vous dites, monsieur Chant, que le Bangladesh ne veut pas vous perdre. Alors, comment faire pour trouver un juste équilibre entre fournir un milieu de travail sécuritaire pour les travailleurs au Bangladesh, faire des affaires dans ce pays et trouver des détaillants canadiens disposés à vendre les produits au prix fixé? Quel est le prix pivot? Comment faites-vous pour gérer cette situation, d'abord par rapport aux détaillants et aussi par rapport aux producteurs?
(1730)
    J'allais renvoyer la question à Bob, mais il voudra probablement que j'y réponde moi-même.
    C'est une question très intéressante et j'aurais aimé avoir plus de temps pour en discuter. Je vois que le temps nous presse. C'est très difficile pour les détaillants canadiens, précisément parce qu'ils doivent évoluer dans un contexte international. Les détaillants canadiens ne font pas le poids par rapport à leurs concurrents, la plupart étant évidemment aux États-Unis, alors les prix de vente deviennent extrêmement importants pour eux.
    C'est sans contredit une des raisons qui les poussent à faire affaire avec des fournisseurs d'un peu partout dans le monde, car ils veulent obtenir les meilleurs prix possible. Ceci dit, ils sont également conscients que les consommateurs veulent des produits de qualité et de la variété, alors il s'agit de trouver l'équilibre entre tous ces facteurs.
    Il est également difficile pour les compagnies manufacturières du Canada de trouver des employés qui acceptent de travailler en usine pour des salaires qu'on considère souvent comme non concurrentiels. Les détaillants doivent composer avec des conditions extrêmement difficiles.
    Cependant, comme Bob l'a mentionné, les consommateurs sont très critiques en ce qui concerne la qualité des produits, l'endroit où ils ont été fabriqués et les prix de vente. Les détaillants se doivent de rester très près de leurs clients, de demeurer à l'affût de leurs besoins et de tenter de répondre à la demande le plus rapidement possible.
    Vous avez gardé la question la plus difficile pour la fin. Espérons que les messages que nous communiquons et les mesures que nous prenons pourront répondre en grande partie à votre question. Nous faisons ce que nous croyons nécessaire pour assurer des milieux de travail sécuritaires au Bangladesh. Nous pensons que notre entreprise offre un grand choix d'abord et avant tout. Nous vivons dans un pays qui croit en notre capacité de faire concurrence aux joueurs internationaux, et cela signifie aussi d'être ouverts aux échanges commerciaux avec tous les pays du monde.
    Si c'est réellement ce que nous croyons, nous devrions nous concentrer sur le sujet qui nous occupe aujourd'hui, soit d'assurer la sécurité au travail et de veiller à ne pas abuser des travailleurs. Cependant, d'autres pays vont offrir des prix plus concurrentiels que d'autres. C'est la nature même du marché. Les détaillants doivent saisir les occasions qui s'offrent à eux et donner à leurs clients le plus de choix possible, le tout de manière responsable et moralement acceptable.
(1735)
    C'est tout le temps que nous avions.
    Madame Brisebois, merci beaucoup de vous être jointe à nous par vidéoconférence aujourd'hui. Monsieur Chant, monsieur Smith, merci de nous avoir consacré de votre temps.
    Monsieur le président, je n'ai pas l'intention de vous mettre dans l'embarras, mais juste avant de partir, je me demandais si le gouvernement accepterait de jeter un oeil à quelques recommandations faisant suite aux témoignages. Nous pourrions en discuter une autre fois.
    Nous pourrons probablement en discuter mercredi.
    La séance est levée.
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