HERI Réunion de comité
Les Avis de convocation contiennent des renseignements sur le sujet, la date, l’heure et l’endroit de la réunion, ainsi qu’une liste des témoins qui doivent comparaître devant le comité. Les Témoignages sont le compte rendu transcrit, révisé et corrigé de tout ce qui a été dit pendant la séance. Les Procès-verbaux sont le compte rendu officiel des séances.
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37e LÉGISLATURE, 2e SESSION
Comité permanent du patrimoine canadien
TÉMOIGNAGES
TABLE DES MATIÈRES
Le mardi 21 octobre 2003
Á | 1110 |
Le vice-président (M. Jim Abbott (Kootenay—Columbia, Alliance canadienne)) |
M. Bruce Stockfish (directeur général, Politique du droit d'auteur, ministère du Patrimoine canadien) |
Mme Danielle Bouvet (directrice, Politique du droit d'auteur, ministère du Patrimoine canadien) |
Á | 1115 |
Á | 1120 |
Á | 1125 |
Á | 1130 |
Á | 1135 |
Á | 1140 |
M. Bruce Stockfish |
Á | 1145 |
Le vice-président (M. Jim Abbott) |
Mme Carole-Marie Allard (Laval-Est, Lib.) |
Á | 1150 |
Mme Danielle Bouvet |
Mme Carole-Marie Allard |
M. Bruce Stockfish |
Á | 1155 |
Le vice-président (M. Jim Abbott) |
M. Paul Bonwick (Simcoe—Grey, Lib.) |
 | 1200 |
M. Paul Bonwick |
Le vice-président (M. Jim Abbott) |
M. Paul Bonwick |
M. Bruce Stockfish |
M. Paul Bonwick |
M. Bruce Stockfish |
M. Paul Bonwick |
Le vice-président (M. Jim Abbott) |
Mme Liza Frulla (Verdun—Saint-Henri—Saint-Paul—Pointe Saint-Charles, Lib.) |
M. Bruce Stockfish |
 | 1205 |
Mme Liza Frulla |
M. Bruce Stockfish |
Mme Liza Frulla |
M. Bruce Stockfish |
Mme Liza Frulla |
M. Bruce Stockfish |
Mme Liza Frulla |
Le vice-président (M. Jim Abbott) |
M. James Lunney (Nanaimo—Alberni, Alliance canadienne) |
 | 1210 |
M. James Lunney |
Le vice-président (M. Jim Abbott) |
M. James Lunney |
M. Bruce Stockfish |
M. James Lunney |
M. Bruce Stockfish |
M. James Lunney |
Le vice-président (M. Jim Abbott) |
M. Chuck Strahl (Fraser Valley, Alliance canadienne) |
 | 1215 |
M. Bruce Stockfish |
M. Chuck Strahl |
Le vice-président (M. Jim Abbott) |
 | 1220 |
M. Bruce Stockfish |
Le vice-président (M. Jim Abbott) |
M. Bruce Stockfish |
Le vice-président (M. Jim Abbott) |
M. Bruce Stockfish |
Le vice-président (M. Jim Abbott) |
M. Bruce Stockfish |
Le vice-président (M. Jim Abbott) |
M. Bruce Stockfish |
 | 1225 |
Le vice-président (M. Jim Abbott) |
M. Paul Bonwick |
M. Bruce Stockfish |
M. Paul Bonwick |
Mme Carole-Marie Allard |
 | 1230 |
M. Chuck Strahl |
Mme Carole-Marie Allard |
Le vice-président (M. Jim Abbott) |
Mme Carole-Marie Allard |
Le vice-président (M. Jim Abbott) |
Mme Carole-Marie Allard |
M. Bruce Stockfish |
Le vice-président (M. Jim Abbott) |
M. Chuck Strahl |
 | 1235 |
Mme Carole-Marie Allard |
Le vice-président (M. Jim Abbott) |
Mme Liza Frulla |
Le vice-président (M. Jim Abbott) |
Mme Liza Frulla |
 | 1240 |
M. Bruce Stockfish |
Mme Liza Frulla |
Le vice-président (M. Jim Abbott) |
M. James Lunney |
Le vice-président (M. Jim Abbott) |
M. Chuck Strahl |
M. Bruce Stockfish |
M. Chuck Strahl |
Le vice-président (M. Jim Abbott) |
M. Paul Bonwick |
 | 1245 |
M. Bruce Stockfish |
M. Paul Bonwick |
Le greffier du comité |
M. Paul Bonwick |
Le greffier |
Le vice-président (M. Jim Abbott) |
Le greffier |
Le vice-président (M. Jim Abbott) |
M. Paul Bonwick |
Le vice-président (M. Jim Abbott) |
Mme Carole-Marie Allard |
M. Bruce Stockfish |
Le vice-président (M. Jim Abbott) |
CANADA
Comité permanent du patrimoine canadien |
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l |
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l |
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TÉMOIGNAGES
Le mardi 21 octobre 2003
[Enregistrement électronique]
Á (1110)
[Traduction]
Le vice-président (M. Jim Abbott (Kootenay—Columbia, Alliance canadienne)): Comme le président m'a demandé de le remplacer dans ses fonctions aujourd'hui, je déclare la séance ouverte.
Nous allons démarrer, vu que nous sommes suffisamment nombreux. Je pense, en effet, qu'il est plus important de savoir ce que pensent les spécialistes du sujet plutôt que d'attendre que nous ayons officiellement le quorum; après tout, les absents pourront tous consulter le procès-verbal, et ce qu'ont à dire nos témoins est de très grande importance pour nous.
Nous poursuivons donc nos audiences sur la Loi canadienne sur le droit d'auteur et nous accueillons à nouveau les représentants des ministères qui vont poursuivre leurs explications.
Vous avez une vingtaine de minutes pour terminer vos explications, après quoi les membres du comité pourront vous poser des questions pour obtenir des précisions.
Vous avez la parole, monsieur Stockfish.
M. Bruce Stockfish (directeur général, Politique du droit d'auteur, ministère du Patrimoine canadien): Merci, monsieur Abbott.
Je rappellerai aux membres du comité que je suis accompagné aujourd'hui de Susan Bincoletto et Albert Cloutier, du ministère de l'Industrie, et de Danielle Bouvet du ministère du Patrimoine canadien.
Lors de notre dernière visite, monsieur le président, nous vous avions expliqué les derniers efforts que déployait le gouvernement en vue de réformer le droit d'auteur, nous avions mentionné les grandes questions, les consultations que nous avions entreprises et fait un rapport d'étape sur la situation. Ma collègue Susan Bincoletto avait expliqué les questions à court terme du programme gouvernemental et qui se trouvent ciblées dans le rapport en vertu de l'article 92. Nous avions donné un aperçu de chacune de ces rubriques.
J'aimerais maintenant céder la parole à Mme Bouvet qui vous expliquera certaines des conséquences à l'échelle internationale, c'est-à-dire le contexte international dans lequel s'inscrivent ces questions. Puis, elle expliquera les questions à moyen et à long terme qui ont été eux aussi ciblées dans le rapport en vertu de l'article 92 et qui ont été inscrites en ordre de priorité en fonction des divers critères et principes que nous nous étions fixés dans ledit rapport, mais dont l'ordre n'est évidemment pas coulé dans le béton. C'est justement une des raisons qui explique que nous consultions votre comité, dans le cadre de notre étude en vertu de l'article 92, pour vous demander ce que vous pensez de la voie à suivre pour mener à bien nos objectifs en matière de réforme du droit d'auteur.
Puis, monsieur le président, nous répondrons avec plaisir à vos questions.
Sans plus attendre, je cède maintenant la parole à ma collègue qui vous expliquera les divers aspects de nos travaux.
[Français]
Mme Danielle Bouvet (directrice, Politique du droit d'auteur, ministère du Patrimoine canadien): Merci, monsieur le président.
Je vais faire ma présentation en français. Commençons par la page 15 du document qui vous a été remis lors de notre dernière présentation.
À cette page 15, il est question du contexte international. Aussi surprenant que cela puisse paraître, les deux traités auxquels ma collègue, Susan Bincoletto, a fait allusion lors de sa dernière représentation n'ont été mis en oeuvre que par très peu de pays industrialisés, même s'ils ont été conclus en 1996. Les États-Unis ont mis en oeuvre les deux traités en 1999 et parmi les pays membres de la Communauté européenne, seuls l'Italie, la Grèce, le Danemark et l'Autriche se sont acquitté des obligations découlant de la directive de mise en oeuvre de ces deux traités. Un projet de loi a été déposé par le Royaume-Uni tout récemment, mais le processus législatif ne fait que commencer. Quant à l'Allemagne, elle a fait un grand pas en septembre dernier, mais il reste du travail à faire afin de compléter l'exercice.
D'autre part, on doit se fier à l'expérience américaine pour pouvoir traiter de l'impact à ce jour des deux traités, parce que c'est essentiellement la seule dont nous sommes au fait. De façon générale, je pense qu'on peut dire que les auteurs, les producteurs d'enregistrements sonores ainsi que les artistes-interprètes dont les prestations sont fixées sur ces enregistrements sonores sont satisfaits de ces deux traités parce qu'ils constituent un complément à la protection qui existait déjà en vertu de diverses conventions internationales. De façon générale, ils sont satisfaits des deux traités.
Parlons des utilisateurs qui auront à faire face à cette protection accrue. Bien évidemment, plusieurs utilisateurs institutionnels, comme les écoles, les bibliothèques, le consommateur de façon générale, les radiodiffuseurs et les compagnies de télécommunications, ont des préoccupations quant à ces traités.
Aux États-Unis, on a constaté que la plus grande controverse entoure les mesures qui ont été mises en place dans le but d'empêcher les reproductions--ce qu'on appelle les mesures de protection technologique--, et toutes les questions liées à l'accès sont mises en relief par plusieurs causes qui ont été entendues par des tribunaux américains.
Au Canada, nous suivons ces développements judiciaires de très près. Lors du processus d'élaboration de politiques et lors de l'adoption de mesures de mise en oeuvre des deux traités, nous tiendrons compte de tous ces éléments. Il faut savoir que les deux traités nous donnent une marge de manoeuvre importante et lorsqu'on pourra y avoir recours, évidemment, le Canada s'assurera d'atteindre un équilibre entre les intérêts des créateurs et ceux des utilisateurs.
C'était ce que je voulais mentionner au sujet du contexte international.
Parlons maintenant des enjeux à moyen terme et à long terme. Pour cela, je vous invite à vous référer à notre dernière présentation et plus particulièrement à la page 10 où on mentionne la liste des enjeux à moyen terme et à long terme.
Comme ma collègue le disait, lorsqu'il s'agit des enjeux du premier groupe, plusieurs impératifs internationaux et nationaux ont amené le gouvernement à choisir de traiter de ces enjeux le plus rapidement possible.
Á (1115)
Quant aux enjeux du deuxième groupe, les recherches et les modifications législatives envisagées sont encore moins avancées et l'échéancier est encore moins précis parce qu'il n'y a aucune obligation internationale qui pourrait nous forcer à aller de l'avant très rapidement. Même si certains enjeux font déjà l'objet de recherches et d'analyses, comme je le disais, il n'y a pas de paramètres ou d'échéanciers précis qui nous obligent à aller de l'avant.
J'ai l'intention, monsieur le président, de traiter de chacun de ces enjeux, parce qu'il ne m'appartient pas d'exclure quelque enjeu que ce soit. J'ai donc choisi de traiter de tous ces enjeux dans ma présentation et si vous avez des commentaires à faire ou des questions à me poser au cours de ma présentation, n'hésitez pas à le faire.
Je vais commencer par le premier enjeu. Il est question d'enjeux supplémentaires, d'enjeux liés aux nouvelles technologies. Lorsque nous avons rédigé le rapport, nous pensions à tout enjeu qu'il restait à examiner ou tout nouvel enjeu qui pouvait découler de l'utilisation des technologies numériques et des pratiques liées à l'Internet.
Dans le rapport, on donne l'exemple de l'application des recours actuels dans le contexte numérique. Même si la loi prévoit des recours pour les créateurs, même dans un contexte numérique, la question qui se pose est la suivante: les recours actuels sont-ils suffisants pour que les créateurs puissent exercer pleinement leurs droits dans un contexte numérique?
Comme ces questions en sont encore à un état très embryonnaire, il est difficile de traiter des possibles réactions des parties intéressées. Je serai donc très peu précise quant aux possibles réactions des parties intéressées, puisque les enjeux ne sont pas encore tout à fait définis.
Quant aux oeuvres audiovisuelles, la question qui se pose est celle de la paternité de ces oeuvres. Actuellement, la Loi sur le droit d'auteur n'identifie pas l'auteur d'une oeuvre audiovisuelle. Lorsqu'il s'agit d'un documentaire, d'une dramatique, d'une émission de télévision, d'oeuvres multimédias, la question qui se pose est la suivante: qui est l'auteur de cette oeuvre audiovisuelle? Est-ce le scénariste? Est-ce le réalisateur? Est-ce le producteur? Est-ce l'auteur de l'oeuvre musicale, l'éclairagiste ou toute autre personne qui pourrait avoir contribué à l'apport créatif de cette oeuvre?
Il y a plusieurs réactions possibles des parties intéressées. Chez les créateurs, plusieurs revendiquent le titre d'auteur. Dans certains cas, la question s'est même posée quant à savoir si le producteur pouvait être considéré comme un auteur et, si la réponse était négative, s'il pouvait être reconnu comme premier détenteur du droit d'auteur ou titulaire d'un droit voisin. C'est l'enjeu principal relié aux oeuvres audiovisuelles. La propriété des oeuvres audiovisuelles aura aussi un impact sur la durée de protection et sur la question du transfert des droits. Aussi longtemps qu'on n'aura pas réglé la question de la propriété, ces questions accessoires ne pourront pas être traitées.
Lorsqu'il est question du droit de la Couronne, on parle du droit d'auteur rattaché aux travaux exécutés par les gouvernements fédéral, provinciaux et territoriaux ainsi que par les organismes découlant de ces gouvernements, par exemple des études du gouvernement. Certains se posent la question à savoir si les débats parlementaires sont détenus par la Couronne. Les lois et règlements sont-ils détenus par la Couronne? Qu'en est-il des décisions judiciaires?
À moins d'avis contraire, les gouvernements sont titulaires du droit d'auteur sur les travaux exécutés par l'un ou l'autre des ministères. Actuellement, plusieurs politiques gouvernementales ont pour but de faciliter l'accès à ces oeuvres. Je pense au projet Gouvernement en direct et aux politiques liées à Culture canadienne en ligne. Il existe aussi des décrets qui permettent d'avoir accès aux lois et aux règlements.
Á (1120)
Dans ces circonstances, on doit se demander s'il y a lieu d'amender la Loi sur le droit d'auteur ou si, en pratique, des aménagements existants ou à venir ne permettraient pas au gouvernement d'éviter de légiférer dans ce domaine. En ce qui concerne les réactions auxquelles on peut s'attendre, il faut dire que divers ministères et sociétés de la Couronne sont, bien sûr, très préoccupés par la question. Radio-Canada et l'Office national du film, par exemple, tiennent à maintenir leurs droits sur les oeuvres exécutées sous leur gouverne. Les utilisateurs des bibliothèques et des archives ont eux aussi leur mot à dire. Il s'agit d'une question qui doit être étudiée par plusieurs paliers de gouvernement. J'ai mentionné le fédéral, mais les provinces et les territoires sont aussi détenteurs de droits de la Couronne. Lorsqu'il s'agit de traiter de cette question, on doit donc nécessairement consulter ces trois paliers de gouvernement.
Pour ce qui est de la gestion collective du droit d'auteur, je vous rappellerai simplement que Bruce, lorsqu'il a traité du droit d'auteur de façon générale, a précisé qu'en vertu de la loi actuelle, les droits pouvaient être exercés individuellement ou collectivement. Chaque fois que le législateur considère ajouter dans la loi de nouvelles mesures de protection ou qu'il traite d'une question d'accès, la question de la gestion collective du droit se pose.
On sait que les sociétés de gestion ont été instaurées afin de faciliter l'octroi de licences et de réduire les coûts des utilisateurs. La loi, qui est entrée en vigueur en 1997 et qu'on appelle le projet de loi C-32, a accru la reconnaissance des sociétés de gestion. Or, que les enjeux soient du domaine numérique ou à caractère entièrement traditionnel, pour le gouvernement, la question est omniprésente.
En outre, beaucoup de travail a été accompli sur le plan administratif dans le but de permettre aux sociétés de gestion de s'adapter aux nouvelles technologies. Par exemple, Patrimoine canadien a accordé d'importantes subventions à la Société de gestion Access Copyright pour qu'elle puisse octroyer des licences en ligne. La société Copibec a elle aussi reçu des fonds pour être en mesure d'offrir ses services en ligne. Pour des occasions particulières, tel un mariage, les utilisateurs peuvent désormais faire appel à un service en ligne de la SOCAN afin d'obtenir une licence.
Les questions suivantes se posent et sont en outre soumises à votre analyse. La loi doit-elle être amendée afin de faciliter davantage le travail dans un contexte numérique? Les sociétés de gestion ne demandent pas mieux que d'avoir un mandat leur permettant de faciliter leur travail dans un tel contexte. Est-ce que le nombre de sociétés de gestion devrait être réduit? Il y en a déjà 36 au Canada; or, si on devait adopter ces mesures, quel en serait l'impact sur ces sociétés de gestion? Quel impact y aurait-il sur le contrôle des auteurs?
Enfin, on sait que certains créateurs, éditeurs et producteurs ne veulent pas que leurs droits soient exercés de façon collective. Ils préfèrent qu'ils le soient de façon individuelle. Tout cela doit être pris en compte lorsqu'on aborde ces questions.
Pour ce qui est de la durée de protection, comme mon collègue Bruce Stockfish le mentionnait, la règle générale veut que la durée de protection soit égale à la vie de l'auteur, plus 50 ans. On sait qu'aux États-Unis, on a porté à 70 ans la durée de la protection. L'Union européenne a pris la même décision, ce qui fait que la durée de protection est maintenant de 70 ans au sein de la Communauté européenne. On peut constater qu'à l'échelle internationale, on a tendance à vouloir accroître la durée de protection. Au Canada, nous devons nous demander s'il y a lieu d'harmoniser notre législation avec celle de nos partenaires commerciaux.
Á (1125)
Bien sûr, des pressions sont exercées par ces pays afin que les créateurs étrangers puissent bénéficier d'une protection accrue, même au Canada. Pour ce qui est des réactions auxquelles on peut s'attendre, du côté des créateurs, on est favorable à la prolongation de la durée de protection. En revanche, les utilisateurs ne la voient pas d'un bon oeil.
Dans le rapport, on parle de l'exception concernant les enregistrements sonores éphémères. Dans une décision récente de la Commission du droit d'auteur, on mentionnait les redevances à être payées pour la reproduction de la musique par les radiodiffuseurs. Je suis sûre que tous les membres de ce comité ont entendu parler de cette question. Pour faire une histoire brève, disons qu'en vertu de la loi actuelle, les radiodiffuseurs autorisés peuvent reproduire, de façon temporaire, des enregistrements sonores pour faciliter leurs activités de programmation; ils doivent en contrepartie payer une redevance aux sociétés de gestion.
Il n'y a que cinq ans de cela, dans le cadre du projet de loi C-32, cette question avait fait l'objet d'un très sérieux débat; monsieur le président s'en souvient certainement. Le coeur du problème était que les radiodiffuseurs soutenaient que les titulaires de droits étant déjà compensés pour la diffusion de leur matériel, l'exception devrait s'appliquer en tout temps, nonobstant la présence de sociétés de gestion.
Les titulaires de droits sont d'avis que la loi devrait être maintenue telle quelle et tiennent à ce que les dispositions adoptées en 1997 demeurent. Ils ont pris la peine de s'organiser pour faciliter l'affranchissement de ce droit et ils considèrent que la reproduction de la musique sur disque dur entraîne une baisse des coûts de production pour les stations de radio. La qualité de la production étant également en cause, ils croient que dans de telles circonstances, les radiodiffuseurs devraient payer.
Mentionnons aussi que la décision rendue par la Commission du droit d'auteur en mars 2003 fixait à environ 1 p. 100 des revenus des radiodiffuseurs le taux à payer pour la reproduction de la musique. Or, ce taux n'est applicable que pour les stations de radio qui font de la reproduction. Si un radiodiffuseur choisit de ne pas reproduire d'enregistrements sonores, il n'aura pas à payer les coûts de la licence.
Enfin, le dernier point au programme, à moyen terme, est le régime de copie pour usage privé, une autre question dont vous avez sûrement beaucoup entendu parler. Dans le cadre du projet de loi C-32, un régime de copie privé a été instauré pour que les consommateurs reproduisent de la musique à des fins privées, les titulaires de droits étant dans l'impossibilité de contrôler strictement cette activité. Le régime permet la copie de musique à des fins privées; en contrepartie, un mécanisme de rénumération collective a été mis sur pied. Importateurs et fabricants de supports audio vierges sont responsables du paiement de la redevance et cette dernière est versée à la Société canadienne de perception de la copie privée, soit la SCPCP en français, et la CPCC en anglais.
La question de l'interfinancement est, au premier chapitre, un des problèmes qu'on attribue à ce régime. On parle ici de redevances perçues auprès de personnes qui achètent des supports mais qui ne les utilisent pas pour copier de la musique. À cette situation précise, la société de perception a réagi en mettant sur pied ce qu'elle a appelé le programme de taux zéro. Elle met à la disposition de ceux qui croient ne pas avoir à payer la redevance un mécanisme leur permettant de s'adresser à la société de perception pour se faire octroyer un tarif zéro. De cette façon, ils n'ont pas à payer une quelconque redevance sur des supports ne servant pas à copier de la musique.
Á (1130)
Parlons de la question des technologies antireproduction. Supposons qu'il soit possible un jour pour les créateurs de crypter leurs enregistrements sonores ou la musique, de façon à ce que personne ne puisse les copier à domicile sans permission. La question qui se poserait alors serait celle-ci: y a-t-il lieu de maintenir le régime de copie privée? Ces deux questions sont extrêmement importantes et nous les étudions de près.
Parlons de la réaction possible des parties intéressées. Les fabricants et les importateurs sont ceux qui sont appelés à payer la redevance. Évidemment, ils aimeraient bien que ce régime soit aboli et ils considèrent que les technologies antireproduction, par exemple, devraient remplacer le régime de copie privée.
Le consommateur, quant à lui, paie plus cher et, évidemment, cela le dérange, mais en contrepartie, il peut copier légalement la musique à des fins privées.
Quant aux titulaires de droits, ils sont satisfaits du régime, de façon générale. À l'occasion de la dernière décision, les redevances perçues par les titulaires de droits étaient de l'ordre de 30 millions de dollars par année. Afin de relever le défi de l'interfinancement, comme je le disais, ils ont mis en place des solutions administratives qui permettent de réduire ce problème.
Plusieurs questions se posent. Les solutions passent-elles nécessairement par des amendements législatifs ou doit-on attendre que les technologies antireproduction soient en place avant de considérer les amendements? Cette question se pose.
Je me permets, monsieur le président, d'aborder rapidement les questions relatives à la troisième catégorie. Pour la plupart, il s'agit d'enjeux ayant une dimension nationale et internationale, et beaucoup, beaucoup d'analyses et de recherches restent à faire.
Le premier enjeu est la protection du savoir traditionnel. Brièvement, au nombre des formes d'expression culturelle traditionnelle que les autochtones désirent protéger, mentionnons les contes, les chants, la musique, les danses, les pièces de théâtre, la peinture et les objets d'art décoratif. La plupart de ces formes d'expression peuvent déjà bénéficier d'une protection en vertu de la Loi sur le droit d'auteur ou d'autres formes de propriété intellectuelle. La grande problématique pour les autochtones se situe au niveau des chants sacrés, des contes, des symboles sacrés et de l'utilisation inconvenante qui peut en être faite. Il y a aussi toute la question liée aux pratiques, aux langues et au savoir des autochtones. Évidemment, les autochtones aimeraient bien qu'on trouve des moyens de protéger ce patrimoine et ces langues. La question qui se pose pour nous est celle-ci: la Loi sur le droit d'auteur est-elle vraiment la loi qui offre une protection à cet égard? Plusieurs questions se posent. Plusieurs lois, notamment la Loi sur les brevets, la Loi sur les marques de commerce ainsi que d'autres mécanismes sont étudiés actuellement.
À l'échelle internationale, cette question est étudiée de très près par l'Organisation Mondiale de la Propriété Intellectuelle. À ce jour, deux sessions d'information ont eu lieu par année réunissant les états membres afin de discuter de cette question. Il est possible qu'à un moment donné, l'idée de se doter d'un instrument international verra le jour. On en est loin, car on en est présentement à une étape de discussion et non pas de négociation, même si des travaux avancent.
L'autre question est celle des bases de données. On sort un peu du champ du droit d'auteur, parce qu'il est question de bases de données non originales. Les Pages jaunes en constituent un exemple, qui nous est fourni par la jurisprudence. Il y a quelques années, la Cour d'appel fédérale a décrété que les Pages jaunes n'étaient pas couvertes en vertu de la Loi sur le droit d'auteur parce que pas suffisamment originales. Alors, la question qui se pose pour nous au Canada est la suivante: est-ce qu'on devrait créer un régime de droit afin de protéger ces bases de données?
Á (1135)
Peu de travail a été fait sur cette question jusqu'à ce jour. À l'échelle internationale, l'Union européenne protège les bases de données depuis déjà 1996. Aux États-Unis, plusieurs tentatives ont été faites dans le but de protéger les bases de données, mais il n'y a eu aucun résultat jusqu'à maintenant. À l'OMPI, c'est une question qui, depuis plusieurs années, est remise pro forma de réunion en réunion.
Quant aux réactions possibles, si le Canada devait aller de l'avant avec cette question, on peut s'attendre à ce que les investisseurs dans les banques de données et les éditeurs soient favorables à ce genre de protection. Du côté des opposants, on peut s'attendre à ce que les consommateurs, archivistes, bibliothécaires, chercheurs soient opposés à pareille protection, évidemment.
S'agissant des droits des artistes-interprètes, on parle des droits des artistes-interprètes dans les prestations qui sont fixées dans des oeuvres audiovisuelles. Jusqu'à présent, on a beaucoup parlé de la protection des artistes-interprètes dont les prestations sont fixées sur des enregistrements sonores. Ici, c'est la fixation dans des oeuvres audiovisuelles. Actuellement, la loi permet aux artistes-interprètes d'oeuvres audiovisuelles de détenir un droit d'autoriser l'intégration de leurs prestations dans un film, mais dès lors que cette autorisation est accordée, ils ne peuvent plus faire respecter leurs droits, sauf ceux qui auront été prévus dans des contrats. Les artistes-interprètes dans le domaine audiovisuel aimeraient avoir des droits semblables à ceux qu'on accorde aux artistes dans le domaine de l'enregistrement sonore. En fait, ils aimeraient bien que tous les droits qui sont conférés dans le WPPT leur soient également accordés. Les artistes-interprètes sont aussi d'avis qu'en raison du contexte numérique, les modèles d'affaires actuels sont bouleversés, et ils considèrent que des amendements législatifs devraient être apportés à la loi dans le but de mieux les protéger.
Quant aux réactions possibles, évidemment, les artistes-interprètes sont très favorables à l'ajout d'une protection à leur égard. S'agissant des réactions négatives, on peut s'attendre à ce que les producteurs de films et les radiodiffuseurs aient des problèmes face à l'ajout d'une protection.
À l'échelle internationale, c'est aussi une question qui a fait l'objet d'importants débats. Il y a même eu une conférence diplomatique en l'an 2000, dont le but était de clore sur un traité international dans le but de protéger leurs prestations. Comme il y a eu échec, les travaux, depuis ce temps, ont été extrêmement erratiques à leur endroit, mais on sait que l'Organisation mondiale de la propriété intellectuelle aimerait que les travaux reprennent. Il y aura d'ailleurs, en novembre prochain, une session d'information de deux jours auprès de l'OMPI afin de voir s'il est possible d'avancer sur cette question-là.
L'avant-dernier point, c'est le droit à l'égard des radiodiffuseurs. Ce sont les radiodiffuseurs qui veulent des droits additionnels afin de contrôler l'accès à leurs signaux. On parle de droits exclusifs, un peu comme les droits exclusifs qui se retrouvent dans WPPT. On peut s'attendre à ce que, du côté des radiodiffuseurs, il y ait enthousiasme pour qu'un traité comme celui-ci se matérialise; du côté des compagnies de télécommunications, c'est non. Dans le cas des créateurs, ils ont fait valoir qu'ils étaient opposés à ce que les radiodiffuseurs aient des droits exclusifs, mais ils seraient disposés à accepter des dispositions qui permettraient aux radiodiffuseurs d'avoir accès à des recours pour empêcher la piraterie de leurs signaux. À l'échelle internationale, c'est là où les négociations sont extrêmement sérieuses.
Á (1140)
Devant l'OMPI, à nouveau, il y a plusieurs propositions qui ont été déposées, dont celles de l'Union européenne, des États-Unis et du Japon, et on s'attend à ce qu'en novembre prochain, les négociations aillent suffisamment loin pour qu'il y ait une proposition dans le but de consolider un texte qui pourrait servir de base à des négociations encore plus sérieuses concernant un traité pour la protection du signal des radiodiffuseurs. Alors, beaucoup de choses sont en cours à l'échelle internationale, et ici, au Canada, on suit et on participe de très près à ces négociations.
En ce qui concerne le dernier point, c'est-à-dire clarification et simplification de la loi, j'ai simplement le goût de vous laisser sur cette question: est-ce que vous trouvez la loi facile à comprendre? Si vous me dites non, je ne serai pas surprise. Dans ce contexte-là, tout ce que je peux vous dire, c'est que c'est une préoccupation que tous ceux qui travaillent dans le domaine du droit d'auteur ont à coeur. On essaie de penser à des amendements qui pourraient simplifier la loi, mais je pense qu'on n'a pas encore réussi à en trouver.
Sur ces paroles, je vous remercie, monsieur le président.
[Traduction]
M. Bruce Stockfish: Merci, madame Bouvet.
Avant de passer à vos questions, je vous demanderais de vous reporter à la page 16 où vous trouverez les prochaines étapes que s'est fixées le ministère.
Il reste encore beaucoup à faire en ce qui a trait aux questions à court terme, mais pour faire le lien avec les autres dossiers, comprenez bien que ce dont ma collègue vient de vous parler ne représente qu'une petite partie du travail que nous effectuons. Nous nous penchons sur tout un éventail de dossiers, et voilà pourquoi nous avons tenté de répartir ces questions selon un calendrier de réforme qui soit gérable.
Les questions sont tirées en totalité du chapitre 2 du rapport en vertu de l'article 92, mais la liste n'est certes pas exhaustive. Vous admettrez qu'il y a beaucoup de choses qui préoccupent les nombreux intervenants et qu'elles sont toutes importantes. Mais sachez que nous ne négligeons pas les enjeux à moyen et à long terme.
Comme le disait Danielle, nous avons effectué beaucoup de démarches au palier international pour ce qui touche à la radiodiffusion, aux connaissances traditionnelles, aux banques de données et aux droits des artistes interprètes. Le mois prochain, une des réunions de l'Organisation mondiale de la propriété intellectuelle portera là-dessus, et vous comprendrez que nous nous préparons de pied ferme.
De plus, nous attendons un jugement de la Commission du droit d'auteur en ce qui concerne les tarifs des copies pour usage privé et nous nous attendons à ce qu'il soit rendu sous peu. Nous ne négligeons pas non plus ce secteur.
Pour résumer, chaque fois que nous parlons de calendriers à court, moyen et à long terme, il s'agit bien sûr du calendrier législatif proposé. Nous travaillons sur ces trois fronts en vue de respecter ce calendrier.
Ce qui me ramène à ce dont parlait l'autre jour Susan Bincoletto, à savoir les questions à court terme, et aux efforts que nous déployons en ce sens pour préparer un projet de loi. Cela a exigé beaucoup de travail de notre part et continuera à en exiger. Nous attendons diverses opinions juridiques, mais continuons pendant ce temps à travailler sur la politique. Nous effectuons des comparaisons pour voir comment d'autres pays ont traité ces mêmes questions, et nous avons encore d'autres consultations à mener.
Beaucoup a déjà été fait, comme vous pouvez le voir. Je disais l'autre jour que nous avons mené déjà des consultations sur certains des dossiers et qu'il nous reste à aborder d'autres aspects encore. Nous y travaillerons, tandis que vous travaillerez cette année de votre côté vous aussi. Notre travail à nous est complémentaire au vôtre, dans un sens, mais les voies parallèles que nous suivons représentent aussi un défi que nous devons relever et que nous devons gérer.
Cela me permet de répondre plus en détail à une question soulevée l'autre jour par M. Bonwick. J'avais peut-être été un peu trop verbeux dans ma réponse, et c'est pourquoi je voudrais aujourd'hui tenter d'être un peu plus succinct et précis pour expliquer où nous en sommes aujourd'hui et ce que nous entendons faire. Vous vouliez savoir quand le gouvernement entendait déposer un projet de loi qui traiterait des questions faisant l'objet des traités de l'OMPI.
En bref, monsieur le président, si tout va pour le mieux, nous espérons pouvoir déposer l'an prochain, en 2004, un projet de loi qui traiterait de toutes les questions à court terme, c'est-à-dire des questions faisant l'objet des traités de l'OMPI, mais qui traiterait aussi d'autres aspects découlant des consultations en regard des documents sur les questions numériques publiés en 2001 et qui ont été ajoutés au lot. Il s'agit notamment des questions d'accès et d'éducation, de l'accès aux bibliothèques, de propriété des photographies et des oeuvres non publiées que l'on retrouve actuellement dans le projet de loi C-36.
Ce calendrier correspond à celui que nous avions proposé dans le rapport en vertu de l'article 92. À la page 10, vous voyez que notre court terme correspond à un à deux ans et que c'est l'échéancier que nous nous étions fixé.
J'ai dit que nous oeuvrions sur tous les fronts mais que certains sont plus achevés que d'autres, même s'il reste encore beaucoup à faire. Pour pouvoir respecter cet échéancier, nous espérons pouvoir élaborer des positions que nous proposerons au Cabinet au début de 2004. Puis, nous espérons pouvoir ensuite demander aux rédacteurs législatifs du ministère de la Justice de rédiger le projet de loi en tant que tel. D'après nos avocats, le droit d'auteur étant un domaine très compliqué et le processus de rédaction législative étant ce qu'il est, il faudra un certain temps. Par conséquent, si tout va pour le mieux, nous devrions être en mesure de proposer un projet de loi au Parlement vers la fin de l'an prochain.
Je répète que cela sera possible seulement si tout va pour le mieux. Mais plusieurs variables en matière d'élaboration des politiques ne relèvent pas de nous. Nous, nous allons mener d'autres consultations et effectuer d'autres analyses administratives et juridiques dont il faudra tenir compte, en même temps que nous suivrons l'évolution de ce secteur.
Je répète que nous devons travailler de concert avec vous, dans le cadre de votre examen en regard de l'article 92 et que nous devrons tenir compte des témoignages que vous entendrez, en présumant que vous tiendrez compte vous aussi du travail que nous ne cessons d'effectuer.
Á (1145)
N'oublions pas, non plus, le contexte politique, puisque les deux ministres intéressés ont signalé qu'il faisait du prochain projet de loi sur les droits d'auteur une de leurs grandes priorités. Nous faisons de notre mieux pour aller vite, mais nous ne savons toujours pas quelles seront les priorités du prochain gouvernement. En supposant que les priorités ne changent pas, nous serons en mesure d'aller de l'avant, mais il ne faut pas négliger la situation politique.
Dans le meilleur des cas, voilà le calendrier que nous nous sommes imposé, tout en tenant compte de tous les éléments qui nous échappent.
Monsieur le président, nous nous arrêterons là et nous répondrons avec plaisir aux questions que vous aurez sur ce que nous avons expliqué et sur d'autres choses encore.
Le vice-président (M. Jim Abbott): Bien. Je vous remercie.
J'ai décidé unilatéralement de changer l'ordre dans lequel nous poserons nos questions, en espérant que cela puisse faciliter le déroulement.
Mme Allard, M. Bonwick et Mme Frulla veulent poser des questions, et je recevrai les demandes des autres s'il y en a. Nous suivrons cet ordre-là.
Je vous serais très reconnaissant de vous en tenir à cinq minutes chacun pour les questions et les réponses. Quand tous les membres présents auront pris part au premier tour, j'espère que vous me permettrez d'avoir à mon tour cinq minutes de question.
Madame Allard.
[Français]
Mme Carole-Marie Allard (Laval-Est, Lib.): Monsieur le président, je voudrais féliciter les représentants du ministère. Je pense qu'ils ont travaillé vraiment très fort. Ils ont réussi à faire une présentation succincte tout en élaborant sur de grands enjeux. Je vous félicite et vous remercie beaucoup.
Il m'apparaît, selon votre présentation, que l'on doive étudier tous ces sujets à long terme. Vous mentionnez, à la page 14, que les États-Unis, pour leur part, ont déjà ratifié le traité.
Puisque nous ne l'avons pas fait, existe-t-il un vide juridique qui pourrait nous causer des problèmes et qui pourrait nous obliger à devoir adopter une loi en catastrophe pour essayer de régler une situation qui serait perçue comme étant un problème avec les États-Unis? N'y aurait-il pas lieu de centrer notre étude sur ce genre de sujet, qui pourrait nous mener à des vides juridiques?
Quelle est votre réponse, madame Bouvet?
Á (1150)
Mme Danielle Bouvet: Je vous remercie de votre question.
Je dois d'abord dire que je considère que nous avons déjà une loi qui s'applique dans un contexte numérique. Relativement aux auteurs d'oeuvres originales, très peu d'amendements devront être apportés à notre loi pour se conformer au WCT.
Les experts sont unanimes. Selon eux, les amendements seront mineurs, de sorte qu'il est très facile pour moi de vous dire que la loi s'applique déjà dans un contexte numérique.
Parlons maintenant des producteurs d'enregistrements sonores et des artistes. Le gouvernement a déjà reconnu la nécessité d'amender sa loi à l'égard de plusieurs questions. Je répète que la loi s'applique déjà à leur endroit, mais que des amendements plus substantiels devront y être apportés. La situation actuelle n'empêche pas les producteurs et artistes d'exercer plusieurs recours et d'avoir plusieurs droits.
Comparons notre loi actuelle à la loi américaine. La loi américaine a porté fruit à certains égards, mais elle en est encore à un état embryonnaire au niveau de son application, car la piraterie aux États-Unis est encore extrêmement importante malgré la ratification des deux traités. Bien sûr, cette loi américaine comprend une palette de droits un peu plus étendue que dans la loi canadienne, mais le phénomène demeure, la piraterie est encore extrêmement importante, tant aux États-Unis qu'au Canada. Les lois des États-Unis ne protègent pas certains droits des producteurs et des artistes que nous protégeons.
Quand nous avons amendé la loi en 1997, des droits voisins ont été accordés aux producteurs et aux artistes, et ces droits n'existent pas aux États-Unis. À cause de cela, je dirais qu'il y a un écart. Nous avons l'intention de combler cet écart, mais nous pouvons affirmer que notre loi s'applique déjà dans un contexte numérique.
Mme Carole-Marie Allard: Monsieur le président, je tiens donc pour acquis qu'au Canada, les vides juridiques ne nous seront pas nécessairement préjudiciables.
Parlons de la situation canadienne. Dernièrement, un projet de loi qui devait fusionner la Bibliothèque nationale et les Archives nationales nous a réservé quelques surprises. On a découvert que certains articles touchaient le droit d'auteur. Pouvez-vous nous dire si ces surprises étaient légitimes? Comment faut-il les interpréter? Est-ce à dire que la réforme sur le droit d'auteur est urgente?
M. Bruce Stockfish: Madame Allard, je ne sais pas si les questions qui ont causé cette surprise étaient reliées au droit d'auteur ou à ce qui a été soulevé au comité. Nous avons inscrit la question que vous avez soulevée dans notre agenda pour étude à court terme; en d'autres mots, nous avons précisé que l'article 7 de la Loi sur le droit d'auteur est une question urgente. Malgré le fait qu'elle ne comporte pas d'enjeux de nature numérique, comme c'est le cas pour la plupart des autres questions, il s'agit d'une question urgente. On parle évidemment des oeuvres non publiées et du droit d'auteur.
Á (1155)
[Traduction]
Comme vous le savez, il existait une période temporaire de protection qui s'appliquait aux oeuvres non publiées. Naguère, les oeuvres non publiées jouissaient d'une protection perpétuelle, contrairement aux oeuvres publiées qui étaient assujetties à la durée habituelle de protection limitée de 50 ans après le décès. En 1997, les règles ont été modifiées pour permettre une période de protection transitoire de cinq ans qui s'appliquerait à la succession des auteurs. Nous parlons ici des auteurs décédés il y a plus de cinquante ans et des successions des auteurs dont les oeuvres arriveraient sous peu dans le domaine public et pour lesquelles on percevait la nécessité d'accorder une protection transitoire.
En 1997, la durée de protection s'appliquant aux auteurs décédés avant 1948 était de cinq ans, ce que le milieu des écrivains considérait en grande partie comme étant injuste. Le gouvernement, après avoir écouté ces doléances, a tenu compte également des préoccupations des archivistes et des chercheurs, et un petit groupe d'étude a été formé pour essayer de trouver une solution consensuelle. Étant donné les contraintes qui s'appliqueraient à la fin de 2003 et que ces oeuvres tomberaient alors dans le domaine public, nous avons choisi de les inscrire dans les enjeux à court terme pour régler la question.
Le projet de loi C-36, sur la Bibliothèque nationale et les archives publiques, nous a permis de rouvrir le dossier plus rapidement que prévu. Mais il semble évident que nous ne serons pas en mesure de régler le cas de toutes les questions à court terme d'ici la fin de cette année-ci.
Le projet de loi sur la Bibliothèque nationale et les Archives du Canada traitait des questions de droit d'auteur de façon corrélative. Comme il s'agissait de questions touchant la Bibliothèque nationale et les Archives du Canada en termes de dépôt légal, par exemple, cela nous a permis de nous pencher sur les questions d'archives et de recherche dans le cadre du même projet de loi. Comme il avait été jugé que cette question était liée aux archives dans son sens le plus large, nous avons inclus cette question, en tenant compte encore une fois de la nature court terme du dossier.
Était-il surprenant que cette question se retrouve dans le projet de loi? Ce l'était clairement pour certains. Était-ce controversé? Certes, et beaucoup plus que prévu, et particulièrement en raison des préoccupations que cela soulevait. Par ailleurs, je vous rappellerais que le tout avait été décidé à la suite d'un accord consensuel parmi les grands intervenants, consensus qui se maintient toujours. Il est certain que le droit d'auteur continuera à causer problème. Le projet de loi ne faisait pas donc exception. Mais cela explique que le gouvernement ait choisi d'inclure cette question dans le projet de loi C-36.
Le vice-président (M. Jim Abbott): Nous passons à M. Bonwick.
M. Paul Bonwick (Simcoe—Grey, Lib.): Merci, monsieur le président.
Avant de passer aux deux questions que je veux aborder, j'aimerais parler de la motion dont on devait s'occuper la semaine dernière.
Au fait, j'appuie la décision que vous avez prise de limiter à cinq minutes le temps d'intervention. C'est une façon de mieux organiser et structurer nos délibérations. Je recommanderais d'en faire la règle le plus tôt possible, peut-être à l'occasion de la prochaine réunion, pour pouvoir agir sans tarder.
Je veux aborder deux points. Tout d'abord, le projet de loi C-36 et des dispositions relatives au droit d'auteur qu'il contient et, deuxièmement, la façon dont le comité a décidé au printemps de procéder à l'examen de la Loi sur le droit d'auteur.
J'aborderai d'abord le deuxième point. Au printemps, après quelques séances d'information, le comité a décidé—faute de meilleure description—de classer les questions en catégories court, moyen et long terme. J'ai été heureux d'entendre M. Stockfish nous dire que le ministère travaillait dur à la première catégorie et enregistrait des progrès et que comme il y avait eu de nombreuses consultations au cours des six dernières années, le comité n'avait pas à refaire ce que le ministère avait déjà fait.
Quand on a décidé de classer ces questions en trois catégories, j'avais le sentiment que la majorité ou tous les membres du comité souhaitaient comme le ministre agir rapidement. Nous sommes devenus signataires en 1997 et 42 pays ont déjà procédé à la ratification. Le Canada n'est pas de ceux-là.
Depuis, dans ses discours et ses communiqués, le ministre dit que c'est une priorité. Or, M. Stockfish nous dit qu'au mieux cela va se faire à l'automne de 2004.
Sans tomber dans le pessimisme, je pense qu'il faut songer davantage au printemps ou à l'automne de 2005 vu l'échéancier que vous avez décrit et l'éventualité d'une élection. Il sera donc matériellement impossible pour le ministère de passer par le cabinet et le processus législatif.
Je pense—et j'espère—parler au nom du comité quand je dis que votre réponse est inacceptable, que le comité, le ministre, semble-t-il, lui, envisage un échéancier calculé en semaines et non en mois. Si nous pouvons de quelque manière que ce soit exercer des pressions sur le ministère de la Justice pour qu'il collabore davantage avec vous pour y arriver...
Pour ma part, comme c'était l'avis du comité au printemps, je trouve inacceptable d'envisager la ratification neuf longues années après avoir signé le texte.
En ce qui concerne les consultations, à un certain moment on finit par dépasser la mesure quand on parle de six ou sept ans...
Une voix: [Note de la rédaction : Inaudible]
 (1200)
M. Paul Bonwick: Désolé, monsieur le président, je pense que c'est le secrétaire parlementaire qui préside la réunion.
Le vice-président (M. Jim Abbott): L'ennui c'est que vous en êtes à quatre minutes.
M. Paul Bonwick: Très bien, parce que ma réponse sera plutôt courte.
Sous la conduite du comité, du ministre et du Parlement, pouvez-vous régler la question en quelques semaines? Pouvez-vous suivre ces instructions si nous vous aidons?
Et je remercie beaucoup le secrétaire parlementaire de son interruption.
M. Bruce Stockfish: Monsieur Bonwick, je tiens à souligner qu'il n'y a pas que notre ministre, Mme Copps, mais aussi le ministre Rock qui attachent la plus haute priorité à ce projet de loi, qui réglerait les questions à court terme conduisant à la ratification des traités de l'OMPI.
Je ne peux que répéter que la situation dans laquelle nous évoluons est que l'élaboration des politiques est souvent indépendante de notre volonté. Même pour ceux qui relèvent de nous, nous rencontrons aussi des difficultés. C'est la nature même des questions sur lesquelles nous travaillons.
M. Paul Bonwick: Alors, pouvez-vous y arriver—j'essaie de ne pas dépasser mon temps de parole—dans les semaines à venir, oui ou non?
M. Bruce Stockfish: Non.
M. Paul Bonwick: D'accord. Alors...
Le vice-président (M. Jim Abbott): Nous en sommes à cinq minutes précises.
Madame Frulla.
Mme Liza Frulla (Verdun—Saint-Henri—Saint-Paul—Pointe Saint-Charles, Lib.): Merci, monsieur le président.
Pour reprendre là où mon collègue a terminé, si vous répondez non, si nous ne pouvons pas le ratifier dans les semaines à venir, qu'en est-il des questions à régler à moyen terme? Ce qui m'ennuie, c'est que ces questions ont une grande importance. Si on parle... et vous dites que l'échéancier de Paul est impossible. Son échéancier est très logique. Cela pourrait nous mener au printemps 2005. Que va-t-il donc arriver dans le moyen terme?
Vous voyez ce que je veux dire? Pour moi, les questions à moyen terme sont déterminantes mais elles ne pourront pas être réglées avant 2006 ou 2007...?
M. Bruce Stockfish: Comme je l'ai dit, madame Frulla, nous continuons de travailler à toutes les questions de nature législative, y compris celles pour le moyen et le long terme. À cause de l'immensité de la tâche qui nous attend, ma direction générale a vu son effectif multiplié par trois ces deux dernières années; si cela n'avait pas été le cas, il nous aurait fallu être en mode crise pour les questions à court terme. Nous nous occupons donc des questions à moyen et à long terme.
Pour ce qui est de la gestion des droits collectifs, par exemple, nous avons organisé des tables rondes qui rassemblent des sociétés de gestion pour trouver des solutions législatives et administratives. Nous faisons un état des lieux au sujet de l'exception pour enregistrement éphémère et nous suivons la situation du régime de copie privée, comme je l'ai dit.
Nous faisons ce travail préparatoire en prévision du prochain projet de loi, qui suivra, pour ne pas avoir à connaître les frustrations...
 (1205)
[Français]
Mme Liza Frulla: Est-il possible, compte tenu de la situation, qu'il y ait, pour la fin de 2004 ou de 2005, une loi--puisque vous continuez votre travail sur le moyen terme--regroupant au moins le court terme et le moyen terme? Est-ce que c'est envisageable?
M. Bruce Stockfish: Tout est possible. Dans notre rapport sur l'article 92, nous avons pris la décision d'organiser notre travail à court, à moyen et à long terme. Nous avons fondé ce travail sur des principes et des objectifs que nous avions précisés dans le rapport. Or, il est possible qu'en cours de route, nous remplacions ce qui était pour nous la principale priorité. Un an s'est écoulé depuis ce rapport et nous nous sommes dit qu'il s'agissait là d'un environnement dynamique. Nous procéderons à de nouvelles évaluations.
Pour votre part, vous et le comité ferez votre travail. Comme nous l'avons déjà fait dans notre rapport, nous vous invitons à réfléchir à cette question de priorité.
[Traduction]
Au chapitre 3 de notre rapport, nous vous avons précisément demandé si, à votre avis, nous avions bien regroupé les questions et les avions mis dans le bon ordre. C'est le mieux que nous avons pu faire. Ce n'est pas une science mais c'est ce que nous avons pu faire de mieux en tenant compte des critères et des facteurs pour conserver un processus gérable de réforme du droit d'auteur. Nous tiendrons évidemment aussi compte de vos opinions.
Mme Liza Frulla: Monsieur Stockfish, peut-on même songer... comme vous je pense que selon des délais normaux, ceci a beaucoup de sens—honnêtement—mais vu
[Français]
l'enjeu supplémentaire que constituent les nouvelles technologies, la gestion collective du droit d'auteur et la durée de la protection,
[Traduction]
ce sont des questions cruciales. Les gens disent qu'en 2005, quand on présentera la nouvelle loi, les choses auront changé. Les nouvelles technologies progressent si rapidement que la situation ne sera plus la même. C'est pourquoi nous vous demandons instamment de venir nous voir pour passer en revue l'échéancier.
Moi, ce qui m'inquiète—et c'est ce que Carole-Marie disait—c'est la partie 7, ce qui signifie que si l'on ne peut pas régler les questions à court terme, et déposer le résultat de nos travaux dans quelques semaines, cela signifie que la partie 7, si elle n'est pas ratifiée tout de suite...
Parce que c'est une injustice. Elle sera ratifiée dans un an et demi, voire deux. Qu'advient-il donc de cette partie?
M. Bruce Stockfish: Pour ce qui est des oeuvres non publiées d'auteurs morts avant 1949, elles tombent dans le domaine public. Il sera difficile de s'occuper de cette question, passé la fin de l'année.
Mme Liza Frulla: Mais que se passera-t-il si elles tombent dans le domaine public et que dans deux ans nous disons qu'il y a une injustice? Peut-on revenir en arrière?
M. Bruce Stockfish: Il faudrait pour cela prévoir expressément la récupération rétroactive des droits, ce qui causerait un préjudice à certaines parties qui auront pu employer ces oeuvres déjà tombées dans le domaine public. Cela peut se faire, mais cela crée de nouvelles complications.
Mme Liza Frulla: Merci, monsieur Stockfish.
Le vice-président (M. Jim Abbott): Monsieur Lunney.
M. James Lunney (Nanaimo—Alberni, Alliance canadienne): Pour commencer, je tiens à dire officiellement que je m'oppose au comportement autocratique du président...
Une voix: C'est affreux.
 (1210)
M. James Lunney: ... au nom de l'opposition. Bien entendu, si d'autres... et M. Bonwick a aussi parlé de cette prise de décision autocratique inacceptable.
Je dis cela tout en reconnaissant bien sûr la grande complexité de la question, particulièrement pour moi qui suis un nouveau membre du comité. Je pense que nous approuverions une période de questions de cinq minutes. Mais nous ne voulons certainement pas en faire une habitude, comme le laissait entendre M. Bonwick, pour tous les futurs travaux du comité.
Le vice-président (M. Jim Abbott): Continuez, vous avez déjà perdu 37 secondes.
M. James Lunney: C'est la durée que je préfère. Tout peut prendre 37 secondes.
Je comprends que le travail ici est très difficile. Vous avez parlé de vos travaux actuels sur les politiques, sur la comparaison avec l'étranger, les consultations, l'attente d'avis juridiques et l'étude de ce projet de loi, qu'on ne verra tout probablement pas, si jamais on nous le renvoie, avant une élection, avant 2005. Et je suis probablement optimiste.
C'est donc manifestement un sujet complexe. Il y a beaucoup de controverse au sujet des questions à court terme et à long terme. Il va de soi que les gens qui sont touchés par le moyen terme et le long terme estiment qu'ils devraient avoir la priorité.
Vous dites avoir traité dans votre rapport de certains principes et préoccupations. Pourriez-vous me les rappeler? Sur quels principes sont fondées ces priorités?
M. Bruce Stockfish: Les principes et critères ont d'abord été énoncés dans le documentCadre de révision du droit d'auteurpublié par les deux ministres en juin 2001 et essentiellement intégrés au rapport sur l'article 92. Vous pouvez lire ces principes dans le rapport, par exemple : « Préserver l'intégrité de la loi ». Est-ce que la loi fonctionne bien dans ce nouvel environnement? Il importe aussi de savoir si « un échéancier extérieur force l'intervention ». Autrement dit, y a-t-il une date limite, comme dans le cadre de l'article 7, dont on vient de parler? Ensuite, il faut savoir si « les enjeux ont fait l'objet d'analyses et de consultations approfondies ». Est-ce qu'on est prêt? Il est clair que ces travaux sont toujours en cours et que certaines questions sont plus mûres que d'autres. Le rapport parle aussi de « saisir rapidement des occasions sur le marché ». Des facteurs économiques sont en jeu et le Canada tient à en profiter. Enfin, y a-t-il un « consensus entre les intervenants »? Dans le domaine du droit d'auteur, il est très difficile à obtenir. Il ne faut pas oublier le facteur de l'environnement international, non pas seulement les traités sur lesquels nous travaillons et qui déterminent notre ordre du jour, mais aussi les tendances et les événements internationaux chez nos partenaires commerciaux.
Il faut prendre en compte tout cela. Je le répète, il n'y a pas de formule scientifique, mais un ensemble de facteurs à prendre en compte, sans oublier les efforts globaux du gouvernement pour faire en sorte que la réforme demeure gérable. Voilà les groupes de questions que nous avons ciblées pour le court terme, le moyen terme et le long terme. J'insiste toutefois sur le fait que rien n'est coulé dans le béton. Pour revenir à ce que disait Mme Frulla, c'est un milieu dynamique. Nous réévaluons constamment les questions. Au fur et à mesure des changements dans l'environnement, nous nous adaptons bien entendu, et vous devez le faire aussi, de toute évidence. Nous écouterons vos points de vue pour revoir nos orientations.
M. James Lunney: Si 42 pays ont déjà fait la ratification et, présume-t-on, apporté des changements législatifs, n'y a-t-il pas déjà des modèles que nous pourrions simplement adopter, de manière à être plus efficaces pour régler ces questions?
M. Bruce Stockfish: Mes collègues pourraient certainement en parler abondamment, mais permettez-moi d'abord de dire que, oui, bien sûr, plus de 40 pays ont ratifié les traités, et nos principaux partenaires commerciaux ont beaucoup de difficulté eux aussi à traiter de ces mêmes questions.
Il est vrai que les États-Unis ont procédé à la ratification, mais on a tenu des audiences aux États-Unis, où il y a eu beaucoup d'opposition, et nombreux sont ceux qui réexaminent aussi les dispositions de la Digital Millennium Copyright Act.
En Europe, une directive en matière de droit d'auteur a été adoptée par la commission à Bruxelles, directive qui doit être mise en oeuvre par les divers États membres. Beaucoup y trouvent à redire. Il avait d'abord été question de décembre 2002, et nous avons largement dépassé cette date sans que la directive ait été mise en oeuvre. L'Europe n'est donc pas en mesure de ratifier les traités de l'OMPI. L'Australie ne les a pas ratifiés. Pas plus que la Nouvelle-Zélande.
De nombreux pays l'ont fait, c'est vrai, et ces traités sont en vigueur. Nous examinons un projet de loi qui traitera de la question des traités de l'OMPI et nous permettra de ratifier ces traités, mais nous avons eu beaucoup à apprendre depuis la signature des traités de l'OMPI en 1996. Il nous reste beaucoup à apprendre, et nous tâchons de nous adapter à ce milieu au fur et à mesure. Ce n'est pas un prétexte pour laisser traîner les choses—nous comprenons qu'il faut agir rapidement pour tenir compte des préoccupations des parties prenantes—mais nous devons tenir compte de l'évolution du milieu.
M. James Lunney: D'accord. Pour terminer...
Le vice-président (M. Jim Abbott): Je suis désolé, monsieur Lunney, votre temps de parole est écoulé.
Chuck.
M. Chuck Strahl (Fraser Valley, Alliance canadienne): Merci.
C'est là il me semble une de ces questions qui fait que certains au comité vous plaindront, je pense, vu la sagesse du roi Salomon dont vous devrez faire preuve ici. Vous avez toujours dit que, d'une part, les producteurs sont de cet avis et que, d'autre part... Je compatis donc avec vous sur ce point.
Là où j'éprouve moins de compassion... et je dois vous le dire—vous savez ce que je pense du projet de loi C-36—, je crains que ce projet de loi ne nous servira à rien, parce que bon nombre d'entre nous pensent que ces dispositions sur les droits d'auteur n'ont été ajoutées que parce qu'il fallait bien les ajouter quelque part. Nous avions laissé entendre au ministre que nous pourrions accepter une prolongation de trois ans le temps de régler tout cela de façon appropriée et holistique, mais pour ce qui était de le faire sans un examen général du droit d'auteur—nous nous montrions réticents.
Je pense que ce projet de loi risque de ne pas être accepté du tout, ce qui est déplorable, parce que nous avons maintenant entraîné la bibliothèque et les archives dans ce gâchis du droit d'auteur. Le droit d'auteur est un tel fouillis qu'il est regrettable de les avoir mêlés à cela. Je n'ajouterai rien d'autre.
Pour ce qui est de la stratégie générale à élaborer en matière de processus législatif, qu'il s'agisse d'approuver les traités de l'OMPI ou d'autre chose, je vous prierais de tenter de nous exposer ce qu'il en est de ce projet de loi qui n'est pas un projet de loi omnibus... Ne nous donnez pas à tous une raison de protester, donnez-nous plutôt une raison d'acquiescer. Je crains que nous ne finissions par avoir qu'un projet de loi contre lequel tout le monde trouvera quelque chose à redire et que nous allons traîner jusqu'à la 39e législature.
Ce n'est qu'un conseil en passant. Je ne sais même pas si c'est possible.
Comme tout le monde, je suppose, je m'inquiète du temps qu'il faut pour soumettre un projet de loi visant à faire en sorte que le Canada donne suite d'une manière quelconque à notre signature de ces traités internationaux. Je me demande s'il ne vaudrait pas mieux pour nous—et nous devons mener à bien cet examen de cette loi sur le droit d'auteur—que vous nous présentiez une ébauche de projet de loi plutôt que d'en parler de façon générale. Parce qu'il me semble que ce qui est en train de se passer, c'est que nous allons parler à tous ceux à qui vous avez déjà parlé, et ils vont dire : « Eh bien, je peux vous dire que j'ai déjà parlé aux gens des ministères, et ils sont en train de rédiger quelque chose. » Et pendant que nous sommes ici en train de dire qu'il faut vider la question, vous êtes déjà en train de rédiger quelque chose à partir de ce que vous avez entendu de ces mêmes témoins, probablement. Nous passons donc des mois à siéger interminablement... non pas inutilement mais ça va à l'encontre du but recherché.
Ne vaudrait-il pas mieux, même si ce n'est pas parfait, que vous rédigiez un projet de loi pour nous, que le ministre le renvoie avant la deuxième lecture sous forme d'avant-projet de loi, et ainsi personne ne serait offusqué si nous proposions des changements? Nous aurions tout au moins quelque chose de concret à examiner au lieu de cette illusoire salade, à laquelle je crains que nous aboutirons, surtout avec des élections en vue.
 (1215)
M. Bruce Stockfish: Nous sommes bien sûr conscients de ces préoccupations. En fait, elles sont au nombre des questions dont nous vous avons parlé au printemps, notamment quant à la meilleure façon de nous épauler mutuellement. C'est clair, nous sommes en train d'élaborer une mesure législative, et en même temps il faut revoir la Loi sur le droit d'auteur dans son ensemble, en tenant compte de notre rapport.
Je ne peux donc que répéter que nous sommes en train d'élaborer ce projet de loi, mais nous ne sommes pas en mesure de présenter maintenant au comité quelque chose de tangible concernant ces questions. Il y a peut-être d'autres questions que le comité pourrait examiner et qui renforceraient notre travail. C'est vraiment à vous d'en juger.
M. Chuck Strahl: Mais le problème, voyez-vous, c'est qu'on ne sait pas quoi. Nous pourrions faire toutes sortes de choses qui compléteraient ce que vous faites. Cela pourrait aller dans le même sens ou dans le sens contraire ou faire double emploi. On ne sait pas. L'ennui c'est précisément qu'on ne sait pas vraiment où vous allez. Enfin, même le projet de loi C-36... vous savez « mettez ça dedans, espérons que vous pourrez vous en occuper », c'est une surprise, comme Mme Allard l'a déjà dit. C'est arrivé sans prévenir. Je ne réalisais pas que c'était nécessaire, surtout dans ce projet de loi, et cela a créé une controverse là où ce n'était pas nécessaire.
Je pense qu'il nous faut un projet de texte qu'on puisse se mettre sous la dent. Nous pourrions y consacrer tout un mois et vous, à l'autre bout de la ville, vous pourriez dire : « Quelle perte de temps. C'est déjà réglé et c'est déjà dans le projet de texte ». Nous, nous ne le saurions même pas.
Dieu que c'est frustrant, surtout avec les élections au beau milieu. Comme Paul l'a dit, on essaie de penser en semaines plutôt qu'en années parce qu'il ne nous reste sans doute que quelques semaines d'activités législatives pendant lesquelles nous pouvons soit vous faciliter la vie ou vous la compliquer et je crois que ce soit plutôt le deuxième cas de figure.
Le vice-président (M. Jim Abbott): Monsieur Shepherd et monsieur Schellenberger, libre à vous de poser des questions si vous le voulez. Si vous ne le voulez pas, je vais m'accorder cinq minutes, si vous le voulez bien. Puis, on refera le tour.
Je vais d'abord ôter ma casquette de président et annoncer d'abord au comité que j'ai écrit à la ministre il y a une dizaine de jours pour lui dire qu'il serait bon qu'elle s'investisse dans l'adoption du projet de loi C-36. Je pense qu'il y a une certaine bonne volonté de la part des partis d'opposition tout comme chez les députés d'arrière-banc ministériels, mais il faut que la ministre manifeste son intérêt en faveur de l'adoption du projet de loi.
Je l'ai invitée à amorcer des discussions avec M. Strahl qui pilote le C-36 pour l'opposition officielle. Nous ne pouvons qu'espérer que la ministre s'investira dans le processus d'adoption à la Chambre.
Ma question, par contre, porte sur le régime de copie privée. Pour que le ministère puisse prendre de bonnes décisions, j'imagine qu'il a besoin d'idées—sinon des chiffres précis—sur les questions suivantes.
Combien d'argent a été perçu depuis l'entrée en vigueur du régime? Combien a été redistribué? De la somme qui reste, combien est allé en coûts d'administration, ce qui nous donne le solde, la somme à redistribuer?
 (1220)
M. Bruce Stockfish: J'ai des idées d'ordre général là-dessus, mais avant de m'engager publiquement, me donnerez-vous un instant pour consulter mes collègues?
Le vice-président (M. Jim Abbott): Bien sûr—pourvu que le chronométrage de mon temps s'arrête.
Des voix: Oh, oh!
M. Bruce Stockfish: Pour ce qui est des recettes tirées des prélèvements perçus depuis l'an 2000 environ, l'an dernier, environ 28 millions de dollars avaient été perçus par les sociétés canadiennes de perception de la copie privée au nom des sociétés adhérentes. Plus tôt cette année, 7 millions ont été versés aux adhérents. Elles s'occupent évidemment des exigences administratives qui doivent être remplies pour redistribuer les sommes qui restent.
Le vice-président (M. Jim Abbott): Mais cela ne représente que le quart de l'argent versé. Combien est accaparé par les frais d'administration?
M. Bruce Stockfish: On nous dit que cela se situe dans la norme de l'industrie, soit entre 5 p. 100 et 10 p. 100 des coûts, les coûts d'administration.
Le vice-président (M. Jim Abbott): Je crois que c'est pas mal plus de 5 p. 100 à 10 p. 100 pour la SOCAN.
M. Bruce Stockfish: C'est l'information dont je dispose.
Le vice-président (M. Jim Abbott): Il faudrait vraiment que nous ayons ces chiffres avant d'envisager d'étudier tant soit peu sérieusement cela.
Avec la ratification par les États-Unis en 1999 et toute la question de la protection par opposition à l'accès, ce que j'ai du mal à comprendre, c'est que nous, les législateurs canadiens, soyons obligés d'édicter une loi pour nous conformer aux traités internationaux. Alors j'aimerais savoir comment pouvons-nous nous y prendre pour détailler cela? En d'autres termes, si nous voulons rectifier le déséquilibre créé par les États-Unis, jusqu'où pouvons-nous aller? Ne sommes-nous pas limités par les modalités et les conditions prescrites par les traités internationaux? Quelle est la marge de manoeuvre que nous avons?
M. Bruce Stockfish: Je vais si vous voulez bien vous répondre sur un plan général et si mes collègues pouvaient approfondir un peu, je m'en féliciterais.
Laissez-moi vous donner une idée de certains des dossiers dont nous nous occupons dans le contexte des traités de l'OMPI.
Le dossier des mesures de protection technologiques, par exemple, est représentatif du genre de difficultés dont les deux camps font état. D'une part, ceux qui détiennent les droits déplorent une perte de contrôle, et il est évident que le droit d'auteur est un droit exclusif. C'est une question de contrôle. Ceux qui détiennent ce droit doivent pouvoir contrôler l'utilisation qui est faite de leur oeuvre, c'est-à-dire la façon dont leur oeuvre est utilisée, et donc cela sous-tend la possibilité d'être rémunéré.
Dans l'environnement numérique, dans l'environnement Internet, effectivement on pourrait dire qu'il y a eu une perte de contrôle. Les mesures de protection technologiques ou à tout le moins la protection légale des mesures techniques, que les détenteurs de droit veulent prendre pour conserver le contrôle, reviennent précisément à cela, conserver le contrôle. Ils craignent en effet de perdre complètement le contrôle s'ils ne peuvent pas s'appuyer sur des mesures comme celles-là.
À l'autre extrémité du spectre, on craint que les mesures de protection techniques, et les protections légales qui leur sont accordées, permettraient un contrôle total, absolu. Et il est évident que le droit d'auteur comprend de nombreuses exceptions, il s'assortit d'une multitudes d'utilisations légitimes, sans même parler des oeuvres qui sont déjà dans le domaine public. Il y a donc beaucoup d'autres parties prenantes, dans les milieux utilisateurs au sens large, qui craignent un contrôle absolu qui risque de battre en brèche le juste milieu traditionnel que nous connaissons depuis toujours dans le domaine du droit d'auteur, ce juste milieu entre le contrôle et l'accès.
Il s'agit donc d'un environnement très dynamique et nous sommes à l'écoute des deux camps. Les traités de l'OMPI existent bel et bien, et ils appellent des mesures de protection technologiques. Nous sommes en train d'en élaborer de manière à trouver, dans ce dossier comme dans d'autres aussi, une solution aussi équitable que possible, une solution qui prenne en compte les préoccupations des différentes parties prenantes, mais également l'environnement technologique et juridique dans lequel nous travaillons. Mais pour être franc avec vous, cet environnement évolue sans cesse depuis 1996, de sorte que nous devons constamment réajuster le tir.
 (1225)
Le vice-président (M. Jim Abbott): Monsieur Bonwick.
M. Paul Bonwick: Pour revenir à ce que disaient MM. Stockfish et Strahl au sujet de ce que le comité pourrait faire pour venir compléter votre travail, j'aurais une idée intéressante. Pourquoi le ministère ne viendrait-il pas compléter notre travail à nous?
Je suis très mal à l'aise lorsqu'un gouvernement, un ministre ou un pays signe quelque chose, c'était en 1997, et ne parvient pas, même après deux mandats successifs, à faire ratifier cet instrument. D'autres pays ont fait précédent. Au lieu de nommer les quatre, cinq ou huit pays qui ne l'ont pas fait, comme vient de le faire Bruce, citez-moi plutôt les 42 pays qui l'ont ratifié. Le chiffre est étonnant.
Et lorsque nous parlons d'échéanciers, je trouve cela troublant, s'agissant du projet de loi C-36, que lorsqu'un ministère juge que quelque chose doit être adopté très rapidement, il trouve toujours le moyen de le faire—à preuve la Loi sur la Bibliothèque et les Archives du Canada—mais que lorsqu'il ne semble pas pouvoir le faire, il s'en désintéresse. Je ne parviens pas à me convaincre que le ministère soit dans l'impossibilité de nous soumettre d'ici janvier ou février un avant-projet de loi qui réglerait le premier dossier, la ratification de l'OMPI.
Pour être très franc avec vous, je trouve inacceptable qu'il faille attendre un troisième mandat avant que le ministère puisse nous fournir un avant-projet de loi. Cela veut dire que le ministère ne suit pas son ministre, il ne suit pas le Parlement, s'il ne parvient pas à donner acte après huit ans.
Je vous le répète donc, le comité s'est prononcé très clairement au printemps, et il le fait à nouveau aujourd'hui. Le comité vous dit que nous voulons un avant- projet de loi au tout début de l'année prochaine, je ne peux pas vous en dire plus.
La dernière chose dont je voudrais parler sous couvert d'une réponse, c'est que le comité et le ministère doivent impérativement être en bonne relation. Il faut que nous puissions vous faire confiance et, en toute différence, l'inverse est vrai également.
Pour en venir au projet de loi C-36, ce projet de loi nous est parvenu sans avertissement, sans que le comité soit même au courant, presque sans préavis. Alors qu'on s'était apparemment entendu pour qu'il soit retiré et que l'étude se fasse à l'automne plutôt qu'au printemps, le ministère y a-t-il été pour quelque chose lorsque le projet de loi a été réintroduit au printemps alors que la Chambre avait ajourné ses travaux et qu'un nouveau comité allait devoir s'en saisir après l'ajournement estival? Est-ce que le ministère y a été pour quelque chose dans la réapparition de cet élément dans le projet de loi C-36 alors qu'il avait été entendu qu'il en serait retiré?
M. Bruce Stockfish: Pour vous répondre succinctement, en un mot, non, monsieur Bonwick, nous n'y étions pour rien. C'était là quelque chose qui relevait du comité.
M. Paul Bonwick: D'accord, je vous remercie.
Mme Carole-Marie Allard: Monsieur le président, je pense que je vais essayer de m'exprimer en anglais.
En fait, M. Strahl vous a accusé d'avoir créé un genre de fourre-tout en ajoutant ces dispositions dans le projet de loi C-36. Mais si nous en croyons votre documentation, celle-ci nous montre ce qui figurait dans votre rapport il y a deux ans, et c'est bien manifestement là : les oeuvres non publiées seraient pour le court terme. Il n'y a rien de neuf. Nous savions que nous aurions à traiter de cette disposition qui ferait partie du projet de loi C-36; cela figurait bien—à court terme, les oeuvres non publiées—dans un rapport il y a deux ans.
Par conséquent, lorsque vous dites aujourd'hui à ces gens qu'ils s'y sont pris de façon détournée, vous reconnaissez à mon avis implicitement que, lorsque nous parlons de cet énorme dossier qu'est celui du droit d'auteur, nous faisons face à un véritable mastodonte.
Je préférerais entendre, M. Strahl... et M. Stockfish, lorsqu'il disait qu'une injustice était créée, parce que la période de transition était trop courte lorsque nous avions adopté la loi en 1997. La réalité est que pour la succession d'un auteur décédé en 1949, l'oeuvre est protégée jusqu'en 2047. Dans le cas d'un auteur qui est décédé en 1948, c'est-à-dire un an plus tôt, l'oeuvre est protégée jusqu'en 2003 seulement. C'est donc une injustice, et c'est la raison pour laquelle nous avons dû le dire quelque part, étant donné que la protection accordée par la loi échoit à la fin de cette année-ci.
Lorsque je me suis rendu compte qu'il était impossible de traiter avec l'opposition, j'ai proposé que ces droits... mais je ne veux pas y revenir.
Monsieur Strahl, je pense que nous devons admettre la réalité. Le ministère ne nous a pas pris par surprise. Cela est écrit noir sur blanc ici même, cela a été dit il y a deux ans. Il a essayé de trouver la meilleure façon d'accorder cette protection à ceux qui étaient décédés un an... au mauvais moment, dirai-je, mais je ne sais pas vraiment si c'est suffisamment clair.
 (1230)
M. Chuck Strahl: On ne choisit pas l'heure de sa mort.
[Français]
Mme Carole-Marie Allard: On constate aujourd'hui que les oeuvres des gens morts en 1948 sont protégées jusqu'en 2003, alors que celles des gens morts en 1949 le sont jusqu'en 2047.
[Traduction]
Je comprends pourquoi nous devions traiter de cette question. Il y a injustice, et c'est ce qu'a dit M. Stockfish. Je pense que nous devrions essayer de faire preuve d'ouverture et essayer d'y arriver, avec ce projet de loi, et ne pas retarder cette fusion de la bibliothèque et des archives.
Merci.
Le vice-président (M. Jim Abbott): Par souci d'équité, je pense que M. Strahl devrait disposer du même temps, mais par égard aussi pour les témoins, nous devrions y revenir.
Par souci d'équité, M. Strahl devrait avoir l'occasion d'intervenir.
Mme Carole-Marie Allard: Je n'ai pas encore posé ma question.
Le vice-président (M. Jim Abbott): Il vous reste deux minutes pour le faire, mais comme je l'ai dit, en toute justice, je veux donner à M. Strahl l'occasion de se prononcer.
Mme Carole-Marie Allard: Monsieur Stockfish, y avait-il un autre moyen de faire quelque chose avec un si bref préavis?
M. Bruce Stockfish: Madame, les faits sont là, d'une certaine façon. Nous avons estimé que l'article 7 faisait partie des questions à court terme, compte tenu du fait que la période de cinq ans pour la protection provisoire des oeuvres non publiées expirerait à la fin de l'année en cours. Comme je l'ai dit, les faits sont là.
En rédigeant le rapport, nous espérions, pour ne pas dire que nous nous y attendions, qu'un projet de loi serait adopté avant la fin de l'année en cours. Il est apparu, pour diverses raisons que j'ai déjà expliquées, qu'il n'en serait pas ainsi. Nous l'avons clairement compris au début de l'année. C'était pour cette raison, compte tenu du fait que nous avions un projet de loi portant sur des questions connexes de droit d'auteur et compte tenu de l'urgence de cette question donnée, que nous avons accepté de l'inclure.
C'était relativement étroit en apparence, une question de consensus. Bien sûr, il y avait des difficultés, comme dans toute question de droit d'auteur où différents intérêts sont en jeu, mais on a estimé que c'était un moyen approprié de régler cette question de façon opportune.
Le vice-président (M. Jim Abbott): J'aimerais donner la parole à M. Strahl.
M. Chuck Strahl: J'ai déjà suggéré au ministre la possibilité de prolonger cette période transitoire, ce qui nous permettrait de régler le problème. Je crois que c'est la bonne façon de procéder.
Je ne conteste pas le fait qu'il s'agit d'une question à court terme. Je sais que vous l'avez présentée en tant... mais je conteste la façon dont elle a été présentée. On a voulu tout fourrer dans un projet de loi couvrant à la fois la bibliothèque et les archives. En réunissant les deux, on a cinq minutes de débat aux Communes et dix minutes ici, en comité. C'est indiscutable. Il est temps d'aller de l'avant. Il est temps de donner à tous ces gens ce dont ils ont besoin. Il est temps de faire passer le tout au Parlement comme de la chair à saucisse. Le problème, c'est quand on y ajoute des dispositions qui prêtent à controverse. Dans ce cas-là, on court le risque de faire capoter tout le projet de loi, et c'est précisément ce qui se passe.
Si vous ne voyez pas la différence, madame Allard, c'est que vous ne comprenez pas la procédure parlementaire. Nous acceptons rapidement et facilement les mesures évidentes. En réunissant la bibliothèque et les archives, on essaie de gagner du temps, de faire d'une pierre deux coups. Quant à moi, j'ai proposé une autre formule. On pourrait étendre la période de quelques années. C'est une période transitoire de cinq ans, mais Dieu sait pourquoi, comme l'a dit Paul, au bout de cinq ans, nous n'avons toujours pas d'option législative satisfaisante. Quelle qu'en soit la raison, nous n'en avons pas, mais nous pouvons opter pour une prolongation de deux ans. Et la mesure passera comme de la chair à saucisse. Encore une fois, il n'y aura pas de débat. Nous pourrons la faire adopter.
En disant aux membres du comité qu'il faut faire ce qui est prévu dans le projet de loi, parce que c'est une marmite qui sert à faire passer n'importe quoi, vous vous exposez à des problèmes. Comme je l'ai dit, il y aura des problèmes tôt ou tard si nous ne procédons pas correctement dès maintenant. Essayons de rassembler tous les éléments pour en faire quelque chose de sensée et de cohérent. Les questions proposées ici nous invitent à la prudence : il ne faut pas ajouter au projet de loi des questions qu'il va falloir régler d'ici cinq ans, etc.
Au plan législatif, ce serait un désastre organisé. Le leader à la Chambre ne représentera pas cette mesure, car il sait que c'est une perte de temps, et il en est très irrité. Les membres du comité se sont mis d'accord. Nous n'en reparlerons pas, mais nous avons compris que tout cela était stupide et nous avons essayé de trouver des solutions. Le comité n'a pas donné son accord, et nous nous retrouvons pris avec ce problème. Si nous n'accordons pas à la bibliothèque et aux archives ce qu'elles méritent et ce dont elles ont besoin—je sais qu'il ne me reste plus de temps—, ce sera une honte, parce que nous n'avons pas fait ce qu'il fallait au plan législatif.
Je ne suis pas témoin et je ne demande pas de réponse, mais je tiens à dire que je suis prêt à aller de l'avant. Réglons le problème. Accordons à la protection du droit d'auteur la prolongation nécessaire, sur une courte période, de façon que tous les problèmes de droit d'auteur puissent être réglés d'ici deux ans. Je suis d'accord avec Paul et les autres pour dire que les choses traînent depuis trop longtemps; nous n'aurons aucune indulgence pour le ministère ni pour les fonctionnaires, car cela n'en finit plus.
C'est pourquoi je dis qu'il faut généreusement accorder une prolongation de quelques années pour obtenir une formule complète, car je ne peux pas concevoir qu'on règle le problème pour un petit groupe et qu'on oblige tous les autres, qui attendent déjà depuis neuf ans, à attendre neuf ans de plus.
Je n'en veux pas, et c'est pourquoi j'ai proposé une solution qui prolongera la protection et qui s'appliquera à la bibliothèque et aux archives. C'est tout à fait raisonnable. Il suffit que le ministre s'engage et nous pourrions clore le dossier en un quart d'heure.
 (1235)
Mme Carole-Marie Allard: Monsieur le président, j'aimerais avoir une information.
Allons-nous discuter de cette réforme encore en 2017? C'est en effet la date butoir pour la protection qui est accordée à ceux qui sont morts en 1948.
Le vice-président (M. Jim Abbott): Je crains simplement qu'on s'écarte du sujet et qu'on commence à parler du projet de loi C-36. Nous sommes ici et laissons de côté le projet de loi C-36, dont on peut très bien discuter dans les couloirs.
Y a-t-il des...
Mme Liza Frulla: Non, je veux parler de cela. J'ai une question à poser.
Le vice-président (M. Jim Abbott): Un instant.
Y a-t-il des questions que les députés veulent poser, mais pas sur le projet de loi C-36?
Mme Liza Frulla: Oui.
Sans tomber dans le dogmatisme, je serais très, très mal à l'aise comme parlementaire si nous ne ratifiions pas le projet de loi C-36, de même que Chuck, Paul et nous tous.
Il y avait un consensus sur certaines questions, mais pas pour d'autres. Disons-le franchement, il y a eu cafouillage. Comme parlementaire, je serais extrêmement embêtée de ne pas ratifier le projet de loi C-36 et de laisser passer ce que j'appellerais une injustice.
La question soulevée par Chuck, et par Paul aussi, est de savoir s'il est possible de dire que nous garderons la protection pour trois ou quatre ans, avec prolongation, le temps de trouver une solution, au lieu de défaire un projet de loi valable parce que des députés... Ce n'est pas ce que je pense, mais je comprends que certains députés soient mal à l'aise. J'aurais préféré qu'on traite la question, mais d'après ce que vous nous dites, nous savons que nous ne pouvons pas avoir de ratification à court terme, en décembre.
Ce que je veux savoir, c'est s'il est possible de protéger ces gens contre une injustice. Nous en voyons un exemple actuellement, avec les oeuvres de Jacques Brel, un grand chanteur belge. Ses oeuvres non publiées n'étaient pas protégées et on peut maintenant les acheter chez tous les disquaires. C'est une grave question. Je pense que ce n'est pas juste pour l'auteur puisque s'il ne voulait pas publier ces oeuvres, il avait sans doute de bonnes raisons. Mais il n'était pas protégé.
Revenons à ce que disait Chuck. Pour que nous, parlementaires, soyons plus à l'aise, pour la ratification du projet de loi C-36, et pour qu'il n'y ait pas d'injustice pour ceux qui sont morts en 1947, pourrait-on prolonger la période que nous ratifierons pour le court terme? Est-ce possible?
 (1240)
M. Bruce Stockfish: Comme M. Strahl l'a dit, des discussions sont actuellement en cours sur la prolongation de la période de transition, ce qui nous permettrait de traiter de cette question comme on s'attendait à pouvoir le faire, pour les questions de court terme. Il est clair que si le projet de loi, dans son libellé actuel, est inacceptable à cause de sa teneur ou de la façon dont on en a traité, nous pourrons le modifier pour nous permettre de poursuivre l'examen de la question en prolongeant la période de transition de cinq ans.
Mme Liza Frulla: Il y aura donc un comité...
Le vice-président (M. Jim Abbott): Bien.
J'aimerais apporter une précision au sujet du mot « discussion ». Il y a eu des discussions chez les députés d'arrière-banc. Le secrétaire parlementaire a aussi participé à une partie des discussions, de même que les députés de l'opposition. Le problème, c'est que la discussion n'est pas allée plus haut jusqu'ici. La ministre n'a pas parlé de ses intentions. Elle n'est pas du tout mêlée à cette discussion. Par conséquent, c'est comme s'il n'y avait pas de discussion. Pour respecter l'échéance du 7 novembre, il doit y avoir une entente et un engagement de la part de la ministre. Ensuite, le ministère de la Justice pourra rédiger, en bonne et due forme, l'amendement qui nous donnerait ce compromis.
Le leader du gouvernement à la Chambre m' a dit personnellement qu'il n'y a pratiquement plus de temps. C'est pratiquement fini. S'il est vrai que la fin n'arrive vraiment qu'à la toute fin, nous sommes toutefois tout près de la fin. Ce n'est pas la responsabilité des députés, mais plutôt de la ministre elle-même.
Monsieur Lunney, vous avez la parole.
M. James Lunney: Monsieur le président, je vais retirer mes questions pour permettre aux autres membres du comité de parler de questions plus pertinentes.
Le vice-président (M. Jim Abbott): Bien.
Chuck, c'est à vous.
M. Chuck Strahl: Vous avez parlé de ce qui nous pend au bout du nez, en politique : une élection est probable. Vous avez sûrement suivi les débats de la campagne à la direction du Parti libéral. Parmi toutes ces déclarations faites par, maintenant, seulement Paul Martin et Mme Copps, y a-t-il quelque chose qui se rapporte à ce sur quoi nous travaillons? Dans les discours de campagne, avez-vous entendu quelque chose comme des promesses, des suggestions?
M. Bruce Stockfish: Non, rien que je sache.
M. Chuck Strahl: Bien, merci.
Le vice-président (M. Jim Abbott): Monsieur Bonwick, c'est à vous.
M. Paul Bonwick: De mon côté, vous avez sans doute entendu notre frustration sur le fait que nous n'avons pas encore apposé notre signature, et le souhait du comité de voir le ministère travailler, en collaboration avec d'autres, évidemment, pour que nous en soyons saisis dès que possible : il y a un moment pour agir et on pourrait dire que ce sera dès la quatrième semaine de janvier et pendant le mois de février, quand le comité siégera.
Le comité a-t-il le droit de vous demander une date, à laquelle vous aurez quelque chose à nous présenter? Avons-nous ce pouvoir? Avons-nous le pouvoir de vous dire que nous voulons que d'ici deux semaines, vous nous donniez une date pour ce que le comité demande, et non en fonction des arguments que vous avez déjà présentés?
Je pense que ma question s'adresse soit au greffier, soit à M. Stockfish.
 (1245)
M. Bruce Stockfish: En fait, je vous ai donné le meilleur échéancier qu'un fonctionnaire puisse vous offrir. Nous relevons de nos ministres. Il est clair que c'est pour eux une priorité, comme pour vous, et nous travaillons avec un maximum de diligence. Mais les échéances que nous avons fixées sont telles que je vous les ai présentées. Si les ministres nous demandent de produire quelque chose plus tôt, nous les conseillerons et nous leur donnerons les meilleurs conseils possible sur ce qui peut se faire, mais nous agirons selon leurs souhaits.
Pour toutes les raisons que je vous ai données, soit l'environnement de travail, la rédaction au ministère de la Justice et les consultations en cours, nous avons encore beaucoup de pain sur la planche et il nous faudra par conséquent beaucoup de temps. Mais bien entendu, nous écoutons ce que vous nous dites très clairement et nous ferons de notre mieux.
M. Paul Bonwick: J'aimerais que le greffier nous dise de quel pouvoir dispose le comité, à cet égard.
Le greffier du comité: Le comité pourrait adopter une motion demandant au ministère de donner une réponse, mais il faudrait pour cela avoir le quorum.
M. Paul Bonwick: Il n'y a pas de problème et on aura même le préavis de 48 heures. Je m'en occupe.
Le greffier: En outre, si le ministère est prêt à nous donner de l'information, nous pourrions avoir une motion à ce sujet. C'est une autre possibilité.
Le vice-président (M. Jim Abbott): Étant donné la date butoir du 7 novembre, je propose que le consentement unanime soit nécessaire pour l'adoption immédiate d'une motion. Mais s'il y a consentement unanime au sujet de la motion...
Je pense que nous sommes en nombre suffisant?
Le greffier: Non.
Le vice-président (M. Jim Abbott): Non? Dommage. C'était une bonne idée, pourtant.
M. Paul Bonwick: [Note de la rédaction : inaudible]... après-midi, pour jeudi.
Le vice-président (M. Jim Abbott): Bien.
[Français]
Mme Carole-Marie Allard: Monsieur Stockfish et madame Bouvet, j'aimerais vraiment clarifier la situation.
Au cours de votre présentation, vous n'avez manifesté aucune préférence concernant les priorités à aborder. Or, pourriez-vous nous indiquer une question que nous pourrions considérer comme une priorité? Je ne sais pas si c'est exact, mais je me suis laissé dire qu'à cause de l'Internet, il y avait présentement un vide juridique au Canada. Apparemment, à cause du fait qu'aucune de nos lois ne réglemente l'Internet, des compagnies étrangères qui s'installeraient ici pourraient nous causer préjudice. Corrigez-moi si j'ai tort.
En fin de compte, toute la question de l'Internet ne serait-elle pas ce à quoi on devrait s'attaquer en tout premier lieu?
M. Bruce Stockfish: À mon avis, madame, c'est vraiment à la discrétion des membres de votre comité. Nous avons décrit le travail que nous faisons concernant le court terme. Évidemment, beaucoup d'autre travail nous attend pour ce qui est du moyen terme et du long terme. Comme Mme Bouvet l'a expliqué, beaucoup de questions et d'enjeux sont encore à résoudre. Il reste beaucoup de travail à faire. Ultimement, il s'agit d'un travail auquel les membres du comité pourraient s'attaquer. Il n'en demeure pas moins que c'est à vous qu'il revient de déterminer vos priorités.
[Traduction]
Le vice-président (M. Jim Abbott): Merci aux témoins. La discussion a été beaucoup plus animée que je ne m'y attendais, mais c'est sans doute très sain.
La séance est levée.