HERI Réunion de comité
Les Avis de convocation contiennent des renseignements sur le sujet, la date, l’heure et l’endroit de la réunion, ainsi qu’une liste des témoins qui doivent comparaître devant le comité. Les Témoignages sont le compte rendu transcrit, révisé et corrigé de tout ce qui a été dit pendant la séance. Les Procès-verbaux sont le compte rendu officiel des séances.
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37e LÉGISLATURE, 2e SESSION
Comité permanent du patrimoine canadien
TÉMOIGNAGES
TABLE DES MATIÈRES
Le jeudi 30 octobre 2003
Á | 1105 |
Le président (M. Clifford Lincoln (Lac-Saint-Louis, Lib.)) |
Mme Pamela Brand (directrice nationale, La Guilde canadienne des réalisateurs) |
Á | 1110 |
Mme Arden Ryshpan (gérante des affaires directrices, La Guilde canadienne des réalisateurs) |
Á | 1115 |
Mme Pamela Brand |
Le président |
Mme Mylène Alder (directrice générale adjointe, Association des producteurs de films et de télévision du Québec (APFTQ)) |
Á | 1120 |
Á | 1125 |
Á | 1130 |
Á | 1135 |
Le président |
M. Michael Hennessy (président intérimaire, Association canadienne de télévision par câble) |
M. Gerald (Jay) Kerr-Wilson (vice-président, Affaires juridiques, Association canadienne de télévision par câble) |
Á | 1140 |
M. Michael Hennessy |
Le président |
M. Ken Thompson (directeur, Politiques publiques et communications, Alliance of Canadian Cinema, Television and Radio Artists) |
Á | 1145 |
Á | 1150 |
Á | 1155 |
Le président |
M. James Lunney (Nanaimo—Alberni, Alliance canadienne) |
Le président |
M. Gerald (Jay) Kerr-Wilson |
Mme Pamela Brand |
Le président |
Mme Mylène Alder |
Le président |
M. James Lunney |
Mme Pamela Brand |
M. James Lunney |
Mme Mylène Alder |
 | 1200 |
Le président |
Mme Christiane Gagnon (Québec, BQ) |
Mme Mylène Alder |
 | 1205 |
Le président |
Mme Mylène Alder |
Mme Liza Frulla (Verdun—Saint-Henri—Saint-Paul—Pointe Saint-Charles, Lib.) |
 | 1210 |
M. Michael Hennessy |
Mme Liza Frulla |
Le président |
M. Gerald (Jay) Kerr-Wilson |
Mme Liza Frulla |
 | 1215 |
Le président |
M. Gerald (Jay) Kerr-Wilson |
Le président |
Le président |
M. Paul Bonwick (Simcoe—Grey, Lib.) |
M. Ken Thompson |
 | 1220 |
Le président |
Mme Wendy Lill (Dartmouth, NPD) |
M. Ken Thompson |
 | 1225 |
Mme Mylène Alder |
Le président |
Mme Pamela Brand |
Le président |
M. Gary Schellenberger (Perth—Middlesex, PC) |
 | 1230 |
M. Ken Thompson |
Le président |
M. Gary Schellenberger |
Le président |
Mme Carole-Marie Allard (Laval-Est, Lib.) |
M. Michael Hennessy |
 | 1235 |
M. Gerald (Jay) Kerr-Wilson |
Mme Carole-Marie Allard |
M. Gerald (Jay) Kerr-Wilson |
Mme Carole-Marie Allard |
M. Gerald (Jay) Kerr-Wilson |
Mme Carole-Marie Allard |
Le président |
M. Jim Abbott (Kootenay—Columbia, Alliance canadienne) |
 | 1240 |
Le président |
Mme Pamela Brand |
Le président |
Mme Mylène Alder |
Le président |
M. Michael Hennessy |
Le président |
M. Ken Thompson |
Le président |
Mme Christiane Gagnon |
M. Gerald (Jay) Kerr-Wilson |
 | 1245 |
Le président |
Mme Carole-Marie Allard |
M. Michael Hennessy |
Le président |
M. Gerald (Jay) Kerr-Wilson |
Mme Carole-Marie Allard |
M. Gerald (Jay) Kerr-Wilson |
Le président |
Mme Wendy Lill |
M. Ken Thompson |
 | 1250 |
Mme Wendy Lill |
M. Ken Thompson |
Le président |
Mme Liza Frulla |
M. Gerald (Jay) Kerr-Wilson |
Le président |
 | 1255 |
M. Gerald (Jay) Kerr-Wilson |
Le président |
M. Gary Schellenberger |
M. Michael Hennessy |
Le président |
M. Ken Thompson |
Le président |
Mme Pamela Brand |
Mme Mylène Alder |
Le président |
Mme Carole-Marie Allard |
Mme Pamela Brand |
Mme Carole-Marie Allard |
Mme Arden Ryshpan |
M. Ken Thompson |
· | 1300 |
Mme Carole-Marie Allard |
M. Michael Hennessy |
Le président |
CANADA
Comité permanent du patrimoine canadien |
|
l |
|
l |
|
TÉMOIGNAGES
Le jeudi 30 octobre 2003
[Enregistrement électronique]
Á (1105)
[Traduction]
Le président (M. Clifford Lincoln (Lac-Saint-Louis, Lib.)): Je déclare ouverte la séance du Comité permanent du patrimoine canadien,
[Français]
qui se réunit aujourd'hui pour continuer son étude sur la révision de la Loi sur le droit d'auteur,
[Traduction]
chargé de l'examen de la Loi sur le droit d'auteur.
Nous sommes heureux d'accueillir aujourd'hui quatre groupes. De La Guilde canadienne des réalisateurs, Mme Pamela Brand, directrice nationale; et Mme Arden Ryshpan, responsable des affaires des réalisateurs. De l'Association des producteurs de films et de télévision du Québec (APFTQ), Mme Mylène Alder, directrice générale adjointe. De l'Association canadienne de télévision par câble, M. Michael Hennessy, président intérimaire, et M. Gerald Kerr-Wilson, vice-président, Affaires juridiques. Enfin, de l'Alliance of Canadian Cinema, Television and Radio Artists, M. Ken Thompson, directeur, Politiques publiques et communications.
Je vous souhaite à tous la bienvenue. Je donne la parole à Mme Brand.
Je crois que le greffier vous a expliqué que chaque exposé doit se limiter à 10 minutes afin de donner aux membres le temps de poser des questions.
Mme Pamela Brand (directrice nationale, La Guilde canadienne des réalisateurs): Bonjour, monsieur Lincoln et membres du comité.
La Guilde canadienne des réalisateurs est un organisme national de travail qui représente plus de 3 800 employés clés des équipes de réalisation et de logistique provenant de tous les domaines de réalisation, production, décoration et montage de films et de la télévision au Canada. Près de 500 réalisateurs de films cinématographiques et télévisuels comptent parmi nos membres.
Arden et moi sommes ici pour représenter la Société canadienne de gestion des droits des réalisateurs, qui est un organisme à but non lucratif créé en 1998 par La Guilde canadienne des réalisateurs pour servir de société de gestion. Aujourd'hui, la SCGDR perçoit les redevances concernant les copies pour usage privé de divers pays européens pour le compte de ses membres qui sont réalisateurs.
Le comité veut connaître notre point de vue sur le processus de réforme de la Loi sur le droit d'auteur du gouvernement—le bien-fondé de la liste des questions, le délai d'exécution et ses principes directeurs. Nous avons des opinions à ce sujet. La Guilde a participé très activement au processus de la réforme de la Loi sur le droit d'auteur et en a vu toutes les nuances.
Nous avons activement participé au processus, qui a mené à l'adoption du projet de loi C-32 en 1997, ainsi qu'au processus de consultation de ces dernières années portant sur la mise en application des traités de l'OMPI. Nous avons participé de manière appréciable aux discussions traitant des questions de retransmission sur Internet—le cas de iCrave TV—et la modification consécutive de la Loi sur le droit d'auteur.
Nous sommes membres de la Coalition des créateurs et producteurs sur le droit d'auteur et de l'Alliance pour les droits des créateurs; ces deux organismes font des pressions pour le changement. Nous collaborons à l'établissement d'une installation de gestion électronique du droit d'auteur des oeuvres audiovisuelles en commençant par la mise en application de l'ISAN (numéro international normalisé des oeuvres audiovisuelles).
Étant donné qu'au point de vue financier, nos membres dépendent complètement d'une loi et d'une administration qui doivent être efficaces, nous tenons donc à une bonne marche du processus de réforme. À cette fin, nous avons sept propositions concernant le processus de réforme de la Loi sur le droit d'auteur du gouvernement.
Premièrement, nous vous demandons une approche différente des questions de la réforme de la Loi sur le droit d'auteur; c'est-à-dire regrouper les questions par thème et en petit nombre au lieu de le faire par d'exhaustifs projets de loi omnibus. Nous croyons que le gouvernement doit adopter une approche analytique pour atteindre ces objectifs.
Quelques questions peuvent être traitées individuellement en raison de l'étroitesse de leur portée. Plusieurs questions récentes telles que la modification Lucy Maud Montgomery ont été réglées pour des raisons de limite de temps, de fortes répercussions qu'elles auraient eues sur l'industrie, de consensus de l'industrie chèrement acquis au sein de l'industrie et de la position claire du gouvernement et de l'industrie.
Certaines questions peuvent être distinctes, par exemple, celle de la paternité et de la possession du droit d'auteur et de photographies, mais elles sont liées à d'autres questions du fait de leur inclusion dans le traité de l'OMPI.
D'autres questions ne sont pas distinctes. Elles touchent toutes les oeuvres protégées car elles représentent un changement fondamental du concept du droit d'auteur et ont donc une grande portée. Le projet numérique de l'OMPI, la responsabilité des FSI, l'accès numérique, les exceptions et la gestion sur une base collective du droit d'auteur en font partie. Mais elles sont toutes, à l'exception de la gestion sur une base collective, dans la phase à court terme du processus de réforme du gouvernement et le traitement des questions moins complexes, par exemple, celle de la paternité des oeuvres audiovisuelles et des réformes connexes, est reporté au moyen terme.
Nous sommes loin de contester l'importance primordiale de la mise en application des traités de l'OMPI. Nous avons besoin de l'OMPI. Nous convenons qu'elle est essentielle et nous demandons l'accélération du processus. En déployant stratégiquement un plus grand nombre d'employés, les petites questions nécessitant une réforme pourraient être traitées simultanément au lieu d'être reléguées à la phase à moyen terme.
Déjà, le délai d'exécution, énoncé en années à partir de la date du rapport, ne représente plus qu'un intérêt historique car, en pratique, il ne peut pas être respecté. Le gouvernement devrait envisager l'aide d'experts-conseils pour accomplir sa tâche. Si l'on n'actualise pas les lois, notamment l'application du projet numérique, les industries liées au droit d'auteur rateront des occasions. Par ailleurs, les frais continus de consultation et de présentations qui ne donnent aucun résultat sont de plus en plus difficiles à assumer par les entreprises de ce secteur. Nous devons trouver un moyen d'accélérer le processus.
Á (1110)
Le rapport relègue à la phase à long terme les questions actuellement soulevées au niveau international à l'OMPI, notamment les connaissances traditionnelles, les bases de données et les droits relatifs aux représentations audiovisuelles. Nous convenons qu'il est sage d'attendre qu'un consensus international se développe avant de procéder par voie législative dans de tels domaines étant donné que les besoins intérieurs ou l'évolution de la procédure, à l'exemple des affaires judiciaires se rapportant directement à la question, peuvent exiger des modifications à la loi avant l'apparition d'un tel consensus international. Si une politique importante est en cours d'application sur la scène internationale, le gouvernement doit continuer à y participer et à s'assurer que les intervenants canadiens restent informés et s'impliquent avant que la politique soit définitivement adoptée.
La réforme de la Loi sur le droit d'auteur nécessite une focalisation et un sens du leadership. Le fait que le dossier sur le droit d'auteur soit la responsabilité conjointe de Patrimoine et Industrie ne nous servira peut-être pas bien. Bien ce ne soit pas à proprement dire une question de réforme sur le droit d'auteur, elle dépend étroitement du degré d'efficacité du processus de réforme.
Il y a longtemps que l'on dit que la Loi sur le droit d'auteur devrait être rédigée de façon à la rendre indépendante de la technologie employée. Le récent cas de retransmission sur Internet donne à penser que cette suggestion demande une vraie réflexion. Considérant que la définition des droits, des oeuvres et de toute autre question devrait être rédigée de façon à la rendre indépendante de la technologie employée, la plupart des exceptions, l'utilisation équitable mise à part, sont issues de technologies spécifiques et de déficiences de marché. La justification de toute exception donnée et sa portée dépendent de la technologie sous-jacente. Lorsque les faits justifiant une exception sont spécifiques à une technologie, la langue devrait l'être aussi.
Nous remarquons l'identification du besoin de parvenir à un équilibre entre les demandes des utilisateurs pour des règles simples et équitables d'accès et le droit des titulaires des droits à une rémunération et à un contrôle. Les titulaires des droits qui cherchent à commercialiser leurs oeuvres veulent le contrôle afin de les diffuser et y donner accès pour leur avantage et celui des utilisateurs. Le contrôle et la disposition permettant l'accès ne sont pas nécessairement contraires ni opposés. La reconnaissance légale du droit d'auteur est compatible à la volonté du producteur de contrôler et d'exploiter l'oeuvre. Ne l'oublions pas.
Finalement, nous allons parler de l'audiovisuel. Je laisse la parole à Arden.
Mme Arden Ryshpan (gérante des affaires directrices, La Guilde canadienne des réalisateurs): Dans notre industrie, il est essentiel de connaître l'identité de l'auteur d'une oeuvre audiovisuelle; je le souligne aux réalisateurs membres de la Guilde.
Depuis des années, la Guilde entreprend des démarches auprès du gouvernement canadien afin que soit légalement reconnu aux réalisateurs et aux scénaristes le statut d'auteurs d'oeuvres audiovisuelles. Le rapport indique que des membres différents de l'équipe de réalisation, et dans quelques cas le producteur, ont légalement le statut d'auteurs dans d'autres pays. Ce que le rapport n'indique pas est que le commun dénominateur, c'est-à-dire le réalisateur, excepté aux États-Unis, est un auteur.
Pour l'industrie, la reconnaissance du statut d'auteur est importante pour plusieurs raisons. Habituellement, les systèmes internationaux de droits perçus, comme les redevances sur la copie pour usage privé ou sur la retransmission, répartissent de tels droits entre les auteurs et les producteurs. L'absence d'une reconnaissance légale du droit d'auteur pour les réalisateurs a compliqué le travail de la SCGDR visant à percevoir les paiements pour les réalisateurs dans les pays étrangers. Les retards qui s'en sont ensuivis ont déjà fait perdre beaucoup d'argent aux réalisateurs canadiens.
Ce manque de clarté a entraîné un manque de répartition des redevances de retransmission entre les producteurs et les auteurs dans notre propre pays—une injustice toujours présente. Si à l'avenir, le Canada applique des mesures concernant la copie pour usage privé ou d'autres mesures similaires visant à assurer des droits de rémunération pour l'utilisation sans autorisation d'oeuvres audiovisuelles, la reconnaissance légale du droit d'auteur pour le réalisateur et le scénariste à titre de coauteurs pourrait garantir qu'ils ne seront pas oubliés quand ils se prévaudront de leur droit à être payés.
Le fait de ne pas connaître l'auteur soulève deux questions. Comment délimiter la durée de protection de nombreuses oeuvres audiovisuelles au Canada. Notre loi stipule que dans le cas d'oeuvres cinématographiques auxquelles les dispositifs de la mise en scène ou les combinaisons des incidents représentés donnent un caractère dramatique, le droit d'auteur subsiste pendant la vie de l'auteur, puis jusqu'à la fin de la 50e année suivant celle de son décès. Sans connaître l'auteur, quelle est la durée de protection de son oeuvre?
Ces questions de paternité et de protection face aux changements constants de la technologie, ne peuvent être traitées simplement comme des arguments intellectuels ou comme si elles ne devaient intéresser que les grandes multinationales du divertissement. Les problèmes issus de ces questions deviennent de plus en plus pratiques. Par exemple, vous avez certainement appris que la MPAA, dirigée par le célèbre Jack Valenti, a interdit par crainte de piratage l'envoi de copies de films pour la prochaine remise des oscars. Ces copies de films, sous forme de bandes vidéo ou de plus en plus de DVD, sont envoyés à une multitude de gens qui peuvent voter pour une catégorie ou une autre. Ces copies sont souvent le seul moyen de visionner les petits films indépendants qui ne sont pas projetés dans les grandes salles de cinéma. Le nouveau film de Denys Arcand Les invasions barbares est considéré comme le film qui remportera l'oscar du meilleur film étranger. Mais si personne ne peut voir le film, personne ne votera pour le film.
Les problèmes dont nous parlons aujourd'hui ont un effet de ruissellement qui risque d'empêcher l'un des meilleurs réalisateurs canadiens d'obtenir une reconnaissance au niveau international—un oscar. Nous ne saurions trop insister sur les considérables répercussions économiques de cette mesure législative sur nos membres. On peut aussi se demander qui a droit aux droits moraux, une question qui préoccupe aussi un grand nombre de nos membres.
Au cours des trois dernières années, deux de nos réalisateurs ont vu leurs oeuvres modifiées une fois leurs projets terminés. Dans les deux cas, les réalisateurs jugeaient que les changements n'étaient pas fidèles à l'esprit de leurs oeuvres. Tous les deux ont utilisé un pseudonyme pour les oeuvres achevées de crainte que leur réputation en souffre. Dans les deux cas, ils n'ont eu aucun problème à le faire puisqu'ils n'étaient pas considérés comme les auteurs de leurs oeuvres.
Á (1115)
Mme Pamela Brand: Merci, Arden.
Il y a d'autres questions sur l'audiovisuel à ajouter à votre liste, en particulier la nécessité d'actualiser la définition de l'oeuvre cinématographique, un terme périmé du point de vue technologique et qui en plus est difficile à prononcer. C'est cependant une question très importante même si elle est technique.
Nous croyons que les industries cinématographique et télévisuelle devraient, avec l'aide du gouvernement, résoudre ces questions. Nous souhaitons voir le gouvernement leur accorder la priorité dans son programme.
Voilà ce que nous avions à dire. Merci de votre temps. Nous nous ferons un plaisir de répondre à vos questions.
Le président: Merci beaucoup, madame Brand et madame Ryshpan.
[Français]
Je voudrais maintenant céder la parole à Mme Alder, de l'Association des producteurs de films et de télévision du Québec.
Madame Alder.
Mme Mylène Alder (directrice générale adjointe, Association des producteurs de films et de télévision du Québec (APFTQ)): Merci à tous les membres du comité. Merci, monsieur le président, d'avoir invité l'Association des producteurs de films et de télévision du Québec à vous rencontrer ce matin.
À la demande de votre comité, l'APFTQ a procédé à l'examen d'un programme de réforme de la Loi sur le droit d'auteur recommandé par le gouvernement dans le document intitulé Stimuler la culture et l'innovation: Rapport sur les dispositions et l'applicationde la Loi sur le droit d'auteur. En fait, plus précisément, on a demandé à l'APFTQ, comme à tout autre organisme ici présent ce matin, d'évaluer l'exhaustivité de la liste des principaux problèmes répertoriés, les principes directeurs, le déroulement projeté ainsi que les délais d'exécution de cette réforme.
Je vous rappellerai brièvement que l'APFTQ regroupe plus de 120 entreprises indépendantes de production de cinéma et de télévision du Québec oeuvrant tant en français qu'en anglais dans les domaines de la dramatique, du documentaire, de la jeunesse, des variétés, du magazine, de l'animation et du film publicitaire. Les membres de l'APFTQ produisent la très grande majorité des productions canadiennes réalisées par des producteurs indépendants du Québec, ce qui représentait, en 2002-2003, quelque 860 millions de dollars.
L'APFTQ et ses membres oeuvrent dans un contexte législatif particulier puisqu'ils sont assujettis à une loi provinciale en matière de relations de travail, notamment dans le domaine du cinéma et de la télévision, à savoir la Loi sur le statut professionnel et les conditions d'engagement des artistes de la scène, du disque et du cinéma. Je le mentionne parce que cela implique certaines particularités. Dans ce contexte, l'APFTQ négocie des ententes collectives multipatronales avec les associations d'artistes et les syndicats de techniciens. Ces accords couvrent une centaine de postes d'artistes qui ont été reconnus en vertu de cette loi provinciale. La GCR et l'ACTRA, qui sont présentes ce matin, en sont des exemples. Une fois en vigueur, ces conventions doivent obligatoirement être respectées par les producteurs membres de l'APFTQ.
Le 15 septembre 2001, L'APFTQ a soumis au gouvernement un mémoire complet portant sur l'ensemble des modifications qu'elle souhaite voir apporter à la Loi sur le droit d'auteur. Les positions exprimées dans ce mémoire sont toujours valables et ont été résumées dans le document qui a été acheminé à votre comité en septembre dernier. Je crois que vous en avez tous reçu une copie. À titre de référence, j'ai annexé ce document au texte de mon allocution. Plusieurs propositions qui y sont énoncées répondent à des problèmes répertoriés dans le rapport du gouvernement, mais étant donné les limites de temps auxquelles nous sommes contraints ce matin, la présente allocution va se limiter aux problèmes que nous jugeons les plus importants et les plus urgents pour notre industrie. Je rappelle que même si nous ne les abordons pas ce matin, faute de temps, nous maintenons les autres points.
L'APFTQ partage l'avis du gouvernement selon lequel toute réforme de la Loi sur le droit d'auteur doit rechercher l'équilibre entre les deux principaux objectifs de cette dernière, à savoir, d'une part, offrir aux créateurs de contenu culturel une protection adéquate et, d'autre part, assurer aux Canadiens un accès approprié aux oeuvres. Par ailleurs, il nous semble également très approprié que le gouvernement ait ajouté un troisième objectif devant servir de principe directeur, soit celui d'agir comme un important levier pour encourager l'innovation, l'esprit d'entreprise et la réussite dans la nouvelle économie du savoir.
De même, il nous apparaît que l'objectif poursuivi par le gouvernement dans cette réforme visant à ce que la Loi sur le droit d'auteur demeure l'une des lois les plus modernes et les plus progressives du monde est parfaitement louable.
Cependant, nous ne pouvons nous empêcher de soulever une incohérence entre cet objectif et le constat suivant: le Canada est actuellement le seul pays occidental qui n'a pas encore clarifié la question de la titularité des droits d'auteur sur des oeuvres audiovisuelles. En effet, comme le souligne le gouvernement dans son rapport:
[...] la Loi n'identifie pas l'auteur d'une oeuvre cinématographique (c.-à-d. un film) et depuis longtemps la question consiste à savoir qui devrait être considéré comme l'auteur ou les auteurs d'une telle oeuvre (p. ex., le réalisateur, le producteur ou le scénariste). |
Et j'insiste sur le mot « longtemps ».
Du point de vue de l'industrie cinématographique et télévisuelle du Québec, la Loi sur le droit d'auteur du Canada n'en est pas une des plus modernes qui soit, puisqu'on se retrouve dans une situation où prévalent encore des conflits que les autres pays occidentaux ont réglés il y a plusieurs dizaines d'années.De tels conflits entraînent nécessairement des coûts importants pour les producteurs, en sus d'une certaine précarité des droits d'exploitation de nos productions dont les chaînes de titres demeurent, à toutes fins pratiques, aléatoires: feront l'objet de licence et/ou de cessions les droits d'auteur présumés exister par le producteur à défaut d'identification claire dans la loi.
Á (1120)
Dans son rapport, le gouvernement indique que:
Les détenteurs de droits veulent être assurés que les oeuvres seront protégées dans un environnement en ligne et que les utilisateurs demandent des règles claires et équitables, portant sur l'accès à Internet et l'utilisation de son contenu. |
Les questions fondamentales en ce qui concerne les productions cinématographiques et télévisuelles demeurent, toutefois: qui sont ces détenteurs de droits et à qui le contenu appartient-il? Ce qui est certain en ce qui nous concerne, c'est que les producteurs de productions audiovisuelles veulent s'assurer que celles-ci soient bel et bien protégées dans un environnement en ligne et qu'ils puissent conserver le contrôle de leurs exploitations dans un tel environnement.
En conséquence, au chapitre de la reconnaissance et de la protection des oeuvres et autres objets proposés dans le projet de réforme, il nous apparaît primordial que la question de la paternité des films et des vidéos soit abordée et que l'on en dispose dans un avenir très rapproché; j'entends par là la prochaine phase immédiate qui s'en vient. Une clarification à cet égard entraînera une amélioration notable de la situation qui prévaut actuellement dans notre industrie. L'élimination de l'incertitude existant autour de l'identité du ou des auteurs aura nécessairement des répercussions positives à l'échelle mondiale pour les producteurs, tant sur le plan économique que stratégique.
Sans pour autant se prononcer sur la détermination de l'identité du ou des auteurs d'une production audiovisuelle, et ce pour des motifs reliés au fait que l'APFTQ doit maintenir des relations de travail avec plus de 11 associations d'artistes et syndicats de par la loi, nous recommandons au gouvernement de prévoir à tout le moins un régime de droit voisin en faveur du producteur d'enregistrement de production audiovisuelle, qui soit assorti d'une présomption de cession de droit du ou des auteurs de celle-ci en faveur du producteur. Cette proposition a le mérite de ne pas trop s'interroger sur qui est l'auteur, mais par ailleurs, elle pallie les effets négatifs grandissants que présente la situation floue actuelle. La détermination de l'identité du ou des auteurs d'un film ou d'une production vidéo en vertu de la loi relève en ce moment d'une évaluation spécifique de l'apport créatif de toute personne ayant participé à cette production. Ce processus implique une certaine subjectivité puisque la détermination de ce qu'est un apport créatif demeure variable d'une personne à une autre. J'imagine que vous allez l'entendre, car tous les gens qui vont venir vous rencontrer dans le cadre de vos travaux vont vous dire qu'ils sont l'auteur. J'en passe, ce qui en dit long sur la subjectivité présente dans ce processus.
Une des principales conséquences de cette ambigüité, c'est la précarité de la chaîne de titres, comme on l'a mentionné. Imaginez si un producteur omettait, en toute bonne foi, d'obtenir des licences ou des cessions de droits d'une personne ayant participé à la production d'un film et qu'un tribunal reconnaissait par la suite cette personne comme co-auteur! Ce serait une catastrophe. C'est tout à fait réaliste de penser que cette situation peut se produire à l'heure actuelle. Seule une présomption de cession de droits en faveur du producteur enchâssée dans la Loi sur le droit d'auteur préviendrait ce genre de situation.
Par ailleurs, il faut souligner que les coûts liés à cette incertitude sont à toutes fins pratiques entièrement assumés par les producteurs qui obtiennent plus de droits que moins, qui paient donc plus que moins, afin de s'assurer de ne pas avoir ou d'avoir le moins possible de mauvaises surprises lors de l'exploitation de leurs oeuvres audiovisuelles.
La Loi sur le droit d'auteur a reconnu depuis plusieurs années des droits voisins aux producteurs d'enregistrements sonores. L'existence de ces droits, comme le souligne le rapport du gouvernement, et je cite:
[...] est liée à la reconnaissance de l'investissement et des efforts artistiques qui vont de pair avec la production d'un enregistrement. |
Or, cet investissement est en moyenne nettement inférieur aux investissements habituellement consentis dans la production cinématographique et télévisuelle.
Á (1125)
Ainsi, le coût moyen d'un enregistrement sonore, lors des trois dernières années au Québec, se chiffre approximativement à 60 000 $, selon les données que je viens d'obtenir de la SODEC, tandis qu'un budget moyen de long métrage au Québec se situait, en 2001-2002, autour de 3,4 millions de dollars. Au Canada, en 2002-2003, ce budget moyen était de 3,6 millions de dollars, selon le dernier rapport annuel de Téléfilm Canada. On parle donc ici d'investissements moyens six fois plus élevés que pour les enregistrements sonores. Pourtant, il n'y a actuellement aucun filet de protection pour les producteurs de productions audiovisuelles dans la loi, mais il y en a pour les productions d'enregistrements sonores.
En ce qui concerne l'urgence conséquente à la nouvelle réalité numérique, l'APFTQ constate que le gouvernement omet, dans son rapport, de préciser qu'elle s'étend aussi aux oeuvres cinématographiques et télévisuelles, et donc pas seulement, comme il est écrit, aux oeuvres littéraires, photographies, dessins, enregistrements sonores, clips vidéos et logiciels.
Comme Mme Brand de la Guilde canadienne des réalisateurs vient de vous rappeler d'ailleurs, on peut vraiment affirmer qu'aujourd'hui, la nouvelle réalité numérique affecte de plus en plus l'industrie du cinéma et de la télévision. ICrave TV, que ma collègue a mentionné tout à l'heure, JumpTV, où on a retransmis des signaux de radiodiffusion, et donc du contenu télévisuel via Internet, en sont quelques exemples.
Faut-il également souligner qu'il est possible, en ce moment même, de se procurer une copie de films tels que Les invasions barbares sur des sites web de téléchargement de type Kazaa.com ou Morpheus.com tout à fait gratuitement ou pour des sommes dérisoires allant de 1 $ à 2 $ par mois. Cette situation est sérieuse. Elle inquiète de plus en plus les titulaires de droits, puisqu'elle risque de compromettre le modèle d'exploitation en place dans notre industrie et peut potentiellement les priver de revenus importants.
En 2002, près de 20 p. 100 des adolescents du Québec admettaient télécharger des films via Internet, activité arrivant au 8e rang parmi les plus populaires sur Internet chez ce groupe d'âge. Au Canada, toujours en 2002, cette proportion a grimpé à 35 p. 100 des 12-24 ans. On peut penser que c'est déjà beaucoup plus que cela aujourd'hui, car la technologie évolue tellement vite en ce qui concerne la possibilité de télécharger des films; elle est plus avancée aujourd'hui qu'elle ne l'était l'année dernière. Donc, cela a certainement eu pour effet de renforcer ce phénomène. Autre statistique intéressante à ce chapitre, on note qu'en 2002, 50 p. 100 des foyers canadiens possédaient un lecteur DVD, alors que cette proportion n'était que de 1 p. 100 en 1998.
Cette nouvelle réalité technologique milite en faveur de l'instauration sans délai d'un régime de copie privée des enregistrements de productions audiovisuelles semblable à celui qui existe actuellement à l'égard des enregistrements sonores. L'absence d'un tel régime au Canada entraîne un manque à gagner important pour les producteurs, les auteurs et les artistes interprètes de ces oeuvres audiovisuelles. De plus, elle empêche les producteurs de percevoir des redevances dans plusieurs pays étrangers offrant de tels régimes en raison du principe de la réciprocité.
L'APFTQ attend depuis plusieurs années la clarification de la question de la titularité des droits d'auteur sur le film et la vidéo, ainsi que l'instauration d'un régime de copie privée en audiovisuel. Ces questions avaient été inscrites à l'agenda de la phase II de modifications à la Loi sur le droit d'auteur dans les années 1990 et elles avaient finalement été repoussées à la phase III.
Le cabinet de la ministre du Patrimoine canadien nous confirmait d'ailleurs, dans une lettre du 28 novembre 1997, que ces deux questions faisaient partie des éléments à considérer en vue de la prochaine étape de modifications à la loi, donc celle-ci, et non la suivante. Or, non seulement la question de la copie privée en audiovisuel n'est pas abordée directement dans le rapport du gouvernement, voici que la question de la titularité est encore une fois repoussée à une étape ultérieure, à savoir celle des travaux à moyen terme, dans deux à quatre ans.
Nous sommes profondément déçus de cette proposition et nous espérons que le gouvernement acceptera de maintenir sa promesse de régler ces questions lors de la prochaine phase de modifications.
L'APFTQ convient que les enjeux relatifs à l'ère numérique doivent être traités en priorité dans le programme de réforme. Toutefois, comment le gouvernement peut-il conclure que les questions reliées à l'accès et à l'utilisation éducative, impliquant l'adoption de nouvelles exceptions et l'élargissement des exceptions actuelles, sont des questions plus urgentes que celles liées à la titularité des droits sur un film ou une production vidéo, ou à tout le moins à l'assurance d'un minimum de protection aux producteurs de ces oeuvres? L'accès du public à ces oeuvres mérite-t-il plus d'empressement que la protection des droits des auteurs, y inclus ceux des producteurs qui les créent?
Á (1130)
En outre, nous constatons que la problématique entourant la titularité des droits sur les photographies apparaît en première phase de la réforme. En quoi est-ce plus urgent de régler cette question? Les conséquences économiques, qu'elles soient reliées aux sommes en jeu ou aux partenariats de production ou d'exploitation avec l'étranger, ainsi que le nombre de personnes touchées par cette problématique sont bien moins importants pour la photographie que pour le film ou la vidéo. D'ailleurs, il nous semble que ce débat est bien plus récent que celui prévalant dans le domaine de l'audiovisuel.
En conclusion, l'APFTQ est d'accord sur les grands principes directeurs énoncés par le gouvernement dans son projet de réforme du droit d'auteur. Cependant, nous constatons que la liste des principaux problèmes répertoriés n'est pas complète: il y manque le régime de copie privée en audiovisuel. De plus, le déroulement proposé dans le projet de réforme ne nous apparaît pas adéquat. Nous souhaitons vivement que la question de la titularité des droits sur l'oeuvre audiovisuelle, y compris l'adoption de droits voisins pour les producteurs et la présomption de cession de droits en leur faveur, fassent partie de la prochaine phase de modifications à la Loi sur le droit d'auteur. De même, l'instauration d'un régime de copie privée pour les oeuvres audiovisuelles devrait être envisagée à très court terme.
Plus on tarde à régler ces questions, plus les producteurs, auteurs et artistes interprètes perdent des revenus. L'APFTQ croit sincèrement que ces questions sont tout aussi urgentes, sinon plus, à régler que ne le sont celles liées à l'ère numérique dans laquelle sont dorénavant exploitées ces oeuvres. À quoi sert de régler le sort des utilisations si on ne détermine pas qui peut ou non les autoriser et qui va en bénéficier?
Je vous remercie.
Á (1135)
[Traduction]
Le président: Merci.
Monsieur Hennessy.
[Français]
M. Michael Hennessy (président intérimaire, Association canadienne de télévision par câble):
Merci, monsieur le président.
Je m'appelle Michael Hennessy et je suis président intérimaire de l'Association canadienne de télévision par câble. Gerald Kerr-Wilson est aujourd'hui à mes côtés; il est le vice-président des affaires juridiques de l'ACTC.
[Traduction]
Au nom de l'ACTC, je voudrais remercier M. Bourgault et le comité de nous recevoir cette semaine en dépit de leur emploi du temps déjà très chargé.
[Français]
L'ACTC est l'un des membres fondateurs de la Coalition pour un régime équilibré du droit d'auteur.
[Traduction]
Il y a, parmi les partenaires de la Coalition pour un régime équilibré du droit d'auteur, des défenseurs de l'intérêt public, des radiodiffuseurs, des entreprises de technologie et plusieurs éminents universitaires. Le secteur des communications, représenté par les associations ou les membres de la coalition, atteint un chiffre d'affaires de 45 milliards de dollars par an et emploie directement 95 000 Canadiens.
À ce stade précoce de l'examen du comité, vous avez demandé à des témoins de donner leur point de vue sur le processus de réforme de la Loi sur le droit d'auteur recommandés par le gouvernement, énoncé dans le rapport sur l'article 92.
En plus de la fourniture de services de télévision par câble à plus de 6 millions de foyers canadiens, les membres de l'Association canadienne de télévision par câble fournissent aussi des services d'accès à Internet à large bande à plus de deux millions de foyers à travers le pays. Ces réseaux forment l'ossature du programme de la connectivité du gouvernement et constituent les plates-formes qui fourniront tout un éventail de communications, de données et de services de divertissement à tous les Canadiens.
La réussite de l'industrie canadienne des FSI dans l'établissement de ces réseaux a été pour le moins remarquable. À la fin de l'année dernière, 85 p. 100 des Canadiens avaient accès à un service Internet à large bande et 28 p. 100 de tous les foyers canadiens étaient abonnés à un service Internet à large bande. En conséquence, le Canada se trouve au deuxième rang mondial, cédant seulement la place à la Corée du Sud pour ce qui est du taux de pénétration de l'accès Internet à large bande et les câblodistributeurs fournissent la majorité de ces connexions à large bande.
Cette raison est à l'origine du vif intérêt que porte notre industrie au processus de réforme du droit d'auteur qui reflétera les réalités de cet environnement numérique.
M. Gerald (Jay) Kerr-Wilson (vice-président, Affaires juridiques, Association canadienne de télévision par câble): Nous soutenons la décision du gouvernement de répartir le processus de réforme du droit d'auteur en trois phases : court, moyen et long termes. Nous acceptons, dans l'ensemble, la classification par le gouvernement des questions en trois catégories.
Le gouvernement a constaté justement que la réforme du droit d'auteur est par nécessité un processus continu; il n'est simplement pas productif d'essayer de résoudre simultanément toutes les questions possibles. Cependant, il est essentiel que celles qui sont inextricablement liées soient traités en même temps comme un groupe homogène.
Ainsi que l'a reconnu le gouvernement en développant sa phase à court terme de problèmes, nous ne pouvons modifier la Loi sur le droit d'auteur pour répondre aux exigences des traités de l'OMPI relatifs à Internet sans un traitement complet de la question sur la nécessité de limiter la responsabilité des FSI. Les limites de la responsabilité des FSI et la mise en oeuvre du traité de l'OMPI sont des éléments du projet numérique du droit d'auteur. L'adoption d'une mesure législative de mise en oeuvre de l'OMPI sans s'occuper en même temps des limites de la responsabilité des FSI mettrait de nombreuses entreprises existantes dans une situation précaire. Elle menacerait sérieusement le large déploiement continuel des réseaux à large bande au Canada. Nous pourrions perdre bon nombre de gains déjà acquis.
Le Canada n'est pas seul à avoir abouti à ces conclusions. Les deux seuls pays du G-7 ayant ratifié le traité de l'OMPI, les États-Unis et le Japon, ont incorporé dans leurs lois une règle d'exonération pour les FSI. L'Europe et l'Australie ont défini les limites de responsabilité des FSI avant même de ratifier les traités de l'OMPI. La Nouvelle-Zélande est en train de modifier sa législation et les limites de responsabilité des FSI font partie des propositions du gouvernement de ce pays. Les décideurs politiques de ces pays ont bien compris qu'il est tout à fait illogique de créer, en raison de l'ère numérique, de nouveaux droits qui exposent à des responsabilités de droit d'auteur pouvant entraver les réseaux de transmission nécessaires à la fourniture d'oeuvres numériques.
Le 23 octobre, le comité a adopté une motion demandant aux ministres du Patrimoine et de l'Industrie de préparer un avant-projet de loi concernant l'OMPI à être soumis à l'examen du comité avant le mois de février. En notre qualité de membres de la Coalition pour un régime équilibré du droit d'auteur, nous avons informé, par écrit, le comité et les ministres de nos préoccupations concernant cette motion. Nous sommes inquiets car la motion semble recommander au gouvernement la séparation de la mise en oeuvre de l'OMPI des autres questions à court terme demandant une mesure législative urgente. Comme nous avons essayé de l'expliquer, les questions issues de la mise en oeuvre de l'OMPI et la nécessité de limiter la responsabilité des FSI sont inextricablement liées.
Nous sommes aussi préoccupés car la motion semble donner l'impression que le Canada accuse du retard par rapport au reste du monde parce qu'il n'a pas encore ratifié les traités de l'OMPI qui ont été signés en 1997. Il est évident, toutefois, que loin d'accuser du retard, le Canada garde le pas avec la plupart des pays industrialisés.
Alors que 42 pays ont ratifié les deux traités, les États-Unis et le Japon sont les seuls deux pays du G-7 qui l'ont fait. Beaucoup d'autres pays sont des pays en voie de développement qui n'ont pratiquement pas de services Internet. En fait, plus de 100 pays partie à la Convention de Berne n'ont pas encore ratifié les deux traités relatifs à Internet.
Á (1140)
M. Michael Hennessy: La ratification des deux traités est un processus complexe et aura un impact étendu et profond sur un grand nombre de parties intéressées et sur le grand public.
Les gouvernements étrangers ont adopté une attitude prudente pour ne pas commettre d'erreurs. Ils essaient de répondre aux exigences des traités tout en maintenant un équilibre entre les titulaires de droits d'auteur, les utilisateurs de droits d'auteur et l'intérêt public. Il n'y a qu'à considérer les États-Unis et leur loi « Digital Millennium Copyright Act » pour comprendre les dangers de l'adoption d'une loi avant de comprendre entièrement toutes les questions et sans tenir compte des divers intérêts.
Le Canada a toutes les raisons d'être fier de ses réalisations dans l'adoption d'une nouvelle technologie et d'entrer le premier dans la nouvelle ère numérique et nous sommes fiers d'en faire partie. Notre réussite continuelle est due à un milieu de la réglementation stable et comportant des limites de responsabilité des FSI appropriées—une règle d'exonération.
La mise en oeuvre d'une mesure législative qui n'atteindrait pas ces objectifs imposerait, comme Jay l'a dit, des responsabilités entravantes obligations paralysantes aux FSI qui fournissent aux Canadiens l'accès au monde et, au monde l'accès au Canada, par le service Internet à large bande et par ligne commutée.
Je vous remercie.
Le président: Merci beaucoup, monsieur Hennessy et monsieur Kerr-Wilson.
Monsieur Thompson.
M. Ken Thompson (directeur, Politiques publiques et communications, Alliance of Canadian Cinema, Television and Radio Artists): Monsieur le président et membres du comité, bonjour.
L'Alliance of Canadian Cinema, Television and Radio Artists, ACTRA, qui représente 21 000 artistes professionnels canadiens travaillant dans les médias d'enregistrement en anglais au Canada vous remercie de lui donner l'occasion de présenter son point de vue au comité.
Cette année, l'ACTRA a célébré son 60e anniversaire. L'ACTRA est un ardent défenseur de la préservation et du renforcement de la culture et de la créativité canadiennes. L'ACTRA joue un rôle de premier plan dans les coalitions de promotion des programmes culturels canadiens et dans les organismes internationaux qui s'emploient à protéger la diversité culturelle dans une économie mondiale. L'ACTRA joue un rôle majeur dans la défense des droits des artistes dans le cadre de la réforme de la Loi sur le droit d'auteur au pays et à l'étranger.
Nous sommes très heureux de pouvoir participer aujourd'hui à ces consultations préliminaires traitant de la question importante du processus de réforme du gouvernement de la Loi sur le droit d'auteur visant essentiellement à protéger notre expression culturelle et notre identité nationale.
J'aimerais, avant d'aller plus loin, féliciter le comité pour la motion qu'il a faite jeudi dernier et faisant état des traités de l'OMPI et encourageant le gouvernement à présenter un avant-projet de loi. Les traités de l'OMPI ne constituent pas une fin en soi, mais ils sont un commencement. Ils créeront le fondement d'une loi sur le droit d'auteur à l'ère numérique au Canada.
Pour concrétiser nos promesses, les artistes doivent recevoir un rémunération appropriée à leur travail. Le système de droits d'auteur qui assure aux créateurs tant les droits économiques que moraux est essentiel à la poursuite de cet objectif. Le principe fondamental sur lequel l'ACTRA repose ses propositions concernant le droit d'auteur et les artistes se résume ainsi : puisque la représentation ajoute de la valeur à l'oeuvre artistique et peut donner vie et grandeur au scénario, l'oeuvre de l'artiste mérite donc d'être protégée par une loi sur le droit d'auteur.
Étant donné que le processus de réforme de la Loi sur le droit d'auteur du gouvernement, énoncé au chapitre 3 de «Un cadre de révision du droit d'auteur», relègue les droits de l'artiste à la troisième phase à long terme des modifications de la loi, nous craignons que les droits des artistes de l'audiovisuel continueront d'accuser du retard par rapport à ceux des autres artistes. Vu la rapidité des progrès technologiques dans nos industries et des effets qu'ont de tels changements sur notre capacité de protéger les artistes, l'absence de droits dans la prochaine phase du processus de réforme risque alors d'être fatale. Nous vous demandons de recommander l'inclusion des droits des artistes dans l'examen des questions portant sur les droits d'auteur dans le même regroupement que la protection des droits des auteurs et des oeuvres visuelles.
En l'absence d'une reconnaissance légale des droits des artistes, les syndicats canadiens sont passés par la négociation collective pour donner aux artistes de l'audiovisuel des droits équivalant aux protections des droits d'auteur dont jouissent leurs homologues dans d'autres pays. Dans le contexte actuel, l'ACTRA négocie et gère des accords avec tous les producteurs de médias importants au Canada pour le travail fait par les acteurs, les chanteurs, les danseurs, les animateurs, les présentateurs, les cascadeurs, les artistes de spectacles de variétés et d'autres artistes.
Les ententes conclues entre l'ACTRA et les producteurs instaurent des conditions de travail appropriées, des exigences contractuelles et un paiement minimum pour les membres de l'ACTRA. Les ententes importantes portent sur des films et des émissions de télévision des producteurs indépendants canadiens et de ceux qui filment des oeuvres étrangères au Canada, les développeurs des nouveaux médias, les producteurs de publicité télévisuelle et radiophonique, la société Radio-Canada, la CTV, CanWest Global et l'Office national du film du Canada.
Les ententes donnent aux producteurs le droit d'utiliser des présentations enregistrées dans des marchés définis au Canada et dans le monde à des périodes déterminées. Ils exigent le paiement de frais supplémentaires, sous forme de redevances fixes si l'oeuvre est utilisée à l'extérieur de ces marchés ou hors de ces périodes. Ces frais supplémentaires prennent en compte l'apport créatif et économique de l'artiste au film, aux émissions télévisuelles ou radiophoniques, à l'enregistrement sonore ou à une oeuvre de nouveau média. Les accords prennent également en compte les autres droits contractuels, que les artistes ont dans leur oeuvre, y compris les limites concernant les extraits, les montages ou les inclusions, dans de nouvelles émissions ou de nouveaux films, de la représentation enregistrée.
Afin d'appliquer les droits, l'ACTRA a négocié dans ces ententes la gestion des redevances des droits voisins fournis aux artistes, en vertu des lois canadiennes et étrangères, pour les oeuvres sonores; la société des droits de l'artiste-interprète de l'ACTRA a été créée en 1984. La société peut fonctionner, en toute légalité, comme une société de gestion et gérer sur une base collective les droits de ses membres.
Á (1145)
Durant de nombreuses années, ces accommodements ont bien fonctionné pour les artistes canadiens. Les grands radiodiffuseurs étaient responsables des productions audiovisuelles canadiennes. Il y avait très peu de distribution à l'extérieur du Canada, des marchés traditionnels du cinéma et de la télévision ou des magasins de musique et de vidéo. Les technologies utilisées pour produire, distribuer et diffuser les oeuvres étaient dispendieuses et encombrantes. L'ACTRA pouvait donc contrôler l'utilisation de ces oeuvres et, de manière générale, garantir l'application des dispositions contractuelles. En outre, les technologies nécessaires pour faire les copies de représentations enregistrées et permettre une manipulation facile des oeuvres n'étaient pas disponibles ou elles étaient au-dessus des moyens financiers du citoyen ordinaire.
Tout cela a changé considérablement au cours des 20 dernières années. Aujourd'hui, les producteurs indépendants créent le gros de la production au Canada, ils obtiennent le financement nécessaire au moyen de modèles fonctionnels et en créant des partenariats. En outre, les nouvelles technologies permettent de distribuer instantanément dans le monde les oeuvres sous forme numérique. N'importe qui, à l'aide d'un ordinateur ordinaire, peut reproduire parfaitement ces oeuvres et il est possible d'apporter aux oeuvres des changements que ne souhaitaient pas leurs créateurs.
En 1997, le gouvernement a modifié la Loi sur le droit d'auteur pour assurer aux artistes de l'audiovisuel un minimum de droits y compris celui de revendiquer une prestation contractuelle auprès d'une tierce partie utilisant les oeuvres. Mais ces modifications ont à peine posé des fondations visant la solution des cas les plus flagrants liés à ces profonds changements et ne se sont pas attaquées aux défis posés par les nouveaux médias et les communications numériques.
Avec la portée mondiale des communications numériques et des applications des nouveaux médias, il est de plus en plus difficile pour les artistes de ne compter que sur des dispositions contractuelles, sans des droits d'auteur sous-jacents, pour soutenir leurs contrats avec les producteurs des oeuvres visuelles. Non seulement les droits, reconnus dans le monde, des prestations dans des médias audiovisuels aideraient les artistes à percevoir des redevances de tierces parties, mais aussi leur permettraient de revendiquer la protection de leurs représentations fixées dans des médias audiovisuels contre le piratage et la manipulation non autorisée.
Les deux défis de l'application des nouveaux médias pour les prestations fixées dans des oeuvres audiovisuelles et de la facilité avec laquelle la technologie numérique peut être utilisée dans un but malveillant pour exproprier la créativité sans rémunération ni compensation ont incité à lutter pour un traité international portant sur les droits des artistes concernant leurs oeuvres audiovisuelles.
Le débat portant sur la création d'un tel traité international sur la protection des droits de l'artiste dans l'audiovisuel a commencé à la Convention de Rome en 1961 et continue aujourd'hui. L'Organisation mondiale de la propriété intellectuelle, OMPI, a tenu une conférence diplomatique en 2000 sur le thème des nouveaux droits des artistes travaillant dans les technologies numériques et les nouveaux médias. Malheureusement, bien que cette conférence diplomatique ait atteint un consensus sur 19 articles en négociation, le traité n'a pas été signé parce qu'il n'y a pas eu d'accord final sur le 20e article.
Le débat portant sur ce traité international doit recommencer la semaine prochaine lors de la réunion spéciale de l'assemblée générale de l'OMPI pour avancer les travaux vers un tel traité concernant la reconnaissance et la protection internationales des droits de l'artiste dans les films, les oeuvres audiovisuelles et les autres nouveaux médias.
Le changement de la réforme du gouvernement de la Loi sur le droit d'auteur vise à inclure les droits des artistes dans les oeuvres audiovisuelles au même titre que la protection des droits dans les oeuvres audiovisuelles des créateurs ne devrait pas être incompatible avec la participation permanente du Canada aux débats et aux négociations de l'OMPI visant un traité pour les droits des artistes dans leurs oeuvres audiovisuelles. Cette réunion importante de l'OMPI devrait revigorer le processus pour arriver à un traité international sur les droits des artistes dans leurs oeuvres audiovisuelles. Le Canada a toujours participé au processus de l'OMPI et a l'occasion de continuer son importante contribution à la prochaine séance.
L'ACTRA soutient que les développements ont atteint le stade où il est important d'achever un processus commencé il y a six ans et de donner un ensemble de droits aux artistes de l'audiovisuel. Cela créera un contexte juridique approprié pour la production, la distribution et l'exhibition actuelles des oeuvres audiovisuelles. Le regroupement des droits de l'artiste des oeuvres audiovisuelles et des autres questions faisant intervenir la production des droits des créateurs dans les oeuvres audiovisuelles atteindra les objectifs du gouvernement visant à offrir une plus grande protection des droits d'auteur et à assurer que la Loi sur le droit d'auteur demeure l'une des lois les plus modernes et les plus progressives du monde.
Á (1150)
L'exécution ou l'interprétation de l'artiste de spectacle fait partie intégrante de la création d'une oeuvre audiovisuelle; en conséquence, il est juste et nécessaire que les droits des artistes de spectacle en ce qui a trait aux oeuvres audiovisuelles soient pris en compte dans le cadre du même groupe que la protection des droits des créateurs à l'égard des oeuvres audiovisuelles, y compris les oeuvres multimédias. Nous soutenons que d'inclure dans ce groupe les droits des artistes du spectacle à l'égard de leur exécution ou interprétation correspond à l'ambition de la réforme gouvernementale « qui aborde les enjeux regroupés selon un thème commun à l'égard desquels il peut, de manière raisonnable et efficace, accomplir des travaux en vue de l'élaboration de la politique et apporter des modifications législatives, et ce de façon équilibrée, en procédant étape par étape. »
Nous demandons que vous recommandiez au gouvernement de modifier le programme de réforme du droit d'auteur de manière à inscrire les droits des artistes du spectacle à l'égard des oeuvres audiovisuelles à titre de point à l'ordre du jour regroupé avec les autres questions relatives au droit d'auteur à l'égard des oeuvres audiovisuelles, et que ce groupement soit placé à l'ordre du jour après les questions de mise en oeuvre du traité de l'OMPI sur le droit d'auteur et du traité de l'OMPI sur les interprétations et exécutions et les phonogrammes.
Je vous remercie d'avoir donné à l'ACTRA cette occasion d'exprimer ses préoccupations et de formuler ses recommandations à l'égard de ce qui nous apparaît être un processus très important. Je suis prêt à répondre à vos questions et j'ai hâte de participer à la discussion.
Á (1155)
Le président: Merci, monsieur Thompson. Nous allons maintenant passer aux questions.
Monsieur Lunney.
M. James Lunney (Nanaimo—Alberni, Alliance canadienne): Merci, monsieur le président.
Je voudrais remercier tous les intervenants d'être venus dialoguer avec nous. C'est évidemment un dossier très compliqué et très important pour beaucoup de Canadiens.
Pour commencer, j'aimerais vous poser une question. L'une des critiques adressées au gouvernement relativement à sa gestion du dossier du droit d'auteur, c'est qu'il semble que nous ayons deux ministres ayant compétence dans ce domaine. À votre avis, est-ce que le fait que le ministre du Patrimoine canadien et celui de l'Industrie aient tous les deux compétence dans ce dossier pose problème? Si vous le croyez, comment, à votre avis, faudrait-il résoudre le problème? Quelqu'un veut-il tenter de répondre à cela.
Le président: Monsieur Kerr-Wilson.
M. Gerald (Jay) Kerr-Wilson: Il y a probablement deux considérations dans la gestion du portefeuille du droit d'auteur, l'une pratique et l'autre philosophique. Sur le plan pratique, il est évidemment problématique d'avoir deux ministères et deux ministres qui s'efforcent de s'entendre sur les questions avant de légiférer. Donc, de ce point de vue, cela cause des délais et des tensions.
Cependant, du point de vue philosophique, cette division se trouve en fait à refléter l'équilibre qui est censé être instauré dans la Loi sur le droit d'auteur. Le ministère du Patrimoine a un mandat culturel et doit s'assurer que la loi reflète le besoin de préserver les oeuvres de création, tandis que le ministère de l'Industrie a en quelque sorte un mandat économique et industriel, étant chargé de préserver l'oeuvre en question, mais aussi de veiller à ce qu'on puisse y avoir accès et à résoudre les problèmes technologiques.
Les deux perspectives sont très importantes et je pense que nous détesterions perdre cette équilibre. Si, dans le but de rendre le processus de réforme du droit d'auteur plus efficient, on envisage de confier le portefeuille purement et simplement à l'un des deux ministères existants, je ne crois pas que ce soit la solution, parce que nous perdrions d'une manière ou d'une autre une perspective très importante.
Je sais qu'il y a eu au comité une discussion sur l'opportunité de ressusciter un ministère des Communications, pour que les deux perspectives soient rassemblées sous un même toit, dans un seul ministère et sous l'égide d'un seul ministre. Cela pourrait être une piste de solution.
Mme Pamela Brand: Je suis d'accord avec M. Wilson au sujet des difficultés d'ordre pratique. C'est très difficile de communiquer avec deux ministères distincts. Il y a discontinuité, ce qui retarde le processus.
Quant à l'argument qui a été soulevé au sujet des questions d'ordre économique et de la création proprement dite, nous ne croyons pas que ces deux aspects soient distincts et séparés. Ils sont liés, puisque l'un découle de l'autre. Nous croyons donc qu'il serait utile que les deux relèvent du même ministère.
Le président: Madame Alder.
[Français]
Mme Mylène Alder: J'abonde dans le même sens que Mme Brand. Ainsi, j'aimerais souligner le fait que dans le cas de l'APFTQ, la radiodiffusion relève du ministère de l'Industrie, alors que le droit d'auteur relève d'un autre. Fréquemment, des dossiers doivent prendre en compte les deux différentes lois. Or, il serait évidemment beaucoup plus pratique pour nous que ces deux éléments soient sous la responsabilité d'un seul et même ministère.
[Traduction]
Le président: Monsieur Lunney.
M. James Lunney: Merci.
M. Kerr-Wilson a proposé de rassembler le tout au sein d'un ministère séparé qui s'appellerait le ministère des Communications. Vous avez tous les deux proposé un seul ministère. Devrait-il s'agir de l'Industrie, du Patrimoine canadien, ou d'un nouveau ministère des Communications?
Mme Pamela Brand: L'une ou l'autre solution nous conviendrait. Un nouveau ministère des Communications serait très bien. Je ne choisirais pas entre le patrimoine et l'industrie, mais ce serait utile d'avoir un seul ministère.
M. James Lunney: Très bien. Merci.
Madame Alder, dans votre exposé, vous avez parlé explicitement du secteur audiovisuel et vous vous êtes demandé si l'auteur était le réalisateur, l'éditeur ou le scénariste. Vous avez déclaré que ces conflits ont été réglés il y a des dizaines d'années dans d'autres pays occidentaux.
Pouvez-vous nous donner des exemples de tels pays, ou bien s'agit-il des pays du G-7 que M. Kerr-Wilson a nommés, les États-Unis et le Japon? Si c'est le cas, pourriez-vous résumer à notre intention comment cette question a été résolue de manière satisfaisante?
[Français]
Mme Mylène Alder: Je n'ai pas la liste avec moi. J'ai un tableau qui résume un peu ce qui a été fait. Ce ne sont pas tout à fait les mêmes. Prenons la France, l'Angleterre et l'Allemagne. Dans ces pays, ces questions sont réglées. La proposition de l'APFTQ ressemble un peu à ce qui se fait en France. La loi française considère que divers intervenants sont des co-auteurs présumés de l'oeuvre. Elle prévoit un droit voisin pour des producteurs d'oeuvres audiovisuelles, et le producteur y jouit d'une présomption de droits cédés nécessaires à l'exploitation de l'oeuvre. Cet exemple est assez concret.
Dans d'autres cas, comme le mentionnait Mme Brand, on a reconnu que le réalisateur était l'auteur. Dans d'autres pays, on a dit que c'était le producteur. Il y a aussi les États-Unis--on n'a pas besoin d'aller très loin--où le processus juridique est un peu plus complexe. On peut dire néanmoins que le producteur, à toutes fins pratiques, y possède les droits. Il y a beaucoup de pays. J'ai déjà fait une remarque à ce sujet.
À l'APFTQ, nous trouvons d'ailleurs étrange que le Canada participe activement aux conférences diplomatiques de l'OMPI quand il y est question du domaine de l'audiovisuel. Le Canada est à peu près le seul pays qui n'a pas réglé cette question. Il est évident que la question des droits du producteur n'est jamais à l'ordre du jour, parce que ce n'est un problème pour personne, sauf pour le Canada. Lors de précédentes consultations, j'indiquais qu'il serait approprié qu'on règle cette question avant d'aller plus loin au niveau de l'OMPI. Si le comité le désire, je pourrai vous faire parvenir de mon bureau un tableau des différents pays occidentaux.
 (1200)
Le président: Oui, cela nous rendrait service. Pourriez-vous envoyer cela à notre greffier, s'il vous plaît?
Madame Gagnon, vous avez la parole.
Mme Christiane Gagnon (Québec, BQ): Merci. Ma question s'adresse à Mme Alder, de l'APFTQ.
Vous vous dites impatiente. Vous trouvez que le comité ne priorise pas la reconnaissance de droits voisins pour le producteur. Vous dites qu'il y a beaucoup de sommes d'argent en jeu. J'aimerais avoir un ordre de grandeur des sommes d'argent qui sont en jeu, parce qu'on n'a pas encore légiféré. C'est ma première question.
Ma deuxième question est la suivante. J'aimerais comprendre l'objectif de la cession de droits au producteur. Cela veut-il dire que les artistes et réalisateurs qui ont contribué à l'oeuvre seraient privés de leurs redevances sur le droit d'auteur? J'aimerais mieux comprendre. J'aimerais que vous m'expliquiez la notion de présomption de cession au producteur un peu plus en détail. Comment cette mesure est-elle perçue dans le milieu de la création?
Un peu plus tôt, M. Thompson parlait du droit de l'artiste, du droit du créateur. Je pense aussi que l'artiste, même si l'oeuvre vit et est vue, a le droit d'en retirer un bénéfice. Y aurait-il arrêt des redevances qui seraient dues aux artistes? Donnez-moi plus de précision.
Mme Mylène Alder: En ce qui concerne votre première question, je peux vous dire qu'on n'a pas fait faire une analyse mathématique pour le Québec comme tel, mais je peux vous mentionner qu'aux États-Unis, disons par rapport à l'avènement de l'ère numérique, la Motion Picture Association of America a procédé à un examen des revenus qui seraient perdus. Elle l'évalue à trois milliards $US, avec l'avènement de l'ère numérique. On est à plus petite échelle, bien sûr, mais la perte va très certainement être conséquente au volume qu'on fait. Je tiens à souligner qu'il y a quand même un volume de production très élevé au Québec et qu'en plus, nos produits sont populaires. Nos gens vont voir les films québécois. À la télévision, c'est ce qui est dans les palmarès. Ce sont donc des produits qui sont populaires et susceptibles d'êtres copiés, vus ou tout ce que vous voulez.
Pour ce qui est du manque à gagner, par exemple en ce qui a trait aux droits voisins sur la copie privée, dans beaucoup de pays européens, il y a un régime de copie privée en place. L'auteur peut y aller... Pour différentes raisons, surtout en vertu de l'application de la Convention de Berne, entre autres, les auteurs ont un traitement national et même si le Canada n'a pas de régime de copie privée, un auteur, si son oeuvre est diffusée dans un pays étranger où il y en a un, pourra aller chercher de l'argent. Un producteur ne peut pas le faire. Pour le producteur, parce qu'il n'est pas «nécessairement» reconnu auteur de l'oeuvre—je mets «nécessairement» entre guillemets parce que c'est une tout autre question—il faudrait que le Canada offre ce régime, parce que la plupart de ces pays-là vont l'offrir aux producteurs provenant de pays qui offrent la réciprocité à leurs ressortissants. C'est ce qui fait qu'on n'est pas capable, dans certains pays, d'aller chercher des sommes d'argent qui existent à l'heure actuelle. J'espère que cela répond à votre première question.
Pour ce qui est de la deuxième question, non, je ne le pense pas; ce n'est pas du tout l'intention de l'APFTQ de dépouiller de ses droits qui que ce soit. Je pense qu'à l'APFTQ, on a quand même une histoire qui plaide assez en faveur du respect des droits des auteurs. Je vous rappelais, un peu au début, le contexte législatif dans lequel on est. Nous avons plusieurs ententes collectives qui sont en vigueur actuellement, et je peux vous dire que nous avons des licences de nos scénaristes, avec un système de paiement de redevances. Du côté des réalisateurs, pour le moment, nous n'avons aucune entente en long métrage qui prévoit aussi le paiement de redevances, etc. Ce n'est pas pour défaire cela et refaire le monde.
Je vais vous donner un exemple bien précis de ce qui nous inquiète le plus. Admettons qu'un caméraman ou un directeur photo ait filmé et que le film gagne des prix pour la qualité de ses images. Il prétend qu'il devrait être co-auteur du film parce que c'est lui qui a fait toute la photographie, etc. En ce moment, le directeur photo est couvert par une entente de technicien. On n'a pas de clause de cession de droits comme telle. Souvent, des producteurs vont essayer d'évaluer, avant de produire, qui va avoir un apport créatif, ce qui constitue un sérieux problème parce qu'on ne sait pas encore comment cela va être produit. D'autres vont préférer ne pas prendre de risques et lui faire signer une cession de droits, par mesure de protection. Il y en a qui ne le font pas nécessairement et qui peuvent se retrouver avec un produit fini où une image prend une importance telle qu'il pourrait peut-être aspirer à se faire reconnaître un statut de co-auteur. C'est dans des cas comme ceux-là qu'on voudrait avoir cette présomption de cession de droits comme filet.
Dans le document que j'ai annexé à mon allocution, vous avez un résumé de notre gros mémoire.
 (1205)
Le président: Madame Alder, veuillez essayer d'être plus concise, s'il vous plaît, car on va manquer de temps.
Mme Mylène Alder: Oui, d'accord. Vous avez dans ce document les paramètres de la présomption de cette cession. En fait, c'est simplement pour reconnaître que le producteur bénéficie de suffisamment de droits pour faire une exploitation normale de l'oeuvre audiovisuelle. C'est tout simplement ça.
Mme Liza Frulla (Verdun—Saint-Henri—Saint-Paul—Pointe Saint-Charles, Lib.): Merci beaucoup d'être ici.
[Traduction]
Ma question s'adresse à M. Anderson ou M. Wilson.
Nous avons reçu une lettre de la Coalition pour un régime équilibré du droit d'auteur, dont vous êtes membre. La coalition s'inquiétait de la motion que nous avons adoptée la semaine dernière, dans laquelle nous demandons au ministère de déposer un projet de loi
[Français]
un avant-projet de loi,
[Traduction]
pour que nous puissions au moins l'examiner, expédier rapidement la première étape et mettre vraiment en vigueur le traité de l'OMPI.
Dans cette communication, on dit que les membres de la coalition sont vraiment inquiets de cette motion. Ils disent que nous visons à la fois les auteurs et les distributeurs. Pouvez-vous nous expliquer cela? Pourquoi s'inquiètent-ils de la motion
[Français]
que l'on a déposée la semaine dernière.
[Traduction]
Tout ce que nous voulons, après des années et des années de consultation et après avoir demandé à différents intervenants ce qu'il faudrait inscrire dans cette loi pour la moderniser... Nous sommes maintenant en 2003, presqu'en 2004, et le ministère a dit que nous aurons probablement un projet en 2004 ou au début de 2005. Nous trouvons que c'est bien tard, considérant la technologie qui existe. Je voudrais donc que vous nous en parliez.
 (1210)
M. Michael Hennessy: Pour commencer, nous n'avons aucune objection à cela en tant que tel. Je pense que votre argument est tout à fait raisonnable.
Ce qui nous inquiète, c'est que le ministère ayant à peine deux semaines pour présenter un plan général, il n'y aura rien sur la limitation de responsabilité ou la règle refuge. En fait, nous recherchons simplement une plus grande clarté dans ce processus, parce qu'en l'absence d'une telle règle, l'impact sur les fournisseurs de services Internet serait considérable. Nous serions alors le seul pays, parmi nos principaux partenaires commerciaux, qui n'aurait pas une telle règle.
Ce n'est pas qu'il y ait un problème comme tel dans votre motion demandant au ministère de répondre sans délai, mais nous demandons vraiment au comité de veiller tout simplement à transmettre au ministère le message que sa réponse doit englober la limitation de responsabilité.
[Français]
Mme Liza Frulla: Lorsqu'on regarde les phases...
[Traduction]
il y a des phases à court terme, à moyen terme et à long terme.
[Français]
Dans le court terme, on parle des enjeux liés aux traités, de la responsabilité des FSI quant à l'accès à l'éducation, à la photographie, etc. Ça, c'est le court terme.
Pour notre part, on trouvait que le moyen terme qui, lui, touchait tous les enjeux, à savoir la nouvelle technologie, l'oeuvre audiovisuelle, la gestion collective du droit d'auteur, la durée de la protection, était vraiment au coeur du débat. Êtes-vous d'accord là-dessus? Notre crainte, en ce qui concerne le moyen terme, c'est que si on ne pouvait pas fournir le court terme avant la fin de 2004, on n'en voyait pas la fin. Alors, il me semble qu'il y a un urgent besoin pour tout le monde, autant pour les FSI que pour les producteurs ou les auteurs, d'avoir une loi qui serait, je pense, plus moderne, moins complexe et qui nous permettrait aussi d'appliquer les traités, tels que la plupart des pays le font actuellement.
Autrement dit, est-ce qu'on prend trop de temps ou pas assez? Est-ce qu'on vous a assez consultés ou pas assez? Est-ce que les FSI, finalement, peuvent trouver leur part à l'intérieur de cela? Est-ce qu'on peut le faire dans des délais normaux, et non pas dans des délais qui, pour nous, apparaissent non seulement anormaux, mais aussi dangereux?
[Traduction]
Le président: Monsieur Kerr-Wilson.
M. Gerald (Jay) Kerr-Wilson: Pour revenir brièvement sur les observations faites par M. Hennessy, nous craignons que les ministères prennent la motion à la lettre et se concentrent exclusivement sur les modifications nécessaires pour mettre en oeuvre l'OMPI. Vous pouvez légiférer de manière à vous permettre de ratifier l'OMPI, mais sans aborder aucune des autres questions à court terme. Comme la motion traite exclusivement de la mise en oeuvre de l'OMPI, nous craignons que pour respecter le délai, les ministères fassent le strict minimum nécessaire pour obtenir la mise en oeuvre de l'OMPI, et ne s'attaquent pas globalement à la responsabilité des FSI et à certaines autres questions à court terme qui sont également liées et qu'il faut régler.
Donc, si la réponse est que le 10 février, nous aurons un ensemble complet de modifications législatives traitant de toutes les questions, alors nous n'avons aucune inquiétude. Notre problème, c'est que si l'on nous présente à cette date la moitié d'un projet de loi qui traite uniquement du strict minimum, nous ignorons ce qu'il adviendra des autres questions à court terme. Nous avons en quelque sorte créé un quatrième niveau.
Nous demandons que l'on précise bien que le comité veut que les ministères s'attaquent à l'ensemble de la problématique identifiée à court terme et mettent en discussion toutes les questions afin d'avoir un débat éclairé.
Mme Liza Frulla: Mais brièvement, estimez-vous que vous avez été suffisamment consulté?
 (1215)
Le président: Très bien, estimez-vous que nous avons consulté suffisamment?
M. Gerald (Jay) Kerr-Wilson: Je crois qu'il y a eu une consultation très poussée en 2001. Nous avons certainement eu toutes les occasions voulues de faire connaître notre point de vue. Nous aimerions avoir l'occasion d'être consultés sur la forme du projet de loi. Nous avons eu un bon débat sur la politique. Nous aimerions également qu'on présente un projet de loi, mais il faudrait qu'il aborde toutes les questions, pas seulement la moitié d'entre elles.
Le président: Pour être bien clair, si un projet de loi ou un avant-projet de loi est rédigé, notre comité en sera évidemment saisi et l'examinera à fond. Nous ne pouvons pas prendre d'engagement à cet égard parce que c'est évidemment tout un processus.
Le président: Madame Lill.
Pardon, c'est le tour de M. Bonwick.
M. Paul Bonwick (Simcoe—Grey, Lib.): Merci, monsieur le président.
Normalement, je dirais les femmes d'abord, Wendy, mais cette fois-ci, je vais saisir mon tour.
Premièrement, je vais traiter des allégations faites dans la lettre de l'Association de la télévision par câble, ou plutôt dans la lettre de la coalition sur le droit d'auteur, et je dois dire qu'il y a deux ou trois choses qui ont échappé aux auteurs de cette lettre. J'attire votre attention sur le mot « ébauche ». Nous mettons en place un échéancier et, au cours des trois prochains mois, le ministère va déposer une ébauche ou un avant-projet de loi. En supposant que nous serons saisis d'un avant-projet de loi, les intervenants ainsi que les membres du comité auront l'occasion d'en prendre connaissance et de vérifier que le projet est suffisamment complet. Nous ne demandons pas un texte de loi définitif dont on ferait l'étude article par article le 10 février.
Je dirai également que vos paroles sont très différentes de votre lettre. Je suis déçu, très franchement, parce qu'il semble bien que nous soyons loin d'inspirer confiance à l'Association de télévision par câble. À titre de signataire de cette lettre, vous dites clairement que vous ne faites pas confiance au ministère ou au comité, que vous ne croyez pas que nous soyons capables de juger si le texte est suffisamment complet.
Je vais citer certains passages de votre lettre et les comparer à ce que vous dites ici devant le comité. Je cite :
La motion du comité nous inquiète énormément. La motion pourrait déboucher sur un avant-projet de loi qui ne traite pas globalement... |
Je pense que le comité est pleinement conscient de la complexité du dossier, mais nous reconnaissons également que nous devons nous retrousser les manches et commencer à étudier des ébauches quelconques. Nous avons l'occasion au cours des trois prochains mois, et assurément au cours des trois mois après février, d'examiner tout cela d'une manière globale. Je me dois de supposer que si les questions relatives à la responsabilité des FSI ne sont pas abordées dans le projet qui nous sera proposé, le comité insistera pour que le ministère remette le projet en chantier.
Quant à savoir s'il eut fallu que la motion soit plus détaillée, peut-être que nous aurions pu y préciser cela, mais on suppose que cela va sans dire.
Nous ne voyons pas la ratification de manière cloisonnée; je pense que nous devons procéder selon les priorités. Je voudrais également tirer au clair deux ou trois autres commentaires que vous avez faits, quand vous dites que le comité a peut-être une idée fausse sur l'identité de ceux qui ratifient et de ceux qui ne ratifient pas. De dire que la plupart des autres pays industrialisés n'ont pas ratifié, ne ratifient pas, ou sont alignés, c'est clairement inexact. Les États-Unis ont ratifié en 2000-2001, et le Japon a suivi à peu près le même échéancier.
Il vaut également la peine de signaler que quand nous avons demandé de l'information à nos recherchistes, ils nous ont dit que l'Angleterre, l'Italie, le Danemark, l'Allemagne, la Grèce et la France—je considère que ce sont là des pays industrialisés—ont apporté les modifications nécessaires et sont maintenant en mesure de ratifier. Ils attendent simplement que le reste de l'UE ait complété le processus. Je pense que nous devons reconnaître que le Canada a du retard par rapport aux autres pays.
J'aimerais vous poser une question, monsieur Thompson. D'après l'échéancier qui nous a été remis il y a quelques semaines par le ministère, quelles seraient les répercussions pour l'industrie si—et c'est une hypothèse très raisonnable—nous n'imposions aucune échéance pour la ratification et si celle-ci avait lieu vers le printemps 2005, ou plus probablement à l'automne 2005? Ce serait donc dans deux ans. Pouvez-vous me donner une idée là-dessus?
M. Ken Thompson: Cela fait maintenant plus de 12 ans que je m'occupe de droit d'auteur, de ratification et d'adhésion aux traités internationaux. Je sais que la première ronde de modifications—et je m'excuse de vous faire une longue réponse, mais c'est un long processus—à la Loi sur le droit d'auteur a commencé en 1988. Je pense qu'on avait dit en fait qu'il y aurait une deuxième étape dans les six mois. Mais nous n'en avons pas vu la trace pendant près de 10 ans, parce que c'est très difficile de changer notre loi pour l'aligner sur la technologie moderne, pour qu'elle cadre avec l'inconnu, dans bien des cas. Néanmoins, nous avons eu amplement le temps d'en discuter. Les consultations ont commencé dès 1998, date à laquelle le gouvernement a publié un document de discussion.
Je pense donc que la motion adoptée par le comité est courageuse. Quant aux conséquences pour l'industrie, il n'y a aucun droit régissant par exemple les relations entre les artistes du spectacle et les producteurs. En fait, ces relations ne s'étendent pas à l'ensemble du monde. Elles ne s'appliquent pas réellement à quiconque se situe à l'extérieur de ces ententes. Il y a donc une foule de possibilités d'abus des droits des artistes du spectacle, de leurs droits contractuels, ce qui veut dire qu'ils ne sont pas payés. Cela revêt une grande importance pour nous.
Il y a toute une gamme de nouvelles utilisations des interprétations et exécutions dans le monde de l'audiovisuel, y compris pour les jeux d'ordinateur, pour lesquels les artistes ne sont pas suffisamment rémunérés. Il y a des intérêts financiers considérables en jeu dans cette affaire, et cela simplement pour ce qui est des artistes de studio d'enregistrement. Et cela s'applique à tous les créateurs. Il nous faut une certitude—voilà ma réponse.
 (1220)
Le président: Très bien.
Madame Lill.
Mme Wendy Lill (Dartmouth, NPD): Merci.
Je suis vraiment d'accord avec l'idée qu'il faut étudier ensemble les droits des interprètes et exécutants et ceux des auteurs. Ce sont tous des gens qui participent à une production, et cela m'apparaît logique.
Je m'intéresse à la plomberie, pour ainsi dire, de toute cette affaire. Il a été question de la gestion des droits collectifs et de la manière dont tout cela fonctionne. Cela semble très bien fonctionner dans le cas du droit d'auteur applicable à l'oeuvre d'un auteur individuel. Quand il s'agit de productions audiovisuelles, ce sont des créations collectives et toute la problématique devient beaucoup plus complexe.
Je me demande si quelqu'un ici présent pourrait me donner une formule très simple. Depuis deux ans, nous essayons de résoudre l'équation du contenu canadien. Je sais que c'est très complexe, mais comment envisagez-vous cela? Est-ce que c'est aussi simple que de préciser ce qu'un exécutant peut mettre par écrit avant le début d'une production? Est-ce ainsi qu'ils finissent par toucher leur pourcentage de la propriété? Est-ce que les producteurs et les agents négocient ferme pour établir un contrat? Ou bien voudriez-vous que ce soit écrit noir sur blanc, quant au niveau de participation à une oeuvre donnée?
M. Ken Thompson: Avant que les réalisateurs et les producteurs répondent à cette question, je vais mettre mon grain de sel.
Je ne pense pas que d'ajouter de nouveaux droits dans la Loi sur le droit d'auteur relativement aux interprétations audiovisuelles dans le cas des artistes du spectacle fera la moindre différence quant au processus que l'ACTRA applique dans le cadre des arrangements contractuels. Cela établit une structure sur laquelle ces ententes collectives peuvent actuellement être établies.
Il y a un problème technologique que nous devons résoudre. Par exemple, dans l'industrie des jeux, nous avons ce que l'on appelle la capture du mouvement. Un exemple concret de capture du mouvement est le personnage du Gollum dans le film Le Seigneur des anneaux. En fait, c'est un acteur qui a joué ce rôle, mais tous ses mouvements ont été saisis numériquement et superposés à une créature dessinée. Voilà, en bref, en quoi consiste la capture du mouvement. L'acteur qui a fait cela mérite d'être rémunéré.
Dans l'industrie des jeux, par exemple, une capture du mouvement peut se faire au Canada, tandis que les programmeurs se trouvent à Singapour, en Asie du Sud-Est ou en Inde, et le produit fini est réalisé en France. Il nous faut une structure du droit d'auteur qui serve de cadre à l'ensemble des arrangements contractuels. Tout cela est parfaitement logique.
Les créateurs et les producteurs ont des droits d'auteur qui sont le pilier de leurs entreprises, et les exécutants ou interprètes ont des droits audio et une structure qui défend leurs intérêts commerciaux. Il semble simplement absurde que cela ne s'étende pas aux interprètes et exécutants dans le monde de l'audiovisuel. Il y a un très bon cadre dont on peut s'inspirer pour cela.
 (1225)
[Français]
Mme Mylène Alder: Pour répondre à votre question et compléter celle de M. Thompson, j'aimerais préciser qu'au Québec, la situation est un peu différente. Comme je le disais plus tôt, les ententes collectives que l'APFTQ a conclues avec l'ACTRA doivent obligatoirement être utilisées par nos membres. Elles prévoient des droits à la rémunération, qu'on appelle des droits de suite, qui sont afférents à différents types d'utilisation. Ainsi, quelqu'un qui veut diffuser une production sur une chaîne spécialisée, que ce soit dans cinq ou dix ans, doit payer des droits qui vont de pair avec cette utilisation.
Cela dit, nos ententes collectives, tant avec l'UDA qu'avec l'ACTRA, incluent des clauses en vertu desquelles des utilisations non prévues doivent faire l'objet d'une entente avec l'ACTRA, quand les choses se passent en anglais, ou avec l'UDA, quand elles se passent en français. Il est donc faux de dire qu'on pourrait, dans certaines situations, ne rien demander ou ne rien payer à qui que ce soit. On ne peut pas faire cela. On est tenus de respecter les règles.
Pour ce qui est de l'assise légale, je veux mentionner que le droit à l'image en est un qui est très fort au Québec. Je peux parler de la législation québécoise, qui est celle que je connais le plus. Ainsi, en vertu de cette législation, on ne peut pas exploiter l'image d'un comédien de diverses façons sans l'autorisation de ce dernier. C'est un élément que le comité devrait peut-être prendre en considération.
[Traduction]
Le président: Madame Brand.
Mme Pamela Brand: Je veux simplement ajouter qu'à la Guilde canadienne des réalisateurs, nous avons également des contrats avec l'APFTQ et l'ACCT, mais le manque de clarté de la loi sur la définition de l'auteur nous rend la vie très difficile. Nous devons établir notre compétence dans de nombreux pays dans le monde. Nous percevons des droits, fondés sur la législation européenne, mais nous avons d'énormes difficultés, surtout dans des pays comme l'Allemagne, parce qu'aux yeux de la loi canadienne, les réalisateurs ne sont pas reconnus comme des auteurs ou des co-auteurs—ce qui est notre position—dans le cas des oeuvres audiovisuelles. Les réalisateurs membres de notre Guilde ont perdu des millions de dollars au cours des dernières années à cause de cela.
Cela s'applique tout particulièrement aux droits de retransmission. À cause de l'absence d'une loi sur la paternité des oeuvres qui reconnaît qui est l'auteur d'une oeuvre, et de l'absence de clarté, nous ne pouvons pas percevoir de droits de retransmission en Europe pour les réalisateurs canadiens. Il s'agit d'une question très sérieuse.
Le président: Monsieur Schellenberger.
M. Gary Schellenberger (Perth—Middlesex, PC): Merci.
Il y a des choses avec lesquelles je suis d'accord et il y a des choses qui me laissent perplexe. J'ai quelques questions et je ne sais pas qui pourra y répondre.
Concernant le traité de l'OMPI, si nous ratifions un traité ou si nous entreprenons des discussions en vue de ratifier un tel traité, combien d'années pensez-vous faudra-t-il avant que ces choses entrent en vigueur? Si c'est depuis 1997, cela fait déjà un bon bout de temps, surtout à l'ère du numérique où les choses changent du jour au lendemain sans se conformer à bon nombre des suggestions qui se trouvaient ici. Peut-être que ce serait une bonne chose si nous avions un peu de cela dans ce dernier.
Je regarde les témoins qui sont devant nous aujourd'hui. S'il y a deux ministères qui s'occupent des droits d'auteur, devrez-vous refaire cet exposé devant le ministère de l'Industrie? Toutes ces choses prennent du temps. Je me demande si toute cette question ne devrait pas relever d'un seul ministère.
Encore une fois, la plus grande partie du problème est de nature numérique. Si nous en étions encore à l'âge des ténèbres, nous pourrions suivre. Alors, ces choses doivent être faites de manière rapide. Je pense qu'il est très important que nous ayons quelque chose à ce sujet dans l'avant-projet de loi que le comité a demandé. Nous devrions au moins avoir quelque chose pour pouvoir dire : « C'est l'article 6 qui ne marche pas ici. » Je peux très certainement comprendre une telle chose.
J'ai fait partie d'un gouvernement municipal pendant 12 ans et je sais combien les choses peuvent prendre du temps parfois, comme on vient juste de l'expliquer—10 et 12 ans pour que les choses se fassent. Dans notre compétence, la règle, c'était que nous étions censés revoir notre plan officiel tous les cinq ans. Lorsque je faisais partie du conseil, nous avons commencé un plan officiel. Le projet était là, et il nous a fallu huit ans pour le mettre en oeuvre—nous avons dépassé les cinq ans.
Comme l'a dit M. Bonwick, nous avons demandé cet avant-projet de loi. Ce n'est pas une fin en soi, mais cela donne au comité quelque chose à étudier. Encore une fois, cet avant-projet de loi pourrait être examiné par le Comité de l'industrie, et peut-être que les choses pourraient aller plus vite.
Ne pensez-vous pas qu'un avant-projet de loi serait une bonne chose, et en temps opportun, nous pourrions être en mesure de l'examiner et de mettre en oeuvre plus rapidement toutes les choses que vous demandez?
 (1230)
M. Ken Thompson: Il ne fait aucun doute qu'un avant-projet de loi s'impose.
Juste pour vous informer, les traités de l'OMPI ne sont pas quelque chose de nouveau qui est apparu soudainement sur la table. On en parle depuis 1993, année où les discussions ont commencé à Genève sur ces traités et sur les principes, dont la responsabilité des FSI, bien que cela ne fasse pas partie du traité. Il est plus que temps d'avoir un avant-projet de loi maintenant.
Le président: Monsieur , vous pouvez poser une autre question.
M. Gary Schellenberger: Je n'ai pas vraiment d'autres questions. Je remercie les témoins d'être venus ici aujourd'hui. J'aime me tenir au courant de ce qui se passe dans certains de ces comités. Je suis arrivé à mi-chemin parce que j'étais occupé à autre chose, alors je vous remercie de vos exposés aujourd'hui. Merci.
Le président: Merci, monsieur .
Madame Allard.
[Français]
Mme Carole-Marie Allard (Laval-Est, Lib.): Je vous remercie d'être ici ce matin.
[Traduction]
Je pose ma question à M. Hennessy.
Je comprends que la question de la responsabilité est capitale pour votre industrie et j'ai été étonnée de lire dans votre document qu'il y a 70 000 plaintes liées à la violation du droit d'auteur chaque année, en plus des milliers de plaintes liées au contenu reçues chaque jour.
Je comprends pourquoi vous avez fait de la question des fournisseur de service Internet un enjeu à court terme, parce que je pense que cela doit constituer un fardeau très lourd pour votre industrie. Votre industrie, c'est d'être un fournisseur de service Internet, et, comme vous le dites, vous ne voulez pas devenir une cible facile. Vous ne voulez pas être responsable alors que, principalement, vous ne faites que fournir un accès, héberger et assurer des services de transmission, si je comprends bien.
Je comprends également que certains intervenants ont également trouvé votre industrie. La affirme que les fournisseurs de service Internet devraient être responsables de la communication d'oeuvres protégées par les droits d'auteur sur l'Internet. Je crois également savoir que la Cour suprême du Canada est censée se prononcer sur cette question.
Alors, lorsque vous proposez de modifier l'article 2.4 de la Loi sur les droits d'auteur pour qu'elle soit plus précise en ce qui concerne les fournisseurs de service Internet, est-ce que vous prenez en compte la décision que pourrait rendre prochainement la Cour suprême sur cette question?
M. Michael Hennessy: Pour revenir en arrière, ce que nous demandons précisément, c'est que cela soit enchâssé comme l'exception dite des entreprises de télécommunications dans la Loi sur les droits d'auteur et dans toute la législation, qu'elle soit adoptée ou proposée par nos principaux partenaires commerciaux de l'Union Européenne, les États-Unis, l'Australie et ce qui se fait actuellement en Nouvelle-Zélande. Le problème, c'est que bien que l'industrie des FSI soit une cible facile, parce qu'elle est considérée comme le goulot d'étranglement dans le vieux sens des télécommunications, la réalité, c'est qu'il y a des milliards de bits d'information qui circulent dans un sens et dans l'autre.
Si vous prenez l'exemple de la transmission de pièces musicales de personne à personne, vous avez des cas où des gens assurent un service depuis une île éloignée du Pacifique sud ou au beau milieu d'un camp de réfugiés palestinien. Il est très difficile pour nous d'examiner un paquet qui peut contenir une image, une partie d'un film, ou un courriel ou quoi que ce soit d'autre, et de distinguer cela parmi des milliards de bits d'information. Alors, bien qu'il semble s'agir d'une cible facile, ce serait quelque chose d'impossible à mettre en application. Avec les coûts qu'une telle surveillance suppose et avec la responsabilité à long terme, cela ne fonctionnerait tout simplement pas.
La question qui est devant la cour est en réalité une question très limitée, à savoir si la mise en antémémoire devrait comporter les mêmes exceptions que l'hébergement et la transmission. Puisqu'il est avocat, Jay peut probablement parler de cette question de manière plus détaillée, mais d'une façon ou d'une autre, je ne pense pas que cela règle la question fondamentale.
 (1235)
M. Gerald (Jay) Kerr-Wilson: La question qui est devant la Cour suprême se limite à un tarif proposé par la , et quelle que soit la décision rendue, il est certain qu'elle aura des répercussions énormes pour notre industrie. Mais peu importe quelle sera sa décision, la nécessité d'avoir des limites sur la responsabilité des FSI est beaucoup plus vaste. Elle ne concerne pas uniquement la et les droits de la ; elle touche la responsabilité face à la gamme complète des oeuvres de création, et toute la gamme des accès limités de l'article 3.
Mme Carole-Marie Allard: Si je vous comprends bien, vous parlez de l'urgence de modifier l'article 2.4 pour inclure les fournisseurs de service Internet, parce qu'à l'heure actuelle, il y a un vide juridique qui pourrait vous causer un tort immense.
M. Gerald (Jay) Kerr-Wilson: La Commission du droit d'auteur a jugé que l'alinéa 2.4(1)b) s'appliquait à nous dans nos activités, et la Cour fédérale d'appel est d'accord avec les deux tiers de cette décision. Nous ne savons pas ce que la Cour suprême en dira, mais nous pensons que la clarté est une bonne chose pour tout le monde. Il serait préférable de clarifier la loi, comme on l'a fait dans d'autres pays, pour préciser les activités qui seraient assujetties à l'exception et les conditions faisant en sorte que l'on puisse se fier aux limites.
Mme Carole-Marie Allard: Vous proposez également un régime d'émission d'avis. Vous semblez avoir discuté de ce régime avec d'autres partenaires. Vous semblez prêts à mettre en application ce régime. Ai-je raison de penser que vous êtes prêts à ce que la loi mette rapidement ce régime en application?
M. Gerald (Jay) Kerr-Wilson: Nous pratiquons l'émission d'avis sur une base volontaire maintenant. Même si la loi n'a pas été modifiée, l'industrie canadienne des FSI—et non seulement les membres de l'ACTC, mais également les membres de l'ACFI et Bell—procède maintenant à l'émission d'avis dans le cadre de son processus. Ainsi, si cette question n'était pas incorporée dans la législation, ce serait bien.
Mme Carole-Marie Allard: Puis-je poser une autre question?
[Français]
Le président: On va refaire un tour, madame Allard. Pour le moment, on va donner une chance à M. Abbott.
[Traduction]
Monsieur Abbott.
M. Jim Abbott (Kootenay—Columbia, Alliance canadienne): Merci beaucoup.
Évidemment, un des problèmes avec la Loi sur le droit d'auteur, c'est que sa mise en application dépend du jugement de la Commission du droit d'auteur et lorsqu'il y a désaccord, il n'est pas rare de se retrouver devant un tribunal.
Je pense que la question que j'aimerais poser à tout le monde, si vous désirez y répondre, est la suivante : à votre avis, est-ce qu'il faudrait élaborer des principes directeurs pour accompagner la Loi sur le droit d'auteur et est-ce que ces principes directeurs devraient figurer dans le préambule de toute révision?
L'avantage de procéder ainsi, c'est que cela donnerait une meilleure direction à la Commission du droit d'auteur ainsi qu'aux tribunaux en ce qui a trait à l'intention de la loi. L'inconvénient, c'est que pour élaborer ces principes directeurs, je peux imaginer qu'il y aura beaucoup de querelles. Alors, est-ce que toutes ces querelles pour en arriver à ce point en valent la peine et est-ce que cela constituerait une modification utile à apporter à la loi sur le droit d'auteur avant que nous nous mettions effectivement à étudier les détails de cette loi?
 (1240)
Le président: Madame Brand.
Mme Pamela Brand: Des principes directeurs sont toujours utiles, pour les raisons que vous avez données. Je ne suis pas certaine qu'il y aurait autant de querelles. Évidemment, il y en aura, parce qu'il s'agit de principes directeurs et qu'il faut aller dans les détails. C'est là que nous aurions ces querelles, mais des principes directeurs seraient certainement très utiles. Cependant, s'ils devaient entraîner un délai dans la mise en application, nous préférerions ne pas en avoir.
[Français]
Le président: Vous êtes d'accord, madame Alder?
Mme Mylène Alder: Oui, passablement.
[Traduction]
Le président: Monsieur Hennessy, voulez-vous dire quelque chose?
M. Michael Hennessy: Je pense qu'il s'agit d'un couteau à deux tranchants. Je pense à l'article 3 de la Loi sur la radiodiffusion qui comporte de nombreux principes directeurs. Lorsque vous vous présentez devant le régulateur, presque tout le monde peut prétendre que sa position est fondée sur un objectif quelconque de la loi. Ainsi, lorsqu'on tente d'élaborer des principes directeurs, on a tendance à aboutir avec une longue liste d'intérêts, que ce soient les nôtres ou ceux de quelqu'un d'autre, qui veulent que leurs principes soient enchâssés dans la législation.
En même temps, si vous n'élaborez pas trop et que vous exprimez la nécessité d'un équilibre qui reconnaît les droits des artistes, des producteurs et de tout le monde dans la chaîne de production, il pourrait y avoir un certain avantage. Mais je pense que je reviendrai sur l'idée que ce que nous essayons de faire ici, c'est d'avoir une loi équilibrée, plus tôt que plus tard, et que cela devrait probablement demeurer l'objectif principal.
Le président: Merci.
Monsieur Thompson, brièvement.
M. Ken Thompson: Les principes directeurs pourraient être utiles à titre de paragraphes d'introduction à la Loi sur le droit d'auteur, juste pour que les gens sachent de quoi il retourne. Je pourrais également dire que sur une période d'environ 10 ans, la démarche de la Cour suprême lorsqu'elle a examiné cette loi est passée de la protection des créateurs et des auteurs à la protection d'un équilibre d'intérêts. Cela est apparu dans un texte législatif assez récent. Il serait bien que la loi puisse clarifier cette question directement, de sorte que les tribunaux puissent suivre un principe établi dans la loi.
Le président: Madame Gagnon.
[Français]
Mme Christiane Gagnon: Merci. J'aimerais poser une question à M. Hennessy ou à M. Kerr-Wilson.
Dans votre présentation, vous vous opposez à ce qu'en vertu du droit d'auteur, vous ayez à payer des redevances pour avoir fourni un hyperlien avec un site qui commet de la contrefaçon. J'aimerais savoir, dans un tel contexte, comment selon vous le gouvernement devrait procéder pour lutter contre l'aspect illégal de la contrefaçon. Il faut quand même qu'il y ait une forme de protection contre cette pratique.
[Traduction]
M. Gerald (Jay) Kerr-Wilson: Il est clair que notre préoccupation avec la proposition présentée dans le rapport lié à l'article 92 concernant le fait d'avoir un lien avec un site dont le contenu viole la loi—ce qui, en soi, est une infraction—ce n'est pas de protéger le piratage. Nous appuyons une loi sur le droit d'auteur qui donne aux créateurs le droit de prendre des mesures contre les gens qui font un usage non autorisé de leurs oeuvres. Il devrait y avoir des mesures d'action que l'on puisse prendre contre un site qui ne respecte pas vos droits.
La proposition dit simplement que si un lien est fourni à un site dont le contenu constitue une infraction à la loi, le lien lui-même devient une infraction. Les hyperliens sont devenus la feuille de route d'Internet et bien souvent, il s'agit d'un processus automatisé. Par exemple, dans un moteur de recherche, il vous suffit de taper le sujet qui vous intéresse et vous obtenez des milliers de références. Certaines de ces références peuvent contenir du matériel qui enfreint la loi. Le moteur de recherche est un processus automatisé et il n'y a pas d'intervention humaine. Ainsi, il est impossible pour le fournisseur d'un moteur de recherche—Yahoo! ou Google—de filtrer le contenu pour déterminer quels liens se rapportent à des sites légitimes et quels liens se rapportent à des sites qui violent la loi.
Même s'il y avait un filtre, vous ne pouvez pas toujours dire, simplement en visitant le site, si l'oeuvre est présentée légitimement ou non. La conformité d'une oeuvre présentée dans un site Web par rapport au droit d'auteur est souvent impossible à déterminer. Il semble que ce serait placer un fardeau énorme sur les fournissent de moteurs de recherche et de liens.
Si le gouvernement du Canada voulait avoir une page d'hyperliens sur les industries culturelles, il lui faudrait examiner chacun de ces liens pour s'assurer qu'aucun ne comporte des pages dont le contenu viole la loi. Autrement, le gouvernement pourrait lui-même commettre une infraction. Il semble tout simplement que le fait de fournir le lien est trop éloigné de l'infraction pour justifier l'imposition d'une responsabilité.
Il est certain que la loi devrait prévoir que dans les cas où une infraction est démontrée, on devrait pouvoir vous ordonner de désactiver le lien. Il y a des solutions qui ne vont pas aussi loin que de dire: «J'enfreins les droits parce que j'ai un lien avec quelqu'un d'autre qui, à mon insu, enfreint les droits.» C'est cela qui nous inquiète.
 (1245)
Le président: Je vais permettre à Mme Allard et à Mme Lill de poser de courtes questions.
Madame Allard.
Mme Carole-Marie Allard: Monsieur Hennessy, nous avons entendu ici la notion de mise à la disposition des oeuvres aux utilisateurs d'Internet ou de licences collectives. Est-ce que votre industrie a une position à cet égard ou restez-vous volontairement à l'écart de ce débat?
M. Michael Hennessy: Je vais laisser la parole à M. Wilson, parce que c'est lui qui a rédigé cette partie.
Le président: Monsieur Wilson, c'est vous qui vous retrouvez avec la patate chaude.
M. Gerald (Jay) Kerr-Wilson: Merci, monsieur le président.
En vérité, notre intérêt, c'est celui d'une personne qui fournit une connexion Internet. Nous ne sommes pas des fournisseurs de contenu; ainsi, nous n'avons pas d'intérêt direct dans la question de savoir si l'attribution d'une licence collective est la meilleure façon de régler la question des droits d'auteur sur Internet. Nos entreprises de transmission par câble vivent avec des licences collectives avec la SOCAN et des licences collectives de retransmission. Nous reconnaissons qu'il s'agit d'une manière très efficace de faire une grande quantité de travail avec un minimum d'efforts, mais il faut prendre en compte la question de l'équilibre.
Les licences collectives ne devraient pas constituer la seule solution. Je pense qu'il s'agit d'une pièce très importante du casse-tête pour traiter de la question des droits d'auteur sur Internet, mais pas à l'exclusion d'exceptions et de limites raisonnables.
Mme Carole-Marie Allard: Que dire du concept de la mise à la disposition? Est-ce que vous dites que nous ne sommes pas responsables du contenu?
M. Gerald (Jay) Kerr-Wilson: Notre position, c'est que si vous traitez de cette question par le biais des télécommunications ou par le biais de nouveaux droits, cela apportera de la clarté dans la loi parce qu'elle définira une activité propre à l'Internet. Nous ne nous opposons pas à ce que le droit de mise à la disposition soit étendu à des droits voisins. Nous ne nous opposons pas au fait que le droit de communication publique comprenne la mise à la disposition sur Internet. Encore une fois, il s'agit d'une question qui concerne les fournisseurs de contenu qui traitent avec les oeuvres.
Le président: Madame Lill.
Mme Wendy Lill: Je voulais simplement demander une chose à M. Thompson de l'ACTRA. Vous faites valoir le point qu'il est capital à l'heure actuelle de régler le cas des droits des artistes interprètes. Vous dites que c'est essentiel pour terminer le processus amorcé il y a cinq ans et pour assurer un ensemble de droits complet aux artistes interprètes de l'audiovisuel.
Qu'existe-t-il à l'heure actuelle? Avez-vous un document quelconque qui précise ce qui, à vos yeux, représente un ensemble de droits complet? C'est bien connu, le gouvernement aime les solutions, pas les problèmes. Y a-t-il quelque chose sur papier que nous pourrions examiner et sur lequel nous pourrions nous prononcer? Allons dans les détails ici. Y a-t-il quelque chose dans l'air qui, à votre avis, fonctionnerait?
M. Ken Thompson: Pour répondre rapidement, la référence à il y a cinq ans concernait le WPPT, qui, jusqu'à un certain point, protège les droits des artistes interprètes. Vous avez demandé au gouvernement un avant-projet de loi. Ce traité jette les bases pour la création d'un autre organisme de protection des droits en matière d'arts visuels. Par exemple, le WPPT traite de choses comme le droit de mettre à disposition, le droit de reproduction, les mesures techniques, l'information sur le régime des droits—toutes ces choses qui sont essentielles pour les artistes interprètes dans les technologies numériques.
Ce traité lui-même est une sorte de base sur laquelle on peut ajouter, parmi les droits dont ont besoin maintenant les artistes interprètes, le droit de mettre à disposition dans le cas d'une prestation fixée par un moyen audiovisuel et le droit de reproduction, qui n'existent pas à l'heure actuelle dans notre loi. Alors, c'était cela ma référence, pour mettre la loi à jour.
Mais pour répondre directement à votre question, nous n'avons pas d'avant-projet de loi que l'ACTRA aurait rédigé. Ce n'est pas quelque chose que nous ferrions, à moins qu'on nous le demande. C'est vraiment quelque chose qu'il appartient aux ministères du gouvernement d'entreprendre. Mais nous serions très heureux d'avoir l'occasion de commenter ce qu'ils rédigent.
 (1250)
Mme Wendy Lill: Alors, vous n'avez vu aucun avant-projet. Il n'y a rien en circulation sur lequel on travaille et que nous pourriez tous les deux examiner.
M. Ken Thompson: Nous pouvons seulement regarder les lois étrangères, par exemple, celle du Royaume-Uni, à laquelle on a fait allusion ici plus tôt.
Le président: Madame Frulla.
Mme Liza Frulla: Monsieur Wilson, lorsque nous lisons votre rapport, peut-être s'agit-il d'un jugement erroné, mais c'est comme si vous disiez que les FSI ne sont responsables de rien. Le mot clé de cette loi est « responsabilité de ». Qu'est-ce qui vous satisferait?
M. Gerald (Jay) Kerr-Wilson: Il serait probablement exagéré que de dire que nous pensons que les FSI n'ont pas de responsabilité. Il y a deux questions en jeu: est-ce que les FSI devraient être responsables en vertu de la loi? Et quel rôle peuvent jouer les FSI pour aider à corriger le problème des infractions?
Pour ce qui est de la première question, d'un point de vue pratique, si vous rédigez une loi qui rend les FSI responsables des oeuvres auxquelles leurs abonnés ont accès, nous ne pourrons pas gérer cette responsabilité. Si nous étions tenus responsables du fait qu'un poème est affiché dans un site Web quelque part en Inde et pour la mise à disposition des films, même si nous avions un régime de licence collective pour les FSI qui nous coûterait des centaines de dollars par mois et par abonné, nous ne pourrions pas obtenir les droits, parce que l'industrie du cinéma, de Jack Valenti, n'acceptera jamais un régime de licence collective pour les grandes productions cinématographiques.
Nous savons également que les modèles d'entreprise sur Internet sont encore très vagues. Si vous créez une loi qui tout à coup fait de l'industrie canadienne des FSI une cible gigantesque, faisant en sorte que quiconque possède des droits sur une oeuvre qui est rendue accessible au Canada puisse se présenter devant l'industrie canadienne des FSI pour dire: «Merveilleux, nous avons trouvé quelqu'un qui va payer pour tout cela.» Ils vont faire la queue.
Cela semble une exagéré, mais nous ne pourrions tout simplement pas gérer le fait d'être responsable des infractions contre toutes les oeuvres protégées par des droits d'auteur sur Internet qui sont accessibles au Canada, et c'est ce qui arriverait dans le cas de ce régime. Tous les autres pays qui ont eu à traiter de cette question ont reconnu que les FSI ne parviendraient jamais à gérer cette responsabilité.
Le revers de la médaille, c'est que si les FSI ne sont pas tenus responsables, ont-ils un rôle à jouer? Il est clair que oui, parce qu'une partie du contenu est stockée dans notre équipement, bien que ce soit de moins en moins vrai. Dans certains cas, nous avons la capacité de jouer un rôle et l'émission d'avis, c'est la solution que nous proposons. Nous avons maintenant accepté des politiques d'utilisation avec nos abonnés qui prévoient que les abonnés ne peuvent utiliser nos réseaux pour enfreindre la Loi sur le droit d'auteur, et si les abonnés le font, nous avons le droit de suspendre le service ou d'y mettre fin.
Nous sommes prêts à nous engager dans un processus de suivi des plaintes avec les plaignants. Nous le faisons maintenant et c'est efficace. Ainsi, nous avons un rôle à jouer, mais nous ne pourrions tout simplement pas assumer la responsabilité d'être considérés comme ceux qui commettent l'infraction.
Le président: J'aimerais enchaîner sur la question de Mme Frulla. Cela ne concerne pas le droit d'auteur, mais les exemples s'appliquent à tout événement.
J'ai entendu des témoignages de différentes personnes à des conférences disant que dans certains domaines, comme la propagande haineuse, la législation qui a été adoptée dans certaines pays d'Europe—l'Allemagne en est un exemple et la France un autre—cible les FSI comme étant ultimement responsables de la distribution de ce matériel. Ainsi, plutôt que de s'en prendre à l'auteur de ce matériel, ces pays tiennent les FSI responsables dans leurs lois. Je n'ai pas la loi ici, mais on m'a promis de me faire parvenir la dernière, la loi française. Je crois savoir que c'est également le cas en Allemagne pour certaines questions. Je sais qu'on l'envisage dans le cas de la pornographie.
Est-ce que cette formule ne pourrait pas être étendue à certaines formes de droits d'auteur, de manière qu'un certain contrôle soit exercé sur les FSI lorsqu'ils fournissent du matériel dont ils savent qu'il enfreint délibérément le droit d'auteur?
 (1255)
M. Gerald (Jay) Kerr-Wilson: Il est probable que la dernière partie de votre question est la clé. Si un FSI participe à l'activité qui consiste à rendre un contenu accessible en réunissant du contenu et en livrant ce contenu à un abonné, alors, dans ces circonstances particulières, le FSI serait considéré comme un fournisseur de contenu.
Nous ne demandons pas une carte vous-êtes-libéré-de-prison qui permettrait au FSI de faire n'importe quoi. Ce que nous disons, c'est que lorsque la seule activité du FSI est de fournir un hébergement pour ses abonnés ou des installations de transmission—connectivité—, il n'a pas de contrôle. Il ne sait pas et n'a aucune façon de savoir si le contenu viole le droit d'auteur.
Dans notre mémoire, nous utilisons l'analogie avec le bureau de poste auquel on ne peut demander d'ouvrir chaque lettre individuelle pour décider si son contenu n'est pas répréhensible. Multipliez les millions de pièces de courrier qui transitent chaque année à travers le système postal par les milliards de bits d'information qui circulent à travers le réseau d'un FSI. La quantité est tout simplement impossible à gérer, la technologie est impossible à gérer et le réseau , tel que nous le connaissons, ne fonctionnerait plus.
Alors, nous disons que si un FSI faisait quelque chose qu'il sait être mal, l'exception ne s'appliquerait pas. Elle s'appliquerait si le FSI n'a pas la capacité de contrôler le contenu ou de savoir que ce contenu est répréhensible.
Le président: Monsieur Schellenberger.
M. Gary Schellenberger: J'ai simplement deux questions et elles sont liées entre elles. Êtes-vous d'accord avec la proposition du gouvernement voulant que les trois étapes de la révision soient à court, à moyen et à long terme?
Plutôt que de procéder sur une base progressive, ne serait-il pas mieux que toutes les modifications au droit d'auteur soient comprises dans un seul projet de loi modificatif?
M. Michael Hennessy: Dans notre mémoire, au début, nous avons dit que nous étions favorables au processus en trois étapes, mais vous ne pouvez faire qu'un certain nombre de choses avant de vous empêtrer dans la complexité. Alors, si vous voulez progresser, je pense que la façon dont vous faites les choses est la bonne.
Le président: Est-ce que quelqu'un d'autre voudrait ajouter quelque chose sur cette question?
M. Ken Thompson: Dans le cas de l'approche progressive qui nous a été présentée, les membres de l'ACTRA aimeraient simplement que les performances et exécutions audiovisuelles soient placées dans la même catégorie que les questions soulevées par les oeuvres audiovisuelles en général.
Le président: Madame Brand.
Mme Pamela Brand: Nous sommes également d'accord avec une approche progressive. Nous avons beaucoup de sympathie pour les artistes interprètes. Tant et aussi longtemps que leurs problèmes ne viennent pas retarder la question de la paternité des oeuvres, nous appuyons leurs revendications.
[Français]
Mme Mylène Alder: En ce qui me concerne, je n'ai pas d'objection à ce que l'on procède en trois étapes, en autant qu'on traite de l'audiovisuel dans la première. En effet, on souhaiterait une mise en oeuvre graduelle, plutôt que d'attendre à la fin. Il y a déjà assez longtemps qu'on attend.
Le président: À mon avis, le grand défi est que tout le monde veut que ce soit progressif, pourvu que sa notion soit incluse.
[Traduction]
Pourvu que la préoccupation d'un tel ou d'une telle soit incluse, allons-y de cette manière. Alors, je suppose qu'à la fin, ce sera une affaire en une étape.
[Français]
Madame Allard, vous voulez terminer, je crois.
Mme Carole-Marie Allard: Nous avons ici une proposition concrète. Je vais donc poser la question à tout le monde. Il s'agit d'amender le paragraphe 2.4(1) de façon à ce que les fournisseurs d'Internet ne soient pas soumis à la Loi sur le droit d'auteur. Comment réagissez-vous? Est-ce que l'idée d'adopter cette proposition fait consensus? Que diriez-vous si demain matin, un projet de loi nous proposait cela? Vous dites non?
Madame Brand.
[Traduction]
Mme Pamela Brand: Non. Nous pensons qu'ils devraient être responsables.
Mme Carole-Marie Allard: Devraient-ils être responsables, madame Ryshpan?
Mme Arden Ryshpan: Ils devraient être responsables.
M. Ken Thompson: Évidemment, ils devraient être responsables, mais ce n'est pas aussi simple que cela. Cela fait partie du problème. Cela ne porte que sur l'acheminement des télécommunications; mais cela n'inclut pas les autres droits. Cela n'inclurait pas, par exemple, le droit de mettre à disposition, si cela était ajouté à la Loi sur le droit d'auteur. Ce n'est pas simplement une question de modifier cela pour inclure cela ou leur permettre de faire exception à cela. C'est plus complexe.
· (1300)
Mme Carole-Marie Allard: Monsieur Hennessy, je pense que vous allez devoir intervenir.
M. Michael Hennessy: M. Lincoln a fait valoir un point intéressant lorsqu'il a dit que les FSI distribuaient de l'information. Dans l'industrie du câble, nous distribuons des canaux. Dans l'industrie de l'Internet, nous ne distribuons pas; nous fournissons un lien qui se relie à un lien, qui se relie à un lien, qui, essentiellement, relie tout le monde dans le monde d'aujourd'hui.
Si nous étions sans le savoir responsables de la question du droit d'auteur, de la pornographie et de nombreuses autres choses—ce qui est généralement le cas, parce que nous parlons de milliards d'éléments de communication—la seule façon que nous pourrions fonctionner, en bout de ligne, serait de faire disparaître l'Internet. Vous devrez le faire. Vous devrez mettre un prix d'or sur certaines choses. Vous en feriez, fondamentalement, un réseau très semblable au réseau de télévision actuel. Cela serait bon à de nombreux égards pour ceux qui en profitent sur le plan économique, mais cela détruirait une partie du potentiel de démocratie et de liberté de parole que nous voyons dans monde.
Il s'agit d'un couteau à deux tranchants. L'Internet fait peser sur nous toute sorte de menaces, mais il a également probablement ouvert les coeurs et les esprits des gens partout dans le monde, et leur a donné accès au genre d'information qui était incompréhensible il y a seulement 10 ans. J'étais responsable de l'introduction de la concurrence pour les appels interurbains au CRTC il y a 10 ans. Dans quelque 50 000 pages de transcription, de témoignages et de mémoires, jamais il n'est fait mention de l'Internet. Les fureteurs n'ont commencé à apparaître qu'il y a une dizaine d'années, alors c'est une nouvelle ère. Il s'agit d'une ère qui fait peur.
Les gens veulent rendre les FSI responsables parce que c'est dans leur intérêt économique de trouver quelqu'un qui payera. Mais la seule façon que vous pouvez faire payer les gens, c'est en fermant la plus grande partie de l'Internet et en faisant grimper les prix. Cela ferait disparaître l'Internet tel que nous le connaissons aujourd'hui. Et c'est là la menace.
Le président: Sur cette note, monsieur Hennessy, nous allons mettre fin à la séance.
Nous avons essayé au cours de ces séances d'obtenir des points de vue différents dans tous les groupes de témoins, de sorte que nous puissions entendre des perspectives différentes. Je pense que c'est quelque chose qui est arrivé dans la présente séance. Elle a été très riche en information et nous en sommes très heureux. Nous l'avons trouvée extrêmement intéressante. Comme vous pouvez le voir, le temps est arrivé et nous sommes toujours en train de discuter de questions qui nous touchent tous de très près.
Merci beaucoup de votre présence. Nous vous en sommes reconnaissants.
La séance est levée.